HARVARD UNIVERSITY.
IvIBRARY
OF THE
MUSEUM OF COMPARATIVE ZOOLOGY.
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't' BULLETINS
DE
L'ACADÉMIE ROYALE
DES
Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts
DE BELGIQUE.
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BRUXELLES,
HAYEZ, IMPRIMEUR DE l'aCADÉMIE ROYALE DES SCIENCES,
DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE RELGIQUE.
Rue de Louvain, 112.
"1898
BULLETINS
DE
L'ACADÉMIE ROYALE
DES
Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts
DE BELGIQUE.
BULLETINS
DE
L'ACADEMIE ROYALE
DES
Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts
DE BELGIQUE.
68"'« ANNÉE. — 3"'« SÉRIE, T. 56.
1898
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^ BRUXELLES,
HAYEZ, IMPRIMEUR DE L ACADÉ3I1E ROYALE DES SCIENCES,
DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE,
Rue de Louvain, 112.
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OA-^^
SEP 16 1899
BULLETIN
DE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
DES
Lettres et des Beaux-Arts de Belgique.
189<S. — N» 7.
CLASilîi: DES fi^CIEIVCES.
Séance du 2 juillet 1898.
M. Éd. Dupont, directeur.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. W. Spring, vice-direcleur ; Brh\-
niont, Éd. Van Beneden, C. Malaise, F. Folie, Fr. Cré-
pin, J. De Tilly, Ch. Van Bambeke, G. Van der Mensbrug-
ghe, L. Henry, M. Mourlon, P. Mansion, P. De Heen,
C. Le Paige, F. Terby, J. Deruyts, Léon Fredericq,
J. Neuberg, A. Lancaster, membres; A. -F. Renard,
L. Errera, M. Delacre et P. Francotte, correspondants.
5'"^ SÉRIE, TOME XXXVI. ^ 1
( 2 )
CORRESPONDANCE.
La Classe apprend, sous l'impression d'un profond et
sincère sentiment de regret, la mort de l'un de ses mem-
bres titulaires, M. Ernest Candèz^, décédé à Glain, le
50 juin dernier, dans sa 72« année.
Elle vote des remerciements à M. le baron de Selys
Longchamps, qui a bien voulu, en remplacement de
iVl. Dupont empêcbé, parler au nom de l'Académie lors
des funérailles. Son discours figurera au Bulletin.
Une lettre de condoléance sera envoyée à la famille
Candèze.
— M. G. Van der Mensbrugghe présente, pour Y An-
nuaire, sa notice nécrologique sur Hubert Valérius,
ancien membre de la Classe. — Remerciements à
l'auteur et à M. Van Rambeke, qui a bien voulu s'occu-
per de la partie médicale de cette notice.
— M. Vial demande le dépôt d'un billet cacheté dans
les archives de l'Académie. — Accepté.
— Hommages d'ouvrages :
i" Progrès de la défense des États et de la fortification
permanente depuis Vauban; par le général Brialmont,
1 vol. gr. in-80, avec atlas oblong (présenté par le che-
valier Edm. Marchai, avec une note qui figure ci-après);
(3 )
2° Prodrome de la flore belge. Thallophytes, fascicules
I-IIl; par E. De Wildenian (présenté par M. L. Errera,
avec une note qui ligure ci-après) ;
5° Cours de mécanique analytique, tome P'" ; par Ernest
Pasquier;
4° a) L'oxyde de carbone, le qrisou et le qrisoumètre ;
b) Recherches sur les limites de l'absorption de Voxyde de
carbone par le sanq d'un mammifère vivant; par le D'" jN.
Gréhant.
— Remerciements.
— Travaux manuscrits à l'examen :
4" Recherches morphologiques et phylogénétiques sur les
Mollusques archaïques ; par Paul Pelseneer. — Commis-
saires : MM. Éd. Van Beneden, F. Plateau et Ch. Van
Bambeke;
2° Sur les salicylates doubles de métal et d'antipyrine
(troisième communication); par M.-C. Schuyten. — Com-
missaires : MM. Jorissen et Spring;
5° Sur les surfaces minima réglées et les surfaces minima
à lignes de courbure planes; par A. Demoulin. — Com-
missaires : MM. Deruyts, Neuberg et Mansion;
4° Sur l'action cataly tique de la mousse de platine; par
Alexandre de Hemptinne. — Commissaires : MM. Spring
et De Heen ;
o° Notes sur la physique du globe et la météorologie; par
G. Kayser. — Commissaires : MM. Terby et Lancaster.
( i
Discours prononcé au nom de C Académie royale de Belgique
et de la Société entomologique de Belgique, aux funérailles
de M. Ernest Candèze; par le l)aron de Selys Long-
champs, membre de l'Académie.
Messieurs,
C'est un devoir aussi honorable (jue douloureux que je
remplis en me présentant, au nom de l'Académie royale
des sciences de Belgique et de la Société entomologique,
pour rendre hommage au confrère excellent que la mort
nous a enlevé il y a deux jours.
Candèze (Ernest-Charles-Auguste), né à Liège, le
-21 février 1827, obtint le diplôme de docteur en méde-
cine, après de brillantes études faites à notre Université.
Il fut le collaborateur à la direction de l'Asile de Glain,
fondé par M. Abry, dont il épousa la fille distinguée, qui
mourut il y a vingt-cinq ans environ. Il contiibua large-
ment par ses aptitudes et par son zèle à la réputation
légitime de cet important établissement.
Les goûts de Candèze le portaient en même temps vers
les sciences naturelles.
Élève de Lacordaire et de Charles Morren, il s'adonna
à la culture des sciences zoologiques et botaniques, mais
particulièrement à celle de l'entomologie, où il acquit
bientôt, comme spécialiste, une notoriété incontestée
dans le monde savant.
L'Académie, dès 1<S5(S, l'élut correspondant, puis
membre elfectif de la Section des sciences naturelles en
18()1. Il fut directeur de la Classe en 1874.
Le Roi lui conféra, en 1872, la croix de chevalier de
(S )
l'Ordre de Léopold et l'éleva au grade d'officier en
décembre 1897.
Il faisait partie des sociétés entomologiques les plus
notables de l'étranger, dont plusieurs lui décernèrent le
titre de membre honoraire.
Ses excursions et ses voyages à l'étranger furent nom-
breux. 11 assistait aux congrès scientifiques et, chercheur
infatigable, il y trouvait satisfaction, non seulement pour
ses études spéciales, mais aussi pour l'intérêt qu'il portail
à toutes les sciences.
Comme spécialiste, il s'adonna surtout à approfondir
l'étude des Coléoptères de la famille des Élatérides, et
dans cette branche il était considéré comme arrivé au
premier rang.
A la Société royale des sciences de Liège il publia,
en 1833, avec la collaboration de feu le D' Chapuis,
un mémoire sur Les larves des Coléoptères, suivi bientôt
de sa grande Monographie des Élatérides, en quatre
volumes, parus de 48o() à 1805, et de leur Revision,
en 1874.
Plus tard, pour se délasser de ses travaux didactiques,
il écrivit, d'une plume très alerte, plusieurs volumes
charmants, destinés à amuser la jeunesse et à initier les
gens du monde aux merveilles de la nature vivante. On
peut appeler romans scientifiques ces trois ouvrages,
édités chez des libraires notables de Paris et qui eurent
beaucoup de succès, particulièrement les Aventures d'un
Grillon et La Gileppe.
L'activité et le besoin de travail scientifique étaient
si grands chez le D' Candèze, que, malgré son âge
avancé, il se mit en dernier lieu à la recherche des
Insectes diptères de notre pays,, et qu'après quatre ou
cinq années, il en avait réuni maintenant une collection
( 6 )
déjà fort riche, qui aurait donné lieu à la pulilication de
celte partie de notre faune, jusqu'ici inédite.
Dans ces derniers temps, il avait organisé et encouragé
le Cercle des entomologistes liégeois, où se réunissent des
amateurs et de très jeunes gens. Il en était le vénérable
président.
Après avoir esquissé rapidement la vie laborieuse du
D' Candèze, il est juste de dire quelques mots de son
caractère si bon, si gai, si spirituel.
C'était un modèle de père de famille, un ami sûr,
étranger à tout sentiment de jalousie, d'une obligeance
extrême, toujours prêt à encourager et à assister les
jeunes travailleurs, ce qui ne se voit pas toujours; aussi
était-il aimé de tous ceux qui le connaissaient.
Pendant près de cinquante années qu'ont duré nos
relations, j'ai pu apprécier ce caractère d'élite.
Il était un des cinq membres du Conseil de surveillance
du Musée d'histoire naturelle de l'État, et là aussi j'ai pu
constater son jugement droit et son esprit conciliant.
En considération de cette longue intimité, et tenant
compte de l'âge que j'ai atteint, je pouvais m'imaginer
que c'est le D' Candèze qui me conduirait au champ du
repos éternel; mais les décrets de la Providence sont
impénétrables, et c'est moi qui viens lui dire un su|)rênu'
adieu!
Candèze, cher ami et cher confrère, repose en paix !
Adieu !
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
I^rugrès de la défense des États et de ta fortificatiou per-
manente depuis Vaulmn, tel est le titre de l'ouvrage que
vient de publier notie confrère, M. le général Brialmont,
( 7 ) .
et doiU il offre, à litre d'Iiomniage, le premier exemplaire
à la Classe des sciences (1). Cet important ouvrage
comprend dix-huit chapitres. Les six premiers ont pour
objet l'exposé des progrès réalisés dans la défense des
États et dans la fortification permanente depuis Vauban;
l'organisation des camps retranchés permanents; les types
de forts, de fortins intermédiaires et d'enceintes de camps
retranchés; les têtes de ponts, forts d'arrêt et forts de
digues, et les forts et batteries de côtes et forts de mer.
Les douze autres chapitres s'occupent exclusivement de la
fortification permanente dans tous les États de l'Europe.
L'atlas renferme les types de la fortification depuis
Vauban.
Nous nous bornerons, en raison de notre incompétence
pour faire ressortir les mérites de cette œuvre considé-
rable, laquelle résume, en son ensemble, toutes les études
de M. Brialmont sur la matière, à reproduire ici les
premières lignes de l'introduction. Elles feront sutïi-
samment connaître la haute portée de ce livre :
« Les progrès réalisés depuis Vauban dans l'art de la
» guerre et dans l'armement ont modifié le rôle des for-
» teresses et nécessité la transformation de leurs éléments
» constitutifs.
» Nous avons, dans de nombreux écrits, suivi la marche
» de cette transformation et proposé, à chaque étape, les
» types d'ouvrages qui nous semblaient répondre le mieux
)) aux exigences de la situation.
» La fortification est arrivée aujourd'hui à un point où
» elle fera sans doute un long arrêt, car les bouches à feu,
)) les poudres et les projectiles ont acquis une puissance
(1) Bruxelles, typ. et iith. E. Guyot, 1898, l vol. in 8», avec atlas
oblong.
( n
» de (leslmclion qu'il sera difficile, sinon impossible,
)) d'accroître notablement.
» Le moment est donc venu de jeter un coup d'œil sur
)) le chemin parcouru et de montrer ce qui est resté
» debout de nos projets et de ceux des ingénieurs qui ont
» suivi la même voie que nous.
» Ce travail d'élimination et de synthèse nous fournira
» l'occasion de discuter les idées divergentes qui ont été
)) émises dans ces derniers temps sur la défense des États
)) et l'organisation des forteresses, et de séparer ce qui est
)) encore actuellement vrai et pratique de ce qui n'a
» jamais été et ne sera jamais que faux et irréalisable.
» Mais notre but est surtout de décrire et d'apprécier les
» travaux de défense les plus remarquables qui ont été
o exécutés en Europe depuis la fin des guerres du pre-
» mier empire français... »
Chevalier Edm. Marchal.
MM. Th. Durand, conservateur, et De Wildeman,
aide-naturaliste au Jardin botanique de l'État, ont entre-
pris la très utile publication d'un Prodrome de la flore
belge. On y trouvera l'énumération méthodique et com-
plète de toutes les espèces végétales signalées en Belgique.
Le premier volume, dû à M. De Wildeman, renferme
les Thallophytes. Il vient de paraître ; j'ai l'honneur de
l'offrir à l'Académie de la part des auteurs.
Quiconque s'intéresse à la connaissance des productions
naturelles de la Belgique se réjouira de voir enfin rassem-
blées toutes les données botaniques, non seulement pour
les Phanérogames et les Ptéridophytes, pour lesquels nous
( 9 )
possédions l'excellenl Manuel de M. Crépin, mais encore
[)Our les autres embranchements du règne végétal, dont
l'étude avait été jusqu'ici trop négligée.
On doit approuver sans réserve les auteurs d'avoir
adopté les idées modernes sur la classilication des végé-
taux. La réunion en un seul embranchement de tout ce
qui n'est pas phanérogame, le rapprochement des Chara-
cées et des Ptéridophytes, l'admission des Lichens comme
groupe autonome équivalent aux Champignons, l'interca-
lation des Gymnospermes parmi les Angiospermes, la
place suprême accordée aux Renonculacées, sont autant
d'effets de la routine que rien ne justifie plus et qu'il n'est
fdus permis de conserver dans les ouvrages nouveaux.
Là-dessus l'accord est fait aujourd'hui entre les botanistes
compétents.
Pour les détails, moins unanimement acceptés, d'ar-
rangement et de nomenclature des groupes, les auteurs
ont suivi l'ordre de mon cours à l'Université de Bruxelles :
si je mentionne ce fait, c'est pour pouvoir les remercier
de leur flatteuse adhésion.
Le Prodrome de la flore belge ne donne point de descrip-
tions : il renvoie pour chaque espèce à la diagnose
originelle, ainsi (lu'aux diverses flores belges, souvent
aussi à une ligure. On y trouvera ensuite les principaux
synonymes et la dispersion détaillée de l'espèce en Bel-
gique, province par province.
Il n'est pas nécessaire d'ajouter que tous ces renseigne-
ments sont [)résentés avec autant de compétence que de
soin: les noms des auteurs sont, à cet égard, une suflisante
recommandation. L. Errera.
( 10)
RAPPORTS.
Sur la proposition verbale de MM. L. Kredericq et
J.-B. Masiiis, une deuxième note de M. Waroux sur le
Tracé myocardique du cœur exsanyiie figurera au Bulletin.
Sur la fonction ^ {s) de Riemann et le nombre des nombres
premiers inférieurs à une limite donnée; par Ch.-J. de la
Vallée Poussin.
Itapftot'l de M. faut Mannion^ pt'etnier coHttttiêaaii-»'.
« La question traitée par M. de la Vallée Poussin dans
son mémoire est l'une des plus ardues de l'analyse
moderne.
Legendre (*) semble être le premier qui ait publié une
formule donnant approximativement le nombre fx des
nombres premiers inférieurs à une limite donnée x. Cette
formule est la suivante :
nr
fx
Ix— 1,08366
Il l'avait obtenue par une voie empirique.
Gauss, dans une lettre du 24 décembre 1849 (**) à
Encke, qui avait aussi imaginé une formule pour le même
objet, fait l'historique de ses essais relatifs à la question;
(*) Legendre, Théorie des nombres, 2<: édition, 1808, IVe partie,
§ VIII, pp. 394-398; 3'' édition, t. II, 1830, ¥ partie, § VIII, pp. 65-70;
dans la première édition, la question n'est pas abordée.
(") Gauss, \Yerke, II, pp. 444-447.
( ^i )
ces essais, empiriques comme ceux de Legendre, el dont
les premiers dataient de 1792 ou 1793, l'ont conduit à la
formule approchée
fx = Lia:,
Il compare les trois formules, celle de Legendre, celle
d'Encke (*) et la sienne, aux données des tables (**) et
soupçonne que, pour x très grand, la sienne est la |)lus
exacte.
Une formule équivalente à celle de Gauss se trouve
dans une note manuscrite ajoutée par Dirichlel à un
de ses mémoires envoyés au grand géomètre de Gœt-
tingue (***), et il résulte du contexte que c'est par une
méthode analytique, et non par induction, qu'il est
arrivé à ce résultat (1838). Malheureusement, il n'a jamais
publié ses recherches sur ce sujet et il s'est contenté de
les annoncer.
En juillet 1849, C.-J. Hargreave ('^) arrive aussi par
(*) ScHEiuNG (Gaiiss' Werke, II, p. 521) dit que la formule d'Encke
parait être celle-ci :
fx = — 102'x.
Ix
(**) Sur les énumérations de nombres premiers, voir l'introduction
de la Factor Table for the Fourlh million, by James Glaisheu (London,
1879), et une note de Gram {Acta mathematica, XVII, \)\^. 301-314)
avec les nombi-euses indications bibliographiques que l'on y trouve.
("*) DiRiCHLET, Werke, 1889, 1, p. 372; note 2 de la note 2.
("■) C.-J. Hargreave, Analytical Reseurches concerning Numbers.
I Philosophical Magazine, t. XXXV, pp. 36-53.) Le point de départ de
Hargreave (qui était professeur de jurisprudence à University Collège,
à Londres) est déjà la fonction considérée plus tard par Riemann; en
outre, il étudie les mêmes expressions analytiques que Tchebyclief.
Peut-être ce curieux mémoire mériterait-il d'être examiné de près,
au point de vue historique.
( ^2 )
une voie analytique à la formule fx = Lix et a le mérite
(le la publier le premier.
En 1848 et en 1850, Tchebychef présente à l'Acadé-
mie (le Saint-Pétersbourg deux mémoires sur les nombres
premiers (*), dont les principaux résultats, insérés dans
V Algèbre supérieure de Serret, deviennent rapidement
classiques. Ils contiennent maints théorèmes qui rendent
très plausible l'exactitude de la relation fx = Lix comme
loi asymptotique; de plus, Tchebychef enferme fx entre
deux limites, mais il termine son travail par cet aveu :
« Si l'on calcule, d'après nos formules, la totalité des
nombres premiers qui ne surpassent pas une limite don-
née, très grande, l'erreur sera inférieure à un dixième de
la quantité cherchée (**). »
Une note courte, mais substantielle, de Riemann, pré-
sentée à l'Académie de Berlin (***), ouvre une nouvelle
voie aux recherches dans ce domaine. Riemann, par une
méthode où, suivant son habitude, il mêle une analyse
[)rofonde aux inductions hardies familières à son génie,
trouve que la somme
I . I .
Far = /x -t- - /(.i ■-) -4- - /(a-^ ) -♦- etc.
2. <)
(') Tchebychef, Mémoires de l'Académie de Saint-Pétersbourg
(Pavants étrangers), t. VI (1851), pp. 141-157, t. Vil (1854), pp. 15-23;
Journal de Liouville, 1852, t. XVII, pp. 341-365, 3G5-380.
(**) En 1881, Sylvester (American Journal of Mathematics, IV,
pp. 230-247) a signalé un moyen de resserrer les limites indi(iuées
dans les recherches générales de Tcliebychef, sans faire avancer la
question principale, autant que nous pouvons en juger.
("*■) Riemann, Berliner hlonatsberichtc, 1860, pp. 671-680; Werke,
1876, pp. 136-144; 2'= édition, 1892, pp. 145-153; OE^ym, traduction
fran(;aise, 1898, pp. 165-176.
( 13 )
se compose d'abord d'un terme qui reste fini quand x
croît indéfiniment, puis de Lix, entin d'une série d'inté-
grales définies périodiques où entrent les racines d'une
certaine fonction transcendante ^{l). Cette fonction i(/)
s'exprime au moyen d'une autre !^(s), autrefois considérée
par Euler, dans le cas d'une variable réelle et définie par
la relation
\ 1
1
Dans le produit, il faut remplacer ;) successivement
par tous les nombres premiers depuis 2, dans la somme n
par tous les nombres entiers. Depuis ce mémoire capital
de Riemann, tous les travaux importants des géomètres
sur le nombre des nombres premiers roulent sur les |)ro-
priétés de cette transcendante (^(s).
L'un des premiers en date, dû à M. J.-P. Gram, a été
publié en danois, avec résumé en français, en 1884, par
l'Académie de Copenhague {*). Sans contenir aucun
résultat essentiellement nouveau ni important, au dire
de l'auteur, il constitue un commentaire utile des travaux
de Riemann et dcTchebychef; çà et là aussi, Gram intro-
duit des rectifications de détail dans les recherches de ses
devanciers, de Riemann notamment.
Les travaux de MM. Hadamard, von Mangoldt et de la
Vallée Poussin, pour ne citer que les principaux, sont,
au contraire, le complément naturel de la note de Rie-
mann et forment un ensemble de recherches de plus en
plus approfondies des propriétés de l^(s).
(') J.-P. Gram, Recherches sur le nombre des nombres premiers
inférieurs à une limite donnée, 6« série, t. II, pp. 183-308.
( ii)
En 1892, M. Hadamard obtient à l'Institut de France le
grand prix des sciences mathématiques pour une Étude
sur les propriétés des fonctions entières et en particulier
d'une fonction considérée par Riemann (*). Dans la troi-
sième partie de ce beau mémoire, il prouva que la fonc-
tion i(f) de Riemann, considérée comme fonction de r-,
est égale, comme l'avait supposé Riemann, à un produit
de facteurs primaires et d'une simple constante, sans
aucun facteur exponentiel.
En 1896 (**), il démontre, quelques mois après M. de
la Vallée Poussin, que la partie réelle des racines ima-
ginaires de la fonction ^{s) de Riemann ne peut être
égale à l'unité et en déduit diverses propriétés asympto-
tiques qui n'avaient jamais pu être établies avec rigueur.
En 1895 et en 1898, M. von Mangoldt a publié sur le
sujet qui nous occupe deux mémoires importants (***).
Dans le premier, il démontre avec une pleine rigueur
deux théorèmes énoncés par Riemann, l'un sur le nombre
des racines imaginaires de Ç(s) dans lesquelles le coefti-
cient 6 de i ne surpasse pas un nombre lixe, l'autre sur
la convergence de la partie périodique de la relation
fondamentale de Riemann ('^). En particulier, il prouve
que (3 surpasse 12.
(*) Hadamard, Journal de Liouville, 1893, 4e série, t. IX, pp. ITl-'ilo.
(•') Hadamard, C. R., 22 juin 1896, t. CXXII, pp. 1470-1473 ; BH«e<t?i
de la Société mathématique de France, t. XXIV, dernier fascicule,
[•p. 199-220.
(*•*) H. VON Mangoi.dt, Journal de Crelle, t. CXIV, pp. 255-304;
t. CXIX, pp. 65-71.
(") L'auteur signale des recherches antérieures (1884) de A. Piltz,
analogues aux siennes, relativement à la seconde partie de son
mémoire.
( is )
Dans le second, M. von Mangoldt établit pour la pre-
mière fois avec rigueur l'égalité asymptotique
fx = L/x,
et montre que l'on peut aussi écrire, comme relation
asymptoti(iue (*),
Ix
Les travaux de M. de la Vallée Poussin sur la fonc-
tion J^(a) et sur le nombre des nombres premiers ne sont
pas moins importants que ceux de MM. Hadamard et
von Mangoldt, et pénètrent plus profondément encore
dans la nature des lois asymptotiques relatives aux nom-
bres premiers.
Dans sa Démonstration simplifiée du théorème de DiricfUet
sur la progression arithmétique, présentée à l'Académie
en 1895, il utilise les propriétés de ï^{s), qu'il met sous
une forme nouvelle, pour démontrer d'une manière plus
directe le célèbre tbéorème de Diricblet, et termine par
des propositions sur les valeurs asymptotiques relatives
aux nombres premiers.
Dans la première partie de ses Recherches analytiques
sur la théorie des nombres premiers, présentées à la Société
scientifique de Bruxelles le 50 janvier 1890 (**), il
(*) Une note de M. de la Vallée Poussin, insérée à la page 70
de ce mémoire de M. von Mangoldt, contient une très courte démons-
tration de ce second théorème.
(") Le rapport de M. Jordan sur ce mémoire a été lu à la séance
du 15 avril 1896 et publié en juin, dans le Bulletin de la Société
scienti^que, puis dans ses Annales, t. XX, l'^» partie, pp. 91-96.
( 16)
démontre, le premier, que les racines imaginaires de
la fonction de Riemann ont toutes leur partie réelle
comprise entre zéro et l'unité; il en déduit la démons-
tration rigoureuse de diverses lois asymptotiques énon-
cées par Slieltjes. Dans la seconde, la troisième (*) et la
quatrième partie, présentées à la même Société le
U) avril I89G et le 28 janvier 1897, il a étendu ces lois
aux nombres premiers représentés par des formes
linéaires ou quadratiques, soit de déterminant négatif,
soit de déterminant positif.
Le travail soumis à la Classe et sur lequel nous sommes
chargés de faire rapport, M. Deruyls et moi, est la suite
naturelle et le couronnement de l'ensemble des recherches
dont il vient d'être question.
Dans la première partie de ce mémoire, M. de la
Vallée Poussin trouve une limite supérieure, inférieure
à l'unité, de la partie réelle des racines « -i- (3/ de 'C,{s).
Bien que la limite supérieure de 1 — a ainsi obtenue soit
très petite et tende vers zéro avec ^, elle lui permet, dans
la seconde partie, de trouver des expressions approchées
pour un grand nombre de séries relatives soit aux racines
de ^(s), soit aux nombres premiers, et entîn de démon-
trer ce théorème capital : Le logarithme intégral est une
expression asymptotique de fx plus exacte que toutes ses
expressions possibles sous forme linie.
Donnons un apeiçu de l'analyse extrêmement com-
pliquée qui l'a conduit à ce résultat.
(*) Un résumé étendu de ces deux parties a été présenté à la même
Société, le 29 octobre 1890; un résumé analogue de la quatrième
partie, le 28 janvier 1897.
( <7)
Dans le chapitre I*", il établit d'abord la tbrmule
r'--+-i,
où la première somme s'étend à toutes les racines ima-
ginaires p = a -f- (3î de 'C,{s), celle du second membre à
tous les nombres premiers. On a d'ailleurs
p' — i Çs
Pour arriver à une valeur approcliée du second membre,
dans la formule principale, l'auteur trouve successive-
ment des valeurs de ce genre pour les fonctions
a f\ i \ T'a ^ \ ^ i
S- S -H . — . s- -, s
f' \p 1 — p/ Ta %' -4- p' (m — p)(d — p)
et aussi pour (î^'w : X^vi), quand n est réel et voisin de
l'unité.
Dans le chapitre II, il établit d'abord la formule fon-
damentale suivante, où les inégalités ne portent que sur
les parties réelles des deux membres
r'(--4-i
^ \ i^ 1 5, 1 \ \1
S h- - S < /rr H H
S— p 4 s' — p 8 *• — 1 2 /s
r - -+- 1
\2
4 Çm 4s'— 1 8 /s
O'"** SÉRIE, TOME XXXVI.
( 18)
Dans cette relation,
s = « -+- /i, s' = u -+- 2/1.
Il tire immédiatement de celte formule la conséquence
capitale que « ne peut être égale à l'unité, puis, de
déduction en déduction, cette proposition curieuse que si
a. diffère de i^^, (3 doit surpasser 24,55.
Mais il ne s'arrête pas à ce théorème spécial. Par un
maniement extrêmement habile de l'inégalité fondamen-
tale écrite plus haut, il parvient de [)roche en proche à
lier a et (i par le théorème suivant : A partir de ^y 34(i,
on a
V
i — «>
ip—ln
où p et n ont des valeurs déterminées : p = 0,054(39,
il = 15,58.
Armé de cette formule, d'un emploi relativement
facile, M. de la Vallée Poussin peut aborder, dans le
chapitre 111, le premier de la seconde partie, l'évaluation
de sonnnes où figurent les racines p, d'abord
S .
nuis
u^ -H p^
Par des transformations, des subdivisions de ces sommes
( 19 )
OÙ interviennenl sans cesse de nouveaux artifices ana-
lytiques, il parvient enfin à la relation
où
<r'=S-^— -,. p = 0,034C9,
a^ -i- p'
et B une fonction de x, tendant vers une limite finie
pour x = ce .
Le chapitre IV a son point de départ dans une for-
mule établie par l'auteur dans la première partie des
Recherches analytiques sur les nombres premiers citées
plus haut. Il Y établit diverses formules asymptotiques. 11
prouve successivement les théorèmes suivants : Si l'on
pose
- ^ lp = i ■*- yii, - S h> = ^ -^ *î2'
.T pm^x f)'" X ,,<x P 1
■'.t> '^i;^^ '^0 5 '^'4 tendront vers zéro avec -, et seront d'un
ordre de petitesse au moins égal à celui de
Dans le chapitre V, M. de la Vallée Poussin aborde
enfin la question du nombre des nombres premiers
inférieurs à une limite donnée. En utilisant encore une
(20)
fois une formule d'un mémoire précédent, il établit la
relation fondamentale
Fx = Lix -+- T — -4- /2,
Ix
(Ml
5 14 , / \i\ ^
mod T < - (7 H (T^ -H 1 -+- — U'.
2 5 \ 15/
Il en déduit presque immédiatement que fx a pour valeui
asymptotique \Jx et, de plus, ce qui est absolument
nouveau et complète toutes les recherches antérieures,
que la différence entre les deux fonctions ne pourra pas
être d'un ordre de grandeur supérieur à celui de la fonc-
tion
Ix
Par suite, le logarithme intégral est une expression
asymptotique de fx plus exacte que toutes ses expressions
sous forme finie.
Le chapitre M traite une question qui se rattache
étroitement à la loi de distribution des nombres premiers.
Euler a conjecturé, maints géomètres ont en vain essayé
de prouver et enfin M. von Mangoldt a établi rigoureuse-
ment, l'an dernier, dans un mémoire spécial, que
k
lj.{k) étant nul pour k divisible par un carré, 1 pour
^==1, ou k ayant un nombre pair de facteurs, — 1,
pour k ayant un nombre impair de facteurs. M. de la
Vallée Poussin non seulement prouve à son tour le
( 21 )
tiléorème deviné par Euler, mais il donne une formule
pour calculer approximativement un certain nombre de
termes. « La somme étendue aux entiers k <C x ,
^M^)
^"y
tend vers 0 quand x tend vers l'infini et sa valeur absolue
reste inférieure à une expression de la forme ^ , où h
est un nombre fixe. »
Telle est l'analyse du travail de M. de la Vallée Pous-
sin. La difficulté de la question qui y est abordée et enfin
résolue, la connaissance et le maniement facile de toutes
les ressources de l'analyse dont l'auteur fait preuve d'un
bout à l'autre, l'esprit d'invention qu'il y déploie non
seulement dans la marche générale de son travail, mais
aussi à chaque page pour surmonter les obstacles sans
cesse renaissants qui se dressent devant lui, tout con-
court à en faire l'un des mémoires d'analyse les plus
remarquables qui aient jamais été publiés en Belgique.
Nous proposons donc à la Classe d'en ordonner l'im-
pression dans les Mémoires in-H» et d'adresser des remer-
ciements à l'auteur. »
Ces conclusions, auxquelles se rallie M. J. Deruyls,
second commissaire, sont adoptées par la (>lasse.
( n )
Sur la réparation de quelques Algues;
par E. De Wildeman.
ttappori de jRf. Efi-ei-a, pi'enêiet' cotitmiësait'V.
« Le travail de M. De Wildeman a pour but de con)-
pléter sur certains points, de rectifier sur quelques
autres, le paragraphe relatif aux Algues dans le Mémoire
de M. Massart que l'Académie a couronné.
J'ai l'honneur d'en proposer l'impression dans le
Recueil des Mémoires in-8". Les ligures pourront être
reproduites à peu de frais par la zincographie et inter-
calées dans le texte; parmi celles qui se rapportent aux
Treutepolilia, (juelques-unes ne me paraissent pas abso-
lument indispensables. »
M. Grépin, second commissaire, s'étant rallié aux con-
clusions du rapport de M. Errera, celles-ci sont adoptées
par la Classe.
COVLMUiNICAÏIONS ET LECTURES.
Sur les dérivés de quelques nilriles-alcools aliplialiques ;
par Louis Henry, meujbre de l'Académie.
J'ai examiné, dans ces derniers temps, quelques
nitriles-alcools (jue je n'avais pas eus à ma disposition
précédemment (*). Cette note a pour but de faire con-
naître certains de leurs dérivés qui me paraissent offrir
un intérêt particulier.
(*) Voir pour les développements et les analyses, mon mémoire
Sur les nitriles-alcools alipkatiques et leurs dérivés, lequel sera publié
dans le tome LVII des Mémoires in-S» de l'Académie.
( 25 )
Dérivés kn Cj.
Les iiitriles-alcools coirespondaiil au butane normal
CH3 - CH2 - GH.2 - CH3 sont au nombre de trois, savoir :
a. CN-CH(On)-CH, -CH3.
p. Ci\-Cll,-CH(0H)-CH5;
r. Ci\-CH,-CH,-C»,(OH).
Je m'en suis occupé précédemment (*).
A Visobutane J^S^ > CH - CH- correspondent deux
nitriles-alcools :
1° Un composé alcool primaire CN - CH - CH.2{0H) ou
CH3
le nitrile lactique primaire a méthylé. Ce corps n'est pas
connu. On l'obtiendrait, selon toute probabilité, par la
réaction du cyanure de potassium sur la monocldorlnj-
drine — ou mieux la monobromhydrine — alcool primaire
(H0)CH>2 - CHCI - CH3, produit de l'addition de l'acide
bypochloreux (HO)Cl au propylène HX = CH - CH5 (**).
Je regrette de n'avoir pas eu jus(ju'ici ces composés
propyléniques à ma disposition, et par conséquent de
n'avoir pas pu appeler à l'existence ni étudier ce nitrile-
alcool.
Ce que l'on sait des relations de volatilité qui existent
{') Bull, de IWcad. roy. de Belcjiqiœ, t. XXXV, 3« série, p. 173.
(•*) Voir Comptes rendus, elc, t. LXXXIF, p. 1266 (année 1876).
(24 )
entre les dérivés propyUques primaires et les dérivés
isobutyliques
CH--CH2-CH,(0H) El). 98"
^{j^> CH-CH,(OH) 108"
CH3 - CH, - CN Eb. 98"
CH3
CH,
10»
iO°
>-CH-CN 108»
permet de lui assigner comme point d'ébiillition, sous lu
pression ordinaire, S'SO'' à âSo'' :
(HO)CH,-CH, -Ci\ Éb. 222«-225"
(HO)CH, ^ CH _ CN 230--255''
Sous l'action de l'anhydride phosphorique, il fournira
sans nul doute le nitrile méthyl-acryiique CH2 = G-Ci\,
CH3
comme son isomère la cyanhydrine acétonique dont je
vais m'occuper.
CH-
2° Un composé alcool tertiaire r^r,-^ > C(OH) - CN, le
nitrile qlycoliqae himéthylé ou la cyanhydrine acétonique
biméthi/lique.
Ce composé, déjà ancien (*), résulte de l'addition de
l'acide cyanhydrique HCN à la cétone biméthylique CH5 -
CO-CHr,. (F. IJrech.)
(') Liebig's Annalen der Cliemie, t. CIAIV, p. 255 (année 1872).
( 2S )
Il fournit aisément, avec les dérivés acétiques, — l'em-
ploi du chlorure CH3 - COCI est plus avantageux que
celui de l'anhydride (CH5 - €0)^0, — l'acétate correspon-
dant ^^l> C{C2ii.0^)-CN.
Alors que la cyanhydrine acélonique se dédouble si
aisément en ses générateurs, sous l'action de la chaleur,
son acéline se fait remarquer par sa stabilité.
C'est un liquide incolore, mobile, d'une odeur fraîche,
d'une saveur amère spéciale, fort désagréable, d'une den-
sité égale à 0.997 à 19°, insoluble dans l'eau et bouillant
à ISO^-IS^" sous la pression de 760 millimètres.
Soumise à l'action déshydratante de l'anhydride
phosphorique P2O5, la cyanhydrine acétonique CN -
(](0H) < çr^ fournit, d'une manière fort nette, le
nitrile « mélhylacrylique CN — C == CHg (*).
CH3
L'action du pentachlorure de phosphore PCI5 sur cette
cyanhydrine est plus complexe dans son résultat. Elle
s'exerce avec vivacité et donne comme produit immédiat,
après la destruction de l'oxychlorure de phosphore POCI.3
formé simultanément, un liquide incolore, fort mobile,
d'une agréable odeur, analogue à celle du nitrile méthyl-
acrylique. Ce corps est insoluble dans l'eau qu'il surnage,
il s'ajoute au brome et bout sous la pression ordinaire
vers H0M15^
L'analyse y a constaté la présence du chlore, mais en
(juantité inférieure à celle que renferme le chlorure
CH-
CH-^ CCI - CIN, correspondant à la cyanhydrine acéto-
nique, qui doit être le produit immédiat de la réaction.
(*j Voir plus loin, page 32.
( ^6 )
Si l'on tient compte de cet ensemble de faits et de la
facilité avec laquelle les composés butyliques tertiaires
(CH3)2CX - CH3 se transforment en isohulyléne (CH3).2C =
CH2, en perdant le système HX, on est autorisé à
admettre que le produit de la réaction du pentachlorure
de phosphore sur la cyanhydrine acétonique se constitue
TH-
d'un mélange du nitrile acélonique monochloré r.yJ' > C(ll -
CN, produit immédiat de la réaction, et du nitrile a me7/<y/-
acrylique CH.j = C - CN, qui en résulte par élimination
CH3
d'acide HCI. Sa densité de vapeur trouvée, ii.yi, corres-
pond d'ailleurs à la moyenne des densités de vapeur de
ces deux composés :
Densité <ie vapeur.
cil; > <:c' -
CN
3.57
GH, = C-CN
2.51
CHj
5.88
5 88
--3.91
Dérivés en C-;.
Il s'agit des dérivés de la cyanhydrine isobulylidénique
J^S=^ > CH - CH(OH) - CN, produit de l'addition de l'acide
/■"fi
cyanhydrique à l'aldéhyde isobutyrique /^r,"^> CH-CHO.
Le pentachlorure de phosphore PCI.-; la transforme aisé-
( 27 )
ment en son dérivé chloré A^l > CH - CHCI - CIN, Viso-
propyl-acétonitrile monochloré «.
Ce corps constitue un liquide incolore, mobile, d'une
odeur forte rappelant celle des composés amyliques, d'une
saveur très piquante, insoluble dans l'eau.
Sa densité à 10" est égale à 0.9922.
Il bout sans décomposition à 134" sous la pression de
750 millimètres.
C'est le point d'ébullition que lui assignent ses analo-
gies avec les composés butyriques normaux.
a. La transformation du système - CH-j - CN en
- CHCI - CN élève le point d'ébullition de 24".
CN-CH.-CH.-CHs Kb. H8»
; 24»
CN-CnCl-CH,-CH, 142»
cn-(;h„-ch <^[j^
CN - CHCI - CH < ^[
h. La transformation du système CH3 - CHo — en
i-u^ > CH — élève le point d'ébullition d'environ 12°.
LH3
HsC-CH.-CH, -CH-,(OH) Éb. H 6"
) 12"
î]^JÎ>CH-CH,-CH,(OH) 128»
CH3-CH,-CHCI-CN Éb 142"
) 12"
^t!=^ > CH. - CHCI - C\ 154"
LHr.
( Î28 )
Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 5.82. La
densité calculée est 4.06.
Sous l'action du chlorure d'acétyle, cette cyanhydrine
CH-
se transforme en son acétate çyj^ > CH(C2H503) - CN.
Cet acétate cyatio-isobutyrique ^^^ > CH - CH(C2H30^)
- CN constitue un liquide incolore, mobile, d'une faible
odeur, d'une saveur amère, désagréable, insoluble dans
l'eau, d'une densité de 0.9745 à 19°. Il bout sans décom-
position à 192''-193'' sous la pression de 7G0 millimètres.
Distillée avec de l'anhydride phosphorique, la cyanhy-
drine isobutylidénique se transforme dans le nitrile non
saturé correspondant ClN -CH = C < ^|j^ (éb. 140''-14;2<')
ou nitrile acrylique [3 bimél/iylé. (Voir plus loin, p. 55.)
Dérivés en C,;.
CH-
La cyanhydrine isovalérique pir"^ > CH - CHq- CH(OH)
- CN, composé homologue du précédent, a été soumise à
l'action du penlachlorure de phosphore PCl^ et du
chlorure d'acétyle CH5 - COCI.
Elle fournit, et d'une manière fort nette, avec le pen-
tachlorure de phosphore, Vacélo-nitrile monochloré isobutij-
CH
lique prj"^ > CH - CH.2 - CHCl - CN ou nitrile caproïque a
monochloré.
C'est un liquide incolore, mobile, d'une odeur agréable,
faible, d'une saveur piquante, insoluble dans l'eau, d'une
densité de 0.984 à 12°, bouillant sans décomposition à
172"-175° sous la pression de 755 millimètres.
( 29 )
Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 4.43. La
densité calculée est 4,54.
La réaction du chlorure d'acétyle est beaucoup plus
vive et plus énergique que celle de l'anhydride acétique;
elle permet d'obtenir avec facilité Vacétate cyano-isovalé-
rique ^ > CH - CH., - CH(C2H30.) - CN.
Celui-ci constitue un liquide incolore, mobile, d'une
odeur fraîche, d'une saveur amère, piquante, insoluble
dans l'eau, d'une densité de 0.1)00 à 19°, bouillant sans
décomposition à 204° sous la pression de 760 millimètres.
Les dérivés des cyanhydrines isobutyrique et isovalérique
sont homologues; on remarquera la différence notable
que l'on constate, quant à la volatilité, du chef de l'exis-
tence du composant CH^j entre les dérivés chlorhydriques
et les dérivés acétiques correspondants.
Dérivés chlorhydriques. Dérivés acétiques.
C, Éb. 154" \ Éb. 192' v
) 19" ) 12"
Ce 173" / 204'- /
Soumise à l'action déshydratante de l'anhydride phos-
pborique, la cyanhydrine amylidénique fournit, d'une
manière assez nette, le nitrile non saturé correspondant
CN - CH = CH - CH < ^l, (éb. Io4°-lo5°), ou nitrile
acrylique (3 isopropylé. (Voir plus loin, p. 58.)
Dérivés en Cy.
La cyanhydrine œnanthylidénique CH5 - (CH^)^ CH(OH)
- CN, produit de la fixation de l'acide cyanhydrique
HCN sur Vœnanthol CH3 - (CH^^jg - CHO, fournit aussi
( 30)
aisément que les précédents, sous l'action respective du
pentachlorure de phosphore et du clilorure d'acétyle, les
dérivés chlorhydrique et acétique correspondants.
Le nilrile caprylique ou octylique a. chloré CN - CH Cl
-(CHa^s-CH^ constitue un liquide incolore, mobile,
d'une étrange odeur, rappelant celle de l'aldéhyde œnan-
thylique, d'une saveur désagréable, rance.
Il est insoluble dans l'eau; sa densité à i'È" est égale
à 0.959.
Il bout sous la pression de 38 millimètres à il24" et à
217" sous celle de 755 millimètres.
Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 5.29; la
densité calculée est 5.51.
La cyanhydrine œnanthylidénique a acétylée CN - CH
(C.2H3O2) - (CH.2);; - CH5 se présente sous forme d'un
liquide incolore, mobile, d'une odeur rance, d'une saveur
piquante, amère.
Sa densité à 19° est égale h 0.9585. Elle bout à 245"
sous la pression de 7(30 millimètres.
La déshydratation de la cyanhydrine œnanthylidénique
à l'aide de l'anhydride phosphorique s'effectue aisément
et nettement. On distille le mélange des deux corps,
dans une cornue, au bain d'huile, sous pression raréfiée.
On obtient ainsi le nitrile non saturé CN - CH = CH - CHç,
- C4Hg (éb. 197°), îiitrile butyrique normal y butylé ou
nitrile acrylique ^ pentylé. (Voir plus loin, p. 41.)
Je tiens à dire, en terminant, toute la part qu'a prise
à l'élaboration de ce travail mon zélé préparateur,
M. Auguste De Wael.
( 31 )
Sur (lirera composes non salures; par Louis Heniv,
membre de l'Académie.
§ i. — Sur quelques nilriles non salures
1/aetion de l'anhydride pliosphorique sur les nitriles-
(dcools est une question presque neuve. Le nitrile lactique
primaire (*) seul, Ci\ - CH2 - CHo(OH), a été soumis à
l'action de cet ;^i>ent; il en est résulté le nitrile acrylique
CN - CH = CIl^.
A l'occasion de mes recherches sur les nitriles-alcools,
j'ai repris l'étude de cette question générale dans le but
d'obtenir des nitriles non saturés, de la formule CN-
^^nH2„_,, ces corps me paraissant devoir être intéres-
sants à divers points de vue, notamment sous le rapport
de la volatilité.
Les résultats obtenus jusqu'ici me semblent dignes
d'être signalés dès à présent.
J'ai laissé de côté pour le moment le nitrile glycolique
CN-CH2(0H), l'action de l'anhydride phosphorique sur
le composé devant, comme celle de cet agent sur l'alcool
méthylique ll-C-OH, donner lieu à des complications.
(*) Voir Ch. Molreu, Annales decininieet dcphysique, t. II, 7« série,
pp. 145elsuiv.; 1894.
( 32)
Dérivés en C5.
L'isomère du nitrile lactique priuiaire, le nilrile lac-
tique secondaire CN - CH(OH) - CH3 ou nitrile niélhyl-
(jlycolique, soumis à l'action de l'oxyde pliospliorique, n'a
donné, contrairement à mes prévisions, aucun résultai
satisfaisant. Elle aurait dû fournir aussi du nitrile acrylique
CN - CH = CH2. Réalisée dans des conditions diverses,
soit dans l'air, soit dans la vaseline, cette réaction est
restée stérile, le nitrile lactique, après quelque temps de
chaulTe, se charbonnant complètement.
Dérivés en C4.
Les nitriles-alcools en C4 que j'ai examinés se sont,
sauf un seul, mieux comportés (*).
En fait de dérivés iso, je n'ai eu à ma disposition que
la cyanhydrine acétonique CN - C(OH) < J^Jj^ qq jg nitrile
Cris
gly colique biméthylé.
Soumise à l'action déshydratante de l'anhydride phos-
phorique P2O5, la cyanhydrine acétonique fournit, d'une
manière fort nette, le nitrile a méthyl-acrylique
CN-C = CH.
I
CH,
C) Voir, pour les développements, mon mémoire Sur les nitriles-
alcools et leurs dérivés. (3Iémoiues in-S" de l'Académie, l. LVII; 1898.)
( 33 )
Celui-ci se présente sous la forme d'un liquide incolore,
très mobile, d'une agréable odeur fort pénétrante, rappe-
lant l'acide cyanhydrique, d'une saveur amère, piquante;
sa densité à 18° est égale à 0.7991. Il est insoluble dans
l'eau qu'il surnage.
Il bout, sous la pression de 760 millimètres, à 90''-92».
Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 2.26; la densité
calculée est 2.31.
Ce composé s'ajoute intensément au brome.
On y a trouvé 20.77 et 20.61 "/o d'azote; la formule en
demande 20.89.
Je rappellerai, à cette occasion, que le nitrile isobuty-
rique CN - CH < ^[J3 bout à 107°-108°. Il suit de là que
des relations du même ordre, et également remarquables
vu leur caractère exceptionnel, existent aux étages C3
€t C4 entre les nitriles saturés, propionique et methyl-
propionique d'une part, et les nitriles non saturés corres-
pondants, acrylique {*) et méthyl-acrylique d'autre part,
CN-CH0-CH3
Ci\ - CH = CHo
Eb.
98»
78° ,
\-20°
CN-CH2-CH3
1
Éb.
108° ]
y
CH5
)-\So
CN - C == CH.
Il
CH3
90° i
1
(*) Voir Gh. Moureu, loc.
cit.
o""' SÉRIE, TOME
XXXVI.
5
( 54 )
Les trois oxy-nitriles butyriques normaux
a. CN-CH(OH)-CH2-CH3;
p. CN-CH2-CH(OH)-CFl5;
y. CN-CH2-CH2-CH5,
ont été soumis à l'action de l'anhydride phosphorique.
Les dérivés « et [3 fournissent l'un et l'autre, ainsi qu'il
était h prévoir, et d'une manière assez nette, le nitrile
crolonique ordinaire CN - CH = CH - CH5 (éb. 118°-ii9")
ou (3 méthyl-acrylique.
Avec le dérivé y, je pouvais m'attendre à obtenir le
dérivé de nature allylique, renfermant le système terminal
- CH = CH^, le véritable cyanure d'allyle CN - CH^ - CH
= CHc2, l'homologue immédiatement supérieur du nitrile
acrylique. Quelque légitime que fût cette espérance, elle
ne s'est pas réalisée. 16 grammes du nitrile-alcool 7 ont
été, en deux fois, soumis à l'action de l'anhydride phos-
phorique, sans résultat. La masse soumise à l'action de
la chaleur, au bain d'huile, subit une carbonisation com-
plète.
J'ai obtenu ce composé par une autre méthode, la
distillation des dérivés haloïdes 7 du nitrile butyrique
normal, et notamment du dérivé chlot^é CN-CH^-CHç^
- CH2CI (éb. 195°), avec de la potasse caustique, sèche,
pulvérulente.
Le rendement de l'opération est satisfaisant. Cette
réaction a la valeur d'une méthode générale pour pro-
duire les nitriles non saturés renfermant le système
terminal vinylique - CH = CH2.
Le nitrile vinyl-acélique CN - CHg - CH = CH^, ainsi
( 53 )
préparé, constitue un liquide incolore, d'une agréable
odeur, d'une saveur piquante. Sa densité à 16° est égale
à 0.911.
Il est insoluble dans l'eau. Il bout à 135° sous la pres-
sion de 760 millimètres.
Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 2.37; la
densité calculée est 2.31.
On y a trouvé 19.95 et 20.29 °/„ d'azote. La formule
en demande 20.89 %.
Dérivé en C5.
En fait de nitriles-alcools en Cg, je n'ai eu que la
cyanhydrine isobutylidénique CN - CH(OH) - CH < ç^^.
10 grammes en ont été distillés, après quelque temps
de contact avec P^Og, au bain d'huile, sous pression
raréfiée. On recueille un produit incolore qui, après une
double rectification, constitue le nitrile acrylique (3 hi-
méthylé CN - CH = C < J^fj^ à l'état de pureté.
Le rendement est satisfaisant. On y a trouvé 17.27
et 17.42 °/o d'azote; la formule en demande 17.28 %.
Le nitrile [3 biméthyl-acrylique constitue un liquide
incolore, mobile, d'une agréable odeur prussique, d'une
saveur très piquante, sui gêner is.
11 est insoluble dans l'eau qu'il surnage, soluble dans
l'alcool et l'éther.
Sa densité à 14° est égale à 0.8292.
Il bout sans décomposition à 140°-142°, sous la pres-
sion ordinaire.
Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 2.77; la
densité calculée est 2.79.
( 3« )
Ce nitrile complète, avec le nitrile crotonique, la série
des dérivés (3 de méthylisalion du nitrile acrylique CN
- CH = CH.,.
Il est intéressant de les examiner au point de vue de
leur volatilité relative.
Différence 40». Différence 22o.
C!V Éb. 78" CiN Éb. 118» CN Éb. liO-'-l/t^»
I I I
CH CH CH
II II II
CH» CH C
' A
CH3 CH3 CH3
On voit combien va en diminuant l'induence de la
mélhylisation sur l'élévation du point d'ébullition.
Il est non moins intéressant de comparer ces trois
nitriles avec les nitriles simples, saturés aux mêmes
étages de carburation.
CN — CH,-CH3
CN-CH = CHo
CN - en, - CH, - VAU
CN - CH = CH - CH,
CN - CM, - CH < ^[[j
CN - CH = C < ^j['
Eh.
1)8» ^
78° .
\-20°
Éb.
Éb.
118°
118" ,
129° \
140° >
) 0»
)+11°
( 57 )
Non seulement les différences varient quant à leur
valeur, mais même quant à leur signe.
A l'étage C3, la déshydrogénation détermine un abaisse-
ment d'environ 20" dans le point d'ébullition; à l'étage C4,
toute différence a sensiblement disparu. A l'étage Ç^, la
déshydratation s'accompagne, au contraire, d'une éléva-
tion d'environ 11° dans le point d'ébullition.
