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Full text of "Bulletins de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique"

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OF   THE 

MUSEUM  OF  COMPARATIVE  ZOOLOGY. 


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L'ACADÉMIE  ROYALE 


DES 


Sciences,  des  Lettres  et  des  Beaux-Arts 

DE  BELGIQUE. 


es»"  ANNÉE,  5™«  SÉRIE,  T.  XXXVI. 
1898 


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BRUXELLES, 

HAYEZ,    IMPRIMEUR   DE   l'aCADÉMIE   ROYALE   DES   SCIENCES, 

DES    LETTRES   ET    DES   BEAUX-ARTS   DE    RELGIQUE. 

Rue  de  Louvain,  112. 

"1898 


BULLETINS 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE 


DES 


Sciences,  des  Lettres  et  des  Beaux-Arts 

DE  BELGIQUE. 


BULLETINS 


DE 


L'ACADEMIE  ROYALE 

DES 

Sciences,  des  Lettres  et  des  Beaux-Arts 

DE  BELGIQUE. 

68"'«  ANNÉE.  —  3"'«  SÉRIE,  T.  56. 
1898 


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^  BRUXELLES, 


HAYEZ,    IMPRIMEUR    DE    L  ACADÉ3I1E    ROYALE    DES    SCIENCES, 

DES    LETTRES    ET    DES    BEAUX-ARTS    DE    BELGIQUE, 

Rue  de  Louvain,  112. 

4898 


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OA-^^ 


SEP  16  1899 

BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES 


DES 


Lettres  et  des  Beaux-Arts  de  Belgique. 

189<S.  —  N»  7. 


CLASilîi:    DES    fi^CIEIVCES. 


Séance  du  2  juillet  1898. 

M.  Éd.  Dupont,  directeur. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  W.  Spring,  vice-direcleur  ;  Brh\- 
niont,  Éd.  Van  Beneden,  C.  Malaise,  F.  Folie,  Fr.  Cré- 
pin,  J.  De  Tilly,  Ch.  Van  Bambeke,  G.  Van  der  Mensbrug- 
ghe,  L.  Henry,  M.  Mourlon,  P.  Mansion,  P.  De  Heen, 
C.  Le  Paige,  F.  Terby,  J.  Deruyts,  Léon  Fredericq, 
J.  Neuberg,  A.  Lancaster,  membres;  A. -F.  Renard, 
L.  Errera,  M.  Delacre  et  P.  Francotte,  correspondants. 

5'"^    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  ^  1 


(  2  ) 


CORRESPONDANCE. 


La  Classe  apprend,  sous  l'impression  d'un  profond  et 
sincère  sentiment  de  regret,  la  mort  de  l'un  de  ses  mem- 
bres titulaires,  M.  Ernest  Candèz^,  décédé  à  Glain,  le 
50  juin  dernier,  dans  sa  72«  année. 

Elle  vote  des  remerciements  à  M.  le  baron  de  Selys 
Longchamps,  qui  a  bien  voulu,  en  remplacement  de 
iVl.  Dupont  empêcbé,  parler  au  nom  de  l'Académie  lors 
des  funérailles.  Son  discours  figurera  au  Bulletin. 

Une  lettre  de  condoléance  sera  envoyée  à  la  famille 
Candèze. 

—  M.  G.  Van  der  Mensbrugghe  présente,  pour  Y  An- 
nuaire, sa  notice  nécrologique  sur  Hubert  Valérius, 
ancien  membre  de  la  Classe.  —  Remerciements  à 
l'auteur  et  à  M.  Van  Rambeke,  qui  a  bien  voulu  s'occu- 
per de  la  partie  médicale  de  cette  notice. 

—  M.  Vial  demande  le  dépôt  d'un  billet  cacheté  dans 
les  archives  de  l'Académie.  —  Accepté. 

—  Hommages  d'ouvrages  : 

i"  Progrès  de  la  défense  des  États  et  de  la  fortification 
permanente  depuis  Vauban;  par  le  général  Brialmont, 
1  vol.  gr.  in-80,  avec  atlas  oblong  (présenté  par  le  che- 
valier Edm.  Marchai,  avec  une  note  qui  figure  ci-après); 


(3  ) 
2°  Prodrome  de  la  flore  belge.  Thallophytes,   fascicules 

I-IIl;  par  E.  De  Wildenian  (présenté  par  M.  L.  Errera, 

avec  une  note  qui  ligure  ci-après)  ; 

5°  Cours  de  mécanique  analytique,  tome  P'"  ;  par  Ernest 
Pasquier; 

4°  a)  L'oxyde  de  carbone,  le  qrisou  et  le  qrisoumètre  ; 
b)  Recherches  sur  les  limites  de  l'absorption  de  Voxyde  de 
carbone  par  le  sanq  d'un  mammifère  vivant;  par  le  D'"  jN. 
Gréhant. 

—  Remerciements. 

—  Travaux  manuscrits  à  l'examen  : 

4"  Recherches  morphologiques  et  phylogénétiques  sur  les 
Mollusques  archaïques  ;  par  Paul  Pelseneer.  —  Commis- 
saires :  MM.  Éd.  Van  Beneden,  F.  Plateau  et  Ch.  Van 
Bambeke; 

2°  Sur  les  salicylates  doubles  de  métal  et  d'antipyrine 
(troisième  communication);  par  M.-C. Schuyten.  —  Com- 
missaires :  MM.  Jorissen  et  Spring; 

5°  Sur  les  surfaces  minima  réglées  et  les  surfaces  minima 
à  lignes  de  courbure  planes;  par  A.  Demoulin.  —  Com- 
missaires :  MM.  Deruyts,  Neuberg  et  Mansion; 

4°  Sur  l'action  cataly tique  de  la  mousse  de  platine;  par 
Alexandre  de  Hemptinne.  —  Commissaires  :  MM.  Spring 
et  De  Heen  ; 

o°  Notes  sur  la  physique  du  globe  et  la  météorologie;  par 
G.  Kayser.  —  Commissaires  :  MM.  Terby  et  Lancaster. 


(  i 


Discours  prononcé  au  nom  de  C  Académie  royale  de  Belgique 
et  de  la  Société  entomologique  de  Belgique,  aux  funérailles 
de  M.  Ernest  Candèze;  par  le  l)aron  de  Selys  Long- 
champs,  membre  de  l'Académie. 

Messieurs, 

C'est  un  devoir  aussi  honorable  (jue  douloureux  que  je 
remplis  en  me  présentant,  au  nom  de  l'Académie  royale 
des  sciences  de  Belgique  et  de  la  Société  entomologique, 
pour  rendre  hommage  au  confrère  excellent  que  la  mort 
nous  a  enlevé  il  y  a  deux  jours. 

Candèze  (Ernest-Charles-Auguste),  né  à  Liège,  le 
-21  février  1827,  obtint  le  diplôme  de  docteur  en  méde- 
cine, après  de  brillantes  études  faites  à  notre  Université. 
Il  fut  le  collaborateur  à  la  direction  de  l'Asile  de  Glain, 
fondé  par  M.  Abry,  dont  il  épousa  la  fille  distinguée,  qui 
mourut  il  y  a  vingt-cinq  ans  environ.  Il  contiibua  large- 
ment par  ses  aptitudes  et  par  son  zèle  à  la  réputation 
légitime  de  cet  important  établissement. 

Les  goûts  de  Candèze  le  portaient  en  même  temps  vers 
les  sciences  naturelles. 

Élève  de  Lacordaire  et  de  Charles  Morren,  il  s'adonna 
à  la  culture  des  sciences  zoologiques  et  botaniques,  mais 
particulièrement  à  celle  de  l'entomologie,  où  il  acquit 
bientôt,  comme  spécialiste,  une  notoriété  incontestée 
dans  le  monde  savant. 

L'Académie,  dès  1<S5(S,  l'élut  correspondant,  puis 
membre  elfectif  de  la  Section  des  sciences  naturelles  en 
18()1.  Il  fut  directeur  de  la  Classe  en  1874. 

Le  Roi  lui  conféra,  en  1872,  la  croix  de  chevalier  de 


(S  ) 
l'Ordre  de  Léopold   et   l'éleva   au   grade   d'officier  en 
décembre  1897. 

Il  faisait  partie  des  sociétés  entomologiques  les  plus 
notables  de  l'étranger,  dont  plusieurs  lui  décernèrent  le 
titre  de  membre  honoraire. 

Ses  excursions  et  ses  voyages  à  l'étranger  furent  nom- 
breux. 11  assistait  aux  congrès  scientifiques  et,  chercheur 
infatigable,  il  y  trouvait  satisfaction,  non  seulement  pour 
ses  études  spéciales,  mais  aussi  pour  l'intérêt  qu'il  portail 
à  toutes  les  sciences. 

Comme  spécialiste,  il  s'adonna  surtout  à  approfondir 
l'étude  des  Coléoptères  de  la  famille  des  Élatérides,  et 
dans  cette  branche  il  était  considéré  comme  arrivé  au 
premier  rang. 

A  la  Société  royale  des  sciences  de  Liège  il  publia, 
en  1833,  avec  la  collaboration  de  feu  le  D'  Chapuis, 
un  mémoire  sur  Les  larves  des  Coléoptères,  suivi  bientôt 
de  sa  grande  Monographie  des  Élatérides,  en  quatre 
volumes,  parus  de  48o()  à  1805,  et  de  leur  Revision, 
en  1874. 

Plus  tard,  pour  se  délasser  de  ses  travaux  didactiques, 
il  écrivit,  d'une  plume  très  alerte,  plusieurs  volumes 
charmants,  destinés  à  amuser  la  jeunesse  et  à  initier  les 
gens  du  monde  aux  merveilles  de  la  nature  vivante.  On 
peut  appeler  romans  scientifiques  ces  trois  ouvrages, 
édités  chez  des  libraires  notables  de  Paris  et  qui  eurent 
beaucoup  de  succès,  particulièrement  les  Aventures  d'un 
Grillon  et  La  Gileppe. 

L'activité  et  le  besoin  de  travail  scientifique  étaient 
si  grands  chez  le  D'  Candèze,  que,  malgré  son  âge 
avancé,  il  se  mit  en  dernier  lieu  à  la  recherche  des 
Insectes  diptères  de  notre  pays,,  et  qu'après  quatre  ou 
cinq  années,  il  en  avait  réuni  maintenant  une  collection 


(  6  ) 
déjà  fort  riche,  qui  aurait  donné  lieu  à  la  pulilication  de 
celte  partie  de  notre  faune,  jusqu'ici  inédite. 

Dans  ces  derniers  temps,  il  avait  organisé  et  encouragé 
le  Cercle  des  entomologistes  liégeois,  où  se  réunissent  des 
amateurs  et  de  très  jeunes  gens.  Il  en  était  le  vénérable 
président. 

Après  avoir  esquissé  rapidement  la  vie  laborieuse  du 
D'  Candèze,  il  est  juste  de  dire  quelques  mots  de  son 
caractère  si  bon,  si  gai,  si  spirituel. 

C'était  un  modèle  de  père  de  famille,  un  ami  sûr, 
étranger  à  tout  sentiment  de  jalousie,  d'une  obligeance 
extrême,  toujours  prêt  à  encourager  et  à  assister  les 
jeunes  travailleurs,  ce  qui  ne  se  voit  pas  toujours;  aussi 
était-il  aimé  de  tous  ceux  qui  le  connaissaient. 

Pendant  près  de  cinquante  années  qu'ont  duré  nos 
relations,  j'ai  pu  apprécier  ce  caractère  d'élite. 

Il  était  un  des  cinq  membres  du  Conseil  de  surveillance 
du  Musée  d'histoire  naturelle  de  l'État,  et  là  aussi  j'ai  pu 
constater  son  jugement  droit  et  son  esprit  conciliant. 

En  considération  de  cette  longue  intimité,  et  tenant 
compte  de  l'âge  que  j'ai  atteint,  je  pouvais  m'imaginer 
que  c'est  le  D'  Candèze  qui  me  conduirait  au  champ  du 
repos  éternel;  mais  les  décrets  de  la  Providence  sont 
impénétrables,  et  c'est  moi  qui  viens  lui  dire  un  su|)rênu' 
adieu! 

Candèze,  cher  ami  et  cher  confrère,  repose  en  paix  ! 
Adieu  !  

NOTES    BIBLIOGRAPHIQUES. 

I^rugrès  de  la  défense  des  États  et  de  ta  fortificatiou  per- 
manente depuis  Vaulmn,  tel  est  le  titre  de  l'ouvrage  que 
vient  de  publier  notie  confrère,  M.  le  général  Brialmont, 


(  7  )  . 
et  doiU  il  offre,  à  litre  d'Iiomniage,  le  premier  exemplaire 
à  la  Classe  des  sciences  (1).  Cet  important  ouvrage 
comprend  dix-huit  chapitres.  Les  six  premiers  ont  pour 
objet  l'exposé  des  progrès  réalisés  dans  la  défense  des 
États  et  dans  la  fortification  permanente  depuis  Vauban; 
l'organisation  des  camps  retranchés  permanents;  les  types 
de  forts,  de  fortins  intermédiaires  et  d'enceintes  de  camps 
retranchés;  les  têtes  de  ponts,  forts  d'arrêt  et  forts  de 
digues,  et  les  forts  et  batteries  de  côtes  et  forts  de  mer. 
Les  douze  autres  chapitres  s'occupent  exclusivement  de  la 
fortification  permanente  dans  tous  les  États  de  l'Europe. 

L'atlas  renferme  les  types  de  la  fortification  depuis 
Vauban. 

Nous  nous  bornerons,  en  raison  de  notre  incompétence 
pour  faire  ressortir  les  mérites  de  cette  œuvre  considé- 
rable, laquelle  résume,  en  son  ensemble,  toutes  les  études 
de  M.  Brialmont  sur  la  matière,  à  reproduire  ici  les 
premières  lignes  de  l'introduction.  Elles  feront  sutïi- 
samment  connaître  la  haute  portée  de  ce  livre  : 

«  Les  progrès  réalisés  depuis  Vauban  dans  l'art  de  la 
»  guerre  et  dans  l'armement  ont  modifié  le  rôle  des  for- 
»  teresses  et  nécessité  la  transformation  de  leurs  éléments 
»  constitutifs. 

»  Nous  avons,  dans  de  nombreux  écrits,  suivi  la  marche 
»  de  cette  transformation  et  proposé,  à  chaque  étape,  les 
»  types  d'ouvrages  qui  nous  semblaient  répondre  le  mieux 
))  aux  exigences  de  la  situation. 

»  La  fortification  est  arrivée  aujourd'hui  à  un  point  où 
»  elle  fera  sans  doute  un  long  arrêt,  car  les  bouches  à  feu, 
))  les  poudres  et  les  projectiles  ont  acquis  une  puissance 

(1)  Bruxelles,  typ.  et  iith.  E.  Guyot,  1898,  l  vol.  in  8»,  avec  atlas 
oblong. 


(  n 

»  de  (leslmclion  qu'il  sera  difficile,  sinon  impossible, 
))  d'accroître  notablement. 

»  Le  moment  est  donc  venu  de  jeter  un  coup  d'œil  sur 
))  le  chemin  parcouru  et  de  montrer  ce  qui  est  resté 
»  debout  de  nos  projets  et  de  ceux  des  ingénieurs  qui  ont 
»  suivi  la  même  voie  que  nous. 

»  Ce  travail  d'élimination  et  de  synthèse  nous  fournira 
»  l'occasion  de  discuter  les  idées  divergentes  qui  ont  été 
))  émises  dans  ces  derniers  temps  sur  la  défense  des  États 
))  et  l'organisation  des  forteresses,  et  de  séparer  ce  qui  est 
))  encore  actuellement  vrai  et  pratique  de  ce  qui  n'a 
»  jamais  été  et  ne  sera  jamais  que  faux  et  irréalisable. 
»  Mais  notre  but  est  surtout  de  décrire  et  d'apprécier  les 
»  travaux  de  défense  les  plus  remarquables  qui  ont  été 
o  exécutés  en  Europe  depuis  la  fin  des  guerres  du  pre- 
»  mier  empire  français...  » 

Chevalier  Edm.  Marchal. 


MM.  Th.  Durand,  conservateur,  et  De  Wildeman, 
aide-naturaliste  au  Jardin  botanique  de  l'État,  ont  entre- 
pris la  très  utile  publication  d'un  Prodrome  de  la  flore 
belge.  On  y  trouvera  l'énumération  méthodique  et  com- 
plète de  toutes  les  espèces  végétales  signalées  en  Belgique. 

Le  premier  volume,  dû  à  M.  De  Wildeman,  renferme 
les  Thallophytes.  Il  vient  de  paraître  ;  j'ai  l'honneur  de 
l'offrir  à  l'Académie  de  la  part  des  auteurs. 

Quiconque  s'intéresse  à  la  connaissance  des  productions 
naturelles  de  la  Belgique  se  réjouira  de  voir  enfin  rassem- 
blées toutes  les  données  botaniques,  non  seulement  pour 
les  Phanérogames  et  les  Ptéridophytes,  pour  lesquels  nous 


(  9  ) 
possédions  l'excellenl  Manuel  de  M.  Crépin,  mais  encore 
[)Our  les  autres  embranchements  du  règne  végétal,  dont 
l'étude  avait  été  jusqu'ici  trop  négligée. 

On  doit  approuver  sans  réserve  les  auteurs  d'avoir 
adopté  les  idées  modernes  sur  la  classilication  des  végé- 
taux. La  réunion  en  un  seul  embranchement  de  tout  ce 
qui  n'est  pas  phanérogame,  le  rapprochement  des  Chara- 
cées  et  des  Ptéridophytes,  l'admission  des  Lichens  comme 
groupe  autonome  équivalent  aux  Champignons,  l'interca- 
lation  des  Gymnospermes  parmi  les  Angiospermes,  la 
place  suprême  accordée  aux  Renonculacées,  sont  autant 
d'effets  de  la  routine  que  rien  ne  justifie  plus  et  qu'il  n'est 
fdus  permis  de  conserver  dans  les  ouvrages  nouveaux. 
Là-dessus  l'accord  est  fait  aujourd'hui  entre  les  botanistes 
compétents. 

Pour  les  détails,  moins  unanimement  acceptés,  d'ar- 
rangement et  de  nomenclature  des  groupes,  les  auteurs 
ont  suivi  l'ordre  de  mon  cours  à  l'Université  de  Bruxelles  : 
si  je  mentionne  ce  fait,  c'est  pour  pouvoir  les  remercier 
de  leur  flatteuse  adhésion. 

Le  Prodrome  de  la  flore  belge  ne  donne  point  de  descrip- 
tions :  il  renvoie  pour  chaque  espèce  à  la  diagnose 
originelle,  ainsi  (lu'aux  diverses  flores  belges,  souvent 
aussi  à  une  ligure.  On  y  trouvera  ensuite  les  principaux 
synonymes  et  la  dispersion  détaillée  de  l'espèce  en  Bel- 
gique, province  par  province. 

Il  n'est  pas  nécessaire  d'ajouter  que  tous  ces  renseigne- 
ments sont  [)résentés  avec  autant  de  compétence  que  de 
soin:  les  noms  des  auteurs  sont,  à  cet  égard,  une  suflisante 
recommandation.  L.  Errera. 


(  10) 
RAPPORTS. 


Sur  la  proposition  verbale  de  MM.  L.  Kredericq  et 
J.-B.  Masiiis,  une  deuxième  note  de  M.  Waroux  sur  le 
Tracé  myocardique  du  cœur  exsanyiie  figurera  au  Bulletin. 


Sur  la  fonction  ^  {s)  de  Riemann  et  le  nombre  des  nombres 
premiers  inférieurs  à  une  limite  donnée;  par  Ch.-J.  de  la 
Vallée  Poussin. 

Itapftot'l  de  M.    faut  Mannion^  pt'etnier  coHttttiêaaii-»'. 

«  La  question  traitée  par  M.  de  la  Vallée  Poussin  dans 
son  mémoire  est  l'une  des  plus  ardues  de  l'analyse 
moderne. 

Legendre  (*)  semble  être  le  premier  qui  ait  publié  une 
formule  donnant  approximativement  le  nombre  fx  des 
nombres  premiers  inférieurs  à  une  limite  donnée  x.  Cette 
formule  est  la  suivante  : 

nr 

fx 


Ix—  1,08366 


Il  l'avait  obtenue  par  une  voie  empirique. 

Gauss,  dans  une  lettre  du  24  décembre  1849  (**)  à 
Encke,  qui  avait  aussi  imaginé  une  formule  pour  le  même 
objet,  fait  l'historique  de  ses  essais  relatifs  à  la  question; 

(*)  Legendre,  Théorie  des  nombres,  2<:  édition,  1808,  IVe  partie, 
§  VIII,  pp.  394-398;  3''  édition,  t.  II,  1830,  ¥  partie,  §  VIII,  pp.  65-70; 
dans  la  première  édition,  la  question  n'est  pas  abordée. 

(")  Gauss,  \Yerke,  II,  pp.  444-447. 


(  ^i  ) 

ces  essais,  empiriques  comme  ceux  de  Legendre,  el  dont 
les  premiers  dataient  de  1792  ou  1793,  l'ont  conduit  à  la 
formule  approchée 

fx  =  Lia:, 

Il  compare  les  trois  formules,  celle  de  Legendre,  celle 
d'Encke  (*)  et  la  sienne,  aux  données  des  tables  (**)  et 
soupçonne  que,  pour  x  très  grand,  la  sienne  est  la  |)lus 
exacte. 

Une  formule  équivalente  à  celle  de  Gauss  se  trouve 
dans  une  note  manuscrite  ajoutée  par  Dirichlel  à  un 
de  ses  mémoires  envoyés  au  grand  géomètre  de  Gœt- 
tingue  (***),  et  il  résulte  du  contexte  que  c'est  par  une 
méthode  analytique,  et  non  par  induction,  qu'il  est 
arrivé  à  ce  résultat  (1838).  Malheureusement,  il  n'a  jamais 
publié  ses  recherches  sur  ce  sujet  et  il  s'est  contenté  de 
les  annoncer. 

En  juillet  1849,  C.-J.  Hargreave  ('^)  arrive  aussi  par 


(*)  ScHEiuNG  (Gaiiss'  Werke,  II,  p.  521)  dit  que  la  formule  d'Encke 
parait  être  celle-ci  : 

fx  =  —  102'x. 

Ix 

(**)  Sur  les  énumérations  de  nombres  premiers,  voir  l'introduction 
de  la  Factor  Table  for  the  Fourlh  million,  by  James  Glaisheu  (London, 
1879),  et  une  note  de  Gram  {Acta  mathematica,  XVII,  \)\^.  301-314) 
avec  les  nombi-euses  indications  bibliographiques  que  l'on  y  trouve. 

("*)  DiRiCHLET,  Werke,  1889, 1,  p.  372;  note  2  de  la  note  2. 

("■)  C.-J.  Hargreave,  Analytical  Reseurches  concerning  Numbers. 
I  Philosophical  Magazine,  t.  XXXV,  pp.  36-53.)  Le  point  de  départ  de 
Hargreave  (qui  était  professeur  de  jurisprudence  à  University  Collège, 
à  Londres)  est  déjà  la  fonction  considérée  plus  tard  par  Riemann;  en 
outre,  il  étudie  les  mêmes  expressions  analytiques  que  Tchebyclief. 
Peut-être  ce  curieux  mémoire  mériterait-il  d'être  examiné  de  près, 
au  point  de  vue  historique. 


(  ^2  ) 

une  voie  analytique  à  la  formule  fx  =  Lix  et  a  le  mérite 
(le  la  publier  le  premier. 

En  1848  et  en  1850,  Tchebychef  présente  à  l'Acadé- 
mie (le  Saint-Pétersbourg  deux  mémoires  sur  les  nombres 
premiers  (*),  dont  les  principaux  résultats,  insérés  dans 
V Algèbre  supérieure  de  Serret,  deviennent  rapidement 
classiques.  Ils  contiennent  maints  théorèmes  qui  rendent 
très  plausible  l'exactitude  de  la  relation  fx  =  Lix  comme 
loi  asymptotique;  de  plus,  Tchebychef  enferme  fx  entre 
deux  limites,  mais  il  termine  son  travail  par  cet  aveu  : 
«  Si  l'on  calcule,  d'après  nos  formules,  la  totalité  des 
nombres  premiers  qui  ne  surpassent  pas  une  limite  don- 
née, très  grande,  l'erreur  sera  inférieure  à  un  dixième  de 
la  quantité  cherchée  (**).  » 

Une  note  courte,  mais  substantielle,  de  Riemann,  pré- 
sentée à  l'Académie  de  Berlin  (***),  ouvre  une  nouvelle 
voie  aux  recherches  dans  ce  domaine.  Riemann,  par  une 
méthode  où,  suivant  son  habitude,  il  mêle  une  analyse 
[)rofonde  aux  inductions  hardies  familières  à  son  génie, 
trouve  que  la  somme 

I       .        I       . 

Far  = /x  -t- - /(.i  ■-) -4- - /(a-^  ) -♦- etc. 
2.  <) 


(')  Tchebychef,  Mémoires  de  l'Académie  de  Saint-Pétersbourg 
(Pavants  étrangers),  t.  VI  (1851),  pp.  141-157,  t.  Vil  (1854),  pp.  15-23; 
Journal  de  Liouville,  1852,  t.  XVII,  pp.  341-365,  3G5-380. 

(**)  En  1881,  Sylvester  (American  Journal  of  Mathematics,  IV, 
pp.  230-247)  a  signalé  un  moyen  de  resserrer  les  limites  indi(iuées 
dans  les  recherches  générales  de  Tcliebychef,  sans  faire  avancer  la 
question  principale,  autant  que  nous  pouvons  en  juger. 

("*■)  Riemann,  Berliner  hlonatsberichtc,  1860,  pp.  671-680;  Werke, 
1876,  pp.  136-144;  2'=  édition,  1892,  pp.  145-153;  OE^ym,  traduction 
fran(;aise,  1898,  pp.  165-176. 


(  13  ) 
se  compose  d'abord  d'un  terme  qui  reste  fini  quand  x 
croît  indéfiniment,  puis  de  Lix,  entin  d'une  série  d'inté- 
grales définies  périodiques  où  entrent  les  racines  d'une 
certaine  fonction  transcendante  ^{l).  Cette  fonction  i(/) 
s'exprime  au  moyen  d'une  autre  !^(s),  autrefois  considérée 
par  Euler,  dans  le  cas  d'une  variable  réelle  et  définie  par 
la  relation 

\  1 

1 

Dans  le  produit,  il  faut  remplacer  ;)  successivement 
par  tous  les  nombres  premiers  depuis  2,  dans  la  somme  n 
par  tous  les  nombres  entiers.  Depuis  ce  mémoire  capital 
de  Riemann,  tous  les  travaux  importants  des  géomètres 
sur  le  nombre  des  nombres  premiers  roulent  sur  les  |)ro- 
priétés  de  cette  transcendante  (^(s). 

L'un  des  premiers  en  date,  dû  à  M.  J.-P.  Gram,  a  été 
publié  en  danois,  avec  résumé  en  français,  en  1884,  par 
l'Académie  de  Copenhague  {*).  Sans  contenir  aucun 
résultat  essentiellement  nouveau  ni  important,  au  dire 
de  l'auteur,  il  constitue  un  commentaire  utile  des  travaux 
de  Riemann  et  dcTchebychef;  çà  et  là  aussi,  Gram  intro- 
duit des  rectifications  de  détail  dans  les  recherches  de  ses 
devanciers,  de  Riemann  notamment. 

Les  travaux  de  MM.  Hadamard,  von  Mangoldt  et  de  la 
Vallée  Poussin,  pour  ne  citer  que  les  principaux,  sont, 
au  contraire,  le  complément  naturel  de  la  note  de  Rie- 
mann et  forment  un  ensemble  de  recherches  de  plus  en 
plus  approfondies  des  propriétés  de  l^(s). 


(')  J.-P.  Gram,  Recherches  sur  le  nombre  des  nombres  premiers 
inférieurs  à  une  limite  donnée,  6«  série,  t.  II,  pp.  183-308. 


(  ii) 

En  1892,  M.  Hadamard  obtient  à  l'Institut  de  France  le 
grand  prix  des  sciences  mathématiques  pour  une  Étude 
sur  les  propriétés  des  fonctions  entières  et  en  particulier 
d'une  fonction  considérée  par  Riemann  (*).  Dans  la  troi- 
sième partie  de  ce  beau  mémoire,  il  prouva  que  la  fonc- 
tion i(f)  de  Riemann,  considérée  comme  fonction  de  r-, 
est  égale,  comme  l'avait  supposé  Riemann,  à  un  produit 
de  facteurs  primaires  et  d'une  simple  constante,  sans 
aucun  facteur  exponentiel. 

En  1896  (**),  il  démontre,  quelques  mois  après  M.  de 
la  Vallée  Poussin,  que  la  partie  réelle  des  racines  ima- 
ginaires de  la  fonction  ^{s)  de  Riemann  ne  peut  être 
égale  à  l'unité  et  en  déduit  diverses  propriétés  asympto- 
tiques  qui  n'avaient  jamais  pu  être  établies  avec  rigueur. 

En  1895  et  en  1898,  M.  von  Mangoldt  a  publié  sur  le 
sujet  qui  nous  occupe  deux  mémoires  importants  (***). 

Dans  le  premier,  il  démontre  avec  une  pleine  rigueur 
deux  théorèmes  énoncés  par  Riemann,  l'un  sur  le  nombre 
des  racines  imaginaires  de  Ç(s)  dans  lesquelles  le  coefti- 
cient  6  de  i  ne  surpasse  pas  un  nombre  lixe,  l'autre  sur 
la  convergence  de  la  partie  périodique  de  la  relation 
fondamentale  de  Riemann  ('^).  En  particulier,  il  prouve 
que  (3  surpasse  12. 


(*)  Hadamard,  Journal  de  Liouville,  1893, 4e  série,  t.  IX,  pp.  ITl-'ilo. 

(•')  Hadamard,  C.  R.,  22  juin  1896,  t.  CXXII,  pp.  1470-1473  ;  BH«e<t?i 
de  la  Société  mathématique  de  France,  t.  XXIV,  dernier  fascicule, 
[•p.  199-220. 

(*•*)  H.  VON  Mangoi.dt,  Journal  de  Crelle,  t.  CXIV,  pp.  255-304; 
t.  CXIX,  pp.  65-71. 

(")  L'auteur  signale  des  recherches  antérieures  (1884)  de  A.  Piltz, 
analogues  aux  siennes,  relativement  à  la  seconde  partie  de  son 
mémoire. 


(  is  ) 

Dans  le  second,  M.  von  Mangoldt  établit  pour  la  pre- 
mière fois  avec  rigueur  l'égalité  asymptotique 

fx  =  L/x, 

et  montre  que  l'on  peut  aussi  écrire,  comme  relation 
asymptoti(iue  (*), 

Ix 

Les  travaux  de  M.  de  la  Vallée  Poussin  sur  la  fonc- 
tion J^(a)  et  sur  le  nombre  des  nombres  premiers  ne  sont 
pas  moins  importants  que  ceux  de  MM.  Hadamard  et 
von  Mangoldt,  et  pénètrent  plus  profondément  encore 
dans  la  nature  des  lois  asymptotiques  relatives  aux  nom- 
bres premiers. 

Dans  sa  Démonstration  simplifiée  du  théorème  de  DiricfUet 
sur  la  progression  arithmétique,  présentée  à  l'Académie 
en  1895,  il  utilise  les  propriétés  de  ï^{s),  qu'il  met  sous 
une  forme  nouvelle,  pour  démontrer  d'une  manière  plus 
directe  le  célèbre  tbéorème  de  Diricblet,  et  termine  par 
des  propositions  sur  les  valeurs  asymptotiques  relatives 
aux  nombres  premiers. 

Dans  la  première  partie  de  ses  Recherches  analytiques 
sur  la  théorie  des  nombres  premiers,  présentées  à  la  Société 
scientifique   de   Bruxelles  le  50  janvier   1890   (**),   il 


(*)  Une  note  de  M.  de  la  Vallée  Poussin,  insérée  à  la  page  70 
de  ce  mémoire  de  M.  von  Mangoldt,  contient  une  très  courte  démons- 
tration de  ce  second  théorème. 

(")  Le  rapport  de  M.  Jordan  sur  ce  mémoire  a  été  lu  à  la  séance 
du  15  avril  1896  et  publié  en  juin,  dans  le  Bulletin  de  la  Société 
scienti^que,  puis  dans  ses  Annales,  t.  XX, l'^»  partie,  pp.  91-96. 


(  16) 
démontre,  le  premier,  que  les  racines  imaginaires  de 
la  fonction  de  Riemann  ont  toutes  leur  partie  réelle 
comprise  entre  zéro  et  l'unité;  il  en  déduit  la  démons- 
tration rigoureuse  de  diverses  lois  asymptotiques  énon- 
cées par  Slieltjes.  Dans  la  seconde,  la  troisième  (*)  et  la 
quatrième  partie,  présentées  à  la  même  Société  le 
U)  avril  I89G  et  le  28  janvier  1897,  il  a  étendu  ces  lois 
aux  nombres  premiers  représentés  par  des  formes 
linéaires  ou  quadratiques,  soit  de  déterminant  négatif, 
soit  de  déterminant  positif. 

Le  travail  soumis  à  la  Classe  et  sur  lequel  nous  sommes 
chargés  de  faire  rapport,  M.  Deruyls  et  moi,  est  la  suite 
naturelle  et  le  couronnement  de  l'ensemble  des  recherches 
dont  il  vient  d'être  question. 

Dans  la  première  partie  de  ce  mémoire,  M.  de  la 
Vallée  Poussin  trouve  une  limite  supérieure,  inférieure 
à  l'unité,  de  la  partie  réelle  des  racines  «  -i-  (3/  de  'C,{s). 
Bien  que  la  limite  supérieure  de  1  —  a  ainsi  obtenue  soit 
très  petite  et  tende  vers  zéro  avec  ^,  elle  lui  permet,  dans 
la  seconde  partie,  de  trouver  des  expressions  approchées 
pour  un  grand  nombre  de  séries  relatives  soit  aux  racines 
de  ^(s),  soit  aux  nombres  premiers,  et  entîn  de  démon- 
trer ce  théorème  capital  :  Le  logarithme  intégral  est  une 
expression  asymptotique  de  fx  plus  exacte  que  toutes  ses 
expressions  possibles  sous  forme  linie. 

Donnons  un  apeiçu  de  l'analyse  extrêmement  com- 
pliquée qui  l'a  conduit  à  ce  résultat. 


(*)  Un  résumé  étendu  de  ces  deux  parties  a  été  présenté  à  la  même 
Société,  le  29  octobre  1890;  un  résumé  analogue  de  la  quatrième 
partie,  le  28  janvier  1897. 


(  <7) 
Dans  le  chapitre  I*",  il  établit  d'abord  la  tbrmule 


r'--+-i, 


où  la  première  somme  s'étend  à  toutes  les  racines  ima- 
ginaires p  =  a  -f-  (3î  de  'C,{s),  celle  du  second  membre  à 
tous  les  nombres  premiers.  On  a  d'ailleurs 

p'  —  i  Çs 

Pour  arriver  à  une  valeur  approcliée  du  second  membre, 
dans  la  formule  principale,  l'auteur  trouve  successive- 
ment des  valeurs  de  ce  genre  pour  les  fonctions 

a  f\  i      \     T'a     ^         \  ^  i 

S- S  -H .  — .  s- -,  s 


f'       \p       1  —  p/     Ta        %'  -4-  p'       (m  —  p)(d  —  p) 

et  aussi   pour  (î^'w  :  X^vi),  quand  n  est  réel  et  voisin  de 
l'unité. 

Dans  le  chapitre  II,  il  établit  d'abord  la  formule  fon- 
damentale suivante,  où  les  inégalités  ne  portent  que  sur 
les  parties  réelles  des  deux  membres 

r'(--4-i 
^     \  i^      1  5,  1  \      \1 

S h-  -  S < /rr  H H 

S— p       4    s'  —  p  8  *•  —  1      2     /s 


r  -  -+-  1 
\2 


4  Çm       4s'— 1       8     /s 


O'"**    SÉRIE,    TOME    XXXVI. 


(  18) 
Dans  cette  relation, 

s  =  «  -+-  /i,     s'  =  u  -+-  2/1. 

Il  tire  immédiatement  de  celte  formule  la  conséquence 
capitale  que  «  ne  peut  être  égale  à  l'unité,  puis,  de 
déduction  en  déduction,  cette  proposition  curieuse  que  si 
a.  diffère  de  i^^,  (3  doit  surpasser  24,55. 

Mais  il  ne  s'arrête  pas  à  ce  théorème  spécial.  Par  un 
maniement  extrêmement  habile  de  l'inégalité  fondamen- 
tale écrite  plus  haut,  il  parvient  de  [)roche  en  proche  à 
lier  a  et  (i  par  le  théorème  suivant  :  A  partir  de  ^y  34(i, 
on  a 

V 
i  — «> 


ip—ln 


où  p  et  n  ont  des   valeurs   déterminées  :  p  =  0,054(39, 
il  =  15,58. 

Armé  de  cette  formule,  d'un  emploi  relativement 
facile,  M.  de  la  Vallée  Poussin  peut  aborder,  dans  le 
chapitre  111,  le  premier  de  la  seconde  partie,  l'évaluation 
de  sonnnes  où  figurent  les  racines  p,  d'abord 


S . 


nuis 


u^  -H  p^ 

Par  des  transformations,  des  subdivisions  de  ces  sommes 


(  19  ) 
OÙ  interviennenl  sans  cesse  de  nouveaux  artifices  ana- 
lytiques, il  parvient  enfin  à  la  relation 

où 

<r'=S-^— -,.     p  =  0,034C9, 

a^  -i-  p' 

et  B  une  fonction  de  x,  tendant  vers  une  limite  finie 
pour  x  =  ce  . 

Le  chapitre  IV  a  son  point  de  départ  dans  une  for- 
mule établie  par  l'auteur  dans  la  première  partie  des 
Recherches  analytiques  sur  les  nombres  premiers  citées 
plus  haut.  Il  Y  établit  diverses  formules  asymptotiques.  11 
prouve  successivement  les  théorèmes  suivants  :  Si  l'on 
pose 

-   ^  lp  =  i  ■*-  yii,     -  S  h>  =  ^  -^  *î2' 

.T  pm^x  f)'"  X  ,,<x  P 1 

■'.t>  '^i;^^  '^0  5  '^'4  tendront  vers  zéro  avec  -,  et  seront  d'un 
ordre  de  petitesse  au  moins  égal  à  celui  de 

Dans  le  chapitre  V,  M.  de  la  Vallée  Poussin  aborde 
enfin  la  question  du  nombre  des  nombres  premiers 
inférieurs  à  une  limite  donnée.  En  utilisant  encore  une 


(20) 
fois  une  formule  d'un   mémoire   précédent,  il  établit  la 
relation  fondamentale 

Fx  =  Lix  -+-  T  —  -4-  /2, 
Ix 

(Ml 

5  14   ,       /         \i\   ^ 

mod  T  <  -  (7  H (T^  -H    1  -+-  —  U'. 

2  5  \         15/ 

Il  en  déduit  presque  immédiatement  que  fx  a  pour  valeui 
asymptotique  \Jx  et,  de  plus,  ce  qui  est  absolument 
nouveau  et  complète  toutes  les  recherches  antérieures, 
que  la  différence  entre  les  deux  fonctions  ne  pourra  pas 
être  d'un  ordre  de  grandeur  supérieur  à  celui  de  la  fonc- 
tion 

Ix 

Par  suite,  le  logarithme  intégral  est  une  expression 
asymptotique  de  fx  plus  exacte  que  toutes  ses  expressions 
sous  forme  finie. 

Le  chapitre  M  traite  une  question  qui  se  rattache 
étroitement  à  la  loi  de  distribution  des  nombres  premiers. 
Euler  a  conjecturé,  maints  géomètres  ont  en  vain  essayé 
de  prouver  et  enfin  M.  von  Mangoldt  a  établi  rigoureuse- 
ment, l'an  dernier,  dans  un  mémoire  spécial,  que 

k 

lj.{k)  étant  nul  pour  k  divisible  par  un  carré,  1  pour 
^==1,  ou  k  ayant  un  nombre  pair  de  facteurs,  —  1, 
pour  k  ayant  un  nombre  impair  de  facteurs.  M.  de  la 
Vallée  Poussin  non  seulement   prouve   à  son   tour  le 


(  21  ) 
tiléorème  deviné  par  Euler,  mais  il  donne  une  formule 
pour  calculer  approximativement  un  certain  nombre  de 
termes.  «  La  somme  étendue  aux  entiers  k  <C  x , 


^M^) 

^"y 


tend  vers  0  quand  x  tend  vers  l'infini  et  sa  valeur  absolue 
reste  inférieure  à  une  expression  de  la  forme  ^ ,  où  h 
est  un  nombre  fixe.  » 

Telle  est  l'analyse  du  travail  de  M.  de  la  Vallée  Pous- 
sin. La  difficulté  de  la  question  qui  y  est  abordée  et  enfin 
résolue,  la  connaissance  et  le  maniement  facile  de  toutes 
les  ressources  de  l'analyse  dont  l'auteur  fait  preuve  d'un 
bout  à  l'autre,  l'esprit  d'invention  qu'il  y  déploie  non 
seulement  dans  la  marche  générale  de  son  travail,  mais 
aussi  à  chaque  page  pour  surmonter  les  obstacles  sans 
cesse  renaissants  qui  se  dressent  devant  lui,  tout  con- 
court à  en  faire  l'un  des  mémoires  d'analyse  les  plus 
remarquables  qui  aient  jamais  été  publiés  en  Belgique. 

Nous  proposons  donc  à  la  Classe  d'en  ordonner  l'im- 
pression dans  les  Mémoires  in-H»  et  d'adresser  des  remer- 
ciements à  l'auteur.  » 

Ces  conclusions,  auxquelles  se  rallie  M.  J.  Deruyls, 
second  commissaire,  sont  adoptées  par  la  (>lasse. 


(  n  ) 

Sur  la  réparation  de  quelques  Algues; 
par  E.  De  Wildeman. 

ttappori    de  jRf.   Efi-ei-a,  pi'enêiet'  cotitmiësait'V. 

«  Le  travail  de  M.  De  Wildeman  a  pour  but  de  con)- 
pléter  sur  certains  points,  de  rectifier  sur  quelques 
autres,  le  paragraphe  relatif  aux  Algues  dans  le  Mémoire 
de  M.  Massart  que  l'Académie  a  couronné. 

J'ai  l'honneur  d'en  proposer  l'impression  dans  le 
Recueil  des  Mémoires  in-8".  Les  ligures  pourront  être 
reproduites  à  peu  de  frais  par  la  zincographie  et  inter- 
calées dans  le  texte;  parmi  celles  qui  se  rapportent  aux 
Treutepolilia,  (juelques-unes  ne  me  paraissent  pas  abso- 
lument indispensables.  » 

M.  Grépin,  second  commissaire,  s'étant  rallié  aux  con- 
clusions du  rapport  de  M.  Errera,  celles-ci  sont  adoptées 
par  la  Classe. 

COVLMUiNICAÏIONS  ET  LECTURES. 


Sur  les  dérivés   de  quelques   nilriles-alcools   aliplialiques  ; 
par  Louis  Henry,  meujbre  de  l'Académie. 

J'ai  examiné,  dans  ces  derniers  temps,  quelques 
nitriles-alcools  (jue  je  n'avais  pas  eus  à  ma  disposition 
précédemment  (*).  Cette  note  a  pour  but  de  faire  con- 
naître certains  de  leurs  dérivés  qui  me  paraissent  offrir 
un  intérêt  particulier. 

(*)  Voir  pour  les  développements  et  les  analyses,  mon  mémoire 
Sur  les  nitriles-alcools  alipkatiques  et  leurs  dérivés,  lequel  sera  publié 
dans  le  tome  LVII  des  Mémoires  in-S»  de  l'Académie. 


(  25  ) 


Dérivés  kn  Cj. 

Les  iiitriles-alcools  coirespondaiil  au  butane  normal 
CH3  -  CH2  -  GH.2  -  CH3  sont  au  nombre  de  trois,  savoir  : 

a.  CN-CH(On)-CH, -CH3. 
p.  Ci\-Cll,-CH(0H)-CH5; 
r.     Ci\-CH,-CH,-C»,(OH). 

Je  m'en  suis  occupé  précédemment  (*). 

A    Visobutane    J^S^  >  CH  -  CH-   correspondent  deux 

nitriles-alcools  : 

1°  Un  composé  alcool  primaire  CN  -  CH  -  CH.2{0H)  ou 

CH3 

le  nitrile  lactique  primaire  a  méthylé.  Ce  corps  n'est  pas 
connu.  On  l'obtiendrait,  selon  toute  probabilité,  par  la 
réaction  du  cyanure  de  potassium  sur  la  monocldorlnj- 
drine —  ou  mieux  la  monobromhydrine —  alcool  primaire 
(H0)CH>2  -  CHCI  -  CH3,  produit  de  l'addition  de  l'acide 
bypochloreux  (HO)Cl  au  propylène  HX  =  CH  -  CH5  (**). 

Je  regrette  de  n'avoir  pas  eu  jus(ju'ici  ces  composés 
propyléniques  à  ma  disposition,  et  par  conséquent  de 
n'avoir  pas  pu  appeler  à  l'existence  ni  étudier  ce  nitrile- 
alcool. 

Ce  que  l'on  sait  des  relations  de  volatilité  qui  existent 


{')  Bull,  de  IWcad.  roy.  de  Belcjiqiœ,  t.  XXXV,  3«  série,  p.  173. 
(•*)  Voir  Comptes  rendus,  elc,  t.  LXXXIF,  p.  1266  (année  1876). 


(24  ) 

entre  les  dérivés   propyUques   primaires   et   les  dérivés 
isobutyliques 


CH--CH2-CH,(0H)  El).       98" 

^{j^>  CH-CH,(OH)  108" 


CH3  -  CH,  -  CN  Eb.       98" 

CH3 
CH, 


10» 


iO° 


>-CH-CN  108» 


permet  de  lui  assigner  comme  point  d'ébiillition,  sous  lu 
pression  ordinaire,  S'SO''  à  âSo''  : 

(HO)CH,-CH, -Ci\  Éb.     222«-225" 

(HO)CH,  ^  CH  _  CN  230--255'' 

Sous  l'action  de  l'anhydride  phosphorique,  il  fournira 
sans  nul  doute  le  nitrile  méthyl-acryiique  CH2  =  G-Ci\, 

CH3 
comme  son  isomère  la  cyanhydrine  acétonique  dont  je 

vais  m'occuper. 

CH- 

2°  Un  composé  alcool  tertiaire  r^r,-^  >  C(OH)  -  CN,  le 

nitrile  qlycoliqae  himéthylé  ou  la  cyanhydrine  acétonique 
biméthi/lique. 

Ce  composé,  déjà  ancien  (*),  résulte  de  l'addition  de 
l'acide  cyanhydrique  HCN  à  la  cétone  biméthylique  CH5  - 
CO-CHr,.  (F.  IJrech.) 

(')  Liebig's  Annalen  der  Cliemie,  t.  CIAIV,  p.  255  (année  1872). 


(  2S  ) 
Il  fournit  aisément,  avec  les  dérivés  acétiques,  —  l'em- 
ploi du  chlorure  CH3  -  COCI  est  plus  avantageux  que 
celui  de  l'anhydride  (CH5  -  €0)^0,  —  l'acétate  correspon- 
dant ^^l>  C{C2ii.0^)-CN. 

Alors  que  la  cyanhydrine  acélonique  se  dédouble  si 
aisément  en  ses  générateurs,  sous  l'action  de  la  chaleur, 
son  acéline  se  fait  remarquer  par  sa  stabilité. 

C'est  un  liquide  incolore,  mobile,  d'une  odeur  fraîche, 
d'une  saveur  amère  spéciale,  fort  désagréable,  d'une  den- 
sité égale  à  0.997  à  19°,  insoluble  dans  l'eau  et  bouillant 
à  ISO^-IS^"  sous  la  pression  de  760  millimètres. 

Soumise  à  l'action  déshydratante  de  l'anhydride 
phosphorique  P2O5,    la   cyanhydrine   acétonique    CN - 

(](0H)  <  çr^  fournit,    d'une    manière    fort    nette,    le 

nitrile  «  mélhylacrylique  CN  —  C  ==  CHg  (*). 

CH3 
L'action  du  pentachlorure  de  phosphore  PCI5  sur  cette 

cyanhydrine  est  plus  complexe  dans  son  résultat.   Elle 

s'exerce  avec  vivacité  et  donne  comme  produit  immédiat, 

après  la  destruction  de  l'oxychlorure  de  phosphore  POCI.3 

formé  simultanément,  un  liquide  incolore,  fort  mobile, 

d'une  agréable  odeur,  analogue  à  celle  du  nitrile  méthyl- 

acrylique.  Ce  corps  est  insoluble  dans  l'eau  qu'il  surnage, 

il  s'ajoute  au  brome  et  bout  sous  la  pression  ordinaire 

vers  H0M15^ 

L'analyse  y  a  constaté  la  présence  du  chlore,  mais  en 

(juantité   inférieure   à  celle   que   renferme   le   chlorure 
CH- 

CH-^  CCI  -  CIN,  correspondant  à  la  cyanhydrine  acéto- 
nique, qui  doit  être  le  produit  immédiat  de  la  réaction. 


(*j  Voir  plus  loin,  page  32. 


(  ^6  ) 

Si  l'on  tient  compte  de  cet  ensemble  de  faits  et  de  la 
facilité  avec  laquelle  les  composés  butyliques  tertiaires 
(CH3)2CX  -  CH3  se  transforment  en  isohulyléne  (CH3).2C  = 
CH2,  en  perdant  le  système  HX,  on  est  autorisé  à 
admettre  que  le  produit  de  la  réaction  du  pentachlorure 
de  phosphore  sur  la  cyanhydrine  acétonique  se  constitue 

TH- 

d'un  mélange  du  nitrile  acélonique  monochloré  r.yJ'  >  C(ll  - 

CN,  produit  immédiat  de  la  réaction,  et  du  nitrile  a  me7/<y/- 
acrylique  CH.j  =  C  -  CN,  qui  en  résulte  par  élimination 

CH3 
d'acide  HCI.  Sa  densité  de  vapeur  trouvée,  ii.yi,  corres- 
pond d'ailleurs  à  la  moyenne  des  densités  de  vapeur  de 
ces  deux  composés  : 

Densité  <ie  vapeur. 


cil;  >  <:c'  - 

CN 

3.57 

GH,  =  C-CN 

2.51 

CHj 

5.88 

5  88 

--3.91 

Dérivés  en  C-;. 

Il  s'agit  des  dérivés  de  la  cyanhydrine  isobulylidénique 

J^S=^  >  CH  -  CH(OH)  -  CN,  produit  de  l'addition  de  l'acide 

/■"fi 

cyanhydrique  à  l'aldéhyde  isobutyrique /^r,"^>  CH-CHO. 

Le  pentachlorure  de  phosphore  PCI.-;  la  transforme  aisé- 


(  27  ) 

ment  en  son  dérivé  chloré  A^l  >  CH  -  CHCI  -  CIN,  Viso- 

propyl-acétonitrile  monochloré  «. 

Ce  corps  constitue  un  liquide  incolore,  mobile,  d'une 
odeur  forte  rappelant  celle  des  composés  amyliques,  d'une 
saveur  très  piquante,  insoluble  dans  l'eau. 

Sa  densité  à  10"  est  égale  à  0.9922. 

Il  bout  sans  décomposition  à  134"  sous  la  pression  de 
750  millimètres. 

C'est  le  point  d'ébullition  que  lui  assignent  ses  analo- 
gies avec  les  composés  butyriques  normaux. 

a.  La  transformation  du  système  -  CH-j  -  CN  en 
-  CHCI  -  CN  élève  le  point  d'ébullition  de  24". 

CN-CH.-CH.-CHs  Kb.     H8» 

;  24» 

CN-CnCl-CH,-CH,  142» 

cn-(;h„-ch  <^[j^ 

CN  -  CHCI  -  CH  <  ^[ 

h.  La  transformation  du   système   CH3  -  CHo  —   en 

i-u^  >  CH  —  élève  le  point  d'ébullition  d'environ  12°. 
LH3 

HsC-CH.-CH, -CH-,(OH)       Éb.   H  6" 

)    12" 
î]^JÎ>CH-CH,-CH,(OH)  128» 

CH3-CH,-CHCI-CN  Éb    142" 

)     12" 
^t!=^  >  CH.  -  CHCI  -  C\  154" 

LHr. 


(  Î28  ) 
Sa  densité  de  vapeur  a  été  trouvée  égale  à  5.82.  La 
densité  calculée  est  4.06. 

Sous  l'action  du  chlorure  d'acétyle,  cette  cyanhydrine 

CH- 

se  transforme  en  son  acétate  çyj^  >  CH(C2H503)  -  CN. 

Cet  acétate  cyatio-isobutyrique  ^^^  >  CH  -  CH(C2H30^) 

-  CN  constitue  un  liquide  incolore,  mobile,  d'une  faible 
odeur,  d'une  saveur  amère,  désagréable,  insoluble  dans 
l'eau,  d'une  densité  de  0.9745  à  19°.  Il  bout  sans  décom- 
position à  192''-193''  sous  la  pression  de  7G0  millimètres. 
Distillée  avec  de  l'anhydride  phosphorique,  la  cyanhy- 
drine isobutylidénique  se  transforme  dans  le  nitrile  non 

saturé  correspondant  ClN  -CH  =  C  <  ^|j^  (éb.  140''-14;2<') 

ou  nitrile  acrylique  [3  bimél/iylé.  (Voir  plus  loin,  p.  55.) 


Dérivés  en  C,;. 


CH- 
La  cyanhydrine  isovalérique  pir"^  >  CH  -  CHq-  CH(OH) 

-  CN,  composé  homologue  du  précédent,  a  été  soumise  à 
l'action  du  penlachlorure  de  phosphore  PCl^  et  du 
chlorure  d'acétyle  CH5  -  COCI. 

Elle  fournit,  et  d'une  manière  fort  nette,  avec  le  pen- 
tachlorure  de  phosphore,  Vacélo-nitrile  monochloré isobutij- 

CH 
lique  prj"^  >  CH  -  CH.2  -  CHCl  -  CN  ou  nitrile  caproïque  a 

monochloré. 

C'est  un  liquide  incolore,  mobile,  d'une  odeur  agréable, 
faible,  d'une  saveur  piquante,  insoluble  dans  l'eau,  d'une 
densité  de  0.984  à  12°,  bouillant  sans  décomposition  à 
172"-175°  sous  la  pression  de  755  millimètres. 


(  29  ) 

Sa  densité  de  vapeur  a  été  trouvée  égale  à  4.43.  La 
densité  calculée  est  4,54. 

La  réaction  du  chlorure  d'acétyle  est  beaucoup  plus 
vive  et  plus  énergique  que  celle  de  l'anhydride  acétique; 
elle  permet  d'obtenir  avec  facilité  Vacétate  cyano-isovalé- 

rique  ^  >  CH  -  CH.,  -  CH(C2H30.)  -  CN. 

Celui-ci  constitue  un  liquide  incolore,  mobile,  d'une 
odeur  fraîche,  d'une  saveur  amère,  piquante,  insoluble 
dans  l'eau,  d'une  densité  de  0.1)00  à  19°,  bouillant  sans 
décomposition  à  204°  sous  la  pression  de  760  millimètres. 

Les  dérivés  des  cyanhydrines  isobutyrique  et  isovalérique 
sont  homologues;  on  remarquera  la  différence  notable 
que  l'on  constate,  quant  à  la  volatilité,  du  chef  de  l'exis- 
tence du  composant  CH^j  entre  les  dérivés  chlorhydriques 
et  les  dérivés  acétiques  correspondants. 

Dérivés  chlorhydriques.  Dérivés  acétiques. 

C,        Éb.  154"  \  Éb.  192'  v 

)  19"  )  12" 

Ce  173"  /  204'-  / 

Soumise  à  l'action  déshydratante  de  l'anhydride  phos- 
pborique,  la  cyanhydrine  amylidénique  fournit,  d'une 
manière  assez  nette,  le  nitrile  non  saturé  correspondant 

CN  -  CH  =  CH  -  CH  <  ^l,  (éb.   Io4°-lo5°),  ou  nitrile 

acrylique  (3  isopropylé.  (Voir  plus  loin,  p.  58.) 


Dérivés  en  Cy. 

La  cyanhydrine  œnanthylidénique  CH5  -  (CH^)^  CH(OH) 
-  CN,  produit  de  la  fixation  de  l'acide  cyanhydrique 
HCN  sur  Vœnanthol  CH3  -  (CH^^jg  -  CHO,   fournit  aussi 


(  30) 

aisément  que  les  précédents,  sous  l'action  respective  du 
pentachlorure  de  phosphore  et  du  clilorure  d'acétyle,  les 
dérivés  chlorhydrique  et  acétique  correspondants. 

Le  nilrile  caprylique  ou  octylique  a.  chloré  CN  -  CH  Cl 
-(CHa^s-CH^  constitue  un  liquide  incolore,  mobile, 
d'une  étrange  odeur,  rappelant  celle  de  l'aldéhyde  œnan- 
thylique,  d'une  saveur  désagréable,  rance. 

Il  est  insoluble  dans  l'eau;  sa  densité  à  i'È"  est  égale 
à  0.959. 

Il  bout  sous  la  pression  de  38  millimètres  à  il24"  et  à 
217"  sous  celle  de  755  millimètres. 

Sa  densité  de  vapeur  a  été  trouvée  égale  à  5.29;  la 
densité  calculée  est  5.51. 

La  cyanhydrine  œnanthylidénique  a  acétylée  CN  -  CH 
(C.2H3O2)  -  (CH.2);;  -  CH5  se  présente  sous  forme  d'un 
liquide  incolore,  mobile,  d'une  odeur  rance,  d'une  saveur 
piquante,  amère. 

Sa  densité  à  19°  est  égale  h  0.9585.  Elle  bout  à  245" 
sous  la  pression  de  7(30  millimètres. 

La  déshydratation  de  la  cyanhydrine  œnanthylidénique 
à  l'aide  de  l'anhydride  phosphorique  s'effectue  aisément 
et  nettement.  On  distille  le  mélange  des  deux  corps, 
dans  une  cornue,  au  bain  d'huile,  sous  pression  raréfiée. 
On  obtient  ainsi  le  nitrile  non  saturé  CN  -  CH  =  CH  -  CHç, 
-  C4Hg  (éb.  197°),  îiitrile  butyrique  normal  y  butylé  ou 
nitrile  acrylique  ^  pentylé.  (Voir  plus  loin,  p.  41.) 

Je  tiens  à  dire,  en  terminant,  toute  la  part  qu'a  prise 
à  l'élaboration  de  ce  travail  mon  zélé  préparateur, 
M.  Auguste  De  Wael. 


(  31  ) 


Sur   (lirera   composes   non    salures;    par   Louis    Heniv, 
membre  de  l'Académie. 


§  i.  —   Sur  quelques  nilriles  non  salures 

1/aetion  de  l'anhydride  pliosphorique  sur  les  nitriles- 
(dcools  est  une  question  presque  neuve.  Le  nitrile  lactique 
primaire  (*)  seul,  Ci\  -  CH2  -  CHo(OH),  a  été  soumis  à 
l'action  de  cet  ;^i>ent;  il  en  est  résulté  le  nitrile  acrylique 
CN  -  CH  =  CIl^. 

A  l'occasion  de  mes  recherches  sur  les  nitriles-alcools, 
j'ai  repris  l'étude  de  cette  question  générale  dans  le  but 
d'obtenir  des  nitriles  non  saturés,  de  la  formule  CN- 
^^nH2„_,,  ces  corps  me  paraissant  devoir  être  intéres- 
sants à  divers  points  de  vue,  notamment  sous  le  rapport 
de  la  volatilité. 

Les  résultats  obtenus  jusqu'ici  me  semblent  dignes 
d'être  signalés  dès  à  présent. 

J'ai  laissé  de  côté  pour  le  moment  le  nitrile  glycolique 
CN-CH2(0H),  l'action  de  l'anhydride  phosphorique  sur 
le  composé  devant,  comme  celle  de  cet  agent  sur  l'alcool 
méthylique  ll-C-OH,  donner  lieu  à  des  complications. 


(*)  Voir  Ch.  Molreu,  Annales  decininieet  dcphysique,  t.  II,  7«  série, 
pp.  145elsuiv.;  1894. 


(  32) 


Dérivés  en  C5. 

L'isomère  du  nitrile  lactique  priuiaire,  le  nilrile  lac- 
tique secondaire  CN  -  CH(OH)  -  CH3  ou  nitrile  niélhyl- 
(jlycolique,  soumis  à  l'action  de  l'oxyde  pliospliorique,  n'a 
donné,  contrairement  à  mes  prévisions,  aucun  résultai 
satisfaisant.  Elle  aurait  dû  fournir  aussi  du  nitrile  acrylique 
CN  -  CH  =  CH2.  Réalisée  dans  des  conditions  diverses, 
soit  dans  l'air,  soit  dans  la  vaseline,  cette  réaction  est 
restée  stérile,  le  nitrile  lactique,  après  quelque  temps  de 
chaulTe,  se  charbonnant  complètement. 

Dérivés  en  C4. 

Les  nitriles-alcools  en  C4  que  j'ai  examinés  se  sont, 
sauf  un  seul,  mieux  comportés  (*). 

En  fait  de  dérivés  iso,  je  n'ai  eu  à  ma  disposition  que 

la  cyanhydrine  acétonique  CN  -  C(OH)  <  J^Jj^  qq  jg  nitrile 

Cris 
gly colique  biméthylé. 

Soumise  à  l'action  déshydratante  de  l'anhydride  phos- 

phorique  P2O5,  la  cyanhydrine  acétonique  fournit,  d'une 

manière  fort  nette,  le  nitrile  a  méthyl-acrylique 

CN-C  =  CH. 
I 
CH, 


C)  Voir,  pour  les  développements,  mon  mémoire  Sur  les  nitriles- 
alcools  et  leurs  dérivés.  (3Iémoiues  in-S"  de  l'Académie,  l.  LVII;  1898.) 


(  33  ) 

Celui-ci  se  présente  sous  la  forme  d'un  liquide  incolore, 
très  mobile,  d'une  agréable  odeur  fort  pénétrante,  rappe- 
lant l'acide  cyanhydrique,  d'une  saveur  amère,  piquante; 
sa  densité  à  18°  est  égale  à  0.7991.  Il  est  insoluble  dans 
l'eau  qu'il  surnage. 

Il  bout,  sous  la  pression  de  760  millimètres,  à  90''-92». 
Sa  densité  de  vapeur  a  été  trouvée  égale  à  2.26;  la  densité 
calculée  est  2.31. 

Ce  composé  s'ajoute  intensément  au  brome. 

On  y  a  trouvé  20.77  et  20.61  "/o  d'azote;  la  formule  en 
demande  20.89. 

Je  rappellerai,  à  cette  occasion,  que  le  nitrile  isobuty- 
rique CN  -  CH  <  ^[J3  bout  à  107°-108°.  Il  suit  de  là  que 

des  relations  du  même  ordre,  et  également  remarquables 
vu  leur  caractère  exceptionnel,  existent  aux  étages  C3 
€t  C4  entre  les  nitriles  saturés,  propionique  et  methyl- 
propionique  d'une  part,  et  les  nitriles  non  saturés  corres- 
pondants, acrylique  {*)  et  méthyl-acrylique  d'autre  part, 


CN-CH0-CH3 

Ci\  -  CH  =  CHo 

Eb. 

98» 
78°  , 

\-20° 

CN-CH2-CH3 

1 

Éb. 

108°  ] 

y 

CH5 

)-\So 

CN  -  C  ==  CH. 

Il 
CH3 

90°  i 

1 

(*)  Voir  Gh.  Moureu,  loc. 

cit. 

o""'    SÉRIE,    TOME 

XXXVI. 

5 

(  54  ) 

Les  trois  oxy-nitriles  butyriques  normaux 

a.  CN-CH(OH)-CH2-CH3; 
p.  CN-CH2-CH(OH)-CFl5; 
y.     CN-CH2-CH2-CH5, 

ont  été  soumis  à  l'action  de  l'anhydride  phosphorique. 

Les  dérivés  «  et  [3  fournissent  l'un  et  l'autre,  ainsi  qu'il 
était  h  prévoir,  et  d'une  manière  assez  nette,  le  nitrile 
crolonique  ordinaire  CN  -  CH  =  CH  -  CH5  (éb.  118°-ii9") 
ou  (3  méthyl-acrylique. 

Avec  le  dérivé  y,  je  pouvais  m'attendre  à  obtenir  le 
dérivé  de  nature  allylique,  renfermant  le  système  terminal 

-  CH  =  CH^,  le  véritable  cyanure  d'allyle  CN  -  CH^  -  CH 
=  CHc2,  l'homologue  immédiatement  supérieur  du  nitrile 
acrylique.  Quelque  légitime  que  fût  cette  espérance,  elle 
ne  s'est  pas  réalisée.  16  grammes  du  nitrile-alcool  7  ont 
été,  en  deux  fois,  soumis  à  l'action  de  l'anhydride  phos- 
phorique, sans  résultat.  La  masse  soumise  à  l'action  de 
la  chaleur,  au  bain  d'huile,  subit  une  carbonisation  com- 
plète. 

J'ai  obtenu  ce  composé  par  une  autre  méthode,  la 
distillation  des  dérivés  haloïdes  7  du  nitrile  butyrique 
normal,  et  notamment  du  dérivé  chlot^é  CN-CH^-CHç^ 

-  CH2CI  (éb.  195°),  avec  de  la  potasse  caustique,  sèche, 
pulvérulente. 

Le  rendement  de  l'opération  est  satisfaisant.  Cette 
réaction  a  la  valeur  d'une  méthode  générale  pour  pro- 
duire les  nitriles  non  saturés  renfermant  le  système 
terminal  vinylique  -  CH  =  CH2. 

Le  nitrile  vinyl-acélique   CN  -  CHg  -  CH  =  CH^,    ainsi 


(  53  ) 
préparé,  constitue  un  liquide  incolore,   d'une  agréable 
odeur,  d'une  saveur  piquante.  Sa  densité  à  16°  est  égale 
à  0.911. 

Il  est  insoluble  dans  l'eau.  Il  bout  à  135°  sous  la  pres- 
sion de  760  millimètres. 

Sa  densité  de  vapeur  a  été  trouvée  égale  à  2.37;  la 
densité  calculée  est  2.31. 

On  y  a  trouvé  19.95  et  20.29  °/„  d'azote.  La  formule 
en  demande  20.89  %. 

Dérivé  en  C5. 

En  fait  de  nitriles-alcools  en  Cg,  je  n'ai  eu  que  la 
cyanhydrine  isobutylidénique   CN  -  CH(OH)  -  CH  <  ç^^. 

10  grammes  en  ont  été  distillés,  après  quelque  temps 
de  contact  avec  P^Og,  au  bain  d'huile,  sous  pression 
raréfiée.  On  recueille  un  produit  incolore  qui,  après  une 
double  rectification,  constitue  le  nitrile  acrylique  (3  hi- 
méthylé  CN  -  CH  =  C  <  J^fj^  à  l'état  de  pureté. 

Le  rendement  est  satisfaisant.  On  y  a  trouvé  17.27 
et  17.42  °/o  d'azote;  la  formule  en  demande  17.28  %. 

Le  nitrile  [3  biméthyl-acrylique  constitue  un  liquide 
incolore,  mobile,  d'une  agréable  odeur  prussique,  d'une 
saveur  très  piquante,  sui  gêner is. 

11  est  insoluble  dans  l'eau  qu'il  surnage,  soluble  dans 
l'alcool  et  l'éther. 

Sa  densité  à  14°  est  égale  à  0.8292. 

Il  bout  sans  décomposition  à  140°-142°,  sous  la  pres- 
sion ordinaire. 

Sa  densité  de  vapeur  a  été  trouvée  égale  à  2.77;  la 
densité  calculée  est  2.79. 


(  3«  ) 

Ce  nitrile  complète,  avec  le  nitrile  crotonique,  la  série 
des  dérivés  (3  de  méthylisalion  du  nitrile  acrylique  CN 
-  CH  =  CH.,. 

Il  est  intéressant  de  les  examiner  au  point  de  vue  de 
leur  volatilité  relative. 

Différence  40».  Différence  22o. 

C!V  Éb.    78"        CiN  Éb.    118»        CN       Éb.    liO-'-l/t^» 

I  I  I 
CH                            CH                             CH 

II  II  II 
CH»                           CH                             C 

'  A 

CH3  CH3  CH3 

On  voit  combien  va  en  diminuant  l'induence  de  la 
mélhylisation  sur  l'élévation  du  point  d'ébullition. 

Il  est  non  moins  intéressant  de  comparer  ces  trois 
nitriles  avec  les  nitriles  simples,  saturés  aux  mêmes 
étages  de  carburation. 


CN  — CH,-CH3 
CN-CH  =  CHo 


CN  -  en,  -  CH,  -  VAU 

CN  -  CH  =  CH  -  CH, 

CN  -  CM,  -  CH  <  ^[[j 
CN  -  CH  =  C  <  ^j[' 


Eh. 

1)8»  ^ 
78°  . 

\-20° 

Éb. 

Éb. 

118° 
118"  , 

129°  \ 
140°  > 

)      0» 

)+11° 

(  57  ) 

Non  seulement  les  différences  varient  quant  à  leur 
valeur,  mais  même  quant  à  leur  signe. 

A  l'étage  C3,  la  déshydrogénation  détermine  un  abaisse- 
ment d'environ  20"  dans  le  point  d'ébullition;  à  l'étage  C4, 
toute  différence  a  sensiblement  disparu.  A  l'étage  Ç^,  la 
déshydratation  s'accompagne,  au  contraire,  d'une  éléva- 
tion d'environ  11°  dans  le  point  d'ébullition. 

Il  est  encore  intéressant  de  comparer,  quant  à  la  vola- 
tilité de  leurs  termes  respectifs,  la  série  des  nitriles  saturés 
avec  celle  des  nitriles  non  saturés  correspondants. 

Nitriles  saturés.  Nitriles  non  saturés. 


CN         Eb.     98"  Ci\         Eb.     7? 

CH2  \                   CH 

'  +  20"         "                              )  +  40° 

CH3  /                  CH, 

CN  118°                       CN                 118» 

CH,  \                   CH 

CH2  j+H"         CH                          1  +  22° 

CH,  /                  CH3 

CN  129"                      CN                140" 

I  I 

CHj  CH 

I  II 

CH  C 

A  A 

GH5  CH3  CH3  CH3 


On  voit  par  là  que  les  différences  sont  précisément 
double  dans  la  série  des  dérivés  non  saturés. 


(38) 

Le  rapprochement  des  nilriles  correspondants  saturés 
et  non  saturés  en  C3  et  en  C4  n'offre  pas  moins  d'intérêt. 


CH3  -  CH.  -  CN  Eb.       98" 

CHî-CH^-CHî-CN  WS" 

CHg-CH^-CN  Éb.     WS" 

CHa-CH-CN  78° 

CHs-CHs-CH.-CN  ÉI).     US" 

CH2  =  CH-Cll2-CN  155° 


+  20» 


40° 


17» 


cn,  =  cn-CN  Éb.     78°  \ 

/  +  57" 
Clf„  =  CH-CH2-CN  135"  / 


On  voit  à  l'évidence  l'inlluence  volatilisante  exercée 
par  le  rapprochement  des  systèmes  -  CN  et  -  CH  =  CHg, 
influence  qui  ne  s'exerce  pas  à  travers  le  chaînon  -  CHg 
du  nitrile  en  C4  CN  -  CHo  -  CH  =  CH.,. 


Dérivé  en  Cg. 

La    cyanhydrine    amylidénique    CN  -  CH(OH)  -  CH.) 

CH 
CH<pu'^,  homologue   de   la   cyanhydrine   isobutylidé- 

nique,    se    comporte   comme  celle-ci   sous   l'action   de 

l'anhydride  phosphorique.  H  en   résulte  le  nitrile  non 

CH 

saturé  correspondant  CN-  CH  =  CH-CH  <  p"^,  le  nitrile 

iso-pyrotéribique  ou  y  diméthyl-cr otonique,  que  l'on  appel- 
lerait également  bien  nitrile  acrylique  [i  isopropylé. 


(39  ) 

Ce  composé  constitue,  comme  les  précédents,  un  beau 
liquide,  incolore,  mobile,  d'une  odeur  agréable,  plus  ou 
moins  aldéhydique,  d'une  saveur  piquante,  plus  ou  moins 
douceâtre,  insoluble  dans  l'eau  qu'il  surnage,  soluble 
dans  les  dissolvants  carbonés,  l'alcool,  l'éther,  l'acé- 
tone, etc. 

Sa  densité  à  16°  est  égale  à  0.8268. 

11  bout  fixe,  sous  la  pression  de  754  millimètres,  à 
154°-155«. 

Sa  densité  de  vapeur  a  été  trouvée  égale  à  3.20;  la 
densité  calculée  est  5.28. 

C'est  le  point  d'ébullition  que  lui  assigne  l'analogie. 
Les  nitriles  butyrique  et  crotonique  ont  sensiblement  les 
mêmes  points  d'ébullition;  il  en  doit  être  de  même  de 
leurs  dérivés  biméthylés  y. 


CN-CHj-CHa-CH,  Éb.  118» 

CN-CH  =  CH-CH,  il8» 


CN-CH^-CHî-CH  <^[J'     Éb.   155» 
CN-CH  =  CH-CH  <p!!'       154»-155» 


+  0» 


+  0» 


Il  est  utile  de  rappeler  en  ce  moment  les  rapports  de 
volatilité  qui  existent  entre  le  nitrile  acrylique  et  son 
dérivé  (3  biméthylë 


CN-CH  =  CHî 

Eb.     78» 

\ 

cN-cH  =  c<^[;; 

140»  i 

y +  62 

(  ^+0  ) 

On  voit  ainsi  combien  diffère,  quant  à  son  intensité, 
l'influence  qu'exerce  sur  la  volatilité  la  substitution  de 
2  -  CH3  à  :2H,  suivant  qu'elle  s'opère  dans  un  groupement 
carboné  à  double  ou  à  simple  soudure. 

Je  ferai  remarquer  par  la  même  occasion  combien 
diffèrent  aussi,  quant  à  la  volatilité,  les  deux  nitriles 
mëthj/l-acryliques  isomères  : 

Nilrile  acrylique Éb,     78"  \ 

I  dérivé  a  CN-C  =  CH2  90" 

Nilrdes  methyl-  ) 

acryliques         j^^j^^  p  CN-CH=CH  ' 

I       -  CHj,  nilrile  croto- 
\       nique 118" 

Une  fois  de  plus,  il  apparaît  d'une  manière  évi- 
dente combien  puissamment  influe  sur  la  volatilité  de  la 

molécule  totale  l'existence  dans  celle-ci  d'un  atome  de 
I 

carbone  -  C  -,  sans  hydrogène,  relié  à  du  carbone  exclu- 
sivement. 


Dérivé  en  €§. 

La  cijanhydrine  œnanthylidénique  CN  -  CH(OH)  -  (CHg)^ 
-  CH5  est  le  dernier  des  nitriles-alcools  que  j'ai  soumis  à 
l'action  de  l'anhydride  phosphorique. 

14  grammes  de  nitrile,  mélangés  depuis  quelque  temps 
à  20  grammes  de  P2O5,  ont  été  distillés  au  bain  d'huile, 
sous  pression  raréfiée.  Le  produit  qui  passe  est  remar- 
quable de  pureté  et  représente  environ  50  %  du  rende- 
ment théorique.  Il  suffit  d'une  double  rectification  pour 


(  4i  ) 
le  rendre  propre  à  l'analyse.  Celle-ci  a  fourni  les  chiffres 
suivants  : 

Azote  o/o 
Substance.  Trouvé.  Calculé. 

1 Os^4^)28  11.20 


1 1.48 
II Oe-^jieSO  H. 09 

Le  composé  ainsi  obtenu  est  le  nitrile  crotonique  y 
butylé,  CN  -  CH  =  CH  -  (CH2)4  -  CH5. 

Il  constitue  un  liquide  incolore,  mobile,  d'une  odeur 
forte,  rappelant  l'œnanthol,  d'une  saveur  nauséabonde, 
désagréable.  Il  est  insoluble  dans  l'eau,  mais  soluble  dans 
l'alcool  et  l'élher. 

Sa  densité  à  16°  est  égale  à  0.8318. 

Il  bout,  sous  la  pression  de  "GO  millimètres,  à  197°-2(XI°. 

Sa  densité  de  vapeur  a  été  trouvée  égale  à  4.05.  La 
densité  calculée  est  4.21 . 

Ce  nitrile  est  le  troisième  existant  renfermant  le 
système  CH  =  CH. 

Il  est  intéressant  de  le  comparer  aux  nitriles  saiurés 
correspondants  : 

CN-CH, -CHî-CHs  Éb.     118° 

CN-CH  =  CH-CH,  118» 


CN  -  CHj  -  CH2  -  CH  <  ^[j^'    Éb.     155° 

CN  -  CH  =  CH  -  CH  <  ^{J'  1 54°-l 55» 

CN  -  CH2  -  CHj  -  (CH2),  -  CH5  Éb,  1 98»-200'' 
CN-CH  =  CH-(CHî)4-GH3         197°-200° 


+  0" 


+  0» 


(  42  ) 

On  voit  ainsi  que  la  transformation  du  système  symé- 
trique CH2  -  CH^  en  CH  =  CH  dans  ces  conditions,  c'est- 
à-dire  voisin  du  composant  -  CN,  n'intlue  pas  sensible- 
ment sur  le  point  d'ébullition. 

§  II.  —  Sur  les  dérivés  crotoniqiies 
CH5-CH  =  CH-C. 

Au  point  de  vue  des  relations  de  volatilité  qui  existent 
entre  les  composés  saturés  et  les  composés  non  saturés 
correspondants,  les  dérivés  crotoniques  -  CH  =  CH  -offrent 
un  grand  intérêt. 

L'un  d'entre  eux,  et  des  plus  importants,  n'a  pas  encore 
été  décrit.  J'ai  tâché  de  combler  cette  lacune.  Il  s'agit  du 
chlorure  crotonique  CH5  -  CH  =  CH  -  COCl. 

Ce  corps  résulte  de  l'action  du  trichlorure  de  phos- 
phore sur  l'acide  crotonique,  selon  l'équation 

fcH3-CIl=CH-C<QjJ  -HPCl3=fcH5-CH  =  CH-C^,\  +P(0H)5. 

On  a  employé  12  grammes  d'acide  et  6  grammes  de 
trichlorure.  La  réaction  s'établit  sous  l'action  d'un  léger 
échauflément.  On  sépare  après  quelque  temps  la  couche 
liquide  supérieure  de  la  masse  poisseuse  de  l'acide  phos- 
phoreux formé,  auquel  le  froid  a  donné  quelque  consis- 
tance. Il  ne  se  dégage  guère  d'acide  chlorhydrique. 

Une  double  rectification  suffit  pour  obtenir  ce  produit 
à  l'état  de  pureté. 

Le  chlorure  crotonique  CH5  -  CH  =  CH  -  COCl  constitue 
un  liquide  mobile,  incolore,  d'une  odeur  suffocante, 
fumant  à  l'air  ordinaire. 

Sa  densité  à  1(3°  est  égale  à  1.293. 

11  bout,  sous  la  pression  ordinaire,  à  1240-125". 


(  ^3  ) 
Sa  densité  de  vapeur  a  été  trouvée  égale  à  5.61. 

Substance 08%03i9 

Pression  barométrique 765™'" 

Mercure  soulevé ôSi""" 

Tension  de  la  vapeur 101°"° 

Volume  de  la  vapeur CS**,? 

Température 100° 

La  densité  calculée  est  3.61. 

Son  analyse  a  fourni  les  chiffres  suivants  : 

Chlore  »/o 
Substance.  AgCI.  Trouvé.        Calculé. 


I    .     .     .       06%1005       08%13G1       53.52 

33.97 
II   .    .     .      0e%2312      0SS3127       55.47 


Il  est  utile  de  rappeler  que  le  nitrile  butyrique  normal 
CH3  -  CH2  -  CH2  -  COCl  bout  à  100°-101'\ 

Il  en  est  donc  tout  autrement  à  cet  étage  des  chlorures 
et  des  nitriles  correspondants  saturés  et  non  saturés 


CN-CH,-CH, -CH,  Eb.  118» 

0» 
CN-CH  =  CH-CH,  118' 


OCCI  -  CAU  -  Cir,  -  CH3  Eb    100"^ 

"  +25" 
OCCI -CH-CH  -  CH,  lâiMSS-' 


(44) 
La  même  relation  qu'entre  les  chlorures  se  constate 
entre  les  éthers  butyriques  et  crotoniques  correspondants  : 


CH3-CH2-CH.2-CO(OCH3)  Éb.  102» 

CHj-CH-CII-COlOCHs)  120» 

CH3-CH2-CH2-CO(OC,Hb)  Éb.  120» 

CH3-CH  =  CH-C0{0CA)  142" 


+  18» 


+  22» 


Quant  aux  alcools,  butylique  et  crotylique,  ils  sont 
entre  eux  dans  le  même  rapport  de  volatilité  que  les 
nitriles 

CH5-CH„-C[l2-CH2(0H)       Éb.  116°  \ 

)    4-  1» 

CH3-CH  =  CH-CH2(OH)  117»   / 

Le  chlorure  d'acrijle  CHq  =  CH  -  COCI  iournit  avec  les 
alcools,  les  éthers  de  l'acide  [3  chloro-propionique  CICH2  - 
CH2-C0(0C„H,„^,), l'acide  HCl,  produit  de  la  réaction(*) 
s'ajoutant  intégralement  à  l'acide  acrylique.  Le  chlorure 
crotonique  se  comporte  de  la  même  façon.  Sur  ce  chlo- 
rure placé  dans  un  ballon  bien  refroidi,  on  a  fait  tomber 
la  quantité  équivalente  d'alcool;  il  ne  se  dégage  pas 
d'acide  chlorhydrique.  L'éther  formé  bout  en  grande 
partie  à  la  première  distillation  de  165°  à  170°.  On 
sait  que  l'éther  chloro-butyrique  [3  CH5  -  CHCl  -  CHg  CO 
(OC2H;;),  produit  de  l'addition  de  HCl  à  l'acide  croto- 
nique, bout  à  168". 


(*)  Voir  Ch.  Moureu,  loc.  cit. 


(  «) 

Je  tiens  à  adresser  tous  mes  remerciements  à  mon  zélé 
préparateur,  M.  Auguste  De  Wael,  pour  la  part  qu'il  a 
prise,  au  point  de  vue  expérimental,  dans  l'élaboration 
de  ce  travail. 


APPENDICE. 

(^  [II.  —  Recherches  sur  divers  composés  non  saturés, 
par  M.  Camille  Âschman. 

Un  de  mes  assistants  s'est  occupé  autrefois,  à  mon 
invitation,  dans  mon  laboratoire,  d'études  sur  le  pouvoir 
additionnel  des  composés  non  saturés. 

Les  résultats  de  ses  recherches  ont  été  consignés  en 
partie  dans  la  dissertation  qu'il  a  présentée  à  la  Faculté 
des  sciences  de  Louvain  pour  l'obtention  du  grade  de 
docteur  (*).  Ils  n'ont  jusqu'ici,  que  je  sache,  reçu  aucune 
autre  publicité. 

Je  crois  faire  chose  utile  en  signalant  à  présent 
certains  faits  constatés  par  M.  Aschman  au  cours  de  ses 
recherches,  faits  qui  méritent,  à  mon  sens,  d'être  tirés 
de  l'oubli.  Se  rattachant  aux  questions  générales  de  la 
solidarité  fonctionnelle  et  de  la  volatilité  dans  les  composés 
carbonés,  ils  offrent,  au  point  de  vue  de  mes  études 
personnelles,  dans  lesquelles  ils  s'encadrent  naturelle- 
ment, un  intérêt  tout  particulier. 


(')  Sur  le  pouvoir  additionnel  des  composés  non  saturés  bivalents  et 
les  dérivés  allyl-acétiques ,  par  Camille  Aschman,  assistant  au  labora- 
toire de  chimie  générale.  Louvain,  Van  Lintliout  frères,  1883. 


(  4t)  ) 

A.    —  Sur  les  dérivés  aUyl-acétiqiies 
CgH 5  —  CHj  —  C  • . . 

L'acide  allyl-acétique  a  été  obtenu  par  le  dédoublement 
de  l'allyl-acétylo-acétate  d'éthyle  sous  l'action  des  bases. 
On  sait  que  le  dédoublement  de  ce  composé 

OC  -  OC2H., 

I 

CH    -    C-^Hg 

I 

co 

I 

CH3 

comme  d'ailleurs  celui  de  tous  les  composés  du  même 
ordre,  peut  se  faire  de  deux  façons  diverses  : 

a)  Entre  les  chaînons  CH  -  C3H5  et  CO,  pour  donner 
les  acides  acétique  et  allyl-acétique  ; 

b)  Ou  bien  entre  le  chaînon  éther  et  le  chaînon 
HC  -  C3H5,  pour  donner,  outre  l'acide  carbonique,  de 
l'allyl-acétone  C3H5  -  CH2  -  CO  -  CH3. 

A  la  suite  d'essais  nombreux,  l'auteur  a  trouvé  que  le 
rendement  le  plus  considérable  en  acide  allyl-acétique 
C5H5-CH2-CO(OH)  s'obtient  par  l'emploi  d'une  solution 
de  potasse  caustique  faite  dans  les  proportions  suivantes  : 

Potasse  caustique 140  parties 

Eau 40     — 

On  fait  bouillir  pendant  quelques  heures,  dans  un 
ballon   en  communication  avec  un   appareil    à   reflux, 


(47  ) 

rallyl-acétylo-acétale  d'éthyle  avec  celte  solution  de 
potasse  caustique,  d'après  les  proportions  indiquées  par 
l'équation 

OC  -  OC3H,  OC  <  OC,H,  OC  <  ^^^' 

HC  -  C5H8  H,C  -  C3H5 

I               +KOH=  +              ou                + 

CO  OCOK                        H,C  -  C3H, 

I  I                                  I 

CH,  CIL                             CO 


I 
CH 


Lorsque  la  réaction  est  terminée,  on  sépare  l'allyl- 
acétone  qui  surnage  et  on  ajoute  au  liquide  aqueux  de 
l'acide  chlorhydrique  en  excès  pour  chasser  l'acide  allyl- 
acétique  de  son  sel  ;  celui-ci  vient  surnager.  Quelques 
rectifications  l'amènent  à  l'état  de  pureté. 

Chlorure  d'allyl-acétyle 
OCCl  -  CH2 -  CH,  -  CH  =  CHj. 

Ce  corps  résulte  de  l'action  du  trichlorure  de  phos- 
phore sur  l'acide  allyl-acétique,  dans  les  proportions 
indiquées  par  l'équation 

5[C3H,  -  CH, -  CO(OH)]  +  PCI3  =  P(0H)3  +  {C,ll, - COCl)^. 

On  chautre  pour  déterminer  la  réaction.  L'acide  phos- 
phoreux se  dépose  sous  forme  d'une  masse  blanche  par 
le  refroidissement.  La  partie  liquide  que  l'on  sépare,  sou- 
mise à  la  distillation,  fournit  le  chlorure  d'allyl-acétyle 
pur  dès  la  seconde  rectification. 


(  48  ) 
Son  analyse  a  fourni  les  résultais  suivants  : 

Chlore  "/o 
Substance.    Chlor.  d'argent.    Trouvé.       Calculé. 

I   .     .     .       06',2644      0^^3460       52.45  \ 

)  52.40 
II    .     .     .      0gs2I7l       06^2853       52.38  / 

Le  chlorure  d'aUyl-acélyle  CUç)  =  CH  -  CH.)  -  COCl  con- 
stitue un  liquide  incolore,  très  mobile,  d'une  odeur  suffo- 
cante, fumant  à  l'air. 

Sa  densité  est  égale  à  i.0739  à  13°. 

L'eau,  l'alcool,  l'ammoniaque  réagissent  vivement  sur 
lui,  comme  sur  les  chlorures  acides  en  général. 

Il  bout  fixe  à  128°  sous  la  pression  de  765  millimètres. 

La  densité  de  vapeur  a  été  trouvée  égale  à  5.96. 

Substance Ok%0620 

Pression  barométrique 760""' 

Mercure  soulevé 674"' 

Tension  de  la  vapeur 86° 

Volume  de  la  vapeur 146'^'^ 

Température dOO" 

La  densité  calculée  est  4,07. 

AUyl-acétamide 
CsHs-CHj-COtNHj). 

Elle  résulte  de  l'action  du  chlorure  sur  l'ammoniaque 
en  solution  aqueuse  concentrée. 

Ce  corps  cristallise  en  paillettes  blanches,  solubles 
dans  l'eau,  l'alcool  et  l'éther.  Il  fond  à  94°  et  bout  à  250° 
sous  une  pression  de  770  millimètres. 


I 


Saïai 


îmni 


(  ^9  ) 

A  Uyl-acéto-nitrile 
C.H^  -  CH,  -  CN. 

Ce  corps  résulte  de  la  déshydratation  de  l'amide  corres- 
pondante à  l'aide  de  l'anhydride  phosphorique. 

C'est  un  liquide  d'une  agréable  odeur,  insoluble  dans 
l'eau,  d'une  densité  égale  à  1.4803  à  43°,  bouillant 
vers  440°  sous  la  pression  ordinaire.  Densité  de  vapeur 
trouvée,  3.00;  calculée,  2.80. 

Je  ferai  remarquer  en  passant  que  les  dérivés  allyl- 
acétiques  ont  la  même  volatilité  que  les  dérivés  valé- 
riques  normaux  correspondants  : 


CHj  -  CH2  -  CH,  -  CH,  -  COCI     Eb    i  27-128» 
CH»  =  CH   . 128» 


CHj-CHî-CHi-CH^-CiX  Eb.  140° 

0» 
CHj  =  CH- 440» 

CH3-CH2-CH2-CH,-C0(0H)        El..  185» 
CHj  =  CN- 187»  / 

CH^-CHs-CHa-CHa-COtOCsHB)    Éh.  144«  \ 

)  +  0» 
CH,  =  CH- 144°  / 

L'acide  allyl-acétique  s'ajoute  à  l'acide  hypochloreux. 
Il  en  résulte  un  acide  chloro-oxy-valérique  (HO)  CIC3H-; 

Ô""'    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  4 


(  SO) 
-CH2-C0(0H).   Celui-ci  se   présente  sous  forme  d'un 
liquide  incolore,  plus  ou  moins  épais,  plus  dense  que 
l'eau  et  peu  soluble  dans  celle-ci. 

Ce  corps  n'est  pas  distillable.  La  chaleur  le  décompose 
en  dégageant  de  l'acide  chlorhydrique. 

L'analyse  de  ce  corps  a  donné  les  résultats  suivants  : 

Chlore  "/o 
Substance.  AgCl.  Trouvé.        Calculé. 

I    .     .     .       Os%l9G5       Og',1839       ^23.22  \ 

II    .     .     .       06%2900       0g^5048       23.55 


)  23.02 


Ce  que  l'on  sait  de  la  nature  des  produits  d'addition 
de  l'acide  (HO)  Cl  au  propyléne  CH^j  =  CH  -  CH3  et  aux 
composés  aUyiiques  CHo  =  CH  -  CH^X  en  général  (*), 
autorise  à  attribuer  à  cet  acide  chloro-oxy-valérique 
la  constitution  suivante  :  CH.2(0H)  -  CHCl  -  CH.2  -  CHw2 
-CO(OH). 

L'allyl-acétylo-acétate  d'éthyle  s'ajoute  avec  facilité  au 
chlorure  d'iode,  en  solution  aqueuse,  en  dégageant  une 
quantité  de  chaleur  appréciable.  L'éther,  d'abord  plus 
léger  que  l'eau,  ne  tarde  pas  à  tomber  au  fond  de  celle-ci 
sous  forme  d'une  huile  épaisse,  qui  se  colore  en  brun 
dès  l'instant  où  il  y  a  excès  de  ICI. 

Cette  huile,  après  avoir  été  lavée  à  l'eau  alcalinisée 
pour  la  décolorer  complètement,  placée  dans  un  exsicca- 
teur,  ne  tarde  pas  à  se  prendre  en  cristaux.  Ceux-ci 
fondent  à(>l°;  plus  haut,  ils  se  décomposent. 


(*)  Voir  Bull,  de  L'Acaii.  roy.  de  Belgique,  2»  série,  t.  XXXVII, 
pp.  357  et  suiv.  (année  1874).  —  Comptes  rendus,  etc.,  t.  LXXXII, 
p.  1266  (année  1876j. 


(  m  ^ 


j 

Son  analyse  a  fourni  les  chiffres  suivants  : 

Cl  +  I. 
Substance.  AgjlICl).  Trouvé.        Calculé. 


48.79 


1    .     .     .       0g%1522       0e%1720       48.42 
Il    .     .     .       0g^^5H       0e',U87       48.74 

li.  —   Sur  l'allyl-acétone 
C:,Hs-CH.,-C0-CH3. 

L'auteur  s'est  d'abord  occupé  d'améliorer  la  méthode 
de  préparation  de  ce  composé.  Au  lieu  d'employer  la 
potasse  en  solution  alcoolique,  il  a  eu  l'idée  de  faire 
usage  d'une  solution  étendue  de  carbonate  de  potassium. 
Une  solution  de  carbonate  bipotassique  équivaut,  en 
elfet,  à  une  solution  de  KOH  et  de  KHCO5;  or,  c'est  sous 
l'action  des  alcalis  en  solution  étendue  que  s'opère  surtout, 
selon  M.  VVislicenus,  le  dédoublement  des  dérivés  acéti/lo- 
acétiques  avec  formation  d'acétone.  L'expérience  a  con- 
firmé ses  prévisions.  Dans  ces  conditions,  presque  tout 
l'allyl-acétylo-acétate  d'éthyle  se  transforme  en  allyl- 
acétone.  11  suftît  de  faire  bouillir  dans  un  appareil  à 
reflux.  Il  ne  se  forme  pas,  ou  du  moins  très  peu,  d'acide 
allyl-acétique,  le  carbonate  de  potassium  étant  trop  peu 
énergique  pour  déterminer  la  scission  du  noyau  jioiyiai- 
boné  C4  du  côté  -  CO. 

Dans  ce  même  ordre  d'idées,  l'auteur  a  essayé  avec 
succès  l'action  d'autres  sels  à  réaction  basique,  tels  que 
KCN,  K5PO4.  etc.,  sur  l'allvl-acétylo-acétate  d'éthyle. 
Celui-ci  a  fourni  abondamment  de  l'allyl-acétone.  Il  sulïit 


(  32  ) 

même  de  le  chauffer  en  vase  clos  pendant  quelques 
heures,  avec  de  l'eau,  vers  480",  pour  opérer  ce  dédou- 
blement qui,  dans  ces  conditions,  reste  toutefois  incom- 
plet. 

L'allyl-acétone  se  comhine  aisément  et  vivement  avec 
l'acide  hypochloreux.  Il  en  résulte  une  chlorhydrine 
acetonique  répondant  à  la  formule 

(HO)Cl  -  QHb  -  CH,  -  CO  -  CH,. 

Elle  a  fourni  à  l'analyse  les  chiffres  suivants  : 

Chlore  »/o 
Substance.  AgCl.  Trouvé.        Calculé. 

1    .     .     .       Ok',2152       0g^2O27       25.49  v 

)  25.66 
II    .     .    .      0«^2512      ()ir^2572       23.40  / 

Ce  corps  constitue  un  liquide  incolore,  épais  et  vis- 
queux, plus  dense  que  l'eau  au  fond  de  laquelle  il 
tombe  et  qui  le  dissout  fort  peu,  non  distillable  sous  la 
pression  ordinaire. 

De  même  que  les  composés  d'addition  de  l'acide 
(OH)  Cl  aux  composés  allyliques,  il  doit  renfermer  le  sys- 
tème (H0)CH2  -  CHCl.  L'auteur  n'a  pas  réussi,  sous  l'ac- 
tion des  alcalis  caustiques,  à  en  obtenir  l'oxyde  corres- 
pondant, de  la  formule 

CHî  -  CO  -  CH,  -  CH„  -  CH  -  CH,, 
0 

à  la  fois  acétone  et  oxyde  glycolique. 


(  S5) 

C.  —  Acide  cro tonique. 
CH5-CH-CH-CO1OH). 

L'auteur  s'est  encore  occupé  des  produits  cristallins 
d'addition  de  l'acide  hypochloreux  et  du  chlorure  d'iode 
à  l'acide  crotonique  ordinaire  (fus.  72"). 

Diverses  circonstances  l'ont  empêché  de  continuer 
cette  étude,  que  je  me  propose  de  faire  reprendre  dans 
mon  laboratoire. 

I).  —  Sur  l'acide  fumarique. 

Le  fumarate  d'éthyle  (*)  ne  se  combine  pas  avec  l'acide 
hypochloreux  en  solution  aqueuse. 

Le  liquide,  mélange  de  l'éther  fumarique  et  de  la  solu- 
tion hypochloreuse,  a  été  abandonné  à  lui-même,  à  la 
température  ordinaire,  dans  l'obscurité.  Après  quelques 
jours,  le  fumarate  d'éthyle  avait  disparu  et  s'était  trans- 
formé en  une  masse  semi-solide.  En  même  temps,  une 
notable  pression  s'était  produite  dans  le  flacon. 

Le  produit  formé  n'était  autre  que  du  succinate  d'éthyle 
bichloré  C^H2CK2  -  (CO  -  OC^H^)^,  qui  s'obtient  cristal- 
lisé dans  le  sulfure  de  carbone  en  longues  aiguilles 
incolores,  fusibles  à  57°. 


(*)  Éb.   220",   produit  de  l'action   du  chlorure   de  fumaryle   sur 
l'alcool. 


(Si) 
Leur  analyse  a  donné  les  chiffres  suivants  : 


Substance. 

AgCI. 

Chlore  •/ 

I.    .   . 

0g%2121 

06S2493 

29.07 

I.    .    . 

0KM620 

08% 1921 

29.33 

Le  succinale  d'éthyle  bichloré  en  demande  29.21  *>/„. 
Dans  le  produit  d'addition  de  (HO)  Cl  au  fumarate 
d'éthyle,  il  ne  doit  s'en  trouver  que  15.84  %. 

Il  est  à  remarquer  que  le  succinate  d'éthyle  bibromé 
fond,  selon  Kekulé,  à  58°. 

Il  a  été  constaté  également  que  le  fumarate  d'éthyle  ne 
se  combine  pas  non  plus  avec  le  chlorure  d'iode  en  solu- 
tion aqueuse. 

Le  fumarate  d'éthyle  (C2H:,0)GO-CH=CH-CO(OC2H;i) 
n'est  autre  chose  que  l'éthylène  bicarboxyl-éthylé  symé- 
trique. 

Si  l'on  se  rappelle  avec  quelle  facilité  ces  deux 
réactifs  (HO)  Cl  et  ICI  se  combinent  avec  l'éthylène  lui- 
même,  on  voit  combien  l'intensité  du  pouvoir  additionnel 
de  cet  hydrocarbure  est  diminuée  par  la  disparition 
d'une  partie  de  l'hydrogène  et  son  remplacement  par 
des  groupements  négatifs,  tels  que  -  C0(0C2H3). 

.Je  ferai  remarquer  à  cette  occasion  que  j'avais  constaté 
moi-même  auparavant  que  l'éthylène  perchloré  CI^C 
=  CCI2  'le  se  combine  pas  ii  l'acide  hypochloreux;  il  en 
est  transformé,  à  la  longue,  dans  l'obscurité,  en  éthane 
perchloré  CI3C  -  CCI 3. 

L'origine  du  chlore  dans  ces  circonstances  est  évidente. 
L'influence  des  éléments  étrangers  sur  les  aptitudes 
réactionnelles  du  carbone  ne  l'est  pas  moins. 


(  '^5  ) 


Quelques  faits  relatifs  à  la  décharge  produite  par  la  radia- 
tion infra-électrique;  par  P.  De  Heen,  membre  de 
l'Académie. 

Nous  avons  montré  antérieurement  que  la  décharge 
d'un  conducteur  soumis  à  une  radiation  infra-électrique 
se  produisait  en  grande  partie  par  la  rencontre  de  ces 
rayons  avec  les  lignes  de  force  du  conducteur;  mais  on 
peut  se  demander  si  l'énergie  électrique  est,  par  suite  de 
cette  circonstance,  dissipée  dans  l'atmosphère,  ou  bien  si 
elle  se  perd  en  prenant  pour  canal  la  source  de  radiations 
elle-même.  Les  expériences  que  nous  allons  indiquer 
montrent  que  les  deux  modes  de  dissipation  paraissent 
se  produire  simultanément. 

Nous  nous  sommes  d'abord  servi  d'un  brûleur  de  Bun- 
sen, que  nous  avons  placé  à  35  centimètres  environ  de 
notre  électroscope  à  balles  de  sureau  décrit  précédem- 
ment, et  nous  avons  observé  que  la  décharge  se  produit 
pour  ainsi  dire  instantanément  lorsque  le  brûleur  est  en 
communication  avec  le  sol;  si,  au  contraire,  on  prend  la  pré- 
caution de  l'isoler  en  le  disposant  sur  une  tablette  suspendue 
à  l'aide  de  fils  de  soie,  la  décharge  se  produit  lentement. 

Il  résulte  de  cette  observation  que  dans  le  deuxième  cas 
la  dissipation  se  produit  exclusivement  par  l'intermédiaire 
de  l'atmosphère  ambiante,  alors  que  dans  le  premier  cas  la 
source  de  radiations  a  également  servi  de  véhicule  à  V électricité. 

Afin  de  nous  en  assurer,  nous  avons  disposé  la  lampe 
sur  un  électroscope  dont  la  feuille  d'or  est  suspendue 
entre  les  pôles  d'une  pile  sèche,  et  nous  avons  remarqué 


(56  ) 

que  celui-ci  s'électrise  sous  l'acliou  de  l'éleclroscope  à 
balles  de  sureau;  le  signe  est  le  même. 

Au  lieu  de  se  servir  du  brûleur,  on  peut  utiliser  une 
spirale  en  fil  de  platine  que  l'on  chaulie  au  rouge  et  que 
l'on  dispose  ensuite  sur  l'électroscope. 

La  radiation  infra-électrique  de  Rôntgen  donne  lieu  à 
une  observation  absolument  identique,  bien  que  le  phé- 
nomène soit  moins  accentué.  Alin  de  le  montrer,  nous 
nous  sommes  servi  de  la  disposition  (fig.  4). 


/ 


P 


"/■/ 


VV '/■'/'. 


Fig.  \. 


En  A  est  le  tube  à  rayons  X,  placé  à  42  centimètres 
d'un  écran  en  plomb  P  de  1  x0"',66,  percé  d'une  ouverture 
circulaire  de  10  centimètres;  vis-à-vis  de  cette  ouverture, 
du  côté  du  tube,  se  trouve  une  feuille  d'étain  E  dont  les 
bords  ont  été  repliés.  Cette  feuille  est  suspendue  à  l'aide 


(57  ) 

fie  deux  lils  de  soie  /,  et  à  13  centimètres  de  récran  P  se 
trouve  l'éleetroscope  à  balles  de  sureau  B. 

Dans  ces  conditions,  la  feuille  d'étain  E  joue  le  rôle  de 
foyer  d'ébranlement  de  l'éther,  c'est-à-dire  de  la  lampe 
dans  la  première  expérience;  aussi  observe-t-on  que 
lorsque  la  feuille  est  isolée,  la  décharge  est  plus  lente  que 
si  celle-ci  est  en  communication  avec  le  sol. 

Voici  les  séries  d'observations  que  nous  avons  réalisées; 
elles  indiquent  le  temps  de  la  décharge,  en  secondes. 

Nous  avons  observé  alternativement,  en  touchant  simul- 
tanément la  feuille  E  et  l'écran  P,  et  en  laissant  la  feuille 
E  isolée. 


PREMIKRE 

SÉRIE, 

Keuille 

E 

isolée. 

Qon  isolée. 

17" 

13" 

^0" 

1C" 

18" 

15" 

:20" 

15" 

21" 

16" 

25" 

17" 

26" 

20" 

DELIXIÈME 

SÉRIE 

Feuille 

E 

isolée. 

non  isolée. 

14" 

12" 

U" 

II" 

15" 

12" 

W 

11" 

(  S8) 


TROISIÈME 

SÉRIE. 

Feuille 

E 

isolée. 

non 

isolée 

15" 

9.5" 

12" 

9' 

On  voit  que  la  décharge  se  produit  toujours  plus  lente- 
ment lorsque  le  foyer  d'ébranlement  est  isolé. 

La  deuxième  expérience  peut  également  se  réaliser 
avec  la  radiation  Rontgen.  A  cet  etïet,  au  lieu  de  dispo- 
ser sur  l'électroscope  le  bec  de  Bunsen,  nous  avons  disposé 
sur  celui-ci  un  cadre  C  (lig.  :2)  sur  lequel  était  tendu  une 


FiG.  2. 


feuille  d'étain  ayant  0'",60  x  0™,oO;  un  tube  de  Crookes 
fonctionnant  faiblement  était  placé  à  une  distance  suffi- 


(  39  ) 
santé  pour  éviter  une  action  électrique  sensible.  Dans  ces 
conditions,  l'écran  d'étain  joue  le  rôle  de  foyer  d'ébranle- 
ment de  l'élher,  et  si  l'on  met  en  contact  l'électroscope 
E  avec  une  bouteille  de  Leyde  chargée,  on  remarque  que 
l'électroscope  e  se  charge  d'électricité  de  même  signe, 
ainsi  que  cela  avait  lieu  pour  la  flamme. 

Nous  avons  tenu  à  indiquer  d'une  façon  détaillée  les 
résultats  de  l'expérience  et  les  dimensions  de  l'appareil, 
afin  qu'elle  puisse  être  répétée  dans  les  mêmes  condi- 
tions. Si  l'on  utilisait,  par  exemple,  un  lube  trop  fort, 
la  décharge  se  produirait  par  les  lignes  de  force  qui 
dépassent  l'écran  P,  et  l'eff'et  serait  voilé. 

L'observation  de  la  décharge  par  les  flammes  donne 
encore  lieu  aux  remarques  suivantes  :  Si  la  flamme  n'est 
pas  isolée,  la  vitesse  de  décharge  est  sensiblement  indé- 
pendante de  la  dimension  de  la  flamme. 

Afin  de  le  montrer,  nous  nous  sommes  servi  d'un  petit 
tube  métallique  percé  d'une  ouverture  ayant  une  fraction 
de  millimètre  de  diamètre.  On  pouvait  alors  faire  varier 
la  hauteur  de  la  flamme  depuis  2  millimètres  jusqu'à 
55  millimètres  de  hauteur. 

Voici  les  résultats  obtenus  : 

Temps  de  décharge. 

Flamine  Flamme 

de  de 

2  milliiiièlres  de  hauteur.       33  millimèlres  de  hauteur 

23"  23" 

2-2"  25" 

20"  25" 

21"  20' 

20"  20" 


(  60 


Si,  au  coiiliaiie,  un  fait  usage  d'une  flamme  isolée,  l;t 
vitesse  de  décharge  dépend  des  dimensions  de  la  flamme. 
Voici  les  résultats  obtenus  avec  un  bec  de  Bunsen  : 


Temps  de  décharge. 

Hauteur 

Hauteur 

Hauteur 

de  la  flamme  : 

de  la  flamme  : 

de  la  flamme 

12  centimètres. 

8  centimètres. 

2.5  centimètres. 

21" 

37" 

67" 

19" 

33" 

70" 

20" 

38" 

69" 

Si  l'on  vient  à  disposer  un  simple  fil  conducteur  C 
(fig.  3)  entre  la  flamme  et  l'électroscope,   la  vitesse  de 


Fk;.  .3. 


(  61  ) 
décharge  est  diminuée,  ainsi  que  nous  l'avions  déjà  signalé  ; 
mais  on  peut  remarquer  encore  que  cet  effet  est  à  peu 
près  indépendant  de  la  position  occupée  par  le  fil  C. 
Enfin  cet  efîet  disparaît  complètement  si  le  fil  G  est  isolé 
en  le  disposant  sur  une  lame  de  verre. 

Si  le  fil  C,  au  lieu  d'être  placé  entre  la  flamme  et  l'élec- 
troscope,  est  placé  derrière  la  flamme,  on  observe  l'eflet 
inverse.  La  décharge  est  plus  rapide  lorsque  le  fil  occupe 
cette  position  que  si  on  le  supprime.  Si  le  fil  est  isolé, 
son  influence  disparaît  comme  dans  le  premier  cas. 

Si  l'on  place  une  flamme  isolée  entre  deux  électroscopes 
chargés  de  même  nom  (fig.  4),  ces  électroscopes  échangent 


leur  énergie  comme  le  feraient  deux  corps  chauds  rayon- 
nant l'un  vers  l'autre,  et  il  en  résulte  que  la  décharge  est 
beaucoup  plus  lente  lorsque  l'on  charge  les  deux  électro- 
scopes de  la  même  électricité,  que  si  l'on  n'en  charge 
qu'un  seul. 


(  62  ) 

Les  électroscopes  étant  placés  à  56  centimètres  de  la 
flamme,  le  temps  de  décharge  était  de  90"  lorsqu'une 
charge  positive  était  communiquée  aux  deux  appareils  et 
de  44"  lorsqu'un  seul  appareil  était  chargé. 

Si  l'un  des  électroscopes  est  chargé  positivement  et 
l'autre  négativement,  la  décharge  est  au  contraire  instan- 
tanée, ainsi  que  cela  résulte  du  fait  précédent. 

Si  une  flamme  non  isolée  est  placée  dans  les  mêmes 
conditions,  on  observe  le  phénomène  inverse.  C'est  ainsi 
que  l'un  des  électroscopes,  chargé  positivement,  retombe 
en  35"  lorsque  le  second  n'est  pas  chargé.  Il  retombe 
en  65"  lorsqu'on  maintient  une  charge  négative  sur  le 
second.  Il  retombe  au  contraire  en  27"  lorsque  le 
second  est  également  chargé  positivement. 

Si  l'on  substitue  à  la  flamme  l'étincelle  d'une  bobine, 
et  si  l'on  répète  l'expérience  (fig.  4),  on  remarque  que 
celle-ci  se  comporte  comme  une  flamme  non  isolée. 


Du  tracé  tmjocardique  du  cœur  exsangue  (deuxième  note); 
par  M.  Jules  Waroux,  préparateur  de  physiologie  à 
l'Université  de  Liège. 

Dans  une  note  communiquée  à  l'Académie  royale  de 
Belgique  le  5  lévrier  1898,  nous  avons  montré  que  le 
tracé  cardiographique  du  cœur  de  Chien  exsangue  pré- 
sente la  forme  trapézoïde  ordinaire,  du  moment  que  le 
cœur  est  convenablement  nourri  par  une  circulation  de 
sang  artériel  (injecté  par  l'aorte  dans  le  système  des 
artères  coronaires). 

Le  tracé  perd  la  forme  trapézoïde  et  devient  semblable 
à  nn  tracé  de  secousse  musculaire  simple  (colline  à  som- 


(  63  ) 
met  unique)  lorsque  le  muscle  cardiaque  est  placé  dans 
de  mauvaises  conditions  de  nutrition,  par  exemple  lors- 
qu'on   interrompt   momentanément   l'arrivée    du    sang 
artériel. 


FiG.  i.  —  Cœur  de  Chien  extrait.  —  Circulation  artificielle  de  sang  artérialisé. 
—  I*inee  myocardiographique. 

Nous  ne  reviendrons  pas  en  détail  ici  sur  le  procédé 
opératoire;  nous  nous  h(U'nons  à  reproduire  (fig.  i)  un 
tracé  myocardiographique  du  cœur  exsangue  sur  lequel 
se  voient  plus  ou  moins  les  trois  ondulations  du  plateau 
systolique  et  (fig.  2)  un  tracé  montrant  la  transforma- 


FiG.  2.  —  Cœur  de  Chien  extrait.  —  Circulation  artificielle  de  sang  artérialisé. 

—  Pince  myocardiographique.  —  /,  fermeture  du  tulte  d'arrivée  du_sang. 

—  0,  ouverture  de  ce  luhe. 


lion  graduelle  des  cardiogrammes  sous  l'influence  de  l'ar- 


(  64  ) 
rèl  de  la  circulation  artificielle.  En  /  a  lieu  cet  arrêt  par 
suite  de  la  fermeture  du  tube  d'arrivée  du  sang.  Quel- 
ques secondes  après,  le  tracé  perd  sa  forme  et  devient 
semblable  à  un  tracé  de  secousse  musculaire  simple, 
pour  reprendre  graduellement  sa  forme  primitive  après 
la  réouverture  du  tube  d'arrivée  du  sang  qui  se  fait  en  0. 

Nous  avons  repris  les  mêmes  expériences  en  faisant 
agir  sur  le  cœur  du  sang  de  Chien  soumis  au  préalable  à 
un  courant  de  CO^,  courant  qui  a  pour  effet  de  lui  enle- 
ver une  notable  portion  de  son  oxygène  et  de  le  charger 
de  C0-.  On  laisse  circuler  CO-  dans  le  liquide  sanguin 
jusqu'à  ce  que  sa  coloration  rouge  vif  soit  devenue  brun 
rougeâtre,  jusqu'à  ce  qu'il  ait  pris,  en  un  mot,  l'aspect  du 
sang  veineux.  Dans  ces  expériences,  nous  avons  fait  cir- 
culer alternativement  dans  le  cœur  du  sang  artérialisé  et 
du  sang  empoisonné  par  CO^,  et  nous  avons  recueilli  des 
tracés  correspondant  à  ces  deux  circulations. 

A  cet  effet,  l'appareil  primitif  a  été  un  peu  modifié.  Au 
lieu  d'une  seule  bouteille  contenant  le  sang  à  distribuer, 
nous  en  avons  employé  deux,  une  pour  chaque  espèce  de 
sang.  Chacune  de  ces  bouteilles  porte  à  sa  partie  supé- 
rieure un  manomètre  et  une  branche  de  bifurcation  du 
tube  qui  amenait  primitivement  la  pression  de  la  trompe 
de  Muencke  à  la  première  bouteille.  Ces  deux  espèces  de 
sang  sont  amenées  au  cœur  par  deux  tubes  en  caoutchouc 
partant  de  la  partie  inférieure  de  chaque  bouteille  et  se 
rendant  à  une  canule  en  verre  en  Y  placée  dans  l'aorte. 
La  pression  agissant  sur  les  liquides,  en  ouvrant  alter- 
nativement l'un  ou  l'autre  de  ces  tubes,  on  peut  donc 
faire  arriver  dans  le  système  coronaire  tantôt  du  sang 
artériel,  tantôt  du  sang  empoisonné  par  C0-. 


(63  ) 

Comme  nous  l'avons  déjà  indiqué  dans  la  noie  précé- 
dente, les  précautions  les  plus  minutieuses  doivent  être 
prises  pour  éviter  que  des  bulles  d'air  ne  pénètrent, 
poussées  par  le  courant  sanguin,  dans  les  petites  artères 
du  cœur. 

Pour  les  écarter  dans  ce  cas,  le  meilleur  moyen  con- 
siste à  fixer  le  tube  amenant  le  sang  artériel  à  l'une  des 
branches  de  la  canule  de  l'aorte,  l'autre  branche  étant 
ouverte,  après  avoir  auparavant  laissé  s'écouler  un  peu 
de  liquide  sanguin  qui  entraîne  l'air  du  tube.  Ce  liquide 
continuant  à  s'écouler,  sous  l'intluence  de  la  pression 
qu'on  lui  a  communiquée,  pénètre  dans  la  canule  et  sort 
par  l'autre  branche,  en  entraînant  l'air  qu'elle  contient; 
on  ouvre  alors  le  tube  à  sang  chargé  de  CO-,  celui-ci 
s'écoule  en  entraînant  également  l'air  du  tube,  et  on  fixe 
le  tube  sur  la  deuxième  branche  de  la  canule,  en  laissant 
se  rencontrer  les  deux  courants  sanguins;  puis  on  ferme 
immédiatement  le  tube  à  sang  empoisonné  au  moyen 
d'une  vis  à  pression  ou  par  tout  autre  système. 

Le  sang  artériel  pénètre  de  la  sorte  dans  l'aorte  et  les 
coronaires,  et  le  cœur  commence  à  battre  en  donnant  un 
tracé  à  forme  trapézoïde;  si  l'on  change  la  circulation,  si 
l'on  fait  arriver  au  cœur  le  sang  empoisonné  par  CO-,  le 
tracé  normal  se  transforme  en  un  tracé  à  secousses 
simples,  comme  le  montrent  les  exemples  que  nous  don- 
nons. 

La  figure  5  représente  le  tracé  pris  sur  un  cœur  de 
Chien  exsangue  animé  par  une  circulation  artificielle  de 
sang  artériel,  au  moyen  de  la  pince  myocardiographique. 
Seize  secondes  après  l'établissement  de  la  circulation  de 
sang    à   CO-,   le    tracé    s'est   transformé   en   tracé   de 

O'""    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  5 


(  66) 
secousses  simples,  comme  sous  l'influence  de  l'arrêt  de 
la  circulation  (fig.  4). 


}?.i.^i 


J\J\I\!\P 


FiG.  3.  —  Cœur  de  Chien  extrait. 
Circulation  artificielle  artérielle. 
Pince  myocardiograpliique. 


FiG.  4.  —  Circulation  artificielle  de 
sang  à  CO'-.  —  46  secondes  après  son 
établissement. 


''/•2.^8 


FiG.  5.  —  60  secondes  après  le  retour     FiG.  6.  —  3  minutes  20  secondes  après 
de  la  circulation  artérielle.  —  Le        le  retour  de  la  circulation  artérielle, 
tracé  reste  tel  encore  pendant  2  mi- 
nutes 20  secondes. 

Cependant  les  secousses  vont  en  diminuant  dans 
l'exemple  qui  nous  occupe,  bien  que  la  circulation  arté- 
rielle ait  été  rétablie,  et  60  secondes  après  ce  rétablisse- 
ment (lig.  5)  les  battements  ne  se  traduisent  plus  que 
d'une  façon  presque  imperceptible.  Cet  état  se  main- 
tient pendant  2  minutes  20  secondes;  mais  5  minutes 
20  secondes  après  le  retour  de  la  circulation  artérielle, 
le  tracé  a  repris  les  caractères  qu'il  avait  avant  l'expé- 
rience. Il  a  fallu  dans  ce  cas  3  minutes  20  secondes  d'une 
circulation  artérielle  pour  abolir  les  effets  d'une  circula- 
tion de  sang  à  CO-  de  1(>  secondes. 


(67  ) 

Le  cœur,  sous  l'iniluence  nocive  de  ce  sang,  est  devenu 
très  malade,  puisqu'il  a  pour  ainsi  dire  suspendu  ses 
battements  pendant  5  minutes.  Cette  nocuité  est  trop 
forte.  En  diluant  1  volume  de  ce  sang  chargé  de  CO- 
avec  2  ou  même  5  volumes  de  sang  artériel,  on  obtient 
un  mélange  sutïisamnient  puissant  pour  produire  un 
changement  dans  les  contractions  du  cœur,  se  manifes- 
tant par  des  modifications  du  tracé,  sans  amener  son 
arrêt. 


FiG.  1.  —  Cœur  de  Chien  extrait.  — 
Circulation  artérielle.  —  Pince  myo- 
cardiographique. 


FiG.  8.  —  Circulation  de  sang  chargé 
de  00-  (mélange).  —  7  secondesaprès 
son  établissement. 


FiG.  9.  —  21  secondes  après  le  retour  de  la  circulation  artérielle. 

Les  figures  7,  8,  9  et  les  figures  10,   11,   12  ont  été 
obtenues  en  utilisant  un  mélange  semblable. 


(  68) 


FiG.  10.  —  Cœur  de  Chien  extrait.  —  Pince  myocanliographique 
—  Circulation  artérielle. 


FiG.  11.  —  ^3  secondes  après  l'établissement  de  la  circulation 
de  sany  à  CO-   mélange'. 


FlG.  12.  —  28  secondes  après  le  retour  de  la  circulation  artérielle. 


((i9) 
La  ligure  13  l'eprësente  encore  un  tracé  de  contraction 
(lu  muscle  cardiaque  animé  par  une  circulation  artérielle; 
sur  quelques-unes  des  systoles,  notamment  sur  les  pre- 
mière, septième  et  huitième,  on  remarque  bien  les  trois 
ondulations  du  plateau  syslolique.  Vingt  secondes  après 
l'établissement  de  la  circulation  de  sangà  CO-,  la  secousse 


FlG.  13.  —  Cœur  de  Chien  extrait.  —  Pince  myocardiographique. 
—  Circulation  artérielle. 


est  devenue  simple  (lîg.  14).  Ce  qu'il  y  a  de  particulier 
dans  cet  exemple,  c'est  que,  après  le  retour  de  la  circu- 
lation artérielle,  le  tracé  ne  redevient  normal  qu'au  bout 
de  90  secondes  (lig.  17),  bien  que  nous  ayons  employé  le 
mélange  et  non  du  sang  empoisonné  pur.  Cependant, 
avant  le  rétablissement  complet  du  tracé,  on  peut  remar- 
quer à  la  22*^  seconde  (lîg.  15),  à  la  oS*"  seconde  (fig.  16), 
des  secousses  normales  au  milieu  des  secousses  simples 
d'énergie  plus  ou  moins  grande.  Ce  que  l'on  peut  encore 
remarquer  sur  le  tracé  rétabli,  c'est  le  ralentissement  des 
pulsations  et  la  diminution  de  leur  énergie  :  il  y  a  main- 
tenant une  pulsation  par  seconde;  avant  l'expérience,  il  y 
en  avait  deux.  On  peut  attribuer  ce  retard  dans  le  réta- 
blissement du  tracé  normal  par  la  circulation  artérielle. 


(  70 


^20        il 

A^  2. 

5-5-98. 

im 

XiUlX 

:b. 

FiG.  14.  —  20  secondes  après  l'établissement  de  la  circulation 
de  sang  à  f.O*  (mélange). 


FiG.  15.  —  22  secondes  après  le  retour  de  la  circulation  anérielle. 


FiG.  Itî.  —  33  secondes  après  le  retour  de  la  circulation  artérielle 


(71  ) 

à  la  grande  fatigue  du  cœur  sur  lequel  plusieurs  expé- 
riences de  ce  genre  avaient  été  faites  ;  cependant,  comme 
le  montrent  les  exemples,  on  peut  dire  que  les  effets 
de  la  circulation  de  sang 
empoisonné  par  CO-  se  font 
plus  vite  sentir  que  les  effets 
du  rétablissement  de  la  cir- 
culation de  sang  artérialisé. 
Nous  avons  également 
pris  le  cœur  du  Lapin 
comme  sujet  d'expérience; 
mais  celui-ci  ne  se  prête 
pas  aussi  bien  à  ces  recher- 
ches que  le  cœur  du  Chien. 
Nous  avons  réussi  trois  fois 
sur  cinq  à  produire  les  con- 
tractions d'un  cœur  de  La- 
pin, en  faisant  circuler  dans 
ses  artères  coronaires  du 
sang  de  Cheval,  mais  étendu 
d'un  volume  égal  de  solu- 
tion physiologique  à  9  °/oo. 
Au  début,  nous  avions  fait, 
sans  résultat,  quelques  ex- 
périences sur  le  cœur  de 
Lapin  (note  du  5  février 
1898);  nous  avions  alors 
employé  le  sang  de  Cheval 
pur.  Il  est  possible  qu'en 
utilisant  le  sang  de  Lapin, 
on  augmente  considérable- 
ment les  chances  de  succès. 


(  72) 
La  figure  18  représeiUe  un  tracé  pris  sur  le  cœur  du 
Lapin  au  moyen  du  cardiograplie;  on  y  remarque  très  net- 
tement la  forme  Irapézoïde. 


Fk;.  18.  —  Cœur  de  Lapin.  —  Circulation  artificielle 
de  sang  artériel.  —  Cardiographe. 

Le  cœur  de  Lapin,  comme  le  cœur  de  Chien,  convena- 
blement nourri,  fournit  donc  des  tracés  de  cette  forme. 

Travail  de  l'Institut  de  physiologie 
de  l'Université  de  Liège. 


(  73 


ri.AS!^E  BES  LKITTKKS. 


Séance  du  4  juillel  1898. 

M.  le  baron  Ém.  de  Borchgrave,  doyen  d'ancienneté, 
occupe  le  fauteuil. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents:  MM.  S.  Bormans,  Cli.  Piot,  Ch.  Potvin, 
J.  Stecher,  T.-J.  Lamy,  G.  Tiberghien,  L.  Vanderkin- 
dere,  le  comte  Goblet  d'Alviella,  Ad.  Prins,  J.  Vuylsteke, 
A.  Giron,  le  baron  de  ChestretdeHanett'e,  Paul  Fredericq, 
God.  Kurth,  Ch.  Mesdach  de  ter  Kiele,  H.  Denis,  le 
chevalier  Ed.  Descamps,  Georges  Monchamp,  D.  Sleeckx, 
P.  Thomas,  Ern.  Discailles,  Ch.  Duvivier,  membres;  J.-C. 
Vollgraff,  associé;  V.  Brants,  M.  Wilmotte,  H.  Pirenne, 
Ern.  Gossart  et  P.  De  Paepe,  correspondants. 

—  MM.  Vander  Haeghen,  Banning  et  J.  Leclercq  font 
motiver  leur  absence. 


CORBESPONDANCE. 


MM.  Pirenne,  correspondant;  P.  Meyer,  JohnWestlake 
et  L.  Bodio,  associés,  remercient  pour  leurs  diplômes. 

—  M.  Max  Millier  fait  hommage  d'une  brochure  publiée 
en  1893,  à  l'occasion  de  son  oO®  anniversaire  de  docteur 


(  74   ) 
de  l'Université  de  Leipzig  et  de  son  70*  anniversaire  de 
naissance. 

—  M.  Brants  présente,  pour  l'vlnwMaîre,  sa  notice  nécro- 
logique sur  Pierre  Willems,  ancien  membre  de  la  Classe. 
—  Remerciements. 

—  Hommages  d'ouvrages  : 

1°  Een  Noord-Nederlander  over  zijn  omreisje  door  Belgié 
in  1823;  notice  par  P.  Fredericq  (avec  une  note  qui 
figure  ci-après)  ; 

2°  Chartes  du  comté  de  Hainaut  de  l'an  1200.  Reproduc- 
tion des  originaux,  etc.  (publication  extraordinaire  du 
Cercle  arcbéologique  de  Mons)  ;  par  Léopold  Devillers 
(présenté  par  M.  Edm.  Marchai,  avec  une  note  qui  figure 
ci-après)  ; 

3°  Les  agglomérations  urbaines;  par  le  marquis  de  Na- 
daillac,  associé; 

4°  Poésies  chrétiennes  {ô"  partie)  ;  par  le  chanoine  Tous- 
saint; 

5°  Actes  du  Congrès  féministe  international  de  Bruxelles, 
1897;  par  M""  Marie  Popelin; 

6"  Bibliographie  des  ouvrages  arabes  (5"  livraison)  ;  par 
Victor  Chauvin  (présenté  par  M.  Stecher,  avec  une  note 
qui  figure  ci-après)  ; 

7"  Le  vers  français  et  les  prosodies  modernes  ;  par  Jules 
Guilliaume  (présenté  par  M.  Discailles,  avec  une  note  qui 
figure  ci-après)  ; 

8°  a)  Les  origines  de  la  psychologie  contemporaine;  h)  La 
définition  philosophique  de  la  vie  {^"éàlhon);  par  D.  Mercier. 

—  Remerciements. 


(73  ) 


NOTES    BIBLIOGRAPHIQUES. 


Messieurs, 

J'ai  l'honneur  d'offrir  à  la  Classe  des  lettres  une  notice 
tirée  à  part  de  la  revue  mensuelle  publiée  par  la  société 
Het  Willems-Fonds  (1);  cette  brochure  contient  les  notes 
et  impressions  de  voyage  d'un  Hollandais  qui  visita  en 
1823,  avec  sa  femme  et  sa  nièce,  la  plupart  des  villes 
flamandes  et  wallonnes. 

Il  s'appelait  Isaac  Verwey,  était  originaire  de  Dordrecht 
et  remplissait  les  fonctions  de  greffier  du  tribunal  à 
Sneek,  en  Frise.  Son  naïf  journal  de  voyage  nous  donne 
des  renseignements  vraiment  pittoresques  sur  l'état  de 
la  Belgique,  une  dizaine  d'années  après  son  annexion  à 
la  Hollande. 

C'est  par  curiosité  pure  et  par  désir  de  voyager,  dit-il, 
qu'il  songea  à  aller  explorer  en  famille  «  les  ci-devant 
Pays-Bas  autrichiens  ».  Parti  de  Dordrecht  à  7  heures 
du  matin,  le  G  septembre  1823,  par  le  bateau  à  vapeur 
De  Neiferlander,  il  débarque  l'après-midi  à  i  heures  sur  le 


(1)  Een  Noord-Nederlander  over  x,ijn  omreisje  door  Uelgië  in  1823. 
(TuDSCHRiFT  VAN  HET  WiLLEMS-FoNDs,  3''e  jaai'gang,  8"e  aflevering, 
.luni  1898,  bl.  65-93.)  Le  manuscrit  a  été  trouvé  à  Dordrecht  dans  des 
papiers  de  famille.  J'en  dois  la  communication  à  M.  le  D""  Kiewiet  de 
.longe,  président  du  XXIV»  Congrès  néorla,ndais.  tenu  dans  cette  ville 
en  1897. 


(  76) 
<juai  d'Anvers  et  t'ait  le  reste  de  son  voyage  au  moyen 
d'une  voiture  de  louage,  qu'il  paie  24  francs  par  jour, 
tout  compris,  et  qui  lui  est  fournie  par  M.  Loos,  l'un 
des  fondateurs  des  messageries  Van  Gend  et  Loos.  C'est 
ainsi  qu'il  visite  successivement  Malines,  Louvain,  Tirle- 
mont,  Saint-Trond,  Liège,  Chaudfontaine,  Huy,  Namur, 
Dinant,  le  champ  de  bataille  de  Waterloo,  Bruxelles, 
Alost,  Gand  et  Saint-Nicolas.  Le  24  septembre,  le  brave 
greffier  frison  était  de  retour  à  Dordrecht  avec  sa  femme 
et  sa  nièce,  très  satisfaits  tous  les  trois  de  leur  excursion 
de  seize  jours  en  Belgique. 

Habitant  des  régions  basses  de  Hollande  et  de  Frise 
aux  grands  pâturages  qui  s'étendent  à  perte  de  vue  sans 
la  moindre  ondulation  de  terrain,  Isaac  Verwey  est  natu- 
rellement émerveillé  à  la  vue  des  collines  et  des  rochers 
des  bords  de  la  Meuse  et  de  la  Vesdre. 

Parmi  les  monuments,  il  admire  surtout  la  cathédrale 
d'Anvers,  Sainte-Gudule  à  Bruxelles  avec  ses  superbes 
vitraux  qui  lui  rappellent  ceux  de  Gouda,  l'hôtel  de  ville 
de  Louvain  et  l'intérieur  de  Saint-Bavon  à  Gand,  dont 
les  sculptures  de  marbre  l'ont  surtout  frappé,  tandis  qu'il 
ne  dit  mot  des  tableaux.  Au  contraire,  il  s'étend  avec 
complaisance  sur  ceux  de  Saint-Michel  à  Gand,  où 
V Annonciation  de  Lens,  qui  venait  de  mourir  à  Bruxelles 
âgé  de  85  ans,  lui  arrache  des  cris  d'admiration.  A 
Bruxelles,  il  apprécie  surtout  le  nouveau  palais  des 
Chambres  ou  États  généraux. 

Les  trois  universités  fondées  en  1817  attirent  spéciale- 
ment son  attention.  A  Louvain,  il  admire  le  nouvel 
Hortus  botanicus  et  constate  avec  satisfaction  et  surprise 
la  grande  propreté  des  auditoires,  qu'on  blanchit  chaque 
année  pendant  les  vacances.  Les  collections  scientifiques 


(  77  ) 
sont  pauvres,  comme  il  est  naturel  pour  une  université 
si  récente;  mais  on  y  trouve  déjà  un  fonds  formé  par  les 
doubles  des  collections  de  Leide.  A  la  Bibliothèque,  il 
remarque  une  série  de  livres  marqués  au  dos  de  la  men- 
tion Ilel  (Enfer);  ce  sont  des  ouvrages  condamnés  par 
VIndex  et  provenant  de  la  Bibliothèque  de  l'ancienne 
université  supprimée  par  les  Français  après  la  conquête 
de  la  Belgique. 

A  Liège,  où  il  visite  avec  ébahissement  la  fonderie  de 
canons  et  une  houillère  aux  installations  bien  primitives, 
comparées  à  celles  d'aujourd'hui,  il  note  de  nouveau  la 
propreté  des  auditoires  de  l'Université,  le  jardin  bota- 
nique et  les  installations  scientiliques  plus  spacieuses 
qu'à  Louvain,  vu  le  nombre  plus  considérable  d'étu- 
diants. Au  cabinet  d'histoire  naturelle,  il  fait  la  connais- 
sance du  professeur  Gaede  (1),  un  Danois  protestant,  qui 
lui  fait  voir  un  énorme  loup  empaillé,  la  terreur  des 
environs  de  Liège  durant  l'hiver  précédent. 

A  Gand,  il  s'extasie  devant  «  le  célèbre  jardin  bota- 
nique »  avec  ses  grandes  serres  de  fer  en  construction 
comme  celles  de  Louvain  et  ses  bustes  de  botanistes 
célèbres;  il  loue  la  Bibliothèque  où  il  constate  que  la 
collection  des  livres  de  jurisprudence,  sa  spécialité,  est 
bien  fournie,  et  où  il  s'émerveille  à  la  vue  du  pupitre 
mécanique  permettant  de  consulter  une  foule  de  livres 
ouverts  en  même  temps.  Puis  il  va  visiter  le  nouveau 
Palais  de  l'Université,  où  les  collections  d'histoire  naturelle 
sont  admirablement   installées   et   où  la  monumentale 


(1)  Voir,  sur  cette  curieuse  figure  de'  savant,  A.  Le  Koy,  Liber 
memorialis  de  l'Université  de  Liège,  pp.  331-334. 


(78) 

Rotonde,  qui  est  presque  achevée,  produit  sur  lui  une 
grande  impression. 

On  voit  que  ces  trois  universités,  créations  admirables 
du  roi  Guillaume,  lui  tiennent  à  cœur  et  qu'il  en  est 
fier. 

Parmi  les  choses  curieuses  qui  le  frappent,  il  note  un 
grand  local  (Wafelhuis),  où  le  beau  monde  d'Anvers 
s'écrase  le  dimanche  pour  manger  des  gaufres,  boire 
delà  bière,  fumer,  se  promener  lentement  et  s'étouffer; 
il  croit  y  avoir  vu  réuni,  dans  la  grande  salle  et  dans 
les  salles  adjacentes,  environ  un  millier  de  personnes. 
A  Malines,  il  admire  les  nombreux  ornements  dorés 
aux  façades  des  vieilles  maisons.  A  Louvain,  il  trouve 
les  vénérables  bâtiments  des  Halles  et  de  la  caserne 
(ancien  séminaire)  envahis  par  les  échoppes  de  la  foire. 
A  Saint-Trond,  on  le  regarde  de  travers,  parce  qu'il 
verse  du  lait,  un  vendredi,  dans  son  thé.  A  Namur,  il 
va  voir  une  colline  en  mouvement,  qui  glisse  depuis  une 
couple  d'années.  Sur  l'étang  du  parc  royal  de  Laken  se 
balance  une  frégate  en  miniature.  A  Bruxelles,  il  va  voir 
jouer  ïalma  à  la  Monnaie  dans  le  rôle  de  Mahomet  de 
Voltaire  et  y  applaudit  un  virtuose  de  8  ans,  qui  joue  du 
violon  dans  les  entr'actes.  A  Gand,  il  assiste  à  la  repré- 
sentation de  la  Vestale  de  Spontini  ;  mais  on  y  siffle  si 
énergiquement  la  chanteuse,  que  la  pièce  ne  peut  être 
donnée  jusqu'au  bout. 

Parmi  toutes  les  villes  qu'il  a  visitées,  c'est  «  la  grande 
et  belle  ville  de  Gand  »  qui  semble  lui  avoir  fait  le 
plus  d'impression.  Aussi  est-ce  sur  elle  qu'il  s'étend 
avec  complaisance.  II  y  visite  la  collection  célèbre  de 
M.  Schamps,  qui  contenait  des  tableaux  dispersés  aujour- 
d'hui dans  les  plus  grands  musées,  et  celle  de  M'"*'  veuve 


(  79) 
Moysoi),  beaucoup  moins  connue,  qui  comptait,  dit-il, 
cinq  cents  tableaux  et  toute  sorte  d'antiquités.  La  prison 
de  la  Coupure  {Maison  de  force),  spécimen  unique  alors 
du  régime  pénitentiaire  perfectionné,  intéresse  très  vive- 
ment le  greffier  du  tribunal  de  Sneek,  non  moins  que  la 
citadelle  en  construction,  décrétée  par  les  Alliés  comme 
l'un  des  principaux  points  fortifiés  dirigés  contre  les 
retours  d'ambition  de  la  France  vaincue.  A  Huy,  il  avait 
visité  avec  non  moins  d'intérêt  le  fort  achevé  l'année 
précédente. 

En  protestant  fervent,  il  raille  à  l'occasion  le  culte 
catholique  et  note  soigneusement  qu'il  y  a  déjà  une  cen- 
taine de  réformés  à  Liège,  sans  compter  les  soldats  de  la 
garnison.  A  Gand,  il  assiste  au  service  protestant  et  y 
constate  la  présence  d'environ  deux  cents  fidèles,  dont  la 
moitié  est  fournie  par  la  garnison. 

Ces  notes  de  voyage,  naïvement  rédigées  au  retour, 
rendent  assez  bien  l'état  d'âme  des  Hollandais  venant 
inspecter  leur  «  accroissement  de  territoire  »  après 
Waterloo. 

L'histoire  locale  trouvera  à  y  glaner  çà  et  là  quelque 
trait  inconnu  et  curieux. 

Cet  opuscule  vient  compléter  à  propos  le  tableau  si 
pittoresque  de  la  Belgique  au  temps  du  régime  hollandais 
(]ue  nous  a  retracé  un  contemporain  flamand,  feu  l'ancien 
bourgmestre  de  Lierre,  Georges  Bergmann,  dans  ses 
mémoires  trop  peu  connus  (1). 

Paul  Fredericq. 

(1)  Vit  Vader  Bergmann's  gedenkschriften.  Gand,  J.  Vuylsteke,  1895. 


(  80) 

J'ai  riionneur  d'appeler  rattentioii  de  la  Classe  sur  la 
publication  intitulée  :  Chartes  du  comté  de  Hainaut  de 
l'an  1200.  Reproduction  des  originaux  avec  introduction, 
traduction  et  notes,  par  Léopold  Devillers,  conservateur 
des  archives  de  l'État,  à  Mons  (4). 

Cette  publication  a  le  mérite  de  faire  mieux  connaître 
deux  cbartes  des  plus  importantes  du  dépôt  des  archives 
de  l'État,  à  Mons. 

Les  chartes  du  Hainaut  de  l'an  1200  contiennent  une 
codification  fort  remarquable  pour  leur  époque.  On  la 
considère  à  juste  titre  comme  étant  l'œuvre  de  Baudouin, 
comte  (IX)  de  Flandre  et  (VI)  de  Hainaut,  et  de  ses 
légistes.  Mais  M.  Devillers  s'est  attaché  à  démontrer  que, 
dès  1171,  le  comte  Baudouin  V  de  Hainaut  publia  une 
paix  qui  contenait  le  germe  de  la  charte  pénale  de  1200. 

Chevalier  Edw.  Marchal. 


J'ai  l'honneur  de  présenter  à  la  Classe  le  tome  troi- 
sième de  la  Bibliographie  arabe  de  M.  Chauvin,  profes- 
seur à  l'Université  de  Liège.  Le  savant  chercheur  accu- 
mule ici  d'utiles  renseignements  sur  les  fabulistes  arabes, 
sur  Barlaam,  le  roman  dévot  d'origine  bouddhique,  et 
enfin  sur  Antar  et  les  romans  de  chevalerie  musul- 
mane. 

Pour  la  première  partie,  l'intérêt  dépasse  la  littérature 


(1)  Mons,  Dequesne-Masquillier,  1898,  in-fol.  Publication  extra- 
ordinaire du  Cercle  arcliéologique. 


{Si  ) 
orientale,  car  il  s'agit  principalement  de  fournir  des  docu- 
ments pour  l'étude  si  compliquée  de  la  fable  ésopique  en 
Orient.  On  sait  combien  Louqmâne,  le  Salomon  fabuliste, 
ressemble  au  fabuleux  conteur  de  Phrygie.  M.  Chauvin 
ne  réclame  que  le  mérite  de  rassembler  plus  de  détails  et 
d'instituer  des  rapprochements  suggestifs.  Quant  aux 
autres  fabulistes  arabes,  Haïqaz  et  surtout  Roustam  sont 
l'objet  de  curieuses  investigations.  Les  folkloristes  et  les 
littérateurs  seront  heureux  de  trouver  ici  un  corpus  des 
fables  ayant  cours  chez  les  Arabes.  Un  résumé  substantiel 
contient,  outre  celles  déjà  connues,  une  soixantaine  de 
fables  qu'on  n'avait  pas  encore  songé  à  extraire  des 
auteurs  arabes. 

Pour  le  Barlaam  et  Josaphat  vulgarisé  par  le  poème  de 
Gui  de  Cambrai  au  XllP  siècle,  le  savant  bibliographe 
complète  le  travail  de  Kuhn  en  ce  qui  concerne  la 
comparaison  avec  les  littératures  étrangères.  La  plu- 
part de  ces  paraboles  bouddhiques  sont  illustrées  d'iné- 
dites références. 

Même  souci  d'intégralité  et  d'exactitude  (accwraci/)  pour 
le  roman  d'Antar,dont  Voltaire  devinait  déjà  l'importance 
historique  quand  il  l'appelait  «  le  miroir  du  désert».  Nous 
trouvons  ici  tout  ce  qui  peut  aidera  pénétrer  le  plus  ancien 
poème  de  chevalerie  errante,  le  plus  fidèle  tableau  de 
l'Arabie  nomade  avant  Mahomet. 

Non  moins  intéressante  est  l'étude  instituée  sur  les 
romans  musulmans  d'Egypte,  de  Syrie  et  d'Algérie.  C'est 
le  complément  d'une  section  de  la  magnifique  bibliogra- 
phie du  D'  Ahlward. 

J.  Stecher. 


3™*    SÉRIE,    TOME    XXXVI. 


(  82  ) 


Messieurs, 


M.  Jules  Guilliaume  fait  hommage  à  l'Académie  d'un 
livre  :  Le  vers  français  et  les  prosodies  modernes,  dont  je 
demande  la  permission  de  vous  entretenir  quelques 
instants. 

Est-ce,  comme  Pasquier  l'affirme,  à  Jodelle,  mort  en 
1577,  ou  bien  est-ce  à  Mousset,  mort  quelque  trente 
ans  auparavant  (1),  qu'il  faut  faire  remonter  la  première 
tentative  de  substituer  la  quantité  métrique  au  dénom- 
brement des  syllabes  qui,  de  temps  immémorial,  était  en 
usage  dans  la  langue  française? 

Il  ressort,  dans  tous  les  cas,  du  texte  même  des  lettres 
patentes  de  Charles  IX  autorisant  l'Académie  du  poète 
Baïf  et  du  musicien  Joachim  Thibault  de  Courville,  que 
l'on  voulait  dès  1570  «  renouveler  l'ancienne  façon  de 
composer  vers  mesurés  pour  y  accommoder  le  chant  pareil- 
lement mesuré  selon  l'art  métrique  ». 

L'Académie  de  Baïf  mourut  avec  lui  (1591)  et  de  long- 
temps il  ne  sera  plus  question  des  vers  mesurés.  On 
respectera  la  rime  dont  la  suppression  devait  être  une 
conséquence  naturelle  de  l'imitation  du  vers  antique. 

Malherbe  vient,  qui  impose  la  césure  et  proscrit  l'en- 
jambement et  l'hiatus. 

Le  vers  métrique  est  mort!  Vive  le  vers  classique! 

Mais,  fait  remarquer  M.  Guilliaume  à  la  lin  du  premier 
chapitre  de  son  livre,  qui  est  consacré  au  vers  métrique, 

(1)  Agrippa  d'Aubigné  tient  pour  Mousset. 


(  «3  ) 
toutes  les  vicissitudes  ultérieures  du  vers  français,  son 
évolution   à   travers  le  système  classique  et  le  système 
romantique,  n'ont  servi  qu'à  préparer  sa  transformation 
de  vers  métrique  en  vers  rythmique. 

Et  M.  Guilliaume  nous  le  prouve  fort  habilement,  en 
un  style  vif  et  alerte,  à  grand  renfort  de  citations  et  d'ar- 
guments. 

Nul  n'était  d'ailleurs  plus  autorisé  pour  écrire  pareil 
livre.  Il  possède  à  fond  ses  auteurs  :  les  littératures  étran- 
gères n'ont  pas  plus  de  secrets  pour  lui  que  la  littérature 
française.  Sa  longue  expérience  d'auteur  et  de  critique 
lui  a  en  outre  appris  bien  des  choses  en  matière  d'art 
dramatique  et  musical.  Rien  de  tel,  après  tout,  pour  bien 
juger,  que  d'avoir  (passez-moi  l'expression)  mis  la  main 
à  la  pâte. 

M.  Guilliaume  —  autre  condition  requise  en  semblable 
besogne  —  n'est  pas  exclusif.  Il  ne  ratifie  pas  toutes  les 
exécrations  dont  le  vers  classique  a  été  chargé  depuis  la 
fameuse  préface  de  CromweU. 

Ainsi  pour  le  vers  brisé  :  «  A  le  bien  prendre,  dit-il 
avec  raison,  les  romantiques  se  donnaient  beaucoup  de 
peine  pour  enfoncer  des  portes  ouvertes,  car  le  vers  à 
césure  mobile  existait  longtemps  avant  eux.  » 

En  dépit  de  Malherbe,  un  vers  osait  encore  enjamber 
sur  le  vers  au  temps  de  Racine  et  de  Corneille. 

Boileau  avait  eu  beau  dire  : 

Gardez  qu'une  voyelle,  à  courir  trop  hâtée. 
Ne  soit  d'une  voyelle  en  son  chemin  heurtée... 

les  grands  classiques,  en  maintes  circonstances,  n'avaient 
eu  cure  des  recommandations  du  «  législateur  du 
Parnasse  ». 


(  8i) 

Mais  voyez  le  plaisant  de  la  chose!  Quand  Victor  Hugo 
lançait  ses  foudres  contre  l'alexandrin  classique,  il  res- 
pectait cette  règle  de  l'hiatus,  qui  est  bien  une  des  plus 
étranges  qui  se  puissent  concevoir  (1).  Mieux  encore! 
Dans  l'hiatus  proprement  dit,  il  ne  s'agit  que  d'euphonie. 
Mais  la  mesure  elle-même  est  en  cause  pour  la  collision 
des  voyelles  à  l'intérieur  des  mots  et  sur  ce  point  les 
romantiques,  qui  se  posent  cependant  en  révolution- 
naires, ne  sont  pas  plus  audacieux  que  l'école  classique  ; 
parfois  même  ils  le  sont  moins.  Ils  auraient  dû,  dit 
M.  Guilliaume,  chercher  surtout  ici  à  rapprocher  la  poésie 
de  la  prose.  Assurément  ils  auraient  trouvé  dans  cette 
simple  recherche  de  l'euphonie  «  une  source  de  richesses 
infiniment  plus  abondante  que  dans  l'enjambement  de 
quelques  vers  éclopés  ». 

Ronsard,  leur  inspirateur  ordinaire,  avait  dit  : 

«  Tu  dois  ostei'  la  dernière  e  féminine  tant  des  vocables 
singuliers  que  pluriers  qui  se  finissent  en  ée  et  en  ées, 
quand  de  fortune  ils  se  rencontrent  au  milieu  de  ton 
vers.  » 

Ils  n'osèrent  pas  écouter  Ronsard,  et  le  résultat  de  ce 
manque  d'audace,  remarquait  déjà  en  1870  M.  Ténint, 
c'est  que  les  mots  en  ée,  ie  ne  peuvent  plus  se  présenter 
en  poésie  qu'à  l'aide  d'un  de  ces  enjambements  : 

Marie 

Stuart 

Pie 

Neuf 

La  rue 

Vivienne. 
(1)  Cf.  Théodore  de  Banville  et  Legouvé  {La  lecture  en  action). 


(8S) 

M.  (Tuilliaume(l),  tout  en  se  défendant  d'irrévérence  ou 
de  dénigrement  envers  les  maîtres  de  l'école  romantique 
(et  spécialement  envers  Hugo  à  qui  il  serait  bien  tenté 
de  reprocher  de  n'avoir  laissé  voir,  somme  toute,  que  la 
pointe  (2)  du  «  bonnet  rouge  »  dont  il  est  parlé  dans  les 
Cotitemplations) ,  M.  Guilliaume  trouve  mauvais  surtout 
qu'ils  aient  gardé  comme  des  reliques  la  proscription  de 
l'hiatus  et  la  détîguration  de  l'orthographe  et  de  la  pro- 
nonciation, et  répudié  du  passé  tout  ce  qui  donnait  au  vers 
une  empreinte  caractéristique. 

J'ai  quelque  peine  à  croire  que  ce  soit  l'épouvante 
seule  du  «  monstre  hybride  »  {sic),  produit  des  réformes 
incomplètes  de  l'école  romantique,  qui  faisait  dire  à 
Henri  Heine  : 

Je  mourrais  pour  la  France...  mais 
Faire  des  vers  français,  jamais  ! 

Toutefois  je  m'explique  parfaitement  que  l'un  des  plus 
éminents  associés  de  notre  Classe,  M.  Gaston  Paris,  ait 
formulé  le  vœu  de  «voir  les  poètes  s'affranchir,  comme  les 
savants,  de  préjugés  prétendus  scientifiques,  pour  la  pro- 
nonciation comme  pour  l'orthographe  ». 

Dans  le  chapitre  consacré  au  vers  rythmique,  M.  Guil- 


(1)  M.  Guilliaume  s'égaie  très  joliment  de  ce  résultat,  p.  63.  A  moins 
d'avoir  recours  à  l'expédient  aussi  commode  que  puéril  signalé  par 
Ténint,  il  est  encore  interdit  aujourd'hui  de  parler  en  vers  d'une 
annonce  insérer  dans  un  journal,  ou  du  gém>  de  la  langue  non  plus 
que  des  litanies  des  saints,  etc.,  etc. 

(2)  Cf.  Le  vers  invertébré.  (Annales  pol[tiques  et  littéraires, 
n»  du  19  juin  1898.) 


(  86) 
liaume  passe  en  revue  tous  les  efforts  faits  depuis  Tavor- 
tement  du  vers  métrique  de  Baïf  «  pour  asseoir  le  vers 
français  sur  des  bases  plus  larges  et  moins  chancelantes 
que  la  césure  mobile  et  la  rime  implacablement  riche  » 
(p.  114). 

Nous  suivons  avec  intérêt,  entre  autres,  les  eftorts  du 
comte  de  Leu  (l'ex-roi  Louis  de  Hollande),  utilisant  les 
loisirs  qu'il  s'était  donnés  —  ou  plutôt  que  son  despo- 
tique frère  l'avait  contraint  à  prendre  —  pour  discuter, 
dès  1815,  la  théorie  du  vers  français  sans  rime,  puis 
passant,  pendant  la  Restauration,  de  la  théorie  à  la 
pratique  et  s'affranchissant  d'un  «  esclavage  barbare  et 
puéril  ))  pour  écrire  en  vers  non  rimes  une  tragédie  et 
un  opéra  ...  mauvais  d'ailleurs. 

Nous  suivons  avec  un  intérêt  plus  vif  encore  les  efforts 
identiques  d'un  ancien  membre  de  cette  Classe,  Van  Has- 
selt,  dont  nous  évoquions  le  souvenir  à  la  séance  de 
janvier  dernier  à  l'occasion  de  la  Théorie  du  vers  rythmique 
que  ce  Bulletin  a  reproduite. 

Le  mérite  de  ces  études  de  notre  confrère  n'a  pas  été 
assez  apprécié.  Il  est  même  piquant  de  constater  que  ce 
sont  des  poètes  —  voire  des  poètes  belges  —  qui  les  ont 
le  plus  dédaignées.  Travaillez  donc  à  a  donner  un  libre 
essor  au  vers  français  en  régularisant  son  vol  »,  ingéniez- 
Yous  à  introduire  dans  la  poésie  française  le  vers  des 
autres  nations  littéraires,  pour  que  vos  frères  en  Apollon 
vous  traitent  de  maniaque  (1),  ou  peu  s'en  faut!...  Poeta 
poetae  lupus? 


(1)  Voir  la  note  de  la  paiiçe  167  du  livre  de  M.  Guilliaume. 


(  87) 

Le  dédain  et  l'injustice  avec  lesquels  a  été  accueillie  la 
tentative  si  originale  et  si  utile  de  Van  Hasselt  n'ont  pas 
découragé  le  poète  Guilliaume. 

La  parfaite  connaissance  qu'il  a  des  langues  étrangères 
lui  permet  de  démontrer  qu'il  serait  très  facile  de  sou- 
mettre la  langue  el  le  vers  français  à  des  règles  aussi 
précises  que  celles  des  autres  nations.  Nous  vous  signalons 
tout  particulièrement,  Messieurs,  les  pages  du  chapitre  IV, 
où  il  examine  les  causes  des  divergences  et  des  .incertitudes 
qui  régnent  encore  à  ce  sujet  parmi  les  prosaïstes.  Il 
estime,  avec  M.  Paris,  que  l'époque  moderne  s'est  alfran- 
chie  parfois  avec  peu  de  discernement  de  certaines 
entraves  du  XVI1«  siècle,  mais  qu'elle  subit  les  autres  avec 
une  docilité  qui  rend  assez  risibles  les  prétentions  de 
quelques-uns  de  ses  coryphées  à  une  farouche  et  titanique 
indépendance. 

A  la  lin  de  son  beau  livre,  M.  Guilliaume  se  demande 
si  le  vers  français  restera  étouffé  sous  un  fatras  de  règles 
ineptes  et  pédantesques,  ou  s'il  finira  par  se  dissoudre  en 
prose  : 

Sera-t-il  dieu,  table  ou  cuvette  ? 

C'est  le  secret  de  l'avenir. 

Ernest  Discailles. 


(  88  ) 


RAPPORTS. 


Barthélémy  et  Méry  étudiés  spécialement  dans  leurs  rapports 
avec  la  légende  napoléonienne;  par  M.  Garsou,  docteur 
en  philosophie  et  lettres,  professeur  à  l'École  moyenne 
de  Saint-Gilles. 

Mtap/toi't   de     .Vf.   E»'»*«ël    ntêcaiUtfê,    pfetnier    coÈnn*i»»aii'« . 

«  La  littérature  de  la  Restauration  et  de  la  monarchie  de 
Juillet  a  eu  une  influence  considérable  sur  la  création  et 
l'expansion  rapide  de  la  légende  napoléonienne. 

Casimir  Delavigne  après  Béranger,  Victor  Hugo  après 
Barthélémy  et  Méry  ou  en  même  temps  qu'eux,  propa- 
gèrent le  culte  bonapartiste  moins  par  sympathie  pour  le 
régime  impérial  que  par  antipathie  pour  le  gouvernement 
de  la  branche  aînée  et  de  Louis-Philippe,  plus  par  chau- 
vinisme que  par  amour  de  l'absolutisme. 

Et  comme  l'art  et  la  presse  se  firent  les  complices  de 
la  littérature,  Napoléon  III  fut  possible. 

M.  Jules  Garsou,  qui  s'est  proposé  de  déterminer  les 
phases  successives  du  développement  de  la  légende,  a, 
l'an  dernier,  dans  une  brochure  (1)  que  la  critique  accueillit 


vl)  Béranger  et  la  légende  napoléonienne.  Bruxelles,  Weissenbruch, 
4897. 


(89  ) 
par  des  éloges  bien  mérités,  montré  ce  que  fit  Béranger 
pour  la  glorification  du  fondateur  de  la  dynastie  napo- 
léonienne. 

Aujourd'hui,  dans  le  travail  beaucoup  plus  important 
qu'il  soumet  au  jugement  de  la  Classe  des  lettres, 
M.  Garsou  s'occupe  du  rôle  qu'ont  joué  Barthélémy  et 
Méry  dans  la  genèse  de  l'intéressant  phénomène,  histo- 
rique et  littéraire  tout  à  la  fois,  à  l'étude  duquel  ce  jeune 
écrivain  consacre  les  rares  loisirs  de  sa  carrière  profes- 
sorale. 

Tout  en  suivant  de  près  la  formation  de  la  légende 
napoléonienne  dans  les  œuvres  de  Barthélémy  et  de  Méry, 
—  c'est  la  base  du  mémoire  qu'il  nous  envoie,  —  l'auteur 
s'est  attaché  à  mettre  en  pleine  lumière  les  côtés  obscurs 
de  la  vie  des  deux  poètes  marseillais. 

Frappé  surtout  de  l'oubli  profond  où  est  tombé  le  pre- 
mier d'entre  eux,  il  en  a  recherché  les  causes  avec  le  plus 
grand  soin. 

C'est  en  1832,  quand  Barthélémy  passa  brusquement 
du  «:amp  libéral  avancé  dans  le  parti  dit  doctrinaire,  que 
le  silence  commença  à  se  faire  autour  de  son  nom. 

Le  satirique  puissant  dont  la  Némésis  a  parfois  l'éclat 
et  la  virulence  des  Châtiments,  devint  alors  l'objet  des 
sarcasmes  et  de  reproches  sanglants  de  ses  anciens  amis 
et  lecteurs.  Honni  et  méprisé  en  dépit  des  variations 
qu'il  exécutait  sur  le  thème  connu  : 

L'homme  absurde  est  celui  qui  ne  change  j  amais, 

il  essaya  vainement  de  se  faire  pardonner  sa  volte-face. 
Le  public  n'accorda  plus  son  attention   aux  œuvres, 


(  90) 
remarquables  pourtant,  qu'il  ne  cessa  de  composer  jus- 
qu'à sa  mort,  telles  que  la  Nouvelle  Xémésis  et  le  Zodiaque, 
qui  sont  pour  ainsi  dire  absolument  ignorées  de  beaucoup 
de  lettrés. 

M.  Garsou  commente  ces  oeuvres  dans  lesquelles  Bar- 
thélémy parle  de  Napoléon  avec  autant  d'idolâtrie  que 
dans  les  premières.  Sous  ce  rapport  du  moins,  Barthé- 
lémy n'a  pas  changé  :  comme  son  collaborateur  Méry,  il 
persista  toujours  dans  son  culte  pour  l'Empereur. 

Une  patience  infatigable,  une  sagacité  toujours  en  éveil 
et  une  grande  conscience  littéraire  ont  guidé  M.  Garsou 
dans  les  recherches  auxquelles  il  s'est  livré  un  peu  par- 
tout pour  nous  faire  connaître  le  caractère  de  Barthélémy 
et  de  Méry  et,  en  même  temps,  pour  déterminer,  autant 
que  possible,  la  part  respective  de  l'un  et  de  l'autre  dans 
celles  de  leurs  œuvres  qui  ont  été  écrites  en  commun. 

M.  Garsou  s'est  aidé  surtout  des  mémoires  des  contem- 
porains, des  brochures  et  des  journaux  de  la  Restauration, 
de  la  monarchie  de  Juillet  et  du  second  Empire.  Son 
travail  est  richement  documenté  :  certaines  trouvailles 
faites  par  lui,  notamment  à  la  Bibliothèque  nationale  de 
Paris,  sont  d'un  intérêt  réel. 

Le  style  de  M.  Garsou.  à  part  de  rares  passages  qu'il 
lui  sera  très  aisé  de  remanier,  a  les  véritables  qualités  de 
l'histoire  littéraire  :  la  clarté  et  la  sobriété. 

D'aucuns  pourront  reprocher  à  l'auteur  de  pousser  un 
peu  loin  l'admiration  pour  Barthélémy  et  Méry.  Quand  il 
analyse  (à  certains  endroits  trop  minutieusement)  leurs 
œuvres  principales  :  Napoléon  en  Egypte  et  Le  fils  de 
l'homme,  il  ne  tarit  pas  en  éloges  —  et  ses  éloges  ne  nous 
paraissent  pas  toujours  fondés.  Mais  que  le  biographe  qui 


(91  ) 

n'a  jamais  péché  sous  ce  rapport  lui  jette  la  première 
pierre! 

Je  reprocherai  plutôt  à  M.  Garsou  de  noyer  quelquefois, 
pour  ainsi  parler,  le  sujet  principal  de  son  étude  dans  un 
trop  grand  luxe  de  détails  —  quelque  intéressants  qu'ils 
soient  d'ailleurs.  Mais  le  remède  est  facile  :  il  suffit  de 
mettre  ces  détails  dans  l'appendice  dont  l'auteur  a  fait 
suivre  son  mémoire  pour  utiliser  les  résultats  copieux  de 
ses  vastes  recherches. 

En  résumé,  je  considère  le  travail  de  M.  Garsou  comme 
une  contribution  des  plus  importantes  à  l'histoire  litté- 
raire et  à  l'histoire  politique  de  la  France  au  XIX"  siècle, 
et  je  propose  à  la  Classe  des  lettres  de  lui  faire  les  hon- 
neurs de  notre  collection  de  Mémoires  in-8^  » 


nappoÊ't   de    If,   SIechefy  tleuaciéttê»  conttnisaait'o. 

«  Je  conclus  aussi  favorablement  que  le  premier  rap- 
porteur. La  gerbe  que  le  poète  Autran  souhaitait  pour  la 
mémoire  de  ses  deux  compatriotes,  a  été  faite  par  M.  Gar- 
sou, après  une  laborieuse  moisson.  Mais  le  glanage  a  été 
trop  avide,  trop  fiévreux.  En  d'autres  termes,  il  y  a  quel- 
ques détails  un  peu  encombrants  pour  leur  importance, 
et  surtout  des  citations  trop  longues.  Plus  d'une  fois, 
vers  la  fin,  j'ai  rencontré  des  couplets  qu'il  suffira  d'abré- 
ger ou  de  résumer.  Je  les  ai  indiqués  sur  le  manuscrit. 
En  somme,  cette  psychologie  du  chauvinisme  intéresse 
et  fait  penser.  » 


(  92  ) 

Hnftpo»'!  tÊf   .91.    tt'iltuolley   ti'oiaiénu'  fotuntiêtniw. 

(c  Tout  en  me  ralliant,  en  principe,  aux  conclusions 
de  mes  honorables  confrères,  je  crois  devoir  accentuer 
leurs  réserves. 

En  réalité,  le  mémoire  de  M.  Garsou  est  un  simple 
recueil  d'extraits  et  de  documents,  reliés  assez  lâchement 
les  uns  aux  autres  et  qu'il  eût  fallu  mettre  en  œuvre.  La 
proportion  manque;  telle  pièce  de  circonstance  ou  de 
courtisanerie  est  analysée  en  détail,  alors  qu'elle  ne 
méritait  qu'une  rapide  mention;  les  notes  sont  souvent 
dans  le  texte  et  le  texte,  parfois,  dans  les  notes.  En 
somme,  M.  Garsou  n'a  fait  jusqu'ici  que  le  travail  de 
compilation  ;  il  lui  reste  à  digérer  ce  qu'il  a  amassé  avec 
un  indéniable  zèle  pour  son  sujet. 

J'aurais  voulu  aussi  que  l'auteur  de  cette  étude  sur 
Barthélémy  et  Méry  se  préoccupât  de  l'ambiance  histo- 
rique et  de  ce  que  j'appellerai,  un  peu  vaguement  peut- 
être,  la  philosophie  de  son  sujet. 

Nous  sommes  précisément  à  une  heure  de  crise  morale 
pour  la  France.  Des  événements  qui  datent  d'hier  (pour 
ne  rien  dire  de  la  période  «  boulangiste  »)  ont  montré 
les  passions  populaires  déchaînées  et  le  divorce  accompli 
entre  les  intellectuels  d'une  part,  l'armée  et  les  partis 
religieux  de  l'autre.  C'est  précisément  ce  qui  arriva  sous 
Napoléon  P',  avec  cette  notable  différence  que  Napoléon 
avait  le  génie  militaire  et  l'auréole  de  la  gloire,  que  l'on 
sortait  d'une  période  révolutionnaire  et  que  l'on  était 
disposé  à  tout  pardonner  à  un  despote,  pourvu  qu'il 
garantît  l'ordre   et  relevât  la  herté  nationale. 

C'est  ce  qui  explique  la  quasi-unanimité  d'admiration 


(  95  ) 
que  la  littérature  du  début  du  siècle  exprima  sous  des 
formes  très  variées,  quoique  généralement  médiocres.  De 
hautains  esprits,  comme  Victor  Hugo  et  Balzac,  ne  son- 
gèrent pas  à  se  dérober  à  l'engouement  général.  Ils 
aimaient  trop  la  gloire  pour  eux-mêmes  et  ils  n'osèrent 
braver  un  courant  qui  emportait  tout. 

Cette  contagion  dut  être  bien  forte,  puisqu'elle  n'épar- 
gna point  un  sceptique  comme  Stendahl,  dont  on  connaît 
la  biographie  de  Napoléon  et  certaines  pages  de  ses 
romans  et  de  ses  mémoires  où  l'empereur  est  haussé  à  la 
taille  des  héros  d'Homère. 

A  un  seul  endroit  de  son  travail,  M.  Garsou  paraît  s'être 
soucié  des  causes  de  cette  adoration  impérialiste,  en 
laquelle  se  résume  la  carrière  trop  longue  de  Barthélémy. 
Il  fait  observer  que  l'idée  de  revanche  est  constante  dans 
l'àme  française.  C'est  une  vérité  très  élémentaire  et  une 
vérité  de  tous  les  temps  et  de  tous  les  peuples.  Le  Cid 
espagnol  n'incarne-t-il  pas  les  désirs  de  revanche  des 
Chrétiens  sur  les  Maures,  comme  la  Chanson  de  Roland 
est  le  poème  de  la  défaite  de  Roncevaux,  comme  Aliscans 
est  le  poème  de  la  défaite  de  Villedaigne? 

En  réalité,  la  célébration  d'une  victoire  est  l'aft'aire 
d'un  jour  de  noble  exaltation  ou  de  grossière  effervescence  ; 
les  conséquences  d'une  défaite  perdurent  longtemps  et 
douloureusement  pour  ceux  qui  l'ont  essuyée.  Et  si 
Napoléon  doit  à  cette  longue  suite  de  triomphes,  qui  tenait 
l'imagination  littéraire  en  éveil  et  les  passions  des  foules 
en  haleine,  une  part  notable  de  sa  gloire  universelle, 
n'est-il  pas  permis  de  se  demander  si  les  misères  innom- 
brables qui  suivirent  ses  conquêtes,  si  le  deuil  des  foyers, 
les  fosses  ouvertes,  les  villes  brûlées,  les  maisons  vides 
n'ont  pas  plus  fait  que  tout  le  reste  pour  éterniser  sa 


(  9*) 
mémoire?  Il  y  a,  chez  l'être  humain,  une  admiration 
instinctive  de  la  force  brutale,  qui  prime  les  générosités 
et  impose  silence  aux  rancunes  et  aux  douleurs.  Napoléon, 
plus  que  tout  autre  héros  du  sabre,  me  paraît  avoir  béné- 
ficié de  ce  sentiment-là.  )> 

Conformément  aux  conclusions  de  ces  trois  rapports, 
le  travail  de  M.  Garsou  paraîtra  dans  le  recueil  des 
Mémoires  in-8°. 


COMMUiNICATIONS  ET  LECTURES. 


Les  Écossais,   dits  Scoten  ou  Schotle,   en  Flandre; 
par  Ch.  Piot,  membre  de  l'Académie. 

l. 

Dans  ses  relations  concernant  les  deux  conquêtes  de  la 
Bretagne,  appelée  plus  tard  la  Grande-Bretagne  pour  la 
distinguer  du  pays  du  même  nom  sis  en  France,  Jules 
César  ne  fait  pas  mention  des  Écossais,  en  latin  Scoti, 
qui  habitaient  cette  contrée  (1).  Celtes  d'origine  et  de 
race,  très  nomades  et  voyageurs  surtout,  ils  n'ont  rien  de 
commun  avec  les  noms  de  Schot  et  de  Schoten,  accouplés 
à  des  dénominations  géographiques  et  topographiques  de 
lieux  sis  dans  les  Pays-Bas  et  les  provinces  flamandes  de 
Belgique,  pour  désigner  des  enclos.  C'est  postérieure- 
ment aux  conquêtes  de  César  que  nous  voyons  figurer  les 
Scoti  dans  l'histoire,  ainsi  que  le  constate  à  juste  titre 


(1)  Liv.  m,  c.  9  et  suiv. 


(  95  ) 
Zeuss  dans  son  travail    intitulé  :  Die  Deutschen  und  die 
JSaclibarslàmmc  (Munich,  1857).  Jamais  les  annales  his- 
toriques n'en  font  mention  avant  cette  époque. 

Les  Scotes,  dit  Zeuss,  habitaient  l'Irlande  (1),  thèse 
très  vraie  et  incontestable.  Non  seulement  ils  occupaient 
ce  pays,  mais  ils  se  répandirent  en  Europe,  spécialement 
dans  les  localités  où  ils  pouvaient  faire  de  la  propagande 
religieuse  et  catholique  (2).  De  son  côté,  la  Flandre  ne 
rebutait  aucune  peuplade,  conformément  aux  principes 
d'hospitalité  admis  par  les  Germains.  Uospiies,  dit  César, 
[as  non  putanl  :  qui  quaque  de  causa,  ad  eos  venerunt,  ab 
injuria  prohibent,  sanctosque  habent  (I.  VI).  Très  étendu 
et  peu  habité,  ce  pays  pouvait  recevoir  les  peuples  dis- 
posés à  s'établir  dans  la  Gaule  pendant  le  grand  mouve- 
ment d'émigration  provoqué  par  les  Germains,  et  les 
déplacements  des  Celtes.  Quoi  qu'il  en  soit  de  ces 
émigrations,  la  qualification  d'Écossais  ou  de  Schot  ne 
peut  être  prise  dans  le  sens  d'une  simple  épithète  due 
au  hasard;  sinon  il  faudrait  admettre  qu'il  en  était  de 
même  des  noms  des  P>ancs,  des  Frisons,  dits  Wilde 
Friesen,  des  Sicambres,  des  Suèves  et  des  Saxons  établis 
dans  ce  pays. 


(1)  Zeuss,  Scoti,  die  Bewôlmer  von  Ibernien,  p.  o68,  et  Gramatica 
celtica.  —  Le  Deutsches  Wôrterbuch  de  Jacob  Grimm  et  Wilheuw 
Grimm,  t.  IX,  p.  1610,  comprend  par  Schottes,  l'Ecosse.  Voir  aussi 
BucHANUs  ScoTus,  Renim  Scolicarum  kistoria,  fol.  49,  et  Hector 
BoETius  Deidononnus,  Schotorum  historia,  fol.  3  et  suiv.  et  101  \°. 
Les  chroniques  publiées  dans  les  tomes  II  et  III  des  Monumenta  Ger- 
tnaniae  historica  font  mention  de  la  guerre  entre  les  Normands  et  les 
Écossais  établis  dans  l'Hibernie. 

(2)  Voir  à  ce  sujet  les  tomes  II  et  III  des  Monumenta  Germaniae, 
verbis  Scoti,  Scotli  et  Hiberni. 


(90) 

Après  avoir  fait  observer  que  les  Ecossais  habitaient 
l'Irlande,  Zeuss  reproduit  différents  passages  d'écrivains 
anciens,  qui  confirment  entièrement  sa  manière  de  voir 
au  sujet  de  l'origine  irlandaise  de  cette  peuplade  et  con- 
statant qu'elle  remonte  au  V"  siècle.  Nous  savons  aussi, 
par  les  Commentaires  de  César,  que  les  Ménapiens  établis 
en  Flandre  étaient  en  relations  suivies  avec  leurs  com- 
patriotes fixés  en  Irlande. 

Cette  population  de  Scots  irlandais  aurait-elle  eu  des 
relations  plus  ou  moins  intimes  avec  les  Scotes,  Scoti 
ou  Wilde  Scoten  mentionnés  dans  les  monuments  histo- 
riques de  Flandre  au  XI V«  siècle?  Nous  n'en  doutons  pas, 
en  présence  des  renseignements  très  amples  fournis  à 
propos  des  Écossais,  peuple  mentionné  et  décrit  par 
Zeuss,  dont  nous  croyons  inutile  de  reproduire  le 
texte  (1).  Il  suffit  de  faire  observer  que  les  Scotes  cités 
dans  l'histoire  de  l'Hibernie  habitèrent  de  bonne  heure 
le  nord  de  l'île  d'Albion  ou  la  Calédonie,  et  qu'ils  don- 
nèrent ensuite  leur  nom  à  l'Ecosse  dans  la  Grande-Bre- 
tagne (2). 

II. 

Comment  arrivèrent-ils,  du  moins  en  partie,  dans  la 
Flandre,  où  leur  séjour  est  constaté  d'une  manière  for- 
melle par  la  dénomination  de  Wilde  Scotten,  donnée  à 
une  population  qu'un  feudataire  flamand  devait  surveiller 


(1)  Voir  Zeuss,  loc.  cit.,  pp.  193  et  suiv. 

(2)  Voir  à  ce  sujet  Beda,  Ecclesiasticœ  historiœ  Genlis  Anglorum, 
pp.  3  et  suiv.,  et  Herbert  Maxivvei,,  Scottishland  naines,  iheirorigin 
and  manning. 


(  97  ) 
Spécialement  pendant  la  reconstruction  du  pont  édilié  à 
Furnes  (1)?  Aux  termes  du  texte  relatif  à  cette  obligation 
et  datant  de  4565,  ce  feudataire  était  tenu  d'avoir  l'œil 
continuellement  sur  ces  gens  pendant  les  travaux  du  pont  : 
es  sciddich  te  welken  tiden  dat  mijn  heere  van  Vlaenderen 
eil  op  de  Bourglie  te  Veurne  te  stane  op  diebourghe  brugghe 
ende  die  bourgh  brugghe  te  hoiiden  j'egen  de  Wilde  Scoten  ; 
endeals  men  de  bourgh  brugge  macct  van  nieuws,  so  es  liie 
scondich  te  legghen  op  den  ondersten  steen  enen  vlaemschen 
penuinc. 

Dans  ce  texte,  dit  M.  Gilliodts,  auquel  nous  emprun- 
tons ce  passage,  les  Frisons  sauvages  sont  remplacés  par 
les  sauvages  Écossais.  «  Sous  ce  nom,  ajoute-t-il,  faut-il 
entendre  les  Saxons  d'Angleterre,  dont  Orderic  Vital 
disait  :  Frisia  pro  Angliis  opibits  mitlebat?  ou  bien  les 
précurseurs  de  ces  intrépides  Higlanjlers  que  les  séides  de 
Guillaume  de  Loo  auraient  combattus  au  pont  de  Stoole- 
bridge?  »  Nous  ne  le  pensons  pas.  Ce  ne  sont,  en  tous  cas, 
ni  des  Francs,  ni  des  Frisons,  qualifiés  parfois  aussi  de 
sauvages  par  des  documents  du  moyen  âge,  ni  des  Suèves. 
Tous  ces  peuples  étaient  installés  antérieurement  en 
Flandre. 

A  notre  avis,  il  y  a  lieu  de  comprendre  par  Wilde  Sco- 
ten ou  Scotten  un  détachement  ou  la  fraction  d'une 
population  venue  de  l'Hibernie  en  Flandre  et  appelée 
peut-être  à  y  remplacer  les  Ménapiens  expulsés  par  les 
populations  germaines.  Ces  Ménapiens,  l'histoire  l'en- 
seigne, avaient  été,  en  partie,  remplacés  par  les  Flandren- 


(1)  Gilliodts-Van  Seveiien,  CoitUiines  du  quartier  de  Fumes,  l.  I, 
introduction,  pp.  94  à  96. 

5""®    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  7 


(98) 

ses  atqve  Andoverpienses,  Frisioves  ef  Siievi  et  barhari 
quique  circa  maris  littora  degentes,?,e\o\\  un  passage  de  la 
vie  de  saint  Éloi,  rédigée  vers  l'an  674(1).  L'hagiographe, 
auteur  de  cet  écrit,  ne  donnant  pas  la  nomenclature 
complète  de  ces  barbari  circa  maris  littora  degentes,  il  est 
permis,  nous  semble-t-il,  d'y  faire  figurer  d'autres  peu- 
plades, installées  dans  ces  parages,  surtout  les  Wilde 
Scoten,  mentionnés  dans  l'acte  de  1365,  et  habitant  peut- 
être  depuis  longtemps  les  environs  de  Furnes,  selon  le 
témoignage  du  document  précité.  S'ils  n'étaient  pas 
originaires  d'Ecosse  ou  d'Hibernie,  pourquoi  les  aurait- 
on  appelés  Écossais?  Nous  croyons  notre  conjecture 
d'autant  mieux  fondée,  que  les  noms  de  famille  de  Schot, 
Schodt  ou  Schoot  sont  très  répandus  en  Flandre  et  dans 
les  Pays-Bas  (2).  Nous  trouvons  aussi  souvent  en  Flandre 
les  noms  de  Wilde  et  de  Vries,  portés  par  des  habitants 
de  ce  pays. 

m. 

Point  de  doute,  les  Wilde  Scoten  ou  Schotten  for- 
maient une  fraction  minime  des  populations  maritimes 
établies  en  Flandre,  spécialement  près  de  Furnes,  sans 
qu'il  soit  possible  de  fixer  la  date  de  leur  arrivée  dans  ces 


(1)  Vita  Sancti  Eligii,  dans  le  tome  III,  page  S57,  de  Dom  Bouquet, 
Reriim  Gallicarmn  et  Francorum. 

{%  WiNKLER,  dans  son  livre  intitulé  :  Nederlandsche  Geslachtsnamen, 
cite  :  Schot,  Schotsman,  Schott.  Le  nom  de  De  Schot  est  souvent 
l'eproduit  dans  les  publications  de  la  Société  pour  la  langue  flamande 
en  France,  travail  de  Courtois  intitulé  :  Communauté  d'origine  et  de 
langage  entre  les  habitants  de  l'ancienne  Morinie  flamingante  et 
wallonne.  (T.  IV  des  Annales  du  Comité  flamand.) 


(  99  ) 
lieux.  Ils  n'y  étaient  probablement  pas  nombreux,  par 
suite  (les  établissements  occupés  dans  ces  parages  par 
les  Frisons,  par  les  Suèves,  peuplades  que  l'on  a  eu  le  tort 
de  confondre  avec  les  Zélandais  (i),  et  par  d'autres 
émigrés  établis  dans  ces  environs.  Fatalement,  ils  ont  dû  y 
subir  l'influence  de  l'élément  flamand,  au  même  titre  que 
leurs  voisins. 

Si,  comme  nous  le  croyons,  les  Wilde  Scoten  étaient 
originaires  de  l'Irlande,  comment  sont-ils  devenus  des 
Flamands?  A  cette  question  nous  répondrons  par  une 
simple  demande  :  Comment  les  Ménapiens,  peuplade 
gauloise  taisant  usage  de  la  langue  irlandaise,  ont-ils 
changé  leur  idiome  et  adopté  le  flamand  à  Courtrai  et  aux 
environs  de  cette  ville,  actuellement  flamands,  ensuite  la 
langue  romane  à  Lille  et  à  Tournai?  Les  Normands  n'ont- 
ils  pas  parlé  français  en  Normandie?  Durant  des  époques 
antérieures,  les  Étrusques  ne  sont-ils  pas  devenus  des 
Komains,  les  Phocéens  des  Français,  etc.?  Ces  change- 
ments de  langues  sont  évidemment  des  questions  de 
chiffres  pour  les  nouveaux  venus,  ainsi  que  nous  l'avons 
établi  ailleurs,  ou  par  suite  de  nécessités  politiques,  ou 
par  la  force. 