Il est encore intéressant de comparer, quant à la vola-
tilité de leurs termes respectifs, la série des nitriles saturés
avec celle des nitriles non saturés correspondants.
Nitriles saturés. Nitriles non saturés.
CN Eb. 98" Ci\ Eb. 7?
CH2 \ CH
' + 20" " ) + 40°
CH3 / CH,
CN 118° CN 118»
CH, \ CH
CH2 j+H" CH 1 + 22°
CH, / CH3
CN 129" CN 140"
I I
CHj CH
I II
CH C
A A
GH5 CH3 CH3 CH3
On voit par là que les différences sont précisément
double dans la série des dérivés non saturés.
(38)
Le rapprochement des nilriles correspondants saturés
et non saturés en C3 et en C4 n'offre pas moins d'intérêt.
CH3 - CH. - CN Eb. 98"
CHî-CH^-CHî-CN WS"
CHg-CH^-CN Éb. WS"
CHa-CH-CN 78°
CHs-CHs-CH.-CN ÉI). US"
CH2 = CH-Cll2-CN 155°
+ 20»
40°
17»
cn, = cn-CN Éb. 78° \
/ + 57"
Clf„ = CH-CH2-CN 135" /
On voit à l'évidence l'inlluence volatilisante exercée
par le rapprochement des systèmes - CN et - CH = CHg,
influence qui ne s'exerce pas à travers le chaînon - CHg
du nitrile en C4 CN - CHo - CH = CH.,.
Dérivé en Cg.
La cyanhydrine amylidénique CN - CH(OH) - CH.)
CH
CH<pu'^, homologue de la cyanhydrine isobutylidé-
nique, se comporte comme celle-ci sous l'action de
l'anhydride phosphorique. H en résulte le nitrile non
CH
saturé correspondant CN- CH = CH-CH < p"^, le nitrile
iso-pyrotéribique ou y diméthyl-cr otonique, que l'on appel-
lerait également bien nitrile acrylique [i isopropylé.
(39 )
Ce composé constitue, comme les précédents, un beau
liquide, incolore, mobile, d'une odeur agréable, plus ou
moins aldéhydique, d'une saveur piquante, plus ou moins
douceâtre, insoluble dans l'eau qu'il surnage, soluble
dans les dissolvants carbonés, l'alcool, l'éther, l'acé-
tone, etc.
Sa densité à 16° est égale à 0.8268.
11 bout fixe, sous la pression de 754 millimètres, à
154°-155«.
Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 3.20; la
densité calculée est 5.28.
C'est le point d'ébullition que lui assigne l'analogie.
Les nitriles butyrique et crotonique ont sensiblement les
mêmes points d'ébullition; il en doit être de même de
leurs dérivés biméthylés y.
CN-CHj-CHa-CH, Éb. 118»
CN-CH = CH-CH, il8»
CN-CH^-CHî-CH <^[J' Éb. 155»
CN-CH = CH-CH <p!!' 154»-155»
+ 0»
+ 0»
Il est utile de rappeler en ce moment les rapports de
volatilité qui existent entre le nitrile acrylique et son
dérivé (3 biméthylë
CN-CH = CHî
Eb. 78»
\
cN-cH = c<^[;;
140» i
y + 62
( ^+0 )
On voit ainsi combien diffère, quant à son intensité,
l'influence qu'exerce sur la volatilité la substitution de
2 - CH3 à :2H, suivant qu'elle s'opère dans un groupement
carboné à double ou à simple soudure.
Je ferai remarquer par la même occasion combien
diffèrent aussi, quant à la volatilité, les deux nitriles
mëthj/l-acryliques isomères :
Nilrile acrylique Éb, 78" \
I dérivé a CN-C = CH2 90"
Nilrdes methyl- )
acryliques j^^j^^ p CN-CH=CH '
I - CHj, nilrile croto-
\ nique 118"
Une fois de plus, il apparaît d'une manière évi-
dente combien puissamment influe sur la volatilité de la
molécule totale l'existence dans celle-ci d'un atome de
I
carbone - C -, sans hydrogène, relié à du carbone exclu-
sivement.
Dérivé en €§.
La cijanhydrine œnanthylidénique CN - CH(OH) - (CHg)^
- CH5 est le dernier des nitriles-alcools que j'ai soumis à
l'action de l'anhydride phosphorique.
14 grammes de nitrile, mélangés depuis quelque temps
à 20 grammes de P2O5, ont été distillés au bain d'huile,
sous pression raréfiée. Le produit qui passe est remar-
quable de pureté et représente environ 50 % du rende-
ment théorique. Il suffit d'une double rectification pour
( 4i )
le rendre propre à l'analyse. Celle-ci a fourni les chiffres
suivants :
Azote o/o
Substance. Trouvé. Calculé.
1 Os^4^)28 11.20
1 1.48
II Oe-^jieSO H. 09
Le composé ainsi obtenu est le nitrile crotonique y
butylé, CN - CH = CH - (CH2)4 - CH5.
Il constitue un liquide incolore, mobile, d'une odeur
forte, rappelant l'œnanthol, d'une saveur nauséabonde,
désagréable. Il est insoluble dans l'eau, mais soluble dans
l'alcool et l'élher.
Sa densité à 16° est égale à 0.8318.
Il bout, sous la pression de "GO millimètres, à 197°-2(XI°.
Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 4.05. La
densité calculée est 4.21 .
Ce nitrile est le troisième existant renfermant le
système CH = CH.
Il est intéressant de le comparer aux nitriles saiurés
correspondants :
CN-CH, -CHî-CHs Éb. 118°
CN-CH = CH-CH, 118»
CN - CHj - CH2 - CH < ^[j^' Éb. 155°
CN - CH = CH - CH < ^{J' 1 54°-l 55»
CN - CH2 - CHj - (CH2), - CH5 Éb, 1 98»-200''
CN-CH = CH-(CHî)4-GH3 197°-200°
+ 0"
+ 0»
( 42 )
On voit ainsi que la transformation du système symé-
trique CH2 - CH^ en CH = CH dans ces conditions, c'est-
à-dire voisin du composant - CN, n'intlue pas sensible-
ment sur le point d'ébullition.
§ II. — Sur les dérivés crotoniqiies
CH5-CH = CH-C.
Au point de vue des relations de volatilité qui existent
entre les composés saturés et les composés non saturés
correspondants, les dérivés crotoniques - CH = CH -offrent
un grand intérêt.
L'un d'entre eux, et des plus importants, n'a pas encore
été décrit. J'ai tâché de combler cette lacune. Il s'agit du
chlorure crotonique CH5 - CH = CH - COCl.
Ce corps résulte de l'action du trichlorure de phos-
phore sur l'acide crotonique, selon l'équation
fcH3-CIl=CH-C<QjJ -HPCl3=fcH5-CH = CH-C^,\ +P(0H)5.
On a employé 12 grammes d'acide et 6 grammes de
trichlorure. La réaction s'établit sous l'action d'un léger
échauflément. On sépare après quelque temps la couche
liquide supérieure de la masse poisseuse de l'acide phos-
phoreux formé, auquel le froid a donné quelque consis-
tance. Il ne se dégage guère d'acide chlorhydrique.
Une double rectification suffit pour obtenir ce produit
à l'état de pureté.
Le chlorure crotonique CH5 - CH = CH - COCl constitue
un liquide mobile, incolore, d'une odeur suffocante,
fumant à l'air ordinaire.
Sa densité à 1(3° est égale à 1.293.
11 bout, sous la pression ordinaire, à 1240-125".
( ^3 )
Sa densité de vapeur a été trouvée égale à 5.61.
Substance 08%03i9
Pression barométrique 765™'"
Mercure soulevé ôSi"""
Tension de la vapeur 101°"°
Volume de la vapeur CS**,?
Température 100°
La densité calculée est 3.61.
Son analyse a fourni les chiffres suivants :
Chlore »/o
Substance. AgCI. Trouvé. Calculé.
I . . . 06%1005 08%13G1 53.52
33.97
II . . . 0e%2312 0SS3127 55.47
Il est utile de rappeler que le nitrile butyrique normal
CH3 - CH2 - CH2 - COCl bout à 100°-101'\
Il en est donc tout autrement à cet étage des chlorures
et des nitriles correspondants saturés et non saturés
CN-CH,-CH, -CH, Eb. 118»
0»
CN-CH = CH-CH, 118'
OCCI - CAU - Cir, - CH3 Eb 100"^
" +25"
OCCI -CH-CH - CH, lâiMSS-'
(44)
La même relation qu'entre les chlorures se constate
entre les éthers butyriques et crotoniques correspondants :
CH3-CH2-CH.2-CO(OCH3) Éb. 102»
CHj-CH-CII-COlOCHs) 120»
CH3-CH2-CH2-CO(OC,Hb) Éb. 120»
CH3-CH = CH-C0{0CA) 142"
+ 18»
+ 22»
Quant aux alcools, butylique et crotylique, ils sont
entre eux dans le même rapport de volatilité que les
nitriles
CH5-CH„-C[l2-CH2(0H) Éb. 116° \
) 4- 1»
CH3-CH = CH-CH2(OH) 117» /
Le chlorure d'acrijle CHq = CH - COCI iournit avec les
alcools, les éthers de l'acide [3 chloro-propionique CICH2 -
CH2-C0(0C„H,„^,), l'acide HCl, produit de la réaction(*)
s'ajoutant intégralement à l'acide acrylique. Le chlorure
crotonique se comporte de la même façon. Sur ce chlo-
rure placé dans un ballon bien refroidi, on a fait tomber
la quantité équivalente d'alcool; il ne se dégage pas
d'acide chlorhydrique. L'éther formé bout en grande
partie à la première distillation de 165° à 170°. On
sait que l'éther chloro-butyrique [3 CH5 - CHCl - CHg CO
(OC2H;;), produit de l'addition de HCl à l'acide croto-
nique, bout à 168".
(*) Voir Ch. Moureu, loc. cit.
( «)
Je tiens à adresser tous mes remerciements à mon zélé
préparateur, M. Auguste De Wael, pour la part qu'il a
prise, au point de vue expérimental, dans l'élaboration
de ce travail.
APPENDICE.
(^ [II. — Recherches sur divers composés non saturés,
par M. Camille Âschman.
Un de mes assistants s'est occupé autrefois, à mon
invitation, dans mon laboratoire, d'études sur le pouvoir
additionnel des composés non saturés.
Les résultats de ses recherches ont été consignés en
partie dans la dissertation qu'il a présentée à la Faculté
des sciences de Louvain pour l'obtention du grade de
docteur (*). Ils n'ont jusqu'ici, que je sache, reçu aucune
autre publicité.
Je crois faire chose utile en signalant à présent
certains faits constatés par M. Aschman au cours de ses
recherches, faits qui méritent, à mon sens, d'être tirés
de l'oubli. Se rattachant aux questions générales de la
solidarité fonctionnelle et de la volatilité dans les composés
carbonés, ils offrent, au point de vue de mes études
personnelles, dans lesquelles ils s'encadrent naturelle-
ment, un intérêt tout particulier.
(') Sur le pouvoir additionnel des composés non saturés bivalents et
les dérivés allyl-acétiques , par Camille Aschman, assistant au labora-
toire de chimie générale. Louvain, Van Lintliout frères, 1883.
( 4t) )
A. — Sur les dérivés aUyl-acétiqiies
CgH 5 — CHj — C • . .
L'acide allyl-acétique a été obtenu par le dédoublement
de l'allyl-acétylo-acétate d'éthyle sous l'action des bases.
On sait que le dédoublement de ce composé
OC - OC2H.,
I
CH - C-^Hg
I
co
I
CH3
comme d'ailleurs celui de tous les composés du même
ordre, peut se faire de deux façons diverses :
a) Entre les chaînons CH - C3H5 et CO, pour donner
les acides acétique et allyl-acétique ;
b) Ou bien entre le chaînon éther et le chaînon
HC - C3H5, pour donner, outre l'acide carbonique, de
l'allyl-acétone C3H5 - CH2 - CO - CH3.
A la suite d'essais nombreux, l'auteur a trouvé que le
rendement le plus considérable en acide allyl-acétique
C5H5-CH2-CO(OH) s'obtient par l'emploi d'une solution
de potasse caustique faite dans les proportions suivantes :
Potasse caustique 140 parties
Eau 40 —
On fait bouillir pendant quelques heures, dans un
ballon en communication avec un appareil à reflux,
(47 )
rallyl-acétylo-acétale d'éthyle avec celte solution de
potasse caustique, d'après les proportions indiquées par
l'équation
OC - OC3H, OC < OC,H, OC < ^^^'
HC - C5H8 H,C - C3H5
I +KOH= + ou +
CO OCOK H,C - C3H,
I I I
CH, CIL CO
I
CH
Lorsque la réaction est terminée, on sépare l'allyl-
acétone qui surnage et on ajoute au liquide aqueux de
l'acide chlorhydrique en excès pour chasser l'acide allyl-
acétique de son sel ; celui-ci vient surnager. Quelques
rectifications l'amènent à l'état de pureté.
Chlorure d'allyl-acétyle
OCCl - CH2 - CH, - CH = CHj.
Ce corps résulte de l'action du trichlorure de phos-
phore sur l'acide allyl-acétique, dans les proportions
indiquées par l'équation
5[C3H, - CH, - CO(OH)] + PCI3 = P(0H)3 + {C,ll, - COCl)^.
On chautre pour déterminer la réaction. L'acide phos-
phoreux se dépose sous forme d'une masse blanche par
le refroidissement. La partie liquide que l'on sépare, sou-
mise à la distillation, fournit le chlorure d'allyl-acétyle
pur dès la seconde rectification.
( 48 )
Son analyse a fourni les résultais suivants :
Chlore "/o
Substance. Chlor. d'argent. Trouvé. Calculé.
I . . . 06',2644 0^^3460 52.45 \
) 52.40
II . . . 0gs2I7l 06^2853 52.38 /
Le chlorure d'aUyl-acélyle CUç) = CH - CH.) - COCl con-
stitue un liquide incolore, très mobile, d'une odeur suffo-
cante, fumant à l'air.
Sa densité est égale à i.0739 à 13°.
L'eau, l'alcool, l'ammoniaque réagissent vivement sur
lui, comme sur les chlorures acides en général.
Il bout fixe à 128° sous la pression de 765 millimètres.
La densité de vapeur a été trouvée égale à 5.96.
Substance Ok%0620
Pression barométrique 760""'
Mercure soulevé 674"'
Tension de la vapeur 86°
Volume de la vapeur 146'^'^
Température dOO"
La densité calculée est 4,07.
AUyl-acétamide
CsHs-CHj-COtNHj).
Elle résulte de l'action du chlorure sur l'ammoniaque
en solution aqueuse concentrée.
Ce corps cristallise en paillettes blanches, solubles
dans l'eau, l'alcool et l'éther. Il fond à 94° et bout à 250°
sous une pression de 770 millimètres.
I
Saïai
îmni
( ^9 )
A Uyl-acéto-nitrile
C.H^ - CH, - CN.
Ce corps résulte de la déshydratation de l'amide corres-
pondante à l'aide de l'anhydride phosphorique.
C'est un liquide d'une agréable odeur, insoluble dans
l'eau, d'une densité égale à 1.4803 à 43°, bouillant
vers 440° sous la pression ordinaire. Densité de vapeur
trouvée, 3.00; calculée, 2.80.
Je ferai remarquer en passant que les dérivés allyl-
acétiques ont la même volatilité que les dérivés valé-
riques normaux correspondants :
CHj - CH2 - CH, - CH, - COCI Eb i 27-128»
CH» = CH . 128»
CHj-CHî-CHi-CH^-CiX Eb. 140°
0»
CHj = CH- 440»
CH3-CH2-CH2-CH,-C0(0H) El.. 185»
CHj = CN- 187» /
CH^-CHs-CHa-CHa-COtOCsHB) Éh. 144« \
) + 0»
CH, = CH- 144° /
L'acide allyl-acétique s'ajoute à l'acide hypochloreux.
Il en résulte un acide chloro-oxy-valérique (HO) CIC3H-;
Ô""' SÉRIE, TOME XXXVI. 4
( SO)
-CH2-C0(0H). Celui-ci se présente sous forme d'un
liquide incolore, plus ou moins épais, plus dense que
l'eau et peu soluble dans celle-ci.
Ce corps n'est pas distillable. La chaleur le décompose
en dégageant de l'acide chlorhydrique.
L'analyse de ce corps a donné les résultats suivants :
Chlore "/o
Substance. AgCl. Trouvé. Calculé.
I . . . Os%l9G5 Og',1839 ^23.22 \
II . . . 06%2900 0g^5048 23.55
) 23.02
Ce que l'on sait de la nature des produits d'addition
de l'acide (HO) Cl au propyléne CH^j = CH - CH3 et aux
composés aUyiiques CHo = CH - CH^X en général (*),
autorise à attribuer à cet acide chloro-oxy-valérique
la constitution suivante : CH.2(0H) - CHCl - CH.2 - CHw2
-CO(OH).
L'allyl-acétylo-acétate d'éthyle s'ajoute avec facilité au
chlorure d'iode, en solution aqueuse, en dégageant une
quantité de chaleur appréciable. L'éther, d'abord plus
léger que l'eau, ne tarde pas à tomber au fond de celle-ci
sous forme d'une huile épaisse, qui se colore en brun
dès l'instant où il y a excès de ICI.
Cette huile, après avoir été lavée à l'eau alcalinisée
pour la décolorer complètement, placée dans un exsicca-
teur, ne tarde pas à se prendre en cristaux. Ceux-ci
fondent à(>l°; plus haut, ils se décomposent.
(*) Voir Bull, de L'Acaii. roy. de Belgique, 2» série, t. XXXVII,
pp. 357 et suiv. (année 1874). — Comptes rendus, etc., t. LXXXII,
p. 1266 (année 1876j.
( m ^
j
Son analyse a fourni les chiffres suivants :
Cl + I.
Substance. AgjlICl). Trouvé. Calculé.
48.79
1 . . . 0g%1522 0e%1720 48.42
Il . . . 0g^^5H 0e',U87 48.74
li. — Sur l'allyl-acétone
C:,Hs-CH.,-C0-CH3.
L'auteur s'est d'abord occupé d'améliorer la méthode
de préparation de ce composé. Au lieu d'employer la
potasse en solution alcoolique, il a eu l'idée de faire
usage d'une solution étendue de carbonate de potassium.
Une solution de carbonate bipotassique équivaut, en
elfet, à une solution de KOH et de KHCO5; or, c'est sous
l'action des alcalis en solution étendue que s'opère surtout,
selon M. VVislicenus, le dédoublement des dérivés acéti/lo-
acétiques avec formation d'acétone. L'expérience a con-
firmé ses prévisions. Dans ces conditions, presque tout
l'allyl-acétylo-acétate d'éthyle se transforme en allyl-
acétone. 11 suftît de faire bouillir dans un appareil à
reflux. Il ne se forme pas, ou du moins très peu, d'acide
allyl-acétique, le carbonate de potassium étant trop peu
énergique pour déterminer la scission du noyau jioiyiai-
boné C4 du côté - CO.
Dans ce même ordre d'idées, l'auteur a essayé avec
succès l'action d'autres sels à réaction basique, tels que
KCN, K5PO4. etc., sur l'allvl-acétylo-acétate d'éthyle.
Celui-ci a fourni abondamment de l'allyl-acétone. Il sulïit
( 32 )
même de le chauffer en vase clos pendant quelques
heures, avec de l'eau, vers 480", pour opérer ce dédou-
blement qui, dans ces conditions, reste toutefois incom-
plet.
L'allyl-acétone se comhine aisément et vivement avec
l'acide hypochloreux. Il en résulte une chlorhydrine
acetonique répondant à la formule
(HO)Cl - QHb - CH, - CO - CH,.
Elle a fourni à l'analyse les chiffres suivants :
Chlore »/o
Substance. AgCl. Trouvé. Calculé.
1 . . . Ok',2152 0g^2O27 25.49 v
) 25.66
II . . . 0«^2512 ()ir^2572 23.40 /
Ce corps constitue un liquide incolore, épais et vis-
queux, plus dense que l'eau au fond de laquelle il
tombe et qui le dissout fort peu, non distillable sous la
pression ordinaire.
De même que les composés d'addition de l'acide
(OH) Cl aux composés allyliques, il doit renfermer le sys-
tème (H0)CH2 - CHCl. L'auteur n'a pas réussi, sous l'ac-
tion des alcalis caustiques, à en obtenir l'oxyde corres-
pondant, de la formule
CHî - CO - CH, - CH„ - CH - CH,,
0
à la fois acétone et oxyde glycolique.
( S5)
C. — Acide cro tonique.
CH5-CH-CH-CO1OH).
L'auteur s'est encore occupé des produits cristallins
d'addition de l'acide hypochloreux et du chlorure d'iode
à l'acide crotonique ordinaire (fus. 72").
Diverses circonstances l'ont empêché de continuer
cette étude, que je me propose de faire reprendre dans
mon laboratoire.
I). — Sur l'acide fumarique.
Le fumarate d'éthyle (*) ne se combine pas avec l'acide
hypochloreux en solution aqueuse.
Le liquide, mélange de l'éther fumarique et de la solu-
tion hypochloreuse, a été abandonné à lui-même, à la
température ordinaire, dans l'obscurité. Après quelques
jours, le fumarate d'éthyle avait disparu et s'était trans-
formé en une masse semi-solide. En même temps, une
notable pression s'était produite dans le flacon.
Le produit formé n'était autre que du succinate d'éthyle
bichloré C^H2CK2 - (CO - OC^H^)^, qui s'obtient cristal-
lisé dans le sulfure de carbone en longues aiguilles
incolores, fusibles à 57°.
(*) Éb. 220", produit de l'action du chlorure de fumaryle sur
l'alcool.
(Si)
Leur analyse a donné les chiffres suivants :
Substance.
AgCI.
Chlore •/
I. . .
0g%2121
06S2493
29.07
I. . .
0KM620
08% 1921
29.33
Le succinale d'éthyle bichloré en demande 29.21 *>/„.
Dans le produit d'addition de (HO) Cl au fumarate
d'éthyle, il ne doit s'en trouver que 15.84 %.
Il est à remarquer que le succinate d'éthyle bibromé
fond, selon Kekulé, à 58°.
Il a été constaté également que le fumarate d'éthyle ne
se combine pas non plus avec le chlorure d'iode en solu-
tion aqueuse.
Le fumarate d'éthyle (C2H:,0)GO-CH=CH-CO(OC2H;i)
n'est autre chose que l'éthylène bicarboxyl-éthylé symé-
trique.
Si l'on se rappelle avec quelle facilité ces deux
réactifs (HO) Cl et ICI se combinent avec l'éthylène lui-
même, on voit combien l'intensité du pouvoir additionnel
de cet hydrocarbure est diminuée par la disparition
d'une partie de l'hydrogène et son remplacement par
des groupements négatifs, tels que - C0(0C2H3).
.Je ferai remarquer à cette occasion que j'avais constaté
moi-même auparavant que l'éthylène perchloré CI^C
= CCI2 'le se combine pas ii l'acide hypochloreux; il en
est transformé, à la longue, dans l'obscurité, en éthane
perchloré CI3C - CCI 3.
L'origine du chlore dans ces circonstances est évidente.
L'influence des éléments étrangers sur les aptitudes
réactionnelles du carbone ne l'est pas moins.
( '^5 )
Quelques faits relatifs à la décharge produite par la radia-
tion infra-électrique; par P. De Heen, membre de
l'Académie.
Nous avons montré antérieurement que la décharge
d'un conducteur soumis à une radiation infra-électrique
se produisait en grande partie par la rencontre de ces
rayons avec les lignes de force du conducteur; mais on
peut se demander si l'énergie électrique est, par suite de
cette circonstance, dissipée dans l'atmosphère, ou bien si
elle se perd en prenant pour canal la source de radiations
elle-même. Les expériences que nous allons indiquer
montrent que les deux modes de dissipation paraissent
se produire simultanément.
Nous nous sommes d'abord servi d'un brûleur de Bun-
sen, que nous avons placé à 35 centimètres environ de
notre électroscope à balles de sureau décrit précédem-
ment, et nous avons observé que la décharge se produit
pour ainsi dire instantanément lorsque le brûleur est en
communication avec le sol; si, au contraire, on prend la pré-
caution de l'isoler en le disposant sur une tablette suspendue
à l'aide de fils de soie, la décharge se produit lentement.
Il résulte de cette observation que dans le deuxième cas
la dissipation se produit exclusivement par l'intermédiaire
de l'atmosphère ambiante, alors que dans le premier cas la
source de radiations a également servi de véhicule à V électricité.
Afin de nous en assurer, nous avons disposé la lampe
sur un électroscope dont la feuille d'or est suspendue
entre les pôles d'une pile sèche, et nous avons remarqué
(56 )
que celui-ci s'électrise sous l'acliou de l'éleclroscope à
balles de sureau; le signe est le même.
Au lieu de se servir du brûleur, on peut utiliser une
spirale en fil de platine que l'on chaulie au rouge et que
l'on dispose ensuite sur l'électroscope.
La radiation infra-électrique de Rôntgen donne lieu à
une observation absolument identique, bien que le phé-
nomène soit moins accentué. Alin de le montrer, nous
nous sommes servi de la disposition (fig. 4).
/
P
"/■/
VV '/■'/'.
Fig. \.
En A est le tube à rayons X, placé à 42 centimètres
d'un écran en plomb P de 1 x0"',66, percé d'une ouverture
circulaire de 10 centimètres; vis-à-vis de cette ouverture,
du côté du tube, se trouve une feuille d'étain E dont les
bords ont été repliés. Cette feuille est suspendue à l'aide
(57 )
fie deux lils de soie /, et à 13 centimètres de récran P se
trouve l'éleetroscope à balles de sureau B.
Dans ces conditions, la feuille d'étain E joue le rôle de
foyer d'ébranlement de l'éther, c'est-à-dire de la lampe
dans la première expérience; aussi observe-t-on que
lorsque la feuille est isolée, la décharge est plus lente que
si celle-ci est en communication avec le sol.
Voici les séries d'observations que nous avons réalisées;
elles indiquent le temps de la décharge, en secondes.
Nous avons observé alternativement, en touchant simul-
tanément la feuille E et l'écran P, et en laissant la feuille
E isolée.
PREMIKRE
SÉRIE,
Keuille
E
isolée.
Qon isolée.
17"
13"
^0"
1C"
18"
15"
:20"
15"
21"
16"
25"
17"
26"
20"
DELIXIÈME
SÉRIE
Feuille
E
isolée.
non isolée.
14"
12"
U"
II"
15"
12"
W
11"
( S8)
TROISIÈME
SÉRIE.
Feuille
E
isolée.
non
isolée
15"
9.5"
12"
9'
On voit que la décharge se produit toujours plus lente-
ment lorsque le foyer d'ébranlement est isolé.
La deuxième expérience peut également se réaliser
avec la radiation Rontgen. A cet etïet, au lieu de dispo-
ser sur l'électroscope le bec de Bunsen, nous avons disposé
sur celui-ci un cadre C (lig. :2) sur lequel était tendu une
FiG. 2.
feuille d'étain ayant 0'",60 x 0™,oO; un tube de Crookes
fonctionnant faiblement était placé à une distance suffi-
( 39 )
santé pour éviter une action électrique sensible. Dans ces
conditions, l'écran d'étain joue le rôle de foyer d'ébranle-
ment de l'élher, et si l'on met en contact l'électroscope
E avec une bouteille de Leyde chargée, on remarque que
l'électroscope e se charge d'électricité de même signe,
ainsi que cela avait lieu pour la flamme.
Nous avons tenu à indiquer d'une façon détaillée les
résultats de l'expérience et les dimensions de l'appareil,
afin qu'elle puisse être répétée dans les mêmes condi-
tions. Si l'on utilisait, par exemple, un lube trop fort,
la décharge se produirait par les lignes de force qui
dépassent l'écran P, et l'eff'et serait voilé.
L'observation de la décharge par les flammes donne
encore lieu aux remarques suivantes : Si la flamme n'est
pas isolée, la vitesse de décharge est sensiblement indé-
pendante de la dimension de la flamme.
Afin de le montrer, nous nous sommes servi d'un petit
tube métallique percé d'une ouverture ayant une fraction
de millimètre de diamètre. On pouvait alors faire varier
la hauteur de la flamme depuis 2 millimètres jusqu'à
55 millimètres de hauteur.
Voici les résultats obtenus :
Temps de décharge.
Flamine Flamme
de de
2 milliiiièlres de hauteur. 33 millimèlres de hauteur
23" 23"
2-2" 25"
20" 25"
21" 20'
20" 20"
( 60
Si, au coiiliaiie, un fait usage d'une flamme isolée, l;t
vitesse de décharge dépend des dimensions de la flamme.
Voici les résultats obtenus avec un bec de Bunsen :
Temps de décharge.
Hauteur
Hauteur
Hauteur
de la flamme :
de la flamme :
de la flamme
12 centimètres.
8 centimètres.
2.5 centimètres.
21"
37"
67"
19"
33"
70"
20"
38"
69"
Si l'on vient à disposer un simple fil conducteur C
(fig. 3) entre la flamme et l'électroscope, la vitesse de
Fk;. .3.
( 61 )
décharge est diminuée, ainsi que nous l'avions déjà signalé ;
mais on peut remarquer encore que cet effet est à peu
près indépendant de la position occupée par le fil C.
Enfin cet efîet disparaît complètement si le fil G est isolé
en le disposant sur une lame de verre.
Si le fil C, au lieu d'être placé entre la flamme et l'élec-
troscope, est placé derrière la flamme, on observe l'eflet
inverse. La décharge est plus rapide lorsque le fil occupe
cette position que si on le supprime. Si le fil est isolé,
son influence disparaît comme dans le premier cas.
Si l'on place une flamme isolée entre deux électroscopes
chargés de même nom (fig. 4), ces électroscopes échangent
leur énergie comme le feraient deux corps chauds rayon-
nant l'un vers l'autre, et il en résulte que la décharge est
beaucoup plus lente lorsque l'on charge les deux électro-
scopes de la même électricité, que si l'on n'en charge
qu'un seul.
( 62 )
Les électroscopes étant placés à 56 centimètres de la
flamme, le temps de décharge était de 90" lorsqu'une
charge positive était communiquée aux deux appareils et
de 44" lorsqu'un seul appareil était chargé.
Si l'un des électroscopes est chargé positivement et
l'autre négativement, la décharge est au contraire instan-
tanée, ainsi que cela résulte du fait précédent.
Si une flamme non isolée est placée dans les mêmes
conditions, on observe le phénomène inverse. C'est ainsi
que l'un des électroscopes, chargé positivement, retombe
en 35" lorsque le second n'est pas chargé. Il retombe
en 65" lorsqu'on maintient une charge négative sur le
second. Il retombe au contraire en 27" lorsque le
second est également chargé positivement.
Si l'on substitue à la flamme l'étincelle d'une bobine,
et si l'on répète l'expérience (fig. 4), on remarque que
celle-ci se comporte comme une flamme non isolée.
Du tracé tmjocardique du cœur exsangue (deuxième note);
par M. Jules Waroux, préparateur de physiologie à
l'Université de Liège.
Dans une note communiquée à l'Académie royale de
Belgique le 5 lévrier 1898, nous avons montré que le
tracé cardiographique du cœur de Chien exsangue pré-
sente la forme trapézoïde ordinaire, du moment que le
cœur est convenablement nourri par une circulation de
sang artériel (injecté par l'aorte dans le système des
artères coronaires).
Le tracé perd la forme trapézoïde et devient semblable
à nn tracé de secousse musculaire simple (colline à som-
( 63 )
met unique) lorsque le muscle cardiaque est placé dans
de mauvaises conditions de nutrition, par exemple lors-
qu'on interrompt momentanément l'arrivée du sang
artériel.
FiG. i. — Cœur de Chien extrait. — Circulation artificielle de sang artérialisé.
— I*inee myocardiographique.
Nous ne reviendrons pas en détail ici sur le procédé
opératoire; nous nous h(U'nons à reproduire (fig. i) un
tracé myocardiographique du cœur exsangue sur lequel
se voient plus ou moins les trois ondulations du plateau
systolique et (fig. 2) un tracé montrant la transforma-
FiG. 2. — Cœur de Chien extrait. — Circulation artificielle de sang artérialisé.
— Pince myocardiographique. — /, fermeture du tulte d'arrivée du_sang.
— 0, ouverture de ce luhe.
lion graduelle des cardiogrammes sous l'influence de l'ar-
( 64 )
rèl de la circulation artificielle. En / a lieu cet arrêt par
suite de la fermeture du tube d'arrivée du sang. Quel-
ques secondes après, le tracé perd sa forme et devient
semblable à un tracé de secousse musculaire simple,
pour reprendre graduellement sa forme primitive après
la réouverture du tube d'arrivée du sang qui se fait en 0.
Nous avons repris les mêmes expériences en faisant
agir sur le cœur du sang de Chien soumis au préalable à
un courant de CO^, courant qui a pour effet de lui enle-
ver une notable portion de son oxygène et de le charger
de C0-. On laisse circuler CO- dans le liquide sanguin
jusqu'à ce que sa coloration rouge vif soit devenue brun
rougeâtre, jusqu'à ce qu'il ait pris, en un mot, l'aspect du
sang veineux. Dans ces expériences, nous avons fait cir-
culer alternativement dans le cœur du sang artérialisé et
du sang empoisonné par CO^, et nous avons recueilli des
tracés correspondant à ces deux circulations.
A cet effet, l'appareil primitif a été un peu modifié. Au
lieu d'une seule bouteille contenant le sang à distribuer,
nous en avons employé deux, une pour chaque espèce de
sang. Chacune de ces bouteilles porte à sa partie supé-
rieure un manomètre et une branche de bifurcation du
tube qui amenait primitivement la pression de la trompe
de Muencke à la première bouteille. Ces deux espèces de
sang sont amenées au cœur par deux tubes en caoutchouc
partant de la partie inférieure de chaque bouteille et se
rendant à une canule en verre en Y placée dans l'aorte.
La pression agissant sur les liquides, en ouvrant alter-
nativement l'un ou l'autre de ces tubes, on peut donc
faire arriver dans le système coronaire tantôt du sang
artériel, tantôt du sang empoisonné par C0-.
(63 )
Comme nous l'avons déjà indiqué dans la noie précé-
dente, les précautions les plus minutieuses doivent être
prises pour éviter que des bulles d'air ne pénètrent,
poussées par le courant sanguin, dans les petites artères
du cœur.
Pour les écarter dans ce cas, le meilleur moyen con-
siste à fixer le tube amenant le sang artériel à l'une des
branches de la canule de l'aorte, l'autre branche étant
ouverte, après avoir auparavant laissé s'écouler un peu
de liquide sanguin qui entraîne l'air du tube. Ce liquide
continuant à s'écouler, sous l'intluence de la pression
qu'on lui a communiquée, pénètre dans la canule et sort
par l'autre branche, en entraînant l'air qu'elle contient;
on ouvre alors le tube à sang chargé de CO-, celui-ci
s'écoule en entraînant également l'air du tube, et on fixe
le tube sur la deuxième branche de la canule, en laissant
se rencontrer les deux courants sanguins; puis on ferme
immédiatement le tube à sang empoisonné au moyen
d'une vis à pression ou par tout autre système.
Le sang artériel pénètre de la sorte dans l'aorte et les
coronaires, et le cœur commence à battre en donnant un
tracé à forme trapézoïde; si l'on change la circulation, si
l'on fait arriver au cœur le sang empoisonné par CO-, le
tracé normal se transforme en un tracé à secousses
simples, comme le montrent les exemples que nous don-
nons.
La figure 5 représente le tracé pris sur un cœur de
Chien exsangue animé par une circulation artificielle de
sang artériel, au moyen de la pince myocardiographique.
Seize secondes après l'établissement de la circulation de
sang à CO-, le tracé s'est transformé en tracé de
O'"" SÉRIE, TOME XXXVI. 5
( 66)
secousses simples, comme sous l'influence de l'arrêt de
la circulation (fig. 4).
}?.i.^i
J\J\I\!\P
FiG. 3. — Cœur de Chien extrait.
Circulation artificielle artérielle.
Pince myocardiograpliique.
FiG. 4. — Circulation artificielle de
sang à CO'-. — 46 secondes après son
établissement.
''/•2.^8
FiG. 5. — 60 secondes après le retour FiG. 6. — 3 minutes 20 secondes après
de la circulation artérielle. — Le le retour de la circulation artérielle,
tracé reste tel encore pendant 2 mi-
nutes 20 secondes.
Cependant les secousses vont en diminuant dans
l'exemple qui nous occupe, bien que la circulation arté-
rielle ait été rétablie, et 60 secondes après ce rétablisse-
ment (lig. 5) les battements ne se traduisent plus que
d'une façon presque imperceptible. Cet état se main-
tient pendant 2 minutes 20 secondes; mais 5 minutes
20 secondes après le retour de la circulation artérielle,
le tracé a repris les caractères qu'il avait avant l'expé-
rience. Il a fallu dans ce cas 3 minutes 20 secondes d'une
circulation artérielle pour abolir les effets d'une circula-
tion de sang à CO- de 1(> secondes.
(67 )
Le cœur, sous l'iniluence nocive de ce sang, est devenu
très malade, puisqu'il a pour ainsi dire suspendu ses
battements pendant 5 minutes. Cette nocuité est trop
forte. En diluant 1 volume de ce sang chargé de CO-
avec 2 ou même 5 volumes de sang artériel, on obtient
un mélange sutïisamnient puissant pour produire un
changement dans les contractions du cœur, se manifes-
tant par des modifications du tracé, sans amener son
arrêt.
FiG. 1. — Cœur de Chien extrait. —
Circulation artérielle. — Pince myo-
cardiographique.
FiG. 8. — Circulation de sang chargé
de 00- (mélange). — 7 secondesaprès
son établissement.
FiG. 9. — 21 secondes après le retour de la circulation artérielle.
Les figures 7, 8, 9 et les figures 10, 11, 12 ont été
obtenues en utilisant un mélange semblable.
( 68)
FiG. 10. — Cœur de Chien extrait. — Pince myocanliographique
— Circulation artérielle.
FiG. 11. — ^3 secondes après l'établissement de la circulation
de sany à CO- mélange'.
FlG. 12. — 28 secondes après le retour de la circulation artérielle.
((i9)
La ligure 13 l'eprësente encore un tracé de contraction
(lu muscle cardiaque animé par une circulation artérielle;
sur quelques-unes des systoles, notamment sur les pre-
mière, septième et huitième, on remarque bien les trois
ondulations du plateau syslolique. Vingt secondes après
l'établissement de la circulation de sangà CO-, la secousse
FlG. 13. — Cœur de Chien extrait. — Pince myocardiographique.
— Circulation artérielle.
est devenue simple (lîg. 14). Ce qu'il y a de particulier
dans cet exemple, c'est que, après le retour de la circu-
lation artérielle, le tracé ne redevient normal qu'au bout
de 90 secondes (lig. 17), bien que nous ayons employé le
mélange et non du sang empoisonné pur. Cependant,
avant le rétablissement complet du tracé, on peut remar-
quer à la 22*^ seconde (lîg. 15), à la oS*" seconde (fig. 16),
des secousses normales au milieu des secousses simples
d'énergie plus ou moins grande. Ce que l'on peut encore
remarquer sur le tracé rétabli, c'est le ralentissement des
pulsations et la diminution de leur énergie : il y a main-
tenant une pulsation par seconde; avant l'expérience, il y
en avait deux. On peut attribuer ce retard dans le réta-
blissement du tracé normal par la circulation artérielle.
( 70
^20 il
A^ 2.
5-5-98.
im
XiUlX
:b.
FiG. 14. — 20 secondes après l'établissement de la circulation
de sang à f.O* (mélange).
FiG. 15. — 22 secondes après le retour de la circulation anérielle.
FiG. Itî. — 33 secondes après le retour de la circulation artérielle
(71 )
à la grande fatigue du cœur sur lequel plusieurs expé-
riences de ce genre avaient été faites ; cependant, comme
le montrent les exemples, on peut dire que les effets
de la circulation de sang
empoisonné par CO- se font
plus vite sentir que les effets
du rétablissement de la cir-
culation de sang artérialisé.
Nous avons également
pris le cœur du Lapin
comme sujet d'expérience;
mais celui-ci ne se prête
pas aussi bien à ces recher-
ches que le cœur du Chien.
Nous avons réussi trois fois
sur cinq à produire les con-
tractions d'un cœur de La-
pin, en faisant circuler dans
ses artères coronaires du
sang de Cheval, mais étendu
d'un volume égal de solu-
tion physiologique à 9 °/oo.
Au début, nous avions fait,
sans résultat, quelques ex-
périences sur le cœur de
Lapin (note du 5 février
1898); nous avions alors
employé le sang de Cheval
pur. Il est possible qu'en
utilisant le sang de Lapin,
on augmente considérable-
ment les chances de succès.
( 72)
La figure 18 représeiUe un tracé pris sur le cœur du
Lapin au moyen du cardiograplie; on y remarque très net-
tement la forme Irapézoïde.
Fk;. 18. — Cœur de Lapin. — Circulation artificielle
de sang artériel. — Cardiographe.
Le cœur de Lapin, comme le cœur de Chien, convena-
blement nourri, fournit donc des tracés de cette forme.
Travail de l'Institut de physiologie
de l'Université de Liège.
( 73
ri.AS!^E BES LKITTKKS.
Séance du 4 juillel 1898.
M. le baron Ém. de Borchgrave, doyen d'ancienneté,
occupe le fauteuil.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents: MM. S. Bormans, Cli. Piot, Ch. Potvin,
J. Stecher, T.-J. Lamy, G. Tiberghien, L. Vanderkin-
dere, le comte Goblet d'Alviella, Ad. Prins, J. Vuylsteke,
A. Giron, le baron de ChestretdeHanett'e, Paul Fredericq,
God. Kurth, Ch. Mesdach de ter Kiele, H. Denis, le
chevalier Ed. Descamps, Georges Monchamp, D. Sleeckx,
P. Thomas, Ern. Discailles, Ch. Duvivier, membres; J.-C.
Vollgraff, associé; V. Brants, M. Wilmotte, H. Pirenne,
Ern. Gossart et P. De Paepe, correspondants.
— MM. Vander Haeghen, Banning et J. Leclercq font
motiver leur absence.
CORBESPONDANCE.
MM. Pirenne, correspondant; P. Meyer, JohnWestlake
et L. Bodio, associés, remercient pour leurs diplômes.
— M. Max Millier fait hommage d'une brochure publiée
en 1893, à l'occasion de son oO® anniversaire de docteur
( 74 )
de l'Université de Leipzig et de son 70* anniversaire de
naissance.
— M. Brants présente, pour l'vlnwMaîre, sa notice nécro-
logique sur Pierre Willems, ancien membre de la Classe.
— Remerciements.
— Hommages d'ouvrages :
1° Een Noord-Nederlander over zijn omreisje door Belgié
in 1823; notice par P. Fredericq (avec une note qui
figure ci-après) ;
2° Chartes du comté de Hainaut de l'an 1200. Reproduc-
tion des originaux, etc. (publication extraordinaire du
Cercle arcbéologique de Mons) ; par Léopold Devillers
(présenté par M. Edm. Marchai, avec une note qui figure
ci-après) ;
3° Les agglomérations urbaines; par le marquis de Na-
daillac, associé;
4° Poésies chrétiennes {ô" partie) ; par le chanoine Tous-
saint;
5° Actes du Congrès féministe international de Bruxelles,
1897; par M"" Marie Popelin;
6" Bibliographie des ouvrages arabes (5" livraison) ; par
Victor Chauvin (présenté par M. Stecher, avec une note
qui figure ci-après) ;
7" Le vers français et les prosodies modernes ; par Jules
Guilliaume (présenté par M. Discailles, avec une note qui
figure ci-après) ;
8° a) Les origines de la psychologie contemporaine; h) La
définition philosophique de la vie {^"éàlhon); par D. Mercier.
— Remerciements.
(73 )
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
Messieurs,
J'ai l'honneur d'offrir à la Classe des lettres une notice
tirée à part de la revue mensuelle publiée par la société
Het Willems-Fonds (1); cette brochure contient les notes
et impressions de voyage d'un Hollandais qui visita en
1823, avec sa femme et sa nièce, la plupart des villes
flamandes et wallonnes.
Il s'appelait Isaac Verwey, était originaire de Dordrecht
et remplissait les fonctions de greffier du tribunal à
Sneek, en Frise. Son naïf journal de voyage nous donne
des renseignements vraiment pittoresques sur l'état de
la Belgique, une dizaine d'années après son annexion à
la Hollande.
C'est par curiosité pure et par désir de voyager, dit-il,
qu'il songea à aller explorer en famille « les ci-devant
Pays-Bas autrichiens ». Parti de Dordrecht à 7 heures
du matin, le G septembre 1823, par le bateau à vapeur
De Neiferlander, il débarque l'après-midi à i heures sur le
(1) Een Noord-Nederlander over x,ijn omreisje door Uelgië in 1823.
(TuDSCHRiFT VAN HET WiLLEMS-FoNDs, 3''e jaai'gang, 8"e aflevering,
.luni 1898, bl. 65-93.) Le manuscrit a été trouvé à Dordrecht dans des
papiers de famille. J'en dois la communication à M. le D"" Kiewiet de
.longe, président du XXIV» Congrès néorla,ndais. tenu dans cette ville
en 1897.
( 76)
<juai d'Anvers et t'ait le reste de son voyage au moyen
d'une voiture de louage, qu'il paie 24 francs par jour,
tout compris, et qui lui est fournie par M. Loos, l'un
des fondateurs des messageries Van Gend et Loos. C'est
ainsi qu'il visite successivement Malines, Louvain, Tirle-
mont, Saint-Trond, Liège, Chaudfontaine, Huy, Namur,
Dinant, le champ de bataille de Waterloo, Bruxelles,
Alost, Gand et Saint-Nicolas. Le 24 septembre, le brave
greffier frison était de retour à Dordrecht avec sa femme
et sa nièce, très satisfaits tous les trois de leur excursion
de seize jours en Belgique.
Habitant des régions basses de Hollande et de Frise
aux grands pâturages qui s'étendent à perte de vue sans
la moindre ondulation de terrain, Isaac Verwey est natu-
rellement émerveillé à la vue des collines et des rochers
des bords de la Meuse et de la Vesdre.
Parmi les monuments, il admire surtout la cathédrale
d'Anvers, Sainte-Gudule à Bruxelles avec ses superbes
vitraux qui lui rappellent ceux de Gouda, l'hôtel de ville
de Louvain et l'intérieur de Saint-Bavon à Gand, dont
les sculptures de marbre l'ont surtout frappé, tandis qu'il
ne dit mot des tableaux. Au contraire, il s'étend avec
complaisance sur ceux de Saint-Michel à Gand, où
V Annonciation de Lens, qui venait de mourir à Bruxelles
âgé de 85 ans, lui arrache des cris d'admiration. A
Bruxelles, il apprécie surtout le nouveau palais des
Chambres ou États généraux.
Les trois universités fondées en 1817 attirent spéciale-
ment son attention. A Louvain, il admire le nouvel
Hortus botanicus et constate avec satisfaction et surprise
la grande propreté des auditoires, qu'on blanchit chaque
année pendant les vacances. Les collections scientifiques
( 77 )
sont pauvres, comme il est naturel pour une université
si récente; mais on y trouve déjà un fonds formé par les
doubles des collections de Leide. A la Bibliothèque, il
remarque une série de livres marqués au dos de la men-
tion Ilel (Enfer); ce sont des ouvrages condamnés par
VIndex et provenant de la Bibliothèque de l'ancienne
université supprimée par les Français après la conquête
de la Belgique.
A Liège, où il visite avec ébahissement la fonderie de
canons et une houillère aux installations bien primitives,
comparées à celles d'aujourd'hui, il note de nouveau la
propreté des auditoires de l'Université, le jardin bota-
nique et les installations scientiliques plus spacieuses
qu'à Louvain, vu le nombre plus considérable d'étu-
diants. Au cabinet d'histoire naturelle, il fait la connais-
sance du professeur Gaede (1), un Danois protestant, qui
lui fait voir un énorme loup empaillé, la terreur des
environs de Liège durant l'hiver précédent.
A Gand, il s'extasie devant « le célèbre jardin bota-
nique » avec ses grandes serres de fer en construction
comme celles de Louvain et ses bustes de botanistes
célèbres; il loue la Bibliothèque où il constate que la
collection des livres de jurisprudence, sa spécialité, est
bien fournie, et où il s'émerveille à la vue du pupitre
mécanique permettant de consulter une foule de livres
ouverts en même temps. Puis il va visiter le nouveau
Palais de l'Université, où les collections d'histoire naturelle
sont admirablement installées et où la monumentale
(1) Voir, sur cette curieuse figure de' savant, A. Le Koy, Liber
memorialis de l'Université de Liège, pp. 331-334.
(78)
Rotonde, qui est presque achevée, produit sur lui une
grande impression.
On voit que ces trois universités, créations admirables
du roi Guillaume, lui tiennent à cœur et qu'il en est
fier.
Parmi les choses curieuses qui le frappent, il note un
grand local (Wafelhuis), où le beau monde d'Anvers
s'écrase le dimanche pour manger des gaufres, boire
delà bière, fumer, se promener lentement et s'étouffer;
il croit y avoir vu réuni, dans la grande salle et dans
les salles adjacentes, environ un millier de personnes.
A Malines, il admire les nombreux ornements dorés
aux façades des vieilles maisons. A Louvain, il trouve
les vénérables bâtiments des Halles et de la caserne
(ancien séminaire) envahis par les échoppes de la foire.
A Saint-Trond, on le regarde de travers, parce qu'il
verse du lait, un vendredi, dans son thé. A Namur, il
va voir une colline en mouvement, qui glisse depuis une
couple d'années. Sur l'étang du parc royal de Laken se
balance une frégate en miniature. A Bruxelles, il va voir
jouer ïalma à la Monnaie dans le rôle de Mahomet de
Voltaire et y applaudit un virtuose de 8 ans, qui joue du
violon dans les entr'actes. A Gand, il assiste à la repré-
sentation de la Vestale de Spontini ; mais on y siffle si
énergiquement la chanteuse, que la pièce ne peut être
donnée jusqu'au bout.
Parmi toutes les villes qu'il a visitées, c'est « la grande
et belle ville de Gand » qui semble lui avoir fait le
plus d'impression. Aussi est-ce sur elle qu'il s'étend
avec complaisance. II y visite la collection célèbre de
M. Schamps, qui contenait des tableaux dispersés aujour-
d'hui dans les plus grands musées, et celle de M'"*' veuve
( 79)
Moysoi), beaucoup moins connue, qui comptait, dit-il,
cinq cents tableaux et toute sorte d'antiquités. La prison
de la Coupure {Maison de force), spécimen unique alors
du régime pénitentiaire perfectionné, intéresse très vive-
ment le greffier du tribunal de Sneek, non moins que la
citadelle en construction, décrétée par les Alliés comme
l'un des principaux points fortifiés dirigés contre les
retours d'ambition de la France vaincue. A Huy, il avait
visité avec non moins d'intérêt le fort achevé l'année
précédente.
En protestant fervent, il raille à l'occasion le culte
catholique et note soigneusement qu'il y a déjà une cen-
taine de réformés à Liège, sans compter les soldats de la
garnison. A Gand, il assiste au service protestant et y
constate la présence d'environ deux cents fidèles, dont la
moitié est fournie par la garnison.
Ces notes de voyage, naïvement rédigées au retour,
rendent assez bien l'état d'âme des Hollandais venant
inspecter leur « accroissement de territoire » après
Waterloo.
L'histoire locale trouvera à y glaner çà et là quelque
trait inconnu et curieux.
Cet opuscule vient compléter à propos le tableau si
pittoresque de la Belgique au temps du régime hollandais
(]ue nous a retracé un contemporain flamand, feu l'ancien
bourgmestre de Lierre, Georges Bergmann, dans ses
mémoires trop peu connus (1).
Paul Fredericq.
(1) Vit Vader Bergmann's gedenkschriften. Gand, J. Vuylsteke, 1895.
( 80)
J'ai riionneur d'appeler rattentioii de la Classe sur la
publication intitulée : Chartes du comté de Hainaut de
l'an 1200. Reproduction des originaux avec introduction,
traduction et notes, par Léopold Devillers, conservateur
des archives de l'État, à Mons (4).
Cette publication a le mérite de faire mieux connaître
deux cbartes des plus importantes du dépôt des archives
de l'État, à Mons.
Les chartes du Hainaut de l'an 1200 contiennent une
codification fort remarquable pour leur époque. On la
considère à juste titre comme étant l'œuvre de Baudouin,
comte (IX) de Flandre et (VI) de Hainaut, et de ses
légistes. Mais M. Devillers s'est attaché à démontrer que,
dès 1171, le comte Baudouin V de Hainaut publia une
paix qui contenait le germe de la charte pénale de 1200.
Chevalier Edw. Marchal.
J'ai l'honneur de présenter à la Classe le tome troi-
sième de la Bibliographie arabe de M. Chauvin, profes-
seur à l'Université de Liège. Le savant chercheur accu-
mule ici d'utiles renseignements sur les fabulistes arabes,
sur Barlaam, le roman dévot d'origine bouddhique, et
enfin sur Antar et les romans de chevalerie musul-
mane.
Pour la première partie, l'intérêt dépasse la littérature
(1) Mons, Dequesne-Masquillier, 1898, in-fol. Publication extra-
ordinaire du Cercle arcliéologique.
{Si )
orientale, car il s'agit principalement de fournir des docu-
ments pour l'étude si compliquée de la fable ésopique en
Orient. On sait combien Louqmâne, le Salomon fabuliste,
ressemble au fabuleux conteur de Phrygie. M. Chauvin
ne réclame que le mérite de rassembler plus de détails et
d'instituer des rapprochements suggestifs. Quant aux
autres fabulistes arabes, Haïqaz et surtout Roustam sont
l'objet de curieuses investigations. Les folkloristes et les
littérateurs seront heureux de trouver ici un corpus des
fables ayant cours chez les Arabes. Un résumé substantiel
contient, outre celles déjà connues, une soixantaine de
fables qu'on n'avait pas encore songé à extraire des
auteurs arabes.
Pour le Barlaam et Josaphat vulgarisé par le poème de
Gui de Cambrai au XllP siècle, le savant bibliographe
complète le travail de Kuhn en ce qui concerne la
comparaison avec les littératures étrangères. La plu-
part de ces paraboles bouddhiques sont illustrées d'iné-
dites références.
Même souci d'intégralité et d'exactitude (accwraci/) pour
le roman d'Antar,dont Voltaire devinait déjà l'importance
historique quand il l'appelait « le miroir du désert». Nous
trouvons ici tout ce qui peut aidera pénétrer le plus ancien
poème de chevalerie errante, le plus fidèle tableau de
l'Arabie nomade avant Mahomet.
Non moins intéressante est l'étude instituée sur les
romans musulmans d'Egypte, de Syrie et d'Algérie. C'est
le complément d'une section de la magnifique bibliogra-
phie du D' Ahlward.
J. Stecher.
3™* SÉRIE, TOME XXXVI.
( 82 )
Messieurs,
M. Jules Guilliaume fait hommage à l'Académie d'un
livre : Le vers français et les prosodies modernes, dont je
demande la permission de vous entretenir quelques
instants.
Est-ce, comme Pasquier l'affirme, à Jodelle, mort en
1577, ou bien est-ce à Mousset, mort quelque trente
ans auparavant (1), qu'il faut faire remonter la première
tentative de substituer la quantité métrique au dénom-
brement des syllabes qui, de temps immémorial, était en
usage dans la langue française?
Il ressort, dans tous les cas, du texte même des lettres
patentes de Charles IX autorisant l'Académie du poète
Baïf et du musicien Joachim Thibault de Courville, que
l'on voulait dès 1570 « renouveler l'ancienne façon de
composer vers mesurés pour y accommoder le chant pareil-
lement mesuré selon l'art métrique ».
L'Académie de Baïf mourut avec lui (1591) et de long-
temps il ne sera plus question des vers mesurés. On
respectera la rime dont la suppression devait être une
conséquence naturelle de l'imitation du vers antique.
Malherbe vient, qui impose la césure et proscrit l'en-
jambement et l'hiatus.
Le vers métrique est mort! Vive le vers classique!
Mais, fait remarquer M. Guilliaume à la lin du premier
chapitre de son livre, qui est consacré au vers métrique,
(1) Agrippa d'Aubigné tient pour Mousset.
( «3 )
toutes les vicissitudes ultérieures du vers français, son
évolution à travers le système classique et le système
romantique, n'ont servi qu'à préparer sa transformation
de vers métrique en vers rythmique.
Et M. Guilliaume nous le prouve fort habilement, en
un style vif et alerte, à grand renfort de citations et d'ar-
guments.
Nul n'était d'ailleurs plus autorisé pour écrire pareil
livre. Il possède à fond ses auteurs : les littératures étran-
gères n'ont pas plus de secrets pour lui que la littérature
française. Sa longue expérience d'auteur et de critique
lui a en outre appris bien des choses en matière d'art
dramatique et musical. Rien de tel, après tout, pour bien
juger, que d'avoir (passez-moi l'expression) mis la main
à la pâte.
M. Guilliaume — autre condition requise en semblable
besogne — n'est pas exclusif. Il ne ratifie pas toutes les
exécrations dont le vers classique a été chargé depuis la
fameuse préface de CromweU.
Ainsi pour le vers brisé : « A le bien prendre, dit-il
avec raison, les romantiques se donnaient beaucoup de
peine pour enfoncer des portes ouvertes, car le vers à
césure mobile existait longtemps avant eux. »
En dépit de Malherbe, un vers osait encore enjamber
sur le vers au temps de Racine et de Corneille.
Boileau avait eu beau dire :
Gardez qu'une voyelle, à courir trop hâtée.
Ne soit d'une voyelle en son chemin heurtée...
les grands classiques, en maintes circonstances, n'avaient
eu cure des recommandations du « législateur du
Parnasse ».
( 8i)
Mais voyez le plaisant de la chose! Quand Victor Hugo
lançait ses foudres contre l'alexandrin classique, il res-
pectait cette règle de l'hiatus, qui est bien une des plus
étranges qui se puissent concevoir (1). Mieux encore!
Dans l'hiatus proprement dit, il ne s'agit que d'euphonie.
Mais la mesure elle-même est en cause pour la collision
des voyelles à l'intérieur des mots et sur ce point les
romantiques, qui se posent cependant en révolution-
naires, ne sont pas plus audacieux que l'école classique ;
parfois même ils le sont moins. Ils auraient dû, dit
M. Guilliaume, chercher surtout ici à rapprocher la poésie
de la prose. Assurément ils auraient trouvé dans cette
simple recherche de l'euphonie « une source de richesses
infiniment plus abondante que dans l'enjambement de
quelques vers éclopés ».
Ronsard, leur inspirateur ordinaire, avait dit :
« Tu dois ostei' la dernière e féminine tant des vocables
singuliers que pluriers qui se finissent en ée et en ées,
quand de fortune ils se rencontrent au milieu de ton
vers. »
Ils n'osèrent pas écouter Ronsard, et le résultat de ce
manque d'audace, remarquait déjà en 1870 M. Ténint,
c'est que les mots en ée, ie ne peuvent plus se présenter
en poésie qu'à l'aide d'un de ces enjambements :
Marie
Stuart
Pie
Neuf
La rue
Vivienne.
(1) Cf. Théodore de Banville et Legouvé {La lecture en action).
(8S)
M. (Tuilliaume(l), tout en se défendant d'irrévérence ou
de dénigrement envers les maîtres de l'école romantique
(et spécialement envers Hugo à qui il serait bien tenté
de reprocher de n'avoir laissé voir, somme toute, que la
pointe (2) du « bonnet rouge » dont il est parlé dans les
Cotitemplations) , M. Guilliaume trouve mauvais surtout
qu'ils aient gardé comme des reliques la proscription de
l'hiatus et la détîguration de l'orthographe et de la pro-
nonciation, et répudié du passé tout ce qui donnait au vers
une empreinte caractéristique.
J'ai quelque peine à croire que ce soit l'épouvante
seule du « monstre hybride » {sic), produit des réformes
incomplètes de l'école romantique, qui faisait dire à
Henri Heine :
Je mourrais pour la France... mais
Faire des vers français, jamais !
Toutefois je m'explique parfaitement que l'un des plus
éminents associés de notre Classe, M. Gaston Paris, ait
formulé le vœu de «voir les poètes s'affranchir, comme les
savants, de préjugés prétendus scientifiques, pour la pro-
nonciation comme pour l'orthographe ».
Dans le chapitre consacré au vers rythmique, M. Guil-
(1) M. Guilliaume s'égaie très joliment de ce résultat, p. 63. A moins
d'avoir recours à l'expédient aussi commode que puéril signalé par
Ténint, il est encore interdit aujourd'hui de parler en vers d'une
annonce insérer dans un journal, ou du gém> de la langue non plus
que des litanies des saints, etc., etc.
(2) Cf. Le vers invertébré. (Annales pol[tiques et littéraires,
n» du 19 juin 1898.)
( 86)
liaume passe en revue tous les efforts faits depuis Tavor-
tement du vers métrique de Baïf « pour asseoir le vers
français sur des bases plus larges et moins chancelantes
que la césure mobile et la rime implacablement riche »
(p. 114).
Nous suivons avec intérêt, entre autres, les eftorts du
comte de Leu (l'ex-roi Louis de Hollande), utilisant les
loisirs qu'il s'était donnés — ou plutôt que son despo-
tique frère l'avait contraint à prendre — pour discuter,
dès 1815, la théorie du vers français sans rime, puis
passant, pendant la Restauration, de la théorie à la
pratique et s'affranchissant d'un « esclavage barbare et
puéril )) pour écrire en vers non rimes une tragédie et
un opéra ... mauvais d'ailleurs.
Nous suivons avec un intérêt plus vif encore les efforts
identiques d'un ancien membre de cette Classe, Van Has-
selt, dont nous évoquions le souvenir à la séance de
janvier dernier à l'occasion de la Théorie du vers rythmique
que ce Bulletin a reproduite.
Le mérite de ces études de notre confrère n'a pas été
assez apprécié. Il est même piquant de constater que ce
sont des poètes — voire des poètes belges — qui les ont
le plus dédaignées. Travaillez donc à a donner un libre
essor au vers français en régularisant son vol », ingéniez-
Yous à introduire dans la poésie française le vers des
autres nations littéraires, pour que vos frères en Apollon
vous traitent de maniaque (1), ou peu s'en faut!... Poeta
poetae lupus?
(1) Voir la note de la paiiçe 167 du livre de M. Guilliaume.
( 87)
Le dédain et l'injustice avec lesquels a été accueillie la
tentative si originale et si utile de Van Hasselt n'ont pas
découragé le poète Guilliaume.
La parfaite connaissance qu'il a des langues étrangères
lui permet de démontrer qu'il serait très facile de sou-
mettre la langue el le vers français à des règles aussi
précises que celles des autres nations. Nous vous signalons
tout particulièrement, Messieurs, les pages du chapitre IV,
où il examine les causes des divergences et des .incertitudes
qui régnent encore à ce sujet parmi les prosaïstes. Il
estime, avec M. Paris, que l'époque moderne s'est alfran-
chie parfois avec peu de discernement de certaines
entraves du XVI1« siècle, mais qu'elle subit les autres avec
une docilité qui rend assez risibles les prétentions de
quelques-uns de ses coryphées à une farouche et titanique
indépendance.
A la lin de son beau livre, M. Guilliaume se demande
si le vers français restera étouffé sous un fatras de règles
ineptes et pédantesques, ou s'il finira par se dissoudre en
prose :
Sera-t-il dieu, table ou cuvette ?
C'est le secret de l'avenir.
Ernest Discailles.
( 88 )
RAPPORTS.
Barthélémy et Méry étudiés spécialement dans leurs rapports
avec la légende napoléonienne; par M. Garsou, docteur
en philosophie et lettres, professeur à l'École moyenne
de Saint-Gilles.
Mtap/toi't de .Vf. E»'»*«ël ntêcaiUtfê, pfetnier coÈnn*i»»aii'« .
« La littérature de la Restauration et de la monarchie de
Juillet a eu une influence considérable sur la création et
l'expansion rapide de la légende napoléonienne.
Casimir Delavigne après Béranger, Victor Hugo après
Barthélémy et Méry ou en même temps qu'eux, propa-
gèrent le culte bonapartiste moins par sympathie pour le
régime impérial que par antipathie pour le gouvernement
de la branche aînée et de Louis-Philippe, plus par chau-
vinisme que par amour de l'absolutisme.
Et comme l'art et la presse se firent les complices de
la littérature, Napoléon III fut possible.
M. Jules Garsou, qui s'est proposé de déterminer les
phases successives du développement de la légende, a,
l'an dernier, dans une brochure (1) que la critique accueillit
vl) Béranger et la légende napoléonienne. Bruxelles, Weissenbruch,
4897.
(89 )
par des éloges bien mérités, montré ce que fit Béranger
pour la glorification du fondateur de la dynastie napo-
léonienne.
Aujourd'hui, dans le travail beaucoup plus important
qu'il soumet au jugement de la Classe des lettres,
M. Garsou s'occupe du rôle qu'ont joué Barthélémy et
Méry dans la genèse de l'intéressant phénomène, histo-
rique et littéraire tout à la fois, à l'étude duquel ce jeune
écrivain consacre les rares loisirs de sa carrière profes-
sorale.
Tout en suivant de près la formation de la légende
napoléonienne dans les œuvres de Barthélémy et de Méry,
— c'est la base du mémoire qu'il nous envoie, — l'auteur
s'est attaché à mettre en pleine lumière les côtés obscurs
de la vie des deux poètes marseillais.
Frappé surtout de l'oubli profond où est tombé le pre-
mier d'entre eux, il en a recherché les causes avec le plus
grand soin.
C'est en 1832, quand Barthélémy passa brusquement
du «:amp libéral avancé dans le parti dit doctrinaire, que
le silence commença à se faire autour de son nom.
Le satirique puissant dont la Némésis a parfois l'éclat
et la virulence des Châtiments, devint alors l'objet des
sarcasmes et de reproches sanglants de ses anciens amis
et lecteurs. Honni et méprisé en dépit des variations
qu'il exécutait sur le thème connu :
L'homme absurde est celui qui ne change j amais,
il essaya vainement de se faire pardonner sa volte-face.
Le public n'accorda plus son attention aux œuvres,
( 90)
remarquables pourtant, qu'il ne cessa de composer jus-
qu'à sa mort, telles que la Nouvelle Xémésis et le Zodiaque,
qui sont pour ainsi dire absolument ignorées de beaucoup
de lettrés.
M. Garsou commente ces oeuvres dans lesquelles Bar-
thélémy parle de Napoléon avec autant d'idolâtrie que
dans les premières. Sous ce rapport du moins, Barthé-
lémy n'a pas changé : comme son collaborateur Méry, il
persista toujours dans son culte pour l'Empereur.
Une patience infatigable, une sagacité toujours en éveil
et une grande conscience littéraire ont guidé M. Garsou
dans les recherches auxquelles il s'est livré un peu par-
tout pour nous faire connaître le caractère de Barthélémy
et de Méry et, en même temps, pour déterminer, autant
que possible, la part respective de l'un et de l'autre dans
celles de leurs œuvres qui ont été écrites en commun.
M. Garsou s'est aidé surtout des mémoires des contem-
porains, des brochures et des journaux de la Restauration,
de la monarchie de Juillet et du second Empire. Son
travail est richement documenté : certaines trouvailles
faites par lui, notamment à la Bibliothèque nationale de
Paris, sont d'un intérêt réel.
Le style de M. Garsou. à part de rares passages qu'il
lui sera très aisé de remanier, a les véritables qualités de
l'histoire littéraire : la clarté et la sobriété.
D'aucuns pourront reprocher à l'auteur de pousser un
peu loin l'admiration pour Barthélémy et Méry. Quand il
analyse (à certains endroits trop minutieusement) leurs
œuvres principales : Napoléon en Egypte et Le fils de
l'homme, il ne tarit pas en éloges — et ses éloges ne nous
paraissent pas toujours fondés. Mais que le biographe qui
(91 )
n'a jamais péché sous ce rapport lui jette la première
pierre!
Je reprocherai plutôt à M. Garsou de noyer quelquefois,
pour ainsi parler, le sujet principal de son étude dans un
trop grand luxe de détails — quelque intéressants qu'ils
soient d'ailleurs. Mais le remède est facile : il suffit de
mettre ces détails dans l'appendice dont l'auteur a fait
suivre son mémoire pour utiliser les résultats copieux de
ses vastes recherches.
En résumé, je considère le travail de M. Garsou comme
une contribution des plus importantes à l'histoire litté-
raire et à l'histoire politique de la France au XIX" siècle,
et je propose à la Classe des lettres de lui faire les hon-
neurs de notre collection de Mémoires in-8^ »
nappoÊ't de If, SIechefy tleuaciéttê» conttnisaait'o.
« Je conclus aussi favorablement que le premier rap-
porteur. La gerbe que le poète Autran souhaitait pour la
mémoire de ses deux compatriotes, a été faite par M. Gar-
sou, après une laborieuse moisson. Mais le glanage a été
trop avide, trop fiévreux. En d'autres termes, il y a quel-
ques détails un peu encombrants pour leur importance,
et surtout des citations trop longues. Plus d'une fois,
vers la fin, j'ai rencontré des couplets qu'il suffira d'abré-
ger ou de résumer. Je les ai indiqués sur le manuscrit.
En somme, cette psychologie du chauvinisme intéresse
et fait penser. »
( 92 )
Hnftpo»'! tÊf .91. tt'iltuolley ti'oiaiénu' fotuntiêtniw.
(c Tout en me ralliant, en principe, aux conclusions
de mes honorables confrères, je crois devoir accentuer
leurs réserves.
En réalité, le mémoire de M. Garsou est un simple
recueil d'extraits et de documents, reliés assez lâchement
les uns aux autres et qu'il eût fallu mettre en œuvre. La
proportion manque; telle pièce de circonstance ou de
courtisanerie est analysée en détail, alors qu'elle ne
méritait qu'une rapide mention; les notes sont souvent
dans le texte et le texte, parfois, dans les notes. En
somme, M. Garsou n'a fait jusqu'ici que le travail de
compilation ; il lui reste à digérer ce qu'il a amassé avec
un indéniable zèle pour son sujet.
J'aurais voulu aussi que l'auteur de cette étude sur
Barthélémy et Méry se préoccupât de l'ambiance histo-
rique et de ce que j'appellerai, un peu vaguement peut-
être, la philosophie de son sujet.
Nous sommes précisément à une heure de crise morale
pour la France. Des événements qui datent d'hier (pour
ne rien dire de la période « boulangiste ») ont montré
les passions populaires déchaînées et le divorce accompli
entre les intellectuels d'une part, l'armée et les partis
religieux de l'autre. C'est précisément ce qui arriva sous
Napoléon P', avec cette notable différence que Napoléon
avait le génie militaire et l'auréole de la gloire, que l'on
sortait d'une période révolutionnaire et que l'on était
disposé à tout pardonner à un despote, pourvu qu'il
garantît l'ordre et relevât la herté nationale.
C'est ce qui explique la quasi-unanimité d'admiration
( 95 )
que la littérature du début du siècle exprima sous des
formes très variées, quoique généralement médiocres. De
hautains esprits, comme Victor Hugo et Balzac, ne son-
gèrent pas à se dérober à l'engouement général. Ils
aimaient trop la gloire pour eux-mêmes et ils n'osèrent
braver un courant qui emportait tout.
Cette contagion dut être bien forte, puisqu'elle n'épar-
gna point un sceptique comme Stendahl, dont on connaît
la biographie de Napoléon et certaines pages de ses
romans et de ses mémoires où l'empereur est haussé à la
taille des héros d'Homère.
A un seul endroit de son travail, M. Garsou paraît s'être
soucié des causes de cette adoration impérialiste, en
laquelle se résume la carrière trop longue de Barthélémy.
Il fait observer que l'idée de revanche est constante dans
l'àme française. C'est une vérité très élémentaire et une
vérité de tous les temps et de tous les peuples. Le Cid
espagnol n'incarne-t-il pas les désirs de revanche des
Chrétiens sur les Maures, comme la Chanson de Roland
est le poème de la défaite de Roncevaux, comme Aliscans
est le poème de la défaite de Villedaigne?
En réalité, la célébration d'une victoire est l'aft'aire
d'un jour de noble exaltation ou de grossière effervescence ;
les conséquences d'une défaite perdurent longtemps et
douloureusement pour ceux qui l'ont essuyée. Et si
Napoléon doit à cette longue suite de triomphes, qui tenait
l'imagination littéraire en éveil et les passions des foules
en haleine, une part notable de sa gloire universelle,
n'est-il pas permis de se demander si les misères innom-
brables qui suivirent ses conquêtes, si le deuil des foyers,
les fosses ouvertes, les villes brûlées, les maisons vides
n'ont pas plus fait que tout le reste pour éterniser sa
( 9*)
mémoire? Il y a, chez l'être humain, une admiration
instinctive de la force brutale, qui prime les générosités
et impose silence aux rancunes et aux douleurs. Napoléon,
plus que tout autre héros du sabre, me paraît avoir béné-
ficié de ce sentiment-là. )>
Conformément aux conclusions de ces trois rapports,
le travail de M. Garsou paraîtra dans le recueil des
Mémoires in-8°.
COMMUiNICATIONS ET LECTURES.
Les Écossais, dits Scoten ou Schotle, en Flandre;
par Ch. Piot, membre de l'Académie.
l.
Dans ses relations concernant les deux conquêtes de la
Bretagne, appelée plus tard la Grande-Bretagne pour la
distinguer du pays du même nom sis en France, Jules
César ne fait pas mention des Écossais, en latin Scoti,
qui habitaient cette contrée (1). Celtes d'origine et de
race, très nomades et voyageurs surtout, ils n'ont rien de
commun avec les noms de Schot et de Schoten, accouplés
à des dénominations géographiques et topographiques de
lieux sis dans les Pays-Bas et les provinces flamandes de
Belgique, pour désigner des enclos. C'est postérieure-
ment aux conquêtes de César que nous voyons figurer les
Scoti dans l'histoire, ainsi que le constate à juste titre
(1) Liv. m, c. 9 et suiv.
( 95 )
Zeuss dans son travail intitulé : Die Deutschen und die
JSaclibarslàmmc (Munich, 1857). Jamais les annales his-
toriques n'en font mention avant cette époque.
Les Scotes, dit Zeuss, habitaient l'Irlande (1), thèse
très vraie et incontestable. Non seulement ils occupaient
ce pays, mais ils se répandirent en Europe, spécialement
dans les localités où ils pouvaient faire de la propagande
religieuse et catholique (2). De son côté, la Flandre ne
rebutait aucune peuplade, conformément aux principes
d'hospitalité admis par les Germains. Uospiies, dit César,
[as non putanl : qui quaque de causa, ad eos venerunt, ab
injuria prohibent, sanctosque habent (I. VI). Très étendu
et peu habité, ce pays pouvait recevoir les peuples dis-
posés à s'établir dans la Gaule pendant le grand mouve-
ment d'émigration provoqué par les Germains, et les
déplacements des Celtes. Quoi qu'il en soit de ces
émigrations, la qualification d'Écossais ou de Schot ne
peut être prise dans le sens d'une simple épithète due
au hasard; sinon il faudrait admettre qu'il en était de
même des noms des P>ancs, des Frisons, dits Wilde
Friesen, des Sicambres, des Suèves et des Saxons établis
dans ce pays.
(1) Zeuss, Scoti, die Bewôlmer von Ibernien, p. o68, et Gramatica
celtica. — Le Deutsches Wôrterbuch de Jacob Grimm et Wilheuw
Grimm, t. IX, p. 1610, comprend par Schottes, l'Ecosse. Voir aussi
BucHANUs ScoTus, Renim Scolicarum kistoria, fol. 49, et Hector
BoETius Deidononnus, Schotorum historia, fol. 3 et suiv. et 101 \°.
Les chroniques publiées dans les tomes II et III des Monumenta Ger-
tnaniae historica font mention de la guerre entre les Normands et les
Écossais établis dans l'Hibernie.
(2) Voir à ce sujet les tomes II et III des Monumenta Germaniae,
verbis Scoti, Scotli et Hiberni.
(90)
Après avoir fait observer que les Ecossais habitaient
l'Irlande, Zeuss reproduit différents passages d'écrivains
anciens, qui confirment entièrement sa manière de voir
au sujet de l'origine irlandaise de cette peuplade et con-
statant qu'elle remonte au V" siècle. Nous savons aussi,
par les Commentaires de César, que les Ménapiens établis
en Flandre étaient en relations suivies avec leurs com-
patriotes fixés en Irlande.
Cette population de Scots irlandais aurait-elle eu des
relations plus ou moins intimes avec les Scotes, Scoti
ou Wilde Scoten mentionnés dans les monuments histo-
riques de Flandre au XI V« siècle? Nous n'en doutons pas,
en présence des renseignements très amples fournis à
propos des Écossais, peuple mentionné et décrit par
Zeuss, dont nous croyons inutile de reproduire le
texte (1). Il suffit de faire observer que les Scotes cités
dans l'histoire de l'Hibernie habitèrent de bonne heure
le nord de l'île d'Albion ou la Calédonie, et qu'ils don-
nèrent ensuite leur nom à l'Ecosse dans la Grande-Bre-
tagne (2).
II.
Comment arrivèrent-ils, du moins en partie, dans la
Flandre, où leur séjour est constaté d'une manière for-
melle par la dénomination de Wilde Scotten, donnée à
une population qu'un feudataire flamand devait surveiller
(1) Voir Zeuss, loc. cit., pp. 193 et suiv.
(2) Voir à ce sujet Beda, Ecclesiasticœ historiœ Genlis Anglorum,
pp. 3 et suiv., et Herbert Maxivvei,, Scottishland naines, iheirorigin
and manning.
( 97 )
Spécialement pendant la reconstruction du pont édilié à
Furnes (1)? Aux termes du texte relatif à cette obligation
et datant de 4565, ce feudataire était tenu d'avoir l'œil
continuellement sur ces gens pendant les travaux du pont :
es sciddich te welken tiden dat mijn heere van Vlaenderen
eil op de Bourglie te Veurne te stane op diebourghe brugghe
ende die bourgh brugghe te hoiiden j'egen de Wilde Scoten ;
endeals men de bourgh brugge macct van nieuws, so es liie
scondich te legghen op den ondersten steen enen vlaemschen
penuinc.
Dans ce texte, dit M. Gilliodts, auquel nous emprun-
tons ce passage, les Frisons sauvages sont remplacés par
les sauvages Écossais. « Sous ce nom, ajoute-t-il, faut-il
entendre les Saxons d'Angleterre, dont Orderic Vital
disait : Frisia pro Angliis opibits mitlebat? ou bien les
précurseurs de ces intrépides Higlanjlers que les séides de
Guillaume de Loo auraient combattus au pont de Stoole-
bridge? » Nous ne le pensons pas. Ce ne sont, en tous cas,
ni des Francs, ni des Frisons, qualifiés parfois aussi de
sauvages par des documents du moyen âge, ni des Suèves.
Tous ces peuples étaient installés antérieurement en
Flandre.
A notre avis, il y a lieu de comprendre par Wilde Sco-
ten ou Scotten un détachement ou la fraction d'une
population venue de l'Hibernie en Flandre et appelée
peut-être à y remplacer les Ménapiens expulsés par les
populations germaines. Ces Ménapiens, l'histoire l'en-
seigne, avaient été, en partie, remplacés par les Flandren-
(1) Gilliodts-Van Seveiien, CoitUiines du quartier de Fumes, l. I,
introduction, pp. 94 à 96.
5""® SÉRIE, TOME XXXVI. 7
(98)
ses atqve Andoverpienses, Frisioves ef Siievi et barhari
quique circa maris littora degentes,?,e\o\\ un passage de la
vie de saint Éloi, rédigée vers l'an 674(1). L'hagiographe,
auteur de cet écrit, ne donnant pas la nomenclature
complète de ces barbari circa maris littora degentes, il est
permis, nous semble-t-il, d'y faire figurer d'autres peu-
plades, installées dans ces parages, surtout les Wilde
Scoten, mentionnés dans l'acte de 1365, et habitant peut-
être depuis longtemps les environs de Furnes, selon le
témoignage du document précité. S'ils n'étaient pas
originaires d'Ecosse ou d'Hibernie, pourquoi les aurait-
on appelés Écossais? Nous croyons notre conjecture
d'autant mieux fondée, que les noms de famille de Schot,
Schodt ou Schoot sont très répandus en Flandre et dans
les Pays-Bas (2). Nous trouvons aussi souvent en Flandre
les noms de Wilde et de Vries, portés par des habitants
de ce pays.
m.
Point de doute, les Wilde Scoten ou Schotten for-
maient une fraction minime des populations maritimes
établies en Flandre, spécialement près de Furnes, sans
qu'il soit possible de fixer la date de leur arrivée dans ces
(1) Vita Sancti Eligii, dans le tome III, page S57, de Dom Bouquet,
Reriim Gallicarmn et Francorum.
{% WiNKLER, dans son livre intitulé : Nederlandsche Geslachtsnamen,
cite : Schot, Schotsman, Schott. Le nom de De Schot est souvent
l'eproduit dans les publications de la Société pour la langue flamande
en France, travail de Courtois intitulé : Communauté d'origine et de
langage entre les habitants de l'ancienne Morinie flamingante et
wallonne. (T. IV des Annales du Comité flamand.)
( 99 )
lieux. Ils n'y étaient probablement pas nombreux, par
suite (les établissements occupés dans ces parages par
les Frisons, par les Suèves, peuplades que l'on a eu le tort
de confondre avec les Zélandais (i), et par d'autres
émigrés établis dans ces environs. Fatalement, ils ont dû y
subir l'influence de l'élément flamand, au même titre que
leurs voisins.
Si, comme nous le croyons, les Wilde Scoten étaient
originaires de l'Irlande, comment sont-ils devenus des
Flamands? A cette question nous répondrons par une
simple demande : Comment les Ménapiens, peuplade
gauloise taisant usage de la langue irlandaise, ont-ils
changé leur idiome et adopté le flamand à Courtrai et aux
environs de cette ville, actuellement flamands, ensuite la
langue romane à Lille et à Tournai? Les Normands n'ont-
ils pas parlé français en Normandie? Durant des époques
antérieures, les Étrusques ne sont-ils pas devenus des
Komains, les Phocéens des Français, etc.? Ces change-
ments de langues sont évidemment des questions de
chiffres pour les nouveaux venus, ainsi que nous l'avons
établi ailleurs, ou par suite de nécessités politiques, ou
par la force.
Primitivement, il n'y avait pas chez les peuples anciens,
comme de nos jours, des distinctions basées exclusive-
ment sur le langage, spécialement dans les pays dépour-
vus d'une littérature bien cultivée. L'esprit de nationa-
lité, à cette époque, n'était pas développé au point de
répudier tout ce qui n'était pas autochtone. Les Gaulois
(1) Van Cuuysselbergen, Antwoord over de oudkeden van Zeelanà,
p. 50. « Eligius, dit-il, bekeerde vêle Sneven, dat is Zeeuwen. »
( 100)
établis aux bords du Rhin ne se sont-ils pas germanisés
et ceux de la Galice ne sont-ils pas devenus, par la suite
des temps, des Espagnols (1)? Les habitants celtes de la
principauté de Galles ne sonl-ils pas de nos jours des
Anglais (2), malgré les efforts faits dans la presse et les
écoles afin d'y maintenir l'ancien langage, dans le but
d'amener le triomphe de certaines tendances politiques
et religieuses?
N'oublions pas aussi de constater que le llamand offre
des analogies avec la langue des Hibernois, ainsi que l'a
démontré feu le chanoine de Haerne (3), conformément
aux observations signalées par Caucer, Coleville, Wiclef,
Samuel Johnson et d'autres philologues anglais. Rien de
plus naturel. Constamment en contact avec les popula-
tions de Flandre par suite de leur attachement au culte
catholique, les Écossais ou Irlandais étaient à même de
s'initier au langage de notre temps. Celui-ci exerçant à
son tour une influence prépondérante sur la linguistique
de l'Angleterre, il n'y a pas lieu de s'étonner si les Wilde
Scholten sont devenus des Flamands. Leur situation devait
présenter des analogies avec celle des Francs, des Frisons,
des Saxons, des Suèves et autres peuplades installées
(1) Voir à ce sujet Les Celtes en Espagne, dans la Revue celtique,
t. XIV, p. 357, et t. XV, pp. 1 et suiv.
(2] Les Galles durent en grande partie se réfugier dans les mon-
tagnes. Voir Jean Muller, Saxones, p. 28. Lingard, Histoire
d'Angleterre, 1. 1, p. 77. Knobelsdorff, Die keltischen Bestandtheile
in der englisclien Sprache. Éd. Muller, Etymologisclies Worterbiich
der englischcn Sprache.
(3) Voir à ce sujet la Revue catholique de janvier 1883, pp. 176,
415, 463; de 1884, pp. 468, 628, et le Messager des Sciences historiques
de 1884, pp. 93, 229, 308.
( iOI )
successivement dans la Flandre et devenues indigènes
et flamandes dans cette contrée. Des linguistes distingués
ont lait observer aussi que la langue des Écossais, comme
celle des anciens Suédois, Danois et Islandais, présentait
des affinités bien établies avec l'ancien idiome flamand
et frison. A ces observations, nous devons ajouter que les
Acta Sanctorum constatent formellement comment les
Écossais sont sortis de l'Hibernie (1), et que les notes
publiées dans cette collection (2) font connaître les rela-
tions intimes établies anciennement entre la Belgique et
rÉcosse. Jusqu'au XV!*^ siècle, ces relations très fréquentes
et cordiales avaient un caractère de bienveillance et d'in-
l imité bien marqué. Entre les habitants de la Flandre,
d'une part, et ceux de l'Ecosse et de l'Angleterre, d'autre
part, les relations ont toujours été très intimes pendant le
moyen âge, tant sous le rapport du langage qu'au point
de vue des institutions et de l'esprit de nationalité. Ils se
recherchaient, se croisaient et s'assimilaient : témoin le
fait relaté dans le manuscrit n' 7809 à 7810, folio 317,
de la Bibliothèque royale à Bruxelles, et constatant, par
exenjple, que la famille Rnibbe, établie à Alveringen,
était apparentée à Thomas de Cantorbery k partir de l'an
1070. Nous ne citerons pas d'autres exemples semblables.
Ce sont les révolutions du XVP siècle et les événements
politiques de l'Angleterre qui ont brisé ces relations. En
présence de ces faits, faut-il s'étonner si les Wilde Scoten
sont devenus des Flamands?
(1) Ghesquière, Acta S. S., t. III, pp. 2 et 3.
(2j IbUL, t. VI, p. .^95.
( i02 )
IV.
11 y a lieu aussi de faire remarquer que le mot wild ne
doit pas toujours être pris dans le sens de « sauvage )>.
Franc, dans son livre intitulé : Ktymologisch Woorden-
boek (col. 1170), le lait remarquer ajuste titre (1). Dans
certains cas, le mot wild peut signifier indépendant,
intransigeant, indomptable, insoumis, récalcitrant, qualiti-
cations parfaitement applicables aux Écossais et aux Fri-
sons, peuplades aux allures très libres et autochtones.
S'il n'en était pas ainsi, il serait dilïicile de compren-
dre comment les noms de famille de Schot, de Vries, de
Wilde ou de Welde seraient devenus patronymiques et
honorables, en dépit du mépris qui aurait été attaché à
cette qualification (2).
De l'ensemble de ces faits, nous croyons pouvoir con-
clure que les Wilde Scoten ou Schotten ont le droit de
figurer dans la nomenclature des anciens habitants de la
Flandre maritime, malgré leur origine hibernienne, et ce
au même titre que les sauvages Frisons, appelés Wilti.
Dès le XIV*' siècle, ils devaient être initiés à la langue tla-
mande en usage chez leurs voisins et surveillants à
Furnes. Ils subissaient nécessairement par ce contact
rintluence de l'idiome parlé dans leur patrie d'adoption.
(i) Voir aussi Kilianus, Etymologicum teutonicae linyicae, verbo
Wild. Il traduit ce mot par : silvcstris, férus, agrestis, ferinus, indo-
mitus, effremis, immansuetus, vagus, vastus.
2) WiNKLER, dans ses Nederlandsche Gestachtsnamen, cite Wilde
Jan, Wildeboer, Wildervank. — De Bo, Westvlaamsche Idioticon,
mentionne un poisson, nommé à Furnes « schot». — VanHoorebeke,
Étude sur l'origine des noms patronymiques, cite les Wilde et Welde.
( i03 )
Tous ces détails, qui de prime abord peuvent paraître
superflus, sont à nos yeux indispensables pour faire com-
prendre la position et l'état de situation de cette peu-
plade et de ses voisins. Ils peuvent aider à expliquer la
présence en Flandre de plusieurs populations appelées
successivement à la formation de ce comté et faire com-
prendre le mélange et l'origine des dialectes divers parlés
dans ce pays. N'oublions pas aussi de signaler cette con-
trée comme le point de départ des relations des Pays-Bas
avec l'Angleterre, du commerce, des lois d'une civilisa-
tion très originale et autoritaire dans nos provinces, et ce
grâce aux tendances des libertés communales et de la
vie publique dans notre pays (i).
Cette position avait le grand avantage aussi d'être
agréable à l'Angleterre, toujours préoccupée de s'en-
tourer de petits États qui ne pouvaient lui porter
ombrage.
f 1) Voir à ce sujet : Vanderkindere, Les origines de la population
flamande, dans le tome X, page 421 des Bull, de l'Acad. roy. de
Belgique, 3' série, et Ibid., t. XI, p. 211. — Claerhout, De Franken,
de Friesen en de Saksen, dans le Belfort, l. I, p. 486.
( 104 )
Le camp de Labiénus pendant la guerre des Trévires ; par
Ch. Piot, membre de l'Académie.
Très peu de livres ont eu des éditions plus nombreuses
et engagé les commentateurs à les publier que celui inti-
tulé: C. Juin Caesaris commentarium de hello galico. Le
Lexkon caesarianum de Meusel, œuvre de patience et
d'exactitude publiée récemment, consacre à la nomencla-
ture de ces mémoires huit pages de texte bien compact,
grand in-8°. Nous y renvoyons le lecteur désireux de les
consulter et d'examiner ces publications en détail au
point de vue des Commentaires précités.
En vain, nous avons parcouru un grand nombre de ces
éditions, dans le but d'y trouver la solution bien établie
de la question de savoir où était situé le camp de Labié-
nus, lieu de refuge des Romains échappés aux poursuites
des Éburons au moment de quitter Atuatuca. Nous ne
répéterons pas ce que César dit à ce sujet. Il suffît de
faire remarquer que ce désastre d'une partie de l'armée
romaine eut probablement lieu dans le vallon par lequel
passe actuellement le vieux chemin de Tongres à Otrange,
ainsi que nous l'avons établi dans le Messager des sciences
historiques de 1874 (p. 143).
A la suite de cette infortune, les Romains voulurent se
réfugier dans les établissements militaires de leurs com-
patriotes les plus rapprochés du lieu de la défaite. Ces
camps, placés sous les commandements de Q. Cicéron et
de Labiénus, étaient installés à peu près au centre des
Gaules. Grâce aux Commentaires de César, nous savons
( 105 )
que les fugitifs échappés aux Éburons se dirigèrent an
hasard vers le camp de Lahiénus, situé bien loin d'Atua-
tuca (1). Oi^i était installé ce camp? César ne le dit pas
dans des termes précis, conformément à ses habitudes
d'indiquer les faits sommairement, lorsqu'ils n'ont pas
une grande importance à son point de vue. De là des
divergences d'opinions, dont nous croyons devoir rendre
compte. Baert, dans son Mémoire sur les campagnes de
César {p. 3(S) le place à Rocroy. Steininger, dans son
travail intitulé : Geschichte der Trevirer miter der Ilerr-
scliaft der Rômer (p. 52), le fixe aux environs de la Chiers
ou de la Semoy. A ce propos, il fait remarquer (p. 35)
qu'une distance de vingt lieues allemandes, soit de trente-
trois lieues françaises, séparait généralement les camps
romains. Bertholet, dans son Histoire du duché de Luxem-
bourg, se prononce en faveur de la Chiers. La Commis-
sion de la carte des Caules et Creuly placent ce camp à
Marche, Napoléon III à Lavacherie, sur l'Ourthe (Atlas,
t. I, pi. 14), sans autres explications au sujet de ce choix,
si ce n'est l'existence dans cet endroit de vestiges d'un
camp romain. D'autres commentateurs ont donné la
préférence à Revin et à Carignan. Sans vouloir résoudre
la question et sans l'examiner en détail, Wauters (2) fait
(1) Pauci ex prœlio elapsi, incertis itineribiis, dit César, per sijlvas
ad T. Labieman, legatum in Hybernia venerunt, atque eiim de r'ebus
geslis certiorem faciunt (1. V). Herbert Thomas, dans son livre
intitulé : De Timgris et Eburoni, rapporte les mêmes faits, p. IZ.
Ce ti'avail, très peu consulté, renferme bon nombre de renseignements
concernant la géographie ancienne de notre pays.
{% Revue trimestrielle, 2« série, W- volume et 156e de la collection,
p. 106. Cet auteur ne décide pas la question, en disant : « Nous ne pou-
vons, faute de données suffisantes, combattre ni adopter ces conclu-
( 106 )
observer que celte dernière localité ressortit constamment
au diocèse de Trêves et que Revin et Mouzon sont trop
proches de la Meuse pour se prêter au récit de César,
thèse qui nous semble sujette à caution. Le baron von
Goler suppose qu'Arlon tut le lieu de campement, et
Abel que c'était le Titelberg. En un mot, il y a autant
d'avis différents à ce sujet que d'auteurs : tôt caputa, tôt
census.
Nous tâcherons, de notre côté, d'élucider la question,
en faisant observer qu'il s'agit de se prononcer sur ce
point, en prenant pour base des renseignements bien
établis et très positifs.
Avant de procéder à cet examen, nous avons cru
devoir étudier le texte de César au point de vue des
qualifications qu'il donne, dans ses Commentaires, aux
cours d'eau, aux rivières et aux fleuves. De cette manière,
nous avons pu constater qu'il emploie toujours et con-
stamment le mot flumen pour désigner les fleuves et les
rivières sans distinction. Jamais il ne s'est servi des mots
rivulus et rivus. Il a donné la qualification de flumen à
Addriasdubis, Apsus, Arar, Axona, Bagrada, Bâtis,
Garumna, Genusum, Haliacmon, Iberus, Liger, Mosa,
Rhenus, Rhodanus, Sabis, Scaldis, Sequana, Sicoris,
Tamesis. Dans un seul passage, il parle de la Matrona
(la Marne), rivière qu'il qualifie de fluvius, tandis que le
sions »(p. 11)9;. Néanmoins, à la page 105, il affirme « que ces différents
textes prouvent à l'évidence que le camp de Labiénus était situé sur
le territoire rémois ». Ces différences d'opinions proviennent de ce
que les auteurs ont cru devoir distinguer deux expéditions de Labié-
nus, l'une près de la Meuse, l'autre chez les Trévires. César ne fait
mention, à l'année 53, que d'un seul camp occupé par I^abiénus, celui
sis près de la Meuse, et d une seule bataille livrée à cette époque.
( 107 )
dictionnaire latin de Foriallini énumère et explique
d'une manière complète les dénominations de flumen,
de fluvius, de rivuliis, de rivus et détermine fort bien
l'emploi et la signification de ces mots d'après les
auteurs latins.
Par suite du défaut de renseignements sutïisants repro-
duits à ce sujet dans les Commentaires de César, nous
croyons devoir les détailler afin de permettre de bien
juger la question.
Dans son livre V, le général romain constate (c. 24)
qu'il fut obligé de distribuer ses légions en diverses con-
trées et qu'il en envoya une chez les Morins placée
sous les ordres du lieutenant C. Fabius, une autre chez
les Nerviens sous le commandement de Q. Cicéron, une
troisième chez les Essues, en Normandie, commandée
par L. Roscius, une quatrième, sous les ordres de
Labiénus, chez les Rèmes, près du pays des Trévires (1).
Il est donc bien établi, par cette nomenclature, que le
camp de Labiénus était tixé sur le teri'itoire des Rèmes,
près des frontières des Trévires : //* Remis, in confinio
Trevirorum. Où et comment ces frontières étaient-elles
établies?
A cette question, César répond : « Toute la Gaule était,
disait-on, en armes; les Germains avaient passé le Rhin,
d'après la rumeur publique ; les quartiers occupés par
César et ses lieutenants étaient attaqués (2). »
(1) Quartum in Remis cum T. Labieno, in confinio Trevirorum hie-
marejussit (c. 24). La situation de ces camps énnmérés par César a
donné lieu à des dissertations nombreuses, au sujet desquelles les
auteurs n'ont pas pu s'entendre.
("2) Oninem esse in armis Gallican ; Germanos Rlienum tra)tsisse ;
Cœsaris reliqxMrumque Hiberna oppognorari <[. V, c. 41 .
( (08 )
Ces passai^es constatent donc que Labiénus avail
installé ses troupes aux frontières des Rèmes et que les
Germains voulaient taire passer leur armée en deyà du
Rhin, afin d'attaquer les Romains. Nous n'ignorons pas
que, dans son travail, Steininger émet l'avis que l'attaque
des Romains dirigée contre les Trévires eut lieu probable-
ment près de la Chiers ou de la Semois (1); mais cette
supposition ne nous semble pas fondée. Il résulte à
l'évidence des passages précités que les Trévires étaient
les voisins des Rèmes. A cette époque, spécialement
dans la Gaule, les peuples avaient en général pour fron-
tières des neuves, des rivières, des montagnes, des bois.
Quelles furent les frontières établies et reconnues entre
les Trévires et les Rèmes? Elles étaient évidemment
fixées par le cours de la Meuse; sinon il serait impossible
de comprendre la direction suivie par les Trévires au
moment de se diriger vers le camp des Romains, et d'ex-
pliquer comment ceux-ci auraient pu envahir si subite-
ment le territoire des ennemis pendant les poursuites
dirigées contre leur chef Induciomare.
De ces faits résulte évidemment que Labiénus et son
(1) « Die Sclilacht des Labiénus, dil-il, gesjen die Trevirer scheint
also an der Chiei's, oder Semois, vorgefallen und aucli Induciomarus
in einem dieser Fiasse, welche sich an die Maas ersfissen, umgekom-
men zu sein. Wen sie an der Maas selltsl statt gehabt batte, vviirde
C;esar den Namen des Plusses warscheinlicb nicht verscbwiegeu
baben » (p. 35). Mais la Ciiiers a sa source à Esch, entre en France,
baigne Longvvy, Longuyon, Montmédy, Carignan et se décbarge
dans la Meuse ; et la Semois, née près d'Arlon, arrose Bouillon et se
jette dans la Meuse près de Moncbarmé, en France. Ces rivières et
ces endroits sont loin du pays de Reims, où Labiénus était établi,
selon les renseignements de César. Il faut donc admettre, bon gré,
mal gré, que le fliimen désigné par le proconsul était la Meuse.
( 109 )
camp étaient installés près de la Meuse, dans le pays des
Rèmes, conformément au texte de César. La victoire du
proconsul, remportée à la plus grande joie des Rèmes
sur les Gaulois insurgés, fut aussi communiquée à
Labiénus, pendant son séjour chez ses hôtes, avec une
incroyable vitesse, bien qu'il fût éloigné, selon César, de
soixante mille pas des quartiers de Cicéron, où le pro-
consul était arrivé seulement après la neuvième heure du
jour.
César lui-même, à cette époque, résidait pour ainsi dire
constamment chez les Rèmes, qui lui étaient dévoués,
et ce afin d'être à la portée de ses lieutenants lixés dans
leur pays ou aux environs. Ce dévouement des Rèmes
témoigné aux Romains s'explique naturellement. Tou-
jours menacés par les Germains, ils étaient heureux de
trouver chez leurs dominateurs des alliés prêts à les
défendre contre les menaces et les entreprises des voisins
d'Outre-Meuse. A leur avis, mieux valait courber la tète
devant Rome, que de voir constamment le pays exposé
à la merci des hordes germaines, toujours poussées de
l'Orient vers l'Occident par des envahissements répétés
dans la Gaule, et constamment prêtes à s'établir dans
les possessions des peuples voisins.
Rien d'étonnant si la rive droite de la Meuse a été
choisie par César ou Labiénus dans le but d'y fixer un
camp. Celui-ci était établi dans une plaine facile à défen-
dre, tandis que la rive gauche, hérissée de collines et
d'accidents de terrain, présentait de grands inconvénients
pour la défense. Cette position à la droite du fleuve avait
en outre le grand avantage d'être une menace continuelle
à l'adresse des Trévires et des Germains, toujours prêts à
envahir les possessions des Gaulois et à combattre les
( HO )
Romains. Elle commandail aussi la route la plus courte
établie entre les Rèmes et la Germanie. Telle était la
position de ce camp, qui répondait parfaitement aux exi-
gences de l'art militaire des Romains. Toujours installés
sur une hauteur qui dominait les environs, les camps
romains occupaient généralement les bords d'une rivière
ou d'un fleuve dont les eaux étaient destinées aux
hommes et aux animaux. Mosomagus présentait toutes
ces conditions.
Parvenue aux Trévires, la nouvelle des succès de César
engagea leur chef Induciomare à se retirer pendant la
nuit et à ramener ses troupes dans l'intérieur du pays
(c. 54). Cette retraite momentanée ne lui fit pas perdre
courage ni l'envie de reprendre l'ofïénsive pendant une
campagne dirigée contre les Romains. Après avoir déclaré
ennemi de la patrie son gendre Cingétorix, personnage
très dévoué aux Romains, il annonça aux peuples de la
Gaule qu'il se rendrait chez eux par le territoire des
Rèmes, promettant de le ravager et d'attaquer le camp
de Labiénus (c. o()). C'était évidemment le résultat de la
haine bien caractérisée qui existait entre les Rèmes et
leurs voisins les Trévires, haine de race et de voisinage.
Quant à Labiénus, César nous apprend qu'il occupait une
position fortifiée par la nature et l'art et ne redoutait
aucun danger ni pour lui ni pour ses troupes. En atten-
dant, Induciomare faisait manœuvrer sa cavalerie autour
(lu camp romain, dans le but d'en reconnaître la situation
et d'inspirer l'effroi à l'ennemi. De son côté, Labiénus
retint toutes ses troupes dans le camp et ne négligea
rien pour faire croire à l'ennemi qu'il redoutait ses
attaques (c. 58). Cependant, dit César, Induciomare
s'approcha, comme de coutume, de notre camp, et passa
( m )
une grande partie de la journée dans le voisinage, tandis
que ses cavaliers lançaient des traits et, par des invectives,
nous provoquaient au combat. Personne ne leur répondit,
et le soir ils se retirèrent en désordre. Tout à coup Labié-
nus fit sortir, d'une manière inattendue, par les deux
portes du camp, toute sa cavalerie, avec ordre de pour-
suivre Induciomare et de l'amener mort ou vivant. « La
fortune, ajoute César, seconda les desseins de Labiénus.