Primitivement,  il  n'y  avait  pas  chez  les  peuples  anciens, 
comme  de  nos  jours,  des  distinctions  basées  exclusive- 
ment sur  le  langage,  spécialement  dans  les  pays  dépour- 
vus d'une  littérature  bien  cultivée.  L'esprit  de  nationa- 
lité, à  cette  époque,  n'était  pas  développé  au  point  de 
répudier  tout  ce  qui  n'était  pas  autochtone.  Les  Gaulois 


(1)  Van  Cuuysselbergen,  Antwoord  over  de  oudkeden  van  Zeelanà, 
p.  50.  «  Eligius,  dit-il,  bekeerde  vêle  Sneven,  dat  is  Zeeuwen.  » 


(  100) 
établis  aux  bords  du  Rhin  ne  se  sont-ils  pas  germanisés 
et  ceux  de  la  Galice  ne  sont-ils  pas  devenus,  par  la  suite 
des  temps,  des  Espagnols  (1)?  Les  habitants  celtes  de  la 
principauté  de  Galles  ne  sonl-ils  pas  de  nos  jours  des 
Anglais  (2),  malgré  les  efforts  faits  dans  la  presse  et  les 
écoles  afin  d'y  maintenir  l'ancien  langage,  dans  le  but 
d'amener  le  triomphe  de  certaines  tendances  politiques 
et  religieuses? 

N'oublions  pas  aussi  de  constater  que  le  llamand  offre 
des  analogies  avec  la  langue  des  Hibernois,  ainsi  que  l'a 
démontré  feu  le  chanoine  de  Haerne  (3),  conformément 
aux  observations  signalées  par  Caucer,  Coleville,  Wiclef, 
Samuel  Johnson  et  d'autres  philologues  anglais.  Rien  de 
plus  naturel.  Constamment  en  contact  avec  les  popula- 
tions de  Flandre  par  suite  de  leur  attachement  au  culte 
catholique,  les  Écossais  ou  Irlandais  étaient  à  même  de 
s'initier  au  langage  de  notre  temps.  Celui-ci  exerçant  à 
son  tour  une  influence  prépondérante  sur  la  linguistique 
de  l'Angleterre,  il  n'y  a  pas  lieu  de  s'étonner  si  les  Wilde 
Scholten  sont  devenus  des  Flamands.  Leur  situation  devait 
présenter  des  analogies  avec  celle  des  Francs,  des  Frisons, 
des  Saxons,  des  Suèves  et  autres  peuplades  installées 


(1)  Voir  à  ce  sujet  Les  Celtes  en  Espagne,  dans  la  Revue  celtique, 
t.  XIV,  p.  357,  et  t.  XV,  pp.  1  et  suiv. 

(2]  Les  Galles  durent  en  grande  partie  se  réfugier  dans  les  mon- 
tagnes. Voir  Jean  Muller,  Saxones,  p.  28.  Lingard,  Histoire 
d'Angleterre,  1. 1,  p.  77.  Knobelsdorff,  Die  keltischen  Bestandtheile 
in  der  englisclien  Sprache.  Éd.  Muller,  Etymologisclies  Worterbiich 
der  englischcn  Sprache. 

(3)  Voir  à  ce  sujet  la  Revue  catholique  de  janvier  1883,  pp.  176, 
415,  463;  de  1884,  pp.  468,  628,  et  le  Messager  des  Sciences  historiques 
de  1884,  pp.  93,  229,  308. 


(  iOI  ) 
successivement  dans  la  Flandre  et  devenues  indigènes 
et  flamandes  dans  cette  contrée.  Des  linguistes  distingués 
ont  lait  observer  aussi  que  la  langue  des  Écossais,  comme 
celle  des  anciens  Suédois,  Danois  et  Islandais,  présentait 
des  affinités  bien  établies  avec  l'ancien  idiome  flamand 
et  frison.  A  ces  observations,  nous  devons  ajouter  que  les 
Acta  Sanctorum  constatent  formellement  comment  les 
Écossais  sont  sortis  de  l'Hibernie  (1),  et  que  les  notes 
publiées  dans  cette  collection  (2)  font  connaître  les  rela- 
tions intimes  établies  anciennement  entre  la  Belgique  et 
rÉcosse.  Jusqu'au  XV!*^  siècle,  ces  relations  très  fréquentes 
et  cordiales  avaient  un  caractère  de  bienveillance  et  d'in- 
l imité  bien  marqué.  Entre  les  habitants  de  la  Flandre, 
d'une  part,  et  ceux  de  l'Ecosse  et  de  l'Angleterre,  d'autre 
part,  les  relations  ont  toujours  été  très  intimes  pendant  le 
moyen  âge,  tant  sous  le  rapport  du  langage  qu'au  point 
de  vue  des  institutions  et  de  l'esprit  de  nationalité.  Ils  se 
recherchaient,  se  croisaient  et  s'assimilaient  :  témoin  le 
fait  relaté  dans  le  manuscrit  n'  7809  à  7810,  folio  317, 
de  la  Bibliothèque  royale  à  Bruxelles,  et  constatant,  par 
exenjple,  que  la  famille  Rnibbe,  établie  à  Alveringen, 
était  apparentée  à  Thomas  de  Cantorbery  k  partir  de  l'an 
1070.  Nous  ne  citerons  pas  d'autres  exemples  semblables. 
Ce  sont  les  révolutions  du  XVP  siècle  et  les  événements 
politiques  de  l'Angleterre  qui  ont  brisé  ces  relations.  En 
présence  de  ces  faits,  faut-il  s'étonner  si  les  Wilde  Scoten 
sont  devenus  des  Flamands? 


(1)  Ghesquière,  Acta  S.  S.,  t.  III,  pp.  2  et  3. 
(2j  IbUL,  t.  VI,  p.  .^95. 


(  i02  ) 


IV. 

11  y  a  lieu  aussi  de  faire  remarquer  que  le  mot  wild  ne 
doit  pas  toujours  être  pris  dans  le  sens  de  «  sauvage  )>. 
Franc,  dans  son  livre  intitulé  :  Ktymologisch  Woorden- 
boek  (col.  1170),  le  lait  remarquer  ajuste  titre  (1).  Dans 
certains  cas,  le  mot  wild  peut  signifier  indépendant, 
intransigeant,  indomptable,  insoumis,  récalcitrant,  qualiti- 
cations  parfaitement  applicables  aux  Écossais  et  aux  Fri- 
sons, peuplades  aux  allures  très  libres  et  autochtones. 

S'il  n'en  était  pas  ainsi,  il  serait  dilïicile  de  compren- 
dre comment  les  noms  de  famille  de  Schot,  de  Vries,  de 
Wilde  ou  de  Welde  seraient  devenus  patronymiques  et 
honorables,  en  dépit  du  mépris  qui  aurait  été  attaché  à 
cette  qualification  (2). 

De  l'ensemble  de  ces  faits,  nous  croyons  pouvoir  con- 
clure que  les  Wilde  Scoten  ou  Schotten  ont  le  droit  de 
figurer  dans  la  nomenclature  des  anciens  habitants  de  la 
Flandre  maritime,  malgré  leur  origine  hibernienne,  et  ce 
au  même  titre  que  les  sauvages  Frisons,  appelés  Wilti. 
Dès  le  XIV*'  siècle,  ils  devaient  être  initiés  à  la  langue  tla- 
mande  en  usage  chez  leurs  voisins  et  surveillants  à 
Furnes.  Ils  subissaient  nécessairement  par  ce  contact 
rintluence  de  l'idiome  parlé  dans  leur  patrie  d'adoption. 


(i)  Voir  aussi  Kilianus,  Etymologicum  teutonicae  linyicae,  verbo 
Wild.  Il  traduit  ce  mot  par  :  silvcstris,  férus,  agrestis,  ferinus,  indo- 
mitus,  effremis,  immansuetus,  vagus,  vastus. 

2)  WiNKLER,  dans  ses  Nederlandsche  Gestachtsnamen,  cite  Wilde 
Jan,  Wildeboer,  Wildervank.  —  De  Bo,  Westvlaamsche  Idioticon, 
mentionne  un  poisson,  nommé  à  Furnes  «  schot».  — VanHoorebeke, 
Étude  sur  l'origine  des  noms  patronymiques,  cite  les  Wilde  et  Welde. 


(  i03  ) 


Tous  ces  détails,  qui  de  prime  abord  peuvent  paraître 
superflus,  sont  à  nos  yeux  indispensables  pour  faire  com- 
prendre la  position  et  l'état  de  situation  de  cette  peu- 
plade et  de  ses  voisins.  Ils  peuvent  aider  à  expliquer  la 
présence  en  Flandre  de  plusieurs  populations  appelées 
successivement  à  la  formation  de  ce  comté  et  faire  com- 
prendre le  mélange  et  l'origine  des  dialectes  divers  parlés 
dans  ce  pays.  N'oublions  pas  aussi  de  signaler  cette  con- 
trée comme  le  point  de  départ  des  relations  des  Pays-Bas 
avec  l'Angleterre,  du  commerce,  des  lois  d'une  civilisa- 
tion très  originale  et  autoritaire  dans  nos  provinces,  et  ce 
grâce  aux  tendances  des  libertés  communales  et  de  la 
vie  publique  dans  notre  pays  (i). 

Cette  position  avait  le  grand  avantage  aussi  d'être 
agréable  à  l'Angleterre,  toujours  préoccupée  de  s'en- 
tourer de  petits  États  qui  ne  pouvaient  lui  porter 
ombrage. 


f  1)  Voir  à  ce  sujet  :  Vanderkindere,  Les  origines  de  la  population 
flamande,  dans  le  tome  X,  page  421  des  Bull,  de  l'Acad.  roy.  de 
Belgique,  3'  série,  et  Ibid.,  t.  XI,  p.  211.  —  Claerhout,  De  Franken, 
de  Friesen  en  de  Saksen,  dans  le  Belfort,  l.  I,  p.  486. 


(  104  ) 


Le  camp  de  Labiénus  pendant  la  guerre  des  Trévires  ;  par 
Ch.  Piot,  membre  de  l'Académie. 

Très  peu  de  livres  ont  eu  des  éditions  plus  nombreuses 
et  engagé  les  commentateurs  à  les  publier  que  celui  inti- 
tulé: C.  Juin  Caesaris  commentarium  de  hello  galico.  Le 
Lexkon  caesarianum  de  Meusel,  œuvre  de  patience  et 
d'exactitude  publiée  récemment,  consacre  à  la  nomencla- 
ture de  ces  mémoires  huit  pages  de  texte  bien  compact, 
grand  in-8°.  Nous  y  renvoyons  le  lecteur  désireux  de  les 
consulter  et  d'examiner  ces  publications  en  détail  au 
point  de  vue  des  Commentaires  précités. 

En  vain,  nous  avons  parcouru  un  grand  nombre  de  ces 
éditions,  dans  le  but  d'y  trouver  la  solution  bien  établie 
de  la  question  de  savoir  où  était  situé  le  camp  de  Labié- 
nus,  lieu  de  refuge  des  Romains  échappés  aux  poursuites 
des  Éburons  au  moment  de  quitter  Atuatuca.  Nous  ne 
répéterons  pas  ce  que  César  dit  à  ce  sujet.  Il  suffît  de 
faire  remarquer  que  ce  désastre  d'une  partie  de  l'armée 
romaine  eut  probablement  lieu  dans  le  vallon  par  lequel 
passe  actuellement  le  vieux  chemin  de  Tongres  à  Otrange, 
ainsi  que  nous  l'avons  établi  dans  le  Messager  des  sciences 
historiques  de  1874  (p.  143). 

A  la  suite  de  cette  infortune,  les  Romains  voulurent  se 
réfugier  dans  les  établissements  militaires  de  leurs  com- 
patriotes les  plus  rapprochés  du  lieu  de  la  défaite.  Ces 
camps,  placés  sous  les  commandements  de  Q.  Cicéron  et 
de  Labiénus,  étaient  installés  à  peu  près  au  centre  des 
Gaules.  Grâce  aux  Commentaires  de  César,  nous  savons 


(   105   ) 

que  les  fugitifs  échappés  aux  Éburons  se  dirigèrent  an 
hasard  vers  le  camp  de  Lahiénus,  situé  bien  loin  d'Atua- 
tuca  (1).  Oi^i  était  installé  ce  camp?  César  ne  le  dit  pas 
dans  des  termes  précis,  conformément  à  ses  habitudes 
d'indiquer  les  faits  sommairement,  lorsqu'ils  n'ont  pas 
une  grande  importance  à  son  point  de  vue.  De  là  des 
divergences  d'opinions,  dont  nous  croyons  devoir  rendre 
compte.  Baert,  dans  son  Mémoire  sur  les  campagnes  de 
César  {p.  3(S)  le  place  à  Rocroy.  Steininger,  dans  son 
travail  intitulé  :  Geschichte  der  Trevirer  miter  der  Ilerr- 
scliaft  der  Rômer  (p.  52),  le  fixe  aux  environs  de  la  Chiers 
ou  de  la  Semoy.  A  ce  propos,  il  fait  remarquer  (p.  35) 
qu'une  distance  de  vingt  lieues  allemandes,  soit  de  trente- 
trois  lieues  françaises,  séparait  généralement  les  camps 
romains.  Bertholet,  dans  son  Histoire  du  duché  de  Luxem- 
bourg, se  prononce  en  faveur  de  la  Chiers.  La  Commis- 
sion de  la  carte  des  Caules  et  Creuly  placent  ce  camp  à 
Marche,  Napoléon  III  à  Lavacherie,  sur  l'Ourthe  (Atlas, 
t.  I,  pi.  14),  sans  autres  explications  au  sujet  de  ce  choix, 
si  ce  n'est  l'existence  dans  cet  endroit  de  vestiges  d'un 
camp  romain.  D'autres  commentateurs  ont  donné  la 
préférence  à  Revin  et  à  Carignan.  Sans  vouloir  résoudre 
la  question  et  sans  l'examiner  en  détail,  Wauters  (2)  fait 


(1)  Pauci  ex  prœlio  elapsi,  incertis  itineribiis,  dit  César,  per  sijlvas 
ad  T.  Labieman,  legatum  in  Hybernia  venerunt,  atque  eiim  de  r'ebus 
geslis  certiorem  faciunt  (1.  V).  Herbert  Thomas,  dans  son  livre 
intitulé  :  De  Timgris  et  Eburoni,  rapporte  les  mêmes  faits,  p.  IZ. 
Ce  ti'avail,  très  peu  consulté,  renferme  bon  nombre  de  renseignements 
concernant  la  géographie  ancienne  de  notre  pays. 

{%  Revue  trimestrielle,  2«  série,  W-  volume  et  156e  de  la  collection, 
p.  106.  Cet  auteur  ne  décide  pas  la  question,  en  disant  :  «  Nous  ne  pou- 
vons, faute  de  données  suffisantes,  combattre  ni  adopter  ces  conclu- 


(  106  ) 

observer  que  celte  dernière  localité  ressortit  constamment 
au  diocèse  de  Trêves  et  que  Revin  et  Mouzon  sont  trop 
proches  de  la  Meuse  pour  se  prêter  au  récit  de  César, 
thèse  qui  nous  semble  sujette  à  caution.  Le  baron  von 
Goler  suppose  qu'Arlon  tut  le  lieu  de  campement,  et 
Abel  que  c'était  le  Titelberg.  En  un  mot,  il  y  a  autant 
d'avis  différents  à  ce  sujet  que  d'auteurs  :  tôt  caputa,  tôt 
census. 

Nous  tâcherons,  de  notre  côté,  d'élucider  la  question, 
en  faisant  observer  qu'il  s'agit  de  se  prononcer  sur  ce 
point,  en  prenant  pour  base  des  renseignements  bien 
établis  et  très  positifs. 

Avant  de  procéder  à  cet  examen,  nous  avons  cru 
devoir  étudier  le  texte  de  César  au  point  de  vue  des 
qualifications  qu'il  donne,  dans  ses  Commentaires,  aux 
cours  d'eau,  aux  rivières  et  aux  fleuves.  De  cette  manière, 
nous  avons  pu  constater  qu'il  emploie  toujours  et  con- 
stamment le  mot  flumen  pour  désigner  les  fleuves  et  les 
rivières  sans  distinction.  Jamais  il  ne  s'est  servi  des  mots 
rivulus  et  rivus.  Il  a  donné  la  qualification  de  flumen  à 
Addriasdubis,  Apsus,  Arar,  Axona,  Bagrada,  Bâtis, 
Garumna,  Genusum,  Haliacmon,  Iberus,  Liger,  Mosa, 
Rhenus,  Rhodanus,  Sabis,  Scaldis,  Sequana,  Sicoris, 
Tamesis.  Dans  un  seul  passage,  il  parle  de  la  Matrona 
(la  Marne),  rivière  qu'il  qualifie  de  fluvius,  tandis  que  le 


sions  »(p.  11)9;.  Néanmoins,  à  la  page  105,  il  affirme  «  que  ces  différents 
textes  prouvent  à  l'évidence  que  le  camp  de  Labiénus  était  situé  sur 
le  territoire  rémois  ».  Ces  différences  d'opinions  proviennent  de  ce 
que  les  auteurs  ont  cru  devoir  distinguer  deux  expéditions  de  Labié- 
nus,  l'une  près  de  la  Meuse,  l'autre  chez  les  Trévires.  César  ne  fait 
mention,  à  l'année  53,  que  d'un  seul  camp  occupé  par  I^abiénus,  celui 
sis  près  de  la  Meuse,  et  d  une  seule  bataille  livrée  à  cette  époque. 


(  107  ) 

dictionnaire  latin  de  Foriallini  énumère  et  explique 
d'une  manière  complète  les  dénominations  de  flumen, 
de  fluvius,  de  rivuliis,  de  rivus  et  détermine  fort  bien 
l'emploi  et  la  signification  de  ces  mots  d'après  les 
auteurs  latins. 

Par  suite  du  défaut  de  renseignements  sutïisants  repro- 
duits à  ce  sujet  dans  les  Commentaires  de  César,  nous 
croyons  devoir  les  détailler  afin  de  permettre  de  bien 
juger  la  question. 

Dans  son  livre  V,  le  général  romain  constate  (c.  24) 
qu'il  fut  obligé  de  distribuer  ses  légions  en  diverses  con- 
trées et  qu'il  en  envoya  une  chez  les  Morins  placée 
sous  les  ordres  du  lieutenant  C.  Fabius,  une  autre  chez 
les  Nerviens  sous  le  commandement  de  Q.  Cicéron,  une 
troisième  chez  les  Essues,  en  Normandie,  commandée 
par  L.  Roscius,  une  quatrième,  sous  les  ordres  de 
Labiénus,  chez  les  Rèmes,  près  du  pays  des  Trévires  (1). 

Il  est  donc  bien  établi,  par  cette  nomenclature,  que  le 
camp  de  Labiénus  était  tixé  sur  le  teri'itoire  des  Rèmes, 
près  des  frontières  des  Trévires  :  //*  Remis,  in  confinio 
Trevirorum.  Où  et  comment  ces  frontières  étaient-elles 
établies? 

A  cette  question,  César  répond  :  «  Toute  la  Gaule  était, 
disait-on,  en  armes;  les  Germains  avaient  passé  le  Rhin, 
d'après  la  rumeur  publique  ;  les  quartiers  occupés  par 
César  et  ses  lieutenants  étaient  attaqués  (2).  » 


(1)  Quartum  in  Remis  cum  T.  Labieno,  in  confinio  Trevirorum  hie- 
marejussit  (c.  24).  La  situation  de  ces  camps  énnmérés  par  César  a 
donné  lieu  à  des  dissertations  nombreuses,  au  sujet  desquelles  les 
auteurs  n'ont  pas  pu  s'entendre. 

("2)  Oninem  esse  in  armis  Gallican  ;  Germanos  Rlienum  tra)tsisse  ; 
Cœsaris reliqxMrumque  Hiberna  oppognorari  <[.  V,  c.  41  . 


(  (08  ) 

Ces  passai^es  constatent  donc  que  Labiénus  avail 
installé  ses  troupes  aux  frontières  des  Rèmes  et  que  les 
Germains  voulaient  taire  passer  leur  armée  en  deyà  du 
Rhin,  afin  d'attaquer  les  Romains.  Nous  n'ignorons  pas 
que,  dans  son  travail,  Steininger  émet  l'avis  que  l'attaque 
des  Romains  dirigée  contre  les  Trévires  eut  lieu  probable- 
ment près  de  la  Chiers  ou  de  la  Semois  (1);  mais  cette 
supposition  ne  nous  semble  pas  fondée.  Il  résulte  à 
l'évidence  des  passages  précités  que  les  Trévires  étaient 
les  voisins  des  Rèmes.  A  cette  époque,  spécialement 
dans  la  Gaule,  les  peuples  avaient  en  général  pour  fron- 
tières des  neuves,  des  rivières,  des  montagnes,  des  bois. 
Quelles  furent  les  frontières  établies  et  reconnues  entre 
les  Trévires  et  les  Rèmes?  Elles  étaient  évidemment 
fixées  par  le  cours  de  la  Meuse;  sinon  il  serait  impossible 
de  comprendre  la  direction  suivie  par  les  Trévires  au 
moment  de  se  diriger  vers  le  camp  des  Romains,  et  d'ex- 
pliquer comment  ceux-ci  auraient  pu  envahir  si  subite- 
ment le  territoire  des  ennemis  pendant  les  poursuites 
dirigées  contre  leur  chef  Induciomare. 

De  ces  faits  résulte  évidemment  que  Labiénus  et  son 


(1)  «  Die  Sclilacht  des  Labiénus,  dil-il,  gesjen  die  Trevirer  scheint 
also  an  der  Chiei's,  oder  Semois,  vorgefallen  und  aucli  Induciomarus 
in  einem  dieser  Fiasse,  welche  sich  an  die  Maas  ersfissen,  umgekom- 
men  zu  sein.  Wen  sie  an  der  Maas  selltsl  statt  gehabt  batte,  vviirde 
C;esar  den  Namen  des  Plusses  warscheinlicb  nicht  verscbwiegeu 
baben  »  (p.  35).  Mais  la  Ciiiers  a  sa  source  à  Esch,  entre  en  France, 
baigne  Longvvy,  Longuyon,  Montmédy,  Carignan  et  se  décbarge 
dans  la  Meuse  ;  et  la  Semois,  née  près  d'Arlon,  arrose  Bouillon  et  se 
jette  dans  la  Meuse  près  de  Moncbarmé,  en  France.  Ces  rivières  et 
ces  endroits  sont  loin  du  pays  de  Reims,  où  Labiénus  était  établi, 
selon  les  renseignements  de  César.  Il  faut  donc  admettre,  bon  gré, 
mal  gré,  que  le  fliimen  désigné  par  le  proconsul  était  la  Meuse. 


(   109  ) 

camp  étaient  installés  près  de  la  Meuse,  dans  le  pays  des 
Rèmes,  conformément  au  texte  de  César.  La  victoire  du 
proconsul,  remportée  à  la  plus  grande  joie  des  Rèmes 
sur  les  Gaulois  insurgés,  fut  aussi  communiquée  à 
Labiénus,  pendant  son  séjour  chez  ses  hôtes,  avec  une 
incroyable  vitesse,  bien  qu'il  fût  éloigné,  selon  César,  de 
soixante  mille  pas  des  quartiers  de  Cicéron,  où  le  pro- 
consul était  arrivé  seulement  après  la  neuvième  heure  du 
jour. 

César  lui-même,  à  cette  époque,  résidait  pour  ainsi  dire 
constamment  chez  les  Rèmes,  qui  lui  étaient  dévoués, 
et  ce  afin  d'être  à  la  portée  de  ses  lieutenants  lixés  dans 
leur  pays  ou  aux  environs.  Ce  dévouement  des  Rèmes 
témoigné  aux  Romains  s'explique  naturellement.  Tou- 
jours menacés  par  les  Germains,  ils  étaient  heureux  de 
trouver  chez  leurs  dominateurs  des  alliés  prêts  à  les 
défendre  contre  les  menaces  et  les  entreprises  des  voisins 
d'Outre-Meuse.  A  leur  avis,  mieux  valait  courber  la  tète 
devant  Rome,  que  de  voir  constamment  le  pays  exposé 
à  la  merci  des  hordes  germaines,  toujours  poussées  de 
l'Orient  vers  l'Occident  par  des  envahissements  répétés 
dans  la  Gaule,  et  constamment  prêtes  à  s'établir  dans 
les  possessions  des  peuples  voisins. 

Rien  d'étonnant  si  la  rive  droite  de  la  Meuse  a  été 
choisie  par  César  ou  Labiénus  dans  le  but  d'y  fixer  un 
camp.  Celui-ci  était  établi  dans  une  plaine  facile  à  défen- 
dre, tandis  que  la  rive  gauche,  hérissée  de  collines  et 
d'accidents  de  terrain,  présentait  de  grands  inconvénients 
pour  la  défense.  Cette  position  à  la  droite  du  fleuve  avait 
en  outre  le  grand  avantage  d'être  une  menace  continuelle 
à  l'adresse  des  Trévires  et  des  Germains,  toujours  prêts  à 
envahir  les  possessions  des  Gaulois  et  à  combattre  les 


(  HO  ) 

Romains.  Elle  commandail  aussi  la  route  la  plus  courte 
établie  entre  les  Rèmes  et  la  Germanie.  Telle  était  la 
position  de  ce  camp,  qui  répondait  parfaitement  aux  exi- 
gences de  l'art  militaire  des  Romains.  Toujours  installés 
sur  une  hauteur  qui  dominait  les  environs,  les  camps 
romains  occupaient  généralement  les  bords  d'une  rivière 
ou  d'un  fleuve  dont  les  eaux  étaient  destinées  aux 
hommes  et  aux  animaux.  Mosomagus  présentait  toutes 
ces  conditions. 

Parvenue  aux  Trévires,  la  nouvelle  des  succès  de  César 
engagea  leur  chef  Induciomare  à  se  retirer  pendant  la 
nuit  et  à  ramener  ses  troupes  dans  l'intérieur  du  pays 
(c.  54).  Cette  retraite  momentanée  ne  lui  fit  pas  perdre 
courage  ni  l'envie  de  reprendre  l'ofïénsive  pendant  une 
campagne  dirigée  contre  les  Romains.  Après  avoir  déclaré 
ennemi  de  la  patrie  son  gendre  Cingétorix,  personnage 
très  dévoué  aux  Romains,  il  annonça  aux  peuples  de  la 
Gaule  qu'il  se  rendrait  chez  eux  par  le  territoire  des 
Rèmes,  promettant  de  le  ravager  et  d'attaquer  le  camp 
de  Labiénus  (c.  o()).  C'était  évidemment  le  résultat  de  la 
haine  bien  caractérisée  qui  existait  entre  les  Rèmes  et 
leurs  voisins  les  Trévires,  haine  de  race  et  de  voisinage. 
Quant  à  Labiénus,  César  nous  apprend  qu'il  occupait  une 
position  fortifiée  par  la  nature  et  l'art  et  ne  redoutait 
aucun  danger  ni  pour  lui  ni  pour  ses  troupes.  En  atten- 
dant, Induciomare  faisait  manœuvrer  sa  cavalerie  autour 
(lu  camp  romain,  dans  le  but  d'en  reconnaître  la  situation 
et  d'inspirer  l'effroi  à  l'ennemi.  De  son  côté,  Labiénus 
retint  toutes  ses  troupes  dans  le  camp  et  ne  négligea 
rien  pour  faire  croire  à  l'ennemi  qu'il  redoutait  ses 
attaques  (c.  58).  Cependant,  dit  César,  Induciomare 
s'approcha,  comme  de  coutume,  de  notre  camp,  et  passa 


(  m  ) 

une  grande  partie  de  la  journée  dans  le  voisinage,  tandis 
que  ses  cavaliers  lançaient  des  traits  et,  par  des  invectives, 
nous  provoquaient  au  combat.  Personne  ne  leur  répondit, 
et  le  soir  ils  se  retirèrent  en  désordre.  Tout  à  coup  Labié- 
nus  fit  sortir,  d'une  manière  inattendue,  par  les  deux 
portes  du  camp,  toute  sa  cavalerie,  avec  ordre  de  pour- 
suivre Induciomare  et  de  l'amener  mort  ou  vivant.  «  La 
fortune,  ajoute  César,  seconda  les  desseins  de  Labiénus. 
Poursuivi  seul  par  tous  et  atteint  au  gué  du  flumen,  Indu- 
ciomare est  tué  (i).  » 

Ce  flumen,  que  César  ne  désigne  pas  par  son  nom,  est 
évidemment  la  Meuse.  Très  au  courant  de  la  situation 
du  pays  des  Trévires,  par  suite  des  relations  antérieures 
de  Labiénus  établies  dans  leurs  possessions  (2),  César, 
sans  doute,  en  connaissait  trop  bien  la  topographie  pour 
s'expliquer  à  ce  sujet.  Souvent  il  oubliait  de  nommer 
d'une  manière  précise  les  cours  d'eau  ou  les  désignait 
parfois  par  le  mot  flumen.  Ainsi,  il  garde  le  silence  le  plus 
absolu  à  propos  du  tleuve  ou  de  la  rivière  qui  entourait 
la  forteresse  gauloise  d'Uxellodunum,  mentionnée  dans  le 
livre  VIIT  des  Commentaires.  Il  n'y  avait  pas  non  plus, 
dans  les  parages  de  la  Meuse,  d'autres  rivières  ni  fleuves, 
si  ce  n'est  deux  cours  d'eau  peu  importants  :  la  Semois 
et  la  Chiers,  petites  rivières  non  navigables  ni  flottables, 
qui  ne  pouvaient  arrêter  le  passage  d'une  cavalerie.  Peu 
profondes,  spécialement  près  de  la  grande  route,  elles  ont 
à  peine  quelques  pieds  d'eau,  qu'un  cavalier  peut  facile- 
ment franchir  sans  y  chercher  un  gué.  A  ces  deux  rivières 


(1)  Quiim  uniim  omnes  pelèrent,  in  ipso  flyminis  vado  deprehemus 
Induciomarus  interficitur,  caputque  ejus  referlur  in  Castro  (c.  58). 

(2)  Voy.  à  ce  sujet  les  Commentaires,  liv.  I,  c.  .^î6  et  .ST,  et  le  liv.  III, 


(  H^^  ) 

nous  devons  ajouter  l'Aisne,  qui  coule  sur  le  territoire 
rémois.  C'est  en  tous  cas  une  question  de  peu  d'impor- 
tance, qui  ne  saurait  prouver  que  le  camp  de  Labiénus 
n'était  pas  établi  près  de  la  Meuse,  chez  les  Rèmes,  con- 
trairement à  l'assertion  de  César.  En  ce  point,  nous 
sommes  d'accord  avec  le  P.  Alexandre  Wiltheim,  auteur 
de  la  carte  de  l'ancien  pays  de  Trêves,  publiée  par 
Betholet  (1)  et  reproduite  par  Paquet  (2).  Cette  carte 
olïre  certaines  analogies  avec  celle  insérée  dans  le  tra- 
vail précité  de  Steininger,  en  ce  qui  concerne  l'en- 
semble des  renseignements  topographiques,  mais  non 
pour  les  détails.  Néanmoins  les  deux  auteurs,  sans 
s'occuper  de  ces  travaux,  sont  d'accord  pour  arrêter  les 
frontières  occidentales  du  pays  de  Trêves  aux  bords  de 
la  Meuse,  fleuve  qui  a  servi  longtemps  de  frontière  à  l'em- 
pire romain.  Sur  ce  point,  ils  sont  du  même  avis  que 
Hontheim  (ô). 

Nous  devons  donc  admettre  que  le  camp  de  Labiénus 
n'était  pas  fixé  à  Rocroy,  ville  située  à  une  trop  grande 
distance  de  la  Meuse,  dans  une  vaste  plaine,  tandis  que, 
selon  la  description  de  César,  le  camp  de  son  lieutenant 
était  assis  près  du  flumen,  dans  un  endroit  fortifié  par  la 
nature  et  l'art  (4). 

Quant  aux  autres  localités  indiquées  par  Creuly,  Napo- 
léon m,   von  Goler,   Abel,   Steininger  et  les  auteurs 


(i)  Cette  carte  est  insérée  dans  l'Histoire  de  Luœembourfi,  t.  I, 
publiée  en  -1721. 

(2)  Die  Hauftatsaclien  der  Luxemburger  Geschichte,  Liixemboui'Cf, 
1839. 

(3)  Historia  trevirensis,  t.  I,  pp.  4  et  5. 

(4)  Labiénus,  quum  et  loci  natura,  et  manu  mmdtissimis  caslris 
sese  contineret,  de  suo  ac  legionis  periculo  nihil  timebat  (c.  S7). 


(  H5) 
énumérés  plus  haut,  elles  n'ont  rien  de  commun  avec  les 
renseignements  fournis  par  César,  rien  qui  se  rapporte  à 
la  Meuse,  fleuve  sur  lequel  le  camp  était  assis.  C'est  ce 
qui  nous  dispense  d'en  parler  et  de  discuter  leurs  opinions. 

Où  était  enfin  situé  le  camp  de  Labiénus  sis  sur  la 
Meuse?  Telle  est  la  question  que  nous  tâcherons  d'élucider. 

Après  avoir  fait  remarquer  que  ce  retranchement  était 
fixé  sur  la  rive  droite  de  ce  fleuve,  près  du  territoire 
des  Rèmes  (1),  on  nous  demandera,  sans  doute,  pour- 
quoi César  n'a  pas  désigné  par  son  nom  le  flumen  près 
duquel  ce  camp  était  assis.  Rien  de  plus  facile  à  expli- 
quer. Le  lecteur  des  Commentaires  du  proconsul  et  des 
écrits  des  auteurs  latins  a  pu  se  convaincre  que  ceux-ci 
ont  toujours  eu  un  but  bien  déterminé,  celui  d'éviter  les 
détails,  et  d'énoncer  les  faits  sommairement.  Par  suite 
de  l'application  de  ce  système,  César  a  simplement  men- 
tionné, sans  le  nommer,  le  camp  de  Labiénus,  assis  sur  la 
Meuse,  le  seul  et  unique  fleuve  des  Rèmes.  Aucun  autre 
endroit  ne  présentait  les  mêmes  avantages.  D'une  part,  le 
camp  était  bien  défendu  contre  les  agressions  de  l'en- 
nemi; d'autre  part,  il  commandait  la  grande  route  vers  les 
possessions  des  Trévires.  Le  choix  de  cet  emplacement 
était  à  la  fois  politique  et  militaire,  politique  au  point  de 
vue  du  peuple  rémois,  militaire  en  ce  qui  concerne  la 
situation  des  Romains  en  présence  des  Germains. 

En  narrant  le  mouvement  des  troupes  romaines  lan- 
cées par  Labiénus  à  la  poursuite  d'Induciomare,  le  pro- 
consul ne  fait  pas  mention  de  leur  passage  ou  traversée 


(i)  Quartam  {legionem)  in  Rliemis  ciun  Tito   Labieno  in  con/înio 
Trevirorum  Inermare  jussit  (1.  V,  c.  24). 

Ô'""    SÉUIE,    TOME    XXXVl.  <S 


(  i\A  ) 

par  un  fleuve  ou  par  une  rivière,  pas  même  par  un  cours 
d'eau.  JNéanmoins,  si  ce  passage  avait  eu  lieu  soit  par  un 
gué,  soit  par  des  bateaux,  soit  par  un  pont,  cette  circon- 
stance aurait  dû  prendre,  dans  la  narration,  une  plus 
grande  importance  que  celle  relative  à  l'ouverture  des 
deux  portes  du  camp  romain  au  moment  de  l'attaque 
dirigée  contre  Induciomare.  Toutes  ces  circonstances 
établissent,  de  la  manière  la  plus  évidente,  que  le  camp 
de  Labiénus  était  assis  à  la  droite  de  la  Meuse  et  à  l'em- 
placement actuel  de  Mouzon,  localité  désignée  sur  la 
grande  route  par  Peutinger  sous  le  nom  de  Mose  ou  Mosa. 
Cette  localité  était  traversée  par  le  chemin  de  Reims 
[Durocorlurum),  passant  par  Voncq  {Vimgus  viens),  par 
Mosomagus  ou  Mosa,  par  Yvoy-sur-Cher  [Epoissum  viens), 
par  Arlon  {Orolannm  viens)  et  Nieder-Auwen  {Andetanna 
viens).  Sur  ce  point,  nous  sommes  parfintement  d'accord 
avec  d'Anville  (1)  et  Desjardins  (2). 


(1)  Notice  des  Gaules,  pp.  469-495. 

(2)  Géographie  de  la  Gaide,  p.  108.  Cet  auteur  fait  observer  à  ce 
sujet  et  à  juste  titre  qu'Epoisso  vicies  est  indubitablement  Yvoy-sur- 
Chiers  (voir  Valois,  p.  189),  et  que  la  direction  de  cette  route  est  bien 
celle  de  Reims  à  Trêves.  Aucune  des  stations  de  la  Table  ne  coïncide 
avec  celles  de  l'itinéraire,  et  si  Mosa  devait  être  identifié  avec  Mouzon, 
comme  l'ont  voulu  la  plupart  des  géographes,  les  deux  routes  se  con- 
fondraient en  ce  point,  Mouzon  étant  près  d'Yvoy  (Cher).  Mais  le 
relevé  fait  avec  soin,  dans  ces  derniers  temps,  des  vestiges  des  voies 
romaines  dans  le  département  des  Ardennes,  a  signalé  deux  grandes 
artères  principales,  toutes  deux  partant  de  Reims  :  l'une  dans  la  direc- 
tion de  Trêves,  passant  par  Voncq,  Mouzon  et  Yvoy,  qui  parait  satis- 
faire à  toutes  les  exigences  de  l'itinéraire  d'Antonin  ;  l'autre  passant 
par  Roisy,  Saint-Loup,  Château-Portien,  Noroion-Portien  et  gagnant 
la  Meuse  à  Mézières. 


(  Ha  ) 

Après  avoir  établi,  ainsi  que  nous  l'avons  tait  plus 
haut,  que  ce  retranchement  était,  selon  César,  sis  près  de 
la  Meuse,  dans  le  pays  des  Rèmes,  il  y  a  lieu  d'en  indiquer 
la  position  précise.  Dans  ce  but,  nous  avons  consulté  les 
tracés  des  routes  romaines  de  ce  pays.  Des  auteurs  ont 
prouvé,  d'une  manière  certaine,  que  la  plupart  des  grandes 
routes  de  communication  sous  l'empire  romain  étaient 
généralement  établies  d'après  le  système  admis  antérieu- 
rement par  les  nationaux.  Rien  de  plus  naturel, 

A  toutes  les  époques,  les  peuples,  et  les  Gaulois  sur- 
tout, devaient  être  en  possession  de  grands  chemins  et 
de  routes.  S'il  en  est  ainsi,  —  et  nous  n'en  doutons  pas, 
—  il  est  évident  que  pour  fixer  l'itinéraire  suivi  par 
Labiénus  au  moment  de  la  conquête  de  Trêves,  nous 
devons  admettre  les  indications  suivantes,  reproduites 
par  Steininger  : 

Iter  a  Durocortoro  (i). 
Vungum  (2),  vicum,  leg.  XXII. 
Epoisum  (3),  leg.  XXII. 
Orolanum  (4),  vicum,  leg.  XX. 
Andetanale  (5),  vicum,  leg.  XV. 
Treveros  (6). 

Nous  avons  donc  pour  itinéraire  : 

Reims,  Voncq,  Yvoy-sur-Chiers,  Arlon,  Nieder  Auwen 


(1)  Reims. 

{"l)  Voncq. 

(3)  Yvoy-sur-Cher. 

(i)  Arlon. 

(5)  Nieder  Auwen. 

(6)  Trêves  (voy.  Steininger,  loc.  cit.,  p.  14"; 


(  H6  ) 

el  Trêves.  Un  seul  endroit  est  passé  sous  silence  dans  cette 
nomenclature  :  c'est  Mosomagus,  aujourd'hui  Mouzon  (1), 
localité  sise  dans  le  département  des  Ardennes  et  qui 
nous  intéresse  particulièrement.  Elle  commandait  la 
grande  communication  entre  le  pays  des  Rèmes  et  Trêves, 
et  permettait  à  Labiénus  et  aux  Romains  de  surveiller 
continuellement  la  Meuse,  limite  naturelle  entre  les 
possessions  des  Gaulois  et  des  Trévires.  Elle  élail  assise 
à  l'endroit  dit  Mose,  indiqué  à  la  carte  de  Peutinger,  et 
appelé  aussi  Mosomagus,  ensuite  Mouzon.  Cette  dénomi- 
nation se  rapporte  à  la  fois  au  fleuve  et  à  l'endroit.  C'est 
dans  cette  localité  qu'était  établi  le  camp  de  Labiénus, 
le  refuge  des  soldats  romains,  surpris  par  Ambiorix  et  les 
Éburons  au  moment  de  quitter  Aluatuca.  Sous  la  domina- 
tion des  Romains,  c'était  le  lieu  de  résidence  du  Magister 
equilum  GaUiarum  (2).  Pendant  le  moyen  âge,  c'était  un 
ancien  domaine  donné  par  Clovis  II  à  l'évèché  de  Reims 
et  sis  sur  la  rive  droite  de  la  Meuse,  à  17  kilomètres  au 
sud  de  Sedan.  La  localité  est  citée  dans  la  vie  de  saint 
Maximin  en  850(5).  Flodoard  ne  la  mentionne  guère  dans 
son  Ilistoria  ecdesiac  Uemensis,  ni  Marlot,  tandis  que  Vale- 
sius,  dans  su  Aoticia  GaUiarum  (p.  564),  en  parle  longue- 


(1)  Voy.  à  ce  sujet  Bischoff  et  Môi.ler,  Vergleichendes  Wôrterbuch 
der  allen,  mittleren  und  neiien  Géographie,  p.  766.  —  Pendant  le 
moyen  âge  on  écrivait  tantôt  Mosomiim,  tantôt  3Iosomagus,  Mousson. 
Mossomium,  etc.,  dénominations  anciennes  qui  sont  devenues 
aujourd'hui  Mouzon. 

(2)  Noticia  dignitatum  civiliiim  quam  militariuni  perGallias.  (Voy. 
DoM  Bouquet,  Rerum  Galliorum  et  Francoruni  seriptores,  1. 1,  p.  126.) 

(3)  On  lit  :  Trevirorum  episcopiis  quein  annos  DCCCXXX  composuit 
Mosomagum  castellum  vocat  a  Mosa  (V.  Flodoardus). 


(  M7  ) 

ment  :  Mosomagus,  dit-il,  et  pagus  Mosomagensis.  Moso- 
magus  a  flumene  Mosa,  cui  adjacet  galUcum  nomen  incenit, 
quasi  Mosa  vel  ad  Mosam  mansio,  vulgo  Mouson...  In  Noti- 
cia  imper  a  romani  milites  dileclos  ex  incolis  loci  ejus  con- 
tracta noniine  Musmagenses.  D'Arbois  de  Jubainville  (!) 
imprime  :  «  Mosomagus,  champ  de  la  Meuse,  aujourd'luii 
Mouzon.  ))  Autrefois  fortifiée,  cette  ville  fut  souvent  prise 
et  reprise,  puis  définitivement  démantelée  en  1055.  Une 
riche  abbaye  de  Bénédictins  y  était  établie  sous  le  régime 
ancien.  La  localité  avait  donc  ci-devant  une  grande 
importance  (2). 

A  ces  détails  nous  devons  ajouter  les  suivants,  fournis 
par  Paul  Joanne  :  «  Mouzon,  dit-il,  est  l'antique  bourgade 
romaine  de  Mosomagus.  Une  abbaye,  dont  dépend  l'église 
actuelle  de  la  localité,  y  fut  fondée  au  X'"  siècle  par  les 
archevêques  de  Reims  ;  mais  ceux-ci  ne  permirent  pas 
que  le  monastère  fût  érigé  en  évêché.  Il  se  tint  du  XP  au 
XITP  siècle  plusieurs  conciles  à  Mouzon  (3).  »  Constatons 
en  outre  que  selon  Joanne  :  «  Mouzon  est  situé  au  sud 
d'un  coteau  de  545  {sic)  sur  la  rive  droite  de  la  Meuse  », 
renseignement  précieux  au  point  de  vue  de  l'histoire  de 
la  localité.  Il  démontre  que  notre  observation  au  sujet  de 
la  situation  des  camps  pendant  la  période  romaine  est 
parfaitement  fondée,  en  disant  que  ces  établissements 


(1)  Recherches  sur  la  propriété  foncière  et  les  noms  des  lieux  habités^ 
p.  153.  —  Le  Dictionnaire  archéologique  de  la  Gaule,  époque  celtique, 
publié  par  la  Commission  de  l'instruction  en  France,  n'en  est  pas 
encore  à  la  lettre  M. 

(2)  Voy.  au  surplus  Marlot,  Historia  ecclesiœ  remensis. 

(3)  Paui.  Joanne,  Dictionnaire  géographique  et  administratif  de  la 
France,  t.  IV,  p.  2887. 


(  idS  ) 

militaires  étaient  constamment  fixés  sur  un  terrain  élevé, 
près  d'un  tleuve  ou  d'une  rivière.  Mosomagus  servant  de 
camp  à  Labiénus,  remplissait  parfaitement  toutes  les  con- 
ditions voulues  et  exigées  par  l'art  militaire.  C'était  un 
endroit  élevé,  fortifié  par  la  nature  et  l'art,  conformément 
à  la  description  qu'en  donne  César,  et  destiné  à  résister 
aux  attaques  et  aux  invasions  des  Trévires  et  des  Ger- 
mains. 

Nous  ne  doutons  pas  qu'après  avoir  établi  d'une  manière 
si  positive  la  position  du  camp  de  Labiénus,  il  sera  pos- 
sible d'indiquer  l'emplacement  des  autres  établissements 
militaires  des  Romains,  situés  dans  les  environs  et  men- 
tionnés par  César.  Le  camp  de  Labiénus  était,  pour  ainsi 
dire,  le  centre  de  toutes  les  installations  romaines  des 
environs,  et  par  son  importance,  et  par  sa  situation  sous 
le  proconsulat  de  César  et  plus  tard  pendant  le  règne  des 
empereurs  romains. 


(  \\9  ) 


CLASNr:   DE<$   BEAUIL-ARTS. 


Séance  du  7  juillet  '1898. 

M.  RoBiE,  vice-directeur,  occupe  le  fauteuil. 

M.  le  chevalier  Edmond  March.^l,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  Éd.  Fétis,  Th.  Radoux,  J.  Deman- 
nez,  P.-J.  Clays,  G.  De  Groot,  Gust.  Biot,  H.  Hymans, 
Th.  Vinçotte,  Jos.  Stallaert,  Max.  Rooses,  G.  Huberti, 
A.  Hennebicq,  Éd.  Van  Even,  Alfred  Cluysenaar,  le  comte 
Jacques  de  Lalaing,  J.  Winders,  Ém.  Janlet,  H.  Maquet, 
J.  Van  Ysendyck,  membres;  J.-B.  Meunier,  Alb.  De  Vriendt, 
Flor.  van  Duyse,  G.  Hermans  et  Emile  Mathieu,  corres- 
pondants. 


CORRESPONDANCE 


La  Classe  apprend,  sous  l'impression  d'un  profond 
sentiment  de  regret,  la  perte  qu'elle  vient  de  faire  en  la 
personne  de  M.  Joseph  Jaquet,  membre  de  la  section  de 
sculpture,  décédé  à  Schaerbeek  le  9  juin  dernier. 

Elle  vote  des  remerciements  à  M.  Marchai,  qui  a  bien 
voulu  prendre  la  parole  au  nom  de  l'Académie,  lors  des 
funérailles,  en  remplacement  de  M.  le  directeur  Tardieu, 
absent  du  pays.  Le  discours  de  M.  Marchai  paraîtra  au 
Bulletin. 


(  120  ) 

Une  lettre  de  condoléance  sera  envoyée  à  M'""  veuve 
Joseph  Jaqiiet. 

La  Classe  prend  ensuite  notification  de  la  mort  de  Sir 
Edward  Burne-Jones,  associé  de  la  section  de  peinture 
depuis  le  "janvier  1897,  décédé  à  Londres  le  ITjuin  1898, 
à  l'âge  de  65  ans. 

—  Hommage  d'ouvrages  : 

M.  P.  Génard,  correspondant  de  la  Classe,  fait  hom- 
mage d'une  brochure  intitulée  :  Mijne  laatste  nasporingen 
over  de  geboorteplaats  van  QuirUen  Massijs.  —  Remercie- 
ments. 


Discours  prononcé  le  13  juin  1898,  au  nom  de  la  Classe 
des  beaux-arts,  aux  funérailles  de  Joseph  Jaquel,  par 
le  chev.  Edm.  Marchai,  secrétaire  perpétuel  de  l'Aca- 
démie. 

Messieurs, 

C'est  à  un  contemporain  de  Simonis,  de  Fraikin,  des 
frères  Geefs  que  nous  avons  eu  l'honneur  de  compter 
dans  nos  rangs,  ainsi  que  de  tant  d'autres  sculpteurs 
éminents  qui  ont  leur  place  marquée  par  leurs  œuvres 
magistrales  dans  l'histoire  du  mouvement  artistique  de 
la  Belgique  depuis  1830;  c'est  à  un  des  membres  les  plus 
vénérés  de  la  Classe  des  beaux-arts  que  je  viens  adresse)' 
le  suprême  hommage  de  l'Académie  royale  de  Belgique, 
en  raison  de  la  solidarité  confraternelle  qui  existe  entre 
tous  ceux  qui  composent  le  premier  corps  savant  du  pays. 

D'après  l'usage,  il  n'appartient  qu'au  directeur  de  la 


(  <-^«  ) 

(-lasse  —  selon  ses  prérogatives  —  de  parler  en  aussi 
doiiloureiise  circonstance.  L'absence  de  M.  Ch.  Tardieu 
empêche  notre  estimé  confrère  de  remplir  ce  devoir. 
Je  suis  d'autant  plus  heureux  de  pouvoir  le  remplacer  que 
cette  occasion  me  permet  de  payer  à  la  mémoire  de 
Joseph  Jaquet  la  dette  d'amitié  que  j'ai  contractée  envers 
lui  durant  tant  d'années  d'affectueuses  relations. 

C'est  donc  au  nom  de  la  Classe  des  beaux-arts  et  en 
même  temps  de  l'Académie  tout  entière,  que  je  viens 
saluer  une  dernière  fois  la  dépouille  mortelle  de  l'un  de 
ses  membres  les  plus  aimés,  au  moment  où  a  sonné 
pour  lui  l'heure  du  repos  éternel,  après  une  longue  et 
laborieuse  existence  consacrée  à  la  sculpture  et  à  son 
enseignement  professoral. 

Joseph  Jaquet  est  né  le  50  janvier  1822  à  Anvers,  qui 
a  donné  le  jour  à  tant  d'illustrations  artistiques  qui  en 
font  la  gloire  la  plus  pure  et  la  plus  radieuse.  Le  vieil  et 
excellent  ami,  dont  le  cœur  vient  de  cesser  de  battre,  me 
racontait  un  jour  comment  s'était  révélé  en  lui  le  goût 
pour  la  sculpture. 

Tout  le  monde  connaît  l'origine  modeste  des  Geefs; 
elle  n'en  rehausse  que  plus  la  célébrité  qui  entoure  leur 
nom.  Cette  origine,  au  surplus,  a  été  le  sort  commun  à 
bien  des  hommes  éminents  qui  ont  honoré  le  pays.  Le 
Gouvernement  venait  d'adjoindre  la  sculpture  à  la  peinture 
pour  constituer  les  grands  concours,  dits  Prix  de  Rome, 
créés  en  1810  par  le  Roi  Guillaume,  lors  de  son  installa- 
tion sur  le  trône  des  Pays-Ras.  Le  premier  concours  pour 
la  sculpture  fut  ouvert  en  I85(>  et  ce  fut  Joseph  Geefs  qui 
remporta  le  premier  prix.  A  cette  époque,  le  collège  des 
bourgmestre  et  échevins,  accompagné  des  membres  du 
jury  et  du  corps  professoral  de  l'Académie  d'Anvers,  où 


(  \±^2  ) 

se  jugeaient  ces  concours,  ramenait  chaque  fois  triom- 
phalement le  lauréat  à  son  domicile  :  c'était  le  complé- 
ment de  l'honneur  qui  venait  d'être  décerné  à  celui-ci. 
Le  cortège,  musique  en  tête,  qui  entourait  le  jeune 
Geefs,  devait  passer  devant  la  maison  des  parents  de 
Jaquet.  La  vue  de  cette  manifestation  émotionna  telle- 
ment le  jeune  Joseph  que  son  père,  qui  comptait  déjà 
sur  lui  pour  continuer  un  jour,  en  sa  qualité  d'aîné, 
son  laborieux  métier,  dut  céder  à  ses  instantes  sollicita- 
tions et  lui  accorda  l'autorisation  de  suivre  les  cours  de 
cette  Académie  où  son  jeune  concitoyen  venait  d'être  si 
brillamment  couronné.  La  carrière  de  Jaquet  venait  de  se 
décider.  Peu  d'années  après,  il  pouvait,  lui  aussi,  apprécier 
les  charmes  d'un  triomphe  par  les  récompenses  que  lui 
valurent  ses  progrès  et  son  assiduité  aux  cours  de  dessin, 
de  modelage  et  de  composition.  Et  avec  quelle  légitime 
fierté.  Messieurs,  dut-il  se  voir  honoré,  plus  tard,  en  pleine 
efflorescence  de  sa  carrière,  du  titre  de  membre  effectif 
du  corps  académique  de  cette  Académie  d'Anvers,  cette 
distinction  si  recherchée  qui  ne  s'accorde  qu'à  l'élite  des 
artistes!  Quels  durent  être  alors  ses  sentiments  d'émotion 
lorsque,  recevant  cette  distinction,  il  se  reportait  à  ses 
années  d'enfance,  alors  qu'il  suivait  comme  élève  les  cours 
de  cette  même  institution  ! 

Dès  qu'il  eut  acquis  les  qualités  qu'exige  la  maîtrise, 
la  grande  loi  des  satisfactions  matérielles  de  l'existence 
absorba  ses  premières  années. 

Peu  après  i850,  Guillaume  Geefs,  comme  on  le  sait, 
et  qu'Anvers  s'honore  de  compter  comme  son  plus  illustre 
sculpteur  des  temps  modernes,  était  venu  habiter  Bruxelles, 
où  il  put  bientôt  donner  le  plus  puissant  essor  à  son 
magistral  talent,  grâce  à  l'auguste  protection  de  notre  pre- 


(  123  ) 

mier  Souverain.  Joseph  Jaqiiet,  comme  son  ancien  pro- 
fesseur, abandonna  aussi  Anvers  pour  se  llxer  à  Bruxelles, 
non  sans  conserver  à  l'égard  de  sa  ville  natale  les  senti- 
ments de  la  plus  filiale  atfection. 

Dès  qu'il  se  fut  assuré  les  moyens  de  subvenir  à 
l'existence,  il  entra  dans  la  lutte  des  expositions. 

C'est  en  1845  qu'il  obtint  ses  premiers  succès  au 
Salon  triennal  de  Bruxelles.  Son  œuvre  principale  était 
modeste  :  une  l'énus,  mais  il  s'en  dégageait  déjà  un  cer- 
tain charme  dans  le  modelé  qui  attira  l'attention  du 
public.  Trois  années  après,  il  se  présenta  au  même  Salon 
avec  un  groupe  tout  à  la  fois  charmant  et  tragique  qu'il 
avait  appelé  :  La  première  nuit  cVexil  d'Eve. 

Déjà  il  avait  la  hantise  de  la  sculpture  monumentale, 
et  c'est  en  cette  même  année  1848  qu'il  installait  à  Chi- 
may  sa  statue  du  célèbre  poète  et  chroniqueur  Jehan 
Froissart,  que  lui  avait  commandée  le  prince  de  Chimay 
pour  cette  localité  qui  dispute  à  Valenciennes  l'honneur 
d'avoir  donné  le  jour  à  cette  grande  figure  de  l'histoire 
du  XI V"  siècle. 

Le  Salon  de  Bruxelles  de  1851  vit  apparaître,  dans 
son  éclatante  beauté,  son  groupe  :  L'Age  d'or.  Le  succès 
de  Jaquet  fut  immense;  l'œuvre  était  digne  de  louanges 
et  d'admiration.  Le  Gouvernement  s'empressa  de  lui  en 
demander  une  réplique  en  marbre  pour  le  Musée  de 
l'Etat,  ce  suprême  honneur  que  le  pays  n'accorde  qu'aux 
artistes  qui  cherchent  par  leurs  productions  à  soutenir  la 
réputation  de  la  Belgique.  Son  Age  d'or  figure  presque 
vis-à-vis  de  l'admirable  Amour  captif  de  Fraikin,  qui 
date  de  cette  époque. 

C'est  dans  ce  même  Salon  de  1851  que  l'on  put 
admirer  son  groupe  de  L'Enlèvement  des  Sabines,  qui  lui 


{  \U  ) 

avait  été  inspiré  par  la  célèbre  œuvre  de  Jean  Bologne, 
à  Florence ,  et  qui  fut  acquis  par  le  général  baron 
Goethals,  lequel  devint  aussi  le  possesseur  de  son  Pan- 
dore et  d'un  Amour  consolateur,  dont  iVI.  Mosselman  de 
Franquen  fit  l'acquisition  pour  son  hôtel  de  Bruxelles.  A 
ces  gracieux  sujets,  marqués  tout  à  la  t'ois  du  talent  si 
élégant  et  si  souple  de  formes  que  Jaquet  savait  donner 
aux  productions  de  son  imagination,  se  rattachent  encore 
d'autres  œuvres  en  marbre,  grandeur  nature  ou  demi- 
nature  :  L'Hospitalité,  acquise  par  M.  le  sénateur  Barban- 
son;  Flore,  à  M.  l'ingénieur  Deridder;  La  Bienvenue,  à 
ce  mécène  dont  le  pays  a  déploré  la  mort  :  M.  le  comte 
Amédée  de  Beauffort;  ['ënus  et  l'Amour,  à  M.  De  Wit; 
La  Corbeille  de  Joces,  acquis  par  M.  Verheyden,  à  Paris, 
et  les  trois  sujets  achetés  par  M.  Petit  :  Le  Dévouement, 
Les  Maraudeurs  et  Le  Massacre  des  Innocents.  Nous  nous 
bornerons  à  citer  ces  compositions  dont  la  notoriété 
restera. 

La  renommée  suivit  de  près  le  succès.  C'est  alors  que 
les  grandes  maisons  de  Paris,  Wegang,  Vidos,  Lerol 
frères  reproduisirent  par  le  bronze  plus  de  cinquante  de 
ses  groupes,  représentant,  entre  autres  :  Gain  et  Abel, 
Scène  du  déluge.  Le  Dévouement,  Éiisa,  L'Amour  désarmé, 
Les  Maraudeurs,  etc.  Jaquet  exécuta  en  outre  une  quan- 
tité considérable  de  statues  et  de  groupes,  dont  un 
certain  nombre  sont  en  Allemagne  et  en  Amérique. 

L'énumération  des  productions  de  cette  infatigable 
fécondité  artistique  serait  de  nature  à  faire  douter  de 
leur  authenticité  si  Joseph  Jaquet  n'avait  eu  pour  les 
réaliser  le  concours  dévoué  de  son  frère  Jacques. 

Son  Froissart  lui  valut  d'autres  commandes  de  sculp- 
ture monumentale.  Depuis  1853,  sa  statue  équestre  de 


(  125  ) 
rancieii  gouverneur  général  des  Pays-Bas,  le  prince 
Charles-Alexandre  de  Lorraine,  couronne  majestueuse- 
ment le  faîte  de  la  façade  de  la  Maison  des  Brasseurs, 
Grand'Place,  à  Bruxelles.  Cette  plate-forme  aérienne 
avait  été  établie  pour  une  statue  équestre  que  le  sculp- 
teur bruxellois  Marc  Devos  exécuta  à  la  demande  de  la 
corporation  des  brasseurs;  elle  représentait  l'électeur  de 
Bavière  Maximilien-Emmanuel,  gouverneur  des  Pays-Bas, 
qui  avait  aidé  si  puissamment  à  relever  les  maisons 
détruites  par  le  bombardement  de  1695.  Enlevée  par  un 
ouragan,  on  la  remplaça  par  une  autre  statue  en  bronze, 
laquelle  fut  à  son  tour  remplacée,  en  175:2,  par  une  statue 
également  équestre,  et  en  cuivre,  dit-on,  du  prince 
Cbarles  de  Lorraine,  qui  avait  été  ciselée  par  l'orfèvre 
Simon.  Les  sans-culottes  bruxellois  renversèrent  celle-ci 
en  1794;  elle  disparut  peu  après  l'entrée  des  Français 
en  juillet  1795,  et  prit  alors  le  chemin  de  la  fonderie  de 
canons  de  la  Bépublique,  à  Douai.  Ce  genre  de  statue, 
dans  les  airs,  n'est  pas  sans  offrir  de  grandes  difticultés 
au  point  de  vue  de  la  perspective.  Jaquet  s'en  est  tiré 
très  habilement,  et  sa  statue  fait  bonne  figure,  à  plus  de 
50  mètres  de  hauteur.  Cheval  et  cavalier  se  profilent 
dans  les  plus  heureuses  proportions. 

Mons  peut  s'enorgueillir  à  juste  titre  de  sa  belle  statue 
équestre  de  Baudouin  IX,  comte  de  Flandre  et  de  Hai- 
naut,  l'illustre  chef  de  la  quatrième  croisade,  qui  occupa 
le  trône  de  Constantinople  lors  du  partage  entre  les  che- 
valiers francs,  en  1205,  de  l'empire  grec  des  Comnène. 

Une  Benommée  colossale  en  bronze,  dont  il  avait 
surmonté,  en  1864,  le  Dôme  du  Palais  de  l'Industrie  à 
Amsterdam,  lui  valut  de  la  part  du  Gouvernement  hollan- 
dais la  commande  de  la  partie  sculpturale  du  monument 


(  126) 

national  que  celui-ci  érigea  en  4869,  dansleWilhem  Park, 
i^  La  Haye,  pour  consacrer  le  rétablissement  de  l'indépen- 
dance des  anciennes  Provinces-Unies,  en  1815,  et  le 
retour  dans  sa  patrie  de  Guillaume-Frédéric,  qui  devait 
devenir  roi  des  Pays-Bas  sous  le  nom  de  Guillaume  I^''. 

Jaquet  surmonta  ce  monument  d'une  Batavia  tenant 
de  la  main  gauche  le  drapeau  national  et  de  la  main 
droite  un  faisceau  de  flèches.  Derrière  se  trouve  le  lion 
néerlandais;  du  côté  du  monument  qui  est  tourné  vers  la 
ville,  se  voit  le  prince  Guillaume-Frédéric  prêtant  ser- 
ment à  la  loi  fondamentale.  Sur  le  revers  sont  :  Gysbert- 
Karel  van  Hogendorp,  Fr.-Adr.  van  den  Duyn  et  le 
comte  L.  de  Limburg-Stirum,  les  chefs  du  mouvement 
national  de  novembre  1815.  Sur  les  deux  petites  faces  sont 
les  figures  allégoriques  de  la  Liberté  et  de  la  Loi,  sous 
lesquelles  se  trouvent  des  bas-reliefs  représentant  le 
soulèvement  du  peuple  et  l'arrivée  du  prince  appelé  à 
gouverner  le  pays. 

Cette  décoration  colossale,  en  bronze,  valut  à  Jaquet  la 
croix  d'Officier  de  l'Ordre  de  la  Couronne  de  chêne,  que 
nos  voisins  du  nord  n'accordent  généralement  qu'aux 
artistes.  C'est  à  la  même  époque  que  le  Gouvernement 
belge  réleva  à  la  dignité  d'Officier  de  l'Ordre  de  Léopold. 

C'est  par  son  vaste  bas-relief  du  fronton  de  la  façade 
principale  de  la  Bourse  de  Bruxelles  et  par  les  deux  lions 
surmontant  les  murs  de  soutènement  du  grand  escalier, 
sculptés  en  1872,  ainsi  que  par  sa  belle  statue  de  Marie- 
Louise,  première  reine  des  Belges,  placée  à  Philippeville 
en  1879,  que  Jaquet  a  clos  la  part  qu'il  a  eue  dans  la 
statuaire  monumentale. 

Jaquet  ne  connut  jamais  réellement  le  repos.  Malgré 
cette  prodigieuse  production  d'œuvres,  il  sut  remplir  les 


(  i'^^  ) 

fonctions  de  professeur  de  sculpture  à  l'Académie  de 
Bruxelles,  où  l'avait  appelé  son  vieil  ami  Simonis,  avec 
qui  il  partagea  le  rude  sacerdoce  d'initier  les  jeunes 
élèves  à  l'art  qui  avait  fait  leur  réputation  à  tous  les  deux. 
Il  se  dévoua  complètement  à  cette  tâche,  qui  comporte 
des  aptitudes  toutes  particulières. 

La  place  de  Jaquel  était  déjà  marquée  depuis  long- 
temps dans  l'Académie  royale  de  Belgique.  Aussi,  lorsque 
la  mort  enleva  son  collègue  Simonis,  le  remplaça-t-il 
comme  membre  titulaire  de  la  Classe  des  beaux-arts. 

Ainsi  que  vous  venez  de  l'entendre,  Messieurs,  la  part 
de  Joseph  Jaquet  a  été  aussi  considérable  dans  le  mouve- 
ment de  la  sculpture  belge  depuis  1850,  que  celle  de 
Simonis,  de  Guillaume  Geefs  et  de  Fraikin.  Il  est  de  ceux 
de  qui  l'on  peut  hardiment  dire  qu'ils  ont  puissamment 
contribué  à  soutenir  la  vieille  réputation  artistique  de 
la  Belgique. 

L'art  marche  par  périodes.  Chacune  de  ces  périodes  est 
caractérisée  par  un  style  qui  en  porte  le  nom.  Les  artistes 
ne  sauront  jamais  méconnaître  en  leurs  prédécesseurs 
tout  ce  que  ceux-ci  ont  fait  pour  maintenir  le  sentiment 
du  beau  qui  est  la  véritable  expression  du  vrai.  Jaquet 
aura  été  le  dernier  représentant  de  cette  école  roman- 
tique, née  vers  1850,  lors  de  cette  éclosion  des  libertés  de 
la  pensée  et  qui  a  eu  son  époque  de  célébrité.  L'abandon 
des  vieilles  routines  de  l'école  classique,  l'abus  du  sym- 
bolisme ont  établi  une  démarcation  profonde  entre  la 
sculpture  d'hier  et  celle  d'aujourd'hui.  A  un  réalisme 
outré  a  déjà  succédé  la  recherche  du  sentiment  plus  vrai 
de  la  nature  étudiée  uniquement  en  elle-même  et  par  elle- 
même.  Le  conventionnel  n'existe  plus,  et  c'est  la  nature 
qui  préside,  toujours  la  nature,  non  dans  ses  aberrations 


(  128  ) 

et  ses  erreurs  que  d'aucuns  veulent  ériger  en  principe  de 
l'art.  Ce  n'est  plus  dans  les  froides  et  correctes  académies, 
comme  on  les  appelait  jadis,  et  qui  n'étaient  que  le  fruit 
de  combinaisons  enfantées  seulement  dans  les  ateliers, 
que  l'art  réside  encore  ;  c'est  la  nature  dans  tout  ce  qu'elle 
a  de  beau  et  de  vrai  qui  est  devenue  le  guide  des  jeunes 
générations  d'artistes.  Mais  cela  n'empêche  que  pour 
ceux-ci  comme  pour  leurs  anciens  maîtres,  lorsque  l'heure 
du  jugement  de  leurs  œuvres  sera  aussi  inéluctablement 
arrivée,  ils  se  rappelleront  que  ces  devanciers  ont  été 
pour  quelque  chose  dans  la  marche  ininterrompue  du 
progrès. 

Cher  Jaquet,  par  un  pieux  sentiment  familial,  on  t'a 
entouré  en  ce  moment  suprême  des  reproductions  de  tes 
compositions  préférées.  Mourir  dans  ces  conditions,  c'est 
disparaître  dans  une  apothéose  composée  de  tout  ce  que 
tu  avais  produit  pour  rappeler  de  grandes  gloires  de  la 
patrie  ou  pour  charmer  l'imagination  par  les  plus  gra- 
cieux symboles.  Toutes  ces  compositions  si  nobles  et  si 
éloquentes  auxquelles  tu  as  consacré  ton  talent,  consti- 
tuent ton  glorieux  cortège  dans  cette  route  qui  mène  vers 
l'éternité. 

Les  paroles  d'adieu  que  je  t'adresse,  cher  et  vieil  ami, 
reportent  mes  souvenirs  à  mon  enfance,  à  cette  époque  où 
tu  m'accueillais  la  main  ouverte  et  le  sourire  de  la  bien- 
veillance sur  les  lèvres  lors  de  mes  visites  dans  ton  atelier. 
Tel  tu  étais  alors,  tel  tu  as  toujours  été  pour  les  tiens, 
pour  tes  amis,  pour  tes  collègues  et  confrères,  i)Our  tes 
élèves  qui  te  chérissaient  et  qui  vénéreront  ton  nom,  pour 
tous  ceux,  enfin,  qui  ont  eu  le  bonheur  de  te  connaître 
et  d'apprécier  ton  cœur  loyal  et  généreux.  Que  ton  âme 
repose  en  paix,  ton  souvenir  restera  parmi  nous  comme 
ta  vivante  image  ! 


(  129  ) 
Adieu,  Jaquet,  tu  ne  laisses  après  toi  qu'un  arrière-petit  - 
fils  qui  faisait  toute  ta  joie.  Lorsque  pour  lui  sera  arrivé 
l'âge  de  la  raison,  ta  femme  bien-aimée,  ta  fille  chérie, 
à  la  douleur  de  qui  nous  nous  associons,  lui  rappelleront 
que,  seul,  le  travail  ennoblit.  Nous  lui  souhaitons, 
pour  égide  de  sa  destinée,  ta  si  belle  et  honorable 
existence. 


NOTE    BIBLIOGRAPHIQUE. 

Alb.  .Iacquot,  Les  Michel,  les  Adam  et  Clodion. 
Paris,  1898,  1  broch.  in-8°. 

Après  les  consciencieuses  monographies  de  MM.  Thi- 
rion  et  J.-J.  Guitfrey,  il  eût  été  ditïicile  que  M.  Alb. 
Jacquot  trouvât  sur  les  Adam,  les  Michel,  particulière- 
ment sur  Claude  Michel  ou  Clodion,  le  plus  illustre 
membre  de  la  famille,  des  choses  neuves  d'importance 
bien  grande,  à  nous  apprendre. 

Pourtant,  au  cours  de  ses  investigations,  il  est  arrivé 
à  exhumer  maint  détail  curieux,  surtout  en  ce  qui  touche 
les  travaux  de  Clodion. 

L'artiste  d'ordre  vraiment  supérieur,  en  qui  s'incarne 
le  plus  parfaitement  la  statuaire  française  sous  Louis  XV, 
vécut  assez  pour  voir  non  seulement  la  chute  de  la 
monarchie,  mais  presque  celle  de  l'Empire,  après  avoir 
collaboré  à  la  décoration  de  la  colonne  Vendôme  et  de 
l'Arc  du  Carrousel.  M.  Jacquot  a  recherché  les  traces  de 
Clodion  à  Nancy  et  dans  les  environs  et,  outre  des  pro- 
ductions de  jeunesse,  en  signale  d'aiîtres  de  son  âge  mùr, 
créées  durant  l'époque  où  il  chercha,  dans  sa  ville  natale, 
un  refuge  contre  la  tourmente  révolutionnaire. 

5""'    SÉRIE,    TOME    XXXVl.  9 


(  130) 

Parmi  les  contrats  retrouvés  et  qu'il  nous  donne,  il  eu 
est  de  fort  dignes  d'être  connus  :  ceux,  par  exemple, 
relatifs  aux  mausolées  de  la  comtesse  d'Orsay  et  de  la 
baronne  Demidofl',  et  spécialement  celui  passé  en  1805 
avec  le  vicomte  Joseph  Jablonowski  pour  l'érection,  en 
Pologne,  d'un  monument  à  Copernic. 

Ce  monument  lut-il  jamais  exécuté?  C'est  douteux, 
attendu  que  ceux  que  l'on  érigea  à  Tliorn,  lieu  natal  de 
l'immortel  savant,  comme  à  Cracovie,  n'émanent  ni  l'un 
ni  l'autre  du  ciseau  de  Clodion.  Il  n'est  dès  lors  pas 
inutile  de  donner  ici  un  extrait  du  contrat  de  1805,  con- 
tenant une  description  très  pittoresque  du  projet. 

«  Ivopernik  doit  avoir  l'air  et  le  maintien  noble  et 
une  phisionomie  fière,  préocupée  de  quelque  objet  pro- 
fond ;  l'altitude  d'un  homme  qui  met  le  pied  droit  en 
avant  comme  pour  monter  sur  le  demi-globe  posé  sur  im 
piédestale  quarré,  l'autre  pied  est  presque  en  l'air  mais 
desiné  noblement.  Il  doit  être  costumé  selon  son  [)or- 
trait  en  estampe  que  M. le  professeur  Delalande  m'a  promis 
de  donner,  mais  si  ce  costume  n'est  pas  assez  noble,  il 
faut  lui  donner  le  manteau  fourré  de  Docteur  de  l'Uni- 
versité puisqu'il  a  professé  l'Astronomie  à  Padoue.  Il 
faut  prendre  des  renseignements  très  exactes  sur  cela 
pour  ne  pas  faire  des  anacronisme.  Il  faudrait  voir  si  la 
fourrure  polonaise  à  manche  très  étoffée  et  doublée  d'une 
pelisse  épaisse  partout  et  aux  bords  des  manches  ne 
ferait  pas  bon  effet,  mais  c'est  alors  quand  on  ne  peut 
pas  le  costumer  en  manteau  long  académique.  Kopernic 
doit  tenir  sa  main  droite  en  avant,  un  peu  en  attitude 
héroïque,  devançante  le  globe  un  peu  penchée  surtout 
les  deux  doigts  comme  s'il  ordonnait  le  mouvement  de  la 
terre.  De  la  main  gauche  il  doit  retirer  en  arrière  le 


(  ^3^   ) 

voile  ou  la  drapperie  qui  couvre  le  trophée  des  différents 
instruments  astronomiques. 

»  Du  côté  droit  de  Kopernic  un  peu  plus  en  avant  doit 
être  placé  le  Préjugé  dont  l'altitude  demande  beaucoup 
des  soins.  Le  Préjugé  sera  représenté  sous  la  forme  d'un 
vieillard,  nerveux,  musculeux,  presque  décharné,  large 
d'épaules  et  de  corps,  nu  mais  placé  décemment,  ses 
cheveux  et  sa  barbe  d'un  grand  abandon.  11  doit  être 
accroupi,  comme  s'il  prenait  racine  mais  ayant  l'air 
d'être  forcé  par  le  système  de  Kopernic  de  s'élever.  La 
partie  inférieure  de  son  corps  doit  encore  être  presque 
accroupi,  mais  son  indignation  fait  faire  un  mouvement 
à  la  partie  inférieure  de  son  corps  qui  le  fait  tourner  un 
peu  du  côté  opposé  à  la  statue  et  un  peu  avancer  en  avant 
dépassant  un  peu  la  statue  de  Kopernic,  ses  mains  levées 
inégalement  une  presque  vis-à-vis  sa  tête  un  peu  éloignée 
l'autre  plus  haut  que  sa  tête  tenant  un  livre  ouvert  à  la 
main  avec  le  passage  de  la  Bible  où  Josué  s'écrie  Sta  sol, 
et  la  tournant  du  côté  du  soleil  comme  s'il  protestait.  Il 
y  a  je  crois  une  statue  du  groupe  de  Niobé  qui  donne  à 
peu  près  l'idée  de  l'attitude.  Mais  elle  doit  être  plus 
horrible  qu'élégante.  L'austre  annonçait  l'étonnement  et 
la  crainte;  celle-ci  doit  annoncer  l'indignation  et  l'entê- 
tement. Je  ne  sais  s'il  ne  serait  pas  plus  beau  de  ne  pas 
mettre  aucune  drapperie  sur  le  corps  du  préjugé.  Mais  si 
on  ne  peut  pas  la  placer  de  manière  à  cacher  sa  nudité 
indécente,  il  faut  lui  jeter  sur  l'épaule  un  peu  de  drape- 
rie comme  un  manteau  lyrique  autant  qu'il  faut  pour 
qu'il  tombe  sans  affectation  sur  ses  nudités. 

))  Le  globe  sous  les  pieds  de  Kopernic  doit  être  des- 
siné en  carte  géographique  un  peu  en  bas   relief.    La 


(  432  ) 

Pologne  pays  natale  de   ce  grand  homme  doit  être  au 
milieu  dans  la  situation  remarquable...  » 

On  voit  que  l'appel  fait  au  talent  du  statuaire  ne  lui 
imposait  pas  un  bien  puissant  effort  d'imagination. 

D'autres  contrats  lui  laissent  à  peine  plus  d'initiative, 
chose  à  constater  et  qui,  en  présence  d'exemples  simi- 
laires, nullement  rares  dans  l'histoire  de  la  sculpture, 
nous  force  à  admettre  que  quantité  d'ensembles  fameux, 
avant  de  se  produire  sous  leur  forme  finale,  ont  dû  être 
l'objet  de  longues  et  savantes  combinaisons  moins  de  la 
part  de  ceux  qui  les  créaient,  que  de  ceux  qui  en  faisaient 
la  commande. 

Cela  choque  un  peu  les  idées  reçues,  mais  c'est  encore 
l'unique  moyen  d'expliquer  les  ensembles  allégoriques 
vastes  et  compliqués,  dont  la  société  française  fit  ses 
délices  au  XVIII"  siècle. 

Henri  Hymans. 


RAPPORTS. 


MM.  Huberti,  Mathieu,  van  Duyse  et  Benoit  donnent 
lecture  de  leurs  appréciations  sur  une  composition  musi- 
cale portant  pour  titre  :  Trois  poèmes,  soumise  à  l'Acadé- 
mie par  M.  Martin  Lunssens,  à  litre  d'envoi  réglementaire 
comme  premier  prix  du  grand  concours  de  composition 
musicale  de  1893.  —  Renvoi  à  M.  le  Ministre  de  l'Agri- 
culture et  des  Travaux  publics. 


(  133  ) 


OUVRAGES  PRESENTES. 


Brialmunl  [A.].  Progrès  de  la  défense  des  États  et  de  la 
fortification  permanente,  depuis  Vauban.  Bruxelles,  1898; 
vol.  gr.  in-8°  avec  atlas  oblong.  (xi-369  p.  et  43  plan- 
ches). 

Génard  {P.).  Mijne  laatste  nasporingen  over  de  geboorte- 
plaats  van  Quinten  Massys.  Anvers,  1898;  in-8"  (22  p.). 

Pasquier  [Ernest).  Cours  de  mécanique  analytique, 
tome  I^""  :  Vecteurs  —  Cinématique  —  Statique  et  Dyna- 
mique du  point.  Louvain,  1897;  in-4''  (336  p.). 

Verwey  {Isaac).  Een  noord-nederlander  over  zijn  omreisje 
door  België  in  1823.  (Introduction  par  Paul  Fredericq.) 
S.  1.  n.  d.;in-8M29p.). 

Guilliaume  (Jules).  Le  vers  français  et  les  prosodies 
modernes.  Bruxelles-Paris,  1898;  in-8°  (226  p.). 

Devillers  [Léopold).  Chartes  du  comté  de  Hainaut  de 
l'an  1200.  Reproduction  des  originaux  avec  introduction, 
traduction  et  notes.  Mons,  1898;  in-folio  (19  p.). 

De  WUdeman  [E.).  Prodrome  de  la  flore  belge.  Thallo- 
phytes, fasc.  I-III.  Bruxelles,  1897-98;  in-8"  (543  p.). 

Deniijts  (François).  Note  sur  les  groupes  neutres  à  élé- 
ments multiples  associés,  des  involutions  unicursales. 
Bruxelles,  1898;  extr.  in-8°  (11  p.). 

—  Note  sur  la  configuration  formée  par  les  quadrisé- 
cantes  des  courbes  gauches  rationnelles  du  6'""  ordre. 
Bruxelles,  1898;  extr.  in-8«  (20  p.). 

—  Note  sur  les  sécantes  multiples  des  courbes  gauches 
rationnelles.  Bruxelles,  1898;  extr.  in-8<'  (8  p.). 


(  iU  ) 

Toussaint  {le  chan.).  Poésies  chrétiennes,  3'n«  pai'tie. 
Namur,  1898;  in-8°  (30  p.). 

Chauvin  (  Victor).  Bibliographie  des  ouvrages  arabes  ou 
relatifs  aux  Arabes,  III.  Liège,  1898;  in-8''. 

Mercier  (D.).  La  définition  philosophique  de  la  vie, 
2"'«  édition.  Louvain,  1898;  in-S"  (74  p.). 

—  Les  origines  de  la  psychologie  contemporaine. 
Louvain,  1897;  in-18  (xii-476  p.). 

Mathy  (£.).  Rotation  d'un  corps  solide  autour  d'un  point 
fixe.  Cas  où  il  n'y  a  pas  de  forces  motrices  ou  qu'elles  se 
font  équilibre  autour  du  point  fixe.  Gand ,  1898;  in-8" 
(18  p.). 

—  De  l'ellipsoïde  considéré  comme  figure  d'équilibre 
relatif  d'une  masse  fluide  homogène.  Paris,  1898;  extr. 
in-4o  (7  p.). 

—  Expression  des  composantes  de  l'attraction  d'un  ellip- 
soïde homogène  sur  un  point  extérieur,  au  moyen  des  fonc- 
tions 0  et  ^.  Paris,  1898;  extr.  in-4o  (12  p.). 

Exposition  internationale  de  Bimxelles  : 

Congrès  international  colonial.  Compte  rendu,  1897. 
Grand  in-8''  (461  p.). 

Ligue  belge  du  droit  des  femmes.  Actes  du  Congrès  fémi- 
niste international  de  Bruxelles  ;  publiés  par  les  soins  de 
M"*  Marie  Popelin.  Bruxelles,  1898;  in-8o  (vi-loO  p.). 

Bruxelles.  Société  d'anthropologie.  Bulletin,  tome  XIV, 
1895-1896. 

Gand.  Vlaamsche  Académie  voor  taalkunde.  Vak-  en  kunst- 
woorden,  n""  3,  ambacht  van  den  timmerman  (J.  en  V.  Van 
Keirsbiick).  1898. 

—  Willemsfonds.  Uitgave  n""  144  :  De  openbare  en  de 
bijzondere  weldadigheid.  Hare  hervorming.  Naar  het 
fransch  van  K.  H.  De  Quéker.  1897. 

LiÉiîE.  Société  d'art  et  d'archéologie.  Bulletin,  tome  XI. 
1897. 


(  <35  ) 

LouvAiN.  La  Cellule,  recueil  de  cytolojjie,  tome  XiV,  l*""  fas- 
cicule. ln-4". 


Allemagne  et  Autriche-Hongrie. 

Brunn.  Naturforscheude  Gesellschafï.  Verhandlungen , 
Band  XXXV,  1896  —  XV.  Bericin  der  meteorologischen 
Commission,  1895. 

Erlangen.  Pfiysikaliscli-medidnisclie  Societdt.  Sitzungs- 
berichte,  :29.  Heft,  1897. 

Munster,  Vereinfur  Kunst.  25.  Jahresberichl,  1896-1897. 

Berlin.  A'.  Akademie  der  Wissenschafïen.  Abhandlungen, 
1897.  ln-4°. 

Hambourg.  Handelsstalische  Bureau.  Uebersicliteii  des 
Handels  im  Jahre  1897.  111-4°. 

Stuttgart.  Vei^ein  fur  Naturkunde.  Jahreshefle,  54.  Jahr- 
gang,  1898. 


France. 

Aadaillac  [le  m"  de).  Les  agglomérations  urbaines. 
Paris,  1898  ;  extr.  in-8°  (32  p.). 

Gréhanl  (A.).  Recherches  sur  les  limites  de  l'absorption 
de  l'oxyde  de  carbone  par  le  sang  d'un  mammifère  vivant. 
Paris,  1898;  extr.  in-8°  (7  p.j. 

—  L'oxyde  de  carbone,  le  grisou  et  le  grisoumèlre. 
Paris,  1898  ;  extr.  in-4<'  (18  p. ,  fig.). 

Dufet{II.).  Recueil  de  données  numériques  publié  par  la 
Société  française  de  physique.  Optique.  Premier  fascicule  ; 
Longueurs  d'onde.  Indice  des  gaz  etdes^liquides,  Paris,  1898; 
vol.  in-8°  (415  p.). 


(  436  ) 


Liste  des  ouvrages  déposés  dans  la  bibliothèque  de  l'Académie 
par  la  Commission  royale  d'histoire. 

Bruxelles.  Société  d'archéologie.  Annales,  XII,  2. 

Gand.  Société  d'histoire  et  d'archéologie.  Annales,  III,  n"  i. 

—  Messager  des  sciences,  1896,  3. 

Malines.  ^2^  Congrès  historique  et  archéologique,  vol.  !«■■. 

Paris.  Ministère  de  l'instruction  publique.  Lettres  de  Cathe- 
rine de  Médicis,  t.  VI.  1897;  in-4«. 

Bibliothèque  des  Écoles  d'Athènes  et  de  Home,  fascicule  70, 
2«  partie. 

Polijbiblion.  Avril  de  1898. 

Saint-Omer.  Société  des  Antiquaires  de  la  Morinie,  t.  XXIV. 
Bulletin  historique,  183^  livraison. 

Rome.  R.  Accademia  dei  Lincei.  Atti  scienze  niorali,  stori- 
che  e  filologiche,  vol.  Vi.  1898;  gennaio  e  febbraio. 


BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES 


DES 


Lettres  et  des  Beaux-Arts  de  Belgique. 

1898.  —  i\"  8. 


CLASSE    DKS    SCIENCES. 


Séance  du  6  août  1898. 

M.  Éd.  Dupont,  directeur. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  W.  Spr'ing,  vice-directeur  ;  le  baron 
Edm.  de  Selys  Longchanips,  Gluge,  G.  Dewalque,  C. 
Malaise,  F.  Folie,  F.  Plateau,  Fr.  Crépin,  J.  De  Tilly, 
Ch.  Van  Bambeke,  Alfr.  Gilkinet,  G.  Van  der  Mensbrug- 
ghe,  L.  Henry,  M.  Mourlon,  P.  Mansion,  P.  De  Heen, 
C.  Le  Paige,  F.  Terby,  J,  Deruyts,  Léon  Fredericq, 
J.-B.  Masius,  J.  Neuberg,  membres;  Cli.  de  la  Vallée 
Poussin,  associé,  et  A.  Jorissen,  correspondant. 

M.  Lagrange  écrit  pour  motiver  son  absence. 

-^"'^    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  10 


(   ir>8  ) 
CORRESPONDANCE. 


M.  le  Secrétaire  perpétuel  fait  savoir  que  le  Bureau  de 
la  Classe  (composé  de  MM.  Dupont,  Spriiig  et  lui)  s'est 
lendu  à  Malines  le  24  juillet  dernier,  pour  représenter 
ofificiellement  l'Académie  à  l'inauguration  de  la  statue  de 
Pierre-J.  Van  Beneden.  A  la  délégation  s'étaient  joints 
MM.  le  baron  de  Selys  Longchamps,  Brialniont,  Ch.  Van 
Bambeke,  M.  Mourlon,  J.  Deruyts,  Léon  Fredericq, 
J.-B.  Masius,  L.  Errera,  J.  Fraiponl  et  P.  Francotte,  de  la 
Classe  des  sciences,  G.  Biot  et  J.  Winders,  de  la  Classe 
des  beaux-arts. 

Assistaient  aussi  à  la  solennité,  mais  comme  faisant 
partie  de  la  délégation  de  l'Université  de  Louvain  : 
xMM.  Cb.  de  la  Vallée  Poussin,  associé  de  la  Classe  des 
sciences,  et  le  cbevalier  Ed.  Descamps,  membre  de  la 
Classe  des  lettres. 

M.  le  Secrétaire  perpétuel  propose  de  voter  des  remer- 
ciements à  M.  Dupont,  qui  a  pris  la  parole  au  nom  de 
l'Académie.  {Applaudissements.) 

M.  le  Secrétaire  perpétuel  donne  ensuite  lecture  d'une 
lettre  de  M.  Edouard  Van  Beneden,  remerciant  l'Acadé- 
mie, tant  en  son  nom  qu'au  nom  de  sa  famille,  pour  le 
nouvel  hommage  rendu  à  la  mémoire  de  son  vénéré  père. 

«  Mes  remerciements,  ajoute  M.  Van  Beneden,  s'adres- 
sent également  à  ceux  de  mes  confrères  qui  ont  bien 
voulu  se  joindre  au  Bureau,  et  à  M.  Dupont  pour  la  rare 
distinction  avec  laquelle  il  s'est  acquitté  de  la  mission 
dont  il  avait  bien  voulu  se  charger.  » 


(  159  ) 

—  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  et  de  l'Instruction 
publique  demande  l'avis  de  l'Académie  —  en  vue  de 
répondre  à  l'invitation  du  Gouvernement  français  de  faire 
représenter  la  Belgique  au  Congrès  de  Paris,  en  4900  — 
sur  le  rapport  de  M.  Poincarré  «  Sur  les  résolutions  de 
la  Commission  chargée  de  l'étude  des  projets  de  décima- 
lisation du  temps  et  de  la  circonférence  ». 

Renvoi  à  MM.  Folie,  Lagrange  et  Le  Paige. 

—  L'Académie  royale  des  sciences,  la  Faculté  de  méde- 
cine (Karolinska  Instituet),  l'Académie  d'agriculture  et  la 
Société  des  médecins  de  Suède,  à  Stockholm,  invitent 
l'Académie  à  se  faire  représenter  à  la  célébration  du  cin- 
quantième anniversaire  de  la  mort  de  Berzelius,  qui  aura 
lieu  à  Stockholm,  le  7  octobre  1898. 

L'Académie  s'associera,  par  une  adresse,  à  cette 
manifestation. 

—  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  et  de  l'Instruction 
publique  envoie,  pour  la  bibliothèque  de  l'Académie,  le 
premier  fascicule  du  tome  XIV  du  recueil  de  cytologie  : 
La  Cellule.  —  Remerciements. 

—  Hommages  d'ouvrages  : 

Crisfalloïdes  dans  l'ooajte  de  Pholcus  phalangioides 
FuessL,  par  Ch.  Van  Bambeke; 

Recherches  expérimentales  sur  la  formation  du  son  dans 
(es  instruments  à  bouche  de  flûte;  par  le  père  Ch.  Lootens, 
S.  J.  (présenté  par  M.  Yan  der  Mensbrugghe,  avec  une 
note  qui  ligure  ci-après)  ; 

['eber  die  Entmcklumj  der  Graaf^chen  Follikel;  par 
Albert  von  Kolliker,  associé. 

—  Remei'ciements. 


(  140  ) 

—  Travaux  manuscrits  renvoyés  à  l'examen  : 

i°  Becherches  expérimentales  sur  la  circulation  du  sang 
chez  l'Anodonte  (3  planches);  par  MM.  Victor  Willem  et 
Achille  Minne,  de  l'Université  de  Gand.  —  Commissaires  : 
MM.  L.  Fredericq  et  F.  Plateau; 

2°  Les  tremblements  de  terre  et  les  marées;  par  Victor  de 
Ziegler.  —  Commissaires  :  MM.  Folie  et  Van  der  Mens- 
hrugghe ; 

3°  Sur  le  symbole  de  la  vie  et  de  la  création;  par  M.  Basile 
BoukteiefF.  —  Commissaires  :  MM.  Masius  et  Vanlair; 

4°  Sur  les  dérivés  du  bromo-nitro-^néthane  H|2C-Br(J\02)  ; 
par  M.  J.  Maas,  docteur  en  sciences  à  Louvain.  —  Com- 
missaires :  MM.  Henry  et  Spring. 


NOTE    BIBLIOGRAPHIQUE. 

J'ai  l'honneur  de  présenter  en  hommage  à  l'Académie, 
au  nom  du  père  Ch.  Lootens,  S.  J.,  un  exemplaire  de  ses 
Recherches  expérimentales  sur  la  formation  du  son  dans  les 
tuyaux  à  bouche  de  flûte. 

Les  premiers  résultats  de  ces  recherches  ont  été  signa- 
lés dès  1877  dans  le  Journal  de  Physique  et  avaient  attiré 
l'attention  des  physiciens,  notamment  de  Jamin.  L'auteur 
espère,  et  je  pense  comme  lui,  que  ces  faits,  décrits 
maintenant  d'une  manière  plus  complète  et  plus  origi- 
nale, serviront  à  élucider  une  série  de  points  plus  ou 
moins  controversés  en  acoustique. 

G.  Van  der  Mensbrugghe. 


(  Hl  ) 


CONCOURS  DE  LA  CLASSE  POUR  1898. 


SCIENCES    MATHEMy^TIQtJES    ET    I>HVSI9IJES. 

Trois  mémoires  ont  été  reçus  en  réponse  à  la  troisième 
question  : 

Apporter  une  contribution  importante  à  l'étude  des  corres- 
pondances (Verwandtschaften)  que  l'on  peut  établir  entre 
deux  espaces. 

Devise  du  n°  1  :  Geometry  is  hard  (J.-H.-S.  Smith); 
Devise  du  n"  2  :  Numeri  regunt  locum  ; 
Devise  du  n°  5  :  Itinera  ad  veruui. 
Commissaires  :  MM.  .Neuberg,  Le  Paige  et  De  Tilly. 

SCIENCES    Ni%TIJREI>L,ES. 

Un  mémoire  a  été  reçu  en  réponse  à  la  première  ques- 
tion : 

On  demande  de  nouvelles  recherches...  sur  la  digestion 
chez  les  plantes  carnivores. 

Devise  :  L'activité  des  plantes  carnivores  est,  en  dernière 
analyse,  une  question  d'azote. 

Commissaires  :  MM.  Errera,  Gilkinet  et  Crépin, 


(  142  ; 
—  Un  mémoire  a  été  reçu  en  réponse  à  la  deuxième 
question  : 

On  demande  des  recherches  physiologiques  nouvelles  sur 
une  fonction  encore  mal  connue  chez  un  animal  invertébré. 

Devise  :  La  physiologie  des  invertébrés  est  presque  tout 
entière  à  l'état  de  desideratum  (Ch,  Morren). 

Commissaires  :  MM.  Plateau,  Van  Beneden  et  Van 
Barabeke. 


RAPPORTS. 


La  Classe  décide  le  dépôt  aux  archives  des  notes  : 

1"  De  M.  G.  Kayser  Sur  la  physique  du  globe  et  la 
météorologie,  renvoyée  à  l'examen  de  MM.  Terby  et 
Lancaster; 

2"  De  M.  B.-G.  Jenkins  :  .4  method  for  determining 
astronomically  the  variations  in  the  température  and  présure 
of  the  atmosphère,  renvoyée  à  l'examen  de  MM.  Lancaster, 
Lagrange  et  Terby. 

Cette  note,  fait  remarquer  M.  Lancaster,  n'est  que  la 
reproduction,  à  part  quelques  légères  modifications,  d'une 
brochure  du  même  auteur,  publiée  en  1894  sous  le  titre  : 
Tellustria,  etc. 


(  143  ) 


Becherches  morphologiques  et  phylogénétiques 
sur  les  Mollusques  archaïques;  par  Paul  Pelseneer. 

Happot't   de  M.   Éil.    t'ui%    iteneden,    pr-etniet'   cotnntisaait'e. 

«  J'ai  été  chargé  par  la  Classe  de  lui  faire  rapport 
sur  un  mémoire  de  M.  Paul  Pelseneer,  professeur  à 
l'École  normale  de  Gand.  Ce  mémoire  a  pour  titre  : 
Recherches  morphologiques  et  phylogénétiques  sur  les  Mol- 
lusques archaïques. 

Mon  rapport  ne  sera  pas  une  analyse  du  travail  soumis 
à  mon  appréciation.  Je  veux  me  borner  à  en  indiquer 
l'objet  et  à  justifier  la  proposition  que  j'aurai  l'honneur 
de  faire  à  l'Académie,  d'ordonner  l'impression  de  l'œuvre 
de  M.  Pelseneer  dans  les  Mémoires  in-4''. 

Depuis  environ  treize  ans,  M.  Paul  Pelseneer  se  con- 
sacre à  l'étude  de  l'organisation  des  différents  groupes 
dont  se  compose  le  grand  embranchement  des  Mollusques. 
Il  a  publié,  dans  une  série  de  travaux  successifs,  les  résul- 
tats de  ses  recherches  anatomiques.  Ces  travaux,  dont  la 
haute  valeur  est  reconnue  par  les  zoologistes  les  plus 
compétents,  ont  fait  de  M.  Pelseneer  l'une  des  pre- 
mières autorités  de  notre  époque,  en  matière  de  mala- 
cologie. S'il  fallait  citer  des  preuves  à  l'appui  de  cette 
appréciation,  je  rappellerais  que  c'est  à  M.  Pelseneer 
qu'a  été  confiée  l'étude  des  Ptéropodes  du  Challetiger  ; 
c'est  lui  que  Huxley  a  choisi  comme  collaborateur 
pour  l'étude  et  la  publication  de  l'anatomie  des  Spirules. 
J'ajouterais  que  Garstrang,  dans  son  récent  article  sur 


C  \U  ) 
la  morphologie  des  Mollusques,  s'exprime  comme  suit  : 
a  Nous  doutons  qu'aucun  groupe  aussi  étendu  du  règne 
»  animal,  à  l'exception  peut-être  des  Échinodermes,  ait 
»  été  l'objet  de  recherches  aussi  productives  que  celui 
»  des  Mollusques,  durant  la  période  qui  s'est  écoulée 
))  depuis  la  publication,  en  1883,  des  Mollusca  de  Ray 
))  Lankester;  et  certainement  la  méthode  phylogéné- 
»  tique  n'a  pas  réalisé  de  plus  grands  triomphes  que 
»  dans  les  mains  de  Bouvier,  de  Haller,  de  Pelseneer  et 
»  d'autres  savants,  qui  ont  étudié  les  Gastéropodes  et  les 
»  Lamellibranches.  » 

Le  nouveau  mémoire  que  M.  Pelseneer  vient  d'adres- 
ser à  l'Académie  est  la  suite  et  l'on  pourrait  dire  une 
sorte  de  synthèse  de  ses  publications  antérieures. 

Après  que  les  formes  les  plus  primitives  des  différents 
groupes  de  l'embranchement  ont  été  successivement 
reconnues,  il  fallait  se  livrer  à  une  étude  comparative 
de  ces  formes,  dans  le  but  de  rechercher  leurs  relations 
mutuelles  et  de  déterminer  les  affinités  et  l'origine  de 
l'embranchement  auquel  elles  se  rattachent. 

Ce  sont  les  bases  et  les  conclusions  de  cette  étude  que 
M.  Pelseneer  fournit  dans  le  mémoire  qu'il  nous  soumet. 
Celui-ci  comprend  une  partie  analytique,  dans  laquelle  les 
faits  d'observation  se  trouvent  décrits,  et  une  partie  syn- 
thétique, dans  laquelle  ils  sont  discutés  en  eux-mêmes  et 
dans  les  conclusions  qu'ils  comportent. 

Un  atlas  de  planches  admirablement  dessinées  à  la 
plume  accompagne  le  texte. 

Je  ne  possède  pas,  dans  la  connaissance  des  Mollusques, 
une  compétence  suffisante  pour  me  permettre  de  discuter 
l'œuvre  d'un  savant  qui  est,  en  cette  matière,  une  auto- 
rité incontestée. 


I 


(  445  ) 

Mais  je  n'hésite  pas  à  aftirmer  (jiie  la  publication  du 
mémoire  de  M.  Pelseneer,  dans  l'un  de  nos  recueils,  fera 
honneur  à  l'Académie  et  au  pays.  Celui  qui  me  parait 
seul  convenir,  en  raison  du  format  des  planches,  c'est  le 
recueil  des  Mémoires  in-4°  des  savants  étrangers. 

Je  propose  donc  à  la  Classe  de  décider  cette  impres- 
sion, d'ordonner  la  reproduction  par  la  phototypie  des 
planches  qui  accompagnent  le  manuscrit,  et  d'adresser  à 
l'auteur  les  remerciements  et  les  félicitations  de  l'Aca- 
démie. » 

La  Classe  a  adopté  ces  conclusions,  auxquelles  se  sont 
ralliés  entièrement  MM.  Plateau  et  Van  Bambeke. 


Sur  l'action  catalyiique  de  la  mousse  de  platine 
et  de  palladium;  par  A.  de  Hemptinne. 

Happoi't  tte  n.  %V,   Xpt'itty,  ftt-etnief  cuinÊtêiiutnSff. 

«  M.  de  Hemptinne  a  essayé  de  résoudre  la  (piestion 
de  savoir  si  l'action  catalytique  de  la  mousse  de  platine 
est  d'ordre  physique  ou  d'ordre  chimique.  A  cette  fin,  il 
fait  remarquer  que  cette  action  catalytique  doit  s'éteindre 
par  un  abaissement  de  la  température  si  elle  est  un  acte 
chimique,  les  corps  ne  se  combinant  plus  sitôt  que  le 
froid  est  devenu  assez  intense.  Au  contraire,  cette  action 
doit  s'accentuer  dans  les  mêmes  conditions  si  elle  est 
d'ordre  physique,  puisque  la  condensation  est,  en  général, 
facilitée  par  le  froid. 


(  146  ) 

Les  résultats  obtenus  sont  plus  compliqués  qu'on  ne 
pouvait  le  prévoir;  ils  sont  donc  d'autant  plus  intéressants. 
En  comparant  l'action  de  la  mousse  de  platine  avec  celle 
du  carbone  en  poudre  et  de  la  mousse  de  palladium, 
l'auteur  a  constaté  que  le  carbone  condense  plus  d'hydro- 
gène à  —  78°  qu'à  -f-  15%  tandis  que  la  mousse  de  platine 
en  absorbe  moins  à  froid.  La  mousse  de  palladium  se 
comporte  autrement  que  le  platine.  En  opérant  avec 
l'oxyde  de  carbone  au  lieu  de  l'hydrogène,  il  a  été 
constaté  que  la  mousse  de  platine  absorbe  plus  de  gaz  à 
—  78°  que  d'hydrogène  et  que  la  mousse  de  palladium  se 
modifie  au  contact  de  l'oxyde  de  carboné  au  point 
d'acquérir  vers  20°  un  pouvoir  absorbant  extraordinaire. 

J'ai  l'honneur  de  proposer  l'insertion  de  la  note  de 
M.  de  Hemptinne  dans  le  Bulletin  de  la  séance.  » 

La  Classe  a  adopté  ces  conclusions,  auxquelles  M.  De 
Heen  a  adhéré. 


Sur  les  salicylates  doubles  de  métal  et  d'antipyrine 
{troisième  communication);   par  M.-C.    Schuyten. 

itnpito>'t  fltf  MM,   M,  Jot'ivaen,  ftfetnifff  co»ntnis»ait'e. 

«  M.  Schuyten  termine,  dans  cette  note,  l'exposé  de  ses 
recherches  sur  les  salipyrines  obtenues  par  la  méthode 
décrite  dans  une  communication  précédente. 

Comme  d'autres  salicylates  déjà  mentionnés,  ceux  de 
magnésium,  de  manganosum  et  de  plomb  donneraient 
avec  l'antipyrine  des  combinaisons  additionnelles,  tandis 


(  ^i^  ) 

qu'il  serait  impossible  de  réaliser,  dans  les  mêmes  condi- 
tions, la  formation  de  salicylates  doubles  d'aluminium,  de 
chrome,  d'uranyle  et  d'antipyrine. 

L'auteur  ne  se  prononce  pas  encore  pour  ce  qui  con- 
cerne le  composé  de  bismuth,  lequel,  préparé  suivant  un 
procédé  spécial,  constituerait  un  corps  cristallin  qu'il 
considère  comme  une  combinaison  très  importante  et 
dont  il  se  propose  de  faire  l'étude  complète  dans  un  ave- 
nir plus  ou  moins  rapproché. 

M.  Schuyten  attire  l'attention  sur  l'instabilité  des  com- 
binaisons qui  ont  fait  l'objet  de  ses  recherches  et  dont 
l'eau  notamment  provoquerait  aisément  la  dissociation, 
A  propos  de  cette  observation,  on  peut  regretter  que  l'au- 
teur n'ait  pas  cru  devoir  exposer  les  résultats  de  ses  expé- 
riences sur  les  salipyrines  dans  un  travail  d'ensemble,  au 
lieu  de  les  publier  dans  une  série  de  notes  dont  les  pre- 
mières ne  pouvaient  comporter  des  indications  d'ordre 
général . 

Comme  il  manifeste  l'intention  de  poursuivre  ses 
recherches  sur  les  composés  correspondants  de  l'acide 
benzoïque,  je  crois  pouvoir  lui  conseiller  de  résumer  les 
principales  observations  qu'il  recueillera,  dans  un  seul 
mémoire,  dont  la  lecture  sera  plus  intéressante  que  celle 
d'une  série  de  descriptions  se  succédant  à  des  intervalles 
assez  longs. 

J'ai  l'honneur  de  proposer  l'impression  de  la  note  de 
M.  Schuyten  dans  le  Bulletin  des  séances.  » 

La  Classe  a  adopté  ces  conclusions,  auxquelles  s'est  rallié 
M.  W.  Spring. 


(  148  ) 


I.  Note  sur  la  détermination  des  éléments  neutres  d'espèces 
quelconques;  ÏI.  Note  sur  quelques  propriétés  des  courbes 
gauches;  par  F.  Deriiyts. 

Ittippot't  il»  JtW.  léB  Paifff,  pt'einift'  romtnia.sniff. 

«  Les  deux  notes  présentées  par  notre  jeune  collègue 
de  l'Université  de  Liège  me  semblent  offrir  un  grand 
intérêt. 

La  question  de  la  détermination  des  éléments  neutres 
des  involutions  est  entourée  de  difficultés.  M.  Deruyts  les 
a  heureusement  surmontées. 

La  seconde  note  comprend  des  applications,  jusqu'ici 
fort  rares,  des  involutions  de  rang  quelconque  aux  êtres 
géométriques  de  notre  espace. 

Je  citerai  notamment  le  théorème  : 

Par  q  —  k  points  de  l'espace,  on  peut  mener 

2 „,_,^  „(___)(-_ 

courbes  gauches  du  quatrième  ordre  ayant  un  contact 
d'ordre  (k  —  p  -^-  1)  «^^c  une  courbe  gauche  donnée  d'ordre 
n  et  rencontrant  cette  courbe  en  âp  —  o  points. 

Je  propose  bien  volontiers  l'insertion  de  ces  deux 
notes  au  Bulletin  de  la  séance.  » 

La  Classe  a  adopté  ces  conclusions,  auxquelles  s'est 
rallié  M.  Neuberg. 


(  149  ) 
COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Sur  divers  composés  nitrés  aliphatiques  à  fonctions  multiples; 
par  Louis  Henry,  membre  de  l'Académie. 

NOTICE    PRÉLIMINAIRE. 

Mes  études  sur  la  solidarité  fonctionnelle  et  la  volatilité 
dans  le  groupe  du  carbone  m'ont  fait  désirer  connaître 
des  composés  carbonés  renfermant,  dans  leur  molécule, 
en  même  temps  que  le  groupement  -  C  -  NO2,  les  groupe- 
ments >  CO  (aldéhyde  ou  acétone)  ou  -CN  (nitrile). 

J'ai  confié  à  deux  de  mes  élèves  la  tâche  aussi  intéres- 
sante qu'instructive  d'appeler  à  l'existence  des  composés 
de  cette  sorte. 

En  attendant  que  leurs  recherches  sur  cet  objet  soient 
terminées,  je  crois  utile  de  faire  connaître,  dès  à  présent, 
les  composés  dignes  de  remarque  qu'ils  ont  réussi  à 
produire. 

§  I.  —  Sur  la  nitro- acétone 
CHs-CO-CH^NOj). 

V acétone  mononitrée  a  été  obtenue  par  M.  0.  De 
Battice  en  oxydant  Valcool  nitro-isopropylique  {*)  CH5  - 
CH(OH)  -  CH2(N02)  par  le  mélange  chromique  :  bichro- 
mate potassique  et  acide  sulfurique  étendu. 

(')  Louis  Henry,  Bull,  de  l'Acad.  roy.  de  Belgique,  3«  sér.,  t.  XXIX, 
p.  834  (année  1895). 


(  ISO) 

Comme  beaucoup  d'autres  réactions  de  cette  sorte,  si 
cette  opération  est  aisée,  elle  n'est  guère  avantageuse 
quant  à  son  rendement. 

On  pouvait  croire  que  l'on  serait  parvenu  à  former  ce 
composé  dans  de  meilleures  conditions  en  faisant  réagir 
les  dérivés  monolialoïdes  de  l'acétone,  et  notamment 
Vacétone  iodée  CH5  -  CO  -  CH2Ï,  sur  le  nitrite  d'argent 
AgNO^.  Il  n'en  a  pas  été  ainsi. 

La  nitro-acétone  CH5  -  CO  -  CH2(N02)  constitue  un 
liquide  incolore,  mobile,  d'une  odeur  très  piquante,  pro- 
voquant le  larmoiement,  d'une  saveur  brûlante,  avec  un 
arrière-goût  nauséabond,  très  persistant. 

Elle  est  fort  peu  soluble  dans  l'eau,  mais  soluble  dans 
l'éther  et  l'alcool. 

Sa  densité  à  14°  est  égale  à  1.070. 

Elle  bout,  sans  décomposition,  à  132°,  sous  la  pression 
de  767  millimètres,  toute  la  colonne  mercurielle  dans  la 
vapeur. 

Après  quelques  instants  de  contact  avec  l'eau,  elle 
présente  d'une  manière  prononcée  le  caractère  acide;  elle 
rougit  le  papier  bleu  de  tournesol  et  expulse  le  gaz  CO^ 
des  carbonates  alcalins. 

Elle  ne  réagit  pas  avec  le  chlorure  d'acétyle. 

Son  insolubilité  dans  l'eau,  son  odeur,  sa  volatilité, 
l'inertie  du  chlorure  d'acétyle  la  distinguent  nettement 
de  l'alcool  nitro-isopropij tique  et  témoignent  de  son 
individualité. 

Sa  composition  centésimale  correspond  d'ailleurs  à  la 
formule  CH5  -  CO  -  CH2(N0.>).  L'élément  caractéristique 
qu'elle  renferme  quant  à  sa  quantité  est  Vhijdrogéne  : 
M.  De  Batlice  en  a  trouvé  4.97  et  4.99  %;   l'acétone 


(  IS!   ) 
nitrée  en  renlerme  4.85  "/o,  tandis  qu'il  y  en  a  6.66  7o 
dans  l'alcool  nitro-isopropylique. 

J'attirerai  l'attention  sur  trois  propriétés  de  ce  corps, 
lesquelles  montrent  bien  ce  qui,  dans  celles-ci,  est  dû  à 
la  coexistence  des  composants  H2C  -  NO.j  et  >  CO  en 
un  point  de  la  molécule  : 

1°  L'odeur  piquante.  L'alcool  nitro-isopropylique  est 
sensiblement  inodore. 

2''  Le  caractère  acide  nettement  accentué.  L'alcool 
nitro-isopropylique,  quoique  renfermant  aussi  H^C-  NO^, 
est  inerte  sur  les  carbonates  alcalins.  Le  voisinage  de 
>C0  renforce  notablement  le  caractère  basique  du  grou- 
pement H^C  -  NO.2. 

5"  La  volatilité.  Eb.  15:2°.  L'alcool  nitro-isopropylique 
bout,  sous  la  pression  de  768  millimètres,  à  200"-201°. 

La  transformation  du  cbainon  cdcool  secondaire 
>CH-OH  en  chaînon  acétone  y  C  =  0  abaisse  donc  le 
point  d'ébullition  de  48". 

Voici  les  rapports  de  volatilité  de  certains  composés, 
de  même  nature  fonctionnelle,  en  C5. 


Cll5-CH(OH)-Cll3 

El). 

85°  \ 

-"■n 

C!l--C0-CIl3 

36°  / 

CIf5-CH(0H)-CH, -Cl  Éb.     I27" 

Cllj-CO-CfLCI  118» 


-    9" 


Le  poids  moléculaire  de  l'alcool  nitro-isopropylique 
est  105.  Les  alcools  secondaires  en  Cg  ont  un  poids 
moléculaire  presque  identique,  102.  Or  leur  transforma- 


(  152  ) 

lion  en  acétone  s'accompayne  d'un  abaissement  beaucoup 
moindre  dans  leur  point  d'ébullition 

CH3-CH2-CH(On)-Cn2-CH.-CH-,      Éb.  153»    \ 

)  -12'• 
CH,-CFl2-CO-CH,-CH,-CH5  123»    / 

On  voit  par  là,  d'une  manière  évidente,  l'influence 
volatilisante  exercée  par  l'existence  dans  la  molécule  de 
y  acétone  nitrée  du  système  -  CO  -  CHg  (NOg). 

Pour  déterminer  l'étendue  du  rayon  au  dedans  duquel 
cette  influence  se  fait  sentir,  il  faudrait  pouvoir  examiner 
comment  se  présente  l'bomologue  supérieur  de  l'acétone 
mononitrée,  CH3  -  CO  -  CH^  -  CH^  (NOo). 

Il  est  à  espérer  que  M.  De  Battice,  qui  s'occupe  avec 
activité  des  acétones  nitrées,  parviendra  à  donner  une 
solution  complète  à  cette  question, 

^  II.  —  Sur  le  nilrile  butyrique  normal  mononitré 
primaire 

CN  -  CH.  -  CH,  -  CH^INO,)  (*). 

Ce  corps  a  été  obtenu  par  M.  R.  Van  Melckebeke  en 
faisant  réagir  sur  le  nitrite  d'argent  AgNO^  le  nitrile  buty- 
rique mono-iodé  primaire  CN  -  CH^  -  CH^  -  CH^Ï. 

Le  nitrile  butyrique  mononitré  primaire  CN  -  CH^j  - 
CH^  -  CH^  (NO2)  constitue  un  liquide  incolore,  quelque 
peu  épais,  faiblement  odorant,  d'une  saveur  piquante, 
douceâtre. 


[' )  Au  moment  où  j'écris  ces  lignes,  je  reçois  le  numéro  12  du 
Bulletin  de  la  Société  chimique  de  Berlin,  où  M.  0.  Piloty  fail  con- 
naître un  isomère  du  nitrile  butyrique  normal  primaire,  à  savoir  le 
nitrile  isobulyrique  mononitré,  composé  solide,  cristallin,  fus.  à  So". 


(   «'^5  ) 

Il  est  insoluble  dans  l'eau;  l'éther,  l'alcool,  la  benzine, 
le  chloroforme,  les  solutions  alcalines  le  dissolvent  aisé- 
ment. 

Sa  densité  à  12°  est  égale  à  1.158. 

Il  bout  à  160°  sous  la  pression  de  35  millimètres,  à 
256°  sous  la  pression  ordinaire,  mais  en  subissant  une 
légère  décomposition. 

J'ai  montré  précédemment  combien  est  puissante  l'in- 
nuence  volatilisante  qui  résulte  de  la  coexistence  en  un 
point  des  molécules  carbonées  des  composants  -  CN  et 
>  CO.  On  est  autorisé  à  admettre  qu'il  en  doit  être  ainsi 
des  composants  -  CN  et  >  C  (NO^). 

Le  point  d'ébullition  élevé  du  nitrile  butyrique  nitré 
normal  et  primaire  permet  de  conclure  que  cette  influence 
volatilisante  ne  s'exerce  plus  ou  du  moins  que  très  faible- 
ment à  travers  le  système  -  CHo  -  CH^  -  qui  sépare  les 
composants  -  CN  et  H^C  -  NO.» 


CH3-CH2-CH2-CHÎ  Eb.        i" 

CN-CH2-CH2-CH5  US' 

CH3-CH2-CHJ    CH3  Éb.        1» 

CII3  -  CH2  -  CH2  -  CH2(N02)  1 52' 

CN-CH2-CHÎ-CH3  Éb.     118» 

CN  -  CHj  -  CH,  -  CH2(N0,)  256° 


Ml" 


151' 


M  8» 


84° 


CH5-CH3-CH2-CH,(NOj)     Éb.     152» 
CN  -  CH,  -  CHi  -  CH2(i\0i)  2ÔG» 

5'"*    SÉUIE,    TOME    XXXVI.  H 


(   iU  ) 

Les  différences  il7°-84''  et  151  "-US",  ou  55°,  repré- 
sentent ce  qui  tient  clans  les  dérivés  nitriles  nitrés,  à 
l'existence  des  groupements  -  CN  et  -  CHg  (NO2)  à  la  place 
de  -  CH3. 

Ce  corps  présente  les  propriétés  des  nitriles  et  des 
dérivés  nitrés. 

L'action  qu'il  subit  de  la  part  de  l'acide  chlorhydrique 
dans  l'eau  offre  un  intérêt  particulier.  Le  composant 
nitrile  -  CN  est  atteint  le  premier.  Avec  l'acide  chlorhy- 
drique concentré  vers  50",  il  se  transforme  en  acide 
nitro-butyrique  normal  (NOg)  CH2  -  CHç,  -  CH^  -  CO  (OH), 
qui  constitue  un  liquide  épais,  insoluble  dans  l'eau.  Celui- 
ci,  chauffé  à  une  température  plus  élevée  avec  HCl  aq., 
de  même  que  le  nitrile  nitré  lui-même,  se  transforme  en 
acide  succinique  normal  C.2H4  -  [C0(0H)].2,  fus.  185".  Il 
se  forme  en  même  temps  du  chlorhydrate  d'hydroxyla- 
mine  (HO)NHo,  HCl. 

M.  Van  Melckebeke  s'occupe  en  même  temps  de  la 
préparation  des  nitriles  nitrés  inférieurs  en  C3,  etc.,  et 
notamment  de  Vacélo-nitrile  mononitré  NC  -  CH2(N0.2), 
l'isomère  de  l'acide  fulminique  ou  l'acide  fulminique 
lui-même,  composé  qui  a  déjà  fait  souvent  l'objet  des 
recherches  des  chimistes. 

J'aurai  l'honneur  de  communiquer  à  l'Académie  les 
résultats  des  études  de  MM.  De  Battice  et  Van  Melcke- 
beke. 


(  455  ) 


Sur  r action  cataly tique  de  la  mousse  de  platine  et   de 
palladium;  par  A.  de  Hemptinne. 

La  mousse  de  platine  détermine  par  sa  présence 
l'union  de  plusieurs  gaz;  ainsi,  par  exemple,  celle  de 
l'oxygène  et  de  l'hydrogène,  de  l'hydrogène  et  de  l'acéty- 
lène, l'oxydation  de  l'anhydride  sulfureux  et  d'autres 
réactions  encore. 

Certains  auteurs  ont  voulu  expliquer  l'action  cataly- 
tique  du  platine  par  sa  propriété  de  condenser  les  gaz; 
suivant  d'autres,  les  combinaisons  chimiques  résultent  de 
la  formation  de  composés  du  platine  peu  stables. 

L.  Mond,  Ramsay  et  Shields  ont  étudié  avec  soin 
l'absorption  de  l'hydrogène  et  de  l'oxygène  par  la  mousse 
de  platine  ;  ils  n'ont  pas  encore  osé  se  prononcer  sur 
l'existence  d'un  hydrure  de  platine;  Berthelot,  au  con- 
traire, croit  à  l'existence  d'un  composé  de  ce  genre  qui 
aurait  pour  formule  Pts^Hs;  il  base  sa  conviction  sur 
des  observations  thermo-chimiques  ;  ses  expériences  sont, 
comme  l'ont  fait  remarquer  L.  Mond,  Ramsay  et  Shields, 
entachées  de  quelques  erreurs. 

La  question  de  l'existence  d'un  hydrure  ou  de  la  fixa- 
tion d'une  grande  quantité  d'hydrogène  par  absorption 
ou  condensation  est  donc  encore  ouverte;  j'ai  cru  qu'il 
serait  utile  de  se  servir  d'une  méthode  nouvelle  pour 
tâcher  d'éclaircir  les  faits. 


(  156  ) 


METHODE. 


On  sait  par  les  belles  recherches  de  Piclet  qu'à  une 
température  assez  basse  toutes  les  réactions  chimiques 
cessent;  à  —  130°,  les  corps  doués  des  affinités  les  plus 
vives  semblent  être  devenus  indifférents.  Si  donc  l'hydro- 
gène est  fixé  sur  le  platine  par  combinaison,  à  une  tempé- 
rature assez  basse,  cette  action  devra  cesser  d'avoir  lieu; 
si,  au  contraire,  le  platine  condense  simplement  l'hydro- 
gène, en  d'autres  termes,  s'il  n'y  a  qu'un  phénomène 
physique,  l'abaissement  de  la  température  sera  favorable 
à  la  condensation.  Nous  avons  donc  là  une  méthode  pour 
distinguer  un  phénomène  chimique  d'un  phénomène 
physique;  faisons-en  l'application  à  l'étude  de  l'action  de 
l'hydrogène  sur  la  mousse  de  platine  et  de  palladium. 


APPAREIL    ET    RECHERCHES. 

L'appareil  se  compose  d'un  tube  BAE  gradué,  long 
d'environ  80  centimètres  et  plongeant  dans  un  vase  à 
grande  surface  plein  de  mercure  D.  AB  est  recourbé  en 
A;  en  R  et  R'  se  trouvent  des  robinets;  la  pièce  mobile  C 
s'adapte  en  E  sur  le  tube  AE  au  moyen  d'un  manchon 
rodé.  Le  tube  EF  est  capillaire  ;  la  partie  depuis  le  coude 
jusqu'en  F  est  longue  d'environ  25  centimètres.  Voici 
maintenant  la  façon  dont  on  procède.  Par  le  robinet  R,  on 
a  ftîit  le  vide  dans  l'appareil,  le  mercure  monte  en  N;  on 
ferme  R'  ;  par  R,  on  laisse  entrer  de  l'hydrogène  jusqu'il 
ce  que  le  mercure  descende  au  niveau  Nj,  arbitrairement 


(  <S7) 
choisi,  mais  le  même  pour  toutes  les  expériences;  on 
refroidit  C  à  —  78".  On  ouvre  R',  le  mercure  monte  en  N4; 
cette  opération  détermine  l'effet  de  la  dilatation  du  gaz 
dans  le  réservoir   C   vide. 


:t 


t 


v 


u 


On  enlève  le  bain  d'acide 
carbonique  et  d'éther  et  on 
le  remplace  par  un  bain  à 
H-  15°;  le  niveau  du  mer- 
cure descend  en  N^. 

Au  moyen  d'un  thermo- 
mètre à  toluol,  j'ai  eu  soin 
de  m'assurer  que  la  tem- 
pérature du  bain  d'acide 
carbonique  et  d'éther  reste 
constante  à  —  78*,  si  l'on  a 
soin  d'y  ajouter  en  temps 
de  l'acide  carbonique;  dans 
ces  conditions,  le  niveau  du 
mercure  reste  aussi  constant 
en  N4. 

On  répète  la  même  série  d'expériences  que  ci-dessus, 
après  avoir  mis  une  certaine  quantité  de  platine  dans  le 
réservoir  C. 

Le  volume  occupé  par  le  platine  étant  très  petit 
comparativement  à  celui  du  réservoir,  les  erreurs  prove- 
nant de  ce  chef  peuvent  être  négligées.  On  obtient  ainsi 
des  niveaux  N5  et  N3,  d'où  l'on  peut  déduire  approxi- 
mativement le  pouvoir  absorbant  du  platine  à  —  78°  et 
à  ■+-  15°. 


FiG.  i. 


(  <S8  ) 

ABSORPTION  DE  l'hYDROGÈNE  PAR  DU  CARBONE. 

La  condensation  d'un  gaz  par  le  carbone  est  un  effet 
qui  semble  purement  mécanique;  par  suite,  la  quantité 
condensée  doit  croître  avec  l'abaissement  de  la  tempéra- 
ture :  cela  résulte  des  principes  généraux  de  la  thermody- 
namique. 

J'ai  cru  pourtant  utile  de  faire  une  expérience  avec  du 
carbone  pur,  afin  de  vérifier  l'ordre  de  grandeur  des  effets 
dus  au  refroidissement.  Le  carbone  a  été  préparé  en  car- 
bonisant du  sucre;  le  produit  ainsi  obtenu  est  chauffé 
dans  un  tube  en  verre  de  Bohême;  sur  le  produit  incan- 
descent, on  fait  circuler  un  courant  de  chlore  qui  débar- 
rasse le  carbone  des  dernières  traces  d'impuretés  en 
formant  des  chlorures  volatils;  le  carbone  restant  est 
ensuite  bien  lavé,  séché  et  tamisé.  10  grammes  ont  été 
mis  dans  le  réservoir  C  ;  celui-ci  a  été  pris  notablement 
plus  grand  que  dans  les  expériences  suivantes  avec  le 
platine.  On  commence  par  faire  le  vide  dans  l'appareil 
et  on  chauffe  jusqu'au  moment  où  le  carbone  semble  ne 
plus  dégager  d'air.  On  ferme  R',  on  refroidit  C  à  —  78°, 
on  introduit  de  l'hydrogène  jusqu'en  N^  et  on  ouvre  R'; 
le  niveau  du  mercure  monte  au  bout  de  quelque  temps 
en  N5  ;  lorsqu'il  ne  change  plus,  on  le  note  ;  N1N5 
=  710  millimètres. 

On  enlève  ensuite  le  bain  réfrigérant;  le  niveau  descend 
au  bout  d'un  temps  assez  long  en  N3  ;  N^Nj  =  422  milli- 
mètres. 

On  vide  l'appareil  et,  après  avoir  déterminé  approxi- 
mativement le  volume  occupé  par  le  carbone,  on  le 
remplace  par  du  sable  et  on  répète  les  mêmes  opérations. 
On  obtient  N1N4  =  312,  NjN.  =  259. 


(  159  ) 
De  là  on  déduit  pour  l'effet  réel  du  carbone  : 

Ascension  à  —  78°     NjNs  —  N,Ni  =  710  —  422  =  288 

à-»- 15°     N,N3  — N,N,  =  312  — 259=    55 

On  voit  d'après  ces  chiffres  que  l'effet  du  refroidisse- 
ment sur  le  pouvoir  condensant  du  carbone  est  très 
notable  à  —  78°;  la  condensation  est  près  de  six  fois  plus 
forte  qu'à  15". 

PLATINE    ET    HYDROGÈNE. 

La  mousse  de  platine  a  été  préparée  en  réduisant  le 
chlorure  de  platine  par  le  formiate  de  soude;  la  quantité 
mise  dans  le  réservoir  C  a  été  de  5^,68.  La  mousse  de 
platine  contient  toujours  une  assez  grande  quantité  d'oxy- 
i,'ène;  pour  se  débarrasser  de  celui-ci,  on  commence  par 
remplir  l'appareil  d'hydrogène;  celui-ci  se  combine  à 
l'oxygène;  on  chauffe  ensuite  dans  le  vide  jusqu'à  180°. 

On  enlève  ainsi  toute  l'eau  et  la  plus  grande  partie  de 
l'hydrogène  fixé  sur  le  platine.  Avec  la  mousse  ainsi  pré- 
parée, on  opère  comme  il  a  été  décrit.  On  ne  peut  chauffer 
à  une  température  supérieure  à  180°  sans  transformer 
une  partie  du  platine  en  éponge,  ce  qui  le  rend  moins 
actif.  Voici  maintenant  les  chiffres  obtenus,  appareil 
vide  : 

A  —  78»     N.Ni  =  116  millimètres. 
A   -4-  15"     N,N2=    90  millimètres. 

L'appareil  contenant  og',68  de  platine  refroidi  à  —  78°, 
on  ouvre  très  doucement  le  robinet  R'  de  manière  que 
le  gaz,  avant  d'arriver  au  platine;  ait  le  temps  de  se 
refroidir  dans  le  tube  capillaire.  Le  niveau  étant  resté 
constant  en  N5  pendant   quarante-cinq  minutes,   on  a 


(    li)0  ) 

enlevé  le  bain  et  porté  C  à  15°;  par  suite  de  la  dilatation 
du  gaz,  le  niveau  descend  rapidement,  puis,  par  suite 
d'une  nouvelle  absorption,  remonte  de  quelques  milli- 
mètres et  au  bout  d'une  heure  ne  monte  plus  qu'avec  une 
extrême  lenteur.  En  prenant  alors  ce  niveau,  on  obtient  : 

A  —78"     N1N5  — N,N4=  14i  — 116  =  28  ) 
A-t-15-     N.N,  —  N,N2=  170—    90  =  80  î 

Il  suffit  de  jeter  un  coup  d'œil  sur  ces  chifîres  et  de  les 
comparer  à  ceux  obtenus  pour  le  carbone  pour  se  con- 
vaincre que  la  mousse  de  platine  agit  tout  différemment  ; 
l'absorption  est  moindre  à  —  78"  qu'à  -+-  15°;  par  suite, 
l'hypothèse  d'une  simple  condensation  à  la  surface  doit 
être  rejetée. 

Après  avoir  de  nouveau  fait  le  vide  dans  l'appareil,  le 
platine  a  été  porté  à  580°  pendant  un  temps  assez  long. 

On  obtient  alors  : 


A  —78»     N^Ns  — N,Ni=    9.6 
A   -+-  iS"     N,N3  — N,N2=15.6 


II. 


L'absorption  est  moindre  à  —  78°  qu'à  -h  15°,  la 
quantité  d'hydrogène  fixé  est  notablement  plus  petite,  le 
platine  a  perdu  de  ses  qualités  après  avoir  été  fortement 
chauffé. 

Un  autre  échantillon  de  3  grammes  a  donné  : 

A   —  78»     N.Ns  —  N,N,  =  1 1  !)  —  U  6  =    5  ) 

m. 

A  -+- 15»    N^Nj  — N,Ni=  102—    90  =  li>j 

Le  résultat  est  analogue  aux  précédents,  mais  la  quan- 
tité totale  d'hydrogène  absorbé  par  unité  de  poids  a  été 
notablement  moindre  que  dans  I  ;  il  est  à  remarquer  que 
€et  échantillon  avait  été  chauffé  plusieurs  fois  à  190°,  ce 


(  ^^1  ) 

qui  a  rendu  le  platine  moins  actif.  Un  nouvel  échantil- 
lon de  5fc'',o  a  été  mis  dans  l'appareil  et  traité  comme 
dans  l'expérience  I,  avec  cette  dilïérence  que,  au  lieu  de 
faire  passer  brusquement  la  température  de  —  78°  à 
-h  io°,  on  a  laissé  le  bain  refroidir  lentement  jusqu'à  la 
température  ordinaire  ;  on  a  observé  le  niveau  du  mercure 
correspondant  aux  différentes  températures.  Cette  opé- 
ration avait  pour  but  de  voir  si  à  une  certaine  tempéra- 
ture il  n'y  avait  pas  d'absorption  brusque.  Une  série  de 
déterminations  du  même  genre  ont  été  faites  avec  l'ap- 
pareil vide. 

Dans  la  première  colonne  du  tableau  suivant  se 
trouvent  les  chiffres  indiquant  le  nombre  de  divisions 
dont  descend  le  mercure  lorsque  l'appareil  vide,  port(; 
à  —  78°,  revient  à  la  température  ordinaire. 

La  colonne  II  donne  des  chiffres  analogues,  l'appareil 
contenant  5^', 5  de  platine  chargé  d'hydrogène;  dans  la 
colonne  III  sont  les  températures  et  dans  la  colonne  IV 
le  temps  compté  en  minutes  à  partir  du  moment  où  l'on 
ne  refroidit  plus. 


1. 

II. 

III. 

IV. 

0.0 

0.0 

—  78 

0 

2 

2.5 

78 

8 

5 

4.5 

60 

13 

7.5 

6.5 

50 

20 

10.0 

7.5 

40 

26 

12 

8.5 

35 

30 

43.5 

8.5 

30 

34 

14.5 

8.5 

25 

38 

15.5 

9 

20 

48 

16 

9.5 

15 

52 

17  10.5  10  58 


(  162) 

La  ligure  2  permet  de  se  rendre  compte  d'un  coup 
d'œil  de  la  marche  du  phénomène  ;  les  températures  sont 
portées  comme  abscisses  à  partir  de  —  78°,  et  sur  la  ligne 
des  ordonnées  à  partir  du  point  A",  arbitrairement  choisi, 
on  porte  le  nombre  de  divisions  dont  le  mercure  est  des- 
cendu. La  ligne  AB  représente  la  descente  du  mercure, 
l'appareil  étant  vide;  la  ligne  ACDEF  montre  la  manière 
dont  le  platine  se  comporte  dans  une  atmosphère  d'hy- 


\ 

c 

^ 

" 

^ 

\.D                  E 

^ 

jj- 

■■■■■ 

SO  ito        5S         io        a5        -20         là         10 

FiG.  2. 


drogène.  La  partie  AC  montre  une  descente  plus  rapide 
que  dans  l'appareil  vide;  cela  provient  du  gaz  qui  est 
fixé  par  condensation  sur  le  platine.  A  partir  du  point  G, 
l'inclinaison  de  la  ligne  comparée  à  celle  de  l'appareil 
vide  montre  qu'il  y  a  absorption  graduelle  de  l'hydro- 
gène ;  celle-ci  devient  surtout  sensible  en  D  vers  So".  Le 
platine  ayant  fixé  alors  presque  tout  ce  qu'il  peut  absor- 
ber, la  courbe  redevient  parallèle  à  AB,  A  —  10°,  le  bain 


(  163  ) 

réfrigérant  a  été  enlevé  et  le  platine  porté  à  -+-  15°  ;  en 
vingt  minutes,  le  niveau  est  remonté  encore  de  deux  divi- 
sions. On  obtient  ainsi  : 

N,N«  — N,N,=    6.6  ) 

IV. 
N.Nj  — N.Ni  =  lS.6  i 

Rapportons  ces  quatre  expériences  à  l'unité  de  poids 
du  platine  ;  on  obtient  : 


I. 

11. 

IM. 

IV. 

A  —78" 

4.9 

1.6 

1 

1.2 

A  +  IS» 

14 

±7 

4 

2.8 

Rapports 

2.8 

1.7 

4 

2.Ô 

Le  tableau  précédent  nous  montre  que  s'il  y  a  une 
certaine  différence  d'un  échantillon  à  l'autre  de  platine, 
ils  ont  pourtant  tous  ceci  de  commun,  c'est  d'absorber 
moins  d'hydrogène  à  —  78°  qu'à  -h  15°  ou,  à  coup  sur, 
que  cette  absorption  se  l'ait  infiniment  plus  lentement 
aux  basses  températures. 

Comme  il  a  été  dit,  l'hypothèse  d'une  simple  conden- 
sation doit  être  écartée;  celle  d'une  sorte  de  dissolution 
de  l'hydrogène  dans  le  platine  n'est  pas  admissible  non 
plus;  en  effet,  en  vertu  de  la  loi  du  déplacement  de 
l'équilibre,  la  quantité  d'hydrogène  dissoute  aux  basses 
températures  devrait  être  plus  grande,  puisque  l'hydro- 
gène et  le  platine  mis  en  présence  l'un  de  l'autre 
dégagent  de  la  chaleur.  Il  leste  deux  hypothèses  pos- 
sibles :  ou  bien  c'est  la  porosité  du  platine  qui  joue  un 
rôle,  ou  bien  on  se  trouve  en  présemce  d'un  phénomène 
chimique  ;  nous  discuterons  plus  loin  les  faits  favorables 
à  l'une  ou  l'autre  de  ces  hypothèses. 


(  l«4) 


MOUSSE    DE    PLATINE    FRAICHE    ET    HYDROGENE    A    LA 
TEMPÉRATURE    DE    l'aIR    LIQUIDE. 

ïl  suffit  (le  jeter  un  coup  d'œil  sur  le  tableau  précédent 
pour  se  convaincre  que  le  platine  perd  sensiblement  de 
ses  qualités  après  avoir  été  porté  à  une  température  assez 
élevée;  d'autre  part,  cette  opération  est  indispensable 
pour  se  débarrasser  de  l'hydrogène  que  l'on  a  dû  faire 
agir  au  préalable  sur  le  platine,  afin  de  se  débarrasser  de 
l'oxygène  adhérent.  J'ai  espéré  qu'en  opérant  à  —  190', 
température  de  l'air  liquide,  la  combinaison  de  l'oxygène 
et  de  l'hydrogène  n'aurait  plus  lieu  et  que  l'on  pourrait 
ainsi  observer  l'absorption  réelle  de  l'hydrogène  par  la 
mousse  de  platine  fraîche. 

Je  dois  à  l'obligeance  de  M.  Ostwald,  professeur  à 
l'Université  de  Leipzig,  d'avoir  pu  faire  cette  expérience; 
je  tiens  à  le  remercier  ici  d'avoir  mis  à  ma  disposition  la 
machine  de  Linde  qui  sert  à  la  préparation  de  l'air 
liquide.  Je  tiens  également  à  remercier  le  D'  Luther, 
assistant  au  laboratoire,  pour  la  complaisance  qu'il  m'a 
témoignée. 

J'ai  opéré  exactement  comme  précédemment,  avec 
cette  dilîérence  que  le  platine  du  réservoir  G  n'avait  pas 
été  au  préalable  rincé  avec  de  l'hydrogène.  Le  réservoir  C 
plongeant  dans  l'air  liquide,  ma  surprise  a  été  grande, 
lorsque  j'ai  ouvert  le  robinet  R',  de  voir  monter  très  haut 
le  niveau  du  mercure.  Cette  grande  ascension  a  été  déter- 
minée par  la  combinaison  de  l'hydrogène  avec  l'oxygène 
adhérent  au  platine 

N.N,  — N,N,  =  33l'i. 


(  465  ) 
Après  a\oir  enlevé  le  bain,  il  y  a  encore  eu  une  absorp- 
tion de  10  millimètres  : 

Comme  dans  les  expériences  précédentes,  il  y  a  eu 
une  partie  de  l'hydrogène  qui  n'a  pas  été  absorbée  à 
basse  température:  il  est  difficile  de  savoir  exactement 
(juelle  est  celte  quantité,  parce  que  l'abaissement  de  la 
température  augmente  un  peu  la  condensation  à  la  sur- 
face, comme  dans  le  cas  du  charbon.  Le  temps  très 
limité  dont  je  disposais  ne  m'a  pas  permis  de  répéter 
l'expérience  ni  d'opérer  sur  du  platine  rincé  au  préa- 
lable avec  de  l'hydrogène,  puis  chauffé  à  180°,  ce  qui  sérail 
préférable.  La  combinaison  de  l'oxygène  et  de  l'hydro- 
gène à  —  190°  est  un  fait  assez  curieux  :  on  sait  en  eifel 
qu'à  — 150°  l'acide  sulfurique  et  le  sodium  n'agissent  plus 
l'un  sur  l'autre.  La  mousse  de  platine  donne  donc  aux 
gaz  une  activité  étonnante. 

PLATINE    ET    OXYUE    DE    CARBONE. 

D'après  Harbeck  et  C.  Lunge  (*),  il  existe  une  combi- 
naison du  platine  et  de  l'oxyde  de  carbone;  celle-ci  se 
détruit  brusquement  à  250°.  Voyons  comment  le  platine 
et  le  gaz  mis  en  présence  se  comportent  aux  basses  tem- 
pératures. 

On  a  opéré  exactement  comme  pour  l'hydrogène;  Va\)- 
pareil  contenait  5^',68  de  platine  exempt  d'oxygène. 

On  obtient  : 

A  —  78»     NjNs  —  N,Ni  —  S8.J 
A  -4-  1 5°    N.Nj  —  N.N,  =  30 

(*)  Zeitschrift  fur  anorg.  Cheiu.,  t.  VI,  p.  67. 


(  1««  ) 

Avec  le  même  platine,  après  l'avoir  chauffé  à  500% 

on  trouve  : 

A  — 78°    N.N«-N,N,-=13     |    ^^ 

A  -t-  1 5»     N.Ns  -  N,N,  =  20.4  j 

Un  autre  échantillon  de  5  grammes,  après  avoir  été 
chauffé  à  500%  donne 

A -78°     N,N5-i\,=4N     7       (   ^^^ 

Un  autre  échantillon  de  o^',5  a  donné 

A  — 78»     NA  — N.N4=    7      1 

IV. 
A  -t-  15°     N.Nj  — iN,N2=    9      ) 

Pour  cet  échantillon,  on  a  laissé  revenir  lentement  le 
bain  à  la  température  ordinaire.  Le  tableau  et  la  figure      J 
qui  suivent  donnent  une  idée  de  la  marche  de  l'absorp-      ■ 
tion  aux  différentes  températures. 


0 

—  78 

Temps 

i.5 

75 

4 

0 

70 

8 

6 

60 

IG 

7 

55 

20 

8.5 

50 

25 

9.5 

45 

50 

a 

40 

55 

H.5 

55 

40 

12 

50 

45 

15.5 

25 

50 

U 

20 

55 

15 

15 

60 

(  167  } 
AB  représente  la  descente  du  mercure,  l'appareil  étant 
vide  ;5ACDEF,  la  descente  lorsque  le  réservoir  contient  du 
platine  et  de  l'oxyde  de  carbone.  Comme  dans  le  cas  de 
l'hydrogène,  on  observe  d'abord  une  descente  brusque 
provenant  sans  doute  du  gaz  fixé  par  simple  conden- 
sation de  surface.  La  ligne  reste  alors  sensiblement  paral- 
lèle à  AB  jusqu'au  point  D;  vers  —  40°  à  —  30°,  il  semble  y 
avoir  une  absorption  assez  brusque  de  l'oxyde  de  carbone. 
Il  est  aussi  à  remarquer  que  c'est  vers  40°  que  l'absorption 
de  l'bydrogène  est  surtout  devenue  grande. 


Bapportant   les   dilTérentes  expériences  à  l'unité  de 
poids  du  platine,  on  obtient  : 


I. 

H. 

.  III. 

IV. 

A— 78° 

5 

2.2 

2.3 

1.4 

A-4-  15» 

r;.2 

3.6 

5 

1.6 

Rapports 

1 

1.3 

2.t 

1.1 

(   i68  ) 

Co  tableau  démontre  que,  de  même  que  pour  l'hydro- 
gène, l'absorption  est  plus  forte  à  15"  qu'à — 78",  quoique, 
d'un  échantillon  à  l'autre,  il  y  ait  une  différence  assez 
grande. 

En  moyenne,  l'absorption  de  l'oxyde  de  carbone  par 
le  platine  est  plus  grande  à  — 78"  que  pour  l'hydrogène, 
comme  le  prouvent  les  chiffres  représentant  les  rapports. 

Ces  faits  semblent  se  concilier  difficilement  avec  l'hypo- 
thèse d'une  diffusion  des  gaz  dans  les  pores  du  platine; 
en  effet,  on  peut  admettre  qu'une  moins  grande  quantité 
d'hydrogène  est  fixée  par  le  platine  aux  basses  tempéra- 
tures, par  suite  d'une  contraction  du  métal;  mais  dans  ce 
cas,  l'effet  de  la  contraction  devrait  exercer  une  influence 
plus  considérable  sur  l'oxyde  de  carbone  dont  les  molé- 
cules sont  plus  grandes  :  or,  c'est  le  contraire  qui  a  lieu. 

De  plus,  le  métal  se  dilatant  d'une  manière  continue, 
il  devrait  en  être  de  même  de  l'absorption;  or  celle-ci 
semble  croître  assez  rapidement  entre  —  40"  et  —  50". 
La  discussion  des  phénomènes  observés  semble  plutôt 
favorable  à  l'hypothèse  d'une  combinaison  chimique;  ils 
ne  me  paraissent  pourtant  pas  suffisants  pour  trancher  la 
question,  l'hypothèse  d'un  effet  de  la  porosité  n'étant  pas 
absolument  exclue. 

PALLADIUM    ET    HYDROGÈNE. 

Le  pouvoir  absorbant  du  palladium  est  tel  que  l'on  ne 
peut  en  mettre  qu'une  petite  quantité  dans  le  réservoir  C  : 
on  a  mis  Os',o70  de  palladium.  Le  palladium  a  été  au 
préalable  laissé  en  contact  avec  de  l'hydrogène  pur  pen- 
dant vingt-quatre  heures,  afin  de  le  débarrasser  de 
l'oxygène  adhérent,  puis  chauffé  dans  le  vide  à  190".  Mis 


(  -169  ) 
de  nouveau  en  contact  avec  de  l'hydrogène,  il  a  donné 

A  -  70°     N,N,  —  N.Ni  =  188.4 


A  H-  15°     IV,N4  —  N,N3==  158.4  ' 

L'expérience  répétée  plusieurs  fois  a  toujours  fourni 
les  mêmes  résultats.  On  a  également  fait  une  expérience 
après  avoir  chautTé  le  palladium  jusqu'à  450"  et  obtenu 
un  résultat  analogue.  Le  palladium  se  comporte  autre- 
ment que  le  platine  ;  la  condensation  à  la  surface  semble 
jouer  un  rôle  assez  grand,  mais  cela  n'exclut  pourtant 
pas  absolument  la  possibilité  d'un  phénomène  chimique; 
en  effet,  la  plus  basse  température  employée  a  été  —  78°; 
il  serait  intéressant  de  voir  ce  qui  a  lieu  à  la  température 
de  l'air  liquide  :  une  observation  de  ce  genre  permettrait 
peut-être  de  trancher  la  question. 

PALLADIUM  ET  OXYDE  DE  CARBONE. 

Suivant  Harbeck  et  Lunge,  il  existe  un  composé  de 
palladium  et  d'oxyde  de  carbone;  celui-ci  se  décompose 
vers  250".  Un  gramme  de  palladium  exempt  d'oxygène  a 
donné  : 

A  -  78°     N,i\,  -  N,N,  =  5      ] 

A  -4-  15°     N,N3-N,N2  =  4     [  II. 
Rapport 1.5  ) 

L'absorption  est  un  peu  plus  grande  que  dans  le  cas  du 
platine,  mais  le  rapport  est  à  peu  près  le  même. 

Après  avoir  fait  le  vide  dans  l'appareil  et  chauffé  un 
temps  assez  long  à  450°,  puis  refroidi  à  7S°  et  introduit 
de  l'hydrogène,  on  a  trouvé  : 

A  —  78°     N,N,  —  NiN,  =  H. 

5'"*    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  1^2 


(  170) 

Le  niveau  étant  resté  constant  pendant  quarante-cinq 
minutes,  on  a  enlevé  le  bain  et  porté  la  température 
à  15°  ;  mon  étonnement  a  été  grand  de  voir  monter  rapi- 
dement le  mercure  et,  en  quarante  minutes,  d'obtenir  : 

N,N.^IM,Ni=  100. 

J'ai  cherché  à  répéter  l'expérience  avec  un  nouvel 
échantillon  de  palladium  qui  n'avait  pas  été  en  contact 
avec  de  l'oxyde  de  carbone,  mais  simplement  chauffé 
plus  longtemps  à  oOO"  :  les  résultats  ont  été  différents  et 
semblables  à  ceux  de  I.  Le  palladium  semble  donc  avoir 
plus  ou  moins  changé  de  nature  par  le  contact  de  l'oxyde 
de  carbone.  Afin  de  m'en  assurer,  j'ai  de  nouveau  rempli 
l'appareil  d'oxyde  de  carbone,  puis  fait  le  vide  et  chauffé 
à  450°  aussi  longtemps  qu'une  trace  de  gaz  se  dégageait. 
Les  4  grammes  de  palladium  ont  alors  été  mis  au  con- 
tact avec  de  l'hydrogène  à  —  78°,  puis  on  a  laissé  revenir 
lentement  le  bain  à  la  température  ordinaire. 

Le  tableau  et  la  figure  suivants  donnent  les  résultats  : 

0  —  78  Temps. 


2.5 

70 

8 

4 

63 

12 

G 

CO 

il 

7 

55 

21 

10 

45 

28 

12 

55 

55 

15.5 

30 

57 

14.5 

25 

40 

U.5 

20 

45 

(  171  ) 

Vers  20%  le  niveau  se  met  à  monter  très  rapidement  : 
en  deux  minutes,  il  remonte  de  192  millimètres,  et  en 
vingt  minutes,  de  252  millimètres. 


La  ligne  AB  représente  la  descente  du  mercure  pour 
l'appareil  vide;  ACDEF,  le  même  phénomène,  le  réser- 
voir C  contenant  4  grammes  de  palladium.  On  voit  que 
vers  20°  il  y  a  une  absorption  très  brusque,  comme  l'in- 
dique l'ascension  très  rapide  de  la  ligne  EF.  J'ai  encore 
répété  cette  expérience  et  obtenu  le  même  résultat. 

Je  n'ai  pu,  jusqu'à  présent,  trouver  une  explication 
satisfaisante  de  ce  phénomène.  A  première  vue,  il  faudrait 
admettre  que  le  palladium,  après  avoir  été  en  contact  avec 
de  l'oxyde  de  carbone,  a  plus  ou  moins  changé  de  nature 
et  ne  devient  actif  que  vers  —  20°.  Trdost  et  Hautefeuille 
admettent  l'existence  d'un  composé  de  palladium  et 
d'hydrogène,  Hoitsema  la  rejette,  enfin  Ramsay  et  Shields 


(  172  ) 

ne  se  pioiioiiceiit  pas;  je  garderai  la  même  réserve 
jusqu'au  jour  où  l'on  aura  fait  une  expérience  à  —  490"; 
une  détermination  de  ce  genre  pourra,  je  pense,  trancher 
la  question. 

En  terminant,  j'ajouterai  encore  que  les  expériences 
sur  le  palladium  rendent  peu  probable  l'hypothèse  d'un 
phénomène  de  porosité.  En  effet,  si  le  platine  absorbe 
moins  de  gaz  à  —  78°  qu'à  -+-  15"  parce  que  le  métal  se 
contracte,  il  semble  qu'il  devrait  en  être  de  même  pour  le 
palladium;  or,  c'est  le  contraire  qui  a  lieu;  de  plus,  la 
façon  dont  se  comporte  le  palladium  qui  a  été  en  contact 
avec  CO,  s'explique  assez  difticilement  par  une  hypo- 
thèse mécanique. 

Gand,  le  10  juin  1898. 


Sur  tes  salicy laies  doubles  de  métal  et  d'antvpijrine  {troisième 
communication);  par  M.-C.  Schuyten,  docteur  en 
sciences. 

J'ai  l'honneur  de  présenter  à  l'examen  de  l'Académie 
la  troisième  communication  de  mes  recherches  sur  les 
salipyrines  métalliques.  Elle  comporte  les  métaux  Mg, 
Mn,  Ph,  Al,  Cr,  Ur,  Bi. 

Les  trois  premiers  donnent  les  composés  additionnels 
attendus  ou  prévus  par  le  calcul;  les  autres  sont  incapables 
de  produire  des  salipyrines,  sauf  peut-être  le  Bi.  L'AI  et  le 
Cr  provoquent  la  précipitation  de  salipyrine,  simplement; 
le  Bi  donne  sans  doute  le  salicylate  double  attendu;  le 
Cr,  dans  des  circonstances  peu  définissables,  et  l'Ur 
engendrent  des  précipités  non  homogènes,  composés, 
selon  toute  apparence,  de  plusieurs  produits  mélangés  en 
proportion  constante. 


(   175 


SALICYLATE  DOUBLE  DE  MAGNESIUM  ET  D  ANTIPYRIME. 

Le  mélange  des  solutions  aqueuses  des  composants,  en 
quantités  calculées,  ne  provoque  pas  de  précipitation;  il 
faut  avoir  recours  à  l'évaporation  sur  l'acide  sulfurique 
concentré  ou  au  bain-marie;  dans  ce  dernier  cas,  on 
recueille  une  masse  cristalline  jaunâtre  qui  devient 
blanche  cependant  par  le  lavage;  les  eaux  mères  sont 
jaunes. 

Dans  le  tube,  le  corps  fond  en  un  liquide  transparent, 
incolore,  qui  distille  ensuite  du  phénol  en  noircissant  (se 
décomposant). 

Point  de  fusion  :  ISe^-iST"  (non  corr.). 

Formule  : 

(C«H,OH.CO,),  M-.  (C„H,AO),  2H,0. 
Analyses  : 


Substance. 

MgO. 

HM. 

0.3483 

0.0193 

— 

0.1630 

0.0085 

- 

0.8336 

— 

0.0427 

(  174) 

ïpriraées  en  °/o  : 

I.                   II. 

Mg   ....     3.32»/,            3.12»/, 

3.41  •/, 

Trouvé. 

Calculé 

\U0  .     .     .     .                 5.12  »/o 

5.06  «/„ 

Trouvé. 

Calculé. 

La  calcinalion  dans  le  creuset  de  platine  doit  être  con- 
duite, surtout  au  début,  avec  une  extrême  lenteur,  car 
les  vapeurs  entraînent  facilement  des  portions  métalliques. 

La  détermination  de  l'eau  de  cristallisation  a  été  faite 
dans  un  pèse-filtres  soumis  à  une  température  constante 
de  lOO^-lOS";  il  faut  croire  que  dans  une  étuve,  chauffée  à 
la  flamme,  les  parois  et  le  support  métalliques  intérieurs 
ont  une  température  plus  élevée  que  celle  de  l'air  chauffé, 
car  j'ai  trouvé  la  substance,  après  l'opération,  parfaite- 
ment fondue. 

Après    G  heures,  le  corps  avait  perdu  08',0530  de  sor»  poids; 

24       .       après Os^OSys 

6       »  » ()8'-,0404 

6       n  » Oe%0409 

4       ..  « ()«%0419 

6       »  » 08--,0427 

C'est  ici  que  j'ai  arrêté  les  opérations,  le  corps  deve- 
nant très  brun  et  commençant  à  répandre  une  vague 
odeur  de  CgHgOH;  le  commencement  de  la  décomposi- 
tion m'a  semblé  manifeste. 

Le  corps  est  assez  soluble  dans  l'eau  et  cette  solution 
a  une  réaction  neutre.  Dans  les  autres  dissolvants 
(C2H5OH,  (CAl^O,   CHCI3,  QHg,  C«H5.CH3,  CS2), 


(  175  ) 
la  dissolution  est  très  diflicile,  même  à  chaud  ;  le  CHCI5, 
sous  ce  rapport,  donne  encore  le  meilleur  résultat. 

De  l'eau,  j'ai  obtenu,  sous  le  microscope,  de  très  petits 
globules  transparents  à  reflet  faiblement  rougeâtre,  s'étei- 
gnant  sur  fond  noir;  de  l'alcool,  des  plaques  cristallines 
superposées  partiellement,  imitant  assez  bien  des  feuilles 
à  contours  clairs,  arrondis,  enchevêtrées  dans  un  certain 
ordre  régulier,  encore  visibles  sur  fond  noir;  des  autres 
dissolvants,  rien  de  caractéristique. 

L'ammoniaque,  la  potasse  et  la  soude  caustiques;  les 
carbonates  alcalins  ne  donnent  aucune  réaction  appa- 
rente; non  plus  quand  on  chauffe;  le  carbonate  ammo- 
nique,  additionné  d'ammoniaque,  ne  dépose  rien,  même 
après  un  repos  de  plusieurs  jours. 

Le  phosphate  acide  de  sodium,  après  addition  d'ammo- 
niaque et  de  chlorure  d'ammonium,  produit  un  trouble 
très  prononcé  quand  on  secoue  énergiquement  ;  après 
quelque  temps,  dépôt  complet. 

Le  chlorure  ferrique,  l'acide  nitrique  concentré  bouil- 
lant, l'acide  nitreux  donnent  les  colorations  typiques 
pour  l'acide  salicylique  et  l'antipyrine.  Le  nitrate  d'argent, 
rien. 


SALICYLATE  DOUBLE  DE  MANGANOSUM  ET  D  ANTIPYRINE. 

,  Les  premières  gouttes  de  la  solution  aqueuse  du  sel 
manganeux  ajoutées  au  mélange  des  solutions  aqueuses 
de  salicylate  et  d'antipyrine,  en  quantités  calculées,  pro- 
duisent un  précipité  blanc  qui  disparaît  par  l'agitation. 
On  peut  aussi  verser  toute  la  solution,  préparée  d'avance, 
sans  obtenir  un  précipité  permanent.  Mais  si  l'on  aban- 


(  «76  ) 
donne  ensuite  le  liquide  à  lui-même,  il  dépose  pro  mpte- 
ment  un  corps  blanc  de  neige,  amorphe,  qui  devient 
cristallin  sur  le  filtre  pendant  le  lavage  et  se  présente 
finalement  en  tines  aiguilles  courtes,  de  très  joli  aspect. 
Si  Ton  veut  faire  recristalliser,  ce  qui  est  inutile  pour 
l'analyse,  on  peut  le  faire  de  l'alcool  ;  mais  dans  ce  cas, 
il  faut  éviter  la  chaleur;  le  liquide  noircit  très  vite  et  les 
cristaux,  malgré  leur  beauté,  sont  noir-gris. 

Dans  le  tube,  le  corps  fond  en  produisant  beaucoup  de 
mousse,  due  au  départ  abondant  d'eau  et  de  phénol;  à  la 
fin,  le  liquide  passe  du  brun  foncé  au  noir  et  dégage  des 
vapeurs  blanches  à  odeur  pyridique.  Dans  le  creuset 
fermé,  en  présence  de  quelques  gouttes  d'acide  sulfurique 
concentré,  une  douce  chaleur  provoque  la  sublimation 
d'une  magnifique  cristallisation  d'acide  salicylique  sur  les 
parois  peu  chauffées. 

Point  de  fusion  :  Mo"-!  14°  (non  corr.). 

Formule  : 

(CoH^OHCO,), .  Mn  .  (ChH.îNîO)^  .  ^2H,0. 
Analyses  : 


Substance. 

MnsOi. 

H^O. 

0.!26oH 

0.0268 

— 

0.3796 

0.0393 

- 

0.8832 

— 

0.04  i8 

(  ^77  ) 
Ces  résultats  exprimés  en  %  donnent  : 

I.  II. 

Mn    .     .     .     .     7.28  "/'o  7.46  »/„  7Â\"I„ 

Trouvé.  Calculé. 

H,0  .     .     .     .  5.06»/,  4.85  »/o 

Trouvé.  Calculé. 

La  calcination  a  été  faite  au  rouge  vif,  dans  un  creuset 
de  platine. 

La  détermination  de  l'eau  de  cristallisation  a  été  con- 
duite comme  pour  le  composé  du  magnésium.  En  voici 
les  phases  : 

Après    6  heures,  le  corps  avait  perdu  ()?%04M  de  son  poids; 

24       »       après Og',0443 

6        »  »         Og%()452 

6       »  .         Of;'-,04.48 

Le  corps  était  alors  très  foncé  et  commençait  à  répan- 
dre des  odeurs;  j'ai  dû  renoncer  donc  à  ohtenir  un  poids 
constant. 

La  substance  est  soluble  dans  rH20;  réaction  neutre. 

Parmi  les  autres  dissolvants,  l'alcool,  surtout  à  chaud, 
est  le  meilleur.  (Chauffer  très  lentement  et  peu,  car  la 
dissolution  noircit  vite.) 

De  l'eau,  j'ai  obtenu,  sous  le  microscope,  une  cristalli- 
sation superbe  en  aiguilles  prismatiques  tétragonales, 
transparentes  sur  fond  noir  sans  coloration  nette  (lumière 
du  soir);  de  l'C^H^OH,  de  jolies  aiguilles  colorées,  dispo- 
sées en  éventails  à  reflets  magnifiques  sur  fond  noir;  de 
l'éther  sulfurique,  des  aiguilles  isolées,  rares,  hérissées,  le 
long  des  faces,  d'aiguilles  plus  petites  à  peine  visibles, 
disposées  en  aigrettes,  moins  brillantes  sur  fond  noir  que 


(  178  ) 
les  précédentes  ;  du  CHCI5,  de  belles  rosettes  teintées  de 
vert,  de  rouge,  de  bleu,  admirables  sur  fond  noir  ;  du 
benzène,  une  arborescence  incolore  très  caractéristique, 
pure,  s'éteignant  quand  on  tourne  le  nicol;  du  CS^,  rien 
de  spécial. 

Le  sulfure  d'ammonium,  en  présence  du  cblorure 
ammonique,  donne  un  précipité  blanc  jaunâtre;  je  n'ai 
pas  pu  obtenir  le  précipité  couleur  de  chair,  sans  doute 
parce  que  le  corps  n'est  pas  assez  soluble  pour  fournir 
une  dissolution  de  concentration  sutïisante  ;  toutefois, 
après  dépôt,  le  précipité  blanchâtre  présente,  au  fond  du 
tube,  un  léger  rellet  rosàtre. 

La  soude  caustique  donne  une  coloration  brunâtre  avec 
louche  léger  ;  bientôt  il  se  forme  des  tlocons  d'hydrate 
qui  s'accentuent  par  le  chauffage;  si  ensuite  on  ajoute  du 
Br  ou  un  hypobromite  et  qu'on  fasse  bouillir,  il  ne  se 
forme  pas  d'hydrate  noir-brun  de  peroxyde. 

Le  carbonate  de  soude  précipite  immédiatement  en 
blanc. 

Les  ferrocyanures  alcalins  précipitent  en  blanc,  sans 
trace  de  rouge;  l'acide  chlorhydrique  régénère  le  liquide 
incolore  primitif. 

Le  mélange  de  peroxyde  de  plomb  et  d'acide  nitrique 
produit  à  l'ébullition  une  coloration  verte  ou  rouge,  sui- 
vant la  quantité  de  réactif. 

Le  chlorure  ferrique,  l'acide  nitrique  concentré  bouil- 
lant, l'acide  nitreux  donnent  les  réactions  typiques  pour 
l'acide  salicylique  et  l'antipyrine;  le  nitrate  d'argent, 
rien. 

Il  est  à  remarquer  que  la  coloration  rouge  obtenue 
avec  l'acide  nitrique  est  pâle  et  que  par  le  repos  et  le 
refroidissement  elle  passe  lentement  par  le  violet  au  bleu. 


(  ^79  ) 


SALICYLATE    DOUBLE    DE    l'LOMB    ET    D  ANTiPYRINE, 

On  verse  de  l'acétate  de  plomb,  en  solution  aqueuse 
acidiliée  par  l'acide  acétique,  dans  le  mélange  des  solu- 
tions aqueuses  de  salicylate  alcalin  et  d'antipyrine  jusqu'à 
ce  que  la  précipitation  cesse:  le  corps  blanc  formé  est 
gélatineux  et  se  réunit,  par  l'agitation,  en  boule  coulante. 
Séchée,  elle  se  laisse  facilement  pulvériser.  On  peut  aussi 
mélanger  les  solutions  chaudes  des  composants  sutFisam- 
ment  étendues  sans  obtenir  un  précipité  quelconque; 
alors,  par  le  refroidissement  et  après  quelque  temps,  il  se 
dépose  une  couche  blanche  mince,  et,  à  la  surface,  il  y  a 
formation  de  pellicules.  Dans  le  but  d'obtenir  des  cristaux, 
j'ai  chauffé  le  tout  au  bain-marie;  la  couche  blanche  du 
fond  s'est  transformée  alors  en  un  liquide  épais,  puis  est 
redevenue  solide  en  jaunissant  légèrement.  J'ai  constaté 
qu'il  s'était  formé,  aux  dépens  de  la  salipyrine  primitive, 
un  salicylate  de  plomb. 

Le  salicylate  double  n'affecte  pas  toujours,  au  moment 
de  sa  formation,  la  forme  gélatineuse.  Quand  on  opère 
avec  des  solutions  plutôt  concentrées,  on  obtient  un 
abondant  précipité  floconneux,  d'une  blancheur  parfaite; 
jeté  sur  un  filtre  et,  après  lavage  rapide,  imparfaitement 
séché  à  la  trompe,  il  se  liquéfie  en  partie.  A.  ce  propos, 
j'ai  pu  ftiire  une  observation  assez  intéressante.  Afin  de 
recueillir  à  l'état  solide  le  corps  liquéfié,  je  versais  le 
liquide  huileux  dans  une  solution  aqueuse  de  salipyrine 
plombique  préparée  pour  l'analyse,  dans  le  but  de  faire 
cristalliser  le  tout.  Le  lendemain,  il  s'était  formé  une 
très  jolie  cristallisation  en  aiguilles  soyeuses  groupées 
en  rosettes  isolées  que  je  m'empressais  de  recueillir  et  de 
soumettre  à  l'analyse. 


(  i»o  ) 

Qf^',  1 151  de  substance  ont  donné  (>',(M)70  de  sulfate  de 
plomb  ou  40.4  «/o  de  Pb;  le  calcul  pour  le  Pb  (C0H4OH. 
00.2)2-  H2O  décrit  et  connu  indique  41.5  %  de  plomb; 
absence  complète  d'antipyrine. 

La  liquéfaction  dont  je  viens  de  parler  est  donc  accom- 
pagnée d'une  dissociation  de  salipyrine  avec  formation  de 
salicylate  de  plomb.  A  différentes  reprises  déjà,  j'ai 
remarqué  que  les  composés  additionnels  de  l'antipyrine 
sont  très  altérables  en  présence  et  au  sein  des  dissolvants 
neutres;  l'eau  se  distingue  particulièrement  sous  ce 
rapport. 

Dans  le  tube,  le  composé  fond  en  un  liquide  incolore; 
puis  il  redevient  solide  et  se  détruit  en  dégageant 
C6H:iOH  et  des  vapeurs  pyridiques. 

Point  de  fusion  :  48°-50°  (non  corr.). 

Le  corps,  sec,  est  très  peu  soluble  dans  l'H^O;  fraî- 
chement précipité  et  humide,  il  est  bien  plus  soluble;  la 
solution  a  une  réaction  acide  nette. 

L'alcool,  l'éther  sulfurique,  le  chloroforme,  le  benzène 
et  le  sulfure  de  carbone  ne  dissolvent  presque  rien;  le 
second  ne  laisse  rien  à  l'évaporation.  Le  chloroforme 
et  le  sulfure  de  carbone  ont  une  action  très  curieuse  :  le 
premier  dissout  instantanément  la  poudre  blanche,  mais 
devient  trouble  peu  après  ;  petit  à  petit,  il  se  forme  un 
précipité  floconneux  qui  gagne  le  fond;  il  y  a  ici,  sans 
doute,  un  phénomène  de  dissociation  intéressant  qu'il 
serait  peut-être  utile  d'examiner  de  plus  près.  Le  second 
transforme  le  composé  en  masse  gélatineuse  transparente, 
sans  le  dissoudre  en  apparence  ;  par  l'agitation,  elle  se 
divise  et  colle  aux  parois  du  tube. 

Sous  le  microscope,  l'eau  donne  de  petits  mamelons  en 
couche  continue,  sans  forme  cristalline  apparente;  l'alcool. 


(  181  ) 
de  très  petits  points  à  retlet  rougeâtie,  disséminés,  nom- 
breux dans  une  couche  mince  d'une  autre  substance;  le 
chloroforme,  des  aiguilles  réunies  en  paquets  isolés  ne 
s'éteignant  pas  complètement,  comme  les  préparations 
provenant  des  autres  dissolvants,  sur  fond  noir  (*);  le 
benzène,  des  masses  lumineuses  jaunâtres  (lumière  artifi- 
cielle), entourées  d'une  zone  noire,  allongées  en  prismes 
indéfinissables;  le  sulfure  de  carbone  se  comporte  de 
même. 

I/analyse  a  conduit  à  cette  formule  : 

(CfiH, .  OH  .  CO,),  l^b  .  C,.H.,N,0  (**) 


Substance. 

PbSOi. 

ChH,,N,0. 

0.1835 

0.0855 

— 

0  2490 

0.1430 

- 

0.2320 

0.1030 

- 

0.0933 

— 

0.0260 

(*)  Vu  le  pliénomcne  de  disgolulion  s|)écial  dans  le  chloroforme 
cité  précédemment,  je  crois  pouvoir  soupçonner  que  les  aiguilles  ne 
sont  pas  constituées  par  la  salipyrine  plombique. 

(**)  J'ai  aussi  tenté  une  détermination  dej'eau  de  cristallisation.  Le 
corps  fondu  se  transforme  immédiatement  en  composé  blanc  dont  le 
point  de  fusion  est  situé  plus  haut,  sans  déposer  des  gouttelettes  sur 
les  parois  froides  du  tube  ;  et  quand  ce  phénomène  se  produit,  le  com- 
posé est  déjà  noir-brun  et  le  liquide  qui  distille  sent  le  phénol.  Les 
analyses  semblent  indiquer  d'ailleurs  qu'il  y  a  absence  d'HoO. 


(   18-2  ^ 


II. 
Ô0.90  "/„ 

Trouvé. 

III. 
30.31 

% 

50.90  7 

Cal.'ulé. 

27.80  "/. 
Trouvé. 

28.12  7. 

Calculé. 

En  7o  : 

Pb  .     .     .     31  81  7„ 


L'hydrogène  sulfuré  et  le  sulfure  d'ammonium  donnent 
des  précipités  noirs  de  sulfure  de  plomb  avec  ses  carac- 
tères habituels. 

La  KOH  et  la  iNaOH  ne  donnent  rien,  même  si  l'on 
évite  avec  le  plus  grand  soin  un  excès  de  réactif. 

L'ammoniaque,  un  louche  blanc  qui  s'accentue  peu  à 
peu. 

Le  carbonate  sodique,  le  précipité  de  plomb  attendu. 

L'acide  chlorhydrique  et  les  chlorures  alcalins  ne  pro- 
duisent rien,  probablement  parce  que  la  solution  est  trop 
étendue,  ce  qui  est  inévitable. 

L'acide  sulfurique,  du  PbS04  soluble  dans  l'ammo- 
niaque. 

Les  bichromates  alcalins,  un  précipité  jaune. 

L'iodure  de  potassium,  un  précipité  jaune-serin. 

L'acide  nitrique  concentré  bouillant,  une  faible  colora- 
tion rouge. 

Le  fait  que  la  substance  est  très  soluble  dans  l'acide 
acétique  glacial  permet  d'observer,  à  l'aide  de  l'acide 
nitreux  (KNO^  -i-  C2H4O2),  la  réaction  pour  l'antipyrine 
avec  une  très  grande  netteté;  la  coloration  verte  est  très 
forte. 

Le  chlorure  ferrique  produit  la  coloration  violette 
typique  pour  les  salicylates. 


(  <83  ) 


SALICYLATE    DOUBLE    DE    CHROMICLM    ET    0  ANTIPYRINE. 

Dans  le  but  de  préparer  le  corps 

(C«H*OH  .  CO^^s  •  Cr.(C„n„N20]s 

prévu  par  la  théorie,  j'ai  ajouté  au  mélange  des  solutions 
aqueuses  de  salicylate  alcalin  et  d'antipyrine  en  quantités 
calculées,  une  solution  correspondante  de  sulfate  chro- 
mique  (l'alun  de  chrome  donne  les  mêmes  résultats).  Il 
se  précipite,  immédiatement  ou  après  un  temps  plus 
ou  moins  long,  un  composé  blanc  ou  un  dépôt  verdâtre. 
Le  premier,  convenablement  purifié,  ne  renferme  pas 
trace  de  chrome  et  est  de  la  salipyrine  pure,  ce  que  j'ai 
pu  vérifier  par  l'analyse  qualitative  et  quantitative  du 
corps  et  par  la  détermination  de  son  point  de  fusion. 

C.iH.^NsO     ....     57.51  »/„  57.8  "/„ 

Trouvé.  Calculé 

pour  <;6H40H  .COJi  .C,,His,N.O. 

Point  de  fusion     .     ,     85°-86°  SSo-SO-'f) 

Trouvé.  Délerminé 

sur  CeHiOH  .CO.H  .CjiHiaNsO. 

Le  second  renferme  en  moyenne  2.5  %  de  chrome  et 
de  45  à  44  %  de  base,  alors  que  la  théorie  indique,  pour 
la  salipyrine  de  chrome  susmentionnée,  5.11  %  ^^ 
54.48  °/o. 

Celle-ci  n'existe  donc  pas,  ou  mieux  peut-être,  ne  peut 

0  Patein  et  DuFEAu  donnent  91°-90°.  (C.  R.,  1896,  133o.) 


(  484  ) 

pas  être  préparée  comme  je  viens  de  l'indiquer.  Pour 
expliquer  ce  phénomène,  on  pourrait  admettre,  dans  le 
cas  de  la  formation  de  la  salipyrine  seule,  qu'il  se  forme 
de  la  soude  caustique  en  quantité  suffisante  pour  main- 
tenir l'hydrate  chromique  en  solution,  ce  qui  permettrait 
à  la  salipyrine  de  se  constituer  et  de  précipiter  en  vertu 
de  son  insolubilité.  Quant  au  dépôt  verdâtre,  sa  compo- 
sition ne  répond  à  aucun  calcul  en  rapport  avec  nos  idées 
actuelles  sur  la  valence;  je  pense  qu'il  ne  constitue  pas 
une  combinaison  unique,  mais  bien  un  mélange  de  plu- 
sieurs composés,  probablement  très  complexe  {*). 


SALICYLATE    DOUBLE    D  ALUMINIUM    ET    l)  ANTIPYRINE. 

J'ai  ajouté  du  sulfate  d'aluminium  (1*^',7)  en  solution 
aqueuse  au  mélange  des  solutions  aqueuses  de  salicylate 
alcalin  (1^'',6)  et  d'antipyrine  (1»',9).  J'espérais  obtenir 

(CeHiOH  .  C0,)3 .  AI.(C„H,A0)3. 

Il  se  forme  immédiatement  un  trouble  blanc  laiteux 
persistant  qui  se  transforme  après  quelque  temps  en  cris- 
taux brillants,  plats,  réunis  en  rosettes  collées  sur  les 
parois  du  vase. 

Après  purification  et  séchage  convenables,  ils  sont 
légers  et  doux  au  toucher. 

L'analyse  qualitative  (et  quantitative)  a  prouvé  qu'il 
s'est  formé  uniquement  de  la  salipyrine.  En  effet,  le  corps 


(*)  Un  composé  renfermant  une  molécule  de  salipyrine  chromique 
combinée  à  trois  molécules  de  salipyrine  demande  ±(}î  "jo  de  Cr  et 
55.91  °/o  d'antipyrine. 


(  183  ) 
ne  renferme  pas  d'aluminium  combiné,  seulement  des 
traces  de  sulfate  mécaniquement  entraîné  (souillures), 
impondérables  même  sous  forme  d'alumine;  les  chiffres 
obtenus  pour  le  dosage  de  l'antipyrine  et  la  détermina- 
tion du  point  de  fusion  le  montrent  clairement  : 

C,,H,,N,0     ....     57.69  o/o  37.8% 

Trouvé.  Calculé 

IiouiCsH^OH.COaH.CnHiîNâO. 

Point  de  fusion     .     .     8d°-8G°  85"-8r)'' 

Trouvé.  Déterminé 

surC6H40H.C0,H.Ci,H,2Nâ0. 

Des  eaux  mères,  je  n'ai  rien  pu  extraire  de  caractéris- 
tique. 

Je  crois  pouvoir  affirmer  que  la  salipyrine  aluminique 
n'existe  pas. 


SALICYLATE    DOUBLE    D  URANYLE    ET    D  ANTIPYRINE. 

Le  corps 

(CeH, .  OH  .  CO,), .  UrO, .  (CH.^NoO)^  ,„,,  „, 

que  j'espérais  pouvoir  préparer,  ne  s'est  pas  produit  dans 
les  conditions  que  j'ai  pu  réaliser.  Quand  on  ajoute  un 
sel  d'uranyle  en  solution  aqueuse  au  mélange  des  solu- 
tions aqueuses  de  salicylate  alcalin  et  d'antipyrine,  on 
obtient  un  volumineux  précipité  orange  qui,  lavé  à  l'al- 
cool chaud,  est  plus  foncé  que  primitivement  et  présente 
une  légère  fluorescence.  Le  composé  ainsi  produit  n'a 
pas  la  composition  du  précipité  lavé  à  l'eau  froide;  il  ren- 
ferme plusd'urane  et  moins  d'alcaloïde  que  celui-ci. 

3""*    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  15 


(  186  ) 
Les  nombreuses  analyses  effectuées  sur  des  échantillons 
(le  préparations  différentes  m'ont  donné  en  moyenne 
entre  29  et  50  %  d'uranium,  entre  41  et  42  %  d'anti- 
pyrine,  chiffres  que  je  ne  puis  appliquer  ni  à  la  formule 
indiquée  plus  haut  ni  à  aucune  autre  combinaison  pos- 
sible. Il  est  vrai  que  le  corps 

(C«U, .  OH  .  C0,1  .  UrO,    (C„H,2NoO), 

demande  25.99  "/o  d'uranium  et  40.82  %  d'antipyrine  ;  à 
première  vue,  on  pourrait  donc  se  figurer  que  j'ai  analysé 
des  précipités  impurs,  souillés  par  des  sels  d'urane  ou 
par  de  la  salipyrine.  Je  l'ignore.  Mais  je  puis  ajouter  que 
le  corps  ne  cristallise  point;  que,  pour  le  reste,  j'ai  fait 
tout  ce  qui  devait  être  fait  pour  assurer  éventuellement  la 
pureté  du  produit.  J'ai  toujours  opéré,  par  exemple,  en  pré- 
sence d'un  excès  de  base,  dans  le  but  d'éviter  le  salicylate 
d'uranyle  qui  pourrait  précipiter  avec  la  salipyrine  métal- 
lique; je  suis  donc  sur  que  si  le  corps  susindiqué  avait 
dû  se  produire,  il  aurait  donné  à  l'analyse  (méthode  à  la 
calcinalion  de  Pelouze)  un  chiffre  d'uranium  plutôt  infé- 
rieur à  25.99  °/o;  or  il  donne  29-50  %  avec  une  constance 
remarquable,  malgré  les  lavages  répétés  à  froid  avec 
toutes  espèces  de  dissolvants;  pour  enlever  complète- 
ment l'antipyrine  libre,  il  faut  laver  environ  une  semaine 
à  l'eau  froide,  et  alors  le  réactif  nitreux  révèle  encore, 
dans  un  long  tube,  des  traces  de  coloration  verte. 

Tout  fait  donc  supposer  que  le  précipité  orange  dont 
je  viens  d'indiquer  la  formation  n'est  pas  le  corps  cher- 
ché, mais  bien  une  autie  substance  dont  la  composition 
moléculaire  m'échappe,  ou  un  mélange  de  plusieurs 
substances  (salicylate  métallique,  salipyrine,  salipyrine 
métallique)  qu'il  est  très  difficile  de  séparer  et  dont  il  ne 
m'est  pas  possible  de  sortir  pour  le  moment. 


J'ai  enfin  essayé  de  préparer  le  salicylate  double  de  Bi 
et  d'antipyrine;  mes  efforts  n'ont  pas  encore  abouti  au 
résultat  désiré;  la  seule  chose  que  je  puisse  dire  dès  main- 
tenant, c'est  que  j'ai  trouvé  probablement  la  méthode  à 
suivre  et  que  je  suis  en  possession  d'un  corps  qui  n'est 
pas  seulement  du  salicylate  bismuthique;  et  comme  il 
est  cristallin,  j'espère  pouvoir  exposer  dans  un  avenir 
plus  ou  moins  rapproché  l'étude  complète  de  cette  com- 
binaison très  importante. 

C'est  ici  que  j'arrête  mes  recherches  sur  les  salipyrines. 
Les  benzopyrines,  si  elles  existent,  vont  suivre. 

Mais  il  est  évident  que  si,  dans  la  suite,  il  est  néces- 
saire, pour  l'étude  convenable  de  mon  thème,  que  j'en 
prépare  d'autres,  je  me  permettrai  d'attirer  encore  sur 
elles  la  bienveillante  attention  de  l'Académie. 

I^aboratoire  privé.  Anvers,  juin  1898. 


^iir  (a  délerDiination  des  éléments  neiitrcs  d'espèce 
(jnelconquc;  par  François  Deruyts,  chargé  de  cours 
à  l'Université  de  Liège. 

Dans  nos  recherches  antérieures  sur  les  éléments 
neutres  des  involutions,  nous  ne  nous  sommes  occupé 
que  des  éléments  neutres  de  première  espèce  :  nous  nous 
proposons,  dans  cette  courte  note,  d'exposer  d'une  façon 
sommaire  les  résultats  auxquels  nous  sommes  parvenu 
concernant  les  éléments  neutres  d'espèce  quelconque. 