Poursuivi seul par tous et atteint au gué du flumen, Indu-
ciomare est tué (i). »
Ce flumen, que César ne désigne pas par son nom, est
évidemment la Meuse. Très au courant de la situation
du pays des Trévires, par suite des relations antérieures
de Labiénus établies dans leurs possessions (2), César,
sans doute, en connaissait trop bien la topographie pour
s'expliquer à ce sujet. Souvent il oubliait de nommer
d'une manière précise les cours d'eau ou les désignait
parfois par le mot flumen. Ainsi, il garde le silence le plus
absolu à propos du tleuve ou de la rivière qui entourait
la forteresse gauloise d'Uxellodunum, mentionnée dans le
livre VIIT des Commentaires. Il n'y avait pas non plus,
dans les parages de la Meuse, d'autres rivières ni fleuves,
si ce n'est deux cours d'eau peu importants : la Semois
et la Chiers, petites rivières non navigables ni flottables,
qui ne pouvaient arrêter le passage d'une cavalerie. Peu
profondes, spécialement près de la grande route, elles ont
à peine quelques pieds d'eau, qu'un cavalier peut facile-
ment franchir sans y chercher un gué. A ces deux rivières
(1) Quiim uniim omnes pelèrent, in ipso flyminis vado deprehemus
Induciomarus interficitur, caputque ejus referlur in Castro (c. 58).
(2) Voy. à ce sujet les Commentaires, liv. I, c. .^î6 et .ST, et le liv. III,
( H^^ )
nous devons ajouter l'Aisne, qui coule sur le territoire
rémois. C'est en tous cas une question de peu d'impor-
tance, qui ne saurait prouver que le camp de Labiénus
n'était pas établi près de la Meuse, chez les Rèmes, con-
trairement à l'assertion de César. En ce point, nous
sommes d'accord avec le P. Alexandre Wiltheim, auteur
de la carte de l'ancien pays de Trêves, publiée par
Betholet (1) et reproduite par Paquet (2). Cette carte
olïre certaines analogies avec celle insérée dans le tra-
vail précité de Steininger, en ce qui concerne l'en-
semble des renseignements topographiques, mais non
pour les détails. Néanmoins les deux auteurs, sans
s'occuper de ces travaux, sont d'accord pour arrêter les
frontières occidentales du pays de Trêves aux bords de
la Meuse, fleuve qui a servi longtemps de frontière à l'em-
pire romain. Sur ce point, ils sont du même avis que
Hontheim (ô).
Nous devons donc admettre que le camp de Labiénus
n'était pas fixé à Rocroy, ville située à une trop grande
distance de la Meuse, dans une vaste plaine, tandis que,
selon la description de César, le camp de son lieutenant
était assis près du flumen, dans un endroit fortifié par la
nature et l'art (4).
Quant aux autres localités indiquées par Creuly, Napo-
léon m, von Goler, Abel, Steininger et les auteurs
(i) Cette carte est insérée dans l'Histoire de Luœembourfi, t. I,
publiée en -1721.
(2) Die Hauftatsaclien der Luxemburger Geschichte, Liixemboui'Cf,
1839.
(3) Historia trevirensis, t. I, pp. 4 et 5.
(4) Labiénus, quum et loci natura, et manu mmdtissimis caslris
sese contineret, de suo ac legionis periculo nihil timebat (c. S7).
( H5)
énumérés plus haut, elles n'ont rien de commun avec les
renseignements fournis par César, rien qui se rapporte à
la Meuse, fleuve sur lequel le camp était assis. C'est ce
qui nous dispense d'en parler et de discuter leurs opinions.
Où était enfin situé le camp de Labiénus sis sur la
Meuse? Telle est la question que nous tâcherons d'élucider.
Après avoir fait remarquer que ce retranchement était
fixé sur la rive droite de ce fleuve, près du territoire
des Rèmes (1), on nous demandera, sans doute, pour-
quoi César n'a pas désigné par son nom le flumen près
duquel ce camp était assis. Rien de plus facile à expli-
quer. Le lecteur des Commentaires du proconsul et des
écrits des auteurs latins a pu se convaincre que ceux-ci
ont toujours eu un but bien déterminé, celui d'éviter les
détails, et d'énoncer les faits sommairement. Par suite
de l'application de ce système, César a simplement men-
tionné, sans le nommer, le camp de Labiénus, assis sur la
Meuse, le seul et unique fleuve des Rèmes. Aucun autre
endroit ne présentait les mêmes avantages. D'une part, le
camp était bien défendu contre les agressions de l'en-
nemi; d'autre part, il commandait la grande route vers les
possessions des Trévires. Le choix de cet emplacement
était à la fois politique et militaire, politique au point de
vue du peuple rémois, militaire en ce qui concerne la
situation des Romains en présence des Germains.
En narrant le mouvement des troupes romaines lan-
cées par Labiénus à la poursuite d'Induciomare, le pro-
consul ne fait pas mention de leur passage ou traversée
(i) Quartam {legionem) in Rliemis ciun Tito Labieno in con/înio
Trevirorum Inermare jussit (1. V, c. 24).
Ô'"" SÉUIE, TOME XXXVl. <S
( i\A )
par un fleuve ou par une rivière, pas même par un cours
d'eau. JNéanmoins, si ce passage avait eu lieu soit par un
gué, soit par des bateaux, soit par un pont, cette circon-
stance aurait dû prendre, dans la narration, une plus
grande importance que celle relative à l'ouverture des
deux portes du camp romain au moment de l'attaque
dirigée contre Induciomare. Toutes ces circonstances
établissent, de la manière la plus évidente, que le camp
de Labiénus était assis à la droite de la Meuse et à l'em-
placement actuel de Mouzon, localité désignée sur la
grande route par Peutinger sous le nom de Mose ou Mosa.
Cette localité était traversée par le chemin de Reims
[Durocorlurum), passant par Voncq {Vimgus viens), par
Mosomagus ou Mosa, par Yvoy-sur-Cher [Epoissum viens),
par Arlon {Orolannm viens) et Nieder-Auwen {Andetanna
viens). Sur ce point, nous sommes parfintement d'accord
avec d'Anville (1) et Desjardins (2).
(1) Notice des Gaules, pp. 469-495.
(2) Géographie de la Gaide, p. 108. Cet auteur fait observer à ce
sujet et à juste titre qu'Epoisso vicies est indubitablement Yvoy-sur-
Chiers (voir Valois, p. 189), et que la direction de cette route est bien
celle de Reims à Trêves. Aucune des stations de la Table ne coïncide
avec celles de l'itinéraire, et si Mosa devait être identifié avec Mouzon,
comme l'ont voulu la plupart des géographes, les deux routes se con-
fondraient en ce point, Mouzon étant près d'Yvoy (Cher). Mais le
relevé fait avec soin, dans ces derniers temps, des vestiges des voies
romaines dans le département des Ardennes, a signalé deux grandes
artères principales, toutes deux partant de Reims : l'une dans la direc-
tion de Trêves, passant par Voncq, Mouzon et Yvoy, qui parait satis-
faire à toutes les exigences de l'itinéraire d'Antonin ; l'autre passant
par Roisy, Saint-Loup, Château-Portien, Noroion-Portien et gagnant
la Meuse à Mézières.
( Ha )
Après avoir établi, ainsi que nous l'avons tait plus
haut, que ce retranchement était, selon César, sis près de
la Meuse, dans le pays des Rèmes, il y a lieu d'en indiquer
la position précise. Dans ce but, nous avons consulté les
tracés des routes romaines de ce pays. Des auteurs ont
prouvé, d'une manière certaine, que la plupart des grandes
routes de communication sous l'empire romain étaient
généralement établies d'après le système admis antérieu-
rement par les nationaux. Rien de plus naturel,
A toutes les époques, les peuples, et les Gaulois sur-
tout, devaient être en possession de grands chemins et
de routes. S'il en est ainsi, — et nous n'en doutons pas,
— il est évident que pour fixer l'itinéraire suivi par
Labiénus au moment de la conquête de Trêves, nous
devons admettre les indications suivantes, reproduites
par Steininger :
Iter a Durocortoro (i).
Vungum (2), vicum, leg. XXII.
Epoisum (3), leg. XXII.
Orolanum (4), vicum, leg. XX.
Andetanale (5), vicum, leg. XV.
Treveros (6).
Nous avons donc pour itinéraire :
Reims, Voncq, Yvoy-sur-Chiers, Arlon, Nieder Auwen
(1) Reims.
{"l) Voncq.
(3) Yvoy-sur-Cher.
(i) Arlon.
(5) Nieder Auwen.
(6) Trêves (voy. Steininger, loc. cit., p. 14";
( H6 )
el Trêves. Un seul endroit est passé sous silence dans cette
nomenclature : c'est Mosomagus, aujourd'hui Mouzon (1),
localité sise dans le département des Ardennes et qui
nous intéresse particulièrement. Elle commandait la
grande communication entre le pays des Rèmes et Trêves,
et permettait à Labiénus et aux Romains de surveiller
continuellement la Meuse, limite naturelle entre les
possessions des Gaulois et des Trévires. Elle élail assise
à l'endroit dit Mose, indiqué à la carte de Peutinger, et
appelé aussi Mosomagus, ensuite Mouzon. Cette dénomi-
nation se rapporte à la fois au fleuve et à l'endroit. C'est
dans cette localité qu'était établi le camp de Labiénus,
le refuge des soldats romains, surpris par Ambiorix et les
Éburons au moment de quitter Aluatuca. Sous la domina-
tion des Romains, c'était le lieu de résidence du Magister
equilum GaUiarum (2). Pendant le moyen âge, c'était un
ancien domaine donné par Clovis II à l'évèché de Reims
et sis sur la rive droite de la Meuse, à 17 kilomètres au
sud de Sedan. La localité est citée dans la vie de saint
Maximin en 850(5). Flodoard ne la mentionne guère dans
son Ilistoria ecdesiac Uemensis, ni Marlot, tandis que Vale-
sius, dans su Aoticia GaUiarum (p. 564), en parle longue-
(1) Voy. à ce sujet Bischoff et Môi.ler, Vergleichendes Wôrterbuch
der allen, mittleren und neiien Géographie, p. 766. — Pendant le
moyen âge on écrivait tantôt Mosomiim, tantôt 3Iosomagus, Mousson.
Mossomium, etc., dénominations anciennes qui sont devenues
aujourd'hui Mouzon.
(2) Noticia dignitatum civiliiim quam militariuni perGallias. (Voy.
DoM Bouquet, Rerum Galliorum et Francoruni seriptores, 1. 1, p. 126.)
(3) On lit : Trevirorum episcopiis quein annos DCCCXXX composuit
Mosomagum castellum vocat a Mosa (V. Flodoardus).
( M7 )
ment : Mosomagus, dit-il, et pagus Mosomagensis. Moso-
magus a flumene Mosa, cui adjacet galUcum nomen incenit,
quasi Mosa vel ad Mosam mansio, vulgo Mouson... In Noti-
cia imper a romani milites dileclos ex incolis loci ejus con-
tracta noniine Musmagenses. D'Arbois de Jubainville (!)
imprime : « Mosomagus, champ de la Meuse, aujourd'luii
Mouzon. )) Autrefois fortifiée, cette ville fut souvent prise
et reprise, puis définitivement démantelée en 1055. Une
riche abbaye de Bénédictins y était établie sous le régime
ancien. La localité avait donc ci-devant une grande
importance (2).
A ces détails nous devons ajouter les suivants, fournis
par Paul Joanne : « Mouzon, dit-il, est l'antique bourgade
romaine de Mosomagus. Une abbaye, dont dépend l'église
actuelle de la localité, y fut fondée au X'" siècle par les
archevêques de Reims ; mais ceux-ci ne permirent pas
que le monastère fût érigé en évêché. Il se tint du XP au
XITP siècle plusieurs conciles à Mouzon (3). » Constatons
en outre que selon Joanne : « Mouzon est situé au sud
d'un coteau de 545 {sic) sur la rive droite de la Meuse »,
renseignement précieux au point de vue de l'histoire de
la localité. Il démontre que notre observation au sujet de
la situation des camps pendant la période romaine est
parfaitement fondée, en disant que ces établissements
(1) Recherches sur la propriété foncière et les noms des lieux habités^
p. 153. — Le Dictionnaire archéologique de la Gaule, époque celtique,
publié par la Commission de l'instruction en France, n'en est pas
encore à la lettre M.
(2) Voy. au surplus Marlot, Historia ecclesiœ remensis.
(3) Paui. Joanne, Dictionnaire géographique et administratif de la
France, t. IV, p. 2887.
( idS )
militaires étaient constamment fixés sur un terrain élevé,
près d'un tleuve ou d'une rivière. Mosomagus servant de
camp à Labiénus, remplissait parfaitement toutes les con-
ditions voulues et exigées par l'art militaire. C'était un
endroit élevé, fortifié par la nature et l'art, conformément
à la description qu'en donne César, et destiné à résister
aux attaques et aux invasions des Trévires et des Ger-
mains.
Nous ne doutons pas qu'après avoir établi d'une manière
si positive la position du camp de Labiénus, il sera pos-
sible d'indiquer l'emplacement des autres établissements
militaires des Romains, situés dans les environs et men-
tionnés par César. Le camp de Labiénus était, pour ainsi
dire, le centre de toutes les installations romaines des
environs, et par son importance, et par sa situation sous
le proconsulat de César et plus tard pendant le règne des
empereurs romains.
( \\9 )
CLASNr: DE<$ BEAUIL-ARTS.
Séance du 7 juillet '1898.
M. RoBiE, vice-directeur, occupe le fauteuil.
M. le chevalier Edmond March.^l, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. Éd. Fétis, Th. Radoux, J. Deman-
nez, P.-J. Clays, G. De Groot, Gust. Biot, H. Hymans,
Th. Vinçotte, Jos. Stallaert, Max. Rooses, G. Huberti,
A. Hennebicq, Éd. Van Even, Alfred Cluysenaar, le comte
Jacques de Lalaing, J. Winders, Ém. Janlet, H. Maquet,
J. Van Ysendyck, membres; J.-B. Meunier, Alb. De Vriendt,
Flor. van Duyse, G. Hermans et Emile Mathieu, corres-
pondants.
CORRESPONDANCE
La Classe apprend, sous l'impression d'un profond
sentiment de regret, la perte qu'elle vient de faire en la
personne de M. Joseph Jaquet, membre de la section de
sculpture, décédé à Schaerbeek le 9 juin dernier.
Elle vote des remerciements à M. Marchai, qui a bien
voulu prendre la parole au nom de l'Académie, lors des
funérailles, en remplacement de M. le directeur Tardieu,
absent du pays. Le discours de M. Marchai paraîtra au
Bulletin.
( 120 )
Une lettre de condoléance sera envoyée à M'"" veuve
Joseph Jaqiiet.
La Classe prend ensuite notification de la mort de Sir
Edward Burne-Jones, associé de la section de peinture
depuis le "janvier 1897, décédé à Londres le ITjuin 1898,
à l'âge de 65 ans.
— Hommage d'ouvrages :
M. P. Génard, correspondant de la Classe, fait hom-
mage d'une brochure intitulée : Mijne laatste nasporingen
over de geboorteplaats van QuirUen Massijs. — Remercie-
ments.
Discours prononcé le 13 juin 1898, au nom de la Classe
des beaux-arts, aux funérailles de Joseph Jaquel, par
le chev. Edm. Marchai, secrétaire perpétuel de l'Aca-
démie.
Messieurs,
C'est à un contemporain de Simonis, de Fraikin, des
frères Geefs que nous avons eu l'honneur de compter
dans nos rangs, ainsi que de tant d'autres sculpteurs
éminents qui ont leur place marquée par leurs œuvres
magistrales dans l'histoire du mouvement artistique de
la Belgique depuis 1830; c'est à un des membres les plus
vénérés de la Classe des beaux-arts que je viens adresse)'
le suprême hommage de l'Académie royale de Belgique,
en raison de la solidarité confraternelle qui existe entre
tous ceux qui composent le premier corps savant du pays.
D'après l'usage, il n'appartient qu'au directeur de la
( <-^« )
(-lasse — selon ses prérogatives — de parler en aussi
doiiloureiise circonstance. L'absence de M. Ch. Tardieu
empêche notre estimé confrère de remplir ce devoir.
Je suis d'autant plus heureux de pouvoir le remplacer que
cette occasion me permet de payer à la mémoire de
Joseph Jaquet la dette d'amitié que j'ai contractée envers
lui durant tant d'années d'affectueuses relations.
C'est donc au nom de la Classe des beaux-arts et en
même temps de l'Académie tout entière, que je viens
saluer une dernière fois la dépouille mortelle de l'un de
ses membres les plus aimés, au moment où a sonné
pour lui l'heure du repos éternel, après une longue et
laborieuse existence consacrée à la sculpture et à son
enseignement professoral.
Joseph Jaquet est né le 50 janvier 1822 à Anvers, qui
a donné le jour à tant d'illustrations artistiques qui en
font la gloire la plus pure et la plus radieuse. Le vieil et
excellent ami, dont le cœur vient de cesser de battre, me
racontait un jour comment s'était révélé en lui le goût
pour la sculpture.
Tout le monde connaît l'origine modeste des Geefs;
elle n'en rehausse que plus la célébrité qui entoure leur
nom. Cette origine, au surplus, a été le sort commun à
bien des hommes éminents qui ont honoré le pays. Le
Gouvernement venait d'adjoindre la sculpture à la peinture
pour constituer les grands concours, dits Prix de Rome,
créés en 1810 par le Roi Guillaume, lors de son installa-
tion sur le trône des Pays-Ras. Le premier concours pour
la sculpture fut ouvert en I85(> et ce fut Joseph Geefs qui
remporta le premier prix. A cette époque, le collège des
bourgmestre et échevins, accompagné des membres du
jury et du corps professoral de l'Académie d'Anvers, où
( \±^2 )
se jugeaient ces concours, ramenait chaque fois triom-
phalement le lauréat à son domicile : c'était le complé-
ment de l'honneur qui venait d'être décerné à celui-ci.
Le cortège, musique en tête, qui entourait le jeune
Geefs, devait passer devant la maison des parents de
Jaquet. La vue de cette manifestation émotionna telle-
ment le jeune Joseph que son père, qui comptait déjà
sur lui pour continuer un jour, en sa qualité d'aîné,
son laborieux métier, dut céder à ses instantes sollicita-
tions et lui accorda l'autorisation de suivre les cours de
cette Académie où son jeune concitoyen venait d'être si
brillamment couronné. La carrière de Jaquet venait de se
décider. Peu d'années après, il pouvait, lui aussi, apprécier
les charmes d'un triomphe par les récompenses que lui
valurent ses progrès et son assiduité aux cours de dessin,
de modelage et de composition. Et avec quelle légitime
fierté. Messieurs, dut-il se voir honoré, plus tard, en pleine
efflorescence de sa carrière, du titre de membre effectif
du corps académique de cette Académie d'Anvers, cette
distinction si recherchée qui ne s'accorde qu'à l'élite des
artistes! Quels durent être alors ses sentiments d'émotion
lorsque, recevant cette distinction, il se reportait à ses
années d'enfance, alors qu'il suivait comme élève les cours
de cette même institution !
Dès qu'il eut acquis les qualités qu'exige la maîtrise,
la grande loi des satisfactions matérielles de l'existence
absorba ses premières années.
Peu après i850, Guillaume Geefs, comme on le sait,
et qu'Anvers s'honore de compter comme son plus illustre
sculpteur des temps modernes, était venu habiter Bruxelles,
où il put bientôt donner le plus puissant essor à son
magistral talent, grâce à l'auguste protection de notre pre-
( 123 )
mier Souverain. Joseph Jaqiiet, comme son ancien pro-
fesseur, abandonna aussi Anvers pour se llxer à Bruxelles,
non sans conserver à l'égard de sa ville natale les senti-
ments de la plus filiale atfection.
Dès qu'il se fut assuré les moyens de subvenir à
l'existence, il entra dans la lutte des expositions.
C'est en 1845 qu'il obtint ses premiers succès au
Salon triennal de Bruxelles. Son œuvre principale était
modeste : une l'énus, mais il s'en dégageait déjà un cer-
tain charme dans le modelé qui attira l'attention du
public. Trois années après, il se présenta au même Salon
avec un groupe tout à la fois charmant et tragique qu'il
avait appelé : La première nuit cVexil d'Eve.
Déjà il avait la hantise de la sculpture monumentale,
et c'est en cette même année 1848 qu'il installait à Chi-
may sa statue du célèbre poète et chroniqueur Jehan
Froissart, que lui avait commandée le prince de Chimay
pour cette localité qui dispute à Valenciennes l'honneur
d'avoir donné le jour à cette grande figure de l'histoire
du XI V" siècle.
Le Salon de Bruxelles de 1851 vit apparaître, dans
son éclatante beauté, son groupe : L'Age d'or. Le succès
de Jaquet fut immense; l'œuvre était digne de louanges
et d'admiration. Le Gouvernement s'empressa de lui en
demander une réplique en marbre pour le Musée de
l'Etat, ce suprême honneur que le pays n'accorde qu'aux
artistes qui cherchent par leurs productions à soutenir la
réputation de la Belgique. Son Age d'or figure presque
vis-à-vis de l'admirable Amour captif de Fraikin, qui
date de cette époque.
C'est dans ce même Salon de 1851 que l'on put
admirer son groupe de L'Enlèvement des Sabines, qui lui
{ \U )
avait été inspiré par la célèbre œuvre de Jean Bologne,
à Florence , et qui fut acquis par le général baron
Goethals, lequel devint aussi le possesseur de son Pan-
dore et d'un Amour consolateur, dont iVI. Mosselman de
Franquen fit l'acquisition pour son hôtel de Bruxelles. A
ces gracieux sujets, marqués tout à la t'ois du talent si
élégant et si souple de formes que Jaquet savait donner
aux productions de son imagination, se rattachent encore
d'autres œuvres en marbre, grandeur nature ou demi-
nature : L'Hospitalité, acquise par M. le sénateur Barban-
son; Flore, à M. l'ingénieur Deridder; La Bienvenue, à
ce mécène dont le pays a déploré la mort : M. le comte
Amédée de Beauffort; ['ënus et l'Amour, à M. De Wit;
La Corbeille de Joces, acquis par M. Verheyden, à Paris,
et les trois sujets achetés par M. Petit : Le Dévouement,
Les Maraudeurs et Le Massacre des Innocents. Nous nous
bornerons à citer ces compositions dont la notoriété
restera.
La renommée suivit de près le succès. C'est alors que
les grandes maisons de Paris, Wegang, Vidos, Lerol
frères reproduisirent par le bronze plus de cinquante de
ses groupes, représentant, entre autres : Gain et Abel,
Scène du déluge. Le Dévouement, Éiisa, L'Amour désarmé,
Les Maraudeurs, etc. Jaquet exécuta en outre une quan-
tité considérable de statues et de groupes, dont un
certain nombre sont en Allemagne et en Amérique.
L'énumération des productions de cette infatigable
fécondité artistique serait de nature à faire douter de
leur authenticité si Joseph Jaquet n'avait eu pour les
réaliser le concours dévoué de son frère Jacques.
Son Froissart lui valut d'autres commandes de sculp-
ture monumentale. Depuis 1853, sa statue équestre de
( 125 )
rancieii gouverneur général des Pays-Bas, le prince
Charles-Alexandre de Lorraine, couronne majestueuse-
ment le faîte de la façade de la Maison des Brasseurs,
Grand'Place, à Bruxelles. Cette plate-forme aérienne
avait été établie pour une statue équestre que le sculp-
teur bruxellois Marc Devos exécuta à la demande de la
corporation des brasseurs; elle représentait l'électeur de
Bavière Maximilien-Emmanuel, gouverneur des Pays-Bas,
qui avait aidé si puissamment à relever les maisons
détruites par le bombardement de 1695. Enlevée par un
ouragan, on la remplaça par une autre statue en bronze,
laquelle fut à son tour remplacée, en 175:2, par une statue
également équestre, et en cuivre, dit-on, du prince
Cbarles de Lorraine, qui avait été ciselée par l'orfèvre
Simon. Les sans-culottes bruxellois renversèrent celle-ci
en 1794; elle disparut peu après l'entrée des Français
en juillet 1795, et prit alors le chemin de la fonderie de
canons de la Bépublique, à Douai. Ce genre de statue,
dans les airs, n'est pas sans offrir de grandes difticultés
au point de vue de la perspective. Jaquet s'en est tiré
très habilement, et sa statue fait bonne figure, à plus de
50 mètres de hauteur. Cheval et cavalier se profilent
dans les plus heureuses proportions.
Mons peut s'enorgueillir à juste titre de sa belle statue
équestre de Baudouin IX, comte de Flandre et de Hai-
naut, l'illustre chef de la quatrième croisade, qui occupa
le trône de Constantinople lors du partage entre les che-
valiers francs, en 1205, de l'empire grec des Comnène.
Une Benommée colossale en bronze, dont il avait
surmonté, en 1864, le Dôme du Palais de l'Industrie à
Amsterdam, lui valut de la part du Gouvernement hollan-
dais la commande de la partie sculpturale du monument
( 126)
national que celui-ci érigea en 4869, dansleWilhem Park,
i^ La Haye, pour consacrer le rétablissement de l'indépen-
dance des anciennes Provinces-Unies, en 1815, et le
retour dans sa patrie de Guillaume-Frédéric, qui devait
devenir roi des Pays-Bas sous le nom de Guillaume I^''.
Jaquet surmonta ce monument d'une Batavia tenant
de la main gauche le drapeau national et de la main
droite un faisceau de flèches. Derrière se trouve le lion
néerlandais; du côté du monument qui est tourné vers la
ville, se voit le prince Guillaume-Frédéric prêtant ser-
ment à la loi fondamentale. Sur le revers sont : Gysbert-
Karel van Hogendorp, Fr.-Adr. van den Duyn et le
comte L. de Limburg-Stirum, les chefs du mouvement
national de novembre 1815. Sur les deux petites faces sont
les figures allégoriques de la Liberté et de la Loi, sous
lesquelles se trouvent des bas-reliefs représentant le
soulèvement du peuple et l'arrivée du prince appelé à
gouverner le pays.
Cette décoration colossale, en bronze, valut à Jaquet la
croix d'Officier de l'Ordre de la Couronne de chêne, que
nos voisins du nord n'accordent généralement qu'aux
artistes. C'est à la même époque que le Gouvernement
belge réleva à la dignité d'Officier de l'Ordre de Léopold.
C'est par son vaste bas-relief du fronton de la façade
principale de la Bourse de Bruxelles et par les deux lions
surmontant les murs de soutènement du grand escalier,
sculptés en 1872, ainsi que par sa belle statue de Marie-
Louise, première reine des Belges, placée à Philippeville
en 1879, que Jaquet a clos la part qu'il a eue dans la
statuaire monumentale.
Jaquet ne connut jamais réellement le repos. Malgré
cette prodigieuse production d'œuvres, il sut remplir les
( i'^^ )
fonctions de professeur de sculpture à l'Académie de
Bruxelles, où l'avait appelé son vieil ami Simonis, avec
qui il partagea le rude sacerdoce d'initier les jeunes
élèves à l'art qui avait fait leur réputation à tous les deux.
Il se dévoua complètement à cette tâche, qui comporte
des aptitudes toutes particulières.
La place de Jaquel était déjà marquée depuis long-
temps dans l'Académie royale de Belgique. Aussi, lorsque
la mort enleva son collègue Simonis, le remplaça-t-il
comme membre titulaire de la Classe des beaux-arts.
Ainsi que vous venez de l'entendre, Messieurs, la part
de Joseph Jaquet a été aussi considérable dans le mouve-
ment de la sculpture belge depuis 1850, que celle de
Simonis, de Guillaume Geefs et de Fraikin. Il est de ceux
de qui l'on peut hardiment dire qu'ils ont puissamment
contribué à soutenir la vieille réputation artistique de
la Belgique.
L'art marche par périodes. Chacune de ces périodes est
caractérisée par un style qui en porte le nom. Les artistes
ne sauront jamais méconnaître en leurs prédécesseurs
tout ce que ceux-ci ont fait pour maintenir le sentiment
du beau qui est la véritable expression du vrai. Jaquet
aura été le dernier représentant de cette école roman-
tique, née vers 1850, lors de cette éclosion des libertés de
la pensée et qui a eu son époque de célébrité. L'abandon
des vieilles routines de l'école classique, l'abus du sym-
bolisme ont établi une démarcation profonde entre la
sculpture d'hier et celle d'aujourd'hui. A un réalisme
outré a déjà succédé la recherche du sentiment plus vrai
de la nature étudiée uniquement en elle-même et par elle-
même. Le conventionnel n'existe plus, et c'est la nature
qui préside, toujours la nature, non dans ses aberrations
( 128 )
et ses erreurs que d'aucuns veulent ériger en principe de
l'art. Ce n'est plus dans les froides et correctes académies,
comme on les appelait jadis, et qui n'étaient que le fruit
de combinaisons enfantées seulement dans les ateliers,
que l'art réside encore ; c'est la nature dans tout ce qu'elle
a de beau et de vrai qui est devenue le guide des jeunes
générations d'artistes. Mais cela n'empêche que pour
ceux-ci comme pour leurs anciens maîtres, lorsque l'heure
du jugement de leurs œuvres sera aussi inéluctablement
arrivée, ils se rappelleront que ces devanciers ont été
pour quelque chose dans la marche ininterrompue du
progrès.
Cher Jaquet, par un pieux sentiment familial, on t'a
entouré en ce moment suprême des reproductions de tes
compositions préférées. Mourir dans ces conditions, c'est
disparaître dans une apothéose composée de tout ce que
tu avais produit pour rappeler de grandes gloires de la
patrie ou pour charmer l'imagination par les plus gra-
cieux symboles. Toutes ces compositions si nobles et si
éloquentes auxquelles tu as consacré ton talent, consti-
tuent ton glorieux cortège dans cette route qui mène vers
l'éternité.
Les paroles d'adieu que je t'adresse, cher et vieil ami,
reportent mes souvenirs à mon enfance, à cette époque où
tu m'accueillais la main ouverte et le sourire de la bien-
veillance sur les lèvres lors de mes visites dans ton atelier.
Tel tu étais alors, tel tu as toujours été pour les tiens,
pour tes amis, pour tes collègues et confrères, i)Our tes
élèves qui te chérissaient et qui vénéreront ton nom, pour
tous ceux, enfin, qui ont eu le bonheur de te connaître
et d'apprécier ton cœur loyal et généreux. Que ton âme
repose en paix, ton souvenir restera parmi nous comme
ta vivante image !
( 129 )
Adieu, Jaquet, tu ne laisses après toi qu'un arrière-petit -
fils qui faisait toute ta joie. Lorsque pour lui sera arrivé
l'âge de la raison, ta femme bien-aimée, ta fille chérie,
à la douleur de qui nous nous associons, lui rappelleront
que, seul, le travail ennoblit. Nous lui souhaitons,
pour égide de sa destinée, ta si belle et honorable
existence.
NOTE BIBLIOGRAPHIQUE.
Alb. .Iacquot, Les Michel, les Adam et Clodion.
Paris, 1898, 1 broch. in-8°.
Après les consciencieuses monographies de MM. Thi-
rion et J.-J. Guitfrey, il eût été ditïicile que M. Alb.
Jacquot trouvât sur les Adam, les Michel, particulière-
ment sur Claude Michel ou Clodion, le plus illustre
membre de la famille, des choses neuves d'importance
bien grande, à nous apprendre.
Pourtant, au cours de ses investigations, il est arrivé
à exhumer maint détail curieux, surtout en ce qui touche
les travaux de Clodion.
L'artiste d'ordre vraiment supérieur, en qui s'incarne
le plus parfaitement la statuaire française sous Louis XV,
vécut assez pour voir non seulement la chute de la
monarchie, mais presque celle de l'Empire, après avoir
collaboré à la décoration de la colonne Vendôme et de
l'Arc du Carrousel. M. Jacquot a recherché les traces de
Clodion à Nancy et dans les environs et, outre des pro-
ductions de jeunesse, en signale d'aiîtres de son âge mùr,
créées durant l'époque où il chercha, dans sa ville natale,
un refuge contre la tourmente révolutionnaire.
5""' SÉRIE, TOME XXXVl. 9
( 130)
Parmi les contrats retrouvés et qu'il nous donne, il eu
est de fort dignes d'être connus : ceux, par exemple,
relatifs aux mausolées de la comtesse d'Orsay et de la
baronne Demidofl', et spécialement celui passé en 1805
avec le vicomte Joseph Jablonowski pour l'érection, en
Pologne, d'un monument à Copernic.
Ce monument lut-il jamais exécuté? C'est douteux,
attendu que ceux que l'on érigea à Tliorn, lieu natal de
l'immortel savant, comme à Cracovie, n'émanent ni l'un
ni l'autre du ciseau de Clodion. Il n'est dès lors pas
inutile de donner ici un extrait du contrat de 1805, con-
tenant une description très pittoresque du projet.
« Ivopernik doit avoir l'air et le maintien noble et
une phisionomie fière, préocupée de quelque objet pro-
fond ; l'altitude d'un homme qui met le pied droit en
avant comme pour monter sur le demi-globe posé sur im
piédestale quarré, l'autre pied est presque en l'air mais
desiné noblement. Il doit être costumé selon son [)or-
trait en estampe que M. le professeur Delalande m'a promis
de donner, mais si ce costume n'est pas assez noble, il
faut lui donner le manteau fourré de Docteur de l'Uni-
versité puisqu'il a professé l'Astronomie à Padoue. Il
faut prendre des renseignements très exactes sur cela
pour ne pas faire des anacronisme. Il faudrait voir si la
fourrure polonaise à manche très étoffée et doublée d'une
pelisse épaisse partout et aux bords des manches ne
ferait pas bon effet, mais c'est alors quand on ne peut
pas le costumer en manteau long académique. Kopernic
doit tenir sa main droite en avant, un peu en attitude
héroïque, devançante le globe un peu penchée surtout
les deux doigts comme s'il ordonnait le mouvement de la
terre. De la main gauche il doit retirer en arrière le
( ^3^ )
voile ou la drapperie qui couvre le trophée des différents
instruments astronomiques.
» Du côté droit de Kopernic un peu plus en avant doit
être placé le Préjugé dont l'altitude demande beaucoup
des soins. Le Préjugé sera représenté sous la forme d'un
vieillard, nerveux, musculeux, presque décharné, large
d'épaules et de corps, nu mais placé décemment, ses
cheveux et sa barbe d'un grand abandon. 11 doit être
accroupi, comme s'il prenait racine mais ayant l'air
d'être forcé par le système de Kopernic de s'élever. La
partie inférieure de son corps doit encore être presque
accroupi, mais son indignation fait faire un mouvement
à la partie inférieure de son corps qui le fait tourner un
peu du côté opposé à la statue et un peu avancer en avant
dépassant un peu la statue de Kopernic, ses mains levées
inégalement une presque vis-à-vis sa tête un peu éloignée
l'autre plus haut que sa tête tenant un livre ouvert à la
main avec le passage de la Bible où Josué s'écrie Sta sol,
et la tournant du côté du soleil comme s'il protestait. Il
y a je crois une statue du groupe de Niobé qui donne à
peu près l'idée de l'attitude. Mais elle doit être plus
horrible qu'élégante. L'austre annonçait l'étonnement et
la crainte; celle-ci doit annoncer l'indignation et l'entê-
tement. Je ne sais s'il ne serait pas plus beau de ne pas
mettre aucune drapperie sur le corps du préjugé. Mais si
on ne peut pas la placer de manière à cacher sa nudité
indécente, il faut lui jeter sur l'épaule un peu de drape-
rie comme un manteau lyrique autant qu'il faut pour
qu'il tombe sans affectation sur ses nudités.
)) Le globe sous les pieds de Kopernic doit être des-
siné en carte géographique un peu en bas relief. La
( 432 )
Pologne pays natale de ce grand homme doit être au
milieu dans la situation remarquable... »
On voit que l'appel fait au talent du statuaire ne lui
imposait pas un bien puissant effort d'imagination.
D'autres contrats lui laissent à peine plus d'initiative,
chose à constater et qui, en présence d'exemples simi-
laires, nullement rares dans l'histoire de la sculpture,
nous force à admettre que quantité d'ensembles fameux,
avant de se produire sous leur forme finale, ont dû être
l'objet de longues et savantes combinaisons moins de la
part de ceux qui les créaient, que de ceux qui en faisaient
la commande.
Cela choque un peu les idées reçues, mais c'est encore
l'unique moyen d'expliquer les ensembles allégoriques
vastes et compliqués, dont la société française fit ses
délices au XVIII" siècle.
Henri Hymans.
RAPPORTS.
MM. Huberti, Mathieu, van Duyse et Benoit donnent
lecture de leurs appréciations sur une composition musi-
cale portant pour titre : Trois poèmes, soumise à l'Acadé-
mie par M. Martin Lunssens, à litre d'envoi réglementaire
comme premier prix du grand concours de composition
musicale de 1893. — Renvoi à M. le Ministre de l'Agri-
culture et des Travaux publics.
( 133 )
OUVRAGES PRESENTES.
Brialmunl [A.]. Progrès de la défense des États et de la
fortification permanente, depuis Vauban. Bruxelles, 1898;
vol. gr. in-8° avec atlas oblong. (xi-369 p. et 43 plan-
ches).
Génard {P.). Mijne laatste nasporingen over de geboorte-
plaats van Quinten Massys. Anvers, 1898; in-8" (22 p.).
Pasquier [Ernest). Cours de mécanique analytique,
tome I^"" : Vecteurs — Cinématique — Statique et Dyna-
mique du point. Louvain, 1897; in-4'' (336 p.).
Verwey {Isaac). Een noord-nederlander over zijn omreisje
door België in 1823. (Introduction par Paul Fredericq.)
S. 1. n. d.;in-8M29p.).
Guilliaume (Jules). Le vers français et les prosodies
modernes. Bruxelles-Paris, 1898; in-8° (226 p.).
Devillers [Léopold). Chartes du comté de Hainaut de
l'an 1200. Reproduction des originaux avec introduction,
traduction et notes. Mons, 1898; in-folio (19 p.).
De WUdeman [E.). Prodrome de la flore belge. Thallo-
phytes, fasc. I-III. Bruxelles, 1897-98; in-8" (543 p.).
Deniijts (François). Note sur les groupes neutres à élé-
ments multiples associés, des involutions unicursales.
Bruxelles, 1898; extr. in-8° (11 p.).
— Note sur la configuration formée par les quadrisé-
cantes des courbes gauches rationnelles du 6'"" ordre.
Bruxelles, 1898; extr. in-8« (20 p.).
— Note sur les sécantes multiples des courbes gauches
rationnelles. Bruxelles, 1898; extr. in-8<' (8 p.).
( iU )
Toussaint {le chan.). Poésies chrétiennes, 3'n« pai'tie.
Namur, 1898; in-8° (30 p.).
Chauvin ( Victor). Bibliographie des ouvrages arabes ou
relatifs aux Arabes, III. Liège, 1898; in-8''.
Mercier (D.). La définition philosophique de la vie,
2"'« édition. Louvain, 1898; in-S" (74 p.).
— Les origines de la psychologie contemporaine.
Louvain, 1897; in-18 (xii-476 p.).
Mathy (£.). Rotation d'un corps solide autour d'un point
fixe. Cas où il n'y a pas de forces motrices ou qu'elles se
font équilibre autour du point fixe. Gand , 1898; in-8"
(18 p.).
— De l'ellipsoïde considéré comme figure d'équilibre
relatif d'une masse fluide homogène. Paris, 1898; extr.
in-4o (7 p.).
— Expression des composantes de l'attraction d'un ellip-
soïde homogène sur un point extérieur, au moyen des fonc-
tions 0 et ^. Paris, 1898; extr. in-4o (12 p.).
Exposition internationale de Bimxelles :
Congrès international colonial. Compte rendu, 1897.
Grand in-8'' (461 p.).
Ligue belge du droit des femmes. Actes du Congrès fémi-
niste international de Bruxelles ; publiés par les soins de
M"* Marie Popelin. Bruxelles, 1898; in-8o (vi-loO p.).
Bruxelles. Société d'anthropologie. Bulletin, tome XIV,
1895-1896.
Gand. Vlaamsche Académie voor taalkunde. Vak- en kunst-
woorden, n"" 3, ambacht van den timmerman (J. en V. Van
Keirsbiick). 1898.
— Willemsfonds. Uitgave n"" 144 : De openbare en de
bijzondere weldadigheid. Hare hervorming. Naar het
fransch van K. H. De Quéker. 1897.
LiÉiîE. Société d'art et d'archéologie. Bulletin, tome XI.
1897.
( <35 )
LouvAiN. La Cellule, recueil de cytolojjie, tome XiV, l*"" fas-
cicule. ln-4".
Allemagne et Autriche-Hongrie.
Brunn. Naturforscheude Gesellschafï. Verhandlungen ,
Band XXXV, 1896 — XV. Bericin der meteorologischen
Commission, 1895.
Erlangen. Pfiysikaliscli-medidnisclie Societdt. Sitzungs-
berichte, :29. Heft, 1897.
Munster, Vereinfur Kunst. 25. Jahresberichl, 1896-1897.
Berlin. A'. Akademie der Wissenschafïen. Abhandlungen,
1897. ln-4°.
Hambourg. Handelsstalische Bureau. Uebersicliteii des
Handels im Jahre 1897. 111-4°.
Stuttgart. Vei^ein fur Naturkunde. Jahreshefle, 54. Jahr-
gang, 1898.
France.
Aadaillac [le m" de). Les agglomérations urbaines.
Paris, 1898 ; extr. in-8° (32 p.).
Gréhanl (A.). Recherches sur les limites de l'absorption
de l'oxyde de carbone par le sang d'un mammifère vivant.
Paris, 1898; extr. in-8° (7 p.j.
— L'oxyde de carbone, le grisou et le grisoumèlre.
Paris, 1898 ; extr. in-4<' (18 p. , fig.).
Dufet{II.). Recueil de données numériques publié par la
Société française de physique. Optique. Premier fascicule ;
Longueurs d'onde. Indice des gaz etdes^liquides, Paris, 1898;
vol. in-8° (415 p.).
( 436 )
Liste des ouvrages déposés dans la bibliothèque de l'Académie
par la Commission royale d'histoire.
Bruxelles. Société d'archéologie. Annales, XII, 2.
Gand. Société d'histoire et d'archéologie. Annales, III, n" i.
— Messager des sciences, 1896, 3.
Malines. ^2^ Congrès historique et archéologique, vol. !«■■.
Paris. Ministère de l'instruction publique. Lettres de Cathe-
rine de Médicis, t. VI. 1897; in-4«.
Bibliothèque des Écoles d'Athènes et de Home, fascicule 70,
2« partie.
Polijbiblion. Avril de 1898.
Saint-Omer. Société des Antiquaires de la Morinie, t. XXIV.
Bulletin historique, 183^ livraison.
Rome. R. Accademia dei Lincei. Atti scienze niorali, stori-
che e filologiche, vol. Vi. 1898; gennaio e febbraio.
BULLETIN
DE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
DES
Lettres et des Beaux-Arts de Belgique.
1898. — i\" 8.
CLASSE DKS SCIENCES.
Séance du 6 août 1898.
M. Éd. Dupont, directeur.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. W. Spr'ing, vice-directeur ; le baron
Edm. de Selys Longchanips, Gluge, G. Dewalque, C.
Malaise, F. Folie, F. Plateau, Fr. Crépin, J. De Tilly,
Ch. Van Bambeke, Alfr. Gilkinet, G. Van der Mensbrug-
ghe, L. Henry, M. Mourlon, P. Mansion, P. De Heen,
C. Le Paige, F. Terby, J, Deruyts, Léon Fredericq,
J.-B. Masius, J. Neuberg, membres; Cli. de la Vallée
Poussin, associé, et A. Jorissen, correspondant.
M. Lagrange écrit pour motiver son absence.
-^"'^ SÉRIE, TOME XXXVI. 10
( ir>8 )
CORRESPONDANCE.
M. le Secrétaire perpétuel fait savoir que le Bureau de
la Classe (composé de MM. Dupont, Spriiig et lui) s'est
lendu à Malines le 24 juillet dernier, pour représenter
ofificiellement l'Académie à l'inauguration de la statue de
Pierre-J. Van Beneden. A la délégation s'étaient joints
MM. le baron de Selys Longchamps, Brialniont, Ch. Van
Bambeke, M. Mourlon, J. Deruyts, Léon Fredericq,
J.-B. Masius, L. Errera, J. Fraiponl et P. Francotte, de la
Classe des sciences, G. Biot et J. Winders, de la Classe
des beaux-arts.
Assistaient aussi à la solennité, mais comme faisant
partie de la délégation de l'Université de Louvain :
xMM. Cb. de la Vallée Poussin, associé de la Classe des
sciences, et le cbevalier Ed. Descamps, membre de la
Classe des lettres.
M. le Secrétaire perpétuel propose de voter des remer-
ciements à M. Dupont, qui a pris la parole au nom de
l'Académie. {Applaudissements.)
M. le Secrétaire perpétuel donne ensuite lecture d'une
lettre de M. Edouard Van Beneden, remerciant l'Acadé-
mie, tant en son nom qu'au nom de sa famille, pour le
nouvel hommage rendu à la mémoire de son vénéré père.
« Mes remerciements, ajoute M. Van Beneden, s'adres-
sent également à ceux de mes confrères qui ont bien
voulu se joindre au Bureau, et à M. Dupont pour la rare
distinction avec laquelle il s'est acquitté de la mission
dont il avait bien voulu se charger. »
( 159 )
— M. le Ministre de l'Intérieur et de l'Instruction
publique demande l'avis de l'Académie — en vue de
répondre à l'invitation du Gouvernement français de faire
représenter la Belgique au Congrès de Paris, en 4900 —
sur le rapport de M. Poincarré « Sur les résolutions de
la Commission chargée de l'étude des projets de décima-
lisation du temps et de la circonférence ».
Renvoi à MM. Folie, Lagrange et Le Paige.
— L'Académie royale des sciences, la Faculté de méde-
cine (Karolinska Instituet), l'Académie d'agriculture et la
Société des médecins de Suède, à Stockholm, invitent
l'Académie à se faire représenter à la célébration du cin-
quantième anniversaire de la mort de Berzelius, qui aura
lieu à Stockholm, le 7 octobre 1898.
L'Académie s'associera, par une adresse, à cette
manifestation.
— M. le Ministre de l'Intérieur et de l'Instruction
publique envoie, pour la bibliothèque de l'Académie, le
premier fascicule du tome XIV du recueil de cytologie :
La Cellule. — Remerciements.
— Hommages d'ouvrages :
Crisfalloïdes dans l'ooajte de Pholcus phalangioides
FuessL, par Ch. Van Bambeke;
Recherches expérimentales sur la formation du son dans
(es instruments à bouche de flûte; par le père Ch. Lootens,
S. J. (présenté par M. Yan der Mensbrugghe, avec une
note qui ligure ci-après) ;
['eber die Entmcklumj der Graaf^chen Follikel; par
Albert von Kolliker, associé.
— Remei'ciements.
( 140 )
— Travaux manuscrits renvoyés à l'examen :
i° Becherches expérimentales sur la circulation du sang
chez l'Anodonte (3 planches); par MM. Victor Willem et
Achille Minne, de l'Université de Gand. — Commissaires :
MM. L. Fredericq et F. Plateau;
2° Les tremblements de terre et les marées; par Victor de
Ziegler. — Commissaires : MM. Folie et Van der Mens-
hrugghe ;
3° Sur le symbole de la vie et de la création; par M. Basile
BoukteiefF. — Commissaires : MM. Masius et Vanlair;
4° Sur les dérivés du bromo-nitro-^néthane H|2C-Br(J\02) ;
par M. J. Maas, docteur en sciences à Louvain. — Com-
missaires : MM. Henry et Spring.
NOTE BIBLIOGRAPHIQUE.
J'ai l'honneur de présenter en hommage à l'Académie,
au nom du père Ch. Lootens, S. J., un exemplaire de ses
Recherches expérimentales sur la formation du son dans les
tuyaux à bouche de flûte.
Les premiers résultats de ces recherches ont été signa-
lés dès 1877 dans le Journal de Physique et avaient attiré
l'attention des physiciens, notamment de Jamin. L'auteur
espère, et je pense comme lui, que ces faits, décrits
maintenant d'une manière plus complète et plus origi-
nale, serviront à élucider une série de points plus ou
moins controversés en acoustique.
G. Van der Mensbrugghe.
( Hl )
CONCOURS DE LA CLASSE POUR 1898.
SCIENCES MATHEMy^TIQtJES ET I>HVSI9IJES.
Trois mémoires ont été reçus en réponse à la troisième
question :
Apporter une contribution importante à l'étude des corres-
pondances (Verwandtschaften) que l'on peut établir entre
deux espaces.
Devise du n° 1 : Geometry is hard (J.-H.-S. Smith);
Devise du n" 2 : Numeri regunt locum ;
Devise du n° 5 : Itinera ad veruui.
Commissaires : MM. .Neuberg, Le Paige et De Tilly.
SCIENCES Ni%TIJREI>L,ES.
Un mémoire a été reçu en réponse à la première ques-
tion :
On demande de nouvelles recherches... sur la digestion
chez les plantes carnivores.
Devise : L'activité des plantes carnivores est, en dernière
analyse, une question d'azote.
Commissaires : MM. Errera, Gilkinet et Crépin,
( 142 ;
— Un mémoire a été reçu en réponse à la deuxième
question :
On demande des recherches physiologiques nouvelles sur
une fonction encore mal connue chez un animal invertébré.
Devise : La physiologie des invertébrés est presque tout
entière à l'état de desideratum (Ch, Morren).
Commissaires : MM. Plateau, Van Beneden et Van
Barabeke.
RAPPORTS.
La Classe décide le dépôt aux archives des notes :
1" De M. G. Kayser Sur la physique du globe et la
météorologie, renvoyée à l'examen de MM. Terby et
Lancaster;
2" De M. B.-G. Jenkins : .4 method for determining
astronomically the variations in the température and présure
of the atmosphère, renvoyée à l'examen de MM. Lancaster,
Lagrange et Terby.
Cette note, fait remarquer M. Lancaster, n'est que la
reproduction, à part quelques légères modifications, d'une
brochure du même auteur, publiée en 1894 sous le titre :
Tellustria, etc.
( 143 )
Becherches morphologiques et phylogénétiques
sur les Mollusques archaïques; par Paul Pelseneer.
Happot't de M. Éil. t'ui% iteneden, pr-etniet' cotnntisaait'e.
« J'ai été chargé par la Classe de lui faire rapport
sur un mémoire de M. Paul Pelseneer, professeur à
l'École normale de Gand. Ce mémoire a pour titre :
Recherches morphologiques et phylogénétiques sur les Mol-
lusques archaïques.
Mon rapport ne sera pas une analyse du travail soumis
à mon appréciation. Je veux me borner à en indiquer
l'objet et à justifier la proposition que j'aurai l'honneur
de faire à l'Académie, d'ordonner l'impression de l'œuvre
de M. Pelseneer dans les Mémoires in-4''.
Depuis environ treize ans, M. Paul Pelseneer se con-
sacre à l'étude de l'organisation des différents groupes
dont se compose le grand embranchement des Mollusques.
Il a publié, dans une série de travaux successifs, les résul-
tats de ses recherches anatomiques. Ces travaux, dont la
haute valeur est reconnue par les zoologistes les plus
compétents, ont fait de M. Pelseneer l'une des pre-
mières autorités de notre époque, en matière de mala-
cologie. S'il fallait citer des preuves à l'appui de cette
appréciation, je rappellerais que c'est à M. Pelseneer
qu'a été confiée l'étude des Ptéropodes du Challetiger ;
c'est lui que Huxley a choisi comme collaborateur
pour l'étude et la publication de l'anatomie des Spirules.
J'ajouterais que Garstrang, dans son récent article sur
C \U )
la morphologie des Mollusques, s'exprime comme suit :
a Nous doutons qu'aucun groupe aussi étendu du règne
» animal, à l'exception peut-être des Échinodermes, ait
» été l'objet de recherches aussi productives que celui
» des Mollusques, durant la période qui s'est écoulée
)) depuis la publication, en 1883, des Mollusca de Ray
)) Lankester; et certainement la méthode phylogéné-
» tique n'a pas réalisé de plus grands triomphes que
» dans les mains de Bouvier, de Haller, de Pelseneer et
» d'autres savants, qui ont étudié les Gastéropodes et les
» Lamellibranches. »
Le nouveau mémoire que M. Pelseneer vient d'adres-
ser à l'Académie est la suite et l'on pourrait dire une
sorte de synthèse de ses publications antérieures.