(  'ISS  ) 

Nous  nous  servirons  de  la  représenlalion  suivante,  qui 
nous  a  été,  du  reste,  déjà  utile  :  les  espaces  E*.,  de 
l'espace  E^.  coupent  une  courbe  rationnelle  C„  de  cet 
espace  en  des  groupes  de  A-  points  formant  une  involu- 
tion  lî;  cette  involution  est  la  plus  générale  quand  la 
courbe  C„  est  une  courbe  dénuée  de  singularité. 

Si  k  points  de  la  courbe  C„  sont  situés  sur  un  espace 
Ei_3,  ces  k  points  sont  insutHisants  pour  déterminer  un 
groupe  de  lî;  il  est  nécessaire,  pour  qu'un  groupe  conte- 
nant ces  k  points  soit  déterminé,  d'y  adjoindre  deux 
points  auxiliaires,  qui  sont  du  reste  absolument  arbi- 
traires :  dans  ce  cas,  les  k  points  représentent  les  groupes 
de  k  éléments  neutres  de  seconde  espèce  de  Vinvoliiiion, 
En  général,  les  groupes  de  k  points  de  la  courbe  C„  qui 
seront  situés  sur  un  espace  £*.,_,,  représentent  les  groupes 
de  k  éléments  neutres  d'espèce  /  de  l'involution  \l. 

1.  Soient  les  équations  de  la  courbe  C„,  sous  la  forme 

X,  :  X,  :  ...  :  X.  :  X,  +  ,  ==  f\(x)  :  f,{x)  :  ••.  /.(x):  ^^,  (x), 

fonctions  /",  {x)  étant  des  polynômes  entiers  du  degré  n 
par  rapport  à  la  variable  x,  qui  est  le  paramètre  d'un 
point  variable  de  la  courbe.  Soient 

Xf,  Xj,  ...  X,,  X,.(.|,  ...  x* 

les  paramètres  de  A:  points  de  la  courbe  C„;  l'espace  Ei_i_,, 
déterminé  par  les  k  —  i  points  dont  les  paramètres  sont 


(  18!»  ) 


aura  pour  efiiiutioiis 


X,  X, 


/iW       l'Ax,,) 


ou  bien 


X,  X^ 

fii^i  +  i)  f^i^i  +  i) 


/ifc  +  i  (•*■*) 


X, 


=  0; 


■     lk-i[^i+l)    /k-i  +  p[-^i+l) 

•  A -•(^.  +  2)  A- i+p('ï".  +  2) 


=  0, 


p  variant  de  1  à  î  -h  1.  Pour  que  les  points  dont  les 
paramètres  sont 

soient  situés  sur  cet  espace  E^.,,,,  il  faut  que  l'on  ait  les 
i  (/h-  i)  conditions 

/■.W        A(ar,)       ...  A-.W       /,_i_p(x,^) 

(A)      A(x.+2) /.(x..^.,)  ...  A _,(Xj^. .,)/;_,._ ^(x,+ 2)    =0, 

p  variant  de  1  à  /  -h  1  et  7  variant  de  1  à  i. 


(  190  ) 

Chacune  des  équations  (A)  représente  une  involution 
II'  ;;  en  effet,  si  Ton  se  donne,  par  exemple, 

l'équation  (A)  sera  du  degré  n  en  x,  et  elle  admet  comme 
racines  les  valeurs 


X„  =  Xi 


+  " 


•^i+'î  »    •  •  •  *^9 


^k'i 


donc  cette  équation  représente  des  groupes  de  n  élé- 
ments, déterminés  par  k  —  i  d'entre  eux,  quels  que  soient 
ceux-ci  dans  le  groupe;  ces  groupes  forment  une  involu- 
tion Ii_j.  Pour  rechercher  les  groupes  de  A;  solutions, 
Xi,  Xo,  . . .  x^,  qui  satisfont  aux  i{i  ■+-  4)  équations  (A),  il 
sutlit  donc  de  rechercher  les  groupes  de  A;  éléments 
communs  aux  i  -+-  1  involutions  Iî'_j  représentées  par  les 
équations  (A),  dans  lesquelles  on  suppose  q  constant  et 
p  variant  de  1  à  /  -i-  1 .  Remarquons  encore  que  ces  /  -f-  1 
involutions  ont  en  commun  les  groupes  de  k  éléments  qui 
satisfont  à  l'une  ou  l'autre  des  deux  équations 


fi{Xi  +  ^)   f^.{x,+  t)  ...  /a._,(x,.  +  ,) 


=  0, 


fi[Xk)        fi[Xk) 


fk-iix,} 
{k-  l{Xi^^} 


fk  -  i  [Xlc  _  i 

fk-l{Xk) 


Ces  groupes,  pour  la  même  raison  que  ci-dessus,  sont 
les  groupes  de  n  éléments  d'une  involution  iL.-i-  Donc 


(  J9d  ) 

le  nombre  des  groupes  de  k  éléments  neutres  d'espèce  i  d'une 
involution  \l  est  égal  au  nombre  des  groupes  de  k  éléments 
communs  à  i  -h  1  involutions  l^_i  qui  ont  en  commun  les 
groupes  d'une  involution  iLi-i- 

2.  Pour  que  i  -y  1  involutions  I"  ,  aient  des  groupes 
d'éléments  communs  en  nombre  fini  (*),  il  faut  que  la 
somme  des  rangs  de  ces  involutions  soit  un  multiple  du 
nombre  i,  et  pour  que  le  nombre  des  éléments  des 
groupes  communs  soit  k,  il  faut  que  ce  multiple  soit  k  lui- 
même  :  il  faut  donc  que  l'on  ait  la  condition 

(i  -+-  \){k—  \)==ik, 
ou  bien 

/.-=«•(/-+-  i). 

Donc  les  involutions  de  rang  i(i  -<-  l)  ont  des  groupes 
de  i(i  -+-  1)  éléments  neutres  d'espèce  i  en  nombre  fini. 

3.  La  recherche  du  nombre  des  groupes  de  i{i  -h  1) 
éléments  communs  à  î  -f-  1  involutions  I"  qui  ont  en 
commun  les  groupes  d'une  involution  !,"_,,  est  aisée;  la 
seule  difficulté  est  la  longueur  des  différents  cas  à  exa- 
miner; la  méthode  à  suivre  est  identique  en  tous  points 
à  celle  que  nous  avons  employée  plusieurs  fois  déjà  ;  le 
nombre  de  ces  groupes  est  (jji^y. 


(*)  Voir  notre  Mémoire  sur  lu  théorie  de  L' involution  et  de  l'homo- 
graphie unicursale.  (Mémoires  de  ia  Soc,  koy.  des  sciences  de  Liège, 
-J«  série,  t.  XVII,  p.  70.) 


(  192  ) 

Nous  pourrons  ainsi  énoncer  les  théorèmes  suivants  : 

Une  involution  d'ordre  n  et  de  rang  i(i  -h  4)  possède 
(iii  +  i))  groupes  neutres  d'espèce  i. 

k  —  i(i  H-  1)  éléinenls  arbitraires  du  support  d'une  invo- 
lution \l  peuvent  s'associer  à  \ï(i^\)')(J>'oupes  dei{i-hl) 
éléments  de  façon  à  former  autant  de  groupes  neutres  de  k 
éléments  neutres  d'espèce  i  de  cette  involution. 

Les  groupes  de  n  —  i  éléments  neutres  d'espèce  i  d'une 
involution  I°_i  forment  une  involution  \l'i\ij^<iy 

Ce  dernier  théorème  peut  se  vérifier  immédiatement 
par  voie  analytique. 

En  etï'et,  si  nous  prenons  la  représentation  d'une  I^_i 
par  l'égalité  à  zéro  de  /  formes  n  —  linéaires  binaires 
symétriques  par  rapport  aux  variables  homogènes 

'^il  î/i'i   -^2  5  /y 2»    '    •■>   "^il   !Ji'i   •••>  •'nî   3/"' 

nous  voyons  que  i  éléments  dont  les  paramètres  sont, 
par  exemple, 

seront  indéterminés  lorsque  seront  remplies  les  i{i  -+-  1) 
conditions  qui  expriment  que  les  dérivées  partielles 
d'ordre  /  par  rapport  à  i  variables,  prises  parmi  les  2e 
variables 

^H   Vil   ^2î  ^25    •■•■>  ^i1  Vil 

des  normes  M  —  linéaires  symétriques,  sont  nulles.  Or 


(  193  ) 
chacune  de  ces  dérivées  partielles  étant  une  forme  {n  —  i) 
linéaire  symétrique,  par  rapport  aux  variables 

•^i  -t-  1  5  2/i  +  1  »   '''1  +  i  5   }Ji  +  'i'y    •  •  •  '   "^  "  '  i/n' 

représente  une  involution  I^-i.  leur  ensemble  représente 
une  involution  d'ordre  n  —  i  et  de  rang 

H  —  <■  —  ( t  -t-  \)i=n  —  i{'-2  -t-  i). 

4.  Pour  terminer,  nous  donnerons  une  interprétation 
des  groupes  d'éléments  neutres  de  seconde  espèce. 

Les  surfaces  du  second  ordre,  qui  passent  par  trois 
points  fixes,  marquent  sur  une  courbe  gauche  rationnelle 
d'ordre  n  les  groupes  d'une  involution  I«";  cette  involu- 
tion possède  Ç"~")  groupes  de  six  éléments  neutres  de 
seconde  espèce,  c'est-à-dire  qu'il  existe  f7^)  systèmes  de 
six  points  de  la  courbe  C„  qui,  unis  aux  trois  points 
donnés,  ne  déterminent  pas  une  surface  du  second  ordre, 
mais  une  double  infinité. 

Nous  obtenons  donc  la  propriété  suivante  : 

Par  trois  points  fixes  on  peut  mener  f '7*)  systèmes  dou- 
blement infinis  de  surfaces  du  second  ordre,  tels  que  chaque 
système  passe  par  six  points  déterminés  d^une  courbe 
gauche  rationnelle  d'ordre  n. 

En  particulier  :  Par  trois  points  fixes  on  peut  mener 
une  double  infinité  de  surfaces  du  second  ordre  qui  passent 
par  six  points  d'une  courbe  gauche  du  quatrième  ordre. 

La  courbe  du  quatrième  ordre,  dans  ce  cas,  est  arbi- 
traire; mais  la  position  des  six  points  de  cette  courbe 
dépend  de  la  position  des  trois  points  fixes. 


(  i94  ) 


Sur  quelques  propriétés  des  courbes  gauches;  par  François 
Deruyts,  chargé  de  cours  à  l'Université  de  Liège. 

Nous  avons  signalé  récemment  les  résultats  suivants  (*)  : 
1"  Une  involution  \l  possède  des  groupes  de  2k  — ■  2  élé- 
ments neutres  de  première  espèce  en  nombre  fini  et  le  nombre 
de  ces  groupes  est 

n  —  /i"  -+-  1  \  fn  —  /.■ 


/.  —  i  \         k         I  \k  —  2 


2"  k  —  p  éléments  arbitraires  du  support  d'une  inimlu- 
tion  II  peuvent  s'associer  à 


li  -^  ]\  (n  —  /,:' 
P 


n  —  k\ 


groupes  de  2k  —  2  éléments  de  façon  à  former  autant  de 
groupes  de  k  -t-  p  — -2  éléments  neutres  de  première  espèce 
de  l'involution  ; 

5°  Les  groupes  de  n  —  1  éléments  neutres  de  première 
espèce  d'une  involution  II  forment  une  involution  lïk1n_i. 

Actuellement,  nous  nous  proposons  d'étudier  les  pro- 
priétés de  ces  groupes  neutres  et  en  particulier  de 
rechercher  les  groupes  neutres  composés  d'éléments 
multiples. 


(*)  Note  sur  les  éléments  neutres  de  l'involution  et  leurs  applications 
aux  courbes  gauches.  (Bull,  de  l'Acad.  uoy.  de  Belgique,  3e  série, 
I.  XXXV,  1).  855;  1898.) 


(  iyo  ) 

1.  Nous  pouvons  grouper  les  éléments  neutres  d'une 
involution  I*"  de  la  façon  suivante  :  à  k — p  éléments 
arbitraires  du  support  de  l'involution  proposée, 

Al,  A.,,  ... ,  At_,, , 
il  correspond 

2/)  —  2  /n  —  /t  -+-  1  W/i  —  />\  (fi-  —  t  -f-  1  \  (n  —  I: 


p  —  \\         j)         I  \p  —'■Il  \         p         I  \p—^2 

éléments  A^.^^,  faisant  partie,  avec  les  k  —  p  éléments 
arbitraires,  d'un  groupe  de  k  -h  p  —  2  éléments  neutres 
de  I,". 
La  correspondance  qui  existe  entre  les  éléments 


Al ,  Aj,  . . . ,  A^.  _ p,  A 


*-;>  +  ! 


est  évidemment  réciproque  ;  le  nombre  des  coïncidences 

est  donc 

(n-k  -^  \\  ln  —  k\ 

Ce  nombre  est  celui  des  (jroupes  de  k  -+-  p  —  '2  éléments 
neutres  d'une  involution  I^  qui  contiennent  u)i  élément 
(k  —  p  H-  I)"''''  et  âp  —  5  éléments  simples. 

Cas  particulier.  —  Si  nous  faisons 
k  =  n  —  A;  -+-  1 , 

nous  obtenons  le  résultat  suivant  :  Le  nombre  des  groupes 
de  n  —  1  éléments  neutres  d'une  involution  1",  contenant  un 
élément  (n  —  2k)°'"%  est 

2(/i  — /j)(2/.-  — /i). 


(  196  ) 
Ce  résultat  peut  être  vérifié  directement  si  nous  obser- 
vons que  les  groupes  de  n  —  1  éléments  neutres  de  l;' 
forment  une  VliT- n-i  et  que  telle-ei  possède 

groupes  contenant  un  élément  (2A;  —  «)"■•''. 

2.  Prenons  arbitrairement  a  —  I  éléments 

A,,  A,,  ...  A„_, 

du  support  d'une  involution  l)!  ;  il  leur  correspond  dans 
cette  involution  des  groupes  de  n  —  a  -h  i  éléments 
formant  une  I"rrTî;  d'après  ce  que  nous  venons  de 
voir  (1),  cette  involution  contient 

groupes  de  k  -i-  p  —  a  ~  i  éléments  neutres  dont  un 
élément  6""'%  (fe  =  /c  — p  —  a  -i-  2),  el^p  —  5  éléments 
simples  A„.  Ainsi,  aux  éléments  arbitraires 

il  correspond 

éléments  A„;  la  correspondance  entre  les  éléments 

A,,  Aj,  ...,  A„_,,  A„ 
est  réciproque;  le  nombre  des  coïncidences  est 

/;,  _A-  -H  1\  (n  —  k\ 


(   ^97  ) 
Nous  obtenons  ainsi  la  propriété  suivante  : 
Une  involution  ï"  possède 

groupes  de  k  -+-  p  —  2  éléments  neutres  contenant  deux 
éléments  multiples  associés  d'ordre  a  et  b  quand  on  a  la  con- 
dition 

a  H-  /^  =-  A  -    p  -t-  2. 

Cas  particulier.  —  Si  nous  supposons  p  =  n  —  Ah-  1, 
nous  voyons  qu'un?  involution  \l  contient 

/2n  — -2A-\ 

n  -i  ) 

groupes  de  n  —  l  éléments  neutres;  chacun  d'eux  étant 
composé  de  deux  éléments  multiples  associés  d'ordres  a  et  h 
et  de  n  —  (a  -+-  b)  —  1  éléments  simples, 

(fl  -+-  ^  =  2A-—  «  -+-  1). 

Ce  résultat  peut  se  vérifier  aisément,  car  les  groupes  de 
ji  —  1  éléments  neutres  d'une  l'I  forment  une  I";-,.  m  qui 
possède  le  nombre  indiqué  de  groupes  contenant  deux 
éléments  multiples  associés  (*). 

3.  Prenons  encore  a  —i  éléments  A.  («  =  l  ,2,3  ... 
a  —  1),  arbitraires  du  support  d'une  I"*;  il  leur  correspond 


(*)  Voir  notre  Mémoire  sur  la  théorie  de  Vinvolution  unicursale. 
(Bulletins  de  la  Société  royale  des  sciences  de  Liège,  2^  série, 
t.  XVII,  p.  60.) 


(   198   ) 
des  groupes  de  n  —  a  h-  1  éléments  formant  une  involu- 

tion  i:z:t\. 

Cette  dernière  involution  possède  (2) 

groupes  de  p  -h  k  —  a  —  1  éléments  neutres,  contenant 
deux  éléments  multiples  associés  d'ordres  b  et  c,  quand 
on  a  la  condition  6  -t-  c  =  A  —  p  —  a  h-  5,  et  2p  —  A 
éléments  simples  A„  ;  donc,  aux  a — 1  éléments  arbi- 
traires A^,  il  correspond 

fn  —  /,-+-  I  \  (n  —  /.\ 
2/;c(-2p-3)(i>-4)^         ^,         )  l,j  -  J 

éléments  A„.  La  correspondance  entre  les  a  éléments  A^ 
est  réciproque;  le  nombre  des  coïncidences  est  donc 

(n  —  k-^-  \\  fn  —  k\ 
.i*(2,-ô)C2,,-4)(         ^^  )(^_J. 

Nous  pouvons,  en  conséquence,  énoncer  le  théorème 
suivant  : 

Vue  involution  queJcotique  I"  possède 

In  —  k  -4-  1\  f?i  —  k\ 

groupes  (h  p  h-  k  —  2  éUmenls  neutres  contenant  trois 
éléments  multiples  associés  d'ordres  a,  b,  c,  quand  on  a  la 
condition 

a  -+-  I)  H-  c  =  k  —  /}  -+-  5. 


(  d99  ) 
Cas  particulier.  —  En  faisant  7J  =  n  —  k  -h  1,  nous 
voyons  que  les  groupes  de  n  —  1  éléments  neutres  d'une 
f"  qui  contiennent  trois  éléments  multiples  associés 
d'ordres  a,  b,  c,  quand  on  a  a  -t-  //  -+-  r  =  2/c —  w  -h  :2, 
soni  en  nombre 

fî>H  —  2/, 

6a  hc 

Cette  propriété  peut  se  vérifier  directement  de  la 
même  manière  que  ci-dessus  (2). 

4.  Des  trois  cas  particuliers  que  nous  venons  d'exa- 
miner, il  résulte  les  conséquences  suivantes  :  désignons 
par  p  le  nombre  maximum  des  éléments  multiples  associés 
qui  peuvent  se  trouver  dans  les  groupes  de  p  -+-  k  —  2 
éléments  neutres  d'une  involution  1;^',  et  par 

«1,  «2,  •••,  Cp 

les  ordres  de  multiplicité  respectifs  de  ces  éléments  :  nous 
devons  avoir  les  conditions 


1 

p  =  2p  _  ± 


d'où  l'on  déduit 


Donc  une  involution  {[  ne  peut  posséder  des  groupes  de 
k  -^-  p  —  2  éléments  neutres  contenant  plus  de  2p  —  2 
cléments  multiples  associés.  Dans  le  cas  extrême  où  le 


(  ï200  ) 
nombre  maximum  serait  atteint,  le  nombre  des  groupes 
serait 

Enfin,  dans  le  cas  où  p  serait  moindre  que  2;)  —  2,  un 

raisonnement  analogue   à  ceux    que   nous   avons    faits 

précédemment  nous  conduirait  à  la  conclusion  suivante  : 

Une  involution  V^  possède  des  groupes  rfe  p  -4-  k  — 2  éléments 

neutres  contenant  p  éléments  multiples  associés  d'ordre  de 

multiplicité  3;  (i  =  1,  2,  5  ...  p)  quand  on  a  la  condition 
p 
V  a,  =  p  -+-  k  —  p;  le  nombre  de  ces  groupes  est 

•■=/*+'  J!_        In  -  le  -h  \\  ln  —  k\ 

2  n  (^n-oiiw^    ^,     !(^_,)- 

5.  Prenons  maintenant  p'  éléments  arbitraires  du 
support  d'une  involution  II'  et  considérons  chacun  de  ces 
éléments  comme  étant  un  élément  multiple,  d'ordre  de 
multiplicité  b,{i  =  l,  2,  5  ...  p'). 

Il  correspond  à  ces  p'  éléments  des  groupes  formant 
une  involution  Il'IvJ;;  cette  dernière  possède  des  groupes 
^\Q  I; — y.bi-+-p — ^2  éléments  neutres  {p  étant  quel- 
conque), contenant  2p  — 2  =  p  éléments  multiples  asso- 
ciés dont  les  ordres  de  multiplicité  a^  satisfont  à  la 
condition 

p  /■'■ 


en  nombre 


(  Wi  ) 

nous  pourrons  donc,  en  général,  énoncer  le  théorème 
suivant  : 

p'  éléments   du  support  d'une  involution  ï",  considérés 
comme  étant  des  éléments  (bj)"''"*,  peuvent  s'associer  à 


-\)l 


p         ln-k+\\(n-k\ 


groupes  de  p  éléments  multiples  associés  d'ordre  de  mul- 
tiplicité a,  de  manière  à  former  autant  de  groupes  de 
k  -4-  p  —  2  éléments  neutres  de  l' involution,  quand  on  a  la 

condition 

p  p' 


Applications. 

6.  Toutes  les  surfaces  du  second  ordre  qui  passent  par 
six  points  lixes,  marquent  sur  une  courbe  rationnelle 
d'ordre  n,  C„  les  groupes  d'une  involution  I*".  Cette 
involution  possède  une  infinité  de  ternes  neutres;  chacun 
de  ces  ternes,  joint  aux  six  points  donnés,  est  insuffisant 
pour  déterminer  une  surface  du  second  ordre  :  donc  les 
six  points  et  chacun  des  ternes  neutres  sont  situés  sur 
une  courbe  gauche  du  quatrième  ordre.  Or,  parmi  les 
ternes  neutres  de  I3",  il  s'en  trouve  (1)  4f"7")  qui  con- 
tiennent un  élément  double;  on  arrive  ainsi  au  résultat 
suivant  : 

Par  six  points  de  l'espace,  on  peut  mener  4  {^"r^)  courbes 
gauches  du  quatrième  ordre,  tangentes  à  une  courbe  donnée 
d'ordre  n,  C„,  et  ayant  en  outre  un  point  en  commun  avec 
cette  courbe. 

3'"'    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  14 


(  202  ) 

En  particulier  : 

Par  six  points,  on  peut  mener  vingt-quatre  courbea 
gauches  du  quatrième  ordre,  Q,  tangentes  à  une  cubique 
gauche  et  ayant  de  plus  un  point  en  commun  avec  cette 
courbe. 

Si,  parmi  les  six  points  donnés,  trois  sont  sur  une  droite 
d,  les  courbes  du  quatrième  ordre  auxquelles  donnent  lieu 
les  ternes  neutres  de  l'involution  Ij"  se  décomposent  en 
la  droite  d  et  en  des  cubiques  gauches.  Par  conséquent, 
les  théorèmes  précédents  se  transforment  de  la  façon 
suivante  : 

Par  trois  points,  on  peut  mener  A  f  "  ï  *)  cubiques  gauches 
tangentes  à  une  courbe  gauche  d'ordre  n,  C„,  et  ayant  avec 
cette  courbe  un  point  commun. 

Par  trois  points,  on  peut  mener  vingt-quatre  cubiques 
gauches  tangentes  à  une  cubique  gauche  donnée  et  ayant 
un  autre  point  commun  avec  cette  courbe. 

Enfin,  si  parmi  les  six  points  donnés,  m  d'entre  eux 
{m  <  6,  et  m  <  '2n  —  3)  se  trouvent  sur  la  couche  C„, 
l'involution  ir  se  transforme  en  une  involution  \l"~"';  et 
les  théorèmes  précédents  se  modifient  ainsi  qu'il  suit  : 

Par  (6  —  m)  points  de  l'espace,  on  peut  mener  4  ('"'™"^) 
courbes  gauches  du  quatrième  ordre  tangentes  à  une  courbe 
gauche  C„  et  ayant  en  commun  avec  cette  courbe  m  -+-  i 
points  dont  m  sont  assignés  à  l'avance. 

7.  Si  nous  remarquons  que  les  surfaces  du  second 
ordre  qui  passent  respectivement  par  cinq  et  quatre  points 
fixes  de  l'espace,  marquent  sur  une  courbe  d'ordre  n,  C,„ 
les  groupes  de  deux  involutions  I^"  et  Is%  nous  obtien- 
drons les  théorèmes  suivants  : 

Par  cinq  points  de  l'espace,  on  peut  mener  (î  (^"7^)  courbes 


(  203  ) 

gauches  du  quatrième  ordre  onculatrices  à  une  courbe  C„ 
et  coupant  cette  courbe  eu  un  point. 

Par  cinq  points,  on  peut  mener  4  (2n  —  4 )  (^"  ^  ')  courbes 
gauches  du  quatrième  ordre  tangentes  à  une  courbe  C^  et 
coupant  cette  courbe  en  trois  points. 

Par  cinq  points,  on  peut  mener  8  fV*)  courbes  gauches 
du  quatrième  ordre,  qui  soient  bitangentes  à  une  courbe 
d'ordre  m. 

Par  quatre  points,  on  peut  mener  8  (^"  ^  *)  courbes  gauches 
du  quatrième  ordre  surosculatrices  à  une  courbe  d'ordre  n, 
et  rencontrant  cette  courbe  en  un  point. 

Par  quatre  points,  on  peut  mener  6  (2n  —  5)  (*"r*) 
courbes  gauches  du  quatrième  ordre  osculalrices  à  une 
courbe  d'ordre  n  et  coupant  cette  courbe  en  trois  points. 

Par  quatre  points,  on  peut  mener  4fV*)  C"r*)  courbes 
gauches  du  quatrième  ordre  tangentes  à  une  courbe  C„  et 
rencontrant  celte  courbe  en.  cinq  points. 

Par  quatre  points,  on  peut  mener  12  ('"2  *)  courbes 
gauches  du  quatrième  ordre  à  la  fois  tangentes  et  oscula- 
lrices à  une  courbe  C„. 

Par  quatre  points,  on  peut  mener  48  (^'V  *)  (*"r'^)  courbes 
gauches  du  quatrième  ordre  bitangentes  à  une  courbe  C„  et 
ayant  deux  points  communs  avec  cette  courbe. 

8.  En  général,  les  surfaces  du  second  ordre,  passant  par 
9 — /.'  points  fixes,  marquent  sur  une  courbe  C„  les  groupes 
d'une  involution  If;  cette  dernière  possède  des  groupes 
neutres  de  A:  -+-  p  —  2  éléments  contenant  un  élément 
{k  —  p  -+-  1)"'"'  et  2;?  —  5  éléments  simples  en  nombre 
fini  (1);  cette  involution  possède  de  même  des  groupes 
de  li  *-  p  —  2  éléments  neutres  contenant  deux  éléments 
multiples  associés  d'ordres  a  et  b,  el  2p  —  4  éléments 


(  i204  ) 

simples  en  nombre  déterminé  (2),  (a-^h  =  k — p-+2); 
donc  nous  pouvons  énoncer  les  deux  théorèmes  : 
Par  9 —  k  points  de  l'espace,  on  peut  mener 

lin  —  k  -^  \\  l^n  —  kX 

^(*-"-"(     „     )(„-J 

courbes  gauches   du   quotrihue   ordre   ayant  un   contact 
d'ordre   (k  —  p  -+-  1)    avec    une    courbe    gauche    donnée 
d'ordre  n,  et  rencontrant  cette  courbe  en  l2p  —  o  points. 
Par  9  —  k  points  de  l'espace,  on  peut  mener 

courbes  gauches  du  quatrième  ordre,  ayant  avec  une 
courbe  C„  deux  contacts  d'ordres  a  et  b,  et  rencontrant  la 
courbe  en  2/)  —  A  points. 

Ces  deux  théorèmes  sont  vrais  pour  toutes  valeurs  de 
k  et  n,  pourvu  que  k  soit  moindre  que  9  et  que  pour  le 
premier  théorème  p  <  A-  -h  i  et  pour  le  second  p  <  k — 4. 


(  205  ) 


CE.ASISK  DES  £.ETTRIi:iS. 


Séance  du  /''  août  189S. 

M.  le  l)ar<)n  Em.  de  Borchgrave,  doyen  d'ancienneté, 
occupe  le  fauteuil. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents:  MM.  S.  Bormans,  Ch.  Piot,  Cli.  Potvin, 
T.-J.  Lamy,  G.  Tiberghien,  L.  Vanderkindere,  le  comte 
Gohiet  d'Alviella,  Ad.  Prins,  J.  Vuylsteke,  A.  Giron, 
God.  Kurtlf,  H.  Denis,  Georges  Monchamp,  P.  Thomas, 
Ernest  Discailles,  membres;  J.-C.  Vollgraff,  associé; 
V.  Brants,  M.  Wilmotle,  H.  Pirenne,  Ern.  Gossart  et 
Polydore  De  Paepe,  correspondants. 

—  MM.  Vander  Haeghen,  direcleur;  P.  Fredericq, 
membre,  et  J.  Leclercq,  correspondant,  motivent  leur 
absence. 


CORRESPO  NDANCE. 


La  Classe  prend  notilication  otficielle  : 

1°  D'une  lettre  de  M'""  Banning  annonçant  la  mort  de 
scMi  mari,  M.  Emile  Banning,  membre  titulaire,  décédé 
à  Ixelles,  le  15  juillet; 


(  206  ) 

2°  D'une  lettre  de  M.  Charles  Rivier,  pasteur  à  Genève, 
annonçant  la  mort  de  son  frère,  M.  Alphonse  Rivier, 
associé,  décédé  à  Saint-Gilles  lez-Bruxelles,  le  21  du 
même  mois. 

La  Classe  remercie  M.  le  baron  de  Borchgrave,  qui  a 
bien  voulu  se  faire  l'organe  de  ses  sentiments  aux  funé- 
railles de  MlVl.  Banning  et  Rivier. 

Les  discours  prononcés  par  M.  de  Borchgrave,  ainsi 
qu'une  note  de  M.  Vander  Haeghen,  paraîtront  dans  le 
BuUelin  de  la  séance. 

M.  le  Secrétaire  peipétuel  adressera  une  lettre  de 
condoléance  aux  familles  des  défunts. 

—  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  envoie,  pour  la  biblio- 
thèque de  l'Académie,  un  exemplaire  des  Documents 
officiels  de  l'Institut  colonial  international  :  V"  série,  La 
main-d'œuvre  aux  colonies,  t.  III  ;  5*  série.  Le  régime 
foncier  aux  colonies,  t.  I*^'  ;  Compte  rendu  de  la  session 
tenue  à  Berlin  les  6  et  7  septembre  1897.  — Remerciements. 

—  Hommages  d'ouvrages  : 

Àdenet  le  Roi  et  son  œuvre.  Étude  littéraire  et  linguis- 
tique; par  Arthur  Bovy  (présenté  par  M.  Wilmotte,  avec 
une  note  qui  ligure  ci-après); 

De  vlaamsclie  Urijgstaalkunde  ;  par  Edouard  Peeters.  — 
Remerciements. 


KLECTION. 


La  Classe  procède  au  remplacement  de  M.  Banning 
comme  directeur  pour  1899.  M.  A.  Giron  est  élu. 


(  207  ) 


Note  de  M.    Vander  Haeghen,  directeur. 

L'année  1898  a  été  fatale  pour  la  Classe  des  lettres.  A 
peu  de  mois  d'intervalle,  elle  a  perdu  trois  de  ses  mem- 
bres les  plus  distingués  et  le  plus  célèbre  de  ses  membres 

associés. 

M.  Emile  Banning,  décédé  presque  subitement  le 
12  juillet  dernier,  était  une  des  personnalités  les  plus 
hautes  et  les  plus  sympathiques,  non  seulement  de  la 
diplomatie  belge,  mais  de  la  politique  internationale.  Sa 
carrière  a  été  extraordinairement  brillante;  elle  comp- 
tera aussi  parmi  les  plus  utiles;  elle  fut  tout  entière 
vouée  à  la  cause  de  l'humanité,  au  service  de  notre 
patrie. 

Après  avoir  fait  de  solides  études  à  l'Université  de 
Liège,  sa  ville  natale,  M.  Emile  Banning  se  rendit  à 
l'Université  de  Berlin.  Il  ne  tarda  pas  à  faire  connaître 
les  observations  que  lui  avait  suggérées  l'étude  des 
méthodes  usitées  dans  le  haut  enseignement  en  Alle- 
magne. 

Revenu  en  Belgique,  le  jeune  savant  fut  attaché  pen- 
dant quelque  temps  à  la  Bibliothèque  royale.  Mis,  par 
suite  de  ses  fonctions,  en  relation  avec  M.  Paul  Devaux, 
il  devint  le  collaborateur  de  celui-ci  et  bientôt  son  ami. 

Les  qualités  primesautières  du  jeune  érudit  ne  pou- 
vaient que  gagner  au  contact  du  talent  de  Paul  Devaux 
et  des  hommes  distingués  formant  l'entourage  de  cet 
éminent  homme  d'Etat. 

M.  le  Ministre  Rogier,  qui  appréciait  fort  le  haut 
mérite  de  M.  Banning,  le  choisit  comme  secrétaire  en 


(  208  ) 

arrivant  au  Ministère  des  Affaires  Etrangères  et,  depuis 
lors  attaciié  à  ce  Département,  M.  Banning  rendit  à  la 
diplomatie  et  à  la  politique  belges  les  services  les  plus 
signalés.  Il  tut  notamment  un  des  ouvriers  de  la  première 
heure  de  l'œuvre  grandiose  de  la  colonisation  africaine, 
à  laquelle  Sa  Majesté  le  Roi  a  consacré  les  plus  nobles 
efforts;  M.  Banning,  confident  des  projets  de  notre  Sou- 
verain, contribua  puissamment  à  aplanir  les  difficultés 
de  toute  nature  que  l'œuvre  du  Congo  eut  à  traverser  au 
début;  il  prit  une  part  active  aux  travaux  de  la  Confé- 
rence de  187()  et  publia,  à  l'issue  de  cette  importante 
étape  de  l'entreprise  africaine,  deux  volumes  de  docu- 
ments dont  l'effet  fut  décisif.  M.  Banning  apportait  au 
débat  une  série  de  révélations  qui  firent  une  impression 
profonde;  il  indiquait  les  ressources  sur  lesquelles  les 
civilisateurs  de  l'Afrique  étaient  en  droit  de  compter,  le 
bien  à  réaliser  et  mettait  nettement  au  point  des  faits 
qui  jusque-là  n'avaient  fait  que  transparaître  dans  un 
jour  demi-mystérieux. 

Le  succès  de  M.  Banning,  comme  orateur  ou  comme 
écrivain,  ne  fut  pas  moindre  lorsqu'il  prit  part,  en  des 
occasions  plus  récentes,  aux  discussions  soulevées  par  la 
revision  de  notre  pacte  fondamental,  par  la  question  du 
référendum  royal,  par  celle  de  la  réorganisation  de  l'ar- 
mée, etc. 

Toutes  ces  questions,  dans  l'esprit  de  l'éminent  fonc- 
tionnaire, se  rattachaient  étroitement  au  salut,  à  la  pro- 
spérité du  pays  belge.  Il  les  envisageait,  il  en  parlait  avec 
un  loyalisme  complet,  une  loyauté  entière,  exprimant 
fortement  des  convictions  rétléchies,  éloquent  surtout 
lorsqu'il  entreprenait  de  seconder  les  efforts  tentés  par 
Sa  Majesté  le  Roi  en  vue  d'assurer  à  la  Belgique  plus 
de  sécurité  et  une  prospérité  plus  étendue. 


(  209  ) 

M.  Banning  n'étail  pas  le  diplomate  attaché  tradition- 
nellement à  d'étroites  formules  et  qu'une  excessive  pru- 
dence confine  dans  l'inaction.  Sachant  maintenir  les 
progrès  acquis,  son  libre  esprit  s'avançait  courageuse- 
ment dans  le  domaine  des  idées,  ses  convictions  s'impri- 
maient dans  une  langue  claire,  forte,  très  littéraire  : 
aussi  ses  travaux  le  désignaient-ils  dès  longtemps  au 
choix  de  l'Académie  lorsqu'il  fut,  en  1889,  élu  corres- 
pondant, et  en  1892  membre  de  la  Classe  des  lettres  de 
notre  Compagnie. 

L'œuvre  de  M.  Banning  redira  longtemps  les  qualités 
aimables  de  sa  haute  intelligence,  en  même  temps  que 
la  largeur  de  ses  vues,  la  noblesse  de  ses  préoccupations. 

La  vie  de  notre  éminent  et  très  regretté  confrère  a  été 
celle  d'un  homme  de  bien,  celle  d'un  grand  citoyen. 
L'Académie,  que  son  décès  atteint  douloureusement, 
gardera  de  M.  Banning  un  impérissable  souvenir. 


Discoura  prononcé  aux  funéraUles  d'Emile  Banning;  par 
le  baron  Érnile  de  Borchgrave,  membre  de  la  Classe 
des  lettres. 

Appelé,  en  qualité  de  doyen  d'ancienneté,  à  remplacer 
le  Directeur  de  la  Classe  des  lettres,  empêché,  je  remplis 
le  triste  devoir  de  rendre,  au  nom  de  l'Académie  royale, 
un  hommage  suprême,  de  dire  un  dernier  adieu  au  con- 
frère distingué  qu'une  mort  imprévue  nous  a  si  brusque- 
ment ravi,  et  d'adresser  à  la  famille  éplorée  l'expression 
de  notre  sincère  et  vive  condoléance. 

Une  voix  éloquente  vient  de  retracer  la  carrière  féconde 
de  M.  Emile  Banning.  Je  dois  me  borner  à  vous  parler 


(   -210   ) 

de  l'académicien,  à  rappeler  les  travaux  qui  lui  ont  valu 
une  brillante  notoriété. 

Neveu  du  poète  Weustenraad,  M.  Banning  eut  de 
bonne  heure  l'amour  de  la  nature,  le  goût  du  beau,  la 
passion  du  travail,  du  travail  solitaire  qui  développe 
l'intelligence  en  creusant  la  pensée. 

Dei)uis  l'instant  où,  au  seuil  de  la  jeunesse,  il  conquit 
une  flatteuse  distinction  universitaire,  ses  facultés  rares 
lui  permirent  d'embrasser  les  sujets  les  plus  variés. 

Études  de  critique  historique  et  littéraire,  essais  poé- 
tiques, questions  d'enseignement  en  Belgique  et  à  l'étran- 
ger, revues  de  politique  intérieure  et  internationale,  frag- 
ments philosophiques,  il  traça  de  nouveaux  sillons  dans 
le  vaste  champ  ouvert  à  l'esprit  humain. 

Nommé  membre  de  l'Académie,  il  y  a  quelques  années, 
il  aimait  à  prendre  une  part  active  à  nos  délibérations. 
Sa  première  lecture  parmi  nous  fut  consacrée  à  la  glori- 
fication de  l'œuvre  grandiose  du  Congo.  Il  donna,  il  y  a 
quelques  jours  à  peine,  une  de  ses  dernières  préoccupa- 
tions à  l'avenir  du  corps  savant  qui  déplore  sa  perte. 

Écrivain  de  race,  épris  de  la  forme,  dédaigneux  des 
banalités,  ses  travaux  ne  sont  pas  éphémères.  Fruits  d'un 
judicieux  et  patient  labeur,  les  délicats  aimeront  à  les 
relire,  tous  y  trouveront  d'utiles  leçons. 

Philosophe  dévoué  aux  idées  modernes  et  chrétien  con- 
vaincu, il  puisait  dans  ses  idées  hautement  spiritualistes 
des  forces  contre  la  souffrance  physique  qui  le  terrassait 
et  la  ferme  espérance  de  voir  son  àme,  alfranchie  des 
luttes  de  la  vie,  rayonner,  dans  l'au  delà,  de  sa  beauté 
immortelle. 

Adieu,  Banning,  adieu  ! 


(  2f<  ) 

Discours  prononcé  auj-  funérailles  d'Alphonse  Bivier;  par 
le  baron  Emile  de  Borchi,qave,  membre  de  la  Classe 
des  lettres. 

Messieurs, 

L'année  189cS  est  funeste  à  l'Académie. 
Le  nécrologe  s'ouvre  pour  la  septième  fois.  Nous 
avons  à  y  inscrire  la  mort  inopinée  du  distingué  et  très 
regretté  M.  Rivier.  C'est  en  qualité  de  doyen  d'ancien- 
neté, remplaçant  le  Directeur  de  la  Classe  des  lettres, 
empêché,  que  je  viens  rendre  un  hommage  suprême  à  sa 
mémoire. 

M.  Alphonse  Rivier  fut  élu  associé  de  l'Académie  en 
1875.  Né  dans  un  pays  ami,  il  avait  fait  de  la  Belgique 
sa  seconde  patrie.  M.  Thonissen  eut  à  cœur  de  signaler 
le  jeune  savant  qui  déjà  s'était  fait  connaître  ailleurs  et 
acquis,  par  son  enseignement  et  par  ses  publications 
estimées,  un  précoce  et  légitime  renom. 

Ses  connaissances  variées  et  remarquables,  son  intel- 
ligence ouverte  et  pratique,  ses  études  des  questions  qui 
préoccupent  les  esprits  soucieux  de  l'avenir,  le  dési- 
gnaient, tout  autant  que  la  suggestion  de  notre  éminent 
confrère,  au  choix  de  l'Académie. 

M.  Rivier  occupa  sa  place  avec  honneur.  Il  prenait 
une  part  assidue  à  nos  séances.  Il  s'imposait,  dans  nos 
délibérations,  par  ses  vues  précises  et  lumineuses.  Dans 
les  discussions  relatives  aux  concours,  ses  jugements 
faisaient  autorité. 

Il  nous  révéla  les  travaux,  ignorés,  de  compatriotes  qui 
ont  brillé  à  l'étranger. 


(  2i2  ) 

Sa  compétence  dans  les  questions  de  droit  romain,  de 
droit  international,  d'économie  sociale  et  politique,  était 
appréciée  de  tous. 

Sa  courtoisie  captivait.  Affable  et  gracieux,  on  n'enten- 
dait jamais  une  parole  désobligeante  tomber  de  sa  bouche. 

Sa  mort  nous  est  une  surprise  cruelle.  A  voir  sa  vigueur 
et  sa  souplesse  physiques,  nous  nous  flattions  que  de 
longs  jours  lui  étaient  réservés.  Illusion  vaine! 

Lié  avec  M.  Rivier  depuis  trente  ans,  c'est  avec  un 
douloureux  serrement  de  cœur  que  je  lui  dis  ce  triste  et 
dernier  adieu.  Mais  mon  émotion  se  tempère  par  la  certi- 
tude que  ce  savant,  ce  confrère,  cet  homme  de  bien  ne 
sera  pas  oublié  :  il  sera  au  milieu  de  nous  par  le  souve- 
nir de  ses  œuvres  et  de  ses  qualités,  tout  à  la  fois  graves 
et  charmantes. 


NOTE    BIBLIOGRAPHIQUE. 

J'ai  l'honneur  de  déposer  sur  le  bureau  de  l'Académie 
un  exemplaire  du  travail  de  M.  Arthur  Bovy,  intitulé  : 
AuENET  LE  Roi  et  son  oeuvre,  élude  littéraire  et  linguis- 
tique. 

M.  Bovy  est  un  ancien  élève  de  la  section  de  philolo- 
gie romane  de  l'Université  de  Liège.  Sa  thèse  de  docteur 
est  devenue  un  livre,  qui  a  d'autant  plus  d'intérêt  poin 
nous  qu'il  est  consacré  à  un  écrivain  belge,  à  l'auteur  du 
célèbre  roman  de  Berte  au  grand  pied  et  de  ce  Cléomadès 
qu'édita  un  membre  de  l'Académie,  M.  Van  Hasselt,  et 
qu'un  autre  membre  de  la  Classe,  M.  Bormans,  soumit  à 
une  revision  très  attentive.  On  sait  qu'un  troisième  col- 
lègue, le  regretté  M.  Scheler,  a  réédité  Berte  et  publié 


(  213  ) 

Bueves  de  Commarcins  et  les  Enfances  Ogier,  c'est-à-dire 
les  ouvrages  d'allure  épique  qu'on  est  d'accord  pour  attri- 
buer à  Adenet.  La  contribution  de  M.  Bovy  est  donc  la 
dernière  pierre  d'un  monument  vraiment  national  ;  à  ce 
titre  déjà,  nous  nous  serions  fait  un  devoir  de  la  signaler. 

Mais  cette  contribution  philologique  mérite  encore 
d'attirer  notre  attention  par  la  valeur  de  son  contenu. 
Elle  est  divisée  en  trois  parties,  dont  l'une  sert  d'intro- 
duction, tandis  que  la  seconde  est  consacrée  aux  «  pro- 
cédés littéraires  d'Adenet  »,  c'est-à-dire  à  sa  façon  de 
traiter  ses  sources,  à  son  style  et  à  sa  versification;  dans 
la  troisième  partie,  l'auteur  étudie  la  langue  du  rimeur 
brabançon. 

Il  y  a  là  nombre  d'observations  originales,  et  si  l'on 
peut  regretter  fle-ci  de-là  que  l'auteur  n'ait  pas  usé  plus 
généreusement  de  la  méthode  comparative,  il  taut  recon- 
naître que,  dans  l'ensemble,  son  étude  repose  sur  la  con- 
naissance directe  des  textes  et  démontre  surabondamment 
un  esprit  apte  aux  plus  difficiles  des  besognes  philolo- 
giques. M.   WlLMOTTE. 


PROGRAMME  DU  CONCOURS  POUR  L'ANNÉE  1901. 


PREMIERE    QUESTION. 

On  demande  une  étude  critique  sur  les  Vies  des  saints 
de  l'époque  carlovingienne  (depuis  Pépin  le  Bref  jusqu'à 
la  fin  du  X"  siècle). 

L'auteur  ne  s'attachera  qu'aux  Vies  présentant  un 
intérêt  historique. 


(  ^^«4   ) 


DEUXIEME    QUESTION. 

On  demande  une  étude  sur  les  divers  systèmes  péni- 
tentiaires modernes  considérés  au  point  de  vue  de  la  théorie 
pénale  et  des  résultats  obtenus. 


TROISIEME  QUESTION. 

On  demande  une  étude,  d'après  les  découvertes  des  der- 
nières années,  sur  les  croyances  et  les  cultes  de  l'Ile  de 
Crète  dans  l'antiquité. 

QUATRIÈME  QUESTION. 

Étudier  l'organisation  du  travail  dans  une  ville  du 
XV  siècle. 

CINQUIÈME    QUESTION. 

Faire  l'histoire  de  l'assistance  publique  dans  les  cam- 
pagnes en  Belgique,  depuis  la  Révolution  française  jusqu'à 
nos  jours. 

La  valeur  des  médailles  présentées  comme  prix  sera 
de  huit  cents  francs  pour  les  trois  premières  questions  et 
de  six  cents  francs  pour  les  deux  dernières. 

Les  mémoires  seront  écrits  lisiblement  et  rédigés  en 
français,  en  flamand  ou  en  latin.  Ils  seront  adressés, 
francs  de  port,  avant  le  l'^'  novembre  1900,  à  M.  le 
Secrétaire  perpétuel,  au  Palais  des  Académies,  à  Bruxelles. 


(  215  ) 

COIVDITIONS    Réc:i>EIMRI%TAIRKS 
COMMUIVES    AUX    COKCOVRS    AI%!\UELS    DE    K.A    Cl>ASSK. 

L'Académie  exige  la  plus  grande  exactitude  dans  les 
citations;  elle  demande,  à  cet  eflet,  que  les  auteurs 
indiquent  les  éditions  et  les  pages  des  livres  qu'ils  citent. 

Les  auteurs  ne  mettront  point  leur  nom  à  leur  ouvrage; 
ils  y  inscriront  seulement  une  devise,  qu'ils  reprodui- 
ront sur  un  billet  cacheté  renfermant  leur  nom  et  leur 
adresse.  Faute  par  eux  de  satisfaire  à  cette  formalité,  le 
prix  ne  pourra  leur  être  accordé.  L'emploi  d'un  pseudo- 
nyme exclut  les  auteurs  du  concours. 

Les  ouvrages  remis  après  le  terme  prescrit,  ou  ceux 
dont  les  auteurs  se  feront  connaître,  de  quelque  manière 
que  ce  soit,  seront  exclus  du  concours. 

L'Académie  croit  devoir  rappeler  aux  concurrents  que 
les  mémoires  soumis  à  son  jugement  sont  et  restent 
déposés  dans  ses  archives.  Toutefois,  les  auteurs  peuvent 
en  faire  prendre  des  copies,  à  leurs  frais,  en  s'adressant, 
à  cet  effet,  au  Secrétaire  perpétuel. 


PRIX  PERPETUELS. 

Prix  de  Stassart. 
Notice   sur   un   Relge   célèbre. 

(Huitième  période  :  1893-1898.) 

La  Classe  proroge  jusqu'au  l*"  février  1899  le  délai 
pour  la  remise  des  manuscrits  en  réponse  à  la  huitième 
période  de  ce  concours,  ofl'rant  un  prix  de  six  cents  francs 


(  2^6) 

à  l'auteur  de  la  meilleure  notice,  écrite  en  français,  en 
tlaniand  ou  en  latin,  consacrée  à  la  vie  et  aux  travaux 
de  Nicolas  Cleynaerts,  dit  Clenardus,  grammairien,  orien- 
taliste et  voyageur,  né  à  Diest  en  1495,  mort  à  Grenade 
en  1542. 

Les  concurrents  devront  se  conformer  aux  conditions 
réglementaires  ci-dessus  des  concours  de  la  Classe. 


Prix    de    Saint -Génois    pour    une    question    d'histoire 
ou  UE  littérature  en  langue  flamande. 

(Quatrième  période  :  1898-1907.) 

Conformément  aux  volontés  du  fondateur,  la  Classe 
olfre,  pour  la  quatrième  période  de  ce  concours,  un  prix 
de  mille  francs  à  l'auteur  du  meilleur  travail  rédigé  en 
flamand,  en  réponse  à  la  question  suivante  : 

Faire  l'histoire  de  la  période  calviniste  à  Gand  (1576- 

1584). 

Le  délai  pour  la  remise  des  manuscrits  expirera  le 
1"  novembre  1907. 

Les  concurrents  devront  se  conformer  aux  conditions 
réglementaires  des  concours  de  l'Académie. 


(  217  ) 

Prix  Anton  Bergmann. 

[Seconde  période  :  1887-1897  (1)]. 

Le  prix  pour  cette  période  est  réservé  à  la  meilleure 
histoire,  écrite  en  néerlandais,  d'une  ville  ou  d'une  com- 
mune appartenant  à  la  province  de  Brabanl  (l'arrondisse- 
ment de  Nivelles  excepté),  et  comptant  au  moins 
5,000  habitants. 

Le  prix  à  décerner  est  de  trois  mille  francs. 

Les  livres  imprimés  sont  admis  au  même  titre  que  les 
manuscrits;  ceux-ci  pourront  être  ou  signés  ou  anonymes. 
Dans  ce  dernier  cas,  l'auteur  devra  joindre  à  son  travail 
uji  billet  cacheté  renfermant  son  nom  et  son  adresse. 
L'emploi  d'un  pseudonyme  exclut  l'auteur  du  concours. 

Les  œuvres  historiques  sont  comprises  dans  les  avan- 
tages de  la  fondation,  qu'elles  aient  pour  auteurs  des 
étrangers  ou  des  Belges,  pourvu  qu'elles  soient  écrites  en 
néerlandais  et  éditées  en  Belgique  ou  dans  les  Pays-Bas. 


PROGBAMMA  DER  PRIJSKAMPEN 
VOOR  HET  JAAR  1901. 

EERSTE    PRIJSVRAAG. 

Men  vraagl  eene  critische  studie  over  de  Vitae  der 
keiligen  ail  liel  karolingisch  lijdvak  (van  Pepijn  den 
Korte  lot  hel  einde  der  X^  eeuw). 

De  schrijver  zal  alleen  de  Vilae,  die  een  historisch 
belang  opleveren,  te  behandelen  hebben. 


(1)  Par  arrêté  royal,  cette  période  a  été  prorogée  jusqu'au  l*^""  fé- 
vrier 1900. 

S'"*"    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  15 


(  218  ) 


TWEEDE    PRIJSVRAAG. 


}fen  vraagt  cène  sludie  over  de  verschillende  gevange- 
nisslelsels  ail  den  nieuweren  tijd,  in  hel  liclil  der  straf- 
rechtdijke  Uieorie  en  der  verkregen    uilslagen  beschouwd. 


DERDE    PRIJSVRAAG. 


Men  vraagl  een  onderzoek,  naar  aanleiding  van  de  onl- 
dekkingen  der  laatsle  jaren,  over  de  geloofsvornien  en  de 
godMiemlen  van  hel  oude  eiland  Krela. 


VIERDE   PRIJSVRAAG. 


De  inrichting  van  den  arbeid  besludeeren  in  eene  slad 
van  de  XV  eeuw. 


VIJFDE    PRIJSVRAAG. 

De  geschiedenis  schetsen  van  de  openbare  armenverzor- 
ging  op  hel  plalte  land  in  België,  van  de  Framche  oniwen- 
teling  lot  onze  dagen. 

De  waarde  der  als  prijs  uitgeloofde  gouden  eerepen- 
ningeii  zal  van  «67?/  honderd  frank  zijn  voor  elke  der 
drie  eerste  prijsvragen,  en  van  zes  honderd  frank  voor  de 
tvvee  laalste  prijsvragen. 

De  ingezonden  verhandelingen  moeten  leesbaar  ge- 
schreven,  en  mogen  in  Iiet  Fransch,  het  Nederlandseh  of 
liet  Latijn  opgesteld  zijn.  Sfôôr  V"  November  1900 
moeten  zij  aan  den  lieer  Bestendigen  Secrelaris,  in  het 
Paleis  der  Acadeiniën  le  Brussel,  vraclitvrij  gezonden 
worden. 


(  219) 

RBC;E.ElllEIVTSBKPAE.IIWCiElV 
DIE     VOOR     DE     Ï>RI.ISH.A1IIPEI«     CiElllEEN     ZMN. 

De  Académie  eischt  de  grootste  nauwkeurigheid  in  de 
citaten;  te  dien  einde  verlangt  zij  van  de  schrijvers,  dat 
zij  de  uitgaven  en  de  bladzijden  der  door  hen  aangehaaide 
werken  zullen  aanduiden. 

De  schrijvers  mogen  op  hun  werk  hunnen  naam  niet 
vermelden  ;  zij  zullen  er  alleen  eene  kenspreuk  op  plaat- 
sen,  die  nioet  herhaald  worden  op  een  verzegelden  briel", 
bevattende  hunnen  naam  en  hun  adres.  Indien  zij  aan 
dezen  eisch  te  kort  komen,  kan  geen  prijs  hun  worden 
toegewezen. 

Werken,  die  na  den  gestelden  datum  inkomen  of  waar- 
van  de  schrijver,  op  welke  manier  ook,  zich  heeft  laten 
kennen,  zullen  uit  den  prijskamp  gesloten  worden. 

De  Académie  herinnert  aan  de  mededingers,  dat  de  ver- 
handelingen  in  haar  archief  berusten  en  blijven  moeten 
van  het  oogenblik  af  dat  zij  aan  haar  oordeel  werden 
onderworpen.  Nochtans  kunnen  de  schrijvers,  op  hunne 
eigene  kosten,  afschriften  van  hunne  ingezondene  werken 
laten  maken  ;  daartoe  moeten  zij  zich  tôt  den  Bestendigen 
Secretaris  wenden. 

BESTENDIGE  PRIJSKAMPEN. 

Prijs  de  Stassart. 
Verhandeling  over  eenen  reroemden  Belg. 

(Achtste  tijdvak  :  1893-1898.) 

De  Klas  der  Letteren  verlengt  tôt  den  1''°  Februari 
1899,  den  termijn  voor  het  inzenden  derhandschriften  in 
antwoord  op  het  achtste  tijdvak  van  dezen  prijskamp, 


C  ^220  ) 

eenen  prijs  van  zes  honderd  frank  uitloveiide  voor  den 
schrijver  der  beste  verhandeling,  geschreven  in  bel 
Franscb,  het  Nederlandsch  of  bet  Latijn,  en  gewijd  aan 
bet  leven  en  de  werken  van  Nicolaus  Cleynaerts,  gezegd 
Clenardus,  spraakkunstenaar,  orientalist  en  reiziger, 
geboren  te  Diest  in  1495,  gestorven  te  Grenada  in  1542. 
De  mededingers  zullen  de  bovenstaande  reglements- 
bepalingen  voor  de  prijskampen  der  Klas  moeten  in  acht 
nemen. 


Prijs  de  Saint-Genois. 

Nederlandsche  verhandeling  over  geschiedenis 
of  letterkunde. 

(Vierde  tijdvak  :  1898-1907.) 

Liiidens  den  wil  des  sticbters,  looft  de  Klas  der  Lette- 
ren,  voor  bet  vierde  tijdvak  van  dezen  prijskamp,  eenen 
prijs  van  duizend  frank  uit  voor  den  scbrijver  van  bet 
beste  werk,  gescbreven  in  bet  Nederlandscb,  als  antwoord 
op  de  volgende  prijsvraag  : 

De  geschiedenis  schrijven  van  het  Calvinistisch  tijdvak 
te  Cent  {1 576-1 584). 

Voor  1"°  November  1907  is  de  lermijn  tôt  bet 
inzenden  der  verbandelingen  verstreken. 

De  mededingers  zullen  de  bovenstaande  reglements- 
bepalingen  voor  de  prijskampen  der  Académie  moeten  in 
acht  nemen. 


(  22<  ) 

Prijs  Anton  Bergmann. 

[Tweede  tijdvak  :  1887-1897  (1)]. 

Biiinen  dit  tijdvak  is  de  prijs  voorbehouden  aan  de 
beste  in  het  Nederlandsch  geschrevene  geschiedenis  van 
eene  stad  of  gemeente  behoorende  tôt  de  provincie  Bra- 
bant  (uitgezonderd  het  arrondissement  Nijvel)  en  tellende 
ten  minste  5, (MX)  inwoners. 

De  iiitgeloofde  prijs  is  van  drie  duizend  frank. 

De  drukwerken  worden  op  gelijken  voet  als  de  hand- 
schriften  toegelaten  ;  deze  laatste  mogen  den  naam  des 
schrijvers  vermelden  of  verzvvijgen.  ïn  dit  laatste  geval 
moet  de  schrijver  bij  zijn  handschrift  een  verzegelden 
brief  voegen,  bevattende  zijnen  naani  en  de  aanduiding 
van  zijne  woonj)laats.  Door  het  aannemen  van  een  pseu- 
doniem  sluit  de  schrijver  zichzelven  iiit. 

De  historische  gewrochten  worden  tôt  den  prijskamp 
toegelaten  onverschillig  ofzij  door  Belgen  of  vreemdelin- 
gen  geschreven  zijn,  op  voorwaarde  dat  zij  in  het  Neder- 
landsch opgesteld  en  in  België  of  in  Nederland  uitgegeven 
zijn. 


(1)  Bij  koninkli.jk  besluit  is  de  termijn  tôt  inzenden  der  verhande- 
lingen  verstreken  tôt  1»"  Februari  1900. 


(  222  ) 


€L.A!^Si:  DES  BEAUX-ARTS. 


Séance  du  i  août  1898. 

M.  J.  RoBiE,  vice-directeur,  occupe  le  fauteuil. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents:  MM.  F.-A.  Gevaert,  Th.  Radoux,  Peler 
Benoit,  J.  Demannez,  P.-J.  Clays,  G.  De  Groot,  Gustave 
Biot,  H.  Hymans,  Jos.  Stallaert,  Alex.  Markelbach, 
Max.  Rooses,  G.  Huberti,  A.  Hennebicq,  Éd.  Van  Even, 
Alfred  Cluysenaar,  J.Winders,  H.  Maquet,  J.  Van  Ysen- 
dyck,  membres;  J.-B.  Meunier  et  G.  Hermans,  correspon- 
dants. 

MM.  Jules  Pécher  et  Ém.  Mathieu  ont  motivé  leur 
absence. 

—  Le  Bureau  adresse  les  félicitations  de  la  Classe  à 
M.  P.  Benoit  au  sujet  de  sa  nomination  de  directeur  du 
Conservatoire  royal  d'Anvers. 

M.  Benoit  remercie  ses  confrères  et  tout  particulière- 
ment M.  Gevaert,  pour  les  précieux  conseils  qu'il  lui  a 
donnés,  dit-il,  au  sujet  de  l'organisation  définitive  du 
Conservatoire  d'Anvers.  {Applaudissements.) 


(  225  ) 
CORRESPONDANCE. 

M.  le  Ministre  de  l'Agriculture  et  des  Travaux  publics 
communique,  afin  d'avis,  une  Ouverture-fantaisie  sur  la 
légende  de  Geneviève  de  Brabanl,  par  M.  Martin  Lunssens, 
premier  prix  du  grand  concours  de  composition  musicale 
de  1895.  —  Renvoi  à  MM.  Huberti,  Mathieu,  van  Duyse 
et  Benoit. 

COMITÉ  SECRET. 

La  Classe  se  constitue  en  comité  secret  pour  s'occuper 
de  (litîerents  objets  inscrits  à  son  ordre  du  jour. 


OUVRAGES  PRESENTES. 

Bambeke  (Ch.  Van).  Gristailoïdes  dans  l'oocyte  de  Pltol- 
cus  phalangioïdes  Fiiessï.  Paris,  1898;  extr.  in-8"  (24  p.). 

Peetem  (Edouard).  De  vlaamsche  krijgstaalkunde.  Ypres, 
1898;  in-8Mll6  p.). 

de  Jonylie  {le  vicomte  B.).  Un  gros  à  l'etligie  en  pied  de 
Jean  d'Arekel,  prince-évêque  de  Liège  (1364-1378).  Bru- 
xelles, 1898;  extr.  in-8°  (4  p.). 

Bovy  (Arthur).  Adenet  le  Koi  et  son  œuvre.  Étude  litté- 
raire et  linguistique.  Bruxelles,  1898;  extr.  in-S"  (113  p.). 

Lootensifih.).  Recherches  expérimentales  sur  la  formatio  n 
(lu  son  dans  les  instruments  à  bouche  de  flûte.  Paris,  1898  ; 
extr.  in-8''  (75  p.). 

Institut  colonial  international.  Documents  officie  Is  : 
V"  série.  La  main-d'œuvre  aux  colonies,  tome  IIL  3™^  série . 
Le  régime  foncier  aux  colonies,  tontre  I.  —  Compte  rendu 
de  la  session  tenue  à  Berlin  les  6  et  7  septembre  1897. 


(  2-24  ) 

Congrès  international  de  législation  du  travail,  Bruxelles, 
1897.  La  répression  du  travail  en  chambre.  Kapport  pré- 
senté en  réponse  à  la  question  IV;  par  Eug.  Schwiedland. 
Paris,  1897;  in-8M98  p.). 

—  Die  Entwickelung  der  deulschen  Arbeiterschutzge- 
setzgebung  seit  1890;  von  Alfred  Weber,  Leipzig,  1897; 
in-8°  (50  p.). 

—  La  législation  sociale  en  Hongrie;  par  Joseph  Szte- 
réngi.  Budapest,  1897;  in-8°  (58  p.). 

—  Rapports  et  compte  rendu  analytique  des  séances. 
Bruxelles,  1898;  in-8"  (xxxv-741  p.). 

KôUiker  (A.  von).  Ueber  die  Entwicklung  der  Graaf'schen 
Follikel.  Wurzbourg,  1898;  exlr.  in-8''  (7  p.). 

KiEL.  Gesellsehaft  fiïr  Geschicfite.  Zeitschrift,  27.  Band. 

Washington.  Department  of  agriculture.  Yearbook,  1897. 

La  Plata.  Museo  de  La  Plata.  Revista,  tomo  VIII.  1898. 

Annuaire  statistique  delà  ville  de  Buenos-Ayres.  Vll^année, 
1897. 

Paris.  Observatoire.  Rapport  annuel  pour  l'année  1897; 
par  M.  Loewy.  1898  ;  in-4°. 

LivERPooL.  Literary  and  philosophical  Society.  Procee- 
dings,  1895-96. 

Martini  {Tito).  Intorno  al  calore  che  si  sviluppa  nel 
bognare  le  polveri.  Venise,  1898;  extr.  in-8''  (40  p.). 

Rossi  {Ad.).  Osservazioni  circa  gli  «  appunti  di  un  tec- 
nico  »  sul  coertîciente  d'esercizio  délie  reti  ferrovierie 
Mediterranea  ed  Adriatica.  Rome,  1898;  (39  p.). 

Naples.  Zoologisclie  Station.  Zoologischer  Jahresbericht, 
1897. 

Sars  (G.-O.).  An  account  of  the  Cruslacea  of  Norway, 
vol.  II,  pars  9  and  10.  Bergen,  1898;  in-8». 

Resgoll  {Eugène  de).  Clef  astronomique.  Résultat  de 
recherches  scientifiques.  Odessa,  1898;   in-l!2  (11  p.,  tig.). 

Bucarest.  Institut  météorologique.  Annales,  tome  XII, 
1896.  In  4". 


BULLETIN 


UE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES 


DES 


Lettres   et  des  Beaux-Arts  de  Belgique. 

489  8.  —  N»'  9-10. 


ci.Aj><»»i<:  m:H  ^^ciki^ci^»». 


Séance  du   15  octobre   1898. 

iM.  Éd.  Dupont,  directeur. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  W.  Spring,  vice-directeur  ;  le  baron 
Edm.  de  Selys  Longchamps,  G.  Dewalque,  Éd.  Van 
Beneden,  C.  Malaise,  F.  Folie,  F.  ÏMateau,  Fr.  Crépin, 
J.  De  Tilly,  Ch.  Van  Bambeke,  G.  Van  der  Mensbrugghe, 
L.  Henry,  M.  Mourlon,  P.  Mansion,  P.  De  Heen,  C.  Le 
Paige,  J.  Deruyts,  Léon  Fredericq,  J.-B.  Masius,  J.  Neu- 
berg,  A.  Lancasler,  membres;  L.  Errera  et  P.  Francotte, 
correspondants. 

3™*    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  16 


CORRESPONDANCE. 


La  Classe  prend  notification  de  la  mort  de  M.  James 
Hall,  directeur  du  Musée  d'histoire  naturelle  d'Albany, 
né  à  Ingham  (Massachusetts,  États-Unis)  le  12  septem- 
bre 1811,  élu  associé  le  15  décembre  188(3  et  décédé  à 
Albany  le  7  août  1898. 

—  M.  Dupont  donne  lecture  du  discours  qu'il  a  pro- 
noncé le  24  juillet  dernier,  comme  directeur  de  la  Classe, 
à  l'inauguration  de  la  statue  élevée  à  Malines  à  la  mé- 
moire de  P.-J.  Van  Beneden.  —  Des  remerciements  sont 
votés  à  M.  Dupont  dont  le  discours  paraîtra  au  Bulletin. 

—  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  et  de  l'Instruction 
publique  envoie,  pour  la  bibliothèque  de  l'Académie,  un 
exemplaire  des  ouvrages  suivants  : 

1°  Étude  de  l'action  des  toxines  et  antitoxines  sur  la 
nutrition  générale  ;  par  0.  Decroly; 

2°  La  Cellule,  tome  XIV,  2«  fascicule;  tome  XV, 
1^'  fascicule; 

3°  Le  opère  di  Galileo  Galilei,  volume  VII, 

—  Remerciements. 

—  M.  le  Ministre  de  la  Guerre  fait  don  d'un  exem- 
plaire de  la  Carte  de  la  Belgique  an  '160,000",  appropriée 
à  l'usage  des  cgclisles. 

—  Remerciements. 

,   —  Hommage  d'ouvrages  : 

1°  Les  Aiilliozoaires  de  la  «  Planklon- Expédition  »  ,•  par 
Edouard  Van  Beneden  ; 


(  227  ) 

2°  Tous  les  êtres  vivants  ont-ils  besoin  d'oxygène  libre? 
Note  additionnelle  à  /'•<  optimum  >;  par  L.  Errera; 

3"  Résultats  des  campagnes  scientifiques  accomplies  sur 
son  yacht,  12*'  fascicule  ;  par  Albert  l^%  prince  de  Monaco  ; 

40  Vcrgleichende  Anatomie  der  Wirbelthiere,  Band  J;  par 
Ch.  Gegenbaur,  associé; 

5"  Les  insectes  des  temps  secondaires;  par  Fernand 
Meunier  (présenté  par  M.  Malaise,  avec  une  note  qui 
figure  ci-après)  ; 

6"  A.  Sur  le  principe  de  l'énergie;  B.  Sur  certains  prin- 
cipes de  mécanique  ;  C.  Les  hypothèses  cosmogoniques;  par 
Ern.  Pasquier; 

7°  Le  sommeil  hibernal  et  les  modifications  des  neu- 
rones cérébraux  ;  par  Louis  Querton; 

8°  Utilisation  du  phlanite  cambrien  des  environs  d'Otti- 
gnies  par  rhomme  préhistorique  ;  par  George  Cumont; 

9°  Note  sur  un  Némalode  nouveau  des  [les  Fidji;  par 
Gustave  Gilson. 

—  Bemerciements. 

—  Travaux  manuscrits  à  l'examen  : 

i°  Sur  les  vitesses  de  réaction;  par  A.  de  Hemptinne 
et  A.  Bekaert.  —  Commissaires  :  MM.  Spring  et  De 
Heen  ; 

2"  Nouvelle  exploration  scientifique  des  grottes  d'Engis, 
d'Engihoul  et  des  environs;  par  Ernest  Doudou.  —  Com- 
missaires :  MM.  Fraipont  et  Malaise; 

0°  Nouvelle  lettre  de  M.  Dauber,  relative  aux  recherches 
du  b"  Buchner  sur  les  fermentations.  —  Commissaires  : 
MM.  Jorissen  et  Gilkinet. 


(  2"28  ) 


Inauguration  de  la  statue  de  P.-J.  Van  Heneden,  à  Matines, 
le  2i  juillet  1898;  discours  de  M.  É.  Duponl,  directeur 
de  la  Classe  des  sciences. 

Nous  sommes  réunis  pour  une  émouvante  cérémonie,  à 
laquelle  l'Académie  tient  à  prendre  part  de  cœur  et 
d'âme. 

La  ville  de  Malines,  la  cité  où  naquit  P,-J.  Van  Bene- 
den,  vient  d'ériger  à  son  illustre  concitoyen  un  monu- 
ment qui  perpétuera,  aux  yeux  des  générations,  le 
souvenir  d'une  de  nos  plus  riches  contributions  à  la 
science.  Mais  cette  fête  n'est  pas  seulement  patriotique  et 
ne  peut  se  borner  à  glorifier  un  savant  qui  a  servi  son 
pays  par  une  œuvre  de  plus  de  soixante  années.  La  por- 
tée en  est  plus  haute  :  elle  veut  dire  que  la  Belgique, 
comme  la  ville  natale  de  notre  confrère,  comprend  que  la 
science,  par  ses  conquêtes  sur  la  nature,  est  le  plus  beau 
fleuron  dont  se  couronne  la  civilisation,  et  que  chaque 
citoyen  qui  la  fait  progresser,  a  bien  mérité  de  son  époque 
autant  que  de  sa  patrie. 

Ces  sentiments,  dont  nous  sommes  tous  en  ce  moment 
pénétrés,  ne  sont-ils  pas  partagés  dans  tous  les  pays  où 
la  science  est  en  honneur? 

Quelle  grande  carrière  que  celle  qui  nous  revient  à 
l'esprit  avec  une  telle  intensité  d'éclat  !  Quoi  de  plus 
noble  que  de  mettre  de  merveilleuses  aptitudes  au  service 
des  questions  que,  dans  le  domaine  de  la  nature,  il  nous 
importe  le  plus  de  connaître.''  Nous  nous  trouvons  ici 


(  2-29  ) 

devant  le  problème  de  la  vie,  abordé  dans  tons  les 
groupes  du  règne  animal  et  recevant  de  vives  lumières  au 
cours  d'une  existence  toute  d'enthousiasme  et  de  travail. 

Les  productions  de  la  mer  furent  longtemps  le  champ 
favori  de  son  activité.  Tandis  qu'il  en  étudiait  les  groupes 
qui  nous  frappent  par  leurs  dimensions  gigantesques  et 
que,  vivantes  et  fossiles,  il  décrivait  leurs  espèces  et  leur 
distribution  sur  le  globe,  il  découvrait  chez  les  plus 
humbles  de  prodigieuses  métamorphoses. 

Et  bientôt,  son  génie  l'amenant  à  l'étude  des  parasites 
internes,  il  en  constate  de  plus  étonnantes  encore  et  des- 
tinées à  rester  à  jamais  célèbres  par  leurs  phases  d'évolu- 
tion qui  ne  peuvent  s'accomplir  que  par  des  transmigra- 
tions d'un  groupe  animal  dans  un  autre. 

Sa  puissance  d'observation,  servie  par  l'intuition  la 
plus  pénétrante,  lui  faisait  en  quelque  sorte  comman- 
der à  la  nature.  C'est  qu'aussi  il  possédait,  avec  une  force 
de  volonté  h  la  hauteur  de  ses  facultés,  cette  foi  dans  le 
travail  qui  ne  compte  ni  avec  la  fatigue  ni  avec  les 
années  et  qui  l'avait  rendu  maître  de  tous  les  moyens 
capables  de  féconder  ses  recherches. 

Ses  idées  directrices,  qu'il  détaillait  et  détachait  génia- 
lement  dans  son  enseignement  et  dans  ses  écrits,  s'em- 
paraient de  l'être  animal  dans  son  ensemble. 

Qu'il  l'examine  dans  son  organisation  et  dans  son 
développement,  il  le  fait  en  anatomiste  et  en  embryolo- 
gisle  consommé,  et  toujours  avec  un  étonnant  esprit 
d'initiative.  Qu'il  le  considère  dans  ses  rapports  avec  les 
autres  êtres,  dans  ses  affinités  et  ses  adaptations,  c'est 
en  classificaleur  à  la  grande  envergure,  aux  vues  amples, 
perspicaces,    précises,    que   lui.  donne  sa  connaissance 


(  230  ) 

approfondie  de  toutes  les  parties  du  domaine  zoologique. 
Quand  il  suit  l'animal  dans  son  genre  de  vie  et  ses  mul- 
tiples appropriations  à  son  milieu,  il  y  apporte  le  tact  le 
plus  lin  du  naturaliste  et  une  lucide  imagination  guidée 
par  la  pratique  des  constatations  exactes.  S'il  l'aborde 
enfin  sous  le  côté  de  sa  distribution  dans  le  présent  et 
dans  le  passé,  il  n'épargne  ni  démarches  ni  recherches 
pour  la  définir. 

Considérez  le  vaste  ensemble  qu'il  a  embrassé  :  dans 
chacune  des  questions  qu'il  a  résolues  se  révèle  la  ten- 
dance supérieure  du  célèbre  zoologiste,  celle  qui  donne  à 
ses  travaux  leur  caractère  dominant  et  le  plus  personnel. 

Ce  n'est  pas  tant  sur  les  rapports  généalogiques  que 
peuvent  avoir  eu  les  groupes  animaux  à  travers  le  passé 
géologique,  ce  n'est  pas  vers  les  relations  de  descendance 
que  sa  pensée  se  porte.  Son  vigoureux  esprit  se  concentre, 
ses  facultés  se  déploient  sur  l'évolution  individuelle,  sur 
le  développement  de  l'être  spécilique,  sur  ses  transfor- 
mations dans  toutes  leurs  complexités,  de  l'état  embryon- 
naire à  la  forme  adulte  et  reproductrice.  Sur  ces  questions 
qui  sont  la  base  de  nos  connaissances  zoologiques  et 
avant  lesquelles  toute  étude  de  filiation  eût  été  prématu- 
rée, il  est  sans  rival  de  génie  et  de  fécondité.  Souvent  il 
ouvre  la  voie,  toujours  il  marque  d'une  large  empreinte 
le  sujet  qu'il  y  aborde. 

Là  se  trouve  sans  conteste  la  trace  indélébile  qu'il 
laissera  dans  la  marche  de  la  science. 

Une  renommée  ainsi  acquise  s'élève  au  premier  rang 
et  y  demeure.  Voilà  ce  qu'atteste  ce  monument  et  ce  que 
la  cité  de  l'illustre  savant,  dans  son  admiration  et  sa 


(  23(   ) 
flerté,  a  voulu  commémorer,  à  l'exemple  de  nos  autres 
villes,  qui  ont  aussi  tenu  à  honneur  de  perpétuer  par  le 
bronze  la  mémoire  de  leurs  concitoyens  par  qui  ont  été 
enrichies  les  connaissances  humaines. 


NOTE    BIBLIOGRAPHIQUE. 

J'ai  l'honneur  d'offrir  à  l'Académie,  de  la  part  de 
M.  Fernand  Meunier,  Les  insectes  des  temps  secondaires, 
grand  in-8"  de  64  pages,  avec  50  planches  représentant 
des  types  d'insectes,  minutieusement  étudiés  et  photo- 
graphiés par  l'auteur. 

C'est  une  revue  critique  des  Hyménoptères,  Hémiptères, 
Orthoptères,  Coléoptères  et  Névroplères  des  musées 
paléontologiques  de  Munich  et  d'Augsbourg.  11  cite  les 
espèces  et  donne  des  détails  sur  leur  état  de  conserva- 
tion. 

Sous  le  titre  :  Quelques  mots  de  philosophie  paléo-entomo- 
logique,  l'auteur  entre  dans  des  considérations  phylogéné- 
tiques  sur  les  Arthropodes. 

M.  F.  Meunier  me  paraît  avoir  examiné  avec  soin  les 
Arthropodes  secondaires  du  Portlandien  de  la  Bavière, 
avoir  employé  très  utilement  le  subside  qui  lui  a  été 
octroyé,  et  être  digne  de  nouveaux  encouragements. 

C.  Malaise. 


(  232  ) 


RAPPORTS. 


La  Classe  ordonne  le  dépôt  aux  archives  d'une  com- 
munication de  M.  Basile  Boukteieff  {Symbole  de  la  vie  et 
de  la  créatiou),  examinée  par  MM.  Masius  et  Vanlair. 


Sur   les   surfaces  minima  réglées  et  les  surfaces    minima 
à  lignes  de  courbure  planes;  par  A.  Demoulin. 

«  M.  Demoulin  a  pris  comme  point  de  départ  de  son 
étude  cette  remarque  bien  simple  :  «  On  peut  déter- 
miner, au  moyen  de  quadratures,  les  surfaces  minima 
dont  les  lignes  asymptoliques  ou  les  lignes  de  courbure 
sont  représentées  sur  la  sphère  par  un  système  ortho- 
gonal et  isotherme.  » 

Pour  les  surfaces  gauches,  les  images  sphériques  des 
asymptotiques  sont  des  cercles,  les  plans  de  l'une  des 
familles  passant  par  un  même  diamètre.  Le  cas  d'un 
diamètre  non  isotrope  correspond  à  l'hélicoïde  (théorème 
de  Catalan)  ;  pour  un  diamètre  isotrope,  l'auteur  obtient 
une  surface  imaginaire  du  troisième  ordre  dont  le  ds"^ 
avait  été  signalé  par  Ribaucour. 

L'étude  de  la  surface  de  Ribaucour  est  faite  en  détail  ; 
elle  conduit  aux  équations  de  la  cubique  imaginaire  dont 
les  deux  courbures  sont  constantes.  Cette  courbe  avait 


(  235  ) 
été  déterminée  par  M.  Lyon,  mais  M.  Demoulin  montre 
qu'elle  dépend  d'une  constante  unique. 

Le  problème  de  la  déformation  infiniment  petite 
amène  l'auteur  à  la  considération  de  surfaces  qu'il 
appelle  quasi-moulures.  Ces  surfaces  ont  les  lignes  de 
courbure  planes,  les  plans  des  deux  systèmes  étant  res- 
pectivement parallèles  et  perpendiculaires  à  une  droite 
isotrope;  elles  comprennent,  comme  cas  particulier,  les 
surfaces  de  révolution  à  axe  isotrope,  que  M.  Demoulin 
avait  déjà  étudiées  dans  un  précédent  travail.  Plusieurs 
propriétés  intéressantes  de  cette  classe  de  surfaces  se 
trouvent  signalées. 

La  deuxième  partie  du  mémoire  se  rapporte  à  la  déter- 
mination des  surfaces  réglées,  lieux  des  milieux  des 
cordes  de  deux  courbes  dont  les  tangentes  sont  parallèles 
aux  droites  d'un  cône  de  révolution.  Le  problème  est 
rattacbé  aux  questions  précédentes  à  l'aide  d'une  trans- 
formation homographique. 

La  dernière  partie  du  travail  a  pour  objet  la  recherche 
des  surfaces  minima  à  lignes  de  courbure  planes.  Par 
l'emploi  de  la  représentation  sphérique,  l'auteur  obtient 
les  surfaces  réelles  connues,  la  surface  de  Ribaucour  et 
ses  associées,  et  enfin  une  surface  imaginaire  isolée. 

Cette  courte  analyse  sufiira,  je  l'espère,  à  montrer  l'in- 
térêt que  présentent  les  recherches  de  M.  Demoulin.  J'ai 
l'honneur  de  proposer  à  la  Classe  l'impression  du  travail 
dans  le  recueil  des  Mémoires  m-S".  » 

M.  J.  Neuberg,  deuxième  commissaire,  se  rallie  aux 
conclusions  de  son  savant  confrère. 


(  "^34  ) 


Hapitot'i  il*'    Vf.    .fffai(s<o«i,  It'oiitidtne  rontntitanii'e . 

(c  Nous  n'avons  rien  à  ajouter  à  l'analyse  si  exacte  du 
mémoire  de  M.  Demoulin  faite  par  notre  savant  collègue, 
M.  Deruyts,  premier  commissaire.  Mais  il  n'est  peut-être 
pas  inutile  d'appeler  l'attention  sur  la  méthode  de 
recherche  et  de  démonstration  employée  par  l'auteur. 
Dans  ce  travail,  le  douzième  ou  le  quinzième  peut-être 
où  M.  Demoulin  aborde  les  parties  les  plus  élevées  de  la 
géométrie  infinitésimale,  il  établit  une  foule  de  résultats 
anciens  ou  nouveaux,  avec  un  appareil  analytique  réduit 
au  minimum.  C'est  grâce  à  une  connaissance  approfondie 
des  travaux  les  plus  modernes  sur  la  théorie  des  surfaces, 
grâce  aussi  à  l'emploi  de  l'intuition  géométrique,  même 
quand  il  étudie  des  surfaces  imaginaires,  qu'il  peut  éviter 
des  calculs  qui  semblent  au  premier  abord  inévitables.  Il 
a  pu  ainsi,  dans  le  présent  mémoire,  étudier  à  fond  la 
surface  minima  dont  Ribaucour  avait  donné  les  premières 
propriétés  dans  un  beau  mémoire  couronné  par  la  Classe 
des  sciences,  et  compléter  les  recherches  de  M.  Darboux 
sur  les  surfaces  minima  dont  les  lignes  de  courbure  sont 
planes. 

Je  me  rallie  donc  bien  volontiers  aux  conclusions  de 
MM.  Deruyts  et  Neuberg.  » 

—  Ces  conclusions  sont  adoptées  par  la  Classe. 


(  233  ) 

Recherches  expérimentales  sur  la  circulation  sanguine  chez 
l'Anodonte  (travail  du  Laboratoire  de  zoologie  et  d'ana- 
tomie  comparée  de  l'Université  de  Gand);  par  Victor 
Willem  et  Achille  Minne. 

PSiipintft  fie  M.  Ijéot»   Fi'tftlei'icq,  jn'einief  coinittissati'B. 

a  MM.  Willem  et  Minne  ont  étudié  les  phénomènes 
mécaniques  de  la  circulation  du  sang  chez  l'Anodonte, 
en  se  servant  principalement  de  la  méthode  graphique, 
méthode  qui,  jusqu'à  présent,  n'avait  guère  été  appliquée 
aux  recherches  sur  la  circulation  des  animaux  inver- 
tébrés. 

Les  auteurs  ont  eu  à  surmonter  des  dilïicultés  tech- 
niques considérables,  pour  relier  des  organes  aussi  déli- 
cats que  le  cœur  et  les  vaisseaux  de  l'Anodonte,  avec  des 
manomètres  enregistreurs  appropriés.  Ils  ont  réussi  à 
obtenir  de  fort  bons  tracés  des  variations  de  pression  du 
sang.  L'étude  de  ces  tracés,  combinée  avec  les  résultats 
des  autres  procédés  d'investigation,  leur  a  permis  d'es- 
quisser un  tableau  satisfaisant  des  mouvements  du  sang 
dans  l'appareil  circulatoire  des  Mollusques  lamelli- 
branches. 

Le  très  intéressant  travail  de  MM.  Willem  et  Minne 
fait  honneur  au  Laboratoire  d'où  il  est  sorti. 

Je  n'hésite  pas  à  proposer  à  la  Classe  de  décider  l'in- 
sertion du  travail  et  des  planches  dans  les  Mémoires  in-4°, 
et  d'adresser  des  remerciements  aux  auteurs.  » 

M.  Plateau,  second  commissaire,  déclare  se  rallier 
entièrement  aux  conclusions  de  son  savant  confrère  ; 
celles-ci  sont  adoptées  par  la  Classe. 


(  236  ) 

Sur  les  dérivés   du  bromo-uUro-méthane  HojC  -  Br  (NOg)  ; 
par  J.  Maas. 

Knppoft  tle  .n.  ijUfiH  Hfurff,  pfentief  connnia»ait'e. 

Au  cours  de  mes  études  sur  les  alcools  nitrés,  j'ai  con- 
fié à  M.  J.  Maas  la  tâche,  qui  me  paraissait  devoir  être 
intéressante,  d'examiner  les  rapports  des  aldéhydes  ali- 
phatiques  avec  le  bromo-nitro-méthane  H^jC  -  Br(N02)- 
Ce  dérivé,  remarquable  par  sa  composition,  s'obtient, 
comme  on  sait,  sans  difficulté  sérieuse. 

C'est  le  résultat  de  ses  recherches  sur  cet  objet  que 
M.  Maas  présente  à  l'Académie. 

M.  Maas  a  spécialement  étudié  l'action  des  aldéhydes 
inférieures,  le  méthanal  et  l'éthanal,  sur  le  bromo-nitro- 
méthane. 

Suivant  la  règle  que  j'ai  formulée,  la  capacité  de  con- 
densation aldéhydique  du  méthane  bromo-nitré  doit  être 
égale  à  deux  seulement,  celle  du  nitro-méthane  lui-même, 
H3C-  NO2,  étant  égale  à  trois.  En  fait,  il  en  est  ainsi. 

M.  Maas  a  constaté  encore  que  si  la  présence  du  brome 
a  diminué  la  capacité  réactionnelle  du  nitro-méthane, 
elle  en  a  modifié  également  l'intensité.  Alors  qu'elle  est 
assez  vive  dans  le  nitro-méthane  pour  ne  pouvoir  s'exer- 
cer vis-à-vis  du  méthanal  qu'en  une  seule  fois  et  d'une 
manière  complète,  elle  est  assez  déprimée  dans  le  nitro- 
méthane  monobromé  pour  ne  s'exercer  que  successive- 
ment, en  deux  temps,  d'une  manière  incomplète  d'abord, 
d'une  manière  totale  ensuite.  Il  en  résulte  deux  alcools 
nitrés  : 

a)  Vélhanol  bromo-nitré  2-2  (H0)CH.2  -  CH  -  Br(NOc>); 


(  237  ) 

b)  Le propanediol  bromo-nitré  2-2  (H0)CH2-C-Br(N02) 
-  CH2(0H). 

L'aptitude  à  la  condensation  est  moins  développée  dans 
l'éthanal  H5C  -  CH  =  0  que  dans  le  méthanal  CH^  =  0. 
Aussi  M.  Maas  n'est-il  parvenu  à  en  fixer  qu'une  seule 
molécule  sur  le  méthane  bromo-nitré.  Il  se  l'orme  ainsi 
de  Valcool  hopropijlique  bromo-nitré  2-2  H5C-CH(0H) 
-CH-Br(N02). 

M.  Maas  fait  connaître  enfin  les  produits  mixtes  de  la 
condensation  du  bromo-nitro-méthane  avec  le  méthanal 
et  l'éthanal  simultanément,  ou  plutôt  tout  à  la  fois.  Il 
résulte  de  là  un  bulanediol  l-o  bromo-nitré  2-2  de  la 
formule 

(H0)CH2  -  CBr(NO„)  -  CH  (OH)  -  CH3. 

Selon  M.  Maas,  ce  composé,  qui  cristallise  nettement 
et  fond  à  94''-95°,  est  toujours  identique  à  lui-même,  quel 
qu'en  soit  le  mode  de  formation,  qu'il  résulte  de  l'addi- 
tion de  Véthanal  à  Yétimnol  bromo-nitré 

H5C-CH=0     +     CH-Br(NO) 
I 
CHalOH) 

ou  de  l'addition  du  méthanal  au  propanol  2  bromo-nitré 
1-1 

CH  -  Br(NO,) 

CH(OH)  +     HX  =  0. 

I 
CHj 

L'ordre  de  substitution  des  radicaux  X  et  X'  à  la  place 
des  atomes  d'hydrogène  7  et  d-  du  méthane  n'exerçant 


(  238  ) 

y    0 
aucune  influence  sur  la  nature  du  dérivé  >  C  X  X'   qui 

en  est  le  produit,  il  s'ensuit  que  ces  atomes  d'hydrogène 
sontfonctionnellenient  équivalents  et,  par  conséquent,  que 
les  unités  d'action  chimique  5  et  4  de  l'atome  du  carbone 
sont  identiques  en  valeur.  M.  Maas  paraît  ne  pas  avoir 
aperçu  cette  conséquence  de  ses  constatations  expérimen- 
tales; elle  mérite  sans  doute  que  je  la  mette  en  lumière, 
car  j'y  vois  une  confirmation,  d'autant  plus  importante 
qu'elle  peut  sembler  inattendue,  du  travail  auquel  je  me 
suis  livré  autrefois  (*)  pour  démontrer  l'identité  des  qua- 
tre unités  d'action  chimique  de  l'atome  du  carbone. 

Les  corps  signalés  par  M.  Maas  sont  intéressants  au 
point  de  vue  physiologique.  Tous  se  font  remarquer,  quoi- 
que à  des  degrés  divers,  par  leur  action  irritante,  corro- 
sive,  sur  la  peau  et  les  muqueuses.  11  en  est  certains  dont 
l'intensité  de  cette  action,  due  évidemment  à  la  coexis- 
tence des  radicaux  Br,  NOg  et  OH,  rend  le  maniement 
désagréable  et  dangereux. 

Parmi  ces  composés,  je  dois  relever  particulièrement 
le  gli/col  trimèfiuj Ionique  bromo-niiré  2-2 

I1,C-0H 

,  ^  NO, 

HjC  -  on. 

C'est  un  beau  corps  solide,  fusible  à  lOG^-lOT",  sus- 
ceptible de  former  des  cristaux  de  grande  dimension, 
bien  conformés,  translucides. 


(*)  Voir  Bull,  de  VAcad.  roy.  de  BeUjique,  3"  sér.,  t.  XII,  p.  644 
(année  1886);  3"  série,  t  XV,  p.  333  (année 


(  239  ) 

On  voit  tout  de  suite,  à  rinspeclioii  de  la  formule  qui  le 
représente,  combien  te  corps  est  voisin  de  la  dioxij-acé- 
tone  et  de  la  glycérine  : 


H2C-OH  ll,C-OH 

I  I 

CO  HC  -  OH 

I  I 

ILC-OH  II.C-OH 


J'ai  déjà  constaté  ce  rapprochement  l'an  dernier  (*). 
J'ai  la  conliance  qu'il  sera  possible  de  transformer  ce 
glycol  bromo-nitré  en  dioxy-acélone. 

Ainsi  sera  réalisée  la  synthèse  totale  et  directe  de  la 
glycérine  par  la  soudure,  dans  une  réaction  unique,  des 
trois  atomes  de  carbone  qui  constituent  la  molécule  de 
celte  combinaison  si  éminemment  importante  à  tous  les 
points  de  vue. 

L'analyse  que  je  viens  de  faire  du  travail  de  M.  Maas 
suffit,  quelque  sommaire  qu'elle  soit,  pour  montrer  l'in- 
térêt que  présente  ce  travail  et  l'importance  même  que 
l'on  y  peut  attacher  au  point  de  vue  général. 

C'est  assez  dire  que  je  propose  avec  plaisir  à  l'Acadé- 
mie de  lui  donner  place  dans  son  BuUelin.  » 

Cette  proposition,  à  laquelle  se  rallie  M.  Spring,  est 
adoptée  par  la  Classe. 


(n  Recueil  des  travaux  chimiques  des  Pays-Bas  et  de  la  Belgique, 
t.  XVI,  p.  250  (1897),  et  Bulletin  de  la  Société  chimique  de  Berlin, 
t.  XXX,  p.  2206  (1897). 


(  240  ) 

Sur  la  condensation  de  l'aldéhyde  benzoïque  el  de  la  mono- 
chloracélone;  parJ.  Gliysen. 

itnp/'ot'l  de  .?#.  IV,  S^finy,  iiretuiff  cotnmiasait'^. 

ce  En  traitant  un  mélange   d'aldéhyde   benzoïque   et 

d'acétone  par  l'acide  chlorliydrique,  Claisen  et  Claparède 

ont  obtenu,  il  y  a  quelques  années,  la  dibenzylidène-acé- 

tone 

(CeH,.CIl),=  (CH),-CO. 

La  formation  de  ce  corps  a  démontré  l'égale  aptitude 
à  réagir  des  deux  groupes  CH,,  de  l'acétone.  M.  J.  Ghysen 
s'est  proposé  de  déterminer  dans  quelle  mesure  cette 
égalité  est  altérée  quand  l'un  des  groupes  CH5  est  devenu 
CH2CI.  L'expérience  a  prouvé  que,  dans  ces  conditions, 
il  ne  se  formait  plus,  pour  ainsi  dire,  que  de  la  monoben- 
zylidène-acétone  monochlorée;  la  présence  du  chlore 
supprime  à  peu  près  l'aptitude  du  groupe  CH^CI  à  se 
condenser  avec  l'aldéhyde  benzoïque. 

J'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  Classe  l'insertion  de  la 
note  de  M.  Ghysen  dans  le  Bulletin  de  la  séance.  » 

M.  Henry,  second  commissaire,  approuve  cette  propo- 
sition, qui  est  adoptée  par  la  Classe. 


Les  tremblements  de  terre  et  les  marées  ; 
par  M.  V,  de  Ziegler. 

gtapitoi'l   lie  n.   Folie,   pi-eiitiet'    coinntiasaire. 

«  Le  nouveau  travail  de  M.  de  Ziegler  ne  renferme 
aucun  fait  ni  aucune  idée  essentiellement  nouvelle. 
L'auteur  y  affirme  que  la  terre  ferme,  comme  l'Océan, 


(241  ) 

est  sujette  à  des  marées  plus  ou  moins  intenses,  suivant  le 
degré  de  rigidité  des  roches  qui  la  composent,  et  que  les 
tremblements  de  terre,  à  l'exception  de  ceux  qui  sont  le 
résultat  d'une  action  volcanique  ou  d'un  effondrement, 
proviennent  des  attractions  luni-solaires. 

Ce  travail  est  intéressant  à  lire  et  pourrait  paraître 
avantageusement  dans  une  revue  scientifique. 

Nous  ne  pensons  pas  qu'il  puisse  être  publié  par  l'Aca- 
démie. » 

M.  Van  der  Mensbrugghe,  second  commissaire,  parta- 
geant l'avis  de  M.  Folie,  la  Classe  décide  le  dépôt  aux 
archives  de  la  note  de  M.  de  Ziegler. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 

Sur  divers  nitriles-alcools  penta-  et  hcxacarbones  (*); 
par  Louis  Henry,  membre  de  l'Académie. 

A.  —  Composés  en  C5. 

Aux  trois  variétés  sous  lesquelles  existe  et  les  seules 
sous  lesquelles  peut  exister  le  pentane  C5H12  : 

Pentaric  normal        CH3  -  CH^  -  CH.  -  CH»  -  CH3; 

—  secondaire  CHs^^u     m      rri 

—  terliaire      CH3 

CH3->C-CH,, 


(*)  Voir  pour  les  analyses  et  les  développements  mon  mémoire  : 
Sur  les  nitriles-alcools  aliphatiques  et  leurs  dérivée,  inséré  dans  le. 
tome  LVIl  des  Mémoires  in-S"  de  l'Académie. 

3™*    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  17 


(  212  ) 
correspondenl  d'assez  nombreux  nitriies-alcools,  àsavoifi 

Quatre  au  pentane  normal  ; 

Sept  au  penlane  secondaire  ; 

Un  au  pentane  tertiaire. 

De  ces  douze  composés  que  prévoit  la  théorie,  trais 
seulement  ont  été  signalés  jusqu'ici,  mais  peu  étudiés. 
Un  quatrième,  de   la  formule  CN  -  CH-CH(OH)  -  CH3, 

CH3 

est  représenté   par  son  acétone   CN  -  CH  —  CO-CH5, 

CHô 

produit  de  l'action  de  l'acétone  méthyl-éthylique  (3  mono- 
chlorée  CH^  -  CHCl  -  CO  -  CH5  sur  le  cyanure  de  potas- 
sium (*). 

Dans  l'étude  des  nitriies-alcools  en  C5  que  j'ai  entre- 
prise, j'ai  commencé  par  examiner  ceux  de  ces  corps 
dont  on  a  déjà  parlé. 

Dans  une  précédente  communication,  je  me  suis  occupé 
de    l'un    d'entre    eux,    la    cyanhydrine  isobutylidénique 

ru'^  >  CH  -  CH(OH)  -  CN,   produit   de  l'addition  de 

^  CH- 

l'acide  cyanliydrique  à  l'aldéhyde  isobutyrique  ^u"*  >  CH 

- CH = d  n. 

Je  suis  parvenu  depuis  lors  à  me  procurer  les  deux 
autres  termes  :  la  cyanhydrine  butylidénique  CN-CH(OH} 
-  CH2  -  CH2  -  CH3  et  la  cyanhydrine  méthyl-élhyl-acéto- 

CH 
nique  CN  -  C(OH)  <  p  i|  •  J'en  ai  fait  l'étude  au  même 

point  de  vue  que  les  autres  composés  de  cette  sorte. 


(*)  Vladesco,  Bulletin  de  la  Société  chimique  de  Paru,  t.  VI, 
p.  814  (i891). 

(")  Bulletin  de  VAcad.  roy.  de  Belgique,  3«  série,  t.  XXXVI,  p.  85 
1898). 


(  245  ) 

Cyanfnjdrine  hutylidénique  normale 
CN  -  CH(OH)  -  CH,  -  CH,  -  CH^. 

On  pourrait  l'appeler  aussi  bien  ni trilepropyl-gly colique. 

Ce  produit  résulte  de  la  fixation  de  l'acide  cyanhy- 
drique  sur  l'aldéhyde  butyrique  normale. 

Cette  synthèse  a  été  réalisée  dès  1883  (*)  et  1884(**), 
dans  le  but  d'en  transformer  le  produit  en  acide  «  oxy- 
valérique  OC  (OH)  -  CH{OH)  -  CH2  -  CH2  -  CH5. 

La  seule  indication  qui  constitue  en  ce  moment  le 
signalement  de  ce  corps  est  son  état  physique  et  son 
insolubilité  dans  l'eau.  Depuis  cette  époque,  il  n'a  plus 
été  question  de  ce  composé. 

La  cyanhydrine  hutylidénique  normale  CN  -  CH(OH) 
-  CH2  -  CH2  -  CH5  constitue  un  liquide  incolore,  mobile, 
d'une  agréable  odeur  fraîche,  d'une  saveur  piquante. 

Sa  densité  à  24°  est  égale  à  0.9367. 

Elle  est  insoluble  dans  l'eau  qu'elle  surnage,  mais  elle 
est  soluble  dans  l'alcool,  l'éther,  etc. 

On  l'a  soumise  à  l'action  de  la  chaleur,  la  pression 
étant  770  millimètres.  Le  thermomètre  marque  145° 
quand  la  distillation  commence  à  s'effectuer,  la  boule 
plongeant  dans  le  liquide;  la  température  s'élève  jusqu'à 
170°.  Plongé  dans  la  vapeur,  le  thermomètre  monte 
jusqu'à  192°,  où  tout  passe. 

Le  pentachlorure  de  phosphore  réagit  intensément  sur 


(*j  A.-G  Menozzi,  Gazette  chimique  italienne,  t.  XIV,  p.  16. 
(*■)  WiLH.  JusLLN,  Bulletin  de  la  Société  chimique  de  Berlin,  t.  XVII, 
p.  2505. 


(  244-  ) 

la  cyanliydrine  butylidéiiique.  Il  en  résulte  du  nitrile 
valérique  normal  a.  chloré  CN  -  CHCI  -  CHo  -  CHg  -  CH3. 
Le  rendement  de  l'opération  est  presque  intégral. 

Le  nitrile  a.  chloro-valérique  CN  -  CHCI  -  CH^  -  CH2  -  CH5 
constitue  un  liquide  mobile,  incolore,  d'une  odeur 
fraîche,  d'une  saveur  douce  et  piquante. 

Sa  densité  à  24»  est  égale  à  0.9995. 

Il  est  insoluble  dans  l'eau,  mais  soluble  dans  l'alcool 
et  l'éther. 

Il  bout,  sous  la  pression  de  764  millimètres,  à  160°. 

L'acide  HCl  concentré  le  dissout  et  le  transforme, 
sous  l'action  de  la  chaleur,  en  chlorure  ammonique  et  en 
acide  a  chloro-valérique  CO  (OH)  -  CHCI  -  CH^  -  CHg  -  CH3, 
que  l'on  peut  extraire  de  sa  solution  aqueuse  par  l'éther. 

Chauffé  avec  de  l'acide  sulfurique  et  de  l'alcool  méthy- 
lique,  il  se  transforme  en  chloro-valérate  de  méthyle 
0C(0CH5)  -  CHCI  -  CH2  -  CH2  -  CH5,  éb.  160%  sous  la 
pression  de  764  millimètres. 

Distillée  avec  de  ['anhydride  phosphorique,  au  bain 
d'huile,  la  cyanhydrine  butylidénique  perd  les  éléments 
d'une  molécule  d'eau  et  se  transforme  en  nitrile  non 
saturé,  le  nitrile  propylidène-acétique  CN  -  CH  =  CH  -  CH2 
-CH5...,  que  l'on  pourrait  appeler  aussi  bien  (3  éthijl- 
acryliqiie  ou  y  méthyl-crotonique . 

Cette  opération  fournit  un  produit  d'une  grande 
pureté,  mais  le  rendement  en  est  médiocrement  avan- 
tageux. 

Le  nitrile  propylidène-acétique  CN  -  CH  =  CH  -  CHg  -  CH3 
est  analogue  en  tous  points  à  son  homologue  inférieur,  le 
nitrile  crotonique  CN  -  CH  =  CH  -  CH3. 

C'est  un  liquide  incolore,  mobile,  d'une  odeur  agréable, 
pénétrante,  comme  celle  du  nitrile  crotonique,  d'une 
saveur  piquante. 


(  245  ) 

Sa  densité  à  21"  est  égale  à  0.8239. 

Il  est  insoluble  dans  l'eau,  mais  soluble  dans  l'alcool 
et  l'éther. 

Il  bout,  sous  la  pression  de  702  millimètres,  fixe  à 
I40  comme  le  nitrile  valérique  normal  CN  -  CH^  =  CH2 
-CH2-CH5.  Densité  de  vapeur  trouvée,  2. 75  ;  calculée,  2. 79. 

C'est  l'homologue  immédiat  du  nitrile  crolonique  CN 
-CH=CH-CH5,  éb.  llS^-lig".  Aussi  observe-t-on 
entre  leurs  points  d'ébullition  la  relation  ordinaire  d'en- 
viron 20". 

Le  chlorure  d'acétijle  réagit  fortement  et  dès  la  tempé- 
rature ordinaire  sur  la  cyanhydrine  butylidénique.  Il  en 
résulte  l'acétate  correspondant  CN  -  CH  (C.2H5O2)  -  CH^ 
-  CHç,  -  CH5. 

Cet  acétate  constitue  un  liquide  incolore,  mobile, 
d'une  odeur  agréable,  fraîche,  d'une  saveur  étrange, 
amère. 

Sa  densité  à  24"  est  égale  à  0.9696. 

Il  est  insoluble  dans  l'eau,  mais  soluble  dans  l'alcool 
et  l'éther. 

Il  bout  sans  décomposition  et  d'une  manière  fi.\e  à 
194%  sous  la  pression  de  762  millimètres. 

Son  homologue  supérieur,  l'acétate  de  la  cyanhydrine 
propylidénique  CN  -  CH  (C2H3O2)  -  CH^  -  CH3,  bout  à 
485°-186°  sous  la  pression  ordinaire. 

A  l'instar  de  ses  congénères,  la  cyanhydrine  butylidé- 
nique réagit  aisément  sur  les  bases  amidées  H^NX  et 
imidées.  Le  dérivé  correspondant  à  la  diméthylamine 

CN-Cll-Cn, -CH..-CH5 

I 

bout  à  17o°-176''  sous  la  pression  ordinaire. 


(  246  ) 


Nitrile  méthyl-étliyl-giy colique 
ou  cyanhydrine  méthyl-éthylique  acétonique 

CN-C(OH)<CH=_^^^ 

Ce  corps  est  le  produit  de  l'addition  de  l'acide  cyan- 
hydrique  HCN  à  la  célone  méthyl-éthylique  CH3  -  CO  -  CH^ 
-  CH3. 

Quoique  inconnu  comme  tel,  ce  composé  est  relative- 
ment ancien  :  son  existence  remonte  à  1880.  Il  a  été 
signalé  par  M.  Bocking,  élève  au  laboratoire  de  M.  Wis- 
licenus,  à  Wùrzbourg  (*). 

M.  Bocking  s'est  borné  à  en  déterminer  la  formation 
à  l'aide  de  ses  générateurs,  pour  le  transformer  de  suite, 
sans  l'isoler,  en  son  acide,  l'acide  méthyl-élhyl-glycolique 

PH 
(HO)CO  -  C(OH)  <  pjj^  _  ^^  .  Aussi  ne  donne-t-il  aucune 

indication  concernant  sa  composition  ni  ses  propriétés, 

Lenitrile  gly colique méthyl-éthy lé Œ  -  C(OH)  <  ^.„^  pu 

est  en  tous  points  analogue  à  la  cyanhydrine  acétonique 

CN  -  C(OH)  <  pu^  ,  son  homologue  supérieur. 

C'est  un  liquide  incolore  ou  faiblement  jaunâtre, 
mobile,  d'une  odeur  agréable,  légèrement  prussique, 
d'une  saveur  piquante  et  amère. 

Sa  densité  à  24°  est  égale  à  0.9212. 

L'eau  le  dissout;  le  carbonate  bipotassique  l'en  sépare 


(*)  Liebig's  Annalen  tlcr  Chemie,  t.  CCIV,  p.  18. 


(  247  ) 

sous  forme  d'huile  surnageante.  Il  est  également  soluble 
dans  l'alcool,  l'éther,  l'acétone,  etc. 

Soumis  à  l'action  de  la  chaleur,  la  pression  atmo- 
sphérique étant  de  762  millimètres,  il  commence  à  bouillir 
à  90°;  le  thermomètre,  plongé  dans  la  vapeur,  s'élève 
graduellement,  pour  rester  fixe  à  480%  où  la  presque 
totalité  du  liquide  a  passé. 

La  densité  de  la  vapeur  de  ce  nitrile-alcool  a  été 
déterminée  dans  l'appareil  de  Hoffmann. 

On  a  trouvé,  à  130",  dans  la  vapeur  de  l'alcool  amy- 
lique,  2.84;  la  densité  calculée  est  3.42,  ce  qui  corres- 
pond à  une  dissociation  de  33.9  °/o  (*)• 

Le  chlorure  d'acélyle  ne  réagit  que  faiblement  sur  le 
nitrile  glycolique  mélhyl-éthylique.  Il  s'y  dissout  d'abord  ; 
en  chauffant  légèrement  le  mélange  dans  l'eau  tiède,  de 
l'acide  chlorhydrique  se  dégage  et  il  se  forme  l'acétate 
que  l'on  obtient  aisément  à  l'état  de  pureté  par  la  distil- 
lation. 

\J acétate  nitrilo-giycolique  méthyl-éthylique 

CN-C(C,H,0,)<^H=_^^^ 

constitue  un  liquide  incolore,  mobile,    d'une  agréable 
odeur  fraîche,  d'une  saveur  piquante. 


(*)  11  est  assez  remarquable  que  le  nitrile  dimétliyl-glycolique 
GN-C(0H)-(GH3)2,  quoique  plus  simple  de  composition,  se  dissocie 
plus  aisément  que  son  iiomologue  supérieur.  A  130",  sa  densité  de 
vapeur,  déterminée  dans  l'appareil  de  Hoffmann,  est  2.13,  ce  qui 
correspond  à  une  dissociation  de  54.8  •/o  ;  à  ISS",  dans  la  vapeur 
d'aniline,  cette  densité  s'est  abaissée  à  2.05,  ce  qui  correspond  à  une 
dissociation  de  60.3  «/o. 

La  dissociation  des  nitriles  d'ordre  aldcfiydiqne  et  d'ordre  acéto- 
nique  est  une  question  qui  mérite  d'être  étudiée  en  particulier. 


(  248  ) 

Sa  densité  à  24°  est  égale  à  0.9629. 

Il  est  insoluble  dans  l'eau  qu'il  surnage,  soluble  dans 
l'alcool  et  l'éther. 

il  bout  à  195°  sous  la  pression  de  764  millimètres. 

Le  nitrile  glycolique  méthyl-éthylique  se  dissout  dans 
l'acide  chlorhydrique  concentré  en  s'échauffant  laible- 
ment.  Le  liquide,  après  avoir  été  chauffé  pendant  quelque 
temps,  abandonne  par  le  refroidissement  une  belle  cris- 
tallisation de  chlorure  ammonique;  il  reste  en  dissolution 

de  Vacide  hydroxy-vaUrique  p  u^>  C(OH)  -  CO(OH)  que 
l'on  peut  extraire  par  l'éther. 

Au  contact  de  Vanhydride  phosphorique  P^Og,  le  nitrile 
glycolique  méthyl-éthylique  s'échauffe  fortement.  Il  est 
bon  de  refroidir  et  de  n'introduire  l'anhydride  phospho- 
rique dans  l'alcool  que  successivement  et  par  petites 
portions.  Soumise  à  la  distillation  au  bain  d'huile,  la 
masse  fournit,  sans  se  charbonner,  un  liquide  incolore, 
insoluble  dans  l'eau,  odorant  comme  les  nilriles  non 
saturés  en  général. 

Ce  liquide  ne  présente  pas  à  la  distillation  la  même 
fixité  dans  le  point  d'ébullition  que  le  produit  qui  pro- 
Tient  de  la  déshydratation  d'une  cyanhydrine  acétonique 

CH 

symétrique  telle  que  CN  -  C(OH)  <  ^.jt^.  Il  est  probable 

que  la  déshydratation  qui  se  fait,  selon  toute  analogie, 

OH 

surtout  aux  dépens  du  système  -  C  <  pji   _  çri^ ,  se  fait  en 

même  temps  pour  une  certaine  proportion  aux  dépens  du 
système  -  L  <  pjj_. 

Quoi  qu'il  en  soit,  on  parvient,  sans  de  trop  grandes 


(  249  ) 
diÛicultés,  à  retirer  de  ce  produit  brut  le  nitrile  a  méthyl- 
crotonique  CN  -  C  =  CH  -  CH5 . 

CH3 

Celui-ci  constitue  un  liquide  incolore,  mobile,  d'une 
agréable  odeur,  d'une  saveur  amère  et  piquante; 

Il  est  insoluble  dans  l'eau,  soluble  dans  l'alcool  et 
l'éther. 

Sa  densité  à  24°  est  égale  à  0.8143. 

Il  bout  sous  la  pression  de  767  millimètres  à  124''-125''. 
Densité  de  vapeur  trouvée,  2.75;  calculée,  2.79. 

Ce  composé  jouit  du  pouvoir  additionnel,  notamment 
vis-à-vis  du  brome. 

Le  pentaclilorure  de  phosphore  PCI5  attaque  vivement 
la  cyanhydrine  méthyl-éthylique  acétonique.  Après  la 
destruction  par  l'eau  de  l'oxychlorure  de  phosphore 
formé,  l'éther  extrait  du  liquide  acide  un  produit  qui, 
après  l'expulsion  de  ce  dissolvant,  se  présente  sous 
forme  d'un  liquide  exhalant  fortement  l'odeur  des 
nitriles  non  saturés.  Distillé  sur  de  la  potasse  caustique 
en  poudre,  ce  produit,  mélange  d'au  moins  deux  corps, 
se  transforme  presque  intégralement  en  nitrile  a  méthyl- 
crotonique 

CN-C=iCH-CH3,  éb.  124''-h2o\ 
I 
CHs 

que  je  viens  de  décrire,   en   le   rattachant  à   l'action 
de  P2O5. 

Cette  cyanhydrine  ne  réagit  que  faiblement  avec  les 


(  250  ) 

irases  amidées  et  imidées.  Il  est  nécessaire  de  chauffer. 
Son  dérivé  avec  la  di-raéthylamine 

^^^    V      CH,  -  CH5 

N(CH3), 

bout  à  174°  sous  la  pression  de  762  millimètres. 

Avec  le  nitrile  acrylique  (3  himéthylé  CN  -  GH  =  C  <  r-o^ 

correspondant  à   la  cyanhydrine    isohutylidénique    CN  - 

PH 
CH{OH)  -  CH  <  pjj^,  que  j'ai  décrit  précédemment  (*), 

les  deux  nitriles  non  saturés  en  C^  que  je  viens  de  faire 
connaître,  complètent  la  série  des  dérivés  méthylés  du 
nitrile  cr otonique. 

CN-CH  =  CH-CHs. 

CN-CH-CH-CH,        Éb.         118" 

a       p      r. 

CN-C  =  CH-CH5  124»-lâ5» 

a  CH, 

CN-C  =  C-CH3  140"-142» 

P  CH, 

CN-C(I  =  CH-CH, -CH3  140» 


(•)  Bull,  de  l'Acad.  roij.  de  Belgique,  S^  série,  t.  XXXVI,  p.  35  (1898). 


(  251  ) 
A  cette  série  correspond  celle  des  dérivés  saturés  de 
même  ordre  : 


CN  -  CHj  -  C\U  -  CH3 

Eb. 

H8» 

a       p        r. 

CN  -  GH  -  CH3  -  CH, 

1 

425< 

a  CH3 

CN  -  CH,  -  CH  -  CH, 

1 

129« 

p  eu. 

CN  -  CHj  -  CH,  -  CH, 

1 

140' 

r  CH5 

On  aperçoit  ainsi,  d'une  manière  évidente  : 

a.  La  différence  qui  existe  entre  les  nitriles  saturés  et 
non  saturés  quant  à  l'intluence  exercée  sur  la  volatilité 
par  la  méUiylisalion  ; 

b.  La  relation  qui  existe  entre  la  volatilité  et  le  voisi- 
nage plus  ou  moins  immédiat  du  composant  -  CN  et  du 
substituant  CH3. 

Un  nitrile,  alcool  secondaire,  en  C5,  est  représenté  par 
son  acétone,  la  cyanacétone  a  mélhylée 

CN-CH-CO-CH3        Éb      I56«, 
CH, 

produit  de  l'acétone  méthyl-éthylique  monochlorée  secon- 


(  252  ) 

daire  CH3  -  CHCl  -  CO  -  CH^  sur  le  cyanure  de  potas- 
sium KCN  (*). 

Il  est  à  penser  que  l'hydrogénation  de  ce  composé, 
dans  des  conditions  convenables,  fournira  l'alcool  cor- 
respondant 

Ci\-CH-CH(0H)-CH5, 

I 

le  dérivé  a  mélliylé  de  l'alcool  cyano-propylique  secon- 
daire CN  -  CH2  -  CH(OH)  -  CH-  que  j'ai  décrit  précédem- 
ment (**). 

B.  —  Composés  en  Cg. 

L'hexane  CgHii  est  représenté  par  cinq  variétés  iso- 
mères auxquelles  correspondent  huit  nitriles  simples 
X5H11  -  CN  et  dix-sept  alcools  monohydroxylés  CqE[^ 
-  OH.  On  devine  que  le  nombre  des  nitriles-alcools  hexa- 
carbonés  CgHiolOH)  -  CN  est  plus  considérable  encore  : 
la  théorie  en  prévoit  l'existence  de  trente  et  un.  Je  n'ai 
pas  besoin  de  dire  que  l'on  est  bien  loin  de  les  connaître. 

Dans  une  précédente  communication  (***),  je  me  suis 
occupé  de  l'un  d'entre  eux,  la  cijanlujdrine  amijlidénique 

CN  -  CH(OH)  -  CH.2  -  CH  <  ^{j^. 

Depuis  lors,  je  suis  parvenu  à  m'en  procurer  deux 
autres  dont  j'ai  fait  l'examen. 


(*)  Démètre  Vi.adesco,  Bulletin  de  la  Société  chimique  de  Paris, 
3«  série,  l.  VI,  p.  814  (année  1891). 
(**)  Bull,  de  VAead.  roy.de  Belgique,  3*  série,  t.  XXXV,  p.  173  (1898). 
C")Bull.  de  l'Acad.  rotj.deBelgiqm,  3e  série,  t.  XXXVI,  p.  28  (1898). 


(  253  ) 

Cyanhydrine  diéthyl-acétonique  ou  nitrile  diéthy[-gly colique 
CN-C(OH)  — (CH,-CH5^,. 

La  cyanhydrine  diéthyl-acétonique  a  été  préparée  pour 
la  première  fois  par  MM.  Tiemann  et  Friedlànder  (*). 

Elle  résulte  de  l'addition  de  l'acide  cyanhydrique  à  la 
diéthyl-acétone  C^U^^  -  CO  -  CH3. 

C'est  un  liquide  d'aspect  plus  ou  moins  huileux,  fai- 
hlement  jaunâtre,  d'une  agréahle  odeur,  d'une  saveur 
piquante. 

Sa  densité  à  22°  est  égale  à  0.9326. 

Elle  est  insoluble  dans  l'eau;  l'alcool,  l'éther,  l'acé- 
tone, etc.,  la  dissolvent  aisément. 

Tout  en  se  dissociant  en  partie  sous  l'action  de  la 
chaleur,  elle  manifeste  une  notable  stabilité,  eu  égard  à 
sa  constitution.  La  boule  du  thermomètre  étant  plongée 
dans  le  liquide,  elle  commence  à  distiller  vers  130";  celle- 
ci  plongée  dans  la  vapeur,  la  distillation  s'est  opérée  en 
presque  totalité  à  184°. 

Le   chlorure   d'acélyk    la   transforme   en  son   acétate 

CN  -  C  (C2H3OC2)  <  r^u\  liquide  insoluble  dans  l'eau, 

densité  à  22°  égale  à  0.9612,  bouillant  à  212°  sous  la 
pression  de  762  millimètres. 

Distillée  avec  de  l'anhydride   phosphorique,   elle  se 

(*)  Bulletin  de  la  Société  chimique  de  Berlin,  t.  XIV,  p.  1974  (1881). 


(  254  ) 
déshydrate  et  se  transforme  en  nitrile  «  éthyl-crotonique 

CN-C  =  CH-CH3, 
I 
C2H5 

liquide,  incolore,  insoluble  dans  l'eau,  d'une  odeur 
agréable,  densité  à  22°  égale  à  0.8343,  bouillant  à  143°- 
145°  sous  la  pression  ordinaire. 

Le  pentachlorure  de  phosphore  PCI5  l'attaque  vivement. 
Le  produit  immédiat  de  cette  action  devrait  être  le  dérivé 

C  Ho 

chlorhydrique  CN  -  CCI  <  p^i/,  mais  celui-ci  manque 

de  stabilité  et  perd  de  l'acide  chlorhydrique.  Ce  produit 
brut,  distillé  sur  de  la  potasse  caustique  sèche,  pulvéru- 
lente, se  transforme  en  nitrile  a  éthyl-crotonique,  iden- 
tique à  celui  qui  provient  de  l'action  de  l'anhydride 
phosphorique. 

Cette  cyanhydrine  ne  réagit  que  faiblement  avec  les 
bases  amidées  et  imidées.  Il  est  nécessaire  de  chauffer  au 
bain  d'eau.  Le  dérivé  correspondant  à  la  diméthylamine 

CN  -  C  <  JJ'î!'' 

N(CH3)* 

bout  à  176"-!  77''  sous  la  pression  de  764  millimètres. 

Le  nitrile  diéthyl-glycolique  se  dissout  dans  l'acide 
HCl  concentré.  Cette  solution,  chauffée  au  bain  d'eau, 
abandonne  par  le  refroidissement  des  cristaux  de  chlor- 
hydrate ammonique.  Vacide  diélhyl-gli/ colique  formé 
(HO)OC  -  C(OH)  -  (C2H5)2  reste  en  dissolution.  On  peut 
l'extraire  par  l'éther. 


(  255  ) 

Cyanhydrine  méthyl-isopropy ligne   acétonique 
ou  nitrile  méthyl-isopr opyl-gly colique 

CN-C(0H)<^J!^/CH8. 

Cette  cyanhydrine  résulte  de  la  fixation  de  l'acide 
cyanhydrique  sur  l'aldéhyde  méthyl-isopropylique  CH5 

-  CO  -  CH  <  ^_  (*). 

Elle  constitue  un  liquide  quelque  peu  épais,  faiblement 
jaunâtre,  d'une  agréable  odeur,  d'une  saveur  très 
piquante. 

Elle  est  insoluble  dans  l'eau  qu'elle  surnage,  soluble 
dans  l'alcool  et  l'éther. 

Sa  densité  à  18°  est  égale  à  0.9249. 

Elle  subit,  comme  ses  congénères,  sous  l'action  de  la 
chaleur,  le  phénomène  de  la  dissociation.  Soumise  à  la 
distillation,  sous  la  pression  de  764  millimètres,  elle 
commence  à  laisser  passer  du  liquide  à  145*',  la  boule  du 

(*)  Cette  cyanhydrine,  qui  n'a  pas  été  signalée  jusqu'ici,  a  été 
préparée,  à  ma  demande,  par  la  maison  Kahlbaum,  de  Berlin. 

Je  tenais  à  la  posséder  à  cause  de  sa  composition.  Renfermant  le 

système  CN- C(OH)<  ^jj^  ,  elle  devait  me  permettre  d'arriver  au 

système  CN  -  C  =  C  <  sans  hydrogène,  renfermé  dans  le  nitrile 

acrylique  triméthylé 

CN-C  =  C<^y5. 

CH3 

Les  autres  cyanhydrines  d'ordre  uldéhydiqiie  et  d'ordre  acétonique 
que  j'ai  mises  en  réaction  m'ont  été  également  fournies  parla  maison 
Kahlbaum.  Il  m'est  agréable  de  constater  que  tous  ces  produits 
étaient  d'une  pureté  irréprochable. 


(  256  ) 

thermomètre  étant  plongée  dans  le  produit  lui-même.  A 
182",  le  thermomètre  plongé  dans  la  vapeur,  les  trois 
quarts  environ  du  liquide  passent. 

Cette  cyanhydrine  réagit  d'une  manière  très  nette  avec 
le  pentachlorure  de  phosphore.  Le  dérivé  chlorhydrique 
qui  en  résulte  immédiatement, 

CN-CCl     CH-ICH,),, 

I 

perd  déjà  de  l'acide  HCl  dans  les  conditions  de  sa  forma- 
tion. Distillé  avec  de  la  potasse  caustique  en  poudre,  il 
perd  tout  son  chlore  sous  forme  de  HCl  et  se  transforme 
en  nitrile  acrylique  triméthylé 

CHs 

Celui-ci  constitue  un  beau  liquide  incolore,  mobile, 
d'une  agréable  odeur,  d'une  saveur  très  piquante  et  très 
amère.  Il  est  insoluble  dans  l'eau  qu'il  surnage. 

Sa  densité  à  18°  est  égale  à  0.8447. 

Il  bout  sous  la  pression  de  760  millimètres  à  155°-i57°. 
Densité  de  vapeur  trouvée,  3.29  ;  calculée,  3.28. 
Ce  point  d'ébullition  est  celui  que  lui  assigne  l'analogie  : 


CN-CH=CH2  Eb.  78" 

CN  -  c  =  CHj  QO'-ga» 

CN-CH=C<^[]^  Éb.  140"- 142° 

CN-C  =  C<p|l'  IbS^-lS?» 

I  '-'"3 

CH, 


+  1 2"  à  U" 


i5« 


(  287  ) 

Le  nitrile  saturé  correspondant  au  nitrile  triméthyl- 
acrylique  est  encore  inconnu.  Je  regrette  de  ne  pas  avoir 
été  à  même  de  l'appeler  à  l'existence. 

Il  est  intéressant  de  rapprocher  les  trois  dérivés 
méthylés  du  nitrile  acrylique. 

CN      Éb.  78»  CN      Éb.  906-92O  ON      Éh.  425"  CN       ÉIj.  iSo" 

Il  II 

CH  C-CH3  C-CHj  C-CH3 

Il  II  II  II 

CH,  CH2  CH  G 

CH5  CH3      CHs 

Diff.  :  12»  à  44»  Diff.  :  85»  Diff.  :  30» 

Ce  nitrile  en  Cg  peut  être  rattaché  d'une  manière  très 
directe  au  nitrile  crotonique  CN  -  CH  =  CH  -  CH3  ;  c'est  le 
nitrile  crotonique  biméthylé  a  et  (3,  d'où  la  série 
suivante  : 

CN       H8°-H0°  CN        Éb.     125°  CN       Éb.     155» 

I  I  I 

CH  C  -  CH3  C  -  CH3 

II  II  II 

CH  CH  C-CH3 

I  I  i 

CH3  CHs  CH3 

Diff.:  7"  Diff.:  50° 

On  aperçoit  ici  d'une  manière  évidente  la  relation  qui 
existe  entre  la  volatilité  et  le  rapprochement  plus  ou 
moins  immédiat  des  composants  -  CN  et  CH5,  celui-ci 
substitué  à  l'hydrogène. 

SÉRIE,    TOME    XXXVI.  ^  18 


;me 


(  258  ) 
Le   dérivé   trimélhylé   correspond   à   Véthylène  tétra- 
méthylé 

CHj        Éh.     75°  CN         Éb.     155» 

C-CHj  C-CH, 


C-CH3 

C-CH; 

CHs 

CH3 

Diff. 

:  82° 

La  transformation  de  l'éthylène  triméthylé  en  nitrile 
correspondant  s'accompagne  d'une  élévation  dans  la  tem- 
pérature d'ébullition  beaucoup  plus  considérable: 


CH3         Eb. 

1 

57° 

GN         Eb. 

1 

140"- 142» 

CH 

II 

C  -  CHs 

1 

CH 

II 

C-CH3 

1 

CH5 

CH5 

Diff.: 

103"- 

1050 

L'action  de  V anhydride  pfwsphorique  sur  la  cyanbydrine 
méthyl-isopropylique  est  aisée,  mais  moins  nette  dans 
son  résultat  et  moins  avantageuse  quant  au  rendement. 
Le  résultat  de  la  distillation  constitue  un  liquide  incolore, 
fort  mobile,  très  odorant.  Soumis  à  la  distillation,  il  ne 
fournit  guère  que  la  moitié  de  son  volume  de  nitrile  tri- 
méthyl-acrylique 

CN  -C  =  C-(CIl5)j, 
I 
CHj 

bouillant  à  155°. 


(  259  ) 

Le  chlorure  d'acélyle  CH5  -  COCl  ne  réagit  que  faible- 
ment sur  cette  cyanhydrine  ;   il  faut  chauffer.  Vacétate 

CN-C(C2H30,]<JÎÎ!    .CH3 

qui  en  résulte  constitue  un  liquide  quelque  peu  huileux, 
incolore,  d'une  odeur  agréable,  d'une  saveur  étrange.  Ce 
corps  est  insoluble  dans  l'eau,  soluble  dans  l'alcool  et 
l'élher.  Sa  densité  à  18"  est  égale  à  0.9750.  Il  bout  sous 
la  pression  de  704  millimètres  à  212°. 

L'aptitude  réactionnelle  de  ce  nitrile-alcool  vis-à-vis 
des  bases  amidées  et  imidées  est  notablement  diminuée. 
Pour  en  déterminer  la  réaction  avec  la  diméthylamine 
en  solution  aqueuse  de  35  "/o,  il  faut  chauffer  en  vase  clos, 
au  bain  d'eau.  Il  en  résulte  la  base  nitrilée 

V^CH-(CIl3)., 


N(CH 


liquide  insoluble  et  plus  léger  que  l'eau,  à  odeur  cam- 
phrée, bouillant  à  176''-177",  sous  la  pression  ordinaire. 
La  cyanhydrine  méthyl-isopropyl-acétonique  se  dissout 
dans  l'acide  HCl  concentré.  Chauffée,  cette  solution  aban- 
donne, quand  on  la  refroidit,  des  cristaux  de  cWorliydrate 
ammonique;   il   reste  en  dissolution  de  Vacide  méthyl- 

isopropyl-glij colique   (HO)OC  -  C(OH)  <  ç^^.  içu  \    ^"<^ 
l'on  peut  extraire  par  l'éther. 

Le  nitrile  acrylique  CN  -  CH  =  CH2  est  le  plus  simple 
des  nitriles  non  saturés.  Le  remplacement  des  atomes 
d'hydrogène  par  des  radicaux  C„Hj„^.,.permet  d'y  rattacher 
un  grand  nombre  de  nitriles  non  saturés  de  la  formule 


(  260  ) 

générale  C„Hj„_,-CJN,  qui  peuvent  recevoir  des  noms 
rationnels  par  l'expression  de  cette  substitution.  Les  plus 
simples  parmi  ces  nitriles  sont  ceux  qui  résultent  de  la 
substitution  du  radical  méthyle  CH3  à  l'hydrogène. 

La  série  des  dérivés  méthyliques  du  nitrile  acrylique  est 
à  présent  complète.  En  voici  les  divers  termes  : 

Nitrile  acrylique  CN  -  CH  =  CH2,  éb.  78°. 

a.  Dérivés  monométhyliques  : 

a     CN         Éb.     QO^-QS»  p    CN         Éb.     118» 

I  I 

C  -  CH3  CH 

II  n 
CHî                                            CH 

I 


CH, 


b.  Dérivés  ôtméthyliques 


a  et  (3     CN        Éb.  125"  pp     CN        Eb.     140M42» 

C  -  CH3  CH 

Il  II 

CH  C 

CH,  CH.    CH3 


c.  Dérivés  ^nméthyliques 


CN  Eb.     ISb'-lS?» 

I 

C-CH3 

11 

C 

CH.    CH. 


D'une  manière  générale,  la  méthylisation  du  nitrile 
acrylique  en  élève  le  point  d'ébullition. 


(  26i   ) 

Cette  diminution  dans  la  volatilité  est   fort  diverse 

suivant  la  position  du  radical  ou  des  radicaux  -  CH3 

substituants  vis-à-vis  du  groupement  CN  :  elle  est  à  son 

minimum  dans  le  système  NC  -  C  -  CH3  qui  résulte  de 

II 
cette  substitution. 

La  substitution  triméthylique  élève  le  point   d'ébul- 

lition  du  nitrile  primitif  de  77°  à  79°  : 


CN-CH  =  CH,  Eb.       78»       \ 

77°  à  79° 

/IKfio.  |P<7o    / 

CH, 


CN-C  =  C<ptJ^  1550  157» 


C'est  précisément  la  somme  des  élévations  dans  les 
points  d'ébullition  déterminées  par  ces  substitutions 
considérées  isolément  : 


CN- 

CN- 

-  CH  =  CH, 

-  C  =  CH, 
CH3 

Eb.       78» 
90»-92» 

\  iS'-U* 

CN- 
CN- 

CH  =  CH, 
-CH  =  C- 

! 
CH5 

Éb       78° 
H8» 

\       40° 

CN 

-CH=C< 

CH3 

.  nu 

U0»-142» 

^  22»-24° 

1 2°  à  1 4°  +  40°  +  22»  à  24»  "  74°  à  78°. 

La  méthijlisation  du  nitrile  propiqnique  pour  produire 
les  nitriles  saturés  correspondants  a  aussi  pour  résultat 


;^  262  ) 

une  diminution  de  volatilité,  mais  elle  a  une  autre  valeur 
que  celle  qui  s'exerce  dans  le  nitrile  acrylique. 


CN  -  CHa  -  CH5 

Eb. 

980 

CN  -  CH  -  CH3 

1 

loyo-ios" 

CH, 

Cx\  -  CHj  -  CHj  -  CH, 

118» 

CN-CH-CH2-CH5 

I 

125» 

CH5 

CN-CH,-CH<^[J' 

1-29" 

IJll^Le  dérivé  triméthi/lé 

CN-CH-CH<J[Î' 
CH, 

correspondant  au  nitrile  triméthyl-acrylique 
CN-ç  =  c<^|î; 

CH, 

est  encore  inconnu. 

Il  m'est  agréable  de  constater,  avant  de  terminer  ce 
travail,  toute  la  part  qui  revient  à  mon  zélé  préparateur, 
M.  Aug.  De  Wael,  dans  l'élaboration  de  sa  partie  expé- 
rimentale. 


(  263 


Note  sur  l'aurore  boréale  du  9  septembre  1898,  observée  à 
Grammont  et  à  Louvain;  par  F.  Terby,  membre  de 
l'Académie. 

M,  Désiré,  préfet  des  études  du  collège  Saint-Joseph, 
à  Grammont,  a  bien  voulu  me  transmettre  l'observation 
qu'il  a  faite  de  ce  phénomène,  à  Grammont,  avec  une 
dizaine  de  ses  collègues  : 

ce  Vers  8  Y^  heures,  écrit-il,  en  plein  ouest,  s'élève  à 
»  l'horizon  un  nuage  presque  blanc,  que  nous  croyions 
»  être  la  fumée  d'un  vaste  incendie  ;  mais  cette  prétendue 
»  fumée  s'éleva  à  une  hauteur  immense  en  colonne  rela- 
»  tivement  étroite,  disparaissant  tout  à  coup  pour  se 
»  reformer  et  s'évanouir  subitement.  De  dix  en  dix 
»  minutes  à  peu  près,  le  même  phénomène  se  présenta, 
»  mais  à  une  certaine  distance  vers  le  sud  de  l'endroit 
•>•>  de  la  première  apparition,  et  se  reproduisant  d'étape 
»  en  étape,  marchant,  dans  son  origine,  toujours  vers  le 
»  sud,  pour  arriver  enfin,  vers  9  heures  à  9  1/4  heures,  à 
))  l'est;  là,  pour  finir,  s'élancèrent  de  derrière  un  ban- 
))  deau  noir  deux  longues  colonnes,  s'élevant  dans  le 
))  ciel  et  de  même  couleur,  dans  ce  sens  : 


(  264  ) 

J'ai  observé  moi-même  les  diverses  phases  de  ce  phé- 
nomène à  Louvain  :  vers  8  1/2  heures  du  soir,  mon  atten- 
tion fut  attirée  par  la  blancheur  extraordinaire  qui  régnait 
dans  tout  le  ciel  septentrional  ;  bientôt  l'apparition  de 
rayons  ne  me  laissa  aucun  doute  sur  la  présence  de  l'au- 
rore boréale;  ces  rayons  étaient  relativement  faibles 
d'éclat  et  manifestaient  aussi  avec  grande  évidence  le 
phénomène  de  déplacement  vers  l'ouest  signalé  par 
M.  Désiré.  Pour  décrire  leur  aspect,  je  répéterai  textuel- 
lement ce  que  je  disais  en  donnant  les  détails  de  l'aurore 
boréale  du  2  octobre  1882  (1)  : 

«  Ces  rayons  apparaissent  successivement  de  l'est  à 
»  l'ouest,  par  le  nord,  c'est-à-dire  que  de  nouveaux 
»  rayons  surgissent  toujours  à  la  gauche,  ou  à  l'ouest  de 
))  ceux  qui  les  précèdent;  ce  phénomène  appelle  ainsi 
»  l'idée  d'une  draperie  dans  laquelle  se  seraient  formés 
»  de  proche  en  proche,  de  l'est  à  l'ouest,  des  plis  verti- 
»  eaux.  L'extinction  des  rayons  et  leur  apparition  sont 
))  d'ailleurs  si  graduelles  et  si  insensibles  qu'elles  font 
))  songer  aux  vues  fondantes  de  nos  appareils  de  projec- 
V  tion.  » 

Comme  je  l'ai  remarqué  précédemment  aussi,  la  lueur 
rose  a  toujours  suivi  l'apparition  des  rayons  et  s'est  mani- 
festée comme  si  elle  résultait  d'une  espèce  de  diffusion 
ou  de  modification  de  ceux-ci  ;  cette  fois,  d'ailleurs,  cette 
lueur  caractéristique  est  restée  très  faible;  c'est  au  nord- 
est  et  à  l'est-nord-est  seulement  qu'elle  a  pris  momenta- 
nément un  éclat  relativement  marqué. 

Quant  au   déplacement  des  rayons  ou   de  leur  lieu 


(1)  Bull,  de  l'AcacL  roij.  de  Belgique,  3«  série,  tome  IV,  nos  9-10, 
1882. 


(  265  ) 
d'origine  de  l'est  à  l'ouest,  par  le  nord,  je  rappellerai  que 
j'ai  constaté  le  même  lait  pendant  l'aurore  du  3  avril  1870, 
pendant  la  première  partie  de  celle  du  23  octobre  1870, 
puis  pendant  les  aurores  des  49  novembre  1870,  9  avril 

1871,  13  janvier  1874,  2  octobre  1882,  17  novem- 
bre 1882. 

J'ai  constaté  un  déplacement  contraire,  c'est-à-dire  de 
l'ouest  à  l'est,  par  le  nord,  pendant  l'aurore  du  23  sep- 
tembre 1870,  pendant  la  seconde  partie  de  l'aurore  du 
23  octobre   1870;    le  9  novembre   1871  ;   le  4  lévrier 

1872,  pendant  le  phénomène  de  ce  genre  le  plus  splen- 
dide  et  le  plus  complet  que  j'aie  observé,  attendu  qu'à 
cette  date  j'ai  eu  l'occasion  d'admirer  la  formation  d'une 
coupole  ou  couronne  boréale  parfaite,  à  laquelle  aboutis- 
saient des  rayons  partis  de  tous  les  points  de  l'horizon, 
sans  en  excepter  l'horizon  sud,  qui  était  surmonté  d'un 
arc  brillant,  comme  l'horizon  nord;  enfin  le  7  jan- 
vier 1873  (1). 

A  10'' 20"',  l'arc  blanc  de  l'aurore  boréale  se  voyait 
encore  parfaitement  à  l'horizon  septentrional,  mais  toute 
apparence  du  phénomène  s'éteignit  bientôt  après. 

Je  puis  allirmer  que  la  veille  ou  l'avant-veille  de  ce 
phénomène,  il  y  a  eu  encore  des  apparences  d'aurore 
boréale;  j'ai  pour  ma  part  remarqué  parfaitement,  vers 
10  heures,  le  7  ou  le  8  septembre,  un  nuage  blanc  et 
brillant  au  nord-est,  à  faible  hauteur;  et  l'on  m'assurait, 
dans  mon  voisinage,  que  le  9  était  la  troisième  soirée 
consécutive  pendant  laquelle  on  avait  remarqué  des 
manifestations  de  ce  genre  dans  le  ciel. 


(1)  Voir /or.  cil. 


(  266  ) 

La  coïncidence  de  ces  apparitions  avec  la  présence 
d'une  énorme  lâche  solaire,  visible  à  l'œil  nu,  a  été 
signalée  déjà  trop  souvent  dans  le  cas  actuel,  pour  que 
j'insiste  sur  ce  point. 


Sur  la  cause  de  l'absence  de  coloration  de  certaines  eaux 
limpides  naturelles  ;  par  W.  Spring,  membre  de  l'Aca- 
démie. 

Il  est  aujourd'hui  reconnu,  à  suftisance  de  preuve,  que 
l'eau  pure  n'est  pas  incolore  mais  bleue.  Cela  étant,  la 
couleur  d'azur  de  l'Océan  et  de  certains  lacs  n'a  plus 
rien  que  de  très  naturel,  alors  même  que  le  mécanisme 
de  la  réflexion  de  la  lumière  du  Jour,  au  sein  des  eaux, 
n'est  pas  encore  connu  d'une  manière  satisfaisante. 

L'apparition  de  la  couleur  verte  dans  d'autres  eaux  lim- 
pides trouve,  à  son  tour,  une  explication  simple,  ainsi  que 
je  l'ai  fait  voir  à  la  suite  de  nombreuses  recherches  (1), 
dans  la  présence  d'un  trouble  dans  l'eau,  trouble  doué  de 
la  propriété  de  laisser  passer  plus  facilement  les  rayons 
jaunâtres.  Si  ce  trouble  était  suspendu  dans  un  liquide 
absolument  incolore,  le  milieu  nous  paraîtrait  jaunâtre 
ou  brun  jaunâtre,  selon  l'épaisseur  du  trouble;  mais  l'eau 
étant  bleue  et  non  incolore,  la  couleur  du  trouble  se  com- 
posera, pour  notre  œil,  avec  la  couleur  fondamentale  de 
l'eau  et  nous  percevrons  la  sensation  du  vert;  la  nuance  en 


(1)  Bull,  de  VAcad.  roij.  de  Belgique,  3«  série,  t.  V,  p.  35,  1883; 
t.  XII,  p.  814, 1886;  t.  XXXIV,  p.  578,  1897. 


(  267  ) 

sera  plus  ou  moins  pure,  selon  les  cas.  La  matière  consti- 
tuant le  trouble  pourra  être  incolore  par  elle-même, 
mais  le  plus  souvent  elle  sera  colorée,  ainsi  que  je  l'ai 
dit  dans  un  article  récent  (1)  sur  le  rôle  des  composés 
ferriques  et  des  matières  humiques  dans  le  phénomène 
de  la  coloration  des  eaux. 

Si  l'on  s'en  tenait  aux  faits  qui  viennent  d'être  rap- 
pelés, il  Amdrait  nécessairement  que  toute  eau  naturelle, 
limpide,  fût  ou  bleue,  ou  verte,  dès  qu'elle  se  présente- 
rait en  masse  suffisante,  c'est-à-dire  en  couche  d'environ 
un  mètre  d'étendue,  et  cela  sans  que  la  profondeur  doive 
être  notable  ;  on  le  voit  bien  dans  nombre  de  rivières  et 
même  de  ruisseaux. 

L'observation  nous  apprend  cependant  que  cette  con- 
clusion est  très  souvent  en  défaut  :  il  y  a  des  eaux  lim- 
pides qui  sont  absolument  incolores.  Je  citerai  surtout 
l'eau  de  l'Amblève,  de  l'Ourthe,  dans  les  parties  de  leurs 
cours  où  ces  rivières  ne  sont  pas  souillées  par  l'industrie. 
Probablement  en  serait-il  de  même  de  l'eau  de  toutes 
nos  rivières  et  de  nos  ruisseaux  belges,  si  elle  n'était  pas 
contrainte  d'aider  les  industriels  dans  leur  travail. 

Plus  généralement,  on  peut  dire  que  les  cours  d'eau 
dont  l'origine  n'est  pas  dans  la  région  des  neiges  perpé- 
tuelles et  des  glaciers  n'ont  qu'exceptionnellement  une 
couleur  bleue;  souvent  ils  ont  une  teinte  verte,  mais  plus 
souvent  encore  ils  sont  incolores  ou  d'un  aspect  plus  ou 
moins  sombre  dans  leurs  parties  profondes.  C'est  cette 
absence  de  couleur  ou,  si  Ton  préfère,  la  discontinuité  du 
phénomène  de  coloration  qui  fait  la  grande  difficulté  du 


(1)  Loc.  cit.,  1897. 


(  268  ) 

problème  qui  nous  occupe.  Berzelius  a  déjà  appelé  l'at- 
tention sur  ce  point  lorsqu'il  a  rendu  compte,  en  1828(1), 
d'un  travail  que  H.  Davy  avait  fait  sur  la  question  de  la 
couleur  de  l'eau,  travail  dans  lequel  le  célèbre  chimiste 
anglais  démontrait,  pour  la  première  fois,  que  l'eau  pure 
est  bleue.  Les  remarques  de  Berzelius  sont  si  frappantes 
qu'il  y  a  tout  lieu  de  les  reproduire  in  extenso. 

Je  traduis  textuellement  : 

c(  Sans  vouloir  contester  la  justesse  de  cette  explication 
»  (celle  de  Davy),  je  ne  puis  me  déclarer  convaincu  de 
»  son  exactitude,  car  s'il  en  était  ainsi  (si  l'eau  était 
»  bleue),  il  devrait  y  avoir  quelque  chose  en  état  de  lui 
»  enlever  sa  couleur.  On  sait  que  le  lac  de  Wettern,  en 
»  Suède,  a  une  couleur  plus  claire  que  celle  que  l'on 
»  observe  d'ordinaire  dans  d'autres  lacs.  Sur  les  rives 
»  très  escarpées,  au  pied  de  l'Omberg,  le  fond  du  lac  est 
»  formé  de  bandes  de  roches  calcaires  dénudées.  Quand 
))  l'eau  est  calme  et  que  le  soleil  donne,  on  peut  encore 
»  distinguer  des  objets,  sur  le  fond,  à  52  pieds  de  pro- 
»  fondeur,  sans  que  l'œil  ne  découvre  le  moindre  vestige 
»  de  bleu  :  tout  est  clair  et  incolore,  comme  si  on  regar- 
))  dait  à  travers  un  verre  de  cristal.  A  cette  profondeur,  la 
»  couleur  bleue  du  lac  de  Genève  aurait  absorbé  toute 
))  la  lumière,  et  combien  l'eau  de  la  Motala  ne  diffère-t-elle 
»  pas,  à  sa  sortie  du  lac  de  Wettern,  de  l'eau  du  Rhône 
»  où  celui-ci  s'échappe  du  lac  de  Genève!  Les  petits  lacs 
))  de  Dalarna,  que  traverse  la  rivière  Fahlu,  se  distin- 
))  guent  par  la  pureté  de  leurs  eaux  qui  ne  sont  troublées 
»  par  aucun  réactif,  et  cependant  ces  eaux  ne  montrent 


■d)  Jahresberichl  fur  Chcmie,  etc.,  t.  IX,  p.  ^207  (édité  en  1830). 


(  ^^69  ) 
))  pas  non  plus,  quand  on  les  regarde  en  niasse,  la 
»  moindre  pointe  de  bleu  ou  de  vert.  Il  reste  donc  tou- 
»  jours  à  répondre  à  la  question  de  savoir  pourquoi 
»  l'eau  pure  des  glaciers  est  si  fortement  bleue  déjà  à 
»  2  pieds  de  profondeur,  tandis  qu'il  existe  d'autres  eaux 
»  pures  n'ayant  aucune  couleur,  même  en  masse  pro- 
•>•>  fonde.  )) 

J'ai  tenu  à  m'assurer  si  l'aspect  du  lac  de  Wettern 
répond  encore  aujourd'hui  aux  observations  de  Berzelius. 
Je  dois  à  l'obligeance  de  M.  le  professeur  0.  Pettersson, 
de  Stockholm,  les  renseignements  suivants,  qui  éma- 
nent de  personnes  connaissant  bien  ce  lac  :  «  D'après 
))  M.  L.  Olin,  avocat,  qui  est  originaire  d'une  des  îles  du 
5)  lac,  l'eau  est  claire  comme  du  cristal,  «  knjstalldar  », 
»  au  point  qu'il  n'est  pas  possible  de  définir  sa  couleur. 
))  Ce  jugement  se  base  sur  le  fait  que  par  un  temps 
»  calme  on  distingue  nettement  de  petits  objets  à  de 
))  grandes  profondeurs.  M.  Olin  a  plongé  souvent,  aussi 
»  profondément  que  possible,  et  il  a  vu  chaque  fois  les 
))  objets  placés  au-dessus  de  la  surface  de  l'eau,  avec  leur 
»  couleur  naturelle.  Quand  le  ciel  est  nuageux,  la  surface 
»  de  l'eau  est  grise;  au  soleil,  elle  est  bleue  ou  verte.  » 
D'autre  part,  M.  Lindberg,  qui  a  navigué  sur  le  lac  pen- 
dant de  nombreuses  années  en  sa  qualité  de  capitaine  d'un 
bateau  à  vapeur,  a  fourni  les  mêmes  renseignements  sur 
la  clarté  de  l'eau,  surtout  pour  la  partie  nord  du  lac,  près 
de  sa  décharge  dans  la  Motala.  Mais  l'eau  n'est  claire  et 
transparente  que  là  où  le  fond  est  de  sable  ou  de  pierre. 
Il  dit  que  l'on  peut  compter  alors  les  cailloux  à  une  pro- 
fondeur de  12  à  14  pieds  et  il  ajoute  qu'il  est  parfois 
impossible  de  voir  à  travers  l'eau  du  lac,  même  quand 
le  soleil  donne,  et  cela  aux  places  où  l'eau  est,  à  d'autres 


(  270  ) 

moments,  complètement  transparente.  M.  Lindberg attri- 
bue la  cause  de  ce  phénomène  aux  courants  qui  se  pro- 
duisent quelquefois  dans  les  couches  profondes. 

Enfin,  M.  Witt,  assistant  de  M.  0.  Pettersson,  a  con- 
staté, à  l'occasion  de  sondages  entrepris  dans  le  lac  de 
Wettern,  que  la  transparence  n'est  pas  toujours  la  même 
et  que  la  couleur  change  par  places,  surtout  avec  l'inten- 
sité de  l'éclairage. 

En  résumé,  si  l'observation  de  Berzelius  n'est  pas 
con trouvée,  il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  l'absence  de 
coloration  du  lac  n'est  pas  constante.  On  doit  donc  en 
chercher  la  cause  dans  l'action  variable  d'un  facteur 
étranger  à  l'eau. 

L'objet  de  la  présente  note  est  de  répondre  à  la  ques- 
tion de  Berzelius,  tout  en  tenant  compte  des  variations 
d'aspect  que  les  eaux  peuvent  présenter. 

On  le  verra,  la  solution  du  problème  est  d'une  simpli- 
cité étonnante  ;  elle  s'adapte  entièrement  à  l'explication 
que  j'ai  donnée  de  l'apparition  de  la  couleur  verte  dans 
certaines  eaux,  car  elle  n'est  qu'une  conséquence  néces- 
saire de  la  présence  d'un  trouble  réel  d'espèce  détermi- 
née. Elle  peut  donc  être  regardée  comme  la  confirmation 
des  considérations  que  j'ai  fait  valoir  sur  le  problème  de 
la  couleur  des  eaux. 

Voici  le  fait  nouveau  et  ses  relations  avec  les  observa- 
tions antérieures. 

J'ai  montré,  il  y  a  un  an  (1),  l'influence  de  VInjdrate 
ferrique  colloïdal  sur  la  couleur  de  l'eau  ;  il  suflit  que 
celle-ci  en  renferme  moins  d'un  dix-millionième  de  son 


(1)  Bull,  de  l'Acad.  roij.  de  Belgique,  3^  série,  t.  XXXIV,  p.  578, 
1897. 


(  27'l   ) 

poids  pour  paraître  ver  le  ;  une  proportion  plus  forte  de 
composé  ferrique  la  rend  de  plus  en  plus  jaune.  Si  les 
eaux  de  la  nature  qui  renferment  cependant  une  plus 
grande  quantité  de  fer,  ne  sont  pastoulesyaM^esou  brunes^' 
c'est  que  les  composés  ne  sont  pas  à  Vétat  ferrique  :  ils 
sont  continuellement  ramenés  à  Vétat  ferreux,  dont  le 
pouvoir  colorant  est  négligeable  relativement  à  celui  des 
composés  ferriques,  par  l'action  combinée  des  matières 
humiques  et  de  la  lumière  solaire. 

Plus  récemment  (1),  j'ai  fait  voir,  à  l'occasion  de 
recherches  sur  les  matières  colorantes  des  terrains  de 
sédiment  et  sur  l'origine  probable  des  roches  rouges, 
que  l'hydrate  ferrique  qui  a  échappé  à  l'action  réductrice 
des  matières  humiques  perdait  lentement  son  eau  d'hy- 
dratation au  sein  des  sédiments  et,  passant  alors  de  la 
couleur  jaune  d'ocre  au  rouge  vineux,  il  colorait  les 
roches  et  les  terrains  en  rouge,  comme  si  ceux-ci  avaient 
été  saupoudrés  de  matière  colorante. 

Or  si  l'on  fait  macérer,  à  chaud,  une  roche  rouge  (du 
schiste  dévonien,  par  exemple)  dans  une  solution  con- 
centrée de  potasse  caustique  que  l'on  renouvelle  de  temps 
en  temps,  on  arrive,  au  bout  de  quelques  semaines,  à 
enlever  l'acide  silicique  de  la  roche  et  à  ne  plus  avoir 
qu'une  boue  formée  de  sable  plus  ou  moins  fin,  auquel 
se  trouvent  mêlées  des  particules  d'oxyde  ferrique  (héma- 
tite) rouge  orangé,  d'une  ténuité  extrême. 

En  lavant  la  masse  à  l'eau  pure,  par  décantations  répé- 
tées, il  arrive  un  moment  où  la  matière  colorante  rouge 
ne  se  dépose  plus,  môme  après  un  repos  durant  plusieurs 


(1)  Loc.  cit.,  3e  série,  t.  XXXV,  p.  521, 1898. 


(  272  ) 

mois.  On  a  alors,  à  l'état  concentré,  un  milieu  trouble 
formé  de  particules  solides  d'un  rouge  orangé  et  de 
dimensions  si  petites  qu'il  est  difticile  de  les  distinguer 
à  l'aide  d'un  microscope  grossissant  cent  cinquante  fois. 

Ces  particules  si  ténues  ne  sont  sans  doute  autre  chose 
que  les  poussières  de  l'époque  dévonienne  rendues  à 
l'indépendance.  En  évaporant  10  centimètres  cubes  de 
ce  liquide  trouble  dans  une  capsule  en  platine,  j'ai 
obtenu  un  résidu  pesant  Oî?',0125  ;  chaque  goutte  contient 
donc  approximativement  six  centièmes  de  milligramme 
d'oxyde  ferrique,  en  comptant  vingt  gouttes  par  centi- 
mètre cube. 

Eh  bien,  si  l'on  mêle  à  de  l'eau  pure,  bleue,  quelques 
gouttes  seulement  de  ce  liquide  trouble,  la  clarté  de  l'eau 
n'en  paraît  pas  atteinte;  mais  si  l'on  examine  ensuite  le 
liquide  sous  grande  épaisseur  (dans  un  tube  de  6  mètres), 
on  constate,  dans  le  cas  oîi  la  proportion  du  trouble  est 
convenable,  la  disparition  complète  de  toute  coideur  bleue; 
le  liquide,  toujours  d'apparence  limpide,  se  montre  tout 
au  plus,  sous  cette  épaisseur,  un  peu  assombri. 

Au  lieu  de  ce  trouble  ainsi  préparé,  on  peut  se  servir 
aussi  de  celui  qui  se  forme  lorsque  l'on  traite  la  carnallite 
par  l'eau  et  que  l'on  élimine  le  sel  dissous  à  la  suite  d'un 
lavage  par  décantations  successives. 

La  préparation  est  plus  commode,  mais  le  trouble  est 
ici  moins  persistant,  parce  que  l'oxyde  ferrique  se  prend 
aisément  en  flocons  et  qu'il  est  bien  moins  ténu  que  celui 
des  roches  dévoniennes. 

Si  la  proportion  de  trouble  d'oxyde  ferrique  est  trop 
faible,  l'eau  conserve  une  teinte  d'un  vert  jaunâtre,  rappe- 
lant tout  à  fait  certaines  eaux  naturelles,  par  exemple 
celles  de  la  Meuse  en  amont  de  la  région  industrielle  du 


(  273  } 

pays.  ïl  suffît  toutefois  de  quantités  exlraordinairement 
faibles  d'hématite  pour  supprimer  le  bleu  de  l'eau. 

Si  la  proportion  de  trouble  est  au  contraire  trop  forte, 
l'eau  se  montre  de  plus  en  plus  sombre,  jusqu'à  devenir 
opaque  (dans  le  tube  de  6  mètres),  mais  elle  ne  devient 
pas  rouge  par  transparence;  le  rouge  n'apparaît  que  par 
la  réflexion  de  la  lumière,  c'est-à-dire  lorsque  l'on 
regarde  un  tube  débarrassé  de  sa  gaine  opaque,  en  pla- 
çant l'œil  de  manière  que  le  rayon  visuel  rase  la  surface 
du  tube. 

Enfin,  voici  une  observation  qui  est  peut-être  de  nature 
à  fournir  quelques  renseignements  sur  la  manière  optique 
d'agir  des  troubles  en  général. 

Pour  supprimer  la  couleur  bleue  de  l'eau,  il  n'est  natu- 
rellement pas  nécessaire  de  mêler  la  matière  troublante 
au  liquide  :  il  suffît  que  la  lumière  passant  par  l'axe  du 
tube  de  6  mètres  soit  réfléchie  sur  un  plan  enduit  de 
poudre  fine  d'hématite.  Le  fait  paraît  clair;  néanmoins, 
il  faut  prendre  une  précaution  spéciale,  qui  renferme 
précisément  le  point  que  je  désire  mettre  en  évidence. 

Si  l'on  dépose  sur  un  plan  de  porcelaine  blanche  le 
liquide  trouble  rouge  en  quantité  telle  que  la  partie  de  la 
surface  utilisée  pour  la  réflexion  de  la  lumière  ne  ren- 
ferme pas  plus  d'hématite  que  l'eau  pure  n'en  doit  rece- 
voir pour  éteindre  le  bleu,  et  qu'on  laisse  sécher,  on 
obtient  une  surface  rosée,  qui  ne  renvoie  cependant  pas 
assez  de  lumière  rouge  pour  supprimer  la  couleur  bleue 
de  l'eau.  Ce  résultat  incomplet  démontre  donc  qu'une 
réflexion  unique  à  la  surface  du  trouble  ne  suffît  pas  pour 
éteindre  le  bleu,  alors  que  l'effet  est  cependant  complet 
quand  les  grains  du  trouble  sont  en  suspension  dans  l'eau. 

Pour  réussir,  il  faut,  de  toute  nécessité,  déposer  sur  le 

3"'*    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  19 


(  274  ) 
plan  de  porcelaine  une  couche  beaucoup   plus  épaisse 
d'hématite  broyée. 

On  doit  conclure  de  là  que  si,  dans  la  nature,  la  lumière 
du  jour  se  réfléchissait  seulement  une  fois  sur  la  surface 
des  grains  du  trouble,  l'extinction  de  la  couleur  bleue 
nécessiterait  un  trouble  intense  au  point  d'altérei',  d'une 
manière  très  visible,  la  transparence  de  l'eau.  Au  con- 
traire, si  la  lumière  traverse  le  trouble  à  la  suite  d'un 
grand  nombre  de  réflexions  sur  les  grains  d'hématite, 
l'extinction  du  bleu  pourra  être  complète  alors  que  l'eau 
ne  renfermerait  que  de  rares  particules  rouges. 

Cette  remarque  répond  à  une  objection  que  M.  R. 
Abegg  a  faite  à  ma  manière  de  voir  sur  le  rôle  des  trou- 
bles dans  le  phénomène  de  la  génération  de  la  couleur 
verte  dans  les  eaux  des  lacs  et  des  mers  (1),  quand  il  dit 
que  la  lumière  perçue  par  l'observateur  ne  traverse  pas 
le  trouble,  mais  qu'au  contraire  elle  est  réfléchie  par 
celui-ci,  et  qu'on  doit  regarder  tout  le  chemin  parcouru 
par  un  rayon  lumineux  dans  l'eau  comme  tracé  dans 
un  milieu  exempt  de  particules  réfléchissantes. 

Conclusions. 

Il  résulte  des  faits  précédents  que  la  couleur  bleue  de 
l'eau  trouve  son  complément  dans  la  couleur  de  l'hématite. 

Une  eau  tenant  en  suspension  des  particules,  même 
invisibles,  de  cette  substance,  ne  peut  donc  plus  nous 
donner  la  sensation  du  bleu  sitôt  que  la  proportion  des 
particules  d'iiématite  est  en  rapport  avec  l'intensité  du 
bleu. 

(1)  Naturwissenschaflliche  Rundschau,  t.  XIII,  u»  14,  p.  169,  1898. 


(  275  ) 

Les  grains  microscopiques  d'hématite  se  trouvant 
répandus  dans  presque  tous  les  sols,  les  eaux  terrestres  ne 
pourront  que  rarement  être  des  eaux  bleues,  quel  que 
soit  d'ailleurs  leur  degré  de  pureté  ou  de  limpidité  appa- 
rente. Au  contraire,  les  neiges  des  hautes  cimes  et  les 
glaciers  ne  renferment  pas  d'hématite.  Les  poussières 
cosmiques  dont  on  a  signalé  parfois  la  présence  dans  les 
champs  de  neiges  perpétuelles,  sont  pour  la  plupart  des 
grains  de  fer  météorique  doués  d'autres  propriétés  optiques 
que  l'hématite  et  ne  pouvant  entrer  en  ligne  de  compte 
ici.  Les  eaux  descendant  des  glaciers  et  des  neiges  des 
cimes  élevées  sont  donc  dans  les  meilleures  conditions 
pour  étaler  leur  couleur  avec  le  moins  d'altération. 

Le  rôle  des  composés  ferriques  dans  le  phénomène  de 
la  coloration  des  eaux  est  tout  différent  selon  que  ces 
composés  sont  à  l'état  ûliydrate  ou  à  l'état  d'oxyde 
anhydre.  A  l'état  d'hydrate,  ils  sont  jaunes,  comme  toutes 
les  combinaisons  de  FcoO^  avec  une  proportion  sulFisante 
d'une  combinaison  oxygénée  non  chromogène  (1).  Répan- 
dus en  minime  proportion  dans  l'eau,  ils  ont  à  lutter  avec 
les  matières  humiques,  ou,  plus  généralement,  avec  les 
matières  organiques  de  l'eau,  mais  aussi  longtemps  qu'ils 
n'ont  pas  succombé  dans  la  lutte,  ils  font  virer  la  couleur 
bleue  de  l'eau  au  vert,  au  moins  pour  notre  œil.  Quand, 
au  contraire,  les  composés  ferriques  sont  à  l'état  anhydre, 
ils  ont  une  nuance  rouge-orange  qui  compense  exacte- 
ment le  bleu  de  l'eau  et  ils  ne  sont  plus  soumis  au  travail 
réducteur  des  matières  organiques.  Leur  présence  se 
trahit  par  la  suppression  de  la  couleur  bleue  de  l'eau. 


(1)  Voir  mon  travail  sur  les  matières  colorantes  des  terrains  de 
sédiment,  loc.  cit. 


(  276  ) 

Un  mot  encore. 

Si  les  observations  que  je  viens  de  faire  connaître  ne 
prouvent  pas  directement  la  présence  de  particules  d'héma- 
tite dans  les  eaux  incolores  de  la  nature,  elles  établissent 
néanmoins  un  parallélisme  si  étroit  entre  les  expériences 
du  laboratoire  et  les  faits  de  la  nature,  que  je  ne  puis  me 
défendre  de  regarder  comme  fondée  la  réponse  qu'elles 
apportent  à  la  question  déjà  posée  par  Berzelius  au  sujet 
des  eaux  incolores  de  la  Suède. 

Liège,  Institut  de  chimie  générale,  octobre  1898. 


Fondements  de  la  théorie  de  la  variation  des  latitudes  ; 
par  F.  Folie,  membre  de  l'Académie. 

La  théorie  du  mouvement  de  rotation  de  l'écorce  ter- 
restre, que  nous  avons  publiée  récemment  (*),  révèle, 
pour  l'axe  d'inertie  de  celle-ci,  deux  nutations  d'un 
caractère  diurne  ;  la  première  est  la  nutation  eulérienne 
proprement  dite;  sa  période,  qui  dépend  surtout  des 
moments  d'inertie  du  noyau,  est  de  504  jours  pour 
la  Terre  solide,  ou  pour  notre  ellipsoïde  fictif,  et  elle 
est  la  même  pour  l'écorce  ;  la  période  de  la  seconde 
dépend  des  moments  d'inertie  de  l'écorce,  et  ne  peut 
donc  être  déterminée  que  par  l'observation.  Nous  avons 
admis  qu'elle  est  celle  que  Chandler  a  découverte,  mais 
à  laquelle  nous  n'avons  pas  cru  pendant  longtemps,  vu  le 
manque  d'une  explication  théorique  tant  soit  peu  satis- 
faisante. Indépendamment  de  la  nutation  eulérienne  et 

(*)  Théorie  du  mouvement  de  rotation  de  l'écorce  terrestre.  Bruxelles, 
Hayez,  1898. 


(  277  ) 

de  la  nutation  chandlérieiine,  il  existe,  pour  l'écorce,  une 
troisième  nutation,  de  caractère  non  diurne,  qui  vient 
donc  s'ajouter  aux  termes  de  la  nutation  bradléenne. 
Cette  nutation  a  la  même  période  que  la  chandlérienne  ; 
son  coefficient,  comme  celui  des  deux  autres,  du  reste, 
est  une  constante  arbitraire. 

ïl  va  de  soi  que  la  nutation  eulérienne  et  la  chandlé- 
rienne, à  raison  de  leur  caractère  diurne,  s'éliminent 
toutes  deux  dans  l'expression  de  la  somme  des  déclinai- 
sons (ou  des  ascensions  droites)  et,  par  suite,  dans  celle 
de  la  différence  des  latitudes  prises  à  douze  heures  d'in- 
tervalle, tandis  que  la  nutation  bradléenne,  et,  par  con- 
séquent, le  nouveau  terme  théorique  que  nous  avons 
trouvé,  ne  s'y  éliminent  pas. 

Quoique  l'existence  de  la  nutation  chandlérienne,  abso- 
lument inexplicable  pour  une  Terre  solide,  soit  un  crité- 
rium certain  de  la  fluidité  de  la  Terre  en  dessous  de  son 
écorce,  il  nous  a  paru  très  intéressant  de  le  renforcer 
encore,  en  établissant  l'existence  du  nouveau  terme  brad- 
léen,  qui  ne  peut  absolument  pas  se  rencontrer  dans  la 
théorie  du  mouvement  de  rotation  d'une  Terre  solide. 

Si  les  formules  de  nutation  étaient  correctes,  ce  terme 
serait  fort  aisé  à  découvrir  dans  la  différence  des  lati- 
tudes, ou  dans  la  somme  des  ascensions  droites,  prises  à 
douze  heures  d'intervalle. 

Celles-ci,  en  effet,  ne  pourraient  renfermer  que  les  cor- 
rections des  termes  bradléens,  de  ceux  de  l'aberration  et 
de  ceux  de  la  nutation  diurne.  Et  c'est  ainsi  que  nous 
avons  pu  le  mieux  déterminer  cette  dernière  (*). 

(*)  Revision  des  constantes  de  l'astronomie  stellaire.  Bruxelles, 
Hayez,  1896. 


(  278  ) 

Nous  sommes  fondé  à  croire,  toutefois,  qu'il  y  a  éga- 
lement une  correction  à  apporter  aux  termes  dépendant 
de  la  simple  longitude  du  Soleil,  que  cette  correction 
provienne,  soit  d'une  erreur  sur  la  constante  de  l'aber- 
ration, soit  d'une  erreur  sur  celles  des  termes  solaires, 
soit  enfin  de  l'existence,  pour  l'axe  de  l'écorce,  d'une 
nouvelle  nutation  solaire. 

Aussi,  au  lieu  d'appliquer  aux  différences  D  des  lati- 
tudes, observées  à  douze  beures  d'intervalle,  la  simple 
formule 

4-  sin  ^/  -4-  ij  cos  p«  -+-  c  -+-  D  =  0, 

dans  laquelle  l'argument  (3f  a  une  période  de  431  jours, 
avons-nous  cru  nécessaire  d'employer  la  formule 

oc  sin  o  -♦-  y  cos  ©  -<-  C-  sin  pt  -^  )j  cos  8<  -+-  z  -+-  D  =  0. 

En  l'appliquant  aux  252  différences  observées  par 
Pelers  à  Poulkovo,  de  1842  à  1844,  et  en  groupant  entre 
elles  les  observations  voisines,  nous  avons  formé  le 
tableau  suivant,  dans  lequel  tous  les  nombres,  à  l'excep- 
tion des  poids  p,  ont  été  multipliés  par  100  : 


p 

s 

c 

a 

X 

u 

11' 

s 

-  7.8 

-99 

-62 

78 

-  0"2 

-  3..9 

26 

46 

75.5 

-  23.5 

96 

12.2 

-71 

42 

93 

40.5 

39 

89.5 

32.4 

10.4 

41 

76 

-62 

92 

25  5 

-  4.5 

-11.5 

14 

6.5 

-99.5 

90.5 

40.5 

-  46 

-  1.4 

20 

-47 

-86 

64.5 

64 

-  6.3 

.5.1 

10 

-20.5 

85 

-93.5 

-25  " 

-  52 

-  5.3 

33 

39 

90 

-92.5 

34 

8.6 

-  6.0 

9 

125 

-99 

82 

56 

-  2 

-  08 

16 

-32 

-72 

87 

89 

-16 

- 1.3.3 

16 

14 

23 

42.5 

-18 

3.1 

0.4 

(  279  ) 
Nous  en  avons  clédiiit,  par  les  moindres  carrés: 

j  =  -0",l5;i,  .v=-0",07o;     f  =  — 0",005,  .,=  — C'-OOS, 

et  avons  obtenu  comme  résidus,  au  lieu  des  différences 
D  de  Peters,  les  différences  D'  figurant  dans  le  tableau. 
Si  Ton  fait  la  somme  des  carrés  des  unes  et  des  autres, 
on  trouve 

Une  telle  diminution  de  l'erreur  probable  est  un  indice 
presque  certain  de  l'existence  réelle  des  deux  corrections 
que  nous  venons  de  signaler,  et  dont  la  plus  importante 
porte  sur  les  termes  solaires. 

Il  se  passera  longtemps  encore  avant  que  l'ensemble 
de  ces  dernières  corrections  (nutation  solaire  et  aberra- 
tion) soit  bien  connu. 

Et  peut-être  le  moyen  le  plus  simple  de  résoudre  le 
problème  serait-il  de  le  scinder,  c'esl-à-dire  de  détermi- 
ner exactement,  à  moins  de  0".0i  près,  la  parallaxe  du 
Soleil,  pour  en  déduire  la  valeur  de  la  constante  de 
l'aberration. 

La  théorie  du  mouvement  de  rotation  de  l'écorce  ter- 
restre a  donc  établi  l'existence  de  la  nutation  chandlé- 
rienne,  mais  elle  a  montré,  en  outre,  que  celle-ci  n'est 
pas  une  modification  de  la  nutation  eulérienne,  comme 
on  le  croit,  et  que  cette  dernière  existe  également  pour 
l'écorce. 

Quant  au  terme  solaire  de  Chandler,  à  caractère  diurne, 
il  peut  s'expliquer,  comme  nous  l'avons  dit,  ou  par  un 
déplacement  météorologique  du  pôle  d'inertie  (*),  ou  par 

I*)  Essai  sur  la  variation  des  Latitudes.  Bruxelles,  Hayez,  1894.. 


(  280  ) 

des  déviations  périodiques  de  la  verticale,  provenant  de  la 
non-coïncidence  des  centres  de  gravité  de  l'écorce  et  du 
noyau  (*). 

Ainsi  se  trouve  expliqué  le  phénomène,  jusqu'à  présent 
si  obscur,  de  la  variation  des  latitudes. 

Quant  au  sens  précis  de  cette  expression,  aujourd'hui 
courante  dans  la  science,  il  nous  sera  permis  de  rappeler 
que  nous  n'avons  jamais  varié  à  son  sujet  (**). 

On  a  cru,  avec  Oppolzer,  pouvoir  rapporter  correcte- 
ment les  formules  de  la  nutation  à  l'axe  instantané,  et 
éliminer  ainsi  la  nutation  eulérienne  (et  chandlérienne). 

Après  de  nombreux  travaux  sur  cette  n)atière,  nous 
sommes  enfin  airivé  à  démontrer  que,  si  le  procédé 
d'Oppolzer  (corrigé  de  l'erreur  capitale  commise  par  son 
auteur)  élimine  la  nutation  eulérienne  en  obliquité,  cette 
nutation  reparaît  en  longitude  et,  chose  plus  grave,  dans 
l'expression  môme  de  l'heure  (***). 

C'est  donc  à  l'axe  d'inertie,  comme  l'ont  fait  tous  les 
géomètres  ('^),  Oppolzer  seul  excepté,  qu'on  doit  rappor- 
ter les  coordonnées,  pour  en  avoir  des  expressions  cor- 
rectes. Et  alors  on  conçoit  qu'une  grande  partie  des  varia- 
tions des  latitudes  (rapportées  à  l'axe  instantané),  se 
transforment  en  des  nutations  de  l'axe  d'inertie,  négli- 
gées à  tort  par  Oppolzer  et,  à  sa  suite,  par  presque  tous 
les  astronomes. 


(*)  Théorie  du  mouvement  de  cotation  de  iccorce  terrestre.  Bi'ii- 
xelles,  Hayez,  1898. 

(**)  C.  h.,  1890;  Bull.  Astr.,  1890;  Acta  Math.,  189i>;  Annuaire 
de  rObs.  roy.  de  Belgique,  1890-1897;  Bull,  de  l'Acad.  roy.  de  Bel- 
gique, 189M897. 

("*)  Vicrtel  Jahrschrift,  1896;  Bull,  de  l'Acad.  roy.  de  Belgique,  1897; 
Annuaire  de  l'Obs.  roy.  de  Belgique,  1897. 

(")  Euler,  Laplace,  Bessel,  Poisson.  Serrel  et,  enfin,  Tisserand. 


(  281  ) 

Ce  n'est  pas  à  dire  que  nous  niions  absolument  la  possi- 
bilité de  variations  réelles  de  la  latitude,  rapportée  à  l'un 
ou  l'autre  pôle:  celles-ci  surviendraient  s'il  existait  un 
déplacement  mécanique  du  pôle  d'inertie,  provenant  soit 
de  l'accumulation  des  neiges  hivernales  au  pôle,  soit  des 
déformations  élastiques  de  l'écorce. 

C'est  ce  que  l'étude  de  cette  question  si  intéressante, 
poursuivie  dans  la  voie  théorique  que  nous  venons  d'indi- 
quer, pourra  révéler  un  jour,  en  même  temps  qu'elle 
répandra  la  lumière  sur  bien  des  points,  encore  imparfai- 
tement connus,  des  formules  de  réduction  au  lieu  appa- 
rent. 

C'est  l'ancienne  méthode  de  Laplace  et  de  Bessel, 
abandonnée  à  tort  depuis  trente  ans,  qui  sera  reprise 
sous  peu,  appropriée  à  l'écorce  terrestre,  par  tous  les 
astronomes  qui  voudront  se  rendre  compte  par  eux- 
mêmes  de  l'exactitude  des  formules  dont  ils  font  usage. 


Sur  les  nombreux  effets  de  l'élasticité  des  liquides  (troisième 
communication)  ;  par  G.  Van  der  Mensbrugghe,  mem- 
bre de  l'Académie. 

A  la  (in  de  ma  deuxième  note  sur  le  même  sujet  (*) 
j'ai  énoncé  une  conséquence  des  plus  importantes,  savoir 
que  toute  nappe  liquide  courbe  et  suffisamment  mince, 
qui  descend  sous  l'action  de  la  pesanteur,  est  sollicitée 
par  des  pressions  normales  d'autant  plus  énergiques  que 


(*)  Bull,  de  l'Acad.  roij.  de  Belgique,  3e  série,  t.  XXXII,  p|j.  418-4^25, 
1896.  Pour  la  première  note,  voir  même  tome,  p.  270. 


(  282  ) 
les  forces  de  tension  distribuées  dans  toutes  les  portions, 
tant  intérieures  que  superficielles,  de  la  nappe,  sont  elles- 
mêmes  plus  intenses. 

J'ai  déjà  signalé  une  vérification  très  frappante  de 
cette  proposition  :  elle  consiste  dans  la  forme  affectée  par 
une  nappe  liquide  s'échappant  par  une  fente  circulaire 
d'environ  V^  millimètre  de  largeur  et  60  millimètres  de 
diamètre  moyen. 

Aujourd'hui  je  me  propose  de  décrire  quelques  faits 
qui  viennent  à  l'appui  de  la  même  conclusion.  Je  com- 
mencerai par  les  plus  simples. 

Explication  de  quelques  faits  simples 
ou  fréquemment  observés. 

1.  I.orsqu'on  déverse  lentement  un  liquide  d'une  cap- 
sule en  verre  et  sans  bec,  on  sait  que  ce  liquide  ne  quitte 
généralement  pas  la  paroi  latérale  extérieure  de  la  cap- 
sule; c'est  pour  ce  motif  qu'un  opérateur  peu  expéri- 
menté a  souvent  beaucoup  de  peine  à  transvaser  un 
liquide.  Pour  donner  plus  d'ampleur  à  l'expérience  en 
question,  je  me  suis  servi  d'un  grand  réservoir  cylin- 
drique à  fond  plat,  ayant  ;2o  centimètres  de  hauteur  et 
une  contenance  d'environ  12  litres. 

Je  dispose  le  réservoir  de  manière  que  le  fond  fasse, 
par  exemple,  un  angle  de  50°  avec  l'horizon  (fig.  1);  près 
de  la  base,  je  fais  arriver  l'extrémité  ouverte  d'un  tuyau 
en  caoutchouc  mis  en  communication  avec  le  tuyau  de 
conduite  d'une  distribution  d'eau;  j'ai  eu  soin,  au  préa- 
lable, de  rendre  aussi  propres  que  possible  les  surfaces 
intérieure  et  extérieure  du  réservoir.  Cela  étant,  j'ouvre 
le  robinet  de  la  conduite,  jusqu'à  ce  que  j'aie  introduit 


(  283  ) 

autant  d'eau  que  possible  dans  le  vase;  quand  je  juge  que 
le  liquide  est  arrivé  au  repos  dans  toute  sa  masse,  je  rou- 
vre un  peu  le  robinet,  et  je  constate  que  la  nappe  d'eau 
qui  franchit  le  bord  lèche  la  paroi  solide  sans  presque 
s'en  écarter.  En  augmentant  graduellement  la  quantité 
de  liquide  qui  déborde,  je  vois  se  former  peu  à  peu  une 
nappe  s'appuyant  toujours  d'un  côté  sur  la  paroi  latérale, 
mais  s'en  écartant  de  plus  en  plus  de  l'autre  côté,  jus- 
qu'à produire  une  lame  liquide  dans  la  portion  intermé- 
diaire. J'ai  pu  incliner  le  fond  du  vase  de  45°  sur  l'hori- 
zon et  observer  néanmoins  une  lame  liquide  s'appuyant 
sur  la  paroi  latérale. 


Fir,.  1. 

Si,  dans  les  conditions  ci-dessus,  on  opère  avec  de 
l'eau  de  savon,  on  observe  des  effets  qui  sont  absolument 
du  même  genre. 

Pour  expliquer  le  phénomène  en  question,  sufïît-il 
d'invoquer  l'adhérence  du  liquide  an  verre?  Je  ne  le  pense 


(  284  ) 
pas.  En  effet,  si  je  couvre  la  face  extérieure  du  réservoir, 
sur  une  largeur  de  4  à  5  centimètres,  d'une  mince  couche 
d'une  huile  quelconque,  si  ensuite  je  produis  l'écoule- 
ment de  l'eau  comme  dans  le  premier  cas,  la  nappe  s'in- 
tléchit  encore  vers  la  paroi  ;  seulement,  à  mesure  que  la 
vitesse  du  liquide  augmente,  la  portion  baignée  diminue, 
et  le  liquide  aboutit  au  verre  sous  un  angle  peu  différent 
de  90°;  et  cependant  il  y  a  une  grande  quantité  de  liquide 
déviée  de  la  verticale  vers  la  paroi,  ce  qui  montre  bien 
que  si  l'adhérence  intervient  incontestablement  dans  le 
phénomène,  il  faut  réserver  une  part  au  moins  aussi 
grande  à  une  tout  autre  cause. 

Pour  trouver  cette  cause,  nous  n'avons  qu'à  nous  rap- 
peler que  dans  les  premiers  moments  de  la  chute  d'un 
liquide,  les  distances  intermoléculaires,  estimées  dans  le 
sens  vertical,  tendent  à  augmenter  d'autant  plus  rapide- 
ment que  la  vitesse  et  la  durée  de  la  chute  sont  moin- 
dres (*)  ;  c'est  ce  qui  développe  immédiatement  dans  la 
masse  liquide  descendante  une  force  élastique  de  traction 
ou  de  tension,  en  vertu  de  laquelle  la  surface  limite 
convexe  et  les  tranches  intérieures  qui  s'infléchissent 
vers  le  bas  en  vertu  de  la  pesanteur,  éprouvent  de  fortes 
pressions  vers  l'intérieur,  c'est-à-dire  vers  la  paroi  laté- 
rale extérieure.  Comme  cette  force  élastique  se  produit 
dans  tous  les  liquides,  il  n'est  pas  étonnant  que  l'eau  de 
savon  présente  le  même  effet  que  l'eau  pure. 

2.   Un  second  fait  bien  connu,  mais  si  fréquent  qu'on 
n'y  prête  pas  d'attention,  est  le  suivant  :  lorsqu'on  verse 


(*)  Voir  la  première  conimunicalion,  p.  5. 


(  285  ) 
de  l'eau  d'une  aiguière  dans  un  bassin,  on  voit  qu'immé- 
dialeinenl  après  s'être  détachée  de  l'aiguière,  la  petite 
nappe  liquide  commence  à  se  resserrer  en  montrant  des 
stries  longitudinales;  cet  etfet  s'accentue  de  plus  en  plus 
et  peut  môme  donner  lieu  à  une  nappe  dirigée,  à  angle 
droit  sur  la  première. 

Au  premier  abord,  on  serait  tenté  d'attribuer  le  fait 
aux  pressions  capillaires  développées  par  la  tension 
superiîcielle  aux  deux  bords  de  la  nappe;  sans  aucun 
doute,  ces  pressions  existent,  mais  elles  me  paraissent 
totalement  insuffisantes  pour  expliquer  l'efFel  produit; 
car,  d'une  part,  le  bord  est  trop  épais,  il  va  d'ailleurs  en 
grossissant,  et  ainsi  ne  se  développent  que  des  pressions 
relativement  bien  faibles;  d'autre  part,  la  vitesse  va  en 
croissant  dans  le  sens  vertical;  il  faut  donc  des  pressions 
latérales  énergiques  pour  donner  lieu  aux  stries  et  au 
resserrement  de  plus  en  plus  marqué  de  la  nappe.  Ces 
pressions  se  produisent,  selon  moi,  non  seulement  dans 
la  couche  superficielle,  mais  encore  dans  toute  la  masse  ; 
car  deux  particules  situées  dans  un  même  plan  vertical 
perpendiculaire  à  la  nappe  tendent  sans  cesse  à  s'écarter 
1  une  de  l'autre,  en  vertu  de  l'action  de  la  pesanteur  ;  or  le 
liquide  réagit  fortement  contre  la  moindre  augmentation 
des  distances  intermoléculaires,  et  cette  réaction  se  mani- 
feste précisément  par  la  naissance  des  stries  et  par  le 
rapprochement  graduel  de  la  masse  vers  les  parties  cen- 
trales de  la  nappe.  Ce  qui  me  confirme  encore  dans  mon 
opinion,  c'est  qu'on  obtient  des  résultats  du  même  genre 
avec  l'eau  de  savon,  l'alcool,  l'éther,  etc. 

5.  Un  autre  effet  assez  curieux  a  été  observé  d'abord 


(  -286  ) 

par  le  P.  Lacouture  (*)  :  une  veine  d'eau  s'écoule  verti- 
calement de  haut  en  bas  par  l'orifice  d'un  tube  partant 
d'un  vase  de  Mariotte  et  ayant  7  millimètres  de  diamètre; 
quand  la  vitesse  du  liquide  est  devenue  très  faible,  il 
arrive  parfois  que  l'écoulement  s'arrête  tout  à  coup; 
«  l'orifice  »,  dit  l'auteur,  «  se  trouve  alors  comme  fermé 
))  par  une  goutte  qu'on  est  parvenu  à  isoler  un  moment, 
»  et  dont  la  surface  forme  comme  une  membrane...  Le 
»  contact  d'un  corps  même  très  délié  rompt  la  trame  de 
»  ce  réseau,  et  l'écoulement  recommence.  » 

Ce  fait,  dont  je  n'ai  trouvé  nulle  part  une  explication 
plausible,  me  paraît  encore  dû  à  ce  que  la  goutte  pen- 
dante est  soumise  dans  toutes  ses  parties  à  une  très  faible 
élasticité  de  traction,  laquelle  irait  en  augmentant  si  la 
goutte  se  mettait  en  mouvement  vers  le  bas;  voilà  pour- 
quoi le  contact  d'un  corps  même  très  délié  suffit  pour 
annuler  la  force  élastique  en  question,  et  dès  lors  l'équi- 
libre est  rompu. 


Explication  de  certaines  particularités  des  nappes 
de  Savart. 

En  1855,  Savart  a  publié  son  célèbre  mémoire  sur  le 
choc  d'une  veine  liquide  lancée  contre  un  plan  circu- 
laire; les  phénomènes  décrits  par  l'illustre  physicien 
français  ont  été  étudiés  ensuite  successivement  par 
Hagen,  Tyndall,  J.  Plateau,  M.  Boussinesq  et  par  moi- 


(*)  Voir  Les  Mondes,  2e  série,  1'"  année,  1866,  t.  Il,  p.  73. 


(  287  ) 

même  (*)  ;  mais  dans  tous  ces  travaux,  on  suppose  les 
liquides  incompressibles,  ou,  du  moins,  on  n'invoque 
aucun  changement  de  disposition  moléculaire  survenu 
pendant  leur  mouvement;  c'est  pour  ce  motif,  je  pense, 
que,  jusqu'à  présent,  on  n'a  pas  encore  donné  des  expli- 
cations nettes  de  plusieurs  phases  des  plus  singulières 
qu'olîrent  les  nappes  de  Savart. 

Pour  plus  de  clarté,  je  vais  rappeler  l'une  de  ses  expé- 
riences, et  pour  chaque  phase,  je  tâcherai  de  donner 
l'explication  qui  me  paraît  la  plus  plausible. 

Première  phase.  —  «  Sous  une  charge  initiale  de 
))  2  mètres,  l'eau,  d'abord  parfaitement  calme,  tombe  sur 
»  un  disque  horizontal  de  "27  millimètres  de  diamètre 
))  et  placé  à  20  millimètres  de  distance  à  l'orifice,  dont 
))  le  diamètre  est  de  12  millimètres.  Après  le  choc,  il  se 
))  produit  une  nappe  circulaire  et  continue  dont  le  dia- 
))  mètre  est  d'environ  GO  centimètres.  Dans  ces  condi- 
»  tions,  la  partie  centrale  de  la  nappe  est  mince,  unie 
))  et  transparente,  mais  son  pourtour,  qui  a  une  plus 
))  grande  épaisseur,  est  trouble  et  se  présente  sous 
»  l'aspect  d'une  zone  annulaire  recouverte  d'un  grand 
»  nombre  de  stries  rayonnantes  coupées  par  d'autres 
))  stries,  mais  circulaires,  qui  projettent  au  loin  une 
»  multitude  de  gouttelettes.  » 

Afin  de  comprendre  cette  première  phase,  nous  allons, 
par  la  pensée,  suivre  le  li(juide  à  partir  de  l'orifice. 
Comme  la  charge  initiale  est  de  2  mètres,  le  choc  de 
l'eau  contre  le  disque  doit  y  développer  une  grande  com- 


(*)  Sur  une  nouvelle  application  de  rénenfic  potentielle  des  surfaces 
liquides  (Bull,  de  l'Acad.  roy.  de  Belgique,  2o  série,  t.  XLVI,  p.  635, 
1878].  J'ai  donné  à  cette  occasion  les  indications  bibliographiques. 


(  288  ) 

pression  qui  diminue  extrêmement  peu  le  volume  de 
chaque  unité  de  poids  du  liquide,  mais  y  fait  naître  une 
tbrle  élasticité  de  pression  ;  or,  en  raison  de  l'élasticité 
parfaite  de  l'eau,  il  n'y  a  pas  de  perte  sensible  de  force 
vive,  et  la  détente  s'opère  en  une  très  petite  fraction  de 
seconde,  pendant  laquelle  le  liquide  est  lancé  dans  tous 
les  sens  parallèlement  au  plan  du  petit  disque.  Aussi 
longtemps  que  les  distances  intermoléculaires  ne  tendent 
pas  à  augmenter,  les  seules  forces  retardatrices  sont  les 
tensions  superficielles  des  deux  faces  de  la  nappe;  c'est 
pourquoi  la  partie  centrale  de  cette  dernière  est  unie  et 
transparente. 

iMais  bientôt,  par  l'étirement  de  la  lame  amincie,  il  se 
développe  de  l'élasticité  de  traction,  c'est-à-dire  que  les 
particules  éprouvent  des  écarts,  extrêmement  minimes  à 
la  vérité,  mais  suffisants  pour  donner  subitement  lieu  à 
des  lésistances  énergiques;  alors  les  tranches  qui  arrivent 
viennent  choquer  celles  qui  se  sont  ralenties;  de  là  des 
bandes  circulaires  d'où  s'échappent  constamment  des 
gouttelettes;  un  peu  plus  loin  se  produit  un  nouveau 
choc,  ainsi  qu'une  nouvelle  bande  circulaire  d'où 
jaillissent  tumultueusement  de  minimes  masses  liquides 
tout  à  fait  irrégulières  dans  leur  forme  et  leur  grandeur; 
on  peut  s'en  assurer  en  regardant  la  zone  trouble  à  travers 
les  fentes  d'un  disque  tournant  avec  une  vitesse  conve- 
nable. Ce  qui  renforce  encore  l'éparpillement  du  liquide, 
ce  sont  les  pressions  exercées  contre  les  portions  termi- 
nales de  la  nappe,  pressions  provenant  non  seulement 
des  tensions  superficielles,  mais  encore  des  forces  déve- 
loppées à  l'intérieur  par  l'élasticité  de  traction  :  c'est  ce 
qui  explique  aussi  les  fortes  dentelures  qui  paraissent  et 
disparaissent  tour  à  tour  au  même  endroit  et  accusent 
l'existence  de  vrais  mouvements  vibratoires. 


(  289  ) 

Deuxième  phase.  —  «  A  mesure  que  la  charge  diminue, 
le  diamètre  de  la  nappe  s'agrandit  peu  à  peu;  en  même 
temps,  l'auréole  change  d'aspect,  elle  devient  plus  trans- 
parente, sa  largeur  diminue,  elle  se  recouvre  de  larges 
bosselures  et  disparaît  entin  entièrement,  quand  la  pres- 
sion à  l'orifice  n'est  plus  que  de  OO  centimètres  environ. 
La  nappe  atteint  alors  son  diamètre  maximum,  qui  est 
d'à  peu  près  80  centimètres,  et  elle  apparaît  sous  la 
forme  d'une  large  capsule  parfaitement  unie  et  dont  le 
contour  libre,  légèrement  dentelé,  lance  un  grand  nombre 
de  gouttelettes  partant  des  angles  saillants  des  dente- 
lures. » 

Pour  expliquer  cette  deuxième  phase,  iTsuttit  de  se 
rappeler  que  plus  la  vitesse  du  liquide  est  considérable, 
plus  aussi,  à  partir  du  moment  où  se  sera  opérée  com- 
plètement la  détente  après  le  choc,  les  molécules  seront 
tirées  vivement  dans  la  direction  radiale,  ce  qui  fera 
naître  de  l'élasticité  de  traction  et,  par  conséquent,  de 
fortes  résistances  au  mouvement  du  liquide.  Réciproque- 
ment, si  la  vitesse  n'est  pas  trop  grande,  le  degré  d'élas- 
ticité de  tension  sera  peu  marqué  et  le  mouvement  de  la 
niasse  sera  plus  régulier.  Voilà  pourquoi  la  portion  unie 
et  transparente  acquiert  un  diamètre  plus  grand  lorsque 
la  charge  diminue  :  la  tendance  à  l'écartement  molécu- 
laire diminue  de  plus  en  plus,  et  ainsi  s'explique  la  pro- 
duction, non  plus  de  stries  nombreuses,  mais  de  larges 
bosselures  qui  disparaissent  quand  la  pression  à  l'orifice 
n'est  plus  que  de  (>0  centimètres.  Quant  aux  gouttelettes 
lancées  par  les  parties  saillantes  des  dentelures,  elles 
proviennent  de  la  compression  subite  éprouvée  par  le 
liquide  en  ces  parties. 

5'"®   SÉRIE,    TOaiE    XXXVI.  20 


{  290  ) 

Troisième  phase .  —  «  La  pression  continuant  à  décroître, 
la  nappe  unie  diminue  graduellement  de  diamètre,  et  en 
même  temps  se  recourbe  à  sa  partie  inférieure  en  se 
portant  vers  la  tige  qui  soutient  le  disque;  à  la  pression 
de  32  à  33  centimètres,  elle  se  ferme  entièrement,  en 
revêtant  la  forme  d'un  solide  de  révolution  d'environ 
40  centimètres  de  diamètre  et  45  centimètres  de  hauteur, 
dont  la  surface  est  parfaitement  unie  et  dont  la  généra- 
trice ressemble  beaucoup  à  une  lemniscate.  » 

Quant  à  ce  troisième  stade  du  phénomène,  J.  Plateau 
et  moi-même  nous  l'avons  attribué  à  l'influence  de  la 
tension  superficielle  de  la  lame  ;  cette  influence  est 
incontestable;  aujourd'hui  je  puis  en  invoquer  encore 
une  autre  :  c'est  l'élasticité  de  traction  développée  à 
la  fois  dans  les  couches  superficielles  et  à  l'intérieur 
de  la  masse  liquide  ;  de  là  des  pressions  normales  qui 
exaltent  celles  provenant  de  la  tension  superlicielle  et 
qui,  pour  une  charge  assez  réduite,  suflisent  non  seule- 
ment pour  fermer  la  lame,  mais  encore  pour  la  faire 
remonter  sensiblement  le  long  de  la  tige. 

Quatrième  et  cinquième  phases.  —  (c  Quand  la  pression 
diminue  encore  davantage,  il  arrive  bientôt  un  instant 
où  la  nappe  fermée  semble  tiraillée,  surtout  dans  la  por- 
tion la  plus  large  ;  au  bout  de  quelques  secondes,  il  se 
dessine  parfois  une  arête  saillante  dans  cette  portion,  et 
immédiatement  après,  la  nappe  se  soulève,  et  de  convexe 
qu'elle  était  vers  le  haut,  elle  devient  concave;  de  son 
bord  descend  une  lame  courbe  fermée  vers  le  bas.  Cette 
figure  ne  persiste  que  quelques  instants  pour  se  changer 
de  nouveau  en  une  sorte  de  vase  fermé  en  bas  comme 
précédemment,  mais  de  dimensions  moindres.  Ces  chan- 


(  29i  ) 

gements  brusques  peuvent  se  reproduire  plusieurs  fois 
avant  que  l'écoulement  cesse  tout  à  fait.  » 

Ces  deux  dernières  phases,  étroitement  liées  entre 
elles,  ont  beaucoup  surpris  Savart,  qui  a  vainement 
tâché  d'en  donner  l'explication.  M.  Boussinesq  a  esquissé 
la  théorie  de  la  formation  des  nappes  unies  et  fermées, 
mais  ses  calculs  ne  sont  j)as  d'accord  avec  l'expérience 
et  ne  font  pas  voir  d'où  dérive  la  transformation  des 
nappes.  En  1878,  j'ai  proposé  une  explication  plausible, 
mais  en  ne  tenant  aucun  compte  des  elléts  de  l'élasticité 
des  liquides  au  sein  même  de  leur  masse. 

Aujourd'hui  il  me  parait  aisé  de  montrer  que  cette 
élasticité  doit  nécessairement  produire  les  singularités 
<lécrites  plus  haut;  en  effet,  soit//  la  charge  pour  laquelle 
la  nappe  se  ferme  pour  la  première  fois,  en  dessinant 
la  courbe cmkmc  (voir  fig.  2), 
par  exemple. 

Concevons  maintenant 
deux  molécules  qui  quittent 
l'une  Vioo  de  seconde  après 
l'autre  la  portion  de  la 
nappe  où  les  tangentes  à  la 
méridienne  de  la  surface  de 
révolution  réalisée  sont  ver- 
ticales ou  à  fort  peu  près  ;  on 
trouve  aisément  pour  la  distance  initiale  de  ces  molé- 
cules, en  appelant  a  la  vitesse  aux  points  m  les  plus 
éloignés  de  l'axe  de  la  ligure  : 


\ 


1 


100^  ^2     100 


(  292  ) 

et  pour  l'accroissement  de  la  distance  au  bout  de  '/loo  de 
seconde  : 

Rappelons-nous  maintenant  que  l'énergie  de  mouve- 
ment du  liquide  après  le  choc  est  transformée  très  rapi- 
dement et  pour  une  très  grande  part  en  énergie  poten- 
tielle renfermée  dans  la  nappe  étalée  suivant  tous  les 
azimuts;  nous  pouvons  conclure  de  là  que  la  vitesse  a 
du  liquide  aux  points  où  les  tangentes  aux  lignes  méri- 
diennes de  la  nappe  sont  verticales  n'est  qu'une  fraction 
-  de  celle  qui  correspond  à  la  charge  h  à  l'orifice;  nous 
pourrons  donc  écrire  pour  la  distance  ci-dessus  : 


Or,  à  mesure  que  /*  diminue,  la  quantité  de  liquide 
qui  doit  s'étaler  dans  le  même  temps  sur  la  même 
étendue  de  la  nappe,  devient  évidemment  moindre 
aussi  ;  il  s'ensuit  que  non  seulement  h  diminue,  mais 
encore  la  fraction-.  Dans  ces  conditions,  l'accroisse- 
ment relatif  des  distances  intermoléculaires,  c'est-à-dire 


100^ 


n        ^         100    2 


augmente  rapidement,  et  comme  la  nappe  devient  gra- 
duellement plus  mince,  les  molécules  éprouventde  plus  en 
plus  de  difficulté  à  se  maintenir  aux  mêmes  distances,  au 


(  293  ) 
lieu  d'aller  eu  s'écartaiit  entre  elles  enijvertu  des  lois  de  la 
pesanteur.  Mais  alors  le  liquide  franchira  de  plus  en  plus 
difficilement  la  portion  la  plus  large  de  la  nappe;  cette 
portion  sera  tendue,  travaillée,  elle  fera  parfois  remonter 
le  bas  de  la  ligure  le  long  de  l'axe  (voir  la  ligne  ponc- 
tuée m'cm');  on  verra  se  former  sui'  cette  portion  une 
arête  saillante,  à  cause  de  la  force  de  traction  développée 
dans  toute  l'épaisseur  de  la  lame,  force  dirigée  de  haut 
en  bas  et  réciproquement.  Mais,  dès  ce  moment,  il  n'y 
aura  plus  assez  de  liquide  pour  alimenter  la  partie  infé- 
rieure delà  nappe,  qui  s'ouvrira  brusquement;  aussitôt, 
la  portion  supérieure,  sollicitée  par  des  forces  de  traction 
dirigées  en  sens  contraire  à  la  pesanteur,  sera  soulevée 
au-dessus  du  plan  du  disque  et  dessinera  une  lame 
caibc,  concave  vers  le  haut,  comme  l'a  si  bien  observé 
Savart,  sans  pouvoir  en  indiquer  la  cause. 

Ce  qui  vient  entièrement  à  l'appui  de  cette  théorie, 
c'est  que,  d'après  mes  expériences,  il  n'y  a  jamais  de 
relèvement  brusque  quand  on  opère  avec  une  charge 
constante,  ou  bien  lorsque  la  charge,  au  lieu  de  diminuer 
graduellement,  va  au  contraire  en  croissant;  enfin  le 
phénomène  ne  se  manifeste  pas  non  plus  dans  le  cas  où 
la  nappe  présente  une  ouverture. 

La  même  théorie  s'applique  aux  lames  de  Savart  pro- 
duites par  le  choc  de  deux  veines  liquides  lancées  par  des 
orifices  circulaires  dans  des  directions  qui,  au  point  de 
rencontre,  sont  exactement  opposées  (*). 

Comme  il  fallait  s'y  attendre,  tant  que  la  pression  est 
forte    (de    l'",o  à    i  mètres)  et   que   les    nappes   sont 


(*)  Annales  de  chimie  et  de  physique,  t.  LV,  1833,  p.  "loi. 


(  ^294  ) 

entourées  d'une  auréole,  elles  paraissent  sensiblement 
circulaires,  et  le  point  central  de  rencontre  des  jets  en 
occupe  le  centre;  mais  à  mesure  que  la  pi'ession  décroît, 
leur  rayon  vertical  supérieur  diminue  de  longueur, 
tandis  que  le  rayon  inférieur  va  en  augmentant;  on 
reconnaît  ainsi  l'action  de  plus  en  plus  efficace  de  la 
pesanteur.  Pour  des  pressions  suffisamment  réduites,  les 
nappes  sont  entourées  d'un  bourrelet  arrondi  d'où 
s'échappent  constamment  des  gouttelettes,  à  cause  de  la 
compression  trop  intense  du  liquide  dans  les  portions 
terminales. 

Il  me  paraît  certain  que  mon  explication  s'applique- 
rait à  bien  d'autres  faits  du  même  genre,  dont  on  s'est 
vainement  efforcé  de  l'endre  compte,  parce  (ju'on  ne  con- 
sidérait pas  les  liquides  comme  élastiques. 


IIecherches  sur  les  alcools  nitrés.  —  Sur  les  dérivés  du 
bromo-nitro-méthane 

HX-Br(NO,); 

par  Joseph  Maas,  docteur  en  sciences. 

M.  le  professeur  L.  Henry  a  fait  connaître  depuis 
quelques  années,  par  lui-même  et  par  ses  élèves,  les  pro- 
duits de  la  condensation  des  paraffines  nitrées  avec  les 
aldéhydes  aliphatiques. 

Je  me  suis  occupé,  à  son  invitation,  des  dérivés  de 
cet  ordre  correspondant  au  bromo-nitro-méthane  H^C 
-  Br(N02). 


(  295  ) 

J'ai  préparé  le  bromo-nitro-méthane  par  la  méthode 
indiquée  par  M.  J.  Tscherniak  (*)  :  réaction  du  brome  sur 
le  dérivé  sodé  du  nitro-méthane. 

Je  ferai  remarquer  que  l'emploi  de  l'éthylate  de  sodium 
dissous  dans  l'alcool  est  préférable,  pour  obtenir  celui-ci, 
à  l'emploi  de  la  solution  alcoolique  de  soude  caustique. 
On  introduit  ce  sel  sodé  bien  sec,  par  petites  portions 
successives,  dans  la  quantité  nécessaire  de  brome  — 
molécule  pour  molécule  —  refroidi  de  temps  en  temps. 
On  décolore  le  bromo-nitro-méthane  au  moyen  de  la 
solution  des  réactifs  sulfureux,  SO^  ou  sullites  acides. 

La  liqueur  aqueuse  devenant  acide,  à  la  suite  de  la 
disparition  du  brome,  une  partie  du  produit  formé  entre 
en  dissolution  ;  la  saturation  de  cette  solution  acide  par 
NaHC0,3  en  détermine  la  précipitation  intégrale.  En  pro- 
cédant ainsi,  on  arrive  à  un  rendement  d'environ  80  % 
du  rendement  théorique. 

Le  bromo-nitro-méthane  constitue  un  liquide  incolore, 
d'aspect  plus  ou  moins  huileux,  d'une  odeur  très  irritante, 
insoluble  dans  l'eau,  mais  soluble  dans  l'éther.  Il  bout  à 
1470-1490  sous  la  pression  ordinaire. 

Selon  la  règle  établie  par  M.  Louis  Henry,  la  capacité 
de  condensation  des  nitro-paraffines  avec  les  aldéhydes 
inférieures  est  déterminée  par  le  nombre  des  atomes 
d'hydrogène  fixés  sur  l'atome  de  carbone  auquel  est 
attaché  le  radical  nitrile -NO.2  et  égale  à  ce  nombre. 

Alors  qu'elle  est  multiple,  cette  aptitude  à  la  conden- 
sation, comme  la  saturation  des  bases  et  des  acides  poly- 


(*)  Liebig's  Annalen  der  Chemie,  t.  CLXXX,  p.  ^29  (année  1875). 


(  296  ) 

valenls,  peut  s'exercer  de  deux  manières  :  en  une  seule 
fois  et  tolalement,  ou  bien  incomplètement  et  d'une 
manière  successive. 

Cela  étant,  alors  que  la  capacité  de  combinaison  du 
nitro-métbane  est  égale  à  trois,  celle  du  bronio-nitro- 
méthane  n'est  que  deux;  et  elle  doit  pouvoir  s'exercer  en 
deux  temps  ou  deux  pbases  successives,  donnant  succes- 
sivement un  dérivé  mono-aldébydique  et  un  dérivé  bi- 
aldéliydique. 

On  prévoit  même  (|ue  les  dérivés  bi-aldéliydi(jues 
peuvent  être  de  deux  sortes  : 

a)  Simples,  correspondant  à  deux  molécules  d'une 
même  aldéhyde; 

b)  Mixtes,  correspondant  à  deux  molécules  d'aldéhydes 
différentes. 

Ces  données  générales  ont  été  vérifiées  par  l'expérien»*' 
d'une  manière  conmlète. 

Avant  d'en  faire  l'exposé  dans  les  faits  |)articuliers,  je 
ferai  remarquer  qu'il  semble  que  le  pouvoir  réactionnel 
du  nitro-méthane  a  perdu  de  son  intensité  dans  le  bromo- 
nitro-méthane,  par  suite  de  la  présence  d'un  atome  de 
brome  à  la  place  d'un  atome  d'hydrogène.  Ce  pouvoir 
additionnel  est  assez  puissant,  dans  le  nitro-méthane 
notamment,  vis-à-vis  du  mélhanal  pour  ne  s'exercer  que 
d'une  seule  manière,  en  une  fois  et  complètement.  Dans 
le  bromo-nitro-méthane,  au  contraire,  il  ne  s'é[)uise  <jue 
progressivement. 


(  297  ) 


PREMIÈRE   PARTIE. 

Condensation  du  bromo-mtro-méthane  avec  le  méthanal 
H2C  =  0. 

A.  ^  Addition  à  une  seule  molécule  de  méthanal. 
Il  en  résulte  de  IVt/coo/ éthylique  bronio-nitré  (H0)GHc2 

Rr 

-  CH  <  XTQ     OU  /-/  bromo-nitro-éthanol.  Voici  le  fait  : 

Un  mélange  de  7  Vi>  gi'atnmes  de  la  solution  acjueuse 
d'aldéhyde  formique  à  40  %  avec  i  i  grammes  de  bromo- 
nitro-méthane  ne  manil'este  aucune  réaction;  malgré  l'agi- 
tation, la  température  reste  constante  et  le  liquide  partagé 
en  deux  couches  insolubles  l'une  dans  l'autre.  L'in- 
troduction d'un  petit  fragment  de  carbonate  bipotassique 
dans  la  masse  liquide  sulïil  pour  déterminer  la  réaction. 

Celle-ci  s'accomplit  vivement,  les  deux  liquides  se 
dissolvent  l'un  dans  l'autre  et  la  température,  qui  était 
primitivement  de  50",  s'élève  jusqu'à  7t2". 

La  réaction  se  fait  suivant  l'équation 

H{  <'  ^^ 
CH,Br(NO,)  +  H,C  =  0      =        ,       ^'0i. 

HjC-HO 

Le  liquide  homogène  qui  s'est  formé  après  refroidisse- 
ment, est  épuisé  par  l'éther. 
Après  distillation  de  l'éther  au  bain  d'eau,  le  produit 


(  298  ) 

brut  restant  est  rectifié  par  distillation  fractionnée  sous 
pression  réduite. 

Les  premières  portions  sont  constituées  d'éther  et  de 
bromo-nitro-méthane  qui  ont  échappé  à  la  réaction.  On 
recueille  ce  qui  passe  entre  144"  à  150°,  sous  pression 
de  45  millimètres. 

Il  reste  un  produit  épais,  sirupeux,  qui  par  refroidis- 
sement devient  solide.  Celte  masse,  dissoute  dans  l'éther, 
cristallise  lentement. 

Ce  produit  sirupeux  est  en  grande  partie  le  produit  de 
la  condensation  complète  du  méthanal  avec  le  bromo- 
nitro-méthane 

Br(NO,)-C-(CH,OH>,.. 

Une  seconde  rectification  du  produit  distillé  donne  un 
produit  limpide  passant  entre  147°  et  148°,  sous  une 
pression  de  45  millimètres.  Le  rendement  est  d'environ 
65  °/o  du  rendement  théorique. 

L'analyse  de  ce  corps  a  fourni  les  résultats  suivants  : 

I.  Os^',o008  de  substance  ont  donné  21''%1  d'azote, 
sous  la  pression  de  770  millimètres  et  à  la  température 
de  10°. 

II.  a)  Os',0122  de  substance  ont  donné  0&',6762 
d'AgBr. 

[3)  Osf',5183  de  substance,  suivant  la  méthode  de  Carius, 
ont  donné  Os',5705  d'AgBr. 

III.  a)  Oe',r)009  de  substance  ont  donné  Oe',0948  de 
CO2  et  Oe',044  de  H2O. 

(BJO^',2118  de  substance  ont  donné  0e%0060  de  CO2 
et  OS', 0570  deH^O. 


(  299  ) 

D'où  l'on  déduit  : 

Trouvé, 

!. 

II. 

III.            IV. 

V. 

Calculé. 

C    .     .     U.59 

14.27 

—            — 

— 

14.41  «/o 

H    .     .       2.81 

2.24 

—            — 

— 

2.41 

N    .     .        — 

— 

8  30         — 

— 

8.23 

Br  .     .        — 

— • 

—        46.94 

47.34 

47.07 

Le  bromo-nitro-éthanol  Br  (NO^)  CH  -  CH.^  -  (OH) 
ainsi  formé  constitue  un  liquide  plus  ou  moins  épais, 
jaunâtre,  d'une  odeur  et  d'une  saveur  piquantes;  sa 
vapeur  irrite  fortement  les  muqueuses  de  l'œil  et  le 
liquide  lui-même  produit  de  violentes  irritations  à  la 
peau  et  cause  des  douleurs  très  aiguës. 

Il  est  peu  soluble  dans  l'eau,  soluble  dans  l'alcool  et 
l'éther. 

Sa  densité  à  l'état  liquide  est  égale  à  2.084  à  10";  il 
bout  à  147''-148°,  sous  une  pression  de  45  millimètres. 

Son  indice  de  réfraction  est  de  1.52952  à  la  tempéra- 
ture ordinaire. 

Le  poids  moléculaire  a  été  déterminé  suivant  la 
méthode  cryoscopique  : 

I.  Os'",2540  de  substance  dissoute  dans  20  centimètres 
cubes  d'eau  ont  produit  un  abaissement  du  point  de 
congélation  de  0",1(>. 

IL  0s'',7215  de  substance  dans  les  mêmes  conditions 

ont  produit  un  abaissement  de  0°,39. 

D'où  l'on  déduit  : 

Poids  moléculaire. 

Trouvé.-       Calculé. 

1 147     i 

Il .74  '™ 


(  300  ) 

Les  propriétés  du  bromo-nitro-éthanol  sont  de  deiiv 
ordres  : 

a)  Celles  qui  tiennent  à  l'existence  du  composant 
alcool  H^C  -  OH; 

b)  Celles  qui  tiennent  à  l'existence  du  composant  nifre 

"^  <N0./ 

A.  —  Composant  alcool  H.jC  -  OH. 

J'ai  constaté  le  caractère  alcool  dans  ce  composé  par 
l'action  de  l'acide  nitrique  et  de  l'anhydride  acétique, 
réactifs  qui  fournissent  les  éthers  correspondants. 

Éther  nitrique  Br  (NO^)  CH  -  CH^  (NO5),  ou  nitrate 
d'ëthylc  bromo-nitré  1-1 . 

Dans  un  mélange  refroidi  de  deux  parties  d'acide 
nitrique  ordinaire  et  de  trois  parties  d'acide  sulfurique 
du  commerce,  on  introduit  par  petites  portions  le  bro- 
mo-nitro-éthanol ;  celui-ci  se  dissout. 

Après  quelques  instants,  un  trouble  se  produit  et  une 
huile  vient  surnager. 

Pour  la  débarrasser  des  acides,  on  la  lave  à  l'eau,  dans 
laquelle  elle  est  insoluble. 

Après  plusieurs  lavages,  on  la  dessèche  sur  du  chlorure 
de  calcium.  Je  n'ai  pas  tenté  la  distillation  de  ce  produit; 
à  cause  de  la  présence  simultanée  de  NO3  et  NO.2,  il  doit 
être  instable. 

Le  nitrate  de  bromo-nitro-éthyle  desséché  et  non  rec- 
tifié constitue  un  liquide  légèrement  jaunâtre,  plus  ou 
moins  épais. 

Sa  densité  à  la  température  de  11"  est  2.438. 


/ 


(  301  ) 
Le  dosage  de  l'azote  a  fourni  le  résultat  suivant  : 
0^,5234  de  substance  ont  donné  35' ',2  d'azote  à  la  tem- 
pérature de  lO''  et  à  la  pression  de  768  millimètres,  ce  qui 
correspond  à 

Trouvé,  Calculé. 

Azote '/o 13.08         13.02 

Élher  acétique 

Br(iNOs)HC-CH5(C2HsO,)- 

Acétale  ou  éthanoale  d'éthyle  bromo-nilré   1-1. 

Je  me  suis  adressé,  à  l'exemple  de  M.  Louis  Henry, 
pour  obtenir  cet  éther  à  l'anhydride  acétique  plutôt  qu'au 
chlorure  d'acétyle,  le  gaz  HCl  pouvant  réagir  sur  le 
groupement  -NO^. 

Le  mélange  d'anhydride  acétique  et  de  bromo-nitro- 
éthanol,  en  quantités  équimoléculaires,  réagit  à  la  tem- 
pérature ordinaire  et  s'échautle  fortement.  Après  refroi- 
dissement, j'ai  traité  toute  la  masse  par  l'eau.  Il  se 
précipite  une  huile  insoluble  que  j'ai  lavée  encore 
plusieurs  fois  dans  l'eau. 

Le  produit  a  été  distillé;  il  bout  de  138"  à  142"  sous 
la  pression  de  50  millimètres. 

Cet  éther  exhale  une  odeur  acétique;  c'est  un  liquide 
incolore  qui,  à  la  température  de  41",  a  pour  densité 
1.958. 

Le  dosage  de  l'azote  a  fourni  le  résultat  suivant  : 

0s%4181  de  substance  ont  donné  23'^%1  d'azote  à  11» 
et  sous  une  pression  de  769  millimètres. 


(  302  ) 
Ce  qui  correspond  à  : 

Trouvé.         Calcule. 
Azole«/o 6.65         6.60 

En  sa  qualité  d'alcool  primaire,  le  bromo-nitro-élhanol 
doit  fournir  successivement  par  oxydation  une  aldéhyde, 
l'aldéhyde  bromo-nitro-acélique  Br(IN02)CH-CH  =  0,  et  un 
acide,  l'acide  bromo-nitro-acétique  Bi'{^0<2) CE  -CO {OU). 

Ces  corps  sont  de  ceux  que  l'on  peut  regarder  ajuste  titre 
comme  très  intéressants.  Je  regrette  de  n'avoir  pas  été  à 
même  de  m'occuper  de  leur  préparation. 

B.  —  Chaînon  bromo-nitré  Br(N02)CH. 

"  I 

Au  chaînon  bromo-nitré  du  nitro-éthanol  se  rattachent 
les  propriétés  qui  tiennent  à  la  présence  des  radicaux 
Br  et  NO2,  et  celles  qui  tiennent  à  la  présence  de  l'hydro- 
gène. 

i"  Aux  radicaux  Br  et  NO2  je  rattacherai  l'action  de 
l'eau.  J'avais  espéré  pouvoir  obtenir  ainsi  Valdefujde  glyco- 
Hque  selon  l'équation 

(HO)CH,  -  CH  <^TQ  +  H,0    =    (HO)CH,  -  CHO  +  [{JJ,^  . 

Je  suis  autorisé  à  croire  que  les  choses  se  passent 
ainsi,  quoique  je  ne  sois  pas  parvenu  à  isoler  celte  aldé- 
hyde comme  telle,  malgré  la  quantité  relativement 
notable  —  12  grammes  de  nitro-éthanol  —  que  j'ai  con- 
sacrée à  cet  essai. 

J'ai  chauffé  l'alcool  bromo-nitro-éthylique  avec  plu- 
sieurs fois  son  volume  d'eau  en  vase  clos,  à  une  tempéra- 
ture d'environ  155"  à  140"  pendant  quelques  heures. 


(  303  ) 

L'alcool  disparaît,  les  acides  formés  ont  été  neutralisés 
par  du  carbonate  bipotassique. 

Le  liquide  exerce  une  action  fortement  réductrice  sur 
la  liqueur  de  Fehling  et  le  nitrate  d'argent  ammoniacal. 

Je  l'ai  soumis  à  la  distillation;  au  produit  distillé,  j'ai 
ajouté  une  solution  de  bisulfite  sodique.  Après  un  certain 
temps,  ce  liquide  fournit  une  belle  cristallisation  d'un 
composé  sodique,  renfermant  à  peu  de  chose  près  la 
quantité  de  sodium  correspondant  à  la  formule 

^^'  '^  CIl(OH)  -  CH,(OH). 

Le  manque  de  matière  ne  m'a  pas  permis  d'examiner 
à  fond  cette  réaction. 

2°  A  la  présence  de  l'hydrogène  dans  le  composant 
HC-Br(N02)  se  rattache  le  pouvoir  additionnel  du 
bromo-ni  tro-éthanol . 

Ce  pouvoir  additionnel  est  égal  à  1.  J'en  ai  constaté 
l'existence  vis-à-vis  du  methanal  H.2G  =  0  aq.  et  vis-à-vis 
de  Vethanal  H3C  -  CH  =  0  aq. 

B,  —  Addition  de  deux  molécules  de  methanal 

H,C  -  OH 
ll,C  -  Bi (NO,)  +  2CHo  =  0  =      C  <  ^Q 

H2C-OH  ' 

Le  résultat  de  cette  réaction  est  la  production  du  glycol 
triméthulénique  bromo-nitré  2-2,  ou  propanediol  hromo- 
nilro  2-2. 

A  14  grammes  de  bromo-nitro-méthane,  j'ai  ajouté 
une  quantité  de  methanal,  en  solution  aqueuse  de  40  "/o, 
correspondant  à  2  molécules. 


(  304  ) 

L'introduction  d'un  fragment  de  carbonate  bipotassique 
et  l'agitation  déterminent  les  deux  composés  à  réagir,  le 
tout  se  dissout  et  la  température  s'est  élevée  de  28° 
jusqu'à  70°. 

Le  même  produit  se  forme  et  dans  les  mêmes  condi- 
tions, par  la  réaction  sur  l'étbanol  bromo-nitré  du  mé- 
tbanal  en  solution  aqueuse,  en  quantité  représentant 
une  molécule.  Il  y  a  à  notei'  que,  cette  seconde  fois,  la 
réaction  du  mélhanal  est  moins  vive  que  la  première  el 
l'élévation  moins  considérable. 

On  extrait  du  liquide  aqueux  le  produit  obtenu,  par 
l'éther;  l'évaporation  de  celui-ci  le  laisse  à  l'état  de 
l)eaux  cristaux. 

L'analyse  de  ce  corps  a  fourni  les  résultats  suivants  : 

L  Os^oOGT  de  substance  ont  donné  par  la  méthode  de 
Cari  us  0^',5089  de  AgBr,  d'où 

Trouvé.       Calculé. 
Br%     .     .     .     40.28         40 

IL  0^,504:2  de  substance  ont  donné  17'^s9  d'azote  à 
la  température  de  10°  et  à  la  pression  de  7G8  millimètres, 
d'où 

Trouvé.  Calculé. 

]N°/o     .     .     .     7.116  7«/„ 

Le  propane  diol-bromo-nitré  2-2  (HO)  CH^  -  CBr(N0.2) 
CHfl  -  OH  ainsi  préparé  se  présente  sous  forme  de  beaux 
cristaux  incolores,  transparents  ;  j'en  ai  obtenu  qui  mesu- 
raient au  moins  i  centimètre  de  côté  ;  ils  ont,  d'une 
manière  générale,  la  forme  octaédrique. 

Ce  corps  est  peu  soluble  dans  l'eau,  mais  soluble  dans 
l'alcool  et  l'éther. 


(  305  ) 

Son  point  de  fusion  est  compris  entre  106°  et  107". 

J'en  ai  déterminé  le  poids  moléculaire  selon  la  méthode 
cryoscopique. 

I.  0^^279  de  substance  dissous  dans  20  centimètres 
cubes  d'eau  ont  déterminé  un  abaissement  du  point  de 
congélation  de  0°,15. 

1[.  0^,4871  dissous  dans  la  même  quantité  d'eau  ont 
déterminé  un  abaissement  du  point  de  congélation 
de  0%23. 

Ce  qui  correspond  à 

Poids  moléculaire. 
Trouvé.        Calculé. 

I     .     .     .     170     ) 

200 
II     .     .     .     200     ] 

On  remarquera  que  ce  corps  est  très  voisin  de  la  dioxy- 
acélone  et  par  conséquent  de  la  glycérine  : 

011 
OH 
OH 

i\I.  L.  Henry  (*)  a  déjà  fait  connaître  qu'il  s'occupait 
d'efl'ectuer  ces  transformations;  ainsi  sera  réalisée  la  syn- 
thèse directe  et  complète  de  la  glycérine  par  la  soudure 
des   trois    fragments  monocarbonés   qui  la  constituent. 


{*)  Bulletin  de  la  Société  chimique  de  Berlin,  t.  XXX,  p.  2206 

(année  1897),  et  Revue  des  travaux  chimiques  des  Pays-Bas,  t.  XVI, 
p.  250  (année  1897 j. 

3"'"    SÉRIE,    TOME    XXXVl.  21 


H2C-0H 

HjC  -  on 

II2C 

co 

HC 

1 

H2C  -  OH 

H,C  -  OH 

HX 

(  306  ) 


DEUXIÈME  PARTIE. 

(Condensation  du  bromo-nitro-méthank 
AVEC  l'éthanal. 

La  condensation  du  méthane  bromo-nitré  avec  une 
seule  molécule  d'éthanal  a  pour  résultat  la  formation  du 
bromo-nilro  5  propanol  2 

CH5-(:H-(0H)-CMBr(N0,), 

ou  alcool  isopropylique  bromo-nitré  aldéhydique. 

La  réaction  est  en  tous  points  analogue  à  celle  du 
méthanal;  elle  s'opère  dans  les  mêmes  conditions  et 
s'accompagne  d'un  dégagement  de  chaleur  relativement 
considérable,  susceptible  d'élever  la  température  de  45°  à 
50''  pour  de  médiocres  quantités  de  matière. 

Il  y  a  seulement  à  remarquer  que  cette  condensation 
monomoléculaire  est  plus  aisée  que  celle  du  méthanal  ; 
elle  s'opérait  avec  celui-ci  de  deux  façons  à  la  fois  :  alors 
même  que  l'on  n'en  employait  qu'une  seule  molécule 
pour  une  de  H2C  -  Br  (NO2),  on  obtenait  tout  à  la  fois  un 
alcool  mono  et  un  alcool  biatomiquc  bromo-nitré.  Avec 
l'éthanal,  il  n'en  est  pas  ainsi.  On  obtient  exclusivement 
ou  presque  exclusivement  l'alcool  monoalomique.  On  est 
donc  autorisé  à  croire  que  l'aptitude  réactionnelle  de 
l'éthanal  CH5  -  CH  =  0  est  beaucoup  moindre  que  celle 
du  méthanal. 

Valcool  isopropylique  bromo-nilré  H^C  -  CH  -  (OH) 
-  CHBr  (NO2)  est  extrait  de  la  masse  liquide  par  l'éther. 
Après  expulsion  de  celui-ci,  on  le  soumet  à  la  distil- 


(  307  ) 
lation  sous  pression   raréfiée.    Sa  purification   est    des 
plus  aisées  et   le  rendement  est  voisin  du  rendement 
intégral. 

L'analyse   de   cet    alcool   a    fourni    les   résultats  sui- 
vants : 

I.  0^',4181  ont  donné  23  centimètres  cubes  d'azote 
sous  une  pression  de  7()9'"'"  et  à  la  température  de  iO°. 

II.  0^,5711)  de   substance    ont   donné   0"^,M799    de 
AgBr. 

III.  0^'',3654  de  substance  ontdonnéf>',o655de  AgBr. 

IV.  0î^',3o20  de  substance  ont  donné 0«%  1560 de  COo  et 
Oe',0672  de  H^O. 

V.  0s'",47o0  de  substance  ont  donné  0«^",  1839  deCO.j  et 
0^%0819  de  H2O. 

Ces  chiffres  correspondent  à  la  composition  centésimale 
suivante  : 


Trouvée  0 

I. 

II.            III. 

IV. 

V. 

Calculé  «/o 

c .     . 

.     19.40 

1 9.40       — 

— 

— 

19.05 

H.     . 

.       3.46 

5.80       — 

— 

— 

5.26 

Br.     . 

— 

-       43.15 

42.80 

— 

45.48 

N  .     . 

— 

-_          — 

_ 

7.06 

6.86 

L'alcool  isopropylique  bromo-nitre  H5C  -  CH  -  (OH) 
-  CH  Br  (NO2)  constitue  un  liquide  incolore,  jaunissant  à 
la  lumière,  quelque  peu  épais,  à  odeur  faible,  piquante, 
à  saveur  piquante. 

Il  irrite  la  [»eau,  mais  moins  fortement  que  le  nitro- 
bromo-éthanol  (HO)  -  CH^  -  CH  Br  (NO^). 


(  308  ) 

fi  est  peu  soluble  dans  l'eau,  mais  soluble  dans  l'alcool 
et  l'étlier. 

Sa  densité  à  10^  est  égale  à  1.899. 

11  bout  sans  décomposition  à  149M50"  sous  la  pression 
de  42  millimètres. 

Son  indice  de  réfraction  à  la  température  ordinaire 
est  1.51728. 

Son  poids  moléculaire  a  été  déterminé  par  la  méthode 
cryoscopique. 

0^,3015  de  substance  ont  déterminé  un  abaissement 
de  0%15o  dans  le  point  de  congélation  de  20  centimètres 
cubes  d'eau. 

Ce  qui  correspond  à  185.82;  la  formule  exige  184. 

Le  bromo-nitro-isopropanol  CH5  -  CH  -  (OH)  -  CH  Br 
(N02),du  chef  du  composant  HC-Br(N02),est  susceptible 
de  se  condenser  avec  le  méthanal,  mais  je  ne  suis  pas 
parvenu  à  le  condenser  avec  l'éthanal. 

J'en  ai  préparé  les  dérivés  nitrique  et  acétique. 

a)  Déiivé  nitrique  ou  nitrate  d'isopropyle  bromo-nitré 
H5C-CH(N03)-CHBr(N02). 

Il  résulte  de  l'action  du  mélange  nitro-sulfurique  sur 
le  nitro-propanol  bromo-nitré. 

On  opère  comme  avec  le  bromo-nitro-éthanol. 

L'analyse  du  produit  formé  et  desséché  a  donné  le 
résultat  suivant  : 

0^',30G4  de  substance  ont  fourni  52''%1  d'azote  sous  la 
pression  de  768  millimètres  et  à  la  température  de  9". 

Ce  qui  correspond  à  12.09  %  d'azote.  La  formule  en 
demande  12.17  "/o. 

Le  nitrate  d'isopropyle  bromo-nitré  constitue  un  liquide 
incolore,  huileux,  insoluble  dans  l'eau. 

Sa  densité  à  10°  est  égale  à  2.134. 


(  309  ) 
())   llérivé  acétique  ou  âcéiale  d'isopropyle  bionio-nitié 

H^C  -  CH(C,HA)-  CHBr(NOj). 

Il  résulte  de  l'action  de  l'anhydride  acétique  à  chaud 
sur  l'alcool  isopropylique  bromo-nitré. 

C'est  un  liquide  incolore,  huileux,  d'une  faible  odeur 
acétique,  insoluble  dans  l'eau,  d'une  densité  égale  à  1.820 
à  11°. 

Il  bout  à  lo9''-141''  sous  la  pression  de  48  millimètres. 

Son  analyse  a  donné  les  résultats  suivants  : 

Oë',5280  de  substance  ont  fourni  16'^^s4  sous  la  pres- 
sion de  769  millimètres  et  à  la  température  de  11°. 

Ce  qui  correspond  à  G.lo  "/o. 

Un  isomère  de  cet  alcool  isopropylique  bromo-nitré 

"^  <  S'a 

ne  -  OH 
CH5 

a  déjà  été  signalé  par  M.  L.  Henry  (*).  C'est  V alcool  pro- 
pijlique  primaire  bromo-nitré 

H^C  -  OH 

^  '^  NO, 
CH3 

qui  résulte  de  la  condensation  du  méthanal  CHo  =  0  avec 
l'éthane  bromo-nitré  aldéhydique  H5C  -  CH  Br  (NO^). 


("j  Bull,  de  l'Acad.  roy.  de  Belgique,  3«  série,  t.  XXXIII,  p.  426 
(année  1897). 


(  3i0  ) 

C'est  un  corps  solide,  fusible  à  42°. 

Il  se  distingue  chimiquement  du  produit  que  j'ai  pré- 
paré en  ce  qu'il  est  dépwirvu  de  tout  pouvoir  addition- 
nel vis-à-vis  du  méthanal.  La  différence  des  chaînons 
bromo-nitrés  que  renferment  ces  corps 


"V  <  NO.,  V  ^  NO 


rend  compte  de  cette  différence  capitale. 

Les  alcools  bromo-nitrés,  éthylique  et  isopropylique, 

(HO)  -  CH^  -  CHBr(NO,)  et  CH3  -  CH(OH)  -  C(lBr(NOA 

du  chef  du  composant  encore  hydrogéné  HG-Br(N02), 
doivent  encore  posséder  un  pouvoir  de  condensation 
égal  à  1,  vis-à-vis  des  aldéhydes. 

Dans  le  propanol  bromo-nitré,  il  ne  peut  être  mis  en 
évidence  que  par  le  méthanal  CH2  =  0;  l'éthanal,  dont 
le  pouvoir  réactionnel  est  plus  faible,  est  inerte  sur  ce 
composé. 

Dans  l'éthanol  l)romo-nilré,  au  contraire,  il  s'exerce 
tout  aussi  bien  vis-à-vis  de  l'éthanal  que  vis-à-vis  du 
méthanal. 

Un  point  important  que  je  tiens  à  faire  remarquer, 
c'est  que  la  réaction  du  méthanal  sur  l'isopropanol  bromo- 
nitré  et  la  réaction  de  l'éthanal  sur  l'éthanol  bromo-nitré 

CH3     CH(OH)  -  CHBr(NO,)  +  CH,  =  0, 
(OH)CH,  -  CHBr(NO«)  +  CH3     CH  =  G 

aboutissent  l'une  et  l'autre  à  la  formation  du  même  pro- 


(  .IH 


duit,  en  C4,  le  hutanediol  1-3  bromo-nitré  2-2 

CH2-OH 

^  NO. 
CH  -  OH 

CH- 

Ces  condensations  s'opèrent  dans  les  conditions  ordi- 
naires sous  l'action  stimulalrice  d'un  fragment  de  carbo- 
nate potassique.  L'élévation  de  température  qu'elles 
déterminent  est  inférieure  à  celle  qui  caractérise  la  pre- 
mière condensation  et  ne  représente  guère  qu'une  ving- 
taine de  degrés. 

Le  butane-diol  1-3  bromo-nitré  2-2  cristallise  en  beaux 
cristaux  incolores  et  transparents,  insolubles  dans  l'eau 
et  fusibles  à  94''-96°  en  tube  capillaire. 

L'analyse  de  ce  composé  a  fourni  les  chiffres  suivants  : 

a)  Composé  résultant  de  (HO)- CH2-CH  <  ^Q  +  H3C 
-CH  =  0.  ^     " 

I.  0^'',412ô  de  substance  ont  fourni  0^,3701  de  bro- 
mure d'argent. 

IL  0e',40o2  de  substance  ont  fourni  Oe'-,3D89  de  bro- 
mure d'argent;  de  là  on  déduit  : 


Calculé. 
BrVo     .     .     .     58.^20       37.69       r,7.38°/o 

h]  Composé  résultant  de  H5C  -  CH  (OH)  -  CH  Br  (NOc) 
+  H2C  =  0. 

L  0^,3674  de  produit  ont  fourni  0^",5i98  de  bromure 
d'argent. 

H.  Os',4702  de  substance  ont  donné  0^,4152  de  bro- 
mure d'argent. 


(  512 


D'où  l'on  déduit 


Trouvé. 


I.  il.  Calculé. 

Br«/o     .     .     .     37.04       37.58       57.58°/.. 

Le  bromo-nitro-métliane,  comme  les  paiaftines  nitrées, 
jouit  de  la  propriété  de  se  condenser  (*)  avec  l'alcool 

OH 

amvléno-méthyliqueHsC  <J;     ..  „    ,  produit  d'addition 

de  la  pipéridine  C5Hio  =  NH  au  méthanal. 

Il  en  résulte  un  beau  corps  cristallin,  incolore,  soluble 
dans  l'éther,  insoluble  dans  l'eau  et  fusible  à  49"-5l^ 
Comme  ce  corps  s'altère  très  rapidement,  en  devenant 
brun  foncé,  il  ne  m'a  pas  été  possible  de  l'obtenir  dans 
un  état  propre  à  l'analyse  et  de  décider  s'il  résulte  de 
la  réaction  d'une  ou  deux  molécules  d'alcool  amyléno- 
méthylique  sur  H^C  -  Br(N0.2),  et  s'il  répond  à  la  formule 

Br(NO,K.H-(CII.,     N(C5H,o)) 

ou 

Br(NO.,)  -  C  -  (CH-,  -  NiQH.o))^. 

Ce  travail  a  été  fait  au  laboratoire  de  chimie  générale 
de  l'Université  de  Louvain.  C'est  assez  dire  tout  ce  que 
je  dois  à  MM.  les  professeurs  Louis  et  Paul  Henry.  Je  me 
fais  un  devoir  de  leur  exprimer  mes  sentiments  de  vive 
reconnaissance. 


(*)  Voir  L.  Henry,  Sur  la  condensation  des  alcools  alkyl-amido- 
mélhijliques  avec  les  paraffi)ies  nitrées.  (Bull,  de  l'Acad.  roy.  de 
Belgique,  3e  série,  t.  XXXII,  p.  33;  1896.) 


(313  ) 


Siir  la  condensalion  de  l'aldéhyde  benzoïque  el  de  la 
monocfiloracélone  ;  par  J.  Ghysen. 

Parmi  les  corps  se  prêtant  le  plus  facilement  à  la  con- 
densation, ce  mode  de  synthèse  si  fécond  en  résultats,  se 
trouvent  surtout  les  cétones  qui,  par  élimination  d'eau 
entre  molécules  soit  identiques,  soit  difïerentes,  per- 
mettent la  construction  d'édifices  moléculaires  très  com- 
plexes. 

Ce  fut  par  cette  voie  que,  en  1881,  Claisen  et  Clapa- 
rède  (*),  en  traitant  par  l'acide  chlorliydrique  gazeux  un 
mélange  d'aldéhyde  benzoïque  et  d'acétone,  obtinrent  la 
dibenzylidène-acétone  : 

2C«II^C0H  +  H'C.CO.CIP  =  (.«[F  Cil  :  Cil  -  CO 
-CH  :  CILC^H^  +  ^iHU 

Et,  chose  remarquable,  même  une  saturation  incom- 
plète ne  fournit,  à  côté  de  l'aldéhyde  benzoïque  inatta- 
quée, que  du  dérivé  dibenzylidénique,  jamais  de  mono. 

L'identité  des  deux  groupes  méthyle  avait  donc  eu  pour 
résultat  une  égale  vitesse  de  réaction  avec  l'oxygène  de 
l'aldéhyde  benzoïque. 

Il  nous  a  semblé  intéressant  d'étudier  l'influence  du 
remplacement  d'un  atome  d'hydrogène  par  le  chlore  dans 
l'acétone:  le  groupe  GH'*  restant  conserverait-il  sa  faculté 


(■)  Berichte  der  deutscit.  chein.  Gesellschaft,  t.  XIV,  p.  350. 


(  314  ) 

de  céder  H-  à  l'oxygène  de  la  benzaldéhyde  et,  d'autre 
part,  le  H-  du  groupe  CH-Cl  pourrait-il  se  combiner 
comme  le  H-  du  groupe  CH^? 

En  un  mot,  nous  avons  étudié  l'action  de  l'acide  chlor- 
hydrique  gazeux  sur  un  mélange  équimoléculaire  d'aldé- 
hyde benzoïque  et  de  monochloracétone. 

Nous  ne  dirons  qu'un  mot  de  ces  deux  matières  pre- 
mières suffisamment  connues. 

La  monochloracétone  a  été  préparée  par  la  méthode 
de  Fritsch  (*),  qui  nous  a  donné  les  meilleurs  résultats. 

Quant  à  l'aldéhyde  benzoïque,  le  produit  pur  du  com- 
merce suffit. 

Nous  avons  opéré  à  une  température  de  —  10°;  car, 
faute  de  réfrigération,  Baeyer  (**),  qui,  en  18G7,  avait  déjà 
essayé  la  synthèse  réalisée  quatorze  ans  plus  tard  par 
Claisen  et  Claparède,  n'avait  obtenu  que  des  produits 
résineux. 


Condensation  de  l'aldéhyde  benzoïque  et  de  la 
monochloracétone. 

Comme  appareil  producteur  d'acide  chlorhydrique 
gazeux,  nous  nous  sommes  servi  de  celui  basé  sur  la 
réaction  de  l'acide  sulfurique  concentré  sur  le  chlorure 
ammonique  et  qui  permet  de  régler  à  volonté  la  produc- 
tion d'acide  chlorhydrique. 

Un  flacon  de  Drechsel  chargé  d'acide  sulfurique  fai- 


(*)  Annales  de  Liebig,  279,  p.  310. 
(•*)  Berichle.  t.  V!,  p.  '254. 


(  315  ) 

sait  suite  ;  il  nous  renseignait  sur  la  rapidité  du  déga- 
gement. 

Le  mélange  équimoléculaire  d'aldéhyde  benzoïque  et 
de  monochioracétone  se  trouvait  dans  un  ballon  à 
distillation  plongé  dans  un  bain  réfrigérant  de  glace  et 
de  sel. 

Pour  terminer,  un  tube  en  U  renlerniant  un  peu  d'acide 
sulfurique  nous  indiquait  la  plus  ou  moins  grande  inten- 
sité d'absorption  de  l'acide  chlorhydrique. 

A  cause  du  temps  li'ùs  long  qu'exige  la  saturation,  il 
ne  convient  pas  d'opérer  sur  de  trop  grandes  quantités  : 
46^,:2o  de  monochioracétone  et  o5  grammes  d'aldéhyde 
benzoïque  sulïisent. 

Au  commencement,  rabsori)tion  est  très  rapide  ;  elle 
diminue  petit  à  petit,  sans  toutefois  jamais  s'arrêter;  on 
règle  l'arrivée  de  HCl  de  manière  que  de  rares  bulles  se 
dégagent  du  tube  en  U. 

Le  mélange  devient  peu  à  peu  rose,  rouge,  rouge  foncé; 
en  même  temps,  il  s'épaissit  fortement. 

Après  douze  heures,  l'absorption  est  très  lente;  il  est 
inutile  de  prolonger  l'action  de  HCl  :  on  ne  ferait  (jue 
diminuer  le  rendement  par  suite  de  la  formation  de  pro- 
duits résineux. 

Le  contenu  du  ballon  est  versé  dans  de  l'eau  froide  à 
laquelle  on  ajoute  petit  à  petit  du  marbre  pulvérisé  pour 
neutraliser  le  très  grand  excès  de  HCl. 

Quand  la  réaction  se  ralentit,  on  chaulfe  légèrement 
au  bain-marie,  tout  en  maintenant  un  excès  de  CaCO''% 
jusqu'à  cessation  complète  de  tout  dégagement. 

Le  produit  plus  lourd  que  l'eau  se  rassemble  au  fond 
du  vase  sous  forme  d'une  masse  huileuse;  il  a  perdu  sa 
couleur  rouge  foncé  et  est  devenu  jaune. 


(  510  ) 

Oii  (iltre  sur  lilue  mouillé,  lave  à  l'eau  et  porte  à 
l'éluve;  quand  le  (iltre  est  sec,  le  produit  le  traverse  et 
est  reçu  dans  un  matras  assez  grand. 

On  obtient  ainsi  un  liquide  jaune  possédant  l'odeur 
caractéristique  et  irritante  de  la  monocliloracétone. 

Quelque  soin  que  l'on  apporte  à  la  condensation,  il 
reste  en  effet  un  assez  grand  excès  des  constituants. 

Pour  s'en  débarrasser,  le  mieux  est  de  se  baser  sur  la 
propriété  que  possèdent  l'aldéhyde  benzoïque  et  la 
monochloracétone  de  contracter  avec  le  bisulfite  sodique 
une  combinaison  cristalline,  tandis  que  la  benzylidène- 
chloracétone  ne  le  fait  pas. 

On  agite  donc  vigoureusement  et  à  diverses  reprises 
avec  un  volume  égal  de  solution  concentrée  de  bisullite; 
on  laisse  en  contact  vingt-quatre  heures. 

Il  se  forme  une  masse  cristalline  de  bisullîte-benzal- 
déhyde  et  de  bisulfite-chloracétone;  on  filtre  sous  pres- 
sion et  lave  soigneusement  les  cristaux  à  l'éther. 

l.a  solution  éthérée  séparée  de  la  solution  de  bisulfite 
est  lavée  à  l'eau  aussi  longtemps  que  cette  dernière 
devient  acide,  puis  déshydratée  par  du  chlorure  calcique. 

Après  avoir  chassé  l'éther,  on  soumet  à  la  distillation 
fractionnée  sous  pression  réduite. 

Nous  nous  sommes  servi  de  l'appareil  de  Briihl  et 
avons  opéré  à  une  pression  de  15  millimètres. 

Le  ballon  à  distiller  est  chauffé  au  bain  d'huile;  le 
thermomètre  monte  rapidement  et,  après  que  quelques 
gouttes  seulement  ont  passé,  il  atteint  145°;  on  recueille 
alors  dans  un  deuxième  tube. 

Le  thermomètre  reste  aux  environs  de  145°  ;  un  liquide 
jaune,  mobile  passe  en  assez  grande  quantité,  tandis  qu'il 
y  a  un  faible  dégagement  de  HCI  qui  se  perd  dans  la 
trompe. 


(  3^7  ) 

A  un  moment  donné,  la  distillation  s'arrête;  le  ther- 
momètre redescend;  il  reste  encore  dans  le  ballon  une 
masse  noire  assez  importante. 

On  enlève  le  bain  d'huile,  on  chauffe  à  teu  nu  et 
recueille  dans  un  troisième  tube. 

fl  passe  un  liquide  rouge  de  plus  en  plus  foncé  et  de 
plus  en  plus  épais;  bientôt  la  température  de  SCM)"  est 
atteinte;  il  ne  passe  plus  que  quelques  gouttes  noires;  on 
interrompt  la  distillation. 

Le  premier  tube  renferme  de  l'aldéhyde  benzoïque  et 
de  la  benzylidène-chloracétone;  on  enlève  la  première 
par  un  traitement  au  bisulfite  et  on  retrouve  un  peu  de 
benzylidène-chloracétone  qu'on  ajoute  à  la  portion  prin- 
pale  qui  se  trouve  dans  le  deuxième  tube. 

Cette  portion  principale  est  encore  loin  d'être  pure; 
elle  émet  des  vapeurs  d'acide  chlorhydrique  dont  il  con- 
vient de  la  débarrasser  avant  de  procéder  à  une  redistil- 
lalion;  sans  cette  précaution,  on  aurait,  lors  de  la 
deuxième  distillation,  un  charbonnement  assez  intense  et 
en  conséquence  une  diminution  du  rendement;  le  mieux 
est  de  la  mettre  une  nuit  dans  un  exsiccateur  au  vide  en 
présence  de  chaux  vive. 

Le  troisième  tube  renferme,  mais  en  petite  quantité, 
une  masse  rouge  foncé,  pâteuse;  on  la  traite  par  un  peu 
d'alcool  ou  d'éther;  bientôt  il  se  sépare  des  cristaux 
qu'on  exprime  entre  des  feuilles  de  papier  à  filtrer  pour 
les  débarrasser  des  matières  poisseuses  qui  les  imprègnent; 
quant  à  la  purification  ultérieure,  nous  en  reparlerons  à 
l'article  dibenzylidène-chloracétone  (*). 


('j  Voir  page  323. 


(  518  ) 

Le  contenu  du  deuxième  tube,  privé  d'acide  chlorhy- 
drique,  est  distillé  de  nouveau  sous  pression  réduite;  le 
produit  passe  à  145°  et  ne  laisse  qu'un  léger  résidu;  tou- 
tefois on  ne  peut  encore  obtenir  une  cristaUisation,  à  cause 
de  la  surfusion  opiniâtre  que  maintient  la  moindre  impu- 
reté. 

Une  troisième  distillation  est  nécessaire;  cette  fois 
on  obtient  un  liquide  jaune  pâle  à  reflet  vert,  qui,  mis 
dans  un  mélange  réfrigérant,  ne  tarde  pas  à  se  prendre 
en  une  masse  cristalline  blanc  jaunâtre.  (Si  l'on  a  déjà  du 
produit  cristallisé,  il  sutïit  d'amorcer  à  la  température 
ordinaire.) 

Les  cristaux  sont  exprimés  entre  des  feuilles  de  papier 
à  filtrer,  mais  avec  beaucoup  de  précaution,  car,  même 
pur,  le  produit  fond  à  32". 

Ensuite,  les  cristaux  sont  dissous  dans  le  moins  pos- 
sible d'étber  de  pétrole  additionné  d'un  peu  de  benzol  ; 
par  évaporation  spontanée,  la  benzylidène-chloracétone 
cristallise  en  grandes  tables  rbombiques,  absolument 
blanches  et  pures;  séparées  de  ces  premiers  cristaux,  les 
eaux  mères  donnent  par  évaporation  de  nouveaux  cris- 
taux semblables  aux  premiers. 

A  un  moment  donné,  les  dernières  eaux  mères  colorées 
en  jaune  et  où  se  sont  concentrées  toutes  les  impuretés 
se  refusent  à  cristalliser,  bien  qu'elles  renferment  encore 
une  notable  proportion  de  benzylidène-chloracétone;  une 
nouvelle  distillation  (sous  pression  réduite)  est  nécessaire, 
et  le  distillât  amorcé  cristallise;  ces  cristaux  seront  puri- 
fiés par  recristallisation  hors  de  l'éther  de  pétrole. 

Le  rendement  en  produit  pur  ne  dépasse  pas  40  %  de 
la  quantité  de  monochloracétone  employée. 


(319) 
L'analyse  nous  a  donné  les  résultats  suivants  : 

I.  0,2022  de  substance  ont  fourni  0,4910  CO'  et  0,096    H'-O 
11.0,2005  —  —  0,4887  CO- et  0,095    H-0 

111.0,2085  —  —  0,508    CO^  et  0,0985  H-0 

IV.  0,5003  —  —  0,235    AgCl. 

Soit  : 

calculé  pour  :  C*H'  CH  =  CH.CO.CH^CI. 

Trouvé. 
Calculé.  I.  II.  III.  IV. 

C"  1 20  =  66,48  .  .  66,22  66,42  66,44   — 

H'   9  =  4,98  .  .  5,22  5,26  5,24   — 

0   16  =  .  .  —  —  —    — 

CI  55,5  =  19,66  .  .  —  —  —  19,48 


180,5 


Ce  qui  nous  permet  de  conclure  à  la  formule 
C^^^H^OCl  ;  le  fait  que  la  substance  ne  contracte  pas  de 
combinaison  avec  le  bisulfite  sodique  indique  que  l'union 
s'est  faite  par  le  groupe  CH^  de  la  monochloracétone  et 
que  la  formule  rationnelle  est 

eiPCH  =  CH  -  CO  -  CH-Cl. 

Nous  lui  donnerons  le  nom  de  monobenzylidène- 
chloracétone. 

L'équation  de  la  réaction  est  la  suivante  : 

CW.COH  +  H^C.CO.CH^      =      C'H^CH  =  CH.CO.CH^CI  +  HO. 


(  320  ) 

Propriétés.  —  La  monobenzylidène-chloracétone  cris- 
tallise le  mieux  de  l'éther  de  pétrole  additionné  d'un  peu 
de  benzol,  en  grandes  tables  rhombiques  blanches,  fon- 
dant à  52°;  fondue,  elle  se  maintient  longtemps  à  l'état 
de  surfusion. 

Elle  distille  à 

145°     sous  une  |)i'essioii  de  13  millimètres. 
1G0»,5         _  _  25         — 

170°  —  —  40         — 

Elle  est  très  soluble  dans  l'alcool,  l'éther,  le  benzol, 
beaucoup  moins  dans  l'éther  de  pétrole  et  d'autant  moins 
que  son  point  d'ébullition  est  moins  élevé;  insoluble  dans 
l'eau. 

Son  odeur  très  agréable  rappelle  celle  de  la  coumarine; 
sa  saveur  est  brûlante. 

Pour  caractériser  sa  fonction  cétonique,  nous  en  avons 
fait  deux  dérivés  :  l'hydrazone  et  l'oxime. 

Benzylidène-chloracélhydrazone. 

Le  meilleur  procédé  de  préparation  est  le  suivant  :  on 
dissout  dans  de  l'alcool  la  quantité  théorique  (une  molé- 
cule) de  phénylhydrazine  pure,  fraîchement  redistillée; 
on  y  ajoute  la  quantité  théorique  (une  molécule)  de  ben- 
zylidène-chloracétone  également  dissoute  dans  l'alcool. 

Au  bout  de  quelques  minutes,  l'hydrazone  peu  soluble 
se  précipite  en  grandes  masses  cristallines  jaune  rou- 
geâtre;  les  cristaux  sont  séparés,  lavés  avec  un  peu 
d'alcool  et  purifiés  par  recristallisation. 

On  obtient  de  belles  aiguilles  jaune  pâle  qui  ne  tardent 
pas,  même  à  l'obscurité,  à  se  colorer  en  brun  et  ce,  quelle 


(  32i  ) 
que  soit  la  pureté  du  produit;  ce  phénomène  se  produi- 
sant encore  avec  une  liydrazone  à  point  de  fusion  con- 
stant, purifiée  par  six  cristallisations  successives. 
L'analyse  nous  a  fourni  les  résultats  suivants  : 

0,2553  de  subslancc  ont  donne  0,6579  CO^  el  0,1324  H^O 

0,2240  —  _  21,1  C'N  (sur  l'eau)  à  I7°,5 

et  sous  764  miiliinèlrcs  Hg. 

Calculé  pour  : 

CH\CH  =  CH.C-(:H*C1. 

!l 

N 
N-  H 

Trouvé. 

Calculé.  1.  n. 

C'«   =  192  70,97  70,78            — 

11'"  =     15  5,54  5,80 

N^    =  28  10,72  —  10,88 

CI    =  55,5  —  _              _ 


270,5 
La  réaction  s'est  passée  comme  suit  : 

C«H\CH  :CH.C0.CH*CI  +  C«IP.NH.]NH*  =  C«H«.CH 

:CH.C-CH*C1+H'0. 

Il 
N 

N-H 

3°'^    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  22 


(  322  ) 

Propriétés.  —  La  benzylidène-Ghloracéthydrazone  cris- 
tallise en  fines  aiguilles  jaunes  fondant  à  94". 

Trèssoluble  dans  l'étber,  dans  l'alcool  à  chaud,  beau- 
coup moins  dans  l'alcool  à  froid,  insoluble  dans  l'eau. 

Les  cristaux,  même  à  l'obscurité,  ne  tardent  pas  à  se 
colorer. 

Benzylidène-chloracétoxime. 

A  la  solution  métbylique  de  chlorhydrate  d'hydroxyla- 
mine  (une  molécule),  on  ajoute  une  solution  métbylique 
d'hydrate  sodique  (une  molécule)  et  enfin,  sans  s'inquiéter 
du  précipité  de  chlorure  sodique,  on  termine  par  l'addi- 
tion de  benzylidène-chloracétone  (une  molécule)  à  l'état 
fondu;  cette  dernière,  trèssoluble,  n'a  pas  besoin  d'être 
dissoute  au  préalable. 

On  laisse  en  contact  vingt-quatre  heures,  on  filtre;  le 
liquide  à  peine  coloré  en  jaune  est  évaporé  à  siccité  au 
vide. 

Le  précipité,  qui  renferme,  outre  le  chlorure  sodique, 
une  notable  proportion  d'oxime,  est  épuisé  par  l'étber  qui, 
par  évaporation,  abandonne  de  l'oxime  presque  pure. 

Le  résidu  de  l'évaporation  de  la  solution  alcoolique  est 
également  épuisé  par  l'étber;  d'où,  par  évaporation  de  ce 
dernier,  une  nouvelle  quantité  d'oxime  qu'on  réunit  à  la 
première. 

Une  seconde  cristallisation  de  l'étber  donne  un  produit 
pur. 

L'analyse  nous  a  fourni  les  résultats  suivants  : 

I.  0,1890  de  substance  ont  donné  0,4265  CO'-  et  0,090    H'^O 
11.0,1802  —  —  0,4060  CO- et  0,0872  HO 

III    0,2830  —  —  18C'ï\(sur  l'eau)  à  19,"5 

et  sous  762  millimètres  Hg. 


( 

323  ) 

Calculé  pour  : 

C«H\CH  = 

=  CHX  - 

II 

N 

1 

0 

1 

H 

CH^CI. 

Trouvé. 

Calculé. 

I. 

II. 

C»  =  \  20 

61,58 

64,55 

64,45 

11'"=   40 

5,41 

5,29 

5,52 

N   -    44 

7,4  6 

— 

— 

Cl  =    55,5 

— 

— 

— 

0  =    16 

— 

— 

— 

III. 


7,50 


495,5 
La  réaction  peut  se  formuler  ainsi  : 

Cm^CH  =  CH.CO.CH^CI  +  NH'OH 

=  C'H'.CH  =  CH.C  -  CH'CI  +  H'O. 

Il 

N 
I 
0 

H 

Propriétés.  —  La  benzylidène  chloracétoxime  cristallise 
en  petits  prismes  rhombiques  blancs  fondant  à  130°- 
131°  en  se  décomposant;  ils  sonl  solubles  dans  l'éther, 
moins  solubles  dans  l'alcool,  insolubles  dans  l'eau. 

L'odeur  est  faible,  mais  agréable. 

Dihenzylidène-chlor  acétone. 

Nous  avons  vu  que,  lors  de  la  première  distillation  sous 
pression  réduite,  nous  avons  séparé  une  minime  quantité 
de  substance  ayant  distillé  de  170''-300''  et  qui,  traitée 
par  l'alcool,  nous  avait  fourni  quelques  cristaux. 


(  524  ) 

Ayant  réuni  les  produits  provenant  d'une  série  de  con- 
densations, nous  avons  pu  songer  à  une  purification 
complète. 

Les  premiers  cristaux,  redissous  à  chaud  dans  l'alcool, 
se  sont  séparés  par  refroidissement  sous  la  forme  de 
petites  aiguilles  jaunes. 

Après  plusieurs  cristallisations,  nous  avons  obtenu  un 
produit  pur  à  point  de  fusion  constant  :  87". 

L'analyse  de  celui-ci  nous  a  fourni  les  résultats  suivants: 

I    0,2059  de  substance  ont  donné  0,5735  CO'  et  0,0942  H'O 
IL  0,2044  —  —  0,5688  CO*  et  0,092    H'O 

IIL  0,2890  -  —  0,1545  AgCl. 

Calculé  pour  :  C«H^CH  =  CH.CO.CH  =  CH.C«H». 

Trouvé. 

III. 


Calculé. 

I. 

II 

C«'  =  204 

75,97 

75,92 

75,88 

H'*=    14 

4,80 

5,08 

4,99 

0    =    16 

— 

— 

— 

Cl  =    55,5 

1 3,22 

— 

— 

C'était  donc  la  dibenzylidène-chloracétone. 
La  formule  de  la  réaction  est  : 

2C«H^C0H+CH^C0.CIP=C«H''  en  :  CH  CO.CH  :  CILC«H''+2H^0. 

Propriétés.  —  La  dibenzylidène-chloracétone  se  pré- 
sente en  cristaux  inodores  jaune  pâle,  fondant  à  87", 
assez  solubles  dans  l'éther,  peu  solubles  dans  l'alcool, 
surtout  à  froid,  insolubles  dans  l'eau. 

Pour  préparer  ce  corps,  il  faudrait  chercher  un  autre 


(  325  ) 
procédé;  celui-ci  ne  nous  le  donne  que  comme  produit 
accessoire,  et  le  rendement  est  à  peine  de  1  %  de  la  quan- 
tité de  monochloracétone  employée. 

Conclusions. 

L'introduction  d'un  atome  de  chlore  dans  l'un  des 
groupes  méthyle  de  l'acétone  n'a  pas  influencé  la  facilité 
de  l'autre  groupe  méthyle  à  se  combiner  avec  un  reste 
benzylidénique;  dans  le  groupe  CH'^Cl,  au  contraire,  ce 
n'est  qu'à  grand' peine  que  H-  se  combine  à  l'oxygène 
de  la  benzaldéhyde. 

Dans  l'acétone,  où  nous  avons  deux  groupes  méthyle 
identi(iues,  nous  constatons  l'égalité  des  vitesses  réac- 
tionnelles,  ayant  comme  résultat  l'obtention  directe  de 
la  dibenzylidène-acétone. 

Dans  la  monochloracétone,  oîi  se  trouvent  un  groupe 
CH'  et  un  groupe  Cll-Cl,  nous  observons  une  très  grande 
différence  de  vitesses  réactionnelles  ;  il  en  résulte  la  for- 
mation d'une  forte  proportion  de  dérivé  monobenzylidé- 
nique  et  de  très  peu  de  dérivé  benzylidénique. 

[1  serait  intéressant  de  poursuivre  cette  étude  et  de 
voir  l'influence  d'un  substituant  monovalent  R  autre  que 
le  chlore,  sur  l'aptitude  à  la  condensation  des  groupes 
CH'^et  CH'^R  de  l'acétone  monosubstituée. 


COMITE  SECRET. 


II  est  donné  lecture,  par  les  sections,  des  listes  des 
candidatures  présentées  pour  les. places  vacantes. 


(  326  ) 


€Iii%.l§$iiE:  DES  Iiï:TTRE:S. 


Séance  du  i?  octobre  1898. 

M.  F.  Vander  Haeghen,  directeur. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents:  MM.  A.  Giron,  vice-direcleur ;  S.  Bor- 
mans,  Ch.  Piot,  Ch.  Potvin,  J.  Stecher,  T.-J.  Lamy, 
L.  Vanderkindere,  le  comte  Goblet  d'Alvielia,  Ad.  Prins, 
J.  Vuylsteke,  le  baron  de  Chestret  de  Hanefîe,  Paul  Fre- 
dericq,  G.  Kurtli,  Ch.  Mesdach  de  ter  Kiele,  H.  Denis, 
le  chevalier  Ed.  Descamps,  Georges  Monchamp,  Ern. 
Discailles,  membres;  J.-C.  Vollgraff,  associé;  V.  Brants, 
Ch.  De  Smedt,  M.  Wilmotte  et  Ern.  Gossart,  correspon- 
dants. 

M.  Jules  Leclercq  s'excuse  de  ne  pouvoir  assister  à  la 
séance. 


COBRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  et  de  l'Instruction  publique 
transmet  une  ampliation  de  l'arrêté  royal  en  date  du 
25  juillet,  décernant  le  prix  quinquennal  de  littérature 
française,  pour  la  période  de  1895-1897,  à  M.  Albert 
Giraud,  pour  son  ouvrage  :  Hors  du  Siècle. 


(327  ) 

—  M.  Charles  Rivier,  pasteur  à  Genève,  remercie  la 
Classe,  tant  en  son  nom  qu'au  nom  de  sa  famille,  pour 
les  sentiments  de  condoléance  exprimés  lors  de  la  mort 
de  son  frère,  Alphonse  Rivier,  associé  de  la  Classe. 

M.  Descamps  accepte  de  rédiger,  pour  VAnnuaire,  la 
notice  de  M.  Alphonse  Rivier. 

—  M'"*"  veuve  Banning  remercie  aussi  la  Classe  pour 
les  sentiments  de  condoléance  qui  lui  ont  été  exprimés 
lors  de  la  mort  de  son  mari,  M.  Emile  Banning,  memhre 
titulaire. 

M,  le  Secrétaire  perpétuel  ajoute  que  M.  le  général 
Brialmont  a  accepté  de  rédiger,  pour  VAnnuaire,  la 
notice  de  M.  Banning. 

—  M.  le  Secrétaire  perpétuel  fait  savoir  qu'il  a  adressé 
les  félicitations  de  l'Académie  à  M.  Arthur  Hazelius,  au 
sujet  du  vingt-cinquième  anniversaire  de  la  fondation  de 
son  musée  d'ethnographie  Scandinave,  à  Stockholm,  qui 
doit  se  célébrer  le  25  octobre  courant. 

—  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  et  de  l'Instruction 
publique  envoie,  pour  la  bibliothèque  de  l'Académie,  un 
exemplaire  des  ouvrages  suivants  : 

1°  Élude  sur  la  propriété  foncière  dans  les  villes  du 
moyen  dge  et  spécialement  en  Flandre;  par  G.  Des  Marez; 

2"  Histoire  parlementaire  de  la  Belgique,  3®  série,  t.  II, 
fasc.  1-5;  par  Paul  Hymans  et  Alfred  Delcroix. 

—  Remerciements. 

—  M.  le  Ministre  des  Affaires  étrangères  envoie  le 
tome  III  du  Catalogue  de  la  bibliothèque  de  son  Départe- 
ment. —  Remerciements. 


(  328  ) 

—  M.  Jules  Frederichs,  professeur  à  l'Athénée  royal 
(l'Ostende,  remet  le  premier  exemplaire  imprimé  de  son 
Manuel  d'histoire  moderne,  qui  a  remporté  un  prix 
De  Keyn  en  mai  1898. 

—  Hommages  d'ouvrages  : 

1°  A.  Fleurs  de  l'antique  Orient;  B.  Les  figures  symbo- 
liques du  Yi-King;  C.  Le  chinois  parlé  au  VI"  siècle  A.  C; 
par  le  chanoine  C.  de  Harlez  ; 

2°  De  l'intervention  du  ministère  public  dans  le  jugement 
des  affaires  civiles;  par  Ch.  Mesdach  de  ter  Kiele; 

3°  A.  Les  reliques  de  sainte  Julienne  de  Cornillon  à 
l'abbaye  de  Villers;  B.  De  l'organisation  religieuse  dans  les 
colonies;  par  G.  Monchamp; 

4°  L'Aurige  de  Delphes  ;  par  Théophile  Homolle , 
associé  de  la  Classe; 

5°  Le  libre  arbitre;  par  Ernest  Naville,  associé; 

6"  La  Révolution  et  les  pauvres;  par  Léon  Lallemand, 
associé  (présenté  par  M.  Brants,  avec  une  note  qui  ligure 
ci-après)  ; 

7"  Manuel  d' histoire  moderne  ;  par  Jules  Frederichs; 

8*"  A.  Détresse  financière  du  Gouvernement  autrichien... 
en  i79S-l795;  B.  Fouilles  dans  l'ancienne  abbaye  de  Sta- 
velot;  C.  La  collection  numismatique  de  Charles  de  Lor- 
raine; par  G.  Cumont; 

9"  A.  Le  noble  de  Gand  à  la  bannière  portant  une 
foi  (1582);  B.  Un  tiers  de  sou  d'or  inédit  de  Maestricht; 
par  le  vicomte  B.  de  Jonghe; 

10**  Une  expédition  belge  au  Nil;  par  Léon  Chômé 
(présenté  par  M.  Discailles,  avec  une  note  qui  figure 
ci -après); 

11**  Jaques  Bretex  ou  Bretiaus,  —  Le  Tournoi  de  Chau- 


(  329  ) 
vency;  publié  par  Gaëtaii  Hecq  (présenté  par  M.  Marchai, 
avec  une  note  qui  figure  ci-après); 

12"  Le  Mahométisme  d'après  un  (ivre  récent;   par  Louis 
de  la  Vallée  Poussin. 

—  Remerciements. 


NOTES    BIBLlOGRAPmQUES. 

J'ai  l'honneur  de  présenter  à  la  Classe  un  nouveau 
volume  dû  à  M.  Léon  Lallemand,  correspondant  de  l'In- 
stitut de  France.  Il  a  pour  titre  :  La  Révolution  et  les 
pauvres  (1). 

Depuis  longtemps,  M.  Lallemand  s'est  fait  une  spécialité 
des  questions  de  charité  et  d'assistance.  Ayant  appartenu 
pendant  de  longues  années  au  service  de  la  bienfaisance 
de  la  Seine,  il  était  au  courant  des  services  techniques. 

Il  s'est,  depuis  lors,  livré  à  de  laborieuses  études  sur 
l'organisation  et  l'histoire  de  la  charité  privée  ou  légale. 
Il  a  réuni,  en  vue  de  ses  études,  une  bibliothèque 
spéciale  vraiment  précieuse,  un  vrai  «  fonds  de  l'assis- 
tance ». 

Ce  n'est  pas  la  première  fois  que  l'Académie  reçoit 
les  travaux  de  M.  Lallemand.  Ils  sont  nombreux  et  ils 
ont  amené  l'élection  du  fécond  écrivain  en  qualité  d'asso- 
cié de  notre  Classe. 

Le  nouveau  volume  qu'il  publie  fait  partie  d'une  vaste 


(1)  Paris,  Picard,  1898, 1  vol.  in-8^ 


(  330  ) 

histoire  de  la  charité  dont  il  a  conçu  le  plan.  Il  s'occupe 
de  l'œuvre  révolutionnaire  et  de  ses  effets.  Après  avoir 
donné  un  coup  d'œil  aux  projets  préconisés  à  la  lin  de 
l'ancien  régime,  il  analyse  le  rapport  et  le  système  du 
Comité  de  la  mendicité  à  l'Assemblée  constituante.  Tl  y 
relève,  dit-il,  trois  erreurs  fondamentales:  nivellement 
des  secours,  mise  à  la  charge  de  l'État  des  dépenses  d'as- 
sistance, spoliation  des  biens  hospitaliers. 

C'est  l'application  de  ces  principes,  telle  qu'elle  fut  orga- 
nisée par  le  gouvernement  révolutionnaire,  qu'analyse 
M.  Lallemand.  Il  le  fait  avec  une  richesse  vraiment  sur- 
prenante de  documents,  puisés  en  grande  partie  aux 
archives  otïicielles:  c'est  à  coups  de  faits  multiples,  de 
citations  serrées,  à  foison,  qu'il  expose  les  résultats 
désastreux  des  spoliations,  de  la  destruction  de  la  charité 
libre,  qu'il  montre  la  détresse  lamentable  qui  en  fut  la 
suite.  De  nombreux  documents  sont  reproduits  in  extenso, 
d'autres  cités  par  extraits,  ou  analysés.  Encore  l'auteur 
a-t  il  soin  de  nous  dire  qu'il  ne  s'agit  que  d'exemples  qu'il 
serait  aisé  de  remplacer  par  des  centaines  de  pièces  ana- 
logues. On  en  trouvera  plusieurs  concernant  les  départe- 
ments belges.  M.  Lallemand  a  eu  le  louable  souci  de 
laisser  la  parole  aux  faits,  et  les  faits  se  sont  groupés  sous 
sa  plume  avec  une  éloquence  instructive. 

Nous  n'avons  ni  à  analyser  ni  à  examiner  ici  tout  le 
système  de  M.  Lallemand,  mais  il  faut  remercier  notre 
savant  confrère  de  cette  nouvelle  contribution,  laborieuse 
et  importante,  à  l'histoire  des  pauvres  et  de  la  charité. 

V.  Brants. 


(  351   ) 

Sous  ce  titre  :  Une  expédition  belge  au  Nil,  M.  Léon 
Chômé,  directeur  de  la  Belgique  militaire,  a  écrit  une  bro- 
chure dont  il  fait  hommage  à  la  Classe. 

Depuis  quinze  ans,  la  cause  de  la  civilisation  dans 
l'Afrique  centrale  était  gravement  compromise  par  l'in- 
surrection du  Mahdi;  en  avril  1883,  le  dernier  vapeur 
égyptien  avait  descendu  le  Nil  de  Lado  à  Khartum. 

Dans  la  province  équatoriale,  les  Derviches  régnaient 
en  maîtres,  proscrivant,  rançonnant,  pillant  les  indi- 
gènes. 

Il  importait  de  rétablir  la  libre  navigation  sur  le  Nil 
entre  Khartum  et  Redjaf-Lado. 

L'Angleterre  et  l'Etat  indépendant  du  Congo,  unissant 
dans  ce  but  leurs  efforts,  décidèrent  que  les  opérations 
seraient  menées  simultanément  par  les  troupes  du  Congo 
vers  Redjaf,  par  les  soldats  anglais  vers  Khartum. 

Il  y  a  cinq  semaines,  à  la  suite  de  la  bataille  d'Omdur- 
man,  Khartum  était  prise. 

Dix-huit  mois  auparavant,  les  Belges,  eux,  avaient 
occupé  Redjaf. 

C'est  l'expédition  de  Redjaf  qui  fait  l'objet  de  la  bro- 
chure de  M.  Chômé. 

Le  récit  de  cette  expédition,  qui  fut  menée  avec  autant 
d'habileté  que  d'énergie  par  l'héroïque  commandant 
Chaltin,  est  inédit. 

La  brochure  de  M.  Chômé  est  intéressante,  bien  docu- 
mentée et  écrite  avec  verve. 

Ernest  Discailles. 


(  332  ) 

C'est  Heuri-Florent  DelmoUe,  membre  correspondant 
de  l'Académie  depuis  le  8  mai  1855  jusqu'au  7  mars  1856, 
jour  de  sa  mort,  qui  publia  en  1855,  dans  la  Bibliogra- 
phie de  la  littérature  romane  en  Belgique,  le  poème  de 
Jaques  Bretex  :  Les  Tournois  de  Cliauvenci,  d'après  une 
copie  faite  par  son  père,  Philibert  Delmotte,  à  qui  il 
avait  succédé  en  qualité  de  bibliothécaire  de  la  ville 
de  Mons. 

Cette  édition  était  aussi  parfaite  qu'elle  pouvait  l'être, 
en  raison  du  degré  d'avancement,  à  cette  époque,  de 
la  science  philologique  et  de  la  science  archéologique. 
Mais  depuis,  la  philologie  romane,  tout  autant  que 
l'archéologie,  a  fait  de  grands  progrès,  grâce  aux  travaux 
remarquables  des  Scheler,  des  Stecher,  auxquels  j'ajou- 
terai ceux  de  notre  jeune  confrère  Maurice  Wilmotle; 
aussi,  les  Tournois  de  Chauvenci,  qui  constituent  une 
source  précieuse  pour  l'art  de  la  guerre,  l'étude  des  usages 
somptuaires,  l'histoire  des  costumes,  des  instruments  de 
musique,  etc.,  méritaient-ils  d'intéresser  la  jeune  géné- 
ration qui  s'adonne  à  la  culture  des  lettres  et  de  l'histoire. 
Et  c'est  un  jeune  romaniste,  M.  le  capitaine  commandant 
d'infanterie  Gaétan  Hecq,  déjà  connu  par  quelques  inté- 
ressants ouvrages  de  philologie,  qui  a  donné  une  nouvelle 
édition  du  poème  de  Jaques  Bretex  dans  la  collection 
des  travaux  publiés  par  la  Société  des  Bibliophiles, 
établie  à  Mons. 

M.  Hecq  a  fait  précéder  le  poème  du  poète  picard  ou 
hennuyer  —  on  n'est  pas  tixé  encore  sur  le  lieu  exact  de 


(  333  ) 
sa  naissance  —  d'un  résumé  à  l'usage  des  personnes  non 
initiées  au  langage  écrit  du  XIÏP  siècle. 

J'ai  l'honneur  d'offrir  ce  volume  à  la  Classe,  au  nom 
de  l'auteur. 

Chev.  Edm.  Marchal. 


ÉLECTION. 


La  Classe  désigne  M.  Pirenne  pour  remplacer  M.  Wau- 
ters  en  qualité  de  membre  de  la  Commission  de  la  Bio- 
graphie nationale. 


(  354  ) 


€IiANSE  DEJS  BEAUX-ARTS. 


Séance  du  13  octobre  1898. 

M,  Ch.  Tardieu,  directeur,  président  de  l'Académie. 
M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  J.  Robie,  vice-directeur  ;  F. -A. 
Gevaert,  Th.  Radoux,  Peter  Benoit,  J.  Demannez,  P.-J. 
Clays,  G.  De  Groot,  Gustave  Biot,  H.  Hymans,  Th.  Vin- 
çotte,  Alex.  Markelbach,  Max.  Rooses,  A.  Hennebicq, 
Éd.  Van  Even,  Alfred  Cluysenaar,  le  comte  Jacques  de 
Lalaing,  J.  Winders,  Ém.  Janlet,  H.  Maquet,  J.  Van 
Ysendyck,  membres;  J.-B.  Meunier,  FI.  van  Duyse, 
C.  Hermans,  A.  Bourlard  et  Em.  Mathieu,  correspondants. 

M.  le  Secrétaire  perpétuel  adresse  les  félicitations  de 
la  Classe  à  M.  Ch.  Tardieu  au  sujet  de  son  heureux 
retour  du  Congo,  où  l'honorable  Président  de  l'Académie 
avait  été  invité,  avec  d'autres  journalistes  belges,  par  le 
Gouvernement  central  de  l'État  Indépendant,  à  l'inau- 
guration, le  10  juillet  dernier,  du  chemin  de  fer  de 
Matadi  au  Stanley-Pool. 

Des  applaudissements  accueillent  cette  motion  ainsi 
que  la  réponse  de  M.  Ch.  Tardieu. 


(  335  ) 
CORRESPONDANCE. 


M.  le  Secrétaire  perpétuel  donne  lecture  d'une  lettre  de 
M"'«  Samuel,  annonçant  la  mort  de  son  mari,  M.  Adolphe 
Samuel,  membre  de  la  Classe,  né  à  Liège  le  11  juillet 
1824  et  décédé  à  Gand  le  11  septembre  dernier. 

M.  Marchai  ajoute  qu'il  a  prononcé  le  discours  acadé- 
mique d'usage,  accédant  ainsi  à  la  demande  de  M.  ïar- 
dieu,  lequel  se  trouvait  empêché  par  ses  devoirs  profes- 
sionnels de  parler  au  nom  de  la  Classe  aux  funérailles, 
qui  ont  eu  lieu  le  15  septembre. 

La  Classe,  après  avoir  approuvé  le  dernier  hommage 
rendu,  séance  tenante,  par  M.  le  Directeur  Tardieu  à  la 
mémoire  de  l'éminent  directeur  du  Conservatoire  royal 
de  Gand,  décide  qu'une  lettre  de  condoléance  sera 
adressée  à  M'""  veuve  Samuel. 

Elle  vote  l'impression  au  Bulletin  du  discours  de 
M.  Marchai. 

—  La  Classe  prend  ensuite  connaissance  d'une  lettre  de 
M"'*"  Charles  Garnier,  annonçant  la  mort  de  son  mari, 
M.  Jean-Louis-Charles  Garnier,  membre  de  l'Institut 
et  associé  de  l'Académie,  décédé  à  Paris  le  5  août  dernier, 
à  l'âge  de  72  ans. 

Une  lettre  de  condoléance  sera  également  adressée  à 
]y{me  veuve  Garnier. 

—  M.  le  Secrétaire  perpétuel  donne  lecture  du  dis- 
cours prononcé  par  M.  Th.  Radoux,  directeur  du  Con- 
servatoire royal  de  Ljége,  le  25  septembre  dernier,  comme 


(  556  ) 

délégué  de  l'Académie  à  rinauguratioii  de  la  statue  éle- 
vée à  Verviers,  à  Henri  Vieuxtemps. 

[.es  remerciements  de  l'Académie  sont  adressés  à 
M.  Radoux,  dont  le  discours  figurera  au  Bulletin. 

—  M.  le  Ministre  de  l'Agriculture  et  des  Travaux 
publies  transmet  : 

1°  Une  copie  du  procès-verbal  du  jugement  du  grand 
concours  de  peinture  de  cette  année,  décernant  le  grand 
prix  à  M.  Emile  Vloors,  de  Borgerhout,  élève  de  l'Insti- 
tut des  beaux-arts  d'Anvers  ;  un  premier  second  prix  a 
été  voté  à  M.  Camille  Lambert,  d'Arlon,  élève  du  même 
Institut;  un  deuxième  second  prix  à  M.  Jules  Van  Bies- 
broeck,  de  Portici,  élève  de  l'Académie  royale  des  beaux- 
arts  de  Gand,  et  une  mention  honorable  à  M.  Félix  Gogo, 
d'Anvers,  élève  de  l'Institut  d'Anvers. 

Sur  la  demande  de  M.  le  Ministre,  la  proclamation  de 
ces  résultats  aura  lieu  dans  la  prochaine  séance  publique 
de  la  Classe  ; 

2°  a)  Le  premier  rapport  semestriel  de  M.  Victor  De 
Haen,  premier  prix  du  grand  concours  de  sculpture  de 
1894  ;  6)  Le  premier  rapport  semestriel  de  M.  Jacques 
Marin,  boursier  pour  la  sculpture  de  la  fondation  Gode- 
charle  en  1897.  —  Renvoi  à  la  section  de  sculpture  et  à 
M.  Marchai,  rapporteur; 

5°  Le  compte  rendu  de  son  séjour  à  Paris  (décembre 
1897-avril  1898),  par  M.  Martin  Lunssens,  premier  prix 
du  grand  concours  de  composition  musicale  de  1895.  — 
Renvoi  à  MM,  Gevaert,  Huberti  et  Mathieu. 

4°  Ln  exemplaire  des  ouvrages  suivants  pour  la  Biblio- 
thèque de  l'Académie  : 

Uarl  flamand;  la  renaissance  du  XIX"  siècle;  l'école  de 


(  337  ) 
1850  et  les  peintres  contemporains;  par  Jules  Du  Jardin; 

Ln  peinture  en   Europe  :  La  Hollande;  par  Georges 
Lafenestre  et  Eug.  Richtenberger. 

—  Remerciements. 


Djsiours  prononcé  le  13  septembre  1898,  au  nom  de  la 
(liasse  des  beaux-arts,  aux  funérailles  d'Adolphe  Samuel; 
par  M.  le  chevalier  Edm.  Marchai,  Secrétaire  perpétuel 
lie  l'Académie. 

Messieurs, 

i.a  mort  d'Adolphe  Samuel  ne  saurait  susciter  qu'un 
long  et  profond  écho  dans  le  sein  de  la  Classe  des  beaux- 
arts  à  laquelle  a  appartenu  l'éminent  musicien.  Au 
Directeur  incombait  de  parler  en  cette  douloureuse 
circonstance.  Malheureusement  les  devoirs  professionnels 
du  journalisme  retiennent  en  ce  moment  loin  d'ici 
M.  Charles  Tardieu.  Toutefois,  voulant  rendre  à  la  mé- 
moire de  Samuel  le  derniei-  hommage  des  sentiments  de 
l'Académie,  j'ai  accepté  de  venir  parler  au  nom  de  notre 
distingué  Directeur,  en  utilisant,  à  cet  effet,  les  rensei- 
gnements qu'il  m'a  fournis  sur  la  carrière  musicale  de 
notre  regretté  confrère. 

L'Académie  royale  de  Belgique  perd,  en  la  personne 
d'Adolphe  Samuel,  un  de  ses  coopérateurs  les  plus 
dévoués  et  les  plus  éminents. 

Membre  de  la  Classe  des  beaux-arts  depuis  un  quart 
de  siècle,  il  en  fut  le  Directeur  en  1893;  son  discours 
eut  pour  sujet  :  L'art  libre  et  l'enseignement  de  la  musique, 

3™*    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  23 


(  338  ) 

question  non  dépourvue  d'intérêt  et  qui  souleva  d'assez 
vives  controverses.  Non  seulement  Samuel  présida,  en 
cette  circonstance,  avec  autant  de  tact  et  de  courtoisie 
que  d'autorité,  mais  il  se  plaisait  à  intervenir  par  ses 
idées  dans  les  discussions  des  séances  :  il  y  déployait 
un  talent  de  parole  qu'il  exerçait  avec  une  égale  aisance, 
soit  que  la  question  débattue  se  rattachât  à  l'art  qu'il 
professait  et  pratiquait,  soit  qu'elle  fût  du  ressort  des 
arts  plastiques,  ou  mèine  qu'elle  côtoyât  l'érudition  his- 
torique ou  littéraire. 

Samuel,  en  effet,  ne  fut  pas  seulement  un  musicien  de 
mérite,  il  fut  aussi  un  écrivain  de  valeur,  un  critique 
abondamment  informé,  ainsi  qu'en  témoignent  les  écrits 
qu'il  donna  à  la  Revue  trimeslrielle,  à  la  Palria  belgica  et 
dans  l'un  des  trois  volumes  de  Cinquanle  ans  de  liberté 
publiés  en  1880,  et  où  figure  son  intéressant  travail  sur 
La  musique  en  Belgique  et  les  musiciens  belges  depuis  1850, 
travail  qu'il  se  proposait  de  faire  suivre  d'une  Histoire 
générale  et  populaire  de  la  musique,  restée  maliieureuse- 
ment  inachevée.  Il  fut  aussi  un  collaborateur  assidu  de  la 
Civilisation,  de  ÏÉclio  de  Bruxelles,  du  National,  du  Télé- 
graphe, de  V Indépendance  belge,  de  la  Flandre  libérale,  etc., 
qui  renferment  de  lui  nombre  d'articles  de  critique  musi- 
cale. La  variété  de  ses  connaissances  et  de  ses  aptitudes 
dépassait  même  le  cadre  esthétique,  comme  l'Académie 
en  eut  la  preuve  dans  le  zèle  et  l'intelligence  qu'il  mit  à 
s'acquitter  de  son  mandat  de  membre  de  la  Caisse  cen- 
trale des  artistes. 

Sa  vocation  musicale  ne  s'alïirma  pas  d'emblée.  Né  à 
Liège  le  11  juillet  1824,  on  le  voit  pendant  dix  années 
de  sa  première  jeunesse  —  de  la  septième  à  la  dix-sep- 
tième —  se  consacrer  à  la  peinture,  d'abord  dans  l'ate- 


(  559  ) 
lier  du    peintre   Van  Marcke,  puis  aux  Académies  des 
beaux-arls  de  Liège  et  de  Bruxelles. 

Toutefois,  il  avait  déjà  le  goût  de  la  musique,  sinon  le 
dessein  de  s'y  consacrer,  ainsi  qu'en  témoignent  quelques- 
unes  de  ses  compositions  qui  datent  de  ses  premières 
années.  C'est  à  partir  de  i842  —  il  avait  dix-huit  ans  — 
que  la  musique  le  prend  tout  entier;  et  trois  années  ne 
s'étaient  pas  écoulées  que,  déjà  lauréat  des  cours  de 
piano  et  d'orgue,  d'harmonie,  de  contre-point,  de  fugue 
et  de  composition,  tant  au  Conservatoire  de  Liège  qu'à 
celui  de  Bruxelles,  et  déjà  pianiste  applaudi  dans  les  con- 
certs, il  remportait  brillamment,  en  4845,  le  premier 
grand  prix  de  composition  musicale  aux  concours  dits 
de  Rome,  ces  prix  de  Rome  qui  devaient  bientôt  compter 
Gevaert,  Stadfeldt,  Lassen,  Pierre  Benoît,  Radoux. 

Il  arrivait  à  Rome  à  une  époque  où  l'illustre  Verdi 
commençait  à  prendre  possession  de  la  scène  lyrique 
italienne  :  son  art  de  puissant  mélodramaturge,  qui  ne 
s'était  pas  encore  affiné  au  contact  des  écoles  d'Allemagne 
el  de  France,  se  substituait  victorieusement  au  rossi- 
nisme  épuisé  et  même  à  l'art  des  Bellini  et  des 
Donizelti,  ces  rossinistes  émancipés  auxquels  Verdi 
lui-même  doit  beaucoup. 

La  jeunesse  de  Samuel  —  il  n'avait  pas  viiigt-ciuq  ans 
—  subit  cette  influence  alors  prédominante  avec  la  même 
candeur  qui  jette  aujourd'hui  dans  le  wagnérisme  la 
plupart  des  jeunes  compositeurs  de  tous  les  pays.  Lu 
grand  opéra  italien  en  quatre  actes,  dont  il  rapporta  la 
partition  en  Belgique,  en  1848,  était  du  Verdi  le  plus 
pur  :  Giovanni  da  Procida  en  était  le  héros.  L'œuvre  ne 
fut  jamais  représentée,  et  son  auteur  ne  tarda  pas  à  la 
renier. 


(  540  ) 

Il  connut  Meyerbeer,  Mendeissohn,  Ferdinand  Hilier; 
il  se  lia  d'amitié  et  entretint  une  correspondance  active 
et  suivie  avec  Berlioz.  Il  admira  Wagner.  Ces  influences 
écartèrent  la  précédente,  et  dès  lors  Samuel  fut  tout  à 
la  symphonie. 

Sans  énumérer  ici  toutes  les  productions  d'un  compo- 
siteur auquel  on  doit  des  mélodies,  plusieurs  opéras,  des 
symphonies,  des  cantates  et  des  messes,  qu'il  suffise  de 
rappeler  que  c'est  comme  symphoniste  qu'il  remporta, 
avec  son  Christus ,  tour  à  tour  acclamé  à  Gand ,  à 
Bruxelles  et  à  Cologne,  le  plus  éclatant  triomphe  de  sa 
carrière,  et  cela,  à  un  âge  qui,  pour  d'autres,  est  celui 
de  l'abdication  et  de  la  retraite,  alors  que,  pour  ce 
vaillant  septuagénaire,  ce  fut  celui  de  la  maîtrise  et  de  la 
gloire. 

Adolphe  Samuel  fut  longtemps  professeur  au  Conser- 
vatoire royal  de  Bruxelles,  et,  pendant  plus  d'un  quart 
de  siècle,  directeur  du  Conservatoire  royal  de  Gand. 

Indépendamment  de  ses  élèves  Edouard  Blaes,  J.-B. 
Vander  Meulen  et  Nicolas  Daneau,  qui  obtinrent  aux 
grands  concours  de  composition  musicale  des  seconds 
prix  et  des  mentions  honorables,  il  a  eu  l'honneur  d'y 
voir  remporter  le  premier  prix  par  Isidore  Devos,  Pierre 
Heckers  et  Paul  Lebrun.  De  tels  succès,  sous  sa  haute 
direction,  suffisent  pour  justifler  tout  ce  que  fit  Samuel 
pour  rehausser  la  réputation  du  (Conservatoire  de  Gand. 

Pour  finir,  il  faut  citer  à  son  actif  deux  initiatives  qui 
donnèrent  une  notable  impulsion  au  développement 
musical  de  notre  pays  :  la  création  des  Concerts  popu- 
laires de  musique  classique  et  l'institution  des  grands 
festivals  dont  il  fut  le  fondateur  et  le  premier  directeur. 

A  tous  ces  titres,  le  nom  d'Adolphe  Samuel  est  assuré 


(  '"5^1  ) 
de  vivre  dans  la  mémoire  des  artistes,  tant  à  l'étranger 
qu'en  Belgique,  et  l'Académie  a  conscience  d'être  l'or- 
gane   de    l'opinion    publique   en    lui    rendant    ici    un 
suprême  hommage. 


Inauguration  de  la  statue  élevée  à  Henri  Vieuxtemps  à 
Verviers,  le  23  septembre  1898;  discours  par  M.  Th. 
Radoux,  délégué  de  l'Académie. 

Messieurs, 

Je  dois  à  l'amitié  profonde  qui  m'unissait  à  l'artiste 
illustre  auquel  vous  rendez  aujourd'hui  un  suprême  hom- 
mage, l'honneur  d'avoir  été  désigné  par  la  Classe  des 
beaux-arts  de  l'Académie  royale  de  Belgique  pour  expri- 
mer en  son  nom  les  sentiments  de  reconnaissance  qu'elle 
éprouve  en  présence  d'une  manifestation  qui  glorifie  l'un 
de  ses  membres. 


A  un  âge  où  la  plupart  des  artistes,  et  des  plus  grands, 
commencent  leur  carrière,  Vieuxtemps  était  célèbre  dans 
les  deux  mondes,  et  sa  place  était  marquée  dans  notre 
Compagnie  qui  l'accueillit  comme  un  espoir,  dès  la  créa- 
tion de  la  Classe  des  beaux-arts,  en  1845. 


(  542  ) 

Il  avait  vingt-cinq  ans! 

S'il  est  des  artistes  que  l'Acaclémie  honore  en  les 
recevant  dans  son  sein,  il  en  est  d'autres  qui  la  glorifient 
en  y  entrant.  Vieuxtemps  fut  de  ceux-là. 

Enfant  prodige,  il  tint  toutes  les  promesses  qu'avait 
fait  concevoir  son  tali^nt  précoce,  et  jusqu'au  jour  où  une 
terrible  maladie  lit  tomber  de  sa  main  l'archet  magique 
qu'elle  avait  porté  comme  un  sceptre  royal,  Vieuxtemps 
marcha  de  triomphe  en  triomphe. 

Cependant,  cette  gloire  du  virtuose  ne  suifit  bientôt 
plus  à  son  âme  d'élite.  Il  voulut,  comme  quelques  prédes- 
tinés de  l'art,  les  Mendelssohn,  les  Chopin  et  les  Liszt, 
être  à  la  fois  virtuose  et  compositeur,  et,  il  faut  le  recon- 
naître, Vieuxtemps  fut  un  exemple  éloquent  de  cette  dua- 
lité artistique. 

Je  l'ai  dit  dans  le  livre  que  j'ai  consacré  à  sa  glorifi- 
cation, pour  apprécier  avec  toute  l'impartialité  désirable 
l'œuvre  de  Vieuxtemps,  il  faut  se  reporter  à  l'époque  du 
romantisme, qui  commence  vers  1823  avec  CharlesNodier, 
pour  triompher  avec  éclat  en  185D,  avec  V liernani  de 
Victor  Hugo. 

A  partir  de  ce  moment,  le  classicisme  se  débat  en 
vain  contre  le  mouvement  irrésistible  du  romantisme, 
soulevant  des  querelles  inoubliables  entre  les  partisans  de 
ces  deux  manifestations  de  l'esprit  humain. 

Bientôt  suivi  par  les  George  Sand  ,  les  Alfred  de 
Musset,  les  Balzac,  Victor  Hugo  devint  le  chef  d'un  céna- 
cle qui  travailla  avec  passion  à  cette  évolution  de  la  litté- 
rature, dont  la  puissance  s'étendit  peu  après  à  tous  les 
arts  libéraux. 

Dans  un  manifeste  resté  célèbre,  Victor  Hugo  disait  : 
ce  L'esprit  humain  est   toujours  en  marche.  Quand  le 


(343  ) 

corps  change,  comment  l'habit  ne  changerait-il  pas? 
La  langue  de  iVfontaigne  n'est  plus  celle  de  Rabelais, 
la  langue  de  Pascal  n'est  plus  celle  de  Montaigne, 
la  langue  de  Montesquieu  n'est  plus  celle  de  Pascal. 
11  en  est  des  idiomes  humains  comme  de  tout.  Chaque 
siècle  y  apporte  et  en  emporte  quelque  chose.  » 

On  ne  peut  donc  en  vouloir  à  Vieuxtemps  d'avoir 
parlé  la  langue  musicale  de  son  époque.  C'est  sous  l'in- 
fluence de  ce  mouvement  romantique  qu'il  composa 
toutes  ses  œuvres,  et  l'on  peut  affirmer  que  son  concerto 
en  mi,  entendu  en  Allemagne  en  1841,  révolutionna  la 
littérature  du  violon. 

La  forme  en  était  neuve;  le  fond,  d'une  puissance 
indéniable. 

Exécutée  plus  tard  à  Paris,  cette  œuvre  capitale  y  fit 
sensation  et  captiva  à  ce  point  l'attention  de  ce  grand 
passionné  des  idées  nouvelles,  Hector  Berlioz,  qu'il  en 
exalta  les  mérites  en  ces  termes  dans  le  Journal  des 
Débats  : 

«  Vieuxtemps  est  un  violoniste  prodigieux  dans  la 
plus  rigoureuse  acception  du  mot.  Il  fait  des  choses  que 
je  n'ai  jamais  entendues  par  aucun  autre.  Son  concerto 
en  mi  est  une  très  belle  œuvre,  d'un  effet  splendide, 
inondée  de  détails  ravissants  dans  l'orchestre  comme 
dans  la  partie  principale,  et  instrumentée  en  grand 
maître. 

))  Il  maîtrise  son  archet  et  sait  le  faire  durer  tant  qu'il 
veut  sur  un  son  filé  ou  sur  une  cadence.  Enfin,  Vieux- 
temps  joint  au  mérite  éminent  du  virtuose  celui  non 
moins  grand  du  compositeur.  » 

Un  éloge  aussi  chaleureux  de  h.  part  d'un  musicien 
qui  toute  sa  vie  professa  une  sainte  horreur  de  la  banalité, 


(  544  ) 

acquiert  une  importance  capitale,  et  celui  qui  sut  le 
mériter  ne  pouvait  être  qu'un  grand  artiste.  C'est  ce  que 
fut  Vieux  temps. 

Enumérer  tous  les  titres  de  notre  illustre  compatriote 
à  l'admiration  universelle  me  conduirait  trop  loin. 

Il  me  faut  cependant,  avant  de  clore  ce  discours, 
citer  un  trait  qui  fera  connaître  l'homme  de  cœur  qu'était 
Vieuxtemps  : 

C'était  en  1875.  La  terrible  guerre  franco-allemande 
avait  ruiné  des  milliers  de  familles,  et  par  suite  de  l'an- 
nexion de  l'Alsace  et  de  la  Lorraine  à  l'Allemagne,  un 
grand  nombre  d'habitants  de  ces  contrées  étaient  venus 
chercher  un  refuge  dans  la  ville  de  Nancy. 

Au  récit  des  souffrances  de  ces  pauvres  affligés, 
Vieuxtemps,  n'écoutant  que  les  élans  de  son  cœur  géné- 
reux, informa  la  municipalité  de  cette  ville  de  son  inten- 
tion d'y  organiser  un  concert  au  bénéfice  de  ces 
malheureux. 

L'annonce  seule  du  concours  du  grand  artiste  fit 
réaliser  une  recette  fabuleuse;  mais  il  ne  se  doutait  pas, 
le  cher  grand  homme,  que  là  s'exhalerait  son  chant  du 
cygne  et  qu'après  avoir  séché  les  larmes  de  ses  frères, 
les  siennes  allaient  couler. 

Le  fait  est  que,  quelques  jours  plus  tard,  une  attaque 
de  paralysie  vint  immobiliser  cette  main  qui  avait  égrené 
tant  de  perles!  Cet  archet  magique,  désormais  muet,  ne 
devait  plus  faire  vibrer  les  cordes  de  la  lyre  ! 

Ce  supplice  fut  pendant  plusieurs  années  encore  le 
triste  lot  du  triomphateur  de  la  veille,  de  l'affligé  du  len- 
demain! 

Ne  semble-t-il  pas  vraiment  que  toutes  les  gloires 
doivent  s'assombrir  à  leur  déclin? 


(  345  ) 

Beethoven  atteint  de  surdité,  Bacli  et  Hàndel  mourant 
aveugles,  et  Vieuxtemps  paralysé! 

Eh  qu'importe  !  Si  ces  gloires  chères  sont  entrées  dans 
la  nuit,  c'est  une  nuit  de  lumière,  éclairée  par  le  soleil 
de  leurs  œuvres;  et  celles  de  Vieuxtemps  marquent  une 
étape  brillante  dans  l'art  du  violon  et  portent  le  sceau 
d'une  individualité  puissante,  que  vous  venez.  Messieurs, 
d'immortaliser  par  le  bronze! 

En  ce  moment  solennel ,  où  une  cité  tout  entière 
exalte  les  mérites  d'un  de  ses  enfants,  les  artistes  des 
deux  mondes,  émus  à  la  pensée  d'un  spectacle  aussi  gran- 
diose, entonnent  avec  nous  l'hosanna  de  gloire  et 
saluent  avec  respect  cette  image  d'un  des  favoris  des 
Muses  ! 


CONCOURS  ANiNUEI.  POUR  1898. 


■■ARTIK     I.ITTKnAlKE. 

M.  Tardieu  donne  lecture  de  son  rapport,  auquel  ont 
souscrit  MM.  Rooses  et  Albrecht  De  Vriendt,  sur  les  trois 
mémoires  reçus  en  réponse  à  la  première  question  : 

Quelles  sont  tes  analogies  ou  les  différences  qui  existent 
entre  l'allégorie  et  le  sgmbole?  Établir  et  caractériser^  par 
des  exemples  empruntés  à  l'histoire  de  la  peinture,  les  élé- 
ments essentiels  qui  rapprochent  ou  distinguent  ces  deux 
conceptions  esthétiques. 

—  MM.  Gevaert,  Benoit  et  Mathieu  donnent  lecture 


(  546  ) 

de  leurs  rapports  sur  le  mémoire  reçu  en  réponse  à  la 
quatrième  question  : 

Faire  r/ilslorique  de  la  partie  spécialement  musicale  de 
la  chanson  flamande  {origine  des  mélodies  et  des  formes 
nilhmiques),  depuis  le  haut  mot/en  âge  jusquaux  temps 
modernes. 

ART  APPLIQUÉ. 

M.  Tardieu  donne  lecture  de  l'appréciation  de  MM.  De- 
mannez  et  Biot  sur  les  deux  gravures  portant  comme 
devise,  la  première  :  Speranzrt,  et  la  seconde  :  L'art  est 
l'âme  d'un  peuple,  soumises  pour  le  sujet  suivant  : 

On  demande  le  portrait  en  buste,  fjraoé  en  taille-douce, 
d'un  Belrje  contemporain,  ayant  une  notoriété  reconnue 
dans  le  domaine  politique ^  administratif,  scientifique,  litté- 
raire ou  artistique. 

La  Classe  se  prononcera  dans  sa  séance  du  jeudi 
27  octobre  sur  les  propositions  de  ses  commissaires. 


RAPPORTS. 


M.  Marchai  donne  lecture  de  son  appréciation,  à 
laquelle  ont  souscrit  MM.  De  Groot  et  Vinçotte,  du  pre- 
mier rapport  semestriel  de  M.  H,  Boncquet,  premier 
prix  du  grand  concours  de  sculpture  de  4897. 

Renvoi  à  M.  le  Ministre  de  l'Agriculture  et  des  Travaux 
publics. 

Il  ai8coiBBa«gT 


(  347  ) 

CIiA.SSE    DES    BEAVX-ABTS. 


Séance  du  27  octobre  1898. 

M.  Ch.  Tardieu,  directeur  et  président  de  l'Académie. 
M.  le  chevalier  Edmond  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  J.  Robie,  vice-directeur  ;  Éd.  Fétis, 
Th.  Radoux,  J.  Demannez,  P.-J.  Clays,  G.  De  Groot, 
G.  Biot,  H.  Hymans,  Th.  Vinçotte,  Jos.  Stallaert,  Alex. 
Markelbach,  Max.  Rooses,  G.  Huberti,  A.  Hennebicq, 
Éd.  Van  Even,  le  comte  Jac(|ues  de  Lalaing,  J.  Winders, 
Ém.  Janlet,  J.  Van  Ysendyck,  membres;  Alb.  De  Vriendt, 
FI.  van  Duyse,  G.  Hermans,  correspondants. 

MM.  H.  Maquet,  membre,  etÉm.  Mathieu,  correspon- 
dant, s'excusent  de  ne  pouvoir  assister  à  la  séance. 

M.  le  Secrétaire  perpétuel  adressera  à  M.  Mathieu  une 
lettre  de  félicitations  au  sujet  de  sa  nomination  de  direc- 
teur du  Gonservatoire  royal  de  musique  de  Gand. 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'Agriculture  et  des  Travaux  publics 
envoie  le  premier  rapport  semestriel  de  M.  Alfred  Bastien, 
boursier  de  la  fondation  Godecharle  pour  la  peinture,  en 
1897.  —  Renvoi  à  MM.  Hennebicq,  Clays  et   Stallaert. 


(  3i8  ) 
JUGEMENT  DU  CONCOURS  ANNUEL  (1898). 


PAaTIE    E.ITTERA^IRE. 


PREMIERE  QUESTION. 


Quelles  sont  les  analogies  ou  les  différences  qui  existent 
entre  l'allégorie  et  le  symbole?  Établir  et  caractériser,  par 
des  exemples  empruntés  à  l'histoire  de  la  peinture,  les  élé- 
ments essentiels  qui  rapprochent  ou  distinguent  ces  deux 
conceptions  esthétiques. 

«  Trois  mémoires  ont  été  adressés  : 

Le  11°  I,  portant  celle  devise  :  Apparence,  réalité,  fiction  ; 

Le  11°  II,  avec  la  suscription  :  Als  ic  can  ; 

Le  n"  III,  ainsi  étiqiielé:  L'art  symbolique  est  la  forme 
d'art  la  plus  ancienne  et  la  plus  expressive. 

Dans  son  ensemble,  le  concours  est  fort  intéressant;  il 
témoigne  de  rimporlance  qui  s'attache  à  la  question 
posée,  et  la  Classe  a  lieu  de  se  féliciter  de  l'avoir  inscrite 
à  son  programme  de  l'année,  en  môme  temps  qu'elle  doit 
des  éloges  à  tous  les  concurrents  pour  le  soin  qu'ils  ont 
mis  à  l'élucider. 

Le  choix  entre  les  trois  mémoires  envoyés  ne  semble 
pourtant  pas  prêter  à  la  moindre  hésitation. 

Il  n'y  a  pas  lieu,  en  effet,  de  s'arrêter  longtemps  au 
mémoire  n"  III,  car,  si  l'on  y  peut  noter  quelques  obser- 
vations justes  et  d'un  sens  critique  exercé,  les  exemples  y 


(  349  ) 

sont  rares,  médiocrement  représentatifs  pour  la  plupart, 
et  le  travail  du  concurrent  apparaît  moins  comme  une 
étude  approfondie  que  comme  un  article  de  revue  impro- 
visé à  la  veille  du  tirage  et  laissant  même  une  sensation 
d'inachevé,  d'écourté  tout  au  moins. 

Le  mémoire  n"  II  mérite  plus  de  considération. 
L'auteur  s'est  donné  beaucoup  de  mal.  Il  envoie  à  la 
Classe  sept  cahiers  de  texte  illustrés  de  calques,  et  cinq 
boîtes  de  dessins  et  vignettes,  au  nombre  de  plusieurs 
centaines,  dont  il  n'a  pas  eu  le  temps  d'achever  les 
légendes  explicatives,  mais  qui  n'en  attestent  pas  moins 
des  recherches  érudites,  de  même  que  sa  «  Nomenclature 
des  ouvrages  consultés  »  prouve  de  copieuses  lectures. 
L'auteur  s'excuse  de  n'avoir  pu  aller  jusqu'au  bout  de  sa 
tâche.  Par  une  lettre  adressée  à  iM.  le  Secrétaire  perpé- 
tuel, il  explique  que,  n'ayant  consacré  qu'un  mois  à  son 
ouvrage,  il  n'a  malheureusement  pas  étendu  ses  compa- 
raisons et  démonstrations  comme  il  l'aurait  voulu,  et  que, 
s'il  le  communique  tel  quel  à  la  Classe,  c'est  afin  de  lui 
donner  une  idée  du  long  travail  que  nécessitera  son 
étude  et  de  l'importance  qu'il  veut  donner  à  l'édition 
qu'il  se  propose  d'en  publier,  en  y  mentionnant,  avec 
dessins  et  descriptions,  cinq  à  six  cents  tableaux  symbo- 
liques, allégoriques  et  emblématiques  des  différentes 
écoles  de  peinture. 

Il  y  a  là  sans  doute  une  alléchante  [iromesse;  même 
en  son  état  actuel,  le  mémoire  Als  ic  can  n'est  nullement 
indigne  d'attention,  et  la  Classe  ne  refusera  pas  d'encou- 
rager l'auteur  à  le  continuer.  Mais,  outre  que  «  le  temps 
ne  fait  rien  à  l'affaire  »  et  que  le  jugement  d'un  concours 
ne  saurait  favoriser,  si  estimables  qu'elles  soient,  des 
intentions  dont  la  réalisation  demeure  incomplète,  il  faut 


(  330  ) 

noter  que  ce  travail  où  sont  analysés  tant  de  textes  litté- 
raires et  surtout  d'exemples  graphiques,  où  abondent  les 
citations  et  les  énumérations,  est  plus  documentaire  que 
synthétique. 

Si  le  mémoire  n"  III  est  un  essai  auquel  l'auteur  n'a 
pas  mis  la  dernière  main,  se  réservant  peut-être  de  le 
compléter  sur  épreuve,  et  si  les  exemples,  sollicités  par 
la  Classe,  y  sont  plus  indigents  que  typiques,  le  mémoire 
n°  Il  est  comme  la  vaste  ébauche  d'un  livre  à  faire,  les 
documents  amoncelés  y  étouffent  l'éclosion  des  idées 
essentielles;  et,  tout  en  souhaitant  que  l'auteur  achève  et 
publie  son  travail,  il  n'est  peut-être  pas  inutile  de  lui 
conseiller  d'y  opérer  quelques  élagages  pour  éviter 
l'apparence  du  fatras. 

A  notre  sens,  le  mémoire  n"  I  est  le  seul  qui  réponde 
pleinement  au  programme  du  concours. 

Une  introduction,  de  tour  métaphysique  et  mystique, 
voire  occultiste,  indique  dès  le  début  un  curieux  coude- 
à-coude  avec  l'ésotérisme  contemporain.  Et  cette  impres- 
sion première  se  confirme,  à  la  page  49  du  manuscrit,  où 
l'auteur  revendique  pour  notre  époque  le  droit  de  ccrepro- 
duire  dans  son  art  ses  préoccupations  littéraires,  scien- 
tifiques et  morales,  et  de  les  caractériser  par  les  signes 
matériels  qui  répondent  le  mieux  à  son  état  d'âme  », 
ajoutant  aussitôt  qu'il  est  «  juste  de  considérer  comme  la 
plus  autorisée,  quant  à  la  justesse  des  symboles,  l'école 
ésotérique  fondée  sur  des  sciences  exhumées  par  le  Sar 
Péladan,  Stanislas  de  Guaita,  Papus,  etc.  ». 

Il  y  aurait  des  réserves  à  faire  à  ce  sujet,  et  pour  plu- 
sieurs raisons.  D'abord  l'école  ésotérique,  qui  lit  quelque 
tapage  il  y  a  six  ou  sept  ans,  a  beaucoup  perdu  de  son 
ascendant  sur   l'opinion  ou  mieux  sur  la  curiosité  pu- 


(  551  ) 
blique.  Les  Péladan,  les  Guaita  et  les  Papus  d'ailleurs 
sont  loin  de  s'entendre  sur  la  portée  de  leurs  révélations 
de  Mages,  de  Rose-Croix  ou  de  démonologues.  Et  enfin 
le  caractère  scicntificpie  de  leurs  exhumalions  est  loin 
d'être  établi,  encore  qu'ils  se  réclament  de  tel  savant 
illustre  pour  les  présenter  comme  définitives,  quand  l'au- 
torité qu'ils  invoquent  se  borne  à  y  avouer  des  éléments 
de  recherche  et  des  hypothèses  à  vérifier. 

Mais  c'est  là  simplement  affaire  de  point  de  vue,  et  il 
serait  d'autant  moins  équitable  de  chicaner  le  concur- 
rent sur  ce  point,  qu'après  avoir  rendu  hommage  à  la 
justesse  de  la  symbolique  ésotérique,  l'auleur,  à  la 
page  27  de  son  manuscrit,  réagissant  à  juste  titre  contre 
une  tendance  à  l'emploi  systématique  des  recettes  du 
symbolisme,  pour  ainsi  parler,  —  tendance  qui  se  fait 
jour  dans  les  deux  autres  mémoires,  —  engage  l'artiste  à 
se  défier  des  hiéroglyphes,  des  accessoires,  des  attributs 
et  emblèmes,  ou  bien  à  les  prendre  tels  quels,  c'est-à- 
dire  comme  des  signes  conventionnels  toujours  utilisables 
si,  entrés  dans  les  mœurs,  ils  sont  immédiatement  com- 
pris, et  à  peindre  naïvement,  avec  autant  de  talent  que 
possible,  plutôt  que  de  s'égarer  dans  le  dangereux 
domaine  des  analogies  et  des  déductions  dont  «  la  cul- 
ture spéciale  se  pratique  dans  le  silence  du  cloître  ou  de 
l'occultisme  ».  Et  il  achève  ainsi  sa  pensée  :  «  L'art  doit 
être  humain,  c'est-à-dire  palpable,  émotionnel  et  spiri- 
tuel à  la  fois;  il  ne  doit  pas  dégénérer  en  un  étalage  de 
figures  scientifiques,  » 

Cette  phrase  du  chapitre  que  l'auteur  consacre  au  sym- 
bole primitif,  n'est  certes  pas  la  condamnation  du  sym- 
bolisme des  anciens  maîtres,  de  ce  symbolisme  qui  était 


(  552  ) 

à  la  fois  de  rite  et  de  sentiment,  de  conviction  sincère 
autant  que  d'obéissance  à  l'autorité  ou  à  la  tradilion  ; 
mais  elle  condamne  évidemment  le  symbolisme  de  pas- 
tiche ou  de  préciosité.  De  même  (p.  86),  il  préfère  «  une 
simple  impression  de  nature,  évoquant  le  mouvement  et 
la  vie»,  aux  abus,  pour  ne  pas  dire  aux  rébus  de  «  l'argutie 
allégorique  )>.  Il  ne  croit  pas  au  symbole  voulu,  mais  bien 
au  symbole  deviné,  perçu  dans  la  Naturr  qui  seule,  écrit- 
il,  délient  le  symbolisme.  Et  en  proclamant  (p.  52)  que 
«  c'est  surtout  l'interrogation  du  spectateur  qui  marque 
l'intérêt  d'une  œuvre  »,  cela  après  avoir  raillé  cette  manie 
d'engouement  qui  porte  par  exemple  les  fanatiques 
d'Ibsen  à  chercher,  mieux  encore  à  découvrir  un  motif 
social  ou  philosophique  dans  le  moindre  mot  de  leur 
auteur  favori,  fût-ce  dans  une  exclamation  parfaitement 
insignifiante,  il  indique  cette  vue  qui  nous  paraît  profon- 
dément juste,  à  savoir  non  seulement  que  le  symbolisme 
intentionnel  de  l'artiste  n'est  rien  s'il  ne  trouve  sa  con- 
trepartie dans  le  symbolisme  du  public,  mais  encore  que, 
si  la  Nature  détient  seule  le  symbole,  c'est  bien  souvent 
le  public  qui  le  crée  à  l'insu  de  l'artiste  lui-même. 

On  raconte  que  Goethe,  émerveillé  des  commentaires 
suscités  par  son  Faust,  —  déjà  toute  une  bibliothèque,  de 
son  vivant,  et  que  serait-ce  s'il  pouvait  lire  ceux  qui  ont 
paru  depuis  sa  mort  !  —  s'écriait  avec  un  enthousiasme 
souriant  :  «  Je  ne  savais  pas  avoir  pensé  tant  de  choses  !  » 
Anecdote  d'autant  plus  vraisemblable  qu'on  a  retrouvé 
parmi  les  papiers  posthumes  du  poète  cette  simple  défi- 
nition de  son  chef-d'œuvre  :  «  Tableau  hasardé  du  monde 
et  de  la  vie.  »  Mais  la  modestie  de  la  définition  n'exclut 
pas  le  luxe  des  gloses  et  n'implique  pas  leur  illégitimité. 


(  355  ] 

«  Lire  une  œuvre,  c'est  la  créer  à  nouveau  »,  a  dil  juste- 
ment un  commentateur  du  Faust  de  Goethe.  «  Quand  je 
lis  Faust,  c'est  mon  Faust  (1).  » 

Depuis  plus  de  vingt  ans,  toutes  les  littératures 
s'acharnent  sur  le  lîing  de  Richard  Wagner,  et  si  les 
interprétations  symboliques  en  sont  les  plus  nombreuses, 
les  interprétations  naturalistes  et  réalistes  n'en  sont  ni 
les  moins  aisées  ni  les  moins  fondées.  Bien  qu'elles 
semblent  antinomiques,  elles  sont  au  fond  également 
vraies.  Si  Wagner  est  un  profond  symboliste,  il  n'en  est 
pas  moins  un  puissant  réaliste.  Disons  même  qu'il  n'eût 
pas  été  l'un  sans  être  l'autre,  et  recommandons  à  tous  les 
artistes  cette  dualité,  en  leur  rappelant  toutefois  que  le 
maître  de  Bayreulh  avait  commencé  par  prendre  la  pré- 
caution d'être  un  homme  de  génie  sans  dédaigner  de 
posséder  à  fond  son  double  métier  d'écrivain  et  de 
musicien. 

En  risquant  ici  ces  deux  allusions,  nous  nous  écartons 
quelque  peu  du  programme  du  concours.  La  Classe,  en 
effet,  s'est  bien  gardée  de  livrer  aux  concurrents  le 
domaine  intégral  du  symbolisme  et  de  l'allégorie, 
domaine  immense  qui  s'annexe  tous  les  cadres  de  la 
pensée  et  du  sentiment,  puisque  symbole  et  allégorie  ne 
sont  en  somme  que  deux  tours  d'esprit,  aussi  applicables 
à  la  philosophie  qu'à  la  religion  et  à  toutes  les  formes 
d'art,  littéraire,  plastique  ou  sonore.  Elle  a  sagement 
limité  la  question  à  l'histoire  de  la  peinture,  du  moins 
quant  aux  exemples  à  fournir  à  l'appui  des  différences 
ou  des  analogies  des  deux  conceptions  esthétiques  à  étu- 


(1)  Anatole  France,  préface  de  la  traduction  de  Camille  tiENOii. 

Ô""*    SÉRIE,    TOMK    WXVI.  24 


(  3o4  ; 

dier.  Si  le  rapporleur  pousse  iin  peu  an  delà,  c'est  unique- 
ment alin  d'insister  sur  l'importaiice  que  prend  en  l'es- 
pèce l'interprétation  donnée  à  l'œuvre  d'art  par  le 
public  qu'elle  vise  et  prétend  conquérir,  et  afin  de  mar- 
quer qu'un  simple  paysage,  vu  et  rendu  sans  arrière- 
pensée  par  un  artiste  ému,  ou  un  portrait  d'inconnu, 
saisi  et  pénétré  par  un  figuriste  soucieux  de  caractère, 
seront  matière  à  symbolisme  à  meilleur  droit  que  tel 
logogriphc  pictural  où  la  doctrine  et  la  science  des  sym- 
boles auront  prodigué  toutes  leurs  ressources.  L'auteur 
du  mémoire  n"  I  cite  avec  raison  Gustave  iVloreau  parmi 
les  maîtres  du  symbolisme  contemporain,  mais  ce  serait 
une  erreur  —  et  le  concurrent  ne  la  commet  pas  — 
d'attribuer  à  l'initiation  doctrinale  ou  scientifique  le 
charme  et  l'émotion  qui  se  dégagent  des  belles  pages  de 
ce  grand  peintre  et  la  valeur  d'art  que  tout  le  monde  leur 
reconnaît  aujourd'hui.  S'il  est  permis  au  rapporteur  de 
consigner  ici  un  souvenir  personnel,  il  dira  qu'introduit, 
il  y  a  tout  juste  vingt  ans,  dans  l'atelier  de  Gustave 
Moreau,  il  tomba  en  airét  devant  sa  Vieillesse  du  roi 
David,  très  ému  par  l'impression  de  lassitude  qui  éma- 
nait de  l'expression  et  de  l'attitude  du  vieillard  à  barbe 
grise,  au  regard  terne,  à  la  tête  inclinée,  se  détachant 
sur  un  fond  de  ciel  brumeux,  envahi  déjà  par  les  ombres 
de  la  nuit,  comme  le  personnage  était  déjà  guetté  par  les 
ombres  de  la  mort.  Le  peintre  cependant  lui  signalai!,  aux 
architectures  ambiantes,  quatre  chapiteaux  de  colonnes 
dont  les  motifs  étaient  empruntés  aux  attributs  des  quatre 
Évangélistes.  Ils  étaient  pour  lui  le  symbole  du  lien  qui 
rattache  le  Nouveau  Testament  à  l'Ancien.  Le  visiteur 
n'avait  vu  de  symbole  que  dans  le  lien  entre  la  Nature 
et  l'Homme.  Il  avait  tort  sans  doute.  Mais  qu'importe. 


(  5h'5  ) 
puisque  de  toute  façon  la  sensation  d'art  était  produite, 
et  puisque,  pour  parler  comme  l'auteur  du  mémoire  n"  I, 
le  peintre,  visant  le  symbolisme  religieux,  avait  fait  de 
l'art  «  humain,  c'est-à-dire  palpable,  émotionnel  et  spi- 
rituel à  la  fois  »? 

D'autre  part,  en  limitant  à  l'histoire  de  la  peinture  la 
documentation  du  concours,  la  Classe  n'a  pas  entendu 
interdire  aux  concurrents  les  appréciations  philoso- 
phiques inséparables  de  l'étude  de  deux  conceptions 
esthétiques  aussi  imprégnées  de  philosophie  et  de  litté- 
rature que  le  symbolisme  et  l'allégorie. 

L'auteur  du  mémoire  n°  I  ne  s'est  pas  privé  de  ces 
appréciations,  mais,  des  trois  mémoires  soumis  à  la 
Classe,  le  sien  est  celui  où  la  part  faite  aux  idées  géné- 
ratrices du  symbole  et  de  l'allégorie,  à  l'histoire  de  leurs 
manifestations  et  aux  exemples  spécialement  empruntés 
à  la  peinture,  est  distribuée  avec  le  plus  de  méthode,  de 
logique  et  de  goût. 

On  en  pourrait  discuter  certaines  thèses,  critiquer 
divers  détails,  mais  il  n'en  demeurerait  pas  moins  que 
ce  mémoire  constitue  un  travail  sérieux,  approfondi  et 
utile,  composé  avec  soin,  écrit  avec  talent,  et,  tant  au 
point  de  vue  des  recherches  qu'il  a  nécessitées  que  du 
sens  philosophique  et  artistique  dont  il  fournit  la  preuve, 
digne  des  suffrages  de  l'Académie. 

Par  ces  motifs,  j'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  Classe 
des  beaux-arts  : 

1°  De  décider  qu'il  y  a  lieu  de  décerner  le  prix; 

2°  D'attribuer  le  prix  à  l'auteur  du  mémoire  n°  I,  por- 
tant pour  devise  :  Apparence,  réalité,  fiction; 

3°  D'en  ordonner  l'impression  dans  l'un  des  recueils 
de  l'Académie.  » 


(  356  ) 

MM.  Rooses  et  Alb.  De  Vriendt  déclarent  souscrire  à  ces 
propositions. 

La  Classe,  se  ralliant  aux  propositions  de  ses  commis- 
saires, a  décerné  le  prix,  d'une  valeur  de  huil cents  francs, 
au  mémoire  portant  la  devise  :  Apparence,  réalité,  fiction. 

L'ouverture  du  billet  cacheté  a  fait  connaître  comme 
auteur  de  ce  travail  M.  Edgar  Baes,  à  Ixelles. 


QUATRIEME    QUESTION. 

Faire  l'historique  de  la  partie  spécialement  musicale  de 
la  chanson  flamande  (origine  des  mélodies  et  des  formes 
rythmiques),  depuis  le  haut  moyen  âge  jusqu'aux  temps 
modernes. 

RapftOÊ't  de  M.    Gmwaerif  pi'etttiet'   ooiÊ*tnim»ai»'*>. 

a  Le  sujet  d'histoire  musicale  que  la  Classe  des  beaux- 
arts  a  choisi  pour  le  concours  de  cette  année  appartient 
à  un  ordre  de  recherches  qui  implique,  chez  ceux  qui  s'y 
adonnent,  une  sérieuse  culture  de  la  musique  et  des  con- 
naissances approfondies  en  matière  de  littérature  et  d'his- 
toire, double  condition  qui  se  rencontre  rarement  chez 
les  érudits,  même  de  nos  jours.  Aussi  n'est-il  pas  éton- 
nant qu'un  seul  concurrent  ait  répondu  à  notre  appel. 

Son  travail  est  fort  étendu  et  conforme  au  programme 
tracé  par  l'Académie.  En  tant  que  production  musicale 
homophone,  le  chant  populaire  étant  constitué  par  le 
concours  de  deux  éléments,  mélodie  et  rythme,  l'auteur 
a  judicieusement  divisé  son  écrit  en  deux  parties. 


(  337  ) 

La  première,  la  plus  étendue,  est  consacrée  à  l'analyse 
historique  de  l'élément  essentiellement  musical  de  la 
chanson,  la  mélodie. 

Dans  un  premier  chapitre,  l'auteur  démontre  dans  les 
chansons  flamandes  du  moyen  âge  l'existence  des  quatre 
échelles  modales  que  le  chant  liturgique  de  l'Église 
latine  a  héritées  de  l'antiquité  : 

1"  Le  mode  éolien  ou  hypodorien,  le  mineur  diato- 

nique,  encore  connu  de  notre  temps  (/a,  so/  >;,  /a,  mi,  ré, 
ut,  si,  la)  ; 

2°  Le  mode  dorien,  mineur  diatonique  dont  l'avant- 
dernier  degré  au  grave  est  abaissé  d'un  demi-ton  (mi,  ré, 

ut,  si,  la,  sol,  fa  Ç[,  mi)  ; 
5°  Le  mode  iastien  ou  hypophrygien,  échelle  majeure 

privée  de  note  sensible  {sol,  fa  t],  mi,  ré,  ut,  si,  la,  sol)  ; 

¥  L'hypolydien,  mode  majeur  dont  le  quatrième  degré 

au-dessus  du  plus  grave  fait  avec  celui-ci  un  intervalle  de 

triton  [fa,  mi,  ré,  ut,  si  Ç\,  la,  sol,  fa\ 

Dans  le  second  chapitre,  poussant  son  analyse  plus  à 
fond,  l'écrivain  prend  pour  point  de  départ  les  thèmes 
mélodiques  que  la  musique  gréco-latine  a  laissés  dans 
l'Anliphonaire  romain,  et  s'attache  à  signaler  ceux  qui 
ont  guidé  l'inspiration  des  compositeurs  populaires  du 
moyen  âge. 

Dans  son  troisième  chapitre,  il  examine  la  composition 
mélodique,  c'est-à-dire  la  manière  dont  les  auteurs  des 
cantilènes  médiévales  ont  traité  les  thèmes  traditionnels  : 
tantôt  les  reproduisant  presque  sans  modification,  plus 
souvent  procédant  par  voie  d'amplification,  parfois  enfin 
se  servant  simplement  du  cadre  général,  l'échelle  du 
mode,  et  imaginant  librement  le  dessin  mélodique. 


(  358  ) 

Le  quatrième  chapitre  est  consacré  aux  dernières  vicis- 
situdes du  chant  homophone,  à  l'examen  des  altérations 
harmoniques  que  subirent  peu  à  peu  les  mélodies  du  pays 
flamand  sous  l'action  lente  et  continue  de  l'art  polyphone, 
action  qui  amena  vers  1600  la  constitution  effective  des 
deux  modes  de  la  musique  moderne  :  le  majeur,  fusion 
de  l'iastien  et  de  l'hypolydien,  le  mineur,  modification 
chromatique  du  mode  éolien. 

Un  cinquième  chapitre  poursuit  l'histoire  de  la  chan- 
son néerlandaise  postérieurement  à  la  création  de  la 
monodie  harmonisée  et  à  l'apparition  de  la  tonalité 
moderne,  alors  que  la  muse  du  peuple  cessa  de  s'inspirer 
aux  mélopées  liturgiques  et  prit  pour  modèles  les  mor- 
ceaux des  chanteurs  professionnels  et  les  airs  de  ballet. 
Période  de  déclin  et  de  stérilité  croissante.  Le  chant 
populaire,  de  sa  nature  une  mélodie  sans  accompagne- 
ment, était  coupé  dans  sa  racine  et  fatalement  destiné  à 
s'étioler  et  se  dessécher  dès  que  les  musiciens  eurent 
désappris  l'art  de  la  composition  homophone.  Aussi  ne 
vécut-il  plus,  à  partir  du  XVIII''  siècle,  que  dans  la 
mémoire  des  gens  de  la  campagne,  et  là  aussi  a-t-il  pres- 
que disparu  de  nos  jours,  remplacé  par  des  cantiques  ano- 
dins, ou,  chose  plus  fréquente,  par  des  refrains  de  car- 
refour et  de  café-concert,  la  musique  ordinaire  des  masses 
dans  nos  sociétés  démocratiques. 

Le  dernier  chapitre  de  la  première  partie  s'occupe  de  ce 
que  l'on  pourrait  appeler  la  vie  posthume  de  nos  anciens 
chants  populaires,  résurrection  qui  est  le  fruit  de  l'érudi- 
tion universelle  de  notre  temps.  L'auteur  y  examine, 
d'après  sa  méthode  d'analyse  musicale,  les  mélodies 
recueillies  en  partie  de  la  bouche  du  peuple  et  consignées 
dans  les  nombreuses  collections  spéciales  qui  ont  paru 
depuis  le  commencement  du  XIX''  siècle. 


(  359  ) 

Moins  (léveloppée  que  la  première,  la  seconde  partie 
du  mémoire  traite  exclusivement  des  formes  rythmiques 
de  la  chanson  thioise.  I^e  premier  chapitre  contient  les 
notions  indispensables  à  la  connaissance  des  parties  con- 
stitutives du  rythme  :  durées  relatives,  mesures  simples 
et  composées,  membres  rythmiques.  Le  deuxième  cha- 
pitre montre  l'application  des  divers  cléments  du  rythme 
musical  au  mécanisme  particulier  de  l'ancienne  versifi- 
cation néerlandaise.  Enfin  le  chapitre  par  lequel  se  ter- 
mine tout  le  travail  explique  la  structure  des  périodes 
rythmiques  et  décrit  brièvement  la  facture  de  la  strophe 
dans  les  deux  divisions  typiques  de  la  chanson  flamande  : 
les  chants  narratifs,  les  airs  à  danser. 

L'auteur  a  rempli  d'une  manière  plus  que  satisfaisante 
le  cadre  imposé  par  le  programme  de  l'Académie.  Le 
travail  soumis  à  notre  ap|)réciation  est  incontestablement 
à  la  hauteur  des  connaissances  positives  qu'un  esprit  stu- 
dieux de  notre  temps  peut  acquérir  en  ces  matières  diffi- 
ciles. On  reconnaît  partout  un  musicien  familier  avec  les 
parties  les  plus  diverses  de  son  art,  un  érudit  au  courant 
de  toute  la  littérature  du  sujet  à  traiter. 

En  particulier,  la  première  {>ar(ie  du  mémoire  a  une 
valeur  sérieuse  par  le  soin  minutieux  que  l'écrivain  a 
mis  dans  ses  recherches  comparatives,  dans  les  rappro- 
chements établis  avec  les  mélodies  liturgiques  et  les 
cantilènes  profanes  du  moyen  âge.  On  y  rencontre  une 
quantité  de  faits  nouveaux  et  intéressants.  Si  l'on  peut 
regretter  que  la  seconde  partie  n'offre  pas  le  même  inté- 
rêt, si  l'on  doit  y  constater  l'absence  de  toute  recherche 
sur  le  caractère  ethnique  de  certains  rythmes,  il  est  juste 
de   se  rappeler  que  la  musicologie  comparée   est  une 


(  360  ) 

science  encore  à  ses  premiers  débuts,  et  que  jusqu'à  pré- 
sent aucun  travail  approfondi  n'a  paru  sur  cette  question. 
Il  y  a  lieu  de  constater  à  la  louange  de  l'auteur  qu'il  a 
su  exposer  ses  idées  dans  un  style  net  et  clair,  et  ceci  ne 
sera  pas  tenu  pour  un  mérite  insignifiant  si  l'on  considère 
(|ue  la  langue  néerlandaise  n'a  pas  de  terminologie  établie 
pour  les  notions  techniques  propres  à  la  musique  de 
l'antiquité  et  à  celle  du  moyen  âge. 

En  somme,  je  conclus  en  proposant  à  la  Classe  des 
beaux-arts  d'attribuer  le  prix  allèrent  au  concours  musical 
de  4898  à  l'auteur  du  mémoire  portant  pour  devise  : 
De  omie  liedjes  zijn  de  besle,  et  de  voler  l'insertion  du  sus- 
dit travail  dans  la  col  lectionin-8'' des  Wmo<rcscoj(/onnes.  » 

M.  Peter  Benoit,  deuxième  commissaire,  déclare  adhé- 
rer aux  idées  exprimées  dans  ce  rapport.  11  se  joint 
à  son  éminent  confrère,  ajoute-t-il,  pour  demander  l'im- 
pression du  mémoire. 


Happofi  ttf   .n.    Kmile   .fialhtvu,    tfoisiôtitet    romutisanii». 

ce  Attrayante  et  vraiment  instructive  a  été  pour  moi  la 
lecture  du  mémoire  sur  les  origines  mélodiques  et  ryth- 
miques de  la  chanson  flamande.  Il  ne  m'a  pas  été  pos- 
sible, pour  plusieurs  raisons,  de  me  livrer  à  une  étude 
approfondie  de  cet  ouvrage.  Il  m'eût  fallu,  pour  exercer 
un  contrôle  sérieux,  raflraichir  et  raffermir  mes  connais- 
sances trop  sommaires  relativement  au  plain-chant  et  à 
la  musique  grecque.  D'autre  part,  bien  que  le  flamand 
de    l'auteur,   -     d'une   simplicité,    d'une   clarté    plutôt 


(  36i  ) 

gauloise,  —  soit  à  la  portée  d'un  Wallon  de  bonne 
volonté  et  quelque  peu  pratiquant,  ce  n'est  qu'en  mesu- 
rant les  doses  que  j'ai  pu  éviter  la  fatigue  et  l'inattention. 
Or  je  n'avais  reçu  communication  du  mémoire  que  le 
28  septembre,  au  moment  de  la  rentrée  des  cours  des 
écoles  de  musique,  époque  d'encombrement  et  de  corvées 
administratives.  J'ai  toutefois  noté  au  courant  de  ma 
lecture  quelques  points  d'interrogation,  quelques  remar- 
ques; l'auteur  y  trouvera  peut-être  l'indice  d'une  légère 
lacune  que  suffirait  à  combler  une  ligne  de  texte  supplé- 
mentaire. 

Je  soubaiterais,  par  exemple,  que  telle  cbanson  popu- 
laire, inspirée  d'un  cbanl  liturgique,  lui-même  issu  de 
tel  bymne  païen,  ne  fût  \iAS  isolément  citée.  Je  la  voudrais 
parfois  accompagnée  de  la  mélodie  mère,  ambrosienne 
ou  grégorienne,  de  son  aïeule  iastienne  ou  dorienne. 

A  la  page  23,  l'auteur,  après  avoir  résumé  le  système 
musical  des  anciens,  se  sert  brusquement  de  l'expression 
«  aanverwandlen  durtoonaard  »,  «  ton  relatif  majeur  », 
sans  avoir  fait  connaître  au  préalable  si  les  modes  grecs, 
devenus  les  tons  du  plain-cbant,  disposaient  comme  la 
musique  moderne  d'un  /Wa///"  majeur  ou  mineur. 

Je  me  hâte  du  reste  de  me  rallier  à  l'appréciation  du 
juge  par  excellence,  à  lui  seul  cour  d'appel  en  la  matière, 
notre  maître,  M.  Gevaert,  et  je  recommande  l'impression 
de  ce  mémoire,  monument  bibliographique  de  la  chanson 
llamande  ancienne  et  moderne. 

Je  regretterais  cependant  que  le  travail  si  considé- 
rable, si  consciencieux,  d'un  érudit  doublé  d'un  délicat 
musicien,  fût  lettre  morte  pour  nos  confrères  de  la  Wal- 
lonie;   aussi    exprimé-je    le    vœu    qu'un    texte    français 


(  362  ) 

accompagne  l'original;  que  la  publication  ait  lieu  dans 
nos  deux  idiomes  nationaux,  escortant  en  deux  colonnes 
l'insertion  unique  des  mélodies.  » 

La  Classe,  se  ralliant  aux  conclusions  des  rapports  de 
ses  commissaires,  a  décerné  le  prix  de  tnille  francs  à  ce 
travail. 

L'ouverture  du  billet  cacheté  a  (ait  connaître  comme 
en  étant  l'auteur,  .VL  Florimo)i(l  van  Duvse,  correspon- 
dant de  l'Académie,  à  Gand. 


ART    APa>l.lQrK. 

GRAVURE    EN    TAILLE- DOUCi:. 

On  donande  le  portrait  en  buste,  gravé  en  taille-douce, 
d\in  Belge  contemporain,  aijant  une  notoriété  reconnue 
dans  le  doniuiite  politique,  administratif,  scienti/iqni',  litté- 
raire ou  artistique. 

ttapinn'l   (If    fl.    Ch.    'g'fiutiftt. 

«  La  Section  de  gravure,  bien  ([ue  je  n'aie  |)as  l'honneur 
d'en  faire  partie,  m'a  chargé  de  vous  présenter  son  rap- 
port sur  ce  concours. 

Deux  envois  ont  été  adressés  à  la  Classe  : 

L'un  portant  la  devise  :  Speranza; 

L'autre,  cette  suscription  :  //art  est  l'àme  dun  peuple 

La  Section  de  gravure  estime  que  ce  dernier  mérite 
le  prix,  à  raison  de  sa  supériorité  sous  le  rapport  de 
l'élégance  du  dessin  et  de  la  linesse  du  travail  technique. 


(  3()3  ) 
Cependant,  et  tout  en  proclamant  que  le  montant  total 
du  prix  doit  être  attribué  à  cet  envoi,  elle  reconnaît 
cependant  à  la  planche  portant  la  devise  Speranza  des 
qualités  assez  remarquables  pour  légitimer  une  récom- 
pense pécuniaire  à  titre  d'encouragement,  si  les  crédits 
dont  la  Classe  dispose  permettent  cette  extension  et  si 
la  Classe  juge  à  propos  d'y  consentir.  » 

La  Classe  a  décidé  de  partager  le  prix  de  huit  cents 
francs  entre  les  auteurs  de  ces  deux  gravures  :  M.  Louis 
,Peeters,  d'Anvers,  et  M.  Joseph  Aerts,  de  la  même  ville, 
tous  deux  élèves  de  l'Académie  royale  des  beaux-arts 
d'Anvers. 

Les  résultats  des  (-oncours  seront  proclamés  dans  la 
séance  publique. 


PRÉPARATIFS    DE    LA    SÉANCE    PUBLIQUE. 

Conformément  à  l'article  15  du  règlement  de  la  Classe, 
M.  Ch.  Tardieu,  directeur,  donne  lecture  du  discours 
qu'il  prononcera  en  séance  publique. 


(  364  ) 


ri^ASSE   nV.H  BEA  VIL -A  RTS. 


Séance  publique  du  dimanche  6  novembre  4898. 

M.  Ch.  Tardieu,  directeur,  président  de  l'Académie. 
M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Prennent  également  place  au  bureau  : 

MM.  Éd.  Dupont,  directeur  de  la  Classe  des  sciences, 
et  J.  Robie,  vice-directeur  de  la  Classe  des  beaux-arts. 

M.  L.  De  Bruyn,  Ministre  de  l'Agriculture  et  des  Tra- 
vaux publics,  ayant  les  beaux-arts  dans  ses  attributions, 
assiste  à  la  séance. 

Sont  présents  :  MM.  Th.  Radoux,  J.  Demannez,  P.-J. 
Clays,  G,  De  Groot,  Gustave  Biot,  H.  Hymans,  Th.  Vin- 
çotte,  Jos.  Stallaert,  Alex.  Markelbach,  G.  Huberti, 
A.  Hennebicq,  Éd.  Van  Even,  AltV.  Cluysenaar,  J.  Win- 
ders,  H.  Maquet,  J.  Van  Ysendyck,  membres;  J.-B.  Meu- 
nier et  FI.  van  Duyse,  correspondants. 

Assistent  à  la  séance  : 

Classe  des  sciences.  —  MM.  Devvalque,  Brialmont, 
C.  Malaise,  ¥.  Folie,  F.  Plateau,  Fr.  Grépin,  G.  Van  der 
Mensbrugghe,  Louis  Henry,  M.  Mourlon,  P.  De  Heen, 
F.  Terby,  Léon  Fredericq  et  A.   Lancaster,    membres. 


(  565  ) 

Classe  des  lettres.  —  MM.  S.  Boimans,  Ch.  Piot, 
A.  Giron,  Georges  Monchamp,  Ern.  Diseailles,  mem&res  ; 
J.-C.  VoUgraff,  associé;  Alph.  Willems  et  E.  Gossart, 
correspondants. 

La  séance  s'ouvre  à  1  heure  et  demie. 

Sur  l'art  au  XIX^  siècle,  discours  par  M.  Charles  Tardieu, 
directeur  de  h  Classe,  président  de  l'Académie. 

Mesdames,  Messieurs, 

Ce  XIX*  siècle,  qui  n'a  plus  que  deux  années  à  vivre, 
obtiendra  sans  nul  doute  une  place  illustre  dans  les 
annales  de  l'humanité.  Et  pourtant,  il  y  a  quelque  har- 
diesse à  la  lui  promettre  dans  cette  solennité,  car  ce 
siècle  a  perdu  beaucoup  de  temps  à  se  méconnaître,  voire 
à  se  calomnier,  et  il  n'est  peut-être  pas  une  autre  époque 
de  l'histoire  qui  ait  été  moins  équitable  pour  elle-même. 

Il  est  bien  entendu  que  nous  ne  nous  occupons  ici  que 
des  beaux-arts. 

Oh!  si  nous  avions  la  téméraire  prétention  d'encadrer 
dans  cette  courte  allocution  toute  l'activité  de  notre 
temps,  ne  fût-ce  que  pour  en  caractériser  les  manifesta- 
tions les  plus  significatives,  il  nous  faudrait  changer 
d'antienne,  et  surtout  si  nous  y  faisions  place  à  la  science 
et  à  l'industrie. 

Le  XIX*  siècle,  en  effet,  fut  toujours  fier  de  son  œuvre 
scientifique  et  de  son  expansion  industrielle,  et  il  n'est 
pas  de  fierté  plus  légitime  que  celle-là,  tant  cet  œuvre 
est  immense,  tant  cette  expansion  .tient  du  prodige. 

Telle  est  la  complexité  du  labeur  scientifique  contem- 
porain, embrassant  tout,  depuis  le  cèdre  jusqu'à  l'hysope. 


{    366    ; 

pour  parler  comme  le  roi  Salomon,  ou,  si  vous  préférez, 
depuis  l'inlusoire  jusqu'à  l'iguanodon,  et  depuis  le  fond 
des  mers  jusqu'au  ciel  inconnu,  telle  en  est  la  spécialisa- 
tion nécessaire,  la  division  à  l'infini,  que  la  science  est 
presque  dans  l'impossibilité  de  se  mettre  au  courant 
d'elle-même.  Vn  de  nos  éminents  confrères,  qui  fait 
honneur  à  la  science  belge,  nous  confessait  un  jour  son 
embarras  de  s'initier  à  toutes  les  contributions  qui  enri- 
chissent le  domaine,  limité,  auquel  il  a  consacré  sa  vie. 
Ceci  pour  excuser,  Mesdames  et  Messieurs,  non  pas 
l'ignorance  relative  qu'il  serait  impertinent  de  vous  attri- 
buer, mais  la  nôtre,  beaucoup  plus  embarrassée  que 
notre  savant  collègue  de  s'assimiler  tant  de  notions 
indispensables  et  incessamment  accumulées,  revisées  et 
renouvelées. 

De  même,  alors  que  l'industrie  moderne  ap|)lique  avec 
une  égale  ferveur  les  sciences  de  la  vie  et  celles  de  la 
mort,  celles  de  la  guerre  et  celles  de  la  paix;  alors  que, 
de  plus  en  plus  à  l'étroit  dans  les  frontières  des  divers 
États,  par  une  contradiction  piquante  et  féconde,  souhai- 
tant qu'on  les  hérisse  de  barrières  monopolisantes,  elle 
ne  s'en  élance  pas  moins  à  travers  le  monde,  cherchant 
la  lutte,  instituant  la  concurrence,  et  poussant  jusqu'au 
tin  fond  des  continents  mystérieux  pour  y  introduire  la 
civilisation  et  le  progrès,  on  conçoit  aisément  que  ce 
siècle  soit  aussi  glorieux  de  son  labeur  industriel  qu'il 
est  orgueilleux  de  son  œuvre  scientifique. 

Par  contraste,  et  même  à  négliger  les  sciences  de  la 
pensée  et  l'art  des  lettres  pures,  poésie,  drame  ou  roman, 
à  nous  en  tenir  aux  arts  de  la  forme  et  du  son,  comment 
ne  pas  s'étonner  que  ce  même  siècle,  aux  diverses  étapes 
de  sa  carrière,  se  soit  montré  systématiquement  hostile  à 
son  propre  effort  artistique? 


(  367  ) 

Je  sais  bien  que,  s'il  y  eut  des  attaques,  il  y  eut  des 
défenses,  dont  plusieurs  victorieuses;  mais  interrogez  dans 
son  ensemble  l'opinion  publique  du  siècle  sur  son  art,  et 
vous  noterez  qu'au  milieu  du  bruit  des  autoditbyrambes 
et  des  diatribes,  contrepartie  parfois  utile,  cette  opinion 
se  résume  en  un  mélancolique  regret  du  passé,  de  ce  qu'on 
appelle  les  grands  siècles  d'art. 

Certes,  loin  de  moi  l'intention  de  dénigrer  les  maîtres, 
les  pionniers,  les  fondateurs,  les  premiers  promoteurs  du 
beau  définitif,  ceux  qui  ont  laissé  des  exemples  toujours 
bons...  à  copier?  —  non  pas,  le  pasticheur  n'étant  pas 
même  un  apprenti  sorcier,  mais  seulement  un  famulus 
domestiqué,  disant  amen  à  tout,  et  jusqu'aux  sénilités 
du  patron,  —  mais  toujours  bons  à  étudier,  à  pénétrer, 
suscitant  des  interprétations  nouvelles  et  jusqu'à  des 
initiations  imprévues,  quand,  de  ces  exemples,  l'émule 
s'inspire  en  toute  liberté  de  conscience. 

Saluons  ces  anciens  qui  sont  des  éternels;  mais  il  y  a 
un  abîme  entre  ce  respect,  ce  culte  éclairé  qui  consacre 
leur  autorité  en  la  prorogeant,  et  la  dévotion  étroite  et 
stérile  qui  se  borne  à  pleurer  sur  les  ruines  abolies,  sans 
aucun  espoir  de  les  réédifier. 

Feuilletez  l'histoire  des  arts  au  XJX^  siècle,  et  vous  y 
lirez  presque  à  chaque  page  ce  mélancolique  regret  des 
grands  siècles  d'art,  corroboré  par  cette  affirmation  que 
le  nôtre  ne  serait  qu'un  très  petit  garçon,  indigne  et 
incapable  de  se  mesurer  avec  eux. 

Ce  vers  a  passé  proverbe  : 

Qui  me  délivrera  des  Grecs  et  des  Romains  ! 

Protestation  puérile,  pour  peu,  qu'on  la  prenne  à  la 
lettre,  légitime  si  l'on  y  voit  la  négation  d'un  romanisme 


(  368  ) 
de  convention   et  d'une  grécité  barbare,   et   la  ii;uerre 
déclarée  à  ce  préjugé  nélaste  qui  assimile  la  beauté  intrin- 
sèque et  la  noblesse  du  style  à  la  tyrannie  aveugle  de  la 
toge  ou  de  la  chlamyde. 

A  peine  ce  vœu  est-il  émis  que  le  siècle  dernier  finit  et  le 
nôtre  commence  par  l'organisation  de  cette  tyrannie,  qui 
du  moins  en  s'imposant  d'autorité  et  en  proscrivant  tout 
le  reste,  était  en  barmonie  avec  ce  tournant  de  l'bistoire, 
crépuscule  du  XVIIF  siècle,  aurore  du  XIX''  :  d'un  côté, 
proscriptions  révolutionnaires  aboutissant  à  la  dictature 
impériale;  de  l'autre,  proscription  de  tout  ce  qui  n'est  pas 
l'école  de  David,  et,  en  fin  de  compte,  dictature  du  style 
empire,  de  ce  style  pesant  qu'on  s'évertue  à  rebabiliter 
aujourd'hui,  parce  que,  sur  les  marchés  du  bric-à-brac,  il 
n'est  plus  d'autre  bibelot  à  la  portée  des  collectionneurs. 

11  appartenait  à  la  science  contemporaine,  aux  |)atientes 
lecherclies  des  épigrapbistes,  aux  étonnantes  trouvailles 
des  archéologues,  de  réconcilier  l'art  moderne  avec  la  vie 
anticjue  en  l'exhumant,  en  lui  restituant  sa  physionomie 
organique,  et  en  donnant  ainsi  son  véritable  sens  à  un  cri 
libérateur. 

Mais  avant  celte  restitution  qui  s'accomplit  tous  les 
jours  sous  nos  yeux,  nous  révélant  une  antiquité  insoup- 
çonnée, substituant  à  la  superstition  classique  une  philo- 
sophie plus  profonde  de  l'histoire,  et  ce  symbolisme  élargi 
dont  s'inspirent  aujourd'hui  les  arts  et  les  lettres,  une 
œuvre  de  démolition  était  indispensable.  Le  romantisme 
s'y  donna  tout  entier  et  il  eut  tout  au  moins  le  mérite  de 
réagir  contre  une  dictature  esthétique  qui  serait  l'excuse 
de  Sainte-Hélène,  si  l'esthétique  avait  une  part  quel- 
conque dans  la  relégation  d'un  vaincu  sur  un  rocher 
mortel . 


(  369  ) 

Réaction  violente  et  incohérente,  versant  inévitable- 
ment dans  (ni  moyen  âge  d'à-peu-près,  aussi  conven- 
tionnel que  le  pseudo-classicisme,  à  peine  le  romantisme 
a-t-il  l'ait  son  temps  qu'on  le  regrette  déjà  ;  el  l'on  oppose 
aux  naturistes  qui  commencent  à  poindre  les  peintures  à 
cuirasses  où  brillait  l'émail  des  heaumes  empanachés,  et 
les  statues  des  liers  chevaliers  enfourchant  leurs  destriers 
caparaçonnés.  Et  par  une  anomalie  singulière,  alors 
qu'on  s'attendrit  sur  ses  tics  les  plus  irrémissiblemenl 
démodés,  on  semble  ne  lui  savoir  aucun  gré  de  ses  titres 
les  plus  sérieux  à  la  gratitude  esthétique  du  siècle  et  de 
l'avenir  même,  à  savoir  la  réhabilitation  de  la  passion 
et  la  revendication  des  droits  de  l'individu. 

Ce  n'est  pas  ici  le  lieu  de  rchercher  si  ces  deux  con- 
ceptions se  justiHenl  pleinement  du  point  de  vue  moral 
DU  social;  mais  ce  sont  assurément  deux  forces  d'art 
essentielles;  et,  sans  promener  nos  réflexions  de  la  pein- 
ture à  la  musique,  en  passant  par  la  sculpture  et  l'archi- 
tecture, nous  osons  dire  que  toute  l'évolution  artistique 
du  siècle  s'en  déduit. 

On  en  gémit  pourtant,  on  professe  que  la  passion 
mène  fatalement  au  dérèglement,  en  art  comme  dans  la 
vie,  et  que  trop  souvent  l'individualisme  s'infatue  et 
s'hypertrophie  au  point  d'atlecter  des  prétentions  incom- 
patibles avec  le  sens  commun.  Et  l'on  verse  d'abondantes 
larmes  sur  la  fin  des  écoles  et  sur  l'anarchisme  esthétique, 
plaie  de  notre  lin  de  siècle. 

Que  la  passion  se  dérègle  parfois,  il  serait  dilïicile  de 
le  contester;  et,  de  même,  que  l'individu  affranchi  de 
toutes  lisières  se  permette  trop  souvent  des  licences  dont 
au  surplus  il  est  ordinairement  la  première  victime. 

Mais  à  considérer  de  plus  près  ces  deux  facteurs  inéluc- 

3™^    SÉRIE,    TOME    XXXVl.  25 


(  3"0  ) 
tables  de  toute  vitalité,  artistique  ou  autre,  on  est  amené 
à  reconnaître  que  la  passion  elle-même  a  ses  lois  et  que 
l'individualisme  le  plus  forcené  ne  s'aurait  s'en  abstraire. 
Or  tout  l'effort  scientifique  et  artistique  du  siècle,  voire 
son  effort  philosopl)i(jue,  moral  et  politique,  se  réduit  en 
somme  à  ceci  :  substituer  à  la  règle  arbitraire  ou  imagi- 
naire la  loi  naturelle  et  irrécusable. 

Dans  un  discours  prononcé  ici  même,  un  vénérable 
confrère  dont  nous  déplorons  la  perte  récente,  Adolphe 
Samuel  livrait  à  son  auditoire  cet  aveu  pénible,  mais 
loyal,  qu'après  une  longue  vie  absorbée  par  l'art  musical 
et  la  critique,  il  en  était  arrivé  à  se  convaincre  du  néant 
absolu  des  règles,  de  ces  règles  que  prolonge  à  travers 
les  âges  un  enseignement  traditionnel.  Qu'il  n'y  ait  plus 
de  règles,  soit,  et  c'est  exact,  si  l'on  vise  les  règles  a  priori 
dont  le  code  est  pareil  à  ce  chapeau  de  Fortunatus  qui 
saute  de  tête  en  tête,  sans  que  jamais  personne  s'avise 
d'en  contrôler  le  pouvoir  magique.  Mais  il  y  a  des  lois, 
des  lois  de  nature,  l'orateur  les  oubliait  après  les  avoir 
observées  dans  ses  œuvres  ;  et  les  seules  règles  subsistent 
qui  s'attestent  conformes  à  ces  lois  tour  à  tour  ignorées 
ou  devinées,  désormais  objet  d'un  travail  incessant  de 
vérification. 

Convenons-en,  la  règle  toute  faite  a  bien  son  charme. 
Qu'un  instinct  j^rofond  la  découvre  ou  qu'un  caprice  l'in- 
vente; que,  propagée  par  la  mode,  elle  se  maintienne 
par  habitude,  c'est  un  point  d'appui  solide  quand  ce 
n'est  pas  un  oreiller  assoupissant. 

Mais  à  la  recherche  des  lois,  un  oreiller  ne  saurait 
suffire.  Et,  si  le  premier  devoir  de  la  loi  est  de  se  prou- 
ver juste  et  vraie,  il  y  a  des  chances  pour  que,  la 
démonstration   faite,    elle   entraine   une   adhésion   plus 


(  5'"   ) 
explicite  que  la  règle  imposée,  surtout  si  la  loi  démon- 
trée enfante  plus  de  chefs-d'œuvre  que  la  règle  subie, 
laquelle,  après  tout,  en  a  bien  quelques-uns  à  son  actif. 

Cet  individualisme  que  déchaîna  le  romantisme,  dans 
la  première  moitié  du  siècle,  eut  son  complément  dans 
la  seconde,  un  complément  logique  qu'il  est  impossible 
de  ne  pas  rattacher  à  des  circonstances  politiques, 
quelque  désir  qu'on  ait  d'arrêter  la  j)olitique  au  seuil  de 
cette  salle. 

La  politique  étrangère  du  premier  empire  avait  pour 
caractère  prédominant,  avec  le  blocus  des  idées  et  des 
produits  qui  n'agréaient  pas  au  maître  du  monde,  le 
mépris  des  nationalités,  la  méconnaissance  de  leurs  élé- 
ments constitutifs,  de  leurs  instincts  naturels,  de  lei  rs 
aspirations  propres. 

Au  contraire,  le  second  empire,  —  bien  que  le  neveu 
se  donnât  comme  le  continuateur  de  l'oncle,  —  s'il 
renonce  au  blocus  des  produits,  faisant  de  son  mieux 
pour  rétablir  le  blocus  des  idées,  et  s'il  commence  parla 
politique  d'équilibre,  —  la  guerre  de  Crimée  n'aflîchait 
pas  d'autre  tendance,  —  ce  fut  pour  se  jeter  bientôt  après, 
tête  baissée,  dans  la  politique  des  nationalités. 

Ce  que  ce  revirement  a  pu  coûter  ou  rapporter  à  son 
promoteur  et  au  grand  pays  dont  il  jouait  les  destinées 
sur  les  champs  de  bataille,  n'est  pas  de  notre  ressort  ; 
mais  l'influence  en  est  indéniable  sur  les  mouvements 
de  l'art  au  XIX''  siècle,  bien  que  la  critique  préfère  géné- 
ralement s'écarter  de  ce  point  de  vue  pour  se  complaire 
à  des  dissertations  plutôt  dogmatiques. 

Et  la  conséquence  la  plus  remarquable  en  est  le  réveil 
des  nationalités  artistes,  formes  naturelles  de  l'indivi- 
dualisme, car  si  la  première  expansion  de  l'individu  est 


(  372  ) 

la  famille,  et  la  seconde  l'association,  la  troisième  est  la 
nation. 

Que  ce  réveil  soit,  à  certains  égards,  de  coïncidence, 
nous  le  voulons  bien.  La  nation  est  le  sol  de  l'art,  comme 
le  champ  l'est  de  la  graine.  Où  il  n'y  a  pas  de  germe, 
l'engrais  chimique  abdique.  Mais  de  même  que  certaines 
conditions  climatériques  favorisent  l'elfort  du  laboureur, 
de  même  certaines  circonstances  politiques  peuvent 
stimuler  l'effort  de  l'artiste.  Et  c'est  ici  que  la  coïnci- 
dence se  rehausse  de  causalité. 

La  politique  des  nationalités  a  fait  ollice  d'inlluence 
météorologique  ou  de  temps  favorable;  elle  a  été  ce 
ce  moment  »  qui,  d'après  Taine,  est  l'une  des  causes 
déterminantes  de  l'éclosion  du  génie  et  de  l'œuvre.  Elle 
n'a  pas  été  le  germe,  mais  n'en  a  pas  moins  aidé  à  le 
faire  lever  dans  des  sols  laissés  jusque-là  plus  ou  moins 
en  friche. 

Rappelez-vous  ce  qui  était  admis  presque  sans  conteste 
avant  que  cette  politique,  comme  disait  Cavour,  remit 
l'Europe  en  mouvement.  On  reconnaissait  en  peinture  la 
signature  de  l'Italie  et  des  Pays-Bas.  L'Espagne  et 
l'Allemagne  n'apparaissaient  que  comme  des  souvenirs; 
l'Angleterre  comme  un  accident,  encore  qu'elle  eût 
modifié  au  commencement  du  siècle  l'orientation  de 
l'art  français.  En  musique,  la  signature  de  l'Italie  et  de 
l'Allemagne.  Et  pour  la  peinture  comme  pour  la  musique, 
comme  pour  tous  les  arts  sans  distinction,  l'on  assignait 
à  la  France  le  rôle  enviable  d'ailleurs  et  la  fonction 
évidemment  noble  d'une  sorte  de  Cour  d'arbitrage  et  de 
conciliation,  distribuant  la  gloire  jugée  à  sa  mesure,  qui 
était  celle  de  l'éclectisme. 

Or  la  politique  des  nationalités  n'a  pas  plus  tôt  fait  son 


(  375  ) 
apparition  dans  le  monde,  que  tontes  les  nations  capables 
de  facultés  artistes  se  mettent  en  demeure  de  les  déployer, 
et  que  les  individualités  les  plus  sûres  de  leur  «  moi  »  en 
cherchent  dans  leur  nationalité  même,  dans  les  forces 
antérieures  de  leur  race,  dans  les  encouragements  de 
leur  milieu,  le  stimulant  générateur  et  le  souverain 
épanouissement.  Phénomène  d'autant  plus  intéressant 
que  la  facilité  des  échanges,  des  locomotions  et  des 
transports  semblait  faite  pour  servir  la  neutralisation 
cosmopolite  des  idées  et  le  nivellement  des  tendances, 
bien  plutôt  que  l'émulation  des  originalités. 

L'art  anglais,  qui  d'ailleurs  n'avait  pas  attendu  1859 
pour  jeter  au  naturalisme  déjà  débridé  le  déh  du  préra- 
phaélisme et  de  la  moralité  esthétique,  continue  l'œuvre 
de  Ruskin  et  exporte  son  style  sur  le  continent. 
L'Espagne,  avec  Fortuny,  inquiète  les  favoris  de  la  vogue 
parisienne.  L'Allemagne,  non  contente  de  garder  le 
sceptre  de  la  symphonie  et  de  conquérir,  avec  Wagner, 
celui  du  drame  lyrique,  veut  avoir  ses  peintres  et  ses 
sculpteurs.  La  sculpture  belge  élève  les  mineurs  du  pays 
noir  à  la  dignité  du  bronze  héroïque.  La  Russie,  plus 
audacieuse  encore;  emprunte  à  la  misère  du  moujik  le 
symbole  de  la  souffrance  du  Christ,  en  même  temps  que 
sa  musique,  presque  italienne  avec  Glinka,  se  fait  aussi 
russe  que  possible  avec  Moussorgski,  ses  devanciers  et 
ses  émules.  Et  il  n'est  pas  une  nationalité,  pas  une  race, 
si  modeste  qu'elle  soit,  qui  ne  tienne  à  honneur  de 
s'affirmer  sans  réticence  dans  les  arts  et  les  lettres  :  la 
Norvège  avec  un  compositeur  que  notre  Académie  s'est 
associé,  avec  un  dramaturge  qui  a  partout  des  fanatiques; 
la  Rohême  tchèque  avec  des  musiciens  applaudis  jusqu'à 
Vienne;  tandis  que  dans  notre  pays,  où  la  filiation  pictu- 


(  374  ) 

raie  est  ininterrompue,  et  dès  les  premiers  symptômes  de 
ce  mouvement,  le  drapeau  de  la  musique  llainande  est 
bravement  arboré,  aux  applaudissements,  bientôt,  de  la 
Wallonie  elle-même. 

La  France  n'en  reste  pas  moins  le  grand  atelier  où, 
des  quatre  coins  du  monde  artiste,  et  des  Etats-Unis 
comme  de  la  Grèce,  on  vient  chercher  des  maîtres  et  des 
juges,  puiser  surtout  les  normes  du  goût  établies  par 
une  persistante  tradition  conciliatrice;  mais  chacune  de 
ses  expositions  universelles  prouve  que  ses  leçons  les 
plus  précieuses  et  les  plus  sûres  sont  passionnément 
adaptées  au  développement  de  ces  deux  forc(!S  d'art  qui 
sont  celles  du  siècle  et  se  tiennent  inséparables  :  person- 
nalité de  l'artiste,  nationalité  de  l'œuvre. 