Après que les formes les plus primitives des différents
groupes de l'embranchement ont été successivement
reconnues, il fallait se livrer à une étude comparative
de ces formes, dans le but de rechercher leurs relations
mutuelles et de déterminer les affinités et l'origine de
l'embranchement auquel elles se rattachent.
Ce sont les bases et les conclusions de cette étude que
M. Pelseneer fournit dans le mémoire qu'il nous soumet.
Celui-ci comprend une partie analytique, dans laquelle les
faits d'observation se trouvent décrits, et une partie syn-
thétique, dans laquelle ils sont discutés en eux-mêmes et
dans les conclusions qu'ils comportent.
Un atlas de planches admirablement dessinées à la
plume accompagne le texte.
Je ne possède pas, dans la connaissance des Mollusques,
une compétence suffisante pour me permettre de discuter
l'œuvre d'un savant qui est, en cette matière, une auto-
rité incontestée.
I
( 445 )
Mais je n'hésite pas à aftirmer (jiie la publication du
mémoire de M. Pelseneer, dans l'un de nos recueils, fera
honneur à l'Académie et au pays. Celui qui me parait
seul convenir, en raison du format des planches, c'est le
recueil des Mémoires in-4° des savants étrangers.
Je propose donc à la Classe de décider cette impres-
sion, d'ordonner la reproduction par la phototypie des
planches qui accompagnent le manuscrit, et d'adresser à
l'auteur les remerciements et les félicitations de l'Aca-
démie. »
La Classe a adopté ces conclusions, auxquelles se sont
ralliés entièrement MM. Plateau et Van Bambeke.
Sur l'action catalyiique de la mousse de platine
et de palladium; par A. de Hemptinne.
Happoi't tte n. %V, Xpt'itty, ftt-etnief cuinÊtêiiutnSff.
« M. de Hemptinne a essayé de résoudre la (piestion
de savoir si l'action catalytique de la mousse de platine
est d'ordre physique ou d'ordre chimique. A cette fin, il
fait remarquer que cette action catalytique doit s'éteindre
par un abaissement de la température si elle est un acte
chimique, les corps ne se combinant plus sitôt que le
froid est devenu assez intense. Au contraire, cette action
doit s'accentuer dans les mêmes conditions si elle est
d'ordre physique, puisque la condensation est, en général,
facilitée par le froid.
( 146 )
Les résultats obtenus sont plus compliqués qu'on ne
pouvait le prévoir; ils sont donc d'autant plus intéressants.
En comparant l'action de la mousse de platine avec celle
du carbone en poudre et de la mousse de palladium,
l'auteur a constaté que le carbone condense plus d'hydro-
gène à — 78° qu'à -f- 15% tandis que la mousse de platine
en absorbe moins à froid. La mousse de palladium se
comporte autrement que le platine. En opérant avec
l'oxyde de carbone au lieu de l'hydrogène, il a été
constaté que la mousse de platine absorbe plus de gaz à
— 78° que d'hydrogène et que la mousse de palladium se
modifie au contact de l'oxyde de carboné au point
d'acquérir vers 20° un pouvoir absorbant extraordinaire.
J'ai l'honneur de proposer l'insertion de la note de
M. de Hemptinne dans le Bulletin de la séance. »
La Classe a adopté ces conclusions, auxquelles M. De
Heen a adhéré.
Sur les salicylates doubles de métal et d'antipyrine
{troisième communication); par M.-C. Schuyten.
itnpito>'t fltf MM, M, Jot'ivaen, ftfetnifff co»ntnis»ait'e.
« M. Schuyten termine, dans cette note, l'exposé de ses
recherches sur les salipyrines obtenues par la méthode
décrite dans une communication précédente.
Comme d'autres salicylates déjà mentionnés, ceux de
magnésium, de manganosum et de plomb donneraient
avec l'antipyrine des combinaisons additionnelles, tandis
( ^i^ )
qu'il serait impossible de réaliser, dans les mêmes condi-
tions, la formation de salicylates doubles d'aluminium, de
chrome, d'uranyle et d'antipyrine.
L'auteur ne se prononce pas encore pour ce qui con-
cerne le composé de bismuth, lequel, préparé suivant un
procédé spécial, constituerait un corps cristallin qu'il
considère comme une combinaison très importante et
dont il se propose de faire l'étude complète dans un ave-
nir plus ou moins rapproché.
M. Schuyten attire l'attention sur l'instabilité des com-
binaisons qui ont fait l'objet de ses recherches et dont
l'eau notamment provoquerait aisément la dissociation,
A propos de cette observation, on peut regretter que l'au-
teur n'ait pas cru devoir exposer les résultats de ses expé-
riences sur les salipyrines dans un travail d'ensemble, au
lieu de les publier dans une série de notes dont les pre-
mières ne pouvaient comporter des indications d'ordre
général .
Comme il manifeste l'intention de poursuivre ses
recherches sur les composés correspondants de l'acide
benzoïque, je crois pouvoir lui conseiller de résumer les
principales observations qu'il recueillera, dans un seul
mémoire, dont la lecture sera plus intéressante que celle
d'une série de descriptions se succédant à des intervalles
assez longs.
J'ai l'honneur de proposer l'impression de la note de
M. Schuyten dans le Bulletin des séances. »
La Classe a adopté ces conclusions, auxquelles s'est rallié
M. W. Spring.
( 148 )
I. Note sur la détermination des éléments neutres d'espèces
quelconques; ÏI. Note sur quelques propriétés des courbes
gauches; par F. Deriiyts.
Ittippot't il» JtW. léB Paifff, pt'einift' romtnia.sniff.
« Les deux notes présentées par notre jeune collègue
de l'Université de Liège me semblent offrir un grand
intérêt.
La question de la détermination des éléments neutres
des involutions est entourée de difficultés. M. Deruyts les
a heureusement surmontées.
La seconde note comprend des applications, jusqu'ici
fort rares, des involutions de rang quelconque aux êtres
géométriques de notre espace.
Je citerai notamment le théorème :
Par q — k points de l'espace, on peut mener
2 „,_,^ „(___)(-_
courbes gauches du quatrième ordre ayant un contact
d'ordre (k — p -^- 1) «^^c une courbe gauche donnée d'ordre
n et rencontrant cette courbe en âp — o points.
Je propose bien volontiers l'insertion de ces deux
notes au Bulletin de la séance. »
La Classe a adopté ces conclusions, auxquelles s'est
rallié M. Neuberg.
( 149 )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Sur divers composés nitrés aliphatiques à fonctions multiples;
par Louis Henry, membre de l'Académie.
NOTICE PRÉLIMINAIRE.
Mes études sur la solidarité fonctionnelle et la volatilité
dans le groupe du carbone m'ont fait désirer connaître
des composés carbonés renfermant, dans leur molécule,
en même temps que le groupement - C - NO2, les groupe-
ments > CO (aldéhyde ou acétone) ou -CN (nitrile).
J'ai confié à deux de mes élèves la tâche aussi intéres-
sante qu'instructive d'appeler à l'existence des composés
de cette sorte.
En attendant que leurs recherches sur cet objet soient
terminées, je crois utile de faire connaître, dès à présent,
les composés dignes de remarque qu'ils ont réussi à
produire.
§ I. — Sur la nitro- acétone
CHs-CO-CH^NOj).
V acétone mononitrée a été obtenue par M. 0. De
Battice en oxydant Valcool nitro-isopropylique {*) CH5 -
CH(OH) - CH2(N02) par le mélange chromique : bichro-
mate potassique et acide sulfurique étendu.
(') Louis Henry, Bull, de l'Acad. roy. de Belgique, 3« sér., t. XXIX,
p. 834 (année 1895).
( ISO)
Comme beaucoup d'autres réactions de cette sorte, si
cette opération est aisée, elle n'est guère avantageuse
quant à son rendement.
On pouvait croire que l'on serait parvenu à former ce
composé dans de meilleures conditions en faisant réagir
les dérivés monolialoïdes de l'acétone, et notamment
Vacétone iodée CH5 - CO - CH2Ï, sur le nitrite d'argent
AgNO^. Il n'en a pas été ainsi.
La nitro-acétone CH5 - CO - CH2(N02) constitue un
liquide incolore, mobile, d'une odeur très piquante, pro-
voquant le larmoiement, d'une saveur brûlante, avec un
arrière-goût nauséabond, très persistant.
Elle est fort peu soluble dans l'eau, mais soluble dans
l'éther et l'alcool.
Sa densité à 14° est égale à 1.070.
Elle bout, sans décomposition, à 132°, sous la pression
de 767 millimètres, toute la colonne mercurielle dans la
vapeur.
Après quelques instants de contact avec l'eau, elle
présente d'une manière prononcée le caractère acide; elle
rougit le papier bleu de tournesol et expulse le gaz CO^
des carbonates alcalins.
Elle ne réagit pas avec le chlorure d'acétyle.
Son insolubilité dans l'eau, son odeur, sa volatilité,
l'inertie du chlorure d'acétyle la distinguent nettement
de l'alcool nitro-isopropij tique et témoignent de son
individualité.
Sa composition centésimale correspond d'ailleurs à la
formule CH5 - CO - CH2(N0.>). L'élément caractéristique
qu'elle renferme quant à sa quantité est Vhijdrogéne :
M. De Batlice en a trouvé 4.97 et 4.99 %; l'acétone
( IS! )
nitrée en renlerme 4.85 "/o, tandis qu'il y en a 6.66 7o
dans l'alcool nitro-isopropylique.
J'attirerai l'attention sur trois propriétés de ce corps,
lesquelles montrent bien ce qui, dans celles-ci, est dû à
la coexistence des composants H2C - NO.j et > CO en
un point de la molécule :
1° L'odeur piquante. L'alcool nitro-isopropylique est
sensiblement inodore.
2'' Le caractère acide nettement accentué. L'alcool
nitro-isopropylique, quoique renfermant aussi H^C- NO^,
est inerte sur les carbonates alcalins. Le voisinage de
>C0 renforce notablement le caractère basique du grou-
pement H^C - NO.2.
5" La volatilité. Eb. 15:2°. L'alcool nitro-isopropylique
bout, sous la pression de 768 millimètres, à 200"-201°.
La transformation du cbainon cdcool secondaire
>CH-OH en chaînon acétone y C = 0 abaisse donc le
point d'ébullition de 48".
Voici les rapports de volatilité de certains composés,
de même nature fonctionnelle, en C5.
Cll5-CH(OH)-Cll3
El).
85° \
-"■n
C!l--C0-CIl3
36° /
CIf5-CH(0H)-CH, -Cl Éb. I27"
Cllj-CO-CfLCI 118»
- 9"
Le poids moléculaire de l'alcool nitro-isopropylique
est 105. Les alcools secondaires en Cg ont un poids
moléculaire presque identique, 102. Or leur transforma-
( 152 )
lion en acétone s'accompayne d'un abaissement beaucoup
moindre dans leur point d'ébullition
CH3-CH2-CH(On)-Cn2-CH.-CH-, Éb. 153» \
) -12'•
CH,-CFl2-CO-CH,-CH,-CH5 123» /
On voit par là, d'une manière évidente, l'influence
volatilisante exercée par l'existence dans la molécule de
y acétone nitrée du système - CO - CHg (NOg).
Pour déterminer l'étendue du rayon au dedans duquel
cette influence se fait sentir, il faudrait pouvoir examiner
comment se présente l'bomologue supérieur de l'acétone
mononitrée, CH3 - CO - CH^ - CH^ (NOo).
Il est à espérer que M. De Battice, qui s'occupe avec
activité des acétones nitrées, parviendra à donner une
solution complète à cette question,
^ II. — Sur le nilrile butyrique normal mononitré
primaire
CN - CH. - CH, - CH^INO,) (*).
Ce corps a été obtenu par M. R. Van Melckebeke en
faisant réagir sur le nitrite d'argent AgNO^ le nitrile buty-
rique mono-iodé primaire CN - CH^ - CH^ - CH^Ï.
Le nitrile butyrique mononitré primaire CN - CH^j -
CH^ - CH^ (NO2) constitue un liquide incolore, quelque
peu épais, faiblement odorant, d'une saveur piquante,
douceâtre.
[' ) Au moment où j'écris ces lignes, je reçois le numéro 12 du
Bulletin de la Société chimique de Berlin, où M. 0. Piloty fail con-
naître un isomère du nitrile butyrique normal primaire, à savoir le
nitrile isobulyrique mononitré, composé solide, cristallin, fus. à So".
( «'^5 )
Il est insoluble dans l'eau; l'éther, l'alcool, la benzine,
le chloroforme, les solutions alcalines le dissolvent aisé-
ment.
Sa densité à 12° est égale à 1.158.
Il bout à 160° sous la pression de 35 millimètres, à
256° sous la pression ordinaire, mais en subissant une
légère décomposition.
J'ai montré précédemment combien est puissante l'in-
nuence volatilisante qui résulte de la coexistence en un
point des molécules carbonées des composants - CN et
> CO. On est autorisé à admettre qu'il en doit être ainsi
des composants - CN et > C (NO^).
Le point d'ébullition élevé du nitrile butyrique nitré
normal et primaire permet de conclure que cette influence
volatilisante ne s'exerce plus ou du moins que très faible-
ment à travers le système - CHo - CH^ - qui sépare les
composants - CN et H^C - NO.»
CH3-CH2-CH2-CHÎ Eb. i"
CN-CH2-CH2-CH5 US'
CH3-CH2-CHJ CH3 Éb. 1»
CII3 - CH2 - CH2 - CH2(N02) 1 52'
CN-CH2-CHÎ-CH3 Éb. 118»
CN - CHj - CH, - CH2(N0,) 256°
Ml"
151'
M 8»
84°
CH5-CH3-CH2-CH,(NOj) Éb. 152»
CN - CH, - CHi - CH2(i\0i) 2ÔG»
5'"* SÉUIE, TOME XXXVI. H
( iU )
Les différences il7°-84'' et 151 "-US", ou 55°, repré-
sentent ce qui tient clans les dérivés nitriles nitrés, à
l'existence des groupements - CN et - CHg (NO2) à la place
de - CH3.
Ce corps présente les propriétés des nitriles et des
dérivés nitrés.
L'action qu'il subit de la part de l'acide chlorhydrique
dans l'eau offre un intérêt particulier. Le composant
nitrile - CN est atteint le premier. Avec l'acide chlorhy-
drique concentré vers 50", il se transforme en acide
nitro-butyrique normal (NOg) CH2 - CHç, - CH^ - CO (OH),
qui constitue un liquide épais, insoluble dans l'eau. Celui-
ci, chauffé à une température plus élevée avec HCl aq.,
de même que le nitrile nitré lui-même, se transforme en
acide succinique normal C.2H4 - [C0(0H)].2, fus. 185". Il
se forme en même temps du chlorhydrate d'hydroxyla-
mine (HO)NHo, HCl.
M. Van Melckebeke s'occupe en même temps de la
préparation des nitriles nitrés inférieurs en C3, etc., et
notamment de Vacélo-nitrile mononitré NC - CH2(N0.2),
l'isomère de l'acide fulminique ou l'acide fulminique
lui-même, composé qui a déjà fait souvent l'objet des
recherches des chimistes.
J'aurai l'honneur de communiquer à l'Académie les
résultats des études de MM. De Battice et Van Melcke-
beke.
( 455 )
Sur r action cataly tique de la mousse de platine et de
palladium; par A. de Hemptinne.
La mousse de platine détermine par sa présence
l'union de plusieurs gaz; ainsi, par exemple, celle de
l'oxygène et de l'hydrogène, de l'hydrogène et de l'acéty-
lène, l'oxydation de l'anhydride sulfureux et d'autres
réactions encore.
Certains auteurs ont voulu expliquer l'action cataly-
tique du platine par sa propriété de condenser les gaz;
suivant d'autres, les combinaisons chimiques résultent de
la formation de composés du platine peu stables.
L. Mond, Ramsay et Shields ont étudié avec soin
l'absorption de l'hydrogène et de l'oxygène par la mousse
de platine ; ils n'ont pas encore osé se prononcer sur
l'existence d'un hydrure de platine; Berthelot, au con-
traire, croit à l'existence d'un composé de ce genre qui
aurait pour formule Pts^Hs; il base sa conviction sur
des observations thermo-chimiques ; ses expériences sont,
comme l'ont fait remarquer L. Mond, Ramsay et Shields,
entachées de quelques erreurs.
La question de l'existence d'un hydrure ou de la fixa-
tion d'une grande quantité d'hydrogène par absorption
ou condensation est donc encore ouverte; j'ai cru qu'il
serait utile de se servir d'une méthode nouvelle pour
tâcher d'éclaircir les faits.
( 156 )
METHODE.
On sait par les belles recherches de Piclet qu'à une
température assez basse toutes les réactions chimiques
cessent; à — 130°, les corps doués des affinités les plus
vives semblent être devenus indifférents. Si donc l'hydro-
gène est fixé sur le platine par combinaison, à une tempé-
rature assez basse, cette action devra cesser d'avoir lieu;
si, au contraire, le platine condense simplement l'hydro-
gène, en d'autres termes, s'il n'y a qu'un phénomène
physique, l'abaissement de la température sera favorable
à la condensation. Nous avons donc là une méthode pour
distinguer un phénomène chimique d'un phénomène
physique; faisons-en l'application à l'étude de l'action de
l'hydrogène sur la mousse de platine et de palladium.
APPAREIL ET RECHERCHES.
L'appareil se compose d'un tube BAE gradué, long
d'environ 80 centimètres et plongeant dans un vase à
grande surface plein de mercure D. AB est recourbé en
A; en R et R' se trouvent des robinets; la pièce mobile C
s'adapte en E sur le tube AE au moyen d'un manchon
rodé. Le tube EF est capillaire ; la partie depuis le coude
jusqu'en F est longue d'environ 25 centimètres. Voici
maintenant la façon dont on procède. Par le robinet R, on
a ftîit le vide dans l'appareil, le mercure monte en N; on
ferme R' ; par R, on laisse entrer de l'hydrogène jusqu'il
ce que le mercure descende au niveau Nj, arbitrairement
( <S7)
choisi, mais le même pour toutes les expériences; on
refroidit C à — 78". On ouvre R', le mercure monte en N4;
cette opération détermine l'effet de la dilatation du gaz
dans le réservoir C vide.
:t
t
v
u
On enlève le bain d'acide
carbonique et d'éther et on
le remplace par un bain à
H- 15°; le niveau du mer-
cure descend en N^.
Au moyen d'un thermo-
mètre à toluol, j'ai eu soin
de m'assurer que la tem-
pérature du bain d'acide
carbonique et d'éther reste
constante à — 78*, si l'on a
soin d'y ajouter en temps
de l'acide carbonique; dans
ces conditions, le niveau du
mercure reste aussi constant
en N4.
On répète la même série d'expériences que ci-dessus,
après avoir mis une certaine quantité de platine dans le
réservoir C.
Le volume occupé par le platine étant très petit
comparativement à celui du réservoir, les erreurs prove-
nant de ce chef peuvent être négligées. On obtient ainsi
des niveaux N5 et N3, d'où l'on peut déduire approxi-
mativement le pouvoir absorbant du platine à — 78° et
à ■+- 15°.
FiG. i.
( <S8 )
ABSORPTION DE l'hYDROGÈNE PAR DU CARBONE.
La condensation d'un gaz par le carbone est un effet
qui semble purement mécanique; par suite, la quantité
condensée doit croître avec l'abaissement de la tempéra-
ture : cela résulte des principes généraux de la thermody-
namique.
J'ai cru pourtant utile de faire une expérience avec du
carbone pur, afin de vérifier l'ordre de grandeur des effets
dus au refroidissement. Le carbone a été préparé en car-
bonisant du sucre; le produit ainsi obtenu est chauffé
dans un tube en verre de Bohême; sur le produit incan-
descent, on fait circuler un courant de chlore qui débar-
rasse le carbone des dernières traces d'impuretés en
formant des chlorures volatils; le carbone restant est
ensuite bien lavé, séché et tamisé. 10 grammes ont été
mis dans le réservoir C ; celui-ci a été pris notablement
plus grand que dans les expériences suivantes avec le
platine. On commence par faire le vide dans l'appareil
et on chauffe jusqu'au moment où le carbone semble ne
plus dégager d'air. On ferme R', on refroidit C à — 78°,
on introduit de l'hydrogène jusqu'en N^ et on ouvre R';
le niveau du mercure monte au bout de quelque temps
en N5 ; lorsqu'il ne change plus, on le note ; N1N5
= 710 millimètres.
On enlève ensuite le bain réfrigérant; le niveau descend
au bout d'un temps assez long en N3 ; N^Nj = 422 milli-
mètres.
On vide l'appareil et, après avoir déterminé approxi-
mativement le volume occupé par le carbone, on le
remplace par du sable et on répète les mêmes opérations.
On obtient N1N4 = 312, NjN. = 259.
( 159 )
De là on déduit pour l'effet réel du carbone :
Ascension à — 78° NjNs — N,Ni = 710 — 422 = 288
à-»- 15° N,N3 — N,N, = 312 — 259= 55
On voit d'après ces chiffres que l'effet du refroidisse-
ment sur le pouvoir condensant du carbone est très
notable à — 78°; la condensation est près de six fois plus
forte qu'à 15".
PLATINE ET HYDROGÈNE.
La mousse de platine a été préparée en réduisant le
chlorure de platine par le formiate de soude; la quantité
mise dans le réservoir C a été de 5^,68. La mousse de
platine contient toujours une assez grande quantité d'oxy-
i,'ène; pour se débarrasser de celui-ci, on commence par
remplir l'appareil d'hydrogène; celui-ci se combine à
l'oxygène; on chauffe ensuite dans le vide jusqu'à 180°.
On enlève ainsi toute l'eau et la plus grande partie de
l'hydrogène fixé sur le platine. Avec la mousse ainsi pré-
parée, on opère comme il a été décrit. On ne peut chauffer
à une température supérieure à 180° sans transformer
une partie du platine en éponge, ce qui le rend moins
actif. Voici maintenant les chiffres obtenus, appareil
vide :
A — 78» N.Ni = 116 millimètres.
A -4- 15" N,N2= 90 millimètres.
L'appareil contenant og',68 de platine refroidi à — 78°,
on ouvre très doucement le robinet R' de manière que
le gaz, avant d'arriver au platine; ait le temps de se
refroidir dans le tube capillaire. Le niveau étant resté
constant en N5 pendant quarante-cinq minutes, on a
( li)0 )
enlevé le bain et porté C à 15°; par suite de la dilatation
du gaz, le niveau descend rapidement, puis, par suite
d'une nouvelle absorption, remonte de quelques milli-
mètres et au bout d'une heure ne monte plus qu'avec une
extrême lenteur. En prenant alors ce niveau, on obtient :
A —78" N1N5 — N,N4= 14i — 116 = 28 )
A-t-15- N.N, — N,N2= 170— 90 = 80 î
Il suffit de jeter un coup d'œil sur ces chifîres et de les
comparer à ceux obtenus pour le carbone pour se con-
vaincre que la mousse de platine agit tout différemment ;
l'absorption est moindre à — 78" qu'à -+- 15°; par suite,
l'hypothèse d'une simple condensation à la surface doit
être rejetée.
Après avoir de nouveau fait le vide dans l'appareil, le
platine a été porté à 580° pendant un temps assez long.
On obtient alors :
A —78» N^Ns — N,Ni= 9.6
A -+- iS" N,N3 — N,N2=15.6
II.
L'absorption est moindre à — 78° qu'à -h 15°, la
quantité d'hydrogène fixé est notablement plus petite, le
platine a perdu de ses qualités après avoir été fortement
chauffé.
Un autre échantillon de 3 grammes a donné :
A — 78» N.Ns — N,N, = 1 1 !) — U 6 = 5 )
m.
A -+- 15» N^Nj — N,Ni= 102— 90 = li>j
Le résultat est analogue aux précédents, mais la quan-
tité totale d'hydrogène absorbé par unité de poids a été
notablement moindre que dans I ; il est à remarquer que
€et échantillon avait été chauffé plusieurs fois à 190°, ce
( ^^1 )
qui a rendu le platine moins actif. Un nouvel échantil-
lon de 5fc'',o a été mis dans l'appareil et traité comme
dans l'expérience I, avec cette dilïérence que, au lieu de
faire passer brusquement la température de — 78° à
-h io°, on a laissé le bain refroidir lentement jusqu'à la
température ordinaire ; on a observé le niveau du mercure
correspondant aux différentes températures. Cette opé-
ration avait pour but de voir si à une certaine tempéra-
ture il n'y avait pas d'absorption brusque. Une série de
déterminations du même genre ont été faites avec l'ap-
pareil vide.
Dans la première colonne du tableau suivant se
trouvent les chiffres indiquant le nombre de divisions
dont descend le mercure lorsque l'appareil vide, port(;
à — 78°, revient à la température ordinaire.
La colonne II donne des chiffres analogues, l'appareil
contenant 5^', 5 de platine chargé d'hydrogène; dans la
colonne III sont les températures et dans la colonne IV
le temps compté en minutes à partir du moment où l'on
ne refroidit plus.
1.
II.
III.
IV.
0.0
0.0
— 78
0
2
2.5
78
8
5
4.5
60
13
7.5
6.5
50
20
10.0
7.5
40
26
12
8.5
35
30
43.5
8.5
30
34
14.5
8.5
25
38
15.5
9
20
48
16
9.5
15
52
17 10.5 10 58
( 162)
La ligure 2 permet de se rendre compte d'un coup
d'œil de la marche du phénomène ; les températures sont
portées comme abscisses à partir de — 78°, et sur la ligne
des ordonnées à partir du point A", arbitrairement choisi,
on porte le nombre de divisions dont le mercure est des-
cendu. La ligne AB représente la descente du mercure,
l'appareil étant vide; la ligne ACDEF montre la manière
dont le platine se comporte dans une atmosphère d'hy-
\
c
^
"
^
\.D E
^
jj-
■■■■■
SO ito 5S io a5 -20 là 10
FiG. 2.
drogène. La partie AC montre une descente plus rapide
que dans l'appareil vide; cela provient du gaz qui est
fixé par condensation sur le platine. A partir du point G,
l'inclinaison de la ligne comparée à celle de l'appareil
vide montre qu'il y a absorption graduelle de l'hydro-
gène ; celle-ci devient surtout sensible en D vers So". Le
platine ayant fixé alors presque tout ce qu'il peut absor-
ber, la courbe redevient parallèle à AB, A — 10°, le bain
( 163 )
réfrigérant a été enlevé et le platine porté à -+- 15° ; en
vingt minutes, le niveau est remonté encore de deux divi-
sions. On obtient ainsi :
N,N« — N,N,= 6.6 )
IV.
N.Nj — N.Ni = lS.6 i
Rapportons ces quatre expériences à l'unité de poids
du platine ; on obtient :
I.
11.
IM.
IV.
A —78"
4.9
1.6
1
1.2
A + IS»
14
±7
4
2.8
Rapports
2.8
1.7
4
2.Ô
Le tableau précédent nous montre que s'il y a une
certaine différence d'un échantillon à l'autre de platine,
ils ont pourtant tous ceci de commun, c'est d'absorber
moins d'hydrogène à — 78° qu'à -h 15° ou, à coup sur,
que cette absorption se l'ait infiniment plus lentement
aux basses températures.
Comme il a été dit, l'hypothèse d'une simple conden-
sation doit être écartée; celle d'une sorte de dissolution
de l'hydrogène dans le platine n'est pas admissible non
plus; en effet, en vertu de la loi du déplacement de
l'équilibre, la quantité d'hydrogène dissoute aux basses
températures devrait être plus grande, puisque l'hydro-
gène et le platine mis en présence l'un de l'autre
dégagent de la chaleur. Il leste deux hypothèses pos-
sibles : ou bien c'est la porosité du platine qui joue un
rôle, ou bien on se trouve en présemce d'un phénomène
chimique ; nous discuterons plus loin les faits favorables
à l'une ou l'autre de ces hypothèses.
( l«4)
MOUSSE DE PLATINE FRAICHE ET HYDROGENE A LA
TEMPÉRATURE DE l'aIR LIQUIDE.
ïl suffit (le jeter un coup d'œil sur le tableau précédent
pour se convaincre que le platine perd sensiblement de
ses qualités après avoir été porté à une température assez
élevée; d'autre part, cette opération est indispensable
pour se débarrasser de l'hydrogène que l'on a dû faire
agir au préalable sur le platine, afin de se débarrasser de
l'oxygène adhérent. J'ai espéré qu'en opérant à — 190',
température de l'air liquide, la combinaison de l'oxygène
et de l'hydrogène n'aurait plus lieu et que l'on pourrait
ainsi observer l'absorption réelle de l'hydrogène par la
mousse de platine fraîche.
Je dois à l'obligeance de M. Ostwald, professeur à
l'Université de Leipzig, d'avoir pu faire cette expérience;
je tiens à le remercier ici d'avoir mis à ma disposition la
machine de Linde qui sert à la préparation de l'air
liquide. Je tiens également à remercier le D' Luther,
assistant au laboratoire, pour la complaisance qu'il m'a
témoignée.
J'ai opéré exactement comme précédemment, avec
cette dilîérence que le platine du réservoir G n'avait pas
été au préalable rincé avec de l'hydrogène. Le réservoir C
plongeant dans l'air liquide, ma surprise a été grande,
lorsque j'ai ouvert le robinet R', de voir monter très haut
le niveau du mercure. Cette grande ascension a été déter-
minée par la combinaison de l'hydrogène avec l'oxygène
adhérent au platine
N.N, — N,N, = 33l'i.
( 465 )
Après a\oir enlevé le bain, il y a encore eu une absorp-
tion de 10 millimètres :
Comme dans les expériences précédentes, il y a eu
une partie de l'hydrogène qui n'a pas été absorbée à
basse température: il est difficile de savoir exactement
(juelle est celte quantité, parce que l'abaissement de la
température augmente un peu la condensation à la sur-
face, comme dans le cas du charbon. Le temps très
limité dont je disposais ne m'a pas permis de répéter
l'expérience ni d'opérer sur du platine rincé au préa-
lable avec de l'hydrogène, puis chauffé à 180°, ce qui sérail
préférable. La combinaison de l'oxygène et de l'hydro-
gène à — 190° est un fait assez curieux : on sait en eifel
qu'à — 150° l'acide sulfurique et le sodium n'agissent plus
l'un sur l'autre. La mousse de platine donne donc aux
gaz une activité étonnante.
PLATINE ET OXYUE DE CARBONE.
D'après Harbeck et C. Lunge (*), il existe une combi-
naison du platine et de l'oxyde de carbone; celle-ci se
détruit brusquement à 250°. Voyons comment le platine
et le gaz mis en présence se comportent aux basses tem-
pératures.
On a opéré exactement comme pour l'hydrogène; Va\)-
pareil contenait 5^',68 de platine exempt d'oxygène.
On obtient :
A — 78» NjNs — N,Ni — S8.J
A -4- 1 5° N.Nj — N.N, = 30
(*) Zeitschrift fur anorg. Cheiu., t. VI, p. 67.
( 1«« )
Avec le même platine, après l'avoir chauffé à 500%
on trouve :
A — 78° N.N«-N,N,-=13 | ^^
A -t- 1 5» N.Ns - N,N, = 20.4 j
Un autre échantillon de 5 grammes, après avoir été
chauffé à 500% donne
A -78° N,N5-i\,=4N 7 ( ^^^
Un autre échantillon de o^',5 a donné
A — 78» NA — N.N4= 7 1
IV.
A -t- 15° N.Nj — iN,N2= 9 )
Pour cet échantillon, on a laissé revenir lentement le
bain à la température ordinaire. Le tableau et la figure J
qui suivent donnent une idée de la marche de l'absorp- ■
tion aux différentes températures.
0
— 78
Temps
i.5
75
4
0
70
8
6
60
IG
7
55
20
8.5
50
25
9.5
45
50
a
40
55
H.5
55
40
12
50
45
15.5
25
50
U
20
55
15
15
60
( 167 }
AB représente la descente du mercure, l'appareil étant
vide ;5ACDEF, la descente lorsque le réservoir contient du
platine et de l'oxyde de carbone. Comme dans le cas de
l'hydrogène, on observe d'abord une descente brusque
provenant sans doute du gaz fixé par simple conden-
sation de surface. La ligne reste alors sensiblement paral-
lèle à AB jusqu'au point D; vers — 40° à — 30°, il semble y
avoir une absorption assez brusque de l'oxyde de carbone.
Il est aussi à remarquer que c'est vers 40° que l'absorption
de l'bydrogène est surtout devenue grande.
Bapportant les dilTérentes expériences à l'unité de
poids du platine, on obtient :
I.
H.
. III.
IV.
A— 78°
5
2.2
2.3
1.4
A-4- 15»
r;.2
3.6
5
1.6
Rapports
1
1.3
2.t
1.1
( i68 )
Co tableau démontre que, de même que pour l'hydro-
gène, l'absorption est plus forte à 15" qu'à — 78", quoique,
d'un échantillon à l'autre, il y ait une différence assez
grande.
En moyenne, l'absorption de l'oxyde de carbone par
le platine est plus grande à — 78" que pour l'hydrogène,
comme le prouvent les chiffres représentant les rapports.
Ces faits semblent se concilier difficilement avec l'hypo-
thèse d'une diffusion des gaz dans les pores du platine;
en effet, on peut admettre qu'une moins grande quantité
d'hydrogène est fixée par le platine aux basses tempéra-
tures, par suite d'une contraction du métal; mais dans ce
cas, l'effet de la contraction devrait exercer une influence
plus considérable sur l'oxyde de carbone dont les molé-
cules sont plus grandes : or, c'est le contraire qui a lieu.
De plus, le métal se dilatant d'une manière continue,
il devrait en être de même de l'absorption; or celle-ci
semble croître assez rapidement entre — 40" et — 50".
La discussion des phénomènes observés semble plutôt
favorable à l'hypothèse d'une combinaison chimique; ils
ne me paraissent pourtant pas suffisants pour trancher la
question, l'hypothèse d'un effet de la porosité n'étant pas
absolument exclue.
PALLADIUM ET HYDROGÈNE.
Le pouvoir absorbant du palladium est tel que l'on ne
peut en mettre qu'une petite quantité dans le réservoir C :
on a mis Os',o70 de palladium. Le palladium a été au
préalable laissé en contact avec de l'hydrogène pur pen-
dant vingt-quatre heures, afin de le débarrasser de
l'oxygène adhérent, puis chauffé dans le vide à 190". Mis
( -169 )
de nouveau en contact avec de l'hydrogène, il a donné
A - 70° N,N, — N.Ni = 188.4
A H- 15° IV,N4 — N,N3== 158.4 '
L'expérience répétée plusieurs fois a toujours fourni
les mêmes résultats. On a également fait une expérience
après avoir chautTé le palladium jusqu'à 450" et obtenu
un résultat analogue. Le palladium se comporte autre-
ment que le platine ; la condensation à la surface semble
jouer un rôle assez grand, mais cela n'exclut pourtant
pas absolument la possibilité d'un phénomène chimique;
en effet, la plus basse température employée a été — 78°;
il serait intéressant de voir ce qui a lieu à la température
de l'air liquide : une observation de ce genre permettrait
peut-être de trancher la question.
PALLADIUM ET OXYDE DE CARBONE.
Suivant Harbeck et Lunge, il existe un composé de
palladium et d'oxyde de carbone; celui-ci se décompose
vers 250". Un gramme de palladium exempt d'oxygène a
donné :
A - 78° N,i\, - N,N, = 5 ]
A -4- 15° N,N3-N,N2 = 4 [ II.
Rapport 1.5 )
L'absorption est un peu plus grande que dans le cas du
platine, mais le rapport est à peu près le même.
Après avoir fait le vide dans l'appareil et chauffé un
temps assez long à 450°, puis refroidi à 7S° et introduit
de l'hydrogène, on a trouvé :
A — 78° N,N, — NiN, = H.
5'"* SÉRIE, TOME XXXVI. 1^2
( 170)
Le niveau étant resté constant pendant quarante-cinq
minutes, on a enlevé le bain et porté la température
à 15° ; mon étonnement a été grand de voir monter rapi-
dement le mercure et, en quarante minutes, d'obtenir :
N,N.^IM,Ni= 100.
J'ai cherché à répéter l'expérience avec un nouvel
échantillon de palladium qui n'avait pas été en contact
avec de l'oxyde de carbone, mais simplement chauffé
plus longtemps à oOO" : les résultats ont été différents et
semblables à ceux de I. Le palladium semble donc avoir
plus ou moins changé de nature par le contact de l'oxyde
de carbone. Afin de m'en assurer, j'ai de nouveau rempli
l'appareil d'oxyde de carbone, puis fait le vide et chauffé
à 450° aussi longtemps qu'une trace de gaz se dégageait.
Les 4 grammes de palladium ont alors été mis au con-
tact avec de l'hydrogène à — 78°, puis on a laissé revenir
lentement le bain à la température ordinaire.
Le tableau et la figure suivants donnent les résultats :
0 — 78 Temps.
2.5
70
8
4
63
12
G
CO
il
7
55
21
10
45
28
12
55
55
15.5
30
57
14.5
25
40
U.5
20
45
( 171 )
Vers 20% le niveau se met à monter très rapidement :
en deux minutes, il remonte de 192 millimètres, et en
vingt minutes, de 252 millimètres.
La ligne AB représente la descente du mercure pour
l'appareil vide; ACDEF, le même phénomène, le réser-
voir C contenant 4 grammes de palladium. On voit que
vers 20° il y a une absorption très brusque, comme l'in-
dique l'ascension très rapide de la ligne EF. J'ai encore
répété cette expérience et obtenu le même résultat.
Je n'ai pu, jusqu'à présent, trouver une explication
satisfaisante de ce phénomène. A première vue, il faudrait
admettre que le palladium, après avoir été en contact avec
de l'oxyde de carbone, a plus ou moins changé de nature
et ne devient actif que vers — 20°. Trdost et Hautefeuille
admettent l'existence d'un composé de palladium et
d'hydrogène, Hoitsema la rejette, enfin Ramsay et Shields
( 172 )
ne se pioiioiiceiit pas; je garderai la même réserve
jusqu'au jour où l'on aura fait une expérience à — 490";
une détermination de ce genre pourra, je pense, trancher
la question.
En terminant, j'ajouterai encore que les expériences
sur le palladium rendent peu probable l'hypothèse d'un
phénomène de porosité. En effet, si le platine absorbe
moins de gaz à — 78° qu'à -+- 15" parce que le métal se
contracte, il semble qu'il devrait en être de même pour le
palladium; or, c'est le contraire qui a lieu; de plus, la
façon dont se comporte le palladium qui a été en contact
avec CO, s'explique assez difticilement par une hypo-
thèse mécanique.
Gand, le 10 juin 1898.
Sur tes salicy laies doubles de métal et d'antvpijrine {troisième
communication); par M.-C. Schuyten, docteur en
sciences.
J'ai l'honneur de présenter à l'examen de l'Académie
la troisième communication de mes recherches sur les
salipyrines métalliques. Elle comporte les métaux Mg,
Mn, Ph, Al, Cr, Ur, Bi.
Les trois premiers donnent les composés additionnels
attendus ou prévus par le calcul; les autres sont incapables
de produire des salipyrines, sauf peut-être le Bi. L'AI et le
Cr provoquent la précipitation de salipyrine, simplement;
le Bi donne sans doute le salicylate double attendu; le
Cr, dans des circonstances peu définissables, et l'Ur
engendrent des précipités non homogènes, composés,
selon toute apparence, de plusieurs produits mélangés en
proportion constante.
( 175
SALICYLATE DOUBLE DE MAGNESIUM ET D ANTIPYRIME.
Le mélange des solutions aqueuses des composants, en
quantités calculées, ne provoque pas de précipitation; il
faut avoir recours à l'évaporation sur l'acide sulfurique
concentré ou au bain-marie; dans ce dernier cas, on
recueille une masse cristalline jaunâtre qui devient
blanche cependant par le lavage; les eaux mères sont
jaunes.
Dans le tube, le corps fond en un liquide transparent,
incolore, qui distille ensuite du phénol en noircissant (se
décomposant).
Point de fusion : ISe^-iST" (non corr.).
Formule :
(C«H,OH.CO,), M-. (C„H,AO), 2H,0.
Analyses :
Substance.
MgO.
HM.
0.3483
0.0193
—
0.1630
0.0085
-
0.8336
—
0.0427
( 174)
ïpriraées en °/o :
I. II.
Mg .... 3.32»/, 3.12»/,
3.41 •/,
Trouvé.
Calculé
\U0 . . . . 5.12 »/o
5.06 «/„
Trouvé.
Calculé.
La calcinalion dans le creuset de platine doit être con-
duite, surtout au début, avec une extrême lenteur, car
les vapeurs entraînent facilement des portions métalliques.
La détermination de l'eau de cristallisation a été faite
dans un pèse-filtres soumis à une température constante
de lOO^-lOS"; il faut croire que dans une étuve, chauffée à
la flamme, les parois et le support métalliques intérieurs
ont une température plus élevée que celle de l'air chauffé,
car j'ai trouvé la substance, après l'opération, parfaite-
ment fondue.
Après G heures, le corps avait perdu 08',0530 de sor» poids;
24 . après Os^OSys
6 » » ()8'-,0404
6 n » Oe%0409
4 .. « ()«%0419
6 » » 08--,0427
C'est ici que j'ai arrêté les opérations, le corps deve-
nant très brun et commençant à répandre une vague
odeur de CgHgOH; le commencement de la décomposi-
tion m'a semblé manifeste.
Le corps est assez soluble dans l'eau et cette solution
a une réaction neutre. Dans les autres dissolvants
(C2H5OH, (CAl^O, CHCI3, QHg, C«H5.CH3, CS2),
( 175 )
la dissolution est très diflicile, même à chaud ; le CHCI5,
sous ce rapport, donne encore le meilleur résultat.
De l'eau, j'ai obtenu, sous le microscope, de très petits
globules transparents à reflet faiblement rougeâtre, s'étei-
gnant sur fond noir; de l'alcool, des plaques cristallines
superposées partiellement, imitant assez bien des feuilles
à contours clairs, arrondis, enchevêtrées dans un certain
ordre régulier, encore visibles sur fond noir; des autres
dissolvants, rien de caractéristique.
L'ammoniaque, la potasse et la soude caustiques; les
carbonates alcalins ne donnent aucune réaction appa-
rente; non plus quand on chauffe; le carbonate ammo-
nique, additionné d'ammoniaque, ne dépose rien, même
après un repos de plusieurs jours.
Le phosphate acide de sodium, après addition d'ammo-
niaque et de chlorure d'ammonium, produit un trouble
très prononcé quand on secoue énergiquement ; après
quelque temps, dépôt complet.
Le chlorure ferrique, l'acide nitrique concentré bouil-
lant, l'acide nitreux donnent les colorations typiques
pour l'acide salicylique et l'antipyrine. Le nitrate d'argent,
rien.
SALICYLATE DOUBLE DE MANGANOSUM ET D ANTIPYRINE.
, Les premières gouttes de la solution aqueuse du sel
manganeux ajoutées au mélange des solutions aqueuses
de salicylate et d'antipyrine, en quantités calculées, pro-
duisent un précipité blanc qui disparaît par l'agitation.
On peut aussi verser toute la solution, préparée d'avance,
sans obtenir un précipité permanent. Mais si l'on aban-
( «76 )
donne ensuite le liquide à lui-même, il dépose pro mpte-
ment un corps blanc de neige, amorphe, qui devient
cristallin sur le filtre pendant le lavage et se présente
finalement en tines aiguilles courtes, de très joli aspect.
Si Ton veut faire recristalliser, ce qui est inutile pour
l'analyse, on peut le faire de l'alcool ; mais dans ce cas,
il faut éviter la chaleur; le liquide noircit très vite et les
cristaux, malgré leur beauté, sont noir-gris.
Dans le tube, le corps fond en produisant beaucoup de
mousse, due au départ abondant d'eau et de phénol; à la
fin, le liquide passe du brun foncé au noir et dégage des
vapeurs blanches à odeur pyridique. Dans le creuset
fermé, en présence de quelques gouttes d'acide sulfurique
concentré, une douce chaleur provoque la sublimation
d'une magnifique cristallisation d'acide salicylique sur les
parois peu chauffées.
Point de fusion : Mo"-! 14° (non corr.).
Formule :
(CoH^OHCO,), . Mn . (ChH.îNîO)^ . ^2H,0.
Analyses :
Substance.
MnsOi.
H^O.
0.!26oH
0.0268
—
0.3796
0.0393
-
0.8832
—
0.04 i8
( ^77 )
Ces résultats exprimés en % donnent :
I. II.
Mn . . . . 7.28 "/'o 7.46 »/„ 7Â\"I„
Trouvé. Calculé.
H,0 . . . . 5.06»/, 4.85 »/o
Trouvé. Calculé.
La calcination a été faite au rouge vif, dans un creuset
de platine.
La détermination de l'eau de cristallisation a été con-
duite comme pour le composé du magnésium. En voici
les phases :
Après 6 heures, le corps avait perdu ()?%04M de son poids;
24 » après Og',0443
6 » » Og%()452
6 » . Of;'-,04.48
Le corps était alors très foncé et commençait à répan-
dre des odeurs; j'ai dû renoncer donc à ohtenir un poids
constant.
La substance est soluble dans rH20; réaction neutre.
Parmi les autres dissolvants, l'alcool, surtout à chaud,
est le meilleur. (Chauffer très lentement et peu, car la
dissolution noircit vite.)
De l'eau, j'ai obtenu, sous le microscope, une cristalli-
sation superbe en aiguilles prismatiques tétragonales,
transparentes sur fond noir sans coloration nette (lumière
du soir); de l'C^H^OH, de jolies aiguilles colorées, dispo-
sées en éventails à reflets magnifiques sur fond noir; de
l'éther sulfurique, des aiguilles isolées, rares, hérissées, le
long des faces, d'aiguilles plus petites à peine visibles,
disposées en aigrettes, moins brillantes sur fond noir que
( 178 )
les précédentes ; du CHCI5, de belles rosettes teintées de
vert, de rouge, de bleu, admirables sur fond noir ; du
benzène, une arborescence incolore très caractéristique,
pure, s'éteignant quand on tourne le nicol; du CS^, rien
de spécial.
Le sulfure d'ammonium, en présence du cblorure
ammonique, donne un précipité blanc jaunâtre; je n'ai
pas pu obtenir le précipité couleur de chair, sans doute
parce que le corps n'est pas assez soluble pour fournir
une dissolution de concentration sutïisante ; toutefois,
après dépôt, le précipité blanchâtre présente, au fond du
tube, un léger rellet rosàtre.
La soude caustique donne une coloration brunâtre avec
louche léger ; bientôt il se forme des tlocons d'hydrate
qui s'accentuent par le chauffage; si ensuite on ajoute du
Br ou un hypobromite et qu'on fasse bouillir, il ne se
forme pas d'hydrate noir-brun de peroxyde.
Le carbonate de soude précipite immédiatement en
blanc.
Les ferrocyanures alcalins précipitent en blanc, sans
trace de rouge; l'acide chlorhydrique régénère le liquide
incolore primitif.
Le mélange de peroxyde de plomb et d'acide nitrique
produit à l'ébullition une coloration verte ou rouge, sui-
vant la quantité de réactif.
Le chlorure ferrique, l'acide nitrique concentré bouil-
lant, l'acide nitreux donnent les réactions typiques pour
l'acide salicylique et l'antipyrine; le nitrate d'argent,
rien.
Il est à remarquer que la coloration rouge obtenue
avec l'acide nitrique est pâle et que par le repos et le
refroidissement elle passe lentement par le violet au bleu.
( ^79 )
SALICYLATE DOUBLE DE l'LOMB ET D ANTiPYRINE,
On verse de l'acétate de plomb, en solution aqueuse
acidiliée par l'acide acétique, dans le mélange des solu-
tions aqueuses de salicylate alcalin et d'antipyrine jusqu'à
ce que la précipitation cesse: le corps blanc formé est
gélatineux et se réunit, par l'agitation, en boule coulante.
Séchée, elle se laisse facilement pulvériser. On peut aussi
mélanger les solutions chaudes des composants sutFisam-
ment étendues sans obtenir un précipité quelconque;
alors, par le refroidissement et après quelque temps, il se
dépose une couche blanche mince, et, à la surface, il y a
formation de pellicules. Dans le but d'obtenir des cristaux,
j'ai chauffé le tout au bain-marie; la couche blanche du
fond s'est transformée alors en un liquide épais, puis est
redevenue solide en jaunissant légèrement. J'ai constaté
qu'il s'était formé, aux dépens de la salipyrine primitive,
un salicylate de plomb.
Le salicylate double n'affecte pas toujours, au moment
de sa formation, la forme gélatineuse. Quand on opère
avec des solutions plutôt concentrées, on obtient un
abondant précipité floconneux, d'une blancheur parfaite;
jeté sur un filtre et, après lavage rapide, imparfaitement
séché à la trompe, il se liquéfie en partie. A. ce propos,
j'ai pu ftiire une observation assez intéressante. Afin de
recueillir à l'état solide le corps liquéfié, je versais le
liquide huileux dans une solution aqueuse de salipyrine
plombique préparée pour l'analyse, dans le but de faire
cristalliser le tout. Le lendemain, il s'était formé une
très jolie cristallisation en aiguilles soyeuses groupées
en rosettes isolées que je m'empressais de recueillir et de
soumettre à l'analyse.
( i»o )
Qf^', 1 151 de substance ont donné (>',(M)70 de sulfate de
plomb ou 40.4 «/o de Pb; le calcul pour le Pb (C0H4OH.
00.2)2- H2O décrit et connu indique 41.5 % de plomb;
absence complète d'antipyrine.
La liquéfaction dont je viens de parler est donc accom-
pagnée d'une dissociation de salipyrine avec formation de
salicylate de plomb. A différentes reprises déjà, j'ai
remarqué que les composés additionnels de l'antipyrine
sont très altérables en présence et au sein des dissolvants
neutres; l'eau se distingue particulièrement sous ce
rapport.
Dans le tube, le composé fond en un liquide incolore;
puis il redevient solide et se détruit en dégageant
C6H:iOH et des vapeurs pyridiques.
Point de fusion : 48°-50° (non corr.).
Le corps, sec, est très peu soluble dans l'H^O; fraî-
chement précipité et humide, il est bien plus soluble; la
solution a une réaction acide nette.
L'alcool, l'éther sulfurique, le chloroforme, le benzène
et le sulfure de carbone ne dissolvent presque rien; le
second ne laisse rien à l'évaporation. Le chloroforme
et le sulfure de carbone ont une action très curieuse : le
premier dissout instantanément la poudre blanche, mais
devient trouble peu après ; petit à petit, il se forme un
précipité floconneux qui gagne le fond; il y a ici, sans
doute, un phénomène de dissociation intéressant qu'il
serait peut-être utile d'examiner de plus près. Le second
transforme le composé en masse gélatineuse transparente,
sans le dissoudre en apparence ; par l'agitation, elle se
divise et colle aux parois du tube.
Sous le microscope, l'eau donne de petits mamelons en
couche continue, sans forme cristalline apparente; l'alcool.
( 181 )
de très petits points à retlet rougeâtie, disséminés, nom-
breux dans une couche mince d'une autre substance; le
chloroforme, des aiguilles réunies en paquets isolés ne
s'éteignant pas complètement, comme les préparations
provenant des autres dissolvants, sur fond noir (*); le
benzène, des masses lumineuses jaunâtres (lumière artifi-
cielle), entourées d'une zone noire, allongées en prismes
indéfinissables; le sulfure de carbone se comporte de
même.
I/analyse a conduit à cette formule :
(CfiH, . OH . CO,), l^b . C,.H.,N,0 (**)
Substance.
PbSOi.
ChH,,N,0.
0.1835
0.0855
—
0 2490
0.1430
-
0.2320
0.1030
-
0.0933
—
0.0260
(*) Vu le pliénomcne de disgolulion s|)écial dans le chloroforme
cité précédemment, je crois pouvoir soupçonner que les aiguilles ne
sont pas constituées par la salipyrine plombique.