Il  y  a  peut  être  une  exception,  l'architecture.  Il  est 
convenu  que  celle  de  notre  époque  n'a  pas  de  caractère 
propre;  et,  en  admettant  que  ce  préjugé  soit  justifié, 
cela  tient  peut-être  à  ce  que,  plus  que  les  autres  arts, 
elle  se  laisse  hypnotiser  par  cette  superstition  du  passé 
dont  se  complique  à  notre  époque  un  remarquable  effort 
de  renouvellement.  Mais  sommes-nous  au  point  de  recul 
nécessaire  pour  rendre  justice  aux  manifestations  les  plus 
récentes  de  cet  art,  le  plus  complexe  de  tous,  de  cet  art 
dont  le  libre  essor  est  entravé,  non  seulement  par  la 
destination,  condition  première  de  ses  œuvres,  mais 
aussi  par  les  fantaisies  de  la  commande,  par  la  transfor- 
mation de  la  technique,  par  l'emploi  de  nouveaux  maté- 
riaux, et  enfin,  sauf  quehjues  exceptions  prodigues,  par 
la  pénurie  des  ressources?  Et  qui  nous  dit  qu'au  siècle 
prochain,  nos  architectes  n'auront  pas  leur  revanche, 
l'opinion  les  vengeant  d'un  injuste  dédain,  la  critique 
prenant  un  malin  plaisir  à  jeter  les  moellons  de   leurs 


(  375'  ) 
édifices  à  la  face  de  leurs  pileux  émules,  de  leurs  indignes 
successeurs? 

Celte  revanche,  n'eu  doutez  pas,  Mesdames  et  Mes- 
sieurs, est  assurée  à  l'arl  de  noire  époque,  et,  si  nous 
survivons  à  l'année  1900,  nous  entendrons  souvent  et 
nous  savourerons  malicieusement  ces  exclamations  qui 
se  répercutent  d'âge  en  âge  :  «  Nos  pères  ne  l'entendaient 
pas  ainsi.  Et  comme  ils  avaient  raison  !  Et  comme  ils 
étaient  plus  sages  et  plus  heureux  !  »  Encore  deux  ans  et 
nous  aurons  cette  joie  immense  et  cet  honneur  insigne 
d'être  à  notre  tour  un  passé.  Et  dès  aujourd'hui,  avec  un 
héros  d'épopée,  promu  personnage  de  comédie,  ce 
XIX«  siècle  peut  dire  :  «  Et  moi  aussi  je  suis  un  ancêtre!  » 


—  M,  le  Secrétaire  perpétuel  proclame  les  résultats 
suivants  du  concours  annuel  de  la  Classe  et  des  concours 
du  Gouvernement. 

CONCOURS  ANNUEÏ.  PO[]R   1898. 


PARTIE    ■.ITTÉKAini:. 

Trois  mémoires  portant  comme  devise  : 

Le  premier  :  Apparence,  réalité,  fiction  ; 

Le  second  :  Ah  ic  con; 

Le  troisième  :  L'art  symbolique  est  la  forme  d'art  la 
plus  ancienne  et  la  plus  expressive; 
ont  été  soumis  en  réponse  à  la  première  question  : 

Quelles  sont  les  analogies  ou  les  différences  qui  existent 


(  376 


entre  l'allégorie  et  le  si/mbole?  Etablir  et  caractériser,  par 
des  exemples  empruntés  à  l'histoire  de  la  peinture,  les  élé- 
ments essentiels  qui  rapprochent  on  distinguent  ces  deux 
conceptions  esthétiques. 

La  Classe,  se  ralliant  aux  conclusions  du  rapport  de 
ses  commissaires,  a  décerné  le  prix,  d'une  valeur  de  huit 
cents  francs,  au  mémoire  portant  la  devise  :  Apparence, 
réalité,  fiction. 

L'ouverture  du  billet  cacheté  a  fait  connaître  comme 
auteur  de  ce  travail  M.  Edgar  Baes,  à  Ixelles. 

M.  le  Secrétaire  perpétuel  t'ait  remarquer  que  c'est  la 
quatrième  fois  que  M.  Edgar  Baes  remporte  la  médaille 
d'or  des  concours  académiques. 

Son  premier  mémoire  date  de  18G3,  époque  où  il  fut 
couronné  en  même  temps  que  le  peintre  Antoine  Wiertz, 
pour  leurs  réponses  à  la  question  :  Sur  les  caractères  con- 
stitutifs de  r École  flamande  de  peinture  ; 

Son  second  mémoire,  datant  de  1877,  avait  pour  sujet  : 
L'influence  italienne  sur  Rubens  et  Von  Dijck, 

Et  le  troisième  :  Sur  le  régime  de  la  profession  de 
peintre  avant  Rubens,  fit  partie  du  concours  de  1881. 

Indépendamment  de  ces  quatre  médailles  d'or, 
M.  Edgar  Baes  a  remporté,  en  1865,  deux  médailles 
d'argent  :  la  première,  pour  son  mémoire  Sur  l'accroisse- 
ment des  arts  graphiques  et  plastiques,  et  la  seconde, 
pour  son  mémoire  Sur  l'histoire  de  la  peinture  de  paijsage. 

M.  Edgar  Baes  s'est  donc  acquis  par  ses  travaux  litté- 
raires une  place  des  plus  remarquables,  et  l'Académie 
applaudit  bien  sincèrement  à  ses  brillants  succès. 


(  "7  ) 

Un  mémoire  portant  la  devise  :  De  onde  liedjes  zijn  de 
beste,  a  été  soumis  en  réponse  à  la  quatrième  question  : 

Faire  l'historique  de  la  partie  spécialement  musicale  de 
la  chanson  flamande  {origine  des  mélodies  et  dés  formes 
rythmiques),  depuis  le  haut  moyen  âge  jusqu'aux  temps 
modernes. 

La  Classe,  se  ralliant  aux  conclusions  des  rapports  de 
ses  commissaires,  a  décerné  le  prix  de  mille  francs  à  ce 
travail. 

L'ouverture  du  billet  cacheté  a  fait  connaître  comme 
en  étant  l'auteur,  M.  Klorimond  van  Duyse,  correspon- 
dant de  l'Académie,  à  Gand. 

La  Classe  des  beaux-arts  est  d'autant  plus  heureuse  de 
féliciter  M.  Florimond  van  Duyse,  dit  M.  le  Secrétaire 
perpétuel,  que  c'est  pour  la  seconde  fois  que  ce  distingué 
confrère  remporte  la  médaille  d'or  des  concours.  Son 
premier  mémoire  Sur  la  chanson  populaire  flamande  en 
Belgique,  depuis  le  Xt  siècle,  couronné  en  1893,  lui  a 
valu  son  élection  comme  membre  correspondant,  tout 
autant  que  le  second  prix  de  Rome,  qu'il  avait  rem- 
porté en  1875. 

M.  Florimond  van  Duyse  est  de  ceux  qui  honorent, 
par  leurs  travaux,  non  seulement  l'Académie,  mais  aussi 
leur  famille  ;  et  ses  succès  littéraires  ne  sauraient  que 
rehausser  la  gloire  qui  entoure  le  nom  vénéré  de  son 
père,  feu  Prudens  van  Duyse,  que  la  Classe  des  lettres  n'a, 
hélas!  compté  que  trop  peu  de  temps  dans  ses  rangs,  et 
qui  fut  une  des  illustrations  de  la  littérature  flamande. 


(  378  ) 

ART    .%PI>I.IQI.-K. 

Deux  gravures  ont  été  soumises  pour  le  sujet  suivant  : 

On  demande  le  portrait  en  buste,  gravé  en  taille-douce, 
d'un  Belge  contemporain,  ayant  une  notoriété  reconnue  dans 
le  domaine  politique,  administratif,  scientifique,  littéraire 
ou  artistique. 

La  première  gravui'e  porte  la  devise  :  Spcrnnza,  et  la 
seconde  :  L'art  est  l'âme  d'un  peuple. 

\/à  Classe  a  décidé  de  partager  le  j)rix  de  huit  cents 
francs  entre  les  auteurs  de  ces  deux  gravures  :  M.  Louis 
Peeters,  d'Anvers,  et  M.  Joseph  Aerts,  de  la  même  ville, 
tous  deux  élèves  de  l'Académie  royale  des  beaux-arts 
d'Anvers. 


Grand  corscouRS  de  peinture  pour  l'année    1898. 

Conformément  aux  résolutions  du  jury  qui  a  jugé  le 
grand  concours  de  peinture,  dit  Prix  de  Rome,  pour 
l'année  1898, 

Le  premier  prix  a  été  décerné  à  M.  Lmile  Vloors,  de 
Borgerhout,  élève  de  l'Institut  supérieur  des  beaux-arts 
d'Anvers. 

Un  1"^'  second  prix  a  été  voté  à  M.  Camille  Lambert, 
d'Arlon,  élève  du  même  Institut; 

Un  2^  second  prix,  à  M.  Jules  Van  Biesbroeck,  de 
Portici,  élève  de  l'Académie  royale  des  beaux-arts  de 
Gand,  et  une  mention  honorable  à  W.  Félix  Gogo,  élève 
de  l'Institut  précité  d'Anvers. 


(  579  ) 


Prix  quinquennal  de  littkhatuhk  française. 

Par  arrêté  royal  du  25  juillet  l<Sy8,  le  prix  de  cinq 
mille  francs,  attribué  à  la  X"  période  du  concours  quin- 
quennal de  littérature  française  (1<S912-1897),  a  été,  sur 
la  proposition  du  jury,  décerné  à  M.  Albert  Giraud,  pour 
son  ouvrage  :  Hors  du  siècle. 


La  séance  se  termine  par  l'exécution  de  la  cantate  : 
Comala,  musique  de  M.  François  Basse,  premier  second 
prix  du  grand  concours  de  composition  musicale  de  1897, 
poème  de  M.  Paul  Gilson,  lauréat  du  concours  des  can- 
tates françaises  de  la  même  année. 


OUVRAGES  PKESENÏËS. 


Beneden  {Edouard  Van).  Les  Antbozoaires  de  la  «  Plank- 
ton-Expedition  ».  Kiel-Leipzig,  1898;  in-4"  (222  p.,  16  pi., 
1  carte  et  59  figures  dans  le  texte). 

Errera  {L.).  Tous  les  êtres  vivants  ont-ils  besoin  d'oxy- 
gène libre?  Note  additionnelle  à  «  l'Optimum  »,  à  propos 
d'un  travail  récent  de  M.  Beijerinck.  Bruxelles,  exlr.  in-8° 
(8  p.). 

Harlez  {Le  cliev.  Ch.  de).  Fleurs  de  l'antique  Orient. 
Extraits  d'œuvres  inédites  d'anciens  philosophes  chinois. 
1897;  extr.  in-S"  (30  p.). 

—  Les  figures  symboliques  du  Yi-King.  Paris,  1897; 
extr.  in-S"  (67  p  ). 


(  380  ) 

Harlez  {Le  cliev.  Ch.  de).  Le  chinois  parlé  au  VI«  siècle 
A.  C.  d'après  l'Ihi.  Leyde,  1898;  exlr.  in-8°(12  p.). 

Mesclach  de  1er  Kiele  {Ch.).  De  l'intervention  du  ministère 
public  dans  le  jugement  des  affaires  civiles.  Bruxelles, 
1898;  in-8M8  p.)- 

MoncJmmp  {George).  Les  reliques  de  sainte  Julienne  de 
Cornillon  à  l'abbaye  de  Vi  11ers.  Contribution  à  l'histoire 
de  son  culte.  Liège,  1898;  in-18  (31  p.) 

—  De  l'organisation  religieuse  dans  les  colonies.  Bru- 
xelles, 1898;  extr.  in-8<'(14p.). 

Gilson  {Gustave}.  Note  sur  un  Nématode  nouveau  des  îles 
Fiji  :  Carnoya  Vitieiisis  Gilson,  nov.  gen.  Louvain,  1898; 
extr.  in-4"  (35  p.  et  1  pi.). 

Joiighe  {Le  vicomte  B.].  Le  noble  de  Gand  à  la  bannière 
portant  une  foi  (1582).  Bruxelles,  1898;  in-8»(8p.). 

—  Un  tiers  de  sou  d'or  inédit  de  Maestricht.  Bruxelles, 
1898;  in-8<'(4p.). 

de  la  Vallée  Poussin  {L.).  Le  mahométisme,  d'après  un 
livre  récent.  Edimbourg,  1898;  extr.  in-8»  (27  p.). 

Du  Jardin  (Jules).  L'art  flamand.  I^a  Renaissance  du 
XIX«  siècle.  L'Ecole  de  1830  et  les  peintres  contemporains. 
Bruxelles,  1898;  in-4". 

Decroly  (0.).  Etude  de  l'action  des  toxines  et  antitoxines 
sur  la  nutrition  générale.  Gand-Paris,  1898;  in-8"  (117  p.). 

Lafeiiestre  {Georges)  et  RiclUenberger  {Eug.).  La  peinture 
en  Europe.  La  Hollande.  Paris  [1898J;  vol.  pet.  in-8<'. 

De  Wildeman  {E.)  et  Durand  {Th.).  Prodrome  de  la  flore 
belge.  Thallophytes.  4«  fasc.  Bruxelles,  1898;  in-8''. 

Des  Marez  {Guillaume).  Étude  sur  la  propriété  foncière 
dans  les  villes  du  moyen  âge  et  spécialement  en  Flandre, 
avec  plans  et  tables  justificatives.  Gand-Paris,  1898;  in-8o 
(xxv-393  p.). 

De  liaadt  {J.-Th.).  C.-A.  Serrure,  1835-1898.  Paris,  1898; 
in-8°  (8  p.,  portrait). 


(  381  ) 

Hymans  {Raid}  et  Delcroix  {Alfred}.  Histoire  parlemen- 
taire de  la  Belgique,  3«  série,  tome  II,  fasc.  4-3,  session 
ordinaire  de  1896-1897.  1898;  in-8°. 

Pasquier  {Ern.).  Sur  le  principe  de  l'énergie.  —  Sur  le 
principe  des  vitesses  virtuelles.  Bruxelles,  1898;  extr.  in-8" 
(8  p.). 

—  Sur  la  généralisation  de  certains  principes  de  méca- 
nique. Bruxelles,  1898;  extr.  in-8°  (7  p.). 

—  Les  hypothèses  cosmogoniques.  Louvain,  1898;  extr. 
in-S»  (77  p.). 

Frederichs  {Jules).  Histoire  moderne.  Manuel  à  l'usage  de 
l'enseignement  moyen.  Gand,  1898;  in-8"  (476  p.). 

Querton  {Louis).  Du  mode  de  formation  des  membranes 
cellulaires.  Bruxelles,  1897;  extr.  in-8"  (16  p.). 

—  Les  infections  alimentaires.  Bruxelles,  1898;  extr. 
in-8°  (23  p.). 

—  Le  sommeil  hibernal  et  les  modifications  des  neu- 
rones cérébraux.  Bruxelles,  1898;  extr.  in-8''  (58  p.,  4  pi.). 

Querton  (L.)  el  Eiisch  (.V.).  La  plasticité  des  organismes 
et  l'hérédité.  Bruxelles,  1898;  extr.  in-8»  (23  p.). 

Cumont  {George).  Fouilles  faites  dans  l'ancienne  abbaye 
de  Stavelot  pendant  l'année  1896.  Bruxelles,  1898;  extr. 
in-8''  (18  p.). 

—  Détresse  financière  du  Gouvernement  autrichien  au 
moment  de  sa  retraite  devant  l'invasion  française  en  Bel- 
gique (1794-179o),  etc.  Bruxelles,  1898;  extr.  in-8°  (20  p.). 

—  Utilisation  du  phlanile  cambrien  des  environs  d'Otti- 
gnies  par  l'homme  préhistorique.  Bruxelles,  1898  ;  extr. 
in-8»  (7  p.). 

—  Quelques  renseignements  relatifs  à  la  collection 
numismatique  de  Charles  de  Lorraine,  etc.  Bruxelles,  1898  ; 
extr.  in-S"  (13  p.). 

Meunier  {Fernand}.  Observations,  sur  quelques  insectes 
fossiles  du  Musée  de  Munich.  Bruxelles,  1898;  extr.  in-8'' 
(2  p.). 


(  582  ) 

Meunier  {Fernand).  Description  de  quelques  Coléoptères 
de  Toligocène  d'Armissan  (Aude).  Bruxelles,  1898;  extr. 
in-8"»  (3  p.). 

Uecq  (Gaëtan).  Jaques  Bretex  ou  Bretiaus.  Le  tournoi  de 
Chauvency.  Mons,  1898;  gr.  in  8°  (ui-200  p.). 

Deriiyts  {François).  Sur  quelques  propriétés  des  courbes 
gauches.  Bruxelles,  1898;  extr.  in-8"  (11  p.). 

—  Sur  la  détermination  des  éléments  neutres  d'espèce 
quelconque.  Bruxelles,  1898;  extr.  in-8°  (7  p.). 

—  Note  sur  les  éléments  neutres  de  l'involution  et  leurs 
applications  aux  courbes  gauches.  Bruxelles,  1898;  extr. 

in-8"(12p.). 

Kuborn  {Hyacinthe).  De  l'exploitation  des  mines  en  Bel- 
gique au  point  de  vue  de  la  santé  et  de  la  sécurité  des 
ouvriers  qui  y  sont  employés.  Liège,  1898;  in-S»  (22  p.). 

Chômé  {Léon).  Une  expédition  belge  au  Nil.  Bruxelles, 
1898;  extr.  in- 8'  (41  p.,  portrait). 

Ministère  des  Affaires  étrangères.  Catalogue  de  la  biblio- 
thèque, tome  III  (1889-1898),  1^^  partie.  1898. 

Ministère  de  la  Guerre.  Carte  de  la  Belgique  à  l'échelle  du 
160,000  appropriée  ù  l'usage  des  cyclistes  et  élaborée  avec 
le  concours  de  la  Ligue  vélocipédique  belge;  avec  notice, 
1898  (6  feuilles  in-plano  et  broch.  in-8°  de  23  p.). 

LouvAiN.  La  Cellule,  t.  XIV,  2«  fasc,  t.  XV,  1«--  fasc. 

Gand.  Kon.  Vlaamsche  Académie.  Calalogus  van  de  Biblio- 
theek,  1898. 

—  De  Moederlaal,  eenig  doel-  en  redematig  voertuig  der 
gedachte  in  opvoeding  en  onderwijs  (H.  Temmerman). 
1898. 

—  Willems-Fonds.  De  Kapelaan  van  Bardelo  door  Emile 
Seipgens,  met  het  levensbericht  van  den  schrijver,  door 
prof.  Jan  ten  Brink.  Gand,  1898  ;  in-8^ 

Termonue.  Cercle  archéologique.  Annales,  t.  VII,  1"  et 
2«  livr.  1898.  —  Buitengewone  uitgaven,  n""  IX  :  Dender- 
mondsche  drukjiers;  door  Jan  Broeckaert,  2^  bijvoegsel, 
1898. 


(  385  ) 

Allemagne  et  Autriche-Hongrie. 

Gegenbaur  (Ch.).  Vergleichende  Anatomie  der  Wirbel- 
thiere  mit  Berùcksichtigung  der  Wirbellosen,  Band  I.  Leip- 
zig, 1898;  in-8". 

Ficker  {Martin).  Uebor  Lebensdauer  und  Absterben  von 
patliogenen  Keimen.  Leipzig,  1898  ;  in-8<'  (74  p.)- 

Munich.  A'.  Sternwarte.  Neue  Annalen,  Band  IIL  1898; 
in-4°. 

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vol.  XVI-XVIII,  1895-1898. 

Berlin.  Kôn.  preuss.  meleorolo(jisclies  Institut.  Bericht, 
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Vienne.  A',  nnd  A.  militdr-geographisches  Institut.  Arbei- 
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—  Verein  zur  Verbreitung  natiirnissenscliaftlicher  Kennt- 
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Amérique. 

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Hilgard  [E.-W.).  The  beet  sugar  industry  and  ils  develop- 
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Indianopolis.  Department  ofGeologij.  22*'' an  nu  al  report, 
1897. 

Washington.  Bureau  o/Ef/î/ca/ioM.  Report  of  the  Commis- 
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n-  10-14.  1895-1897. 

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1897. 

—  Académie  des  sciences.  OEuvres  de  Laplace,  t.  XIL 
1898;  in-4°. 

Reims.  Académie.  Publications,  vol.  XCVIII.  1894-95. 

Rouen.  Société  des  Amis  des  sciences  naturelles.  Bulletin, 
1896. 

Amiens.  Académie  des  sciences.  Mémoires,  t.  XLIV,  1897. 

Angers.  Société  d'agriculture,  sciences  et  arts.  Mémoires, 
t.  XI,  1897. 


(  38S  ) 

Besançon.  Académie  des  sciences.  Prorès-vorbaux  et 
Mémoires,  1897. 

—  Société  d'Émulation.  Mémoires,  1896. 

BoRDRAUX.  Société  linnéenne.  Actes,  vol.  LI  et  LÎI,  1897. 

Camdi'.ai.  Société  d'Émulation.  Mémoires,  tomes  XLVII- 
LI,  1892-97. 

Chambkuy.  Société  savoisienne  d'histoire  cl  d'tirchéologie. 
Mémoires  et  documents,  t.  XXXVI,  1897. 

Limoges.  Société  archéologique  et  historique.  Bulletin, 
tome  XLVI,  1898. 

Marseille.  Institut  colonial.  Annales,  4«  année,  1896. 


(iRANUE-BRETAGNE  ET  COLONn:S  BRITANNIQUES. 

Londres.  Brilish  Muséum.  A  guide  to  the  fossil  inverte- 
brates  and  plants  in  the  department  of  geology  and 
palaeontology.  1897. 

—  A  monograpli  of  the  Mycetozoa  being  a  descriptive 
catalogue  of  the  species  in  the  herbarium  of  the  Muséum 
(Arthur  Lister).  1894. 

—  Catalogue  oftheafrican  plants,  coUected  by  D''  Frie- 
drich Welwitsch  in  1853-61  :  Dicotyledons,  part  l  and  II. 
(Will.-Phil.  Hiern).  1896-98. 

—  Descriptive  catalogue  of  the  spiders  of  Burma  (Eug.- 
W.  Oates  and  T.  Thorell).  189o. 

—  Catalogue  of  the  madreporarian  corals,  vol.  l-III.  1893- 
1897  ;  in-4». 

—  Catalogue  of  the  fossil  Bryozoa  (J.-W.  Gregory).  1896. 
Sydney.  Royal  Society  of  New  South  Wales.  Journal  and 

proceedings,  vol.  XXXI,  1897. 

Glasgow.  Philosophical  Society.  ..Proceedings,  1897-98, 
vol.  XXIX. 

5"'"    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  26    • 


(  586  ) 

Brisbane.  lioyal  Society  of  Queensland.  Proceedings, 
vol.  XIII.  1898;in-8o. 

Maurice.  Hoyal  Observatory.  Results  of  the  magnetical 
and  ineteorolo2;ical  observation.s,  1896. 


Italie. 

Galilée.  Le   opère  di  Giilileo  Galilei,  volume  VII.  Flo- 
rence, 1897;  vol.  in-4". 

Acquabono  {Lorenzo).  Nozioni  di  calcolo  intégrale.  Turin, 
1898;  extr.  in-S»  (66  p.). 

Rome.    Società  délie  scienze.   Memorie    di    malematica, 
t.  XI.  1898;  in-i°. 

\cmE\LE.  Accademia  di  scienze,  lettere  edarti.  Atti  e  rendi- 
conti.  1896-1897. 

Bologne.  /î.  Accademia  délie  scienze.   Memorie,  t.  VI. 
1896-1897;  in-4''. 

Brescia.  Ateneo.  Commentari.  1897. 

Lucques.   B.  Accademia  di  scienze,  lettere  ed  arli.  Atti, 
t.  XXIX.  1898. 

Naples.  Società  Beale.  Atti,  scienze  moral i  e  politiche, 
vol.  XXIX.  1898. 

—  R.  Istituto  d'incorraggiamento.  Atti,  4«  série,  vol.  X. 
1897;  in-4". 

Palerme.  R.  Accademia  di  scienze,  lettere  ed  arti.  Atti, 
vol.  U-IV.  1893-1897.  In-4«. 

Turin.  R.   Accademia  délie  scienze.  Memorie,! t.  XLVII. 
1897;in-4'\ 


{  387  ) 

Pays-Bas. 

Utrecht.  Gasthuia  voor  Ooglyders.  Verslag  n""  39,  1898. 
In-8^ 

—  frenootschap  van  kumten,  enz.  Aanteekeningen  en 
Verslag  voor  1897. 

Leyde.  Musée  d'antiquités.  Manuscrits  coptes  ;  par 
W.  Pleyte  et  P. -A.  Boeser.  Leyde,  1897;  in  4°. 

—  Maatschnppij  der  nederlandsche  letteikunde.  Speien  van 
Cornelis  Everaert,  met  inleiding  en  aanteekeningen.  uitge- 
geven  door  J.  W.  Muller  en  Scharpé,  1*  aflevering.  Levde, 
1898;in-8". 


Pays  divers. 

Lima  (Archer  de,.  Professâo  de  Fé.  Lisbonne,  1898; 
in-18"  (62  p.). 

Ferron  {Eug.).  Projets  du  second  viaduc  à  construire  à 
Luxembourg.  Luxembourg,  1898;  in-8°  (20  p.,  pi.). 

—  Les  sources  thermales  et  la  température  du  globe 
terrestre.  Luxembourg,  1898;  in-8°  (42  p.,  pi.). 

Dôllen  [W.).  Ephémérides  des  étoiles  pour  la  détermi- 
nation de  l'heure  et  de  l'azimut,  au  moyen  d'un  instru- 
ment des  passages  portatif,  établi  dans  le  plan  vertical 
de  la  polaire  pour  1898.  Saint-Pétersbourg,  1897;  in-8° 
(xii-34  p.). 

Loseth  {Eiler).  Tristranromanens  gammelfranske  prosa- 
haandskrifter  i  Pariser-Nationalbibliotheket.  Christiania, 
1898;  in-8<' (80  p.). 

Saint-Pétersbourg.  Observatoire  physique centraU  Annales, 
1896.  2  vol.  in-4''. 

Christiania.  Videnskabs-Selskabet.  Forhandlinger,  1897. 
Skrifter,  1897. 


(  588  ) 

Chuistiania.  Meleorologisches  Institut.  Jahrbuch  fur  1896 
und  1897.  ln-4^ 

Upsal.  Nova  actaRegiae  Societates  scienliarum,  vol. XVII, 
fasc.  12,  898.  In-4^ 

GoTHEMBOUKG.  Â'.  Vetenskaps-Sauiluille.  Handlingar,  I. 
1898. 

Stockholm.  Musée  du  ISord.  Kinglekar  pà  Skansen.  Bil- 
der  fran  Skansen.  Skiidringar  af  svensk  natur-  och  svenskt 
Folklif  (A.  Hazelius),  Hâtlet  1-4. 

Stockholm.  K.  Svenska  Vetenskqys-Akndemien.  Ofversigt, 
1897.  Bihang,  1897-1898. 

Zurich.  Internationale  Erdmessung.  Das  Schweizerische 
Dreiecknetz,  Band  VllI.  1898;  in-4°. 

San  Fernando.  Instituto  y  Observatorio  de  marina. 
Annales  :  Observaciones  meteorologicas,  1896.  In-4''. 

Madrid.  Observatorio.  Treinta  y  cinco  aûos  de  observa- 
ciones meteorologicas,  desde  el  1"  de  enero  del  1860  al 
31  de  diciembre  del  1894.  Madrid,  1897;  in-4°. 


BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES 


DES 


Lettres  et  des  Beaux-Arts  de  Belgique. 

1898.  —  N"  4L 


CLAfliSK    DKS  S€iE;:«c:Eii. 


Séance  du  5  novembre  l<Sf)S. 

M.  Éd.  Dupont,  directeur. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  W.  Spring,  vice-directeur;  le 
baron  Edm.  de  Selys  Longchamps,  G.  Dewalque,  Brial- 
mont,  C.  Malaise,  F.  Folie,  Fr.  Crépin,  Alfr.  Gilkinel, 
G.  Van  der  Mensbrugghe,  L.  Henry,  M.  Mourlon,  P.Man- 
sion,  P.  De  Heen,  C.  Le  Paige,  F.  Terby,  J.  Deruyts, 
Léon  Fredericq,  J.-B.  Masius,  J.  Neuberg,  A.  Lancasler, 
membres;  L.  Errera,  A.  Jorissen,  Jul.  Fraipont  et  P.  Fran- 
cotte,  correspondants. 

MM.  J.  De  Tilly  et  Ch.  Van  Bambeke  s'excusent  de  ne 
pouvoir  assister  à  la  séance. 

Ô'"''    SÉRIE,    TOME    XXXVi.  27 


(  390  ) 
CORRESPONDANCE. 


M.  le  Minisire  de  l'Intérieur  et  de  l'Instruction  publique 
envoie,  pour  la  bibliothèque  de  l'Académie,  un  exem- 
plaire du  tome  XV,  3®  livraison,  des  At^chives  de  biologie. 
—  Remerciements, 

Le  même  Ministre  transmet  une  dépêche  de  son  col- 
lègue du  Ministère  de  l'Industrie  et  du  Travail  demandant 
l'avis  de  l'Académie  sur  le  projet  émis  par  le  dernier 
congrès  international  de  géologie,  à  Saint-Pétersbourg, 
de  la  création  d'un  observatoire  flottant.  —  Renvoi  à 
MM.  Dewalque,  Renard  et  Malaise. 

—  Hommages  d'ouvrages  : 

1"  Discours  prononcé  aux  lunerailles  de  M.  le  D'  E.  Can- 
dèze;  par  le  baron  de  Selys  Longchamps; 

ii"  Sommaire  du  Cours  d'éléments  de  botanique  pour  la 
candidature  en  sciences  naturelles;  par  L.  Errera; 

ô"  Annales  du  Musée  du  Congo.  Série  I  :  Rotanique. 
Illustrations  de  la  flore  du  Congo,  tome  P',  fasc.  1  ;  par 
Em.  De  Wildeman  et  Th.  Durand; 

4"  A.  Sur  les  organismes  des  a  cannels  »;  R.  ^'otice  sur  la 
constitution  des  lignites  el  les  organismes  qu'ils  renferment  ; 
parR.  Renault,  associé; 

5"  Où  et  comment  il  faut  bâtir  les  sanaloria  dans  les 
régions  accidentées  de  moyenne  altitude;  par  le  F)'"  G.  Joris- 
senne. 

—  Remerciements. 

—  Travaux  manuscrits  à  l'examen  : 

A,  Sur  quelques  dérivés  chlorobromés  en  C^;  R.  Contri- 


(  391  ) 

Imlion  à  l'étude  de  l'oxydation  des  étlujlènes  halogènes  ;  par 
M.  Kréd.  Svvarts,  répétiteur  de  chimie  générale  à  l'Uni- 
versité de  Gand.  —  Commissaires  :  MiNÎ.  Spring  et  Henry. 


RAPPORTS. 


Il  est  donné  lecture  des  rapports  : 

I"  De  MM.  Fraipont  et  Malaise  sur  une  note  intitulée  : 
.\ouoelle  exploration  scientifique  des  grottes  d'Engis,  d'Engi- 
houl  et  des  environs;  par  Ernest  Doudou.  —  Dépôt  aux 
archives,  MM.  les  commissaires  ayant  reconnu  que  ce 
Iravail  est  dénué  de  tout  caractère  scientifique; 

H"  De  MM.  Jorissen  et  Gilkinet  sur  une  lettre  de 
M.  Dauber  relative  aux  Recherches  du  />'  Buchner  sur  les 
fermentations.  —  Dépôt  aux  archives. 


Sur  les  vitesses  de  réaction;  par  A.  de  Hemptiniie  et 
A.  Bekaert. 

ttuitpai'l  rfe    n.  If.   Spt'ing,  iit'tftnivi'  cinttuti»anii'f. 

et  On  sait  que  la  vitesse  des  réactions  chimiques 
dépend,  à  un  haut  degré,  de  la  nature  du  dissolvant  qui 
sert  de  milieu  à  l'acte  chimique.  MM.  A.  de  Ilemptinne 
et  A.  Bekaert  se  sont  demandé  si  la  vitesse  de  réaction 
éprouve  aussi  un  changement  quand,  au  lieu  d'opérer 
dans  un  dissolvant  unique,  on  fait  usage  d'un  mélange,  à 
titre  connu,  de  plusieurs  dissolvants  différents. 

A  cette  fin,  ils  ont  étudié  l'action  de  la  triéthylamine 
sur  l'iodure  d'éthyle  et  sur  le  bromure  d'éthyle  dans  des 
mélanges  d'acétone  et  de  benzène  à  divers  titres  et  à 


(  5i)2  ) 

diverses  températures,  ou  bien  dans  des  mélanges  de 
benzène  ebloré,  de  benzène  et  d'alcool  benzylique,  de 
benzène  et  d'alcool  méthylique,  enfin,  dans  des  mélanges 
d'alcools  divers  et  de  benzène,  de  xylène  ou  d'acétone. 
Le  résultat  général  de  leurs  expériences  tend  à  prouvei- 
que  la  vitesse  de  la  réaction  dépend,  dans  les  conditions 
rappelées,  des  facteurs  propres  à  chacun  des  dissolvants, 
tels  qu'on  peut  les  déterminer  en  opérant  avec  chacun 
d'eux  isolément.  Une  élévation  de  la  température  semble 
augmenter,  dans  les  mêmes  proportions,  la  vitesse  de  la 
réaction  dans  les  divers  dissolvants. 

J'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  Classe  l'insertion  de  la 
note  des  auteurs  dans  le  liulletin  de  la  séance.  » 

—  Celte  proposition,  ajjpuyée  par  M.  De  Heen,  second 
commissaire,    est  adoptée  par  la  Classe. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Vérificalion  de  l'exislence  de  la  natation  eulérienne  dans 
les  latitudes  observées  à  (rreenioich  pendant  les  années 
i880-i89l  ;  par  F.  Folie,  membre  de  l'Académie. 

Dans  une  note  précédente,  j'ai  dit  que  la  théorie  du 
mouvement  de  rotation  de  l'écorce  terrestre  indique,  à 
côté  du  terme  chandlérien  et  du  terme  annuel,  omis  dans 
les  formules  de  réduction,  la  présence  également  du 
terme  eulérien  proprement  dit. 

Les   astronomes    ont    pensé   que   cette    nutation   de 


(  595  ) 
7)04  jours  s'était  transformée  (je  n'ai  jamais  su  pourquoi) 
on  celle  de  451  jours;  un  astronome  très  distingué  m'a 
même  écrit  qu'il  avait  déduit  des  observations  de  Green- 
wieh  une  valeur  nulle  pour  la  constante  de  la  nutation 
eulérienne. 

Avant  de  la  rechercher  dans  une  longue  série  de  lati- 
tudes individuelles,  obtenues  par  deux  passages  consécu- 
lils  de  la  polaire,  j'ai  voulu  m'assurer,  au  moyen  de  celles 
de  Greenwich  même,  si  l'on  n'y  constaterait  pas  la  période 
de  504  jours. 

D'après  moi,  il  doit  exister  trois  périodes  :  celles  de 
504,  de  505  et  de  451  jours. 

Donc  les  demi -sommes  des  résidus ,  pris  deux  à 
deux,  à  cinq,  à  six  et  à  sept  mois  d'intervalle,  doivent 
|)résenter,  entre  le  maxinnnn  et  le  minimum,  des  écarts 
intérieurs  à  celui  des  résidus  primitifs. 

Je  reproduis  dans  cette  note  le  tableau  de  ceux-ci,  que 
jai  déjà  discutés  antérieurement  (*)  ;  l'amplitude  des 
variations  est  de  \",V6. 

En  prenant  les  moyennes  des  résidus  :  1"  à  cinq  mois 
d'intervalle;  ^°  a  six  mois;  5"  à  sept  mois,  l'amplitude 
est  réduite  :  1°  à  0",77;  ^^  à  0",885;  5«  à  0",84o  (**). 

Les  trois  périodes  existent  donc  manifestement,  et  les 
Irois  nutations  ont  à  peu  près  la  même  importance; 
Teulérienne,  toutefois,  semble  réduire  les  écarts  plus 
notablement  que  les  deux  autres. 

Afin  de  m'assurer  davantage  de  l'importance  relative 
des  nutations  eulérienne   et  chandlériemie,  j'ai  combiné 


(*)  Catéchisme  correct  d'astronomie  sphériqne.  Rome,  18!)." 
C)  Voir  les  tableaux  ci-après. 


(  594.  ) 
toutes  les  latitudes  moyennes  {s  et  i)  de  Peters,  en  en  fai- 
sant les  sommes  deux  à  deux  à  six  mois  d'intervalle;  cette 
combinaison  ne  laisse  absolument  subsister  que  les  deux 
nutations  en  cause;  et  j'ai  trouvé,  pour  les  coefficients 
respectifs  de  ces  nutations  :  eulérienne,  0",iO;  chandlé- 
rienne,  0",09. 

Je  me  propose  de  déterminer  les  trois  termes  à  période 
diurne  (eulérien,  chandlérien  et  annuel)  au  moyen  de 
toutes  les  latitudes  [s  -h  i)  de  Peters,  qui  offrent  trop  [)eu 
de  combinaisons  à  six  mois  d'intervalle. 

C'est  en  recherchant  avec  soin  l'expression  numérique 
de  ces  trois  nutations  qu'on  résoudra  le  problème  de  la 
variation  des  latitudes. 

Mais,  je  le  répèle,  on  n'y  arrivera  sûrement  que  par 
des  combinaisons  de  passages  supérieurs  et  inférieurs. 

En  etfet,  à  côté  des  trois  termes  à  période  diurne  dont 
je  viens  de  parler,  il  existe,  comme  je  l'ai  montré  dans 
une  i)récédente  note,  un  terme  annuel  non  diurne.  Or 
celui-ci,  de  même  que  l'aberration,  est  éliminé  dans 
la  moyenne  de  deux  latitudes  {s  et  /),  tandis  que  les  trois 
termes  précédents  seuls  y  subsistent. 

Aucun  autre  procédé,  si  ce  n'est  celui  de  l'observation 
des  mêmes  étoiles,  le  même  jour,  à  180°  de  différence  de 
longitude,  ne  permet  d'effectuer  cette  élimination. 

El  si  on  ne  la  fait  pas,  le  problème  comporte  tant 
d'inconnues  qu'il  est  pratiquement  insoluble. 


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(  599  ) 


Sur  les  vitesses  de  réaction;  par  A.  de  Hemptinne  et 
A.  Bekaert. 

Menschutkin  et  d'autres  auteurs  ont  étudié  l'influence 
du  milieu  sur  la  vitesse  de  réaction;  ils  ont  trouvé  que 
l'influence  de  la  nature  du  dissolvant  est  très  considérable. 
Toutes  ces  recherches,  fort  intéressantes,  méritent  d'être 
poussées  plus  loin;  un  chapitre  entier  reste  à  étudier: 
c'est  l'influence  du  mélange  de  diff"érents  milieux  sur  la 
vitesse  de  la  réaction  ;  les  résultats  de  ces  recherches  sont 
présentés  dans  ce  travail.  Menschutkin  (*)  a  étudié  l'action 
de  la  triéthylamine  sur  l'iodure  d'éthyle  et  sur  le  bromure 
d'éthyle  dans  différents  milieux.  Nous  avons  choisi  les 
mêmes  réactions,  parce  qu'elles  se  prêtent  particulière- 
ment bien  à  l'étude  que  nous  nous  proposons  de  faire. 


Méthode.     ^ 

Dans  une  éprouvette  A,  on  met  0^,505  de  triéthyla- 
mine; on  introduit  dans  celle-ci  une  éprouvette  beau- 
coup plus  petite,  contenant  0*-', 543  de  bromure  d'éthyle; 
on  prépare  ainsi  trois  éprouvettes,  on  met  rapidement 
dans  chaque  tube  10  centimètres  cubes  du  dissolvant,  on 


(*)  Zeitschrift  fiir  Pliys.  Chem.,  t.  V,  p^SSO;  t.  VI,  p.  41. 


(  400  ) 
feime  à  la  lampe  el,  après  avoir  mélangé  les  liquides,  on 
met  les  éprouvetles  dans  un  bain  ou  dans  une  étuve  à 
température  constante. 

A  des  intervalles  de  temps  assez  long,  on  titre  au 
moyen  d'une  solution  de  nitrate  d'argent,  a|)rès  avoir,  au 
préalable,  détruit  la  triétliylamine  au  moyen  d'une  solu- 
tion diluée  d'acide  nitrique;  la  méthode  est  basée  sur  ce 
lait  que  les  iodures  et  bromures  de  la  série  aliphatique  ne 
se  laissent  pas  titrer  par  le  nitrate  d'argent,  ce  qui  n'est 
pas  le  cas  pour  les  iodures  et  bromures  de  bases  ammo- 
niacales. 

Menschutkin  a  opéré  à  100'^  ;  les  réactions  vont  très 
vite  à  cette  température  et  l'on  doit  faire  une  correction 
l)our  le  temps  nécessaire  à  réchauffement  des  substances; 
pour  éviter  ces  difficultés,  nous  avons  opéré  ;i  des  tempé- 
ratures plus  basses,  ce  qui  a  encore  l'avantage  de  donner 
des  chiftVes  qui,  comparés  à  ceux  de  Menschutkin,  dé- 
jnontrent  l'intluence  de  la  température.  Les  réactions 
étant  bimoléculaires,  la  constante  est  donnée  par  la  for- 
mule 

a 

ka  = 

{a  —  n)l 

Dans  la  première  colonne  des  tableaux  suivants,  le 
temps  se  trouve  indiqué  en  minutes;  dans  la  seconde, 
on  trouve  le  nombre  de  centimètres  cubes  de  nitrate 
d'argent  titrés,  et  dans  la  troisième,  la  constante  ha. 


(401   ) 
Benzol  pur  à  50". 


reiiijis. 

((X—  Ji)t 

1290 

5.7 

0.0000998 

44.5  X  1290 

!380 

(') 

O.O0UO988 

44  X  1580 

1695 

77 
42.5  X  lt)9o 

0,000100 

^2670 

10.75 

0.000102 

39.25  X  2670 

4580 

15  5 

0.000100 

54.7  X  4580 

0.000500G 

ka  = 

=  0.000100 

Acétone  à  50". 

X 

ka. 

leiiips. 

[a  —  x)t 

420 

14.8 
35.2  X  420 

0.00 1001 

530 

17.8 

0.001042 

32.2  X  t50 

1395 

29. 1 

0.000998 

20.y  X  1595 

0.003041 

ka 

=  0.001013 

(  402  ) 

Mélange  d'acétone  et  de  benzol  a  oO". 
80  •/„  (Vacélone  et  W  °/o  de  benzol. 


Temps. 

{a  —  x)t 

KO. 

585 

13.7 

0  000980 

36.3  X  38Î) 

483 

iS 

0  000851 

55  X  485 

460 

15.6 

0  000881) 

54.4  X  460 

0.002720 

Au  =.  0.000906 

50  °/o  d'acétone  et  SO  °/o  de  benzol. 


Temps.  , —  ^■''• 

540  1 0.000650 

37  X  540 

iO  55 

1036 0.000646 

30.45  X  «036 

25.4 

1440  0.000600 

26.6  X  1440  

0.001896 

ka  =  0.000632 


(  ^03  j 


80" lo  d'acétone  et  20  %  de  benzol. 


{a  —  x)t 


360 


0.6 


44.41  X  360 


0.000351 


0.001028 
ka  =  0.000342 

Benzol  à  66°. 

Temps.  — ^L.-  ka. 

{a  —  x)i 

4  9 

^^^  /.r  I  ^  z^,,  0.000233 

45.1  X  465 

122 
^**^  ^;rT tttt:  0.000224 


'  ^^^  -^  .    .^,^  0.000222 

d5  X  1 950 


0.000679 
ka  =  0.000226 


(  404  ) 


Temps. 


290 


575 


425 


Acétone  à  66°. 

d- 

ka 

tu  —  ,r)  C 

20.7 

0  00245 

29.3  X  ;290 

^23.8 

0.00255 

24.2  X  575 

26  1 

0.00244 

25.9  X  42y 

0.0072-2 

ka  =  0.00240 

80  "/o  d'acétone  et  20  "jo  de  benzol  à  66°. 


Temps. 

[a—  i)t 

ka. 

598 

25.2 

0  00'>I7 

26.8  X  395 

465 

25.3 

0  OOS'^O 

24.7  X  465 

1555 

37.8 

0  00''>''8 

12.2  X  1355 

0.00665 

ka 

=  0.00221 

(  405  ) 


50  "/o  (t acétone  et  50  «/..  de  benzol  à  66°. 


Temps,  ka. 

(a  —  x)t 


i  fi  T 

550  '- 0.00152 

53.3  X  350 


19.9 

420  0.00157 

501  X  420 


0.00509 
A'a  =  0.00154 

20  °/o  d' acétone  et  80  "/o  de  benzol  à  66". 

X 

Temps.  ka. 

(a  —  x)t 

11.2 

545  0.000856 


(a  —  x)t 

11.2 

38.8  X  345 

27.5 

2^.5  X  1475 

1475 0.000845 


O001G79 
ka  =  0.000859 

o"**    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  28 


(  406  ) 
Nous  avons  représenté  graphiquement  ces  résultats 
(fîg.  1)  en  portant  comme  abscisses  la  proportion  des  mé- 
langes, et  comme  ordonnées  les  constantes  correspon- 
dantes; ainsi  OA  représente  la  vitesse  dans  le  benzol, 
FB  dans  l'acétone,  DM  dans  \^  mélange  à  parties  égales 
d'acétone  et  de  benzol.  Le  point  D  se  trouve  au-dessus 
du  point  M  de  la  ligne  AB  ;  la  vitesse  dans  le  mélange 
acétone  et  benzol  est  donc  un  peu  plus  grande  que 
celle  que  l'on  obtiendrait  par  le  calcul  en  admettant  que 
chaque  liquide  agit  suivant  la  loi  du  mélange.  Pourtant 
cet  écart  n'est  pas  grand  et  ne  dépasse  pas  de  beaucoup 
la  moyenne  des  erreurs.  En  elïét,  pour  un  mélange  de 
parties  égales  d'acétone  et  de  benzol,  l'erreur  moyenne 
est  d'environ  5  "/o,  la  constante  obtenue  par  l'expérience 
est  0.000652,  celle  obtenue  par  le  calcul  est  ().000o56, 
soit  un  écart  de  14  "/o  environ. 


(  407  ) 


Mélange  de  benzol  et  d'acétove  a  66**. 

Chlorbenzul  à  66°. 


Tcuip.-.  ka 

[a  —  X)  l 


4o()  0.000841 

50. ;2  X  450 


l-w(i  -— 0.000846 

"lo.i  X  1570 


0.001087 
l.u  =  O.O0O843 

Benzol  et  chlvrbenzol  à  66". 

Temps.  : — —  ka. 

\u  —  J)l 

1â50      — 0.000450 


\U—  J)l 

189 

21.1  X  1350 

25 

27  X  1800 

28.0 

21.4  X  2790 

^^^^       ^ r^       0.000475 

27  X  1800 

2i90      -— -— -      0.000479 


0.001402 
/,«  =  0.000467 


(  408  ) 
80  °/„  de  benzol  et  20  °/o  de  chlorbevzol  à  66°. 


Temps. 

(a  —  x)t 

ka. 

480 

7 

0.000539 

43  X  480 

\  fifiO 

16.5 

0.000515 

25.5  X  1560 

1920 

18.2 

0.000298 

21.8  X  1920 

0.000952 

ka 

=--0.000317 

20  "je  de  benzol  et  80  "/„  de  chlorbenzol  à  66° 

Temps.  ka, 

{a  —  x]t 

12.9 

488  0.000712 

37.1  X  488 

25  5 
1485  '- 0.000700 


1815 0  000678 

22.4  X  1815 


(a  —  x]t 

12.9 

37.1  X  488 

25.5 

24.5  X  1485 

27.6 

0.002090 
ka  =  0.000696 


(  i()9  ) 

Pour  le  mélange  à  parties  égales  de  chlorbenzol  et  de 
benzol,  la  constante  calculée  est  0.000535,  la  constante 
trouvée  0.000467,  soit  un  écart  d'environ  14  "/o. 

La  figure  2  donne  aux  points  ABC  la  valeur  des  con- 
stantes trouvées.  On  voit  que,  dans  le  cas  actuel,  la  vitesse 
est  un  peu  plus  petite  dans  les  mélanges. 

Chlorbenzol  et  benzol  à  66". 


^■^ 

^:^ 

^_,.,*-'^  "^ 

^^"^  ^ 

"^  ^  '^ 

C 

^ 

■ — 

-^ 

^^^ 

^^^ 

-  "  " 

B 

1 

^^'<<^^^^ 

0  1  2  3  4  5  o 

Fifi.  1 


Alcool  benzyliqiie  à  66\ 


Temps. 


2-J8 


270 


355 


[a—  x)t 

32.7 

17.3x^i28 

54.6 
15.4  X  'i70 

12.7  X  353 


ka. 
0.008290 

0.008321 

0.008273 

0.0-24884 
ka  =  0.008294 


(  410  ) 

Benzol  et  alcool  benzylique  à 

66". 

Temps. 

.r 

Ln 

[a  —  x]  t 

520 

25  7 

0.005305 

520 

32.5 

0.005507 

17  5  X  520 

1400 

42  1 

0.003806 

17.1)  X  1400 

0.010618 

ka  = 

=  0.005559 

La  valeur  calculée  est  0.004201,  la  valeur  trouvée 
0.005539,  soit  un  écart  d'environ  17  %;  l'erreur  moyenne 
a  été  d'environ  9%;  la  représentation  graphique  donne- 
rait une  figure  analogue  à  la  figure  2. 

A  Icool  méthyliq u  e . 


lemps. 

(a  —  x)  t 

««. 

175 

15 

0.002i5 

55  X  175 

500 

21.8 

0  ()0'>'S(l 

28  2  X  300 

542 

23.3 

0  00"^  55 

2fi.7  X  342 

0.00750 

ka 

=  0.00250 

(  4H   ) 


.4  Icool 

méthylique  et  benzol 

Temps. 

JC 

ka. 

{a  -  x)C 

270 

18.5 

0  00->  1 7 

31.5  X  -270 

v'«W/-*  1   ■ 

298 

19  4 

0.00212 

50  G  X  298 

480 

26  7 

- 

0.00230 

25.5  X  480 

0.00659 

ka  = 

:  0.002 19 

La  valeur  calculée  est  0.00156;  l'écart  est  donc  de 
61  °/o  environ. 

Alcool  méthylique  et  acétone. 

Temps. 

185 
404 


\a  -  x]t 

17.5 

0.00295 

52.5  X  185 

28 
22  X  404 

0.00515 

0.00610 

ka 

=  0.00505 

La  valeur  calculée  est  0.00245,  âoit  un  écart  de  24  "/o 
environ. 


(  412  ) 


Alcool  éthylique. 


Temps.  —  fca. 

'  {a-x)l 

19  7 
340       '- 0.001910 

30.3  X  540 

24. C 
300       0.001957 

25.4  X  500 

n6  9 

1364       0.002065 

15.1  X  13t>4 


0.005912 

ka  = 

0.00197 

Alcool  éthylique  et  benzol 

Temps. 

X 

ka 

(a  —jc)t 

280 

162 

0  00171 

33.8  X  280 

352 

19.1 

0  0017*) 

30.9  X  552 

1375 

56  5 

0  001 9^ 

25.7  X  1575 

0.00558 

ka=: 

:  0.00 179 

La  valeur  calculée  est  0.001099,   donc   notablement 
inférieure  :  70  "/«  environ. 


(  413  ) 


Alcool  étiiylique  et  acétone. 

Temps. 

X 

ka 

{a  —  x)t 

«57') 

21.9 

0.00286 

28.1  X  272 

<36n 

40.4 

0.003008 

9.6  X  I3G5 

1755 

42  2 

0.005082 

7.8  X  1755 

0.008950 

ka 

=  0.002985 

La  valeur  calculée  est  0.01)218  ;  elle  est  aussi  notable- 
ment inférieure  :  36  °/o  environ. 

Alcool  propylique. 


Temps. 

[a  -  x)t 

ka. 

260 

U.9 

0.00163 

55.1  X  260 

552 

175 

0.00155 

32.5  X  352 

470 

22  5 

0.00172 

27.5  X  i70 

0.00488 

A:u  =  0.00162 

(  414  ) 
Alcool  propylifpie  et  benzol. 

Temps.  ka. 

'^  («  —  X)  i 

14.4 
272  0.00148 


(«  —  x)  l 

14.4 

35.6  X  -27-2 

51.8 

18.2X995 

35.5 

995  0.00175 

18.2X995 

1  \  30  ^^^ 0.00 1 79 

16  5  X  1150 

0.0050-2 

/fa  =  0.00167 

La  valeur  calculée  est  0.0!>()9l2,  soit  un  écart  de  8i  % 
environ. 

Alcool  propiilique  et  acétone. 


^  {a  —  x)i 

-26.5 


420 

23.5  X  4-20 

0.00268 

S40 

298 

0.00275 

20.2  X  540 

0.00541 

ka 

=  0.00270 

La  valeur  calculée  est  O.OOlâOl,  soit  un  écart  de  55  »/o 


(  415' 


Alcool  mélhylique  et  éthyliqu 

e. 

X 

ka: 

'^""J'-                           {a-x)t 

17.5 

0  00^23 

32.7  X  255 

405                       24.5 

0  00253 

25.7  X  405 

0.00458 

ka  = 

:  0.00229 

La  valeur  calculée  est  0.0203,  soit  un  écart  de  2  "/o 
environ. 


Alcool 

mélhylique  et 

propylique. 

Temps. 

X 

ka 

(a  —  x)i 

235 

16 

0 00200 

34  X  235 

435 

24 

0.00212 

2G  X  435 

0.00412 
ha  =  0.00206 

La  valeur  calculée  est  0.00200. 


(  416  ) 


Alcool 

éthylique  et  2  °/, 

>d' 

eau. 

Temps. 

X 

ka. 

{a—x)t 

273 

19 

0  00224 

28.1  X  273 

i55 

26 

0.00240 

24  X  453 

1383 

58 
12  X  1583 

0.00228 

O.O0G92 

ka 

=  0.00250 

Alcool  éthylique  -+-  2  "/»  d'eau  et  benzol. 


Temps.  —  ka. 

[a—x)t 

267  0.00186 

254  X  267 

22.8 

420  0.00199 

1 7.8  X  420 

0.00385 

yca  =  0.00192 

La  valeur  calculée  est  0.00126,  soit  un  écart  de  52  "/o 
environ. 


(417  ) 
Acétone  et  10  °/o  d'eau. 


Temps. 

{a  —  x]t 

*d. 

285 

nO.G 

0.00557 

19.4  X  285 

ilK5 

5S.4 

0.00547 

U6  X44f) 

0.01104 

Aa^ 

=  0.00552 

L'addition    de   l'eau  a  donc  pour  effet  d'augmenter 
beaucoup  la  vitesse  de  la  réaction. 

Acétone  et  alcool  benzylique. 


remp-. 

[a  —  x)t 

ka. 

98. H 

32.6 

0,00657 

17.4  X  ii«5 

360 

35.5 

0.00680 

1 4.5  X  360 

0.01337 

ka 

=  0.00668 

La   valeur   calculée    est    0.0Ô534,    d'environ    26  "/o 
moindre  que  la  valeur  trouvée. 


(   418  ) 


Temps. 


1405 


1940 


femps. 


uoo 


5213 


Xylol  à  66\ 

X 

ka. 

(a  —  X)  i 

6.0 

0  0001058 

45.4  X  l'«ti^ 

\J  *\'\J\J  1  \J*J\J 

8.5 

0  00010-'>5 

41.7  X  li>45 

V7\yU^  I  V7«-tJ 

O.OOO^iOGi 

/.•a  = 

=  0.0001050 

Xijlol  et  benzol. 

T 

lia. 

{a  —  xi  i 

8.7 

0  0001 50 

41  5  X  J400 

V-v^V/t/  ■  fl\J 

15.0 

0  0((0140 

54.0  X  ^-15 

\/»V/V/Vl  1    r\J 

0.000290 

ka  : 

=  0.000145 

La  valeur  calculée   est  0.000165,   la  valeur  trouvée 
0.000145,  soit  un  écart  d'environ  17  %. 


(  419  ) 


Xylol  et  acétone  à  66°. 

Temps. 

r 

ka 

'^it  —  a]  t 

508 

U  1 

0  001*274 

55.9  X  308 

545 

20 

0  001''23 

50  X  S45 

1400 

50.4 

0  00 1 1 50 

iOG  X  1400 

0.005(i47 

La  = 

=  0  001215 

La  valeur  calculée  est  0.(101i25I ,  soit  un  écart  de  3  "/o 
environ  de  la  valeur  trouvée;  ce  qui  est  moindre  que  les 
erreurs  d'expérience. 


Xi/lol  el  alcool. 

Temps. 

X 

ka. 

[Il  —  .r)t 

498 

-loi 

0  001418 

29.5  X498 

1555 

52.7 
17.5  X  1553 

0.001596 

1458 

55.2 

0  001570 

1G.8  X  1458 

0.004184 
;ca  =  0.001594 

La  valeur  calculée  est  0.001067,  soit  53  "/o  d'écart 
environ. 


(  420  ) 
Xylol  el  chlorbenzol. 


Temps. 

317 
1412 


(a-  x)t 

5.6 
44.4  X  317 

0.0003978 

1  G.4 

0  000'^4H9 

33.6  X  1412 

0.0007430 

ka 

=  0.0003715 

La  valeur  calculée  est  0.000478;  elle  est  notablement 
plus  grande  que  la  valeur  trouvée:  12  %  environ. 


lodure  d'éthyle  el  triéthylamine  dans  10  centimètres  cubes  de 
benzol  à  66°. 


Temps. 

(a  —  X)  t 

ka. 

■=^90 

185 

0  00188 

5I.5X5:iO 

545 

24.7 

0  00179 

25.3  X  545 

1505 

36.7 

0  00185 

15.3  X  1505 

0.00550 

/fa  =  0.00183 

(  «<  ) 


Mêmes  substances  dans  l'acétone. 


Temiis.  '• ku. 

(a  —x)t 

58.5 

IGO 0.020y 

H.5X  160 

41.6 

252  0.0215 

8.4  X  252 

0.0422 

/fa  =  0.0211 


Mêmes  substances  dans  le  mêla7ige  acétone  et  benzol. 

X 

Temps.  ka. 

{a  —  x)c 

54 
465  0.0124 


{a-x)i 

54 

16  X  «65 

4i 

405  0.0112 

9  X  405  ____ 

0.0236 

ku  =0.0118 

La  valeur  calculée  eslO.OMi;  elle  s'écarte  de  la  valeur 
trouvée  d'une  quantité  moindre  que  les  erreurs  d'expé- 
rience. 

En  général,  sauf  pour  les  milieux  à  base  d'alcool,  le 
bromure  de  tétracthylammonium  qui  se  forme,  se  dépose 

O'"""    SÉRIE,    TOMK    XXXVl.  20 


(  m  ) 

à  l'élat  de  cristaux  ;  dans  l'alcool,  ce  produit  est  dissous. 
Or  uous  avons  remarqué  que  dans  ces  milieux  la  con- 
stante ka  va  en  croissant  ;  cela  s'explique  si  l'on  admet 
que  la  substance  produite  exerce  une  action  accélératrice 
sur  la  vitesse  de  la  réaction.  Nous  nous  sommes  assurés 
de  la  réalité  de  ce  t'ait  et  nous  y  reviendrons  dans  un 
autre  travail.  Cette  action  accélératrice  n'est  pas  très 
notable;  c'est  pourquoi  on  obtient  une  valeur  satisfaisante 
pour  la  constante  ka,  si  l'on  a  soin  de  titrer  les  tubes 
après  un  temps  assez  court,  c'est-à-dire  avant  qu'une 
grande  quantité  de  (C2H5)4N  n'ait  été  produite. 

Atin  de  mieux  nous  rendre  compte  des  résultats  obte- 
nus, formons  le  tableau  suivant  : 


SUBSTANCES. 


Benzol 

Acétone  .... 
Ghlorbenzol .  .  . 
Alcool  benzylique. 
Alcool  mélhylique. 
Alcool  éthylique  . 
Alcool  propylique . 

Xylol 

Alcool  éthylique+^o/o  H 
Acétone  +  10»/o  U4O.    . 


Valeur 
du  coefficient  ka 

pour 
N  (CjHsU  15  à  66». 


Chiffres  calculés 

d'après  ceux 
de  Menschutkin 

pour 
le  coefficient  An 

de 
NlC^Hslilà-lOO». 


0.000^2-20 
0.002400 
0.0008i;-i 
0.008294 
0.002501) 
0.001970 
0.001020 
0.000103 
0.002300 
0.005S20 


0.01314 
O.i36oo 
0.03197 
0.2992O 
0.41610 
0.08233 

O.0064C 


Rapports. 


o7  6 

06.9 

62.1 

36 

46.3 

41.6 

62.5 


(  423  ; 

Si  l'on  jette  un  coup  d'œil  sur  le  rapport  des  vitesses 
de  N(C2H5)iB2  et  N(G.2H.-;)4l  dans  différents  milieux,  on 
voit  que  le  parallélisme  est  très  grand;  on  peut  même  le 
considérer  comme  absolu  pour  plusieurs  milieux  :  ainsi, 
par  exemple,  pour  le  benzol,  l'acétone,  le  chlorbenzol  et 
le  xylol  ;  il  est  à  remarquer  que  c'est  précisément  pour 
les  alcools  que  l'on  trouve  une  différence  un  peu 
notable. 


Influence  de  la  température. 

Un  accroissement  de  la  température  semble  augmenter 
dans  les  mêmes  proportions  la  vitesse  de  la  réaction, 
comme  le  montre  le  tableau  suivant  : 

Pour  (NCoH5)4Br. 

à  30".  lîappoits.  i\  %".  Rapports.        à  100". 

Benzol.  .  .  0.000 100   2.28   0.000228   8.48   0.00175 
Acétone  .  .  0.01013    2.57   0.002400   8.98   0.00215 

Pour  N{C^U^^Ul. 

à  66».  Rapports.  ;'.  lUO». 

Benzol.     .     .     .     0.00185         7.17         0.0151; 
Acétone     .     .     .     0.02110         0.48         0.15655 


(  424  ) 


Valeur  de  ka  pour  les  mélanges. 


COMPOSITION 

(les 

M  ÉI- ANGES. 


trouvée. 


calculée. 


Benzol  et  acétone  .... 
Benzol  et  chlorbenzol.  .  . 
Benzol  et  alcool  benzylique. 
Benzol  et  alcool  méihylique 
Benzol  et  alcool  éthylique  . 
Benzol  et  alcool  proiiylique. 
Alcool  méthylique  et  acétone 
Alcool  étliylique  et  acétone. 
Alcool  propylique  et  acétone 
Alcool  benzyliaue  el  acétone 
Xylol  et  alcool  éthylique.    . 

Xylol  et  acétone 

Xylol  et  chlorbenzol  .    .    . 

Xylol  et  benzol 

Alcool  méthylique  et  éthylique 
Acool  méthylique  et  propylique 
Alcool  éthylique  -h  "l  "/o  lUO  ■+-  ben 
Alcool  éthylique  +  S'/o  HaO  .     . 


0.00'184 
0.000467 

o.oo;^53 

0.00249 

0.00479 

0.00167 

0.00305 

0.00298 

0.00270 

0.00668 

0.00439 

0.00124 

0.00372 

0.000143 

0.00229 

0.00206 

0.00492 


0.C0131 

0.0J0S3O 

0.00462 

0.00136 

0.00109 

0.00092 

0.00243 

0.00248 

0.00201 

0.00334 

0.00106 

0.00123 

0.00424 

0  000165 

0.00223 

0.00206 

0  00126 


—  42 

—  17 
-+-  61 
-t-  70 
-h  81 
-+-  24 
-+-  36 
-4-  35 
-+-  26 
+  33 

—  3 

—  44 

—  42 


Il  semble  qu'il  y  a  certaines  lois  qui  régissent  l'action 


(  423  ) 
des  mélanges.  On  peut  les  formuler  de  la  manière  sui- 
vante : 

I.  Pour  beaucoup  de  mélanges,  l'écart  entre  la  valeur 
trouvée  et  la  valeur  calculée  ne  dépasse  pas  de  beaucoup 
Cordrede  grandeur  des  erreurs  d'expérience;  les  valeurs  sont 
tantôt  supérieures,  tantôt  inférieures  aux  chiffres  obtenus 
par  le  calcul. 

II.  Lorsque  des  corps  d'une  même  famille  sont  mélangés 
avec  un  même  corps,  l'ordre  de  grandeur  de  ("écart  entre 
la  valeur  calculée  et  la  valeur  trouvée  est  le  même  et  varie 
régulièrement  avec  le  poids  moléculaire. 

Ainsi  nous  voyons,  pour  les  mélanges  du  benzol  avec 
les  différents  alcools,  des  écarts  de  61,  70  et  81  "/o. 

m.  Pour  les  mélanges  de  deux  corps  de  la  même 
famille,  l'écart  entre  les  valeurs  trouvées  et  calculées  est 
moindre  que  les  erreurs  d'expérience. 

Tel  est  le  cas  pour  les  mélanges  de  l'alcool  mélhylique 
avec  l'alcool  éthylique  et  propylique. 

IV.  Pour  deux  corps  de  familles  différentes,  l'écart  entre 
la  valeur  trouvée  et  calculée  peut  être  moindre  que  les 
erreurs  d'expérience. 

Exemple  :  le  mélange  d'acétone  et  de  xylol,  où  l'écart 
n'est  que  de  3  %. 

On  remarquera  aussi  dans  le  tableau  précédent  que 
pour  tous  les  mélanges  où  il  y  a  un  assez  grand  écart 
entre  la  valeur  calculée  et  la  valeur  trouvée,  l'un  des  com- 
posants contient  le  groupe  hydroxyle. 


(  426  ) 

Mélange  de  trois  substances. 

A  Icuol  éthylique,  xylol  et  acétone  à  66" 


Temps. T.  *"• 

'  {a  —  x)t 

26.3 

520  0.002154 

25.7  X  520 

37  4 

U12  0.002102 

12.6  X  1412  

0.004256 

A-a  =  0.0021 18 


La  valeur  calculée  théoriquement  est  0.0015(5-5,  soit  un 
écart  de  55  "/o. 

La  valeur  calculée  d'après  les  chiffres  ohtenus  pour  les 
mélanges  binaires  est  0.00161,  soit  un  écart  de  5i  "/o- 

On  peut  considérer  le  mélange  des  trois  substances 
comme  composé  de  : 

\  2 

-  alcool,  -  xylol    et  acclonc. 
3  5 

1  2 

-  xvlol.  -  alcool  el  acelone. 
5    '  5 

i  2 

-  acétone.  -  alcool  el  xylol. 
5  5 

La  valeur  calculée  théoriquement  est  celle  que  l'on 
obtient  en  prenant  pour  les  mélanges  binaires  xylol  el 
acétone,  etc.,  les  nombres  calculés. 


(  427  ) 
On  peut  aussi  prendre  pour  la  constante  de  ces 
mélanges  binaires  les  chiffres  obtenus  précédemment  par 
les  expériences  et  prendre  alors  pour  la  constante  cal- 
culée la  moyenne  des  chiffres  obtenus  en  introduisant 
ces  valeurs  d'ans  les  trois  combinaisons  : 

-  alcool      -♦-  -  xylol   et  acétone. 
3  5 

^  2  ,  , 

-  xvlol       H alcool  et  acétone. 

3    '  3 

I  i2 

-  acétone  -♦-  -  alcool  et  xylol. 
3  3  ^ 

C'est  ainsi  que  l'on  a  obtenu  0.00161. 

Alcool,  acétone  et  benzol. 


Temps.  Art. 

'^  {«  —  X)  t 

2G2  0.00242 

30.6  X  202 

20.6 

289 0.00242 

29.4  X  289 

39  \ 

1880  '- 0.00265 

tO.9  X  1880 

0.00749 
ka  =  0.00249 

La  valeur  calculée  théoriquement  est  0.00155;  l'écart, 
de  62  °/o. 


(  4-28  ) 
La  valeur  calculée  d'après  les  mélanges  binaires  est 
0.00180;  l'écart,  de  58  °/o. 

Xylol,  benzol,  acétone. 

X 

'  (a  —  X)  t 

11.5 
290  r^^ r^rr  0.001006 

0.001025 


32.5  X  K25 


0.002051 
^'a  =  0.001015 


La  valeur  calculée  théoriquement  est  0.000900; 
l'écart,  de  12  "/o. 

La  valeur  calculée  d'après  les  mélanges  est  0.000950  ; 
l'écart,  de  8  "jo. 


Xylol,  chlorbenzol  et  ben. 

zol. 

X 

ka 

[a  —  x)t 

415 

6.(> 

0.000506 

43  4  X  415 

1335 

14.9 

0.000518 

35.1  X  1535 

1425 

15 
35  X  1 425 

0.000297 

0.000981 

ka  '. 

=  0.000527 

(  429  ) 

La  valeur  calculée  théoriquement  est  0.000385;  l'écart, 
(le  84  »/o. 

La  valeur  calculée  d'après  les  mélanges  est  O.OOOôtJ  ; 
l'écart,  de  9  °/o. 

Le  tableau  suivant  nous  permet  de  nous  rendre  compte 
de  l'allure  générale  des  phénomènes.  Les  chiflVes  qui  se 
trouvent  dans  la  colonne  intitulée  composition  des  mé- 
langes, indiquent  avec  leurs  signes  l'écart  entre  la  valeur 
trouvée  et  la  valeur  calculée  pour  les  dilïérents  mélanges 
binaires. 


COMPOSITION 
des 

MÉLANGES. 

5 
p 

Valeur  calculée 

d'après 
les  mélanges. 

if    S 
U    3 

■-  .H" 

O)  o 

^5 

ça 
•M 

+  33 

2H 
249 
101 
309 

161 

180 

93 

336 

+  31 

+  38 
+    8 
—  9 

156 

153 

90 

385 

+  35 
+  62 
+  12 

-24 

Alcool    -+-  36  acétone   —  3  xylol. 
+  70 

Alcool  +  36  acétone  +  17  benzol. 

Xylol  —  3  acétone  +  17  benzol. 
-42 

Xylol  —Il  chlorbenzol— 12  benzol. 

On  remarquera  que  la  valeur  calculée  théoriquement 
s'écarte  toujours  plus  de  la  valeur  trouvée  que  la  valeur 
calculée  d'après  les  chiffres  obtenus  pour  les  mélanges 


(  430  ) 

binaires;  ceci  montre  qu'on  peut  considérer  les  mélanges 
ternaires  comme  nous  l'avons  fait,  c'est-à-dire  composés 
de  mélanges  tels  que 

I  2 

-alcool  -I — (acétone  -4-  xylol)  etc. 

5  5 

On  peut,  au  moyen  des  chiftres  obtenus  pour  l'écart 
pour  cent  des  mélanges  binaires,  calculer  approximati- 
vement celui  des  mélanges  ternaires  : 

Écart  Écart 

calculé  trouvé. 

2 

-  (55  -H  55  —    3)  -♦-43  -+-35 
5 

^(35  -4-  70  -t-  17)  -+-81  -^  62 

3 

2 

-  (  3  —  12  4-  17)  -H    \  -H  12 
3  ^ 

_  (_  Il  _i2_i2)      —26  —24 

5 

Il  y  a  une  assez  grande  ditlérence  entre  les  écarts  cal- 
culés et  trouvés,  mais  le  signe  est  toujours  le  même,  ce 
qui  démontre  que  chaque  couple  d'éléments  exerce  son 
influence. 


COMITÉ    SECRET. 


La  Classe  s'occupe  de  la  présentation  de  candidatures 
nouvelles  pour  les  places  vacantes. 


(  431  ) 


CliAllilSi:   DES  LETTREHi. 


Séance  du  7  novembre  1898. 

M.  F.  Vainder  Haeghen,  directeur. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marghal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  y\M.  A.  Gkon,  vice-directeur  ;  G.  Rolin- 
Jaequemyns,  S.  Bormans,  Ch.  Piot,  Ch.  Potvin,  J.  Ste- 
cher,  T.-J.  Lamy,  Ch.  Loomans,  G.  Tiberghien,  L.  Van- 
derkindere,  le  comte  Gohlet  d'Alviella,  P.  Fredericq, 
G.  Kurth,  Ch.  Mesdach  de  ter  Kiele,  H.  Denis,  le  che- 
valier Ed.  Descamps,  G.Monchamp,  P.Thomas,  Ern. Dis- 
cailles, membres;  J.-C.  Vollgraff,  associé;  V.  Brants, 
Ch.  De  Smedt,  Jules  l.eclercq,  M.  Wilmotle,  Ern.  Gos- 
sart  et  Polydore  De  Paepe,  correspondants. 

M.  le  Directeur  adresse  les  félicitations  de  la  Classe  à 
M.  Rolin-Jaequemyns  au  sujet  de  sa  présence  dans  l'as- 
semblée. 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  et  de  l'Instruction  pu- 
blique fait  savoir  que  le  XII"  Congrès  international  des 
orientalistes  se  tiendra  à  Rome  en  1899. 


(  452  ) 

—  M.  Gossart  présente  (avec  une  note  qui  ligure 
ci-après),  au  nom  de  la  famille  Banning,  quinze  volumes 
et  brochures  publiés  par  M.  Emile  Banning,  sous  le  voile 
de  l'anonyme,  et  destinés  à  la  bibliothèque  de  l'Acadé- 
III  ie.  —  Remerciements. 

—  Hommages  d'ouvrages  : 

1"  Remarques  critiques  sur  les  œuvres  philosophiques 
d'Apulée;  par  P.  Thomas; 

2°  Les  élections  du  Reichstay;  pai-  Antonin  Lefèvre- 
Pontalis,  associé  ; 

5"  Du  serment.  Discours  de  rentrée  à  ht  Cour  d'appel  de 
Liège;  par  A.  Faider  ; 

4"  Le  Conseil  de  Brabanl.  Histoire.  Organisation.  Pro- 
cédure, tome  T';  par  Arthur  Gaillard  (présenté  par 
M.  Marchai,  avec  une  note  qui  figure  ci-a|)rès)  ; 

5°  Compte  rendu  sommaire  des  travaux  archéologiques 
exécutés  du  3  novembre  1897  au  I"'  juin  1898,  en  Perse; 
par  J.  de  Morgan; 

()°  Bibliotheca  hagiographica  latina,  tasc.  l;  par  la  So- 
ciété des  Bollandistes  (présenté  par  M.  Ch.  De  Smedl, 
avec  une  note  qui  figure  ci-après). 

—  Remerciements. 


NOTES    BIBLIOGRAPHIQUES. 


M.  Emile  Banning  avait,  peu  avant  sa  mort,  préparé, 
pour  être  offerts  à  la  bibliothèque  de  l'Académie,  des 
exemplaires  de  quinze  volumes  et  brochures,  qui  consti- 
tuent en  partie  son  œuvre  imprimée  et  que  j'ai  l'honneur 
de  déposer  en  son  nom  sur  le  bureau. 


(  455  ) 

De  ces  quinze  publications,  une  est  signée  :  Charles 
Donald,  pseudonyme  sous  lequel  Théodore  Weustenraad. 
l'oncle  de  notre  regretté  confrère,  correspondant  de  la 
Classe  des  lettres,  a  fait  paraître,  en  1831,  ses  Chants  de 
réveil. 

Emile  Banning  est  auteur  de  beaucoup  d'écrits  ano- 
nymes. Parmi  les  ouvrages  qui  ne  portent  pas  son  nom, 
je  signalerai  notamment  :  La  Belgique  et  le  Vatican, 
exposé  historique  de  leurs  rapports  (Bruxelles,  1880).  C'est 
un  extrait  des  trois  volumes  publiés  sous  le  même  titre 
en  1880-1881.  On  a  quelquefois  attribué  La  Belgique  et 
le  Vatican  à  M.  Frère-Orban.  M.  Frère  lui-même,  parlant 
(le  cet  ouvrage,  a  dit,  dans  la  séance  de  la  Chambre  des 
Représentants  du  8  août  1884  :  «  mon  exposé  »  ;  il  faut 
entendre  le  mot  en  ce  sens  que  le  Ministre  entendait 
réclamer  la  responsabilité  d'un  ouvrage  dont  l'impression 
avait  été  ordonnée  par  lui. 

La  situation  qu'il  occupait  dans  l'administration  supé- 
rieure et  surtout  des  motifs  de  convenance  personnelle, 
paraissaient  à  M.  Banning  lui  faire  un  devoir  de  ne  pas 
revendiquer,  de  son  vivant,  cette  publication  comme 
sienne.  Nous  pouvons  dire  aujourd'hui  qu'elle  est  de  lui 
et  qu'elle  est  digne  de  ce  que  nous  connaissons  de  son 
grand  talent  d'historien  et  de  publiciste. 

Il  en  est  de  même  des  suivantes,  qui  ne  figurent  pas 
davantage  dans  le  recueil  des  Notices  biographiques  et 
bibliographiques  des  membres  de  l'Académie  : 

Vépiscopat  et  l'instruction  publique  en  Belgique  de  I8ô0 
à  1879  (Bruxelles,  1879); 

La  morale  dans  l'enseignement  primaire  (Bruxelles,  1879); 

La  Conférence  de  Bruxelles  et  les  Pays-Bas  (Bruxelles, 
1890). 


(   454  ) 

Notre  éminent  confrère  de  la  Classe  des  sciences, 
M.  le  général  Briahnont,  appréciera  ces  écrits  dans  la 
notice  qu'il  prépare  sur  Emile  Banning  :  je  dois  donc 
me  borner  à  n'en  citer  ici  que  les  litres. 

Ern.  Gossart. 


Le  Conseil  de  Brabant  {Hisloire,  —  Organisation,  — 
Procédure),  tel  est  le  titre  d'un  important  ouvrage  que 
publie  M.  Arthur  Gaillard,  et  dont  il  ofïïe  à  l'Académie 
le  tome  P',  consacré  à  YHisloire. 

Le  Conseil  souverain  de  Brabant,  qui  eut  l'administra- 
tion supérieure  de  la  justice  dans  les  provinces  de  Brabant 
et  de  Limbourg  jusqu'à  sa  suppression  par  la  loi  du 
G  frimaire  an  IV  (27  novembre  1795),  avait  déjà  fait 
l'objet  d'une  communication  de  Gachard,  parue  dans  les 
Mémoires  de  l'Académie  {\).  L'entreprise  de  M.  Gaillard 
vient  continuer  la  série  des  ouvrages  concernant  l'admi- 
nistration civile  et  judiciaire  des  anciens  Pays-Bas,  au 
nombre  desquels  nous  citerons  ceux  de  A.  Pinchart  (2), 
A.  Vandenpeereboom  (5),  P.  Alexandre  (4),  P.  Alexandre 


(i;  Sur  la  composition  et  les   attributions  des  anciens   États  de 
Brabant  (Mém.  in-4o  de  l'Acad.  uoy.  de  Belgique,  t.  XVI). 

(2)  Histoire  du  Conseil  souverain  du  Hainaul  (Mém.  in-8°  de  i,'Acad. 
ROY.  DE  Belgique,  t.  VII), 

(3)  Le  Conseil  de  Flandre  à  Ypres. 

(4)  Histoire  du  Conseil  privé  aux  Pays-Bas  (Mém.  in-8»  de  l'Acad., 

t.  LU). 


(  435  ) 
cl  Tierenteyn  (1),  et  surtout  les  remarquables  travaux 
d'Edmond  Poullet  (2). 

Tout  ce  que  je  puis  citer,  à  cette  place,  du  livre  de 
M.  Gaillard,  c'est  que,  contrairement  à  l'opinion  du  Con- 
seil de  Brabant  lui-même,  lequel  appuyait  son  origine  sur 
la  charte  de  Cortenberg  de  1512,  l'auteur  en  fait  remonter 
l'institution  aux  ducs  de  Brabant  de  la  Maison  de 
Bourgogne;  or  l'avènement  du  premier  de  ces  princes, 
Antoine,  fils  de  Philippe  le  Hardi  et  de  Marguerite  de 
Flandre,  n'eut  lieu  qu'en  4404. 

Les  historiens  et  les  juristes  liront  avec  intérêt  cette 
première  partie  de  l'œuvre  entreprise  par  M.  Arthur 
Gaillard  et  que,  nous  l'espérons,  il  saura  mener  à  bonne 
fin,  grâce  à  la  situation  qu'il  occupe  aux  Archives  du 
Royaume  et  à  ses  connaissances  en  matière  de  droit  et 
d'administration. 

La  seule  observation  que  je  me  permette  de  faire,  c'est 
que  l'auteur  ne  parle  guère  des  anciens  auteurs  qui  se 
sont  occupés  du  Conseil  souverain  de  Brabant,  entre 
autres  P.  Stockmans,  J.-Ch.  Verloo,  Ph.  Wielant  et 
surtout  le  comte  Godwin  Wynants,  qui  a  rendu  par 
ses  conseils  et  son  érudition  de  si  grands  services  à 
Charles  VI  et  dont  l'ouvrage,  imprimé  à  Bruxelles  en 
1744,  porte  le  titre  :  De  supremae  Ciiriae  Brabantiae  deci- 
siones  recentiores. 

Chev.  Edm.  Marchal. 


(1)  Swr  les  officiers  fiscaux  des  anciens  Paijs-Bas  (Mém.  in-8"  de 
l'Acad.,  t.  XLV). 

(2)  Histoire  du  droit  pénal  dans  l'ancien  duché  de  Brabant  jusqu'à 
et  depuis  Charles-Quint  (Mém.  cour,  et  des  sav.  étrang.,  in-4o,  de 
i/AcAD.  ROY.  DE  BELGIQUE,  t.  XXXIII  et  XXXV).  —  Histoirc  du  droit 
criminel  dans  l'a7icienne  principauté  de  Liège  (Ibidem,  t.  XXXVIII). 


(  456  ) 

J'ai  l'honneur  d'offrir  à  la  Classe,  au  nom  de  la  Société 
des  BoUandistes,  la  première  livraison  de  la  Bibliotheca 
hagiographica  latina  antiquae  et  mediae  aetatis. 

Cette  publication  contiendra  le  relevé,  par  ordre  alpha- 
bétique, des  noms  des  saints,  de  tous  les  écrits  relatifs  à 
leur  vie,  à  leurs  miracles,  aux  translations  de  leurs  corps, 
etc.,  rédigés  en  latin  avant  le  XVI«  siècle,  avec  l'indica- 
tion de  tous  les  ouvrages  et  recueils  oîi  on  les  trouve 
imprimés.  En  règle  générale,  nous  n'avons  pas  mention- 
né les  documents  encore  inédits. 

Pour  chacune  des  pièces,  nous  avons  marqué  Vincipit, 
—  et  aussi  ceux  des  prologues  et  des  lettres  dédicatoires, 
lorsqu'il  y  a  lieu,  —  le  desinit  et  toutes  les  indications 
qui  peuvent  la  faire  reconnaître  facilement,  ainsi  (|ue  les 
particularités  notables  des  diverses  éditions. 

L'ouvrage  entier  comptera  plus  de  douze  cents  pages. 
Il  rendra  certainement  de  grands  services  aux  érudits  qui 
sont  amenés  à  étudier  des  questions  relatives  à  l'hagiogra- 
phie où  à  l'histoire  de  la  littérature  ecclésiastique,  et  leur 
épargnera  bien  de  pénibles  recherches.  Un  autre  grand 
avantage  de  ce  nouvel  instrument  de  travail,  c'est  que, 
grâce  à  lui,  il  sera  extrêmement  aisé  désormais  de  con- 
stater si  un  document  hagiographique  latin,  rencontré 
dans  un  manuscrit,  est  déjà  publié. 

FI  a  fallu  un  travail  collectif  et  assidu  de  plusieurs 
années  pour  rassembler  les  éléments  de  ce  recueil.  Pour 
plus  de  sûreté,  nous  avons  voulu  voir  de  nos  yeux, 
autant  que  possible,  les  livres  que  nous  y  avons  cités  ; 
plusieurs  voyages,  en  France,  en  Allemagne,  en  Angle- 
terre et  en  Italie,  ont  été  entrepris  dans  cette  vue,  et 


(  /P37  ) 
certes  nous  ne  regrettons  pas  notre  temps  et  notre  peine. 
Nous  osons  croire  aussi  que  les  savants  ne  nous  repro- 
cheront pas  d'avoir,  pour  le  mener  à  bonne  fin,  retardé 
un  peu  l'impression  du  troisième  volume  âesAcla  sancto- 
rum  de  novembre.  Il  abrégera  du  reste  considérablement 
le  travail  de  la  préparation  des  volumes  suivants. 

Ch.  De  Smedt. 


RÉSULTATS  DU  CONCOURS  ANNUEL  POUR  i899. 


Quatre  manuscrits  ont  été  reçus. 
Le  premier  porte  pour  devise  :  Droit  oblige  (Francis 
Lieber)  et  répond  à  la  troisième  question  : 

Déterminer,  d'après  la  doctrine  et  les  traités,  le  régime  en 
temps  de  paix  et  en  temps  de  guerre,  de  l'État  neutre  à  titre 
permanent.  Les  conséquences  de  la  violation  du  territoire 
neutre  seront  l'objet  d'une  attention  particulière.  Les  con- 
currents appuieront  leurs  déductions  d'exemples  empruntés 
à  l'histoire  des  États  neutres  et  étudieront  également  les 
antécédents  de  la  neutralité  belge. 

Commissaires  :  MM.  Descamps,  Prins  et  De  Paepe. 

3'"*    SÉRIE,    TOME    XXX VI.  30 


(  «8) 
Le  deuxième  a  pour  devise  :  Mr.ôev  ayav  et  répond  à 
la  sixième  question  : 

Faire,  d'après  les  sources,  l'histoire  et  la  description  du 
sanctuaire  d'Escidape,  à  Epidaure,  en  insistant  spéciale- 
ment sur  le  théâtre  de  PoUjcléte. 

Commissaires  :  MM.  Alph.  Willems,  Goblet  d'Alviella 
et  Vanderkindere. 

Les  troisième  et  quatrième  travaux  portent  comme 
devises  :  Quid  dcceat,  quid  non  (Horace,  Art  poétique)  et 
Lucent  in  lenebris;  ils  répondent  à  la  huitième  question  : 

Exposer  les  théories  de  la  colonisation  au  XIX^  siècle  et 
étudier  le  rôle  de  l'État  dans  le  développement  des  colonies. 

Commissaires  :  MM.  Denis,  Descamps  et  Brants. 


Prix  Teirlincr. 

Aucun  mémoire  n'est  parvenu  en  réponse  à  la  question 
posée  pour  la  quatrième  période  du  concours  :  Histoire 
de  la  prose  néerlandaise  avant  l'influence  bourguignonne. 


Une  note  intitulée  :  Nomina  geographica  belgica, 
par  M.  P.  Tack,  professeur  à  l'Athénée  royal  de  Huy, 
est  renvoyée  à  l'examen  de  MM.  Kurlh,  Fredericq  et 
Vuylsteke. 


(  439  ) 


COMMUNICATION  ET  LECTURE. 


Un  curieux  problème  de  transmission  symbolique.  —  Les 
roues  lilurfjiqitcs  de  l'ancienne  Egypte  ;  par  le  comte 
Goblet  d'Alviella,  membre  de  l'Académie. 

On  donne  en  Belgique  et  en  France  le  nom  de  «  roues 
de  fortune  »  à  des  roues  qu'on  fait  tourner  pour  consulter 
le  sort;  pour  obtenir  un  résultat  magique;  pour  honorer 
un  personnage  surhumain;  pour  démontrer,  par  une 
image  facile  h  saisir,  l'instabilité  des  choses  humaines; 
pour  in)primer  plus  de  solennité  à  certaines  fêtes  mi-pro- 
fanes, mi-religieuses.  Nous  connaissons  tous  les  roues  de 
fortune  qui  jouent  un  rôle  dans  nos  cavalcades,  nos  pro- 
cessions, nos  plantations  d'arbres  de  mai,  nos  cortèges 
de  géants,  etc.  Plusieurs  églises  de  la  Basse-Bretagne 
renferment  encore  des  roues  accrochées  à  la  voûte  on 
suspendues  aux  piliers;  les  fidèles  les  font  tourner  à  la 
main  ou  au  moyen  d'une  corde,  en  payant  chaque  fois 
deux  sous  pour  un  saint  dont  l'image  est  placée  à  côté  et 
qui  porte  le  nom  de  saint  à  la  roue  :  Santic  ar  rod  ou  Sant- 
he-rod.  Parfois,  c'est  un  véritable  oracle  que  les  jeunes 
Bretonnes  consultent  pour  savoir  si  elles  se  marieront 
dans  l'année,  les  gens  mariés  pour  s'assurer  s'ils  seront 
heureux  ou  malheureux  dans  certaines  entreprises. 
Ailleurs,  on  espère  ainsi  obtenir  du  saint  la  délivrance 


(  4iO  ) 

d'une  maladie,  la  fécondilé  du  bétail,  etc.  Il  s'agit  évi- 
demment là,  comme  le  lait  observer  M.  Gaidoz,  de  pra- 
tiques, étrangères  et  antérieures  au  christianisme,  dont  la 
signification  originaire  s'est  perdue  (1).  Des  roues  de  for- 
tune se  montrent,  du  reste,  parmi  les  représentations 
figurées  des  verrières  et  des  bas-reliefs, "dans  certaines 
églises  gothiques. 


Fie.  •!.  Roue  liturgique  du  Japon  (2). 

Le  même  usage  se  rencontre  au  Japon.  On  y  trouve, 
à  l'entrée  des  sanctuaires  bouddhiques,  encastrées  dans 


(1)  H.  Gaidoz,  Le  dieu  gaulois  du  soleil  et  le  symbolisme  de  la  roue. 
Paris, -1886,  pp.  38-39. 

(2)  D'après  un  exemplaire  du  musée  de  Brighton,  re|)roduit  par 
M.  Wiliam  Simpson  dans  son  ouvrage  Tlie  Buddldst  Praying-Wheel. 
Londres,  1896,  p.  416. 


(  i^il  ) 

les  piliers  de  bois,  des  roues  en  bronze  que  les  fidèles 
font  tourner  à  la  main.  De  même  que  les  roues  bretonnes 
sont  parfois  munies  de  clochettes,  les  roues  japonaises 
portent  des  anneaux  de  métal  qui,  glissant  le  long  des 
rayons,  produisent  un  son  argentin. 

Au  Tibet,  ces  roues  sont  remplacées  par  des  cylindres, 
les  célèbres  «  moulins  à  prières  »  du  lamaïsme. 

II  n'est  pas  dilïicile  de  reconstituer  la  genèse  des  roues 
liturgiques  du  Japon.  C'est  un  instrument  d'origine 
indienne,  la  représentation  de  la  «  Roue  de  la  Loi  «, 
que  le  Bouddha  mit  en  mouvement  pour  le  salut  du 
genre  humain  ;  elle-même  a  son  antécédent,  comme  l'a 
péremptoirement  démontré  M.  W.  Simpson,  dans  les 
roues  magiques  que  les  brahmanes  fiiisaient  tourner  pour 
dominer  le  cours  des  forces  naturelles  et,  en  particulier, 
du  soleil  (1).  En  réalité,  nous  avons  là  une  combinaison 
d'un  symbole  et  d'un  rite.  Le  symbole,  c'est  la  représen- 
tation du  soleil  par  une  roue  ou  un  disque.  Le  rite,  c'est 
la  circumambulation  où  l'on  imite  le  mouvement  appa- 
rent de  l'astre. 

Comme  ce  rite  et  ce  symbole  ont  été  retrouvés,  hors 
de  l'Inde,  parmi  les  principales  branches  de  la  famille 
indo-européenne,  —  notamment  chez  les  populations 
celtiques   de  l'Europe    occidentale  (2),   —  on  peut   se 


(t)  TheBiiddhist  Praijing-Whed.  Londres,  1896,  cliap.  IV. 

(2)  Cf.  A.  Bertrand,  La  religion  des  Gaulois.  Paris,  1897,  p.  i8t. 
«  La  rouelle  a  joué  un  rôle  particulièrement  important  en  Gaule.  A 
titre  d'amulette,  nous  la  trouvons  répandue  en  abondance  dans 
nombre  d'enceintes  gauloises  préromaines,  centres  de  cérémonies 
religieuses...  On  en  faisait  un  commerce  analogue  au  commerce  des 
médailles  et  autres  souvenirs  pieux,  vendus  en  Bretagne  les  jours  de 
pardon  à  la  porte  de  nos  églises.  » 


(  442  ) 

demander  si  les  roues  liturgiques  de  la  Bretagne  et  en 
général  nos  roues  de  fortune  se  rattachent  aux  vieux 
usages  indo-européens,  qui  n'ont  jamais  complètement 
disparu  de  notre  sol,  ou  bien  s'il  faut  y  voir  une  impor- 
tation tardive,  qui  serait  venue  se  greffer  sur  un  symbo- 
lisme préexistant. 


Le  paganisme  classique  a  connu  à  la  fois  la  circum- 
ambulation  et  la  roue  magique  (1).  Il  y  avait,  tout  d'abord, 
la  roue  de  la  déesse  Fortuna  qui  a  passé  dans  notre 
symbolisme  artistique.  M.  Gaidoz  la  tient  pour  l'antécé- 
dent direct  de  nos  roues  de  fortune,  mais  il  soupçonne  en 
même  temps  qu'elle  pourrait  bien  se  rattacher  au  symbo- 
lisme solaire  de  la  Grèce  ou  de  l'Asie  Mineure  (2). 

Chez  les  Grecs,  il  y  avait,  d'abord,  les  disques  qu'on 
utilisait  dans  les  mystères  :  les  xwvot.  ou  poix'jOL.  —  Un 
scholiasle  de  Clément  d'Alexandrie  les  définit  comme  un 
morceau  de  bois,  attaché  à  une  cordelette,  qu'on  faisait 
tourner  dans  les  mystères  pour  produire  une  sorte  de 
ronflement  (5).  D'après  M.  Andrew  Lang,  ce  serait  le 
bruyant  jouet  que  nos  enfants  qualifient  de  grenouille, 
en  anglais  biill-roarer .  M.  Lang  l'a  rapproché  du  turndum 
—  employé  de  la  même  façon  dans  les  initiations  reli- 
gieuses des  Australiens  —  ainsi  que  de  certains  engins 


(1)  Cf.  mon  article  sur  les  Moulins  à  prières  dans  la  Revue  dk 
L'IJNivEUsrrÉ  DE  Bruxelles,  livraison  de  juin  1897. 

(2)  H.  Gaidoz,  op.  cit.,  pp.  57  et  suiv. 

(3)  Kôivot;    ^uXiptov  ou    IcJ^tz-zoli  to   aTrapxtov   xal   Èv  xalç  TsXsTaT; 
ÈSovâxo  iva  poi^T). 


(  443  ) 
utilisés  pour  un  objet  analogue  dans  la  Nouvelle-Zélande, 
le  Nouveau-Mexique  et  l'Afrique  méridionale  (i).  D'autres 
commentateurs  estiment  que  les  termes  du  scholiaste 
s'appliquent  plutôt  à  un  véritable  u  sabot  » ,  sorte  de 
toupie  ronflante  qui  reste  attacbée  à  sa  corde.  —  Quoi 
qu'il  en  soit,  je  me  suis  demandé  s'il  ne  fallait  pas  voir 
la  représentation  d'un  instrument  apparenté  à  l'engin 
dont  parle  M.  A.  Lang,  sur  un  vase  peint  reproduit  par 
Millingen  :  dans  une  scène  figurant  l'enlèvement  de  Per- 
séphone,  Eros,  qui  vole  au-dessus  du  cbar  de  Hadès,  agite 
une  corde  à  laquelle  est  attachée  une  rouelle. 


FiG.  2. 
(Millingen,  Painted  Greek  Vases,  pi.  XVI.)  (2). 

Rentrant  sans  doute  dans  la  même  famille  d'instru- 
ments magiques,  non  moins  que  dans  celle  des  roues  à 
invocations  et  même  des  moulins  à  prières,  on  peut  éga- 
lement mentionner  le  cercle  que,  sur  un  semnus  apulien, 


(1)  Tlie  Bull-roarer,  dans  Custom  and  Myth.  Londres,  1884,  pp.  29 
el  puiv. 

(2)  Cf.  un  autre  exemple,  moins  caraclérisé,  dans  Lenormant  et  de 
WiTTE,  Élite  des  monuments  céramotjrapldques  de  la  Grèce,  t.  11,^ 
pi.  XXIII  A. 


(  444  ) 
Proserpine  fait  tourner  autour  d'un  bâton  ou  d'une  corde 
tendue. 


Fie.  ;i. 

(Stackk.lberg,  Graeber  dcr  Hellcneii,  pi.  XLIIIJ 

Aux  roues  magiques  était  parfois  attaché  un  oiseau, 
riying.  L"'I'jyi,  qui  porte  en  français  le  nom  significatif 
de  torcol  (Yunx  lorquilla),  à  raison  de  la  facilité  avec 
laquelle  il  fait  pivoter  sa  tète,  passait  pour  exercer 
une  intluence  aphrodisiaque  (1).  Afin  d'accroître  cette 
influence,  nous  apprend  le  scholiaste  de  Pindare,  on  liait 
l'oiseau  —  ou  sa  représentation  —  sur  une  roue  qu'on 
faisait  ensuite  tourner  (2).  Ces  roues  elles-mêmes  s'appe- 
laient des  lyinges,  "I-jvveç.  — Philostrale  rapporte  que,  à 
Babylone,  des  ïyinges  en  or  pendaient  du  plafond  dans 
la  salle  d'apparat  où  les  rois  de  Perse  rendaient  la  justice. 
Pour  peu  que  l'oiseau,  les  ailes  épandues,  dépassât  la 
circonférence,  on  ne  peut  s'empêcher  de  songer  ici  aux 
disques  ornithomorplics  que  les  Perses  avaient  jadis 
hérités  des  Assyro-Babyloniens.  Mais  Philostrate  ajoute 


(1)  D'Arcy  W.  Thompson,  A  Glossary  <>f  Greek  Birds,  1  vol.  Oxford, 
1895,  p.  71. 

(2)  Schol.  ad  Pindar.,  Pyth.  4. 


(  44-5  ) 

que  ces  lyinges,  installés  par  les  Mages  en  vue  de  refré- 
ner la  présomption  des  rois,  passaient  pour  parler  «  la 
langue  des  dieux  (1)  »  ;  ce  qui  semble  indiquer  qu'ils 
émettaient  un  bruit  de  nature  particulière.  Je  signale  ce 
passage  à  l'attention  de  M.  Andrew  Lang  qui  a  relevé, 
chez  les  sauvages,  différents  cas  où  le  ronflement  du 
turndum  est  pris  pour  la  voix  d'êtres  surbumains  (2). 

Les  Grecs  avaient  également  des  roues  ou  des  rouelles, 
xuxXo!.,  en  général  à  quatre  rais,  qu'ils  suspendaient  dans 
certains  temples,  comme  on  le  voit  par  les  représenta- 
tions figurées  des  vases  peints  ;  ces  représentations  sont 
le  plus  souvent  en  rapport  avec  les  cultes  d'Apollon, 
d'Atbêna,  d'Hadès.  Notre  regretté  confrère,  le  baron  de 
Witte,  qui  les  énumère  dans  sa  Description  de  la  collection 
d'antiquités^  de  M.  Beur/not  (ô),  ajoute  qu'  «  aucun  écrivain 
de  l'antiquité  n'a  parlé  de  l'usage  de  suspendre  des  roues 
dans  les  temples  et  les  palais  ».  Cependant  il  existe  un 
passage  de  Clément  d'Alexandrie  signalant,  d'après  le 
grammairien  Denys  de  ïbrace,  qui  écrivait  au  dernier 
siècle  avant  notre  ère,  «  la  roue  qu'on  tourne  dans  les 
temples  des  dieux  et  qui  est  tirée  de  l'Egypte  (4}  ». 

Ainsi,  non  seulement  les  Grecs  auraient  fait  tourner 
des  roues  dans  leurs  temples,  mais  encore  ils  auraient 
emprunté  cet  usage  à  l'antique  Egypte.  Le  savant  égyp- 


(1)  KaXXoûjt  ô'ahzaç  Bsùiv  yXojxxac.  Vie  d' Apollonius  de  Tyane, 
liv.  I,  chap.  XXV. 

(2)  Custom  and  Mylh,  pp.  33-36. 

(3)  Paris,  1840,  p.  25. 

(4)  Stromalmn,  lib.  V.,  dans  Opéra  Clementis  Alexanduini.  Pari.s, 
1629,  p.  S68. 


(  U6  ) 

tologue,  M.  Flinders  Pétrie,  dans  une  communicalion 
qu'il  a  récemment  adressée  à  M.  W.  Simpson  et  que 
celui-ci  résume  dans  la  dernière  livraison  du  Journal  of 
f/ie  Roijal  Asialic  Society  (octobre  1898),  vient  d'appuyer 
cette  conclusion  de  deux  textes  empruntés  aux  œuvres 
de  Héron,  un  mathématicien  grec  qui  vécut  sous  Plolé- 
mée  Philadclphe  et  Ptolémée  Evergète,  vers  le  milieu  du 
III*'  siècle  avant  notre  ère. 

Le  premier  passage  est  ainsi  conçu  :  «  Sous  les  por- 
tiques des  temples  égyptiens  sont  placées  des  roues 
mobiles  en  bronze,  qu'on  fait  tourner  en  entrant,  dans 
la  pensée  que  le  bronze  purifie.  »  {Prop.  51.) 

Le  second  texte  décrit  la  construction  d'une  roue 
mobile  «  en  bronze,  appelée  un  purilicateur,  que  les 
fidèles  ont  l'habitude  de  faire  tourner  en  entrant  ». 
[Prop.  69.]  (1). 

De  ces  textes  je  déduirai  les  conclusions  suivantes  : 

1°  Les  Egyptiens  et  les  Grecs  ont  connu  l'usage  — 
encore  pratiqué  aujourd'hui  dans  certains  sanctuaires 
chrétiens  et  bouddhiques  —  de  placer  à  l'intérieur  des 
temples  une  roue  que  les  fidèles  font  tourner. 

2°  Cet  usage  a  été  emprunté  par  les  Grecs  aux  Égyp- 
tiens,   qui    n'en   comprenaient  plus  le  sens  originaire. 

A  l'époque  romaine,  quand,  par  application  d'une  idée 
facile  à  reconstituer,  on  eut  rangé  la  roue  parmi  les  attri- 
buts de  Tyché-Fortuna,  elle-même  parfois  assimilée  à 

(1)  Dans  cette  seconde  proposition,  il  est  question  d'un  aiipnivil 
qui  imiterait  le  cri  d'un  oiseau,  quand  la  l'oue  est  mise  en  mouvement. 
Celle-ci  rentrerait  donc  plutôt  dans  la  catégorie  des  vjyyt<;.  Voy. 
Vetertim  Mctiheiiiaticonuit  Opéra,  Paris,  1643,  p.  2'20.  —  Cf.  Lobeck. 
A(jlaopka)ints.  Kœnigsbei-ii,  1829,  t.  II,  pp.  905-908. 


(  4.47  ) 

Isis,  on  ne  vit  plus  dans  les  roues  égyptiennes,  au  témoi- 
gnage (le  Plutarque,  qu'un  symbole  de  l'instabilité  des 
choses  humaines  (1). 

5"  Si,  en  Grèce,  il  ne  représente  pas  une  survivance 
des  usages  communs  aux  races  indo-européennes,  mais 
le  rés»dtat  d'une  importation  étrangère,  on  peut  supposer 
à  plus  forte  raison  (ju'en  Gaule  et  en  Bretagne,  il  a 
pénétré  avec  les  éléments  gréco-latins  introduits  j)ar  le 
paganisme  classique  et,  plus  lard,  par  le  christianisme 
parmi  les  populations  d'origine  celtique  (2). 

L'emploi  antérieur  de  la  rouelle  et  de  la  circumamhu- 
lation  comme  instruments  magiques  n'aura  fait  que  favo- 
riser l'adoption  d'un  rite  aussi  étroitement  conforme 
aux  tendances  du  symbolisme  local. 

Il  est  à  noter  que  l'emploi  liturgique  de  roues  mobiles 
a  été  également  signalé  dans  le  midi  de  la  ?>ance, 
notamment  dans  les  Pyrénées  (5),  c'est-à-dire  précisé- 
ment dans  la  région  où  l'on  a  découvert  les  principaux 
autels  gallo-romains  portant  l'image  gravée  d'une  roue. 


(1)  Plularque,  dans  sa  Vie  de  Nnina,  fait  une  allusion  aux  «  roues 
égyptiennes  qui  nous  rappellent  l'instabilité  des  choses  humaines  et 
nous  enseignent  à  nous  contenter  des  vicissitudes  que  nous  envoie 
la  Divinité  >'.  Nuinn,  XIV. 

(2)  Telle  semble  être  l'opinion  de  M.  Gaidoz,  qui,  après  avoir  cité, 
d'après  M.  de  Witte,  les  exemples  de  roues  placées  dans  les  repré- 
sentations de  temples,  ajoute  que  «  si  nous  avons  bien  là  des  roues 
suspendues  et  non  des  images  du  soleil  dues  à  un  art  naïf  et  à  une 
convention  traditionnelle,  ces  exemples  appartiendraient  à  la  caté- 
gorie des  roues  de  fortune  et  seraient  le  prototype  des  roues  suspen- 
dues dans  nos  églises  ».  Le  dieu  gaulois  du  saleil,  p.  46. 

(3)  H.  Gaidoz,  op.  c/7.,  p.  iW. 


(  448  ) 


Reste  à  examiner  comment  ce  rite  s'est  introduit  dans 
l'Egypte  antique. 

Les  Égyptiens,  comme  en  témoigne  leur  écriture  hié- 
roglypliiqne,  ont  fait  du  cercle  un  symbole  du  soleil. 
Toutefois,  chez  eux,  cette  image  s'est  développée,  non 
dans  le  sens  de  la  roue,  comme  parmi  les  Indo-Européens, 
mais  sous  la  forme  ornithomorphe  que  présente  le  globe 
ailé.  Jusqu'ici  on  n'a  trouvé,  dans  les  textes  ou  les 
monuments  figurés,  antérieurs  aux  Ptolémées,  aucune 
trace  de  roues  suspendues  dans  les  temples  ou  utilisées 
par  le  culte.  D'un  autre  côté,  il  ne  faut  pas  perdre  de 
vue  qu'à  l'époque  où  apparaît  l'usage  décrit  par  Héron, 
l'Egypte,  soumise  à  une  dynastie  d'origine  hellénique, 
commençait  à  se  départir  de  son  antique  isolement  pour 
s'ouvrir  aux  idées,  aux  symboles  et  aux  rites  de 
l'étranger.  Il  est,  du  reste,  probable  que  les  temples 
dont  Héron  nous  décrit  le  mobilier  appartenaient,  non 
aux  vieux  cultes  égyptiens,  mais  à  la  religion  alexandrine, 
cette  foi  composite  dont  les  dieux,  déjà  habillés  à  la 
grecque,  les  Sera  pis,  les  Harpocrale,  les  Isis  même, 
allaient  bientôt  pénétrer  en  Occident  (1). 

Le  rite  en  question  n'a  pu  venir  de  la  Grèce,  puisque,  au 
contraire,  d'après  les  auteurs  classiques,  c'est  à  l'Egypte 
que  les  Grecs  en  sont  redevables,  et  ainsi  nous  sommes 
naturellement  amenés  à  nous  tourner  vers  le  seul  pays  où 
nous  savons  de  source  certaine  qu'il  était  depuis  long- 


(i)  Cf.  G.  Lafaye,   Histoire  du  culte  des  divinités  d'Alexandrie  hors 
de  l'Egypte.  Paris,  1884,  pp.  15  et  suiv. 


■    (  449  ) 
temps  connu  et  pratiqué  :  l'Inde,  qui,  lors  du  troisième 
siècle  avant  notre  ère,  venait  précisément  d'entrer  en 
contact  avec  le  bassin  de  la  Méditerranée,  à  la  suite  de 
l'invasion  grecque  et  de  l'expansion  bouddhique. 

Dans  sa  lettre  à  M.  W.  Simpson,  M.  Flinders  Pétrie 
apporte  un  fait  nouveau  qui  n'est  pas  sans  importance 
pour  établir  l'existence,  en  Egypte,  d'un  courant  religieux 
parti  de  l'Inde.  Il  annonce  avoir  récemment  découvert  une 
tombe  de  l'âge  ptolémaïque,  où  ne  se  montre  aucune 
image  de  divinités  égyptiennes,  mais  où  figure  un  cercle 
à   quatre  rais    m  ,   surmonté   d'un  trident    i^    .    Ces 

deux  images  ont  été  de  tout  temps  associées  dans  les 
cultes  naturalistes  de  l'Inde.  Le  bouddhisme  les  super- 
posa l'une  à  l'autre,  pour  en  faire  un  de  ses  symboles 
favoris,  le  iriçûla,  qui  peut  se  définir,  dans  sa  forme 
la  plus  fréquente  :  un  omicron  radié,  surmonté  d'un 
oméga  fleuri,  mais  qui  se  ramène  partout  au  disque  (ou 
à  la  roue)  et  au  trident,  comme  éléments  constitutifs. 

FiG.  4,  Triçùlas  bouddhiques  (1). 

Aurait-on  donc  ici,  comme  le  suggère  M.  Flinders 
Pétrie,  le  tombeau  d'un  de  ces  missionnaires  bouddhistes 
que  les  Édits  d'Açoka  nous  apprennent  avoir  été  envoyés 
d'Egypte  dans  les  États  de  Ptolémée  Philadelphe?  L'hy- 
pothèse n'a  rien  d'invraisemblable,  bien  qu'il  convienne 


(1/  Voy.  Bull,    de    l'Acad.   roy.    de    Belgique,    S*   sér.,  t.    XVI, 
pp.  338-341,  1888. 


(  450  ) 

<Je  l'élargir,  en  admettant  qne  cette  tombe  a  pu  renfermer 
les  restes  de  quelque  Égyptien  converti  au  bouddhisme. 
J'ai  exposé  précédemment,  dans  un  autre  travail,  les 
indices  qui,  tout  au  moins  pour  le  siècle  suivant,  tendent 
à  établir  la  présence  d'une  église  bouddhique  à  Alexan- 
drie (1).  Celte  influence  exotique  a  pu  rester  sans  action 
sur  la  théologie  officielle  de  l'Egypte  ou  même  sur  les 
spéculations  des  écoles  philosophiques  contemporaines 
(bien  que  la  question  soit  controversée).  Mais  on  sait 
combien  les  symboles  et  même  les  rites  se  propagent 
plus  facilement  que  les  doctrines.  Déjà  les  bouddhistes 
n'avaient  plus  conscience  de  la  signilication  primitive 
des  usages  qu'ils  avaient  empruntés  aux  vieilles  religions 
de  l'Inde.  Faudrait-il  s'étonner  si  parmi  les  pratiques 
importées  par  des  «  sages  »  venus  de  l'Inde,  les  Gréco- 
Égyptiens  d'Alexandrie  eussent  retenu  un  rite  à  la  fois 
simple  et  original,  revêtu  du  prestige  qui  s'est  toujours 
attaché  aux  pratiques  magiques  de  l'Orient? 

Ainsi,  par  une  sorte  de  choc  en  retour,  les  roues  litur- 
giques, inventées  peut-être  par  les  brahmanes,  seraient 
venues  se  superposer  aux  traditions  du  symbolisme 
solaire,  que  les  Aryens  de  l'Occident  avaient  gardées  de 
l'unité  indo-européenne.  Ce  ne  serait  pas,  d'ailleurs,  le 
seul  cas  où  une  conception  religieuse,  développée  dans  la 
branche  orientale  de  la  race  aryenne,  se  serait  transmise  au 
rameau  occidental  par  l'entremise  de  populations  appar- 
tenant à  d'autres  groupes  ethniques.  Dans  un  autre  ordre 
de  faits,  n'avons-nous  pas  le  culte  de  Mithra,  —  le  grand 
dieu  solaire  des  Indo-Perses,  —  qui  a  passé  dans  l'empire 


(1)  Voy.  BîUl.  de  l'Acad.  roy.  de  Belgique,  3«  série,  t.  XXXIV,  p.  725, 
1897. 


(  45i   ) 

romain  par  rinlermédiaire  de  l'Asie  Mineure,  et  qui  a 
fleuri  ensuite  jusqu'aux  extrémités  de  la  Gaule,  en  y 
apportant  des  thèmes  iconographiques  encore  discernables 
aujourd'hui  dans  les  sculptures  de  nos  cathédrales  (1)  ? 


Si  disposé  que  je  sois  à  adopter  la  solution  de  MM,  W. 
Simpson  et  Flinders  Pétrie,  il  me  reste  cependant  quel- 
ques scrupules,  qui  reposent,  je  l'avoue,  sur  une  inter- 
prétation un  peu  hypothétique  de  certains  monuments 
assyro-chaldéens. 

Entre  l'Inde  et  la  Grèce,  il  y  avait  une  troisième 
région  dont  l'Egypte,  en  sa  dernière  période,  a  rencon- 
tré, sinon  subi,  les  influences  iconographiques  et  symbo- 
liques. C'est  la  Mésopotamie,  dont  les  cultes  n'avaient  pas 
disparu  sans  laisser  de  traces,  après  la  conquête  perse. 
Or  les  Chaldéens,  dont  l'art  et  la  religion  ont  réagi  de 
tout  temps  sur  les  religions  de  l'Asie  Mineure,  ont  de 
bonne  heure  symbolisé  le  soleil  sous  la  forme  d'un 
disque  ou  d'un  cercle  radié. 

Plus  taid,  ce  symbole  se  combina  avec  le  globe  orni- 
thomorphe  de  l'Egypte  pour  former  ces  rouelles  ailées 
et  cornues  dans  lesquelles  les  Assyriens  inscrivirent 
l'image  de  leur  grand  dieu  Assour  (2). 

A  la  vérité,  aucun  texte  cunéiforme  ne  nous  parle  de 
roues  qu'on  faisait  tourner  ou  même  qu'on  suspendait 


(1)  H.  Gaidoz,  Pcpin  le  Bi-ef,  Samson  et  Mithra,  dans  Mélusine, 
mai-juin  1895. 
(ïJ)  Layard,  Monuments  of  Nineveh,  1''  série,  pi.  XXI. 


{  452  ) 

dans  les  temples.  Toutefois,  certains  monuments  offrent 
des  représentations  figurées  qui  pourraient  bien  faire 
allusion  à  un  ri(c  de  ce  genre. 


FiG.  o. 
(Perrot  et  Chipiez,  L'An  dans  l'Aniiqaiié,  t.  Il,  fig.  1\.) 

C'est  d'abord  une  tablette  de  pierre,  actuellement 
déposée  au  British  Muséum,  qui  se  rapporte  à  la  restau- 
ration d'un  temple  du  Soleil,  dans  la  ville  de  Sippara, 
vers  l'an  900  avant  notre  ère.  Devant  un  dieu  assis  dans  un 
édicule  se  trouve  une  table  qui  supporte  un  large  disque 
radié.  Deux  personnages  barbus,  engagés  à  mi-corps 
dans  la  corniche  de  l'édicule,  tiennent  en  main  des 
cordes  qui  descendent  jusqu'à  la  table,  derrière  le 
disque  (1).  Un  autre  personnage  amène  deux  orants  vers 
l'autel  dont  il  saisit  le  pied. 


(1)  Ces  personnages,  suivant  la  description  de  M.  Menant,  «  sou- 
tiennent à  l'aide  de  cordes  un  j^rand  disque  qui  repose  sur  un  autel  «. 
Pierres  gravées,  t.  I,  p.  245. 


(   453  ) 

Un  second  monument,  que  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de 
reproduire  et  de  commenter,  à  un  autre  point  de  vue,  dans 
les  Bulletins  de  l'Académie  (1),  est  un  bas-relief  de  Ninive 
qui  représente  un  palmier  accolé  de  deux  génies  et  de 
deuxM'ois.  Les  deux  génies  brandissent  un  cône  dont  la 
pointe  est  dirigée  vers  un  disque  ailé  qui  plane  sur  la 
couronne  de  l'arbie ;  les  deux  lois  sont  à  genoux  et 
tiennent  cbacun  en  main  l'extrémité  d'une  bandelette 
qui  descend  du  disque. 


FiG.  b. 
(Layaki),  Monuments  oj  Mneveh,  pi.  LIX*.) 

M.  Edw.  B.  ïvior,  qui  a  consacré  à  ce  bas-reliet"  une 
étude  dont  je  me  suis  précédemment  occupé  (2),  voit  dans 
ces  bandelettes  des  cordes  magiques  destinées  à  guider 
ou  à  maintenir  le  globe  solaire  au-dessus  de  l'arbre  que 
les  deux  génies  sont  en  train  de  fertiliser  avec  les  inflo- 
rescences du  palmier  mâle.  Nous  aurions  là  une  repré- 


(1)  Voy.  Bull,  de  l'Acad.  roij.  de  Belgique,  3«  série,  t.  XX,  1890, 
p.  359. 

(2)  E.  B.  Tylor,    Wingcd  figures,   dans  les   Proceedings   de   la 
Society  of  Biblical  Archaeology,  juin  1890. 

51 


SERIE,    TOME    XXXVI. 


(  454  ) 

sentation  symbolique  de  la  fécondation  artificielle  des 
palmiers. 

Un  savant  botaniste,  M.  Bonavia,  a  combattu  cette  hy- 
pothèse à  laquelle  je  m'étais  rallié.  H  soutient  que  le  cône 
est  une  pomme  de  pin  ou  de  cèdre  et  que  les  génies  s'en 
servent  comme  d'un  goupillon  pour  arroser  le  palmier 
d'eau  lustrale.  Quant  aux  cordons,  ils  auraient  simple- 
ment pour  objet  d'établir  une  communication,  un  lien 
moral  ou  plutôt  symbolique  entre  les  adorateurs  et  la 
divinité  dont  on  invoque  la  protection  (i). 

Il  faut  remarquer  que,  dans  ce  bas-relief,  le  disque  ailé 
est  dépourvu  d'éléments  anthropomorphiques.  Je  me 
demande  si  les  deux  rois  agenouillés  ne  seraient  pas  cen- 
sés faire  mouvoir  le  soleil  par  l'application  d'un  rite  où 
l'on  aurait  fait  tourner  un  disque  à  l'aide  de  deux 
cordons.  Nous  aurions  donc  ici  un  symbole  tiré  d'un 
engin  qui  était  lui-même  une  traduction  symbolique  des 
idées  courantes  sur  la  marche  ou  l'action  du  soleil. 

11  convient  de  faire  observer  que,  dans  ce  bas-relief, 
les  bandelettes  disparaissent  derrière  la  (jueue  pennée. 
Mais,  dans  d'autres  exemplaires  du  même  thème,  les 
cordons  se  rattachent  directement  au  disque.  (Voy. 
lig.  7  et  8.) 

La  même  disposition  se  rencontre  encore  dans  deux 
monuments  dont  j'emprunte  la  reproduction  au  précieux 
ouvrage  de  M.  J.  Menant  sin-  les  Pierres  gravées  de  la 
Haule-Asie.  Dans  un  de  ces  cylindres  (fig.  7),  les  deux 
cordons  sont  tenus  par  un  seul  personnage  :  un  dieu  ailé 


(l)  Bonavia,  The  Flora  of  Ihc  Aasyrian  Monuments.  London,  iii9i, 
pp.  77-79. 


(  Am  ) 

et  agenouillé.  Dans  l'autre  (fig.  8),  ils  sont  tenus  par  deux 
prêtres  debout  (I). 


Fie.  7  et  8.  Cylindres  assyriens. 
(Menant,  Pien-ex  tjravées,  t.  11,  C g.  o7  et  GO.) 

Sous  le  second  empire  de  Chaldée,  le  disque  solaire 
reprend  nettement  la  forme  d'une  roue  pure  et  simple.  Il 
y  avait  alors  à  Babylone  une  puissante  famille,  les 
Egibi,  qui  exerça  le  haut  commerce  jusque  sous  la  domi- 
nation perse.  Le  cachet  de  celte  famille,  qui  nous  a  été 
conservé  sur  plusieurs  contrats,  présente  un  personnage, 
la  tête  rasée,  probablement  un  prêtre,  qui  rend  ses 
hommages  au  soleil  et  à  la  lune.  Dans  l'exemplaire  ci- 
dessous,  ce  personnage  s'avance,  la  main  droite  levée, 
vers   une  roue   qui    est   dressée  au   sommet  d'un  haut 


(1)  I^'Urim-Tliummin,  dont  les  Israélites  se  servaient  pour  consulter 
la  volonté  de  Jaliveh,  était  peut-être  une  mécanique  de  ce  ç;enre,  si, 
comme  le  pense  Krncsi  Renan,  il  s'aijit  d'un  p;lobe  ailé  à  urceus. 
Suivant  la  conjcclurc  de  Renan,  les  deux  urœus,  l'un  signifiant  oîa, 
l'autre  non,  s'abaissaient  et  se  relevaient  tour  à  tour,  au  moyen  d'un 
ressoi-t  caché  derrière  le  disque.  (E.  Renan,  Histoire  du  peuple 
d'Israël.  Paris,  1887,  t.  I,  p.  276.)  —  Ne  serait-il  pas  plus  simple  de 
supposer  que  le  ressort,  si  ressort  il  y  a,  faisait  tourner  le  disque  qui 
fournissait  ses  réponses  selon  le  point  oiî  il  s'arrêtait?  Nous  aurions  là 
une  véritable  roue  de  fortune,  un  prototype  de  la  «  roulette  '. 


(  456  ) 

piédestal,  —  peut-être  un  béthyle,  —  lui-même  juché  sur 
un  autel.  Le  geste  est  celui  de  l'invocation.  Mais  c'est 
aussi  l'attitude  du  bouddhiste  qui  va  mettre  en  branle  sa 
roue  ou  son]  cylindre  à  invocations,  comme  on  peut  le 
voir  dans  la  planche  de  l'ouvrage  de  M.  Simpson  où 
celui-ci' a  [dessiné,  d'après  nature,  des  femmes  se  prépa- 
rant à  faire  tourner  des  moulins  à  prières  alignés  le  long 
d'un  mur,  dans  la  lamaserie  de  Heinis,  au  Petit-ïibet  (1). 


Fie.  9.  Cylindre  du  second  empire  clialdéen 
[Gaidoz,  Le  dieu  gaulois  du  soleil,  fig.  H]  ("2). 

Le  type  de  ces  cachets,  fait  observer  M.  J.  Menant,  s'e-st 
continué  sous  les  Achéménides,  c'est-à-dire  à  l'époque  où 
la  culture  mésopotamienne  fut  portée,  par  les  Perses,  de 
l'Indus  au  Nil.  «  En  fait,  ajoute-t-il,  les  mœurs,  les  cou- 
tumes et  l'art  du  second  empire  de  Chaldée  se  sont 
perpétués  jusqu'aux  conquêtes  d'Alexandre  (5).  » 


(1)  The  Buddhist  Praying-Wheel,  p.  18. 

(2)  Cf.  d'autres  reproductions  de  la  raéme  scène  dans  Menant, 
Pierres  gravées  de  la  Haute-Asie,  t.  II,  fig.  118  à  120,  et  dans  le 
Catalogue  de  la  collection  de  Ciercq,  Paris,  1885-1890,  pi.  XXXIV, 

(3)  J.  Menant,  Pierres  gravées  de  la  Uaute-Asie,  t.  II,  p.  136. 


î  i37  ) 


Ézéchiel,  dont  la  symbolique  est  presque  tout  entière 
empruntée  à  l'iconographie  mésopotamienne,  décrit,  dans 
sa  célèbre  vision,  «des  roues  remplies  d'yeux  tout  autour» 
qui  tournaient  d'un  mouvement  spontané,  à  côté  des  Ché- 
rubins (1).  L'archéologie  contemporaine  a  établi  que  ces 
Chérubins  ou  Keroubim  devaient  rappeler,  par  leur  phy- 
sionomie, soit  les  taureaux  ailés  à  face  humaine  qui  gar- 
daient les  abords  des  palais  assyriens,  soit  les  génies 
humains  à  télé  d'aigle  qu'on  trouve  figurés  aux  deux 
côtés  du  disque  ailé.  Quant  aux  roues,  s'il  laut  conclure 
avec  M.  Ed.  Reuss  qu'elles  étaient  formées  de  deux  cercles 
se  coupant  à  angle  droit  afin  de  se  mouvoir  dans  toutes 
les  directions,  c'étaient  bien  des  globes  ou  des  sphères  (2). 
François  Lenormant,  au  contraire,  croit  rester  plus  fidèle 
à  la  description  d'Ézéchiel,  en  se  les  figurant  comme  une 
sorte  de  bobine  cylindrique.  «  On  peut,  dit-il,  se  les 
représenter  comme  des  tambours  d'une  forte  hauteur, 
tournant  sur  leur  axe  vertical  avec  rapidité  (5).  »  —  Mais 
c'est  absolument  la  structure  des  moulins  à  prières  tibé- 
tains ! 

Le  même  archéologue  explique  le  glaive  de  flamme 
tournoyant  que  l'Éternel  avait  placé,  avec  deux  Keroubim, 
à  l'entrée  de  l'Éden,  comme  une  image  empruntée  à  cer- 


(1)  Ézéchiel,  I,  15  et  suiv. 

(2)  Ed.  Reuss,  La  Bible.  Paris,  1876,  t.  II  :  Les  Prophètes,  p.  15,  note. 

(3)  Les  Origines  de  riiistoire.  Paris,  2e  éd.,  1880,  t.  I,  p.  132. 


(  458  ) 

laines  armes  de  jet,  en  forme  de  disque,  qui  auraient  été 
en  usage  dans  l'Asie  antérieure  depuis  les  temps  chal- 
déens.  Il  cite  à  ce  propos  un  passage  significatif  d'un 
hymne  gravé  sur  une  tablette  cunéiforme  du  British  Mu- 
séum. C'est  le  chant  de  guerre  d'un  dieu  qui  se  prépare 
à  la  victoire  : 

«  De  ma  main  droite,  je  tiens  mon  disque  de  feu;  de 
ma  main  gauche,  je  tiens  mon  disque  de  carnage. 

»  Le  soleil  aux  cinquante  faces,  l'arme  élevée  de  ma 
divinité,  je  le  liens. 

»  Le  vaillant  qui  brise  les  montagnes,  le  soleil,  dont 
l'action  ne  cesse  pas,  je  le  tiens. 

»  L'arme  qui  remplit  le  pays  de  la  terreur  de  sa  force 
immense,  dans  ma  main  droite  puissamment,  le  pro- 
jectile d'or  et  d'onyx,  je  le  tiens  (1).  » 

Lenormant  ajoute  que  ce  disque  de  feu  et  ce  disque  de 
carnage  contiennent,  comme  les  roues  d'Ezéchiel,  un 
esprit  qui  les  fait  mouvoir,  et,  comme  le  glaive  tour- 
noyant de  la  Genèse,  une  vie  propre  qui  les  anime;  en 
effet,  dans  d'autres  textes  cunéiformes,  ils  sont  invoqués 
à  titre  de  dieux  personnels  et  placés  à  côté  de  Samas,  le 
soleil,  ainsi  que  de  son  épouse  Goul  (2). 

Il  résulte  des  expressions  employées  dans  le  texte 
cunéiforme  que  l'arme  du  dieu  symbolise  ici  le  soleil  — 
plutôt  que  la  foudre,  comme  l'ont  supposé  certains  com- 
mentateurs. Le  même  symbolisme  s'est  développé  dans 


(t)  Cuneiform  Inscriptions  of  Western  Asia,  t.  II,  pi.  19,  2. 

(2)  F.  Lenormant,  Origines  de  l'histoire,  pp.  133-136,  2»  éd.,  1880. 


I 


(  4o9  ) 
l'Inde,  où  une  arme  de  jet  analogue,  le  ichnkra,  ou 
disque  en  métal  à  rebord  tranchant,  est  devenue  l'attribut 
par  excellence  du  dieu  solaire  Vichnou.  Voici  un  passage 
du  célèbre  poème  en  l'honneur  de  ce  dieu,  le  Harivamça, 
qui  semble  presque  une  paraphrase  du  texte  cunéiforme 
cité  plus  haut  : 

«  Le  dieu  brandit  le  superbe  Soudarçana,  brillant 
comme  les  rayons  du  soleil,  aux  mille  rayons,  destruc- 
teur des  ennemis,  semblable  à  un  feu  flamboyant,  ter- 
rible. 

»  Incomparable  dans  le  choc,  bordé  par  un  cercle 
tranchant  comme  un  rasoir,  orné  de  couronnes  et  de 
guirlandes,  se  mouvant  à  volonté,  changeant  de  forme 
à  volonté,  etc.  (1).  » 

D'après  M.  Gaidoz,  à  qui  nous  empruntons  cette  cita- 
tion (2),  la  Nrisimha  Ïâpanîya-Oupanishad  décrit  le 
tchakta  de  Vichnou  sous  la  forme  d'un  cercle  magique 
avec  sept,  huit,  douze,  seize  et  trente-deux  rayons.  On 
voit  ici  la  transition  au  Dharnialdmkra,  la  pacifique 
roue  de  la  Loi,  «  faite  de  mille  rais,  lançant  mille  rayons  », 


(1)  Il  est  à  remarquer  que,  dans  la  lutte  d'Osiris  et  d'Horus  contre  Set, 
—  telle  qu'elle  est  racontée  dans  les  inscriptions  du  temple  d'Edfou, 
publiées  par  M.  Ernest  Naville,  —  quand  les  dieux  solaires  veulent 
mettre  leurs  adversaires  en  déroute,  ils  assument  la  forme  du  disque 
ailé.  Rien  qu'à  l'entrevoir,  les  ennemis  tombent  morts  de  peur. 
{Revue de  l'histoire  des  religions,  t.  IX,  pp.  332-336.) 

(2)  Le  dieu  gaulois  du  soleil,  p.  12. 


(  Mi{)  ) 

dont  le  mouvement  est  symbolisé   par   les  cylindres  à 
prières  et  les  roues  liturgiques  du  bouddhisme. 


FlG.  40.  Le  Dharmatchakra. 
[Bas-relief  de  Buddha  Gaya,  III'^  siè.:le  av.  J  -C]  (1). 

Y  a-t-il  eu  emprunt  entre  la  Chaldée  et  l'Inde?  —  Le 
problème  est  moins  de  découvrir  qui,  le  premier,  a 
inventé  l'arme  du  disque  aiguisé  que  de  s'assurer  qui,  le 
premier,  en  a  fait  une  image  du  soleil.  La  culture  méso- 
potamienne  est  d'un  âge  trop  reculé  pour  que  nous 
puissions  la  croire  tributaire  de  l'Inde,  et  ainsi,  par  cette 
voie  encore,  nous  nous  trouvons  ramenés  à  la  Chaldée 
comme  berceau  des  roues  liturgiques. 

Il  ne  faut  pas  oublier  que  les  relations  commerciales  et 
maritimes  entre  la  Chaldée  et  l'Inde  se  sont   surtout 


(1)  Reproduit  par  Fergusson,  Historyof  Indian  andEastern  Archi- 
tecture, London,  1891,  fig.  47.  -  Cf.  plus  haut  le  cylindre  chaldéen, 
tig.  9  ;  aussi  la  fig.  5. 


(  4(H   ) 

<lévelo|)pées  à  paiiir  du  Vlh  siècle  avant  notre  ère  (i). 
C'est  par  ce  canal  que  l'Inde  semble  avoir  reçu  les 
premiers  rudiments  de  son  écriture  et  de  ses  arts  plas- 
tiques. Parmi  les  rares  traces  d'emprunt  aux  traditions 
chaldéennes  qu'elle  révèle  dans  ses  documents  littéraires 
ou  religieux,  se  trouve  le  récit  du  déluge  de  Manou,  qui 
otï're  incontestablement  des  traits  de  parenté  avec  la 
tradition  mésopotamienne  du  déluge  de  Xisouthros  (2). 
Or,  ce  récit  se  rencontre  pour  la  première  fois  dans 
une  annexe  du  Yayour  Véda,  le  Satapatha  Bràhmana,  et 
c'est  là  précisément  (jue  M.  AY.  Simpson  a  découvert  la 
plus  ancienne  mention  d'une  roue  magique,  mise  en 
branle  par  des  brabmanes  avec  accompagnement  d'un 
hymne  au  dieu  solaire  Savitri  (5). 

Rien,  toutefois,  n'empêche  d'admettre  que,  si  la  Méso- 
potamie a  fourni  soit  l'idée  de  représenter  le  soleil  par 
le  dis(|ue  utilisé  à  la  guerre,  soit  l'usage  de  mettre  une 
roue  en  mouvement  pour  ligurer  le  cours  de  l'astre,  les 
conceptions  religieuses  qui  ont  employé  ces  symboles 
existaient  antérieurement  parmi  les  habitants  de  l'Inde 
et  même  y  remontaient,  selon  toute  apparence,  au  fonds 
commun  des  croyances  indo-européennes. 

Voici  comment,  dans  cette  hypothèse,  on  pourrait 
tracer  la  généalogie  de  nos  roues  de  fortune,  soit  en  les 


(1)  .1.  Kennedy,  TheearLy  conuiierce  of  Babylon  with  India,  dans  le 
journal  de  la  Royal  Asiatic  Society,  avi-il  1898,  pp.  "Mi  et  suivantes. 

(2)  F.  Lenormant,  Les  premières  civilisations,  Paris,  1874,  t.  II, 
pp.  123  et  suiv. 

(3)  Satapatha-Brahiiiana  (V,  %,  dans  le  t.  XL!  des  Sacral  Bnoks  of 
ihe  Enst. 


(  46-2  ) 

faisant  passer  par  l'iiule,  soit  en  les  faisant  directement 
descendre  de  la  Ghaldée  en  Egypte  : 


X™"  siècle. 
VU'""  siècle. 


ni""  siècle.  i- 

Égvp'e. 

"1 
l"  siècle.  Grèce. 

I 
Rome. 

,   I, 
Gaule. 


Ghaldée, 


Inde. 


Tibel. 

I 


463  ) 


classe:   des  BEAVIL-ARTS. 


Séance  du  10  novembre  1898. 

M.  J.  RoBiE,  vice-directeur,  occupe  le  fauteuil. 

M.  le  chevalier  Edmond  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  Éd.  Kétis,  F.-A.  Gevaert,  Th.  Ra- 
doux,  Peter  Benoit,  J.  Demannez,  P.-J.  Clays,  G.  De 
Groot,  Gust.  Biot,  H.  Hymans,  Th.  Vinçotte,  Jos.  Stal- 
laert,  Alex.  Markelbach,  Max.  Rooscs,  G.  Huberti , 
A.  Hennebicq,  Éd.  Van  Even,  Allr.  Cluysenaar,  le  comte 
Jacques  de  Lalaing,  J.  Winders,  Ém.  Janlet,  H.  Maquel, 
J.  Van  Ysendyck,  membres;  J.-B.  Meunier,  Alb.  De  Vriendt 
et  G.  Hennans,  correspondants. 


CORRESPONDANCE 


MM.  Edgar  Baes  et  Florimond  van  Duyse  remercieni 
la  Classe  pour  les  distinctions  qui  leur  ont  été  accordées 
lors  du  dernier  concours  amiuel. 


(    464    ; 

RAPPORTS. 


Il  est  donné  lecture  des  appréciations  : 

i"  De  MM.  De  Groot,  Vinçotte  et  Marchai,  rapporteur  : 
a)  sur  le  premier  rapport  semestriel  de  M,  Victor  De 
Haen,  premier  prix  du  grand  concours  de  sculpture  de 
1894;  b)  sur  le  premier  rapport  semestriel  de  M.  Marin, 
boursier  de  la  fondation  Godecharle  pour  la  sculpture, 
en  1897; 

2"  Des  mêmes  :  a)  sur  le  buste  en  marbre  de  feu  Guil- 
laume Geefs,  exécuté  pour  la  galerie  des  bustes  d'acadé- 
miciens décédés,  par  M.  Georges  Geefs,  à  Anvers;  h)  sur 
le  buste  en  marbre  de  feu  J.-J.  Haus,  exécuté  pour  la 
même  galerie,  par  M.  Jules  Weyns,  à  Anvers. 

—  Renvoi  à  M.  le  Ministre  de  l'Agriculture  et  des  Tra- 
vaux publics. 


COMMUNICATION  ET  LECTURE. 


L'arl  et  la   lumière;    par   Jean    Robie, 
membre  de  l'Académie. 

Considéré  dans  son  ensemble,  le  climat  de  nos  contrées 
n'offre  rien  d'excessif,  à  cause  du  voisinage  de  la  mer  qui 
adoucit  la  rigueur  des  saisons  et  nous  préserve  des 
longues  sécheresses  dont  les  conséquences  sont  parfois  si 
désastreuses  dans  les  pays  du  soleil. 


(  465  ) 

D'autre  part,  les  perturbations  atmosphériques  que  l'on 
observe  fréquemment  sur  la  côte  occidentale  de  l'Eu- 
rope, modifient  sans  cesse  l'état  du  ciel  et  l'aspect  du 
paysage,  tantôt  clair,  rayonnant,  tantôt  sombre  ou  mélan- 
colique. 

A  l'ordinaire,  durant  l'été,  des  brumes  tièdes  et  dia- 
phanes enveloppent  la  nature  et  nous  font  l'effet  d'un 
léger  voile  de  mousseline  qui,  en  estompant  les  contours 
des  objets,  s'épaissit  peu  à  peu  jusqu'aux  limites  de  l'hori- 
zon noyées  dans  l'espace.  Ce  sont  précisément  les  rosées 
matinales  et  la  moiteur  de  l'atmosphère  qui  donnent  tant 
d'attrait  à  nos  campagnes  par  les  temps  orageux,  lorsque 
des  nuées,  mobiles  comme  l'onde,  llottent  au  gré  de  la 
brise  et  projettent  çà  et  là  des  ombres  errantes,  capri- 
cieuses, et  des  lumières  argentées  qui  séduisent  l'œil  du 
peintre. 

Nulle  part  la  saison  printanière  où  tout  renait,  tout 
reverdit,  depuis  les  frêles  graminéesdes  prairies  jusqu'aux 
géants  des  forêts,  ne  se  manifeste  avec  autant  d'ardeur, 
avec  autant  d'éclat!  Plus  tard  enfin,  au  déclin  des  beaux 
jours,  quand  le  soleil  accomplit  son  œuvre  de  maturation, 
quelle  symphonie  pathétique  pleine  de  contrastes  !  Quel 
doux  spectacle  nous  présente  l'automne  développant  sa 
splendeur  éphémère  dans  les  bois  éclaircis  jonchés  de 
feuilles  mortes!  Il  est  à  remarquer  en  outre  que  les  con- 
ditions particulières  de  notre  climat  se  retrouvent  en 
partie  dans  les  pays  voisins,  la  France,  la  Hollande 
et  l'Angleterre,  qui  ont  donné  naissance  aux  grands 
paysagistes,  aux  vaillants  interprètes  de  la  vie  en 
plein  air. 


(  4C6  ) 

Chose  étrange,  depuis  la  création  des  écoles  de  pein- 
ture, le  désir  d'exprimer  la  lumière  et  l'espace  au  moyen 
de  la  perspective  aérienne  ne  cesse  d'absorber  l'esprit 
des  artistes  européens,  tandis  qu'en  Orient,  en  Asie,  où 
la  clarté  du  jour  est  plus  belle,  olus  limpide  que  partout 
ailleurs,  les  peintres  n'ont  jamais  franchi  les  bornes 
resserrées  de  l'art  byzantin,  qui,  réduit  à  sa  plus  simple 
expression,  prodiguait  l'or,  l'argent  et  les  mosaïques  pour 
dissimuler  son  indigence  et  sa  monotonie. 

Sans  nous  aventurer  en  des  parages  aussi  lointains, 
examinons  un  instant  quels  sont  jusqu'ici,  dans  la  ques- 
tion qui  nous  occupe,  les  avantages  de  la  lumière 
artificielle  et  ses  applications  les  plus  récentes  aux  arts 
décoratifs. 

Durant  ces  dernières  années,  tant  de  découvertes 
scientifiques  ont  bouleversé  nos  habitudes  et  notre 
manière  de  vivre,  que  la  lutte  pour  l'existence  nous 
entraîne  à  prolonger  sans  cesse  nos  travaux  nocturnes  à 
l'aide  d'un  mode  d'éclairage  ayant  les  apparences  de  la 
lumière  solaire.  «  L'industrie  humaine  s'étend,  dit-on, 
avec  les  besoins  qui  la  font  naître.  »  Ce  qui,  au  siècle 
passé,  n'était  qu'un  rêve  de  lampiste,  est  devenu  une 
réalité  éblouissante,  grâce  aux  perfectionnements  succes- 
sifs apportés  à  nos  divers  appareils,  depuis  l'antique 
lampe  à  l'huile,  la  vulgaire  chandelle  qui  au  moyen  âge 
fut  un  luxe  dispendieux,  la  bougie,  le  quinquet  fumeux, 
ia  lampe  Carcel,  le  pétrole  incendiaire,  le  gaz  explosible, 
jusqu'à  la  lumière  électrique  avec  les  rayons  X  qui  n'ont 
pas  dit  leur  dernier  mot. 


(  467  ) 

C'est  une  loi  physique  invariable  que,  plus  la  lumière 
artificielle  se  décolore  et  se  rapproche  de  la  clarté  du 
jour,  moins  nos  yeux  se  fatiguent.  Je  me  souviens  des 
temps  fort  éloignés,  hélas!  où  loul  l'éclairage  de  la  mai- 
son paternelle  se  composait  d'un  modeste  lampion  à 
l'huile  de  colza  dont  la  forme  primitive  rappelait  singu- 
lièrement les  lampes  étrusques  et  pompéiennes  :  cela 
produisait  des  effets  de  clair-obscur  très  pittoresques, 
mais  fort  incommodes  par  les  longues  soirées  d'hiver, 
lorsque,  réunis  autour  de  la  table  familiale,  les  plus 
éveillés  s'adonnaient  à  la  lecture  pendant  que  la  mère 
raccommodait  les  vêtements  de  la  marmaille.  Quand  on 
songe  qu'il  a  fallu  tant  de  siècles  pour  que  l'homme  sentit 
la  nécessité  de  modifier  ce  système  rudimentaire  qui 
demeurait  encore  dans  le  même  état,  alors  que,  pour 
tirer  du  feu  d'un  caillou,  mes  contemporains  s'écorchaient 
les  doigts  en  battant  le  briquet  ! 

Mais  aussi  quelle  surprise,  quel  enthousiasme,  lors- 
que après  une  période  d'essais  et  de  tâtonnements  de 
toute  espèce,  la  science  proclama  le  Fiai  lux  qui  devait 
transformer  l'art  mécanique  en  lui  donnant,  du  même 
coup,  une  parcelle  de  lumière  dérobée  au  soleil  et  une 
force  puissante  et  mystérieuse  dont  la  source  est  iné- 
puisable! 

Il  en  fut  de  même  au  théâtre;  qu'on  essaie  donc  de 
représenter  aujourd'hui  nos  grands  opéras  et  nos  drames 
lyriques  à  la  lueur  des  chandelles,  avec  des  premières 
loges  éclairées  de  la  même  façon!  Ge  serait  évidemment 
désastreux  pour  les  couturiers  de  nos  belles  mondaines, 


(  468  ) 
mais,  par  contre,  quelle  économie  pour  les  maris! 
Malheureusement  pour  eux,  la  modestie  de  l'obscure 
violette  n'est  plus  de  saison,  car  il  est  reconnu  que  désor- 
mais le  luxe  ostensible  des  toilettes  se  développe  gra- 
duellement, en  raison  du  nombre  prodigieux  de  bougies 
que  représente  le  nouveau  luminaire  des  salles  de 
spectacle. 

Dès  son  apparition,  la  lumière  électrique  transforme 
l'art  décoratif  dans  sa  partie  la  plus  essentielle;  comme, 
en  plein  soleil,  les  ciels  rayonnent,  les  fonds  de  paysage 
s'illuminent,  la  mise  en  scène,  décors  et  costumes, 
prennent  un  éclat  merveilleux,  tandis  que  l'électricien, 
le  Deus  ex  machina,  muni  en  quebiue  sorte  d'une  parti- 
tion spéciale,  suit  pas  à  pas  les  changements  à  vue, 
évoque  à  volonté  la  lune,  le  soleil,  les  ténèbres,  et  sou- 
ligne successivement  les  éclairs  fugitifs  indiqués  par  l'or- 
chestre, quand  l'orage  gronde  et  que  la  foudre  éclate. 
Nous  sommes  loin  du  théâtre  de  Shakespeare  où  l'imagi- 
nation des  spectateurs  devait  suppléer  aux  décors;  il  est 
vrai  que  l'art  prestigieux  du  grand  dramaturge  entraî- 
nait tellement  l'esprit  du  public  qu'un  simple  paravent 
semblait  se  transformer,  par  magie,  en  une  vaste  forêt  el 
au  besoin  en  un  superbe  palais. 

Les  créateurs  du  théâtre,  de  la  tragédie  et  de  tout  ce 
qui  a  rapport  aux  jeux  de  la  scène,  comprenaient  les 
choses  plus  simplement  encore  ;  sous  le  beau  ciel  de 
l'Attique,  toutes  les  manifestations  d'art,  quelles  qu'elles 
fussent,  se  faisaient  en  plein  air,  à  la  clarté  radieuse  de 


(  469  ) 
ce  climat  fortuné.   On  comprend  que,  dans  ces  condi- 
tions, les  arts  plastiques  devaient  prendre  cette  ampleur, 
celte  pureté  de  lignes  que  l'on  admire  dans  les  chefs- 
d'œuvre  de  l'École  d'Athènes. 

Nous  ignorons  cependant  si  les  peintres  de  cette 
époque  représentaient  la  nature  sous  tous  ses  aspects, 
telle  qu'elle  nous  apparaît  dans  l'espace,  et  si,  en  résumé, 
leur  jugement  esthétique  était  aussi  délicat,  aussi  subtil 
que  le  nôtre;  à  cet  égard,  nous  devons  nous  en  rapporter 
aux  écrivains  et  orateurs  qui  propageaient  sans  cesse  le 
culte  du  Beau  dans  les  assemblées  publiques,  en  présence 
des  productions  immortelles  des  grands  maîtres.  Aussi, 
d'accord  avec  la  tradition  ancienne,  on  peut  altirmer  sans 
crainte  que,  parmi  cette  démocratie  privilégiée,  dont  les 
titres  de  noblesse  se  composent  de  tout  ce  qu'il  y  a  de 
plus  merveilleux  en  ce  monde,  la  peinture  ne  le  cédait 
en  rien  à  la  statuaire  :  l'art  noble  par  excellence,  qui 
élevait  l'âme  de  la  nation  en  donnant  des  formes  palpa- 
bles et  sublimes  aux  héros  de  l'Iliade  et  en  réalisant  sur 
le  marbre  de  Paros  toutes  les  fictions  poétiques  de 
l'Olympe  qui  s'étaient  développées  dans  les  îles  enchan- 
teresses de  l'Archipel... 

Quittons  maintenant  ces  rivages  embaumés  où  les 
vagues  caressantes  se  perdent  dans  les  myrtes  et  les  lau- 
riers-roses, et  passons  en  Egypte. 

Bien  qu'au  pays  des  Pharaons  les  arts  et  les  sciences 
aient  précédé  de  beaucoup  la  civilisation  hellénique, 
nous  sommes  amplement  renseignés  sur  la  peinture 
égyptienne,  grâce  aux  fresques  d'une  conservation  par- 

5""^    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  52 


(470) 
faite  que  l'on  découvre  sans  cesse  dans  les  hypogées  de 
la  vallée  du  Nil.  Ces  documents  graphiques,  naïvement 
coloriés,  sans  effets  d'omhre  ni  de  lumière,  mais  d'un 
dessin  exact,  minutieux,  nous  dévoilent,  en  tous  ses 
détails,  la  vie  intime  de  ce  peuple  spirituel  et  rafiiné,  qui 
envisageait  la  mort  comme  un  acheminement  au  honheur 
absolu,  ce  qui  ne  l'empêchait  pas  de  festiner  et  de  se 
divertir  à  tout  propos  en  songeant  peut-être  que,  en  ce 
has  monde,  un  tiens  vaut  mieux  que  deux  tu  l'auras.  Exé- 
cutées à  la  lueur  des  tlam beaux  avant  la  fermeture  défi- 
nitive des  tombes,  ces  peintures  devaient  se  dérober  à 
toute  critique  de  la  part  des  vivants  ;  mais  comme, 
selon  la  croyance  des  anciens  Egyptiens,  les  mânes  des 
justes,  après  un  stage  dans  le  royaume  des  lumières, 
jouissaient  pour  toute  éternité  des  plaisirs  terrestres, 
j'imagine  qu'ils  étaient  à  même  de  donner  leur  avis  sur 
la  manière  dont  les  artistes  avaient  interprété  leur  vie 
pastorale  et  leurs  aspirations  vers  la  félicité  perpétuelle, 
dans  le  calme  inviolable  du  tombeau. 

Mais  quel  réveil  plein  d'épouvante,  lorsque,  après  des 
milliers  d'années  de  repos  et  de  bien-être,  une  multitude 
de  spéculateurs  avides,  guidés  par  des  ravageurs  indi- 
gènes, vinrent  bouleverser  leurs  cendres  pour  les  livrer 
en  proie  aux  trafiquants  de  vieilleries!  Ce  fut  bientôt  un 
pillage  en  règle,  une  véritable  exploitation  commerciale; 
emballée  et  numérotée  comme  un  vulgaire  colis,  puis 
expédiée  vers  les  quatre  coins  du  monde,  cette  marchan- 
dise nouvelle,  si  on  peut  l'appeler  ainsi,  embarrassait 
singulièrement  la  douane   qui,  toute  réilexion   faite,  ne 


(  ^71  ) 
trouva  rien  de  plus  simple  que  de  classer  les  momies  des 
rois  emmaillottées  de  bandelettes,  parmi  les  articles  de 
mercerie...  Ce  vandalisme  n'est  plus  possible  aujour- 
d'hui; la  translation  de  ces  restes  précieux  au  musée 
de  Boulak  s'opère  avec  tout  le  respect  que  l'on  doit 
aux  plus  anciennes  dynasties  des  temps  historiques. 

Plus  tard  enfin,  au  commencement  de  notre  ère,  les 
peintures  des  catacombes  de  Rome,  qui,  elles  aussi, 
n'étaient  pas  destinées  à  être  vues  au  grand  jour,  mar- 
quèrent la  décadence  de  l'art  gréco-romain  et  la  for- 
mation de  l'art  chrétien  dont  le  développement  tardif 
ne  devait  s'accomplir  que  vers  le  milieu  du  XIV''  siècle. 

Avant  de  terminer,  il  convient  de  jeter  un  coup  d'œil 
sur  les  grandes  exhibitions  de  peintures  modernes  où 
viennent  s'accumuler,  par  milliers,  les  productions  les 
plus  variées,  les  plus  hétéroclites  qu'il  soit  possible  de 
rêver.  Chaque  année,  au  retour  du  printemps,  alors 
que  les  esprits  fermentent,  la  même  utopie  revient  sur 
l'eau,  c'est-à-dire  «  l'égale  répartition  de  la  lumière  entre 
tous  les  exposants  ». 

Pour  se  faire  une  idée  de  l'importance  de  cette  ques- 
tion, il  suffît  d'assister,  ne  fùl-ce  qu'une  seule  fois,  à 
l'ouverture  d'un  salon  annuel  le  jour  du  vernissage.  Là, 
dans  un  tohu-bohu  de  chevelures  incultes  et  de  barbes  à 
tous  crins,  vous  entendrez  les  imprécations  des  réprou- 
vés qui,  l'œil  enflammé,  les  poings  serrés,  cherchent  en 
vain  leur  œuvre  perdue  dans  un  angle  obscur  ou  triste- 
ment accrochée  sous  la  frise,  dans  l'ombre  tutélaire  de  la 


(  472  ) 
corniche.  Peu  à  peu,  la  marée  montante  des  rapins 
s'écoule  en  tous  sens,  houleuse  et  désordonnée,  tandis 
que  les  échelles  des  vernisseurs  se  heurtent,  se  balancent 
comme  des  mâts  de  navires  par  une  mer  démontée.  Une 
rumeur  étrange,  faite  de  blasphèmes  et  d'insultes  à 
l'adresse  du  jury,  s'élève  de  toutes  parts,  tandis  que  de 
loin  en  loin  des  groupes  d'artistes  décorés,  la  face  épa- 
nouie, le  sourire  aux  lèvres,  se  prodiguent  sans  vergogne 
la  myrrhe  et  l'encens,  avec  la  béatitude  des  élus  du  jour 
dont  quelques-uns  des  mieux  lotis  sont  destinés,  hélas  ! 
à  figurer  tôt  ou  tard  parmi  les  déchus.  Mais  qu'importe? 
Leurs  œuvres  s'étalent  le  long  de  la  rampe,  en  pleine 
lumière  ;  elles  seront  discutées,  éreintées  comme  de  cou- 
tume par  la  jeune  école,  ce  qui  vaut  mieux,  après  tout, 
que  de  demeurer  inaperçues  aux  yeux  du  public,  tou- 
jours enclin  à  prendre  des  vers  luisants  pour  des 
étoiles.  Rassurons-nous  pourtant  :  la  postérité,  plus  clair- 
voyante, saura  bien  se  débarrasser  du  clinquant  et  de  la 
fausse  monnaie. 

Si  le  point  essentiel,  pour  les  peintures  de  tout 
genre,  consiste  en  un  bon  éclairage,  on  peut  citer  cepen- 
dant une  foule  de  belles  œuvres  de  la  Renaissance  qui, 
bien  qu'elles  soient  (ixées  à  demeure  en  un  demi-jour 
douteux  et  tranquille,  s'emparent  de  nos  sens  et  nous 
invitent  au  recueillement,  à  la  méditation  :  telles  sont 
les  fresques  des  écoles  italiennes  que  l'on  rencontre  dans 
la  plupart  des  monuments  religieux  de  l'Italie.  Inspirées 
par  la  foi,  par  l'amour  de  la  beauté  idéale,  toutes  ces 
nobles  pages,  exécutées  sur  place  par  des  artistes  renom- 


(  ^'5  ) 

mes,  s'harmoniseiU  avec  rensenible  des  édifices  dont  elles 
forment  le  complément  indispensable  :  que  serait  la  Cha- 
pelle Sixtine  sans  les  peintures  grandioses  et  sublimes 
de  Michel-Ange? 

En  dehors  des  sculptures  monumentales  ornant  les 
places  publiques,  la  statuaire  s'accommode  parfaitement 
d'un  éclairage  égal  et  discret,  qui  laisse  de  l'ampleur  à 
l'ensemble  sans  se  disperser  confusément  sur  les  détails  : 
le  tombeau  des  Médicis  et  le  mausolée  de  Jules  II  avec 
le  Moïse  imposant  de  l'illustre  Florentin,  démontrent  que 
ces  conditions  de  lumière  font  mieux  ressortir  encore 
leur  caractère  humain  et  dramatique,  où  le  sentiment  de 
la  vérité  s'allie  à  la  splendeur  du  beau. 

Notons  aussi  qu'à  certains  égards  la  pénombre  vague 
et  sinistre  qui  règne  dans  nos  vieilles  cathédrales  gothi- 
ques est  plutôt  favorable  à  la  sculpture  religieuse,  qui 
emprunte  à  l'air  ambiant  un  caractère  de  tristesse  incom- 
patible avec  la  grande  lumière.  L'esprit  ascétique  du 
moyen  âge  réside  en  ces  lieux  austères,  pavés  de  pierres 
tombales  usées  et  glissantes,  sur  lesquelles  les  pas  de  la 
foule  mettent  une  empreinte  humide  et  glacée.  Les 
rayons  vivifiants  du  soleil  semblent  bannis  pour  jamais  de 
ce  séjour  ténébreux,  où  la  lueur  vacillante  des  cierges  vo- 
tifs renforce  les  ombres  épandues,  comme  un  voile  de 
crêpe,  dans  l'éditice  embrumé. 

Du  fond  de  l'abside  s'élèvent,  de  temps  à  autre,  des 
paroles  indécises  et  mystérieuses,  qui  se  répercutent  et  se 
confondent  comme  un  sourd  bourdonnement  d'abeilles, 
dont  les  dernières  vibrations  s'évanouissent  dans  le  si- 
lence. Partout,  le  long  des  bas  côtés  de  la  nef  encombrés 
de  sarcophages  et  d'ornements  funèbres,  on  voit  surgir, 

5™*    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  52. 


(  474  ) 

comme  des  spectres,  une  foule  de  statues  décliarnées  et 
macabres  qui  font  songer  aux  peines  éternelles  et  inspirent 
la  terreur  de  l'implacable  justice  humaine,  tandis  que  sur 
l'autel  apparaît,  dans  toute  sa  gloire,  l'image  du  divin 
Rédempteur  dont  les  yeux  noyés  de  larmes  et  le  doux 
sourire  de  miséricorde  promettent  le  pardon  et  l'oubli... 
En  ce  qui  concerne  la  sculpture  monumentale,  est-il 
besoin  de  dire  que  l'artiste  doit  faire  en  sorte  que  son 
œuvre  s'accorde  et  s'harmonise  avec  le  milieu  spécial  qui 
lui  est  réservé,  qu'il  doit  l'achever,  autant  que  possible, 
sur  place  ou  en  dehors  du  jour  restreint  et  suspect  de 
l'atelier?  L'art  public,  donnant  la  mesure  du  génie  na- 
tional, ne  peut  s'entreprendre  à  la  légère,  comme  un 
enjolivement  banal  et  superflu. 

Nous  avons  vu  en  commençant  que  les  auteurs  drama- 
tiques se  sont  empressés  de  mettre  à  profit  les  merveil- 
leux artifices  de  la  lumière  et  de  l'art  décoratif,  afin  d'agir 
directement  sur  l'esprit  du  spectateur  par  l'action  rapide 
et  simultanée  de  la  vue  et  de  l'ouïe.  Il  y  a  pourtant  là  des 
côtés  matériels  et  prosaïques  dilliciles  à  dérober  aux  yeux 
du  public  attentif,  que  la  moindre  inadvertance  des  ma- 
chinistes peut  dérouter,  tandis  que  les  grandes  œuvres 
musicales,  oratorios,  symphonies  et  poésies  lyriques,  se 
suffisent  à  elles-mêmes,  sans  nul  apparat,  ayant  tout  à 
gagner  à  être  entendues  soit  dans  l'ombre,  soit  dans  un 
jour  douteux  empêchant  nos  facultés  Imaginatives  de  se 
laisser  détourner,  malgré  nous,  par  la  vue  des  choses 
extérieures.  Nous  connaissons  tous  les  belles  auditions 
nocturnes  de  la  cathédrale  de  Fribourg  où,  dans  l'obscu- 
rité profonde  de  la  voûte  sonore,  la  grande  voix  de  l'orgue 


(  ^i/^ } 

transporte  rimagination  dans  les  sphères  élhérées  de 
l'infini  ;  à  Jérusalem,  comme  dans  les  mosquées  de  l'Inde 
ou  sur  les  bords  du  Gange,  par  les  nuits  étoilées  et  pai- 
sibles, les  invocations  religieuses  de  tout  un- peuple  de 
croyants  forment  un  ensemble  d'un  caractère  étrange  et 
grandiose,  dont  le  souvenir  ne  s'efface  jamais. 

Je  m'aperçois,  un  peu  tard,  que  ces  considérations 
plus  ou  moins  fontaisistes  sur  l'art  et  la  lumière  m'ont 
fait  perdre  de  vue  les  ombres  et  le  clair-obscur  dont  le 
rôle  est  tout  aussi  important  dans  les  arts  graphiques, 
puisqu'ils  ne  sont  que  la  conséquence  de  la  lumière 
assourdie  ou  partiellement  interceptée.  C'est  par  la  com- 
binaison et  l'entente  de  ces  éléments  essentiels  que 
Rembrandt  a  su  donner  à  son  œuvre  cet  éclat  magique, 
plein  d'harmonie,  qui  séduit  l'âme  comme  une  émana- 
tion lumineuse,  puisqu'il  est  évident  que,  en  fait  d'art 
comme  en  toutes  choses,  la  lumière,  c'est  la  vie. 


476  ) 


OUVRAGES  PRESENTES. 


Banning  [Emile).  Rapport  sur  l'organisation  et  l'ensei- 
gnement de  l'Université  de  Rerlin,  présenté  à  M.  le  Ministre 
de  l'Intérieur,  le  26  octobre  1861.  Bruxelles,  1863;  in-S" 
(148  p.). 

—  L'Afrique  et  la  Conférence  géographique  de  Bruxelles. 
'i"  édition,  revue  et  augmentée.  Bruxelles,  1898;  in-8° 
{xvi-224  p.,  3  cartes  et  10  gravures), 

—  La  morale  dans  l'instruction  primaire  et  le  parti 
catholique.  Bruxelles,  1879;  in-8°  (40  p.). 

—  L'Episcopat  et  l'instruction  publique  en  Belgique,  de 
1830  à  1879.  Bruxelles,  1879;  in-S"  (90  p.). 

—  La  Belgique  et  le  Vatican.  Documents  et  travaux  légis- 
latifs concernant  la  rupture  des  relations  diplomatiques 
entre  le  Gouvernement  belge  et  le  Saint-Siège,  précédés 
d'un  exposé  historique  des  rapports  qui  ont  existé  entre 
eux  depuis  1830.  Bruxelles,  1880;  in-8Nxciv-LViii-83p.). 

—  La  situation  politique  et  la  lutte  des  partis  en  Bel- 
gique. Paris,  1882;  in-8°(51  p.). 

—  L'Association  internationale  africaine  et  le  Comité 
d'études  du  Haut-Congo.  Travaux  et  résultats  de  décembre 
1877  à  octobre  1882.  Bruxelles,  1882;  in-8°  (32  p.). 

—  Mémoires  sur  les  droits  et  les  prétentions  du  Portugal 
à  la  souveraineté  de  certains  territoires  de  la  côte  occiden- 
tale d'Afrique.  Paris,  1883;  in-8''  (111  p.,  carte). 

—  Mémorandum  concerning  the  portuguese  rights  and 


(  477  ) 
pretensions  to  sovereignty  on  the  west  coast    of  Afrika. 
Londres,  1883  ;  in-S"  (iv-89  p.,  carte). 

BanmiKj  {Emile).  La  Conférence  africaine  de  Berlin  et 
l'Association  internationale  du  Congo.  Bruxelles,  1885; 
extr.  in-S"  (26  p.). 

—  La  défense  de  la  Belgique  au  point  de  vue  national  et 
européen.  Bruxelles,  1887  ;  exlr.  in-S"  (36  p.). 

—  Le  partage  politique  de  l'Afrique,  d'après  les  transac- 
tions internationales  les  plus  récentes  (1885  à  1888).  Bru- 
xelles, 1888;  in-8"  (viii-181  p.,  carte). 

—  Die  politische  Theilung  Afrika's,  nach  don  neuesten 
internationalen  Vereinbarungen  (1885  bis  1889).  (Ueber- 
tragen  von  D^  Arthur  Pfungst).  Berlin,  1890;  in-8"  (210  p., 
carte). 

—  La  Conférence  de  Bruxelles  et  les  Pays-Bas.  Anvers, 
1890;  in-8»(24  p.). 

—  La  revision.  Vue  générale  d'une  réforme  constitution- 
nelle. Bruxelles,  1892;  in-8«  (58  p.). 

Sehjs  Lougchamps  [Le  baron  de).  Funérailles  de  M.  le  D"" 
E.  Candèze  (2  juillet  1898).  Discours.  Liège,  1898;  extr. 
in-18(3  p.). 

Errera  [L.).  Sommaire  du  cours  d'éléments  de  botanique 
pour  la  candidature  en  sciences  naturelles.  Bruxelles,  1898; 
in-8°  (vii-140  p.). 

Thomas  (P.).  Bemarques  critiques  sur  les  œuvres  philo- 
sophiques d'Apulée.  Bruxelles,  1898;  extr.  in-8"(22  p.). 

Du.  Caju  (Marie).  Le  livre  de  l'épargne  et  de  la  pré- 
voyance. Bruxelles,  s.  d.;  in-18  (212  p.). 

—  Soyez  prévenants.  Lectures.  Frameries,  s.  d.;  pet.  in-8" 
(112  p.). 

—  De  l'éducation  delà  prévoyance.  Bruxelles,  s.  d.,  pet. 
in-8«(16p.). 


(  4.78  ) 

Du  Cajii  {Marie).  Arithmétique  de  l'épargne  et  de  la 
prévoyance.  Frameries,  s.  d.,  pet.  in-8°  (164  p.). 

Faider  {Alfred).  Du  serment.  Discours  prononcé  à  l'au- 
dience de  rentrée  de  la  Cour  d'appel.  Liège,  1898;  in-8" 
(46  p.). 

Gaillard  {Arthur).  Le  Conseil  de  Brabant.  Histoire.  Orga- 
nisation. Procédure.  Tome  I"'"  :  Histoire.  Bruxelles,  1898; 
in-4"  (vi-492  p.). 

Jorissenne  {Le  /)■■  G.).  Où  et  comment  il  faut  bâtir  les 
sanatoria  dans  les  régions  accidentées  de  moyenne  altitude. 
Rapport  lu  au  V*  Congrès  international  d'hydrologie 
médicale,  de  climatologie  et  de  géologie  de  Liège.  1898; 
in-8°  (13  p.). 

Bollandistes  {Les).  Bibliotheca  hagiographica  latina  anti- 
que et  mediae  aetatis,  fasc.  1.  Bruxelles,  1898. 

État  Indépendant  du  Congo.  Annales  du  Musée  du  Congo. 
Série  1,  Botanique.  Illustration  de  la  flore  du  Congo,  par 
Ém.  De  Wildeman  et  Th.  Durand,  tome  !«'•,  fasc.  1.  1898  ; 
in-4». 

Archives  de  biologie,  tome  XV,  3. 

Office  du  Trayai/.  Annuaire  de  la  législation  du  travail. 
1897. 

Ministère  de  l'Intérieur.  Annuaire  statistique  de  la  Bel- 
gique. 1897. 

Charleroi.  Société  paléontologique  et  archéologique.  Docu- 
ments et  rapports,  tome  XXII.  1898. 


Allemagne  et  Autriche-Hongrie. 

Iéna.  Medicinisch-naturwissenschaftlicher   Verein.    Denk- 
schriften.  Band  VI,  VII,  VIII.  1897-1898;  5  cah.  in-4». 
Bvi>KPEST.Statistisches  Bureau.  Publications,  XX V-XX VIII, 


(  479  ) 
1898.  Statistisches  Jahrbuch    der    Stadt   Budapest.   1894- 
Ï896. 

Ratisbonne.    Naturwisseuschaftlicher    Verein.    Bericlite, 
Heft  VI.  1896-1897. 

KixGEWvm. :\atiirhistonscliesLandes-Museum.  Festschrift 
zum  50  jâlirigen  Bestehen  des  Muséums.  1898. 

WiESBADEN.  Aassauischer  Verein  fur  Naturkunde.  Jalir- 
gang51.l898. 

Halle.  Verein  fur  Erdkunde.  Mitteilungen.  1898. 


France. 

Henault  (B.).  Sur  les  organismes  des  cannels.  Paris,  1898; 
2  extr.  in-8"  (7  et  6  p.). 

Reiiaull  {B.)  et  Boche  {A.).  Notice  sur  la  constitution  des 
ligniles  et  les  organismes  qu'ils  renferment.  Autun,  1898; 
extr.  in-8"  (39  p.). 

Lefèvre-Pontalis  (Antoine).  Les  élections  du  Reichstag. 
Paris,  1898;  in-8'>  (27  p.). 

Serrure  (/i.).  Jetons  rares  ou  inédits.  Paris,  1898;  extr. 
in-8^  (3  p.). 

Morgan  [J.  de).  Compte  rendu  sommaire  des  travaux 
archéologiques  exécutés  du  3  novembre  1897  au  l^''  juin 
1898.  Paris,  1898;  pet.  in-8«  (90  p.). 

Pascmid  [Henri).  Les  droits  des  femmes  dans  l'association 
conjugale.  Paris,  1898;  in-8°  (60  p.). 


Grande-Bretagne  et  Colonies  britanniques. 

Markham  {Sir  Cléments).  Antarctic  exploration  :  A  plea 
fora  national  expédition.  Londres,  18^8;  in-8°  (15  p., carte). 

Basliforlh  {Francis).  Replica  di  Krupp  alla  protesta  del 
signor  Bashforth.  Cambridge,  1898;  in-S"  (39  p.). 


(  480  ) 

Greenwich.  Royal  Observatory.  Observations  and  results, 
1895. 

Cape  of  Good  Hope.  Royal  Observatory.  Results  of  meri- 
dian  observations  of  stars,  made  in  the  years  1892  to  189o. 
In-4''. 

—  Annals,  vol.  IV.  1897;  in-4°. 

Ottawa.  Société  royale  du  Canada.  Mémoires,  t.  lil,  1897. 

Calcutta.  Meteorological  Department.  Hainfall  of  India, 
1896.  In-4». 


Pays   divers. 

Leyue.  Physiologisch  laboratorinni  der  Universiteil.  Onder- 
zoekingen,  'i^^  reeks,  III  (Einthoven). 

San  Fernando.  Almanaque  nautico  para  1900. 

Stockholm.  K.  Svenska  Vetenskaps-Akademien.  llandlin- 
gar,  Band   XXX,  1897-1898  ;  in-4". 


»oe»090< 


BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES 


DES 


Lettres  et  des  Beaux-Arts  de  Belgique. 

1898.  —  IN°  i2. 


€I.ASI«ii:    DKS    iSClKIVrR». 


I 


Séance  du  3  décembre  1898. 

M.  Éd.  Dupont,  directeur. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  W.  Sprlng,  vice-directeur  ;  le  baron 
Edm.  de  Selys  Longchamps,  G.  Dewalque,  Brialmont, 
Éd.  Van  Beneden,  C.  Malaise,  ¥.  Folie,  F.  Plateau, 
Fr.  Crépin,  J.  De  Tilly,  Ch.  Van  Bambeke,  Alfr.  Gilkinet, 
G.  Van  der  Mensbrugghe,  L.  Henry,  M.  Mourlon, 
P.  Mansion,  P.  De  Heen,  C.  Le  Paige,  Ch.  Lagrange, 
F.  Terby,  J.  Deruyts,  Léon  Fredericq,  J.-B.  Masius, 
J.  Neuberg,  A.  Lancaster,  membres;  Ch.  de  la  Vallée 
Poussin,  associé;  A. -F.  Benard,  L.  Errera  et  P.  Fran- 
eotte,  correspondants. 

O*"*    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  55 


(  482  ) 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'Inlérieur  et  de  l'Instruction  publique 
soumet  à  l'avis  de  la  Classe  deux  requêtes  par  lesquelles 
MM.  P.  Francotte,  correspondant  de  l'Académie  et 
professeur  à  l'Université  de  Rruxelles,  et  Louis  Quer- 
ton,  lauréat  de  l'Académie  royale  de  médecine,  sollicitent 
de  pouvoir  occuper  en  1899  la  table  belge  du  laboratoire 
de  zoologie  du  D""  Dobrn,  à  Naples. 

—  Renvoi  à  MM.  Éd.  Van  Reneden  et  Ch.  Van  Ram- 
beke. 

—  L'Académie  impériale  militaire  de  médecine  de 
Saint-Pétersbourg  prie  l'Académie  de  bien  vouloir  s'as- 
socier aux  solennités  de  son  centenaire,  qui  aura  lieu  le 
18  (50)  décembre  de  cette  année. 

Une  lettre  de  félicitations  sera  adressée  par  M.  le  Secré- 
taire perpétuel  à  celte  institution. 

—  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  envoie,  pour  la  biblio- 
thèque de  l'Académie,  un  exemplaire  des  ouvrages  sui- 
vants : 

Annales  delà  Société  scientifique  de  Briixelles^^i^  année, 
1896-1897; 

Bulletin  du  Cercle  des  naturalistes  de  Uw/,  1898, 
n"'  l-!2.  —  Remerciements. 

—  M.  le  Ministre  de  l'Agriculture  adresse  un  exemplaire 
des  Diagrammes  des  variations  du  niveau  de  la  mer  à 
Oslende,  en  1897.  —  Remerciements. 


(483  ) 

—  Hommages  d'ouvrages  : 

4°  Contributions  à  l'histoire  de  la  constitution  de  l'œuf  : 
m.  Recherches  sur  l'oocyte  de  Pholcus  phalangioïdes 
Fuessl.;  par  Ch.  Van  Bambeke; 

2"  Sur  les  propriétés  fondamentales  des  liquides;  par 
G.  Van  der  Mensbriigghe  (présenté  par  l'auteur)  ; 

5"  Travaux  publiés  à  foccasion  du  Congrès  national 
dlu/gicnc  et  de  climatologie  médicale  de  la  Belgique  et  du 
Congo,  tenu  à  Bruxelles  du  9  au  1 4  août  4897,  sous  les 
auspices  de  la  Société  royale  de  médecine  publique  (pré- 
senté par  M.  Lancaster); 

4°  L'homme  et  le  singe;  par  le  marquis  deNadaillac: 
associé  de  l'Académie  ; 

5"  liec/urches  de  chimie  et  de  phi/siologie  appliquées  à 
ragriculiure,  tome  III;  par  A.  Pelermann  (présenté  par 
M.  Malaise); 

6"  Annales  du  Musée  du  Congo,  12^  série  :  Zoologie, 
tome  V',  fasc.  1  ;  par  G. -A.  Boulenger  (présenté  par  l'État 
Indépendant  du  Congo)  ; 

1°  Mémoire  analytique  sur  la  théorie  de  Laplace  rela- 
tive au  phénomène  du  flux  et  du  reflux  de  la  mer^  par 
Eueène  Ferron.  —  Remerciements. 

Les  notes  bibliographiques  lues  par  MM.  Van  der 
Mensbriiggbe,  Lancaster  et  Malaise  figurent  ci-après. 

—  Ti'avaux  manuscrits  renvoyés  à  l'examen  : 

Sur  la  luminescence  des  gaz;  par  A.  do  Hemptinnc.  — 
Commissaires  :  MM.  De  Heen  et  Van  der  Mensbrugghe: 

Sur  la  cause  de  l\iccélération  séculaire  du  mouvement 
r/e/rt  L?nif -parA.  Jouveneau.  —  Coriimissaires  :  MM.  Folie, 
Lagrange  et  Terby; 

Mémoire  énonçant  et  démontrant  un  nouveau  principe 


(  484  ) 

de  mécnniqne;  par  Eugène   Ferroii.  —  Commissaires  : 
MM.  DeTillyet  Mansion; 

Un  nouveau  détail  de  structure  du  protoplasme  des  cel- 
lules nerveuses  (état  spiréniateux  du  protoplasme)  ;  travail 
du  laboratoire  de  neurologie  de  l'Université  de  Louvain  ; 
par  Ch.  Nelis.  —  Commissaires  :  MM.  Éd.  Van  Beneden 
et  Van  Bambeke. 


NOTES    BIBLIOGRAPHIQUES. 

J'ai  l'honneur  d'oftrir,  à  titre  d'hommage  à  l'Académie, 
un  exemplaire  de  ma  note  intitulée  :  Sur  les  propriétés 
fondamentales  des  liquides.  Dans  cette  note,  qui  a  tait 
l'objet  d'une  conférence  donnée  aux  ingénieurs  sortis  des 
Ecoles  spéciales  de  Gand,  j'expose  brièvement  la  suite 
des  raisonnements  au  moyen  desquels  j'ai  fait  dériver  de 
l'élasticité  des  liquides  l'énergie  potentielle  des  couches 
superficielles  ainsi  que  leur  évaporation  incessante. 

Qu'il  me  soit  permis  de  rapporter  ici  l'un  des  faits  les 
plus  curieux  que  je  cite  à  l'appui  de  ma  thèse  :  c'est  une 
observation  faite  en  18G2  par  mon  ancien  élève  M.  Jos. 
Saurel,  major  d'artillerie  ;  en  voici  l'exposé  textuel  par 
l'auteur: 

(c  Je  m'étais  avisé  de  vouloir  remonter  en  chaloupe  le 
»  courant  que  la  levée  des  barrages  occasionne  au  pont 
))  des  Chaudronniers,  à  Gand.  Cette  levée  se  faisait  le 
»  samedi,  mais  alors  la  chute  était  trop  forte,  et  je  savais 
»  par  expérience  qu'il  fallait  attendre  au  moins  jusqu'au 
»  lundi  pour  effectuer  le  passage  ;  c'est  ce  qui  explique 
»  que  j'ai  retenu  le  jour  (un  lundi)  de  ma  petite  aven- 
))  ture. 


(  4.8o  ) 

)>  Mon  embarcation  avait  de  6  à  7  mètres  de  longueur 
»  sur  i"\75  dans  sa  plus  grande  largeur;  elle  était  bien 
))  taillée  à  l'avant  et  bien  dépouillée  à  l'arrière.  J'y  étais 
»  seul,  et  je  manœuvrais  à  la  godiMe  (une  seule  rame  à 
))  l'arrière  agissant  en  queue  de  poisson).  L'avant  de  la 
»  cbaloupe  s'élevait  donc  fortement  et  l'arrière  plongeait. 

»  A  celte  époque,  les  culées  du  pont  des  Chaudron- 
»  niers  étaient  raccordées  en  amont  par  deux  surfaces 
»  courbes  aux  côtés  du  cours  d'eau  ;  aujourd'hui  ce 
»  raccordement  est  obtenu  par  deux  plans  verticaux 
))  obliques.  Les  dimensions  de  l'ouverture  sont  restées  à 
»  peu  près  ce  qu'elles  étaient  alors  (8  mètres  de  lon- 
»  gueur  du  pont  et  9  de  largeur).  J'étais  parvenu  à  faire 
»  dépasser,  par  l'extrémité  de  ma  chaloupe,  de  1  mètre 
»  environ  l'entrée  amont  du  pont,  lorsque  je  m'aperçus 
»  que  le  courant  me  laissait  parfaitement  immobile  dans 
))  l'axe  du  pont.  Je  suis  resté  là  près  d'un  quart  d'heure, 
))  puis,  après  m'être  fait  dériver,  j'ai  répété  l'expérience 
))  à  plusieurs  reprises.  » 

Voilà  un  fait  qui  mérite  assurément  de  fixer  l'attention 
des  ingénieurs.  Il  prouve,  selon  moi,  que  l'eau  sous  le 
pont  est  plus  fortement  comprimée  que  les  couches  de 
même  profondeur  en  amont  ou  en  aval. 

G.  Van  uer  Mensbrugghe. 


J'ai  l'honneur  d'offrir  à  la  Classe,  au  nom  de  la  Société 
royale  de  médecine  publique,  un  exemplaire  des  travaux 
publiés  à  l'occasion  du  Congrès  national  d'hygiène  et  de 
climatologie  médicale  de  la  Belgique  et  du  Congo,  qui 
s'est  tenu  à  Bruxelles  du  9  au  14  août  1897,  sous  les 
auspices  de  ladite  Société. 


(  486  ) 

Ces  travaux  comprennent  : 

1"  Le  compte  rendu  des  séances  du  Congrès; 

2°  Le  Rapport  sur  la  climatologie  belge; 

5°  Le  Rapport  sur  la  climatologie,  la  géologie  et  la 
situation  sanitaire  de  l'État  du  Congo. 

Ils  forment  trois  volumes  comptant  en  tout  1200  pages 
grand  in-8°. 

La  partie  la  plus  étendue  (GoO  pages)  est  celle  qui  a  trait 
au  Congo;  elle  est  le  fruit  des  études  d'une  Commission 
nommée  dès  octobre  1893  dans  le  sein  de  la  Société,  et 
qui,  outre  un  certain  nombre  de  documents  imprimés,  a 
eu  à  sa  disposition  une  quantité  considérable  de  docu- 
ments inédits,  obtenus  grâce  à  l'obligeance  du  Gouver- 
nement de  l'État  Indépendant,  de  la  Compagnie  du 
chemin  de  fer,  des  Directeurs  des  missions  cbrétiennes, 
des  chefs  de  poste,  médecins  et  agents  divers  disséminés 
sur  le  vaste  territoire  de  l'État.  Le  précieux  concours  de 
tous  ces  collaborateurs  donne  au  volume  consacré  au 
Congo  un  intérêt  particulier  d'actualité  et  d'originalité. 
Le  livre  comprend  les  chapitres  suivants  : 

I.  Le  climat  méléorique,  par  A.  Lancasler  et  E.  Meu- 
leman  ; 

IL  La  constituliot  du  sol,  par  J.  Cornet; 

m.  Morbidité,  mortalité,  statistique,  par  les  D"  A. 
Bourguignon,  G.  Dryepondt  et  Ch.  Firket; 

IV.  Adaptation,  acclimatement  et  hygiène,  par  les 
mêmes; 

V.  Conditions  physiques,  climalologiqucs  et  hygiéniques 
des  principales  stations,  missions,  etc. 

Ce  dernier  chapitre,  auquel  ont  collaboré  les  six  mem- 
bres de  la  Commission,  est  le  plus  développé.  Il  consti- 
tue un  véritable  répertoire  de  données  relatives  à  l'état 
physique  et  sanitaire  du  Congo. 


(  487  ) 

J'ai  l'honneur  de  joindre  à  ces  divers  ouvrages,  en 
mon  nom  et  au  nom  de  M.  E.  Meuleman,  vétérinaire  au 
!«•■  régiment  de  guides,  ancien  commissaire  du  district 
du  Staniey-Pool,  un  exemplaire  du  Rapport  traitant 
exclusivement  du  climat.  Ce  rapport  est  accompagné  de 
nombreux  diagrammes  météorologiques. 

A.  Lancaster. 


Le  tome  III  des  Recherches  de  chimie  et  de  physiologie 
appliquées  à  C agriculture  {!),  que  j'ai  l'honneur  de  pré- 
senter au  nom  de  M.  Petermann,  fait  suite  aux  deux 
volumes  remis  antérieurement  à  l'Académie.  Il  contient 
l'ensemble  des  travaux  que  M.  Petermann  et  ses  colla- 
borateurs de  la  Station  agronomique  de  Gembloux  ont 
exécutés  en  vue  de  rassembler  des  matériaux  destinés  à 
être  utilisés  pour  la  carte  agronomique  de  la  Belgique. 

Ce  volume  comprend  les  chapitres  suivants  : 

I.  L'exploration  chimique  du  sol,  dans  ses  relations  avec 
la  carte  agronomique,  accompagnée  de  considérations  inté- 
ressantes sur  cette  dernière  ; 

II.  La  méthode  suivie  à  la  station  agronomique  dans 
l'analyse  des  terres  ; 

III.  L'analyse  complète  de  cent  cinquante-cinq  sols  arables 
et  sols  vierges  du  pays  ; 

IV.  L'analyse  de  substances  utiles  à  l'agriculture  :  cal- 
caires, marnes,  sables,  et  une  étude  complète  sur  les  tourbes 
de  l' Hertogenwald  et  de  la  foret  de  Freyr  ; 

V.  Résumé  et  discussion  des  premiers  résultats  obtenus. 
Dans  ce  dernier  chapitre,  où  l'auteur  expose  quelques 

(1)  Bruxelles,  Mayolez  et  Audiarte;  —  Paris,  Masson. 


(  488  ) 
considérations  ou  déductions  nouvelles,  je  signale  parti- 
culièrement :  la  détermination  minéralogique  des  débris 
minéraux  faite  par  mes  soins;  le  paragraphe  traitant  du 
pouvoir  absorbant  des  terres  pour  l'eau  après  un  mouil- 
lage complet,  et  de  la  proportion  d'eau  retenue  après  une 
dessiccation  à  l'air  et  sans  chaleur  artificielle,  et  les  pages 
consacrées  au  taux  des  principaux  éléments  fertilisants  : 
azote,  potasse,  chaux,  magnésie  et  acide  phosphorique. 

Au  point  de  vue  géologique,  M.  Petermann  est  arrivé 
à  cette  conclusion  intéressante  que  le  rapport  de  l'argile 
au  sable  est  dans  le  limon  très  sensiblement  comme  1  :  5. 
Cette  constante  est  établie  par  l'analyse  de  dix-huit  échan- 
tillons de  limon  prélevés  entre  les  deux  points  extrêmes  : 
Acren  et  Tongres,  et  en  éliminant  dans  le  calcul  de  la 
composition  du  limon  primitif,  le  taux  de  la  matière 
organique  dont  la  présence  est  une  conséquence  de  la 
mise  en  culture.  Ce  qui  caractérise  encore  le  limon,  en 
dehors  de  sa  richesse  en  argile,  c'est  l'extrême  ténuité 
du  sable  qu'il  contient,  dont  98  "/o  passent  au  tamis  de 
2/^Q  de  millimètre,  produit  qu'il  convient  par  conséquent 
de  dénommer  «  poussiéreux  ». 

Au  point  de  vue  agronomique,  c'est-à-dire  de  l'utilité 
de  l'analyse  chimique  des  terres,  l'auteur  établit  par  les 
dosages  de  l'acide  silicique  soluble  une  constatation  à 
laquelle  il  attache  une  grande  importance  et  qu'il  résume 
dans  les  lignes  suivantes  : 

«  Cette  constatation  repousse  la  critique  formulée 
»  depuis  longtemps  à  l'adresse  du  procédé  employé  dans 
»  l'analyse  des  terres  :  les  acides  minéraux  mettent  en 
«  dissolution  non  seulement  les  principes  nutritifs  conte- 
»  nus  dans  les  combinaisons  devant  être  considérées 
))  comme  facilement  attaquables  par  les  racines  et  les 


r  489  ) 

»  principes  nutritifs  à   l'état  d'absorption   pris  dans  le 

»  sens  de  Liebig,  mais  aussi  les  bases  engagées  dans  des 

»  silicates  assez  réfractaires  à  la  décomposition  par  voie 

»  naturelle.  ->■> 

«  Le  cliimiste  n'ayant,  pour  ainsi  dire,  jamais  déter- 

»  miné  le  taux  de  silice  soluble  et  ne  s'étant  que  rare- 

»  ment  rendu  compte  de  la  quantité  énorme  de  silicates 

))  restant  dans  le  résidu  insoluble  de  l'attaque  chlorby- 

»  drique,  on  comprend  que  la  critique  que  nous  venons 

))  de  mentionner  n'a  pu  être  réfutée  et  a  passé  finalement 

»  à  l'état  d'axiome.   Mais  nos  analyses  prouvent  absolu- 

»  ment  le  contraire  :  la  proportion  d'acide  silicique  dis- 

))  sous  dans  l'acide  chlorhydrique  est  bien  loin  d'être 

»  assez  élevée  pour  que  les  bases,  dissoutes  en  même 

»  temps,  puissent  être  considérées  comme  préexistantes 

»  dans  le  sol  à  l'état  de  silicates.  »  C.  Malaise. 


JUGEMENT  DU  CONCOURS  ANNUEL  (1898). 


SCIENCES    llIATHÉIIIj%TIQljeS    ET    PHYSIQUES. 

Trois  mémoires  avaient  été  reçus  en  réponse  à  la 
troisième  question  du  programme  des  sciences  mathéma- 
tiques et  physiques  :  Apporter  une  contribution  importante 
à  l'élude  des  correspondances  (Verwandtschaften)  que  l'on 
peut  établir  entre  deux  espaces. 

Ils  portent  pour  devises  : 

N°  1.  Geometry  is  hard  (J.-H.-S.  Smith). 

N"  2.  Nuîneri  regunt  lociim. 

N°  3.  Itinera  ad  verum. 


(  490  ) 
Vu  l'extension  considérable  de  ces  trois  manuscrits 
reçus  le  1"'  août,  date  du  délai  réglementaire  pour  leur 
remise  à  l'Académie,  et  l'impossibilité  pour  MM.  les  Com- 
missaires de  présenter  dans  la  séance  du  15  décembre 
courant  leurs  rapports,  en  vue  de  mettre  la  Classe  à  même 
de  se  prononcer  sur  leurs  conclusions,  le  jugement  en  ce 
qui  concerne  ces  trois  mémoires  ne  sera  prononcé  qu'ulté- 
rieurement. 


«OIENCKS    1VAT1JREI.I.BS. 

Il  est  donné  lecture  des  rapports  suivants  : 

1"  De  MM.  Errera,  Gilkinet  et  Crépin,  sur  le  mémoire 
portant  la  devise  :  L'aclivilé  des  plantes  carnivores  est,  en 
dernière  anali/se,  une  question  d'azole  (Morren),  envoyé 
en  réponse  à  la  première  question  du  programme  pour  les 
sciences  naturelles  :  On  demande  de  nouvelles  recherches 
macrochimiques  et  microchimiques  sur  la  digestion  chez  les 
plantes  carnivores  ; 

2°  De  MM.  Plateau,  Éd.  Van  Beneden  et  Van  Bam- 
beke,  sur  le  mémoire  portant  la  devise  :  La  phijsiologie 
des  Invertébrés  est  presque  tout  entière  à  l'état  de  deside- 
ratum (L.  Fredericq),  envoyé  en  réponse  à  la  deuxième 
question  :  On  demande  des  recherches  phtjsiologiques  nou- 
velles sur  une  fonction  encore  mal  connue  chez  un  animal 
invertébré. 

La  Classe  se  prononcera  sur  les  conclusions  de  ces  rap- 
ports dans  sa  séance  du  jeudi  15  décembre. 


(  491   ) 

D'après  une  décision  prise  par  la  Classe  en  1897,  les 
Œuvres  complètes  de  J.-S.  Stas  sont  olfertes  chaque  année 
aux  docteurs  en  sciences  chimiques  qui  ont  obtenu  leur 
diplôme  légal  avec  la  plus  grande  distinction. 

Conformément  à  cette  résolution,  ces  volumes  seront 
remis  celte  année  à  MM.  Goldschmidt  et  Jules  Denis, 
élèves  de  l'Université  de  Bruxelles,  dans  la  séance 
publique  de  la  Classe  fixée  au  vendredi  16  décembre 
courant. 


RAPPORTS. 


MM.  Dewalque,  Renard  et  Malaise  donnent  lecture 
de  leur  rapport  sur  la  proposition,  adressée  par  le  Con- 
grès géologique  international  de  Saint-Pétersbourg  de 
1897,  d'associer  la  Belgique  à  la  création  d'un  «  Institut 
flottant  international  ». 

—  Renvoi  à  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  et  de  l'In- 
struction publique. 


Sur  quelques  dérivés  chlorobromés  en  C^;  par  Fréd.  Swarts, 
répétiteur  de  chimie  générale  à  l'Université  de  Gand. 

ttapporl  tt»  .9M,   tf.  Sitfing,  in'entifi-  coiitittiMsniff. 

«  Ce  travail  est  une  étude  des  produits  de  la  réaction 
du  pentachlorure  d'antimoine  avec  l'élhylène  tribromé  : 
C^HBrs. 


(  492  ) 

Il  se  forme  [U'incipalement  un  dichlortribromélliane 
C^HBrsCl^,  isomère  avec  un  produit  déjà  connu,  el 
secondairement  le  monochlortétrabrométhane  Cc2Br4CIH 
et  le  tribromchloréthylène  C^BrsCl.  Le  premier  de  ces 
produits  est  liquide,  il  bout  à  1  il2°  sous  50  millimètres, 
réagit  avec  la  potasse  pour  donner  le  dichlordibrométhy- 
lène  C^Cli^Br^  ;  avec  le  zinc  en  poudre  et  l'alcool,  il  donne 
le  dicblorbrométhylène  CoHBrCla;  il  se  décompose  à 
chaud  pour  passer  à  l'état  d'hexachlorure  (de  Julin), 
s'oxyde  à  l'air  et  donne  avec  le  brome  un  produit  d'addi- 
tion :  C2Br4CK2. 

J'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  Classe  l'insertion  de  la 
note  de  M.  Fréd.  Swarts  dans  le  Bulletin  de  la  séance.  » 

Cette  proposition,  à  laquelle  se  rallie  M.  Henry,  second 
commissaire,  est  adoptée  par  la  Classe. 


Contribution  à  l'étude  de  l'oxydation  des  éthylènes  halogè- 
nes; par  Fréd.  Swarts,  répétiteur  de  chimie  générale 
à  l'Université  de  Gand. 

Hapfiot't  tlf^  m.  II'.  Sif'iiiff,  pè'tfinieê'  cotHtniaaaiâ'». 

«  Dans  un  travail  antérieur  (4),  M.  Fréd.  Swarts  avait 
constaté  l'oxydation  du  dibromfluoréthylène  symétrique 
et  son  passage  à  l'état  de  fluorure  dibromfluoracétique; 
aujourd'hui,  il   a  tenu  à  vérifier  si  ce  l'ait  curieux  et 


(1)  Bull,  de  l'Acad.  roy.  de  Belgique,  3^  série,  t.  XXXV,  p.  849. 


(  493  ) 
important  s'observait  aussi  cliez  d'autres  dérivés  halo- 
gènes de  l'éthylène. 

A  cette  fin,  il  a  soumis  à  l'action  de  l'oxygène  ou  de 
l'ozone,  selon  le  cas,  les  dérivés  halogènes  de  l'éthylène 
qu'il  a  découverts  lui-même  ainsi  que  certains  dérivés 
déjà  connus.  Ses  recherches  ont  permis  de  constater 
que  : 

i'^'  Le  tribromfluorélhylène  CBr^  :  CBrFl  donne,  comme 
produit  principal  de  la  réaction,  un  bromure  acide,  à 
l'aide  duquel  l'auteur  a  pu  préparer  du  tribromacetate 
d'éthyle  ; 

2"  Le  dibromfluoréthtjléne  CBrg  :  CHFl  s'oxyde  facile- 
ment et  donne  nettement  du  bromure  de  fluorbromacélyle 
qui  a  servi  à  faire  l'éther  correspondant  :  CHFlBr  : 
CO2.C2H5; 

3"  Le  perchloréthylène  que  Demole  a  reconnu  réfrac- 
taire  à  l'air,  s'oxyde  au  contact  de  l'ozone  et  passe  lente- 
ment à  l'état  de  chlorure  de  trichloracélyle ; 

A'°  Le  tétrabrométhyléne  s'oxyde  aussi  par  l'action  de 
l'ozone,  mais  plus  difljcilement  encore  que  le  précédent; 

5"  Le  dichlordibrométhylène  symétrique  s'oxyde  très 
difficilement  au  contact  de  l'ozone;  il  se  comporte  néan- 
moins comme  le  dilluordibrométhylène,  en  ce  sens  que 
c'est  l'halogène  le  plus  actif  qui  demeure  uni  au  groupe 
CO; 

0°  Le  dibrométhylène  symétrique  CHBr  -  CHBr  s'oxyde 
difficilement  en  donnant  du  bromure  de  bromacétyle  mêlé 
d'aldéhyde  dibromée  et  de  tétrabrométhane  dissymétrique  : 
CBrs  -  CHsBr. 

L'auteur  termine  son  travail  par  une  discussion  des  pro- 
cédés qui  pourraient  expliquer  l'oxydation  des  éthylènes 


[  494  ) 

halogènes,    discussion    qu'il    n'est   guère    possible    de 
résumer  ici  sans  l'altérer  dans  sa  clarté. 

Je  propose  avec  plaisir  l'insertion  du  travail  de 
M.  Fréd.  Swarts  dans  le  Bulletin  de  la  séance,  car  il  nous 
apporte  des  faits  complétant  heureusement  nos  connais- 
sances sur  les  dérivés  halogènes  du  carbone.  » 


Ra/ii'Ofl  tim    m.   Ijoni»  Hvttfy,   nccottil  connni*»aiÈ'f. 

a  Le  mémoire  de  M.  Fréd.  Swarts,  dont  M.  Spring 
vient  de  rendre  compte,  concerne  un  des  faits  les  plus 
étranges  et  partant  les  plus  curieux  de  l'histoire  générale 
des  composés  non  saturés. 

Alors  que  l'éthylène  se  combine  si  aisément  et  si 
vivement  avec  les  corps  halogènes,  il  manifeste,  du  moins 
dans  les  conditions  ordinaires,  une  inertie  parfaite  vis-à- 
vis  de  l'oxygène,  qui  est  cependant  un  élément  négatif 
puissant  et  doué  d'affinités  si  faciles  à  éveiller. 

Cette  inertie  cesse  à  la  suite  de  la  présence  des  corps 
halogènes  dans  la  molécule  de  cet  hydrocarbure  fonda- 
mental. Il  y  a  longtemps,  en  eftet,  que  l'on  a  signalé  des 
cas  d'addition  de  l'oxygène  à  divers  dérivés  haloïdes  de 
l'éthylène  (*) .  Cette  question  a  attiré  autrefois  mon 
attention  et  fait  l'objet  de  quelques  recherches  de  ma 
part,  en  ce  qui  concerne  Vcllnjléne  Irichloro-éthyl-oxylé 
CI-Co(OC.)H^)  (**).  Je  constate  avec  satisfaction  la  préfé- 


(*)  Demole,  Bulletin  de  la  Société  chimique  de  Berlin,  l.  XI,  pp.  316 
et  1307  (année  1878). 

(**)  Bulletin  de  la  Société  chimique  de  Berlin,  t.  XII,  p.  1839 
(année  1870j. 


(  495  ) 

rence  que  manifeste  M.  Svvarts  pour  la  manière  que  j'ai 
proposée  de  comprendre  celle  réaction  ;  si  le  mécanisme 
en  est  simple  en  apparence,  au  fond  il  est  complexe,  si 
l'on  tient  compte  de  la  nature  des  produits,  si  éloignés  de 
l'éthylène,  que  fournit  cette  oxydation.  Le  temps  n'a  fait 
que  me  confirmer  dans  ma  manière  de  voir. 

Je  ne  crois  pas  inutile  d'ajouter  qu'au  cours  de  mes 
reclierches  sur  les  dérivés  haloïdes  de  l'éthane,  j'ai  mis 
au  jour  deux  éthylènes  halogènes,  susceptibles  de  s'ajou- 
ter aussi  à  l'oxygène,  à  savoir  les  éthylènes  chloro-iodé 
CH2=CC1I  et  bromo-iodé  CH2  =  CBrI  dissymétriques  (*). 
Le  premier  de  ces  corps,  qui  renferme  les  deux  termes 
extrêmes  de  la  triade  halogénique  et  qui  s'oxyde  aisément, 
mériterait  certainement  d'être  examiné  sous  ce  rapport. 

Je  ne  puis  non  plus  m'empêcher  de  faire  remarquer, 
à  l'occasion  de  cette  question  générale  de  l'oxydabilité 
des  composés  non  saturés,  que  les  dérivés  haloïdes  de 
l'acétylène,  du  moins  certains  d'entre  eux,  tels  que  l'acé- 
tylène monochloré  CH  =  CCI  et  l'acétylène  monobromé 
CHs^CBr,  manifestent  pour  l'oxygène  une  affinité  bien 
plus  considérable  encore  que  les  dérivés  éthyléniques. 
Cette  affinité  est  assez  intense  pour  rendre  ces  composés 
spontanément  inflammables  à  l'air.  Je  ne  doute  pas  qu'il 
ne  soit  possible,  par  un  dispositif  expérimental  conve- 
nablement approprié,  de  modérer  l'intensité  de  cette 
oxydation,  de  manière  à  ne  pas  briser  le  noyau  C=C. 
Les  produits  de  celte  réaction  me  paraissent  devoir  être 
curieux  à  examiner. 


(*)  Comptes  rendus,  t.  XGVIIÎ,  p.  741  (année  1884). 


(  490  ) 

C'est  là  certainement  une  question  aussi  intéressante 
que  neuve  à  résoudre. 

Je  ne  dois  pas  insister  à  présent  sur  la  valeur  que  j'at- 
tache à  cette  nouvelle  communication  de  M.  Fréd.  Swarts 
et  le  vif  intérêt  avec  lequel  j'en  ai  pris  connaissance.  Je 
me  joins  volontiers  à  mon  savant  confrère  et  collègue 
pour  en  proposer  à  l'Académie  l'insertion  dans  le  Bulle- 
tin de  ses  séances.  »  —  Adopté. 


Sur  quelques  propriétés  des  polygones  inscrits  aux  courbes 
gauches;  par  Fr.  Deruyts,  chargé  de  cours  à  l'Université 
de  Liège. 

«  J'ai  lu  avec  intérêt  le  nouveau  travail  de  M.  Fr.  De- 
ruyts. Il  contient  quelques  résultats  de  valeur,  application 
de  la  méthode  que  l'auteur  a  employée  avec  succès  à 
l'étude  des  courbes  et  surfaces  d'ordres  supérieurs. 

Je  propose  l'insertion  du  travail  de  M.  Fr.  Deruyts 
dans  le  Bulletin  de  la  séance.  » 

Cette  proposition,  à  laquelle  M.  Neuberg,  second  com- 
missaire, déclare,  dit-il,  se  rallier  volontiers,  est  adoptée 
par  la  Classe. 


497  ) 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 

^ur  l'oxydation  directe  de  Véthylène  trichloro-éthyl-oxylé 

(;i2C  =  a:iiU(:,iii,); 
par  Louis  Henry,  membre  de  l'Académie. 

Le  mémoire  de  M.  Swarls  :  Sur  l'oxydation  des  dérivés 
haloides  de  l'éthylène,  a  rappelé  mon  attention  sur  les 
recherches  que  j'ai  faites  autrefois  concernant  le  même 
objet,  en  ce  qui  regarde  Véthylène  trichloro-éthyl-oxylé 
CloC  =  GCl(OCA,). 

Voici  les  faits  que  j'ai  constatés  : 

Abandonnés  à  l'air  ordinaire,  dans  un  vase  largement 
ouvert,  tel  qu'une  capsule,  les  élhylènes  trichloro-mcthyl- 
oxylé  CLC=CCl(0CH3)  et  éthyl.-oxylé  CL2C  =  CCl{OC.>Hj5) 
jie  tardent  pas  à  devenir  acides  et  à  dégager  d'abondantes 
vapeurs  chlorhydriques.  Après  quelque  temps,  le  tout  se 
transforme  en  une  cristallisation  d'acide  oxalique.  Celui-ci 
est  l'aboutissant  final  de  l'action  simultanée  de  l'oxygène 
et  de  la  vapeur  d'eau  renfermés  dans  l'air. 

Les  choses  se  passent  autrement  avec  l'oxygène  sec. 
Véthylène  trichloro-éthyl-oxyl',  agité  avec  ce  gaz,  l'absorbe 
en  s'échauffant  sensiblement.  Il  se  U^ansforme  à  la  longue 
en  un  liquide  incolore,  d'une  odeur  suffocante,  fumant 
fortement  à  l'air  et  se  transformant  avec  l'eau  en  acide 
oxalique. 

5'"^    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  34 


(  498  ) 

Je  lis  dans  mon  journal  de  travail  que  j'ai  mis  en 
réaction  107  grammes  d'éthi/lène  irichloro-étkijl-oxijlé  pur. 
A  travers  cette  masse  liquide,  on  a  fait  passer,  en  un 
courant  lent,  16  litres  d'oxygène,  dont  une  partie  seule- 
ment a  été  absorbée. 

Il  est  utile  de  faire  remarquer  qu'une  molécule-gramme 
d'ethyléne  trichloro-cthyl-oxijlé  pèse  175.5  et  qu'un  atome- 
gramme  d'oxygène,  16  grammes,  mesure,  dans  les  con- 
ditions normales,  11  litres  165  centimètres  cubes. 

Sans  vouloir  revenir,  en  ce  moment,  sur  le  mécanisme 
de  cette  oxydation,  j'ai  déjà  dit  que  j'en  regardais  le 
produit  comme  constituant  le  chlorure  de  l'acide  chloro- 

Cl 

oxa/o-ymîçue  {*),  {HO j CO -C  <^^  „  ,  composé  analogue 

à  l'acide  oxalo-vinique  (HO) OC  -  C<^p  „  ,  que  j'avais 
fait  connaître  antérieurement  (**). 


OC  -  Cl 
Chlorure  de  chloro-oxalo-vinvlc       i 

•'      CloC  -  OC,H., 

OC  -  Cl 
—        d'oxalo-vinvie  i 

OC  ~  OCJL 


Après  l'absorption  de  l'oxygène,  ce  liquide  a  été  soumis 
à  la  distillation,  sous  la  pression  ordinaire.  Celle-ci  s'est 
opérée  sans  point  fixe.  Je  lis  dans  mes  notes  qu'elle  a 
commencé  vers  100°,  qu'une  bonne  partie  du  liquide  a 


O  Voir  Bericlite  (1er  deutschen  chomschen  Gcsdlscliafft,  t.  XII, 
p.  1838  (année  \^1^  ,  e\  Association  française  pour  U avancement  des 
sciences,  Compte  rendu  de  la  VIII^  session,  Montpellier,  1879,  p.  461. 

("  >  Comptes  rendus  de  l'Acad.  des  sciences  de  Paris,  t.  LXXIII.  p.  39 
(année  1871). 


(  499  ) 
passé  vers  440"  et  qu'à  la  fin  le  thermomètre  est  monté 
au  delà  de  200°.  Je  m'attendais  à  plus  de  constance  dans 
les  indications  thermométriques  et  j'avoue   que   cette 
variation  m'a  troublé  dans  mes  prévisions. 

Quoi  qu'il  en  fût,  la  portion  du  produit  qui  avait  passé 
vers  140°  a  été  analysée.  Voici  les  résultats  du  dosage  du 
chlore  : 


Substance. 

AgCl. 

Chlore  <>/«  (*). 

1 .   . 

.        0P^4M3 

Oe',9124 

55.0G 

II .   . 

.       0K^4i56 

Oe%9209 

55.27 

Le  chlorure  de  chloro-oœalo-vinyle 

OC -CI 

I 

cisC-or,H» 

renferme  55.61  %  de  chlore. 

L'accord  est  par  conséquent  satisfaisant. 

Ces  recherches  remontent  à  l'automne  de  1879.  J'en  ai 
entretenu  la  section  de  chimie  du  Congrès  de  l'Associa- 
tion française  pour  l'avancement  des  sciences,  au  mois 
d'août  1880  (**). 

Toutefois,  je  ne  me  suis  pas  décidé  à  livrer  ces  résultats 
à  la  publicité,  parce  que  je  me  proposais  d'y  revenir,  ne 
parvenant  pas  à  m'orienter  comme  je  le  désirais  dans 


(•)  Véthylène  tnchloro  éthylé  qui  avait  seKvi  à  cette  opération  était 
bien  pur.  Il  avait  bouilli,  sous  la  pression  ordinaire,  à  154-155"  et 
l'on  y  avait  trouvé  60  35  "/o  de  chlore,  alors  que  la  formule  CI2C 
=  CCUOCaHs)  en  demande  60.57. 

(**)  Compte  rendu  de  la  /A'e  session,  Reims,  1880,  p.  429. 


(  500  ) 

les  faits  constatés  pendant  la  distillation  du  liquide,  après 
l'absorption  de  l'oxygène. 

Au  milieu  d'autres  occupations,  j'ai  pendant  longtemps 
perdu  de  vue  cet  objet  de  recherches. 

Depuis  lors,  les  travaux  publiés  par  MM.  Anscbutz  (*) 
et  Fauconnier  (**)  sur  les  produits  de  la  réaction  de  PCI5 
avec  les  élhers  oxaliques,  m'ont  mis  à  même  de  com- 
prendre ce  qui  se  passe  dans  ces  circonstances. 

IJélher  chloro-oxalo-vinique  de  M.  Anscbutz  : 

OC  -  OC,Hb 

cioC-OQng' 

produit  direct  de  l'action  de  PCI5  sm'  l'éther  oxalique, 
bout,  sous  la  pression  de  10  millimètres,  à  SS^-SS".  On 
peut  en  inférer  que,  sous  la  pression  ordinaire,  ce  com- 
posé bout  ou  bouillirait  vers  485'',  sensiblement  au  même 
point  que  Yéther  oxalique  lui-même 

OC  -  OC^Hj 
I  , 

OC  -  OC.Hg 

(jui  bout  à  180". 

\! .  Anscbutz  a  constaté  encore  que  cet  éther  bichloro- 
oxaliquo,  soumis  à  l'action  de  la  cbaleur,  se  dédouble 

OC  -  OCjHs  OC  -  OC.Us 

I  =1  +     CJI.CI 

CloC  -  OCJL  OC  -  Cl 


(*)  LiehUfs  Annalcn  der  Chenue,  t.  CGLIV,  pj).  19  et  20  (année  1889). 
("j  Comptes  rendus,  etc.,  l.  GXIV,  p  122  (année  1892). 


(  501   ) 
en    chlorure    d'élliyle    et   chlorure    d'oxalo-vinyle    CM^O 
-  C0(0aH5),  bouillant  à  I5oM5G°. 

Si  l'on  rapproche  les  points  d'ébullition  de  ces  com- 
posés 

(C,H,0)OC -  COlOCallg)  Éb.     186' 

(Cjr,0)OC  -  CCK,f  OC.Hj)        Éb.    vers  185° 
(C.WsOjOC-COC!  Éb.     135"- 136" 

on  peut  légitimement  conclure  de  leur  comparaison  : 

a)  Que  le  remplacement  de  0  par  Cl^  dans  les  dérivés 
oxy-éthyliques  de  l'acide  oxalique  ne  modilie  pas  sensi- 
blement la  volatilité; 

b)  Que  la  transformation  du  composant  OC(OC2H5) 
oxy-élher  dans  ces  dérivés  en  composant  chlorure  acide 
OCCl,  abaisse  le  point  d'ébullition  de  oO"  environ. 

Pour  ce  double  motif,  je  suis  autorisé,  ce  me  semble, 
à  attribuer  au  chlorure  de  l'acide  chloro-oxalo-vinique 

CI,C  -  OC.Ils 

I 
OC-C!, 

qui  est,  selon  moi,   le  produit  réel  de  l'oxydation  de 
Vélhylène  Irichloro-ethyl-oxylé  Cl2C=  CC^OC^H^),   455°- 
140"  environ  comme  point  d'ébullilion,  la  même  volati- 
lité qu'au  chlorure  d'oxalo-vinyle  ClCO  -  C0{0C2Hg). 
D'autre  part,   le  chlorure  d'oxalyle  ClCO  -  COCl    de 


(  502  ) 
M.  Fauconnier,  produit  de  l'action  complète  de  PCI5  sur 
rélher  oxalique 

OC  -  OC2H5  Cl-C  -  OCJIs 

I  +    2PC1,     =         I  +    2P0CU 

OC  -  oCiiis  eu:  -  ocHs 

ClCO 
ClCO 

bout  vers  70°  {*). 

De  plus,  il  est  à  remarquer  que  ce  composé  renferme  à 
peu  près  la  même  quantité  centésimale  de  chlore  que  le 
chlorure  de  chloro-oxalo-vimjie  lui-même. 


Chlore  «/c. 

ClCO-CCI^lOCUj) 

55.GI 

ClCO  -  COCI 

55.90 

Tout  cela  étant,  voici  comment  s'explique,  à  mon  sens, 
la  distillation  du  produit  brut  de  l'oxydation  de  Véthylène 
trichloro-étlujl-oxylé. 


(*)  C'est  à  peu  près  le  point  d'ébullition  que  lui  assignent  ses  rela- 
tions avec  l'élher  oxalique  et  l'éthane  perchloré. 

(C^HsOjOC-COlOCiHs)  Éb.    ISB"  \     gQ„ 

C10C-C0(0C«Hs)  «30  / 

\  -5O0 
ClOC-COCl  85»  / 

CI3C-CCI3  485»   \     g^„ 

CIOC-CCI3  US» 


ClOC  -  cocu  54« 


)^" 


(  o03  ) 

Ce  produit  étant  conslilué  exclusivement,  ou  au  moins 
en  grande  partie,  par  du  chlorure  de  chloro-oxalo-vimjle 
ClCO  -  CCU(OC2H5),  a  dû  fournir  une  notable  portion 
bouillant  vers  140°.  Le  dédoublement  partiel  de  ce  com- 
posé, sous  l'action  de  la  chaleur,  en  chlorure  d'éUtyle 
C2H5CI  et  chlorure  d'oxalyle  ClCO  -  COCl,  a  permis  à  la 
distillation  de  s'établir  avant  UX)".  Si  le  produit  analysé 
n'était  pas  exclusivement  du  chlorure  de  chloro-oxalo- 
vimjle  ClCO  -  CCl2(OC.2H5),  il  ne  pouvait  renfermer  que 
du  chlorure  d'oxalyle  dont  la  présence  ne  pouvait  pas  en 
altérer  la  composition  centésimale. 

J'ajouterai  enfin  que  l'oxygène  qui  avait  servi  à  réaliser 
celte  oxydation  n'étant  pas  probablement  d'une  siccité 
absolue,  il  a  dû  se  former  de  l'acide  oxalo-vinique  (HO)CO 
-  (^OlOCjHg),  lequel  bout  à  117%  sous  la  pression  de 
15  millimètres. 

C'est  la  présence  de  ce  corps  qui,  vraisemblablement, 
a  permis  à  la  colonne  mercurielle  de  s'élever  jusque 
vers  200". 

Quoi  qu'il  en  soit,  je  me  propose  de  reprendre  à  nou- 
veau cette  question  de  Voxydation  de  Véthylène  trichloro- 
élhyl-oxyU'. 

Le  chlorure  de  chloro-oxalo-vinyle  ClCO  -  CCl2(0C2H5), 
qui  en  est  le  produit  réel,  est  un  composé  qui  mérite 
certes  un  examen  approfondi,  car  il  est  permis  d'en 
attendre  des  réactions  d'un  haut  intérêt,  notamment  au 
point  de  vue  synthétique. 

Lorsque  je  m'en  suis  occupé,  il  y  a  bientôt  vingt  ans, 
la  distillation  dans  le  vide  ou  âous  pression  réduite 
n'était  pas  encore  entrée,  comme  aujourd'hui,  dans  la 
pratique  courante  des  laboratoires.  J'ai  tout  lieu  d'espérer 
qu'en  la  mettant  en  usage,  je  pourrai  isoler  ce  chlorure. 


(  504  ) 

de  composition  si  complexe,  à  l'état  de  pureté.  Son 
correspondant  méthylique  ClCO  -  CCU{0CH5)  devant 
être  plus  volatil  el  plus  stable  sous  l'action  de  la 
chaleur  (*),  j'aurai  soin  de  mettre  aussi  en  réaction 
Vètinjlène  trichloro-mélhyl-oxylc  CL2C-CCI(OCH5),  éb.  vers 
I50°-i35". 


Sur  l'origine  de  la  couleur  bleue  du  ciel;  par  W.  Spring, 
membre  de  l'Académie. 

État  de  la  question. 

La  cause  de  la  coloration  du  ciel  a,  depuis  longtemps 
déjà,  préoccupé  les  physiciens,  sans  que  cependant  le 
problème  se  trouve  résolu,  aujourd'hui,  de  manière  à 
satisfaire  tous  les  esprits. 

Il  n'entre  pas  dans  le  cadre  de  cette  note  de  retracer 
tous  les  travaux  exécutés  sur  ce  sujet  depuis  l'époque  où 
Newton  lit  voir,  le  premier,  que  des  corps  peuvent 
paraître  colorés  dans  certaines  conditions,  sans  toutefois 
posséder  une  couleur  qui  leur  soit  propre.  Une  histoire 
suffisamment  développée  de  la  question  a  été  faite  par 
J.-M.  Pernter,  il  y  a  quelques  années  (**).  Je  puis  me 
borner  à  mentionner  seulement  les  recherches  princi- 


(*)  Selon  M.  Anschutz  {toc.  cit. ,  le  chloro-oxalate  biméthxjlique 
ClaClOCHj)-  COyOCH^)  bout,  presque  sans  décomposition,  à  179'-i81", 
sous  la  pression  ordinaire.  Le  chlorure  d'oxalo  vinyle  méthylique 
C1G0-C0(0CH3)  bout,  sous  la  pression  ordinaire,  à  llSo-lSO". 

(")  Scliriftcn  des  Vereins  zur  Verbreitung  naturw.  Kenntnisse,  Wien, 
t.  XXX,  pp.  197-219,  1890.  A  paru,  en  résumé,  dans  les  Fortschrilte 
der  Physik,  t.  XLVI,  (3),  p.  441,  1896. 


C  50o  ) 
pales,    indispensables    pour    comprendre    l'observation 
nouvelle  que  je  désire  faire  connaître  par  ces  lignes  et 
la  valeur  qu'elle   peut  avoir  pour  la  solution    du   pro- 
blème. 

On  a  attribué,  depuis  longtemps,  la  lumière  de 
l'atmosplière  à  une  réflexion  ou  à  une  diffusion  des  rayons 
du  soleil  dans  l'air.  En  etfet,  si  l'atmospbère  était  abso- 
lument transparente,  elle  serait  obscure;  le  disque 
lumineux  du  soleil  nous  apparaîtrait  sur  le  fond  noir 
des  espaces  stellaires  et  les  phénomènes  de  l'aurore  et 
du  crépuscule  ne  se  produiraient  pas.  La  preuve  physique 
directe  de  la  réflexion  atmosphérique  a  été  fournie  par 
Brewster.  Ce  physicien  constata  que  la  lumière  du  firma- 
ment n'est  pas  de  la  lumière  ordinaire,  mais  bien  de  la 
lumière  partiellement  polarisée.  Le  maximum  de  la  pola- 
risation a  lieu  quand,  tournant  le  dos  au  soleil,  on  regarde 
le  ciel  dans  une  direction  perpendicnlaire  aux  rayons 
qui  nous  atteignent.  Il  résulte  immédiatement  de  là  que 
l'angle  de  polarisation  atmosphérique  est  de  45  degrés, 
car  l'angle  de  90  degrés  correspondant  au  maximum 
de  polarisation,  comprend  l'angle  d'incidence  des 
rayons  directs  et  l'angle  des  rayons  réfléchis,  qui  sont 
nécessairement  égaux.  L'observation  de  Brewster  a  été 
confirmée  par  Arago,  Babinet,  îTerscbel  et  par  d'autres 
savants;  on  peut  donc  regarder  comme  certain  que  le  ciel 
nous  envoie  de  la  lumière  réfléchie. 

Ce  point  étant  acquis,  Clausius  s'est  posé  la  question  de 
savoir  8ur  quoi  la  lumière  du  soleil  se  réfléchit.  Comme 
il  était  difficile  d'admettre  une  réflexion  de  la  lumière 
dans  l'air  sur  l'air,  il  a  cherché,  par  l'analyse  mathéma- 
tique des  phénomènes  de  réflexion,  les  conditions  phy- 
siques que  devaient  remplir  les  particules  servant  de 
miroirs  pour  que  les  propriétés  optiques  <le  notre  atmo- 


(  506  ) 

sphère  fussent  satisfaites.  Son  travail,  qui  a  paru  en 
1849  (1),  conduit,  en  résumé,  aux  résultats  que  voici.  La 
réflexion  ne  peut  avoir  lieu  sur  des  particules  qui 
seraient  répandues  dans  l'air  comme  une  fine  pous- 
sière (12),  sinon  la  transparence  de  l'air  se  trouverait 
diminuée  plus  fortement  que  nous  ne  le  constatons; 
elle  ne  peut  pas  non  plus  se  faire  sur  des  couches  d'air 
de  densités  différentes,  enveloppant  concentriquement 
la  terre,  car  la  lumière  du  soleil,  loin  d'atteindre  notre 
œil,  serait  renvoyée  vers  les  espaces  planétaires.  Si  l'on 
admet  plutôt  la  présence,  dans  l'air,  de  parlicules  d'eau, 
on  rencontre  une  difficulté.  Tn  milieu  constitué  de 
cette  fa^on  ne  transmettrait  pas  la  lumière  en  ligne 
droite.  Les  l'éfractions  subies  par  un  rayon  passant  succes- 
sivement par  des  gouttelettes  frappées,  en  général,  sous 
un  angle  quelconque,  aurait  pour  effet  une  diffusion  qui 
nous  effacerait  le  contour  du  disque  solaire,  comme  si 
nous  le  regardions  au  travers  d'un  verre  dépoli.  Il  ne 
reste  donc  qu'une  hypothèse,  celle  de  corps  transparents 
creux,  ou  de  vésicules  d'eau.  Si  on  l'accepte,  on  s'assure 
facilement  que  non  seulement  la  réflexion  de  la  lumière 
s'explique,  mais  encore  que  la  lumière  réfractée,  c'est-à-' 
dire  celle  qui  passe  par  la  vésicule  transparente,  doit  con- 
tinuer son  chemin  dans  une  direction  sensiblement  la 
même,  lin  effet,  la  lamelle  sphérique  d'eau  qui  consti- 
tue la  vésicule  peut  être  assimilée,  aux  deux  points  où 
elle  est  percée  par  le  rayon  lumineux,  à  deux  lamelles 


(l)  Annales  de  Pogcjendorff,  t.  LXXVl,  pp.  161-188. 

("i)  Celte  ex|)lication  a  reparu  néauinoins  en  1872;  voir  l'article  de 
Collas  Sur  la  cause  de  la  couleur  bleue  du  ciel,  dans  Les  Mondes  (2), 
t.  XXIX,  ]).  Oi7;  il  y  est  dit  que  l'air  renfermerait  des  poussières 
de  silice  [\). 


(  «07  ) 
planes  parallèles,  extrêmement  petites,  et  l'on  sait  que  la 
réfraction  à  la  sortie  d'un  milieu  compris  entre  des  plans 
parallèles  compense  la  réfraction  à  l'entrée.  De  celte 
façon,  la  direction  de  la  lumière  qui  traverse  une  vésicule 
sera  conservée  dans  son  ensemble.  Cette  hypothèse  est, 
en  outre,  avantageuse  à  la  réflexion,  car  elle  met  sur  le 
chemin  du  rayon  lumineux  quatre  changements  de  milieu 
par  vésicule,  le  rayon  incident  se  réfléchissant  sur  la  sur- 
face externe  et  sur  la  surface  interne  de  la  vésicule  à 
l'entrée  et  à  la  sortie.  L'intensité  de  la  partie  réfléchie 
de  la  lumière  devra  donc  l'emporter  de  beaucoup  sur 
celle  de  la  partie  réfracté  e 

Clausius  regarde  donc  comme  très  probable,  sinon 
comme  démontré,  que  la  vapeur  d'eau  passe,  dans  l'air, 
par  la  forme  vésiculaire  avant  de  se  condenser  en 
gouttes  proprement  dites.  La  cause  de  l'illumination  du 
hrmament  serait  dans  la  forme  de  ce  premier  degré  de 
la  condensation. 

Passant  ensuite  à  la  question  de  l'origine  du  bleu  du 
ciel  ainsi  qu'aux  phénomènes  de  coloration  de  l'aurore  et 
du  crépuscule,  Clausius  admet,  dans  un  autre  mémoire!  1), 
(jue  le  bleu  n'est  pas  propre  à  l'atmosphère,  mais  qu'il 
apparaît,  dans  les  vésicules  d'eau,  à  la  suite  de  l'interfé- 
rence des  rayons  de  grande  longueur  d'ondes.  Le  firma- 
ment ne  serait  pas  bleu  par  suite  de  Vabsorption  des 
rayons  complémentaires,  comme  l'est  une  fleur  bleue,  par 
exemple,  mais  sa  coloration  aurait  la  même  cause  que 
l'irisation  des  bulles  de  savon  dont  les  parois  sont 
devenues  suflîsamment  minces.  Toutefois,  il  y  aurait 
à   noter    que   le  bleu  du  ciel  serait   exclusivement   de 


1)  Annales  de  Poggendorff,  t.  LXXVI,  pp.  188-195. 


(  508  ) 

premier  ordre,  c'est-à-dire  de  même  origine  que  celui 
qui,  dans  l'expérience  bien  connue  des  anneaux  de  Neulon, 
entoure  la  tache  centrale  obscure. 

Les  tons  rouge  orangé  de  l'aurore  ou  du  crépuscule, 
d'autre  part,  sont  aussi  expliqués  bien  simplement.  En 
effet,  la  lumière  traversant  les  vésicules  doit  être  nécessai- 
rement complémentaire  du  bleu;  mais  nous  ne  pourrons 
la  percevoir  que  si  les  rayons  du  soleil  ont  passé  par  un 
nombre  considérable  de  vésicules,  car,  d'après  ce  qui  a 
été  rappelé  plus  haut,  la  partie  de  la  lumière  réfractée  est 
bien  plus  faible  que  la  partie  réfléchie  (l).  Cette  condi- 
tion se  trouve  réalisée  lorsque  le  soleil  est  à  l'horizon  ; 
alors  le  nombre  de  vésicules  traversées  est  bien  plus 
grand . 

La  théorie  de  Clausius  parait  bien  expliquer  les  faits 
observés.  Elle  a  trouvé,  en  outre,  un  appui  dans  les 
expériences  de  G.  Govi  sur  la  polarisation  de  la  lumière 
par  diffusion  (2),  ainsi  que  dans  celles  de  Tyndall  sur 
V illumination  des  nuages  naissants  (5).  Le  célèbre  |)hysi- 
cien  anglais  a  notamment  fait  voir  que  si  l'on  éclaire  for- 
tement un  mélange  d'air,  de  vapeur  de  nitrite  de  bulyle 
ou  d'amylc  et  d'acide  chlorhydrique,  sous  une  pression 
très  réduite,  il  se  produit  «  un  azur  splendide  qui  devient 
»  d'abord  de  plus  en  plus  prononcé,  arrive  à  son  maxi- 
»  mum  de  pureté  et  d'intensité,  et  passe  ensuite,  les  par- 
»  ticules  devenant  pins  grosses,  au  bleu  blanchâtre  ». 

(1)  Si  l'on  prend  pour  imilé  la  lumière  tolale,  la  partie  réfléeliie 
serait  0.922  et  la  partie  réfractée  0.078,  dans  les  limites  extrêmes, 
d'après  les  calculs  de  Clausius  [loc.  cit.,  p.  194). 

(2)  Comptes  rendus,  t.  LI,  p.  360,  1860. 

(3)  La  chaleur  mode  de  mouvement  (traduction  de  l'abbé  Moigno). 
Paris,  1874,  pp.  517  et  suivantes. 


(  509  ) 

Cette  lumière  bleue  ayant  été  reconnue  polarisée,  Tyn- 
(lail  a  regardé  son  expérience  comme  reproduisant,  au 
moyen  de  substances  spéciales,  le  phénomène  de  la  colo- 
ration bleue  du  ciel;  il  résulterait  de  là  que  ce  bleu  serait 
engendré  par  la  réflexion  et  non  par  une  absorption 
propre  à  l'atmosphère. 

(Juoi  qu'il  en  soit,  l'explication  proposée  par  Clausius 
a  soulevé  des  objections  de  la  part  de  J.  W.  Strutt  (i), 
au  moins  en  ce  qui  concerne  l'existence  réelle  de  vésicules 
de  vapeur  dans  l'air.  Le  savant  anglais  a  établi,  de  son 
côté,  par  l'analyse  mathématique,  que  des  gouttelettes 
pleines  pouvaient  aussi  réfléchir  beaucoup  mieux  les 
rayons  bleus.  Il  suffit  pour  cela  que  leur  diamètre  soit 
extrêmement  petit  et  de  l'ordre  de  grandeur  des  lon- 
gueurs d'ondes.  Ce  désaccord  entre  Clausius  et  Strutt  n'a 
cependant  pas  d'importance  pour  le  sujet  qui  nous 
occupe. 

Ce  résumé  de  la  théorie  de  l'illumination  du  lirma- 
ment  porte  à  croire,  malgré  tout  ce  qu'il  a  forcément 
d'incomplet,  que  la  «  grande  énigme  »  du  bleu  du  ciel, 
comme  l'appelait  Herschel,  a  trouvé  son  explication. 
Néanmoins,  la  solution  proposée  laisse  encore  place  au 
doute. 

11  résulte  des  expériences  mêmes  de  Tyndall  que  la 
lumière  réfléchie  par  un  nuage  naissant  n'est  bleue  que 
pendant  peu  d'instants  ;  elle  passe  bientôt  au  bleu  pâle, 
puis  au  blanc.  Cette  fugacité  contraste  singulièrement 
avec  la  fixité  et  avec  l'uniformité  du  bleu  d'un  ciel  serein. 
Si  l'on  admet  même,  avec  Clausuis  (2),  qu'il  se  forme 


(1)  PkU.  Mag.,  (4),  t.  XLl,  p.  274,  1871. 
(21  Loc.  cit.,  p.  192. 


(  olO  ) 
continuellement  de  nouvelles  vapeurs,  on  ne  comprend 
pas  sans  autre  explication  pourquoi  les  vésicules  devenues 
trop  épaisses  pour  former  du  bleu  de  premier  ordre 
s'évaporeraient  à  nouveau  pour  en  reproduire  de  plus 
fines,  avec  une  régularité  et  une  précision  telles  que  l'œil 
ne  peut  saisir  aucune  variation  dans  la  nuance  du  ciel. 

D'autre  part,  la  théorie  de  Clausius  veut  que  le  bleu  du 
ciel  soit  un  bleu  de  premier  ordre;  or  celui-ci  est  plus  gris 
que  celui  du  ciel  :  on  s'en  assure  facilement  par  l'examen 
des  anneaux  de  Newton.  Cette  théorie  postule  encore  que 
la  couleur  des  rayons  de  l'aurore  et  du  crépuscule  soit 
exactement  complémentaire  du  bleu  du  ciel;  or,  d'après 
E.  Briicke  (1),  il  n'en  serait  pas  ainsi.  Ce  physicien  émet 
donc  explicitement  un  doute  sur  l'origine  du  bleu  du  ciel 
et  il  regarde  les  couleurs  crépusculaires  comme  indé- 
pendantes, au  point  de  vue  de  leur  production,  du  bleu 
du  firmament. 

Enfin,  je  rappellerai  un  fait  bien  connu  de  toutes  les 
personnes  qui  ont  fait  de  grandes  ascensions.  A  mesure 
que  Ton  s'élève,  le  bleu  du  ciel  perd  de  plus  en  plus  son 
ton  blanchâtre  ;  au-dessus  de  4,000  mètres  environ,  le 
firmament  parait  blm  sombre.  En  même  temps,  le  drgré 
de  polarisalion  de  la  lumière  va  diminuant  (Tyndalli.  Il 
me  parait  que  la  vraie  conclusion  à  tirer  du  parallélisme 
de  ces  deux  phénomènes,  c'est  que  la  cause  de  la  polari- 
salion réside  dans  ce  qui  blanchit  le  ciel  et  non  dans  ce 
(jui  le  bleuit.  Ce  qui  empêche  de  se  prononcer  catégori- 
quement, c'est  l'indétermination  du  problème  :  dans  la 
vallée,  on  observe  un  bleu  moins  sombre,  mais  on  a 
devant  soi  une  épaisseur  d'aii-  plus  grande  et  l'on  pour- 


(1)  Poggendorff  Annalen,  l-  LXXXVIII,  p.  363. 


(  SH   ) 
rait,  avec  Tyndall,  attribuer  la  plus  forte  polarisation  à 
une  réflexion  plus  multipliée  des  rayons  lumineux. 

Quoi  qu'il  en  soit  de  la  valeur  de  ces  doutes,  il  ne  sera 
pas  sans  utilité  de  mentionner  une  observation  que  je 
crois  nouvelle. 

Observations  nouvelles. 

Pour  résoudre  l'indétermination  à  laquelle  il  vient 
d'être  fait  allusion,  on  peut  opérer,  me  paraît-il,  de  la 
manière  suivante. 

Si  l'on  regarde  la  polarisation  comme  la  preuve  de 
l'origine /?«r  réflexion  du  bleu  du  ciel,  il  faut  nécessaire- 
ment admettre  qu'en  interceptant  les  rayons  bleus  à  l'aide 
d'une  substance  de  couleur  exactement  complémentaire, 
on  éteindrait,  par  le  fait  même,  la  partie  polarisée  de  la 
lumière  du  lîrmament.  Si,  au  contraire,  l'atmospbère 
devait  sa  couleur  à  une  absorption,  la  suppression  de  la 
lumière  bleue  n'arrêterait  pas  la  polarisation;  celle-ci 
serait  alors  due  plutôt  à  la  réflexion  du  contingent  blanc 
de  la  lumière  du  ciel.  En  réalité,  le  pbénomène  à  étudier 
est  plus  compliqué  que  les  lignes  précédentes  le  sup- 
posent. La  polarisation  peut  être  due  en  partie  à  la  for- 
mation du  bleu  et  en  partie  aux  réflexions  nous  amenant 
de  la  lumière  blancbe.  Dans  ce  cas,  l'interposition  de  la 
couche  de  couleur  complémentaire  ne  supprimera  que 
partiellement  la  polarisation. 

Voyons  ce  que  nous  apprend  l'observation. 

Le  choix  de  la  matière  dont  la  couleur  est  complé- 
mentaire du  bleu  du  ciel  est  une  conséquence  des  recher- 
ches que  j'ai  eu  l'honneur  de  communiquer  dernièrement 
à  l'Académie  sur  la  Cause  de  l'absence  de  coloration  de  cer- 


(  512  ) 

laines  eaux  limpides  naturelles  (1).  On  se  souvient  que 
Vhématite,  en  parcelles  assez  fines  pour  être  transparentes, 
est  de  couleur  complémentaire  an  bleu  de  l'eau.  Si  l'on 
regarde  le  ciel  à  travers  ces  lamelles  suspendues  dans 
un  peu  d'eau,  on  constate  aussi  la  disparition  du  bleu. 
Toutefois  le  maniement  des  lamelles  d'hématite  est  très 
incommode.  J'ai  renoncé  à  leur  emploi  pour  me  servir 
des  solutions  ferriques  limpides  dont  la  couleur  paraît  la 
même.  Celle  qui  a  le  mieux  répondu  aux  conditions  dési- 
rées a  été  une  solution  de  sulCocyanure  ferrique.  Comme 
l'hématite,  elle  cteint  aussi  le  bleu  de  l'eau  pure.  Pour  la 
préparer,  on  ajoute  une  goutte  d'une  solution  de  chlorure 
ferrique,  à  5  °/o  environ,  à  quelques  centimètres  cubes 
d'une  solution  de  sulfocyanure  de  potassium  à  10  "/o, 
puis  on  étend  d'eau  jusqu'à  ce  que  l'intensité  de  la  teinte 
rouge-orange  soit  en  rapport  avec  celle  du  bleu  de  l'eau 
que  l'on  observe  dans  un  tube  de  longueur  suffisante.  En 
interposant  entre  l'œil  et  le  tube  une  auge  à  laces  paral- 
lèles contenant  le  composé  ferrique,  la  sensation  du  bleu 
disparaît. 

Si  l'on  regarde,  de  même,  le  ciel  serein  au  travers  de 
cette  auge,  on  remarque  aussi  la  disparition  du  bleu  pour 
une  concentration  convenable  du  composé  ferrique. 
Celle-ci  est  à  chercher  par  tâtonnements,  d'après  l'état 
du  ciel.  Quand  on  la  possède,  on  voit  dans  le  ciel 
comme  une  tache  blanche,  d'intensité  lumineuse  un  peu 
alfaiblie,  ce  qui  doit  être. 

Ce  résultat  étant  acquis,  on  place  entre  l'œil  et  l'auge 
un  polariscope  (je  me  suis  servi  de  celui  de  Savart,  muni 
d'une  lame  de  quartz  ou  de  gypse),  et  l'on  constate  nette- 

(l)  Bull,  de  l'Acad.  roij.  de  Belgique,  3«sér.,  t.  XXXVI,  p.  266, 1898. 


(  SI3  ) 
ment  que  la  lumière,  bien  que  privée  de  bleu,  est  encore  pola- 
risée dans  la  même  proportion  que  celle  du  ciel  non  regardé 
à  travers  l'auge.  En  comparant  le  degré  de  polarisation 
avec  celui  du  ciel  nu,  il  ne  m'a  pas  été  possible  de 
trouver  une  différence.  J'ai  répété  souvent  cette  obser- 
vation pendant  les  nombreux  jours  sereins  des  mois  de 
septembre  et  d'octobre  derniers,  à  diverses  heures,  et  je 
suis  arrivé  invariablement  au  même  résultat. 

Conclusions. 

On  peut  conclure,  je  crois,  de  ces  observations  que  le 
fait  de  la  polarisation  de  la  lumière  du  ciel  ne  prouve 
pas  nécessairement  l'absence  de  couleur  propre  de  notre 
atmosphère.  La  suppression  du  bleu  paraît  sans  influence 
appréciable  sur  le  degré  de  polarisation  du  firmament. 
On  est  plutôt  conduit  à  admettre  que  la  polarisation  est 
due  à  la  réflexion  de  la  lumière  sur  des  particules  (vési- 
cules ou  gouttelettes  de  vapeur)  assez  épaisses  pour  ne  pas 
être  le  siège  de  phénomènes  d'interférence.  Le  bleu  du  ciel 
ne  serait  pas,  comme  on  l'a  pensé  généralement,  la  cause 
de  l'illumination  de  l'atmosphère,  mais  nous  le  perce- 
vrions comme  une  conséquence  de  celle-ci.  La  lumière  du 
soleil,  en  pénétrant  dans  notre  atmosphère,  y  subirait 
une  difl'usion  partielle  à  la  suite  de  réflexions  causées, 
très  probablement,  par  les  vésicules  ou  les  gouttelettes 
de  vapeur  d'eau.  Si  le  milieu  était  absolument  incolore, 
le  ciel  nous  apparaîtrait  blanc,  mais  moins  éclairant  dans 
la  direction  perpendiculaire  aux  rayons  solaires.  Or,  le 
fait  que  nous  voyons  le  ciel  bleu  nous  oblige  donc  à 
admettre  que  l'atmosphère  n'est  pas  absolument  incolore, 
mais  bleue. 

5'"*    SÉRIE,    TOME    XXXVl.  35 


(  514  ) 

Nous  devons  examiner  à  présent  si  cette  conclusion  se 
concilie  avec  V optique  métf orologique. 

D'abord,  on  remarquera  que  la  rétlexion  de  la  lumière, 
dans  l'air,  sans  phénomènes  de  coloration,  n'exclut  en 
aucune  façon  la  polarisation.  Arago  a  vu,  déjà  en  1854, 
qu'il  suffit  que  la  lumière  passe  par  une  couche  d'air  de 
50  mètres,  troublée  par  des  vésicules  de  vapeurs,  pour 
se  polariser  notablement  (1),  Hagenbach  a  fait  la  même 
remarque  en  1872  (2).  Enfin,  Lallemand  avait  déjà  émis 
l'opinion  que  le  bleu  du  ciel  n'est  pas  polarisé,  mais  que 
la  lumière  polarisée  est  blanche  (5).  Les  considérations 
théoriques  sur  lesquelles  ce  physicien  se  base,  sont  même 
appuyées  sur  une  expérience;  néanmoins,  comme  celle-ci 
peut  être  discutée,  je  n'insisterai  pas. 

L'atmosphère  aurait- elle  effectivement  une  couleur 
propre  :  le  bleu?  Non  seulement  rien  ne  s'oppose  à  ce 
qu'on  admette  la  chose,  mais  je  dirai  que  cette  conclusion 
découle  de  nos  connaissances  actuelles.  En  efiét,  parmi  les 
substances  dont  le  mélange  forme  l'air,  il  en  est  quatre 
qui  ont  la  couleur  bleue.  D'abord  la  vapeur  d'eau.  Tyndall 
dit  à  ce  sujet  (4)  que  «  la  vapeur  d'eau  et  l'eau  liquide 
»  absorbent  la  même  classe  de  rayons;  c'est  une  manière 
»  d'établir  que  la  couleur  de  l'eau  pure  est  aussi  la  cou- 
»  leur  de  sa  vapeur  ».  Il  ajoute  que  probablement 
l'atmosphère  doit  à  la  vapeur  d'eau  d'être  un  milieu  de 
couleur  bleue,  car  on  a  remarqué  que  le  bleu  du  firma- 
ment et  des  montagnes  lointaines  de  l'horizon  se  fonçait 


(i)  Loc.  cit.,  p.  127. 

(2)  Dus  Licht  des  Landschaftsdiiftes.  (Der  Naturforscher,  t.  V, 
pp.  23-24, 1872.) 

(3)  Comptes  rendus,  t.  LXXV,  p.  707, 1872. 

(4)  La  dmleiLr  mode  de  mouvement,  p.  365. 


(  515  ) 
en  proportion  de  la  quantité  de  vapeur  d'eau  contenue 
dans  l'air.  On  se  rappelle,  en  outre,  que  notre  regretté 
confrère  Ch.  Montigny  (1)  a  vu,  dans  ses  nombreuses 
observations  sur  la  scintillation  des  étoiles,  la  couleur 
bleue  apparaître  plus  fréquente  et  plus  intense  cbaque 
fois  que  l'air  était  plus  humide. 

Enfin  le  fait  que  le  bleu  de  l'eau  et  le  bleu  de  l'air  se 
trouvent  éteints  par  la  même  substance  (voir  plus  haut) 
ne  parle  certainement  pas  contre  une  origine  commune. 

D'autre  part,  l'oxygène  lui-même  n'est  pas  incolore. 
k.  Olszewsky  (2,  dit  que  l'oxygène  liquide  exempt  d'ozone 
est  nettement  bleu  sous  une  épaisseur  de  50  millimètres. 
Sa  coloration  est  donc  environ  cinquante  fois  plus  pro- 
noncée que  celle  de  l'eau  pure,  puisque  celle-ci  ne  com- 
mence à  se  manifester  que  sous  1500  millimètres  d'épais- 
seur. Ce  physicien  s'est  demandé  aussi  si  le  bleu  du  ciel 
ne  serait  pas  dû  à  la  présence  de  l'oxygène. 

Dans  les  régions  plus  élevées  de  l'atmosphère,  là  où 
les  émanations  organiques  du  sol  deviennent  plus  rares, 
l'air  renferme  souvent,  sinon  toujours,  de  l'ozone  et  du 
peroxyde  d'hydrogène.  Ces  substances  sont  aussi  bleues. 
D'après  Olszewsky  (5),  l'ozone  liquide  est  si  bleu  qu'une 
couche  de  2  millimètres  est  presque  opaque,  et,  d'après 
Hautefeuille  et  Chapuis  (4),  V oxygène  ozonisé  autant  que 
possible  à  la  température  ordinaire  est  bleu  sous  1  mètre 
d'épaisseur.  J'ai  montré  moi-même  (5)  que  le  peroxyde 


(1)  Bull,  de  VAcad.  roy.  de  Belgique,  Se  sér.,  t  VII,  p.  304,  1884. 

(2)  Chemikcr  Zeilung  fRepertorium;,  p.  66,  1891. 

(3)  Monatshefle  fur  Chemie,  t.  VIII,  p.  69. 

(4)  Comptes  rendus,  t.  XCI,  p.  522. 

(5j  Bull,  de  l'Acad.  roy.  de  Belgique,  3^  sér.,  t.  XXIX,  pp.  363-384, 
1895. 


(  516  ) 

d'hydrogène  pur  a  une  couleur  bleue  environ  deux  fois 
aussi  foncée  que  celle  de  l'eau.  Il  n'est  donc  plus  possible 
de  regarder  l'air  comme  absolument  incolore.  D'ailleurs, 
W.-N.  Hartley  rappelle,  dans  son  travail  Sur  les  limiles 
du  spectre  solaire,  sur  le  bleu  du  ciel  et  la  fluorescence  de 
l'ozone  (1),  que  Liveing  et  Dewar  ont  constaté  que 
l'oxygène  de  l'air  a  effectivement  un  fort  pouvoir  absor- 
bant pour  les  rayons  à  grandes  longueurs  d'ondes.  Il 
attribue  lui-même  le  bleu  du  ciel  à  la  fluorescence  des  gaz 
de  l'atmosphère,  principalement  à  l'oxygène  et  à  l'ozone. 
Il  regarde  l'ozone  comme  se  trouvant  en  quantité  suffisante 
dans  l'air  pour  donner  à  l'atmosphère  une  couleur  bleue 
d'absorption. 

Il  reste  à  examiner  si  les  phénomènes  lumineux  de 
l'aurore  et  du  crépuscule  ne  sont  pas  un  obstacle  à  notre 
manière  de  voir. 

On  s'en  souvient,  d'après  la  théorie  de  Clausius,  le 
bleu  du  ciel  et  les  lueurs  rouges  du  matin  et  du  soir 
auraient  une  origine  commune,  le  bleu  étant  le  résultat 
de  la  réflexion  et  le  rouge  orangé  celui  de  la  réfraction 
des  rayons  solaires  dans  les  vésicules  de  vapeur  d'eau. 

En  déplaçant  à  présent  Vorigine  du  bleu,  on  doit  se 
demander  s'il  n'y  a  pas  lieu  de  fournir  une  explication 
nouvelle  des  lueurs  crépusculaires.  La  réponse  à  cette 
question  se  trouve  dans  les  résultats  obtenus  par  M.  le 
Prof'  Cari  Barus,  dans  ses  recherches  sur  Les  couleurs  des 
condensations  nuageuses  (2).  L'auteur  a  constaté  que  ces 
couleurs  permettent  de  distinguer  sûrement  la  vapeur 


(1)  Fortschritte  der  Physik,  t.  XLV,  3.  Abth  ,  p.  239,  1889. 

(2)  The  colors  of  cloudy  condensation.  (American  meteorologicai. 
Journal,  Mardi,  1893.) 


(  517 


d'eau  d'un  amas  de  gouttelettes  infiniment  petites  ei 
qu'elles  donnent  en  même  temps  une  mesure  pour  les 
dimensions  de  ces  dernières. 

Il  observait  un  jet  de  vapeur  se  détendant  dans  un  tube 
de  0'°,60  de  long,  fermé  par  des  plans  de  verre,  tandis 
que  la  lumière  passait  par  le  tube  dans  la  direction  de 
l'axe.  Le  résultat  général  de  ces  observations  peut  se 
résumer  en  disant  qu'une  conclemation  nuageuse  produit 
les  phénomènes  de  coloration  des  milieux  troubles.  Sui- 
vant le  diamètre  des  gouttelettes,  la  première  lueur  visi- 
ble vire  du  rouge  au  vert. 

Ce  sont,  en  somme,  des  couleurs  d'interférence,  d'ordre 
supérieur,  qui  se  produisent  quand  les  dimensions  des 
gouttelettes  ont  grandi  au  point  de  rendre  impossible  la 
formation  du  bleu  de  premier  ordre.  Si  les  rayons  du 
soleil  traversent  donc,  le  matin  ou  le  soir,  des  couches 
d'air  chargées  de  gouttelettes  dont  les  dimensions  sont 
comprises  entre  0'"'",00004  et  0'°'",OD04,  ils  se  coloreront 
de  nuances  diverses,  étrangères  au  bleu  proprement  dit  du 
firmament.  Ces  nuances  ne  seront  pas  nécessairement 
complémentaires  du  bleu  du  ciel,  comme  devaient  l'être 
celles  de  la  théorie  de  Clausius.  La  remarque  de  E.  Brijcke 
à  ce  sujet  (voir  plus  hauti  n'est  donc  plus  une  objec- 
tion. On  sait,  en  outre,  que  l'apparition  de  lueurs  vertes, 
à  l'aurore  ou  au  crépuscide,  n'est  pas  un  phénomène  bien 
rare.  M.  de  Maubeuge  en  a  signalé  récemment  une  extra- 
ordinaire qui  a  accompagné  le  lever  du  soleil  derrière  le 
massif  du  Sinaï,  «  en  lançant  à  la  première  seconde  de 
»  son  apparition  un  rayon  lumineux  vert  émeraude 
»  absolument  pur  et  net  (4)  ». 

(1)  Comptes  rendus,  t.  GXXVII,  p.  453, 1898. 


(  518  ) 

L'explication  des  couleurs  crépusculaires  peut  donc 
être  détachée  de  celle  du  bleu  du  ciel. 

Pour  terminer,  je  toucherai  encore  un  point  particulier 
qui  semble  étranger  au  sujet  actuel,  mais  qui  s'y  rattache 
cependant  au  fond. 

Lorsque  Tyndall  eut  appelé  de  nouveau  l'attention  sur 
l'origine  probable  du  bleu  du  ciel,  on  a  cru  que  le  bleu 
de  l'eau  pouvait  être  dû  également  à  des  phénomènes 
d'interférence.  Cette  opinion  a  été  renouvelée  récemment 
par  M.  R.  Abegg  (1)  et  regardée  comme  certaine  et  irré- 
futable {sicher  richtig  und  unwiderlegliclv ,  de  sorte  que, 
pour  cet  auteur,  le  bleu  de  l'eau  serait  à  la  fois  bleu  de 
réflexion  et  bleu  d'absorption.  Je  crois  que  M,  R.  Abegg 
fait  erreur  :  la  réilexion  de  la  lumière  dans  l'eau  donne 
une  illumination  plus  ou  moins  jaune  orangé  ou  blanche, 
et  non  bleue.  Pour  trancher  la  question,  il  suffira 
d'éteindre  la  lumière  bleue  des  eaux  naturelles  par  sa 
couleur  complémentaire  et  de  s'assurer  si,  oui  ou  non,  la 
polarisation  disparaît  en  même  temps  et  dans  la  môme 
mesure.  Je  me  propose  de  vérifier  le  fait  sitôt  que  les 
devoirs  de  ma  charge  m'en  laisseront  le  loisir. 

liège.  Institut  de  chimie  générale.  Novembre  1898. 


(i)  Naturw.  Rundschau,  t.  XIII,  n"  14,  1898. 


(  319  ) 


Sur  quelques  dérivés  chlorobromés  en  €3;  par  Frécï.  Swarts, 
répétiteur  de  chimie  générale  à  l'Université  de  Gand. 

Dans  les  recherches  que  fit  Sabanejeff  sur  les  dérivés 
chlorés  et  bromes  que  l'acétylène  peut  former  par  addi- 
tion, cet  auteur  (*)  a  étudié  l'action  du  pentachlorure 
d'antimoine  sur  l'éthylène  bibromé  symétrique.  Il  a 
observé  qu'il  se  forme,  non  pas  du  dibromdichloréthane 
symétrique,  comme  on  aurait  pu  s'y  attendre,  mais  un 
composé  de  la  formule  CBr.jH  -  CCK2H,  Il  se  produit  tou- 
jours en  même  temps  un  déplacement  partiel  du  brome 
par  le  chlore,  avec  formation  de  composés  chlorés. 

J'ai  étudié  l'action  du  pentachlorure  d'antimoine  sur  le 
tribrométhylène,  préparé  par  le  procédé  de  Lennox  (**), 
en  chauffant  du  tétrabromélhane  symétrique  avec  de  l'acé- 
tate de  potasse  et  du  carbonate  de  soude. 

Pour  éviter  une  réaction  très  vive,  j'ai  dissous  une 
molécule  d'éthylène  tribromé  dans  son  poids  de  tétrachlo- 
rure de  carbone.  Dans  la  solution,  refroidie  par  immer- 
sion dans  de  l'eau  glacée,  j'ai  laissé  couler  lentement 
une  molécule  de  pentachlorure  d'antimoine. 

Il  se  produisit  une  élévation  notable  de  température  et 
le  liquide  se  colora  fortement  en  rouge,  par  suite  d'une 
mise  en  liberté  de  brome.  Après  introduction  de  tout  le 
pentachlorure,   le   ballon  dans  lequel  j'avais  opéré  fut 


(*)  Sabanejeff.  Liebig's  Annalen,  t.  GCXVI,  p.  256. 
(")  Lennox,  Liebig's  Annalen,  t.  CXXIl,  p.  215. 


(  520  ) 

légèrement  houché  et  abandonné  à  lui-même.  Après 
vingt-quatre  heures,  il  s'y  était  produit  une  abondante 
cristallisation:  le  liquide  surnageant  fut  décanté,  secoué 
successivement  avec  de  l'acide  chlorhydrique,  une  solu- 
tion d'acide  tartrique  et  de  la  soude,  puis  séché  sur  du 
chlorure  de  calcium. 

J'ai  distillé  le  chlorure  de  carbone  au  bain-marie;  il 
me  resta  un  liquide  très  dense,  que  j'essayai  de  distillera 
la  pression  ordinaire.  Seulement,  quand  le  thermomètre 
atteignit  180°,  il  se  manifesta  une  décomposition  assez 
importante,  avec  dégagement  de  brome  et  d'acide  brom- 
hydrique.  1 

En  fractionnant  au  Lebel  dans  le  vide,  j'ai  obtenu,  I 

après  deux  rectilieations,  un  liquide  incolore,  bouillant  1 

à  142°  sous  50  millimètres  de  pression. 

Deux  dosages  de  carbone  et  d'hydrogène  dans  le  pro- 
duit obtenu  m'ont  donné  les  résultats  suivants  : 

is%7i)77  de  stibstaiice  ont  fourni  0c^0Gl8  H^O, 

soil0g^00C8G  i^oiiO.Sg"/,, 

cl08^4818COi,soit0e^i5ll  C,  ou  7  20"/». 

Is^SIC)  de  substance  ont  donné  Os^OTôS  H^O, 

soit0g'-,008l4H,  ouO./tôo/o, 

et  Oe^^OOO  CO.,  soit  Oe%1 33G3  C,  ou  7. 1 9 "/„ . 

Ces  teneurs  en  carbone  et  hydrogène  correspondent  à 
la  formule  CjHBrsClo,  qui  exige 

C     7.!  5°/.,, 
H     0.-29  ^/„. 

Le  tribromdichloréthane  que  j'ai  obtenu  et  que  j'appel- 


(  S24  ) 
lerai  (3  diclilortribiométhane,  pour  le  distinguer  du  di- 
chlortribiométhane  obtenu  par  Denzel  (*J,  est  un  liquide 
incolore,  brunissant  à  la  lumière  et  se  congelant  à  -  5° 
environ.  Sa  densité  à  21%o  est  de  2.6263;  son  indice 
de  réfraction,  de  1.5989  à  i5°,o. 

J'ai  pris  sa  densité  de  vapeur  par  le  procédé  de  Hof- 
mann  à  184"  et  je  l'ai  trouvée  normale.  Cependant,  le 
mercure  était  légèrement  attaqué;  il  enlève  sans  doute 
du  brome  au  dichlortribrométhane,  comme  le  fait  le 
zinc. 

Quand  on  distille  le  [3  dichlortribrométhane  à  la  pres- 
sion atmosphérique,  on  constate  qu'il  bout  vers  210", 
mais  il  se  décompose  en  même  temps  assez  fortement, 
en  dégageant  du  brome  et  de  l'acide  bronihydrique. 
Sous  pression  réduite,  il  distille  à  142''  sous  50  milli- 
mètres, à  155"  sous  35  millimètres  de  pression. 

A  côté  du  tribromdichloréthane,  j'ai  obtenu,  en  distil- 
lant le  produit  brut  de  la  réaction  du  perchlorure  d'anti- 
moine sur  le  tribrométhylène,  un  résidu  ne  bouillant  pas 
à  142°  sous  un  vide  de  710  millimètres  et  qui  se  prenait 
par  refroidissement  en  grandes  lamelles  cristallines. 

Ces  cristaux  furent  traités  par  l'alcool  froid  qui  en 
dissout  la  majeure  partie,  ne  laissant  qu'un  résidu  inso- 
luble très  minime.  La  solution  alcoolique  m'a  donné,  par 
évaporation,  de  beaux  cristaux,  fusibles  à  32"  et  distillant 
vers  150"  sous  50  millimètres  de  pression.  Ces  cristaux 
sont  très  solubles  dans  l'alcool  et  l'éther  et  possèdent  une 
odeur  camphrée.  Ces  propriétés  appartiennent  au  tétra- 
bromchloréthande  écrit  par  Denzel^**) .  Pour  vérifler  l'iden- 


(*)  Denzel,  Liebig's  Annalen,  t.  CXCV,  j).  ^201. 
(**)  Denzel,  Berichten.  L  XII,  p.  "i'iOT. 


(  522  ) 
tité  des  corps,  j'ai  tait  un  dosage  de  carbone  et  d'hydro- 
gène. 

16%522  de  substance  ont  donné  0Êr%3t04  COs, 

soit08^9284C,  ou  G.t  "L, 
et  0g^0548  HaO,  soit  Oe^.OOCm  H,  ou  0.40  "/„. 

Calculé  pour  C^HriCIII. 

C     6.50 1, 
H     0.26  »/„. 

Ce  corps  a  déjà  été  obtenu  par  Denzel,  en  broniant 
le  chlorure  d'élhylène,  et  par  Wallach  {*),  en  faisant  agir 
le  brome  sur  l'acétylène  monochloré.  Sa  formation  dans 
la  réaction  que  j'étudie  est  évidemment  due  à  une  mise 
en  liberté  de  brome,  qui  forme  du  chlorure  de  brome, 
lequel  s'additionne  au  tribrométhylène. 

Cette  réaction  n'est  jamais  que  secondaire  au  point  de 
vue  quantitatif;  elle  devient  d'autant  plus  importante  que 
l'on  opère  à  une  température  plus  élevée  et  qu'on  fait 
arriver  plus  rapidement  le  pcntachlorure  d'antimoine. 

Le  résidu  insoluble  dans  l'alcool  froid  se  dissout  dans 
une  grande  quantité  d'alcool  bouillant  et  recristallise  par 
refroidissement  en  petites  aiguilles  fusibles  à  201".  J'en 
ai  obtenu  trop  peu  pour  pouvoir  l'identifier. 

La  substitution  du  brome  par  le  chlore  doit  avoir  pour 
conséquence  la  production  d'éthanes  bromochlorés  plus 
riches  en  chlore  que  le  dichlortribrométhane.  Je  ne  les  ai 
pas  recherchés  dans  les  produits  de  la  réaction,  la  quan- 
tité de  produit  bouillant  de  100°  à  140°  dans  le  vide  étant 
trop  faible  pour  être  soumise  à  un  travail  de  séparation. 

Le  composé  antimonique  cristallin,  qui  constituait  le 

C)  Wallach,  Liebufs  Annakn,  t.  CCIII,  j).  89. 


(  523  ) 
résidu  de  la  préparation,  était  formé  de  trichlorure  d'an- 
timoine pur. 

J'ai  soumis  le  (3  dichiortribrométhane  à  l'action  de  la 
potasse  alcoolique.  100 grammes  de  produit  furentdissous 
dans  leur  poids  d'alcool  et  traités  par  20  grammes,  soit 
un  léger  excès,  de  potasse  caustique  dissoute  dans 
oOO  centimètres  cubes  d'alcool. 

La  réaction  s'accompagna  d'une  vive  élévation  de  tem- 
pérature et  détermina  la  précipitation  immédiate  du  sel 
de  potassium.  Après  addition  de  toute  la  potasse,  j'ai 
cbaufTé  au  reflux  pendant  une  lieure  pour  acbever  la 
réaction,  puis  j'ai  précipité  par  l'eau,  séché  et  distillé  à  la 
pression  atmosphérique. 

La  distillation  commença  à  lliiP,  et  entre  160"  et  180° 
je  recueillis  la  plus  grande  partie  du  produit.  Au-dessus 
de  480°,  le  thermomètre  monta  lentement  jusque  200°  et 
j'obtins,  entre  ces  limites  de  température,  un  distillât  qui 
se  prit  partiellement  en  cristaux  par  refroidissement.  Je 
n'ai  observé  aucune  trace  de  décomposition. 

Le  liquide  récolté  entre  160°  et  i80°  fut  rectifié  au 
Lebel  et  me  fournit  une  substance  bouillant  à  172°  sous 
7(35  millimètres  de  pression. 

J'en  ai  fait  une  combustion. 

ie',48'24  de  sub>lance  ont  donné  08^5134  COj, 

soit  1s%4002C,  ou  9.44  "/„. 

Calculé  pour  CXf^Rr,  :  9.45  »/»• 

Le  dichlordibrométhylèiie  que^  je  désignerai  aussi  par 
la  lettre  (3,  est  un  liquide  incolore,  d'une  odeur  agréable, 
ne  s'altérant  pas  à  la  lumière.  Il  se  solidifie  à  une  tempé- 
rature un  peu  inférieure  à  0°.  Sa  densité  à  17°, 5  est  de 
2.3753  ;  son  indice  de  réfraction  à  16°,  de  1 .5800. 


(  524  ) 

La  densité  de  vapeur  est  normale,  comme  le  montrent 
les  données  de  l'expérience  : 


Poids 

de 

substance. 

Température. 

l'ie>sioii 
barométrique 
réduite  à  0". 

Volume. 

Densité. 

l'oids 

moléculaire 

déduit. 

os^ossa 

1860 

doS^'-'.O 

63«,ti 

8.82 

2o:i9 

Poids  moléculaire  théorique  :  254.2. 

Quand  on  distille  un  mélange  d'alcool  et  de  fi  dichlor- 
dibrométhylène,  celui-ci  (orme  avec  l'alcool  une  vapeur 
mixte,  distillant  vers  85°,  analogue  à  celle  que  j'ai 
observée  pour  le  dibronifluorélhylène.  Il  n'est  donc  pas 
avantageux  de  distiller  directement  le  produit  brut  de  la 
réaction,  pour  enlever  l'excès  d'alcool  quand  on  prépare 
le  (3  dichlordibrométhylène;  il  vaut  mieux  précipiter  par 
l'eau. 

L'acide  sulfurique  concentré  est  sans  action  sur  le 
(3  dichlordibrométhylène.  Quand  on  entraîne  la  vapeur  de 
ce  dernier  par  un  courant  d'anhydride  carbonique  à  tra- 
vers un  tube  de  verre  chaulïé  au  rouge,  il  y  a  décompo- 
sition partielle.  Une  partie  de  la  substance  se  carbonise 
en  dégageant  du  brome  et  du  chlore,  une  autre  portion 
se  décompose  en  brome  et  en  perchlorbenzol,  mais  la 
majeure  partie  de  l'éthylène  chlorobromé  passe  sans  alté- 
ration. En  répétant  l'entraînement  à  plusieurs  reprises, 
on  parvient  à  obtenir  une  transformation  plus  complète 
en  chlorure  de  Julin. 

Le  (î   dichlordibrométhylène    s'altère   lentement    au 
contact  de  l'oxygène  en  se  transformant  en  un  chlorure 


(  525  ) 

acide.  J'ai  l'occasion  de  revenir  sur  cette  réaction  dans 
un  mémoire  que  je  présente  à  l'Académie. 

J'ai  isolé,  par  distillation  du  produit  bouillant  de  180"  à 
200°,  un  corps  solide,  distillant  à  202°  et  fondant  à  34°. 
Cette  substance  était  soluble  dans  l'alcool,  l'éther  et  le 
chloroforme.  Un  dosage  de  chlore  et  de  brome  m'a  donné 
les  résultats  suivants  : 

'|6^054l  de  substance  ont  donné  2g%4418  AgBr  -4-  AgCI. 

Par  la  transformation  en  chlorure  d'arçfent,  j'ai  constaté  une  perte 
de  poids  de  0g'',4598,  correspondant  à  Is^OilS  AgBr,  ou  08^,8284-  Br, 
soit  80.01  o/o  et  à  0k>,4989  ClAg,  soit  Os',  14238  Cl,  ou  11.86  <>/.. 


Calculé  pour  CaBrsCi. 

Trouvé. 

Br     80.15"/, 

80.01  7o 

Cl      11.90"/, 

II.8G70 

Les  cristaux  obtenus  étaient  donc  formés  de  tribrom- 
chloréthylène.  Ce  corps  a  été  obtenu  parDenzel  et, d'après 
cet  auteur,  fond  à  34° et  bout  à  203°-20o°. 

Dans  la  réaction  de  la  potasse  alcoolique  sur  le  fi 
dichlortribrométhanc,  il  s'était  donc  formé,  à  côté  du  (3 
dichlordibrométhylène,  qui  constitue  le  produit  le  plus 
important  de  la  réaction,  une  certaine  quantité  de  tri- 
bromchloréthylène. 

Pour  établir  l'importance  relative  des  deux  transfor- 
mations, j'ai  dosé  le  chlorure  et  le  bromure  de  potassium 
formés  dans  la  réaction.  Ces  corps  furent  dissous  dans 
l'eau  et  précipités  dans  une  partie  de  cette  solution  par 
le  nitrate  d'argent. 

0e'-,8820  de  AgCI  -+■  AgBr  m'ont  donné  par  l'action 
du  chlore  0^',70d2  AgCI,  ce  qui  correspond  à  0^,7485 
AgBr  ou  0g%31854  Br,  et  à  Os',033  Cl. 

J'ai  tiré  de  ces  données  numériques  que ,  pour  une 


(  526  ) 
molécule  de  chlorure  de  potassium,  il  se  formait 
4.28  molécules  de  bromure.  La  transformation  du  [3  tri- 
bromdichloréthane  en  p  dichloréthylène  est  donc  envi- 
ron quatre  fois  plus  importante  que  la  transformation  en 
tribromchlorétliylène. 

Je  rappellerai  que  M.  Henry  (*)  a  observé  un  phénomène 
analogue  pour  le  dichloriodéthane  et  pour  le  chlorbromé- 
thane.  Par  l'action  de  la  potasse  alcoolique,  il  a  obtenu, 
pour  le  premier,  un  mélange  de  quatre  parties  d'iodure 
de  potassium  et  d'une  partie  de  chlorure;  pour  le  second, 
de  trois  parties  de  chlorure  pour  une  de  bromure. 

Il  est  à  remarquer  qu'il  n'y  a  pas  de  règle  fixe  déter- 
minant la  nature  de  l'hydracide  qui  se  forme  en  quantité 
la  plus  forte.  Tantôt,  comme  pour  le  chlorbrométhane, 
c'est  l'halogène  le  plus  actif  qui  est  enlevé  en  proportion 
la  plus  forte  ;  tantôt,  au  contraire,  c'est  l'hydracide  déri- 
vant de  l'halogène  le  moins  négatif  qui  se  forme  en  quan- 
tité prépondérante. 

Le  fi  dibromdichloréthylène  se  combine  au  brome  par 
addition,  mais  cette  réaction  est  très  lente,  ne  réussit  bien 
qu'à  la  lumière  et  demande  plusieurs  jours  pour  être 
complète;  le  mélange  se  transforme  en  une  masse  cris- 
talline. Si  l'on  opère  en  solution  chloroformique,  il  se 
dépose  de  beaux  et  grands  cristaux.  Ceux-ci  sont  formés 
de  tétrabromdichloréthane,  comme  le  prouve  le  dosage  de 
carbone  que  j'y  ai  fait. 

1g%l250  de  substance  ont  donné  06%2491  CO,, 
soit  0e',06GI1  C,  ou  5.88  "/„ 

Calculé  pour  QCI.nr^  :  (:  =  5.80''/„. 


(*)  Henry,  Comptes  rendus,  t.  XCVIII,  pp.  S18,  680. 


(  527  ) 

Le  tétrabrom(licl)loréthane  est  très  peu  soluble  dans 
l'alcool  et  l'éther,  plus  soluble  dans  le  chloroforme;  son 
meilleur  dissolvant  est  le  benzol  bouillant. 

Quand  on  le  chaulle,  il  commence  déjà  à  dégager  du 
brome  à  140°  ;  il  fond  à  191°  avec  décomposition  impor- 
tante. Si  on  le  chaufle  rapidement,  il  se  décompose  sans 
se  fondre. 

J'ai  soumis  également  le  (3  dichlortribromélhane  à  l'ac- 
tion réductrice  de  la  poussière  de  zinc  en  présence  de 
l'alcool.  La  réduction  est  violente,  elle  s'accompagne 
d'une  très  forte  élévation  de  température  et  demande  à 
être  conduite  avec  précaution.  11  faut  refroidir  le  ballon 
dans  lequel  on  opère  avec  de  l'eau  glacée,  ajouter  le  zinc 
lentement  et  par  très  petites  portions,  et  agiter  constam- 
ment. 

Lorsque  l'addition  de  zinc  ne  produisit  plus  d'éléva- 
tion de  température,  j'arrêtai  l'opération.  Le  liquide  fut 
tillré  à  la  trompe  et  l'éthylène  obtenu  précipité  par  l'eau 
acidulée  par  l'acide  acétique  et  distillé  après  la  dessic- 
cation. 

L'ébullition  commença  à  100°  et  tout  le  liquide  passa 
à  la  distillation  au-dessous  de  115°.  En  rectifiant  au 
Lebel,  j'ai  isolé  un  corps  bouillant  à  112°-115°,  dont  j'ai 
fait  une  combustion. 

0e',8t09  de  substance  ont  donné  08%0o8  H^O, 
soit  Oer^OOGSl  H,  ou  0.8%, 
et  0B%41 30  CO2,  soit  O»',!  I U  C,  ou  \  5.87  «/„. 

Calculé  pour  C.3rCU.  Trouvé. 

C     13.67"/.  13.87  »/o 

H       0.57  "/o  0.57  »/„ 

Le  zinc,  en  agissant  sur  le  (3  dichlortribrométhane,  ne 


(  d28  ) 

lui  enlève  donc  que  du  brome.  Cette  conclusion  a  été 
vérifiée  par  l'analyse  du  sel  de  zinc  formé  :  c'était  du 
bromure  de  zinc  pur. 

Le  dichlorbrométhylène  que  j'ai  obtenu  est  liquide  et 
ne  solidifie  pas  à  -20".  Sa  densité  est  de  1.87(>4  à 
17°,5;  son  indice  de  réfraction,  de  15.190  à  16". 

La  densité  de  vapeur  a  été  prise  à  100". 


l'oids 

de 

substaïKîe. 

Température. 

Pression 
barométrique 
réduite  à  0°. 

Volume. 

Densité. 

Poids 

niol6iul:iire 

déJuit 

06'',0645 

lOti» 

15-1  ""°,7 

t)2«,;i 

.'>;>.4 

ni. 6 

1 

Le  dichlorbrométhylène  se  combine  aisément  au  brome 
pour  régénérer  le  fi  dichlortribrométhane.  11  ne  se  poly- 
mérise  pas  et  ne  paraît  pas  s'altérer  notablement  à  l'air. 

La  constitution  des  différents  corps  que  j'ai  obtenus 
peut,  me  semble-t-il,  se  déduire  avec  quelque  certitude 
des  considérations  suivantes  : 

Le  tribromdichloréthane  peut  avoir  pour  formule 


1. 

I 
CCI.H 


II. 

cnr.,ci 

I 

CBiCin 


m. 

CCUBr 
I 
CBrJI 


La  formule  III  est  celle  du  dichlortribrométhane  de 
Denzel. 

La  formule  I  doit  être  rejetée  pour  le  corps  que  j'ai 
obtenu,  car  un  composé  de  cette  formule  devrait  donner 
du  dibromchloréthvlène  sous  l'action  du  zinc. 


(  559  ) 

Il  s'agit  donc  d'établir  si  le  (3  dichlortribrométhane 
est  identique  ou  non  au  produit  de  Denzel.  Ce  dernier 
composé  bout  entre  215°  et  220°,  et  ne  se  solidifie  pas  à 
-  20°.  Denzel  ne  signale  pas  de  décomposition  à  l'ébul- 
lition.  Le  (3  dichlortribrométhane  se  décompose  au  con- 
traire et  se  solidifie  à  -  5°  environ.  Denzel,  il  est  vrai, 
déclare  n'avoir  pu  obtenir  un  produit  complètement  pur. 

Ledichlortribrométhylène  doit  se  transformer  par  la  po- 
tasse alcoolique  en  dichlordibrométhylène  dissymétrique, 
tandis  que  le  corps  de  la  formule  IF  doit  fournir  le  dichlor- 
dibrométhylène symétrique  :  (XIBr  =  CCIBr.  Denzel  a 
préparé  l'éthylène  dissymétrique  en  faisant  agir  la  potasse 
alcoolique  sur  1'  «  dichlortribrométhane  (*).  Ce  corps  a 
aussi  été  obtenu  par  Bourgoin  (**)  en  traitant  le  tétra- 
chlordibrométhane  CCI3  -  CCIBr.2  par  l'aniline.  Ces  au- 
teurs ne  donnent  ni  l'un  ni  l'autre  le  point  d'ébullition 
evact  du  produit,  mais,  d'après  Denzel,  il  serait  voisin 
de  l\)o\ 

Le  dichlordibrométhylène  de  Denzel  doit  donner  par 
addition  au  brome  un  tétrabromdichloréthane  de  la  for- 
mule 

CCUBf 

CBi-j. 

Cette  substance  a  été  obtenue  par  cet  auteur  en  faisant 
agir  le  brome  sur  le  composé  GHojBr-CHCl-  (***).  Ce  tétra- 
bromdibrométhylène  ne  commence  à  se  décomposer  qu'à 
175°  et  fond  à  180°  avec  décomposition. 


(")  Denzel,  Liebig's  Annalen,  t.  GXGV,  p.  208. 

(**)  Bourgoin,  Bulletin  de  la  Société  chimique,  t.  XXIV,  p.  116. 

('")  Denzel,  Berichte,  t.  XII,  p.  2i207. 

56 


(  530  ) 

Le  dichlordibrométhylène  que  j'ai  préparé  bout  à 
17^°  ;  il  donne  avec  le  brome  un  produit  d'addition  qui 
commence  à  dégager  du  brome  à  140"  et  qui  fond  à  19i°. 

Il  me  paraît  donc  plus  que  probable  que  je  me  suis 
trouvé  en  présence  d'un  composé  différent  de  celui  de 
Denzel  et  qui  ne  peut  être  alors  que  le  dichlordibrom- 
éthylène symétrique. 

Le  (3  dichlortribrométhane  aurait  donc  pour  formule 

CBr.Cl 
I 
CHBrCI. 

11  doit  donner  par  l'action  du  zinc  un  dichlorbrométhy- 
lène  de  la  formule 

CBrCl 

II 
CHCI, 

tandis  que  l'a  dichlortribrométhane  doit  donner 

CBrH 

II 
CCI2. 

Ce  dernier  a  été  décrit  également  par  Denzel,  qui 
l'obtint  par  l'action  de  la  potasse  alcoolique  sur  le  dichlor- 
dibrométhane  dissymétrique  CHCK2  -  CHBra  (*).  Il  bout  à 
II40-II50  et  possède  à  16°  une  densité  de  1.906. 

Le  produit  que  j'ai  obtenu  a  à  peu  près  le  même  point 
d'ébullition,  mais  sa  densité  à  17", 5  est  de  1.8764.  Une 
différence  de  trois  unités  de  la  deuxième  décimale  ne  peut 
être  due  à  une  différence  de  température  de  1",5. 

(*)  Denzel,  loc.  cit.,  p.  208. 


(  53i   ) 
L'ensemble  de  toutes  ces  différences  me  paraît  consti- 
tuer une  preuve  suffisante  pour  donner  au  tribromdichlor- 
éthane  que  j'ai  obtenu  la  formule  II  : 

CBpjCI 

I 

CIlBrCl 

Le  pentachlorure  d'antimoine  ne  provoquerait  donc 
pas  de  transposition  du  brome  en  agissant  sur  le  tribrom- 
éthylène,  comme  il  le  fait  à  l'égard  du  dibrométhylène 
symétrique  (*). 

Les  corps  que  je  viens  de  décrire  dans  ce  travail 
auraient  donc  pour  formule 

(:Br,CI  CBiCl  CBrCl  CBr.Cl 

I  II  I  I 

CHBr(J  CBrCl  CHCI  CBr^CI 

Je  me  propose  de  vérifier  encore,  par  de  nouvelles 
expériences,  l'exactitude  de  ces  formules. 

Gand,  le  1"  novembre  1898. 


(*)  Pendant  l'impression  de  ce  travail  a  paru  un  mémoire  de 
K.  Klbs  et  J.  Newmann  (*),  dans  lequel  ces  auteurs  donnent  le  résultat 
de  leurs  recherches  sur  l'action  du  chlore  sur  le  tritrométhylène. 

Ils  n'ont  pas  constaté,  comme  on  aurait  pu  le  croire,  l'addition 
d'une  molécule  de  chlore,  mais,  au  contraire,  une  substitution  de 
l'hydrogène  par  le  chlore,  avec  formation  de  tribromchloréthylène. 
Le  pentachlorure  de  phosphore  produit  le  même  phénomène.  En 
même  temps,  une  partie  du  brome  est  remplacée  par  du  chlore.  Il  est 
assez  curieux  d'observer  que  le  pentachlorure  d'antimoine,  qui  joue 
en  général  facilement  le  rôle  de  substituant,  ne  se  comporte  pas 
comme  le  chlore  ou  le  pentachlorure  de  phosphore  dans  la  réaction 
que  j'ai  décrite  dans  la  présente  communication. 

(')  Journal Jur  prakl.  Cliein.,  Bd.  LVIII,  p.  245. 


(  532  ) 


Contribution  à  Vétude  de  l'oxydation  des  éthi/lènes  halo- 
gènes; par  Fréd.  Swarts,  répétiteur  de  chimie  générale 
à  l'Université  de  Gand. 

Il  y  a  plusieurs  années  que  Demole  (*)  avait  reconnu 
que  certains  étliylénes  chlorés  et  bromes  possèdent  la 
remarquable  propriété  de  s'oxyder  à  l'air  en  donnant 
naissance  soit  à  des  chlorures,  soit  à  des  bromures 
acides.  Il  avait  observé  ce  phénomène  notamment  pour 
le  dibrométhylène  dissymétrique  et  le  tribrométhylène, 
(jui  donnent  respectivement  le  bromure  de  bromacétyle 
et  le  bromure  de  dibromacétyle.  Le  chlorbrométhylène 
dissymétrique  CClBr  =  CH2,  auquel  Demole  avait  assigné 
erronément  la  formule  symétrique,  se  transforme  en  un 
mélange  de  bromure  de  chloracétyle  et  de  chlorure  de 
bromacétyle  ;  ce  dernier  est  le  produit  le  plus  important 
de  la  réaction.  Il  se  manifeste  dans  ces  réactions  un 
déplacement  d'un  des  atomes  d'halogènes  sur  l'atome  de 
carbone  voisin,  la  double  soudure  se  défait  et  l'oxygène 
se  fixe  sur  l'atome  de  carbone  dénudé.  Il  est  à  remarquer 
que  l'hydrogène  ne  subit  pas  de  transposition  dans 
cette  réaction.  Demole  a  en  même  temps  observé  une 
polymérisation  partielle  de  l'éthylène,  dont  l'importance 
variait  avec  les  conditions  de  l'expérience. 

J'ai  cru  intéressant  d'étudier  l'oxydation  de  quelques 
éthylènes  fluobromés  que  j'ai  obtenus  dans  le  cours  de 
mes  recherches  sur  les  composés  organiques  fluorés.  J'ai 


(*)  Demole,  Berichte,  t.  XI,  pp.  316  et  1307. 


(  535  ) 

également  essayé  d'oxyder  l'éthylène  percliloré,  l'élhy- 
lène  peibromé,  le  dichlordibrométliylène  symétrique  et  le 
dibrométhylène  symétrique.  Je  soumets  le  résultat  de 
mes  investigations  à  l'appréciation  de  l'Académie. 

Oxydation  du  dibronidifluoréthylène. 

J'ai  déjà  eu  l'occasion  de  signaler  l'oxydation  très  facile 
par  l'oxygène  du  dibronidifluoréthylène  symétrique,  oxy- 
dation qui  m'a  permis  d'obtenir  l'acide  dibromfluoracé- 
tique  {*). 

J'ai  repris  l'étude  de  ce  phénomène,  afin  de  vérifier  si, 
à  côté  du  fluorure  de  dibromfluoracétyle,  il  ne  se  pro- 
duisait pas  de  bromure  de  difluorbromacétyle. 

J'ai  introduit  dans  un  ballon  muni  d'un  réfrigérant 
ascendant  |18  grammes  de  dibromdifluoréthylène  et 
10  grammes  d'alcool,  et  j'ai  fait  barboter  dans  le  mélange 
un  courant  d'oxygène  bien  sec.  Il  ne  se  produisit  pas 
d'élévation  notable  de  la  température;  l'oxygène  fut 
beaucoup  moins  bien  absorbé  que  par  le  dibromdifluor- 
éthylène pur.  Pour  activer  la  réaction,  j'ai  chauffé  le 
ballon  à  40"  environ.  II  se  condensa  dans  le  réfrigérant 
un  liquide  extrêmement  volatil,  que  j'ai  reconnu  plus  tard 
être  de  l'aldéhyde,  provenant  de  l'oxydation  de  l'alcool. 
J'ai  constaté  en  même  temps  un  dégagement  abondant 
d'acide  fluorhydrique,  se  traduisant  par  une  corrosion 
énergique  du  verre. 

Au  bout  de  six  heures,  j'ai  interrompu  le  courant 
d'oxygène  et  j'ai  secoué  le  produit  de  la  réaction  avec  de 


(*)  F.  SwARTS,  Sur  l'acide  dibrom fluor acéliqne.  (Bull,  de  l'Acad. 
Rov.  DE  Belgique,  3^  sér.,  t.  XXXV,  p.  849.) 


(  534  ) 

l'eau,  pour  enlever  l'excès  d'alcool.  Le  liquide  précipité 
fut  séché  sur  du  chlorure  de  calcium  et  distillé. 

Le  thermomètre  s'éleva  rapidement  de  GO"  à  170"; 
par  rectitications  répétées,  je  ne  parvins  à  séparer  qu'un 
peu  de  dibromdifluorélhylène  inaltéré  et  du  dihromfluor- 
acétate  d'éthyle.  Le  thermomètre  ne  se  fixa  jamais  aux 
environs  de  110",  température  voisine  du  point  d'ébullilion 
probable  du  difluorbromacétate  d'étbyle.  Je  n'ai  pu  sépa- 
rer, pendant  l'ascension  rapide  du  thermomètre,  que 
0^,4  de  produit  bouillant  entre  110°  et  120°,  contre 
20  grammes  de  dibromfluoracétate  d'éthyle  pur. 

L'oxydation  du  dibromdiiluoréthylène  symétrique  ne 
fournit  donc  qu'un  fluorure  acide. 

Oxydation  du  tribromfluoréllujlène 

CDi\, 

H 

CBrFI. 

Le  tribromfluoréthylène  se  laisse  oxyder  par  l'oxygène, 
mais  moins  facilement  que  le  dibromdiiluoréthylène. 

11  se  produit  une  légère  élévation  de  température  au 
début  de  l'expérience,  mais  après  peu  de  temps  le  liquide 
revient  à  la  température  ordinaire.  L'oxydation  marche 
beaucoup  mieux  quand  on  opère  à  100".  Pour  observer 
les  progrès  de  la  transformation,  je  prélevais  de  temps  à 
autre  une  petite  portion  du  liquide  que  je  versais  dans 
l'eau,  afin  d'établir  la  quantité  relative  de  bromure  ou 
de  fluorure  acide  formé. 

Pendant  l'oxydation,  le  liquide  brunit  fortement  et 
subit  une  destruction  partielle avecdégagement  de  vapeurs 
de  brome;  celui-ci  ne  disparaît  pas  complètement  par 
refroidissement. 


(  555  ) 

Après  seize  heures,  la  transformation  était  presque  com- 
plète :  en  secouant  avec  de  l'eau,  je  pus  constater  la  for- 
mation d'un  corps  cristallin,  insoluble  dans  l'eau,  mais 
soluble  dans  l'éther.  Le  courant  d'oxygène  fut  interrompu 
et  je  distillai  le  produit  de  la  réaction. 

J'ai  obtenu  ainsi  un  liquide  bouillant  entre  130°  et 
160°,  qui  fumait  fortement  à  l'air  en  dégageant  de  l'acide 
bromhydrique  et  fluorhydrique. 

Il  restait  dans  le  ballon  un  résidu  peu  important  qui 
se  décomposa  assez  facilement  quand  j'essayai  de  le 
distiller  et  que  j'ai  traité  par  l'eau.  J'ai  séparé  ainsi  le 
composé  solide,  cristallin,  mentionné  plus  haut,  qui  fut 
dissous  dans  l'éther.  Par  cristallisation,  j'obtins  de  belles 
aiguilles  blanches,  d'une  odeur  camphrée  mais  irritante, 
qui  fondaient  à  176°  et  se  décomposaient  à  une  tempé- 
rature peu  supérieure.  Toutes  ces  propriétés  sont  celles 
du  pentabromfluoréthane,  dont  la  présence  s'explique 
aisément  par  le  fait  que  le  tribrométhylène  subit  une 
décomposition  partielle  pendant  l'oxydation,  avec  pro- 
duction de  brome,  dont  une  partie  est  fixée  par  le  tri- 
brométhylène et  le  transforme  en  pentabromfluoréthane. 

Le  liquide  distillé  fut  éthérifîé  par  l'alcool  absolu.  Il 
se  dégagea  de  l'acide  fluorhydrique.  En  précipitant  par 
l'eau,  j'ai  séparé  un  liquide  très  dense,  qui  fut  séché  et 
distillé.  La  distillation  commença  à  145°;  le  thermomètre 
monta  lentement  jusque  170°,  température  à  laquelle  il 
semaintint  pendantia  plus  grande  durée  de  la  distillation, 
puis  s'éleva  lentement  jusque  225°.  Au-dessus  de  200°, 
j'observai  une  décomposition  partielle,  avec  dégagement 
de  brome  et  d'acide  bromhydrique. 

En  rectifiant  au  Lebel  le  liquide  bouillant  au-dessous 
de  180°,  j'ai  séparé  un  peu  de  tribromfluoréthylène  inal- 


(  550  ) 

téré  et  un  corps  bouillant  à  174", 5,  que  toutes  ses  pro- 
priétés ainsi  qu'un  dosage  de  carbone  et  d'hydrogène 
m'ont  démontré  être  du  dibromfluoracétale  d'éthyle. 

Le  distillât  recueilli  au-dessus  de  180°  m'a  fourni 
d'abord  du  dibromfluoracétate  d'éthyle,  ensuite  un  liquide 
distillant  avec  légère  décomposition  à  2125°  et  qui  ne 
contenait  pas  de  fluor.  Un  dosage  de  brome  m'a  démon- 
tré que  je  me  trouvais  en  présence  du  tribromacétate 
d'éthyle,  dont  l'existence  était  à  prévoir  en  raison  du 
dégagement  d'acide  fluorhydriquc  qui  avait  accompagné 
l'éthérificalion. 

J'ai  obtenu  environ  cinq  fois  plus  de  dibromfluoracé- 
tate d'éthyle  que  de  tribromacétate;  il  ne  fut  évidemment 
pas  tenu  compte  des  petites  quantités  de  liquide  à  point 
d'ébullition  intermédiaire. 

La  production  du  bromure  acide  est  donc  le  phéno- 
mène principal  dans  ce  processus  d'oxydation. 

Oxydation  du  dibromfluorélhylène 

Ce  corps,  comme  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de  le  signa- 
ler (*),  s'oxyde  facilement  à  l'air. 

1(X)  grammes  de  dibromfluoréthylène  furent  oxydés 
dans  un  appareil  à  reflux  par  un  courant  lent  d'oxygène 
sec.  La  fixation  de  l'oxydation  est  accompagnée  au  début 
d'une  forte  élévation  de  température.  Le  liquide  s'évapore 
et  l'oxydation  de  la  vapeur  se  produit  beaucoup  plus  éner- 
giquement  que  celle  du  liquide;  aussi  l'atmosphère  du 

(*)  F.  SwARTS,  Sur  quelques  dérivés  (luobromés  en  C^  (première 
communication).  (Bull,  de  l'Acad.  roy.  de  Belgique,  3°  sér., 
t.  XXXIII.  p.  439.) 


(  '^37  ) 
ballon  est-elle  plus  chaude  que.  le  liquide  lui-même.  Au 
commencement  de  rexpérience,  l'absorption  de  l'oxy- 
gène est  complète  pour  un  courant  de  !  centimètre  cube 
par  seconde. 

A  la  fin  de  l'opération,  l'oxydation  est  beaucoup  plus 
lente,  et  l'expérience  m'ayant  prouvé  que  c'est  surtout  à 
l'état  de  vapeur  que  le  dibromlluoréthylène  s'oxyde,  j'ai 
chauffé  jusqu'à  ébnllition  tranquille  pour  achever  la  réac- 
tion. Je  n'ai  observé  aucune  destruction  pendant  la  durée 
de  l'expérience. 

Après  deux  jours,  la  transformation  était  complète; 
une  prise  d'essai  se  dissolvait  complètement  dans  l'eau. 

Le  produit  de  la  réaction  lut  soumis  à  la  distillation. 
L'ébullition  commença  à  1  lo"  et  le  thermomètre  se 
maintint  pendant  presque  toute  la  durée  de  l'opération 
entre  115'  et  120",  puis  monta  lentement  à  125",  enfin 
rapidement  jusqu'à  KJO".  Entre  125"  et  IGO",  je  n'ai 
recueilli  ([u'une  très  faible  quantité  de  substance.  J'ai 
pu  distiller  jusqu'à  la  dernière  goutte  de  liquide  sans 
observer  de  décomposition. 

J'avais  obtenu  environ  HO  grammes  de  produit  bouillant 
de  115"  à  125".  En  le  rectifiant  au  Lebel  à  quatre  boules, 
j'ai  isolé  70  grammes  d'un  corps  ayant  un  point  d'ébulli- 
tion  absolument  fixe  de  116",  plus  une  petite  portion  de 
liquide  distillant  de  115"  à  125". 

Le  composé  bouillant  à  1 16"  fume  à  l'air  en  dégageant 
de  l'acide  bromhydrique  ;  il  réagit  avec  violence  sur  l'eau. 

J'y  ai  fait  un  dosage  de  carbone  et  d'hydrogène. 

O6',9o05  de  substance  ont  donné  06%0592  H^O, 

soil  O8',00436o  H,  ou  0  45  »/„, 

et  0s%3818  CO2,  soit  06M04I5  C,  ou  10.93  "/„. 

Ces  teneurs  en  carbone  et  hydrogène  correspondent  à 


(  S3S  ) 

celles  d'un  corps  de  la  formule  C^Br^FlHO,  qui  contien- 
drait 

c  H 

10.91°/.  0.45  Vo 

Cette  formule  appartient  aussi  bien  au  fluorure  de 
dibromacélyle  qu'au  bromure  de  fluorbromacélyle.  Pour 
déterminer  la  quantité  de  brome  contenu  sous  forme  de 
bromure  acide,  j'ai  détruit  la  substance  par  l'eau  glacée 
et  j'ai  titré  l'acide  bromhydrique  formé  par  la  méthode 
de  Volhardt. 

2g',5244  de  substance  ont  précipilé  I03'=%2d  d'AgNOj  7,0, 
correspondant  à  Oe^S-235  Br,  ou  35  86"/..- 

Le  bromure  de  fluorbromacétyle  contiendrait  56.3  % 
de  brome  sous  forme  de  bromure  acide. 

Le  liquide  bouillant  à  116°  peut  être  considéré  comme 
du  bromure  de  fluorbromacétyle  presque  complètement 
pur.  Traité  par  l'eau,  il  donne  une  solution  aqueuse  dans 
laquelle  l'acétate  de  calcium  ne  produit  d'ailleurs  qu'une 
légère  opalescence.  Il  ne  contient  donc  que  des  traces  de 
fluorure  de  dibromacétyle. 

J'ai  éthérifîé  ce  bromure  acide  par  l'alcool  absolu  :  j'ai 
obtenu  ainsi  du  bromure  d'éthyle  et  un  éther  bouillant 
à  150";  oO  grammes  de  bromure  acide  m'ont  donné 
40  grammes  d'éther,  soit  un  rendement  théorique. 

L'analyse  de  cet  éther  m'a  donné  les  résultats  sui- 
vants : 

1K%012I  de  substance  ont  fourni  Ok^^TS^  C02,soit  0s^03036H, 
ou  3.3  "/o, 
et  0g%9375  CO2,  soit  0?%2872  C,  ou  25  8  »/.. 

Calculé  pour  CFlBrFl  -  CO^  -  CaHs. 
C     25  94  "/„ 
H       3.24  7, 


(  559  ) 
La   densité   de   vapeur,    déterminée   par   le   procédé 
d'Hofmann  à  la  température  de  184°,  a  confirmé  les 
données  analytiques. 


Poids 

de 

substance. 

Température. 

Pression 
b.irniiiélriqae 
réiluitpàO". 

Volume. 

Densilé. 

Poids 

moléculaire 

déduit. 

0gs(t575 

184° 

146n"°,5 

62",  1 

6.^23 

179.4 

Poids  moléculaire  théorique  de  CHBrFl  -  CO^C^H.;  : 
184.6. 

11  se  forme  donc  du  fluorbromacétate  d'élhyle. 

Les  produits  de  queue  de  la  distillation  du  bromure  de 
lluorbromacétyle  m'ont  également  donné  par  éthérifica- 
tion  le  fluorbromacétate  d'éthylc  ainsi  qu'une  très  petite 
quantité  d'un  autre  éther,  bouillant  de  194°  à  200°,  ne 
contenant  pas  de  fluor  et  se  transformant  par  l'ammo- 
niaque en  une  amide  fondant  à  156°.  Tous  ces  caractères 
permettent  d'identifier  cet  éther  avec  le  dibromacétate 
d'éthyle.  Dans  l'éthérification,  il  se  dégageait  de  l'acide 
fluorhydrique;  la  formation  de  l'éther  dibromacélique 
doit  être  attribuée  à  l'existence  d'un  peu  de  fluorure  de 
dibromacétyle  dans  les  produits  d'oxydation  du  dibrom- 
fluoréthylène.  Ce  fluorure  doit  avoir  un  point  d'ébuUi- 
tion  très  voisin  du  bromure  de  fluorbromacétyie. 

Quant  au  liquide  qui  distille,  en  très  minime  quantité 
il  est  vrai,  entre  125°  et  150°,  il  est  constitué  probable- 
ment par  de  l'acide  fluorbromacétique,  provenant  de 
l'altération  du  bromure  acide  à  l'air  humide. 

Le  dibromfluorbromacétyle  se  transforme  donc  presque 


(  540  ) 
exclusivement  en  bromure  de  fluorbromacétyle  ;  la  for- 
mation de  fluorure  de  dibromacétyle  est  tout  à  fait  insi- 
gnifiante; je  n'ai  en  effet  pas  obtenu  2  grammes  de 
dibromacétate  d'éthyle  aux  dépens  de  100  grammes  de 
dibromfluoréthylène. 

Dans  le  travail  cité  plus  haut,  dans  lequel  j'ai  décrit  le 
dibromtluorétbylène,  j'avais  annoncé  que  ce  corps  s'oxyde 
à  l'air  :  la  corrosion  du  verre,  le  dégagement  d'acide 
fluorhydrique  que  j'avais  observés,  m'avaient  fait  croire  à 
la  production  d'une  quantité  importante  d'un  fluorure 
acide.  Certes,  ce  dernier  se  produit,  mais  l'étude  plus 
approfondie  du  phénomène  m'a  montré  que  je  m'étais 
trompé  sur  l'importance  de  la  transformation  en  fluorure 
acide;  celle-ci  n'est  que  secondaire  au  point  de  vue 
quantitatif. 

Je  me  suis  demandé  si  l'élhylène  perchloré  et  per- 
bromé,  que  Demole  déclarait  réfractaires  à  l'oxydation,  le 
sont  bien  autant  que  cet  auteur  le  croyait.  L'oxydabilité 
facile  du  dibromdifluoréthylène  et  du  tribromfluoréthylène 
m'avaient  en  effet  prouvé  que  les  éthylènes  persubstitués 
sont  capables  de  fixer  l'oxygène. 

Oxydation  du  perchloréthyléne. 

Ce  corps  ne  s'altère  pas  à  l'air,  mais  on  sait  que 
l'anhydride  sulfurique  le  transforme  en  chlorure  de  tri- 
chloracétyle  à  130".  Il  était  donc  possible  que  l'oxygène 
se  fixât  directement  sur  l'éthylène  perchloré. 

Au  lieu  d'oxyder  par  l'oxygène,  j'ai  essayé  d'oxyder  par 
l'ozone. 

Celui-ci  était  produit  dans  un  ozonisateur  de  Siemens 


(  Ui  ) 
et  était  envoyé,  à  l'aide  de  tubes  rodés  aux  joints,  dans  le 
ballon  contenant  l'étliylène  à  oxyder. 

J'ai  rapidement  reconnu  par  une  expérience  prélimi- 
naire que  le  bichlorure  de  carbone  se  transformait 
partiellement,  même  à  froid,  et  que  le  gaz  sortant  de 
l'appareil  avait  une  réaction  acide  et  possédait  l'odeur 
irritante  d'un  chlorure  acide. 

L'oxydation  du  perchloréthylène  par  l'oxygène  ozonisé 
est  cependant  très  lente,  même  à  chaud,  et  je  ne  suis 
jamais  parvenu  qu'à  obtenir  une  transformation  incom- 
plète en  chlorure  acide,  même  en  maintenant  le  courant 
d'ozone  pendant  huit  jours. 

Comme  le  chlorure  de  trichloracétyle  qui  devait  se 
produire  a  à  peu  près  le  même  point  d'ébuUition  que 
l'éthylène  perchloré,  je  ne  pouvais  espérer  séparer  les 
deux  corps  par  distillation. 

Pour  identifier  le  produit  d'oxydation,  j'ai  traité  par 
une  solution  concentrée  d'ammoniaque  dans  l'eau. 
L'éthylène  perchloré  en  excès  fut  séparé  à  l'entonnoir  à 
robinet  et  la  solution  ammoniacale  secouée  avec  de 
l'éther.  Ce  dernier  fut  décanté,  séché  et  évaporé.  Il  se 
déposa  des  cristaux  incolores  qui  furent  recristallisés  du 
chloroforme  bouillant.  J'obtins  ainsi  des  lamelles  fondant 
à  141°,  point  de  fusion  de  la  irichloracétamide.  Un  dosage 
d'azote  a  confirmé  l'identité  de  ces  deux  corps. 

06^357  de  substance  ont  donné  06'',414NH3, 
soit  0e^0538N,  ou  9.5»/,. 

Calculé  pour  CCIs  -  CONIL,  :  9.55  •/,. 

En  opérant  à  100°  avec  15  grammes  de  perchloréthylène 
et  en  faisant  passer  25  litres  d'oxygène  ozonisé  à  raison 
d'une  bulle  par  seconde,  j'ai  obtenu  environ  Os'-,7  de 
trichloracétamide. 


(  542  ) 

Dans  une  autre  expérience,  faite  à  froid,  j'ai  titré 
acidimétriqueinent  le  chlorure  de  trichloracétyle  formé. 
S^SS  de  perchloréthylène  furent  mis  en  expérience  ;  j'y 
fis  passer  20  litres  d'oxygène  ozonisé.  Il  se  forma  0^',152 
de  chlorure  de  trichloracétyle. 

Le  perchloréthylène  est  donc  susceptible  d'oxydation 
par  l'ozone. 

Je  ferai  remarquer  incidemment  que  cette  réaction 
constitue  une  voie  de  synthèse  totale  assez  simple  de 
l'acide  acétique,  par  la  succession  des  transformations 
suivantes  : 

C  -4-  S  »^-  CSi  »-*■  CCl^  B-^  CîCIi  Br*  CCI3 .  COCl  »*  CCI3 .  CO .  OH 
!^CH3-C0.0H. 

Oxydation  du  tétrabrométhylène. 

Ce  corps  a  été  obtenu  par  le  procédé  de  Lennox  (*), 
en  faisant  agir  la  potasse  alcoolique  sur  une  solution  de 
pentabrométhane  dans  l'alcool.  Le  pentabrométhane  a 
été  i)réparé  par  fixation  du  brome  sur  le  tribrométhylène. 
L'oxydation  a  été  provoquée  par  l'ozone. 

L'éthylène  perbromé  étant  solide  à  la  température 
ordinaire,  j'ai  effectué  l'oxydation  à  chaud,  en  opérant  à 
une  température  un  peu  inférieure  à  la  température  de 
sublimation  de  l'éthylène. 

J'ai  observé  également  que  le  gaz  sortant  de  l'appareil 
avait  une  réaction  acide  et  répandait  des  fumées  d'acide 
bromhydrique.  L'oxydation  était  cependant  beaucoup 
moins  rapide  que  celle  du  perchloréthylène. 

Après  avoir  maintenu  le  courant  d'oxygène  ozonisé 

(*)  Lennox,  Annalen  der  Chemie  und  Pharmacie,  t.  CXXII,  p.  126. 


(  8*3  ) 
pendant  un  jour,  j'ai  reconnu  que  l'éthylène  perbromé 
se  prenait  en  cristaux  par  refroidissement,  mais  que 
ceux-ci  étaient  visiblement  humectés  d'un  liquide.  En 
continuant  pendant  plusieurs  jours  à  faire  passer  l'ozone, 
je  suis  parvenu  à  augmenter  la  quantité  de  liquide,  mais 
pas  assez  pour  pouvoir  le  séparer  des  cristaux. 

Ceux-ci  furent  triturés  avec  une  solution  d'ammo- 
niaque, et  l'amide  qui  avait  dû  se  produire  fut  séparée 
de  la  même  manière  que  la  trichloracétamide.  J'ai 
obtenu  ainsi  un  corps  fondant  à  120"  et  présentant  tous  les 
caractères  de  la  tribromacétamide.  Je  n'ai  cependant  pu 
en  recueillir  plus  de  0^%1,  soit  une  quantité  trop  faible 
pour  l'analyser. 

La  possibilité  d'oxyder  le  perbrométhylène  et  de  le 
transformer  en  bromure  de  tribromacétyle  par  l'oxygène 
n'en  est  pas  moins  démontrée. 

Oxydation  du  dic/ihrdibrométhi/lène  symétrique. 

Le  dichlordibrométhylène  symétrique,  décrit  dans 
une  autre  communication  que  j'ai  l'honneur  d'adresser 
à  l'Académie,  a  également  été  soumis  à  des  essais 
d'oxydation.  Je  signale  dans  ce  travail,  qui  a  surtout  été 
fait  dans  le  but  d'obtenir  cet  éthylène  chlorobromé  afin 
de  pouvoir  le  soumettre  à  l'action  de  l'oxygène,  que  ce 
corps  s'altère  lentement  à  l'air  en  se  transformant  en  un 
chlorure  ou  en  un  bromure  acide. 

Cette  oxydation  à  l'air  est  cependant  extrêmement 
faible  et  lente,  même  à  chaud.  Aussi  ai- je  préféré  employer 
l'ozone  pour  fixer  l'oxygène. 

Malgré  l'emploi  d'un  courant  d'oxygène  ozonisé  main- 
tenu pendant  huit  jours  et  tout  en  opérant  à  la  tempéra- 


(  544  ) 

lure  (l'ébullition   de  l'élhylène,   je  n'ai  obtenu   qu'une 
transformation  très  incomplète. 

J'ai  transformé  le  produit  d'oxydation  en  amide,  qui 
fut  purifiée  par  cristallisation.  Cette  amide  était  insoluble 
dans  l'eau,  très  soluble  dans  l'éther  et  l'alcool,  peu 
soluble  dans  le  chloroforme,  presque  insoluble  dans  le 
tétrachlorure  de  carbone  froid.  Ce  dernier  dissolvant  m'a 
servi  à  obtenir  un  produit  pur,  qui  fondait  à  127°.  Tous 
ces  caractères  sont  ceux  de  la  chlordibromacétamide. 
J'avais  très  peu  de  produit  à  ma  disposition  et  les 
purifications  répétées  m'en  ont  fait  perdre  assez  pour 
qu'il  ne  m'en  restât  plus  une  quantité  sulfisante  pour  faire 
une  analyse  de  contrôle.  Mais  la  constance  du  point  de 
fusion  dans  des  produits  de  cristallisations  successives, 
m'a  assuré  de  la  pureté  de  la  substance. 

Dans  une  autre  expérience  faite  à  froid  et  en  présence 
de  l'eau,  j'ai  déterminé  la  quantité  de  chlorure  acide 
produite. 

15  grammes  de  dibromdichloréthylène  furent  oxy- 
dés à  froid  sous  une  couche  d'eau,  à  l'aide  d'un  courant 
d'oxygène  ozonisé  maintenu  pendant  quinze  jours.  Ils 
m'ont  fourni  Oe%86  de  chlorure  acide.  On  voit  par  là 
que  la  transformation  est  extrêmement  lente. 

Le  dichlordibrométhylène  symétrique  se  comporte  donc 
comme  le  dilUiordibrométhylène  symétrique  :  c'est  l'ha- 
logène le  plus  actif  qui  reste  combiné  au  groupement 
C  =  0. 

Il  résulte  de  l'ensemble  de  ces  expériences  que  les 
cinq  éthylènes  persubslitués  que  j'ai  soumis  à  l'oxydation 
se  laissent  tous  transformer  soit  par  l'oxygène,  soit  par 
l'ozone,  avec  plus  ou  moins  de  facilité. 


(  345  ) 

Oxi/dalion  du  dibromélhylène  stjmélrique 
CHBr  =  CHBr. 

J'ai  soumis  l'éthylène  bibromé  symétrique  à  l'action 
oxydante  de  l'ozone,  ce  corps  ne  s'altéranl  pas  à  l'air. 
L'ozone  oxyde  le  dibrométbylène  à  chaud,  mais  il  se  pro- 
duit une  décomposition  importante,  avec  dégagement 
abondant  d'acide  bromhydrique  et  résiniiicalion  partielle 
du  liquide.  Dans  ces  conditions,  il  m'était  difficile  de 
tirer  des  conclusions  bien  sûres  de  la  marche  de  l'oxy- 
dation. 

Celle-ci  est  très  lente,  à  l'enconlre  de  ce  qui  se  pré- 
sente pour  le  dibrométbylène  dissymétrique.  Après  avoir 
maintenu  le  courant  d'oxygène  ozonisé  pendant  huit 
jours,  j'ai  arrêté  l'opération. 

Le  produit  de  la  réaction  fumait  fortement  à  l'air,  mais 
possédait  en  môme  temps  une  odeur  manifeste  d'aldé- 
hyde bromée.  Sa  composition  est  fort  complexe. 

Je  ne  m'étendrai  pas  sur  les  difficultés  que  j'ai  rencon- 
trées dans  la  séparation  des  différents  produits  que  je 
suis  parvenu  à  isoler.  La  réaction  est  surtout  une  réaction 
destructive;  le  composé  principal  que  l'on  retrouve  après 
l'oxydation  est  le  tétrabrométhane  dissymélrique  Œv-^ 
-  CH^Br,  bouillant  sans  altération  à  255"  sous  la  pression 
atmosphérique  et  que  j'ai  identifié  par  analyse.  J'y  ai 
trouvé  : 

Calculé  pour  CjH2Bi'4. 

C         7.1 3  »/„  ^    6.!)9  •/.. 

H         O.G2''/„  0.42  "/„ 

Br     92.27  "/o  92.51  "/. 

S"*    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  37 


(  546  ) 

A  côté  de  ce  corps,  j'ai  obtenu  une  petite  quantité 
d'un  acide  bouillant  vers  225°  et  dont  le  sel  de  plomb 
est  bien  soluble  dans  l'eau.  Le  point  d'ébullition,  les 
caractères  du  sel  de  plomb  m'ont  fait  conclure  que  c'est 
de  l'acide  dibromacétique. 

La  formation  de  cet  acide  s'explique  par  le  fait  que 
dans  l'oxydation  du  dibrométhylène  symétrique  il  se  pro- 
duit aussi  une  aldéhyde  bromée,  bouillant  vers  145°,  très 
soluble  dans  l'eau,  dont  on  peut  la  précipiter  par  l'acide 
sulfurique  concentré.  La  dibromaldéhyde  bout  à  142°, 

En  même  temps  se  forme  du  bromure  de  bromacétyle, 
mais  en  quantité  si  minime  que  j'ai  dîi  me  borner  à  le 
caractériser  qualitativement. 

Il  résulte  néanmoins  de  ce  que  je  viens  d'exposer  qu'on 
peut  oxyder  le  dibrométhylène  symétrique,  que  celui-ci 
donne  comme  produits  d'oxydation  du  bromure  de  bro- 
macétyle et  de  l'aldéhyde  dibromée,  qu'une  oxydation 
ultérieure  transforme  en  acide  dibromacétique. 

C'est  probablement  à  la  présence  de  l'aldéhyde  bromée 
qu'est  due  la  résinification  pendant  l'oxydation. 

Dans  tous  les  phénomènes  d'oxydation  que  j'ai  étudiés, 
je  n'ai  pas  observé  de  polymérisation  notable  de  l'éthy- 
lène  mis  en  œuvre.  J'ai  tout  au  plus  constaté,  en  oxydant 
le  dibromdilluoréthylène  et  le  tribromfluoréthylène,  qu'il 
se  formait  une  très  minime  quantité  d'un  composé  cris- 
tallin, si  peu  abondant  que  je  n'ai  pu  le  recueillir  et  qui 
est  peut-être  un  polymère. 

Pour  interpréter  l'oxydation  des  éthylènes  halogènes, 
Demole  a  admis  qu'il  se  produisait  un  départ  d'hydracide, 
provoquant  la  formation  d'un  corps  instable  de  la  forme 
CHR  =  C  =.  Celui-ci  absorberait  l'oxygène  de  l'air  en 


(  ^^7  ) 
donnant  un  dérivé 

CHR 

II 
C=0 

qui  fixerait  ensuite  l'hydracide  primitivement  séparé  pour 
donner  soit  un  chlorure,  soit  un  bromure  acide. 

Pour  cet  auteur,  il  serait  aussi  possible  qu'il  se  formai 
de  l'acide  hypochloreux  ou  hypobromeux  aux  dépens  de 
l'hydracide  enlevé  et  de  l'oxygène.  Cet  acide  hypobro- 
meux se  décomposerait  par  la  chaleur  dégagée  dans  la 
réaction  en  brome,  oxygène  et  eau.  Demole  explique  ainsi 
la  formation  du  tétrabrométhane  dans  l'oxydation  du  tri- 
brométhylène. 

A  l'appui  de  sa  théorie,  qui  repose  sur  l'hypothèse  do 
l'enlèvement  préalable  de  l'hydracide,  il  invoque  le  fait 
que  les  éthylènes  persubstitués  ne  s'oxydent  pas,  qu'il 
faut  donc  la  présence  des  éléments  de  l'hydracide  dans 
la  molécule. 

G.  Wagner  (*),  dans  une  étude  sur  l'oxydation  des 
composés  non  saturés,  a  émis  une  autre  théorie.  Il  n'ad- 
met pas  l'oxydation  directe  de  l'éthylène  avec  formation 
d'un  oxyde  d'éthylène,  car,  dit-il,  on  ne  conçoit  pas 
pourquoi  on  ne  retrouverait  pas  une  certaine  quantité  de 
ce  dernier.  En  outre,  si  l'oxydation  était  due  à  la  pro- 
duction d'un  oxyde  d'éthylène,  qui  se  transformerait  par 
tautomérie,  on  ne  comprend  pas  pourquoi  les  éthylènes 
persubstitués  ne  se  laissent  pas  oxyder.  Pour  lui,  le  rôle 
important  appartient  à  l'hydrogène  :  c'est  celui-ci  qui  est 
oxydable  et  c'est  pour  cela  que  les_^  seuls  éthylènes  qui  se 


(*)  Wagner,  Bericlile,  l.  XXI,  p.  3356. 


(  548  ) 
laissent  oxyder  sont  ceux   qui    contiennent  encore  de 
l'hydrogène. 

11  paraît  à  ce  chimiste  que  l'éthylène  est  par  lui-même 
incapable  de  fixer  l'oxygène,  mais  il  tend  à  se  combi- 
ner au  brome  et  à  l'hydroxyle.  En  raison  de  cette  ten- 
dance et  de  l'affinité  de  l'hydrogène  pour  l'oxygène,  une 
molécule  d'éthylène  bibromé,  par  exemple,  enlèverait  à 
l'autre  du  brome  et  de  l'hydrogène,  et,  en  présence  de 
l'oxygène,  fixerait  les  éléments  de  l'acide  hypobromeux, 
pour  donner  de  l'alcool  tribromé.  Celui-ci  se  décompose- 
rait en  bromure  de  bromacétyle  et  en  acide  bromhydrique 
qui  serait  fixé  par  la  molécule  d'acétylène  bromée  pro- 
duite dans  la  première  phase  de  la  réaction. 


CH,                CH„ 

CH^Br 

CH 

Cllç>Br        CHî 

H          -f-  0  +   Il 

=2  1 

-+-  '" 

=        1            -+-   u 

CBi%.                CBr, 

CBr,  - 

OH        CBr 

BrC  =  0        CBr 

Les  deux  hypothèses  de  Demole  et  de  Wagner  ont  un 
point  commun  :  elles  font  intervenir  toutes  deux  la  for- 
mation d'acide  bromhydrique,  peut-être  d'acide  hypo- 
bromeux, et  sont  basées  sur  le  fait  que  les  éthylènes 
persubstitués  ne  se  laissent  pas  oxyder. 

Elles  tombent  toutes  deux  devant  l'observation  que  les 
éthylènes  perhalogénés  se  laissent  oxyder  comme  les 
autres.  Il  y  a  déjà  longtemps,  avant  même  les  recherches 
de  Wagner,  M,  Henry  (*),  s'occupant  de  l'oxydation 
des  éthylènes,  avait  mentionné  l'oxydabilité  d'un  com- 
posé éthylénique,  l'éther  trichlorvinylique 

CCIs 

11 

CCI  —  OCjHs. 

(*)  Henry,  Berichte,  t.  XII,  p.  1839. 


(  549  ) 
Or  ce  corps  a  les  plus  grandes  analogies  avec  l'éthy- 
lène  perchloré,  et  pour  expliquer  son  oxydation,  il  serait 
difficile  d'invoquer  la  formation  d'acide  chlorhydrique  ou 
d'acide  liypochloreux. 

Pour  expliquer  l'oxydation  des  éthylènès,  M.  Henry 
admit  qu'il  y  a  (ixation  directe  d'oxygène  avec  production 
d'un  oxyde  d'éthylène  instable  qui  se  transforme  par  tau- 
tomérie  en  chlorure  acide. 

Il  me  parait  que  c'est  là  l'explication  la  plus  plausible. 
Nous  connaissons  déjà  plusieurs  phénomènes  du  même 
genre,  dans  lesquels  un  oxyde  d'éthylène  se  transforme  en 
un  corps  contenant  le  groupement  C  =  0  ;  je  signalerai  la 
production  d'aldéhyde  par  déshydratation  d'un  glycol,  la 
transposition  tautomérique  des  pinacolines.  Pour  ces 
dernières,  il  est  souvent  difficile  de  dire  si  l'on  se  trouve 
en  présence  d'une  acétone  ou  d'un  oxyde  éthylénique. 

Dans  le  cas  des  éthylènès  halogènes,  l'apparition  de  la 
fonction  si  caractéristique  du  chlorure  acide  permet  de 
trancher  immédiatement  la  question. 

L'hypothèse  qui  consiste  à  admettre  la  formation  d'un 
oxyde  d'éthylène  rendrait  d'abord  mieux  compte  du  fait 
que  le  perchlorélhylène,  l'éthylène  tétrabromé  et  le 
dichlordibrométhylène  s'oxydent  moins  facilement  que 
le  dilluordibrométhylène  et  le  tribromtluoréthylène.  Si 
l'oxydation  est  un  simple  phénomène  d'addition  suivi 
d'une  transposition  intramoléculaire,  on  comprend  facile- 
ment que  les  éthylènès  dont  le  pouvoir  de  se  combiner 
par  addition  est  peu  marqué,  doivent  s'oxyder  plus 
difficilement  que  les  autres.  Or  le  perchloréthylène  ne 
se  chlorure  qu'à  la  lumière  solaire,  le  perbrométhylène  se 
combine  difficilement  au  brome,  de  même  que  le  dichlor- 
dibrométhylène. Au  contraire,  la  fixation  du  brome'sur 


(  550  ) 
le  difluordibrométhylène  et  sur  le  tribromtluoréthylène 
est  des  plus  faciles.  Il  y  a  analogie  complète  entre  la 
façon  dont  les  éthylènes   substitués  se  comportent  vis- 
à-vis  des  halogènes  et  vis-à-vis  de  l'oxygène. 

On  pourrait,  il  est  vrai,  répondre  que  l'éthylène  lui- 
même  se  combine  facilement  aux  halogènes,  mais  n'est 
pas  susceptible  de  fixer  directement  l'oxygène.  Il  en  est 
de  môme  pour  beaucoup  de  composés  non  saturés.  Cette 
contradiction  s'explique  peut-être  par  les  considérations 
suivantes. 

La  transformation  de  l'oxyde  d'éthylène  formé  doit  se 
faire  d'autant  plus  facilement  que,  dan^  le  cas  des  éthy- 
lènes halogènes,  l'oxygène  n'a  pas  à  s'échanger  contre  un 
groupement  à  caractère  plutôt  positif,  comme  l'hydrogène 
ou  le  méthyle,  ainsi  que  cela  a  lieu  dans  les  transpositions 
énoliques  de^  pinacolines,  mais  au  contraire  contre  un 
élément  d'allures  fortement  négatives,  comme  le  chlore, 
le  brome  ou  le  fluor. 

Le  fait  bien  probable  que  l'oxygène  s'échange  de  pré- 
férence contre  un  élément  négatif,  nous  expliquerait 
pourquoi  le  dibrométhylène  symétrique  donne  de  l'aldé- 
hyde dibromée  par  oxydation. 

CBrH  CBrH  CBi\,H 

I  -+-0=1  )0  =      '      '    • 

CBrH  CBrH  ^  HC  -  0 

J'ai  obtenu  aussi  du  bromure  de  bromacétyle,  il  est 
vrai,  mais  en  quantité  moins  forte  que  l'acide  dibroma- 
cétique.  L'échange  se  produit  dans  les  deux  sens,  mais 
avec  prédominance  de  la  transposition  du  brome  avec 
l'oxygène.  J'ai  d'ailleurs  fait  remarquer  au  début  de  ce 
travail  que,  dans  les  expériences  de  Demole,  celui-ci  n'a 
pas  constaté  non  plus  le  déplacement  de  l'atome  d'hydro- 
gène. 


(  SEil  ) 

D'autre  part,  l'expérience  prouve  que  le  chaînon 
C-O-(CiBrFl)  représente  un  groupement  très  stable  qui 
tend  à  se  produire  dans  beaucoup  de  réactions  chi- 
miques. 

Cette  tendance  est  contrebalancée,  dans  l'oxydation  du 
dibrométhylène  symétrique,  par  celle  de  l'oxygène  à 
s'échanger  de  préférence  contre  le  brome  plutôt  que 
contre  l'hydrogène.  Ceci  nous  explique  pourquoi  le 
dibrométhylène  symétrique  s'oxyde  si  dilficilement, 
tandis  que  le  composé  dissymétrique  est  oxydé  avec  la 
plus  grande  facilité. 

L'explication  de  M.  Henry  nous  rend  donc,  mieux  que 
les  autres,  compte  de  la  différence  d'allures  entre  les 
différents  éthylènes  halogènes,  et  c'est  un  argument  de 
plus  en  sa  faveur. 

Wagner  invoque  contre  l'hypothèse  de  la  formation 
d'un  oxyde  d'éthylène  instable  le  fait  qu'on  ne  retrouve 
pas  cet  oxyde  dans  les  produits  de  la  réaction.  On  peut 
retourner  cet  argument  contre  lui,  car  on  ne  trouve  pas 
non  plus  d'acétylène  brome  ou  de 

CBrH, 
CBr.OFI 

Si  nous  admettons  comme  probable  que  l'oxygène 
s'échange  plus  facilement  contre  un  halogène  que  contre 
l'hydrogène,  nous  trouvons  dans  la  transformation  du 
dibromfluoréthylène  en  bromure  de  fluorbromacétyle  un 
argument  nouveau  en  faveur  de  la  formule 

CBr.     ^ 

CHFI 

que  j'ai  donnée  à  ce  corps. 


(  5d2  ) 
Des  deux  formules  possibles  : 

CBps  CBrFI 

Il  il 

CHFl  CBrH, 

la  première  explique  la  transformation  presque  exclu- 
sive, et  par  conséquent  la  plus  facile,  en  bromure  de 
fluorbromacétyle,  par  l'échange  de  l'oxygène  contre  le 
brome,  tandis  que  la  seconde  impliquerait  une  transpo- 
sition entre  l'oxygène  et  l'hydrogène. 

On  peut  se  demander  s'il  existe  une  règle  déterminant 
la  nature  de  l'halogène  qui  prend  la  place  de  l'oxygène 
dans  l'oxydation  des  éthylènes  halogènes  mixtes. 

Il  semble  que  ce  soit  l'halogène  le  moins  actif  qui 
s'échange  de  préférence  contre  l'oxygène.  Il  en  est  ainsi 
pour  les  deux  éthylènes  symétriques  que  j'ai  étudiés  : 


/CBrCl  CBr.Cl  /C— BrFI  CBr, 

0<  I  =  I  0(  I  =1 

\CBrCI         0=C-Ci  \C-Br.FI  0  =  (:.FI 


Il  en  est  de  même  pour  le  tribromfluoréthylène  et  le 
dibromfluoréthylène  :  les  équations 

/CBpo  CBr^FI  /C-Br,         0  =  CBr 

\C.BrFl  0  =  (:Br  ^  CHFl  CHBrFl 

sont  celles  qui  représentent  la  réaction  prépondérante. 
Enfin,  Demole  a  montré  que  pour  le  chlorbrométhylène 
symétrique,  c'est  le  chlorure  de  bromacétyle  qui  constitue 
le  produit  principal  de  la  réaction. 

Gand,  le  1"  novembre  1898. 


(  o55  ) 


Svr  quelques  propriétés  des  poli/gones  inscrits  aux  courbes 
gauches;  par  François  Deruyts,  chargé  de  cours  à 
l'Université  de  Liège. 

A  la  suite  de  nos  recherches  antérieures,  concernant 
les  éléments  neutres  des  involutions  quelconques,  nous 
avons  montré  l'importance  des  résultats  que  l'on  pouvait 
en  déduire  au  point  de  vue  des  propriétés  des  courbes 
gauches  rationnelles,  ainsi  qu'au  point  de  vue  des  pro- 
priétés de  certains  systèmes  de  surfaces  alliées  à  ces 
courbes  (*).  Actuellement,  en  nous  servant  des  résultats 
acquis,  concernant  les  éléments  neutres,  ainsi  que  d'autres 
résultats  que  nous  avons  donnés,  déjà  depuis  longtemps, 
concernant  les  groupes  communs  aux  involutions,  nous 
nous  proposons  d'établir  quelques  théorèmes  relatifs 
aux  polyèdres  dont  les  sommets  sont  les  points  d'une 
courbe  gauche,  ou  dont  les  (aces  sont  les  plans  d'une 
surface  développa ble. 

1.  Supposons  d'abord  que  les  groupes  d'une  involu- 
tion  du  premier  rang,  I;',  soient  représentés  par  des 
groupes  de  n  points  d'une  courbe  plane  rationnelle, 
d'ordre  m,  C„  :  en  unissant,  deux  à  deux,  par  des  droites, 
les  points  des  différents  groupes  de  l'involution,  nous 
obtenons  une  simple  infinité  de  droites,  enveloppant  une 


(*)  Bull,  de  l'Acad.  roij.  de  Belgique,  3°  sér..  t.  XXXV,  n°^  2,  3,  4, 
6;  t.  XXXVI,  no  8,  1898. 


(  ^U  ) 

courbe  de  la  classe  (n  —  1)  {m  —  1);  en  effet,  l'involu- 
tioii  r,'  a  en  commun  avec  l'involution  du  premier 
rang,  \"\  marquée  sur  la  courbe  C„  par  les  sécantes 
issues  d'un  point  quelconque  du  plan,  {«  —  1)  {m  —  4) 
couples. 

Remarquons  que  les  droites  du  plan  marquent  sur  la 
courbe  C„  les  groupes  d'une  l'î  qui  a  en  commun  avec 
l'involution  proposée  l',',  [m  —  2)  ("ï')  ternes  :  ces  ternes 
correspondent  aux  [m  —  2)  ("j')  tangentes  triples  de  la 
courbe  d'involution  de  I,'.  De  plus,  l'involution  I;*  possède 
2(n  —  1)  éléments  doubles;  donc  la  courbe  d'involution 
a  2(/i —  i)  tangentes  communes  avec  la  courbe  C„.;  ces 
deux  courbes  ont  encore  {»  —  2)  [m  —  2)  autres  tangentes 
communes  (sauf  pour  le  cas  de  ni  =  2),  mais  ces  tangentes 
unissent  des  points  distincts,  c'est-à-dire  que  le  point 
de  contact  de  ces  tangentes  n'est  pas  un  point  double 
de  l;'. 

Puisqu'une  involution  I,'  est  déterminée  sur  la  courbe 
C„.  par  deux  groupes  de  n  points,  nous  pourrons  énoncer 
le  théorème  suivant,  généralisation  d'un  théorème  dû  à 
Ém.  WeyrH  : 

Les  côtés  de  deux  polygones  complets  de  n  sommets, 
inscrits  dans  une  courbe  rationnelle  plane  d'ordre  m,  C„, 
sont  circonscrits  à  une  même  courbe,  ^,  de  classe  (n  —  1) 
(m  —  1  ),  possédant  (m  —  2)  ("7')  tangentes  triples  :  de 
plus,  il  existe  une  infinité  d'autres  polygones  de  n  sommets, 
inscrits  à  la  courbe,  C„,  et  circonscrits  à  la  même  courbe,  S. 


(*)  Ueber  Involulionen  hôherer  Grade.  (Journal  de  Grelle,  t.  LXXII, 
pp.  "285,  etc.) 


(  555  ) 

2.  Supposons  maintenant  que  les  groupes  de  l'invo- 
lution  l:  soient  représentés  par  des  groupes  de  n  points 
d'une  courbe  gauche  rationnelle,  d'ordre  m,  C„  ;  les 
droites  qui  unissent  les  couples  de  cette  involution, 
forment  le  système  des  génératrices  d'une  surface  réglée, 
d'ordre  (m  — 4)  (n  — 1).  En  effet,  l'involution  I,"  a  en 
commun  avec  l'involution  I;*,  marquée  sur  la  courbe  C„. 
par  les  plans  passant  par  une  droite  quelconque  de 
l'espace,  {m —  i)  [n  —  1)  couples. 

L'involution  I;  possède  2(»  —  1)  éléments  doubles, 
donc  {n  —  i)  [m  —  1)  génératrices  de  la  surface  réglée 
d'involution  sont  des  tangentes  à  la  courbe  C„.;  en 
général,  ce  sont  les  seules  génératrices  jouissant  de  cette 
propriété. 

L'involution  m,  marquée  sur  la  courbe  C„.  par  les 
plans  de  l'espace,  possède  une  infinité  de  ternes  neutres; 
ces  ternes  neutres  forment  le  système  des  trisécantes  de 
la  courbe  C„(*);  recherchons  combien  il  existe  de  ces 
ternes  neutres  qui  font  partie  de  groupes  de  I;'. 

Pour  cela,  considérons  un  point  A  de  la  courbe  C,„;  il 
lui  correspond,  dans  l'involution  I3", 

(m  —  2)  (m  —5) 


couples  neutres  B  B'  et  donc  {m  —  2)  {m  —  5)  points  B. 
A  chacun  des  points  B  il  correspond,  dans  I;',  (h  —  4) 
points  C  :  ainsi,  à  un  point  A  il  correspond 

{n—  I)  [m  — -2)^(m  — 5j 


(')  Bull,  de  LWcad.  roy.  de  Belgique,  3«  sér.,  t.  XXXV,  n"  3,  1898. 


(  556  ) 
points  C;  on  verrait  de  même  qu'à  un  point  C  il  corres- 
pond 

{n—  1)  (m  —  2)  (m  — 5) 

points  A;  le  nombre  des  groupes  cherchés  est  évidem- 
ment égal  à  la  moitié  du  nombre  des  coïncidences  (AC)  ; 
ce  nombre  est  par  conséquent 

(/*—  1)  {m  —  t2)  (m  —  5). 

Nous  pouvons  interpréter  géométriquement  ce  résultai 
en  disant  que  la  courbe  C^  possède  [n  —  1)  [m  —  2) 
[m  —  o)  trisécantes  qui  sont  des  génératrices  de  la  sur- 
face réglée  d'involution  de  I','. 

Enfin,  l'involution  donnée  l','  et  l'involution  V",  mar- 
quée sur  la  courbe  C„.  par  les  plans  de  l'espace,  ont  en 
commun  {m  —  5)  ("7")  quaternes  :  donc  la  surface  réglée 
d'involution  de  li'  possède  {m  —  5)  ("i')  groupes  de  six 
génératrices,  formant  autant  de  groupes  de  quadrilatères 
complets  plans,  inscrits  à  la  courbe  C,,.. 

iNous  pouvons  encore  remarquer  que  la  courbe  C,„  est 
située  sur  la  surface  d'involution  de  I;',  et,  de  plus,  qu'elle 
est  multiple  d'ordre  n  —  i  pour  cette  surface. 

Puisque  l'involution  l;'  est  déterminée  par  deux  groupes 
de  n  points,  nous  obtenons  le  théorème  suivant  : 

Les  cotés  de  deux  jjultjgones  gaiirJies  complets  de  n  som- 
mets inscrits  dans  une  courbe  gauche  d'ordre  m,  sont  les 
génératrices  d'une  surface  réglée  d'ordre  (n  —  1)  (m  —  i); 

(n 4)  {m  —  2)  (m  — 3)  trisécantes  de  la  courbe  C„,  sont 

des  génératrices  de  la  surface  réglée.  De  plus,  il  existe  une 
infinité  d'autres  polyones,  inscrits  à  la  courbe  C„,  dont 
les  côtés  sont  les  génératrices  de  la  même  surface  réglée. 


(  ^-^7  ) 

3.  En  particulier,  nous  en  déduisons  que  les  bisé- 
canles  d'une  cubique  gauche  qui  s'appuient  sur  une  droite 
de  l'espace  forment  une  surface  réglée  du  quatrième 
ordre.  En  effet,  les  bisécantes  d'une  cubique  gauche  qui 
s'appuient  sur  une  droite  de  l'espace,  sont  les  droites  qui 
unissent  deux  à  deux  les  ternes  d'une  involution  I,;  il 
suffira  donc  de  faire,  dans  l'énoncé  précédent,  m  =  3, 
n  =  5.  Remarquons  que  la  cubique  gauche  est  située  sur 
la  surface  réglée  S4  et  qu'elle  est  une  ligne  double  de 
cette  surface  :  par  conséquent,  la  surface  S4  est  réci- 
proque à  elle-même  et  peut  être  engendrée  par  l'inter- 
section des  plans  correspondants  de  deux  faisceaux  de 
plans  projectifs  du  second  ordre. 

Si  la  droite  donnée  de  l'espace  s'appuie  sur  la  cubique 
ffauche,  nous  retrouvons  le  théorème  bien  connu  :  Les 
bisécantes  d'une  cubique  gauche  qui  rencontrent  une  droite 
quelconque  s'appuyant  sur  la  courbe,  forment  le  système  de 
génératrices  d'une  surface  réglée  du  second  ordre. 

Ce  théorème  se  déduit  de  l'énoncé  général,  en  suppo- 
sant ni=5,  »j  =  2. 


4.  Joignons  trois  à  trois,  par  des  plans,  les  points  des 
groupes  d'une  involulion  I'/,  représentée  sur  une  courbe 
gauche  rationnelle  C„.  ;  nous  obtenons  une  infinité  de 
plans  formant  une  développable  de  la  classe  ("7')  ('»  —  2). 

En  effet,  les  plans  de  l'espace  qui  passent  par  un  point 
fixe  marquent  sur  la  courbe  C„.  une  involution  I"  qui  a 
en  commun  avec  l'involution  I"  proposée  ("â*)  {m — 2) 
ternes  d'éléments. 

L'involution  lî  a,  de  plus,  en  commun  avec  l'involu- 
tion I3",  marquée  sur  la  courbe  C„  par  tous  les  plans 
de  l'espace,  ("3')  (//*  —  5)  quaternes  d'éléments;  par  con- 


(  ms  ) 

séquent,  la  développable  d'involution  d'une  I;'  possède 
("3')  ('"  —  5)  plans  quadruples. 

Enfin,  l'involution  I"  possède  une  infinité  de  ternes 
neutres  qui  forment  le  système  de  trisécantes  de  la 
courbe  C„,  ;  nous  avons  vu  précédemment  (n°  2)  qu'il 
existe 

(w  —  1  )  (m  —  2)  {m  —  5) 

ternes  neutres  de  I^  contenant  un  couple  de  J,"  :  donc 

{n  —  i)  (m  —  ;2)  (m  —3) 

plans  de  la  développable  d'involution  d'une  I"  con- 
tiennent une  trisécante  de  la  courbe-support. 

Nous  pouvons  énoncer  le  théorème  suivant,  comme 
conséquence  de  ce  que  nous  venons  de  voir  : 

Les  faces  de  deux  polyèdres  complets  dont  les  n  sommets 
sont  inscrits  à  une  courbe  gauche  rationnelle  d'ordre  m, 
fonnent  les  plans  d'une  développable  de  classe  (°7*)  (m  —  2); 
celle  développable  coniient  ("7')  (m  —  3)  plans  quadruples  j 
de  plus, 

(n—  I)  (m  — i2)  (m  — 5) 

plans  de  celte  surface  passent  par  une  trisécante  de  la 
courbe-support. 

Dans  le  cas  où  la  courbe  est  du  troisième  ordre,  on 
obtient  l'énoncé  suivant  : 

Les  faces  de  deux  polygones  complets  de  n  sommets 
inscrits  dans  une  cubique  gauche,  forment  les  plans  d'une 
développable  de  la  classe  {"ï*);  de  plus,  il  existe  une  infinité 
d'autres  polygones  de  n  sommets  inscrits  à  la  inéme 
cubiijue  gauche  et  dont  les  faces  sont  les  plans  de  la  même 
développable. 


(  559  ) 

On  obtiendrait  de  même  Ténoncé  corrélatif: 

Les  sommets  de  deux  polyèdres  complets  de  n  faces, 
osculatrices  à  une  cubique  gauche,  sont  situés  sur  une  vième 
courbe  d'ordre  ("7*);  de  plus,  il  existe  une  infinité  d  autres 
polyèdres  osculaleurs  à  la,  cubique  gauche  et  inscrits  à  la 
même  courbe  d'ordre  ("2'). 

En  particulier,  si  nous  supposons  7i  ==  5  et  n  =  4, 
nous  obtenons  les  deux  théorèmes  suivants  : 

Les  vingt  sommets  de  deux  pculaèdres  oscillateurs  à  une 
même  cubique  gauche  sont  situés  sur  une  courbe  gauche 
du  sixièine  ordre. 

Les  huit  sommets  de  deux  tétraèdres,  oscillateurs  à  une 
même  cubique  gauche,  sont  situés  sur  une  seconde  cubique 
gauche  et  il  existe  une  infinité  d  autres  tétraèdres  oscilla- 
teurs à  la  première  courbe  et  inscrits  à  la  seconde. 

Ce  dernier  théorème  a  été  donné  sous  une  forme  un 
peu  différente  par  M.  Reye  (*). 

5.  Considérons  actuellement  une  involution  lâ',  repré- 
sentée par  des  groupes  de  n  points  d'une  courbe  gauche 
rationnelle  C,,.;  les  plans  qui  unissent  trois  à  trois  les 
points  des  groupes  de  l'involution  sont  en  nombre  dou- 
blement intini  :  ils  enveloppent  une  surface  de  la  classe 

(n-2)(V). 

En  effet,  l'involution  proposée  I"  a  en  commun  avec 
l'involution  I"',  marquée  sur  la  courbe  C„,  par  tous  les 
plans  qui  passent  par  une  droite  fixe,  (n  —  2)  ("7*)  ternes 
d'éléments. 

L'involution  L'  possède  3(w  —  2)  groupes  contenant  un 


(*)  Die  Géométrie  der  Laye,  3"  édiu,  t.  II,  p.  226. 


(  560  ) 

élément  triple  :   donc  la  surface  d'involution  contient 
3(,i  —  2)  plans  qui  sont  osculateurs  à  la  courbe-support. 
Les  couples  neutres  de  I^  sont  en  nombre 

(/i— 1)  (n-2) 


chacun  de  ces  couples  neutres  joint  à  un  point  quel- 
conque de  la  courbe  C„  donne  lieu  à  un  plan  de  la 
surface  d'involution;  ils  correspondent  donc  aux  géné- 
ratrices rectilignes  de  la  surface  d'involution. 

D'autre  part,  la  courbe  C„  possède  une  inflnité  de  tri- 
sécantes  ;  il  en  existe 

{«  —  -2)  (m  —  2)  (m  —  5) 


qui  sont  situées  sur  la  surface  d'involution. 

En  effet,  les  Irisécantes  de  la  courbe  C„  sont  les  ternes 
neutres  de  l'involution  1',",  marquée  sur  la  courbe  C„  par 
les  plans  de  l'espace  :  parmi  ces  trisécantes,  il  en  existe 

(n  —  t>)  {m  —  2)  (m  —  5) 


2 


dont  les  trois  points  de  section  font  partie  d'un  groupe 
de  l'involution  I"  proposée. 

Pour  le  démontrer,  prenons  un  point  A  de  la  courbe  ; 
il  lui  correspond  dans  1,'  les  groupes  d'une  P'^S  possé- 
dant 

(m  — 2)  (m  — 3) 


(  S6t  ) 
couples  neutres  (BC),  et  à  chacun  de  ces  couples  (BC)  il 
correspond  dans  lî,  {n  —  2)  points  D  :  au  point  A  corres- 
pondent donc 

(n  —  2)  {m  —  2)  {m  —  3) 
2 

points  D.  De  même  à  un  point  D,  il  correspond  dans 
l'involution  J"  les  groupes  d'une  involution  IV  Q»i  con- 
tient (voir  n°  2)  {n  —  2)  {m  —  2)  {m  —  5)  groupes,  com- 
posés d'un  couple  BC  de  I"r*  et  d'un  terne  neutre  de  I^, 
ce  terne  neutre  étant  formé  du  couple  BC  et  d'un  élé- 
ment A.  Donc,  à  un  point  D  il  correspond 

(»  — 2)  (»i  — 2)  (/»  — 5) 

points  A.  Chacun  des  groupes  cherchés  absorbe  trois 
coïncidences  de  la  correspondance  que  nous  venons 
d'établir;  leur  nombre  est  donc  bien 

(w  —  2)  {m  —  2)  (m  —  5) 
2 

En  d'autres  termes,  si  une  involution  I"  est  représentée 
par  des  groupes  de  n  points  d'une  courbe  gauche  C„,  il 
existe 

(»  —  2)  (m  —  2)  im  —  5) 


groupes  dont  trois  des  points  représentatifs  sont  en  ligne 
droite. 

L'involution  L"  a  en  commun  avec  l'involution  Ir 
CTO  ('"?')  quinternes  :  c'est-à-dire  que  si  les  groupes 
d'une  involution  l"  sont  représentés  par  des  groupes  de 
n  points  d'une  courbe  C„,  il  existe  (V')  ("T^)  groupes  dont 

5""®    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  58 


(  502  ) 
cinq  des  points  représentatifs  sont  dans  un  même  plan. 
Nous  en  déduisons  encore   que  la  surface  d'involution 
d'une  I-i  représentée  sur  une  courbe  gauche  d'ordre  m 
possède  ("7')  ("'s')  plans  décuples. 

Puisqu'une  involution  I;'  est  déterminée  par  trois 
groupes  de  it  éléments,  nous  pouvons  énoncer  le  théo- 
rème suivant  : 

Les  faces  de  trois  pnhjçfoiios  complets  de  n  sommets, 
inscrits  à  une  courbe  r/atichc  rationnelle  d'ordre  m,  sont 
tangentes  à  vue  même  surface  de  classe  (n  —  2)  ("7')  ;  ^^ 
-plus,  il  existe  une  double  infinité  d'autres  poh/gones  de  n 
sommets,  inscrits  à  la  courbe  et  circonscjits  à  la  même 
surface. 

I.a  surface  contient  :  ^  ("3')  {"';')  plans  décuples; 


in—  1)  (n  — 2) 


génératrices  rcctilignes  qui   sont  des  trisécantes  de  la 
courbe-support; 

(»— 2)  'ui  —  2)  (î»  — ô) 


génératrices  rectilignes  (iiii  sont  des  trisécantes  de   la 
courbe-support. 

6.  Cas  particuliers.  —  Si  nous  supposons  que  la 
conrbe-support  est  une  cubi(jue  gauche,  on  obtient 
l'énoncé  suivant  : 

Les  faces  de  trois  polygones  complets  de  n  sommets, 
itiscrits  (i  une  cubique  gauche,  sont  tangentes  à  une  même 
surface  de  classe  (n  —  2)  ;  de  plus,  il  existe  une  double 
infinité  d'autres  poli/gones,  inscrits  à  la  même  courbe  et 
circonscrits  à  la  vième  surface. 


(  565  ) 

Ou  bien  encore  : 

Les  sommets  de  trois  poh/èdres  complets  de  n  faces 
osculalrices  à  une  même  cubique  gauche  sont  situés  sur  une 
même  surface  d'ordre  (n  —  '2). 

En  particulier,  si  nous  supposons  n  =  4  et  n  =  5, 
nous  obtenons  les  deux  tbéorèmes  suivants  : 

1°  Les  sommets  de  trois  tétraèdres,  osculateurs  à  une 
même  cubique  gauche,  sont  situés  sur  une  même  surface  du 
second  ordre  et  il  existe  une  double  infinité  d'autres  tétra- 
èdres à  la  fois  circonscrits  à  la  même  cubique  gauche  et 
inscrits  à  la  même  surface. 

Ce  théorème  est,  comme  on  le  sait,  dû  à  M.  Cremona. 

2"  Les  sommets  de  trois  pentaèdres  complets  osculateurs 
à  une  même  cubique  gauche,  sont  trente  points  situés  sur 
une  même  surface  cubique  :  il  existe  une  double  infinité 
d'autres  pentaèdres,  à  la  fois  inscrits  à  celte  surface  cubique 
et  osculateurs  à  la  cubique  gauche.  De  plus,  six  droites, 
situées  chacune  dans  deux  plans  de  la  cubique  gauche,  sont 
six  droites  d'un  double-six  de  la  surface  cubique  {*). 

ADDITION. 

En  général,  si  nous  supposons  que  l'on  représente  les 
groupes  d'une  involution  I','  par  des  groupes  de  n  points 
d'une  courbe  normale  C,„  d'une  variété  linéaire  à  m 
dimensions  E,„  (m,  <  n),  et  si  nous  joignons  par  des 
espaces  E,„_,,  m  à  m  les  points  des  groupes  de  l'involu- 
tion  I;,  nous  obtenons  une  simple  infinité  d'espaces 
E,„_„  formant  une  développable  d«  la  classe  {l~\). 


(*)  Nous  entendons  par  droite  dans  deux  plans  d'une  cubique  gauche 
l'intersection  de  deux  plans  osculateurs  de  cette  courbe.  (Voir,  à  ce 
sujet,  les  traités  de  géométrie  de  51.  Salmon.) 


(  o64  ) 

En  effet,  tous  les  plans  E„,_j  qui  passent  par  un  point 
quelconque  de  E„,  marquent  sur  la  courbe  normale  C„ 
les  groupes  d'une  involution  I";_,  :  cette  dernière  involu- 
tion  a,  en  commun  avec  l'involution  proposée  1",  {l~\) 
groupes  de  m  éléments.  Ces  groupes  correspondent  aux 
espaces  E„,_,  de  la  développable  qui  passent  par  le  point 
en  question.  Cette  développable  est  donc  bien  de  la 
classe  (",iî). 

Si  n  =  m  -h  i,  la  développable  est  de  la  classe  m, 
c'est-à-dire  qu'elle  est  formée  par  les  espaces  E,„.,,  oscula- 
teurs  à  une  courbe  normale  C,'„  de  E,„  (*), 

En  remarquant  que  l'involution  l""^'  est  déterminée 
par  deux  groupes  de  /;/  -i-  1  éléments,  on  obtient  le 
théorème  général  suivant  : 

Les  m  H-  1  faces  E„_,  d'un  polygone  de  m  4-  1  som- 
mets, inscrits  à  une  courbe  normale  C,„ ,  d  une  variété 
linéaire  E,„,  sont  osculatrices  à  une  autre  courbe  normale 
C,'„  de  celte  variété. 

En  particulier,  pour  m  =  i2,  on  retrouve  le  théorème 
de  Poncelet,  et  pour  m  =3,  le  théorème  de  M.  Reye. 

2.  Cette  propriété  projective,  qui  se  transmet  dans 
tous  les  espaces  linéaires  sous  la  même  forme,  permet  de 
construire  les  groupes  d'une  involution  lï,  dès  que  l'on 
se  donne  deux  groupes  de  n  éléments  de  cette  involution  : 
nous  nous  bornerons  à  le  montrer  pour  le  cas  de  n  =  4. 

La  remarque  suivante  nous  sera  utile  à  ce  sujet  :  Les 
surfaces  coniques  du  second  ordre,  ayant  quatre  génératrices 
communes,  dont  l'une  est  bisécanle  d'une  cubique  gauche, 


(*)  Par  extension  de  ce  qui  se  passe  dans  l'espace  E5,  nous  appelons 
espace  Em-\,  osculaleur  à  une  courbe  normale  C«,  tout  espace  E,„-i 
qui  rencontre  cette  courbe  normale  en  m  points  coïncidents. 


(  5(35  ) 
coupent  cette  courbe   en  des  groupes   de  quatre    points, 
formant  une  involution  l,*. 

Nous  pensons  que  cette  remarque  est  évidente,  mais 
pour  prouver  que  l'involution  l\,  ainsi  définie,  est  la  plus 
générale,  il  faut  que  nous  puissions,  par  le  procédé  que 
nous  venons  d'indiquer,  résoudre  le  problème  suivant  : 

Étant  donnés  deux  groupes,  X^,  Yj,  Z^,  Ui  ;  Xg,  \^,  Zg, 
U|2,  de  quatre  points  d'une  cubique  gauche,  construire  les 
trois  points  Y5,  Z3,  U3,  complétant  un  groupe  d'une  \\,  déter- 
minée par  un  point  X3  de  cette  même  cubique. 

Les  deux  plans  (X^  Y^  Zi),  (X^  Y.2  Z^)  se  coupent  en  une 
droite  d;  le  plan  [dX^)  rencontre  la  cubique  gauche  en 
deux  points,  Bj,  B2  :  la  bisécante  (Bi  B^)  coupe  la  droite 
d  en  un  point  A.  Si  nous  appelons  a  et  6  les  droites 
respectives  d'intersections  des  plans 

(\,Y,Z,),  (B.B,U,), 
(X,YA1,     (B,B,U,), 

le  plan  («6)  rencontre  la  cubique  en  trois  points  {Y5Z3  U5), 
qui  sont  les  points  cherchés. 

En  etîet,  les  trois  cônes  du  second  degré,  décompo- 
sables,  formés  par  les  couples  de  plans, 

(X,Y.Z,),  (B,B,U,), 
(X,Y,Z,),  (B,B,UO. 
(B,B,X3),     (YsZjUj), 

ont  en  commun  quatre  génératrices  dont  l'une  (BjBa)  est 
bisécante  de  la  cubique  gauche. 

Les  plans  (Y3  Z3  U3)  forment  une  développable  de  la 
troisième  classe. 


(  506  ) 

En  effet  : 

1°  Les  droites  a,  dans  le  plan  (Xj  Y^  Zj),  et  les  droites 
b,  dans  le  plan  (X2  Y.,  Z.,),  enveloppent  deux  courbes  de 
la  seconde  classe  C72  et  a^,  tangentes  à  la  droite  rf;  car 
on  peut  remarquer  que  si  M  est  un  point  quelconque  du 
plan  (XjYi  Zi),  les  plans  du  faisceau  (MU^)  marquent  sur 
la  cubique  gauche  C3  les  couples  d'une  If,  tandis  que  les 
plans  du  faisceau  (d,)  marquent  sur  la  même  courbe  les 
ternes  d'une  I^;  ces  deux  involutions  \\  et  I^  ont  deux 
couples  communs  qui  correspondent  aux  tangentes  à  la 
courbe  o-^,  issues  du  point  M  ; 

2°  En  joignant  un  point  P  de  l'espace  aux  systèmes 
de  droites  a  et  b,  obtenues  en  faisant  varier  le  point  X3 
sur  la  cubique  gauche,  nous  formons  deux  cônes  de  la 
seconde  classe,  ayant  tous  deux  comme  plan  tangent  le 
plan  (Prf)  :  ces  cônes  ont  en  commun  trois  plans  qui  sont 
les  plans  de  la  développable  (Y.-  Z3  U3)  passant  par  P. 

D'après  ce  qui  précède,  il  nous  semble  inutile  de 
démontrer  que  les  faces  des  tétraèdres  (Xi  Y^  Zi  Ui), 
(Xq  Y2  Z2  U2)  sont  des  plans  de  cette  développable. 


COMITÉ  SECRET. 


La  Classe  s'occupe,  en  comité  secret,  de  la  discussion 
des  titres  des  candidats  présentés  pour  les  places  vacantes. 

—  Elle  procède  ensuite  à  la  nomination  de  sa  Com- 
mission spéciale  des  finances. 

Les  membres  sortants  sont  réélus. 


(  ^67  ) 


CXAJlifi^E  DWIH   LETTltEt^. 


Séance  du  5  décembre  1898. 

M.  F.  Vander  Haeghen,  directeur. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  A.  Giron,  vice-directeur  ;  S.  Bor- 
raans,  Ch.  Piot,  T.-J.  Lamy,  G.  Tiberghien,  L.  Van- 
derkindere,  le  comte  Goblet  d'Alviella,  P.  Fredericq, 
G.  lùirth,  Ch.  Mesdach  de  ter  Kiele,  H.  Denis,  le  che- 
valier Ed.  Descamps,  G.Monchamp,  P.Thomas,  Ern. Dis- 
cailles, membres;  J.-C.  Vollgratî,  associé;  V.  Brants, 
Ch.  De  Smedt,  Jules  Leclercq,  M.  Wilmotle,  H.  Pirenne 
et  Ern.  Gossart,  correspondants. 

M.  le  Directeur  adresse  les  félicitations  de  la  Classe  à 
M.  G.  Kurtli  au  sujet  de  la  manifestation  dont  il  a  été 
l'objet  le  20  novembre  dernier,  à  l'Université  de  Liège. 
Il  assure  l'honorable  membre  que  l'Académie  tout  entière 
s'est  associée  à  ce  témoignage  de  sympathie. 

Les  applaudissements  de  la  Classe  ont  accueilli  cette 
motion,  ainsi  que  les  remerciements  exprimés  fpar 
M.  Kurth. 


(  568  ) 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  envoie,  pour  la  biblio- 
thèque de  l'Académie,  un  exemplaire  de  la  Bibliotheca 
Belgica,  102*  et  103*  livraisons.  —  Remerciements. 

—  Hommages  d'ouvrages  : 

4 .  Les  rites  de  la  moisson  el  les  commencements  de  l'agri- 
culture, à  propos  du  dernier  ouvrage  de  M.  Grant  Allen  ; 
par  le  comte  Goblet  d'Alviella; 

2.  A.  Esquisse  historique  sur  les  insignes  de  souveraineté 
et  les  décorations  de  l'armée  russe.  Période  des  grands 
princes  et  des  czars;  B.  Cent  ans  du  corps  militaire  des 
courriers  de  cabinet.  1796-'! 896;  par  le  colonel  d'état- 
major  Nicolas  Nicolaeff.  Saint-Pétersbourg,  189(3-1898. 
(Présenté  par  M.  Marchai,  avec  une  note  qui  figure 
ci-après); 

5.  Ménélik  II,  roi  des  rois  de  l'Ethiopie;  par  le  marquis 
de_Nadaillac,  associé; 

4.  Le  collectivisme;  discours,  par  L.  de  Gamond  ; 

5.  La  participation  aux  bénéfices  ;  par  Waxweiler  ; 

6.  A.  //  carattere  morale  di  Antonio  liosmini;  B.  Una 
fissazione  hegheliana;  C.  Sulle  dottrine  psicofisiche  di 
Platone;  D.  Che  cosa  è  l'educazione;  E.  Sull'  ipotesi  delV 
evoluzione;  F.  L'unita  délie  scibile  e  la  filosofia  délia  morale; 
G.  Lezioni  di  filosofia  délia  morale;  par  L.-M.  Billia,  pro- 
fesseur à  l'Université  de  Turin  (présenté  par  M.  Mon- 
champ,  avec  une  note  qui  figure  ci-après); 

7.  De  Oranje  Nassau  boekerij  en  de  Oranje-Penningen 


(  569  ) 
in  de  Koninidijke  Bibliotheek  en  in  het  Koninklijk  Penning- 
Kabinet,  te  's  Gravenhage,  189S  (offert  par  M.  le  Directeur 
de  la  Bibliothèque  royale  et  M.  le  Directeur  du  Cabinet 
des  médailles  de  La  Haye). 

—  Remerciements, 

—  Le  Comité  organisateur  du  septième  Congrès  inter- 
national de  géographie  invite  les  membres  de  l'Académie 
à  prendre  part  à  cette  session  qui  aura  lieu  à  Berlin,  du 
28  septembre  au  4  octobre  4899. 


NOTES    BIBLIOGRAPHIQUES. 

I.  Esquisse  historique  sur  les  insignes  de  souveraineté  et 
les  décorations  de  l'armée  russe.  Période  des  grands  princes 
et  des  czars;  —  T[.  Cent  ans  du  corps  militaire  des  courriers 
de  cabinet.  1796-1896.  Esquisse  historique;  2  vol.  petit 
111-4"  (en  russe),  par  le  colonel  d'état-major  Nicolas 
iNicolaeff,  Saint-Pétersbourg,  1896-1898. 

M.  le  colonel  d'état-major  Nicolas  Nicolaeff,  de  l'armée 
russe,  offre  à  l'Académie  un  exemplaire  du  livre  qu'il  a 
consacré  au  développement  des  notions  et  des  idées  sur 
la  manière  d'interpréter,  dans  la  plus  large  acception  du 
mot,  les  origines  des  marques  de  souveraineté  et  des 
décorations,  armes,  armures,  drapeaux,  étendards, 
armoiries,  etc.,  de  l'armée  russe,  depuis  le  commence- 
ment de  la  période  des  grands  princes  et  des  czars. 
L'auteur,  pour  arriver  à  réaliser  son  œuvre,  a  mis  à  con- 
tribution les  principaux  dépôts  d'archives  de  l'Empire.  Il 
a  cherché  ainsi  à  donner  à  son  travail  un  caractère  scien- 


(  570  ) 

lilîque  et  archéologique  qui  n'a  pas  d'antécédents  dans 
les  armées  européennes. 

Il  commence  en  rappelant  la  manière  des  Slaves  d'en- 
visager les  drapeaux  comme  des  signes  sacrés  de  rallie- 
ment, ce  qui  se  pratiquait  déjà  chez  les  Russes  avant  leur 
baptême.  Il  fait  ensuite  valoir  l'influence  exercée  par 
le  christianisme  sur  ces  emblèmes  et  son  action  pour 
arriver  à  transformer  les  drapeaux  en  reliques  d'église. 

Il  y  ajoute  des  considérations  sur  les  préparatifs  et  le 
cérémonial  qui  entouraient  leur  remise  aux  corps  d'armée. 

Le  colonel  Nicolaelf,  atin  de  mieux  faire  ressortir 
l'objet  de  son  travail,  y  a  joint  un  certain  nombre  de 
belles  planches  gravées  ou  photographiées,  dont  les  deux 
premières  représentent  des  ancêtres  de  l'armée  russe, 
armés  pour  le  combat  ou  assiégeant  une  ville,  et  les 
autres,  des  oriflammes,  drapeaux,  fanions,  etc.,  depuis 
1560,  ainsi  que  les  armoiries  actuelles  de  l'Empire,  telles 
qu'elles  ont  été  déterminées  héraldiquement  en  1700. 

Le  lecteur  trouvera  dans  ce  beau  volume  la  description 
détaillée  des  drapeaux  des  Cosaques,  l'explication  histo- 
rique des  causes  qui  déterminèrent  ceux-ci  à  se  soustraire 
au  protectorat  des  Polonais  et  des  Turcs  et  leur  soumis- 
sion à  l'ancienne  Russie,  ainsi  que  les  drapeaux  qu'ils 
reçurent  alors  comme  marque  de  leur  indépendance. 
On  y  trouvera  aussi  la  description  détaillée  des  autres 
distinctions  militaires,  attributs,  médailles,  insignes  de 
service  ou  de  commandement.  L'auteur  termine  cette 
partie  de  son  livre  en  expliquant  les  changements  arrivés 
dans  l'armée  russe  depuis  sa  réorganisation  par  Pierre  le 
Grand  (ï172o),  qui  a  donné  à  tous  les  régiments  leurs 
marques  honorifiques,  lesciuelles  subsistent  encore. 

Les  quatre  appendices  se  rapportent  à  la  création  de 


(  S7I  ) 
la  chambre  d'armes  ou  arsenal,  le  Musée  numismatique 
d'artillerie  actuel  et  ce  qu'il  était  sous  l'ancien  régime, 
enfin  des  drapeaux  comme  monuments  de  l'ancienne 
peinture  d'images.  Parmi  ces  drapeaux,  il  y  en  a  qui  ont 
une  réelle  valeur  historique  et  archéologique  et  leur  dessin 
est  de  toute  beauté. 

Le  colonel  Nicolaeff  offre  en  même  temps  un  exem- 
plaire de  son  Histoire  de  la  création  du  corps  militaire 
des  courriers  de  cabinet,  dont  l'institution  remonte  au 
siècle  dernier.  Son  volume  est  illustré,  entre  autres,  de 
portraits  et  de  tigures  représentant  les  courriers  dans 
leur  costume  militaire. 

Chev.  Edm.  Marchal. 


J'ai  l'honneur  de  présenter  à  l'Académie,  de  la  part  de 
M.  Billia,  professeur  à  l'Université  de  Turin,  sept  publi- 
cations de  ce  savant  dont  voici  les  titres  : 

Il  carattere  morale  di  Antonio  Rosmini.  Milano,  1897. 

Una  fissazione  Itecjheliatia.  Torino,  1898. 

Sulle  dottrine  psicofisiche  di  Platone.  Modena,  1898. 

Checosa  è  l' educazione .  Torino,  1896. 

SuW  ipotesi  dell'  evoluzione.  Torino,  1897. 

L'unità  délie  scihile  e  la  filosofia  délia  morale.  Toi'ino, 
1898. 

Lezioni  di  filosofia  délia  morale.  Torino,  1897. 

M.  Billia,  dont  notre  regretté  confrère  Alphonse  Le 
Roy  a  plusieurs  fois  entretenu  la  Classe,  est  un  disciple 
fervent  du  célèbre  Rosmini  et  se  réclame  souvent  de  son 
autorité  :  un  des  travaux  qu'il  offre  à  la  Compagnie  est 


(  Dli  ) 

consacré  tout  entier  à  défendre  le  penseur  de  Roveredo 
contre  de  compromettants  éloges  qui  font  de  lui  un 
panthéiste,  presque  un  hégélien;  un  autre  exalte  et, 
dirais-je  bien,  chante  les  qualités  morales  du  Maître.  Je 
ne  veux  point  contester  que  Rosmini  n'ait  été  brillam- 
ment doué  du  côté  de  l'esprit  et  du  cœur,  et  je  reconnais 
que  son  œuvre  commande  l'attention,  ne  serait-ce  que 
par  l'influence  considérable  qu'elle  a  exercée  et  exerce 
encore  en  Italie  et  ailleurs.  Toutefois  mes  convictions 
philosophiques  et  théologiques  me  séparent  de  cet  écri- 
vain et  de  son  école  sur  des  points  de  conséquence. 

Ces  réserves  foites,  je  juge  dignes  d'être  lus  les  travaux 
de  M.  Billia.  Ils  se  font  remarquer  par  leurs  vues  synthé- 
tiques et  en  même  temps  par  des  analyses  qui  ne  man- 
quent pas  de  finesse,  et  à  certains  moments  d'humour. 
L'auteur  est  érudit  ;  il  a  beaucoup  hanté  Platon  et  connaît 
ceux  qui  se  sont  inspirés  de  la  philosophie  platonicienne. 