(**) J'ai aussi tenté une détermination dej'eau de cristallisation. Le
corps fondu se transforme immédiatement en composé blanc dont le
point de fusion est situé plus haut, sans déposer des gouttelettes sur
les parois froides du tube ; et quand ce phénomène se produit, le com-
posé est déjà noir-brun et le liquide qui distille sent le phénol. Les
analyses semblent indiquer d'ailleurs qu'il y a absence d'HoO.
( 18-2 ^
II.
Ô0.90 "/„
Trouvé.
III.
30.31
%
50.90 7
Cal.'ulé.
27.80 "/.
Trouvé.
28.12 7.
Calculé.
En 7o :
Pb . . . 31 81 7„
L'hydrogène sulfuré et le sulfure d'ammonium donnent
des précipités noirs de sulfure de plomb avec ses carac-
tères habituels.
La KOH et la iNaOH ne donnent rien, même si l'on
évite avec le plus grand soin un excès de réactif.
L'ammoniaque, un louche blanc qui s'accentue peu à
peu.
Le carbonate sodique, le précipité de plomb attendu.
L'acide chlorhydrique et les chlorures alcalins ne pro-
duisent rien, probablement parce que la solution est trop
étendue, ce qui est inévitable.
L'acide sulfurique, du PbS04 soluble dans l'ammo-
niaque.
Les bichromates alcalins, un précipité jaune.
L'iodure de potassium, un précipité jaune-serin.
L'acide nitrique concentré bouillant, une faible colora-
tion rouge.
Le fait que la substance est très soluble dans l'acide
acétique glacial permet d'observer, à l'aide de l'acide
nitreux (KNO^ -i- C2H4O2), la réaction pour l'antipyrine
avec une très grande netteté; la coloration verte est très
forte.
Le chlorure ferrique produit la coloration violette
typique pour les salicylates.
( <83 )
SALICYLATE DOUBLE DE CHROMICLM ET 0 ANTIPYRINE.
Dans le but de préparer le corps
(C«H*OH . CO^^s • Cr.(C„n„N20]s
prévu par la théorie, j'ai ajouté au mélange des solutions
aqueuses de salicylate alcalin et d'antipyrine en quantités
calculées, une solution correspondante de sulfate chro-
mique (l'alun de chrome donne les mêmes résultats). Il
se précipite, immédiatement ou après un temps plus
ou moins long, un composé blanc ou un dépôt verdâtre.
Le premier, convenablement purifié, ne renferme pas
trace de chrome et est de la salipyrine pure, ce que j'ai
pu vérifier par l'analyse qualitative et quantitative du
corps et par la détermination de son point de fusion.
C.iH.^NsO .... 57.51 »/„ 57.8 "/„
Trouvé. Calculé
pour <;6H40H .COJi .C,,His,N.O.
Point de fusion . , 85°-86° SSo-SO-'f)
Trouvé. Délerminé
sur CeHiOH .CO.H .CjiHiaNsO.
Le second renferme en moyenne 2.5 % de chrome et
de 45 à 44 % de base, alors que la théorie indique, pour
la salipyrine de chrome susmentionnée, 5.11 % ^^
54.48 °/o.
Celle-ci n'existe donc pas, ou mieux peut-être, ne peut
0 Patein et DuFEAu donnent 91°-90°. (C. R., 1896, 133o.)
( 484 )
pas être préparée comme je viens de l'indiquer. Pour
expliquer ce phénomène, on pourrait admettre, dans le
cas de la formation de la salipyrine seule, qu'il se forme
de la soude caustique en quantité suffisante pour main-
tenir l'hydrate chromique en solution, ce qui permettrait
à la salipyrine de se constituer et de précipiter en vertu
de son insolubilité. Quant au dépôt verdâtre, sa compo-
sition ne répond à aucun calcul en rapport avec nos idées
actuelles sur la valence; je pense qu'il ne constitue pas
une combinaison unique, mais bien un mélange de plu-
sieurs composés, probablement très complexe {*).
SALICYLATE DOUBLE D ALUMINIUM ET l) ANTIPYRINE.
J'ai ajouté du sulfate d'aluminium (1*^',7) en solution
aqueuse au mélange des solutions aqueuses de salicylate
alcalin (1^'',6) et d'antipyrine (1»',9). J'espérais obtenir
(CeHiOH . C0,)3 . AI.(C„H,A0)3.
Il se forme immédiatement un trouble blanc laiteux
persistant qui se transforme après quelque temps en cris-
taux brillants, plats, réunis en rosettes collées sur les
parois du vase.
Après purification et séchage convenables, ils sont
légers et doux au toucher.
L'analyse qualitative (et quantitative) a prouvé qu'il
s'est formé uniquement de la salipyrine. En effet, le corps
(*) Un composé renfermant une molécule de salipyrine chromique
combinée à trois molécules de salipyrine demande ±(}î "jo de Cr et
55.91 °/o d'antipyrine.
( 183 )
ne renferme pas d'aluminium combiné, seulement des
traces de sulfate mécaniquement entraîné (souillures),
impondérables même sous forme d'alumine; les chiffres
obtenus pour le dosage de l'antipyrine et la détermina-
tion du point de fusion le montrent clairement :
C,,H,,N,0 .... 57.69 o/o 37.8%
Trouvé. Calculé
IiouiCsH^OH.COaH.CnHiîNâO.
Point de fusion . . 8d°-8G° 85"-8r)''
Trouvé. Déterminé
surC6H40H.C0,H.Ci,H,2Nâ0.
Des eaux mères, je n'ai rien pu extraire de caractéris-
tique.
Je crois pouvoir affirmer que la salipyrine aluminique
n'existe pas.
SALICYLATE DOUBLE D URANYLE ET D ANTIPYRINE.
Le corps
(CeH, . OH . CO,), . UrO, . (CH.^NoO)^ ,„,, „,
que j'espérais pouvoir préparer, ne s'est pas produit dans
les conditions que j'ai pu réaliser. Quand on ajoute un
sel d'uranyle en solution aqueuse au mélange des solu-
tions aqueuses de salicylate alcalin et d'antipyrine, on
obtient un volumineux précipité orange qui, lavé à l'al-
cool chaud, est plus foncé que primitivement et présente
une légère fluorescence. Le composé ainsi produit n'a
pas la composition du précipité lavé à l'eau froide; il ren-
ferme plusd'urane et moins d'alcaloïde que celui-ci.
3""* SÉRIE, TOME XXXVI. 15
( 186 )
Les nombreuses analyses effectuées sur des échantillons
(le préparations différentes m'ont donné en moyenne
entre 29 et 50 % d'uranium, entre 41 et 42 % d'anti-
pyrine, chiffres que je ne puis appliquer ni à la formule
indiquée plus haut ni à aucune autre combinaison pos-
sible. Il est vrai que le corps
(C«U, . OH . C0,1 . UrO, (C„H,2NoO),
demande 25.99 "/o d'uranium et 40.82 % d'antipyrine ; à
première vue, on pourrait donc se figurer que j'ai analysé
des précipités impurs, souillés par des sels d'urane ou
par de la salipyrine. Je l'ignore. Mais je puis ajouter que
le corps ne cristallise point; que, pour le reste, j'ai fait
tout ce qui devait être fait pour assurer éventuellement la
pureté du produit. J'ai toujours opéré, par exemple, en pré-
sence d'un excès de base, dans le but d'éviter le salicylate
d'uranyle qui pourrait précipiter avec la salipyrine métal-
lique; je suis donc sur que si le corps susindiqué avait
dû se produire, il aurait donné à l'analyse (méthode à la
calcinalion de Pelouze) un chiffre d'uranium plutôt infé-
rieur à 25.99 °/o; or il donne 29-50 % avec une constance
remarquable, malgré les lavages répétés à froid avec
toutes espèces de dissolvants; pour enlever complète-
ment l'antipyrine libre, il faut laver environ une semaine
à l'eau froide, et alors le réactif nitreux révèle encore,
dans un long tube, des traces de coloration verte.
Tout fait donc supposer que le précipité orange dont
je viens d'indiquer la formation n'est pas le corps cher-
ché, mais bien une autie substance dont la composition
moléculaire m'échappe, ou un mélange de plusieurs
substances (salicylate métallique, salipyrine, salipyrine
métallique) qu'il est très difficile de séparer et dont il ne
m'est pas possible de sortir pour le moment.
J'ai enfin essayé de préparer le salicylate double de Bi
et d'antipyrine; mes efforts n'ont pas encore abouti au
résultat désiré; la seule chose que je puisse dire dès main-
tenant, c'est que j'ai trouvé probablement la méthode à
suivre et que je suis en possession d'un corps qui n'est
pas seulement du salicylate bismuthique; et comme il
est cristallin, j'espère pouvoir exposer dans un avenir
plus ou moins rapproché l'étude complète de cette com-
binaison très importante.
C'est ici que j'arrête mes recherches sur les salipyrines.
Les benzopyrines, si elles existent, vont suivre.
Mais il est évident que si, dans la suite, il est néces-
saire, pour l'étude convenable de mon thème, que j'en
prépare d'autres, je me permettrai d'attirer encore sur
elles la bienveillante attention de l'Académie.
I^aboratoire privé. Anvers, juin 1898.
^iir (a délerDiination des éléments neiitrcs d'espèce
(jnelconquc; par François Deruyts, chargé de cours
à l'Université de Liège.
Dans nos recherches antérieures sur les éléments
neutres des involutions, nous ne nous sommes occupé
que des éléments neutres de première espèce : nous nous
proposons, dans cette courte note, d'exposer d'une façon
sommaire les résultats auxquels nous sommes parvenu
concernant les éléments neutres d'espèce quelconque.
( 'ISS )
Nous nous servirons de la représenlalion suivante, qui
nous a été, du reste, déjà utile : les espaces E*., de
l'espace E^. coupent une courbe rationnelle C„ de cet
espace en des groupes de A- points formant une involu-
tion lî; cette involution est la plus générale quand la
courbe C„ est une courbe dénuée de singularité.
Si k points de la courbe C„ sont situés sur un espace
Ei_3, ces k points sont insutHisants pour déterminer un
groupe de lî; il est nécessaire, pour qu'un groupe conte-
nant ces k points soit déterminé, d'y adjoindre deux
points auxiliaires, qui sont du reste absolument arbi-
traires : dans ce cas, les k points représentent les groupes
de k éléments neutres de seconde espèce de Vinvoliiiion,
En général, les groupes de k points de la courbe C„ qui
seront situés sur un espace £*.,_,, représentent les groupes
de k éléments neutres d'espèce / de l'involution \l.
1. Soient les équations de la courbe C„, sous la forme
X, : X, : ... : X. : X, + , == f\(x) : f,{x) : ••. /.(x): ^^, (x),
fonctions /", {x) étant des polynômes entiers du degré n
par rapport à la variable x, qui est le paramètre d'un
point variable de la courbe. Soient
Xf, Xj, ... X,, X,.(.|, ... x*
les paramètres de A: points de la courbe C„; l'espace Ei_i_,,
déterminé par les k — i points dont les paramètres sont
( 18!» )
aura pour efiiiutioiis
X, X,
/iW l'Ax,,)
ou bien
X, X^
fii^i + i) f^i^i + i)
/ifc + i (•*■*)
X,
= 0;
■ lk-i[^i+l) /k-i + p[-^i+l)
• A -•(^. + 2) A- i+p('ï". + 2)
= 0,
p variant de 1 à î -h 1. Pour que les points dont les
paramètres sont
soient situés sur cet espace E^.,,,, il faut que l'on ait les
i (/h- i) conditions
/■.W A(ar,) ... A-.W /,_i_p(x,^)
(A) A(x.+2) /.(x..^.,) ... A _,(Xj^. .,)/;_,._ ^(x,+ 2) =0,
p variant de 1 à / -h 1 et 7 variant de 1 à i.
( 190 )
Chacune des équations (A) représente une involution
II' ;; en effet, si Ton se donne, par exemple,
l'équation (A) sera du degré n en x, et elle admet comme
racines les valeurs
X„ = Xi
+ "
•^i+'î » • • • *^9
^k'i
donc cette équation représente des groupes de n élé-
ments, déterminés par k — i d'entre eux, quels que soient
ceux-ci dans le groupe; ces groupes forment une involu-
tion Ii_j. Pour rechercher les groupes de A; solutions,
Xi, Xo, . . . x^, qui satisfont aux i{i ■+- 4) équations (A), il
sutlit donc de rechercher les groupes de A; éléments
communs aux i -+- 1 involutions Iî'_j représentées par les
équations (A), dans lesquelles on suppose q constant et
p variant de 1 à / -i- 1 . Remarquons encore que ces / -f- 1
involutions ont en commun les groupes de k éléments qui
satisfont à l'une ou l'autre des deux équations
fi{Xi + ^) f^.{x,+ t) ... /a._,(x,. + ,)
= 0,
fi[Xk) fi[Xk)
fk-iix,}
{k- l{Xi^^}
fk - i [Xlc _ i
fk-l{Xk)
Ces groupes, pour la même raison que ci-dessus, sont
les groupes de n éléments d'une involution iL.-i- Donc
( J9d )
le nombre des groupes de k éléments neutres d'espèce i d'une
involution \l est égal au nombre des groupes de k éléments
communs à i -h 1 involutions l^_i qui ont en commun les
groupes d'une involution iLi-i-
2. Pour que i -y 1 involutions I" , aient des groupes
d'éléments communs en nombre fini (*), il faut que la
somme des rangs de ces involutions soit un multiple du
nombre i, et pour que le nombre des éléments des
groupes communs soit k, il faut que ce multiple soit k lui-
même : il faut donc que l'on ait la condition
(i -+- \){k— \)==ik,
ou bien
/.-=«•(/-+- i).
Donc les involutions de rang i(i -<- l) ont des groupes
de i(i -+- 1) éléments neutres d'espèce i en nombre fini.
3. La recherche du nombre des groupes de i{i -h 1)
éléments communs à î -f- 1 involutions I" qui ont en
commun les groupes d'une involution !,"_,, est aisée; la
seule difficulté est la longueur des différents cas à exa-
miner; la méthode à suivre est identique en tous points
à celle que nous avons employée plusieurs fois déjà ; le
nombre de ces groupes est (jji^y.
(*) Voir notre Mémoire sur lu théorie de L' involution et de l'homo-
graphie unicursale. (Mémoires de ia Soc, koy. des sciences de Liège,
-J« série, t. XVII, p. 70.)
( 192 )
Nous pourrons ainsi énoncer les théorèmes suivants :
Une involution d'ordre n et de rang i(i -h 4) possède
(iii + i)) groupes neutres d'espèce i.
k — i(i H- 1) éléinenls arbitraires du support d'une invo-
lution \l peuvent s'associer à \ï(i^\)')(J>'oupes dei{i-hl)
éléments de façon à former autant de groupes neutres de k
éléments neutres d'espèce i de cette involution.
Les groupes de n — i éléments neutres d'espèce i d'une
involution I°_i forment une involution \l'i\ij^<iy
Ce dernier théorème peut se vérifier immédiatement
par voie analytique.
En etï'et, si nous prenons la représentation d'une I^_i
par l'égalité à zéro de / formes n — linéaires binaires
symétriques par rapport aux variables homogènes
'^il î/i'i -^2 5 /y 2» ' •■> "^il !Ji'i •••> •'nî 3/"'
nous voyons que i éléments dont les paramètres sont,
par exemple,
seront indéterminés lorsque seront remplies les i{i -+- 1)
conditions qui expriment que les dérivées partielles
d'ordre / par rapport à i variables, prises parmi les 2e
variables
^H Vil ^2î ^25 •■•■> ^i1 Vil
des normes M — linéaires symétriques, sont nulles. Or
( 193 )
chacune de ces dérivées partielles étant une forme {n — i)
linéaire symétrique, par rapport aux variables
•^i -t- 1 5 2/i + 1 » '''1 + i 5 }Ji + 'i'y • • • ' "^ " ' i/n'
représente une involution I^-i. leur ensemble représente
une involution d'ordre n — i et de rang
H — <■ — ( t -t- \)i=n — i{'-2 -t- i).
4. Pour terminer, nous donnerons une interprétation
des groupes d'éléments neutres de seconde espèce.
Les surfaces du second ordre, qui passent par trois
points fixes, marquent sur une courbe gauche rationnelle
d'ordre n les groupes d'une involution I«"; cette involu-
tion possède Ç"~") groupes de six éléments neutres de
seconde espèce, c'est-à-dire qu'il existe f7^) systèmes de
six points de la courbe C„ qui, unis aux trois points
donnés, ne déterminent pas une surface du second ordre,
mais une double infinité.
Nous obtenons donc la propriété suivante :
Par trois points fixes on peut mener f '7*) systèmes dou-
blement infinis de surfaces du second ordre, tels que chaque
système passe par six points déterminés d^une courbe
gauche rationnelle d'ordre n.
En particulier : Par trois points fixes on peut mener
une double infinité de surfaces du second ordre qui passent
par six points d'une courbe gauche du quatrième ordre.
La courbe du quatrième ordre, dans ce cas, est arbi-
traire; mais la position des six points de cette courbe
dépend de la position des trois points fixes.
( i94 )
Sur quelques propriétés des courbes gauches; par François
Deruyts, chargé de cours à l'Université de Liège.
Nous avons signalé récemment les résultats suivants (*) :
1" Une involution \l possède des groupes de 2k — ■ 2 élé-
ments neutres de première espèce en nombre fini et le nombre
de ces groupes est
n — /i" -+- 1 \ fn — /.■
/. — i \ k I \k — 2
2" k — p éléments arbitraires du support d'une inimlu-
tion II peuvent s'associer à
li -^ ]\ (n — /,:'
P
n — k\
groupes de 2k — 2 éléments de façon à former autant de
groupes de k -t- p — -2 éléments neutres de première espèce
de l'involution ;
5° Les groupes de n — 1 éléments neutres de première
espèce d'une involution II forment une involution lïk1n_i.
Actuellement, nous nous proposons d'étudier les pro-
priétés de ces groupes neutres et en particulier de
rechercher les groupes neutres composés d'éléments
multiples.
(*) Note sur les éléments neutres de l'involution et leurs applications
aux courbes gauches. (Bull, de l'Acad. uoy. de Belgique, 3e série,
I. XXXV, 1). 855; 1898.)
( iyo )
1. Nous pouvons grouper les éléments neutres d'une
involution I*" de la façon suivante : à k — p éléments
arbitraires du support de l'involution proposée,
Al, A.,, ... , At_,, ,
il correspond
2/) — 2 /n — /t -+- 1 W/i — />\ (fi- — t -f- 1 \ (n — I:
p — \\ j) I \p —'■Il \ p I \p—^2
éléments A^.^^, faisant partie, avec les k — p éléments
arbitraires, d'un groupe de k -h p — 2 éléments neutres
de I,".
La correspondance qui existe entre les éléments
Al , Aj, . . . , A^. _ p, A
*-;> + !
est évidemment réciproque ; le nombre des coïncidences
est donc
(n-k -^ \\ ln — k\
Ce nombre est celui des (jroupes de k -+- p — '2 éléments
neutres d'une involution I^ qui contiennent u)i élément
(k — p H- I)"'''' et âp — 5 éléments simples.
Cas particulier. — Si nous faisons
k = n — A; -+- 1 ,
nous obtenons le résultat suivant : Le nombre des groupes
de n — 1 éléments neutres d'une involution 1", contenant un
élément (n — 2k)°'"% est
2(/i — /j)(2/.- — /i).
( 196 )
Ce résultat peut être vérifié directement si nous obser-
vons que les groupes de n — 1 éléments neutres de l;'
forment une VliT- n-i et que telle-ei possède
groupes contenant un élément (2A; — «)"■•''.
2. Prenons arbitrairement a — I éléments
A,, A,, ... A„_,
du support d'une involution l)! ; il leur correspond dans
cette involution des groupes de n — a -h i éléments
formant une I"rrTî; d'après ce que nous venons de
voir (1), cette involution contient
groupes de k -i- p — a ~ i éléments neutres dont un
élément 6""'% (fe = /c — p — a -i- 2), el^p — 5 éléments
simples A„. Ainsi, aux éléments arbitraires
il correspond
éléments A„; la correspondance entre les éléments
A,, Aj, ..., A„_,, A„
est réciproque; le nombre des coïncidences est
/;, _A- -H 1\ (n — k\
( ^97 )
Nous obtenons ainsi la propriété suivante :
Une involution ï" possède
groupes de k -+- p — 2 éléments neutres contenant deux
éléments multiples associés d'ordre a et b quand on a la con-
dition
a H- /^ =- A - p -t- 2.
Cas particulier. — Si nous supposons p = n — Ah- 1,
nous voyons qu'un? involution \l contient
/2n — -2A-\
n -i )
groupes de n — l éléments neutres; chacun d'eux étant
composé de deux éléments multiples associés d'ordres a et h
et de n — (a -+- b) — 1 éléments simples,
(fl -+- ^ = 2A-— « -+- 1).
Ce résultat peut se vérifier aisément, car les groupes de
ji — 1 éléments neutres d'une l'I forment une I";-,. m qui
possède le nombre indiqué de groupes contenant deux
éléments multiples associés (*).
3. Prenons encore a —i éléments A. (« = l ,2,3 ...
a — 1), arbitraires du support d'une I"*; il leur correspond
(*) Voir notre Mémoire sur la théorie de Vinvolution unicursale.
(Bulletins de la Société royale des sciences de Liège, 2^ série,
t. XVII, p. 60.)
( 198 )
des groupes de n — a h- 1 éléments formant une involu-
tion i:z:t\.
Cette dernière involution possède (2)
groupes de p -h k — a — 1 éléments neutres, contenant
deux éléments multiples associés d'ordres b et c, quand
on a la condition 6 -t- c = A — p — a h- 5, et 2p — A
éléments simples A„ ; donc, aux a — 1 éléments arbi-
traires A^, il correspond
fn — /,-+- I \ (n — /.\
2/;c(-2p-3)(i>-4)^ ^, ) l,j - J
éléments A„. La correspondance entre les a éléments A^
est réciproque; le nombre des coïncidences est donc
(n — k-^- \\ fn — k\
.i*(2,-ô)C2,,-4)( ^^ )(^_J.
Nous pouvons, en conséquence, énoncer le théorème
suivant :
Vue involution queJcotique I" possède
In — k -4- 1\ f?i — k\
groupes (h p h- k — 2 éUmenls neutres contenant trois
éléments multiples associés d'ordres a, b, c, quand on a la
condition
a -+- I) H- c = k — /} -+- 5.
( d99 )
Cas particulier. — En faisant 7J = n — k -h 1, nous
voyons que les groupes de n — 1 éléments neutres d'une
f" qui contiennent trois éléments multiples associés
d'ordres a, b, c, quand on a a -t- // -+- r = 2/c — w -h :2,
soni en nombre
fî>H — 2/,
6a hc
Cette propriété peut se vérifier directement de la
même manière que ci-dessus (2).
4. Des trois cas particuliers que nous venons d'exa-
miner, il résulte les conséquences suivantes : désignons
par p le nombre maximum des éléments multiples associés
qui peuvent se trouver dans les groupes de p -+- k — 2
éléments neutres d'une involution 1;^', et par
«1, «2, •••, Cp
les ordres de multiplicité respectifs de ces éléments : nous
devons avoir les conditions
1
p = 2p _ ±
d'où l'on déduit
Donc une involution {[ ne peut posséder des groupes de
k -^- p — 2 éléments neutres contenant plus de 2p — 2
cléments multiples associés. Dans le cas extrême où le
( ï200 )
nombre maximum serait atteint, le nombre des groupes
serait
Enfin, dans le cas où p serait moindre que 2;) — 2, un
raisonnement analogue à ceux que nous avons faits
précédemment nous conduirait à la conclusion suivante :
Une involution V^ possède des groupes rfe p -4- k — 2 éléments
neutres contenant p éléments multiples associés d'ordre de
multiplicité 3; (i = 1, 2, 5 ... p) quand on a la condition
p
V a, = p -+- k — p; le nombre de ces groupes est
•■=/*+' J!_ In - le -h \\ ln — k\
2 n (^n-oiiw^ ^, !(^_,)-
5. Prenons maintenant p' éléments arbitraires du
support d'une involution II' et considérons chacun de ces
éléments comme étant un élément multiple, d'ordre de
multiplicité b,{i = l, 2, 5 ... p').
Il correspond à ces p' éléments des groupes formant
une involution Il'IvJ;; cette dernière possède des groupes
^\Q I; — y.bi-+-p — ^2 éléments neutres {p étant quel-
conque), contenant 2p — 2 = p éléments multiples asso-
ciés dont les ordres de multiplicité a^ satisfont à la
condition
p /■'■
en nombre
( Wi )
nous pourrons donc, en général, énoncer le théorème
suivant :
p' éléments du support d'une involution ï", considérés
comme étant des éléments (bj)"''"*, peuvent s'associer à
-\)l
p ln-k+\\(n-k\
groupes de p éléments multiples associés d'ordre de mul-
tiplicité a, de manière à former autant de groupes de
k -4- p — 2 éléments neutres de l' involution, quand on a la
condition
p p'
Applications.
6. Toutes les surfaces du second ordre qui passent par
six points lixes, marquent sur une courbe rationnelle
d'ordre n, C„ les groupes d'une involution I*". Cette
involution possède une infinité de ternes neutres; chacun
de ces ternes, joint aux six points donnés, est insuffisant
pour déterminer une surface du second ordre : donc les
six points et chacun des ternes neutres sont situés sur
une courbe gauche du quatrième ordre. Or, parmi les
ternes neutres de I3", il s'en trouve (1) 4f"7") qui con-
tiennent un élément double; on arrive ainsi au résultat
suivant :
Par six points de l'espace, on peut mener 4 {^"r^) courbes
gauches du quatrième ordre, tangentes à une courbe donnée
d'ordre n, C„, et ayant en outre un point en commun avec
cette courbe.
3'"' SÉRIE, TOME XXXVI. 14
( 202 )
En particulier :
Par six points, on peut mener vingt-quatre courbea
gauches du quatrième ordre, Q, tangentes à une cubique
gauche et ayant de plus un point en commun avec cette
courbe.
Si, parmi les six points donnés, trois sont sur une droite
d, les courbes du quatrième ordre auxquelles donnent lieu
les ternes neutres de l'involution Ij" se décomposent en
la droite d et en des cubiques gauches. Par conséquent,
les théorèmes précédents se transforment de la façon
suivante :
Par trois points, on peut mener A f " ï *) cubiques gauches
tangentes à une courbe gauche d'ordre n, C„, et ayant avec
cette courbe un point commun.
Par trois points, on peut mener vingt-quatre cubiques
gauches tangentes à une cubique gauche donnée et ayant
un autre point commun avec cette courbe.
Enfin, si parmi les six points donnés, m d'entre eux
{m < 6, et m < '2n — 3) se trouvent sur la couche C„,
l'involution ir se transforme en une involution \l"~"'; et
les théorèmes précédents se modifient ainsi qu'il suit :
Par (6 — m) points de l'espace, on peut mener 4 ('"'™"^)
courbes gauches du quatrième ordre tangentes à une courbe
gauche C„ et ayant en commun avec cette courbe m -+- i
points dont m sont assignés à l'avance.
7. Si nous remarquons que les surfaces du second
ordre qui passent respectivement par cinq et quatre points
fixes de l'espace, marquent sur une courbe d'ordre n, C,„
les groupes de deux involutions I^" et Is% nous obtien-
drons les théorèmes suivants :
Par cinq points de l'espace, on peut mener (î (^"7^) courbes
( 203 )
gauches du quatrième ordre onculatrices à une courbe C„
et coupant cette courbe eu un point.
Par cinq points, on peut mener 4 (2n — 4 ) (^" ^ ') courbes
gauches du quatrième ordre tangentes à une courbe C^ et
coupant cette courbe en trois points.
Par cinq points, on peut mener 8 fV*) courbes gauches
du quatrième ordre, qui soient bitangentes à une courbe
d'ordre m.
Par quatre points, on peut mener 8 (^" ^ *) courbes gauches
du quatrième ordre surosculatrices à une courbe d'ordre n,
et rencontrant cette courbe en un point.
Par quatre points, on peut mener 6 (2n — 5) (*"r*)
courbes gauches du quatrième ordre osculalrices à une
courbe d'ordre n et coupant cette courbe en trois points.
Par quatre points, on peut mener 4fV*) C"r*) courbes
gauches du quatrième ordre tangentes à une courbe C„ et
rencontrant celte courbe en. cinq points.
Par quatre points, on peut mener 12 ('"2 *) courbes
gauches du quatrième ordre à la fois tangentes et oscula-
lrices à une courbe C„.
Par quatre points, on peut mener 48 (^'V *) (*"r'^) courbes
gauches du quatrième ordre bitangentes à une courbe C„ et
ayant deux points communs avec cette courbe.
8. En général, les surfaces du second ordre, passant par
9 — /.' points fixes, marquent sur une courbe C„ les groupes
d'une involution If; cette dernière possède des groupes
neutres de A: -+- p — 2 éléments contenant un élément
{k — p -+- 1)"'"' et 2;? — 5 éléments simples en nombre
fini (1); cette involution possède de même des groupes
de li *- p — 2 éléments neutres contenant deux éléments
multiples associés d'ordres a et b, el 2p — 4 éléments
( i204 )
simples en nombre déterminé (2), (a-^h = k — p-+2);
donc nous pouvons énoncer les deux théorèmes :
Par 9 — k points de l'espace, on peut mener
lin — k -^ \\ l^n — kX
^(*-"-"( „ )(„-J
courbes gauches du quotrihue ordre ayant un contact
d'ordre (k — p -+- 1) avec une courbe gauche donnée
d'ordre n, et rencontrant cette courbe en l2p — o points.
Par 9 — k points de l'espace, on peut mener
courbes gauches du quatrième ordre, ayant avec une
courbe C„ deux contacts d'ordres a et b, et rencontrant la
courbe en 2/) — A points.
Ces deux théorèmes sont vrais pour toutes valeurs de
k et n, pourvu que k soit moindre que 9 et que pour le
premier théorème p < A- -h i et pour le second p < k — 4.
( 205 )
CE.ASISK DES £.ETTRIi:iS.
Séance du /'' août 189S.
M. le l)ar<)n Em. de Borchgrave, doyen d'ancienneté,
occupe le fauteuil.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents: MM. S. Bormans, Ch. Piot, Cli. Potvin,
T.-J. Lamy, G. Tiberghien, L. Vanderkindere, le comte
Gohiet d'Alviella, Ad. Prins, J. Vuylsteke, A. Giron,
God. Kurtlf, H. Denis, Georges Monchamp, P. Thomas,
Ernest Discailles, membres; J.-C. Vollgraff, associé;
V. Brants, M. Wilmotle, H. Pirenne, Ern. Gossart et
Polydore De Paepe, correspondants.
— MM. Vander Haeghen, direcleur; P. Fredericq,
membre, et J. Leclercq, correspondant, motivent leur
absence.
CORRESPO NDANCE.
La Classe prend notilication otficielle :
1° D'une lettre de M'"" Banning annonçant la mort de
scMi mari, M. Emile Banning, membre titulaire, décédé
à Ixelles, le 15 juillet;
( 206 )
2° D'une lettre de M. Charles Rivier, pasteur à Genève,
annonçant la mort de son frère, M. Alphonse Rivier,
associé, décédé à Saint-Gilles lez-Bruxelles, le 21 du
même mois.
La Classe remercie M. le baron de Borchgrave, qui a
bien voulu se faire l'organe de ses sentiments aux funé-
railles de MlVl. Banning et Rivier.
Les discours prononcés par M. de Borchgrave, ainsi
qu'une note de M. Vander Haeghen, paraîtront dans le
BuUelin de la séance.
M. le Secrétaire peipétuel adressera une lettre de
condoléance aux familles des défunts.
— M. le Ministre de l'Intérieur envoie, pour la biblio-
thèque de l'Académie, un exemplaire des Documents
officiels de l'Institut colonial international : V" série, La
main-d'œuvre aux colonies, t. III ; 5* série. Le régime
foncier aux colonies, t. I*^' ; Compte rendu de la session
tenue à Berlin les 6 et 7 septembre 1897. — Remerciements.
— Hommages d'ouvrages :
Àdenet le Roi et son œuvre. Étude littéraire et linguis-
tique; par Arthur Bovy (présenté par M. Wilmotte, avec
une note qui ligure ci-après);
De vlaamsclie Urijgstaalkunde ; par Edouard Peeters. —
Remerciements.
KLECTION.
La Classe procède au remplacement de M. Banning
comme directeur pour 1899. M. A. Giron est élu.
( 207 )
Note de M. Vander Haeghen, directeur.
L'année 1898 a été fatale pour la Classe des lettres. A
peu de mois d'intervalle, elle a perdu trois de ses mem-
bres les plus distingués et le plus célèbre de ses membres
associés.
M. Emile Banning, décédé presque subitement le
12 juillet dernier, était une des personnalités les plus
hautes et les plus sympathiques, non seulement de la
diplomatie belge, mais de la politique internationale. Sa
carrière a été extraordinairement brillante; elle comp-
tera aussi parmi les plus utiles; elle fut tout entière
vouée à la cause de l'humanité, au service de notre
patrie.
Après avoir fait de solides études à l'Université de
Liège, sa ville natale, M. Emile Banning se rendit à
l'Université de Berlin. Il ne tarda pas à faire connaître
les observations que lui avait suggérées l'étude des
méthodes usitées dans le haut enseignement en Alle-
magne.
Revenu en Belgique, le jeune savant fut attaché pen-
dant quelque temps à la Bibliothèque royale. Mis, par
suite de ses fonctions, en relation avec M. Paul Devaux,
il devint le collaborateur de celui-ci et bientôt son ami.
Les qualités primesautières du jeune érudit ne pou-
vaient que gagner au contact du talent de Paul Devaux
et des hommes distingués formant l'entourage de cet
éminent homme d'Etat.
M. le Ministre Rogier, qui appréciait fort le haut
mérite de M. Banning, le choisit comme secrétaire en
( 208 )
arrivant au Ministère des Affaires Etrangères et, depuis
lors attaciié à ce Département, M. Banning rendit à la
diplomatie et à la politique belges les services les plus
signalés. Il tut notamment un des ouvriers de la première
heure de l'œuvre grandiose de la colonisation africaine,
à laquelle Sa Majesté le Roi a consacré les plus nobles
efforts; M. Banning, confident des projets de notre Sou-
verain, contribua puissamment à aplanir les difficultés
de toute nature que l'œuvre du Congo eut à traverser au
début; il prit une part active aux travaux de la Confé-
rence de 187() et publia, à l'issue de cette importante
étape de l'entreprise africaine, deux volumes de docu-
ments dont l'effet fut décisif. M. Banning apportait au
débat une série de révélations qui firent une impression
profonde; il indiquait les ressources sur lesquelles les
civilisateurs de l'Afrique étaient en droit de compter, le
bien à réaliser et mettait nettement au point des faits
qui jusque-là n'avaient fait que transparaître dans un
jour demi-mystérieux.
Le succès de M. Banning, comme orateur ou comme
écrivain, ne fut pas moindre lorsqu'il prit part, en des
occasions plus récentes, aux discussions soulevées par la
revision de notre pacte fondamental, par la question du
référendum royal, par celle de la réorganisation de l'ar-
mée, etc.
Toutes ces questions, dans l'esprit de l'éminent fonc-
tionnaire, se rattachaient étroitement au salut, à la pro-
spérité du pays belge. Il les envisageait, il en parlait avec
un loyalisme complet, une loyauté entière, exprimant
fortement des convictions rétléchies, éloquent surtout
lorsqu'il entreprenait de seconder les efforts tentés par
Sa Majesté le Roi en vue d'assurer à la Belgique plus
de sécurité et une prospérité plus étendue.
( 209 )
M. Banning n'étail pas le diplomate attaché tradition-
nellement à d'étroites formules et qu'une excessive pru-
dence confine dans l'inaction. Sachant maintenir les
progrès acquis, son libre esprit s'avançait courageuse-
ment dans le domaine des idées, ses convictions s'impri-
maient dans une langue claire, forte, très littéraire :
aussi ses travaux le désignaient-ils dès longtemps au
choix de l'Académie lorsqu'il fut, en 1889, élu corres-
pondant, et en 1892 membre de la Classe des lettres de
notre Compagnie.
L'œuvre de M. Banning redira longtemps les qualités
aimables de sa haute intelligence, en même temps que
la largeur de ses vues, la noblesse de ses préoccupations.
La vie de notre éminent et très regretté confrère a été
celle d'un homme de bien, celle d'un grand citoyen.
L'Académie, que son décès atteint douloureusement,
gardera de M. Banning un impérissable souvenir.
Discoura prononcé aux funéraUles d'Emile Banning; par
le baron Érnile de Borchgrave, membre de la Classe
des lettres.
Appelé, en qualité de doyen d'ancienneté, à remplacer
le Directeur de la Classe des lettres, empêché, je remplis
le triste devoir de rendre, au nom de l'Académie royale,
un hommage suprême, de dire un dernier adieu au con-
frère distingué qu'une mort imprévue nous a si brusque-
ment ravi, et d'adresser à la famille éplorée l'expression
de notre sincère et vive condoléance.
Une voix éloquente vient de retracer la carrière féconde
de M. Emile Banning. Je dois me borner à vous parler
( -210 )
de l'académicien, à rappeler les travaux qui lui ont valu
une brillante notoriété.
Neveu du poète Weustenraad, M. Banning eut de
bonne heure l'amour de la nature, le goût du beau, la
passion du travail, du travail solitaire qui développe
l'intelligence en creusant la pensée.
Dei)uis l'instant où, au seuil de la jeunesse, il conquit
une flatteuse distinction universitaire, ses facultés rares
lui permirent d'embrasser les sujets les plus variés.
Études de critique historique et littéraire, essais poé-
tiques, questions d'enseignement en Belgique et à l'étran-
ger, revues de politique intérieure et internationale, frag-
ments philosophiques, il traça de nouveaux sillons dans
le vaste champ ouvert à l'esprit humain.
Nommé membre de l'Académie, il y a quelques années,
il aimait à prendre une part active à nos délibérations.
Sa première lecture parmi nous fut consacrée à la glori-
fication de l'œuvre grandiose du Congo. Il donna, il y a
quelques jours à peine, une de ses dernières préoccupa-
tions à l'avenir du corps savant qui déplore sa perte.
Écrivain de race, épris de la forme, dédaigneux des
banalités, ses travaux ne sont pas éphémères. Fruits d'un
judicieux et patient labeur, les délicats aimeront à les
relire, tous y trouveront d'utiles leçons.
Philosophe dévoué aux idées modernes et chrétien con-
vaincu, il puisait dans ses idées hautement spiritualistes
des forces contre la souffrance physique qui le terrassait
et la ferme espérance de voir son àme, alfranchie des
luttes de la vie, rayonner, dans l'au delà, de sa beauté
immortelle.
Adieu, Banning, adieu !
( 2f< )
Discours prononcé auj- funérailles d'Alphonse Bivier; par
le baron Emile de Borchi,qave, membre de la Classe
des lettres.
Messieurs,
L'année 189cS est funeste à l'Académie.
Le nécrologe s'ouvre pour la septième fois. Nous
avons à y inscrire la mort inopinée du distingué et très
regretté M. Rivier. C'est en qualité de doyen d'ancien-
neté, remplaçant le Directeur de la Classe des lettres,
empêché, que je viens rendre un hommage suprême à sa
mémoire.
M. Alphonse Rivier fut élu associé de l'Académie en
1875. Né dans un pays ami, il avait fait de la Belgique
sa seconde patrie. M. Thonissen eut à cœur de signaler
le jeune savant qui déjà s'était fait connaître ailleurs et
acquis, par son enseignement et par ses publications
estimées, un précoce et légitime renom.
Ses connaissances variées et remarquables, son intel-
ligence ouverte et pratique, ses études des questions qui
préoccupent les esprits soucieux de l'avenir, le dési-
gnaient, tout autant que la suggestion de notre éminent
confrère, au choix de l'Académie.
M. Rivier occupa sa place avec honneur. Il prenait
une part assidue à nos séances. Il s'imposait, dans nos
délibérations, par ses vues précises et lumineuses. Dans
les discussions relatives aux concours, ses jugements
faisaient autorité.
Il nous révéla les travaux, ignorés, de compatriotes qui
ont brillé à l'étranger.
( 2i2 )
Sa compétence dans les questions de droit romain, de
droit international, d'économie sociale et politique, était
appréciée de tous.
Sa courtoisie captivait. Affable et gracieux, on n'enten-
dait jamais une parole désobligeante tomber de sa bouche.
Sa mort nous est une surprise cruelle. A voir sa vigueur
et sa souplesse physiques, nous nous flattions que de
longs jours lui étaient réservés. Illusion vaine!
Lié avec M. Rivier depuis trente ans, c'est avec un
douloureux serrement de cœur que je lui dis ce triste et
dernier adieu. Mais mon émotion se tempère par la certi-
tude que ce savant, ce confrère, cet homme de bien ne
sera pas oublié : il sera au milieu de nous par le souve-
nir de ses œuvres et de ses qualités, tout à la fois graves
et charmantes.
NOTE BIBLIOGRAPHIQUE.
J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de l'Académie
un exemplaire du travail de M. Arthur Bovy, intitulé :
AuENET LE Roi et son oeuvre, élude littéraire et linguis-
tique.
M. Bovy est un ancien élève de la section de philolo-
gie romane de l'Université de Liège. Sa thèse de docteur
est devenue un livre, qui a d'autant plus d'intérêt poin
nous qu'il est consacré à un écrivain belge, à l'auteur du
célèbre roman de Berte au grand pied et de ce Cléomadès
qu'édita un membre de l'Académie, M. Van Hasselt, et
qu'un autre membre de la Classe, M. Bormans, soumit à
une revision très attentive. On sait qu'un troisième col-
lègue, le regretté M. Scheler, a réédité Berte et publié
( 213 )
Bueves de Commarcins et les Enfances Ogier, c'est-à-dire
les ouvrages d'allure épique qu'on est d'accord pour attri-
buer à Adenet. La contribution de M. Bovy est donc la
dernière pierre d'un monument vraiment national ; à ce
titre déjà, nous nous serions fait un devoir de la signaler.
Mais cette contribution philologique mérite encore
d'attirer notre attention par la valeur de son contenu.
Elle est divisée en trois parties, dont l'une sert d'intro-
duction, tandis que la seconde est consacrée aux « pro-
cédés littéraires d'Adenet », c'est-à-dire à sa façon de
traiter ses sources, à son style et à sa versification; dans
la troisième partie, l'auteur étudie la langue du rimeur
brabançon.
Il y a là nombre d'observations originales, et si l'on
peut regretter fle-ci de-là que l'auteur n'ait pas usé plus
généreusement de la méthode comparative, il taut recon-
naître que, dans l'ensemble, son étude repose sur la con-
naissance directe des textes et démontre surabondamment
un esprit apte aux plus difficiles des besognes philolo-
giques. M. WlLMOTTE.
PROGRAMME DU CONCOURS POUR L'ANNÉE 1901.
PREMIERE QUESTION.
On demande une étude critique sur les Vies des saints
de l'époque carlovingienne (depuis Pépin le Bref jusqu'à
la fin du X" siècle).
L'auteur ne s'attachera qu'aux Vies présentant un
intérêt historique.
( ^^«4 )
DEUXIEME QUESTION.
On demande une étude sur les divers systèmes péni-
tentiaires modernes considérés au point de vue de la théorie
pénale et des résultats obtenus.
TROISIEME QUESTION.
On demande une étude, d'après les découvertes des der-
nières années, sur les croyances et les cultes de l'Ile de
Crète dans l'antiquité.
QUATRIÈME QUESTION.
Étudier l'organisation du travail dans une ville du
XV siècle.
CINQUIÈME QUESTION.
Faire l'histoire de l'assistance publique dans les cam-
pagnes en Belgique, depuis la Révolution française jusqu'à
nos jours.
La valeur des médailles présentées comme prix sera
de huit cents francs pour les trois premières questions et
de six cents francs pour les deux dernières.
Les mémoires seront écrits lisiblement et rédigés en
français, en flamand ou en latin. Ils seront adressés,
francs de port, avant le l'^' novembre 1900, à M. le
Secrétaire perpétuel, au Palais des Académies, à Bruxelles.
( 215 )
COIVDITIONS Réc:i>EIMRI%TAIRKS
COMMUIVES AUX COKCOVRS AI%!\UELS DE K.A Cl>ASSK.
L'Académie exige la plus grande exactitude dans les
citations; elle demande, à cet eflet, que les auteurs
indiquent les éditions et les pages des livres qu'ils citent.
Les auteurs ne mettront point leur nom à leur ouvrage;
ils y inscriront seulement une devise, qu'ils reprodui-
ront sur un billet cacheté renfermant leur nom et leur
adresse. Faute par eux de satisfaire à cette formalité, le
prix ne pourra leur être accordé. L'emploi d'un pseudo-
nyme exclut les auteurs du concours.
Les ouvrages remis après le terme prescrit, ou ceux
dont les auteurs se feront connaître, de quelque manière
que ce soit, seront exclus du concours.
L'Académie croit devoir rappeler aux concurrents que
les mémoires soumis à son jugement sont et restent
déposés dans ses archives. Toutefois, les auteurs peuvent
en faire prendre des copies, à leurs frais, en s'adressant,
à cet effet, au Secrétaire perpétuel.
PRIX PERPETUELS.
Prix de Stassart.
Notice sur un Relge célèbre.
(Huitième période : 1893-1898.)
La Classe proroge jusqu'au l*" février 1899 le délai
pour la remise des manuscrits en réponse à la huitième
période de ce concours, ofl'rant un prix de six cents francs
( 2^6)
à l'auteur de la meilleure notice, écrite en français, en
tlaniand ou en latin, consacrée à la vie et aux travaux
de Nicolas Cleynaerts, dit Clenardus, grammairien, orien-
taliste et voyageur, né à Diest en 1495, mort à Grenade
en 1542.
Les concurrents devront se conformer aux conditions
réglementaires ci-dessus des concours de la Classe.
Prix de Saint -Génois pour une question d'histoire
ou UE littérature en langue flamande.
(Quatrième période : 1898-1907.)
Conformément aux volontés du fondateur, la Classe
olfre, pour la quatrième période de ce concours, un prix
de mille francs à l'auteur du meilleur travail rédigé en
flamand, en réponse à la question suivante :
Faire l'histoire de la période calviniste à Gand (1576-
1584).
Le délai pour la remise des manuscrits expirera le
1" novembre 1907.
Les concurrents devront se conformer aux conditions
réglementaires des concours de l'Académie.
( 217 )
Prix Anton Bergmann.
[Seconde période : 1887-1897 (1)].
Le prix pour cette période est réservé à la meilleure
histoire, écrite en néerlandais, d'une ville ou d'une com-
mune appartenant à la province de Brabanl (l'arrondisse-
ment de Nivelles excepté), et comptant au moins
5,000 habitants.
Le prix à décerner est de trois mille francs.
Les livres imprimés sont admis au même titre que les
manuscrits; ceux-ci pourront être ou signés ou anonymes.
Dans ce dernier cas, l'auteur devra joindre à son travail
uji billet cacheté renfermant son nom et son adresse.
L'emploi d'un pseudonyme exclut l'auteur du concours.
Les œuvres historiques sont comprises dans les avan-
tages de la fondation, qu'elles aient pour auteurs des
étrangers ou des Belges, pourvu qu'elles soient écrites en
néerlandais et éditées en Belgique ou dans les Pays-Bas.
PROGBAMMA DER PRIJSKAMPEN
VOOR HET JAAR 1901.
EERSTE PRIJSVRAAG.
Men vraagl eene critische studie over de Vitae der
keiligen ail liel karolingisch lijdvak (van Pepijn den
Korte lot hel einde der X^ eeuw).
De schrijver zal alleen de Vilae, die een historisch
belang opleveren, te behandelen hebben.
(1) Par arrêté royal, cette période a été prorogée jusqu'au l*^"" fé-
vrier 1900.
S'"*" SÉRIE, TOME XXXVI. 15
( 218 )
TWEEDE PRIJSVRAAG.
}fen vraagt cène sludie over de verschillende gevange-
nisslelsels ail den nieuweren tijd, in hel liclil der straf-
rechtdijke Uieorie en der verkregen uilslagen beschouwd.
DERDE PRIJSVRAAG.
Men vraagl een onderzoek, naar aanleiding van de onl-
dekkingen der laatsle jaren, over de geloofsvornien en de
godMiemlen van hel oude eiland Krela.
VIERDE PRIJSVRAAG.
De inrichting van den arbeid besludeeren in eene slad
van de XV eeuw.
VIJFDE PRIJSVRAAG.
De geschiedenis schetsen van de openbare armenverzor-
ging op hel plalte land in België, van de Framche oniwen-
teling lot onze dagen.
De waarde der als prijs uitgeloofde gouden eerepen-
ningeii zal van «67?/ honderd frank zijn voor elke der
drie eerste prijsvragen, en van zes honderd frank voor de
tvvee laalste prijsvragen.
De ingezonden verhandelingen moeten leesbaar ge-
schreven, en mogen in Iiet Fransch, het Nederlandseh of
liet Latijn opgesteld zijn. Sfôôr V" November 1900
moeten zij aan den lieer Bestendigen Secrelaris, in het
Paleis der Acadeiniën le Brussel, vraclitvrij gezonden
worden.
( 219)
RBC;E.ElllEIVTSBKPAE.IIWCiElV
DIE VOOR DE Ï>RI.ISH.A1IIPEI« CiElllEEN ZMN.
De Académie eischt de grootste nauwkeurigheid in de
citaten; te dien einde verlangt zij van de schrijvers, dat
zij de uitgaven en de bladzijden der door hen aangehaaide
werken zullen aanduiden.
De schrijvers mogen op hun werk hunnen naam niet
vermelden ; zij zullen er alleen eene kenspreuk op plaat-
sen, die nioet herhaald worden op een verzegelden briel",
bevattende hunnen naam en hun adres. Indien zij aan
dezen eisch te kort komen, kan geen prijs hun worden
toegewezen.
Werken, die na den gestelden datum inkomen of waar-
van de schrijver, op welke manier ook, zich heeft laten
kennen, zullen uit den prijskamp gesloten worden.
De Académie herinnert aan de mededingers, dat de ver-
handelingen in haar archief berusten en blijven moeten
van het oogenblik af dat zij aan haar oordeel werden
onderworpen. Nochtans kunnen de schrijvers, op hunne
eigene kosten, afschriften van hunne ingezondene werken
laten maken ; daartoe moeten zij zich tôt den Bestendigen
Secretaris wenden.
BESTENDIGE PRIJSKAMPEN.
Prijs de Stassart.
Verhandeling over eenen reroemden Belg.
(Achtste tijdvak : 1893-1898.)
De Klas der Letteren verlengt tôt den 1''° Februari
1899, den termijn voor het inzenden derhandschriften in
antwoord op het achtste tijdvak van dezen prijskamp,
C ^220 )
eenen prijs van zes honderd frank uitloveiide voor den
schrijver der beste verhandeling, geschreven in bel
Franscb, het Nederlandsch of bet Latijn, en gewijd aan
bet leven en de werken van Nicolaus Cleynaerts, gezegd
Clenardus, spraakkunstenaar, orientalist en reiziger,
geboren te Diest in 1495, gestorven te Grenada in 1542.
De mededingers zullen de bovenstaande reglements-
bepalingen voor de prijskampen der Klas moeten in acht
nemen.
Prijs de Saint-Genois.
Nederlandsche verhandeling over geschiedenis
of letterkunde.
(Vierde tijdvak : 1898-1907.)
Liiidens den wil des sticbters, looft de Klas der Lette-
ren, voor bet vierde tijdvak van dezen prijskamp, eenen
prijs van duizend frank uit voor den scbrijver van bet
beste werk, gescbreven in bet Nederlandscb, als antwoord
op de volgende prijsvraag :
De geschiedenis schrijven van het Calvinistisch tijdvak
te Cent {1 576-1 584).
Voor 1"° November 1907 is de lermijn tôt bet
inzenden der verbandelingen verstreken.
De mededingers zullen de bovenstaande reglements-
bepalingen voor de prijskampen der Académie moeten in
acht nemen.
( 22< )
Prijs Anton Bergmann.
[Tweede tijdvak : 1887-1897 (1)].