Deux  d'entre  les  travaux  qu'il  nous  oftVe,  ainsi  que  je 
viens  de  le  dire,  s'occupent  de  Rosmini.  Un  autre  montre 
dans  Platon  les  préoccupations  de  nos  modernes  psycho- 
physiciens. Un  quatrième  nous  donne  la  définition  de 
l'éducation,  en  tant  que  celle-ci  comprend  l'éducation 
de  nature  et  l'art  de  l'éducation,  deux  choses  que  l'auteur 
distingue  à  bon  droit.  Un  cinquième  travail  a  pour  objec- 
tif ce  que  l'auteur  appelle  Vhypothêse  de  l'évolution.  Il  y 
rejette  catégoriquement  la  doctrine  d'après  laquelle  il  n'y 
aurait  au  monde  que  de  l'évolution,  sans  vérités  absolues 
ni  substratums  permanents  des  phénomènes,  mais  il  ne 
trouverait  pas  de  raisons  péremptoires  dans  les  dogmes 
chrétiens  ni  dans  la  philosophie  pour  rejeter  l'évolution, 
par  exemple,  dans  le  règne  végétal,   ou  dans  le  règne 


(875) 
animal,  dût  celle-ci  s'étendre  à  V animalité  de  l'homme. 
Les  deux  derniers  ouvrages  s'occupent  de  la  philosophie 
delà  morale.  L'un  d'eux  est  consacré  à  faire  ressortir 
l'unité  des  sciences  et  à  montrer  la  place  d'honneur 
que  tient  dans  leur  ensemble  la  philosophie  de  la  morale. 
Entre  autres  choses,  M.  Billia  fait  toucher  du  doigt 
la  connexion  entre  les  sciences  naturelles  et  la  psy- 
chologie qui  étudie  l'instrument  de  toutes  nos  connais- 
sances. Le  Lezioni  di  filosofia  délia  morale,  dont  il  nous 
reste  à  dire  quelques  mots,  est  une  œuvre  plus  considé- 
rable que  toutes  celles  dont  il  vient  d'être  question. 
L'auteur  y  considère  la  notion  de  cette  science  et  sa  place 
dans  le  scibile,  puis  successivement  l'intelligence,  la 
volonté,  la  liberté  et  la  loi  morale.  11  s'y  montre  partout 
spiritualiste  et,  aux  occasions,  rosminien.  Je  regrette 
que  le  court  espace  réservé  dans  notre  Bulletin  aux  notices 
bibliographiques  m'empêche  de  dire  davantage  sur  ce 
livre,  auquel  il  serait  utile  de  consacrer  une  analyse  cri- 
tique bien  plus  étendue. 

Je  me  borne  donc  à  ajouter  que  M.  Billia  est  un  des 
collaborateurs  les  plus  assidus  de  la  revue  IlAuovo  Hisor- 
gimento.  Il  y  publie  pour  le  moment  une  série  d'articles 
contre  le  néothomisme  de  Mercier  et  de  son  école,  notam- 
ment de  M.  le  professeur  De  Craene.  Le  grand  grief  de 
\L  Billia,  c'est  que  la  jeune  et  active  école,  d'une  part 
courtise  la  doctrine  positiviste,  et  d'autre  part  repousse  en 
bloc  toutes  les  doctrines  idéalistes,  donc  aussi  celle  de 
Rosmini.  Le  ton  de  ces  articles  est  courtois  et  sérieux  : 
je  les  signale  à  tous  ceux  qu'intéresse  le  mouvement  des 
idées.  Georges  Monchamp. 


(  574  ) 
COMMUNICATION. 


La  Classe  des  lettres  et  des  sciences  morales  et  poli- 
tiques a  examiné  récemment  deux  questions  importantes 
qui  touchent  à  sa  constitution.  Ces  questions  concernent 
l'organisation  de  la  Classe  dans  ses  rapports,  d'une  part, 
avec  la  littérature  pure,  d'autre  part,  avec  les  sciences 
morales  et  politiques.  Comme  des  modifications  statu- 
taires et  réglementaires  pouvaient  se  rattacher  à  la  solu- 
tion de  ces  questions,  la  Classe  a  porté  en  même  temps 
son  attention  sur  les  conditions  auxquelles  sont  soumis 
les  changements  à  apporter  éventuellement  à  son  organi- 
sation. 

En  ce  qui  concerne  ce  dernier  point,  il  y  a  lieu  de  dis- 
tinguer entre  les  Statuts  organiques  de  l'Académie,  le 
Règlement  général  commun  aux  trois  Classes  et  le  Règle- 
ment intérieur  de  chaque  Classe. 

Les  Statuts  organiques  forment  la  constitution  stahle 
de  l'Académie  dont  le  Roi  est  le  Protecteur.  Ils  indiquent, 
dans  leur  article  final,  les  conditions  nécessaires  pour 
leur  revision  :  «  Les  dispositions  qui  précèdent,  formant 
les  Statuts  organiques,  ne  peuvent  être  changées  qu'en 
séance  générale  et  du  consentement  de  l'Académie, 
donné  par  les  trois  quarts  des  membres  présents.  Tout 
changement  est  soumis  à  l'approbation  du  Roi.  » 

L'article  il  des  mêmes  Statuts  parle  du  Règlement 
général  en  ces  termes  :  «  Le  Roi  décrète  un  Règlement 
général.  Il  ne  peut  y  être  apporté  de  changements  qu'une 
fois  par  an  dans  la  séance  générale  des  trois  Classes 
mentionnée   ci-après;    ces   changements  doivent   avoir 


(  s^n  ) 

obtenu  l'assentiment  des  deux  tiers  des  membres  pré- 
sents et  ils  sont  soumis  à  l'approbation  du  Roi.  » 

L'article  40  s'exprime  comme  il  suit  concernant  le 
Règlement  de  chaque  Classe  :  «  Chaque  Classe  forme 
son  Règlement  intérieur  qui  est  soumis  à  l'approbation 
royale.  »  Il  n'y  a  pas  d'autres  conditions  posées  à  l'exer- 
cice de  cette  dernière  prérogative. 

La  question  de  l'accès  à  accorder  dans  la  Classe  à  des 
représentants  de  la  littérature  pure  a  été  posée  par 
M.   Kurth  dans  les  termes  suivants  : 

«  A  première  vue,  il  semble  qu'une  question  pareille 
ne  soit  susceptible  que  d'une  réponse  affirmative;  je  n'hé- 
site cependant  pas  à  répondre  négativement.  Notre  Classe 
porte  un  nom  qui  donne  lieu  à  un  malentendu.  Si  on 
l'appelle  Classe  des  lettres,  c'est  faute  de  trouver  dans  le 
vocabulaire  actuel  une  expression  qui  la  désigne  d'une 
manière  adéquate.  Cette  Classe  n'est  en  réalité  qu'une 
Classe  des  sciences  qui  se  rapportent  à  l'homme  et  à  la 
société,  et  que  je  regrette  de  ne  pouvoir,  parce  que 
nous  ne  sommes  pas  les  maîtres  du  langage,  appeler  du 
vieux  nom  si  expressif  et  si  large  (ï humanités .  Son  but, 
c'est  de  cultiver  en  commun  et  d'aider  à  progresser,  par 
les  moyens  qui  sont  à  sa  disposition,  les  diverses  sciences 
qui  forment  son  domaine.  Elle  ne  se  distingue  en  rien, 
sous  ce  double  rapport,  de  la  Classe  des  sciences  propre- 
ment dite,  au  sujet  de  laquelle  il  n'y  a  jamais  eu  de 
malentendu.  Or,  la  littérature  est  un  art  et  non  une 
science,  et  il  n'y  a  rien  ou  presque  rien  de  commun  entre 
les  travaux  de  l'artiste  et  ceux  du  savant  (1). 

))  C'est  la  raison  pour  laquelle,  à  mon  sens,  il  n'y  a  pas 


l)  On  ne  me  fera  jias  dire,  j'espère,  que  l'arlisle  ne  peut  pas  être 
un  savant,  ou  que  le  savant  n'a  pas  à  se  préoccuper  d'être  artiste. 


(  S76  ) 
lieu  d'introduire  dans  notre  Classe  les  représentants  des 
belles-lettres.  Ils  seraient  égarés  parmi  nous,  non  qu'ils 
n'y  trouvent  pas  le  tribut  de  sympathie  ou  d'admiration 
qui  leur  revient,  mais  parce  qu'ils  ne  seraient  pas  dans 
leur  véritable  milieu.  Si  donc  on  estime  qu'il  soit  utile 
pour  les  belles-lettres  de  grouper  leurs  membres  en  aca- 
démie, il  doit  être  bien  entendu  que  ce  n'est  pas  dans 
notre  Classe  qu'il  faut  les  introduire. 

))  Il  faut,  ou  bien  créer  à  leur  usage  une  Classe  des 
belles-lettres,  sauf  à  donner  à  la  nôtre  un  nom  qui  expri- 
merait d'une  manière  plus  exacte  ses  véritables  attribu- 
tions, ou  bien  les  réunir  dans  une  section  spéciale  de  la 
Classe  des  beaux-arts,  qui  deviendrait  ainsi  la  Classe  des 
beaux-arts  et  des  belles-lettres. 

»  Sera-ce  rendre  un  vrai  service  à  la  littérature  que 
d'enrégimenter  ainsi  ses  principaux  représentants?  Je  ne 
voudrais  pas  l'aflirmer  sans  réserve.  Il  est  de  la  nature  du 
travail  scientifique  de  progresser  dans  les  ateliers  com- 
muns et  grâce  aux  efforts  collectifs;  il  est  de  l'essence  du 
travail  artistique  de  devoir  ses  plus  beaux  chefs-d'œuvre 
à  la  méditation  solitaire  et  à  l'inspiration  personnelle.  Au 
surplus,  et  quelles  que  soient  les  diverses  manières  de  voir 
sur  cette  question,  elles  ne  sauraient,  je  pense,  nous 
empêcher  d'être  unanimes  quant  à  la  distinction  à  éta- 
blir entre  les  sciences  que  nous  cultivons  ici  et  l'art  litté- 
raire proprement  dit. 

»  Cette  distinction,  si  je  ne  me  trompe,  est  rigoureuse- 
ment observée  dans  toutes  les  académies  du  monde,  sans 
omettre  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres, 
qui,  comme  notre  Classe,  porte  un  nom  traditionnel 
peu  en  rapport  avec  la  nature  et  avec  l'étendue  de  ses 
travaux  actuels.  » 

La   Classe  ne  méconnaît  aucunement   le  très  remar- 


(  »77  ) 
quable  mouvement  littéraire  qui  honore  la  Belgique 
contemporaine.  Mais  ce  fait  ne  supprime  pas,  à  ses  yeux, 
la  distinction  «  entre  les  sciences  dont  elle  s'occupe  et 
l'art  littéraire  proprement  dit  ».  Et  elle  ne  peut  que 
faire  siennes,  à  ce  point  de  vue,  les  observations  de 
M.  Kurth.  Elle  n'entend  pas  se  prononcer  sur  les  services 
que  rendrait  à  la  littérature  nationale  le  groupement  des 
littérateurs  en  institution  ollicielle.  Mais  elle  estime  que 
si  quelque  chose  d'utile  peut  être  réalisé  dans  cet  ordre, 
il  conviendrait  de  le  demander  soit  à  la  création  d'une 
Classe  autonome,  soit  à  l'adjonction  d'une  section  parti- 
culière à  la  Classe  des  beaux-arts.  Augmenter  de  quel- 
ques unités  le  nombre  des  sièges  de  la  Classe  des  lettres 
ne  serait  pas  une  solution.  C'est  en  s'inspiranl  de  ces 
motifs  que  la  Classe  a  adopté  la  résolution  suivante  : 
(c  11  n'y  a  pas  lieu  d'augmenter  le  nombre  des  membres 
de  la  Classe  en  vue  d'accorder  une  place  particulière  à  la 
littérature  pure,  la  place  de  celle-ci  étant  plutôt  dans  une 
section  de  la  Classe  des  beaux-arts  ou  dans  une  Classe  à 
créer  spécialement.  »  Cette  résolution  a  été  adoptée  à 
l'unanimité  moins  trois  voix  et  deux  abstentions. 

En  ce  qui  concerne  l'organisation  de  la  Classe  dans  ses 
rapports  avec  les  sciences  morales  et  politiques,  l'assem- 
blée a  été  saisie  de  deux  propositions,  l'une  demandant 
la  création  d'une  Classe  nouvelle  des  sciences  morales  et 
politiques,  l'autre  demandant  l'attribution  à  la  Section 
des  sciences  morales  et  politiques  d'une  représentation 
égale  à  la  moitié  des  sièges  de  toute  la  Classe. 

La  première  proposition  a  été  rejetée  à  l'unanimité 
moins  une  voix,  celle  de  son  auteur,  et  deux  abstentions. 

La  Classe  a  estimé  que  la  création  de  la  Classe  proposée, 
non  seulement  n'aurait  pas  de   raison  d'être  dans  les 

5'"''    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  39 


(  578  ) 

conditions  actuelles,  mais  serait  en  contradiction  avec 
l'existence  de  la  Section  des  sciences  morales  et  poli- 
tiques instituée,  au  sein  de  la  Classe  actuelle  des  lettres, 
par  les  Statuts  organiques  et  comprenant,  aux  termes  des 
Règlements,  les  matières  suivantes  :  l'économie  politique, 
la  statistique,  la  législation,  le  droit  public,  la  jurispru- 
dence, indépendamment  de  la  philosophie  morale  et  des 
autres  branches  philosophiques.  Mais  la  Classe  a  admis 
qu'il  y  avait  lieu  d'attribuer,  en  tout  cas,  la  moitié  fixe 
de  ses  siègesàla  Section  dessciences  moralesetpolitiques, 
afin  d'assurer  toujours  à  cette  Section  dans  la  Classe  une 
représentation  correspondant  à  son  importance. 

La  Classe  a  tenu  en  même  temps  à  affirmer  spéciale- 
ment ce  qu'il  y  a  d'heureux  et  de  fécond  dans  la  rencontre 
en  une  même  assemblée  d'historiens  d'élite  et  de  savants 
s'occupant  des  sciences  morales  et  politiques.  Aujourd'hui 
que  l'on  tend  de  plus  en  plus,  dans  les  sciences  écono- 
miques, juridiques  et  même  philosophiques,  à  faire  large 
la  part  des  faits,  l'histoire  devient  en  quelque  sorte  un 
terrain  commun  où  toutes  les  sciences  morales  se  ren- 
contrent et  que  toutes  ont  également  besoin  d'exploiter. 

L'histoire,  à  ce  point  de  vue,  est  moins  une  science 
spéciale  que  l'introduction  nécessaire  à  la  plupart  des 
sciences  morales  et  politiques. 

c(  Tout  en  reconnaissant  volontiers  l'importance  que 
ces  sciences  ont  prise  et  ne  cessent  de  prendre  de  nos 
jours,  disait  M.  Rurth,  en  appelant  sur  ce  point  l'attention 
de  l'Académie,  je  ne  saurais  cependant  consentir,  pour  ma 
part,  à  un  fractionnement  qui  détacherait  de  notre  Classe 
les  savants  qui  les  cultivent.  Il  est  de  l'intérêt  des  études 
relatives  à  l'homme  et  à  la  société  de  rester  groupées,  et 
les  sciences  sociales  elles-mêmes  perdraient  beaucoup  à 
être  cultivées  à  l'écart,  en  dehors  du  milieu  où  l'on  se 


(  579  ) 

livre  à  rétiide  de  l'histoire,  de  la  philosophie  morale  el 
du  droit.  Dira-t-on  que  ces  derniers  font  partie  du 
groupe  des  sciences  sociales  et  qu'ils  doivent  les  suivre 
dans  leur  exode  vers  la  terre  promise  d'une  Classe  à  elles? 
Mais  alors  on  ne  voit  pas  ce  qui  resterait  à  la  Classe  qu'on 
voudrait  abandonner.  Tout  compte  fait,  si  la  sociologie, 
pour  employer  ce  terme  barbare,  se  trouve  tro|)  peu 
représentée  parmi  nous,  ce  n'est  pas  en  faisant  sortir  de 
nos  rangs  ses  trop  rares  représentants,  c'est  au  contraire 
en  les  y  faisant  entrer  en  plus  grand  nombre  que  nous 
remédierons  à  l'abus.  » 

Les  mesures  prises  par  la  Classe  ne  peuvent  manquer 
d'avoir  ce  résultat.  N'exigeant  point  de  modifications 
statutaires,  elles  peuvent  être  immédiatement  mises  à 
exécution. 

Toutes  les  résolutions  de  la  Classe  ayant  obtenu  un 
assentiment  presque  unanime,  puisent  dans  cette  circon- 
stance un  surcroît  d'autorité. 


ELECTIONS. 


La  Classe  désigne  M.  Ernest  Gossart,  correspondant, 
pour  remplacer  M.  Samuel  dans  la  Commission  de  la 
Biographie  nationale. 

Elle  procède  ensuite  au  renouvellement  de  sa  Com- 
mission spéciale  des  finances.  Les  membres  sortants  sont 
réélus  pour  1899.  M.  Descamps  remplacera  M.  Wauters, 
décédé. 


(  d80  ) 


CLASSE  DES  BEAUX-ARTS. 


Séance  du  1"'  décembre  1898. 

M.  Ch.  Tardieu,  directeur,  président  de  l'Académie. 
M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  J.  Robie,  vice-directeur;  F. -A. 
Gevaert,  G.  Gufléns,  Th.  Radoux,  Peter  Benoit,  J.  Deman- 
nez,  P.-J.  Clays,  G.  De  Groot,  Gustave  Biot,  H.  Hymans, 
Th.  Vinçotte,  Jos.  Stallaert,  Alex.  Markelbach,  Max. 
Rooses,  G.  Huberti,  A.  Hennebicq,  Éd.  Van  Even,  Alfred 
Cluysenaar,  le  comte  Jacques  de  Lalaing,  J.  Winders, 
Ém.  Janlet,  J.  Van  Ysendyck,  membres;  Jos.  Meunier, 
correspondant. 

MM.  Maquet,  membre,  et  Mathieu,  correspondant,  font 
motiver  leur  absence. 


CORRESPONDANCE. 


Le  Gouvernement  de  S.  M.  la  Reine  des  Pays-Bas  offre 
un  exemplaire  du  livre  portant  pour  titre  :  Le  Musée 
national  à  Amsterdam.  Texte  de  Victor  de  Stuers;  plan- 
ches de  l'architecte  P.-J.-H.  Cuypers.  1897,  in-folio. 
—  Remerciements. 


(  S8i   ) 

L'Athénée  de  Brescia  offre  un  exemplaire  de  l'album 
de  phototypies  portant  pour  titre  :  U opère  di  Bonvicino, 
publié  à  l'occasion  de  l'inauguration  de  la  statue  de  ce 
peintre  (1498-1555),  à  Brescia,  et  à  l'occasion  de  l'expo- 
sition récente  de  ses  œuvres.  —  Remerciements. 

La  note  lue  par  M.  Marchai  au  sujet  de  ces  deux 
ouvrages  ligure  ci-après. 

—  M.  E.  Cremers  fait  hommage  d'une  brochure  inti- 
tulée :  L'anali/se  el  la  composition  mélodiques.  —  Remer- 
ciements. 

NOTE    BIBLIOGRAPHIQUE. 

S'il  est  dans  l'histoire  de  la  peinture  de  la  Haute-Italie 
une  intéressante  figure  du  XVP  siècle,  à  côté  du  Titien 
et  de  Palma  le  Vieux,  c'est  Alexandro  Bonvicino,  de 
Brescia,  dit  Moretto,  qui  vécut  à  Brescia  de  1498  à 
à  1555.  Il  parait  qu'il  n'a  étudié  que  dans  cette  localité 
qui  a  bénéficié  de  sa  gloire  artistique.  Bonvicino  peignait 
déjà  en  1516;  il  devait  donc  alors  avoir  environ  20  ans. 

J.  Burckhardt  —  une  autorité  en  matière  d'art  —  en 
parle  en  ces  termes  dans  son  Cicérone,  page  751  (tra- 
duction française  de  M,  Auguste  Gérard,  Ministre  pléni- 
potentiaire de  France  à  Bruxelles)  : 

«  Après  une  étude  attentive  des  Vénitiens  et  surtout  de 
Palma,  il  se  forma  à  l'école  de  Girolamo  Romanino, 
aussi  de  Brescia  (1485-1566),  surtout  aux  dernières 
œuvres  du  maître,  dont  le  coloris  éclatant  se  fondit  chez 
lui  en  une  tonalité  argentée,  d'un  gris  perlé  très  fin. 
Ce  n'est  que  dans  les  derniers  tableaux  de  Moretto  que  la 
tonalité  devient  d'un  gris  très  monotone  et  le  coloris  d'un 
rouge  assez  lourd,  en  même  temps  que  les  figures  perdent 


(  582  ) 
leur  précision,  leur  l'orme  et  tournent  au  sentimental. 
D'ordinaire  elles  ont  une  maturité  (une  opulence  de 
formes,  aurait  du  dire  le  traducteur),  une  plénitude  de 
beauté,  une  noblesse  d'attitude  auxquelles  il  ne  manque 
que  la  chaleur  et  la  vie  du  Titien  ou  de  Palma.  Certain 
trait  original  de  mélancolie  leur  donne  encore  plus  de 
charme.  » 

C'est  surtout  dans  les  églises  de  Brescia  que  l'on  peut 
admirer  et  apprécier  la  prodigieuse  fécondité  du  Moretto, 
et  cette  intéressante  localité  a  le  droit  de  s'enorgueillir  de 
cet  élève  et  émule  de  Romanino. 

L'Athénée  de  Brescia,  fondé  en  1802  pour  la  haute 
culture  intellectuelle,  vient  d'élever  à  Bonvicino  une 
statue  sur  l'une  des  places  publiques  de  la  ville;  cette 
statue  est  de  Domenico  Ghidoni.  L'Athénée  de  Brescia  a 
organisé  à  cette  occasion,  en  septembre  de  l'année 
actuelle,  une  exposition  de  toutes  les  œuvres  qu'il  a  pu 
réunir  du  célèbre  peintre.  C'est  au  nom  de  cette  institu- 
tion artistique  et  littéraire  que  j'ai  l'honneur  de  présenter 
à  la  Classe  l'album  portant  pour  titre  :  L'opère  di  Bonvi- 
cino, renfermant  trente  et  une  reproductions  hélioty- 
piques des  tableaux  du  maître.  Mes  excellents  confrères 
de  la  Classe  des  beaux-arts  parcourront  cet  ouvrage  avec 
intérêt,  je  n'en  doute  pas;  cet  album  est  accompagné 
d'un  texte  qui  jette  un  jour  tout  nouveau  sur  la  vie  et  les 
œuvres  de  célèbre  peintre  italien. 

D'autre  part,  MM.  les  architectes  feuilletteront  avec  le 
même  intérêt  le  beau  volume  que  le  Gouvernement 
hollandais  vient  d'offrir  à  l'Académie  et  qui  porte  pour 
titre  :  Le  Musée  national  à  Amsterdam,  texte  de  Victor 
de  Stuers,  planches  de  P.-J.-H.  Cuypers,  l'architecte  du 
monument.  Chev.  Edm.  Marchal. 


(  583  ) 


RAPPORT. 


II  est  donné  lecture  des  appréciations  de  MM.  Winders, 
Janlet  et  Maquet  sur  le  premier  rapport  semestriel  de 
M.  Cols,  prernier  prix  du  grand  concours  d'architecture 
de  1896. 

—  Renvoi  à  M.  le  Ministre  de  l'Agriculture  et  des  Tra- 
vaux publics. 


ÉLECTIONS. 


La  Classe  fait  choix  de  M.  P'iorimond  van  Duyse  pour 
remplacer  M.  Samuel  dans  la  Commission  de  la  Biogra- 
phie nationale. 

Elle  procède  ensuite  au  renouvellement  de  sa  Commis- 
sion spéciale  des  finances  pour  l'année  1899;  M.  Huberti 
y  remplacera  M.  Samuel,  décédé. 

Elle  se  constitue  en  comité  secret  pour  discuter  les 
titres  des  candidats  présentés  pour  les  places  vacantes  et 
pour  l'adoption  de  candidatures  nouvelles. 


(  58i  ) 


€l.AISfSK  DES  SCIEIVCES. 


Séance  du  15  décembre  1898. 

M.  Éd.  Dupont,  directeur. 

M.  le  chevalier  Edmond  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  W.  Spring,  vice-directeur;  le  baron 
Edm.  de  Selys  Longchamps,  G.  Dewalque,  Éd.  Van 
Beneden,  G.  Malaise,  F.  Folie,  F.  Plateau,  Fr.  Grépin, 
J.  De  Tilly,  Gh.  Van  Bambeke,  Alfr.  Gilkinet,  G.  Van 
der  Mensbrugghe,  Louis  Henry,  M.  Mourlon,  P.  Mansion, 
P.  De  Heen,  G.  Le  Paige,  Gh.  Lagrange,  F.  Terby, 
J.  Deruyts,  Léon  Fredericq,  J.-B. -Voltaire  Masius, 
J.  Neuberg,  A.  Lancaster,  membres;  Gh.  de  la  Vallée 
Poussin,  associé;  P.  Francotte,  correspondant. 

M.  Brialmont,  niembre,  s'est  excusé  de  ne  pouvoir 
assister  à  la  séance. 


GORRESPONDANGE. 


M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  et  de  l'Instruction  publique 
demande  que  la  Glasse  procède,  conformément  à  l'ar- 
ticle 42  du  règlement  général  des  concours  quinquennaux 
et  décennaux,  à  la  formation  d'une  liste  de  quatorze 


(  ^sn  ) 

noms,  pour  le  choix  :  I"  du  jury  chargé  de  décerner  le 
prix  décennal  des  «  sciences  botaniques  »  ;  2"  du  jury 
chargé  de  décerner  le  prix  décennal  de  «  chiniie  et  de 
physique  expérimentales  » ,  dont  la  première  période 
sera  close  le  51  décembre  courant. 

—    Hommage  d'ouvrage  : 

La  courbure  et  la  torsion  dans  la  coUinéation  et  la  réci- 
procité; par  Clément  Servais,  extr.  in-S".  —  Remer- 
ciements. 


JUGEMENT  l)i;  CONCOURS  ANNUEL  (1898). 


SCIKIVCES    iMATIlÉ.llATlQt]Ii:S    ET    I>HYSI«[}IJKS. 

Trois  mémoires  ont  été  reçus  en  réponse  à  la  troisième 
question  : 

Apporter  une  contribution  importante  à  l'étude  des  corres- 
pondances (Verwandtschaf'ten)  que  l'on  peut  établir  entre 
deux  espaces. 

Ils  portent  pour  devises  : 

N°M.  —  Geometry  is  hard  (J.-H.-S.  Smith); 
2.  —  Numeri  regunt  locum  ; 
5.  —  Itinera  ad  verum. 

Sur  la  déclaration  des  commissaires-rapporteurs  de  ne 
pouvoir  encore  présenter  leurs  conclusions,  autant  à 
cause  de  l'importance  de  la  question  posée  que  des  pro- 
portions des  mémoires  soumis  à  leur  appréciation,  la 
Classe  ajourne  le  prononcé  du  jugement  jusqu'à  une 
prochaine  séance   publique. 


(   586   ; 


KcmmcES  i{.%ti;rel.i.es. 


PREMIERE    QUESTION. 


On  demande  de  nouvelles  recherches  macrochimiques  et 
microchimiques  sur  la  digestion  chez  les  plantes  carnivores. 

«  Le  mémoire  qui  nous  a  été  adressé  porte  pour  épi- 
graphe cette  phrase  de  feu  notre  confrère  Ed.  Morren  : 
«fL'activité  des  plantes  carnivores  est,  en  dernière  ana- 
lyse, une  question  d'azote.  »  Cette  absorption  d'azote, 
l'auteur  en  fournit  une  démonstration  plus  complète  que 
tous  ses  devanciers,  et  qui  parait  décisive. 

Gobel  avait  remarqué  que  les  Nepenthes  paraissent 
l'emporter  quant  à  l'énergie  de  leur  digestion  sur  les  autres 
plantes  insectivores  :  aussi  l'auteur  a-t-il  été  bien  inspiré 
en  choisissant  précisément  ces  végétaux  pour  étudier  le 
phénomène  de  plus  près.  Quant  à  la  difficulté  de  se  les 
procurer  en  quantité  suflisante,  elle  n'existait  pas  pour 
lui,  puisqu'il  a  eu  la  bonne  fortune  de  faire  une  grande 
partie  de  ses  recherches  pendant  un  séjour  dans  la  forêt 
vierge,  à  Java. 

Ajoutons  que  les  impressions  de  voyage  exotique  qui 
percent,  çà  et  là,  discrètement,  dans  les  descriptions 
scientifiques  des  faits  observés,  donnent  à  ce  mémoire  un 
certain  charme  spécial. 

L'auteur  commence  par  quelques  considérations  géné- 
rales sur  la  digestion,  puis  il  passe  rapidement  en  revue 
les  phénomènes  de  digestion  dans  le  règne  végétal  : 
racines   attaquant   des   composés   minéraux   insolubles, 


(  587  ) 
plantes  saprophytes  et  parasites  digérant  des  matières 
organiques  complexes,  plantules  en  germination  utilisant 
les  matériaux  de  réserve,  saprophytisme  partiel  des 
plantes  carnivores.  Il  résume  alors  ce  que  l'on  sait  de  ces 
dernières  plantes  et  en  particulier  des  Nepenthes  :  cet 
exposé  m'a  paru  présenter  quelques  légères  omissions  et 
inexactitudes,  mais  qui  n'ont  pas  grande  importance. 

Le  problème  chimique  est  abordé  ensuite  dans  le  cha- 
pitre «  sur  les  zymases  protéolytiques  et  leurs  produits 
de  dédoublement  ».  Examinant  l'action  de  la  pepsine 
(en  présence  d'acide  dilué)  sur  les  albuminoïdes,  l'auteur 
y  reconnaît,  avec  divers  autres  biochimistes,  trois  étapes 
successives  :  transformation  de  l'albuminoïde  en  sijnto- 
nines  ou  acidalbumines ;  transformation  de  celles-ci  en 
albumoses;  et  de  celles-ci,  à  leur  tour,  en  peptones.  11 
indique  avec  soin,  d'après  ses  propres  expériences,  les 
caractères  de  ces  divers  groupes  de  corps,  notamment 
des  peptones. 

Il  y  a  lieu  de  signaler  l'aliment  (pie  notre  auteur  a 
donné  aux  urnes  de  Nepentlws  :  c'est  du  blanc  d'œuf  dilué 
au  dixième  et  rendu  incoagulable  par  l'addition  d'un 
millionième  de  sulfate  de  fer.  Cette  «  albumine  incoagu- 
lable», facile  à  doser,  à  manier  et  à  stériliser,  peutrendre, 
en  chimie  physiologique  et  en  bactériologie,  de  très 
grands  services,  comme  l'ont  montré  des  recherches 
entreprises,  il  y  a  déjà  quelques  années,  à  l'Institut  bota- 
nique de  l'Université  de  Bruxelles,  et  que  l'Académie  a 
bien  voulu  publier  en  189:2  et  1895. 

Les  expériences  faites  dans  la  forêt  vieige  ont  porté  sur 
le  Nepenthes  melampliora.  Normalement,  le  liquide  sécrété 
par  l'urne  encore  fermée  est  neutre.  Mais  il  sullit  de  pro- 
duire une  excitation,  soit  en  secouant  l'urne  un  peu  fort, 


(  588  ) 

soit  en  y  introduisant  un  corps  étranger  solide  ou  même 
liquide,  pour  que  la  sécrétion  s'acidifie  bientôt.  Les 
insectes  se  noient  beaucoup  plus  vite  dans  le  liquide  des 
urnes  que  dans  l'eau,  très  probablement  parce  que  ce 
liquide  les  mouille,  tandis  qu'il  n'en  est  pas  ainsi  pour 
l'eau.  Une  fois  noyés  dans  le  liquide  des  urnes,  ils  restent 
encore  vivants  durant  plusieurs  heures,  de  sorte  qu'il  n'y 
a  probablement  point  là  d'action  toxique,  comme  quel- 
ques-uns l'admettent,  mais  simple  et  graduelle  asphyxie. 

En  regard  de  ces  faits,  il  est  intéressant  d'apprendre 
que  l'auteur  a  observé  deux  espèces  d'insectes  qui  bravent 
impunément  le  liquide  des  urnes  et  qui  y  effectuent  même 
tout  le  cycle  de  leur  développement.  Une  constatation 
semblable  avait  déjà  été  faite  pour  les  Sarracenia,  mais 
on  était  tenté  de  l'expliquer  par  l'absence  de  zymase 
digestive  dans  le  liquide  de  ces  plantes.  Chez  le  Nepenthes 
melamphora,  une  zymase  existe  probablement,  et  il  est 
curieux  de  voir  des  larves  vivre  dans  un  tel  liquide. 
N'oublions  pas  toutefois  que  l'on  connaît  bon  nombre 
d'immunités  tout  aussi  remarquables,  à  commencer  par 
la  résistance  de  la  muqueuse  stomacale  vis-à-vis  du  suc 
gastrique. 

L'addition  d'albumine  au  liquide  de  l'urne  y  provoque 
la  réaction  acide,  ou  l'exalte  si  elle  existait  déjà  ;  après 
deux  jours  environ,  l'albumine  a  disparu,  sans  qu'il  soit 
possible  d'obtenir  une  réaction  nette  de  peptones  vraies. 
Cela  paraît  tenir  à  ce  que  le  liquide  du  Nepenthes  melam- 
phora n'est  pas  très  actif  et  que  la  plante  absorbe  les 
produits  de  dédoublement  des  albuminoïdes  au  fur  et  à 
mesure  de  leur  formation  ;  si  l'on  arrête  la  résorption  de 
ces  produits  en  détachant  l'urne  de  la  plante,  la  digestion 
elle-même  est  aussitôt  arrêtée. 


{  589  ) 

L'auteur  n'a  point  réussi  à  établir  avec  certitude  l'exis- 
tence d'une  zymase  peptonifiante  chez  le  Nepenthes  de  la 
forêt  vierge.  Mais  il  a  obtenu  à  cet  égard  chez  d'autres 
espèces,  étudiées  dans  les  serres  d'Europe,  des  résultats 
probants. 

Il  a  pu  montrer  que  les  sécrétions  d'urnes  les  plus 
fortement  peptonifiantes  perdent  ce  pouvoir  par  l'ébulli- 
tion.  Quant  aux  peptones,  on  n'en  trouve  presque  jamais 
dans  les  urnes,  car,  étant  diffusibles,  il  est  naturel  qu'elles 
soient  résorbées  les  premières  :  on  n'en  constate  la  pré- 
sence que  dans  les  cas  où  l'absorption,  consécutive  à  la 
digestion,  est  probablement  fort  ralentie. 

Un  problème  essentiel,  et  sur  lequel  les  recherches 
faites  antérieurement  étaient  peu  concluantes,  est  celui 
de  l'absorption  par  la  plante  des  produits  de  la  digestion. 
L'auteur  l'a  aborde  de  front  en  dosant  (par  la  méthode 
de  Kjeldahl)  l'azote  qui  reste  dans  l'urne  quelques  jours 
après  l'ingestion  d'une  quantité  connue  d'albumine  :  la 
proportion  d'azote  total  est  réduite  à  20  7o  de  ce  qu'elle 
était  dans  l'albumine  ingérée,  et  encore  faut-il  tenir 
compte  ici  de  l'azote  de  la  zymase,  de  celui  des  particules 
chitineuses  d'insectes  en  suspension  dans  le  liquide,  etc. 

L'absorption  par  la  plante  de  la  plus  grande  partie  de 
l'azote  organique  fourni  à  l'urne  est  ainsi  clairement 
prouvée. 

L'auteur  s'est  occupé  aussi  de  recherches  microchi- 
miques sur  la  digestion  des  Nepenthes  :  elles  auraient  pu 
être  plus  nombreuses  et  plus  approfondies,  et  l'on  s'atten- 
dait à  le  voir  essayer,  entre  autres,  les  élégants  procédés 
de  coloration  employés  dernièrement  avec  succès  chez 
les  Drosera  par  M"^  Huie.  Il  n'en  a  pas  moins  constaté. 


(  590  ) 
par  (les  expériences  au  moyen  de  bleu  de  méthylène  et 
par  la  marche  de  «  l'agrégation  »  intracellulaire  à  la 
suite  de  la  digestion,  que  tout  se  passe  comme  si  les 
glandes  sécrétrices  étaient  en  même  temps  le  siège  de 
l'absorption. 

Des  expériences  relatives  à  la  nature  de  la  zymase  de 
l'urne  et  un  petit  chapitre  consacré  aux  conclusions  com- 
plètent le  mémoire. 

Sans  doute,  ce  travail  laisse  encore  ouvertes  quelques- 
unes  des  questions  soulevées;  ses  résultats,  néanmoins, 
sont  intéressants  à  plus  d'un  titre.  Pour  ne  rappeler  que 
les  points  principaux,  l'auteur  indique  les  conditions 
dans  lesquelles  l'acidité  apparaît;  il  réfute  définitivement 
un  certain  nombre  de  déductions  inexactes  —  celles  de 
Raph.  Dubois,  par  exemple  ^;  il  améliore  la  technique 
expérimentale  par  l'emploi  de  l'albumine  incoagulable; 
il  établit  d'une  façon  péremptoire,  par  le  dosage  de 
l'azote,  l'absorption  des  produits  digérés. 

Aussi  avons-nous  l'honneur  de  proposer  à  la  Classe 
de  décerner  le  prix  à  ce  mémoire  et  d'en  ordonner 
l'impression.  » 


Rnppot't    de    ,F#.  Giikinet,   tlvMxiéme  coÈttntiHmnirv. 

((  Le  mémoire  envoyé  en  réponse  à  la  première  ques- 
tion traite  spécialement  de  la  digestion  des  Nepenthes. 
Le  rapport  détaillé  de  mon  savant  confrère,  premier 
commissaire,  me  dispense  d'une  analyse  qui  ferait  double 
emploi.  Les  premiers  chapitres,  consacrés  aux  considéra- 
tions générales  sur  la  digestion  et  à  l'exposé  des  généra- 


(  591  ) 

lités  relatives  aux  plantes  carnivores,  sont  suffisamment 
étendus  pour  donner  une  idée  exacte  des  connaissances 
actuelles  sur  le  sujet  traité.  Les  chapitres  suivants,  con- 
sacrés aux  Nepenthes,  constatent  l'absorption  des  albu- 
minoides  par  les  urnes  des  Nepenthes,  à  la  suite  d'une 
digestion  préalable  dans  un  milieu  acide. 

Pour  ce  qui  concerne  les  organes  de  l'absorption, 
l'auteur  en  arrive  à  la  conclusion,  peu  inattendue  du 
reste,  qu'elle  a  lieu  par  les  glandes  mêmes  qui  sécrètent 
le  liquide  digestif.  Ainsi  que  l'a  fait  remarquer  le  savant 
premier  commissaire,  ce  chapitre  est  écourté  et  les  con- 
clusions sur  ce  point  manquent  un  peu  de  base  expéri- 
mentale. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  mémoire  est  intéressant,  claire- 
ment et  simplement  écrit;  il  étend  dans  une  certaine 
mesure  nos  connaissances  sur  la  digestion  des  plantes 
carnivores  et  je  propose  volontiers,  avec  le  premier  com- 
missaire, de  lui  décerner  le  prix  et  d'en  ordonner  l'im- 
pression dans  un  des  recueils  académiques.  » 

M.  Crépin,  troisième  commissaire,  déclare  partager 
l'opinion  de  ses  deux  collègues  sur  le  mémoire  examiné 
par  eux  et  adopter  leurs  conclusions. 

La  Classe,  ratifiant  les  conclusions  des  rapports  des 
commissaires,  a  décerné  sa  médaille  d'or,  d'une  valeur  de 
six  cents  francs,  à  l'auteur  de  ce  mémoire,  M.  Georges 
Clautriau,  assistant  à  l'Institut  botanique,  à  Bruxelles. 


(  nn  ) 

DEUXIÈME    QUESTION. 

On  demande  des  recherches  physiologiques  nouvelles  sur  une 
fonction  encore  mal  connue  chez  un  animal  invertébré. 

Happoi't  de    ff.    Plaiffau,  pfemiet'  coêntniataiftf. 

«  Kowalevsky,  appliquant  en  1889,  après  Schindler  et 
Solger,  la  méthode  des  injections  physiologiques  colorées 
aux  Invertébrés,  dans  le  but  de  mettre  en  évidence  les 
éléments  excréteurs,  obtint  des  résultats  d'une  telle 
valeur  que  les  biologistes  s'empressèrent  d'employer  ce 
moyen  d'investigation. 

Kowalevsky  avait  utilisé  le  procédé  pour  l'étude  d'or- 
ganes d'excrétion  chez  des  Lamellibranches,  des  Gastro- 
podes et  des  Céphalopodes. 

En  1892  parut  dans  les  Archives  de  biologie  l'important 
travail  de  Cuénot  où,  se  servant  de  la  méthode  avec  cer- 
taines modifications,  ce  naturaliste  arrive  à  la  conclusion 
que,  chez  les  Gastropodes  pulmonés,  il  n'existe  pas  moins 
de  quatre  espèces  d'organes  excréteurs  :  le  rein,  les  cel- 
lules vacuolaires  et  les  cellules  cyanophiles  du  foie,  enfin 
des  cellules  excrétrices  disséminées  dans  le  tissu  conjonc- 
tif. 

En  1895,  E.  Hecht,  élève  du  précédent,  au  cours  d'une 
étude  sur  les  Nudibranches  de  Roscoff,  s'est  occupé  de 
l'excrétion  chez  ces  animaux. 

En  dernier  lieu  (1896),  les  injections  colorées  ont  été 
mises  en  usage  par  P.  Pelseneer  pour  l'examen  des  reins 
de  plusieurs  Mollusques. 

Nos  connaissances  sur  la  nature  et,  jusqu'à  un  certain 
point,  sur  le  fonctionnement  des  organes  de  désassimila- 
tion  des  Mollusques,  étaient  donc  assez  avancées.  L'auteur 
du   mémoire   soumis  à  notre  examen  et  qui  porte  la 


(  593) 

devise  :  La  physiologie  des  invertébrés  est  presque  tout 
entière  à  l'état  de  desideratum  (L,  Fredericq),  s'est  proposé 
de  relier  entre  eux  les  résultats  acquis  jusqu'à  ce  jour  et 
de  les  étendre  par  une  investigation  portant  sur  l'ensem- 
ble du  groupe.  Ainsi  qu'on  va  le  voir,  son  travail  est  tout 
autre  qu'une  compilation  et  renferme  beaucoup  de  choses 
intéressantes,  fruits  d'efforts  personnels. 

Après  quelques  considérations  sur  le  rôle  de  l'excré- 
tion dans  l'organisme,  sur  la  méthode  des  injections,  sur 
l'aptitude  particulière  de  telle  ou  telle  catégorie  de  cel- 
lules excrétrices  à  absorber  plus  spécialement  certaines 
matières  colorantes  et  sur  la  technique  qu'il  a  suivie, 
l'auteur  expose  en  détail  les  résultats  de  ses  investiga- 
tions sur  des  Mollusques  appartenant  aux  principaux 
ordres. 

Chez  les  Amphineures  (espèce  étudiée:  Acanthochiton 
discrepans),  on  ne  connaissait  que  les  néphridies.  Les 
injections  physiologiques  y  mettent  en  outre  en  évidence 
deux  autres  espèces  de  cellules  excrétrices  :  celles  des 
conduits  réno-péricardiaux  et  des  cellules  éparses  dans  le 
tissu  conjonctif. 

Chez  les  Solénoconques  (espèce  étudiée  :  Dentalium  vul- 
gare),  l'injection  de  carminate  décèle  aussi  la  présence 
de  nombreuses  cellules  excrétrices  du  tissu  conjonctif 
s'ajoutant  donc  aux  néphridies  seules  connues  jusqu'à 
présent. 

Quatorze  espèces  marines  et  d'eau  douce  ont  été  étu- 
diées par  l'auteur  dans  le  groupe  des  Gastropodes  proso- 
branches.  L'excrétion  y  est  dévolue.:  4''  aux  néphridies  ; 
2°  à  des  cellules  closes  du  tissu  conjonctif,  puis,  5",  dans 
plusieurs  genres,  à  certaines  cellules  du  foie  analogues 
aux  cellules  vacuolaires  du  foie  des  Pulmonés. 

5™^    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  40 


(  594  ) 

L'auteur  décrit  la  façon  dont  le  rein  pair  ou  impair  se 
comporte  vis-à-vis  des  injections  colorées  et  constate  que, 
lorsqu'il  y  a  deux  reins,  généralement  très  inégaux,  ceux- 
ci  peuvent  ou  bien  avoir  des  fonctions  identiques  (Paiera), 
ou  bien,  ainsi  que  l'avaient  déjà  observé  Kowalevsky  et 
Pelseneer,  avoir  des  rôles  ditférents  {Haliotis,  Trochus). 
Tandis  que  si  le  rein  est  unique  (gaucbe),  l'organe  impair 
représente  physiologiquement  les  deux  glandes  népbri- 
diennes,  contenant,  en  effet,  les  deux  espèces  de  cellules 
excrétrices  respectivement  localisées  ailleurs  dans  le 
rein  droit  et  le  rein  gauche  {Paludina,  Cydostoma,  Bucci- 
num,  Nassa,  etc.). 

Parmi  les  Opisthobranches,  huit  espèces  ont  servi  aux 
recherches.  Les  expériences  ont  permis  de  confirmer  le 
rôle  de  la  néphridie  étudié  par  Kowalevsky,  celui  de  cer- 
taines cellules  du  foie  signalées  par  Cuénot  et  Hecht, 
celui  enfin  des  cellules  excrétrices  du  tissu  conjonctif 
décrites  par  ce  dernier. 

Pour  les  Pulmonés,  l'auteur  renvoie  au  travail  de  Cué- 
not et  aux  rectifications  ultérieures  du  même  naturaliste. 

Dans  le  groupe  des  Lamellibranches,  il  a  étudié 
quatorze  formes  et  a  cherché  à  préciser  et  à  étendre  nos 
connaissances  sur  les  glandes  péricardiques  de  ces  Mol- 
lusques. 

Chez  les  Céphalopodes  où  l'on  connaissait  deux  espèces 
d'organes  excréteurs,  les  néphridies  et  les  cœurs  bran- 
chiaux, l'auteur  prenant  comme  sujet  d'étude  la  Sepia 
ofjicinalis,  a  examiné  spécialement  le  cœur  branchial  et 
a  pu  ainsi  ajouter  à  la  liste  des  organes  d'excrétion  des 
Céphalopodes  Y  appendice  qui  coiffe  ce  cœur.  Cet  appen- 
dice renferme,  en  effet,  deux  catégories  de  cellules  excré- 
trices, les  cellules  épithélialcs  et  des  cellules  particulières 
logées  dans  le  réticulum  conjonctif. 


(  m^  ) 

L'auteur,  cherchant  à  grouper  les  résultats,  passe 
ensuite  à  des  considérations  d'une  portée  phis  générale. 

Il  signale  d'abord  le  phénomène  fréquent  de  la  fixation 
du  carminate  des  injections  sur  des  substances  amorphes 
qui  se  colorent  plus  ou  moins  vivement,  telles  que  le 
lissu  conjonctif  de  l'axe  squelettique  des  branchies,  les 
baguettes  logées  dans  l'épaisseur  des  lames  de  soutien  de 
celles-ci.  Il  rapj)e]le  l'existence,  chez  les  Gastropodes 
d'eau  douce  et  chez  les  Lamellibranches  du  groupe  des 
Naïades,  de  nombreuses  concrétions  constituées  soit  par 
du  carbonate  de  calcium  seul,  soit  par  l'association  d'une 
substance  organique  avec  du  carbonate  et  du  phosphate 
de  calcium.  Le  rôle  de  ces  concrétions  logées  dans  le 
lissu  conjonctif  est  en  grande  partie  inconnu,  mais  elles 
possèdent  aussi,  chez  le  Mollusque  vivant,  une  affinité 
intense  et  persistante  pour  le  carminate  d'ammoniaque. 
La  constatation  de  ces  faits  ne  manque  pas  d'importance 
pratique;  elle  met  en  garde  contre  des  erreurs  possibles. 

L'auteur  consacre  un  chapitre  intéressant  au  fonction- 
nement des  cellules  excrétrices.  Si  ce  fonctionnement  et 
l'évacuation  des  produits  de  désassimilation  se  comprend 
aisément  lorsque  les  cellules  en  question  tapissent  des 
cavités  en  communication  avec  l'extérieur,  il  en  est 
autrement  si  les  organes  excréteurs  sont  clos,  comme 
les  cellules  éparses  dans  le  tissu  conjonctif  des  Aniphi- 
neures,  des  Solénoconques  et  des  Gastropodes,  le  cœur 
branchial  et  son  appendice  chez  les  Céphalopodes,  les 
glandes  péricardiques  palléales  des  Lamellibranches.  Ici 
le  fonctionnement  n'apparaît  plus  avec  évidence  et  des 
recherches  spéciales  s'imposaient. 

Dans  le  cas  des  glandes  péricardiques  palléales  des 
Lamellibranches,  dont  les  cœcums  ont  en  réalité  leurs  ori- 
fices oblitérés,  sans  usage,  et  où  les  produits  rejetés  par 


(  596  ) 

les  cellules  tapissant  ces  cœcunis  ne  peuvent  gagner  le 
péricarde,  les  choses  se  passeraient,  d'a|)rès  l'auteur  du 
mémoire,  de  la  façon  suivante  :  de  nombreux  amibocytes 
circulant  dans  les  lacunes  sanguines  interposées  entre 
les  tubes  de  la  glande,  passent  au  travers  des  parois, 
pénètrent  dans  les  tubes  et,  agissant  comme  phagocytes, 
absorbent  la  sécrétion  des  cellules  émise  sous  forme  de 
boules.  Après  un  certain  temps,  ces  amibocytes,  bourrés 
de  produits  d'excrétion,  refont,  en  sens  inverse,  le  chemin 
parcouru,  retournent  dans  les  lacunes  sanguines  et  de  là 
passent  dans  la  circulation  générale,  où  il  est  aisé  de  les 
retrouver.  Ce  serait  là  une  des  origines  des  phagocytes  à 
inclusions  rencontrés  par  plusieurs  observateurs  et,  entre 
autres,  par  C.  De  Bruyne,  dans  le  sang  des  Lamelli- 
branches, et  qui,  comme  ce  dernier  l'a  montré  dans  un 
travail  récent,  finissent  par  traverser  les  épithéliums  de  la 
surface  externe  pour  quitter  définitivement  l'organisme. 

Toutefois  l'auteur  du  mémoire,  s'appuyant  sur  diverses 
observations,  croit  qu'il  ne  faut  pas  s'exagérer  cette  dia- 
pédèse  de  phagocytes  et  que  beaucoup  d'entre  eux,  au 
lieu  de  sortir  du  corps  du  Mollusque,  se  logent  à  demeure 
dans  le  tissu  conjonctif,  où  leur  nombre  augmente  de  plus 
en  plus  avec  l'âge  de  l'animal. 

Quant  aux  cellules  excrétrices  closes  du  tissu  conjonctif 
des  autres  Mollus(iues,  Amphineures,  Solénoconques, 
Gastropodes  et  Céphalopodes,  il  est  possible  qu'il  y  ait 
aussi  intervention  de  phagocytes  pour  enlever  les  produits 
qu'elles  forment. 

Cependant,  chez  les  Gastropodes  et 'spécialement  chez 
Paludina,  elles  fonctionneraient  plus  ou  moins  comme 
reins  d'accumulation.  A  mesure  que  l'individu  vieillit,  les 
vacuoles  des  cellules  excrétrices  du  tissu  conjonctif  se 
chargent  de  produits  solides  partiellement  cristallisés, 


(  Sî>7  ) 
puis  se  fragmentent  et  sont  la  proie  de  phagocytes  (pii 
disséminent  dans  tout  le  corps  du  Mollusque  des  concré- 
tions partiellement  digérées. 

Suit  un  court  chapitre  hypothétique  sur  la  phylogénie 
des  cellules  excrétrices  du  tissu  conjonctif,  puis  vient  un 
chapitre  final  sur  la  comparaison  des  Mollusques  avec 
d'autres  groupes.  L'auteur  y  montre,  en  se  basant  sur  les 
résultats  obtenus  par  divers  biologistes,  que  le  fait  de  la 
collaboration  de  cellules  excrétrices  closes  et  de  phago- 
cytes qui  distribuent  dans  les  tissus  une  quantité  consi- 
dérable de  granules  solides  augmentant  graduellement 
avec  l'âge  de  l'individu,  se  retrouve,  avec  quelques 
variantes,  chez  les  Annélides  oligochètes  et  polychètes, 
les  Hirudinées,  les  Sipunculides  et  les  Échinodermes. 

Tel  est,  en  résumé,  le  contenu  du  mémoire;  l'impres- 
sion générale  qui  m'est  restée  après  un  examen  appro- 
fondi est  celle  d'un  travail  d'une  valeur  incontestable, 
mais  incomplet.  Si  l'auteur  avait  pris  pour  titre  Applica- 
tion de  la  méthode  des  injections  colorées  aux  Mollusques, 
je  n'aurais  rien  à  dire;  mais  en  intitulant  son  mémoire 
L'excrétion  chez  les  Mollusques,  il  faisait  espérer  des 
résultats  qui  ne  s'y  rencontrent  pas. 

Je  précise  :  l'auteur  nous  donne  (pages  2  et  12  du 
manuscrit)  l'énumération  des  quelques  substances  chi- 
miques, urée,  acides  urique  et  hippurique,  guanine  ou 
xanthine,  connues  jusqu'à  présent  comme  sécrétées  par 
les  néphridies  ou  la  glande  péricardique  d'un  certain 
nombre  de  Mollusques,  mais  il  n'a  guère  cherché  soit  à 
allonger  cette  liste,  soit  à  retrouver.les  mêmes  corps  dans 
des  groupes  de  Mollusques  où  ils  n'avaient  pas  été 
signalés.  Ainsi,  par  exemple,  parlant  du  cœur  branchial 
des  Céphalopodes,  il  dit  (page  35  du  manuscrit)  :  Chez 
Octopus,  ce  il  y  a  dans  chaque  cellule  une  grosse  concré- 


(  598  ) 
tion  colorée;  c'est  à  la  présence  de  ces  concrétions  qu'est 
due  la  couleur  violette  du  cœur  des  Octopodes  »  ;  puis, 
signalant  les  granules  nombreux  qui  chargent  le  cyto- 
plasme de  ces  mêmes  cellules  chez  Sepia  :  «  Ce  sont  des 
çranules  à  réaction  acide  qui  fixent  le  carrainate  et  la 
fuchsine;  sans  aucun  doute,  ils  représentent  le  produit 
de  désassimilation  fabriqué  par  la  glande.  » 

Le  lecteur  est  en  droit,  me  semble-t-il,  de  demander 
quelle  est  la  nature  chimique  des  concrétions  des  Octopus, 
des  nombreux  granules  des  cellules  du  cœur  branchial 
des  Sepia;  il  désirerait  au  moins  voir  l'auteur  instituer 
quelques  expériences  pour  tenter  d'arriver  à  une  solution 
de  ces  questions. 

Le  côté  faible  du  travail  me  parait  donc  être  celui-ci  : 
l'auteur,  extrêmement  habile  dans  l'emploi  de  la  méthode 
des  injections  physiologiques  colorées,  n'a  pour  ainsi 
dire  eu  recours  qu'à  celte  méthode.  Précieuse  comme 
moyen  d'investigation  topographique  pour  mettre  en 
évidence  des  éléments  à  fonction  excrétrice,  elle  peut 
tout  au  plus  nous  renseigner  parfois  sur  la  réaction  soit 
acide,  soit  alcaline,  ou  nous  permettre  de  deviner,  par 
comparaison  avec  des  cas  connus,  quels  sont  les  produits 
d'excrétion  probables.  Mais  ce  ne  sont  là  que  les  premiers 
jalons  dont  le  biologiste  ne  doit  pas  se  contenter;  il  doit 
chercher  à  déterminer  la  nature  réelle  des  produits 
excrétés  par  les  diverses  glandes.  L'auteur  fait  preuve 
d'assez  de  connaissances  physiologiques  pour  montrer 
qu'il  serait  capable  de  poursuivre  ses  recherches  dans  le 
sens  que  j'indique.  J'émets  le  vœu  de  le  voir  s'engager 
plus  tard  dans  cette  voie. 

Malgré  ces  critiques,  le  travail  qui  nous  est  soumis  est 
une  œuvre  très  sérieuse,  due  évidemment  à  la  plume  d'un 
naturaliste  rompu  de  longue  date  aux  recherches  anatomo- 


(  o99  ) 
physiologiques  sur  les  Invertébrés;  ilHgurerait  fort  hono- 
rablement dans  les  publications  de  l'Académie.  Je  pro- 
pose à  la  Classe  des  sciences  de  lui  décerner  le  prix  et 
d'en  ordonner  l'impression  ainsi  que  la  reproduction  des 
planches  dans  le  recueil  des  Mémoires  in-4°  (1).  » 

MM.  Éd.  Van  Beneden  et  Van  Bambeke  déclarent  se 
rallier  aux  conclusions  de  ce  rapport. 

LaClasse,  ratifiant  ces  conclusions,  décerne  sa  médaille 
d'or,  d'une  valeur  de  six  cents  francs,  à  l'auteur  du 
mémoire  :  M.  L.  Cuénot,  professeur  de  zoologie  à  l'Uni- 
versité de  Nancy. 


ELECTIONS. 


La  Classe  procède,  conformément  à  l'article  :2  du 
règlement  général  et  à  l'article  44  de  son  règlement 
particulier,  aux  élections  pour  les  places  vacantes. 

—  Les  résultats  du  concours  annuel  et  des  élections 
seront  proclamés  dans  la  séance  publique  fixée  au  vendredi 
16  décembre. 


PRÉPARATIFS    DE    LA    SEANCE    PUBLIQUE. 

Conformément  à  l'article  17  de  son  règlement, 
M.  Dupont,  en  sa  qualité  de  directeur,  et  M.  F.  Folie 
donnent  lecture  de  leurs  discours. 

(1)  L'auteur  a  reçu  l'autorisation  de  faire  imprimer  son  mémoire 
dans  les  Archives  de  Biologie,  publiées  par  MM.  Éd.  Van  Beneden  et 
Ch.  Van  Bambeke. 


(  GOO  ) 


CLASSE  DES  SCIEMCES. 


Séance  publique  du  16  décembre  1898. 

M.  Ed.  Dupont,  directeur. 

M.  le  chevalier  Edm.  Marchal,  secrétaire  perpétuel. 

Prennent  également  place  au  bureau  : 

MM.  Ch.  Tardieu,  président  de  l'Académie,  et  W. 
Spring,  vice-directeur  de  la  Classe  des  sciences. 

Sont  présents  :  MM.  G.  Dewalque,  Brialmont,  Éd. 
Van  Beneden,  C.  Malaise,  F.  Folie,  Fr.  Crépiu,  Ch. 
Van  Bambeke,  Alfr.  Gilkinet,  G.  Van  der  Mensbrugghe, 
L.  Henry,  M.  Mourlon,  P.  De  Heen,  C.  Le  Paige,  Ch. 
Lagrange,  F.  ïerby,  J.  Deruyts,  Léon  Fredericq,  J.  Neu- 
berg,  A.  Lancaster,  membres;  Ch.  de  la  Vallée  Poussin, 
associé;  A. -F.  Benard,  L.  Errera,  P.  Francotte,  Fr.  De- 
ruyts et  Ch.-J.  de  la  Vallée  Poussin,  correspondants. 

Assistent  à  la  séance  : 

Classe  des  lettres.  —  MM.  A.  Giron,  vice-directeur  ; 
Ch.  Potvin,  T.-J.  Lamy,  Ern.  Discailles,  membres;  J.-C. 
Vollgraff>  associé;  J.  Leclercq  et  E.  Gossart,  correspon- 
dants. 

Classe  des  beaux- arts.  —  MM.  G.  Guffens,  J.  Deman- 
nez,  G.  De  Groot,  Gust.  Biot,  H.  Hymans,  Jos.  Stal- 
laert,  G.  Huberti,  Éd.  Van  Even,  J.  Winders  et  Ém. 
Janlet,  membres. 


\ 


(  601   ) 


Quelques   mots   sur  l'Evolution;    par   É,    Dupont, 
directeur  de  la  Classe  des  sciences  pour  1898. 

La  recherche  de  \à  relation  des  effets  et  des  causes,  <}ui 
trouve  sa  formule  abstraite  dans  la  donnée  que  tout  pro- 
cède d'un  antécédent,  a,  dès  les  premiers  temps  de  la 
pensée,  préoccupé  l'esprit  humain.  Par  là,  on  abordait 
le  problème  scientifique  des  origines  que,  de  nos  jours, 
on  traduit  d'un  mot,  embrassant  l'une  des  plus  puis- 
santes vues  de  la  science  et  aussi  l'une  de  celles  (jui 
eurent  le  plus  de  mal  à  se  l'aire  jour  :  l'Évolution. 

Cette  notion,  comportant  à  la  lois  l'idée  de  dérivation 
et  l'idée  de  différenciation,  est  d'abord  connexe  à  la 
notion  de  la  succession  du  temps  ;  avant  tout,  elle  est  dans 
sa  dépendance,  car  le  temps  en  est  le  principal  facteur,  la 
fonction  essentielle.  Or  la  notion  scientifique  du  temps 
fut  elle-même  longue  à  acquérir  avec  l'ampleur  qui  lui 
convient. 

Les  géologues,  dont  les  recherches  reposent  cependant 
sur  l'étude  de  la  succession  des  événements,  hésitaient 
devant  les  instances  des  précurseurs  qui  les  pressaient 
d'adopter,  dans  la  considération  du  passé  terrestre,  une 
durée  indéfinie  et  de  rejeter  radicalement  tout  appel  à 
des  phénomènes  imaginaires  en  vue  de  raccourcir  ce 
passé  et  d'en  interrompre  la  continuité.  Mais,  lorsque 
ce  progrès  de  doctrine  eut  été  accompli,  la  donnée 
de  l'évolution  fit  rapidement  son  cliemin.  Elle  est 
aujourd'hui  à  la  base  de  toute  notre  conception  de  la 
nature.  C'est  ce  qui  me  porte,  dans  la  lecture  que  l'usage 


(  602  ) 

impose  aux  directeurs  sortants,  à  vous  soumettre,  avant 
les  résultats  de  mes  études  et  de  mes  recherches,  les 
réflexions  que  son  vaste  domaine  m'a  suggérées. 


I. 


L'idée  que  les  phénomènes  de  même  ordre,  quelque 
variés  qu'ils  soient,  sont  fondamentalement  liés  dans  le 
passé,  non  seulement  par  leur  succession,  mais  surtout 
par  une  filiation  directe,  ouvrait  aux  investigations  un 
domaine  d'une  merveilleuse  fécondité.  Aussitôt,  la  suite 
des  changements  observés  dans  la  nature  se  précisa  et 
put  exactement  se  classer. 

Si  les  manifestations  de  même  catégorie  annoncent 
une  filiation,  ou  pour  mieux  dire  une  hérédité,  elles 
subissent  aussi  la  réaction  de  l'ensemble  de  leur  milieu 
et  se  soumettent,  dès  qu'elles  peuvent  se  produire,  à  des 
adaptations  corrélatives. 

Ainsi  les  phénomènes,  considérés  dans  leur  succession, 
étant  sujets  à  deux  actions  :  la  filiation  qui  les  rattache 
à  leurs  précédents  et  les  différenciations  qui  expriment 
leur  appropriation  à  d'autres  circonstances,  —  de  l'héré- 
dité procèdent  les  ressemblances,  de  l'adaptation  les  diffé- 
rences. 

Mais,  par  le  fait  même  qu'il  y  a  filiation  et  que  celte 
filiation  laisse  toujours  sa  marque  au  milieu  des  transfor- 
mations, nous  trouvons  avec  sa  relativité,  comme  support  à 
cette  conception  ou  plutôt  à  cette  constatation,  une  sorte 
d'axiome  scientifique  que  voici  :  «  Les  phénomènes  se 
»  manifestent  dans  le  présent  et  se  sont  manifestés  dans 


(  603  ) 

»  le  passé  comme  si  les  lois  de  la  nature  étaient  im- 
M  muables.  » 

L'édifice  de  la  compréhension  et  de  la  reconstitution  du 
passé  repose  sur  ces  prémisses.  Sans  elles,  tout  ce  que 
nous  savons  ou  croyons  savoir  sur  les  époques  lointaines 
ou  récentes,  sur  la  corrélation  de  leurs  phénomènes, 
s'écroulerait  à  l'instant  et  irrémédiablement  pour  faire 
place  au  chaos,  à  un  amas  de  faits  incohérents  et  sans 
liaison.  La  science  pour  le  présent  et  pour  le  passé  aurait 
cessé  d'exister. 

Heureusement  le  grand  principe,  que  la  science  adopte 
comme  guide  pour  explorer  l'espace  et  pour  sonder  le 
temps,  n'est  pas  un  produit  de  raison  pure,  un  simple 
concept  philosophique  imaginé  en  vue  d'expliquer  le  cours 
des  choses. 

11  n'est  pas  davantage  une  simple  théorie  scientifique, 
une  sorte  de  tentative  à  caractère  temporaire  qui,  faute 
de  mieux  et  sauf  à  se  modifier  ou  même  à  être  remplacée 
suivant  les  nécessités,  s'impose  comme  une  orientation 
vers  de  nouvelles  recherches. 

Le  principe  de  la  fixité  des  lois  a  de  plus  solides  assises. 
La  science,  dans  ses  études  sur  resj)ace  et  sur  le  temps, 
l'a  constamment  vérifié.  Quelles  que  soient  les  directions 
qu'elle  ait  prises,  il  a  acquis,  par  l'évidence  que  fournit 
un  fait  constant,  le  rang  d'une  notion  considérée  comme 
définitive.  C'est  donc  bien  là  une  loi  scientifique  et  elle 
est  considérable,  parce  que,  s'appliquant  au  temps  aussi 
bien  qu'à  l'espace,  elle  englobe  les  autres  lois  naturelles 
et  que,  par  elle,  nous  possédons  un  moyen  assuré  de 
tenter  la  restauration  du  passé  de  l'Univers.  Serait-ce 
aller  au  delà  de  sa  portée  de  l'appeler  la  loi  suprême  de 
la  science? 


(  604  ) 

Mais,  pendant  que  nous  constatons  cette  permanence 
des  relations  nécessaires  des  phénomènes,  nous  sommes 
témoins  de  modifications,  répétées  et  innombrables,  dans 
le  passé  et  le  présent,  qui  nous  apprennent  que  la  varia- 
bilité des  manifestations  est  dans  la  nature  au  même  rang 
que  la  fixité  de  ses  lois.  Principe  de  stabilité  et  prin- 
cipe de  mobilité  marchent  de  pair,  avec  le  même  degré 
d'évidence. 

C'est  que  les  causes  en  jeu,  étant  constantes  dans 
leurs  éléments,  sont  multiples  dans  leur  action;  elles 
réagissent  sans  relâche  les  unes  sur  les  autres,  s'adaptent 
mutuellement  en  créant  des  résultantes  nouvelles,  des 
effets  différents  d'intensité  et,  par  conséquent,  sont 
variables  dans  leurs  conditions.  11  en  résulte  une  sorte 
d'équilibre  instable,  une  suite  de  transformations  inces- 
santes. 

Ainsi  apparait  cet  autre  point  fondamental  de  l'évolu- 
tion :  (c  La  variabilité  des  phénomènes  se  présente  comme 
»  le  résultat  de  l'action  combinée  des  lois  de  la  nature.  » 

Ces  deux  grandes  données  de  la  doctrine  sont  établies 
par  l'observation  directe  qui  les  a  reconnues  et  vérifiées 
dans  toutes  les  voies,  et  leur  constance  les  a  douées 
d'une  force  inébranlable.  Mais,  par  elles-mêmes,  elles 
sont  encore  incomplètes,  puisqu'elles  exigent  l'adjonction 
d'une  troisième  notion,  celle  qui  permet  de  suivre  la 
marche  du  temps,  ce  qu'on  appelle  une  méthode  chrono- 
logique. Il  a  donc  fallu  que  la  géologie,  avant  ses  essais 
de  reconstitution  du  passé,  découvrit  son  procédé  pour 
apprécier  la  progression  du  temps,  et  elle  l'a  trouvé  aussi 
précis  qu'elle  pouvait  le  désirer,  au  point  que,  sous  ce 
rapport,  elle  n'a  guère  à  envier  aux  sciences  exactes  : 
«  Lorsque  deux  dépôts  horizontaux  sont  superposés,  le 


(  605  ) 

»  dépôt  recouvert  est  toujours  plus  ancien  que  le  dépôt 
»  recouvrant.   » 

Ce  principe  chronologique,  qui  a  été  adapté  aux 
couches  bouleversées  et  à  quelques  autres  cas  particuliers, 
n'a  pas  de  postulatum,  à  moins  que  l'on  ne  récuse  la 
permanence  des  lois  d'un  même  phénomène,  car  les  ter- 
rains ont  été  surtout  déposés  par  les  eaux  et,  ne  l'eussent- 
ils  pas  été  dans  certaines  occurrences,  leur  succession, 
sauf  des  cas  exceptionnels  faciles  à  distinguer,  serait 
encore  établie  par  les  superpositions. 

La  science  a  pu  ainsi  entrer  en  possession  de  sa 
méthode  pour  pénétrer  d'une  manière  assurée,  par  les 
assises  de  surface,  dans  le  passé  du  globe,  y  reconnaître 
la  suite  régulière  des  phénomènes  à  travers  les  temps, 
y  installer  enfin  de  réelles  tables  chronologiques  basées, 
sinon  sur  les  durées,  du  moins  sur  la  succession  exacte  des 
événements  :  sur  ce  point  aussi,  son  armure  est  solide. 

Cette  conquête,  aussi  belle  par  la  puissance  de  ses 
résultats  que  par  la  précision  de  sa  donnée,  nous  a  ouvert 
le  passé  terrestre  et  a  donné  issue  à  la  méthode  de  l'évo- 
lution. 

Les  terrains  dont  la  succession  dans  le  temps  peut  être 
si  sûrement  fixée,  allaient  désormais  pouvoir,  par  leur 
nature  et  leur  contenu,  nous  révéler  leur  histoire  et  nous 
admettre  à  considérer  les  événements  qui  se  sont  déroulés 
à  travers  des  durées  prodigieuses. 

C'est  alors  que,  de  nouveau  sous  le  couvert  de  la  fixité 
des  lois  de  la  nature,  appelé  par  l,es  géologues  Causes 
actuelles,  s'est  présentée  à  nous  une  suite  variée  de  phéno- 
mènes, sous  l'aspect  d'un  vaste  enchaînement,  d'où  il 
semble  clairement   apparaître   que   les  événements  de 


(  606  ) 

notre  passé  convergent  pour  tracer,  simultanément  avec 
une  longue  suite  d'adaptations  et  de  transformations, 
leurs  filiations  intimes  et  continues,  et  faire  arriver  le 
globe  à  son  état  actuel.  Chaque  phénomène  s'affirme 
comme  procédant  d'un  phénomène  antérieur  de  même 
ordre  qui  le  rattache  à  sa  souche  et  tend  à  le  rendre  fixe 
et  immuable,  tandis  qu'il  ne  tend  pas  moins  à  s'en  écarter 
par  toutes  sortes  de  variations  et  de  différenciations. 

Nous  disons  en  conséquence  qu'ici  nous  trouvons  les 
caractères  d'une  véritable  évolution,  puisque  le  double 
processus,  formant  l'essence  de  toute  action  évolutive  et 
se  présentant  l'un  comme  centripète,  l'autre  comme  cen- 
trifuge, paraît  diriger  sans  interruption  les  manifestations 
du  passé  terrestre  où  nous  pouvons  avoir  accès. 

Tout  d'abord,  les  phénomènes  que  nous  révèlent  la 
suite  des  terrains,  leur  composition  et  leurs  dispositions, 
nous  conduisent  à  une  nouvelle  donnée  d'évolution  de 
haute  importance.  Aucun  vestige  de  périodicité  ne  s'y 
observe,  aucune  réapparition  régulière  ne  s'y  constate. 
Dans  la  formation  et  le  façonnement  de  la  croûte  terres- 
tre, l'évolution  suit  une  voie  formellement  continue,  sans 
retour  sur  elle-même.  Les  actions  reposent  sur  les  mêmes 
causes  de  permanence,  elles  sont  mutuellement  contin- 
gentes pour  leurs  variations,  mais  non  soumises  à  des 
inffuences  de  rotation  qui  les  feraient  réapparaître  pério- 
diquement et  les  placeraient,  comme  le  globe  lui-même, 
dans  la  sphère  des  phénomènes  astronomiques. 

Ce  sont,  toujours  et  sans  ordre  alternatif  régulier,  des 
dépôts  à  prédominance  ou  de  silice  ou  de  silicates  alumi- 
neux  ou  de  calcaire;  ce  sont  des  roches  éruptives  de 
natures  et  de  dispositions  similaires;  ce 'sont  des  filons 


(  607  ) 
ou  des  amas  métallifères  de  mêmes  allures;  ce  sont  les 
mêmes  modifications  de  terrains  accompagnant  des  cir- 
constances analogues;  ce  sont  encore  des  perturbations 
et  des  bouleversements  de  couches  avec  les  mêmes  carac- 
tères généraux. 

Ces  phénomènes  se  manifestent  en  développement 
sériai,  avec  une  amplitude,  une  intensité  et  des  caractères 
secondaires  variables;  jamais  dans  un  cycle  déterminé. 
Telle  se  montre  l'évolution  de  l'enveloppe  terrestre,  en 
opposition  saillante  avec  les  mouvements  dont  la  terre 
est  animée. 

Mais  quel  que  puisse  être  l'intérêt  d'un  examen  détaillé 
du  façonnement  de  la  partie  du  globe  que  nous  pouvons 
directement  étudier,  il  cède  cependant  le  pas  à  l'étude 
du  développement  de  la  vie.  Les  relations  mutuelles  des 
êtres  organisés  à  travers  les  temps  ne  créent-elles  pas, 
à  l'observation  et  à  la  méditation,  une  des  questions  les 
plus  vastes  et  les  plus  enfiévrantes?  Même  dépouillé  de 
tout  esprit  (Va  priori,  pris  en  lui-même  dans  la  seule  vue 
de  connaître  curieusement  par  des  faits,  et  non  par  idéo- 
logie, comment  les  choses  se  sont  passées,  le  problème 
conserve  ses  côtés  obsédants  qui  veulent  que  l'attention 
s'y  fixe  sans  relâche  :  il  faut  s'assurer  comment  les  êtres 
organisés  se  sont  comportés  au  cours  des  âges.  Ceux  qui 
nous  entourent  sont  très  variés  ;  ceux  qui  ont  vécu  dans  le 
passé  géologique  le  sont  plus  encore.  Y  a-t-il  entre  tous 
ces  êtres,  vivants  ou  fossiles,  des  relations  organiques  qui 
démontrent  ou  seulement  fassent  pressentir  une  descen- 
dance, et,  s'il  en  est  réellement  ainsi,  quels  caractères  ces 
relations  ont-elles  revêtus  et  quelle  signification  annon- 
cent-ils? 

Or  c'est  précisément  l'étude  de  cette  grande  inconnue 


(  608  ) 

qui  a  donné  naissance  à  la  notion  de  l'évolution,  en 
faisant  démêler  son  double  facteur  :  la  filiation  et  l'adap- 
tation de  l'être.  Devenue  d'une  application  générale  pour 
toute  variation  qui  se  produit  en  quelque  sorte  automati- 
quement, la  donnée  évolutive  exprime  nettement  l'orien- 
tation actuelle  de  la  science,  dès  que  le  temps  entre  en 
considération. 

En  d'autres  termes,  la  recherche  des  rapports  de  des- 
cendance est  la  matière  delà  vaste  enquête  dont  les  espèces 
organisées  sont  l'objet.  Que  nous  a-t-elle  positivement 
révélé?  D'une  part,  conservation  des  mêmes  plans  d'orga- 
nisation dans  le  règne  animal  comme  dans  le  règne  végé- 
tal, pour  le  temps  comme  pour  l'espace;  d'où  il  résulte 
l'indication  de  la  possibilité  d'une  filiation  directe  reliant 
respectivement  les  animaux  et  les  végétaux.  D'autre  part, 
variations  d'organisation  souvent  fort  étendues,  qui  main- 
tiennent néanmoins  ces  attaches  respectives  plus  ou  moins 
voisines  ou  plus  ou  moins  lointaines,  suivant  que  les  épo- 
ques géologiques  sont  plus  ou  moins  rapprochées  ou  plus 
ou  moins  distantes,  comme  s'il  y  avait  ramification  pro- 
gressive des  types  animés  pour  aboutir  à  l'état  présent. 

C'est  ce  qu'énonce  avec  une  netteté  parfaite  l'écrivain 
le  plus  récent  sur  ce  sujet  grandiose,  lorsqu'il  dit  :  «  Il 
»  faut  reconnaître  que  le  monde  fossile  n'est  pas  distinct 
))  du  monde  actuel  ;  il  n'y  a  qu'un  monde  unique  qui  s'est 
»  continué  depuis  les  plus  anciens  âges  jusqu'à  nos 
))  jours.  » 

Ainsi  exprimée,  la  donnée  est  incontestable.  Elle 
reflète,  sans  qu'il  y  ait  une  objection  à  y  faire,  ce  que 
nous  pouvons  discerner  aujourd'hui  dans  le  passé  de  la 
vie  et  définit  la  direction  des  recherches.  Elle  nous  dit 
clairement  que  c'est  à  connaître  les  enchaînements  des 


(  609  ) 

êtres  par  voie  de  descendance  que  doivent  tendre  nos 
efforts. 

L'indication  de  ces  rapports  mutuels  d'organisation 
est  l'objet  même  des  classifications.  Aussi,  dès  qu'on 
eut  une  notion  précise  de  la  succession  des  temps  et  des 
modifications  simultanées  qu'ils  ont  produites  dans  les 
manifestations  de  la  vie,  on  essaya  de  substituer  des 
classifications  généalogiques  aux  simples  classifications 
séparant  ou  groupant  les  êtres  d'après  leurs  seules 
alFinités  organiques. 

Par  d'ingénieuses  figures,  à  l'instar  de  ce  que  font  les 
généalogistes  pour  les  familles,  on  a  cherché  à  retracer  la 
lignée  des  êtres.  Mais  il  importe  de  ne  pas  leur  donner 
une  portée  qu'elles  n'ont  pas  et  ne  peuvent  avoir  encore. 
Elles  expriment  des  réalités  formelles  :  les  relations 
organiques  combinées  avec  la  distribution  dans  le  passé, 
et  l'on  y  joint  d'une  manière  saisissante,  sous  la  forme 
d'un  arbre  généalogique,  une  vue  de  théorie,  l'orien- 
tation synthétique  coordonnant  ces  notions  positives,  — 
en  d'autres  termes,  l'interprétation  rationnelle  qu'on  est 
porté  à  donner  à  ces  faits  connexes.  Car  la  généalogie 
des  êtres  n'est  encore  que  pressentie,  et,  je  ne  suis  pas 
le  seul  à  le  faire  remarquer,  nous  devons  reconnaître 
que  nos  efforts  n'ont  pu  aller  au  delà. 

Ainsi  que  nous  l'exposerons  bientôt  avec  plus  de 
détails,  il  ne  nous  a  pas  encore  été  donné  de  voir,  en  les 
suivant  à  travers  les  terrains,  les  espèces  se  transformer, 
passer  des  unes  aux  autres  et  constituer  la  véritable  trame 
de  l'action  évolutive.  Dans  aucun  cas,  on  n'a  pu  restaurer 
une  généalogie  à  l'état  de  fait  définitivement  acquis. 
Même,  pour  ne  rappeler  que  la  plus  célèbre,  la  lignée 

S""^    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  41 


(  610  ) 

des  Équidés,  qui  parut  pendant  plusieurs  années  établie 
sur  des  bases  certaines,  a  vu  surgir  récemment,  surtout 
pour  les  types  du  tertiaire  ancien,  des  doutes  et  même 
des  dénégations  parmi  des  autorités  de  la  science.  Les 
données  si  curieuses  de  l'embryologie  ont  aussi  soulevé 
naguère  des  méfiances  sur  la  portée  décisive  qu'on  avait 
cru  pouvoir  d'abord  leur  attribuer  en  faveur  de  la  théorie 
généalogique. 

Est-ce  à  dire  que,  devant  notre  impuissance  actuelle, 
il  faille  renoncer  à  la  doctrine  de  la  descendance  comme 
à  un  beau  rêve  évanoui?  Loin  de  là.  Ce  serait  une 
manière  de  voir  aussi  fâcheuse  qu'erronée  et  l'on  tombe- 
rait dans  un  extrême  bien  plus  malencontreux  encore.  Il 
n'est  au  contraire  nullement  établi  que  la  science  ait  fait 
fausse  route.  Ce  que  nous  avons  à  retenir  de  l'état  des 
choses,  c'est  que  cette  doctrine  est  une  théorie  de  direc- 
tion, que  les  relations  des  êtres  dans  le  temps  doivent 
manifestement  être  recherchées  dans  ce  sens,  parce 
qu'elle  a  pour  elle  toutes  les  vraisemblances,  que  seule 
elle  rend  sérieusement  compte  des  faits  recueillis  depuis 
la  naissance  de  l'histoire  naturelle,  qu'en  même  temps 
qu'on  ne  peut  lui  opposer  rien  de  sérieux  et  qu'elle 
ouvre  une  voie  à  la  fois  féconde  et  rationnelle,  elle  porte 
en  elle  tous  les  caractères  de  ces  vues  souvent  appelées 
des  vérités  logiques,  source  ordinaire  des  plus  fortes 
convictions. 

J'ai  quelquefois  cherché  si  l'on  ne  pourrait  trouver, 
dans  l'histoire  de  la  science,  des  exemples  de  situations 
analogues  à  celle  où  se  présente  en  ce  moment  la  théorie 
de  l'évolution,  et  il  m'a  paru  que  l'histoire  de  la  décou- 
verte de  la  rotation  de  la  terre  fournissait  un  parallèle 


(  6ii  ) 
s'adaptant  bien  à  notre  cas.  Copernic,  reprenant  la 
donnée  de  certains  astronomes  de  l'antiquité,  la  rendit 
plus  probable  que  l'hypothèse  contraire,  la  seule  qui  pût 
lui  être  opposée,  celle  de  la  terre  immobile,  centre  du 
monde.  Pendant  trois  siècles,  les  convictions  ne  firent 
que  croître  avec  les  probabilités  de  plus  en  plus  grandes, 
mais  ce  n'étaient  encore  que  des  convictions  et  des  pro- 
babilités, une  théorie,  la  seule  admissible  assurément. 
Pour  qu'elle  passât  à  l'état  de  vérité  scientifiquement 
démontrée,  sur  laquelle  il  n'y  eût  plus  à  revenir,  il  a 
fallu  que  d'admirables  expériences  nous  fissent  voir  ht 
terre  en  mouvement. 

C'est  dans  l'un  de  ces  stades  transitoires  d'élaboration 
que  se  trouve  la  question  de  la  descendance.  La  convic- 
tion est  unanime  :  elle  exprime  une  loi  existante,  elle  doit 
répondre  à  des  réalités  formelles;  la  seule  hypothèse 
qu'on  puisse  lui  opposer,  celle  des  «  créations  succes- 
sives »,  ne  pourrait  plus  être  soutenue  ni  scientifiquement 
ni  logiquement.  Mais,  jusqu'ici,  elle  n'a  pu  franchir  les 
limites  de  la  théorie;  elle  attend  encore  sa  démonstration. 

Lorsqu'une  question  se  trouve  dans  cet  état,  l'insuccès 
des  recherches  peut  venir  à  la  fois  de  la  complexité  des 
éléments  en  jeu  et  de  l'insuffisance  des  documents.  Nous 
rencontrons  ici  ces  deux  conditions.  Le  thème  est  fort 
complexe,  car  il  doit  être  abordé  par  beaucoup  de  voies 
différentes,  toutes  appelées  à  fournir  d'indispensables 
contingents.  Quant  à  l'insufTisance  des  données  acquises, 
la  suite  de  cet  aperçu  montrera  une  fois  de  plus  combien 
elle  est  encore  considérable. 


(  012  ) 

II. 

Je  dois  maintenant  exposer  les  résultats  de  mes  études 
et  de  mes  recherches  sur  le  problème  en  tentant  de 
l'aborder  par  les  côtés  qui  m'ont  été  accessibles.  Je  pré- 
senterai d'abord  quelques  réflexions  sur  les  plans  fonda- 
mentaux de  constitution  des  êtres;  puis,  des  observa- 
tions sur  le  développement  stratigraphique  de  la  vie  et 
la  solution  qu'elles  semblent  faire  prévoir;  enfin,  un 
examen  sommaire  des  transformations  du  globe  sous  la 
main  de  l'homme. 

Il  est  constaté  depuis  longtemps  que  les  êtres  inorga- 
nisés, les  minéraux,  sont  partout  soumis  aux  mômes  lois, 
tant  chimiques  que  cristallographiques.  On  ne  connaît 
pas  d'espèce  minérale  dont  la  composition  n'obéisse  aux 
lois  des  combinaisons  découvertes  dans  nos  laboratoires 
et  dont  les  cristallisations  ne  soient  assujetties  aux  lois  de 
symétrie  de  l'un  des  systèmes  dans  lesquels  on  a  rangé 
les  cristaux.  S'il  en  est  ainsi  pour  le  globe  terrestre,  nous 
devons  remarquer  que  le  fait  se  retrouve  pour  les  météo- 
rites, ces  fragments  de  matière  cosmique  qui  accèdent 
jusqu'à  nous,  de  sorte  que  le  principe  peut  dépasser  en 
généralisation,  par  des  données  immédiates,  la  sphère  où 
nous  nous  mouvons. 

Mais  ce  phénomène,  observé  dans  l'espace,  s'applique 
tout  aussi  nettement  au  temps.  Que  nous  considérions 
les  minéraux  des  roches  les  plus  anciennes,  des  divers 
schistes  cristallins  notamment,  que  nous  les  prenions  dans 
la  suite  des  terrains  qui,  au  cours  du  passé,  ont  aidé  à 
façonner  la  croûte  terrestre,  terrains  éruplifs  ou  terrains 
de  seconde  formation,  sédimentaires  et  autres,  modifiés 


(  615  ) 

ou  non  par  des  actions  métamorphiques,  toujours  ils 
présentent  le  même  phénomène  :  ils  sont  constitués 
d'après  les  mêmes  lois  chimiques  et  cristallographiques. 
C'est  le  plan  fondamental  et  unique  de  l'être  inorganisé. 

Et  qu'observons-nous  à  l'égard  de  la  matière  placée 
sous  l'action  de  la  vie  ou  que  la  vie  a  jadis  animée?  Nous 
voyons  les  êtres  s'y  grouper  en  deux  grandes  catégories 
qu'on  a  appelées  le  règne  animal  et  le  règne  végétal,  et 
qui  répondent  à  deux  grandes  fonctions  opposées  dans  la 
nature.  Peu  importe  que,  dans  leurs  êtres  inférieurs,  ils 
présentent  parfois  des  contacts  ne  permettant  pas  de  les 
répartir  sûrement  et  de  décider  s'ils  sont  plutôt  animaux 
que  végétaux.  Ce  défaut  de  ligne  de  démarcation  précise 
ne  peut  guère  nous  étonner,  puisque  le  même  élément, 
la  cellule,  est  à  la  base  du  règne  végétal  aussi  bien  que 
du  règne  animal.  Peut-être  pourrait-il  faire  naître  la 
supposition  qu'il  y  a  unité  au  point  de  départ  de  l'être 
organisé  et  que  les  deux  règnes  représentent  seulement 
des  différenciations  bifurquées.  Mais  la  donnée  prépon- 
dérante qui  est  devant  nous,  est  d'abord  qu'on  n'a  pas 
reconnu  sur  le  globe  d'être  vivant  qui  ne  soit  susceptible 
de  prendre  place  dans  un  de  ces  deux  règnes;  ensuite, 
que  cette  constatation  sur  l'espace  se  reproduit  aussi  pour 
les  êtres  qui  ont  passé  par  la  vie  à  travers  le  temps.  Pas 
plus  dans  le  temps  que  dans  l'espace,  il  ne  se  manifeste 
de  traces  d'un  troisième  règne  organique. 

Les  êtres  animés  sont  végétaux  ou  animaux  ;  ils  sont, 
dans  leur  immense  majorité,  constitués  sur  l'un  de  ces 
deux  plans  d'organisation  et  jamais  .sur  un  autre.  En 
dehors  de  quelques  organismes  unicellulaires  dont  le 
classement  reste  douteux  d'une  manière  provisoire  ou 
définitive,  tout  être  du  globe  qui  est  ou  qui  a  été  doué 


(  614  ) 
de  vie,  ressortit  de  l'une  ou  de  l'autre  de  ces  deux  consti- 
tutions, toujours  avec  les  mêmes  lois  anatomiques  et, 
par  voie  de  conséquence,  avec  les  mêmes  lois  physiolo- 
giques. 

Ainsi,  dans  le  monde  minéral,  une  forme  fondamentale 
unique;  dans  le  monde  animé,  deux  moules  juxtaposés, 
peut-être  unis  à  leurs  contins.  De  sorte  que  l'être,  dans 
l'acception  qu'il  prend  en  histoire  naturelle,  qu'il  soit 
organisé  ou  inorganisé,  ne  se  montre  et  ne  s'est  jamais 
montré  propre  à  se  constituer  que  sous  trois  modes 
essentiels  :  minéral,  végétal  ou  animal.  Partout  et  tou- 
jours, sans  jamais  y  déroger  dans  la  limite  où  l'observa- 
tion a  pu  s'étendre,  ces  mêmes  manifestations,  produits 
des  mêmes  lois,  se  représentent  et  se  sont  représentées 
sans  divergences.  Voilà  ce  que  nous  enseignent  les 
recherches  de  la  science  à  l'égard  des  êtres  :  trois  plans 
de  constitution,  pas  un  de  plus! 

Je  ne  serai  pas  assez  téméraire  pour  tenter  de  démêler 
le  pourquoi  de  cette  étonnante  limitation  de  nombre. 
Mais  il  me  paraît  qu'elle  provoque  du  premier  mot  une 
double  réflexion.  D'abord,  on  peut  y  voir  une  nouvelle 
indication  de  la  fixité  des  lois  de  la  nature,  et,  sur  un 
thème  aussi  considérable,  on  ne  saurait  accumuler  trop 
de  données.  Puis,  dans  la  constatation  que  les  êtres  orga- 
nisés, aussi  loin  que  nous  retrouvions  les  traces  de  la 
vie,  n'ont  fourni  que  les  deux  mêmes  plans  fondamen- 
taux, on  peut  trouver  un  argument,  sinon  nouveau,  au 
moins  renforcé,  en  faveur  de  la  théorie  de  la  descendance, 
car,  cette  même  double  base  d'organisation  ayant  toujours 
servi  à  la  formation  de  l'animal  ou  du  végétal,  on  est 
amené  à  concevoir  d'autant  plus  facilement  des  liens 
directs  de  filiation  dans  les  représentants  de  ces  deux 
groupes  d'êtres. 


(  615  ) 

Mais  nous  devons  quitter  ce  champ  de  considérations 
générales  et  aborder  plus  directement  quelques  côtés 
précis  du  problème  de  l'évolution. 

L'examen,  soit  dans  des  collections  (1),  soit  dans  des 
traités (2),  de  vastes  assemblements  de  fossiles,  classés  sui- 
vant leur  ancienneté  et  provenant  des  diverses  régions  du 
globe,  conduit,  ainsi  que  nous  nous  le  sommes  rappelés, 
à  la  conclusion  que  le  développement  géologique  de  la 
vie  a  pour  mécanisme  fondamental  le  phénomène  de  la 
descendance.  Et  cependant,  ainsi  que  nous  nous  le 
sommes  également  rappelés,  les  passages  des  types  spéci- 
fiques les  uns  aux  autres  qui  en  seraient  la  conséquence 
nécessaire,  se  dérobent  de  plus  en  plus  à  nos  recherches 
straligraphiques  immédiates. 

On  doit  dès  lors  se  demander  si  ces  observations  con- 
tradictoires n'expriment  pas  l'intervention  de  quelque 
phénomène  perturbateur,  enveloppant  le  problème  de 
complications  et  écartant  de  nous  la  constatation  pure  et 
simple  des  transformations. 

C'était  manifestement  à  l'étude  des  terrains  de  se  pro- 
noncer. Il  s'agissait  de  suivre  la  marche  de  la  vie  dans 
un  ensemble  de  couches  d'une  même  région,  assez  épais 
pour  que   les  faunes  y  eussent   plusieurs   fois  changé 


(1)  M.  Albert  Gaudry,  dont  je  reproduisais  plus  haut  la  définition 
des  constatations  de  la  science  sur  le  développement  géologique  de  la 
vie,  a  établi,  il  y  a  quelques  mois,  au  Muséum  de  Paris,  une  galerie 
de  paléontologie  générale  qui  est  en  quelque  sorte  le  document  sur 
pièces  de  l'évolution  du  règne  animal. 

(2)  J'ai  ici  particulièrement  en  vue  l'ouvrage  du  professeur  von 
Zittel,  qui  est  l'expression  la  plus  complète  des  connaissances 
paléontologiques  que  nous  possédions.  Il  a  été  traduit  en  français  par 
M.  Charles  Barrois. 


(  616) 
d'espèces  ;  il  fallait  que  cet  amas  de  couches  témoignât 
d'une  uniformité  telle  que  les  conditions  des  dépôts  suc- 
cessifs eussent  peu  varié,  ou  bien,  si  elles  avaient  varié, 
qu'on  pût  préciser  la  nature  des  variations.  Puis,  ces 
assurances  prises,  il  fallait  patiemment  et  minutieuse- 
ment reconnaître  et  fouiller,  à  tous  les  niveaux  de  cet 
ensemble,  de  nombreux  gîtes  de  fossiles,  afin  de  se  mettre 
en  mesure  de  déterminer  suivant  quelles  règles  les  muta- 
tions d'espèces  s'y  sont  produites. 

Une  grande  partie  de  nos  terrains  primaires,  sur  un 
énorme  amas  de  5,000  à  6,000  mètres  de  couches,  se 
prête  merveilleusement  à  celte  recherche  (1). 

Voici  d'abord  la  grande  série  marine  terminant  le 
devonien  inférieur  et  généralement  appelée  coblenzienne. 
Les  évaluations  s'accordent  pour  lui  attribuer  à  elle  seule, 
sur  la  bordure  septentrionale  de  l'Ardenne,  l'étonnante 
épaisseur  de  près  de  5  kilomètres.  C'est  une  suite  répétée 
de  dépôts  de  schistes  et  de  grès  d'apport  manifestement 
continental,  où  aucun  indice  ne  fait  présumer  des  inter- 
ruptions sédimentaires.  Tout  s'y  annonce  comme  une 
suite  continue,  formée  le  long  d'une  côte  dans  des  con- 
ditions absolument  uniformes,  sauf  qu'à  certains  niveaux 
prédomine  le  grès  et  à  certains  autres  le  schiste.  Nulle 
part  ne  se  dénoncent  par  des  discordances  de  stratifica- 
tion de  forts  mouvements  du  sol,  ni  entre  les  couches 
des  dénudations  produites  par  d'autres  conditions  de  la 
côte,  ni  de  véritables  conglomérats  indiquant  d'impor- 
tantes variations  dans  l'apport  des  sédiments,  ni  des 


(i)  L'exposé  qui  va  suivre,  résume  les  résultats  d'une  élaboration 
quasi  séculaire  commencée  en  i801  par  d'Oraalius  d'Halloy  et 
continuée  par  André  Dumont,  par  M.  Jules  Gosselet  et  par  moi-même. 


(  617) 
roches  de  calcaire  marquant  des  changements  dans  le 
régime  marin.  Les  couches  fossilifères,  même  abondam- 
ment fossilifères,  ne  manquent  pas  et  les  fossiles  y  sont 
généralement  bien  conservés. 

Or,  on  relève,  dans  la  verticale  de  cet  énorme  amas 
stratiûé,  les  faits  paléontologiques  suivants  : 

Apparaissant  ou  disparaissant,  tantôt  à  un  niveau,  tan- 
tôt à  un  autre,  avec  un  développement  numérique  varié, 
généralement  par  groupes,  parfois  isolément,  les  espèces 
ont  eu  des  durées  diverses.  Les  unes  caractérisent  de 
faibles  parties  de  l'ensemble,  d'autres  s'étendent  dans  une 
longue  suite  de  dépôts,  d'autres  traversent  tout  l'amas. 
Le  phénomène  se  produit  en  quelque  sorte  par  échelon- 
nement. Mais  ces  espèces  apparaissent  et  disparaissent 
sans  que  rien  ne  dénote  sur  place  de  quels  ancêtres 
elles  viennent,  ni  quels  descendants  elles  ont  laissés. 
Au  cours  de  leur  durée,  elles  ont  conservé  leurs  carac- 
tères propres  et  n'ont  pas  subi  de  transformations  qui 
permettent  d'établir  à  aucun  degré  le  passage  de  l'une 
dans  l'autre. 

Les  terrains  qui  surmontent  ce  Coblenzien  nous  pré- 
sentent le  phénomène  sous  un  aspect  quelque  peu  diffé- 
rent. C'est  qu'aussi  la  composition  des  dépôts  y  subit  de 
grands  changements.  Les  dépôts  de  grès  et  de  schistes  s'y 
montrent  encore,  mais  la  prépondérance  appartient  aux 
amas  de  calcaire.  Trois  grands  étages  devoniens  succes- 
sifs en  renferment  de  fortes  masses  dont  l'une,  à  elle 
seule,  toute  d'une  venue,  a  une  puissance  de  700  mètres; 
le  Calcaire  carbonifère  ou  Dinantien,^  ainsi  que  l'appellent 
plusieurs  autorités  de  la  science,  est  presque  intégrale- 
ment calcareux,  et  l'un  de  ses  termes  stratigraphiques 


(  618  ) 
réalise,   égalemenl  à   lui   seul,   une  épaisseur  presque 
égale  à  celle  qui  vient  d'être  mentionnée. 

Ces  roches  de  calcaire  dont  les  éléments,  au  lieu  d'être 
des  apports  continentaux,  ont  été  sécrétés  par  des  orga- 
nismes, caractérisent  des  états  très  particuliers  du  milieu 
marin;  elles  sont  coralliennes,  crinoïdiques,  foraminifé- 
riennes  ou  détritiques.  Parmi  les  calcaires  coralliens,  les 
uns  sont  en  couches  sédimentées  à  l'égal  des  dépôts  argi- 
leux ou  quartzeux;  les  autres  sont  de  véritables  récifs 
coralligènes,  construits  comme  de  nos  jours  en  amas 
insulaires  et  ayant  réclamé  pour  se  former  des  conditions 
strictement  limitées  de  limpidité,  de  profondeur  et  de 
température  des  eaux. 

Ainsi,  d'une  part,  de  grandes  variations  de  milieu  se 
sont  produites  dans  la  même  mer  pendant  la  seconde 
période  devonienne  et  pendant  la  période  dinanlienne. 
D'autre  part,  bien  plus  encore  que  les  masses,  d'épais- 
seur kilométrique,  des  sédiments  vaseux  et  sableux 
coblenziens,  l'accumulation  des  restes  organiques,  consti- 
tuant ces  puissantes  masses  calcareuses  successives,  nous 
fait  préjuger  le  temps  énorme  qu'ont  embrassé  ces 
périodes.  Le  champ  d'observation,  en  lui-même  el  par 
ses  contrastes  avec  celui  qui  l'a  précédé,  est  ici  encore 
bien  favorable  à  l'étude  de  la  marche  de  l'action  vitale. 

En  premier  lieu,  nous  remarquons  des  moditications 
plus  répétées  et  plus  marquées  dans  les  faunes,  de  plus 
fréquentes  coïncidences  dans  le  phénomène  d'apparition 
et  de  disparition  simultanées  des  espèces.  C'est  au  point 
qu'à  plusieurs  reprises  leur  ensemble  subit  presque  un 
renouvellement. 

En  second  lieu,  nous  n'y  constatons  néanmoins  pas 
davantage  la  transformation  des  espèces  les  unes  dans  les 


(  619  ) 
autres,  ce  passage  graduel  qui  témoignerait  leur  tiliatioii 
directe.  De  nouveau,  l'espèce,  aux  caractères  nets  et  aux 
représentants  souvent  innombrables,  se  présente  comme 
si  elle  était  née  et  morte  sur  place,  sans  ancêtres  et  sans 
descendants. 

Des  apparitions  brusques  pour  des  durées  fort  iné- 
gales ;  des  disparitions  plus  ou  moins  anticipées,  mais 
non  moins  brusques,  les  unes  et  les  autres  d'ordinaire  en 
coïncidence;  quelques  traversées  d'énormes  épaisseurs, 
survivant  à  quantité  d'existences  plus  éphémères  :  telle 
l'exploration  détaillée  nous  montre  la  marche  de  la  vie 
au  cours  des  espaces  de  temps  incommensurables  que 
peuvent  offrir  à  l'esprit,  pénétré  de  la  doctrine  des  Causes 
actuelles,  ces  colossales  accumulations  de  terrains  de 
toute  origine.  Les  apparitions,  comme  les  disparitions, 
sont  brutales  ;  ni  le  temps  ni  le  milieu  ne  nous  montrent, 
même  par  un  seul  exemple  direct,  le  moule  organique  en 
voie  de  transformation  continue. 

J'ai  fait  appel  aux  lumières  des  géologues  qui  se  sont 
consacrés  à  l'étude  de  nos  autres  terrains  d'origine  marine 
et  leur  ai  demandé  si  les  faits  qu'ils  y  ont  observés  ne 
tendent  pas  aux  mêmes  résultats  paléonlologiques.  Ils 
m'ont  répondu  que  c'est  effectivement  sous  cet  aspect 
que  le  phénomène  s'est  présenté  à  leurs  yeux. 

N'est-ce  pas,  du  reste,  aussi  ce  qu'ont  fait  constater 
tous  les  terrains  oîi  des  recherches  détaillées  ont  eu  lieu 
sur  une  échelle  suffisante?  La  même  donnée  ne  se  repro- 
duit-elle pas  également  pour  les  genres  et  les  autres 
groupes  taxonomiques  des  deux  règnes?  De  fait,  ce  sont 
des  notions  depuis  longtemps  connues.  La  paléontologie 
stratigraphique  les  répète  à  satiété. 

J'v  insiste  néanmoins  ici,  je  les  rappelle  et  je  les  con- 


(  t)20  ) 

firme  par  quarante  années  de  recherches,  parce  que,  bien 
qu'elles  soient  l'un  des  traits  saillants  du  développement 
vital  dans  le  passé,  la  doctrine  de  la  descendance  ne  me 
parait  pas  les  avoir  encore  mises  en  œuvre,  parce  que,  par 
leur  constance,  elles  expriment  comment  s'est  opérée  la 
distribution  des  êtres  dans  les  terrains  de  chaque  région, 
parce  que,  enfin,  si  la  donnée  généalogique  est  réelle,  elles 
pourraient  faire  toucher  du  doigt  la  cause  même  qui  a 
voilé  l'action  du  phénomène  transformiste. 

Donc,  dans  les  recherches  stratigraphiques  d'une 
région,  la  succession  en  ligne  directe,  —  peut-on  juste- 
ment dire,  —  nous  échappe  complètement.  Une  conclu- 
sion aussi  fortement  établie  est  naturellement  appelée  à 
servir  de  point  de  départ  pour  une  nouvelle  poursuite  de 
la  question.  D'autres  données,  d'apparences  plus  secon- 
daires, ne  seraient-elles  pas  connexes  à  celle-là  et  de 
nature,  par  leurs  combinaisons  mutuelles,  à  nous  laisser 
entrevoir  par  quels  modes  enchevêtrés  les  actes  de 
descendance  ont  pu  géologiquement  se  propager?  En 
d'autres  termes,  quel  sens  serait-il  possible  en  ce  moment 
d'attribuer,  au  point  de  vue  généalogique,  à  l'absence  de 
passage  entre  les  espèces? 

Poursuivant  nos  remarques  sur  les  faits  biologiques 
que  nous  pouvons  relever  dans  cet  ordre  d'idées,  nous 
retenons  deux  groupes  d'observations  sur  lesquels  doit 
se  porter  notre  attention  la  plus  sérieuse. 

Les  espèces  ne  sont  pas  représentées  par  des  spécimens 
toujours  identiques.  Elles  offrent  l'union  de  caractères 
constants  et  de  caractères  variables.  Tantôt  les  premiers 
sont  prépondérants  et  alors  l'espèce  paraît  presque  stable, 
même  à  travers  de  fortes  épaisseurs  de  terrains  ;  tantôt 
les  caractères  variables  prennent  plus  d'importance;  en 


(  624  ^ 
se  fixant,  ils  deviennent  héréditaires  et  donnent  lieu  à  des 
variétés,  à  des  races,  ou  bien,  affectant  plus  spécialement 
pêle-mêle  des  spécimens,  ils  ne  produisent  que  ce  qu'on 
nomme  des  variations. 

Tout  en  conservant  leur  type  spécifique  et,  par  consé- 
quent, leurs  caractères  d'ordre  principal,  les  espèces 
varient  donc  à  des  degrés  divers  et  peuvent  même  le  faire 
dans  des  limites  assez  étendues.  Mais  ces  modifications 
d'ordre  secondaire  ont  ordinairement  pour  caractéristique 
essentielle  de  présenter  les  passages  de  leurs  différencia- 
tions, c'est-à-dire  ce  qui  fait  précisément  défaut  d'espèce 
à  espèce  dans  les  gisements  de  la  même  région. 

Nous  constatons  ainsi  sur  place  un  premier  facteur 
auxiliaire  dans  la  vie  de  l'espèce  :  l'espèce  n'est  pas  une 
entité  absolument  immuable  ;  elle  se  modifie,  mais  ne  se 
transforme  pas;  —  elle  subit  un  commencement  de 
transformisme,  sans  qu'on  puisse  le  suivre  plus  avant. 

A  côté  se  montre  un  autre  facteur  beaucoup  plus  dis- 
simulé et  non  moins  important.  On  peut  reconnaître  çà 
et  là  que  des  espèces,  anéanties  en  une  place  en  coïnci- 
dence avec  des  changements  dans  la  nature  du  sédiment 
et,  par  conséquent,  dans  les  conditions  du  milieu,  réappa- 
raissent pour  quelque  temps  dans  un  dépôt  supérieur 
analogue  à  celui  de  leur  première  époque  d'existence. 
Cette  observation  fait  penser  à  un  déplacement  latéral 
de  ces  espèces  et  introduit  dans  la  question  la  donnée 
probablement  décisive  des  migrations. 

En  effet,  que  des  groupes  d'êtres,  espèces,  genres, 
familles,  ordres,  se  soient  éteints  au  cours  des  temps, 
faute  de  continuer  à  rencontrer  dans  les  circonstances  de 
toutes  sortes  qui  les  entouraient  leurs  conditions  vitales, 
c'est  un  fait  non  contesté  et  non  contestable.  Mais  il  est 


(  622  ) 
non  moins  certain  —  et  nous  allons  en  rappeler  des 
exemples  précis  —  que  la  même  action  de  milieu  n'a 
pas  toujours  amené  des  extinctions  totales,  mais  seule- 
ment des  extinctions  locales  ou  régionales.  Il  est  non 
moins  certain  encore  —  et  nous  en  rappellerons  aussi 
des  exemples  probants  —  que  des  espèces  ont  étendu 
leurs  lieux  de  séjour  et  qu'elles  ont  même  changé  de 
patrie. 

La  marche  de  la  vie  à  travers  les  terrains  d'une  région, 
se  manifestant  essentiellement  par  l'apparition  et  la  dis- 
parition répétées  et  brusques  des  espèces,  pourrait  dès 
lors  recevoir  une  explication  fort  satisfaisante  par  l'inter- 
vention de  changements  géographiques,  de  déplacements 
dans  l'espace.  Ainsi  l'apparition  d'une  forme  spécilique 
prendrait  la  signification  d'une  arrivée,  d'une  immigra- 
tion, sa  disparition  souvent  celle  d'un  départ  ou,  pour 
mieux  dire,  souvent  d'une  extinction  locale. 

Arrivés  à  ce  point,  peut-être  verrions-nous  s'entr'ouvrir 
la  voie  où  il  y  a  lieu  d'orienter  le  problème  de  la  des- 
cendance. 

Puisque  les  espèces  sont  susceptibles  de  changer  de 
patrie  et  qu'elles  ne  se  montrent  pas  moins  sujettes  sur 
place  à  des  variations  plus  ou  moins  rapides,  ne  serait-il 
pas  rationnel  de  se  demander  si,  continuant  à  varier, 
suivant  leur  plan  d'organisation,  au  cours  de  ces  muta- 
tions d'habitats  et  de  milieux,  elles  ne  verraient  pas  leurs 
caractères,  maintenus  constants  dans  leur  patrie  précé- 
dente, devenir  eux-mêmes  variables  dans  leurs  nouvelles 
patries?  Si  bien  que,  de  variations  en  variations  et  de 
déplacements  en  déplacements,  les  espèces  arriveraient 
aux  transformations  étendues  que  prévoit  la  doctrine  de 
l'évolution  :  une  espèce  ayant  abandonné  son  premier 


(  625  ) 
séjour  pour  y  revenir  plus  tard  complètement  différenciée 
et  à  l'état  d'espèce  distincte,  ou  de  forme  spécifique  qui 
ne  conserverait  plus  avec  son  ancêtre  que  des  affinités  de 
genre,  ou  de  genre  devenu  une  nouvelle  famille,  et  ainsi 
de  suite.  Ce  serait,  en  un  mot,  la  continuation  non  limitée 
de  la  faculté  ancestrale. 

Certes  ces  combinaisons,  pouvant  se  diversifier  à  l'in- 
fini dans  la  longueur  des  temps,  produiraient  l'aspect  de 
notre  monde  fossile  avec  ses  éléments  fondamentaux  : 
filiation  directe,  différenciations  successives  se  dirigeant 
vers  le  monde  actuel,  mais  non  saisissables  de  proche  en 
proche. 

Dans  cet  ordre  d'idées,  les  rapports  généalogiques  se 
dissimuleraient  donc  au  stratigraphe  par  des  mutations 
géographiques;  l'évolution  spécifique  se  refuserait  à  l'ob- 
servation directe  dans  l'exploration  méthodique  d'un 
bassin,  parce  qu'elle  se  serait  poursuivie  dans  des  régions 
différentes,  multiples,  probablement  distantes,  où  on 
n'aurait  pu  encore  suivre  pas  à  pas  la  filiation. 

Tel  est  le  mode  de  solution  que  je  crois  pouvoir  pro- 
poser pour  le  problème. 

C'est  assez  dire  que,  s'il  répondait  à  une  réalité,  l'il- 
lustre auteur  de  V Origine  des  espèces  faisait  un  bien 
légitime  appel,  il  y  a  quarante  ans,  à  l'insuffisance  des 
matériaux  au  sujet  de  l'objection  du  manque  de  passages 
entre  espèces.  Cet  appel  serait  encore  aussi  légitime 
aujourd'hui, car,  devant  un  tel  ensemble  de  complications, 
le  problème  réclamerait  de  nouvelles  séries  de  recherches, 
si  vastes,  que  nous  ne  saurions  assurément  en  attendre  la 
solution  de  notre  époque. 

Jugeons-en  du  reste  en  abordant  un  autre  champ  d'en- 
quête. 


(  624  ) 

Voici  cette  fois  des  mammifères  terrestres  récents  :  il 
s'agit  de  notre  faune  quaternaire.  Elle  comprend  des 
représentants  de  beaucoup  d'ordres  de  leur  classe  et,  dans 
nos  régions  à  cavernes,  elle  se  manifeste  durant  trois 
époques  géologiques  se  faisant  suite  sans  interruption. 
D'abord  parait  la  faune  du  Mammouth  dont  nous  ne  con- 
naissons pas  les  précurseurs  immédiats,  puis  viennent 
successivement  la  faune  du  Renne  et  la  faune  de  l'Urus. 

Nous  pouvions  nous  attendre  à  reconnaître,  dans  cette 
gradation  chronologique,  des  faits  d'apparition  et  de  dis- 
parition, comme  dans  les  séries  marines  précédentes.  On 
y  constate,  en  effet,  de  nombreuses  et  fort  intéressantes 
disparitions  successives,  mais  la  série  des  apparitions 
manque. 

La  faune  du  Mammouth  renferme,  outre  ses  espèces 
propres,  les  espèces  des  deux  faunes  suivantes.  Pour  deve- 
nir la  faune  du  Renne,  elle  a  donc  subi  des  extinctions 
seulement.  Mais  celles-ci  sont  de  deux  sortes  :  extinctions 
totales  du  Mammouth,  du  Rhinocéros  tichorhin  et  de 
quelques  autres,  et  extinctions  régionales  de  l'Hyène  du 
Cap  et  du  Lion. 

Ces  deux  espèces,  aujourd'hui  africaines,  soulèvent  une 
première  remarque.  Les  spécimens  de  nos  cavernes  sont 
d'une  époque  relativement  reculée  :  diffèrent-ils  des  sur- 
vivants de  l'autre  continent?  Leur  ostéologie  ne  marque 
d'autre  différence  qu'une  taille  généralement  plus  grande 
dans  les  cavernes.  Le  temps,  la  distance  et  les  milieux  si 
contrastants  n'ont  pas  agi  autrement  sur  elles;  il  n'y  a 
pas  apparence  de  transformisme.  Ce  sont  assurément  les 
mêmes  espèces. 

Une  autre  constatation  de  même  ordre  se  présente 
ensuite.  Parmi  les  autres  types  spécifiques  des  mêmes 


(  625  ) 

lieux,  ayant  vécu  avec  ces  espèces  pendant  l'âge  du  Mam- 
mouth et  leur  ayant  survécu  pendant  l'âge  du  Renne, 
figurent  les  animaux  de  notre  extrême  nord  et  plusieurs 
espèces  actuellement  caractéristi(jues  notamment  de  l'Eu- 
rope orientale.  Les  uns  et  les  autres  disparaissent  à  leur 
tour  de  notre  région  avec  notre  seconde  époque.  Mais  il 
n'y  a  plus  d'espèces  éteintes  parmi  eux  ;  tous  ne  subissent 
que  des  extinctions  régionales.  Or,  malgré  leurs  ditlé- 
rences  chronologiques  et  géographiques,  la  comparaison 
de  leurs  restes  quaternaires  avec  leurs  représentants 
encore  vivants  ne  nous  annonce  pas  davantage  des  trans- 
formations anatomiques  :  noire  Renne  était  le  même  que 
le  Renne  actuel  de  Laponie;  notre  Bœuf  musqué  était  le 
Bœuf  musqué  des  présentes  régions  polaires  américaines; 
nos  Lemmings  se  rapportent  aux  deux  espèces  vivantes 
de  Lemmings.  Il  en  est  de  même  pour  les  espèces  des 
steppes  et,  en  général,  pour  toutes  les  espèces  ayant  alors 
quitté  nos  régions.  Pas  plus  que  le  Lion  et  l'Hyène,  dis- 
parus précédemment  de  l'Europe  occidentale  et  sauf  peut- 
être  encore  chez  quelques-unes  une  diminution  actuelle 
dans  la  taille,  ces  espèces  n'ont  varié,  —  pour  autant 
que  leur  étude  ostéologique  soit  jugée  suffisante  pour  en 
décider. 

La  même  règle  de  fixité  anatomique  se  reproduit,  du 
reste,  pour  les  quarante  à  quarante-cinq  espèces  de  l'âge 
du  Mammouth  qui  se  sont  perpétuées  jusqu'à  nous, 
qu'elles  aient  changé  ou  non  de  patrie.  Ce  serait  abusive- 
ment qu'on  voudrait  déclarer  y  reconnaître  de  véritables 
indices  de  transformisme. 

Mais,  a-t-on  objecté,  si  cette  faune  quaternaire,  dans 
ses  organismes  les  plus  sensibles,  semble-t-il,  aux  causes 
des  variations  morphologiques,  ne  montre  pas  d'indices 

S""*    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  42 


(  626  ) 
de  transformations  spécifiques,  c'est  que  le  temps  écoulé 
a  été  trop  court!  Certes,  pour  ces  dernières  époques 
géologiques,  l'intervention  des  durées  a  une  fort  sérieuse 
valeur,  et  on  peut  d'autant  moins  y  contredire  que  le 
même  phénomène  de  stabilité  s'applique  à  tous  les  repré- 
sentants du  règne  animal  et  du  règne  végétal  des  mêmes 
temps,  alors  qu'ils  ont  si  largement  varié  dans  les  temps 
antérieurs.  Cependant  le  nouveau  fait  de  la  fixité  des 
types  dont  nous  nous  occupons,  n'en  doit  pas  moins  nous 
frapper,  vu  les  différences  de  milieu  ambiant  aussi 
saillantes  que  nous  font  préjuger  à  la  fois  cet  assemblage 
étonnant  d'espèces  aujourd'hui  éteintes  ou  disjointes  et  les 
conditions  climatériques  dans  lesquelles  il  se  développa. 

Car,  en  premier  lieu,  nous  venons  de  voir  combien  le 
phénomène  des  migrations,  qu'on  peut  souvent  appeler 
avec  plus  de  justesse  celui  des  extinctions  régionales, 
est  le  principal  caractère  des  modifications  de  la  faune 
quaternaire.  Les  faits  de  ce  genre  y  sont  particulièrement 
précis  et  méritent  de  servir  de  base  à  l'étude  de  la  ques- 
tion, puisque  les  migrations  s'y  sont  produites  de  la 
manière  la  plus  caractérisée  et  la  mieux  définie  à  deux 
reprises  différentes  et  que,  les  espèces  qui  y  ont  été  sou- 
mises étant  encore  vivantes,  leur  habitat  actuel,  quelque 
éloigné  qu'il  soit  de  leur  habitat  ancien,  peut  être  reconnu 
avec  bien  plus  de  facilité  et  de  netteté  que  pour  les 
espèces  n'existant  plus. 

En  second  lieu,  ces  mutations  géographiques  sont 
susceptibles  d'être  mises  en  relation  avec  les  événements 
physiques  les  plus  suprenanls  de  la  fin  des  temps  géolo- 
giques, les  époques  glaciaires,  dont  le  déchiffrement  est 
sans  doute  notre  principale  œuvre  contemporaine  sur 
l'histoire  de  la  terre. 


(  627  ) 

A  la  période  iiiterglaciaire,  on  rapporte,  avec  des  faits 
sérieux  à  l'appui,  l'âge  du  Mammouth,  ce  qui  ne  concorde 
guère,  il  est  vrai,  avec  la  constatation,  indiscutable  cepen- 
dant, de  ce  qu'on  a  appelé  un  paradoxe  zoologique  :  la 
coexistence  sous  nos  latitudes  d'espèces  aujourd'hui  afri- 
caines et  d'espèces  aujourd'hui  exclusivement  polaires,  du 
Lion  vivant  notamment  en  compagnie  du  Renne. 

A  la  deuxième  époque  glaciaire  peut  correspondre 
notre  âge  du  Renne,  et  ceci  concorde  mieux  avec  la 
disparition  coïncidente  des  espèces  africaines  et  avec  le 
maintien,  souvent  accompagné  d'un  plus  grand  dévelop- 
pement numérique,  des  espèces  de  notre  extrême  nord. 

Chacun  enfin  admet  que  le  début  de  l'époque  actuelle, 
l'âge  de  l'Urus,  a  succédé  à  cette  deuxième  époque  gla- 
ciaire et  qu'il  a  spécialement  pour  caractéristique  la  dis- 
parition de  ces  espèces  des  latitudes  extrêmes. 

Par  les  changements  climalériques  que  dénoncent  de 
tels  phénomènes,  nous  pouvons  sans  peine  nous  rendre 
compte  des  causes  de  certaines  éliminations  successives 
désignées  sous  le  nom  de  migrations. 

Mais  il  nous  est  possible  de  faire  un  pas  de  plus.  La 
relégation  au  midi  du  Lion  et  de  l'Hyène  se  manifeste 
sous  l'aspect  d'extinctions  locales,  car  nous  ne  pouvons 
penser  que  les  conditions  de  l'Afrique  excluaient  ces 
espèces  à  l'époque  quaternaire.  Il  n'en  est  pas  de  même 
pour  d'autres  espèces  et  particulièrement  pour  le  Renne, 
qui  vivait  certainement  chez  nous  toute  l'année.  Ici  nous 
trouvons  une  véritable  émigration,  un  refoulement  de 
l'espèce  au  delà  du  cercle  polaire,  puisque,  à  la  deuxième 
époque  glaciaire,  la  Laponie  fut  recouverte  d'un  épais 
glacier  qui  aurait  exclu  son  existence. 

A  tous  points  de  vue,  ces  exemples  de  limitation  d'ha- 
bitat et  de  changement  de  patrie,  caractérisant  des  époques 


(  628  ) 

géologiques  contiguës  à  la  nôtre,  nous  sont  précieux.  Ils 
nous  font  saisir  sur  le  vif  l'importance,  la  fréquence,  l'ex- 
tension, l'enchevêtrement  du  phénomène  et  prévoir,  faits 
en  mains,  le  rôle  que  les  migrations  ont  joué  dans  le 
passé  vital. 

Ils  sont  d'autant  plus  à  méditer  que  ce  phénomène  des 
migrations  n'y  entraîne  pas  de  marques  appréciables  de 
transformations  organiques,  de  variations  du  type  spéci- 
fique en  relation  avec  les  changements  considérables  de 
milieu  qui  créaient  inévitablement  ces  refoulements  ou 
ces  migrations. 

Par  ces  données  complémentaires,  nous  sommes  mieux 
en  mesure  d'apprécier,  dans  ce  seul  côté  de  la  doctrine 
de  la  descendance,  la  complication  presque  inextricable 
des  actions  en  jeu.  Ainsi  que  nous  le  disions  plus  haut, 
s'il  a  été  donné  à  notre  époque  de  fournir  la  haute  pro- 
babilité du  phénomène  généalogique,  nous  ne  pouvons 
nous  étonner  qu'il  ne  nous  ait  pas  été  réservé  d'en  trouver 
la  démonstration  de  fait. 

Cependant  cette  époque  quaternaire,  déjà  si  remai- 
quable  par  ses  manifestations  dans  l'ordre  physique  et 
biologique,  allait  nous  ouvrir  un  autre  horizon  d'une 
incomparable  grandeur,  en  préparant  une  transformation 
totale  de  l'acte  évolutif  de  la  surface  terrestre. 

Dès  l'âge  du  Mammouth,  en  pleine  période  intergla- 
ciaire, des  découvertes  attestent  l'existence  de  l'homme 
en  Europe  et  peut-être  même  en  Amérique. 

Depuis  l'apparition  de  la  vie,  aucun  phénomène  ne 
s'était  produit  sur  le  globe,  dont  les  conséquences  aient 
été  aussi  graves,  car  l'homme  allait  bouleverser  le  monde. 

La  nature  avait  été  seule  à  l'œuvre  jusque-là;  ses  lois 
seules  avaient  présidé  à  la  vie  du  globe,  et  la  géologie 


(  629  ) 
n'avait  eu  à  constater  que  l'histoire  de  ce  que  fut  la  terre 
sous  leur  empire  exclusif. 

Quel  spectacle  nous  est  donné  ensuite!  Par  la  venue 
de  l'homme,  la  nature  se  rencontre  avec  le  plus  formi- 
dable des  antagonistes.  L'entrée  de  l'intelligence,  en 
lutte  avec  les  forces  aveugles  de  la  matière,  ouvre  à 
l'évolution  une  phase  que  rien  dans  le  passé  ne  rappelle. 
A  une  nature  dont  les  lois,  à  travers  l'immensité  des 
temps,  régnaient  en  maîtresses  absolues,  va  se  substituer, 
avec  une  vertigineuse  rapidité,  en  quelques  dizaines  de 
siècles,  en  moins  de  temps  encore  pour  des  continents 
entiers,  une  nature  assujettie  à  l'intelligence,  radicale- 
ment transformée,  dans  toutes  ses  parties  et  dans  tous 
ses  aspects,  pour  les  seuls  besoins  de  l'homme. 

Le  règne  de  la  raison  humaine  succédant  à  la  souve- 
raineté de  la  nature,  telle  sera  désormais  la  loi  de  l'évo- 
lution du  globe  et  par  conséquent  de  l'histoire  de  la  terre! 

Pour  embrasser  dans  son  ampleur  cet  étonnant  phé- 
nomène, rien  ne  m'a  semblé  plus  favorable  que  de  le 
réduire  d'abord  à  une  étude  locale  sur  un  tout  petit  pays, 
le  nôtre,  afin  de  l'y  suivre  dans  trois  de  ses  étapes 
humaines,  en  établissant  ce  qu'étaient  nos  régions  lorsque 
l'homme,  encore  investi  d'un  pouvoir  rudimentaire,  y 
pénétra,  —  ce  qu'elles  devinrent  lorsque  l'homme,  à 
l'aurore  de  leurs  temps  historiques,  commençait  à  se  les 
assujettir,  —  enfin  où  elles  sont  arrivées  de  notre  temps 
lorsque  l'homme,  pourvu  de  la  toute-puissance  que  la 
science  lui  donne,  leur  impose  toutes  les  ressources  de 
la  civilisation,  c'est-à-dire  lorsqu'il  les  a  complètement 
domptées  et  asservies,  qu'il  a  mis  ses  lois  économiques  à 
la  place  des  lois  naturelles. 

Quand  l'homme  apparaît  dans  notre  pays,  il  est  en 


(  630  ) 

possession  d'outils  et  d'armes,  en  silex  et  en  os,  confec- 
tionnés par  lui;  il  sait  se  vêtir  et  se  parer;  il  a  des  rela- 
tions avec  des  régions  distantes  de  quelques  journées 
de  marche;  il  combat  tous  les  animaux,  les  grands  herbi- 
vores et  les  plus  redoutables  carnassiers,  il  les  tue  et  s'en 
nourrit.  Cependant  il  ne  peut  encore  se  créer  parmi  eux 
des  alliés  et  des  aides;  il  n'en  a  réduit  aucun  en  servi- 
tude. Partout  règne  la  forêt,  legs  des  temps  géologiques; 
pas  un  indice  ne  fait  penser  qu'il  ait  assuré  son  existence 
en  s'assujettissant  des  plantes  par  la  culture  et  qu'en  con- 
séquence il  se  soit  livré  à  des  défrichements.  Il  ne  forme 
pas  encore  de  tribus,  mais  seulement  quelques  familles 
éparses,  choisissant  les  cavernes  pour  abris,  s'il  les  a  à  sa 
portée.  Mais  il  sait  produire  et  utiliser  le  feu  et,  par  cela 
seul,  il  est  entré  en  possession  d'une  énorme  supériorité 
qui  le  met  en  état  de  transformer,  au  moyen  de  la  cuisson, 
en  un  régime  artificiel  herbivore  et  Carnivore  son  régime 
naturel  de  frugivore  ;  par  là  encore,  il  s'est  rendu  capable 
de  vivre  sous  tous  les  climats.  C'est  assurément  cette 
acquisition  qui  lui  a  permis  d'accéder  justiu'à  nos  lati- 
tudes et  de  les  dépasser,  car  il  est  un  immigrant;  il  n'a 
pas  pris  naissance  dans  l'Europe  occidentale. 

Ces  modestes  débuts  au  milieu  des  forêts  expriment  le 
pouvoir  de  l'homme  dans  ces  premiers  temps.  Sa  domi- 
nation n'existe  en  quelque  sorte  qu'en  germe  et  ne 
s'exerce  guère  que  par  l'emploi  de  moyens  d'un  genre 
tout  nouveau  pour  se  rendre  maître  et  se  nourrir  des  ani- 
maux qui  sont  autour  de  lui.  Il  en  est  encore  à  l'état  que 
nous  appelons  sauvage  ;  il  reste  isolé  et  n'augmentera  pas 
son  pouvoir  pendant  l'époque  quaternaire. 

Dépassons  cette  époque,  traversons,  sans  nous  y  arrêter, 
le  dernier  âge  de  la  pierre,  au  savoir-faire  déjà  plus 


(  631  ) 

étendu  et  aux  populations  plus  deuses,  puis  notons  les 
premiers  temps  de  la  substitution  des  métaux  à  la  matière 
brute,  pour  arriver  à  l'époque  romaine.  De  grands  remous 
de  populations  s'étaient  déjà  produits;  des  relations  com- 
merciales de  toute  nature  s'étaient  établies.  La  variabilité 
dans  les  mœurs  avait  agi  et  amené  le  progrès,  en  même 
temps  que  l'isolement  avait  pris  lin.  C'est  le  «  phénomène 
des  migrations  »  et  ses  résultats  s'exerçant  par  l'action 
de  l'homme. 

César  alors,  ouvrant  notre  ère  historique,  décrit  l'état 
de  nos  contrées.  Pendant  qu'il  insiste  sur  l'extension  des 
forêts  vierges,  sur  les  marécages  et  les  débordements  des 
rivières,  c'est-à-dire  sur  le  maintien  de  la  nature  primi- 
tive, il  nous  fait  le  tableau  de  l'étendue  des  champs 
stériles,  témoignant  de  l'importance  des  défrichements  ; 
il  signale  dans  chaque  tribu  l'existence  de  vastes  cultures 
et  de  grands  troupeaux  ;  il  cite  de  nombreuses  bourgades 
et  nous  fait  évaluer  à  400,000  le  nombre  de  nos  habi- 
tants. 

Tel  qu'il  y  a  vingt  siècles,  notre  pays  apparut  aux 
convoitises  romaines,  l'action  de  l'homme  s'y  était  déjà 
largement  exercée  :  les  forêts,  en  voie  de  destruction, 
remplacées  partiellement  par  une  végétation  artilicielle 
appropriée  à  sa  nourriture;  la  grande  faune  commençant 
à  disparaître  devant  les  espèces  domestiquées  propres  à 
l'alimenter  et  à  l'aider  dans  ses  labeurs  ou  ses  combats. 
En  un  mot,  la  nature,  changée  profondément  d'aspect  et 
de  condition,  est  entrée  sous  la  domination  humaine. 

Ce  n'est  là  encore  qu'un  état  intermédiaire,  celui  que 
nous  appelons  la  barbarie.  Encore  une  étape  et  nous 
arrivons  à  notre  époque    même.    L'antagonisme  entre 


(  632  ) 

les  forces  brutes  et  la  volonté  consciente  a  pris  fin,  il  n'y 
a  plus  de  partage  :  le  territoire  appartient  tout  entier  à 
l'homme. 

Tout  le  sol  est  cultivé,  couvert  d'une  végétation  desti- 
née à  nos  besoins.  Ce  qui  reste  de  forêts  est  devenu  une 
culture  d'arbres  soumise  à  des  récoltes  régulières,  et  toute 
trace  de  la  forêt  vierge  a  depuis  longtemps  disparu.  Notre 
flore  a  changé  de  caractères  à  la  fois  par  ces  causes  et 
par  des  migrations  artificielles,  par  des  importations  de 
plantes  et  d'arbres  cultivés  à  part  ou  mélangés  à  la  végé- 
tation première; 

Des  lois  protectrices  seules  sauvent  de  la  destruction 
quelques  représentants  des  grandes  espèces  sauvages.  Non 
seulement  les  animaux  domestiques  tiennent  dans  notre 
faune  une  place  analogue  à  celle  de  nos  cultures  dans  la 
végétation,  mais  il  y  a  eu  aussi  des  importations  d'autres 
espèces  qui  sont  nos  commensales  ; 

Les  marécages,  naguère  si  développés,  ont  été  dessé- 
chés ; 

La  nature  du  sol  a  été  transformée  sur  de  grands 
espaces,  et  des  terres  qu'on  vit  stériles  comptent  mainte- 
nant parmi  les  plus  fécondes; 

Les  anciens  cours  d'eau  ont  été  endigués  et  canalisés; 
des  cours  d'eau  artificiels  ont  été  créés; 

Les  agglomérations  de  toute  sorte  et  de  toute  grandeur, 
peuplées  par  plus  de  six  millions  d'habitants  et  prenant 
la  place  de  la  forêt  primitive; 

Les  voies  de  communication  de  toute  espèce  sillon- 
nant le  pays  et  parcourues  par  de  prodigieux  engins  ; 

Ces  transformations,  imposées  coup  sur  coup  à  la  nature, 
ont  achevé  de  modifier  l'aspect  de  nos  régions,  tellement 


(  635  ) 
que  tout  ce  que  nous  avons  sous  les  yeux  porte  la  pro- 
fonde empreinte  de  l'homme.  Tout  y  est  rapporté  à  ses 
besoins  sociaux  et  économiques. 

C'est  l'expression  matérielle  de  ce  que  nous  appelons 
la  civilisation  moderne.  Et  à  quoi  cet  état  inouï  de  civili- 
sation est-il  dû,  sinon  à  l'entrée  en  scène  d'un  nouveau 
progrès  de  l'intelligence  humaine,  aussi  rapide  que  déci- 
sif: la  science,  c'est-à-dire  la  compréhension  de  la  nature 
au  point  de  vue  de  sa  complète  appropriation  à  la  vie 
de  l'homme!  On  peut  aussi  bien  dire  d'abord  :  au  point 
de  vue  de  l'accroissement  de  la  puissance  humaine! 

Car,  à  ce  moment,  la  puissance  humaine  s'est  élevée 
d'un  bond  à  une  ampleur  que  le  monde  n'avait  pas 
connue  et  ne  pouvait  prévoir,  et  la  nature,  perdant  sa 
fière  et  rude  condition,  est  devenue  son  humble  servante. 

Peut-il  être  pour  le  géologue  un  spectacle  plus  éton- 
nant que  ces  formes  nouvelles,  rapides,  radicales,  où  s'est 
transformé  l'ancien  ordre  des  choses?  Depuis  l'époque  du 
gneiss  et  du  micaschiste,  il  a  suivi  les  actions  originaires 
et  l'évolution  générale  des  phénomènes;  grâce  au  prin- 
cipe de  la  permanence  des  lois  naturelles,  il  les  a  com- 
prises et  les  a  vues  se  développer  graduellement,  lente- 
ment à  coup  sûr,  avec  le  même  caractère  essentiel  d'unité 
dans  leurs  causes  et  leurs  modifications.  Et  tout  à  coup, 
vers  la  fin  de  l'incommensurable  série  des  temps  qu'il  a 
contemplée,  il  lui  est  donné  de  reconnaître  une  autre 
action,  sans  précédent  pour  lui  ;  il  en  suit  le  développe- 
ment progressif,  de  plus  en  plus  puissant  et  étendu,  et, 
en  un  temps  dont  cette  fois  il  sait  el  compte  la  durée, 
qui  n'est  que  de  quelques  siècles,  souvent  même  quelques 
années,  il  se  trouve  devant  une  nature  sans  ressemblance 


(  634  ) 

avec  la  nature  antérieure!  Lorsque  la  science  lui  a  révélé 
ce  passé,  h  lui  aussi  elle  a  montré  de  quels  exploits  elle 
est  capable  pour  accroître  le  pouvoir  de  la  compréhen- 
sion humaine. 

D'autres  événements  d'un  caractère  grandiose  nous 
étaient  encore  réservés.  Un  dernier  pas  reslait  à  faire 
dans  l'évolution  de  notre  époque. 

Quand,  il  y  a  quatre  siècles,  la  connaissance  du  globe 
commença  à  nous  être  acquise,  l'espèce  humaine  le 
peuplait  partout,  sauf  une  partie  des  glaces  polaires  et 
quelques  petites  îles  perdues  dans  l'Océan.  Partout  aussi 
la  phase  de  développement  que  les  cavernes  nous  ont  fait 
connaître,  était  dépassée  tantôt  par  des  civilisations  déjà 
prospères  qui  pliaient  fortement  la  nature  aux  besoins 
des  populations;  tantôt  par  une  demi-barbarie  où  la  civi- 
lisation et  la  nature  se  balançaient;  le  plus  souvent  par 
l'état  sauvage  et,  même  dans  ce  dernier  état,  le  progrès 
sur  nos  premiers  âges  se  manifestait  par  des  plantations 
et  des  animaux  domestiques,  par  un  outillage  varié  quel- 
quefois en  métal,  par  des  agglomérations  de  huttes  et 
des  villages,  par  de  grandes  ablations  de  forêts  surtout, 
car  l'homme  est  l'ennemi  des  arbres.  Pour  son  déve- 
loppement social,  il  lui  faut  d'abord  l'anéantissement 
des  forêts;  c'est  par  là  qu'il  commence  et  il  les  empêche 
de  se  reconstituer  par  le  feu,  la  dent  de  son  bétail,  ses 
cultures  ou  ses  constructions. 

Aujourd'hui,  par  un  phénomène  sans  exemple,  le  monde 
est,  peut-on  dire,  aux  mains  des  Européens  ou  des  peu- 
ples qui  en  sont  directement  issus,  et  leur  manière  d'être 
tend  à  devenir  universelle. 

Les  mémorables  découvertes  de  la  fin  du  moyen  âge, 


(  635  ) 
fondamentales  pour  l'avenir  de  l'humanité,  garantissaient 
à  l'Europe  occidentale,  avec  les  moyens  d'une  diffusion 
indéfinie  de  la  pensée,  la  supériorité  définitive  des  armes 
et  le  pouvoir  de  se  diriger  sûrement  sur  les  mers.  Inau- 
gurant l'ère  des  grandes  navigations,  assurée  de  la  sorte, 
elles  ouvrirent  à  l'Européen  l'accès  de  tout  le  globe.  C'était 
lui  donner  l'hégémonie  de  tous  les  peuples. 

L'Européen  ne  connaît  plus  d'obstacles.  En  notre 
siècle,  dirigé  non  plus  par  l'empirisme,  mais  par  la 
science  dans  des  empiétements  plus  prodigieux  encore,  il 
achève  de  mettre  sous  son  joug  toutes  les  l'oices  naturelles 
et  toutes  les  parties  de  la  terre;  il  ne  compte  pas  plus  avec 
l'espace  continental  qu'avec  l'espace  maritime.  Dans  un 
élan  irrésistible,  il  impose  uniformément  à  l'univers  sa 
science,  ses  industries  et  ses  mœurs.  Partout  la  nature, 
d'abord  adaptée  suivant  tant  de  plans  divers  par  des 
peuples  isolés  et  disséminés,  subit  une  unification  com- 
plète. Elle  est  en  voie  de  se  transformer  de  fond  en 
comble,  pour  être  soumise  à  de  nouvelles  coordinations 
sur  un  plan  unique,  le  plan  européen! 

Cette  surprenante  évolution  que  la  géologie  du  globe 
traverse  nous  révèle  ostensiblement  le  mécanisme  qiii 
la  produit. 

La  faculté  d'expansion  et  d'adaptation  de  l'homme  aux 
milieux  les  plus  divers  est  indéfinie,  et  nous  avons  reconnu 
à  quelle  acquisition  première  il  faut  faire  remonter  son 
origine.  Si  les  découvertes,  les  conquêtes  initiales  sur  la 
nature  sont  individuelles,  comme  l'est  essentiellement  le 
génie,  en  s'épanchant  chez  un  peuple,  elles  y  créent  un 
foyer  de  civilisation,  une  variabilité  j)rogressive.  Tôt  ou 
tard,  par  voie  violente  ou  pacifique,  par  voie  de  migra- 


(  036  ) 
lion  en  un  mot,  le  contact  ou  la  fusion  des  peuples  voisins 
fait  pénétrer  chez  eux  ces  progrès  qui,  en  en  subissant 
de  nouveaux,  se  généralisent  de  plus  en  plus  et  finissent 
par  se  répandre  sur  tout  le  globe.  Aussi,  parmi  les 
avancements  de  la  civilisation,  se  placent  toujours  en 
première  ligne  les  moyens  plus  actifs  d'expansion,  c'est- 
à-dire  de  pénétration  et  de  communication  dans  tous  les 
domaines. 

Par  conséquent,  de  même  que  nous  avons  cru  l'entre- 
voir pour  l'évolution  animale  et  végétale  s'effectuant  sous 
l'influence  des  seules  actions  naturelles,  les  migrations 
se  retrouvent,  ici  encore,  l'un  des  principaux  éléments 
des  transformations  progressives.  Elles  se  traduisent  par 
le  mutualisme  entre  peuples,  par  un  véritable  altruisme 
universel,  au  sein  duquel  préside,  avec  une  inexorable 
rigueur,  la  grande  loi  darwinienne  de  la  sélection.  Dans 
le  fonctionnement  de  tout  ce  qui  est  doué  de  mobilité 
organique,  le  progrès  est-il  en  eff"et  autre  chose  qu'une 
meilleure  adaptation  aux  circonstances,  la  substitution 
du  mieux  dans  son  acception  réelle? 

Ainsi  se  produit  à  nos  yeux  l'évolution  de  l'activité 
humaine  sur  le  globe  ou  plutôt  l'évolution  de  notre 
période  géologique  :  l'homme  en  lutte  contre  la  nature 
qu'il  veut  adapter  à  ses  besoins,  et  il  la  veut  tout  entière. 
Le  monde  est  à  sa  merci  et  la  puissance  humaine  se 
mesure  à  ses  conquêtes  sur  l'ordre  établi  des  choses. 

Si,  en  dernier  acquit,  les  sciences  naturelles  n'ont 
d'autre  rôle  ni  d'autre  ambition  que  d'agrandir  cette 
puissance,  elles  n'y  ont  certes  pas  failli  au  cours  du  siècle 
qui  va  se  clore. 


(  657  ) 


Quelques  grandes  phases  dans  l' histoire  de  l'astronomie; 
par  F.  Folie,  membre  de  l'Académie. 

L'astronomie  est,  après  l'arithmétique,  la  plus  antique 
des  sciences;  elle  a  pris  naissance  au  sein  des  peuples 
pasteurs,  sous  ce  beau  ciel  qui  éclaira  le  berceau  de 
l'humanité. 

Ils  durent  constater  bientôt  que  la  croissance  et  le 
fanage  de  leurs  fourrages,  de  même  que  la  multiplication 
de  leur  bétail,  le  chaud  et  le  froid,  la  sécheresse  et 
l'humidité,  étaient  en  connexion  intime  avec  le  cours  du 
Soleil  à  travers  les  constellations. 

L'étude  de  ce  cours  et  de  ces  constellations  était  donc 
pour  eux  d'une  importance  capitale. 

Telle  fut  l'origine  de  l'astronomie. 

Elle  ne  fit  de  grands  progrès,  parmi  nos  ancêtres  scien- 
tifiques, que  dans  l'école  d'Alexandrie,  dont  Hipparque 
et  Ptolémée  sont  les  plus  illustres  représentants. 

On  peut  dire,  si  l'on  fait  abstraction  de  la  précession 
des  équinoxes,  découverte  par  ce  dernier  astronome,  que 
l'astronomie  spliérique  des  anciens  se  bornait  à  considérer 
la  Terre  comme  fixe,  et  le  ciel  des  étoiles  comme  tournant 
uniformément  autour  de  l'axe  géographique  de  la  Terre. 

Ils  connaissaient  assez  exactement  les  mouvements  des 
autres  astres,  qu'ils  désignaient  tous  sous  le  nom  de 
planètes;  mais  la  cause  de  ces  mouvements  leur  échappa 
entièrement. 

Les  Grecs  et   les  Romains  ont  poursuivi   l'étude  de 


(  638  ) 

l'astronomie  de  Ptolémée,  témoin  les  calendriers  de 
JNuma  et  de  Jules  César,  mais  sans  rien  y  ajouter. 

Les  Arabes,  malgré  le  grand  zèle  qu'ils  ont  apporté, 
vers  l'an  dOOO,  à  l'étude  de  l'astronomie,  ne  lui  ont  fait 
réaliser  aucun  progrès  très  marquant. 

Un  fait  qui  atteste  toutefois  la  précision  atteinte  par 
l'astronomie,  avant  sa  renaissance,  est  l'exactitude  remar- 
(|uable  de  la  réforme  du  calendrier  effectuée  par  Gré- 
goire XIII,  dans  le  but  de  faire  toujours  tomber  le 
commencement  du  printemps  à  la  même  date  qu'à 
l'époque  du  Concile  de  Nicée,  qui  avait  (ixé  celle  de  la 
fête  de  Pâques,  réforme  d'un  intérêt  général  très  grand, 
en  ce  qu'elle  ramène  tous  les  ans,  aux  mêmes  dates,  tous 
les  travaux  agricoles. 

La  seconde  pbase  de  l'histoire  de  l'astronomie  s'ouvre 
à  l'époque  de  Tycho-Brahé,  de  Copernic,  de  Galilée  et 
de  Kepler. 

C'est  le  véritable  fondateur  de  l'astronomie  moderne 
qui  s'écria,  indigné  de  l'indifférence  hostile  de  ses  con- 
temporains : 

Que  m'importe  si  mes  découvertes  ne  sont  appré- 
ciées que  dans  un  siècle,  puisqu'il  a  bien  plu  au  Créateur 
d'attendre  pendant  quatre  mille  ans  un  contemplateur 
de  son  œuvre  tel  que  moi  ! 

Copernic  et  Galilée,  du  reste,  n'ont  pas  vu  leurs  décou- 
vertes astronomiques  plus  appréciées  que  celles  de  ce 
grand  homme. 

Quoique  Kepler,  après  avoir  trouvé  les  lois  qui  porte- 
ront à  jamais  son  nom,  en  eût  assez  nettement  soupçonné 
la  source,  il  était  réservé  au  génie  de  Newton  de  la 
mettre  en  pleine  lumière,  en  créant  la  haute  analyse  et  la 
Mécanique  céleste. 


(  639  ) 

L'alli-action  solaire  fut,  dès  lors,  la  cause  du  mouve- 
ment de  la  Terre,  des  planètes  et  des  comètes;  l'attrac- 
tion terrestre,  celle  du  mouvement  de  la  Lune;  l'attraction 
luni-solaire,  celle  de  la  précession  des  équinoxes  et  de  la 
nutation,  entrevue  déjà  par  Newton  et  confirmée  un  peu 
plus  tard  par  Bradley,  qui,  s'aidant  de  la  découverte  de 
la  vitesse  de  la  lumière,  faite  par  Rœmer,  fonda  bientôt 
aussi  la  théorie  de  l'aberration. 

Bradley,  pas  plus  que  ses  illustres  devanciers,  n'eut  à 
se  louer  de  la  justice  de  ses  contemporains;  l'un  d'entre 
eux,  un  astronome  et  un  ami,  nia  pendant  dix  ans  sa 
découverte  de  la  nutation. 

Les  progrès  réalisés  par  Newton  et  Bradley  caracté- 
risent la  troisième  grande  phase  de  l'histoire  de  l'astro- 
nomie, pendant  laquelle  les  instruments  et  les  méthodes 
d'observation  furent  fort  perfectionnés,  et  qui  fut  digne- 
ment close  par  les  découvertes  de  Herschel,  particu- 
lièrement celle  de  la  planète  Uranus,  et  celle  du  mouve- 
ment de  transport  du  Soleil  dans  l'espace. 

A  la  lin  du  siècle  dernier  également  fut  découverte,  par 
Piazzi,  la  première  de  ces  innombrables  petites  planètes 
qui  comblent  la  lacune,  signalée  par  Bode,  entre  Mars  et 
Jupiter.  Bientôt  Olbers  en  trouvait  une  seconde.  Mais 
l'astronomie  lui  est  redevable  d'un  service  plus  signalé  : 
c'est  lui  qui  a  découvert  Bessel  dans  un  comptoir  de 
Brème,  et  a  fait  du  jeune  commis  un  astronome  illustre 
entre  tous. 

Il  restait  cependant  encore  un  pas  décisif  à  faire. 
Newton,  en  créant  la  Mécanique  céleste,  n'avait  guère 
fait  que  l'ébaucher.  Sa  démonstration  du  phénomène  de 
la  précession  des  équinoxes,   fort   imparfaite,   dut  être 


(  Ui)  ) 
reprise  par  d'AIeinbert.  La  démonstration  de  la  nutation 
fut  l'œuvre  d'Euler. 

xMais,  vers  son  époque,  surgit  un  génie  mathématique 
incomparable,  duquel  la  Mécanique  céleste  est  sortie  tout 
armée,  comme  la  Minerve  antique  du  cerveau  de  Jupiter. 

Laplace  écrivit  ce  monument  impérissable,  que  ses 
successeurs  n'ont  pu  (]ue  perfectionner  dans  quelques 
détails. 

Dans  celte  science  sublime,  il  eut  pour  émule  Lagrange, 
à  qui  les  théories  générales  de  la  Mécanique  céleste  sont 
redevables  de  méthodes  marquées  au  coin  de  son  puissant 
génie. 

Pour  appliquer  les  lormules  de  la  Mécanique  céleste, 
il  tallait  un  astronome  qui  les  connût,  et  qui  sût  bien 
observer.  Il  se  rencontra  dans  Bessel,  dont  les  Funda- 
menla  nova  forment,  avec  la  Mécanique  céleste  et  la 
Theoria  motus  de  Gauss,  la  base  de  l'astronomie  du  XIX" 
siècle,  et  ouvrent  la  quatrième  phase  de  l'histoire  de  la 
science. 

C'est  dans  celle-ci  que  lurent  déterminées  pour  la  pre- 
mière Ibis,  d'une  manière  plus  ou  moins  correcte,  mais 
non  pas  encore  à  moins  du  0",01  près  (ce  qui  serait  abso- 
lument indispensable  pour  les  calculs  de  réduction),  les 
constantes  de  la  précession,  de  la  nutation  et  de  l'aber- 
ration, grâce  aux  travaux  de  Bessel  et  des  deux  Struve. 

C'est  dans  celle-ci  également  que  la  Mécanique  céleste 
trouva  une  confirmation  tout  à  fait  inattendue  dans  l'ad- 
mirable découverte  de  Le  Verrier,  qui  n'a  pas  évité,  je  ne 
dis  pas  à  son  auteur,  mais  au  gouvernement  de  l'époque, 
la  honte  de  l'avoir  révoqué. 

Qui  n'a  entendu  parler  de  cette  découverte? 


(  641  ) 

Herschel  avait  trouvé,  depuis  un  demi-siècle  environ, 
une  grosse  planète,  Uranus,  qui,  à  raison  de  son  éloigne- 
ment,  avait  échappé  à  ses  devanciers. 

Le  mouvement  de  celte  planète  présentait  des  anoma- 
lies qu'il  fallait  expliquer,  sous  peine  d'avoir  à  modifier 
et  les  lois  de  l'attraction  newtonienne  et  les  formules 
de  la  Mécanique  céleste. 

Le  Verrier  attribua  les  anomalies  d'Uranus  à  l'attrac- 
tion d'une  grosse  planète,  plus  éloignée  encore. 

II  s'agissait  de  calculer  la  position  que  devait  occuper 
cette  dernière  planète,  pour  occasionner  les  perturbations 
constatées  dans  le  mouvement  d'Uranus  :  problème  exces- 
sivement compliqué,  à  cause,  surtout,  de  son  indétermi- 
nation; car  on  ne  pouvait  se  donner  ni  la  masse  de  cette 
planète,  ni  sa  distance  au  Soleil,  ni  l'inclinaison  et  le 
nœud  de  son  orbite, 

Le  Verrier  parvint,  après  d'immenses  labeurs,  à 
résoudre  le  problème  qu'il  s'était  posé,  et  avec  tant  de 
bonheur,  qu'après  avoir  signalé  la  position  de  sa  planète 
à  l'Observatoire  de  Berlin,  il  recevait,  trois  jours  après, 
la  nouvelle  de  la  découverte  de  Neptune  par  Galle,  à  la 
place  même  que  ses  calculs  lui  avaient  assignée  dans 
le  Ciel. 

Adams  avait  eu  la  même  idée  que  Le  Verrier,  mais  il 
n'est  arrivé  à  la  solution  du  problème  que  six  mois  après 
son  heureux  émule. 

Quelles  déceptions  cruelles  on  peut  rencontrer  dans 
les  labeurs  scientifiques! 

Un  remarquable  progrès,  intéressant  l'astronomie,  fut 
réalisé  par  Fizeau.  Ce  grand  physicien  eut  la  hardiesse 
de  mesurer  directement  la  vitesse  prodigieuse  de  la 
lumière,   qui  est  de  500,000  kilomètres  par  seconde. 

3"^    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  43 


(  642  ) 

L'ingénieux  Foucault  améliora  son  procédé,  qui  a  atteint 
aujourd'hui  une  perfection  telle  que  la  vitesse  de  la 
lumière,  grâce  surtout  aux  déterminations  de  Michelson 
et  de  Cornu,  est  connue  avec  une  précision  que  l'on  sou- 
haiterait voir  atteinte  par  les  constantes  astronomiques, 
par  celles  de  l'aberration  et  de  la  parallaxe  solaire  en 
particulier,  liées  toutes  deux  à  la  vitesse  de  la  lumière, 
de  telle  sorte  que,  si  l'une  d'elles  était  exactement  con- 
nue, l'autre  le  serait  également. 

Le  pendule  de  Foucault  aussi  mérite  d'être  signalé,  de 
même  que  son  gyroscope,  non  au  point  de  vue  des  appli- 
cations astronomiques,  mais  comme  les  preuves  les  plus 
frappantes  du  mouvement  de  rotation  de  la  Terre.  Fait 
singulier.  Poisson  avait  traité,  longtemps  auparavant,  la 
question  du  mouvement  d'un  pendule  oscillant  librement 
autour  d'un  point  fixe  à  la  surface  de  la  Terre,  et  avait 
trouvé  qu'il  ne  se  déplacerait  que  d'une  quantité  imper- 
ceptible, à  raison  du  mouvement  de  rotation  de  celle-ci. 
Mais  si  Poisson  avait  été  aussi  bien  un  esprit  philoso- 
phique qu'un  analyste  habile,  il  se  serait  dit,  à  priori, 
que  le  plan  d'oscillation  du  pendule  restant  invariable 
dans  l'espace,  devait  effectuer,  en  apparence,  une  révo- 
lution journalière,  par  rapport  aux  objets  entraînés  dans 
le  mouvement  de  rotation  du  globe,  et  l'analyste  eût 
aperçu  l'erreur  de  calcul  qu'il  avait  commise  en  écrivant, 
par  méprise,  un  sinus  au  lieu  d'un  cosinus.  C'est  seule- 
ment après  l'invention  de  Foucault,  qui  eût  été  faite  par 
Poisson  sans  cette  méprise,  que  Plana  s'aperçut  de  celle- 
ci  en  reprenant  les  calculs  du  géomètre  français. 

Il  me  reste  à  signaler,  parmi  les  grandes  découvertes 
du  siècle  en  astronomie  mathématique,  les  recherches  sur 
les  parallaxes,  autrement  dit  sur  les  distances  des  étoiles 


(  (545  ) 

au  Soleil,  sur  les  orbites  des  étoiles  doubles  et  sur  le 
déplacement  du  système  solaire  dans  l'espace,  travaux 
dans  lesquels  se  sont  illustrés  surtout  Bessel,  Struve  et 
Argelander,  que  je  suis  beureux  d'avoir  eu  pour  maître 
en  astronomie  pratique  ;  entîn,  les  méthodes,  véritable- 
ment nouvelles,  imaginées  en  mécanique  céleste  par  Gyl- 
dén,  et  poursuivies  ensuite  par  Poincaré,  pour  le  calcul 
des  perturbations. 

A  cette  dernière  phase  de  l'histoire  de  la  science 
appartient  aussi  presque  entièrement  la  création  de  l'as- 
tronomie physique. 

Le  siècle  dernier  ne  peut  guère  revendiquer,  dans  cette 
partie,  que  la  découverte  de  l'anneau  de  Saturne  et  de 
ses  satellites  par  Cassini  et  par  Huygens,  l'inventeur  de 
la  pendule  astronomique,  et  les  travaux  des  P.  Schrôder 
et  de  Vico  sur  la  rotation  des  planètes. 

Le  nôtre  a  vu  éclore  deux  modes  entièrement  nouveaux 
de  recherches  astronomiques.  L'un  est  dû  au  génie  de 
Kirchhof  et  de  Bunsen,  qui  ont  démontré  que  les  raies, 
constatées  par  Frauenhofer  dans  le  spectre  solaire,  pou- 
vaient servira  caractériser  les  éléments  chimiques  existant 
dans  la  source  lumineuse  dont  les  rayons  sont  étalés  en 
spectre  par  le  prisme. 

Parmi  les  travaux  astronomiques  les  plus  considérables 
auxquels  cette  découverte  a  donné  lieu,  il  faut  citer 
d'abord  la  détermination  exacte  de  la  position  des  raies 
du  spectre  solaire  et  des  longueurs  d'ondes  lumineuses 
correspondantes. 

Nous  possédons  aujourd'hui  plusieurs  travaux  impor- 
tants sur  cette  matière.  L'un  des  premiers  dessins  du 
spectre  solaire  complet  a  été  exécuté  à  l'Observatoire  de 
Bruxelles,  par  Fiévez. 


(  Ui  ) 

Plus  étendus  et  plus  détaillés  sont  les  spectres  de  Piazzi 
Smith,  de  Roeland  et  tout  particulièrement  celui  de 
Thollon,  qui  a  été  interrompu,  à  moitié  achevé  seulement, 
par  la  mort  de  son  habile  auteur. 

La  seconde  moitié  a  été  heureusement  terminée  à  Nice, 
au  moyen  de  l'appareil  même  de  Thollon,  par  l'ini  des 
astronomes  d'Uccle,  qui  a  consacré  de  longs  mois  d'ob- 
servalions,  de  dessin  et  de  calculs  à  cette  œuvre,  et  qui 
est  allé  la  contrôler  ensuite  à  l'Observatoire  d'Alger, 
pourvu  également  d'un  appareil  de  Thollon. 

Notre  Compagnie  peut  se  dire,  avec  une  fierté  légitime, 
qu'en  achevant  le  spectre  de  l'astronome  français,  il  a  fait 
une  œuvre  qui  restera  ;  et  la  Belgique  doit  quelque  recon- 
naissance à  MM.  Perrotin  et  Trépied,  qui  ont  gracieuse- 
ment mis  leur  observatoire  et  leurs  conseils  à  la  disposi- 
tion de  l'astronome  belge. 

Il  reste  encore  bien  des  découvertes  à  faire  en  cette 
matière,  surtout  dans  les  régions  extrêmes  du  spectre, 
l'infra-rouge  et  l'ultra-violet,  dont  Abney,  Cornu  et  Lang- 
ley  se  sont  occupés  avec  beaucoup  de  succès. 

Il  me  sutfira  de  dire  ici  que  le  spectre  photographique 
est  six  fois  |)lus  étendu  que  celui  que  nous  voyons  à  l'œil 
nu  dans  les  circonstances  ordinaires. 

Les  raies  spectrales  servent,  comme  on  sait,  à  ana- 
lyser chimiquement  le  Soleil  et  les  étoiles,  et  ont  permis 
de  constater  ainsi  l'identité  de  constitution  de  la  matière 
dans  tous  les  astres  de  l'univers. 

Un  instant,  Lockyer  avait  même  cru  pouvoir  ramener 
à  l'unité  tous  les  corps  réputés  simples  par  les  chimistes. 
Ce  n'était  qu'une  noble  illusion,  et  c'est  à  l'avenir  qu'il 
appartient  d'en  prouver  la  réalité. 

Parmi  les  premiers  travaux,  et  les  plus  considérables, 


(  645  ) 

sur  la  speclroscopie  stellaire,  on  tloit  nienlioniier  ceux 
de  l'illustre  P.  Secchi;  il  a  étudié  au  spectrosco|)e  plus 
de  4, (MX)  étoiles  et  les  a  classées  en  quatre  types,  d'après 
la  nature  de  leur  lumière.  Ses  recherches  ont  été  pour- 
suivies avec  heaucoup  de  zèle  et  de  succès  par  Duner. 

On  connaît  l'ouvrage  classique  de  Secchi  sur  le  Soleil, 
ouvrage  dans  lequel  sont  résumés  ses  travaux  spectrosco- 
piques  relatifs  à  cet  astre,  ses  recherches  sur  la  photo- 
sphère, les  protuhérances,  les  taches,  la  température  du 
Soleil;  et  cet  autre  ouvrage  sur  l'unité  des  forces  phy- 
siques, qui  le  montre  aussi  profond  philosophe  et  physi- 
cien qu'astronome  éminent.  Fait  étrange,  qui  m'a  été 
rapporté  par  un  de  ses  élèves ,  et  qui  témoigne  de  la 
grande  modestie  du  savant,  Secchi  ne  prétendait  con- 
naître un  peu  bien  que  l'archéologie. 

Une  des  applications  les  plus  ingénieuses  de  la  spec- 
troscopie  est  celle  qui  est  relative  à  la  détermination  de 
la  vitesse  absolue  des  étoiles,  et  même  à  celle  de  la 
vitesse  de  rotation  du  Soleil. 

C'est  Doppler  qui  s'est  dit  le  premier  que,  si  une 
étoile  se  rapproche  de  nous  avec  une  vitesse  assez  consi- 
dérable, la  longueur  des  ondes  lumineuses  qu'elle  nous 
envoie  doit  se  raccourcir  par  le  fait  même,  et  produire, 
par  conséquent,  une  variation  dans  la  position  des  raies 
du  spectre. 

Les  premiers  résultats  tangibles  de  cette  méthode  ont 
été  obtenus  par  Huggins  en  18G8. 

Christie,  Maunder,  Vogel  ont  pu  déterminer,  par  la 
suite,  les  vitesses  d'un  grand  nombre,  d'étoiles. 

En  1870,  Zôllner  invente  le  spectroscope  à  reversion, 
et  Vogel  l'applique  immédiatement  à  la  détermination 
de  la  vitesse  de  rotation  du  Soleil  au  moyen  du  déplace- 


(  040 


ment  des  raies  des  deux  bords.  Young,  en  1870,  trouve, 
par  le  même  moyen,  une  vitesse  de  rotation  de  2.27  ki- 
lomètres par  seconde. 

Christie,Thollon  et  Cornu  ont  également  fait  de  beaux 
travaux  sur  ce  sujet.  Le  premier  de  ces  savants  a  même 
appliqué  le  principe  à  la  détermination  de  la  vitesse  de 
rotation  de  Jupiter  (1877). 

Houzeau  a  émis  cette  idée  très  ingénieuse  qu'au  moyen 
du  déplacement  des  raies  spectrales,  on  arriverait  à 
déterminer  l'inclinaison  relative  des  orbites  des  étoiles 
doubles. 

D'après  les  observations  de  Young,  eniin,  l'atmosphère 
solaire  tournerait  plus  rapidement  que  le  corps  de  l'astre. 

Les  importants  travaux  de  Secchi  et  de  ses  successeurs, 
sur  le  Soleil,  avaient  éveillé,  chez  les  astronomes,  le  désir 
de  pouvoir  en  étudier,  en  tout  temps,  les  protubérances, 
qu'on  n'avait  pu  apercevoir  encore  que  durant  les  éclipses 
totales. 

C'est  à  Lockyer  que  revient  l'honneur  d'avoir  émis  la 
première  idée  de  leur  observation  au  spectroscope,  et  à 
Janssen,  l'infatigable  directeur  de  l'Observatoire  astro- 
physique de  Paris,  l'honneur  non  moins  grand  de  l'avoir 
réalisée  (1808). 

Le  second  mode  de  recherche  inauguré  en  ce  siècle  est 
la  photographie.  Quelle  facilité  merveilleuse  ses  progrès 
ont  donnée  aux  astronomes,  qui,  auparavant,  passaient 
de  longues  nuits  à  dessiner  patiemment  quelques  détails 
de  la  Lune,  de  Vénus,  de  Jupiter,  etc.,  ou  de  longues 
heures  à  fixer  les  contours  d'une  tache  solaire,  tandis 
qu'ils  obtiennent  aujourd'hui  tous  ces  détails  en  quelques 
minutes  ou  en  quelques  secondes! 

Les  agrandissements  des  magnifiques  photographies 


(  6i7  ) 
lunaires  de  Lick  Observatory,  dont  notre  Compagnie  a 
reçu  les  premiers  exemplaires,  ont  ouvert  également  une 
voie  nouvelle,  dans  laquelle  se  distingue  supérieurement 
aujourd'hui  l'Observatoire  de  Paris.  Je  regrette  vivement 
que  l'habile  auteur  de  ces  forts  agrandissements  n'ait  pu 
être  chargé,  à  Uccle,  d'un  service  de  photographie  astro- 
nomique, pour  lequel  il  avait  et  le  talent  et  les  instru- 
ments nécessaires. 

A  côté  des  photographies  lunaires,  une  mention  spé- 
ciale est  due  aux  magnifiques  photographies  du  Soleil 
obtenues  à  Meudon,  depuis  plus  de  dix  ans,  par  Janssen, 
qui  a  réussi  également  le  premier,  avec  Gill,  à  photogra- 
phier une  comète. 

Quelle  facilité  également  otïre  la  photographie  pour  la 
découverte  de  petites  planètes!  L'objectif  photographique 
reste  invariablement  fixé  sur  un  même  secteur  du  ciel, 
qu'il  suit  dans  son  mouvement,  grâce  à  l'appareil  sur 
lequel  il  est  placé,  appareil  animé  d'un  mouvement  égal 
et  directement  contraire  à  celui  de  la  Terre.  Tout  est 
donc  fixe,  étoiles  et  plaque  photographique.  La  pose  dure 
un  assez  grand  nombre  d'heures.  Si  une  petite  planète  se 
trouve  dans  le  champ  exploré,  comme  elle  se  meut  à 
travers  les  étoiles,  ce  n'est  pas  un  point  lumineux  qu'elle 
laissera,  comme  ces  dernières,  sur  la  plaque,  mais  une 
petite  trace  qui  permettra  de  la  reconnaître  immédiate- 
ment. 

Il  n'est  pas  possible  de  passer  ici  sous  silence  une 
invention  très  ingénieuse,  sans  laquelle  les  grands  pro- 
grès de  l'astronomie  physique  étaient  irréalisables;  je 
veux  parler  de  l'application  du  mouvement  d'horlogerie 
aux  équatoriaux.  C'est  Hooke  qui  en  a  eu  la  première 
idée.   Elle  a  été  réalisée,  vers   1755,   par  Vayringe,  à 


(  648  ) 
Lnnéville,  et  a  surtout  progressé,  peu  de  temps  après,  en 
Aiii^Ieterre. 

L'une  des  œuvres  les  plus  utiles  à  l'astronomie  future 
est  certainement  cette  carte  du  Ciel,  due  à  l'initiative  de 
l'amiral  Mouchez,  et  qui  s'exécute  actuellement  dans  un 
grand  nombre  d'observatoires  des  deux  mondes.  Déjà 
Pickering  s'était  signalé  dans  cette  voie;  c'est  une  justice 
qu'il  convient  d'autant  plus  de  lui  rendre,  qu'on  a  paru 
oublier  un  peu  les  grands  progrès  qu'il  avait  réalisés  dans 
la  photographie  stellaire.  Son  catalogue  photoméirique 
de  4,200  étoiles,  déduit  de  19,000  observations,  lui 
mérite  également  la  reconnaissance  des  astronomes. 

La  théorie  des  ondulations,  due  au  puissant  génie  de 
Fresnel,  et,  en  particulier,  celle  de  la  polarisation  de  la 
lumière,  ont  eu  également,  entre  les  mains  d'Arago,  leurs 
applications  à  l'astronomie  physique. 

Notre  siècle  aussi  a  vu  les  instruments  astronomiques 
arriver  à  une  perfection  inespérée.  Les  objectifs  des 
lunettes  astronomiques  ont  atteint  jusqu'à  1"',03  de  dia- 
mètre. 

C'est  l'Amérique  qui  tient  le  record  dans  celte  direc- 
tion, grâce  surtout  à  la  générosité  de  Lick  et  de  Yerkes. 
Et  cette  générosité  a  déjà  été  récompensée  par  de  magni- 
fiques découvertes,  comme  celle  du  cinquième  satellite 
de  Jupiter,  faite,  par  Barnard,  à  .  Lick  Observatory, 
en  m)± 

A.  Hall  avait  trouvé  à  Washington,  en  1877,  les  deux 
satellites  de  Mars,  qui,  fait  digne  de  remarque,  furent 
déjà  soupçonnés  en  1600  par  Kepler.  Lorsque  le  grand 
astronome  apprit  que  Galilée  venait  de  découvrir  les 
quatre  satellites  de  Jupiter,  il  dit  :  «  On  en  trouvera  un 
à  Vénus,  deux  à  Mars,  six  ou  huit  à  Saturne  »,  prophétie 
réalisée  de  tous  points,  sauf  en  ce  qui  concerne  Vénus. 


(  649  ) 

Il  est  vrai  que,  d'après  Schiaparelli,  Vénus,  de  même 
que  Mercure,  ne  seraient  pas,  comme  on  l'a  cru  depuis 
l'antiquité,  des  planètes  analogues  à  notre  Terre  ou  à 
Mars,  mais  de  simples  satellites  du  Soleil,  c'est-à-dire 
des  corps  dont  la  vie  est  absente,  et  qui  n'ont  nul  besoin 
d'être  éclairés  durant  leurs  nuits. 

Kepler  croyait  aux  causes  finales,  rejetées  par  l.aplace. 
Le  grand  géomètre  français  avait  dit  :  «.  Si  la  nature 
s'était  proposé  d'éclairer  la  Terre  pendant  la  nuit,  elle 
aurait  fort  mal  rempli  son  but;  elle  n'avait  qu'à  lancer 
la  Lune  dans  le  plan  de  l'équateur  avec  une  vitesse 
déterminée,  et  cet  astre  eût  éternellement  éclairé  la  Terre 
durant  toute  la  nuit.  »  Or  Delaunay,  qui  a  consacré  vingt- 
cinq  années  à  la  tbéorie  du  mouvement  de  la  Lune,  a 
trouvé  que,  quand  bien  même  la  nature  en  eût  agi  de  la 
sorte,  il  n'en  serait  pas  moins  arrivé,  par  suite  des  per- 
turbations, que  la  Lune  fût  sortie  du  plan  de  l'équateur 
pour  parcourir  son  orbite  actuelle. 

A  côté  de  la  belle  découverte  de  Kirchbof  et  Bunsen, 
on  ne  peut  passer  sous  silence  celle  qui  est  la  plus  féconde 
du  siècle,  la  théorie  mécanique  de  la  chaleur,  dont  le 
premier  principe,  le  principe  fondamental,  est  dû  au 
génie  de  Robert  Mayer,  médecin  à  Heilbronn ,  et  le 
second  à  Rodolphe  Clausius. 

On  sait  la  profonde  déduction  que  Thomson  a  tirée 
de  ce  second  principe,  relativement  à  la  dissolution  linale 
de  tous  les  corps  de  la  nature,  et  à  la  résolution  de  tous 
les  mouvements  stellaires  et  planétaires  en  de  simples 
mouvements  moléculaires,  déduction  que  Tyndall  expri- 
mait en  ces  termes,  tirés  d'une  épître  de  saint  Pierre  : 
c<  Les  éléments  seront  dissous  par  le  feu.  » 

Un  principe  aussi  vaste  que  celui  de  Mayer  a  d'impor- 


(  G5'0  ) 


taiU(3S  applications  à  toutes  les  sciences;  l'astronomie,  eu 
particulier,  en  a  tiré  des  conséquences  très  remarquables 
relativement  aux  mouvements  des  corps  célestes,  à  leur 
température,  à  leur  âge  même,  enfin  à  leur  destinée 
finale. 

Mais  je  m'arrête  (la  matière  est  trop  vaste),  sans  donner 
plus  qu'une  simple  mention  aux  ondes  herziennes  et  aux 
rayons Rônlgen,  dont  la  découverte  aura  certainement  son 
contre-coup  en  astronomie  physique. 

En  pensant  aux  progrès  immenses  réalisés,  durant  ce 
siècle,  dans  la  connaissance  des  astres,  vous  serez  aussi 
surpris  que  moi  de  lire,  dans  l'un  des  discours  prononcés, 
l'an  dernier,  à  l'inauguration  de  l'Observatoire  Y'erkes,  à 
Chicago,  que  l'astronomie  est  peu  cultivée  parce  qu'elle 
ne  rapporte  pas  des  dollars. 

Si  le  culte  de  l'astronomie  était  aujourd'hui  abandonné, 
et  si  tel  en  était  le  motif,  n'en  pourrait-on  pas  dire  autant 
de  toutes  les  sciences,  même  de  la  physique,  de  la  chimie 
et  de  la  mécanique?  Très  rares  sont  les  vrais  savants  qui 
ont  acquis,  par  leurs  travaux,  plus  que  Votium  cum 
digiiitale. 

En  aucun  siècle,  les  recherches  scientifiques  n'ont  été 
plus  nombreuses,  en  aucun  siècle,  les  observations  astro- 
nomiques n'ont  été  plus  universellement  répandues.  Et 
ce  n'est  certes  pas  en  Amérique,  où  l'astronomie,  née 
d'hier,  est  aujourd'hui  mieux  dotée  et  plus  cultivée  peut- 
être  qu'en  aucun  pays,  grâce  aux  Peabody,  Lick, 
Washburn,  Yerkes,  Miss  Burns  et  autres  protecteurs 
intelligents,  que  l'on  est  en  droit  de  se  plaindre  de 
l'abandon  de  cette  science. 

Et  n'avons-nous  pas  vu  créer  ou  ressusciter,  en  Europe, 
des  observatoires,    bien   connus   déjà   par  leurs  beaux 


(  631  ) 
travaux,   et  dont   le  plus  récent   est  l'Observatoire  du 
Vatican? 

L'astronomie  n'est  certes  pas  près  de  s'éteindre; 
non  seulement  des  princes  s'y  intéressent  encore,  comme 
jadis  Rodolphe  de  Habsbourg,  Léon  X,  Grégoire  XIll, 
Alphonse  de  Castille,  Albert  de  Saxe,  Louis  XIV,  Nicolas, 
Maximilien,  Don  Pedro;  mais  l'opinion  publique,  plus 
éclairée  et  plus  puissante,  serait  de  force  peut-être  à 
empêcher  un  gouvernement  peu  clairvoyant  d'abandonner 
un  observatoire,  sous  prétexte  qu'il  ne  répond  à  aucun 
besoin  pratique. 

Non  certes.  A  la  fin  du  siècle  qui  a  vu  éclore  les  tra- 
vaux des  Laplace,  des  Bessel,  des  Struve,  des  Le  Verrier, 
des  Newcomb,  des  Gyidén,  qui  a  vu  créer  à  Poulkovo  la 
plus  grande  école  d'astronomie  des  temps  modernes,  on 
n'a  aucune  raison  de  douter  des  brillantes  découvertes 
que  le  XX'  siècle  réserve  à  l'astronomie. 

Avant  de  plonger  nos  regards  dans  l'avenir,  embras- 
sons un  instant  le  passé  d'un  coup  d'œil. 

1"^^  phase.  Antiquité  :  liipparque  et  Ptolémée. 

Terre  fixe,  Ciel  mobile  autour  d'un  axe  fixe. 

S*"  phase.  Renaissance  :  Copernic,  Galilée,  Kepler. 

Le  Soleil  est  fixe,  la  Terre  et  les  planètes  tournent 
autour  d'axes  fixes,  et  circulent  autour  du  Soleil. 

5"  phase.  Temps  modernes  :  Newton,  Bradley. 

L'attraction  newtonienne  explique  la  précession  des 
équinoxes,  les  marées,  les  mouvements  planétaires  et 
cométaires,  présume  la  nutation,  bientôt  découverte, 
ainsi  que  l'aberration,  par  Bradley; 

4*^  phase,  contemporaine  :  Herschel,  Laplace,  Bessel, 
Struve,  Le  Verrier,  Gyidén. 

Explication  de  tous  les  mouvements  célestes. 


(  652  ) 

Formules  correctes  du  mouvement  de  rotation  de  la 
Terre  supposée  solide.  Nouvelle  méthode  pour  le  calcul 
des  perturbations. 

Perlectionnements  très  considérables  des  instruments. 

Fondation  de  l'astronomie  physique,  et,  particulière- 
ment, de  la  spectroscopie  et  de  la  photographie  céleste. 

Nous  allons  très  prochainement  entrer  dans  la  cin- 
quième phase. 

Les  astronomes  qui  sont  à  la  tête  des  grands  annuaires 
astronomiques  ont  déjà  voulu  s'y  préparer,  en  s'enten- 
dant  sur  les  constantes  et  les  formules  de  réduction  dont 
ils  feront  usage  au  XX^  siècle.  D'autres  ont  pensé,  avec 
raison,  que  les  résolutions  qu'ils  ont  prises  étaient  pré- 
maturées. 

Nul  astronome  n'ignore,  en  effet,  combien  incertaines 
sont  nos  connaissances  quant  aux  valeurs  des  constantes 
de  la  précession,  de  l'aberration  et  de  la  parallaxe 
solaire. 

Nul  n'ignore,  non  plus,  que  l'astronomie  en  est  encore 
aujourd'hui  réduite  au  pur  empirisme  dans  la  solution 
d'une  question  soulevée  par  l'Observatoire  de  Berlin,  et 
activement  étudiée  dans  les  deux  mondes,  grâce  surtout 
à  l'initiative  éclairée  de  son  savant  directeur  :  la  question 
de  la  variation  des  latitudes. 

Nul  enfin  ne  peut  plus  ignorer  (pie,  si  la  nutation  eulé- 
rienne  n'est  pas  insensible,  les  formules  de  réduction 
usitées  sont  incorrectes,  parce  qu'elles  la  suppriment 
purement  et  simplement,  pour  la  remplacer  par  la  seule 
variation  de  la  latitude,  dont  les  apparences,  on  va  le 
voir,  sont  dues  à  des  causes  très  diverses. 

Ce  sera  certes  un  sujet  d'étonnement  pour  nos  succes- 
seurs immédiats,  que  la  légèreté  avec  laquelle  tous  les 


(  655  ) 
astronomes  du  X1X«  siècle  ont  admis,  en  dépit  de  nom- 
breux avertissements,  les  formules  d'Oppolzer,  qui  était 
moins  bon  analyste  qu'astronome  distingué  et  calcula- 
teur très  habile.  Je  dois  déclarer  cependant  que  Tisse- 
rand, dans  son  traité  de  Mécanique  céleste,  n'a  pas  suivi 
Oppolzer;  il  s'est  borné,  malheureusement,  de  même 
que  Laplace,  à  considérer  la  nutation  eulérienne  et  la 
nutation  diurne  comme  insensibles.  Un  seul  géomètre, 
du  reste,  et  non  l'un  des  moins  illustres,  a  aflirmé  inci- 
demnient  l'exactitude  des  formules  de  l'astronome  vien- 
nois (*)  ;  il  est  vrai  qu'à  cette  date  je  n'avais  pas  encore 
fait  sauter  aux  yeux  la  subtilité  incorrecte  d'analyse  sur 
laquelle  sont  fondées  ces  formules. 

Aujourd'hui,  l'aslronome-géomètre  dont  je  parle  n'en 
affirmerait  plus  l'exactitude,  mais  sa  grande  autorité,  et  le 
silence  qu'il  a  gardé  depuis  ma  démonstration,  n'en  auront 
pas  moins  contribué  à  accréditer,  chez  les  contemporains, 
une  erreur  des  plus  préjudiciables  à  la  science. 

J'ai  démontré  {**)  que  si  l'on  rapporte  correctement, 
comme  Oppolzer  a  voulu  le  faire,  les  formules  du  mou- 
vement de  rotation  de  la  Terre  à  son  axe  instantané,  la 
nutation  eulérienne  disparaît,  à  la  vérité,  en  obliquité, 
mais  non  en  longitude,  et  qu'elle  apparaît  même,  chose 
excessivement  grave,  dans  l'expression  de  l'heure  sidé- 
rale. 

Et  veuillez  remarquer  qu'il  s'agit,  non  d'astronomie, 
mais  d'analyse  mathématique,  et  qu'ici,  ce  qui  n'est  pas 


(*)  Newcomb,  The  cléments  of  tlie  four  inner  planets  and  tlie  funda- 
mental  constants  of  aslronomy,  p.  131,  1895. 

(*')  Vierteljalirsckrift,  1896.  —  Annuaire  de  rObservatoire  pour 
1897,  et  Bull,  de  l'Acad.  roy.  de  Belgique,  3^  sér.,  t.  XXXIII,  pp.  154 
et  397. 


(  654  ) 

exact  est  radicalement  faux.  Mais  en  astronomie,  me 
dira-t-on,  nierez-vous  l'exactitude  des  formules  usitées, 
relatives  à  la  variation  des  latitudes?  Non  certes.  Mais  je 
nie  absolument  l'exactitude  des  formules  relatives  à  l'as- 
cension droite  et  à  l'heure.  On  m'a  répondu  :  Mais  les 
quantités  négligées  sont  si  faibles  !  Elles  sont  absolument 
du  même  ordre  que  les  variations  de  la  latitude  :  si  l'on 
néglige  les  unes,  on  doit,  logiquement,  négliger  aussi 
les  autres.  Si  ces  dernières  sont  appréciables,  et  mille 
faits  l'attestent,  il  en  est  de  même  des  premières;  et  le 
grand  tort  de  l'astronomie  contemporaine  est  de  n'en 
tenir  nullement  compte.  L'heure  et  l'ascension  droite  y 
sont  incorrectement  déterminées  ;  il  en  est  de  même  du 
méridien,  qui,  dans  la  méthode  de  Laplace,  est  fixe,  dans 
celle  d'Oppolzer,  sujet  à  trois  variations  périodiques, 
l'une  annuelle,  les  deux  autres  de  504-  et  de  451  jours. 
Comment  déterminer  un  azimut  sans  rien  connaître  des 
formules  de  ces  variations,  puisque  l'heure  même  en 
dépend  ? 