Biiinen dit tijdvak is de prijs voorbehouden aan de
beste in het Nederlandsch geschrevene geschiedenis van
eene stad of gemeente behoorende tôt de provincie Bra-
bant (uitgezonderd het arrondissement Nijvel) en tellende
ten minste 5, (MX) inwoners.
De iiitgeloofde prijs is van drie duizend frank.
De drukwerken worden op gelijken voet als de hand-
schriften toegelaten ; deze laatste mogen den naam des
schrijvers vermelden of verzvvijgen. ïn dit laatste geval
moet de schrijver bij zijn handschrift een verzegelden
brief voegen, bevattende zijnen naani en de aanduiding
van zijne woonj)laats. Door het aannemen van een pseu-
doniem sluit de schrijver zichzelven iiit.
De historische gewrochten worden tôt den prijskamp
toegelaten onverschillig ofzij door Belgen of vreemdelin-
gen geschreven zijn, op voorwaarde dat zij in het Neder-
landsch opgesteld en in België of in Nederland uitgegeven
zijn.
(1) Bij koninkli.jk besluit is de termijn tôt inzenden der verhande-
lingen verstreken tôt 1»" Februari 1900.
( 222 )
€L.A!^Si: DES BEAUX-ARTS.
Séance du i août 1898.
M. J. RoBiE, vice-directeur, occupe le fauteuil.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents: MM. F.-A. Gevaert, Th. Radoux, Peler
Benoit, J. Demannez, P.-J. Clays, G. De Groot, Gustave
Biot, H. Hymans, Jos. Stallaert, Alex. Markelbach,
Max. Rooses, G. Huberti, A. Hennebicq, Éd. Van Even,
Alfred Cluysenaar, J.Winders, H. Maquet, J. Van Ysen-
dyck, membres; J.-B. Meunier et G. Hermans, correspon-
dants.
MM. Jules Pécher et Ém. Mathieu ont motivé leur
absence.
— Le Bureau adresse les félicitations de la Classe à
M. P. Benoit au sujet de sa nomination de directeur du
Conservatoire royal d'Anvers.
M. Benoit remercie ses confrères et tout particulière-
ment M. Gevaert, pour les précieux conseils qu'il lui a
donnés, dit-il, au sujet de l'organisation définitive du
Conservatoire d'Anvers. {Applaudissements.)
( 225 )
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'Agriculture et des Travaux publics
communique, afin d'avis, une Ouverture-fantaisie sur la
légende de Geneviève de Brabanl, par M. Martin Lunssens,
premier prix du grand concours de composition musicale
de 1895. — Renvoi à MM. Huberti, Mathieu, van Duyse
et Benoit.
COMITÉ SECRET.
La Classe se constitue en comité secret pour s'occuper
de (litîerents objets inscrits à son ordre du jour.
OUVRAGES PRESENTES.
Bambeke (Ch. Van). Gristailoïdes dans l'oocyte de Pltol-
cus phalangioïdes Fiiessï. Paris, 1898; extr. in-8" (24 p.).
Peetem (Edouard). De vlaamsche krijgstaalkunde. Ypres,
1898; in-8Mll6 p.).
de Jonylie {le vicomte B.). Un gros à l'etligie en pied de
Jean d'Arekel, prince-évêque de Liège (1364-1378). Bru-
xelles, 1898; extr. in-8° (4 p.).
Bovy (Arthur). Adenet le Koi et son œuvre. Étude litté-
raire et linguistique. Bruxelles, 1898; extr. in-S" (113 p.).
Lootensifih.). Recherches expérimentales sur la formatio n
(lu son dans les instruments à bouche de flûte. Paris, 1898 ;
extr. in-8'' (75 p.).
Institut colonial international. Documents officie Is :
V" série. La main-d'œuvre aux colonies, tome IIL 3™^ série .
Le régime foncier aux colonies, tontre I. — Compte rendu
de la session tenue à Berlin les 6 et 7 septembre 1897.
( 2-24 )
Congrès international de législation du travail, Bruxelles,
1897. La répression du travail en chambre. Kapport pré-
senté en réponse à la question IV; par Eug. Schwiedland.
Paris, 1897; in-8M98 p.).
— Die Entwickelung der deulschen Arbeiterschutzge-
setzgebung seit 1890; von Alfred Weber, Leipzig, 1897;
in-8° (50 p.).
— La législation sociale en Hongrie; par Joseph Szte-
réngi. Budapest, 1897; in-8° (58 p.).
— Rapports et compte rendu analytique des séances.
Bruxelles, 1898; in-8" (xxxv-741 p.).
KôUiker (A. von). Ueber die Entwicklung der Graaf'schen
Follikel. Wurzbourg, 1898; exlr. in-8'' (7 p.).
KiEL. Gesellsehaft fiïr Geschicfite. Zeitschrift, 27. Band.
Washington. Department of agriculture. Yearbook, 1897.
La Plata. Museo de La Plata. Revista, tomo VIII. 1898.
Annuaire statistique delà ville de Buenos-Ayres. Vll^année,
1897.
Paris. Observatoire. Rapport annuel pour l'année 1897;
par M. Loewy. 1898 ; in-4°.
LivERPooL. Literary and philosophical Society. Procee-
dings, 1895-96.
Martini {Tito). Intorno al calore che si sviluppa nel
bognare le polveri. Venise, 1898; extr. in-8'' (40 p.).
Rossi {Ad.). Osservazioni circa gli « appunti di un tec-
nico » sul coertîciente d'esercizio délie reti ferrovierie
Mediterranea ed Adriatica. Rome, 1898; (39 p.).
Naples. Zoologisclie Station. Zoologischer Jahresbericht,
1897.
Sars (G.-O.). An account of the Cruslacea of Norway,
vol. II, pars 9 and 10. Bergen, 1898; in-8».
Resgoll {Eugène de). Clef astronomique. Résultat de
recherches scientifiques. Odessa, 1898; in-l!2 (11 p., tig.).
Bucarest. Institut météorologique. Annales, tome XII,
1896. In 4".
BULLETIN
UE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
DES
Lettres et des Beaux-Arts de Belgique.
489 8. — N»' 9-10.
ci.Aj><»»i<: m:H ^^ciki^ci^»».
Séance du 15 octobre 1898.
iM. Éd. Dupont, directeur.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. W. Spring, vice-directeur ; le baron
Edm. de Selys Longchamps, G. Dewalque, Éd. Van
Beneden, C. Malaise, F. Folie, F. ÏMateau, Fr. Crépin,
J. De Tilly, Ch. Van Bambeke, G. Van der Mensbrugghe,
L. Henry, M. Mourlon, P. Mansion, P. De Heen, C. Le
Paige, J. Deruyts, Léon Fredericq, J.-B. Masius, J. Neu-
berg, A. Lancasler, membres; L. Errera et P. Francotte,
correspondants.
3™* SÉRIE, TOME XXXVI. 16
CORRESPONDANCE.
La Classe prend notification de la mort de M. James
Hall, directeur du Musée d'histoire naturelle d'Albany,
né à Ingham (Massachusetts, États-Unis) le 12 septem-
bre 1811, élu associé le 15 décembre 188(3 et décédé à
Albany le 7 août 1898.
— M. Dupont donne lecture du discours qu'il a pro-
noncé le 24 juillet dernier, comme directeur de la Classe,
à l'inauguration de la statue élevée à Malines à la mé-
moire de P.-J. Van Beneden. — Des remerciements sont
votés à M. Dupont dont le discours paraîtra au Bulletin.
— M. le Ministre de l'Intérieur et de l'Instruction
publique envoie, pour la bibliothèque de l'Académie, un
exemplaire des ouvrages suivants :
1° Étude de l'action des toxines et antitoxines sur la
nutrition générale ; par 0. Decroly;
2° La Cellule, tome XIV, 2« fascicule; tome XV,
1^' fascicule;
3° Le opère di Galileo Galilei, volume VII,
— Remerciements.
— M. le Ministre de la Guerre fait don d'un exem-
plaire de la Carte de la Belgique an '160,000", appropriée
à l'usage des cgclisles.
— Remerciements.
, — Hommage d'ouvrages :
1° Les Aiilliozoaires de la « Planklon- Expédition » ,• par
Edouard Van Beneden ;
( 227 )
2° Tous les êtres vivants ont-ils besoin d'oxygène libre?
Note additionnelle à /'•< optimum >; par L. Errera;
3" Résultats des campagnes scientifiques accomplies sur
son yacht, 12*' fascicule ; par Albert l^% prince de Monaco ;
40 Vcrgleichende Anatomie der Wirbelthiere, Band J; par
Ch. Gegenbaur, associé;
5" Les insectes des temps secondaires; par Fernand
Meunier (présenté par M. Malaise, avec une note qui
figure ci-après) ;
6" A. Sur le principe de l'énergie; B. Sur certains prin-
cipes de mécanique ; C. Les hypothèses cosmogoniques; par
Ern. Pasquier;
7° Le sommeil hibernal et les modifications des neu-
rones cérébraux ; par Louis Querton;
8° Utilisation du phlanite cambrien des environs d'Otti-
gnies par rhomme préhistorique ; par George Cumont;
9° Note sur un Némalode nouveau des [les Fidji; par
Gustave Gilson.
— Bemerciements.
— Travaux manuscrits à l'examen :
i° Sur les vitesses de réaction; par A. de Hemptinne
et A. Bekaert. — Commissaires : MM. Spring et De
Heen ;
2" Nouvelle exploration scientifique des grottes d'Engis,
d'Engihoul et des environs; par Ernest Doudou. — Com-
missaires : MM. Fraipont et Malaise;
0° Nouvelle lettre de M. Dauber, relative aux recherches
du b" Buchner sur les fermentations. — Commissaires :
MM. Jorissen et Gilkinet.
( 2"28 )
Inauguration de la statue de P.-J. Van Heneden, à Matines,
le 2i juillet 1898; discours de M. É. Duponl, directeur
de la Classe des sciences.
Nous sommes réunis pour une émouvante cérémonie, à
laquelle l'Académie tient à prendre part de cœur et
d'âme.
La ville de Malines, la cité où naquit P,-J. Van Bene-
den, vient d'ériger à son illustre concitoyen un monu-
ment qui perpétuera, aux yeux des générations, le
souvenir d'une de nos plus riches contributions à la
science. Mais cette fête n'est pas seulement patriotique et
ne peut se borner à glorifier un savant qui a servi son
pays par une œuvre de plus de soixante années. La por-
tée en est plus haute : elle veut dire que la Belgique,
comme la ville natale de notre confrère, comprend que la
science, par ses conquêtes sur la nature, est le plus beau
fleuron dont se couronne la civilisation, et que chaque
citoyen qui la fait progresser, a bien mérité de son époque
autant que de sa patrie.
Ces sentiments, dont nous sommes tous en ce moment
pénétrés, ne sont-ils pas partagés dans tous les pays où
la science est en honneur?
Quelle grande carrière que celle qui nous revient à
l'esprit avec une telle intensité d'éclat ! Quoi de plus
noble que de mettre de merveilleuses aptitudes au service
des questions que, dans le domaine de la nature, il nous
importe le plus de connaître.'' Nous nous trouvons ici
( 2-29 )
devant le problème de la vie, abordé dans tons les
groupes du règne animal et recevant de vives lumières au
cours d'une existence toute d'enthousiasme et de travail.
Les productions de la mer furent longtemps le champ
favori de son activité. Tandis qu'il en étudiait les groupes
qui nous frappent par leurs dimensions gigantesques et
que, vivantes et fossiles, il décrivait leurs espèces et leur
distribution sur le globe, il découvrait chez les plus
humbles de prodigieuses métamorphoses.
Et bientôt, son génie l'amenant à l'étude des parasites
internes, il en constate de plus étonnantes encore et des-
tinées à rester à jamais célèbres par leurs phases d'évolu-
tion qui ne peuvent s'accomplir que par des transmigra-
tions d'un groupe animal dans un autre.
Sa puissance d'observation, servie par l'intuition la
plus pénétrante, lui faisait en quelque sorte comman-
der à la nature. C'est qu'aussi il possédait, avec une force
de volonté h la hauteur de ses facultés, cette foi dans le
travail qui ne compte ni avec la fatigue ni avec les
années et qui l'avait rendu maître de tous les moyens
capables de féconder ses recherches.
Ses idées directrices, qu'il détaillait et détachait génia-
lement dans son enseignement et dans ses écrits, s'em-
paraient de l'être animal dans son ensemble.
Qu'il l'examine dans son organisation et dans son
développement, il le fait en anatomiste et en embryolo-
gisle consommé, et toujours avec un étonnant esprit
d'initiative. Qu'il le considère dans ses rapports avec les
autres êtres, dans ses affinités et ses adaptations, c'est
en classificaleur à la grande envergure, aux vues amples,
perspicaces, précises, que lui. donne sa connaissance
( 230 )
approfondie de toutes les parties du domaine zoologique.
Quand il suit l'animal dans son genre de vie et ses mul-
tiples appropriations à son milieu, il y apporte le tact le
plus lin du naturaliste et une lucide imagination guidée
par la pratique des constatations exactes. S'il l'aborde
enfin sous le côté de sa distribution dans le présent et
dans le passé, il n'épargne ni démarches ni recherches
pour la définir.
Considérez le vaste ensemble qu'il a embrassé : dans
chacune des questions qu'il a résolues se révèle la ten-
dance supérieure du célèbre zoologiste, celle qui donne à
ses travaux leur caractère dominant et le plus personnel.
Ce n'est pas tant sur les rapports généalogiques que
peuvent avoir eu les groupes animaux à travers le passé
géologique, ce n'est pas vers les relations de descendance
que sa pensée se porte. Son vigoureux esprit se concentre,
ses facultés se déploient sur l'évolution individuelle, sur
le développement de l'être spécilique, sur ses transfor-
mations dans toutes leurs complexités, de l'état embryon-
naire à la forme adulte et reproductrice. Sur ces questions
qui sont la base de nos connaissances zoologiques et
avant lesquelles toute étude de filiation eût été prématu-
rée, il est sans rival de génie et de fécondité. Souvent il
ouvre la voie, toujours il marque d'une large empreinte
le sujet qu'il y aborde.
Là se trouve sans conteste la trace indélébile qu'il
laissera dans la marche de la science.
Une renommée ainsi acquise s'élève au premier rang
et y demeure. Voilà ce qu'atteste ce monument et ce que
la cité de l'illustre savant, dans son admiration et sa
( 23( )
flerté, a voulu commémorer, à l'exemple de nos autres
villes, qui ont aussi tenu à honneur de perpétuer par le
bronze la mémoire de leurs concitoyens par qui ont été
enrichies les connaissances humaines.
NOTE BIBLIOGRAPHIQUE.
J'ai l'honneur d'offrir à l'Académie, de la part de
M. Fernand Meunier, Les insectes des temps secondaires,
grand in-8" de 64 pages, avec 50 planches représentant
des types d'insectes, minutieusement étudiés et photo-
graphiés par l'auteur.
C'est une revue critique des Hyménoptères, Hémiptères,
Orthoptères, Coléoptères et Névroplères des musées
paléontologiques de Munich et d'Augsbourg. 11 cite les
espèces et donne des détails sur leur état de conserva-
tion.
Sous le titre : Quelques mots de philosophie paléo-entomo-
logique, l'auteur entre dans des considérations phylogéné-
tiques sur les Arthropodes.
M. F. Meunier me paraît avoir examiné avec soin les
Arthropodes secondaires du Portlandien de la Bavière,
avoir employé très utilement le subside qui lui a été
octroyé, et être digne de nouveaux encouragements.
C. Malaise.
( 232 )
RAPPORTS.
La Classe ordonne le dépôt aux archives d'une com-
munication de M. Basile Boukteieff {Symbole de la vie et
de la créatiou), examinée par MM. Masius et Vanlair.
Sur les surfaces minima réglées et les surfaces minima
à lignes de courbure planes; par A. Demoulin.
« M. Demoulin a pris comme point de départ de son
étude cette remarque bien simple : « On peut déter-
miner, au moyen de quadratures, les surfaces minima
dont les lignes asymptoliques ou les lignes de courbure
sont représentées sur la sphère par un système ortho-
gonal et isotherme. »
Pour les surfaces gauches, les images sphériques des
asymptotiques sont des cercles, les plans de l'une des
familles passant par un même diamètre. Le cas d'un
diamètre non isotrope correspond à l'hélicoïde (théorème
de Catalan) ; pour un diamètre isotrope, l'auteur obtient
une surface imaginaire du troisième ordre dont le ds"^
avait été signalé par Ribaucour.
L'étude de la surface de Ribaucour est faite en détail ;
elle conduit aux équations de la cubique imaginaire dont
les deux courbures sont constantes. Cette courbe avait
( 235 )
été déterminée par M. Lyon, mais M. Demoulin montre
qu'elle dépend d'une constante unique.
Le problème de la déformation infiniment petite
amène l'auteur à la considération de surfaces qu'il
appelle quasi-moulures. Ces surfaces ont les lignes de
courbure planes, les plans des deux systèmes étant res-
pectivement parallèles et perpendiculaires à une droite
isotrope; elles comprennent, comme cas particulier, les
surfaces de révolution à axe isotrope, que M. Demoulin
avait déjà étudiées dans un précédent travail. Plusieurs
propriétés intéressantes de cette classe de surfaces se
trouvent signalées.
La deuxième partie du mémoire se rapporte à la déter-
mination des surfaces réglées, lieux des milieux des
cordes de deux courbes dont les tangentes sont parallèles
aux droites d'un cône de révolution. Le problème est
rattacbé aux questions précédentes à l'aide d'une trans-
formation homographique.
La dernière partie du travail a pour objet la recherche
des surfaces minima à lignes de courbure planes. Par
l'emploi de la représentation sphérique, l'auteur obtient
les surfaces réelles connues, la surface de Ribaucour et
ses associées, et enfin une surface imaginaire isolée.
Cette courte analyse sufiira, je l'espère, à montrer l'in-
térêt que présentent les recherches de M. Demoulin. J'ai
l'honneur de proposer à la Classe l'impression du travail
dans le recueil des Mémoires m-S". »
M. J. Neuberg, deuxième commissaire, se rallie aux
conclusions de son savant confrère.
( "^34 )
Hapitot'i il*' Vf. .fffai(s<o«i, It'oiitidtne rontntitanii'e .
(c Nous n'avons rien à ajouter à l'analyse si exacte du
mémoire de M. Demoulin faite par notre savant collègue,
M. Deruyts, premier commissaire. Mais il n'est peut-être
pas inutile d'appeler l'attention sur la méthode de
recherche et de démonstration employée par l'auteur.
Dans ce travail, le douzième ou le quinzième peut-être
où M. Demoulin aborde les parties les plus élevées de la
géométrie infinitésimale, il établit une foule de résultats
anciens ou nouveaux, avec un appareil analytique réduit
au minimum. C'est grâce à une connaissance approfondie
des travaux les plus modernes sur la théorie des surfaces,
grâce aussi à l'emploi de l'intuition géométrique, même
quand il étudie des surfaces imaginaires, qu'il peut éviter
des calculs qui semblent au premier abord inévitables. Il
a pu ainsi, dans le présent mémoire, étudier à fond la
surface minima dont Ribaucour avait donné les premières
propriétés dans un beau mémoire couronné par la Classe
des sciences, et compléter les recherches de M. Darboux
sur les surfaces minima dont les lignes de courbure sont
planes.
Je me rallie donc bien volontiers aux conclusions de
MM. Deruyts et Neuberg. »
— Ces conclusions sont adoptées par la Classe.
( 233 )
Recherches expérimentales sur la circulation sanguine chez
l'Anodonte (travail du Laboratoire de zoologie et d'ana-
tomie comparée de l'Université de Gand); par Victor
Willem et Achille Minne.
PSiipintft fie M. Ijéot» Fi'tftlei'icq, jn'einief coinittissati'B.
a MM. Willem et Minne ont étudié les phénomènes
mécaniques de la circulation du sang chez l'Anodonte,
en se servant principalement de la méthode graphique,
méthode qui, jusqu'à présent, n'avait guère été appliquée
aux recherches sur la circulation des animaux inver-
tébrés.
Les auteurs ont eu à surmonter des dilïicultés tech-
niques considérables, pour relier des organes aussi déli-
cats que le cœur et les vaisseaux de l'Anodonte, avec des
manomètres enregistreurs appropriés. Ils ont réussi à
obtenir de fort bons tracés des variations de pression du
sang. L'étude de ces tracés, combinée avec les résultats
des autres procédés d'investigation, leur a permis d'es-
quisser un tableau satisfaisant des mouvements du sang
dans l'appareil circulatoire des Mollusques lamelli-
branches.
Le très intéressant travail de MM. Willem et Minne
fait honneur au Laboratoire d'où il est sorti.
Je n'hésite pas à proposer à la Classe de décider l'in-
sertion du travail et des planches dans les Mémoires in-4°,
et d'adresser des remerciements aux auteurs. »
M. Plateau, second commissaire, déclare se rallier
entièrement aux conclusions de son savant confrère ;
celles-ci sont adoptées par la Classe.
( 236 )
Sur les dérivés du bromo-uUro-méthane HojC - Br (NOg) ;
par J. Maas.
Knppoft tle .n. ijUfiH Hfurff, pfentief connnia»ait'e.
Au cours de mes études sur les alcools nitrés, j'ai con-
fié à M. J. Maas la tâche, qui me paraissait devoir être
intéressante, d'examiner les rapports des aldéhydes ali-
phatiques avec le bromo-nitro-méthane H^jC - Br(N02)-
Ce dérivé, remarquable par sa composition, s'obtient,
comme on sait, sans difficulté sérieuse.
C'est le résultat de ses recherches sur cet objet que
M. Maas présente à l'Académie.
M. Maas a spécialement étudié l'action des aldéhydes
inférieures, le méthanal et l'éthanal, sur le bromo-nitro-
méthane.
Suivant la règle que j'ai formulée, la capacité de con-
densation aldéhydique du méthane bromo-nitré doit être
égale à deux seulement, celle du nitro-méthane lui-même,
H3C- NO2, étant égale à trois. En fait, il en est ainsi.
M. Maas a constaté encore que si la présence du brome
a diminué la capacité réactionnelle du nitro-méthane,
elle en a modifié également l'intensité. Alors qu'elle est
assez vive dans le nitro-méthane pour ne pouvoir s'exer-
cer vis-à-vis du méthanal qu'en une seule fois et d'une
manière complète, elle est assez déprimée dans le nitro-
méthane monobromé pour ne s'exercer que successive-
ment, en deux temps, d'une manière incomplète d'abord,
d'une manière totale ensuite. Il en résulte deux alcools
nitrés :
a) Vélhanol bromo-nitré 2-2 (H0)CH.2 - CH - Br(NOc>);
( 237 )
b) Le propanediol bromo-nitré 2-2 (H0)CH2-C-Br(N02)
- CH2(0H).
L'aptitude à la condensation est moins développée dans
l'éthanal H5C - CH = 0 que dans le méthanal CH^ = 0.
Aussi M. Maas n'est-il parvenu à en fixer qu'une seule
molécule sur le méthane bromo-nitré. Il se l'orme ainsi
de Valcool hopropijlique bromo-nitré 2-2 H5C-CH(0H)
-CH-Br(N02).
M. Maas fait connaître enfin les produits mixtes de la
condensation du bromo-nitro-méthane avec le méthanal
et l'éthanal simultanément, ou plutôt tout à la fois. Il
résulte de là un bulanediol l-o bromo-nitré 2-2 de la
formule
(H0)CH2 - CBr(NO„) - CH (OH) - CH3.
Selon M. Maas, ce composé, qui cristallise nettement
et fond à 94''-95°, est toujours identique à lui-même, quel
qu'en soit le mode de formation, qu'il résulte de l'addi-
tion de Véthanal à Yétimnol bromo-nitré
H5C-CH=0 + CH-Br(NO)
I
CHalOH)
ou de l'addition du méthanal au propanol 2 bromo-nitré
1-1
CH - Br(NO,)
CH(OH) + HX = 0.
I
CHj
L'ordre de substitution des radicaux X et X' à la place
des atomes d'hydrogène 7 et d- du méthane n'exerçant
( 238 )
y 0
aucune influence sur la nature du dérivé > C X X' qui
en est le produit, il s'ensuit que ces atomes d'hydrogène
sontfonctionnellenient équivalents et, par conséquent, que
les unités d'action chimique 5 et 4 de l'atome du carbone
sont identiques en valeur. M. Maas paraît ne pas avoir
aperçu cette conséquence de ses constatations expérimen-
tales; elle mérite sans doute que je la mette en lumière,
car j'y vois une confirmation, d'autant plus importante
qu'elle peut sembler inattendue, du travail auquel je me
suis livré autrefois (*) pour démontrer l'identité des qua-
tre unités d'action chimique de l'atome du carbone.
Les corps signalés par M. Maas sont intéressants au
point de vue physiologique. Tous se font remarquer, quoi-
que à des degrés divers, par leur action irritante, corro-
sive, sur la peau et les muqueuses. 11 en est certains dont
l'intensité de cette action, due évidemment à la coexis-
tence des radicaux Br, NOg et OH, rend le maniement
désagréable et dangereux.
Parmi ces composés, je dois relever particulièrement
le gli/col trimèfiuj Ionique bromo-niiré 2-2
I1,C-0H
, ^ NO,
HjC - on.
C'est un beau corps solide, fusible à lOG^-lOT", sus-
ceptible de former des cristaux de grande dimension,
bien conformés, translucides.
(*) Voir Bull, de VAcad. roy. de BeUjique, 3" sér., t. XII, p. 644
(année 1886); 3" série, t XV, p. 333 (année
( 239 )
On voit tout de suite, à rinspeclioii de la formule qui le
représente, combien te corps est voisin de la dioxij-acé-
tone et de la glycérine :
H2C-OH ll,C-OH
I I
CO HC - OH
I I
ILC-OH II.C-OH
J'ai déjà constaté ce rapprochement l'an dernier (*).
J'ai la conliance qu'il sera possible de transformer ce
glycol bromo-nitré en dioxy-acélone.
Ainsi sera réalisée la synthèse totale et directe de la
glycérine par la soudure, dans une réaction unique, des
trois atomes de carbone qui constituent la molécule de
celte combinaison si éminemment importante à tous les
points de vue.
L'analyse que je viens de faire du travail de M. Maas
suffit, quelque sommaire qu'elle soit, pour montrer l'in-
térêt que présente ce travail et l'importance même que
l'on y peut attacher au point de vue général.
C'est assez dire que je propose avec plaisir à l'Acadé-
mie de lui donner place dans son BuUelin. »
Cette proposition, à laquelle se rallie M. Spring, est
adoptée par la Classe.
(n Recueil des travaux chimiques des Pays-Bas et de la Belgique,
t. XVI, p. 250 (1897), et Bulletin de la Société chimique de Berlin,
t. XXX, p. 2206 (1897).
( 240 )
Sur la condensation de l'aldéhyde benzoïque el de la mono-
chloracélone; parJ. Gliysen.
itnp/'ot'l de .?#. IV, S^finy, iiretuiff cotnmiasait'^.
ce En traitant un mélange d'aldéhyde benzoïque et
d'acétone par l'acide chlorliydrique, Claisen et Claparède
ont obtenu, il y a quelques années, la dibenzylidène-acé-
tone
(CeH,.CIl),= (CH),-CO.
La formation de ce corps a démontré l'égale aptitude
à réagir des deux groupes CH,, de l'acétone. M. J. Ghysen
s'est proposé de déterminer dans quelle mesure cette
égalité est altérée quand l'un des groupes CH5 est devenu
CH2CI. L'expérience a prouvé que, dans ces conditions,
il ne se formait plus, pour ainsi dire, que de la monoben-
zylidène-acétone monochlorée; la présence du chlore
supprime à peu près l'aptitude du groupe CH^CI à se
condenser avec l'aldéhyde benzoïque.
J'ai l'honneur de proposer à la Classe l'insertion de la
note de M. Ghysen dans le Bulletin de la séance. »
M. Henry, second commissaire, approuve cette propo-
sition, qui est adoptée par la Classe.
Les tremblements de terre et les marées ;
par M. V, de Ziegler.
gtapitoi'l lie n. Folie, pi-eiitiet' coinntiasaire.
« Le nouveau travail de M. de Ziegler ne renferme
aucun fait ni aucune idée essentiellement nouvelle.
L'auteur y affirme que la terre ferme, comme l'Océan,
(241 )
est sujette à des marées plus ou moins intenses, suivant le
degré de rigidité des roches qui la composent, et que les
tremblements de terre, à l'exception de ceux qui sont le
résultat d'une action volcanique ou d'un effondrement,
proviennent des attractions luni-solaires.
Ce travail est intéressant à lire et pourrait paraître
avantageusement dans une revue scientifique.
Nous ne pensons pas qu'il puisse être publié par l'Aca-
démie. »
M. Van der Mensbrugghe, second commissaire, parta-
geant l'avis de M. Folie, la Classe décide le dépôt aux
archives de la note de M. de Ziegler.
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Sur divers nitriles-alcools penta- et hcxacarbones (*);
par Louis Henry, membre de l'Académie.
A. — Composés en C5.
Aux trois variétés sous lesquelles existe et les seules
sous lesquelles peut exister le pentane C5H12 :
Pentaric normal CH3 - CH^ - CH. - CH» - CH3;
— secondaire CHs^^u m rri
— terliaire CH3
CH3->C-CH,,
(*) Voir pour les analyses et les développements mon mémoire :
Sur les nitriles-alcools aliphatiques et leurs dérivée, inséré dans le.
tome LVIl des Mémoires in-S" de l'Académie.
3™* SÉRIE, TOME XXXVI. 17
( 212 )
correspondenl d'assez nombreux nitriies-alcools, àsavoifi
Quatre au pentane normal ;
Sept au penlane secondaire ;
Un au pentane tertiaire.
De ces douze composés que prévoit la théorie, trais
seulement ont été signalés jusqu'ici, mais peu étudiés.
Un quatrième, de la formule CN - CH-CH(OH) - CH3,
CH3
est représenté par son acétone CN - CH — CO-CH5,
CHô
produit de l'action de l'acétone méthyl-éthylique (3 mono-
chlorée CH^ - CHCl - CO - CH5 sur le cyanure de potas-
sium (*).
Dans l'étude des nitriies-alcools en C5 que j'ai entre-
prise, j'ai commencé par examiner ceux de ces corps
dont on a déjà parlé.
Dans une précédente communication, je me suis occupé
de l'un d'entre eux, la cyanhydrine isobutylidénique
ru'^ > CH - CH(OH) - CN, produit de l'addition de
^ CH-
l'acide cyanliydrique à l'aldéhyde isobutyrique ^u"* > CH
- CH = d n.
Je suis parvenu depuis lors à me procurer les deux
autres termes : la cyanhydrine butylidénique CN-CH(OH}
- CH2 - CH2 - CH3 et la cyanhydrine méthyl-élhyl-acéto-
CH
nique CN - C(OH) < p i| • J'en ai fait l'étude au même
point de vue que les autres composés de cette sorte.
(*) Vladesco, Bulletin de la Société chimique de Paru, t. VI,
p. 814 (i891).
(") Bulletin de VAcad. roy. de Belgique, 3« série, t. XXXVI, p. 85
1898).
( 245 )
Cyanfnjdrine hutylidénique normale
CN - CH(OH) - CH, - CH, - CH^.
On pourrait l'appeler aussi bien ni trilepropyl-gly colique.
Ce produit résulte de la fixation de l'acide cyanhy-
drique sur l'aldéhyde butyrique normale.
Cette synthèse a été réalisée dès 1883 (*) et 1884(**),
dans le but d'en transformer le produit en acide « oxy-
valérique OC (OH) - CH{OH) - CH2 - CH2 - CH5.
La seule indication qui constitue en ce moment le
signalement de ce corps est son état physique et son
insolubilité dans l'eau. Depuis cette époque, il n'a plus
été question de ce composé.
La cyanhydrine hutylidénique normale CN - CH(OH)
- CH2 - CH2 - CH5 constitue un liquide incolore, mobile,
d'une agréable odeur fraîche, d'une saveur piquante.
Sa densité à 24° est égale à 0.9367.
Elle est insoluble dans l'eau qu'elle surnage, mais elle
est soluble dans l'alcool, l'éther, etc.
On l'a soumise à l'action de la chaleur, la pression
étant 770 millimètres. Le thermomètre marque 145°
quand la distillation commence à s'effectuer, la boule
plongeant dans le liquide; la température s'élève jusqu'à
170°. Plongé dans la vapeur, le thermomètre monte
jusqu'à 192°, où tout passe.
Le pentachlorure de phosphore réagit intensément sur
(*j A.-G Menozzi, Gazette chimique italienne, t. XIV, p. 16.
(*■) WiLH. JusLLN, Bulletin de la Société chimique de Berlin, t. XVII,
p. 2505.
( 244- )
la cyanliydrine butylidéiiique. Il en résulte du nitrile
valérique normal a. chloré CN - CHCI - CHo - CHg - CH3.
Le rendement de l'opération est presque intégral.
Le nitrile a. chloro-valérique CN - CHCI - CH^ - CH2 - CH5
constitue un liquide mobile, incolore, d'une odeur
fraîche, d'une saveur douce et piquante.
Sa densité à 24» est égale à 0.9995.
Il est insoluble dans l'eau, mais soluble dans l'alcool
et l'éther.
Il bout, sous la pression de 764 millimètres, à 160°.
L'acide HCl concentré le dissout et le transforme,
sous l'action de la chaleur, en chlorure ammonique et en
acide a chloro-valérique CO (OH) - CHCI - CH^ - CHg - CH3,
que l'on peut extraire de sa solution aqueuse par l'éther.
Chauffé avec de l'acide sulfurique et de l'alcool méthy-
lique, il se transforme en chloro-valérate de méthyle
0C(0CH5) - CHCI - CH2 - CH2 - CH5, éb. 160% sous la
pression de 764 millimètres.
Distillée avec de ['anhydride phosphorique, au bain
d'huile, la cyanhydrine butylidénique perd les éléments
d'une molécule d'eau et se transforme en nitrile non
saturé, le nitrile propylidène-acétique CN - CH = CH - CH2
-CH5..., que l'on pourrait appeler aussi bien (3 éthijl-
acryliqiie ou y méthyl-crotonique .
Cette opération fournit un produit d'une grande
pureté, mais le rendement en est médiocrement avan-
tageux.
Le nitrile propylidène-acétique CN - CH = CH - CHg - CH3
est analogue en tous points à son homologue inférieur, le
nitrile crotonique CN - CH = CH - CH3.
C'est un liquide incolore, mobile, d'une odeur agréable,
pénétrante, comme celle du nitrile crotonique, d'une
saveur piquante.
( 245 )
Sa densité à 21" est égale à 0.8239.
Il est insoluble dans l'eau, mais soluble dans l'alcool
et l'éther.
Il bout, sous la pression de 702 millimètres, fixe à
I40 comme le nitrile valérique normal CN - CH^ = CH2
-CH2-CH5. Densité de vapeur trouvée, 2. 75 ; calculée, 2. 79.
C'est l'homologue immédiat du nitrile crolonique CN
-CH=CH-CH5, éb. llS^-lig". Aussi observe-t-on
entre leurs points d'ébullition la relation ordinaire d'en-
viron 20".
Le chlorure d'acétijle réagit fortement et dès la tempé-
rature ordinaire sur la cyanhydrine butylidénique. Il en
résulte l'acétate correspondant CN - CH (C.2H5O2) - CH^
- CHç, - CH5.
Cet acétate constitue un liquide incolore, mobile,
d'une odeur agréable, fraîche, d'une saveur étrange,
amère.
Sa densité à 24" est égale à 0.9696.
Il est insoluble dans l'eau, mais soluble dans l'alcool
et l'éther.
Il bout sans décomposition et d'une manière fi.\e à
194% sous la pression de 762 millimètres.
Son homologue supérieur, l'acétate de la cyanhydrine
propylidénique CN - CH (C2H3O2) - CH^ - CH3, bout à
485°-186° sous la pression ordinaire.
A l'instar de ses congénères, la cyanhydrine butylidé-
nique réagit aisément sur les bases amidées H^NX et
imidées. Le dérivé correspondant à la diméthylamine
CN-Cll-Cn, -CH..-CH5
I
bout à 17o°-176'' sous la pression ordinaire.
( 246 )
Nitrile méthyl-étliyl-giy colique
ou cyanhydrine méthyl-éthylique acétonique
CN-C(OH)<CH=_^^^
Ce corps est le produit de l'addition de l'acide cyan-
hydrique HCN à la célone méthyl-éthylique CH3 - CO - CH^
- CH3.
Quoique inconnu comme tel, ce composé est relative-
ment ancien : son existence remonte à 1880. Il a été
signalé par M. Bocking, élève au laboratoire de M. Wis-
licenus, à Wùrzbourg (*).
M. Bocking s'est borné à en déterminer la formation
à l'aide de ses générateurs, pour le transformer de suite,
sans l'isoler, en son acide, l'acide méthyl-élhyl-glycolique
PH
(HO)CO - C(OH) < pjj^ _ ^^ . Aussi ne donne-t-il aucune
indication concernant sa composition ni ses propriétés,
Lenitrile gly colique méthyl-éthy lé Œ - C(OH) < ^.„^ pu
est en tous points analogue à la cyanhydrine acétonique
CN - C(OH) < pu^ , son homologue supérieur.
C'est un liquide incolore ou faiblement jaunâtre,
mobile, d'une odeur agréable, légèrement prussique,
d'une saveur piquante et amère.
Sa densité à 24° est égale à 0.9212.
L'eau le dissout; le carbonate bipotassique l'en sépare
(*) Liebig's Annalen tlcr Chemie, t. CCIV, p. 18.
( 247 )
sous forme d'huile surnageante. Il est également soluble
dans l'alcool, l'éther, l'acétone, etc.
Soumis à l'action de la chaleur, la pression atmo-
sphérique étant de 762 millimètres, il commence à bouillir
à 90°; le thermomètre, plongé dans la vapeur, s'élève
graduellement, pour rester fixe à 480% où la presque
totalité du liquide a passé.
La densité de la vapeur de ce nitrile-alcool a été
déterminée dans l'appareil de Hoffmann.
On a trouvé, à 130", dans la vapeur de l'alcool amy-
lique, 2.84; la densité calculée est 3.42, ce qui corres-
pond à une dissociation de 33.9 °/o (*)•
Le chlorure d'acélyle ne réagit que faiblement sur le
nitrile glycolique mélhyl-éthylique. Il s'y dissout d'abord ;
en chauffant légèrement le mélange dans l'eau tiède, de
l'acide chlorhydrique se dégage et il se forme l'acétate
que l'on obtient aisément à l'état de pureté par la distil-
lation.
\J acétate nitrilo-giycolique méthyl-éthylique
CN-C(C,H,0,)<^H=_^^^
constitue un liquide incolore, mobile, d'une agréable
odeur fraîche, d'une saveur piquante.
(*) 11 est assez remarquable que le nitrile dimétliyl-glycolique
GN-C(0H)-(GH3)2, quoique plus simple de composition, se dissocie
plus aisément que son iiomologue supérieur. A 130", sa densité de
vapeur, déterminée dans l'appareil de Hoffmann, est 2.13, ce qui
correspond à une dissociation de 54.8 •/o ; à ISS", dans la vapeur
d'aniline, cette densité s'est abaissée à 2.05, ce qui correspond à une
dissociation de 60.3 «/o.
La dissociation des nitriles d'ordre aldcfiydiqne et d'ordre acéto-
nique est une question qui mérite d'être étudiée en particulier.
( 248 )
Sa densité à 24° est égale à 0.9629.
Il est insoluble dans l'eau qu'il surnage, soluble dans
l'alcool et l'éther.
il bout à 195° sous la pression de 764 millimètres.
Le nitrile glycolique méthyl-éthylique se dissout dans
l'acide chlorhydrique concentré en s'échauffant laible-
ment. Le liquide, après avoir été chauffé pendant quelque
temps, abandonne par le refroidissement une belle cris-
tallisation de chlorure ammonique; il reste en dissolution
de Vacide hydroxy-vaUrique p u^> C(OH) - CO(OH) que
l'on peut extraire par l'éther.
Au contact de Vanhydride phosphorique P^Og, le nitrile
glycolique méthyl-éthylique s'échauffe fortement. Il est
bon de refroidir et de n'introduire l'anhydride phospho-
rique dans l'alcool que successivement et par petites
portions. Soumise à la distillation au bain d'huile, la
masse fournit, sans se charbonner, un liquide incolore,
insoluble dans l'eau, odorant comme les nilriles non
saturés en général.
Ce liquide ne présente pas à la distillation la même
fixité dans le point d'ébullition que le produit qui pro-
Tient de la déshydratation d'une cyanhydrine acétonique
CH
symétrique telle que CN - C(OH) < ^.jt^. Il est probable
que la déshydratation qui se fait, selon toute analogie,
OH
surtout aux dépens du système - C < pji _ çri^ , se fait en
même temps pour une certaine proportion aux dépens du
système - L < pjj_.
Quoi qu'il en soit, on parvient, sans de trop grandes
( 249 )
diÛicultés, à retirer de ce produit brut le nitrile a méthyl-
crotonique CN - C = CH - CH5 .
CH3
Celui-ci constitue un liquide incolore, mobile, d'une
agréable odeur, d'une saveur amère et piquante;
Il est insoluble dans l'eau, soluble dans l'alcool et
l'éther.
Sa densité à 24° est égale à 0.8143.
Il bout sous la pression de 767 millimètres à 124''-125''.
Densité de vapeur trouvée, 2.75; calculée, 2.79.
Ce composé jouit du pouvoir additionnel, notamment
vis-à-vis du brome.
Le pentaclilorure de phosphore PCI5 attaque vivement
la cyanhydrine méthyl-éthylique acétonique. Après la
destruction par l'eau de l'oxychlorure de phosphore
formé, l'éther extrait du liquide acide un produit qui,
après l'expulsion de ce dissolvant, se présente sous
forme d'un liquide exhalant fortement l'odeur des
nitriles non saturés. Distillé sur de la potasse caustique
en poudre, ce produit, mélange d'au moins deux corps,
se transforme presque intégralement en nitrile a méthyl-
crotonique
CN-C=iCH-CH3, éb. 124''-h2o\
I
CHs
que je viens de décrire, en le rattachant à l'action
de P2O5.
Cette cyanhydrine ne réagit que faiblement avec les
( 250 )
irases amidées et imidées. Il est nécessaire de chauffer.
Son dérivé avec la di-raéthylamine
^^^ V CH, - CH5
N(CH3),
bout à 174° sous la pression de 762 millimètres.
Avec le nitrile acrylique (3 himéthylé CN - GH = C < r-o^
correspondant à la cyanhydrine isohutylidénique CN -
PH
CH{OH) - CH < pjj^, que j'ai décrit précédemment (*),
les deux nitriles non saturés en C^ que je viens de faire
connaître, complètent la série des dérivés méthylés du
nitrile cr otonique.
CN-CH = CH-CHs.
CN-CH-CH-CH, Éb. 118"
a p r.
CN-C = CH-CH5 124»-lâ5»
a CH,
CN-C = C-CH3 140"-142»
P CH,
CN-C(I = CH-CH, -CH3 140»
(•) Bull, de l'Acad. roij. de Belgique, S^ série, t. XXXVI, p. 35 (1898).
( 251 )
A cette série correspond celle des dérivés saturés de
même ordre :
CN - CHj - C\U - CH3
Eb.
H8»
a p r.
CN - GH - CH3 - CH,
1
425<
a CH3
CN - CH, - CH - CH,
1
129«
p eu.
CN - CHj - CH, - CH,
1
140'
r CH5
On aperçoit ainsi, d'une manière évidente :
a. La différence qui existe entre les nitriles saturés et
non saturés quant à l'intluence exercée sur la volatilité
par la méUiylisalion ;
b. La relation qui existe entre la volatilité et le voisi-
nage plus ou moins immédiat du composant - CN et du
substituant CH3.
Un nitrile, alcool secondaire, en C5, est représenté par
son acétone, la cyanacétone a mélhylée
CN-CH-CO-CH3 Éb I56«,
CH,
produit de l'acétone méthyl-éthylique monochlorée secon-
( 252 )
daire CH3 - CHCl - CO - CH^ sur le cyanure de potas-
sium KCN (*).
Il est à penser que l'hydrogénation de ce composé,
dans des conditions convenables, fournira l'alcool cor-
respondant
Ci\-CH-CH(0H)-CH5,
I
le dérivé a mélliylé de l'alcool cyano-propylique secon-
daire CN - CH2 - CH(OH) - CH- que j'ai décrit précédem-
ment (**).
B. — Composés en Cg.
L'hexane CgHii est représenté par cinq variétés iso-
mères auxquelles correspondent huit nitriles simples
X5H11 - CN et dix-sept alcools monohydroxylés CqE[^
- OH. On devine que le nombre des nitriles-alcools hexa-
carbonés CgHiolOH) - CN est plus considérable encore :
la théorie en prévoit l'existence de trente et un. Je n'ai
pas besoin de dire que l'on est bien loin de les connaître.
Dans une précédente communication (***), je me suis
occupé de l'un d'entre eux, la cijanlujdrine amijlidénique
CN - CH(OH) - CH.2 - CH < ^{j^.
Depuis lors, je suis parvenu à m'en procurer deux
autres dont j'ai fait l'examen.
(*) Démètre Vi.adesco, Bulletin de la Société chimique de Paris,
3« série, l. VI, p. 814 (année 1891).
(**) Bull, de VAead. roy.de Belgique, 3* série, t. XXXV, p. 173 (1898).
C")Bull. de l'Acad. rotj.deBelgiqm, 3e série, t. XXXVI, p. 28 (1898).
( 253 )
Cyanhydrine diéthyl-acétonique ou nitrile diéthy[-gly colique
CN-C(OH) — (CH,-CH5^,.
La cyanhydrine diéthyl-acétonique a été préparée pour
la première fois par MM. Tiemann et Friedlànder (*).
Elle résulte de l'addition de l'acide cyanhydrique à la
diéthyl-acétone C^U^^ - CO - CH3.
C'est un liquide d'aspect plus ou moins huileux, fai-
hlement jaunâtre, d'une agréahle odeur, d'une saveur
piquante.
Sa densité à 22° est égale à 0.9326.
Elle est insoluble dans l'eau; l'alcool, l'éther, l'acé-
tone, etc., la dissolvent aisément.
Tout en se dissociant en partie sous l'action de la
chaleur, elle manifeste une notable stabilité, eu égard à
sa constitution. La boule du thermomètre étant plongée
dans le liquide, elle commence à distiller vers 130"; celle-
ci plongée dans la vapeur, la distillation s'est opérée en
presque totalité à 184°.
Le chlorure d'acélyk la transforme en son acétate
CN - C (C2H3OC2) < r^u\ liquide insoluble dans l'eau,
densité à 22° égale à 0.9612, bouillant à 212° sous la
pression de 762 millimètres.
Distillée avec de l'anhydride phosphorique, elle se
(*) Bulletin de la Société chimique de Berlin, t. XIV, p. 1974 (1881).
( 254 )
déshydrate et se transforme en nitrile « éthyl-crotonique
CN-C = CH-CH3,
I
C2H5
liquide, incolore, insoluble dans l'eau, d'une odeur
agréable, densité à 22° égale à 0.8343, bouillant à 143°-
145° sous la pression ordinaire.
Le pentachlorure de phosphore PCI5 l'attaque vivement.
Le produit immédiat de cette action devrait être le dérivé
C Ho
chlorhydrique CN - CCI < p^i/, mais celui-ci manque
de stabilité et perd de l'acide chlorhydrique. Ce produit
brut, distillé sur de la potasse caustique sèche, pulvéru-
lente, se transforme en nitrile a éthyl-crotonique, iden-
tique à celui qui provient de l'action de l'anhydride
phosphorique.
Cette cyanhydrine ne réagit que faiblement avec les
bases amidées et imidées. Il est nécessaire de chauffer au
bain d'eau. Le dérivé correspondant à la diméthylamine
CN - C < JJ'î!''
N(CH3)*
bout à 176"-! 77'' sous la pression de 764 millimètres.
Le nitrile diéthyl-glycolique se dissout dans l'acide
HCl concentré. Cette solution, chauffée au bain d'eau,
abandonne par le refroidissement des cristaux de chlor-
hydrate ammonique. Vacide diélhyl-gli/ colique formé
(HO)OC - C(OH) - (C2H5)2 reste en dissolution. On peut
l'extraire par l'éther.
( 255 )
Cyanhydrine méthyl-isopropy ligne acétonique
ou nitrile méthyl-isopr opyl-gly colique
CN-C(0H)<^J!^/CH8.
Cette cyanhydrine résulte de la fixation de l'acide
cyanhydrique sur l'aldéhyde méthyl-isopropylique CH5
- CO - CH < ^_ (*).
Elle constitue un liquide quelque peu épais, faiblement
jaunâtre, d'une agréable odeur, d'une saveur très
piquante.
Elle est insoluble dans l'eau qu'elle surnage, soluble
dans l'alcool et l'éther.
Sa densité à 18° est égale à 0.9249.
Elle subit, comme ses congénères, sous l'action de la
chaleur, le phénomène de la dissociation. Soumise à la
distillation, sous la pression de 764 millimètres, elle
commence à laisser passer du liquide à 145*', la boule du
(*) Cette cyanhydrine, qui n'a pas été signalée jusqu'ici, a été
préparée, à ma demande, par la maison Kahlbaum, de Berlin.
Je tenais à la posséder à cause de sa composition. Renfermant le
système CN- C(OH)< ^jj^ , elle devait me permettre d'arriver au
système CN - C = C < sans hydrogène, renfermé dans le nitrile
acrylique triméthylé
CN-C = C<^y5.
CH3
Les autres cyanhydrines d'ordre uldéhydiqiie et d'ordre acétonique
que j'ai mises en réaction m'ont été également fournies parla maison
Kahlbaum. Il m'est agréable de constater que tous ces produits
étaient d'une pureté irréprochable.
( 256 )
thermomètre étant plongée dans le produit lui-même. A
182", le thermomètre plongé dans la vapeur, les trois
quarts environ du liquide passent.
Cette cyanhydrine réagit d'une manière très nette avec
le pentachlorure de phosphore. Le dérivé chlorhydrique
qui en résulte immédiatement,
CN-CCl CH-ICH,),,
I
perd déjà de l'acide HCl dans les conditions de sa forma-
tion. Distillé avec de la potasse caustique en poudre, il
perd tout son chlore sous forme de HCl et se transforme
en nitrile acrylique triméthylé
CHs
Celui-ci constitue un beau liquide incolore, mobile,
d'une agréable odeur, d'une saveur très piquante et très
amère. Il est insoluble dans l'eau qu'il surnage.
Sa densité à 18° est égale à 0.8447.
Il bout sous la pression de 760 millimètres à 155°-i57°.
Densité de vapeur trouvée, 3.29 ; calculée, 3.28.
Ce point d'ébullition est celui que lui assigne l'analogie :
CN-CH=CH2 Eb. 78"
CN - c = CHj QO'-ga»
CN-CH=C<^[]^ Éb. 140"- 142°
CN-C = C<p|l' IbS^-lS?»
I '-'"3
CH,
+ 1 2" à U"
i5«
( 287 )
Le nitrile saturé correspondant au nitrile triméthyl-
acrylique est encore inconnu. Je regrette de ne pas avoir
été à même de l'appeler à l'existence.
Il est intéressant de rapprocher les trois dérivés
méthylés du nitrile acrylique.
CN Éb. 78» CN Éb. 906-92O ON Éh. 425" CN ÉIj. iSo"
Il II
CH C-CH3 C-CHj C-CH3
Il II II II
CH, CH2 CH G
CH5 CH3 CHs
Diff. : 12» à 44» Diff. : 85» Diff. : 30»
Ce nitrile en Cg peut être rattaché d'une manière très
directe au nitrile crotonique CN - CH = CH - CH3 ; c'est le
nitrile crotonique biméthylé a et (3, d'où la série
suivante :
CN H8°-H0° CN Éb. 125° CN Éb. 155»
I I I
CH C - CH3 C - CH3
II II II
CH CH C-CH3
I I i
CH3 CHs CH3
Diff.: 7" Diff.: 50°
On aperçoit ici d'une manière évidente la relation qui
existe entre la volatilité et le rapprochement plus ou
moins immédiat des composants - CN et CH5, celui-ci
substitué à l'hydrogène.