Le  prochain  siècle  en  fera  un  grave  reproche  à  ceux-là 
qui,  étant  capables  de  le  faire,  auront  omis  d'approfon- 
dir la  question,  ou  négligé  le  strict  devoir  de  proclamer 
bravement  la  vérité  devant  les  nombreux  astronomes, 
très  méritants  et  très  habiles,  qui  consacrent  plus  spécia- 
lement leurs  veilles  aux  observations  et  à  leur  critique 
qu'aux  théories  de  la  Mécanique  céleste. 

Depuis  Laplace  donc,  tandis  que  les  observations 
acquéraient  une  précision  inespérée,  leur  réduction  effec- 
tuait un  progrès  à  rebours,  qui,  depuis  une  trentaine 
d'années  environ,  a  considérablement  nui  à  la  science, 
en  substituant  aux  formules  rigoureuses  du  maître  et  au 
méridien  fixe  de  Bessel  et  de  Struve,  des  formules  incor- 


(  655  ) 

rectes  et  un  méridien  mobile,  et  en  rendant  impossibles 
une  définition  et  une  détermination  exactes  de  l'heure. 

Et  il  serait  fort  regrettable,  je  le  répète,  que  les  grandes 
éphémérides  astronomiques  fissent  usage,  dans  le  XX« 
siècle,  de  formules  qui  reposent  sur  une  transformation 
analytique  radicalement  fausse,  et  même  de  constantes 
fort  sujettes  à  caution,  celles  de  la  précession  et  de  l'abei-- 
ration  en  particulier. 

Je  n'hésite  pas  même  à  proclamer  hautement  que 
l'établissement  scientifique  qui  sera  le  premier  à  rompre 
avec  ces  errements,  non  seulement  fera  franchir  à  l'astro- 
nomie sphérique  du  XIX*'  siècle  le  fossé  profond  qui  la 
sépare  de  celle  du  XX%  mais  sera  suivi  bientôt  par  tous 
les  observatoires  des  deux  mondes. 

Beaucoup  trouveront,  sans  doute,  cette  déclaration 
bien  présomptueuse.  Ils  ont,  depuis  huit  ans,  à  leur  dis- 
position un  moyen  fort  simple  de  la  réduire  à  néant. 
Qu'un  seul  prouve  publiquement  l'exactitude  des  formules 
dont  ils  font  usage,  ou  la  fausseté  de  la  démonstration 
que  j'ai  faite  de  leur  incorrection,  et  je  serai  le  premier 
à  reconnaître  mon  erreur. 

L'astronomie  sphérique  mathématique  a  encore  un  très 
grand  pas  à  faire  pour  atteindre  au  degré  de  précision 
auquel  notre  siècle  a  porté  l'astronomie  pratique. 

L'existence  des  volcans  a  fait  supposer,  même  dans 
l'antiquité,  que  l'intérieur  de  la  Terre  est  en  ignition.  On 
se  rappelle  que  Maupertuis  avait  soulevé  cette  question,  au 
XVIH"  siècle,  devant  l'Académie  des  sciences  de  Berlin. 
Les  géomètres,  toutefois,  ont  toujours  considéré  la 
Terre  comme  solide.  Depuis  une  trentaine  d'années  seu- 
lement, ils  se  sont  demandé  si  l'on  ne  devrait  pas  étudier, 
au    lieu   du   mouvement   d'une  Terre  solide,    celui    de 


(  656  ) 

l'écorce  terrestre.  Plusieurs,  notamment  Hopkins,  Delau- 
nay,  W.  Thomson,  G. -H.  Darwin,  ont  émis  sur  ce  sujet 
(les  idées  en  général  justes  et  ingénieuses.  Les  conclusions 
principales  en  sont  que  : 

Dans  les  mouvements  à  longue  période,  l'écorce  et  le 
noyau  se  meuvent  comme  s'ils  étaient  solidaires;  telles  la 
précession  et  la  nutation  bradiéenne. 

Dans  les  mouvements  à  courte  période,  l'écorce  se 
meut  indépendamment  du  noyau;  telle  la  nutation 
diurne. 

Quant  aux  mouvements  à  période  intermédiaire,  on  a 
cru  qu'ils  seraient  d'autant  plus  altérés  que  leur  période 
est  plus  courte;  mais  c'est  là,  je  pense,  une  erreur. 

Au  surplus,  ces  théorèmes  ont  été  énoncés  sans 
démonstration,  à  l'exception  de  celle  de  Hopkins,  qui  est 
insullîsante.  M.  Ronkar  les  a  démontrés  plus  tard  dans 
nos  publications  (*). 

Il  s'agissait  donc  d'établir  la  théorie  du  mouvement 
de  l'écorce  terrestre,  en  tenant  compte  des  actions 
intérieures. 

J'ai  fait  mettre  cette  question  au  concours  pour  1893;  il 
y  a  été  répondu  par  l'envoi  d'un  mémoire  que  je  considère 
comme  excellent,  et  qui,  ne  la  résolût-il  même  pas  com- 
plètement au  point  de  vue  pratique,  n'en  était  pas 
moins  la  première  ihéorie  correcte  qu'on  eût  donnée  du 
mouvement  de  rotation  de  l'écorce  terrestre:  théorie  qui 
doit  être  la  base  de  l'astronomie  sphérique  du  XX®  siècle, 
et  ouvrir  la  cinquième  phase  de  l'histoire  de  la 
science. 


•)  Mt'in.  couronnés  et  Mém.  des  savants  étrangers,  t.  LI,  1889. 


(  6S7  ) 

IiKlépendammeiil  de  ce  grand  pas  à  franchir,  quelques 
progrès  déjà  eussent  pu  (Hre  réalisés,  si  l'on  avait  mis, 
à  perfectionner  les  formules,  autant  de  zèle  et  de  talent 
qu'à  perfectionner  les  observations. 

Quelques  astronomes  s'en  sont  préoccupés  :  Peters, 
Wagner,  Fabrilius,  Seeliger,  Oppolzer;  mais  leurs  for- 
mules sont,  ou  incomplètes,  ou  même  incorrectes.  Nul, 
en  particulier,  n'avait  recherché  les  termes  qui  pro- 
viennent, soit  de  la  combinaison  de  l'aberration  annuelle 
et  de  l'aberration  systématique,  soit  de  celle  de  la  réfrac- 
tion, avec  la  nutation  ou  l'aberration. 

Cette  lacune  est  comblée  aujourd'hui  (*). 

Plusieurs  autres  desiderata  ont  été  signalés  dans  cette 
lecture. 

La  constante  de  la  précession  a  besoin  d'une  détermi- 
nation nouvelle,  et  je  veux  montrer  ici  qu'on  n'a  pas 
encore  correctement  abordé  sa  recherche. 

Supposons  qu'une  étoile,  sans  mouvement  propre 
objectif,  ait  été  tout  à  fait  correctement  observée,  en 
ascension  droite  et  en  déclinaison,  par  Bradley  en  1755, 
par  Wagner  en  1855,  et,  pour  simplifier  l'analyse,  que 
les  deux  observations  aient  été  ramenées  au  Soleil  pris 
pour  origine. 

Les  deux  positions  observées  seront  différentes,  malgré 
la  fixité  absolue  de  l'étoile,  en  premier  lieu,  à  cause  de 
la  précession,  ou,  plus  explicitement,  de  la  variation  de 
l'équinoxe  et  de  l'équateur  de  1755  à  1855;  en  second 
lieu,  à  cause  du  déplacement  du  Soleil,  ou  du  mouve- 


(')  Catéchisme  correct  d'astronomie  sphérique.  Rome,  1893  —Revue 
{les  constantes  de  l'astronomie  stellaire.  Bruxelles,  1896. 

3™*    SÉRIE,    TOME    XXXVI.  44 


(  658  ) 

ment  systématique,  entre  ces  deux  dates  ;  en  troisième 
lieu...  car  il  y  a  un  tertio  auquel  nul  des  astronomes  qui 
se  sont  occupés  de  la  question  n'avait  songé.  Le  premier 
des  Struve  avait  bien  pensé  à  tenir  compte  du  mouve- 
ment ou  de  la  parallaxe  systématique,  et  son  fils  Otto, 
l'illustre  doyen  des  astronomes  contemporains,  réalisant 
cette  idée,  avait  déterminé  une  constante  de  la  préces- 
sion, qui,  à  raison  de  cette  circonstance,  fut  pendant 
longtemps  prétërée  à  celle  de  Bessel  par  un  grand  nom- 
bre d'astronomes.  Des  doutes  ayant  surgi  au  sujet  de 
cette  supériorité,  Dreyer,  puis  Louis  Struve,  fils  d'Otto, 
firent  une  nouvelle  détermination,  cette  dernière  fondée 
sur  les  catalogues  pour  1755  et  4855  publiés,  après  une 
revision  laborieuse  et  des  observations  personnelles  dans 
l'hémisphère  austral,  par  les  soins  d'Auwers. 

Mais  il  manque  à  ces  déterminations  d'avoir  tenu 
compte  de  la  troisième  cause  de  la  variation  de  position 
dans  les  lieux  observés. 

Nul  astronome  n'ignore  que  le  mouvement  systéma- 
tique produit  une  aberration,  tout  comme  le  mouvement 
annuel. 

Seulement,  ont-ils  dit  tous,  cette  aberration  est  une 
qualité  constante  pour  chaque  étoile,  et  ne  peut,  par 
conséquent,  nullement  être  déterminée  par  l'observation. 

Ils  reconnaissent  cependant  que  cette  aberration  varie 
d'une  étoile  à  une  autre,  c'est-à-dire  avec  la  position  de 
l'étoile.  Elle  n'est  donc  pas  la  même,  pour  une  même 
étoile,  en  1755  et  en  1855,  et  voilà  la  troisième  cause 
dont  ils  ont  omis  de  tenir  compte.  Seeliger  l'avait  soup- 
çonnée,—  c'est  une  justice  que  je  me  plais  à  lui  rendre,  — 
mais  ses  formules  sont  fort  incomplètes. 

Il  existe  donc  trois  termes  dans  la  variation  du  lieu 


(  659  ) 

moyen  truiie  étoile,  d'une  date  à  une  autre  date  très 
éloignée  :  le  terme  de  précession,  celui  de  la  parallaxe 
systématique,  et  celui  de  la  variation  de  l'aberration 
systématique  entre  ces  deux  dates. 

A  la  rigueur,  il  y  aurait  un  quatrième  terme,  prove- 
nant de  la  combinaison  de  la  parallaxe  et  de  l'aberra- 
tion systématiques;  mais  ce  dernier  peut  être  considéré 
comme  négligeable,  sauf  peut-être  pour  les  circompo- 
laires. 

Et  voilà  pourquoi  une  nouvelle  détermination  de  la 
précession,  sur  de  nouvelles  bases,  s'impose  absolument. 
Alors  seulement,  le  catalogue  d'Auwers  aura  produit  tous 
les  fruits  que  l'auteur  était  en  droit  d'attendre  de  son 
œuvre,  et  l'on  aura,  non  seulement  une  détermination 
véritablement  correcte  de  la  précession,  mais  on  con- 
naîtra, en  même  temps,  exactement  la  vitesse  et  la 
direction  du  mouvement  systématique.  Alors  aussi  on 
pourra  recbercher  s'il  existe  un  mouvement  galactique, 
c'est-à-dire  un  mouvement  général  des  étoiles  de  la  voie 
lactée  autour  d'un  centre  inconnu,  question  dont  plusieurs 
astronomes,  Màdler,  Schônfeld  et  L.  Struve,  entre  autres, 
se  sont  occupés. 

On  voit  que  l'astronomie  sphérique  eût  déjà  pu  faire 
quelques  progrès  assez  marqués,  si  les  astronomes  de  ce 
siècle  avaient  été  aussi  bons  mathématiciens  qu'ils  étaient 
bons  observateurs,  et  s'étaient  bornés  à  développer  ou  à 
compléter  les  formules  absolument  rigoureuses  de 
Laplace-Bessel,  au  lieu  d'y  substituer  d'autres  formules 
qui  sont  absolument  incorrectes. 

Ces  progrès  peuvent  se   résumer   en  quelques  lignes: 

Déflnition  d'une  heure,  non  pas  à  1res  peu  prés,  mais 
rigoureusement  uniforme  ; 


(  000  ) 

Développement  des  formules  de  la  nutation  diurne  et 
détermination  de  ses  constantes; 

Calcul  correct  des  termes  du  second  ordre,  tant  de  la 
nutation  que  de  l'aberration,  et  particulièrement  des 
termes  périodiques  et  séculaires  de  l'aberration  systéma- 
tique, au  moyen  desquels  on  parviendra  à  déterminer 
exactement  la  vitesse  et  la  direction  du  mouvement  du 
Soleil  dans  l'espace  (*). 

Indépendamment  des  perfectionnements  apportés,  à 
l'aurore  du  XX''  siècle,  aux  formules  usitées,  celui-ci 
aura  une  tâche  plus  considérable  à  accomplir.  Il  devra 
établir,  comme  il  a  été  dit,  les  formules  du  mouvement 
de  rotation  de  l'écorce  solide  du  globe,  qui  jetteront  un 
jour  tout  à  fait  nouveau  sur  ces  variations  de  latitude, 
objet  bien  digne  de  la  grande  préoccupation  des  astro- 
nomes en  ces  dernières  années  du  XIX*"  siècle,  qui  se 
clôturera,  sans  doute,  par  un  grand  point  d'interrogation 
relativement  aux  causes  de  ce  phénomène. 

L'une  des  causes  les  plus  dilïiciles  à  analyser  réside 
dans  les  déviations  périodiques  de  la  verticale,  qu'on  a 
traitées  un  peu  trop  superficiellement. 

J.  Plantamour,  frère  du  célèbre  astronome  et  géodé- 
sien,  les  avait  étudiées  près  de  Genève,  et  avait  cru  pou- 
voii'  les  attribuer  à  des  mouvements  du  sol,  occasionnés 
par  des  variations  de  température.  La  conclusion  tirée 
par  Becker  de  ses  observations  à  Neufchâtel  a  été  iden- 
tique. 


(*)  Ce  n'est  pas  ici  le  lieu  d'entrer  dans  des  détails  techniques  sur 
ces  différents  points.  On  les  trouvera  exposés  complètement  dans  la 
Revision  des  constantes  de  l'astronomie  stellaire.  Bruxelles,  Hayez, 
1896. 


(  661   ) 

On  n'a  malheureusement,  à  la  suite  de  ces  deux 
déductions,  accordé  aucune  importance  aux  observations 
de  nadir  faites  à  Abbadia,  avec  une  persévérance  digne 
de  lous  les  éloges,  par  A.  d'Abbadie,  qui  a  généreuse- 
ment doté  son  petit  observatoire,  afin  que  ses  travaux  y 
fussent  continués  après  sa  mort. 

La  question  est  aujourd'hui  étudiée  dans  plusieurs 
observatoires  d'Allemagne,  au  moyen  du  pendule  extrê- 
mement sensible  de  von  Rebeur-Paschvvitz,  et  sera 
peut-être  poursuivie  à  Uccle,  grâce  à  la  généreuse  inter- 
vention d'un  prolecteur  très  éclairé  des  sciences. 

On  sera  surpris,  quebpie  jour,  du  peu  d'importance 
qu'on  a  attaché  assez  longtemps  aux  déviations  pério- 
diques de  la  verticale,  en  présence  de  l'influence  relati- 
vement considérable  qu'on  sera  obligé  de  leur  reconnaître 
sur  les  coordonnées  apparentes  des  astres. 

L'explication  de  ces  déviations  est  cependant  limpide, 
quoique  la  formule  n'en  soit  pas  aisée  à  établir. 

Il  est  bien  certain,  vu  les  grandes  irrégularités  de 
l'écorce  terrestre,  que  le  centre  de  gravité  de  celle-ci  ne 
coïncide  pas  avec  celui  du  noyau. 

Supposons  l'écorce  fixe,  et,  pour  cela,  animons  la 
Terre  tout  entière  d'un  mouvement  égal  et  directement 
contraire  au  mouvement  diurne.  11  en  résultera  que  le 
centre  de  gravité  du  noyau  effectuera,  en  un  jour,  une 
révolution  entière,  rétrograde,  autour  de  l'axe  de  rotation 
de  l'écorce.  Et,  comme  la  pesanteur  est  la  résultante  des 
attractions  des  centres  de  gravité  de  l'écorce  et  du  noyau, 
on  voit  clairement  que,  si  l'on  prend  pour  position 
moyenne  de  la  verticale  celle  qui  passe  par  le  premier 
de  ces  centres,  la  direction  de  la  verticale  réelle,  c'est- 
à-dire  de  la  résultante  des  attractions  des  deux  centres. 


(  6li-i  ) 
tournera  en  un  jour,  d'un  mouvement  rétrograde,  autour 
de  sa  position  moyenne,  et  que  le  grand  axe  de  relli|)se 
qu'elle  décrit  sera  situé  dans  le  méridien. 

Probablement  existe-t-il  également  une  période  an- 
nuelle de  ces  déviations. 

Car  si  les  masses  du  noyau  et  de  l'écorce  sont  sensi- 
blement différentes,  il  en  résultera  des  différences  plus 
ou  moins  considérables  entre  les  vitesses  de  leurs  centres 
de  gravité,  et  elles  se  traduiront  surtout  par  des  variations 
annuelles  de  position  de  l'un  de  ces  centres  par  rapport 
à  l'autre. 

Enfin,  si,  comme  l'alfirment  W.  Tbomson  et  G.  Dar- 
win, l'écorce  est  élastique,  il  y  aura  non  seulement  des 
déviations  annuelles,  mais  encore  des  déviations  men- 
suelles de  la  verticale. 

Je  n'en  parle  ici  qu'au  point  de  vue  des  variations  de 
latitude,  mais  il  va  de  soi  qu'elles  exercent  également 
une  influence  dans  la  détermination  de  l'ascension 
droite. 

On  voit  que  l'observation  de  ces  déviations  mérite,  à 
divers  litres,  d'être  assidûment  poursuivie. 

Sans  doute,  il  existe  d'autres  causes  de  variation  appa- 
rente des  latitudes;  et  il  va  de  soi  que  toute  erreur  sur 
la  déclinaison  de  l'étoile  observée  en  est  une. 

Peut-être  chacune  de  ces  dernières,  prises  isolément,  ne 
dépasse-t-elle  guère  en  importance  la  nutation  diurne, 
dont  on  n'a  pas  encore  tenu  compte  dans  les  réductions. 
Et  de  là  précisément  la  grande  difficulté  de  leur  détermi- 
nation. 

Dans  tous  les  cas,  c'est  aux  observations,  discutées 
scrupuleusement  à  l'aide  des  formules  correctes  du  mou- 
vement de  rotation   de  l'écorce  terrestre,   qu'il  faudra 


(  603  ) 

recourir,  pour  établir  les  valeurs  des  constantes  qui 
figurent  dans  les  termes,  plus  nombreux  qu'on  ne  le 
suppose  très  généralement,  des  variations  de  la  lati- 
tude. 

Et  s'il  convient  de  louer  sans  réserve  l'initiative  clair- 
voyante de  M.  Foerster,  à  laquelle  la  science  est  rede- 
vable de  ces  nombreuses  observations  faites  dans  les  deux 
mondes,  durant  ces  derniers  lustres,  et  de  la  belle  décou- 
verte de  Chandler,  qui  en  a  été  la  conséquence,  il  nous 
sera  permis  peut-être  d'indiquer  les  observations  qu'on 
pourrait  joindre  très  utilement  à  ces  dernières,  afin 
d'arriver,  aussitôt  que  possible,  à  la  détermination  des 
différents  termes  indiqués  par  la  théorie  du  mouvement 
de  rotation  de  l'écorce  terrestre. 

Tous  les  efforts  des  astronomes,  et  même  de  l'Associa- 
tion géodésique  internationale,  se  sont  portés  vers  la 
recherche  empirique  du  mouvement  du  pôle  astrono- 
mique, question  spéculative  certainement  intéressante, 
mais  qu'un  Kepler  ne  parviendrait  pas  à  résoudre,  tant 
les  éléments  en  sont  compliqués,  s'il  ne  pouvait  s'aider 
de  la  théorie. 

Les  astronomes  disent  :  Puisque  c'est  autour  du  pôle 
astronomique  que  la  Terre  tourne,  c'est  à  l'équateur 
astronomique  que  doivent  être  rapportées  nos  coordon- 
nées. 

Mais  c'est  dans  ce  plan  également  que  devraient  alors 
être  calculées  les  coordonnées  que  l'on  prétend  y  obser- 
ver. Et  l'on  ne  s'est  pas  aperçu  que,  tandis  qu'Oppolzer 
rapporte  la  latitude  au  pôle  astronomique,  l'ascension 
droite  et  l'heure  sont  rapportées,  dans  ses  formules, 
incorrectes  du  reste,  à  l'équateur  et  au  méridien  géogra- 
phiques. 


(  664  ) 

C'est  donc  à  l'axe  d'inertie  de  l'écorce  terrestre  que 
j'ai  rapporté  les  formules  relatives  à  sa  nutation. 

Empruntant  au  savant  mémoire  inédit,  dont  j'ai  parlé 
ci-dessus,  les  équations  dilïerentielles  du  mouvement  de 
l'écorce,  et  y  introduisant  une  hypothèse  qui,  si  même 
elle  n'est  pas  entièrement  réalisée  dans  la  nalure,  permet 
du  moins  d'ahoutir  à  des  loimules  absolument  suflisantes 
dans  la  pratique  astronomique,  je  suis  parvenu  à  intégrer 
ces  équations  aussi  rigoureusement  qu'on  a  pu  le  faire 
pour  celles  du  mouvement  de  la  Terre  solide. 

Dans  cette  lecture,  je  dois  me  borner  à  résumer  les 
résultats  auxquels  j'ai  abouti  : 

1"  La  nutation  eulérienne  proprement  dite,  celle  de 
la  Terre  solide  ou  de  mon  ellipsoïde  fictif,  existe  égale- 
ment pour  l'écorce.  Sa  période  est  de  504  jours; 
ï^ii  2°  L'écorce  est  sujette  à  une  deuxième  nutation  de 
caractère  eulérien,  dont  la  période  dépend  de  ses  moments 
d'inertie,  comme  la  période  eulérienne  proprement  dite 
dépend  de  ceux  de  la  Terre  ou  de  mon  ellipsoïde  fictif, 
et  ne  peut  donc  être  déterminée  que  par  voie  empirique. 

J'ai  admis,  et  tous  les  astronomes  seront  d'accord  avec 
moi,  que  cette  période  est  celle  de  451  jours,  génialement 
découverte  par  Chandler,  et  à  l'existence  de  laquelle  je 
n'ai  pas  cru,  aussi  longtemps  que  je  n'en  avais  pas  une 
explication  théorique  satisfaisante  ; 

5"  A  cette  nutation  chandlérienne  vient  s'ajouter,  pour 
l'écorce,  une  nutation  bradiéenne  (c'est-à-dire  sans  carac- 
tère diurne)  de  même  période  (*); 

(*)  En  recherchant  ce  terme  dans  la  série  des  latitudes  déterminées 
par  Peters,  j'ai  trouvé  0".07  pour  son  coefficient  et  réduit  l'erreur 
probable  d'une  observation  à  la  moitié  de  sa  valeur;  c'est  un  argu- 


(  (565  ) 

Les  coefficients  de  ces  trois  nutations  sont  des  con- 
stantes arbitraires; 

4°  L'axe  de  l'écorce  est,  de  pins,  soumis  à  la  nutation 
diurne,  dont  j'ai  exposé  les  formules  il  ya  quinze  ans  (*). 

Dans  les  modifications  que  notre  théorie  apporte  aux 
formules  usuelles  de  la  nutation,  n'apparaît  aucun  terme 
solaire  nouveau,  mais  des  corrections  seulement  aux 
coefficients  des  termes  connus;  comme  ces  coefficients 
sont  déjà  faibles  quant  aux  termes  annuels,  et  que,  au 
contraire,  la  recherche  dont  je  viens  de  parler  (**),  ainsi 
que  celles  de  Chandier,  du  reste,  indiquent  la  nécessité  de 
l'introduction  d'un  terme  solaire  nouveau  assez  impor- 
tant; comme  on  ne  peut  pas  admettre  que  la  constante 
de  l'aberration  serait  en  défaut  ou  en  excès  de  0",1,  je 
ne  vois  d'autre  cause  de  l'existence  du  terme  solaire  que 
j'ai  trouvé  moi-même,  que  dans  les  déviations  périodiques 
de  la  verticale  (***). 

Je  ne  suis  pas  en  mesure,  actuellement,  de  donner  les 


ment  décisif  en  faveur  de  l'existence  de  ce  terme,  et  celle-ci  est  la 
preuve  la  plus  frappante  de  la  fluidité  intérieure  du  globe,  car  un  terme 
semblable  ne  peut  pas  se  rencontrer  dans  la  théorie  du  mouvement 
d'une  Teri'e  solide.  Mais,  en  même  temps,  j'ai  trouvé  un  terme  annuel 
beaucoup  plus  important,  sans  caractère  diurne,  et  dont  nulle  théorie 
n'a  soupçonné  l'existence.  (Voir  le  Bulletin  d'octobre  1898.) 

(*)  Théorie  des  mouvements  diurne,  annuel  et  séculaire  de  l'axe  du 
monde.  Bruxelles,  Hayez,  ISS'^,  1894. 

("")  Voir  la  note  de  la  page  précédente. 

(***)  Il  est  possibh^,  comme  je  l'ai  fait  voir  dans  mon  Essai  sur  la 
variation  des  latitudes,  que  l'accumulation -des  neiges  hivernales  sur 
notre  hémisphère  occasionne  une  variation  de  l'axe  d'inertie  de 
l'écorce,  et  par  suite,  de  la  latitude,  même  rapportée  à  cet  axe.  3Iais 
cette  variation  est  éliminée  dans  les  différences  des  latitudes  {s  et  /:, 
d'où  j'ai  déduit,  pour  le  terme  solaire,  le  coefficient  0",07. 


(  666  ) 

formules  théoriques  de  ces  déviations,  non  plus  que  celles 
des  variations  de  latitude  occasionnées  par  les  déforma- 
tions élastiques  de  l'écorce. 

Il  y  a  lieu  d'espérer  que  cette  lacune  sera  bientôt  com- 
blée. Auparavant,  il  ne  sera  guère  possible  de  déduire 
des  observations  une  valeur  quelque  peu  correcte  de  la 
constante  de  l'aberration,  à  cause  surtout  de  la  difficulté 
d'exprimer  empiriquement  les  termes  solaires  provenant 
des  déviations  périodiques  de  la  verticale. 

D'après  ce  qui  vient  d'être  exposé,  on  voit  bien  claire- 
ment que,  puisqu'on  ne  peut  obtenir  de  formules  cor- 
rectes en  astronomie  sphérique,  qu'en  prenant  l'axe  ou 
le  pôle  d'inertie  pour  axe  ou  pour  pôle  de. référence,  c'est 
relativement  à  ce  pôle,  et  non  au  pôle  instantané,  que 
doit  être  délinie  la  latitude;  on  voit  alors  aussi  qu'une 
partie  notable  des  variations  de  latitude  (rapportée  à  ce 
dernier  pôle)  se  traduit  par  des  variations  de  déclinaison 
(rapportée  au  pôle  d'inertie),  une  autre  partie  résultant, 
pour  nous,  des  déviations  périodiques  de  la  verticale. 

Seules  les  variations  météorologiques  ou  élastiques  du 
pôle  d'inertie  de  l'écorce  terrestre  seraient  des  variations 
réelles  de  la  latitude,  rapportée  à  l'un  ou  l'autre  pôle 
indifféremment. 

C'est  cette  opinion  que  j'ai  défendue  depuis  huit 
ans  (*). 

Elle  a  été  combattue  par  un  astronome-géomètre  très 
distingué  (**),  qui  n'a  jamais  répondu  nia  ma  réplique  (***) 


(*)  Comptes  rendus,  mai  1890. 
(*')  Tisserand,  B.  A.,  1890. 

(*")  Bull,  de  l'Acad.  roij.  de  Belgique,  3«  sér.,  t.  XXIII,  p.  84,  1893. 
Réponse  à  M.  Tisserand. 


(667  ) 

ni  à  un  article  postérieur  (*),  et  a  néanmoins  pris,  comme 
j'ai  soutenu  qu'on  devait  le  faire  (**),  l'axe  d'inertie  pour 
axe  de  référence  dans  ses  formules  du  mouvement  de 
rotation  de  la  Terre. 

Des  formules  correctes  du  mouvement  de  rotation  de 
l'écorce  terrestre,  résultent  deux  conséquences  de  la  plus 
haute  importance  à  l'égard  de  la  détermination  des  diffé- 
rents termes  de  la  nutation. 

Les  deux  nutalions  eulérienne  et  chandlérienne  s'éli- 
minent dans  la  moyenne  des  ascensions  droites  ou  des 
déclinaisons  d'une  étoile  observée  dans  le  méridien 
tixe  à  deux  passages  consécutifs  (.set  i),  et,  par  suite,  dans 
la  différence  des  latitudes  déduites  de  ces  deux  passages. 
Il  en  est  de  même  des  déviations  diurnes  de  la  verticale, 
ainsi  que  des  variations  météorologiques  ou  élastiques  du 
pôle  d'inertie. 

C'est  de  semblables 'combinaisons  d'observations  qu'on 
peut  donc  espérer  les  meilleurs  résultats,  quant  à  la 
détermination  des  constantes  de  la  nutation  diurne  ou 
de  l'aberration  (***)  et  quant  aux  corrections  à  apporter 
aux  termes  de  la  nutation  bradléenne. 


(*)  Acta  Muthematica,  1892. 

(*')  Annuaire  de  l'Observatoire  royal,  1890  à  1897. 

('">  Voir  ces  déterminations  dans  la  Révision  des  constantes  de 
rastronomie  stellaire.  —  Je  ferai  remarquer  à  ce  sujet  que  Chandler  a 
déduit  (A. .  J,  n"  293),  comme  moi-même  {Révision  des  constantes,  etc.1, 
des  observations  de  latitude  de  Gyldén,  les  meilleures  peut-être 
qu'on  possède,  une  correction  négative  de  la  constante  de  l'aberration 
de  Struve.  Mais  si  je  suis  entièrement  d'accord  avec  lui  (A.  J.,  n"  427) 
sur  l'inopportunité  de  modifier  actuellement  cette  constante,  je 
réserve  absolument  mon  opinion  quant  au  sens  de  la  correction  qu'il 
y  aura  lieu  d'y  apporter,  lorsque  les  termes  solaires  dont  j'ai  parlé 
seront  suffisamment  connus. 


(  668  ) 

Au  contraire,  cette  dernière  nulation,  ainsi  que  l'aber- 
ration, s'éliminent  dans  les  différences  des  ascensions 
droites  ou  des  déclinaisons,  et,  par  suite,  dans  la  moyenne 
des  latitudes  obtenues  à  ces  deux  passages.  Il  en  serait 
naturellement  de  même  pour  deux  observations  d'une 
même  étoile,  faites  à  douze  heures  d'intervalle,  en  deux 
lieux  différents. 

Dans  les  formules  correctes  de  la  nutation  (rapportées 
à  l'axe  d'inertie),  celle-ci  existe  donc,  quant  aux  termes 
dont  l'existence  n'a  été  bien  clairement  révélée  que  par 
les  observations  de  latitude  faites  durant  ces  dernières 
années  (eulérien,  chandlérien,  annuel),  aussi  bien  en  lon- 
gitude qu'en  obliquité,  en  ascension  droite  qu'en  décli- 
naison ;  et  c'est  là  un  point  qui  a  été  nié  ou  négligé  par 
tous  les  astronomes  (*). 

Depuis  bien  des  années,  nous  avons  signalé  ces  deux 
conséquences  de  la  théorie,  que  Chandier  a  appliquées 
dans  ses  laborieuses  recherches  sur  la  variation  des  lati- 
tudes, quoi  qu'il  ne  semble  pas  encore  avoir  admis  com- 
plètement notre  manière  de  voir,  qui  consiste,  comme  il 
résulte  des  formules  de  la  nutation,  à  remplacer  les 
variations  de  la  latitude  rapportée  à  l'axe  instantané 
(pour  lequel  il  n'existe  pas  de  formules  correctes)  par  des 


(*)  Les  expressions  de  ces  variations  sont,  dans  le  méridien,  quant 
aux  deux  nutations  eulérienne  et  chandiérienne  : 

col  ?SoL  =  ±:  rsin  (/3,  -4-  ;3/)  qr  y'  sin  (5'  -\-  0'1), 

A^  =  =F  rcos  (3,  -+-  31)  ±  r'  cos  (3;  -t-  d'i), 

les  signes  supérieurs  et  inférieurs  correspondant  aux  passages  de 
même  nom.  {Théorie  du  mouvement  de  rotation  de  l'écorce  solide  du 
globe.  Bruxelles,  Hayez,  1898,  p.  34.) 


(  669  ) 

variations  de  Ja  déclinaison  rapportée  à  l'axe  d'inertie 
(pour  lequel  les  formules  sont  absolument  correctes)  et 
par  des  déviations  périodiques  de  la  verticale  (abstraction 
faite  des  variations  réelles  qui  pourraient  provenir  d'un 
déplacement  de  l'axe  d'inertie). 

Cette  négation  des  variations  de  la  latitude  rapportée 
au  pôle  d'inertie,  sur  laquelle  j'ai  déjà  appelé  l'attention 
des  astronomes,  il  y  a  six  ans,  à  cette  même  tribune, 
diminue-t-elle  en  rien  le  mérite  de  la  découverte  de  Ber- 
lin? Évidemment  non.  Que  cette  découverte  se  traduise 
par  l'expression  de  varialions  de  la  lalitude,  rapportée  au 
pôle  instantané,  ou  par  celle  de  varialions  en  obliquité  et 
en  longitude  relatives  à  l'axe  d'inertie,  elle  n'en  aura  pas 
moins  grandement  contribué  à  combler  le  fossé  qui 
sépare  l'astronomie  du  XIX'"  siècle  de  celle  du  XX''. 

Je  dirai  même  que  le  retentissement  de  cette  décou- 
verte, et  de  celle  de  Chandler,  dans  le  monde  entier,  a 
excité  en  moi,  plus  encore  peut-être  que  celle  de  la  nuta- 
tion  diurne,  le  désir  d'aboutir  à  l'établissement  définitif 
des  formules  du  mouvement  de  rotation  de  l'écorce 
terrestre. 

Une  procbaine  aurore  montrera  la  solution  théorique 
complète  de  cette  question,  que  la  lin  du  siècle  a  léguée 
au  siècle  futur  comme  une  énigme  indéchiffrable.  Et 
quand  cette  solution  définitive  aura  été  confirmée  par  les 
faits,  on  s'étonnera  à  bon  droit,  tant  on  la  trouvera  alors 
limpide,  que  les  meilleurs  esprits  se  soient  refusés  si 
longtemps  à  l'admettre. 

Une  tâche  complémentaire,  qui  incombe  également  à 
nos  successeurs  immédiats,  peut-être  même  à  nos  con- 
temporains, sera  la  détermination  plus  correcte  d'un 
certain  nombre  de  constantes  fondamentales,  telles  celles 


(  070  ) 
de  la  précession,  de  raberration,  de  la  parallaxe  solaire 
et  des  nutalions  à  courte  période. 

Ces  constantes  connues,  l'astronomie  spbérique  du 
XX®  siècle  sera  édifiée. 

11  m'eût  été  doux  de  pouvoir  poursuivre,  dans  les 
publications  de  l'Observatoire,  ma  revision  des  constantes 
de  l'astronomie  stellaire,  tâcbe  pour  l'accomplissement 
de  laquelle  j'ai  accepté,  un  peu  malgré  moi,  la  direction 
de  l'établissement. 

Des  influences  administratives,  absolument  inexcusa- 
bles en  matière  scientifique,  m'en  ont  empêché,  malgré 
le  zèle  dévoué  de  mes  astronomes,  sur  le  précieux  con- 
cours desquels  je  suis  très  heureux  de  pouvoir  compter 
encore  aujourd'hui. 

Eux,  dont  la  compétence  en  ces  matières,  qu'ils  ont 
scrutées  avec  moi  pendant  douze  ans,  n'est  pas  douteuse, 
ont  eu  foi  dans  mon  œuvre,  et  leurs  travaux  ont  été 
appréciés  à  l'étranger  (*), 

Une  administration  incompétente  l'a  considérée  comme 
une  chimère,  et  j'ai  dû  renoncer  à  les  y  faire  collaborer. 

J'en  étais  donc  réduit  à  la  poursuivre  seul,  charge 
écrasante,  jointe  aux  devoirs  multiples  qui  incombent 
au  directeur  d'un  observatoire  à  la  fois  astronomique, 
météorologique  et  magnétique. 

Il  ne  me  restait  qu'à  choisir  :  ou  continuer  mon 
œuvre  et  donner  ma  démission,  ou  conserver  la  direc- 
tion en  abandonnant  mon  œuvre. 

C'est  le  premier  parti  que  j'ai  pris,  et  je  n'ai  pas  lieu 
de  m'en  repentir,  quoi  qu'il  arrive. 


(*)  GiiNTHER,  Physique  géogrnpliiqice,  2*  éd.,  pp.  270  et  350. 
ScHMiDT,  Jahresber.  des  Wiirt.  Naturiv.  Vereins,  1897,  p.  240. 


^      (  671  ) 

Les  loisirs  de  la  retraile  m'ont  permis  de  faire  faire, 
aux  questions  dont  je  poursuis  l'étude,  le  pas  le  plus 
décisif  qu'elles  aient  franchi  depuis  seize  ans. 

Et  si  les  publications  de  l'Observatoire  ne  me  sont  plus 
accessibles  aujourd'hui,  du  moins,  grâce  au  bienveillant 
concours  de  mes  confrères,  celles  de  l'Académie  me  le 
restent-elles,    et   la   science   ni   le    pays   n'y   perdront 

rien. 

Grivegnée  (l^iége),  décembre  1898. 


ANNEXE. 


Sur  la  théorie  de  la  variation  des  latitudes. 

Jusqu'en  ces  derniers  temps,  je  me  suis  toujours  refusé 
à  admettre  les  formules  que  Chandier  avait  déduites  d'un 
grand  nombre  d'observations,  relativement  à  la  variation 
des  latitudes,  parce  que  ces  formules  me  paraissaient  tout 
à  fait  injustifiables  en  théorie  :  la  période  de  431  jours 
me  semblait  inexplicable,  et  le  terme  annuel,  dont  l'ar- 
gument dépend  de  la  longitude  du  Soleil  et  de  celle  de 
l'observateur,  plus  inexplicable  encore  (*). 

Je  ne  pensais  pas  alors  qu'il  put  exister,  dans  la  nuta- 
tion  de  l'écorce  terrestre,  des  termes  essentiellement 
différents  de  ceux  qui  se  rapportent  à  la  Terre  solide. 

Je  me  trompais. 


C)  Quoique  Chandier,  depuis  la  publication  de  mon  Essai  sur  la 
variation  des  latitudes,  ait,  en  ses  dernières  formules,  supprimé  la 
longitude  de  l'observatoire  dans  l'argument  de  son  terme  annuel,  je 
crois  néanmoins  très  explicable  la  présence  de  ce  terme,  sous  sa 
première  forme. 


(  672  )       « 

Lorsque  j'ai  établi  les  formules  <lu  mouvement  de 
rotation  de  l'éeorce  terrestre,  je  suis  arrivé  aux  résultats 
suivants  : 

La  précession  et  le  terme  nodal  de  la  nutation  sont  les 
mêmes  pour  l'éeorce  que  pour  la  Terre  solide,  ainsi  que 
la  nutation  eulérienne  de  304  jours. 

Certains  termes  de  nutation  peuvent  être  altérés,  et 
dans  leur  forme,  et  dans  leur  grandeur,  par  les  actions 
mutuelles  de  l'éeorce  et  du  noyau.  La  théorie,  aidée  de 
l'observation,  découvrira  quels  sont  ces  termes,  et  de 
quelle  quantité  ils  seront  altérés. 

Ces  actions  mutuelles  introduisent,  de  plus,  un  nou- 
veau terme  de  forme  eulérienne,  et  d'une  période  de 
-^  jours,  «2  *^''iiit  ""  coelTicient  qui  dépend  des  actions 
mutuelles,  ainsi  qu'un  terme,  non  eulérien,  de  même 
période. 

Le  premier  de  ces  termes  me  semble  être  indubitable- 
ment celui  de  Chandler. 

S'il  en  est  ainsi,  le  coefficient  a^,  dépendant  des 
actions  mutuelles,  est  connu  ;  alors  aussi  on  connaît  le 
dénominateur  N  =  u^«^  (1  -^-  0^2)  —  2  a^,  qui  intervient 
dans  le  coefficient  de  tous  les  termes  de  nutation  (*). 

Et  l'on  voit  que  ce  sont  les  termes  dépendants  de  la 
simple  longitude  du  Soleil  qui  seront  les  plus  altérés  dans 
les  expressions  de  la  nutation  de  l'éeorce. 

Ceci  explique  les  discordances  considérables  entre  les 
diff'érentes  déterminations  de  la  constante  de  l'aberration 
qui  ont  été  faites  depuis  Delambre  et  F.-W.  Struve 
jusqu'à  nos  jours. 

(')  Voir  Théorie  du  mouvement  de  rotation  de  l'éeorce  solide  du  globe. 
Bruxelles,  Hayez,  1898. 


(  673  ) 

Mais  ceci  n'explique  pas  encore  la  présence  du  second 
terme  de  Cliandler  dans  l'expression  de  la  variation  des 
latitudes. 

Dans  la  théorie  du  mouvement  de  l'écorce  terrestre, 
dont  je  viens  de  résumer  les  principaux  résultats,  j'ai 
supposé,  à  cause  de  la  difliculté  du  problème,  que  les 
centres  de  gravité  du  noyau  et  de  l'écorce  coïncident. 

Or,  si  l'on  peut  admettre,  quant  à  celui-là,  que  son 
centre  de  gravité  coïncide  avec  on  centre  de  ligure,  il 
n'en  est  pas  de  même  quant  à  celle-ci,  à  cause  de  ses 
irrégularités  considérables. 

Il  ne  sera  pas  hors  de  propos  de  signaler,  à  ce  sujet, 
une  concordance  tout  à  fait  remarquable  entre  une 
déduction  à  priori,  relative  à  l'épaisseur  de  l'écorce,  et  le 
résultat  déduit  d'un  très  grand  nombre  d'observations. 

On  sait  que  M.  Faye  a  énoncé  cette  opinion  judicieuse 
que  l'écorce  doit  être  plus  épaisse  sous  les  mers  que  sous 
les  continents,  parce  que  le  refroidissement  y  a  été  plus 
considérable  (*). 

C'est  donc  au  sein  de  l'océan  Pacifique  que  doit  se 
trouver  l'axe  du  plus  petit  moment  d'inertie  de  l'écorce, 
et,  par  suite,  le  méridien  auquel  nous  avons  donné  le 
nom  de  premier  méridien.  Les  déterminations  que  nous 
avons  faites  de  sa  position  (**),  qui  est  une  des  deux 
constantes  de  la  nutation  diurne,  le  placent  à  Poulkovo, 
c'est-à-dire  entre  les  îles  Marquises  et  les  îles  de  la 
Société,  au  beau  milieu  du  Pacifique;  ce  qui  confirme 


(*)  Comptes  rendus,  12  janvier  1891. 

(")  Révision  des  conslnntes  de  l'astronomie  stellaire,  1896.  (Extrait 
du  t.  VII  des  Annales  astronomiques  de  l'Observatoire  royal  de 
Belgique.) 

5"'*    SÉRIE,    TOME    XXXVl.  45 


(  674) 
absolument  les  vues  de  M.  Faye  et  fournit  une  jireuve,  à 
ajouter  à  toutes  les  autres,  de  la  réalité  de  la  nutation 
diurne,  et,  par  conséquent,  de  l'existence  d'une  écorce 
solide,  indépendante  du  noyau  dans  les  mouvements  à 
courte  période. 

Nous  devons  donc  admettre  que  le  centre  de  gravité  de 
l'écorce  ne  coïncide  pas  avec  celui  du  noyau. 

Examinons  les  conséquences  de  ce  fait. 

Considérons  un  lieu  déterminé  de  la  Terre.  La  gra- 
vité, en  ce  lieu,  sera  la  résultante  des  attractions  du 
centre  de  gravité  de  l'écorce  et  de  celui  du  noyau.  Nous 
appellerons  verticale  moyenne  la  direction  de  la  pre- 
mière de  ces  deux  attractions. 

Quelle  sera  la  direction  réelle  de  la  verticale  et  à 
quelles  déviations  sera-t-elle  sujette? 

Pour  nous  en  faire  une  idée  exacte,  rendons  l'écorce 
terrestre  fixe,  imprimons  à  tout  le  système  un  mouve- 
ment égal  et  de  sens  contraire  au  mouvement  diurne  de 
celle-ci,  et  faisons  provisoirement  abstraction  de  son 
mouvement  de  révolution  autour  du  Soleil. 

Dès  lors,  le  centre  de  gravité  du  noyau  tournera  autour 
de  l'axe  de  rotation  de  l'écorce,  d'un  mouvement  égal  et 
directement  contraire  au  mouvement  diurne. 

Il  en  résulte,  à  l'évidence,  qu'en  tout  lieu  la  verticale 
décrira,  en  un  jour  sidéral,  d'un  mouvement  rétrograde, 
un  cône  autour  de  sa  position  moyenne,  résultat  confirmé 
par  les  observations  du  nadir;  que  c'est  dans  le  méridien 
que  la  direction  de  l'attraction  du  noyau  fera  le  plus 
grand  et  le  plus  petit  angle  avec  celle  de  l'attraction  de 
l'écorce,  et,  par  suite,  que  les  déviations  de  la  verticale 
seront,  en  un  môme  lieu,  les  plus  considérables,  fait 
également  confirmé  par  l'observation  ;  que  c'est  dans  le 


{  67o  ) 
premier  vertical  qu'elles  seront  les  plus  faibles;  qu'elles 
dépendent  de  la  latitude  du  lieu,  et  qu'aux  pôles  la  verti- 
cale décrira  un  cône  circulaire  droit  autour  de  sa  position 
moyenne;  qu'en  des  lieux  de  même  latitude,  les  dévia- 
tions seront  égales,  mais  qu'elles  se  présenteront  une 
heure  plus  tard  pour  un  lieu  situé  à  15''  de  longitude 
occidentale  du  premier. 

Or  toutes  les  déterminations  de  latitude,  et  notamment 
les  déterminations  directes,  reposant  sur  des  observations 
de  distances  zénithales,  ont  été  fondées  sur  l'hypothèse  de 
l'invariabilité  du  zénith. 

Puisque  celui-ci  est  variable,  il  en  résultera  des  varia- 
tions périodiques  de  la  latitude,  qui  affecteront  le  carac- 
tère eulérien,  c'est-à-dire  qu'elles  se  produiront  en  sens 
contraire  en  deux  lieux  situés  à  douze  heures  de  longitude 
l'un  de  l'autre. 

Telle  est  la  conséquence  des  déviations  diurnes  de  la 
verticale,  en  ce  qui  concerne  les  variations  de  latitude. 

Mais  les  déviations  de  la  verticale  ont  également  une 
période  annuelle,  comme  on  le  verra  ci-dessous. 

Imaginons,  en  effet,  le  noyau  solide  séparé  de  l'écorce 
par  une  couche  fluide.  Ces  deux  corps  diffèrent  notable- 
ment entre  eux  par  la  masse. 

De  plus,  les  distances  de  leurs  centres  de  gravité  à  celui 
du  Soleil  sont  très  généralement  différentes  entre  elles. 

Il  en  résulte  que  les  orbites  décrites  par  ces  deux  cen- 
tres autour  du  Soleil  ne  sont  pas  identiques,  et,  quoique 
le  noyau  soit  inclus  dans  l'intérieur  de  l'écorce,  la  flui- 
dité de  la  couche  interposée  permet  certains  mouvements 
de  leurs  centres  l'un  par  rapport  à  l'autre  ;  il  est  possible 
même  que  les  phases  lunaires  ne  soient  pas  sans  exercer 
une  légère  influence  sur  ces  mouvements. 


(  676  ) 

Il  est  certain,  toutefois,  que  c'estsurtoutdu  Soleil  qu'ils 
dépendront,  et  que  la  distance  mutuelle  de  ces  deux  cen- 
tres sera  une  fonction  périodique  de  la  longitude  de  cet 
astre. 

Il  en  sera  de  même  des  déviations  de  la  verticale,  qui 
dépendent  de  cette  distance  ;  et,  puisque,  comme  on  l'a 
vu  ci-dessus,  ces  déviations  affectent  également  le  carac- 
tère eulérien,  la  forme  en  sera,  pour  un  lieu  déterminé, 
celle  du  second  terme  de  Chandier,  sous  sa  première 
forme,  à  ceci  près  toutefois,  que  le  coefficient  dépendra 
de  la  latitude  de  l'observateur. 

Il  résulte  des  considérations  qui  viennent  d'être  expo- 
sées que  les  deux  termes  chandlériens  de  la  variation  des 
latitudes  existent,  mais  que  le  terme  eulérien  d'une 
période  de  504  jours  existe  également  ;  qu'il  existe  de 
plus  un  terme  rétrograde  d'une  période  de  431  jours  (*), 
mais  qui  n'affecte  pas  la  forme  eulérienne,  c'est-à-dire 
que  ce  terme  rentre  parmi  ceux  de  la  nutation  générale, 
qui  sont  les  mêmes  pour  tous  les  observatoires  ;  enfin, 
que  les  termes  solaires  de  nutation,  calculés  pour  une 
Terre  supposée  solide,  devront  être  un  peu  modifiés  pour 
l'écorce  terrestre. 

Mais  si  nous  nous  demandons  quels  sont,  parmi  ces 
termes,  dont  la  théorie  du  mouvement  de  l'écorce  terres- 
tre révèle  l'existence,  ceux  qui  indiquent  une  variation 
réelle  de  la  latitude  astronomique  (c'est-à-dire  rapportée 
au  pôle  instantané  de  rotation,  et  non  au  pôle  géogra- 
phique de  l'écorce),  nous  voyons  clairement  que  ce  sont 


(*)  L'existence  de  ce  terme  est  établie  par  les  différences  des  lati- 
tudes (5  et  i)  observées  par  Peters.  {Bull,  de  l'Acacl.  roy.  de  Belgique, 
3«  sér.,  t.  XXXVI,  octobre  1898.) 


(  677  ) 
les  deux  termes  eulériens  seuls,  celui  de  304  jours  et 
celui  de  431  jours;  que  le  terme  annuel  de  Chandler, 
malgré  sa  forme  eulérienne,  se  rapporte  à  des  déviations 
périodiques  de  la  verticale  et  produit  des  variations  du 
zénith,  et  par  suite  des  variations  apparentes  seulement 
de  la  latitude  astronomique.  Il  en  est  de  même,  à  plus 
forte  raison,  des  autres  corrections  que  la  théorie  du 
mouvement  de  l'écorce  apporte  aux  formules  de  nutation 
calculées  pour  une  Terre  solide,  et  qui  sont,  du  reste,  les 
mêmes  pour  tous  les  lieux  d'observation. 

Je  fais  ici  abstraction  des  termes  du  second  ordre  en 
général,  dont  j'ai  donné  les  expressions  dans  ma  Révision 
des  constantes  de  l'astronomie  steUaire,  et  qui  rentrent 
également  dans  la  catégorie  précédente. 

Il  est  encore  deux  causes,  plus  secondaires  probable- 
ment, de  variations  de  la  latitude. 

La  première  est  le  déplacement  du  pôle  d'inertie  de 
l'écorce  terrestre  par  suite  des  précipitations  atmosphé- 
riques et,  en  particulier,  de  l'accumulation  des  neiges 
pendant  l'hiver  sur  les  masses  continentales  de  l'hémi- 
sphère boréal.  J'ai  exposé,  dans  mon  Essai  sur  les 
variations  de  latitude,  les  effets  de  cette  cause  sur  les 
coordonnées  apparentes  des  astres  et,  par  suite,  sur  le 
calcul  de  la  latitude  déduite  des  observations  de  ceux-ci  (*). 

La  seconde  cause  est  l'élasticité  de  l'écorce  terrestre. 
On  conçoit  que  cette  cause  a  pour  effet  de  renfler  l'écorce 
aux  deux  extrémités  du  rayon  vecteur  mené  de  son  centre 
à  l'astre  (Soleil  ou  Lune),  et,  par  conséquent,  de  produire 


(*)  La  seconde  forme  donnée  par  Chandler  à  son  terme  annuel 
concorde  avec  la  formule  que  j'ai  déduite  de  cette  hypothèse.  \ Essai 
sur  la  variation  des  latitudes.  Extrait  de  I'Annuaire  pour  d894.) 


(678) 

des  dtWiations  de  la  verticale,  dont  l'effet  viendra  s'ajouter 
à  celui  des  déviations  qui  ont  été  signalées  ci-dessus. 

Le  théorie  des  déformations  élastiques  de  l'écorce  ter- 
restre n'a  pas  encore  été  faite.  Des  observations  suivies 
de  la  verticale  permettront  cependant  de  s'assurer  rapi- 
dement de  leur  existence;  car,  dans  ce  phénomène, 
l'intluence  prépondérante  de  la  Lune  se  manifestera  pro- 
bablement, comme  dans  les  marées,  par  l'existence  de 
périodes  mensuelles. 

Voici  donc  quelles  sont  les  raisons  théoriques,  bien 
plus  multiples  qu'on  ne  l'a  cru,  des  variations  de  latitude  : 

1°  L'existence,  dans  l'expression  de  la  nutation  géné- 
rale de  l'écorce  solide,  d'un  terme  à  mouvement  rétro- 
grade d'une  période  de  451  jours  :  la  nutation  générale 
est  celle  qui  affecte  l'axe  d'inertie  de  l'écorce,  et  qui  est 
la  même  pour  tous  les  points  de  celle-ci. 

2"  Les  corrections  à  apporter,  pour  l'écorce,  aux 
termes  solaires  de  la  nutation  générale,  calculés  dans 
l'hypothèse  de  la  solidité  du  globe. 

5°  Incertitude  de  la  constante  de  l'aberration. 

Ces  trois  premières  causes  ne  produisent  que  des 
variations  purement  apparentes  de  la  latitude,  qui  pro- 
viennent d'une  négligence  dans  le  calcul  de  la  déclinai- 
son de  l'étoile. 

11  en  est  de  même  de  la  quatrième  cause,  qui  se  rap- 
porte à  la  nutation  spéciale,  variant  avec  la  longitude  du 
lieu  de  l'observation  : 

4°  Négligence  des  termes  de  la  nutation  diurne. 

Celle-ci  produira  les  différences  apparentes  les  plus 
grandes  de  latitude  entre  deux  lieux  dont  les  longitudes 
diffèrent  entre  elles  de  0  heures. 

5''  La  nutation  eulérienne  proprement  dite,  d'une 
période  de  304  jours. 


V  <>"9  ) 

6"  La  nutation  chandiérienne,  de  même  caractère  que 
la  précédente,  mais  d'une  période  de  451  jours.  Ces  deux 
nutations  sont  des  causes  réelles  de  variations  de  la  lati- 
tude astronomique,  c'est-à-dire  rapportée  à  l'axe  instan- 
tané de  rotation  (*).  Elles  produisent  les  différences  les 
plus  grandes  entre  les  latitudes  de  deux  observatoires 
distants  de  douze  heures  en  longitude  l'un  de  l'autre. 

7°  Les  déviations  périodiques  de  la  verticale,  qui  pro- 
viennent de  la  non-coïncidence  des  centres  de  gravité  du 
noyau  et  de  l'écorce,  et  qui  présentent,  outre  une  période 
diurne,  une  période  annuelle.  Celles-ci  expliquent  la 
présence  du  premier  terme  annuel  de  Cliandler  dans 
l'expression  de  la  variation  des  latitudes. 

8°  Les  déviations  de  la  verticale  qui  proviendraient  de 
l'élasticité  de  l'écorce.  Celles-ci  produiraient  également 
des  variations  apparentes  de  latitude  à  double  période, 
l'une  diurne,  l'autre  annuelle  et  mensuelle. 

9°  Les  variations  annuelles  de  position  de  l'axe  d'iner- 
tie de  l'écorce,  provenant  des  précipitations  atmosphé- 
riques, et  dont  l'effet  maximum  se  fera  sentir,  en  latitude, 
sur  le  méridien  suivant  lequel  s'est  effectué  le  déplace- 
ment du  pôle,  tandis  qu'il  sera  nul  sur  le  méridien  situé 
à  90°  du  premier  (**). 

Parmi  ces  neuf  causes  théoriques,  dont  les  sept  pre- 


(*)  Il  a  été  démontré  que,  si  la  nutation  euléfienne  (ou  la  chandié- 
rienne^ disparait  correctement  de  la  nutation  en  obliquité  pour  se 
traduire  par  une  variation  de  la  latitivde,  elle  ne  disparait  pas  en 
longitude,  et  intervient  même,  chose  plus  grave,  dans  l'expression  de 
l'heure  sidérale.  [Vierteljahrsckrift,  1896;  Annuaire  de  l'Observatoire 
pour  1897.) 

(*')  L'existence  de  ces  dernières  variations  semble  confirmée  par  la 
seconde  forme  donnée  par  Chandler  à  son  terme  annuel. 


(  680  ) 

mières  sont  certaines,  les  deux  autres  simplement  proba- 
bles, la  plupart  n'occasionnent  que  des  variations  pure- 
ment apparentes  de  latitude,  qui  proviennent  d'une 
incorrection  dans  le  calcul  de  celle-ci  :  négligence,  soit 
de  quelques  termes  de  nutation  indiqués  par  la  théorie, 
soit  des  déviations  de  la  verticale,  ou  incorrection  de  la 
constante  de  l'aberration. 

Deux  termes  seulement  sont  relatifs  à  des  variations 
réelles  de  la  latitude  aslronomique  :  c'est  le  terme  eulérien, 
d'une  période  de  304  jours,  et  le  terme  chandiérien, 
d'une  période  de  451  jours. 

La  présence  du  terme  annuel  dans  les  premières  for- 
mules de  Chandler  s'explique,  comme  il  a  été  dit,  par 
les  déviations  périodiques  de  la  verticale,  qui  produisent, 
dans  les  distances  zénithales  des  étoiles,  des  variations 
dont  aucune  formule  n'a  encore  tenu  compte;  ces  varia- 
tions revêtent,  comme  les  deux  termes  précédents,  le 
caractère  eulérien,  c'est-à-dire  que  la  longitude  de  l'ob- 
servatoire intervient  dans  leur  argument. 

L'angle  horaire  interviendrait  également  dans  ces  trois 
termes,  s'il  s'agissait  d'observations  faites  hors  du  méri- 
dien, cas  dont  nous  ne  nous  occuperons  pas  ici. 

On  trouvera  plus  loin  les  expressions  de  la  plupart  des 
termes  précédents,  à  l'exception  de  ceux  qui  proviennent 
des  déviations  de  la  verticale,  et  que  l'on  doit  se  borner, 
actuellement,  à  rechercher  d'une  manière  empirique. 

Analysons  néanmoins  les  déviations  qui  sont  dues  à 
la  non-coïncidence  des  centres  de  gravité  du  noyau  et  de 
l'écorce. 

Nous  désignerons  ces  deux  centres  par  N  et  E,  le  lieu 
de  l'observation  par  L,  et  nous  poserons  LE  ==  R, 
LN  =  r,  EN  =  d,  sa  projection  sur  R,  égale  à  d\ 
l'angle  ELN  =  y. 


(681  ) 
Soit  I  l'attraction  de  E,  i  celle  de  N  sur  L,  G  leur 
résultante,  g  l'angle  qu'elle  fait  avec  R. 
En  projetant  G  sur  R.  on  a 


Or 


cos  r  ■■ 


»  =  I  — 


G  cos  g  =  \  -\-  i  cos  ■y. 


2Rr 


d'Y     d« 

I   -H  2- 

R/         R' 


en  se  bornant  aux  termes  du  second  ordre  en  d.   Donc 


.  ,  ,  d'Y  R  —  rf'        d^ 

G  cos  o  =  I     1  -t-     I  H-  2 , 

^  '  ^  R/         r  rM 


ou,  en  remplaçant 

R  — ri!' 


1  d'  -t-  d" 

par  1 ; — 

^  2       R^ 


Mais 


^/'        1  d"       5  r/' 

Gcosg  =  2II  -♦-2— H 

y  '  R        2  R'       2  R' 


G*  =  P  -+-  i'  -H  2h*  cos  r 


=  1*    1  -t- 


r/         ri'\*     rfq  R  _ , 

L\  R/        R'^J        r 


(  682  ) 
En  réduisant,  on  trouve 


et 


J  d'       5]  <r       5  rf*\ 

G*  =  4IM1  -+-4--+- , 

\  R        4  ir       4RV 

/  d'       5  3rf'*  —  d*\ 

G  =21     1  -+-2-  H —  ; 

\  R        8        R^      / 


d'où  l'on  tire 


q       \     ,-d  13  (/" 

a  ou  2  sin  -^  =  - 1/7  -     I 

■'  2       2         R\         14  ri* 


Telle  est  l'expression  de  l'angle  que  la  verticale  fait 
avec  sa  position  moyenne. 

Le  rapport  j  est  le  cosinus  de  l'angle  de  d  avec  R, 
cosinus  dont  l'expression  est 


:Rf/ 


j  atteint  donc  son  maximum  et  son  minimum  en  même 
temps  que  r,  c'est-à-dire  dans  le  méridien. 

On  aura,  pour  ces  deux  cas,  en  désignant  par  e  la 
demi-ouverture  du  cône  diurne  décrit  par  le  centre  du 
noyau  autour  de  l'axe  de  l'écorce,  et  par  <ï>  la  latitude  du 
lieu, 

d' 

—  ==  sin(*  =b  e). 
a 


(  683  ) 
Désignons  par  Ag  la  différence  entre  les  valeurs  maxi- 
mum et  minimum  de  l'angle  g  : 

A9=  1.23-  !  sin'('î>-t-f)  —  sin*('i>  —  f )  ! 

cl 
=  1.23  — sin  2*  sin  2f. 
R 

Pour  que  cette  différence  soit  la  plus  grande  possible, 
il  faut  que  la  latitude  du  lieu  soit  égale  à  45%  de  même 
que  l'angle  que  la  ligne  des  centres  du  noyau  et  de 
l'écorce  fait  avec  l'axe  de  celle-ci. 

Il  semble  que  cet  écart  puisse  s'élever  aujourd'hui, 
sous  notre  latitude,  5(>',5,  à  0",6  : 

On  aurait  donc  actuellement  (janvier  1898)  ^  sin  2e 
=  0",5  environ,  et  la  distance  des  centres  du  noyau  et 
de  l'écorce  serait  de  16  mètres  approximativement,  en 
admettant  que  e  soit  égal  à  45". 

Cette  faible  valeur  est  parfaitement  admissible;  et  il 
n'en  résulte  pas  moins  des  écarts  très  sensibles  entre  les 
directions  de  la  verticale  à  12  heures  d'intervalle,  ou,  si 
l'on  veut,  en  deux  lieux,  situés  à  12  heures  de  longitude 
l'un  de  l'autre,  et  où  l'on  a  observé  une  même  étoile. 
Comme  on  ne  peut  pas,  actuellement,  tenir  compte  de 
ces  déviations  de  la  verticale  dans  le  calcul  des  distances 
zénithales,  cette  négligence  se  reportera  naturellement  sur 
ie  calcul  de  la  latitude  déduite  de  tes  distances. 

Indépendamment  de  la  période  diurne  qui  vient  d'être 
signalée  dans  les  déviations  de  la  verticale,  elles  ont 
également  une  période  annuelle. 

La  distance  des  centres  du  noyau  et  de  l'écorce  dépend, 


(  684  ) 

en  effet,  des  rayons  vecteurs  menés  de  ces  centres  au 
Soleil,  ainsi  que  de  l'angle  compris  entre  eux.  Les 
expressions  de  ces  rayons  sont  des  fonctions  de  la  diffé- 
rence des  longitudes  du  Soleil  et  du  périgée;  il  en  est 
de  même  de  l'angle  compris  et,  par  conséquent,  de  la 
distance  des  centres. 

Pour  trouver  l'expression  de  cette  distance,  il  faudrait 
connaître  la  théorie  des  mouvements  des  deux  centres 
autour  de  leur  centre  de  gravité  commun,  théorie  qui  ne 
sera  peut-être  pas  établie  avant  longtemps. 

Mais  on  voit,  d'après  ce  qui  vient  d'être  dit,  que  la 
première  formule  empirique  de  Chandler  est  parfaite- 
ment justifiée. 

La  seconde  l'est  également,  si  les  précipitations  hiver- 
nales modifient  la  position  de  l'axe  d'inertie  de  l'écorce. 

Il  y  aurait,  en  ce  cas,  deux  termes  annuels  distincts  ; 
le  premier  affecterait  un  caractère  diurne,  l'autre  pas. 

Nous  donnerons  ci-dessous,  aussi  complètement  qu'il 
nous  est  possible  de  le  faire,  les  termes  complémentaires 
que  la  théorie  du  mouvement  de  l'écorce  terrestre  intro- 
duit dans  l'expression  de  la  déclinaison  rapporlée  au 
pôle  d'inertie,  en  y  ajoutant  un  dernier  terme,  provenant 
des  déviations  périodiques  de  la  verticale. 

Formules  de  réduction  du  XY°  siècle. 

Dans  les  expressions  suivantes,  N,9,  N,-];  désignent  les 
nutations  en  obliquité  et  en  longitude  de  l'écorce,  qui 
proviennent  des  constantes  arbitraires;  N^Q,  N^^Jj  la  nuta- 
tion  diurne. 

cf  est  l'heure  sidérale  du  premier  méridien;  celui-ci  est 
situé  par  245™  de  longitude  E.  de  Greenwich.  Pour  un 


(  m  ) 

observatoire  qui  est  à  l  heures  de  longitude  W.  du  pre- 
mier méridien,  ce  =  /  -i-  t,  -  étant  l'heure  sidérale  de 
l'observation. 

Ne^  =  ri  sin (p;  —  ,J)  —  y  sin  [(I  +  /)«  +  p] 
4-risin[(l  -t-/,)îP  -+-  p,]. 

sineN,./-  =  ricos(p;  — /,<)  — rcos[(t  -t-  z)-^  -+-  p] 

-4-riC0s[(l    -4-/,)y  +  p,]. 

Les  périodes  de  U  et  de  4^  sont  respectivement  de  304 
(Euler)  et  de  431  (Chandler)  jours. 

N^e  =  0:0G7  (I,  cos2î>  -+-  2^  sin  2?). 
sin  eN^.f  =  0'.'067  (  —  2,  sin  2?  -+- 1^  cos  2?). 

2,  =  —  1.15  —  0.154  cosQ  -+-  0.3G  cos  2©  -t-  0.82  cos  2(([. 
22=  —0.18    sin  Q  +  0.39  sin  2© -H  0.88  sin  2(;. 

Les  termes  qui  proviennent  du  déplacement  annuel  du 
pôle  d'inertie  sont,  M  désignant  la  longitude  de  l'obser- 
vatoire relativement  au  méridien  sur  lequel  s'eflfectue  ce 
déplacement,  et  z  l'heure  sidérale  (*)  : 

Ae=  —  i  sin  (M  -+-  t)  cos(©  —  A), 
sin  dA<i>  =  —  i  cos  (M  ■+-  z)  cos(©  —  A); 

d'où,  en  appelant  r,  l'angle  horaire  : 

Aâ=  —  i  cos  (M -+- ij)  cos  (O  —  A). 


(*)  Essai  sur  les  variations  de  lalitude. 


I 


(  686  ) 

C'est  là  le  terme  annuel  de  Chandler,  sous  la  seconde 
forme  qu'il  lui  a  donnée. 

Mais,  comme  il  a  été  dit  ci-dessus,  la  première  forme 
pourrait  exister,  par  suite  des  déviations  périodiques  de 
la  verticale.  Il  est  à  présumer  que  celles-ci  se  traduiront 
par  des  expressions  de  la  forme 

Ad=  gf  sin(»  -H  O  —  F), 
sin  e^<^  =  g  cos(î)  -t-  ©  —  F), 

la  constante  g  variant  avec  la  latitude  de  l'observatoire. 
On  déduira  aisément,  des  formules  précédentes,  l'ex- 
pression de 

AJ  ==  sin  aNg  -+-  cos  a  sin  0N«,. 

L'introduction  de  cette  expression  dans  la  réduction 
de  l'étoile  au  lieu  apparent  montrera,  lorsque  les  con- 
stantes (y  compris  celle  de  l'aberration)  en  seront  bien 
connues,  V invariabilité  de  la  hauteur  du  pôle  moyen  géogra- 
phique (*),  que  nous  affirmons  depuis  huit  ans. 


{*)  Nous  ne  parlons  pas  ici  des  termes  du  second  ordre,  quoiqu'on 
n'en  tienne  pas  un  compte  exact,  parce  qu'ils  sont  insignifiants  dans 
la  réduction  des  observations  aujourd'hui  en  faveur,  et  renverrons, 
sur  ce  sujet,  au  Catéchisme  correct  d'astronomie  spliériqice  et  k  la 
Revision  des  constantes  de  L'astronomie  stellaire. 


(  687) 
M.  le  Secrétaire  perpétuel  proclame  de  la  manière  sui- 
vante les  résultats  des  concours  et  des  élections  : 

CONCOURS  ANNUEL  DE  LA  CLASSE  (4898). 

SCIE^VCES    lIATnÉlUATIOlJES    ET    PHYSIQUES. 

Trois  mémoires  ont  été  reçus  en  réponse  à  la  troisième 
question  : 

Apporter  une  contribution  importante  à  l'étude  des  cor- 
respondances (Verwandtschaften)  que  l'on  peut  établir  entre 
deux  espaces. 

Ils  portent  pour  devises  : 

N°'  i.  —  Geometry  is  hard  (J.-H.-S.  Smith)  ; 
2.  —  Numeri  regunt  locum; 
5.  —  Itinera  ad  verum. 

Sur  la  déclaration  des  commissaires-rapporteurs  de  ne 
pouvoir  encore  présenter  leurs  conclusions,  autant  à 
cause  de  l'importance  de  la  question  posée  que  des  pro- 
portions des  mémoires  soumis  à  leur  appréciation,  la 
Classe  ajourne  le  prononcé  du  jugement  jusqu'à  une 
prochaine  séance  publique. 

SCIENCES    IVA.TVREEEES. 

Un  mémoire  portant  comme  devise  :  L'activité  des 
plantes  carnivores  est,  en  dernière  analyse,  une  question 


(  088  )  il 

d'azote  (Morren),  a  été  reçu  en  réponse  à  la  première 
question  : 

On  demande  de  nouvelles  recherches  macrochimiques  et 
microchimiques  sur  la  digestion  chez  les  plantes  carnivores. 

La  Classe,  ratifiant  les  ('onclusions  des  rapports  des 
commissaires  qui  ont  examiné  ce  mémoire,  a  décerné  une 
médaille  d'or  de  la  valeur  de  six  cents  francs  à  l'auteur, 
M.  Georges  Clautriau,  assistant  à  l'Institut  botanique,  à 
Bruxelles. 

Un  mémoire  portant  pour  devise  :  La  physiologie  des 
Invertébrés  est  presque  tout  entière  à  l'état  de  desideratum 
(L.  Fredericq),  a  été  reçu  en  réponse  à  la  deuxième 
question  : 

On  demande  des  recherches  physiologiques  nouvelles  sur 
une  fonction  encore  mal  connue  chez  un  animal  invertébré. 

La  Classe,  ratifiant  les  conclusions  des  rapports  des 
commissaires  qui  ont  examiné  ce  mémoire,  a  décerné  une 
médaille  d'or  de  la  valeur  de  six  cents  francs  à  l'auteu", 
M.  L.  Cuénot,  professeur  de  zoologie  à  la  Faculté  des 
sciences  de  l'Université  de  Nancy  (France). 


La  Classe,  conformément  à  la  demande  du  Comité  qui 
a  publié  les  oeuvres  de  J.-S.  Stas,  a  l'honneur  d'offrir  un 
exemplaire  de  ces  volumes  à  M.  Robert  Goldschmidt  et 
à  M.  Just  Denis,  élèves  de  l'Université  de  Bruxelles, 
qui  ont  obtenu,  cette  année,  avec  la  plus  grande  distinc- 
tion, leur  diplôme  légal  de  docteur  en  sciences  chimiques. 


(  689  ) 


ELECTIONS. 


Depuis  ses  dernières  élections,  la  Classe  a  eu  le  regret 
de  perdre  deux  de  ses  membres  titulaires,  MM.  Alph.  Briarl 
et  Ern.  Candèze,  el  trois  de  ses  associés  :  MM.  François 
Brioschi,  de  Milan;  Rodolphe  Leuckart,  de  Leipzig,  et 
James  Hall,  d'Albany. 

Ont  été  élus  : 

Dans  la  Section  des  sciences  mathématiques  et  phy- 
siques : 

Correspondants  :  MM.  François  Deruyts,  chargé  de 
cours  à  l'Université  de  Liège,  et  Ch.-J.  de  la  Vallée 
Poussin,  professeur  à  l'Université  de  Louvain. 

Associé:  M.  Louis  Cremona,  sénateur,  professeur  à 
l'Université  de  Rome. 

Dans  la  Section  des  sciences  naturelles  : 

Membres  titulaires,  sauf  approbation  royale:  MM.  Al- 
phonse-F.  Renard  et  Léo  Errera,  correspondants. 

Associés  :  MM.  Edwin  Ray  Lankester,  directeur  du 
Musée  d'histoire  naturelle  au  Brilish  Muséum,  et  Alexan- 
dre Karpinsky,  directeur  du  Comité  géologique  russe  à 
l'Institut  des  mines  de  Saint-Pétersbourg. 


3™*    SÉRIE,    TOME    XXXVI. 


46 


(  690  ) 


OUVRAGES  PRÉSENTÉS. 


Bambeke  {Ch.  Van).  Contributions  à  l'histoire  de  la 
constitution  de  l'œuf.  III.  Recherches  sur  l'oocyte  de 
Pholcus  phalangioïdes  (Fuessl.).  Liège,  1898;  extr.  in-S* 
(88  p.,  6  pi.). 

Goblel  d'Alviella  {Le  comte).  Les  rites  de  la  moisson  et 
les  commencements  de  l'agriculture,  à  propos  du  dernier 
ouvrage  de  M.  Grant  Allen.  Paris,  1898;  exlr.  in-8°  (25  p.). 

Lancaster  (Alb.)  et  Meuleman  [E.).  Le  climat  du  Congo. 
Bruxelles,  1898;  in-S»  (iv-464  p.,  cartes). 

Van  lier  Mensbrugghe  [G.].  Sur  les  propriétés  fondamen- 
tales des  liquides.  Bruxelles,  1898;  extr.  in-8"  (10  p.). 

Gamond  {L.  de).  Le  collectivisme.  Discours.  Gand,  1898; 
in-8°  (4o  p.). 

Cremers  {E.).  L'analyse  et  la  composition  mélodiques. 
Paris-Bruxelles,  1898;  in-8°  (92  p.). 

Pelermann  [A.).  Recherches  de  chimie  et  de  physiologie 
appliquées  à  l'agriculture,  tome  III.  Bruxelles-Liège,  1898; 
in-S"  (427  p.). 

Bruxelles.  Société  royale  de  médecine  publique.  Congrès 
national  d'hygiène  et  de  climatologie  médicale  de  la  Bel- 
gique et  du  Congo  (Bruxelles,  août  1897).  Rapport  avec  le 
résumé  des  mémoires  envoyés  en  vue  du  Congrès  ;  l"""  partie, 
Belgique;  "1^"  partie,  Congo  :  climat,  constitution  du  sol  et 
hygiène  de  l'État  Indépendant.  1898;  2  vol. 

—  Compte  rendu  des  séances  du  Congrès  national 
d'hygiène.  1898. 

Ministère  de  V Agriculture  et  des  Travaux  publics.  Dia- 


(«91  ) 

grammes  des  variations  du  niveau  de  la  mer,  observées  à 
l'extrémité  de  l'estacade  d'est  du  chenal  d'entrée  du  port 
d'Ostende,  1897.  In-folio. 

État  Indépendant  du  Congo.  Annales  du  Musée  du  Congo, 
série  11  :  Zoologie.  Matériaux  pour  la  faune  du  Congo; 
Poissons  nouveaux,  par  G. -A.  Boulenger,  tome  1*%  fasc.  1, 
Bruxelles,  1898;  in-4°. 

Société  scientifique  de  Bruxelles.  Annales,  21"  année, 
1896-1897. 

Arlon.  institut  archéologique.  Annales,  t.  XXXIIl,  1898. 

Gano.  Bibliotlteca  Belgica.  Bibliographie  générale  des 
Pays-Bas,  102«  et  lOS"  livraisons.  1898. 

HuY.  Cercle  des  Naturalistes.  Bulletin,  1898,  n<"  1-2. 


France. 

Nadaillac  {Le  marquis  dé).  L'homme  et  le  singe.  Louvain, 
1898  ;  extr.  in-8°  (88  p.). 

—  Mënélik  II,  Négûs  Négûsti,  roi  des  rois  de  l'Ethiopie. 
Paris,  1898;  in-8M39  p.). 

Gaudry  {Albert).  Notice  sur  les  travaux  scientifiques  de 
Victor  Lemoine  et  particulièrement  sur  les  découvertes  à 
Cernay.  Paris,  1898;  extr.  in-8"  (12  p.). 

Serrure  {Baymond).  Quelques  mots  sur  les  moutons  et  les 
doubles  moulons  d'or  de  Jeanne  et  Wenceslas,  ducs  de 
Brabant.  Mâcon,  1898;  extr.  in-8"  ;5  p.). 

Paris.  Société  tiationale  des  Antiquailles  de  France.  Bulletin 
et  Mémoires,  1897.  2  vol. 

—  Académie  des  inscriptions  et-  belles-lettres.  Comptes 
rendus  des  séances  de  l'année  1898. 


(  092  ) 

Granue-Biœtagne  et  Colonies  britanniques. 

Aitchison.  The  Royal  gold  medal,  1898,  presented  to 
Professer  Aitchison,  20"'  june  1898,  by  Mr.  F.-C.  Penrose. 
Aitchison's  reply.  Londres,  1898;  exlr.  in-4''  (6  p.,  portrait). 

—  The  opening  address  at  the  first  gênerai  meeting  of 
the  Royal  Instilute  of  British  Architects,  7"'  november  1898; 
extr.  in-4°  (9  p.). 

Coghlan  (T.- A .).  A  statistical  account  of  the  seven  colonies 
of  Australasia,  1897-98.  Seventh  issue.  Sydney,  1898;  in-8\ 

Londres.  Royal  historical  Society.  Transactions,  vol.  XIl, 
1898. 

—  Royal  Society.  Proceedings,  1898. 

Sydney.  Australian  Muséum.  Report  for  the  year  1897. 
Sydney,  1898;  in-4°  (46  p.). 

LivERPOOL.  Biological  Society.  Proceedings,  vol.  XIL 
1897-98. 

Madras.  Observatory.  Report  for  the  year  1897-98,  and 
on  the  éclipse  expédition  of  January  1898. 


Italie. 

Galilée.  Le  Opère  di  Galileo  Galilei,  vol.  VIII.  Florence, 
1898;  in-4». 

RiUia(Lorejizo-Michelanç]elo).  Il  carattere  morale  di  Anto- 
nio Rosmini,  studio  pel  centenario  dalla  nascita  di  Anto- 
nio Rosmini,  24  marzo  1897.  Milan,  1897;  gr.  in-8''  (21  p.). 

—  Une  fissazione  Hegheliana.  Turin,  1897;  in-8'>  (24  p.). 
''  ■ —  Sulle  dottrine  psicofisiche  di  Platone.  Modène,  1898  ; 
in-4»  (17  p.). 

—  Che  cosa  è  l'educazione.  Turin,  1897  ;  in-8''  (16  p.). 

—  Suir  ipotesi  dell'  evoluzione.  Turin,  1897  ;  in-8''  (41  p.). 


I 


(  695  ) 

Billia  (L.-M.).  L'unilà  dello  scibile  e  la  filosofia  délia 
morale.  Turin,  1897;  in-S"  (22  p.). 

—  Lezioni  di  filosofia  délia  morale.  Turin,  1897;  in-8* 
(107  p.). 

Brescia.  Ateneo.  L'opéra  del  Moretto.  (Alessandro  Bonvi- 
cino,  1498-1554.)  Brescia,  1898;  vol.  in-fol.  (143  p.,  30  pi.). 


Pays-Bas. 

Stuers  {Victor  de)  et  Cuypers  (P.-J.-H.).  Le  Musée  national 
à  Amsterdam.  Amsterdam,  1897;  in-folio  (47  p.,  60  pi.). 

La  Haye.  Kon.  Bibliothecl',  De  Oranje  Nassau  boekerij  en 
de  Oranje-penningen  in  de  Koninklijke  Bibliotheek  en  in 
het  Koninklijk  Penning-Kabinet  te  's  Gravenhage,  1450- 
1702.  La  Haye  [1898];  in-8°. 

—  Département  van  Koloniën.  Dagb-Register  gehouden 
int  Casteel  Batavia  vant  passeerende  daer  ter  plaetse  als 
over  geheel  Nederlandts  India,  1631-1634  (H. -T.  Colen- 
brander).  La  Haye,  1898;  gr.  in-8». 


Pays  divers. 

JSicolaeff' [Le  colonel  iC étal-major).  Cent  ans  tlu  corps  des 
courriers  de  cabinet.  1796-1896.  Esquisse  historique.  Saint- 
Pétersbourg,  1896;  vol.  gr.  in-8»  (106  p.). 

—  Esquisse  historique  sur  les  insignes  de  souveraineté 
et  les  décorations  de  l'armée  russe.  Période  des  grands 
princes  et  des  czars.  Saint-Pétersbourg,  1898;  gr.  in-8° 
(322  p.). 

Hildebraml  Hildebrandsson  {Le  IP  H.)  et  Teisserenc  de 
Bort  {Léon).  Les  bases  de  la  météorologie  dynamique  histo- 
rique. État  de  nos  connaissances,  l""*  livraison.  Paris,  1898  ; 
m-S"  (58  p.,  une  carte). 


(  694  ) 

Ferron  {Eug.).  Mémoire  analytique  sur  la  théorie  de 
Laplace  relative  aux  phénomènes  du  flux  et  du  reflux  de  la 
mer.  Luxembourg,  1898;  extr.  in-8°  (62  p.,  une  pi.). 

GoiRE.  Naturforschcnde  fMesellschaft.  Jahresbericht,  Band 
41,  1897-1898,  und  Beitrage. 

Helsingfors.  Sociélé  des  sciences.  Acta,  tom.  22  et  23, 
1897.  In-4». 

—  Ôfversigt,  XXXIX,  1896-1897. 

TiFLis.  Physikalisches  Observalorium.  Beobachtungen  im 
Jahre  1896.  In^". 

Ups\l.  Observatoire  méléorologique.  Etudes  internatio- 
nales des  nuages.  1896-1897:  Observations  et  mesures  de  la 
Suède,  vol.  1  et  II.  1898;  in-4''; 


L'Académie  a  reçu  en  outre,  pendant  l'année  1898,  les 
Recueils  ainsi  que  les  Publications  des  Établissements  et 
des  Société?  savantes  dont  les  noms  suivent  : 

Anvers.  Académie  d'archéologie.  —  Société  royale  de  géo- 
graphie. —  Société  de  médecine.  —  Société  médico-chirurgi- 
cale. —  Sociélé  de  pharmvJe. 

Bruges.  Sociélé  d'émulation. 

Bruxelles.  Académie  royale  de  médecine.  —  Analecla  Bol- 
landiana.  —  Annales  de  médecine  vétérinaire.  —  Annales 
des  travaux  publics.  —  Association  belge  de  photographie.  — 
Association  belge  des  chimistes.  —  Bibliographie  de  la  Bel- 
gique. —  Bulletin  de  statistique  démographique  et  sanitaire 
(D""  Janssens).  —  Ciel  et  Terre.  —  Commission  royale  d'his- 
toire. —  Commissions  royales  d'art  et  d'arcliéologie.  —  In- 
stitut des  sciences  sociales.  —  Institut  international  de  biblio- 
graphie. —  Ministères  des  Affaires  étrangères,  de  l'Agriculture, 
de  l'Intérieur,  du  Travail.  —  Moniteur  belge.  —  Moniteur 
industriel  belge.  —  Observatoire  royal.  —  Presse  médicale 


(  693  ) 
belge.  —  Revue  bibliographique  belge.  —  Revue  de  Belgique. 

—  Revue  générale.  —  Sociétés  :  d'Agriculture,  d'Anthropolo- 
gie, d'Archéologie,  d'Architecture,  d'Astronomie,  royale  de 
Botanique,  d'Électriciens,  Entoniologique,  de  Librairie,  royale 
belge  de  Géographie,  de  Géologie  et  d'Hydrologie,  royale 
Malacologique,  royale  de  Médecine  publique,  de  Microscopie, 
royale  de  Numismatique,  royale  de  Pharmacie,  des  Sciences 
médicales  et  naturelles.  Scientifique. 

Charleroi.  Société  paléontologique  et  archéologique. 
Enghien.  Cercle  archéologique. 

Gand.  Koninklijkevlaamsche  Académie.  —  Cercle  historique 
et  archéologique.  —  Willems fonds. 

—  Messager  des  sciences  historiques.  —  Société  de  médecine. 
Gembloux.  Institut  agricole. 

Huy.  Cercle  des  sciences  et  des  beaux-arts.  —  Cercle  des 
Naturalistes. 

Liège.  Écho  vétérinaire.  —  Institut  archéologique.  —  Revue 
de  l'instruction  publique.  —  Société  géologique  de  Belgique: 

—  Société  médico-chirurgicale.  —  Wallonia. 

Louvain.  Le  Musée  belge.  —  Le  Muséon.  —  Revue  néo- 
scolastique.  —  Revue  sociale  catholique. 
Maredsous.  Abbaye. 
Namur.  Société  archéologique. 

Saint-Nicolas.  Cercle  archéologique  du  Pays  de  Waes. 
Termonde.  Cercle  archéologique. 
Verviers.  Société  d'archéologie  et  d'histoire. 

Berlin.  Kôn.  Akademie  der  Wissenschaften.  —  Deutsche 
chemische  Gesellschaft.  —  Geologische  Gesellschaft.  —  Gesell- 
schaft  filr  Erdkunde.  —  Gesellschaft  fur  Anthropologie,  Ethno- 
logie und  Urgeschichte.  —  Jahresbericht  ûber  die  Fortschritte 
der  Chemie.  —Physikalische  Gesellschaft.  —  Meteorologisches 
Institut.  —  Verein  fur  Geschichte  der  Mark  Brandenburg. 

Bonn.  Naturhistorischer  Verein  der  preussischen  Rhein- 
lande  und  Westphalens. 


(  696  ) 

Brème.  Nalurwissenscliafïlicher  Verein. 

Budapest.  Institut  royal  de  géologie.  —  Académie  des 
sciences.  —  Statistisches  Bureau. 

Cracovie.  Académie  des  sciences. 

Francfort-sur-Main.  Senckeuberg.  naturforsch.  Gesellschafl. 

Francfort-sur-  Oder.  Naturwissenschaftlicher  Verein. 

Gotha.  Geographische  Anstalt. 

Gottingen.  KiJn.  Gesellschafl  der  Wissenschaften. 

Halle.  Natvrwiss.  Verein  fur  Saclisen  mid  Thiiringen. 

léna.  Medizinisch-natunvissevschaftliche  Gesellschafl. 

Leipzig.  Archiv  der  Mathematik  vnd  Physik.  —  Beiblàtter 
zuden  Annalen  der  Physik  uml  Chemie.  —  Forschungen  zur 
brandenbiirgischen  und  y.reussischcn  Geschichte.  —  Kvn. 
Gesellschafl  der   Wissenschaften.  —  Zaologischer  Anzeiger. 

Munich.  Kôn.  Akademie  der  Wissenschajien. 

Prague.  Académie  tchèque  des  sciences.  —  A'on.  Gesell- 
schafl der  Wissenschaften.  —  Le  Journal  scientifique 
«  Krok  ».  —  Société  mathématique. 

Strasbourg.  Société  des  sciences,  agriculture  et  arts. 

Vienne.  Kaiserl.  Akademie  der  Wissenschaften.—  Anthro- 
pologische  Gesellschafl.  —  Zoolog.-bctanische  Gesellschafl.  — 
Kais.  geologische  fîeichsanstalt.  —  Monatshefte  fur  Mathe- 
matikund  Physik.—  Kais.  Naturhistorisches  Hofmuseum.  — 
Zool.  botanische  Gesellschafl. 

"Wurzbourg.  Physikal.-medizinische  Gesellschafl. 

Universités  r/e  Carlsruhe,  Fribourg-en-Brisgau,  Giessen, 
Heidelberg,Kiel,IVlarbourg,  Strasbourg,  Tubingueet  Vienne. 

Copenhague.  Institut  météorologique.  —  Société  royale  des 
sciences.  —  Société  des  Antiquaires. 
Madrid.  R.  Acade7nia  de  la  historia. 

Albany.  University  of  the  slate  of  New  York. 
Baltimore.  John  Hopkins  University. 


(  «97  ) 

Boston.  Academy  of  arts  and  sciences.  —  Natural  llislary 
Society. 

Buenos- Ayres.  Sociedad  cientifica  Àrgenliiia.  —  Bulletin 
mensuel  de  statistique  municipale. 

Cambridge.  Muséum  ofcompar.  zoôlogy.  —  Observatory. 

Chicago.  Field  Columbian  Muséum.  —  Kenwood  Observa- 
tory. 

Cordova.  Academia  de  ciencias. 

Granviile.  Denison  University. 

Halifax.  Nova-Scolian  Institute. 

Ithaca.  Journal  ofphysical  chemistry. 

Lincoln.  University  of  Nebraska. 

Mexico.  Observatorio.  —  Sociedad  de  historia  natural. 

Montevideo.  Universidad. 

Mont-Hamilton.  lÀck  Obsei^atory. 

Montréal.  Natural  history  Society. 

New-Haven.  Journal  of  sciences. 

New-York.  Geographical  Society.  —  Academy  of  sciences.— 
Muséum  of  natural  history. 

Philadelphie.  Academy  of  naUiral  sciences.  —  Franklin 
Institute.  —  The  american  Naturalist.  —  Philosophical 
Society.  —  Historical  Society. 

Rio  de  Janeiro.  Instituto  historico.  —  Soc.  de.geographia. 

Rochester.  Academy  of  sciences. 

Saint-Louis.  Academy  of  sciences. 

Salem.  Essex  Institute. 

San-Francisco.  California  Academy  of  sciences. 

Santiago  de  Chili.  Société  scientifique. 

Toronto.  Canadian  Institute. 

Washington.  Bureau  of  éducation.  —  Department  of  agri- 
culture. —  U.  S.  national  Muséum.  -^  Smithsonian  Institu- 
tion. —  U.  S.  Geological  Survey. 

Abbeville.  Société  d'émulation. 

Amiens.  Société  ijidustrielle.  —  Société  des  .Antiquaires. 


(  698  ) 

Arras.  Commission  des  antUfidtés  départementales. 

Bûnc.  Académie  d'Hippone. 

Bordeaux.  Société  des  sciences  physiques  et  naturelles. 

Gaen.  Société  linnéenne.  —  Société  des  beaux-arts. 

Dax.  Société  de  Borda. 

Le  Havre.  Société  d'études  diverses. 

Lille.  Société  géologique  du  Nord.  —  Société  des  architectes. 

Marseille.  Société  scientifique  industrielle.  —  Faculté  des 
sciences. 

Montpellier.  Académie  des  sciences. 

Nancy.  Société  des  sciences. 

Paris.  Académie  de  médecine.  —  Bulletin  scientifique 
(Giard).  —  École  normale  supérieure.  —  École  des  CJiartes.  — 
Journal  de  Vaijriculture.— Journal  des  Savants.—  Le  Cosmos. 

—  La  Nature.  -  Le  Progrès  médical .  —  Le  Polybiblion.  — 
Ministère  de  l'Instruction  publique.  —  Moniteur  scientifique. 

—  Musée  Guimet.  —  Muséum  dliistoire  naturelle.  —  Revue 
britannique.  —  Bévue  des  questions  liisloriques.  —  Revue 
générale  des  sciences.  —  Bévue  politique  et  littéraire.  — 
Bévue  scientifique.  —  Sociétés  :  d'agriculture,  d'anthropolo- 
gie, astronomique,  de  biologie,  rjiimique,  géologique,  de 
géograpliie,  matliématique,  météorologique,  philomatique, 
zoologique. 

Saint-Omer.  Société  des  Antiquaires  de  la  Morinie. 
Toulouse.  Société  archéologique. 
Valenciennes.  Société  d'agriculture. 

Adélaïde.  Royal  Society  of  South  Australia. 
Birmingham.  PhilosopJiical  Society. 
Brisbane.  Royal  geograpliical  Society. 
Calcutta.   Asialic   Society  of  Bengal.    —    Meteorological 
Department.  —  Geological  Survey. 
Cambridge.  Piiilosopiiical  Society. 
Dublin.  Boyal  Irish  Academy.  —  Dublin  Society. 


(  699  ) 

Edimbourg.  Botanical  Society.  —  Geological  Society.  — 
Physieal  Society.  —  Royal  Society.  —  Laboratory  of  tlie  R. 
Collège  ofphysicians. 

Glasgow.  Geological  Society. 

Le  Cap.  Philosophical  Society. 

Londres.  Anthropological  Institule.  —  R.  Society  of  Anti- 
quaries.  —  Royal  Astronomical  Society.  —  Royal  Institute 
of  British  Architects.  —  Chemical  Society.  —  Royal  Geogra- 
phical  Society.  —  Geological  Society.  —  Institution  ofmeclia- 
nical  Engineers.  —  Institute  of  civil  Engineers.  —  Royal 
Institution  of  Great  Britain.  —  Linnean  Society.  —  Mathe- 
matical  Society.  —  Meteorological  Society.  —  Royal  Micro- 
scopical  Society.  —  Nature.  —  Niimismatic  Society.  —  Zoolo- 
gical  Society. 

Manchester.  Literary  and  Philosophical  Society. 

Newcastle-upon-Tyne.  Institute  ofmining  and  mechanical 
Engineers. 

Sydney.  Linnean  Society.  —  R.  Society  of  N.  S.  Wales. 

Florence.  Biblioteca  nazionale  centrale.  —  Società  entomo- 
logica  italiana.  —  Rivista  scienti fico-industriale. 

Milan.  Società  di  scieuze  naturali.  —  R.  Istituto  di  scienze. 

Modène.  Società  dei  naluralisti.  —  R.  Stazione  agraria 
sperimentali. 

Naples.  Società  Reale. 

Padoue.  Società  veneto-IreiUina  di  scienze  naturali. 

Palerme.  Circolo  giuridico.  —  Circolo  matematico. 

Parme.  //  nuovo  Risorgimento. 

Pise.  Società  toscana  di  scienze  naturali.  —  Il  nuovo 
cimento. 

Rome.  Reale  Acadeniia  dei  Lincei.  —  Academia  pontificia 
de  Niiovi  Lincei.  —  Comitato  di  arligliera  e  genio.  —  Gazetta 
chimica.  —  Ministerio  dei  Invori  pubblici.  —  Società  per  gli 
studi  zoologiche. 


(  700  ) 

Turin.  Academia  reale  délie  scienze. 
Venise.  R.  Istituto  di  scienze, 
Vérone.  Accademia  d'agrkoltura. 

Amsterdam.  A'.  Akademie  van  wetenschappen. 

Batavia.  Genoolscliap  van  kunsten  en  ivelenscliap pen.  — 
Natuurkundifie  Vereeniging. 

Buitzenzorg.  Jardin  botanique. 

Delft.  École  poliiteclinique, 

Harlem.  Société  hollandaise  des  sciences,  —  Musée  Teyler. 

La  Haye.  Imtituut  voor...  volkenkunde.  — Entomologische 
Vereeniging. 

Leyde.  Mautschappii  der  Nederlandsche  lelterkunde.  — 
Nederlandsclie  dierkimdige  Vereeniging. 

Utrecht.  nislorisch  Genoolschap. 

Bukarest.  Institut  météorologique.  —  Société  des  sciences 
physiques.  —  Ministère  de  V Instruction  publique. 

Jassy.  Société  scientifique  et  littéraire. 

Dorpat.  Université.  —  Naturforschende  Gesellschaft. 

Kazan.  Université  impériale. 

Moscou.  Société  impériale  des  Naturalistes, 

Nowa-Alexandrya.  Annuaire  géologique  et  minéralogique. 

Odessa.  Société  des  Naturalistes. 

Saint-Pétersbourg.  Académie  impériale  des  sciences.  — 
Institut  impérial  de  médecine  expérimentale.  —  Comité  géo- 
logique. —  Jardin  impérial  de  botanique.  —  Société  impériale 
de  géographie.  —  Société  de  chimie. 

Christiania.  Société  des  sciences.  —  Université. 

Stockholm.  Nordiskt  medicinsk  Archiv.  —  Acta  mathema- 
tica.  —  Institut  royal  géologique.  —  Société  des  Antiquaires. 
—  Société  entomologique. 

Upsal.  Université» 


(  vol  ) 

Berne.  Le  Droit  d'auteur. 

Genève.  Archives  des  sciences  physiques  et  naturelles.  • — 
Société  de  géographie. 

Lausanne.  Société  vaudoise  des  sciences  naturelles. 

Zurich.  Naturforschende  Gesellschaft.  —  Astronomiscfie 
Mittheilungen  (Wolf). 

Alexandrie.  Institut  égyptien. 
Belgrade.  Académie  royale  des  sciences. 
Coïmbre.  Jornal  malhematicas  (Teixeira). 
Le  Caire.  Société  khédiviale  de  géographie. 
Luxembourg.  Verein  fur  Geschichte. 
Manila.  Observatorio  meteorologico. 
Tokyo.  Gesellschaft  fur  Natur-  und  Vôlkerkunde  Oslasiens. 
—  Impérial  University. 


BULLETINS    DE    L  ACADEMIE    ROYALE    DE    BELGIQUE. 

TABLES  ALPHABÉTIQUES 

DU  TOME  TRENTE -SIXIÈME  DE  LA  TROISIÈME  SÉRIE. 

1898. 

TABLE  DES  AUTEURS. 


Académie  impériale  militaire  de 
médecine  de  Saint-Pétersbourg. 
Célébration  de  son  centenaire 
(félicitations),  482. 

Académie  royale  de  Belgique. 
Rapport  sur  les  questions  rela- 
tives à  l'organisation  de  la 
Classe  des  lettres,  674. 

Académie  royale  suédoise  des 
sciences  de  Stockholm.  Célébra- 
tion du  S0«  anniversaire  de  la 
mort  de  Berzelius  (adresse  de 
félicitations),  139. 

Aerts  (J.'i.  Lauréat  du  concours 
d'art  appliqué  'gravure  en  taille 
douce).  Rapport  de  M.  Ch.  Tar- 
di(^u,  36i;  proclamé,  378. 

Albert  A'''  (S.  A.  S.  le  prince)  de 
Monaco.  Hommage  d'ouvrage, 
227. 


Anor2î/mc5(  Mémoires  de  concours). 
Sur  les  analogies  ou  les  diffé- 
rences qui  existent  entre  l'allé- 
gorie et  le  symbole  (rapports 
de  MM.  Tardieu,  Rooses  et  Alb. 
De  Vriendt),  348,  356. 

Athénée  de  Brescia.  Hommage 
d'ouvrage  avec  note  par  le  che- 
valier Edm.  Marchai  (L'opéra 
di  Bonvicino),  581. 


Baes  {Edgar).  Sur  les  analogies 
ou  les  différences  qui  existent 
entre  l'allégorie  et  le  symbole 
(Mémoire  couronné).  Rapport 
de  MM.  Tardieu,  Rooses  et 
Alb.  De  Vriendt,  348,  356;  pro- 
clamé lauréat,  376;  remercie, 
463. 

Bambeke   {Ch.    Van).    Hommage 


I 


TABLE    DES    AUTEURS. 


705 


d'ouvrages,  139,  483.  —  Rap- 
ports :  voir  Ctiéiiot  iL.);  Pelse- 
neer  (P.). 

Banning  [Emile).  Décès, 205;  note 
dcM.  VanderHaegen  et  discours 
prononcé  aux  funérailles  par  le 
baron  E.  de  Borchgrave,  207, 
209.  M.  Brialmont  accepte  de 
rédiger  pour  V Annuaire  la  no- 
tice du  défunt,  327. 

Banning  {W^"  veuve  Emile). 
Remerciements  pour  les  senti- 
ments de  condoléance  qui  lui 
ont  été  exprimés,  327.  —  Hom- 
mage d'ouvrages  publiés  sous 
le  voile  de  l'anonyme  par  feu 
son  mari  (avec  note  bibliogra- 
phique par  Ern.  Gossart),  432. 

Baslien  lAlfr.).  Réception  de  son 
premier  rapport  semestriel,  347. 

Bekaert  (A.) et  Hemptinne [A.  de). 
Sur  les  vitesses  de  réaction, 
399;  rapports  de  MM.Spring  et 
De  Heen,  391,  392. 

Beneden  (Éd.  Va7i).  Remercie  pour 
le  nouvel  hommage  rendu  à  la 
mémoire  de  son  père  (inaugu- 
ration, à  Malines,  de  la  statue 
de  P.-J.  Van  Beneden),  138.  — 
Hommage  d'ouvrage,  226.  — 
Rapports  :  voir  Cuénot  (L.)  ; 
Pelseneer  (P.). 

Beneden  (feu  P.-J.  Van).  Inaugu- 
ration de  sa  statue,  à  Malines, 
138  ;  discours  prononcé  par 
M.  Éd.  Dupont,  228. 

Benoit  (P.).  Félicité  au  sujet  de  sa 
nomination  de  directeur  du 
Conservatoire    royal  d'Anvers, 


222.   —  Rapports  :  voir  Duyse 
[Flor.  van)  ;  Lunssens  {M.). 

Berzelivs  (feu  J.-J.).  Célébration 
du  cinquantième  annivei'saire 
de  sa  mort  (Adresse  de  félicita- 
tions), 139. 

Bibliothèque  royale  de  La  Haye 
(M.  le  Directeur  de  la).  Hom- 
mage d'ouvrage,  S69. 

Biesbroeck  (Jules  Van).  Deuxième 
second  prix  du  grand  concours 
de  peinture  de  1898,  33C;  pro- 
clamé, 378. 

Biliia  [L.-M.K  Hommage  d'ou- 
vrages de  philosophie  et  de 
morale,  avec  note  par  G.  Mon- 
champ,  568,  571 . 

Bodio  (L.).  Remercie  pour  son 
diplôme  d'associé,  73. 

Boncquet  (H.).  Premier  rapport 
semestriel  (lecture  des  appré- 
ciations de  MM.  De  Groot,  Vin- 
çotte  et  Marchai),  346. 

Bormans  (Stan.).  Membre  de  la 
Commission  spéciale  des  linan- 
ces,  579. 

Boukleieff  (B.).  Soumet  un  travail 
sur  le  symbole  de  la  vie  et  de  la 
création,  140;  dépôt  aux  archi- 
ves après  avis  de  MM.  Masius  et 
Vanlair,  232. 

Bovy  {Arthur).  Hommage  d'ou- 
vrage avec  note  parfti.  VVilmotte 
(Adenet  le  Roi  et  son  œuvre), 
206,  212. 

Brant.s  (V.).  Remet  pour  VAji- 
nvaire  de  1899  sa  notice  sur 
P.  Willems,  74.  —  Note  biblio- 
graphique :  voir  Lullcniand 
(Léoni. 


704 


TABLE    DES   AUTEURS. 


Brialmont  {A.).  Hommage  d'ou- 
vrage avec  note  par  le  chevalier 
Edm.  Marchai  (Progrès  de  la 
défense  des  États  et  de  la  for- 
tification permanente  depuis 
Vauban),  2,  6.  —  Accepte  de 
rédiger  pour  V Annuaire  la  no- 
tice de  feu  Ém.  Banning,  327. 
—  Membre  de  la  Commission 
spéciale  des  finances,  566. 

Burne-Jones  (Sir  Edward).  Décès, 
120. 


Cabinet  des  médailles  de  la  Haye 
(M.  le  Directeur  du).  Hommage 
d'ouvrage,  569. 

Candèze(Ern.).  Décès, 2;  discours 
prononcé  à  ses  funérailles  par 
M.  le  baron  Edm.  de  Selys 
Longcharaps,  4. 

Chauvin{V.).  Hommage  d'ouvrage 
avec  note  par  J.  Stecher  (Biblio- 
grapliie  des  ouvrages  arabes, 
3®  livraison),  74,  80. 

Chômé  (Léon).  Hommage  d'ou- 
vrage avec  note  par  Ern.  Dis- 
cailles (Une  expédition  au  Nil), 
328,  331. 

ClatUriau  (G.).  Mémoire  couronné 
sur  la  digestion  dans  les  urnes 
de  Nepcnthes  (rapports  de  MM. 
Errera,  Gilkinet  et  Crépin),  586, 
590,  591  ;  proclamé,  688. 

Congo  (État  Indépendant  du). 
Hommage  des  Annales  de  son 
Musée,  390,  483. 

Cols  (Aitg.).  Premier  rapport 
semestriel  (lecture  des  appré- 


'  dations  de  MM.  Winders,  Janlel 
et  Maquet),  583. 

Cremers  [E.].  Hommage  d'ou- 
vrage, 581. 

Cremona  (Louis) .  Élu  associé, 
689. 

Crépin  '  Fr .) .  Membre  de  la 
Commission  spéciale  des  finan- 
ces, 566.  —  Rapports  :  voir 
Clautriuu  (G.);  De  Wildeman 
^  [É.). 

Cuénot  (L.).  Mémoire  couronné 
sur  l'excrétion  chez  les  Mollus- 
ques (rapports  de  MM.  Plateau, 
Éd.  Van  Beneden  et  Van  Bam- 
beke).  592,  599;  proclamé  lau- 
réat, 688. 

Cumont  (G.).  Hommage  d'ou- 
vrages, 227,  328. 

Cuypers  [P.-J.-H.).  Voir  Pays-Bas 
(Gouvernement  de  S.  M.  la 
Reine  des). 


D 


Dauber.  Nouvelle  lettre  relative 
aux  recherches  du  D""  Buchner 
sur  les  fermentations  (Dépôt 
aux  archives  après  lecture  du 
rapport  de  MM.  Jorissen  et  Gil- 
kinet), 391. 

de  Borchgrave  (baron  Emile).  Dis- 
cours prononcés  aux  funérail- 
les :  1°  d'Emile  Banning,  209; 
2o  d'/Mphonse  Rivier,  211. 

De  Groot  (G.).  Rapports  :  voir 
Bonrquet  (IL);  De  Haen  (V.); 
Geefs  (G.);  Marin  (/.j;  Weyns 

iJ-). 
De  Haen  (K.).  Premier   rapport 


TABLE    DES   AUTEURS. 


705 


semestriel  (lecture  des  appré- 
ciations de  MM.  De  Groot,  Vin- 
(;otte  et  Marchai),  464. 

De  Heen  (P.).  Quelques  faits  rela- 
tifs à  la  décharge  produite  par 
la  radiation  infra-électrique,  55. 
—  Rapports  :  voir  Heinptinne 
(A.  de)  et  Bekaert  (A.). 

deJonç/lie  (vicomte  B,).  Hommage 
d'ouvrages,  328. 

de  la  Vallée  Poussin  [Ch.-J.).  Sur 
la  fonction  C  {s)  de  Riemann  et 
le  nombre  des  nombres  pre- 
miers inférieurs  à  une  limite 
donnée  (rapports  de  MM.  Man- 
sion  et  J.  Deruyts),  10,  21.—  Élu 
correspondant,  689. 

de  la  Vallée  Poussin  (Louis).  Hom- 
mage d'ouvrage,  329. 

Demannez  (/.).  Membre  de  la 
Commission  spéciale  des  fi- 
nances, o83. 

Demoulin  (A.).  Sur  les  surfaces 
minima  réglées  et  les  surfaces 
minima  à  lignes  de  courbure 
planes  (rapports  de  MM.  De- 
ruyts, i\euberg  et  Mansion),  232, 
233,  234. 

Denis  (Just).  Reçoit,  en  séance 
publique,   un   exemplaire  des 

■    OEuvres  de  J.-S.  Stas,  688. 

Deruyts  (Fr.).  Sur  la  détermina- 
tion des  éléments  neutres  d'es- 
pèce quelconque,  187.  —  Sur 
quelques  {)ropriétés  des  courbes 
gauches,  194.  —  Sur  quelques 
propriétés  des  polygones  in- 
scrits aux  courbes  gauches, 
5S8  ;  rapports  de  MM.  Le  Pagie 
et  Neuberg  sur  ces  trois  com- 

Ô'"^    SÉRIE,    TOME    XXXVI. 


munications,  148,  496.  —  Élu 
correspondant,  689. 

Deruijts  {Jan/ues).  Rapports  :  voir 
de  la  Vallée  Poussin  {Ch.-J  ): 
Demoulin  (A.). 

Descamps  (chevalier  Ed.).  Accepte 
de  rédiger  pour  V Annuaire  la 
notice  de  feu  Alpli.  Rivier,  327. 
—  Membre  de  la  Commission 
spéciale  des  finances,  579. 

DeSmedt  (Ch.).  Note  bibliogra- 
phique :  voir  Société  des  Bollan- 
distes. 

Devillo's  (L.).  Hommage  d'ou- 
vrage avec  note  par  le  chevalier 
Edm  Marchai  (Chartes  du  comté 
de  Hainaut  de  l'an  1200),  74,  80. 

De  Vriendt  {Alb.).  Rapport  :  voir 
Anonymes;  Baes  (Edgar). 

Dewalque  (G-).  Rapport  :  voir 
Institut  international  flottant. 

De  Wildeman  (É.).  Hommage 
d'ouviage  avec  note  par  Eéo 
Errera  (Prodrome  de  la  flore 
belge:  Thallophytes,  fasc.  I-lIl), 
3,  8.  —  Sur  la  réparation 
de  quelques  Algues  (Mémoires 
in^",  t.  LVIII).  Rapport  de 
M31.  Errera  et  Crépin,  22. 

Discailles  (Ern.).  Notes  bibliogra- 
phiques :  voir  Chômé  (Léon); 
Guilliaume  (Jules).  —  Rapport  : 
voir  Garsou  [J.). 

Doudou  (Ern.).  Nouvelle  explo- 
ration scientifique  des  grottes 
d'Engiç,  d'Engihoul  et  des  envi- 
rons. Dépôt  aux  archives  après 
lecture  des  rapports  de  MM. 
Fraipont  et  Malaise,  391. 

Dupont  (Éd.).  Discours  prononcé 

47 


706 


TABLE  DES  AUTEURS, 


à  l'inaugu ration  de  la  statue  de 
P.-J.  Van  Beneden,  228.  — 
Quelques  mots  sur  révolution 
(discours),  601. 
Duy.se {Florimond  van).  Historique 
de  la  partie  spécialement  musi- 
cale de  la  chanson  flamande 
(Mémoire  couronné).  Rapports 
de  MM.  Gevaert,  Benoit  et  Ma- 
thieu, 3.^6,  360;  proclamé  lau- 
réat, 377  ;  remercie,  463.  — 
Membre  de  la  Commission  de 
la  Biographie  nationale,  583.  — 
Rapport  :  voir  Lunssens  {M.). 


Ë 


Errera  {Léo).  Hommage  d'ou- 
vrages, 227, 390.  —  Élu  membre 
titulaire,  689.  —  Note  bibliogra- 
l)liique  :  voir  De  Wilde}nan{É.). 
—  Rapports  :  voir  ClaiUriau  (G)  ; 
Dr  Wildeman  (É.). 


Faider  (A.).  Hommage  d'ouvrage, 
432. 

Fcrron  (Eug.).  Hommage  d'ou- 
vrage, 483.  Soumet  un  mémoire 
énonçant  et  démontrant  un  nou- 
veau principe  de  mécanique, 
483. 

Folie  (F.).  Fondements  de  la  théo- 
rie de  la  variation  des  latitudes, 
.27(3.  _  Vérification  de  l'exis- 
tence de  la  nutation  eulérienne 
dans  les  latitudes  observées  à 
Greenwich  pendant  les  années 
1880-1891,    392.  —    (Quelques 


grandes  phases  de  l'histoire  de 
l'Astronomie,  637.  —  Rapports  : 
voir  Ministre  de  Vlntérieur, 
Ziegler  {V.  de). 

Fraipont  {J.).  Rapport:  voir  Dou- 
dou  (Ern.). 

Francotte  (P.).  Demande  à  pou- 
voir occuper,  en  1899,  la  table 
belge  du  laboratoire  de  Naples, 
482'. 

Frederichs  (/.).  Remet  un  exem- 
plaire de  son  livre  (Manuel 
d'histoire  moderne)  couronné 
par  le  jury  De  Keyn  en  mai 
1898,  328. 

Fredericq  (L.).  Rapports  :  voir 
Waroux  (J.),  Willem  {V.)  et 
Minne  (A.). 

Fredericq  (P.).  Hommage  d'ou- 
vrage avec  note  (Een  Noord- 
Nederlander  over  zijn  omreisje 
door  Belgie,  in  1823),  74, 75. 


Gaillard{Artliur).  Hommage  d'ou- 
vrage avec  note  par  le  chevalier 
Edmond  Marchai  (Le  Conseil  de 
Brabant  :  Histoire.  Organisation. 
Procédure),  432,  434. 

Gamond  (L.  dé).  Hommage  d'ou- 
vrage, 568. 

Garnier  [Charles).  Décès,  335. 

Garsou  (Jules).  Barthélémy  et 
Méry  étudiés  spécialement  dans 
leurs  rapports  avec  la  Légende 
napoléonienne  (Mémoires  in-8'', 
t.  LVIII).  Rapports  de  MM.  Dis- 
cailles, Stecher  et  Wilmotte,  88, 
91,  92. 


TABLE    DES    AUTEURS. 


707 


(•eefs  (Georges).  Appréciation  ver- 
bale, par  MM.  De  Groot,  Vin- 
çotte  et  Marchai,  de  son  buste 
en  marbre  de  feu  Guillaume 
Geefs,  464. 

Gegenbaur  (Ch.).  Hommage  d'ou- 
vrages, 227. 

Génard  (P.).  Hommage  d'ouvra- 
ges, 120. 

Gevaerl  (F.-A.).  Rapport  :  voir 
Duyse(FL.  van). 

Gkysen  (J.).  Sur  la  condensation 
de  l'aldéhyde  benzoïque  et  de 
la  monochloracétone,  313;  rap- 
port de  MM.  Spring  et  Henry, 
240. 

Gilkinet  {Alfr.).  Rapports  :  voir 
ClaiUriau  (G.);  Dauber. 

Gilson  (G.).  Hommage  d'ouvra- 
ges, 227. 

Giraud  (Alb.).  Prix  quinquennal 
de  littérature  française  (X"  pé- 
riode, 1893-1897),  326  ;  proclamé 
lauréat,  379. 

Giron  (Alfr.)  Élu  directeur  pour 
1899,  206. 

Goblet  d'Alviella  (comte  Eug.).  Un 
curieux  problème  de  transmis- 
sion symbolique.  Les  roues  li- 
turgiques de  l'ancienne  Egypte, 
439.  —  Hommage  d'ouvrage, 
568. 

Gogo  (Félix).  Lauréat  (mention 
honorable)  du  grand  concours 
de  peinture  de  1898,  336;  pro- 
clamé, 378. 

Goldschmidt  (Robert).  Reçoit,  en 
séance  publique,  un  exemplaire 
des  OEuvres  de  J.-S.  Stas,  688. 

Gossart   (Ern.).   Membre    de  la 


Commission  de  la  Biographie 
nationale,  579.  —  Note  biblio- 
graphique :  voir  Banning  (M'"<^ 
veuve  Emile). 

Gréhant  [N.).  Hommage  d'ou- 
vrage, 3. 

Guilliaimie  (Jules).  Hommage 
d'ouvrage  avec  note  par  Ern. 
Discailles  (Le  vers  français  et 
les  prosodies  modernes),  74, 
82. 


U 


Hall  (James).  Décès,  226. 

Hurlez  (Ch.  de).  Hommage  d'ou- 
vrages, 328. 

Hazelius  (A.).  Félicité  au  sujet  de 
l'anniversaire  de  son  musée 
d'ethnographie,  à  Stockholm, 
327. 

Hecq  [Gaëlan).  Hommage  d'ou- 
vrage avec  note  par  le  chevalier 
Edm.  Marchai  (Jacques  Bretex 
ou  Bretiaus.  Le  tournoi  de 
Chauvency),  328,  332. 

Hemptinne  [Alex.  de).  Sur  l'action 
catalytique  de  la  mousse  de 
platine  et  de  palladium,  155.  — 
Sur  les  vitesses  de  réaction  (en 
collaboration  avec  A.  Bekaert), 
399;  rapports  de  JIM.  Spring 
et  DeHeen,  145,  146,  391,392. 
—  Soumet  une  note  sur  la 
luminescence  des  gaz,  483. 

Henry  {LJ).  Sur  les  dérivés  de 
quelques  nitriles- alcools  ali- 
phaliques,  22.  —  Sur  divers 
composés  non  saturés,  31.  — 
Sur  divers  composés  nitrés  ali- 


708 


TABLE  DES  AUTEURS. 


phatiques  à  fonctions  multiples, 
149. —Sur  divers  nilriles-alcools 
penta-  et  hexacarbonés,  '241.  — 
Sur  l'oxydation  directe  de  l'é- 
thylène  tricliloro  -  éthyl  -  oxylé, 
ClaC  =  CGI  (OC2H3),  497.  —  Rap- 
ports :  voir  Ghysen  (J.);  Maas 
(J.);  Swaris  [Fréd.]. 

Homolle  {Th.}.  Hommage  d'ou- 
vrage, 328. 

Huber-^ti  (Giist.).  Membre  de  la 
Commission  spéciale  des  finan- 
ces, 583.  —  Rapport  :  voir 
Lnnssens  (M.). 

Hymaiis  (//.).  Membre  de  la  Com- 
mission spéciale  des  finances, 
583.  —  Note  bibliograpliique  : 
voir  Jacquot  {Alb.). 


Institut  international  flottant 
(Projet  de  création  d'un).  De- 
mande d'avis  adressée  au  nom 
de  M.  le  Ministre  de  l'Industrie 
et  du  Travail,  390;  lecture  du 
rapport  de  MM.  Dewalque,  Re- 
nard et  Malaise,  491. 


Jacquot  (Alb.).  Les  Michel,  les 
Adam  et  Clodion  (Note  biblio- 
graphique par  H.  Hyraans),  129. 

Janlei  [Èm.).  Rapport  :  voir  Cols 
(Aug.). 

Jaquet  [Jcs.).  Décès,  119;  discours 
prononcé  à  ses  funérailles  par 
le  chevalier  Edm.  Marchai,  120. 

Jenkins  [B.-G.).  A  method  for 


determining  astronomically  the 
variations  in  the  température 
and  pressure  of  the  atmosphère 
(Dépôt  aux  archives  après  lec- 
ture du  rapport  de  MM.  Lan- 
caster,  Lagrange  et  Terbyj, 
142. 

Jorissen  (A.).  Rapports  :  voii- 
Dauber;  Sduujten  [M.-C). 

Jorissenne  (G.).  Hommage  d'ou- 
vrage, 390. 

Jouveneau  (A.).  Soumet  une  noU' 
sur  l'accélération  séculaire  du 
mouvement  de  la  Lune,  483. 


Karpinsky  (Alexandre).  Élu  asso- 
cié, 489. 

Kayser  (G.).  Notes  sur  la  physique 
du  globe  et  la  météorologie 
(dépôt  aux  archives  après  avis 
de  MM.  Terby  et  Lancaster),  142. 

Kôlliker  [Albert  von).  Hommage 
d'ouvrage,  139. 

Kurth  (G.).  Manifestation  en  son 
honneur  à  Liège  (félicitations  1. 
567. 


Lagrange  [Ch.).  Rapports  :  voir 
Jenkins  (B.C.);  Ministre  de 
l'Intérieur. 

Lallemand  (Léon).  Hommage  d'ou- 
vrage avec  note  par  V.  Branis 
(La  Révolution  et  les  pauvres), 
328,  329. 

Lambert  [Camille).  Premier  se- 
cond prix  du  grand  concours 


TABLE    DES    AUTEURS. 


709 


de  peinture  de  1898,  336;  pro- 
clamé, 378 

Lamy  (T.-J.).  Membre  de  la  Com- 
mission spéciale  des  finances, 
579. 

lAincaster  (Alb.).  Note  bibliogra- 
phique :  voir  Société  royale  de 
médecine  publique.  —  Rapports  : 
xoirJenkins  B.-G.);  KayseriG.). 

Lankester  (Edwin-Ray).  Elu  asso- 
cié, 689. 

LefèvreVontalis  {A.).  Hommage 
d'ouvrage,  43^. 

/.<!  Paige  (C).  lUipports  :  voir  De- 
ruyts  (Fr.);  Minisire  de  Vlnté- 
rieur. 

Ijwtens  (Ch.).  Hommage  d'ou- 
vrage avec  note  par  G.  Van  der 
Mensbrugghe  (Recherches  expé- 
rimentales sur  la  formation  du 
son  dans  les  instruments  à 
bouche  de  flûte  ),  139,  140. 

Lunssens  (M.).  Trois  poèmes  pour 
voix  et  orchestre  (lecture  des 
appréciations  de  M.M.  Huberti, 
Mathieu,  van  Duyse  et  Benoit), 
132.  — Réception:  de  son  ouver- 
ture-fantaisie sur  la  légende  de 
Geneviève  de  Brabant,  223;  du 
compte  rendu  de  son  séjour  à 
Paris,  336. 


]»I 


Mans  (/.).  Recherches  sur  les 
ALCOOLS  NiTRÉs:  Sur  les  dérivés 
du  bromo-nitro -méthane  HjG 
-  Br(N02),  294;  rapports  de  MM. 
L.  Henry  et  Spring,  236,  239. 


Malaise  (C).  Ra[)ports  :  voir  Dou- 
dou  (Ern.);  Institut  interna- 
tional flottant.  —  Notes  biblio- 
graphiques :  voir  Meunier  (F.); 
Petermann  (A.). 

Mansion  (P.).  Rapports  :  voir  de 
la  Vallée  Poussin  {Ch.-J.)  ;  De- 
moulin  (A.). 

Maquet  {H.).  Rapport  :  voir  Cols 
{Aug.). 

Marchai  (Chevalier  Edm.).  Dis- 
cours prononcés  aux  funérailles 
de  Joseph  Jaquet,  120;  d'Adol- 
plie  Samuel,  337.  —  Notes 
bibliographiques  :  voir  Athénée 
deBrescia;  Brialmont(A.);  De- 
villers  (L.);  Gaillard  {A.);  Hecq 
(G.);  Nicolaetf'  dV.);  Pays-Bas 
(Gouvernement  de  S.  M.  la  Reine 
des).  —  Rapports  .  \oir  Boncquet 
(«.);  De  Hacn(V.);  Geefs  (G.); 
Marin  [J.)\  Weyns{J.). 

Marin  (Jacques).  Réception  de 
son  premier  rapport  semestriel, 
336;  lecture  des  appréciations 
de  MM  De  Groot,  Vinçotte  et 
Marchai,  464. 

Masiiis  (J.-B.-Voltaire).  Rapports  : 
voir  Boukteielf  {B.};    Waroitx 

(J.). 

Mathieu  (Êm.).  Félicité  au  sujet 
de  sa  nomination  de  directeur 
du  Conservatoire  royal  de  Gand, 
347.  —  Rapports  :  voir  Duyse 
(Flor.  van);  Lunssens  (M  ). 

Mercier  (D.).  Hommage  d'ouvrage, 
74. 

Mesdach  de  ter  Kiele  {Ch.).  Hom- 
mage d'ouvrage,  328. 


7dO 


TABLE    DES    AUTEURS. 


Meunier  (Fevji.).  Hommage  d'ou- 
vrage avec  note  par  C.  Malaise 
(Les  insectes  des  temps  secon- 
daires), 227,  231. 

Meijer  (P.).  Remercie  pour  son 
diplôme  d'associé,  73. 

Ministre  de  l'Agriculture  et  des 
Travaux  publics.  Envoi  d'ou- 
vrages, 336,  482. 

Ministre  de  la  Guerre.  Envoi 
d'ouvrage,  226. 

Ministre  de  l'Intérieur  et  de  l'In- 
struction publique.  Demande 
l'avis  de  l'Académie  :  1°  Sur  la 
représentation  de  la  Belgique 
au  Congrès  de  Paris  de  1900 
(décimalisation  du  temps  et  de 
la  circonférence),  139;  lecture 
du  rapport  de  MM.  Folie,  La- 
grange  et  Le  Paige,  724  ;  Sur 
la  proposition  adressée  par  le 
Congrès  géologique  interna- 
tional de  Saint-Pétersbourg, 
d'associer  la  Belgique  à  la  créa- 
tion d'un  Institut  international 
flottant,  390;  lecture  du  rap- 
port de  MM.  Dewalque,  Renard 
et  Malaise,  491.  —  Envoi  d'ou- 
vrages, 139,  206,  226,  327,  390, 
482,  568. 

Ministre  des  Alfaires  étrangères. 
Hommage  d'ouvrage,  327. 

Minne  (Aclnlle)  et  Willem  (V.). 
Recherches  expérimentales  sur 
la  circulation  sanguine  chez 
l'Anodonte  (rapport  de  MM.  L. 
Fredericq  et  F.  Plateau),  235. 

Monchamp  (G.).  Hommage  d'ou- 
vrage, 328.  —  Note  bibliogra- 


phique  :   voir  Billia  (L.-M.). 

Morgan  (J.  de).  Hommage  d'ou- 
vrage, 432. 

Mourlon  [M.).  Membre  de  la  Com- 
mission spéciale  des  finances, 
666. 

Millier  (Max).  Hommage  d'ou- 
vrage, 73. 

Musée  du  Congo.  Hommage  d'ou- 
vrages (Annales  de  botanique 
et  de  zoologie),  390,  483. 


N 


Nadaillac  (marquis  dej.  Hommage 
d'ouvrages,  74,  483,  568. 

Naville  {Ern.).  Hommage  d'ou- 
vrage, 328. 

Nélis  {Ch.).  Soumet  un  travail 
intitulé  :  Un  nouveau  détail  de 
structure  du  protoplasme  des 
cellules  nerveuses  (état  spiré- 
mateux  du  protoplasme),  484. 

Neuberg  (J.).  Rapports  :  voir  Dc- 
moulin  (A.);  Deruyts  (Fr.). 

Nicolaeff  (iV.).  Hommage  d'ou- 
vrages avec  note  par  le  cheva- 
lier Edm.  Marchai  [A.  Esquisse 
historique  sur  les  insignes  de 
souveraineté  et  les  décorations 
de  l'armée  russe;  B.  Cent  ans 
du  corps  militaire  des  courriers 
de  cabinet,  1796-1896  ,  568, 569. 


Pasquier  (Ern.).  Hommage  d'ou- 
vrages, 3,  227. 
Pays-Bas  (Le  Gouvernement  de 


TABLE    DES    AUTEURS. 


711 


S.  M.  la  Reine  des).  Hommage 
d'ouvrage  avec  note  par  le  che- 
valier Edm.  Marchai  (Le  Musée 
national  d'Amsterdam,  j^ar  V 
de  Stuers  et  P.-J.-H.  Guypers  , 
580,  581. 

Peeters(Ed  ).  Hommage  d'ouvrage, 
206. 

Peeters  (L.).  Lauréat  du  concours 
d'art  appliqué  (gravure  en  taille 
douce  1.  Rapport  de  M.  Ch.  Tar- 
dieu,  362;  proclamé,  378. 

Pelseneer  (P.).  Recherches  mor- 
phologiques et  phylogénétiques 
sur  les  Mollusques  archaïques 
(rapport  de  MM.  Éd.  Van  Bene- 
den,  Plateau  et  Van  Bambeke), 
U3,  145. 

Petermann  (A.).  Hommage  d'ou- 
vrage avec  note  par  G.  Malaise 
(Recherches  de  chimie  et  de 
physiologie  appliquées  à  l'agri- 
culture, t.  III),  483,  487. 

Piot  [Cil  ).Les  Écossais, dits  Scoten 
ou  Schotte,  en  Flandre,  94.  — 
Le  camp  de  Labienus  pendant 
la  guerre  des  Trévires,  104.  — 
Membre  de  la  Commission  spé- 
ciale des  finances,  579. 

Pirenne  {H.).  Remercie  pour  son 
diplôme  de  correspondant.  73. 
—  Désigné  pour  l'emplacer 
M.  Wauters  dans  la  Commission 
de  la  Biographie  nationale,  333. 

Plateau  (F.).  Rapports  :  voir  Cué- 
not  (L.);  Pelseneer  (P.);  Willem 
(V.)  et  Minne  (Achille). 

Popelin  [Marie).  Hommage  d'ou- 
vrage, 74. 


Que) Ion  (L.).  Hommage  d'ou- 
vrages, 227.  —  Demande  de 
pouvoir  occuper,  en  1899,  la 
table  belge  au  laboratoire  de 
Xaples,  482. 


B 


Radoux  [Th.).  Discours  prononcé 
à  l'inauguration  de  la  statue 
d'Henri  Vieuxtemps,  341. 

Rasse  (Fr.).  Exécution  de  sa  can- 
tate Comala,  379. 

Renard  (A. -F  ).  Élu  membre  titu- 
laire, 689.  —  Rapport  :  voir 
Institut  international  flottant. 

Renault  [R.).  Hommage  d'ouvra- 
ges, 390. 

Rivier  [Alphonse).  Décès,  206.  — 
Discours  prononcé  à  ses  funé- 
railles par  le  baron  Em.  de 
Borchgrave,  211  —  M.  le  che- 
valier Descamps  écrira  sa  notice 
pour  l'Annuaire,  327. 

Rivier  (Ch.).  Remercie,  en  son 
nom  et  au  nom  de  sa  famille, 
pour  les  sentiments  de  condo- 
léance qui  lui  ont  été  exprimés, 
327. 

Robie  [Jean).  L'art  et  la  lumière, 
464.  —  Membre  de  la  Commis- 
sion spéciale  des  finances,  583. 

Rolin-Jaequenujns  [G.).  Félicité  au 
sujet--de  sa  présence  à  la  séance 
du  7  novembre  1898,  431. 

Roo.'^es  (Max.).  Rapport  :  voir  Ano- 
nymes ;  Baes  [Edgar). 


712 


TABLE  DES  AUTEURS. 


Samuel  (Ad.).  Décès,  335;  dis- 
cours prononcé  à  ses  funé- 
railles par  le  chevalier  Edm. 
Marchai,  337. 

Scimylen  {M.-C  ).  Sur  les  salicy- 
lates  doubles  de  métal  et  d'anti- 
pyrine  (3«  communication),  172; 
rapport  de  MM.  Jorissen  et 
Spring,  146,  147. 

Selys-Longckamps  (baron  Edm. 
de).  Discours  prononcé  aux 
funérailles  d'Ern.  Candèze.  4. 
—  Hommage  d'ouvrage,  390. 

Servais  {Clém.).  Hommage  d'ou- 
vrage, 585. 

Société  des  Bollandistes.  Hommage 
d'ouvrage  avec  note  par  Ch.  De 
Smedt  (Bibliotlieca  hagiogra- 
phica  latina,  fasc.  I),  432,  436. 

Société  roijale  de  médecine  ptibli- 
que,  à  Bruxelles.  Hommage 
d'ouvrage  avec  note  par  Alb. 
Lancaster  (Travaux  publiés  à 
l'occasion  du  Congrès  national 
d'hygiène  et  de  climatologie 
médicale  de  la  Belgique  et  du 
Congo,  1897),  483,485. 

Spring  (  W.).  Sur  la  cause  de  l'ab- 
sence de  coloration  de  certaines 
eaux  limpides  naturelles,  266. 
—  Sur  l'origine  de  la  couleur 
bleue  du  ciel,  504.  —  Rapports  : 
voir  Ghijsen  (J.);  Hcmptijine 
(A.  de)  et  Bekaert  (A.);  Mans 
ij.);  Schmjten  [M.-C):  Swarts 
(Frcd.). 

Stullaert  (J.).  Membre  de  la  Com- 


mission spéciale  des  finances. 
583. 

Steclier  (J.).  Note  bibliographique  : 
voir  Chauvin  (Y.).  —  Rapport  : 
voir  Garsou  (J  ). 

Stuers  (  V. de).  Voir  Pays-Bas  (Gou- 
vernement de  S  M.  la  Reine 
des). 

Swarts  {Fréd.).  Sur  quelques  déri- 
vés chlorobromés  en  Ca,  519. — 
Contribution  à  l'étude  de  l'oxy- 
dation des  éthylènes  halogènes, 
532;  rapports  de  MM.  Spring  et 
Henry  sur  ces  deux  communi- 
cations, 491,  492,  494. 


Tack  (P.).  Soumet  une  note  inti- 
tulée :  Nonmia  geographica  bel- 
gica,  438. 

Tardieu  (Cli.).  Félicité  au  sujet  de 
son  retour  du  Congo,  334.  — 
Sur  l'art  au  XIX^  siècle  (dis- 
cours), 365.  —  Rapports  :  voir 
Anonymes;  Aerts  (J.);  Baes 
(Edgar);  Peeters{L.). 

Terby  (Fr.).  Sur  l'aurore  boréale 
du  9  septembre  1898,  observée 
à  Grammont  et  à  Louvain,  263. 
—  Rapports  :  voir  Jenkins 
[B-G.y,  Kayser  (G.) 

Thomas  (Paul).  Hommage  d'ou- 
vrage, 432. 

Tilly  (/.  De).  Membi-e  de  la  Com- 
mission spéciale  des  finances, 
566. 

Toussaint  (Le  chanoine).  Hom- 
mage d'ouvrante,  78 


TABLE  DES  AUTEURS. 


7i; 


Vander  Hueghen  [Ferd.].  Note  au 
sujet  de  la  mort  d'Emile  Ban- 
ning,  207. 

Van  der  Mensbriigghe  (G.)  Remet 
pour  VAi27iuni)'e  de  1899  sa 
notice  sur  Hubert  Valérius,  2. 
-  Sur  les  nombreux  etï'ets  de 
l'élasticité  des  liquides  (troi- 
sième communication  ,  281.  — 
Hommage  d'ouvrage  avec  note 
bibliographique  (Sur  les  pro- 
))riétés  fondamentales  des  li- 
quides), 483,  484.  —  Note 
bibliographique  :  voir  Lootens 
[Ch.).  —  Rapport  :  voir  Ziegler 
(V.de). 

Vanlair  {C).  Rapport  :  voir  Bonk- 
leietf'{B.). 

Vial(D.).  Dépose  un  pli  cacheté, 2. 

Yieuxtcmps  (feu  Ht')iri).  Inaugura- 
lion  de  sa  statue  à  Verviers 
(discours  par  M.  Radoux),  341. 

Vinçotte  (Th.).  Rapports  :  voir 
Bçncquel  (//.);  De  Haen  (F.); 
Geefs{G  );  Marin  iJ.r,  Weyiis (J.). 

Vloor^  {Ém.).  Lauréat  (pi'emier 
prix)  du  grand  concours  de 
peinture  de  1898,  336  ;  |)ro- 
clamé.  378. 


Warou.v  (J.).  Du  tracé  myocar- 
dique  du  cœur  exsangue  (deu- 
xième note),  62;  rapport  verbal 
de  MM.  L.  Fredericq  et  J.-B. 
Masius,  10. 

Westlake  {John).  Remercie  pour 
son  diplôme  d'associé,  73. 

Weyns  {Jides).  Appréciation  ver- 
bale de  MM.  De  Groot.  Vinçotte 
et  Marchai  sur  son  buste  en 
marbre  de  feu  J.-J.  Haus,  464. 

Wiilem  (F.)  et  Minne  {Achille). 
Recherches  expérimentales  sur 
la  circulation  sanguine  chez. 
l'Anodonte  (rapport  de  MM.  L. 
Fi-edericq  et  F.  Plateau),  235. 

Wilniotte  (M.).  Note  bibliographi- 
que :  voir  Bovy  {Arthur).  — 
Rapport  :  voir  Garsou  {J.). 

Wii^ders  (/.).  Rapport  :  voir  Cols 
{Aug.) 


Ziegler  {V.  de).  Soumet  une  note 
sur  les  tremblements  de  terre 
et  les  marées  dépôt  aux  archi- 
ves). Rapport  de  MM  Folie  et 
Van  der  Mensbrugghe,  240,  241. 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


Action  (Sur  1')  caialytique  de  la 
mousse  de  platine  et  de  palla- 
dium; par  A.  de  Hemptinne, 
155;  rapports  de  MM.  Spring  et 
De  Heen,  145, 146. 

Adenet  le  Roi  et  son  œuvre  ;  par 
Arthur  Bovy  (Note  bibliogra- 
phique par  M.  VVilmotte),  212. 

Agronomie.  Recherches  de  chimie 
et  de  physiologie  appliquées  à 
l'agriculture,  tome  III;  par  A. 
Petermann  (Note  bibliogra- 
phique par  G.  Malaise),  487. 

Alcools.  Recherches  sur  les  alcools 
nitrés  :  Sur  les  dérivés  du  bro- 
mo-nitro-méthane  HaC  -  BriNO»); 
par  J.  Maas,  294;  rapports  de 
3IM.  Henry  et  Spring,  236,  239. 
—  Voir  Nitriles. 

Aldéhyde.  Voir  Condensation. 

Algues.  Sur  la  réparation  de  quel- 
ques Algues  (Mé)  noir  es  in-8°, 
t.  LVIII)  ;  par  É.  De  Wildeman. 
Rapport  de  MM.  L.  Errera  et 
Crépin,  22. 

Allégorie.  Voir  Concours  de  la 
Classe  des  beaux-arts,  1898. 

Annuaire  de  l'Académie  (Notices 
pour  1').  Voir  Biographie. 

Anodonte.  Voir  Circulation. 

Anthropologie.  Voir  Grottes. 


Arabes  (Ouvrages).  Voir  Biblio- 
graphie. 

Armée  russe.  I. Esquisse histori([ue 
sur  les  insignes  de  souveraineté 
et  les  décorations  de  l'armée 
russe.  Période  des  grands 
princes  et  des  czars.  —  II.  Cent 
ans  du  Corps  militaire  des  Cour- 
riers de  cabinet,  1796-1896;  par 
N.  Nicolaeff  (Note  bibliogra- 
phique par  le  chevalier  Edm. 
Marchai),  569. 

Art  (L')  au  XI\e  siècle  (discours); 
par  Ch.  Tardieu,  365.  —  L'art 
et  la  lumière;  par  J.  Robie, 
464. 

Astronomie.  Quelques  grandes 
phases  de  l'histoire  de  l'astro- 
nomie; par  F.  Folie,  637.  — 
Voir  :  Latitudes;  Lune;  Nuta- 
tion. 

Atmosphère.  A  method  for  deter- 
mining  astronomieally  the  va- 
riations in  the  température  and 
pressure  of  the  atmosphère 
(Dépôt  aux  archives  après  lec- 
ture du  rapport  de  MM.  Lancas- 
ter,  Lagrange  et  Terby),  142. 

Aurore  boréale  (Sur  1')  du  9  sep- 
tembre 1898,  observée  à  Gram- 
mont  et  à  Louvain  ;  par  F. 
Terby,  263. 


TABLE    DES   MATIERES. 


715 


B 


Beaux-arls.  Voir  Art  ;  Biographie; 
Bonvicino;  Bustes-,  Concours  de 
la  Classe  des  beaux-arts;  Con- 
cours {Grands).  Py'i.v  de  Rome. 

Belgique.  Note  bibliographique , 
car  P.  Fredericq  (Een  Noord- 
Nederlander  over  zijn  omreisje 
door  België  in  18ïi3),  75. 

Bibliographie  des  ouvrages  arabes, 
3e  livraison:  par  V.  Chauvin 
(Note  bibliographique  par  J.  Ste- 
cher),  80. 

Bibliotheca  hagiographica  latina, 
fasc.  1  ;  par  la  Société  des  Bol- 
landistes  (Note  bibliographique 
par  Ch.  De  Smedl),  436. 

Bienfaisance.  Voir  Révolution. 

Billet  cacheté  déposé  par  M  Vial,  2. 

Biographie.  Notice  sur  Hubert  Va- 
lérius;  par  G.  Van  der  Mens- 
brugghe  {Annuaire  de  1899),  2. 
—  Notice  sur  Pierre  Willems; 
par  V.  Brants  (Aimuaire  de 
1899),  74.  —  M.  Descamps  ac- 
cepte d'écrire,  pour  V Annuaire, 
la  notice  d'.\lphonse  Rivier,  327. 
M.  Brialmonl,  celle  d'Emile 
Banning,  327.  —  Note  de 
M.  Vander  Haeghen  (annonce 
de  la  mort  d'Emile  Banning , 
207.  —  Les  Michel,  les  .\dam 
et  Clodion;  par  Alb.  Jacquot 
(Note  bibliographiciue  par  H. 
Hymans),  129.  —  Voir  Funé- 
railles, Jubilés,  Monuments. 

Biologie.  MM.Francotte  et  Querton 
demandent  à  pouvoir  occuper 


en  1899  la  table  belge  au  Labo- 
ratoire de  Naples,  482. 

Bonvicino  (L'opère  di).  Album  de 
phototypies  publié  par  l'Athé- 
née de  Brescia  (Note  bibliogra- 
phique par  le  chevalier  Edm. 
Marchai),  581. 

Botanique.  \oir  Algues  ;  Concours 
de  la  Classe  des  sciences  ;  Flore. 

Brabant  (Le  Conseil  de).  Voir 
Conseil. 

Bretex  (Jaques)  ou  Bretiaus  :  Le 
Tournoi  de  Ciiauvency;  par  G. 
Hecq  (Note  bibliographique  par 
le  chevalier  Edm.  Marchai),  332. 

Bustes  des  académiciens  décédés. 
Appréciations  verbales  de  MM. 
De  Groot,  Vinçotle  et  Marchai 
sur  les  bustes  en  marbre  de  feu 
Guillaume  Geefs,  par  Georges 
Geefs  et  de  feu  J.-J.  Haus,  par 
J.  Weyns,  464. 


Camp  (Le)  de  Labienus  pendant 
la  guerre  des  Trévires;  par  Ch. 
Piot,  104. 

Catalyse.  Voir  Action. 

Chanson  flamande.  Voir  Concours 
de  la  Classe  des  beaux-arts. 

Chartes  du  comte  de  Hainaut  de 
l'an  1200;  par  L.  Devillers  (Note 
bibliographique  parle  chevalier 
Edm.  Marchai),  80. 

Chimie.  Voir  :  Action  catalytique; 
Agronomie;  Alcools;  Coloration; 
Composés;  Condensation  ;  Déri- 
vés;  Fermentations;  Nitriles- 


716 


TABLE    DES    MATIERES. 


alcools;  Oxydation;   Réaction; 
Salicylales. 

Ciel.  Voir  Couleur. 

Circulation.  Recherches  expéri- 
meiilales  sur  la  circulation  du 
sang  chez  l'Anodontej  par  V. 
Willem  et  A.  Minne  'rapport 
de  M3I.  L.  Fredericq  et  F. 
Plateau»,  235. 

Cœur.  Sur  le  tracé  myocardique 
du  cœur  exsangue  ;  par  J .  Wa- 
roux,  62;  rapport  verbal  de 
MM.  L.  Fredericq  et  J.-B. 
Masius,  10.  —  Voir  Circulation. 

Coloration.  Sur  la  cause  de  l'ab- 
sence décoloration  de  certaines 
eaux  limpides  naturelles;  par 
W.  Spring,  266. 

Commission  de  la  Biographie  na- 
tionale. Membres  :  MM.  H.  Pi- 
renne,  333;  Ern  Gossart,  579; 
Florim.  van  Duyse,  583. 

Commission  royale  d'histoire.  Ou- 
vrages déposés  dans  la  biblio- 
thèque de  l'Académie,  136. 

Commission  spéciale  des  finances  : 
Classe  des  sciences.  Reélec- 
tion, 566. 

Classe  des  lettres.  Réélec- 
tion, 579.  —  M.  Wauters  rem- 
placé par  M.  Descamps  579. 

Classe  des  beaux-arts.  Ré- 
élection, 583.  M.  Samuel 
remplacé  par  M.  Huberti.  583. 

Composés.  Sur  divers  composés 
non  saturés;  par  L.  Henry,  31. 
—  Sur  divei's  composés  nitrés 
alii)liatiques  à  fonctions  multi- 
ples; par  L.  Henry,  149. 


Concours  annuels  : 

Classe  des  scienxes  (1898). 
Mémoires  reçus  et  désignation 
des  commissaires,  141.  —  Ajour- 
nement du  jugement  des  mémoi- 
res sur  la  question  de  mathéma- 
tiques. 489,  585.  —  Lecture  des 
rapports  sur  les  mémoires  reçus 
en  réponse  aux  questions  de 
sciences  naturelles,  490.  —  Mé- 
moire couronné  sur  la  digestion 
dans  les  urnes  de  Nepenthes; 
par  G.  Clautriau  (rapports  de 
MM.  Errera,  Gilkinet  et  Crépin), 
586,  590.  —  3Iémoire  couronné 
sur  l'excrétion  chez  les  Mol- 
lusques (rapports  de  MM.  F.  Pla- 
teau, Éd.  Van  Beneden  et  Van 
Bambekei,  592,  599.  —  Procla- 
mation, 688. 

Classe  des  lettres  (1899). 
Blémoires  i-eçus  et  désignation 
des  commissaires ,  437 .  — 
(1901)  Programme,  213,  217. 

Classe  des  beaux -arts 
(1898;  :  Partie  littéraire.  Sur 
les  analogies  et  les  différences 
qui  existent  entre  l'allégorie  et 
le  symbole  (Mémoire  couronné 
de  M.  Edgar  Baes.)  Rapport  de 
MM.  Tardieu,  Rooses  et  De 
Vriendt,  348,  356  —  Historique 
de  la  partie  spécialement  musi- 
cale de  la  chanson  flamande. 
(3Iémoire  couronné  de  M.  F. 
van  Duyse.)  Rai)ports  de  MM. 
Gevaert,  Benoit  et  Mathieu,  356, 
360.  —  Remerciements  des  lau- 
réats,  463.   —    Art    appliqué. 


TABLE    DES    MATIERES. 


717 


(Portrait  en  buste,  gravé  en 
taille-douce,  d'un  Belge  contem- 
porain.) Rapport  l'ait  au  nom 
de  la  Section  de  gravure  par 
M.  Tardieu,  3Q±  MM.  L.  Peeters 
et  J.  Aerts,  prix  en  partage, 
363.  —  Proclajnation  des  résul- 
tats, 375. 
Concours  (Grands).  Pri.x:  de  Rome  : 

Architecture  (1896).  Pre- 
mier rapport  de  M.  Cols .  Lecture 
des  a[»préciations  de  MM.  Win- 
ders,  Janlet  et  Maqueli,  583. 

Musique  (1895).  Lecture  des 
appréciations  de  MM.  Huberti, 
3Iathieu,  van  Duyse  et  Benoit 
sur  l'envoi  réglementaire  de 
M.  Martin  Lunssens  (Trois  poè- 
mes pour  voix  et  orchestre), 
132.  —  Réception  d'une  ouver- 
ture-fantaisie sur  la  légende  de 
Geneviève  de  Brabant  et  du 
compte  rendu  de  son  séjour  à 
Paris,  par  le  même  lauréat,  223, 
336.  —  (1897).  Exécution  de 
la  cantate  de  M.  Fr.  Rasse,  pre- 
mier second  prix,  379. 

Peinture  (1898).  Lauréats, 
336;  proclamation,  378. 

Sculpture  (1894).  Premier 
rapport  semestriel  de  M.  Victor 
De  Haen,  lauréat  (Lecture  des 
appréciations  de  5IM.  De  Groot, 
Vinçotte  et  3Iarchal),  464.  — - 
(1897).  Premier  rapport  de 
M.  H.  Boncquet,  lauréat  (Lec- 
ture des  appréciations  de  MM. 
De  Groot,  Vinçolte  et  Marchai), 
346. 


Condensation  (Sur  la)  de  l'aldé- 
hyde benzoïque  et  de  la  mono- 
chloracétone,  par  J.  Ghysen, 
313;  rapport  de  MM.  Spring  et 
Henry,  240. 

Congo.  M.  Tardieu  félicité  au  sujet 
de  son  retour  du  Congo,  334.  — 
Voir  Expédition  ;  Congrès  na- 
tional d'hygiène,  etc. 

Congrès  géologique  international 
de  Saint-Pétersbourg.  Voir  In- 
slilul  international  flottant. 

Congrès  pour  la  décimalisation  du 
temps  et  de  la  circonférence,  à 
Paris.  Demande  d'avis  sur  la 
représentation  de  la  Belgique 
à  ce  Congrès,  129.  (Communica- 
tion au  Ministre  de  l'Intérieur  du 
rapport  de  MM.  Folie,  Lagrange 
et  Le  Paige»,  724. 

Congrès  national  d'hygiène  et  de 
climatologie  médicale  de  la 
Belgique  et  du  Congo  (Note  bi- 
bliographique par  A.  Lancaster), 
485.' 

Conseil{Le)  de  Brabant  :  Histoire. 
Organisation.  Procédure,  t.  I^'', 
par  A.  Gaillard  (Note  bibliogra- 
phique par  le  chevalier  Edm. 
Mai'chal),  434. 

Couleur  bleue  du  ciel  (Sur  l'ori- 
gine de  la);  par  W.  Spring,  504. 

Courbes  gauches  (Sur  quelques 
propriétés  des)  ;  par  F.  Deruyts, 
194  ;  rai)port  de  MM.  Le  Paige 
et  Neuberg,  148.  —  Voir  Poly- 
gones. 

Courriers  de  cabinet.  —  Voir 
Année  russe. 


718 


TABLE    DES    MATIERES. 


D 


Décimalisation  du  temps  et  de  la 
circonférence.  —  Voir  Congrès. 

Décorations.  Voir  Armée  russe. 

Défense  des  États.  Voir  Fortifica- 
tion. 

Dérivés.  Sur  quelques  dérivés 
chlorobromés  en  C^;  par  Fr. 
Swarts,  519;  rappoits  de  M3I. 
Spring  et  Henry,  491,  492.  — 
Voir  JSitriles-alcooh. 

Dons.  Ouvrages  imprimés  offerts  : 
par  S.  A.  S.  le  prince  Albert  Je""  de 
Monaco,  227  ;  l'Athénée  de  Bres- 
cia,  S81  ;  par  MM.  Bambeke  iCh. 
Van),  139,  483;  Banning  (M'"« 
veuve  Emile),  432  ;  Beneden  (Éd. 
Van),  226  ;  Bibliothèque  royale 
de  La  Haye  (M.  le  Directeur  de 
la),  569;  BUlia  (L.-M.),  568  ;  Bovy 
(A.),  206;  Brialmont  {A.\  '2; 
Cabinet  des  médailles  de  La 
Haye  (M.  le  Directeur  du),  569; 
Chauvin  (V.),  74;  Chômé  (L.), 
328;  Congo  (État  indépendant 
du), 390, 483;  Créraers  (E.),581  ; 
Cumont  (G. ),  227, 328  ;  de  Jonghe 
(vicomte  B.),  328;  de  la  Vallée 
Poussin  (L.),  329;  Devillers(L.), 
74;  De  Wildeman  (E.),  3  ;  Errera 
(L.),  227,  390;  Faider  (A.),  432; 
Ferron  (Eug.),  483;  Fredericq 
(P.),  74;  Gaillard  (A.),  432;  Ga- 
mond  (L.  de),  568;  Gegenbaur 
(Ch.),227;  Génard(P.),i20;  Gil- 
son  (G.).  227  ;  Goblet  d'Alviella 
(Comte Eug.),  568;  Gréhant  (N.), 
3;  Guilliaume  (J.),  74;  Harlez 
(Ch.  de),  328;  Hecq  (G.),  338; 


Homolle  (Th.),  328;  Jorisseniie 
(G.),  390;  KoUiker  (Alb.  von), 
139  ;  Lallemand  (L.),  328  ;  LelV- 
vre-Pontalis  (A.),  432;  Lootens 
(Ch.),  139;  Mercier  (D.),  74; 
Mesdach  de  ter  Kiele  (Ch.  , 
328;  Meunier  (F.),  227;  Ministre 
de  l'Agriculture  et  des  Travaux 
publics,  336, 482;  Ministre  de  la 
Guerre,  226  ;  Ministre  de  l'Inté- 
rieur et  de  l'Instruction  publi- 
que, 139,  206,  226,  327,  390, 
482,  568  ;  Ministre  des  Affaires 
étrangères,  327;  Monchamp(G.), 
328;  Morgan  (J.  de),  432;  Mill- 
ier (M.),  73;  Musée  du  Congo, 
390 ,  483  ;  Nadaillac  (marquis 
de),  74,  483,  568;  Naville  (E.), 
328;  Nicolaeff(N.),568;  Pasquier 
(E.),  3,  227;  Pays-Bas  (Gouver- 
nement de  S.  M.  la  Reine  des". 
580;  Peeters  (Ed.),  206;  Peter- 
mann  (A.),  483;  Popelin  (M''e),  74; 
Querton  (L.),  227;  Renault  (B.), 
390  ;  Selys  Longchamps  (baron 
Edm.  de),  390;  Servais  (Clém.\ 
585  ;  Société  des  Bollandistes, 
432  ;  Société  royale  de  médecine 
publique,  à  Bruxelles,  483; 
Thomas  (P.  ),  432  ;  Toussaint  (Le 
chanoine  I,  74;  Van  der  Mens- 
brugghe  (G.),  483.  —  Voir 
Ouvrages  présentés. 


E 


Eaux.  Voir  Coloration. 

Écossais   (Les)   dits    Scoten   ou 

Schotte  en   Flandre;   par  Ch. 

Piot,  94. 


TABLE    DES   MATIERES. 


719 


Egypte  ancienne.  \oïr  Symbolique. 
Élasticité.  —  Voir  Liquides. 
Élections,  nominations  : 

Classe  des  sciences.  JIM.  Re- 
nard et  Errera,  élus  membres 
titulaires;  F.  Deruyts  et  Ch.-J. 
de  la  Vallée  Poussin,  élus  corres- 
pondants; L.  Cremona,  Edwin- 
Ray  Lankester,  A.  Karpinsky, 
élus  associés,  689. 

Classe  des  lettres.  Remer- 
ciements pour  les  diplômes,  73. 
—  M.  Giron  élu  directeur  i)our 
1899,  206. 

Classe  des  beaux  -  arts  . 
M.  Benoit,  nommé  directeur  du 
Conservatoire  royal  d'Anvers 
(Félicitations),  222.  —  M.  Ém. 
3Iathieu,  nommé  directeur  du 
Conservatoire  royal  de  Gand 
(Félicitations),  347. 

Élasticité.  Voir  Liquides. 

Électricité.  Quelques  faits  relatifs 
à  la  décharge  produite  par  la 
radiation  infra-électrique;  par 
P.  De  Heen,  35. 

Éléments  neutres  d'espèce  quel- 
conque (Sur  la  détermination 
d');  par  F.  Deruyts,  187;  rap- 
port de  MM.  Le  Paige  et  Neu- 
berg,  148. 

Enseignement  et  politique.  Voir 
Politique. 

Entomologie.  Voir  Insectes. 

Éthylènes  halogènes.  Voir  Oxyda- 
tion. 

Évolution.  Quelques  mots  sur 
l'Évolution;  discours  par  Éd. 
Dupont,  601. 


Expédition  (Une)  belge  au  Nil 
(Prise  de  Redjaf)  ;  par  Léon 
Chômé  (Note  bibliographique 
par  Ern.  Discailles),  331. 


Fermentations.  Nouvelle  lettre  de 
M.  Dauber  relative  aux  recher- 
ches du  D'-  Buchner  sur  les  fer- 
mentations (dépôt  aux  archives). 
Lecture  du  rapport  de  MM.  Jo- 
rissen  et  Gilkinet,  391. 

Flandre.  —  Voir  Écossais. 

Flore  belge  (Prodrome  de  la)  : 
Thallophytes,  fasc.  I-III;  par 
E.  De  Wildeman  (Note  biblio- 
graphique par  Léo  Errera),  8. 

Fonctions.  Sur  la  fonction  Ç  (s) 
de  Riemann  et  le  nombre  des 
nombres  premiers  inférieurs  à 
une  limite  donnée;  par  Ch.-J. 
de  la  Vallée  Poussin  (rapport  de 
M3L  P.  Mansion  et  J.  Deruyts). 
10,  21. 

Fondations.  Voir  Prix. 

Fortification.  Progrès  de  la  dé- 
fense des  États  et  de  la  fortifi- 
cation permanente  depuis  Vau- 
ban;  par  le  général  Brialmont 
(Note  bibliographique  par  le 
chevalier  Edm.  Marchai),  6. 

Funérailles.  Discours  prononcés 
aux  funérailles  :  d'Ern.  Can- 
dèze,  par  le  baron  Edm.  de 
Selys  Longchamps,4;  de  Joseph 
Jaquet,  parle  chevalier  Edmond 
Marchai,  120;  d'Emile  Banning 
et  d'Alphonse  Rivier,   par   le 


720 


Table  des  matières. 


baron  de  Borchgrave,  !209,  211  ; 
d'Ad.  Samuo.l,  parle  chevalier 
Edm.  Marchai,  837.  —  Voir 
Monuments. 

G 

Gaz.  Voir  Luminescence. 

Géographie.  Voir  Noniina  geogra- 
phica  beUjica 

Géologie  :  voir  Évolution  ;  Institut 
international  flottant. 

Grottes .  Nouvelle  exploration 
scientifique  des  grottes  d'Engis, 
d'Engihoul  et  des  environs;  par 
Ernest  Doudou  (dépôt  aux  ar- 
chives). Lecture  des  rapports 
de  MM.  Fraipont  et  Malaise,  391 . 


H 


Hagiographie.  Voir  Bibliotheca... 

Huinaut.  Voir  Chartes. 

Histoire.  Voir  Armée  russe;  Bel- 
gique; Ca)np;  Chartes  ;  Conseil; 
Écossais. 

Histoire  des  religio)is.  Voir  Sym- 
bolique. 

Histoire  littéraire.  Voir  Adenet  le 
Roi;  Bretex;  Napoléon. 


Insectes  (Lesj  des  temps  secon- 
daires; par  Fernand  Meunier 
(Note  bibliographique  par  G.  Ma- 
laise), 231.' 

Insignes.  Voir  Armée  russe. 

Institutinternationalflottant{?TO- 
jet  de  création  d'un).  Demande 
d'avis  adressée  au  nom  de  M.  le 


Ministre  de  l'Industrie  et  du 
Travail,  390.  Lecture  du  rap- 
port de  MM.  Dewalque,  Renard 
et  Malaise,  491. 

J 

Jubilés.  Cinquantième  anniver- 
saire de  la  mort  de  Berzelius 
(Adresse  de  félicitations),  139. 
—  Vingt- cinquième  annivei-- 
saire  de  la  fondation  du  Musée 
d'ethnographie ,  à  Stockholm 
(Lettre  de  félicitations),  327.  — 
Centenaire  de  l'Académie  impé- 
riale militaire  de  médecine  de 
Saint-Pétersbourg  (Lettre  de 
féhcitations),  482.  —  Vingt - 
cinquième  anniversaire  de  l'in- 
stitution par  M.  Kurth  de  sou 
cours  de  critique  histori(|ue 
(Félicitations),  567. 


Labienus(Le  camp  de).Voir  Camp. 

Laboratoire  de  Naples.  Voir  Biolc- 
gie. 

Latitudes.  Fondements  de  la  théo- 
rie de  la  variation  des  latitudes  ; 
par  F.  Folie,  276. 

Liquides.  Sur  les  nombreux  effets 
de  l'élasticité  des  liquides  (troi- 
sième communication);  par  G. 
Van  der  Mensbrugghe,  281.  — 
Sur  les  propriétés  fondamen- 
tales des  liquides  ;  par  G.  Van 
der  Mensbrugghe  (note  biblio- 
graphique), 484. 

Liturgie.  Voir  Stjmboiique. 


TABLE    DES    MATIERES. 


7^1 


Lumière{La)ei  l'Art;  par  J.Robie . 
46  i. 

Luminescence  des  gaz  (Note  sou- 
mise par  A.  de  Hemplinne),483. 

Liine.  Sur  la  cause  de  l'accéléra- 
tion  séculaire  de  la  Lune  (Note 
soumise  par  A.  Jouveneau),  483. 


M 


Malacologie.  Voir  Concours  de  la 
Classe  des  sciences;  Mollusques. 

Marées  (Sur  lesi  et  les  tremble- 
ments de  terre;  par  V  de 
Zicgler  (Dépôt  aux  archives). 
Rapports  de  MM.  Folie  et  Van 
der  Mcnsbrugghe,  240,  241. 

Mathématiques.  Voir  Courbes; 
Éléments  neutres  ;  Fonctions  ; 
Mécanique  ;  Polygones  ;  Sur- 
faces. 

Mécanique  pure.  Mémoire  énon- 
ç;uit  et  démontrant  un  nouveau 
prin('i|)e  de  mécanique  (soumis 
par  Eiig.  Ferron),  484. 

Météorologie.  Voir  Atmosphère; 
Aurore  boréale;  Couleur;  Phy- 
sique du  globe;  Tremblements  de 
terre. 

Mollusques.  Recherches  morpho- 
logiques et  phyiogcnéliques  sur 
les  Mollusques  ai'chaïques;  par 
P.  Peiseneer  (rapports  de  M.\I. 
Éd.  Van  Beneden,  Plateau  et 
Van  Bambeke),  143,  143.  — 
Voir  Concours  de  la  Classe  des 
sciences. 

Monochloracétone.  Voir  Condensa- 
tion. 

Monuments.  Inauguration,  à  Ma- 

S"*   SÉRIE,    TOME    XXXVI, 


lines,  de  la  statue  de  P.-J.  Van 
Beneden,  138;  discours  pro- 
noncé par  M.  Éd.  Dupont,  228; 
remerciements  de  M.  Éd.  Van 
Beneden  et  de  sa  famille,  138. 
—  Inauguration,  à  Verviers,  de 
la  statue  de  Henri  Vieuxtemps 
(Discours  prononcé  par  Th  Ra- 
doux),  341. 

Morale.  Voir  Philosophie . 

Moretto.  Voir  Bonvicino. 

Musée  (Le)  national  d'Amsterdam, 
texte  de  Victor  de  Stuers,  plan- 
ches de  l'architecte  P.-J. -H.  Cuy- 
pers  (Note  bibliographique  par 
le  chevalier  Edm.  Marchai),  581. 

Musique.  Voir  Concours  de  la 
Classe  des  beaux-arts  ;  Concours 
{Grands).  Prix  de  Rome;  Son. 

Myologie.  Voir  Cœur. 


Napoléon.  Barthélémy  et  Méry 
étudiés  spécialement  dans  leurs 
rapports  avec  la  légende  napo- 
léonienne. (Mémoires  in  -  8», 
t.  LVIIL)  Rapports  de  M.W.  Dis- 
cailles, Stecher  et  Wilmotte, 
88.  91,  92. 

Nécrologe.  Banning  (Emile),  206; 
Burne-Jones  (sir  Edward),  120; 
Cmdèze  (Ernest),  2;  Garnier 
(Cliarles),  335;  Hall  (James), 
226;  Jaquet  (Joseph),  119;  Ri- 
vier  (Alph.),  206;  Samuel  (Ad.). 
335. 

Nepenlhes  (Urnes  de).  Voir  Con- 
cours de  la  Classe  des  sciences 
de  1898. 

Neurologie.  Voir  Protoplasme. 

48 


722 


TABLE    DES    MATIERES, 


Nil.  Voir  Expédition. 

Nitriles-?dcooh  aliphatiques  (Sur 
les  dérivés  de  quelques);  par 
L,  Henry,  22.  —  Sur  divers 
nitriles-alcools  penta-  et  hexa- 
carbonés;  par  le  même,  241. 

Nomina  geographica  bel£çica(Note 
soumise  par  P.  Tack),  438. 

Nutation.  Véritication  de  l'exis- 
tence de  la  nutation  eulérienne 
dans  les  latitudes  observées  à 
Greenwich  pendant  les  années 
1880-1891;  par  F.  Folie,  392. 

O 

Ouvrages  présentés.  Juillet,  133; 
août,  223;  octobre,  379;  novem- 
bre, 47G;  décembre,  690.  — 
Voir  Dons. 

Oxydation.  Contribution  à  l'étude 
de  l'oxydation  des  éthylènes 
halogènes;  par  Fréd.  Swarts, 
532;  rapports  de  MM.  Spring  et 
Henry,  492,  494.  —  Sur  l'oxy- 
dation directe  de  l'éthylène  tri- 
chloro-éthyl-oxylé  CI2C  =  CCI 
(OCîHï);  par  L.  Henry,  497. 


Paléontologie.  Voir  Grottes,  In- 
sectes. 

Palladium.  Voir  Action  cataly- 
tiqiie. 

Pauvres  (Les)  et  la  Révolution. 
Voir  Révolution. 

Philosophie  et  morale.  Ouvrages 
offerts  par  L.-M.  Billia  (Note 
bibliographique  par  G.  Mon- 
champ),  o71. 


Physiologie  Voir  Agronomie;  Cir- 
culation ;  Cœur;  Concours  de  la 
Classe  des  sciences. 
Physique.  Non-  Électricité  ;  Liqui- 
des; Réaction;  Son. 
Physique  du  globe  (Sur  la)  et  la 
météorologie;  par  G.  Kayser,  3; 
dépôt  aux  archives  après  avis 
de  MM.  Terby  et  Lancaster,  142. 
—  Voir  Marées;  Tremblements 
de  terre. 
Platine.  Voir  Action  catalytique. 
Poésie.    Le  vers  français  et  les 
prosodies  modernes,  par  Jules 
Guilliaume  (Note  bibliographi- 
que par  Ern.  Discailles),  82. 
Politique  et  Enseignement  (Ou- 
vrages publiés  sous  le  voile  de 
l'anonyme  par  Ém.  Banning  et 
offerts  par  sa  veuve  (Note  biblio- 
graphique par  Ern.  Gossart).432. 
Polygones.  Sur  quelques  proprié- 
tés des  polygones  inscrits  aux 
courbes  gauches;  par  Fr.  De- 
ruyls,  5o3;  rapport  de  MM.  Le 
Paige  et  Neuberg,  496.  —  Voir 
Courbes. 
Prix  Anton  Bergmann.  Program- 
me de  la  seconde  période,  217, 
221. 
Prix  de  Keyn  (IX*  concours,  II» 
période).  M.  J.  Frederichs  remet 
un  exemplaire  imprimé  de  son 
a  Manuel  d'histoire  moderne  », 
couronné  en  mai  1898,  328. 
Prix  de  Saint-Génois.  Programme 

de  la  IVe  période,  216,  220. 
Prix  de  Stassart  (Notice  sur  un 
Belge  célèbre).  Programme  de 
la  huitième  période,  215,  219. 


TABLE    DES   MATIERES. 


725 


Prix  fondé  en  mémoire  de  J.-S. 
Stds.  Il  est  fait  remise,  en 
séance  publique,  d'un  exem- 
plaire des  OEuvres  de  J.-S.  Stas 
à  M.  R.  Gold?chmidt  et  à  M.  J. 
Denis,  491. 

Prix  Godecharle.  Sculpture 
(1897).  Premier  rapport  de 
M.  J.  Marin  (Lecture  des  appré- 
ciations de  MM.  De  Groot,  Vin- 
çotte  et  Marchai),  464.  —  Pein- 
ture (1897).  Réception  du 
premier  rapport  de  M.  Alfr. 
Bastien,  347. 

Prix  Teirlijick  (quatrième  pé- 
riode). Aucun  mémoire  n'a  été 
reçu  en  réponse  à  la  question 
posée,  438. 

Prix  décennaux  : 

Sciences  botaniques  (  pre- 
mière période).  Formation  du 
jury,  585. 

Chimie  et  physique  expéri- 
mentales (première  période). 
Formation  du  jury,  585. 

Prix  quinquennaux  : 

Littérature  française  (X» 
période,  1893-18971.  M.  Albert 
Giraud,  lauréat,  326;  proclamé, 
379. 

Prosodie.  Voir  Poésie. 

Protoplasme.  Un  nouveau  détail 
de  structure  du  protoplasme 
(état  spirémateux  du  proto- 
plasme) ;  travail  soumis  par 
Ch.  Nélis,  484. 

R 

Radiographie.  Voir  Électricité. 
Redjaf.  Voir  Expédition. 
Réaction.  Sur  les  vitesses  de  réac- 


tion; par  A.  de  Hemptinne  et 
A.  Bekaert,  399;  rapports  de 
MM.  Spring  et  De  Heen,  391, 
392. 

Révolution  (La)  et  les  pauvres; 
par  L.  Lallemand  (Note  biblio- 
grapliique  par  V.  BrantS',  329. 

Rôties  liturgiques.  Voir  Symbo- 
lique. 

Russie.  Voir  Armée  russe. 


Salicylates  (Sur  les)  doubles  de 
mélal  et  d'antipyrine  (troi- 
sième communication;;  par 
M  -C.  Scliuylen,  172;  rapport 
de  MM.  Jorissen  et  Spring,  146, 
147. 

Son.  Recherches  expérimentales 
sur  la  formation  du  Fon  dans 
les  instruments  à  bouche  de 
fliUe;  par  le  P.  Ch.  Lootens. 
(Noie  bibliographique  par  G. 
Van  der  Mensbruggiie),  140. 

Station  zoologique  de  Naplcs.  Voir 
Riologie. 

Statues.  Voir  Monuments. 

Statuts  et  règlements  de  l'Aca- 
démie. Rapport  sur  l'organisa- 
tion de  la  Classe  des  lettres,  574. 

Surfaces  (Sur  les)  minima  réglées 
et  les  surfaces  minima  à  lignes 
de  courbure  planes;  par  A. 
Demoylin  ^rapports  de  MM.  J. 
Deruy  ts,  J.  Neuberg  et  Mansion), 
232,  233,234. 

SijDihole.  Voir  Concours  de  la 
Classe  des  beaux-arts,  1898. 

Symbole  de  la  vie  et  de  la  création  ; 
par  B.  Boukteieff.  Dépôt  aux 


724 


TABLE    DES    MATIERES. 


archives  après  avis  de  MM.  Ma- 
sius  et  Vanlair,  232. 
Symbolique  comparée.  Un  curieux 
problème  de  transmission  sym- 
bolique Les  roues  liturgiques 
de  l'ancienne  Egypte;  par  le 
comte  Goblet  d'Alviella,  439. 


Toponymie.  Voir  Nomina  geogra- 

pliica  belgica. 
Tournoi  de  Ghauvency  Voir  Bre- 

tex. 


Tremblements  (Les)  de  terre  et  les 
marées  ;  par  V.  de  Ziegler  (dépôt 
aux  archives).  Rapports  de  MM. 
Folie  et  Van  der  Mensbrugghe, 
240,241. 


Vers  français  (Le).  Voir  Poésie. 
Voyages.  Voir  Belgique. 


Zoologie.  Voir  Biologie. 


TABLE  DES  PLANCHES  ET  DES  FIGURES. 


De  Heen  iP.).  Quelques  faits  rela- 
tifs à  la  décharge  produite  par 
la  radiation  infra- électrique 
(4  figures),  56-Gl. 

Goblet  d'Alviella  (Comte  EuG.i. 
Un  curieux  problème  de  trans- 
mission symbolique.  —  Les 
roues  liturgi(iues  de  l'ancienne 
Egypte  (lO' figures),  439-462. 

Hemptinne  (A.  de).  Sur  l'action 
catalytique  de  la  mousse  de  pla- 
tine et  de  palladium  (4  ligures), 
157-171. 

Hemptinne  (A.  de)  et  Bekaert  (A.  ). 


Sur  les  vitesses  de  réaction 
(2  figures),  405,  409. 

Terby'  iF.).  Aurore  boréale  du 
9  septembre  1898,  observée  à 
Grammont  et  à  Louvain  (1  fi- 
gure), 263. 

Van  der  Mensbrugghe  (G.).  Sur 
les  nombreux  elfels  de  l'élasti- 
cité des  liquides,  troisième  com- 
miinication(2  figures),  283,  291. 

Waroux  (Jules).  Du  tracé  myo- 
cardique  du  cœur  exsangue, 
deuxième  note  (18  figures), 
63-72. 


ERRATUM. 


Classe  des  sciences.  Séaiif.'  du 
m  octobre.  Rapports. 

Ajouter  :  MM.  Folie,  Lagrange  et 
Le  Paige  donnent  lecture  de 
leur  rapport  sur  la  demande 
adressée  par  M.  le  Ministre  de 


l'Intérieur  au  sujet  de  la  repré- 
sentaùon  de  la  Belgique  au  Cori- 
grès  de  Paris  en  1900.  ^Décimali- 
sation  du  temps  et  de  la  circonfé- 
rence.) Ce  rapport  sera  adressé 
en  copie  au  Gouvernement. 


PUBLICATIONS  ACADÉMIQUES. 

Depuis  la  rcoiganisation,  en  1816. 


IVouvcaux  Mëmoires,  t.  1-XlX  (I820-I84S);  in-4o.  —  >iénioires, 
t  XX-LllI  (18i6-18il8);  in-4'>.  -  Prix  :  8  fr.  par  volume  à  parlir  du  tome  X. 

Mémoii-es  couronnés,  t  IXV  (lS17-18f2);  in-40.  —  Mémoires 
couronnés  et  Mémoires  des  savants  étrangers, t. XVl-LM 

(184;M89!>).  —  Prix  :  8  Ir.  |)af  volume  à  partir  du  tome  XII. 

Mémoires  couronnés.  in-S»,  t.  I-LV,  LVIi.  Prix  :  4  fr.  par  volume. 

Tatoles  ae  Logarithmes,  par  A.  Namur  et  P  Maiision,  in-S». 

Taljles  des  Mémoires  (l816-IS.'i7)  (18;.8-1878.  ln-18. 

a^aljles  des  Mimnires,  nouvelle  éilition,  4772-1897;  in-8'>. 

Annuaire.  1-^'  à  Go""-  Minute,  ia3j-18!l9;  in-i8. 

Règlements  et  Documents.  coii(:ernantlestroisClasses;i896,in-18. 

Bulletins,  4«  scr.t.l-XXIII  —  2-  s6r.,t.  i-L;-8<^sér..t.  l-XXXVl.in-B». — 
Annexes  aux  lUtUeiins  de  18ol,  in-80.  —  Prix  :  4  fr.  par  volume. 

Tables  générales  des  r.ulletins  :  t.  I-XXI II,  !'«  sér.  (1832-1856).  iSbS; 
in-80. -2-  sér.,  t  l-X\  (18,-)7-1866!,  t.  XXI-L  (1867  18801  1883;  in-S».  -  'A'  sér.. 
t    1-XXX  il8vl-lt9.^ii,  1898;  iii-80. 

BiUiiograplxie  académique,  1"  édit.,  18.-;4,  2''  édit.,  1874,  'à'^  édit., 
188(î;  4"  édit..  1^9.i;iii-18. 

catalogue  de  la  B.bliollKHiue  de  lAcadémie,  l""  partie  :  Sociétés  savantes  et 
Kecueils  pirioiliiiues;  2''«  partie  :  sc.eiices,  ieities.  arts,  1S81-90;  4  vol.  in-80. 

Catalogue  de  la  l)ililiotlié(|ue  du  baron  de  Slassart,  I8(i3;  in-S». 

Centième  anniversaire  dt'/"<-«(i«no/((1772-1872).1872;  2  vol.gr.  in-S» 

Monuments  de  la  littérature  flamande. 
CEuvres  de  Van  Mae  riant  :  I)ER  NATUKEN  ni.OEME,  tome  i«^  publié 
par  J.  r.ormans,  1831;  1  vol.  in-S».  —  RysitiViiEi..  avec  Glossaire,  ]iub]ié  par  J.  David, 
1858-1860;  4  vol.;  — Ai.exanders  Geesten,  publié  par  Snellaert,  1860-1862;  2  vol.— 
IVederlandscne  gedicUten,  eie.,  publiées  par  Snellaert,  1869;  1  vol.  — 
partnonopeus  van  Bloys,  publié  par  J.  Bormans,  1871;  1  vol.  — 
Spegliel  der  ^Vyslleit,  van  Jaa  Pract,  publié  par  J.  Bormans,  1872;  1  vol. 

Œiii'ies  des  grands  écrivains  du  pays. 
CEuvrés  de  Cliastellain,  publiées  par  le  baron  Kervyn  de  Lettenbove. 
1863-1860,  8  vol.  in.8».  —  Le  l"  livre  des  Clironiques  de  Frois- 
sart,  par  le  même.  186  ',  2  vol.  —  Chroniques  de  Jelian  le  Bel, 
par  L.  Polain.  186-^2  vol.  —  Ll  Roumans  de  Cléomadès,  par  André 
Van  Hasselt.  1866,  2  vol  —  Dits  et  Contes  de  Jean  et  Uaudouin 
de  Condé.  par  Auguste  Sehf'ler.  18i6,  3  vol.  —  Li  ars  d'amour,  etc., 
par  J.  l'élit.  lb6(M872,  2  vol.  —  Œuvres  de  Froissart  :  Chroniques,  ^iv 
le  baron  Kervyn  de  Leiienhove.  1867-1877,  26  vol.; —  Poésies,  par  Aug.  Scheler. 
1870-1872.  3  vol.;  —  (ilo^toire,  par  le  même.  1874, 1  vol. —  Letres  de  Corn." 
mines,  par  Kervyn  de  Leiienhove.  181)7,  3  vol.  —  Dits  de  ^Vatriquet 
de  Couvin,  par  A.  Scheler.  1868,  1  vol. —  Les  Enfances  Ogier,  par 
le  même.  187i.  1  vol. —  Bueves  de  Commarciiis,  par  Adenès  li  Rois, 
par  le  même  1874,  1  vol.  —  Li  Ttoumans  de  :Berte  aux  grans 
pies,  |iar  le  même.  1874,  1  vol.  —  Trouvères  toelges  du  X-IIc  au 
XIV*  siècle,  i)ar  le  même.  1876,  I  vol.  —  Nouvelle  série.  1879,  1  vol.  — 
Li  Bastars  de  Bullion,  par  le  même.  1877, 1  vol. —  Récits  d'un 
:Bourgeois  de  Valenciennes  (X.tV=  siècle),  par  le  baron 
Kervyn  de  l.etienhove.  lS77,  1  vol.  —  Œuvres  de  Ohilletoert  de 
Lannoy.  par  Ch.  Polvm.  1878,  1  vol.  —  P»oésies  de  Gilles  li 
Muisis.  par  Kervyn  de  Leltenhove.  1882,  2  vol.  —  CEuvres  de  Jean 
Lemaire  de  Belges,  par  J.  Stccber.  1882-91,  4  vol.  avec  notice.  — 
Li  Regret  Guillaume,  par  A.  Scheler.  1882, 1  volume. 

Biographie  nationale. 

BiograpHie  nationale,  t.  I  à  XV  (1"  fasc).  Bruxelles,  1866-1898, 
gr.  in-80. 

Commission  royale  d'histoire. 

Collection  de  Chroniques  Ijelges  inédites,  publiées  par 
ordre  du  r.ouvernement;  101  vol.  in-'»o.  (Voir  la  liste  sur  la  couverture  des  Chroniques.) 

Comptes  rendus  des  séances.  I^''  sér.,  avec  table  (1837-1849),  17  vol 
i„.8o.  _  2me  scr.^  avec  table  (1830-1859).  13  vol.  in-80.  _  2""'  sér.,  avec  table  (1860- 
1872),15  vol. in-80.— 4"'^  sér.,  17  vol.  in-80  (1873-1891;.— 5«"-  sér., t.  1-VII. 

Annexes  aux  Dullcti'is,  21  vol.  in-80.  (Voir  la  liste  sur  la  couverture  des  Chro- 
niques et  des  Comptes  rendus  )