SÉRIE, TOME XXXVI. ^ 18
;me
( 258 )
Le dérivé trimélhylé correspond à Véthylène tétra-
méthylé
CHj Éh. 75° CN Éb. 155»
C-CHj C-CH,
C-CH3
C-CH;
CHs
CH3
Diff.
: 82°
La transformation de l'éthylène triméthylé en nitrile
correspondant s'accompagne d'une élévation dans la tem-
pérature d'ébullition beaucoup plus considérable:
CH3 Eb.
1
57°
GN Eb.
1
140"- 142»
CH
II
C - CHs
1
CH
II
C-CH3
1
CH5
CH5
Diff.:
103"-
1050
L'action de V anhydride pfwsphorique sur la cyanbydrine
méthyl-isopropylique est aisée, mais moins nette dans
son résultat et moins avantageuse quant au rendement.
Le résultat de la distillation constitue un liquide incolore,
fort mobile, très odorant. Soumis à la distillation, il ne
fournit guère que la moitié de son volume de nitrile tri-
méthyl-acrylique
CN -C = C-(CIl5)j,
I
CHj
bouillant à 155°.
( 259 )
Le chlorure d'acélyle CH5 - COCl ne réagit que faible-
ment sur cette cyanhydrine ; il faut chauffer. Vacétate
CN-C(C2H30,]<JÎÎ! .CH3
qui en résulte constitue un liquide quelque peu huileux,
incolore, d'une odeur agréable, d'une saveur étrange. Ce
corps est insoluble dans l'eau, soluble dans l'alcool et
l'élher. Sa densité à 18" est égale à 0.9750. Il bout sous
la pression de 704 millimètres à 212°.
L'aptitude réactionnelle de ce nitrile-alcool vis-à-vis
des bases amidées et imidées est notablement diminuée.
Pour en déterminer la réaction avec la diméthylamine
en solution aqueuse de 35 "/o, il faut chauffer en vase clos,
au bain d'eau. Il en résulte la base nitrilée
V^CH-(CIl3).,
N(CH
liquide insoluble et plus léger que l'eau, à odeur cam-
phrée, bouillant à 176''-177", sous la pression ordinaire.
La cyanhydrine méthyl-isopropyl-acétonique se dissout
dans l'acide HCl concentré. Chauffée, cette solution aban-
donne, quand on la refroidit, des cristaux de cWorliydrate
ammonique; il reste en dissolution de Vacide méthyl-
isopropyl-glij colique (HO)OC - C(OH) < ç^^. içu \ ^"<^
l'on peut extraire par l'éther.
Le nitrile acrylique CN - CH = CH2 est le plus simple
des nitriles non saturés. Le remplacement des atomes
d'hydrogène par des radicaux C„Hj„^.,.permet d'y rattacher
un grand nombre de nitriles non saturés de la formule
( 260 )
générale C„Hj„_,-CJN, qui peuvent recevoir des noms
rationnels par l'expression de cette substitution. Les plus
simples parmi ces nitriles sont ceux qui résultent de la
substitution du radical méthyle CH3 à l'hydrogène.
La série des dérivés méthyliques du nitrile acrylique est
à présent complète. En voici les divers termes :
Nitrile acrylique CN - CH = CH2, éb. 78°.
a. Dérivés monométhyliques :
a CN Éb. QO^-QS» p CN Éb. 118»
I I
C - CH3 CH
II n
CHî CH
I
CH,
b. Dérivés ôtméthyliques
a et (3 CN Éb. 125" pp CN Eb. 140M42»
C - CH3 CH
Il II
CH C
CH, CH. CH3
c. Dérivés ^nméthyliques
CN Eb. ISb'-lS?»
I
C-CH3
11
C
CH. CH.
D'une manière générale, la méthylisation du nitrile
acrylique en élève le point d'ébullition.
( 26i )
Cette diminution dans la volatilité est fort diverse
suivant la position du radical ou des radicaux - CH3
substituants vis-à-vis du groupement CN : elle est à son
minimum dans le système NC - C - CH3 qui résulte de
II
cette substitution.
La substitution triméthylique élève le point d'ébul-
lition du nitrile primitif de 77° à 79° :
CN-CH = CH, Eb. 78» \
77° à 79°
/IKfio. |P<7o /
CH,
CN-C = C<ptJ^ 1550 157»
C'est précisément la somme des élévations dans les
points d'ébullition déterminées par ces substitutions
considérées isolément :
CN-
CN-
- CH = CH,
- C = CH,
CH3
Eb. 78»
90»-92»
\ iS'-U*
CN-
CN-
CH = CH,
-CH = C-
!
CH5
Éb 78°
H8»
\ 40°
CN
-CH=C<
CH3
. nu
U0»-142»
^ 22»-24°
1 2° à 1 4° + 40° + 22» à 24» " 74° à 78°.
La méthijlisation du nitrile propiqnique pour produire
les nitriles saturés correspondants a aussi pour résultat
;^ 262 )
une diminution de volatilité, mais elle a une autre valeur
que celle qui s'exerce dans le nitrile acrylique.
CN - CHa - CH5
Eb.
980
CN - CH - CH3
1
loyo-ios"
CH,
Cx\ - CHj - CHj - CH,
118»
CN-CH-CH2-CH5
I
125»
CH5
CN-CH,-CH<^[J'
1-29"
IJll^Le dérivé triméthi/lé
CN-CH-CH<J[Î'
CH,
correspondant au nitrile triméthyl-acrylique
CN-ç = c<^|î;
CH,
est encore inconnu.
Il m'est agréable de constater, avant de terminer ce
travail, toute la part qui revient à mon zélé préparateur,
M. Aug. De Wael, dans l'élaboration de sa partie expé-
rimentale.
( 263
Note sur l'aurore boréale du 9 septembre 1898, observée à
Grammont et à Louvain; par F. Terby, membre de
l'Académie.
M, Désiré, préfet des études du collège Saint-Joseph,
à Grammont, a bien voulu me transmettre l'observation
qu'il a faite de ce phénomène, à Grammont, avec une
dizaine de ses collègues :
ce Vers 8 Y^ heures, écrit-il, en plein ouest, s'élève à
» l'horizon un nuage presque blanc, que nous croyions
» être la fumée d'un vaste incendie ; mais cette prétendue
» fumée s'éleva à une hauteur immense en colonne rela-
» tivement étroite, disparaissant tout à coup pour se
» reformer et s'évanouir subitement. De dix en dix
» minutes à peu près, le même phénomène se présenta,
» mais à une certaine distance vers le sud de l'endroit
•>•> de la première apparition, et se reproduisant d'étape
» en étape, marchant, dans son origine, toujours vers le
» sud, pour arriver enfin, vers 9 heures à 9 1/4 heures, à
)) l'est; là, pour finir, s'élancèrent de derrière un ban-
)) deau noir deux longues colonnes, s'élevant dans le
)) ciel et de même couleur, dans ce sens :
( 264 )
J'ai observé moi-même les diverses phases de ce phé-
nomène à Louvain : vers 8 1/2 heures du soir, mon atten-
tion fut attirée par la blancheur extraordinaire qui régnait
dans tout le ciel septentrional ; bientôt l'apparition de
rayons ne me laissa aucun doute sur la présence de l'au-
rore boréale; ces rayons étaient relativement faibles
d'éclat et manifestaient aussi avec grande évidence le
phénomène de déplacement vers l'ouest signalé par
M. Désiré. Pour décrire leur aspect, je répéterai textuel-
lement ce que je disais en donnant les détails de l'aurore
boréale du 2 octobre 1882 (1) :
« Ces rayons apparaissent successivement de l'est à
» l'ouest, par le nord, c'est-à-dire que de nouveaux
» rayons surgissent toujours à la gauche, ou à l'ouest de
)) ceux qui les précèdent; ce phénomène appelle ainsi
» l'idée d'une draperie dans laquelle se seraient formés
» de proche en proche, de l'est à l'ouest, des plis verti-
» eaux. L'extinction des rayons et leur apparition sont
)) d'ailleurs si graduelles et si insensibles qu'elles font
)) songer aux vues fondantes de nos appareils de projec-
V tion. »
Comme je l'ai remarqué précédemment aussi, la lueur
rose a toujours suivi l'apparition des rayons et s'est mani-
festée comme si elle résultait d'une espèce de diffusion
ou de modification de ceux-ci ; cette fois, d'ailleurs, cette
lueur caractéristique est restée très faible; c'est au nord-
est et à l'est-nord-est seulement qu'elle a pris momenta-
nément un éclat relativement marqué.
Quant au déplacement des rayons ou de leur lieu
(1) Bull, de l'AcacL roij. de Belgique, 3« série, tome IV, nos 9-10,
1882.
( 265 )
d'origine de l'est à l'ouest, par le nord, je rappellerai que
j'ai constaté le même lait pendant l'aurore du 3 avril 1870,
pendant la première partie de celle du 23 octobre 1870,
puis pendant les aurores des 49 novembre 1870, 9 avril
1871, 13 janvier 1874, 2 octobre 1882, 17 novem-
bre 1882.
J'ai constaté un déplacement contraire, c'est-à-dire de
l'ouest à l'est, par le nord, pendant l'aurore du 23 sep-
tembre 1870, pendant la seconde partie de l'aurore du
23 octobre 1870; le 9 novembre 1871 ; le 4 lévrier
1872, pendant le phénomène de ce genre le plus splen-
dide et le plus complet que j'aie observé, attendu qu'à
cette date j'ai eu l'occasion d'admirer la formation d'une
coupole ou couronne boréale parfaite, à laquelle aboutis-
saient des rayons partis de tous les points de l'horizon,
sans en excepter l'horizon sud, qui était surmonté d'un
arc brillant, comme l'horizon nord; enfin le 7 jan-
vier 1873 (1).
A 10'' 20"', l'arc blanc de l'aurore boréale se voyait
encore parfaitement à l'horizon septentrional, mais toute
apparence du phénomène s'éteignit bientôt après.
Je puis allirmer que la veille ou l'avant-veille de ce
phénomène, il y a eu encore des apparences d'aurore
boréale; j'ai pour ma part remarqué parfaitement, vers
10 heures, le 7 ou le 8 septembre, un nuage blanc et
brillant au nord-est, à faible hauteur; et l'on m'assurait,
dans mon voisinage, que le 9 était la troisième soirée
consécutive pendant laquelle on avait remarqué des
manifestations de ce genre dans le ciel.
(1) Voir /or. cil.
( 266 )
La coïncidence de ces apparitions avec la présence
d'une énorme lâche solaire, visible à l'œil nu, a été
signalée déjà trop souvent dans le cas actuel, pour que
j'insiste sur ce point.
Sur la cause de l'absence de coloration de certaines eaux
limpides naturelles ; par W. Spring, membre de l'Aca-
démie.
Il est aujourd'hui reconnu, à suftisance de preuve, que
l'eau pure n'est pas incolore mais bleue. Cela étant, la
couleur d'azur de l'Océan et de certains lacs n'a plus
rien que de très naturel, alors même que le mécanisme
de la réflexion de la lumière du Jour, au sein des eaux,
n'est pas encore connu d'une manière satisfaisante.
L'apparition de la couleur verte dans d'autres eaux lim-
pides trouve, à son tour, une explication simple, ainsi que
je l'ai fait voir à la suite de nombreuses recherches (1),
dans la présence d'un trouble dans l'eau, trouble doué de
la propriété de laisser passer plus facilement les rayons
jaunâtres. Si ce trouble était suspendu dans un liquide
absolument incolore, le milieu nous paraîtrait jaunâtre
ou brun jaunâtre, selon l'épaisseur du trouble; mais l'eau
étant bleue et non incolore, la couleur du trouble se com-
posera, pour notre œil, avec la couleur fondamentale de
l'eau et nous percevrons la sensation du vert; la nuance en
(1) Bull, de VAcad. roij. de Belgique, 3« série, t. V, p. 35, 1883;
t. XII, p. 814, 1886; t. XXXIV, p. 578, 1897.
( 267 )
sera plus ou moins pure, selon les cas. La matière consti-
tuant le trouble pourra être incolore par elle-même,
mais le plus souvent elle sera colorée, ainsi que je l'ai
dit dans un article récent (1) sur le rôle des composés
ferriques et des matières humiques dans le phénomène
de la coloration des eaux.
Si l'on s'en tenait aux faits qui viennent d'être rap-
pelés, il Amdrait nécessairement que toute eau naturelle,
limpide, fût ou bleue, ou verte, dès qu'elle se présente-
rait en masse suffisante, c'est-à-dire en couche d'environ
un mètre d'étendue, et cela sans que la profondeur doive
être notable ; on le voit bien dans nombre de rivières et
même de ruisseaux.
L'observation nous apprend cependant que cette con-
clusion est très souvent en défaut : il y a des eaux lim-
pides qui sont absolument incolores. Je citerai surtout
l'eau de l'Amblève, de l'Ourthe, dans les parties de leurs
cours où ces rivières ne sont pas souillées par l'industrie.
Probablement en serait-il de même de l'eau de toutes
nos rivières et de nos ruisseaux belges, si elle n'était pas
contrainte d'aider les industriels dans leur travail.
Plus généralement, on peut dire que les cours d'eau
dont l'origine n'est pas dans la région des neiges perpé-
tuelles et des glaciers n'ont qu'exceptionnellement une
couleur bleue; souvent ils ont une teinte verte, mais plus
souvent encore ils sont incolores ou d'un aspect plus ou
moins sombre dans leurs parties profondes. C'est cette
absence de couleur ou, si Ton préfère, la discontinuité du
phénomène de coloration qui fait la grande difficulté du
(1) Loc. cit., 1897.
( 268 )
problème qui nous occupe. Berzelius a déjà appelé l'at-
tention sur ce point lorsqu'il a rendu compte, en 1828(1),
d'un travail que H. Davy avait fait sur la question de la
couleur de l'eau, travail dans lequel le célèbre chimiste
anglais démontrait, pour la première fois, que l'eau pure
est bleue. Les remarques de Berzelius sont si frappantes
qu'il y a tout lieu de les reproduire in extenso.
Je traduis textuellement :
c( Sans vouloir contester la justesse de cette explication
» (celle de Davy), je ne puis me déclarer convaincu de
» son exactitude, car s'il en était ainsi (si l'eau était
» bleue), il devrait y avoir quelque chose en état de lui
» enlever sa couleur. On sait que le lac de Wettern, en
» Suède, a une couleur plus claire que celle que l'on
» observe d'ordinaire dans d'autres lacs. Sur les rives
» très escarpées, au pied de l'Omberg, le fond du lac est
» formé de bandes de roches calcaires dénudées. Quand
)) l'eau est calme et que le soleil donne, on peut encore
» distinguer des objets, sur le fond, à 52 pieds de pro-
» fondeur, sans que l'œil ne découvre le moindre vestige
» de bleu : tout est clair et incolore, comme si on regar-
)) dait à travers un verre de cristal. A cette profondeur, la
» couleur bleue du lac de Genève aurait absorbé toute
)) la lumière, et combien l'eau de la Motala ne diffère-t-elle
» pas, à sa sortie du lac de Wettern, de l'eau du Rhône
» où celui-ci s'échappe du lac de Genève! Les petits lacs
)) de Dalarna, que traverse la rivière Fahlu, se distin-
)) guent par la pureté de leurs eaux qui ne sont troublées
» par aucun réactif, et cependant ces eaux ne montrent
■d) Jahresberichl fur Chcmie, etc., t. IX, p. ^207 (édité en 1830).
( ^^69 )
)) pas non plus, quand on les regarde en niasse, la
» moindre pointe de bleu ou de vert. Il reste donc tou-
» jours à répondre à la question de savoir pourquoi
» l'eau pure des glaciers est si fortement bleue déjà à
» 2 pieds de profondeur, tandis qu'il existe d'autres eaux
» pures n'ayant aucune couleur, même en masse pro-
•>•> fonde. ))
J'ai tenu à m'assurer si l'aspect du lac de Wettern
répond encore aujourd'hui aux observations de Berzelius.
Je dois à l'obligeance de M. le professeur 0. Pettersson,
de Stockholm, les renseignements suivants, qui éma-
nent de personnes connaissant bien ce lac : « D'après
)) M. L. Olin, avocat, qui est originaire d'une des îles du
5) lac, l'eau est claire comme du cristal, « knjstalldar »,
» au point qu'il n'est pas possible de définir sa couleur.
)) Ce jugement se base sur le fait que par un temps
» calme on distingue nettement de petits objets à de
)) grandes profondeurs. M. Olin a plongé souvent, aussi
» profondément que possible, et il a vu chaque fois les
)) objets placés au-dessus de la surface de l'eau, avec leur
» couleur naturelle. Quand le ciel est nuageux, la surface
» de l'eau est grise; au soleil, elle est bleue ou verte. »
D'autre part, M. Lindberg, qui a navigué sur le lac pen-
dant de nombreuses années en sa qualité de capitaine d'un
bateau à vapeur, a fourni les mêmes renseignements sur
la clarté de l'eau, surtout pour la partie nord du lac, près
de sa décharge dans la Motala. Mais l'eau n'est claire et
transparente que là où le fond est de sable ou de pierre.
Il dit que l'on peut compter alors les cailloux à une pro-
fondeur de 12 à 14 pieds et il ajoute qu'il est parfois
impossible de voir à travers l'eau du lac, même quand
le soleil donne, et cela aux places où l'eau est, à d'autres
( 270 )
moments, complètement transparente. M. Lindberg attri-
bue la cause de ce phénomène aux courants qui se pro-
duisent quelquefois dans les couches profondes.
Enfin, M. Witt, assistant de M. 0. Pettersson, a con-
staté, à l'occasion de sondages entrepris dans le lac de
Wettern, que la transparence n'est pas toujours la même
et que la couleur change par places, surtout avec l'inten-
sité de l'éclairage.
En résumé, si l'observation de Berzelius n'est pas
con trouvée, il n'en est pas moins vrai que l'absence de
coloration du lac n'est pas constante. On doit donc en
chercher la cause dans l'action variable d'un facteur
étranger à l'eau.
L'objet de la présente note est de répondre à la ques-
tion de Berzelius, tout en tenant compte des variations
d'aspect que les eaux peuvent présenter.
On le verra, la solution du problème est d'une simpli-
cité étonnante ; elle s'adapte entièrement à l'explication
que j'ai donnée de l'apparition de la couleur verte dans
certaines eaux, car elle n'est qu'une conséquence néces-
saire de la présence d'un trouble réel d'espèce détermi-
née. Elle peut donc être regardée comme la confirmation
des considérations que j'ai fait valoir sur le problème de
la couleur des eaux.
Voici le fait nouveau et ses relations avec les observa-
tions antérieures.
J'ai montré, il y a un an (1), l'influence de VInjdrate
ferrique colloïdal sur la couleur de l'eau ; il suflit que
celle-ci en renferme moins d'un dix-millionième de son
(1) Bull, de l'Acad. roij. de Belgique, 3^ série, t. XXXIV, p. 578,
1897.
( 27'l )
poids pour paraître ver le ; une proportion plus forte de
composé ferrique la rend de plus en plus jaune. Si les
eaux de la nature qui renferment cependant une plus
grande quantité de fer, ne sont pastoulesyaM^esou brunes^'
c'est que les composés ne sont pas à Vétat ferrique : ils
sont continuellement ramenés à Vétat ferreux, dont le
pouvoir colorant est négligeable relativement à celui des
composés ferriques, par l'action combinée des matières
humiques et de la lumière solaire.
Plus récemment (1), j'ai fait voir, à l'occasion de
recherches sur les matières colorantes des terrains de
sédiment et sur l'origine probable des roches rouges,
que l'hydrate ferrique qui a échappé à l'action réductrice
des matières humiques perdait lentement son eau d'hy-
dratation au sein des sédiments et, passant alors de la
couleur jaune d'ocre au rouge vineux, il colorait les
roches et les terrains en rouge, comme si ceux-ci avaient
été saupoudrés de matière colorante.
Or si l'on fait macérer, à chaud, une roche rouge (du
schiste dévonien, par exemple) dans une solution con-
centrée de potasse caustique que l'on renouvelle de temps
en temps, on arrive, au bout de quelques semaines, à
enlever l'acide silicique de la roche et à ne plus avoir
qu'une boue formée de sable plus ou moins fin, auquel
se trouvent mêlées des particules d'oxyde ferrique (héma-
tite) rouge orangé, d'une ténuité extrême.
En lavant la masse à l'eau pure, par décantations répé-
tées, il arrive un moment où la matière colorante rouge
ne se dépose plus, môme après un repos durant plusieurs
(1) Loc. cit., 3e série, t. XXXV, p. 521, 1898.
( 272 )
mois. On a alors, à l'état concentré, un milieu trouble
formé de particules solides d'un rouge orangé et de
dimensions si petites qu'il est difticile de les distinguer
à l'aide d'un microscope grossissant cent cinquante fois.
Ces particules si ténues ne sont sans doute autre chose
que les poussières de l'époque dévonienne rendues à
l'indépendance. En évaporant 10 centimètres cubes de
ce liquide trouble dans une capsule en platine, j'ai
obtenu un résidu pesant Oî?',0125 ; chaque goutte contient
donc approximativement six centièmes de milligramme
d'oxyde ferrique, en comptant vingt gouttes par centi-
mètre cube.
Eh bien, si l'on mêle à de l'eau pure, bleue, quelques
gouttes seulement de ce liquide trouble, la clarté de l'eau
n'en paraît pas atteinte; mais si l'on examine ensuite le
liquide sous grande épaisseur (dans un tube de 6 mètres),
on constate, dans le cas oîi la proportion du trouble est
convenable, la disparition complète de toute coideur bleue;
le liquide, toujours d'apparence limpide, se montre tout
au plus, sous cette épaisseur, un peu assombri.
Au lieu de ce trouble ainsi préparé, on peut se servir
aussi de celui qui se forme lorsque l'on traite la carnallite
par l'eau et que l'on élimine le sel dissous à la suite d'un
lavage par décantations successives.
La préparation est plus commode, mais le trouble est
ici moins persistant, parce que l'oxyde ferrique se prend
aisément en flocons et qu'il est bien moins ténu que celui
des roches dévoniennes.
Si la proportion de trouble d'oxyde ferrique est trop
faible, l'eau conserve une teinte d'un vert jaunâtre, rappe-
lant tout à fait certaines eaux naturelles, par exemple
celles de la Meuse en amont de la région industrielle du
( 273 }
pays. ïl suffît toutefois de quantités exlraordinairement
faibles d'hématite pour supprimer le bleu de l'eau.
Si la proportion de trouble est au contraire trop forte,
l'eau se montre de plus en plus sombre, jusqu'à devenir
opaque (dans le tube de 6 mètres), mais elle ne devient
pas rouge par transparence; le rouge n'apparaît que par
la réflexion de la lumière, c'est-à-dire lorsque l'on
regarde un tube débarrassé de sa gaine opaque, en pla-
çant l'œil de manière que le rayon visuel rase la surface
du tube.
Enfin, voici une observation qui est peut-être de nature
à fournir quelques renseignements sur la manière optique
d'agir des troubles en général.
Pour supprimer la couleur bleue de l'eau, il n'est natu-
rellement pas nécessaire de mêler la matière troublante
au liquide : il suffît que la lumière passant par l'axe du
tube de 6 mètres soit réfléchie sur un plan enduit de
poudre fine d'hématite. Le fait paraît clair; néanmoins,
il faut prendre une précaution spéciale, qui renferme
précisément le point que je désire mettre en évidence.
Si l'on dépose sur un plan de porcelaine blanche le
liquide trouble rouge en quantité telle que la partie de la
surface utilisée pour la réflexion de la lumière ne ren-
ferme pas plus d'hématite que l'eau pure n'en doit rece-
voir pour éteindre le bleu, et qu'on laisse sécher, on
obtient une surface rosée, qui ne renvoie cependant pas
assez de lumière rouge pour supprimer la couleur bleue
de l'eau. Ce résultat incomplet démontre donc qu'une
réflexion unique à la surface du trouble ne suffît pas pour
éteindre le bleu, alors que l'effet est cependant complet
quand les grains du trouble sont en suspension dans l'eau.
Pour réussir, il faut, de toute nécessité, déposer sur le
3"'* SÉRIE, TOME XXXVI. 19
( 274 )
plan de porcelaine une couche beaucoup plus épaisse
d'hématite broyée.
On doit conclure de là que si, dans la nature, la lumière
du jour se réfléchissait seulement une fois sur la surface
des grains du trouble, l'extinction de la couleur bleue
nécessiterait un trouble intense au point d'altérei', d'une
manière très visible, la transparence de l'eau. Au con-
traire, si la lumière traverse le trouble à la suite d'un
grand nombre de réflexions sur les grains d'hématite,
l'extinction du bleu pourra être complète alors que l'eau
ne renfermerait que de rares particules rouges.
Cette remarque répond à une objection que M. R.
Abegg a faite à ma manière de voir sur le rôle des trou-
bles dans le phénomène de la génération de la couleur
verte dans les eaux des lacs et des mers (1), quand il dit
que la lumière perçue par l'observateur ne traverse pas
le trouble, mais qu'au contraire elle est réfléchie par
celui-ci, et qu'on doit regarder tout le chemin parcouru
par un rayon lumineux dans l'eau comme tracé dans
un milieu exempt de particules réfléchissantes.
Conclusions.
Il résulte des faits précédents que la couleur bleue de
l'eau trouve son complément dans la couleur de l'hématite.
Une eau tenant en suspension des particules, même
invisibles, de cette substance, ne peut donc plus nous
donner la sensation du bleu sitôt que la proportion des
particules d'iiématite est en rapport avec l'intensité du
bleu.
(1) Naturwissenschaflliche Rundschau, t. XIII, u» 14, p. 169, 1898.
( 275 )
Les grains microscopiques d'hématite se trouvant
répandus dans presque tous les sols, les eaux terrestres ne
pourront que rarement être des eaux bleues, quel que
soit d'ailleurs leur degré de pureté ou de limpidité appa-
rente. Au contraire, les neiges des hautes cimes et les
glaciers ne renferment pas d'hématite. Les poussières
cosmiques dont on a signalé parfois la présence dans les
champs de neiges perpétuelles, sont pour la plupart des
grains de fer météorique doués d'autres propriétés optiques
que l'hématite et ne pouvant entrer en ligne de compte
ici. Les eaux descendant des glaciers et des neiges des
cimes élevées sont donc dans les meilleures conditions
pour étaler leur couleur avec le moins d'altération.
Le rôle des composés ferriques dans le phénomène de
la coloration des eaux est tout différent selon que ces
composés sont à l'état ûliydrate ou à l'état d'oxyde
anhydre. A l'état d'hydrate, ils sont jaunes, comme toutes
les combinaisons de FcoO^ avec une proportion sulFisante
d'une combinaison oxygénée non chromogène (1). Répan-
dus en minime proportion dans l'eau, ils ont à lutter avec
les matières humiques, ou, plus généralement, avec les
matières organiques de l'eau, mais aussi longtemps qu'ils
n'ont pas succombé dans la lutte, ils font virer la couleur
bleue de l'eau au vert, au moins pour notre œil. Quand,
au contraire, les composés ferriques sont à l'état anhydre,
ils ont une nuance rouge-orange qui compense exacte-
ment le bleu de l'eau et ils ne sont plus soumis au travail
réducteur des matières organiques. Leur présence se
trahit par la suppression de la couleur bleue de l'eau.
(1) Voir mon travail sur les matières colorantes des terrains de
sédiment, loc. cit.
( 276 )
Un mot encore.
Si les observations que je viens de faire connaître ne
prouvent pas directement la présence de particules d'héma-
tite dans les eaux incolores de la nature, elles établissent
néanmoins un parallélisme si étroit entre les expériences
du laboratoire et les faits de la nature, que je ne puis me
défendre de regarder comme fondée la réponse qu'elles
apportent à la question déjà posée par Berzelius au sujet
des eaux incolores de la Suède.
Liège, Institut de chimie générale, octobre 1898.
Fondements de la théorie de la variation des latitudes ;
par F. Folie, membre de l'Académie.
La théorie du mouvement de rotation de l'écorce ter-
restre, que nous avons publiée récemment (*), révèle,
pour l'axe d'inertie de celle-ci, deux nutations d'un
caractère diurne ; la première est la nutation eulérienne
proprement dite; sa période, qui dépend surtout des
moments d'inertie du noyau, est de 504 jours pour
la Terre solide, ou pour notre ellipsoïde fictif, et elle
est la même pour l'écorce ; la période de la seconde
dépend des moments d'inertie de l'écorce, et ne peut
donc être déterminée que par l'observation. Nous avons
admis qu'elle est celle que Chandler a découverte, mais
à laquelle nous n'avons pas cru pendant longtemps, vu le
manque d'une explication théorique tant soit peu satis-
faisante. Indépendamment de la nutation eulérienne et
(*) Théorie du mouvement de rotation de l'écorce terrestre. Bruxelles,
Hayez, 1898.
( 277 )
de la nutation chandlérieiine, il existe, pour l'écorce, une
troisième nutation, de caractère non diurne, qui vient
donc s'ajouter aux termes de la nutation bradléenne.
Cette nutation a la même période que la chandlérienne ;
son coefficient, comme celui des deux autres, du reste,
est une constante arbitraire.
ïl va de soi que la nutation eulérienne et la chandlé-
rienne, à raison de leur caractère diurne, s'éliminent
toutes deux dans l'expression de la somme des déclinai-
sons (ou des ascensions droites) et, par suite, dans celle
de la différence des latitudes prises à douze heures d'in-
tervalle, tandis que la nutation bradléenne, et, par con-
séquent, le nouveau terme théorique que nous avons
trouvé, ne s'y éliminent pas.
Quoique l'existence de la nutation chandlérienne, abso-
lument inexplicable pour une Terre solide, soit un crité-
rium certain de la fluidité de la Terre en dessous de son
écorce, il nous a paru très intéressant de le renforcer
encore, en établissant l'existence du nouveau terme brad-
léen, qui ne peut absolument pas se rencontrer dans la
théorie du mouvement de rotation d'une Terre solide.
Si les formules de nutation étaient correctes, ce terme
serait fort aisé à découvrir dans la différence des lati-
tudes, ou dans la somme des ascensions droites, prises à
douze heures d'intervalle.
Celles-ci, en effet, ne pourraient renfermer que les cor-
rections des termes bradléens, de ceux de l'aberration et
de ceux de la nutation diurne. Et c'est ainsi que nous
avons pu le mieux déterminer cette dernière (*).
(*) Revision des constantes de l'astronomie stellaire. Bruxelles,
Hayez, 1896.
( 278 )
Nous sommes fondé à croire, toutefois, qu'il y a éga-
lement une correction à apporter aux termes dépendant
de la simple longitude du Soleil, que cette correction
provienne, soit d'une erreur sur la constante de l'aber-
ration, soit d'une erreur sur celles des termes solaires,
soit enfin de l'existence, pour l'axe de l'écorce, d'une
nouvelle nutation solaire.
Aussi, au lieu d'appliquer aux différences D des lati-
tudes, observées à douze beures d'intervalle, la simple
formule
4- sin ^/ -4- ij cos p« -+- c -+- D = 0,
dans laquelle l'argument (3f a une période de 431 jours,
avons-nous cru nécessaire d'employer la formule
oc sin o -♦- y cos © -<- C- sin pt -^ )j cos 8< -+- z -+- D = 0.
En l'appliquant aux 252 différences observées par
Pelers à Poulkovo, de 1842 à 1844, et en groupant entre
elles les observations voisines, nous avons formé le
tableau suivant, dans lequel tous les nombres, à l'excep-
tion des poids p, ont été multipliés par 100 :
p
s
c
a
X
u
11'
s
- 7.8
-99
-62
78
- 0"2
- 3..9
26
46
75.5
- 23.5
96
12.2
-71
42
93
40.5
39
89.5
32.4
10.4
41
76
-62
92
25 5
- 4.5
-11.5
14
6.5
-99.5
90.5
40.5
- 46
- 1.4
20
-47
-86
64.5
64
- 6.3
.5.1
10
-20.5
85
-93.5
-25 "
- 52
- 5.3
33
39
90
-92.5
34
8.6
- 6.0
9
125
-99
82
56
- 2
- 08
16
-32
-72
87
89
-16
- 1.3.3
16
14
23
42.5
-18
3.1
0.4
( 279 )
Nous en avons clédiiit, par les moindres carrés:
j = -0",l5;i, .v=-0",07o; f = — 0",005, .,= — C'-OOS,
et avons obtenu comme résidus, au lieu des différences
D de Peters, les différences D' figurant dans le tableau.
Si Ton fait la somme des carrés des unes et des autres,
on trouve
Une telle diminution de l'erreur probable est un indice
presque certain de l'existence réelle des deux corrections
que nous venons de signaler, et dont la plus importante
porte sur les termes solaires.
Il se passera longtemps encore avant que l'ensemble
de ces dernières corrections (nutation solaire et aberra-
tion) soit bien connu.
Et peut-être le moyen le plus simple de résoudre le
problème serait-il de le scinder, c'esl-à-dire de détermi-
ner exactement, à moins de 0".0i près, la parallaxe du
Soleil, pour en déduire la valeur de la constante de
l'aberration.
La théorie du mouvement de rotation de l'écorce ter-
restre a donc établi l'existence de la nutation chandlé-
rienne, mais elle a montré, en outre, que celle-ci n'est
pas une modification de la nutation eulérienne, comme
on le croit, et que cette dernière existe également pour
l'écorce.
Quant au terme solaire de Chandler, à caractère diurne,
il peut s'expliquer, comme nous l'avons dit, ou par un
déplacement météorologique du pôle d'inertie (*), ou par
I*) Essai sur la variation des Latitudes. Bruxelles, Hayez, 1894..
( 280 )
des déviations périodiques de la verticale, provenant de la
non-coïncidence des centres de gravité de l'écorce et du
noyau (*).
Ainsi se trouve expliqué le phénomène, jusqu'à présent
si obscur, de la variation des latitudes.
Quant au sens précis de cette expression, aujourd'hui
courante dans la science, il nous sera permis de rappeler
que nous n'avons jamais varié à son sujet (**).
On a cru, avec Oppolzer, pouvoir rapporter correcte-
ment les formules de la nutation à l'axe instantané, et
éliminer ainsi la nutation eulérienne (et chandlérienne).
Après de nombreux travaux sur cette n)atière, nous
sommes enfin airivé à démontrer que, si le procédé
d'Oppolzer (corrigé de l'erreur capitale commise par son
auteur) élimine la nutation eulérienne en obliquité, cette
nutation reparaît en longitude et, chose plus grave, dans
l'expression môme de l'heure (***).
C'est donc à l'axe d'inertie, comme l'ont fait tous les
géomètres ('^), Oppolzer seul excepté, qu'on doit rappor-
ter les coordonnées, pour en avoir des expressions cor-
rectes. Et alors on conçoit qu'une grande partie des varia-
tions des latitudes (rapportées à l'axe instantané), se
transforment en des nutations de l'axe d'inertie, négli-
gées à tort par Oppolzer et, à sa suite, par presque tous
les astronomes.
(*) Théorie du mouvement de cotation de iccorce terrestre. Bi'ii-
xelles, Hayez, 1898.
(**) C. h., 1890; Bull. Astr., 1890; Acta Math., 189i>; Annuaire
de rObs. roy. de Belgique, 1890-1897; Bull, de l'Acad. roy. de Bel-
gique, 189M897.
("*) Vicrtel Jahrschrift, 1896; Bull, de l'Acad. roy. de Belgique, 1897;
Annuaire de l'Obs. roy. de Belgique, 1897.
(") Euler, Laplace, Bessel, Poisson. Serrel et, enfin, Tisserand.
( 281 )
Ce n'est pas à dire que nous niions absolument la possi-
bilité de variations réelles de la latitude, rapportée à l'un
ou l'autre pôle: celles-ci surviendraient s'il existait un
déplacement mécanique du pôle d'inertie, provenant soit
de l'accumulation des neiges hivernales au pôle, soit des
déformations élastiques de l'écorce.
C'est ce que l'étude de cette question si intéressante,
poursuivie dans la voie théorique que nous venons d'indi-
quer, pourra révéler un jour, en même temps qu'elle
répandra la lumière sur bien des points, encore imparfai-
tement connus, des formules de réduction au lieu appa-
rent.
C'est l'ancienne méthode de Laplace et de Bessel,
abandonnée à tort depuis trente ans, qui sera reprise
sous peu, appropriée à l'écorce terrestre, par tous les
astronomes qui voudront se rendre compte par eux-
mêmes de l'exactitude des formules dont ils font usage.
Sur les nombreux effets de l'élasticité des liquides (troisième
communication) ; par G. Van der Mensbrugghe, mem-
bre de l'Académie.
A la (in de ma deuxième note sur le même sujet (*)
j'ai énoncé une conséquence des plus importantes, savoir
que toute nappe liquide courbe et suffisamment mince,
qui descend sous l'action de la pesanteur, est sollicitée
par des pressions normales d'autant plus énergiques que
(*) Bull, de l'Acad. roij. de Belgique, 3e série, t. XXXII, p|j. 418-4^25,
1896. Pour la première note, voir même tome, p. 270.
( 282 )
les forces de tension distribuées dans toutes les portions,
tant intérieures que superficielles, de la nappe, sont elles-
mêmes plus intenses.
J'ai déjà signalé une vérification très frappante de
cette proposition : elle consiste dans la forme affectée par
une nappe liquide s'échappant par une fente circulaire
d'environ V^ millimètre de largeur et 60 millimètres de
diamètre moyen.
Aujourd'hui je me propose de décrire quelques faits
qui viennent à l'appui de la même conclusion. Je com-
mencerai par les plus simples.
Explication de quelques faits simples
ou fréquemment observés.
1. I.orsqu'on déverse lentement un liquide d'une cap-
sule en verre et sans bec, on sait que ce liquide ne quitte
généralement pas la paroi latérale extérieure de la cap-
sule; c'est pour ce motif qu'un opérateur peu expéri-
menté a souvent beaucoup de peine à transvaser un
liquide. Pour donner plus d'ampleur à l'expérience en
question, je me suis servi d'un grand réservoir cylin-
drique à fond plat, ayant ;2o centimètres de hauteur et
une contenance d'environ 12 litres.
Je dispose le réservoir de manière que le fond fasse,
par exemple, un angle de 50° avec l'horizon (fig. 1); près
de la base, je fais arriver l'extrémité ouverte d'un tuyau
en caoutchouc mis en communication avec le tuyau de
conduite d'une distribution d'eau; j'ai eu soin, au préa-
lable, de rendre aussi propres que possible les surfaces
intérieure et extérieure du réservoir. Cela étant, j'ouvre
le robinet de la conduite, jusqu'à ce que j'aie introduit
( 283 )
autant d'eau que possible dans le vase; quand je juge que
le liquide est arrivé au repos dans toute sa masse, je rou-
vre un peu le robinet, et je constate que la nappe d'eau
qui franchit le bord lèche la paroi solide sans presque
s'en écarter. En augmentant graduellement la quantité
de liquide qui déborde, je vois se former peu à peu une
nappe s'appuyant toujours d'un côté sur la paroi latérale,
mais s'en écartant de plus en plus de l'autre côté, jus-
qu'à produire une lame liquide dans la portion intermé-
diaire. J'ai pu incliner le fond du vase de 45° sur l'hori-
zon et observer néanmoins une lame liquide s'appuyant
sur la paroi latérale.
Fir,. 1.
Si, dans les conditions ci-dessus, on opère avec de
l'eau de savon, on observe des effets qui sont absolument
du même genre.
Pour expliquer le phénomène en question, sufïît-il
d'invoquer l'adhérence du liquide an verre? Je ne le pense
( 284 )
pas. En effet, si je couvre la face extérieure du réservoir,
sur une largeur de 4 à 5 centimètres, d'une mince couche
d'une huile quelconque, si ensuite je produis l'écoule-
ment de l'eau comme dans le premier cas, la nappe s'in-
tléchit encore vers la paroi ; seulement, à mesure que la
vitesse du liquide augmente, la portion baignée diminue,
et le liquide aboutit au verre sous un angle peu différent
de 90°; et cependant il y a une grande quantité de liquide
déviée de la verticale vers la paroi, ce qui montre bien
que si l'adhérence intervient incontestablement dans le
phénomène, il faut réserver une part au moins aussi
grande à une tout autre cause.
Pour trouver cette cause, nous n'avons qu'à nous rap-
peler que dans les premiers moments de la chute d'un
liquide, les distances intermoléculaires, estimées dans le
sens vertical, tendent à augmenter d'autant plus rapide-
ment que la vitesse et la durée de la chute sont moin-
dres (*) ; c'est ce qui développe immédiatement dans la
masse liquide descendante une force élastique de traction
ou de tension, en vertu de laquelle la surface limite
convexe et les tranches intérieures qui s'infléchissent
vers le bas en vertu de la pesanteur, éprouvent de fortes
pressions vers l'intérieur, c'est-à-dire vers la paroi laté-
rale extérieure. Comme cette force élastique se produit
dans tous les liquides, il n'est pas étonnant que l'eau de
savon présente le même effet que l'eau pure.
2. Un second fait bien connu, mais si fréquent qu'on
n'y prête pas d'attention, est le suivant : lorsqu'on verse
(*) Voir la première conimunicalion, p. 5.
( 285 )
de l'eau d'une aiguière dans un bassin, on voit qu'immé-
dialeinenl après s'être détachée de l'aiguière, la petite
nappe liquide commence à se resserrer en montrant des
stries longitudinales; cet etfet s'accentue de plus en plus
et peut môme donner lieu à une nappe dirigée, à angle
droit sur la première.
Au premier abord, on serait tenté d'attribuer le fait
aux pressions capillaires développées par la tension
superiîcielle aux deux bords de la nappe; sans aucun
doute, ces pressions existent, mais elles me paraissent
totalement insuffisantes pour expliquer l'efFel produit;
car, d'une part, le bord est trop épais, il va d'ailleurs en
grossissant, et ainsi ne se développent que des pressions
relativement bien faibles; d'autre part, la vitesse va en
croissant dans le sens vertical; il faut donc des pressions
latérales énergiques pour donner lieu aux stries et au
resserrement de plus en plus marqué de la nappe. Ces
pressions se produisent, selon moi, non seulement dans
la couche superficielle, mais encore dans toute la masse ;
car deux particules situées dans un même plan vertical
perpendiculaire à la nappe tendent sans cesse à s'écarter
1 une de l'autre, en vertu de l'action de la pesanteur ; or le
liquide réagit fortement contre la moindre augmentation
des distances intermoléculaires, et cette réaction se mani-
feste précisément par la naissance des stries et par le
rapprochement graduel de la masse vers les parties cen-
trales de la nappe. Ce qui me confirme encore dans mon
opinion, c'est qu'on obtient des résultats du même genre
avec l'eau de savon, l'alcool, l'éther, etc.
5. Un autre effet assez curieux a été observé d'abord
( -286 )
par le P. Lacouture (*) : une veine d'eau s'écoule verti-
calement de haut en bas par l'orifice d'un tube partant
d'un vase de Mariotte et ayant 7 millimètres de diamètre;
quand la vitesse du liquide est devenue très faible, il
arrive parfois que l'écoulement s'arrête tout à coup;
« l'orifice », dit l'auteur, « se trouve alors comme fermé
)) par une goutte qu'on est parvenu à isoler un moment,
» et dont la surface forme comme une membrane... Le
» contact d'un corps même très délié rompt la trame de
» ce réseau, et l'écoulement recommence. »
Ce fait, dont je n'ai trouvé nulle part une explication
plausible, me paraît encore dû à ce que la goutte pen-
dante est soumise dans toutes ses parties à une très faible
élasticité de traction, laquelle irait en augmentant si la
goutte se mettait en mouvement vers le bas; voilà pour-
quoi le contact d'un corps même très délié suffit pour
annuler la force élastique en question, et dès lors l'équi-
libre est rompu.
Explication de certaines particularités des nappes
de Savart.
En 1855, Savart a publié son célèbre mémoire sur le
choc d'une veine liquide lancée contre un plan circu-
laire; les phénomènes décrits par l'illustre physicien
français ont été étudiés ensuite successivement par
Hagen, Tyndall, J. Plateau, M. Boussinesq et par moi-
(*) Voir Les Mondes, 2e série, 1'" année, 1866, t. Il, p. 73.
( 287 )
même (*) ; mais dans tous ces travaux, on suppose les
liquides incompressibles, ou, du moins, on n'invoque
aucun changement de disposition moléculaire survenu
pendant leur mouvement; c'est pour ce motif, je pense,
que, jusqu'à présent, on n'a pas encore donné des expli-
cations nettes de plusieurs phases des plus singulières
qu'olîrent les nappes de Savart.
Pour plus de clarté, je vais rappeler l'une de ses expé-
riences, et pour chaque phase, je tâcherai de donner
l'explication qui me paraît la plus plausible.
Première phase. — « Sous une charge initiale de
)) 2 mètres, l'eau, d'abord parfaitement calme, tombe sur
» un disque horizontal de "27 millimètres de diamètre
)) et placé à 20 millimètres de distance à l'orifice, dont
)) le diamètre est de 12 millimètres. Après le choc, il se
)) produit une nappe circulaire et continue dont le dia-
)) mètre est d'environ GO centimètres. Dans ces condi-
» tions, la partie centrale de la nappe est mince, unie
)) et transparente, mais son pourtour, qui a une plus
)) grande épaisseur, est trouble et se présente sous
» l'aspect d'une zone annulaire recouverte d'un grand
» nombre de stries rayonnantes coupées par d'autres
)) stries, mais circulaires, qui projettent au loin une
» multitude de gouttelettes. »
Afin de comprendre cette première phase, nous allons,
par la pensée, suivre le li(juide à partir de l'orifice.
Comme la charge initiale est de 2 mètres, le choc de
l'eau contre le disque doit y développer une grande com-
(*) Sur une nouvelle application de rénenfic potentielle des surfaces
liquides (Bull, de l'Acad. roy. de Belgique, 2o série, t. XLVI, p. 635,
1878]. J'ai donné à cette occasion les indications bibliographiques.
( 288 )
pression qui diminue extrêmement peu le volume de
chaque unité de poids du liquide, mais y fait naître une
tbrle élasticité de pression ; or, en raison de l'élasticité
parfaite de l'eau, il n'y a pas de perte sensible de force
vive, et la détente s'opère en une très petite fraction de
seconde, pendant laquelle le liquide est lancé dans tous
les sens parallèlement au plan du petit disque. Aussi
longtemps que les distances intermoléculaires ne tendent
pas à augmenter, les seules forces retardatrices sont les
tensions superficielles des deux faces de la nappe; c'est
pourquoi la partie centrale de cette dernière est unie et
transparente.
iMais bientôt, par l'étirement de la lame amincie, il se
développe de l'élasticité de traction, c'est-à-dire que les
particules éprouvent des écarts, extrêmement minimes à
la vérité, mais suffisants pour donner subitement lieu à
des lésistances énergiques; alors les tranches qui arrivent
viennent choquer celles qui se sont ralenties; de là des
bandes circulaires d'où s'échappent constamment des
gouttelettes; un peu plus loin se produit un nouveau
choc, ainsi qu'une nouvelle bande circulaire d'où
jaillissent tumultueusement de minimes masses liquides
tout à fait irrégulières dans leur forme et leur grandeur;
on peut s'en assurer en regardant la zone trouble à travers
les fentes d'un disque tournant avec une vitesse conve-
nable. Ce qui renforce encore l'éparpillement du liquide,
ce sont les pressions exercées contre les portions termi-
nales de la nappe, pressions provenant non seulement
des tensions superficielles, mais encore des forces déve-
loppées à l'intérieur par l'élasticité de traction : c'est ce
qui explique aussi les fortes dentelures qui paraissent et
disparaissent tour à tour au même endroit et accusent
l'existence de vrais mouvements vibratoires.
( 289 )
Deuxième phase. — « A mesure que la charge diminue,
le diamètre de la nappe s'agrandit peu à peu; en même
temps, l'auréole change d'aspect, elle devient plus trans-
parente, sa largeur diminue, elle se recouvre de larges
bosselures et disparaît entin entièrement, quand la pres-
sion à l'orifice n'est plus que de OO centimètres environ.
La nappe atteint alors son diamètre maximum, qui est
d'à peu près 80 centimètres, et elle apparaît sous la
forme d'une large capsule parfaitement unie et dont le
contour libre, légèrement dentelé, lance un grand nombre
de gouttelettes partant des angles saillants des dente-
lures. »
Pour expliquer cette deuxième phase, iTsuttit de se
rappeler que plus la vitesse du liquide est considérable,
plus aussi, à partir du moment où se sera opérée com-
plètement la détente après le choc, les molécules seront
tirées vivement dans la direction radiale, ce qui fera
naître de l'élasticité de traction et, par conséquent, de
fortes résistances au mouvement du liquide. Réciproque-
ment, si la vitesse n'est pas trop grande, le degré d'élas-
ticité de tension sera peu marqué et le mouvement de la
niasse sera plus régulier. Voilà pourquoi la portion unie
et transparente acquiert un diamètre plus grand lorsque
la charge diminue : la tendance à l'écartement molécu-
laire diminue de plus en plus, et ainsi s'explique la pro-
duction, non plus de stries nombreuses, mais de larges
bosselures qui disparaissent quand la pression à l'orifice
n'est plus que de (>0 centimètres. Quant aux gouttelettes
lancées par les parties saillantes des dentelures, elles
proviennent de la compression subite éprouvée par le
liquide en ces parties.
5'"® SÉRIE, TOaiE XXXVI. 20
{ 290 )
Troisième phase . — « La pression continuant à décroître,
la nappe unie diminue graduellement de diamètre, et en
même temps se recourbe à sa partie inférieure en se
portant vers la tige qui soutient le disque; à la pression
de 32 à 33 centimètres, elle se ferme entièrement, en
revêtant la forme d'un solide de révolution d'environ
40 centimètres de diamètre et 45 centimètres de hauteur,
dont la surface est parfaitement unie et dont la généra-
trice ressemble beaucoup à une lemniscate. »
Quant à ce troisième stade du phénomène, J. Plateau
et moi-même nous l'avons attribué à l'influence de la
tension superficielle de la lame ; cette influence est
incontestable; aujourd'hui je puis en invoquer encore
une autre : c'est l'élasticité de traction développée à
la fois dans les couches superficielles et à l'intérieur
de la masse liquide ; de là des pressions normales qui
exaltent celles provenant de la tension superlicielle et
qui, pour une charge assez réduite, suflisent non seule-
ment pour fermer la lame, mais encore pour la faire
remonter sensiblement le long de la tige.
Quatrième et cinquième phases. — (c Quand la pression
diminue encore davantage, il arrive bientôt un instant
où la nappe fermée semble tiraillée, surtout dans la por-
tion la plus large ; au bout de quelques secondes, il se
dessine parfois une arête saillante dans cette portion, et
immédiatement après, la nappe se soulève, et de convexe
qu'elle était vers le haut, elle devient concave; de son
bord descend une lame courbe fermée vers le bas. Cette
figure ne persiste que quelques instants pour se changer
de nouveau en une sorte de vase fermé en bas comme
précédemment, mais de dimensions moindres. Ces chan-
( 29i )
gements brusques peuvent se reproduire plusieurs fois
avant que l'écoulement cesse tout à fait. »
Ces deux dernières phases, étroitement liées entre
elles, ont beaucoup surpris Savart, qui a vainement
tâché d'en donner l'explication. M. Boussinesq a esquissé
la théorie de la formation des nappes unies et fermées,
mais ses calculs ne sont j)as d'accord avec l'expérience
et ne font pas voir d'où dérive la transformation des
nappes. En 1878, j'ai proposé une explication plausible,
mais en ne tenant aucun compte des elléts de l'élasticité
des liquides au sein même de leur masse.
Aujourd'hui il me parait aisé de montrer que cette
élasticité doit nécessairement produire les singularités
<lécrites plus haut; en effet, soit// la charge pour laquelle
la nappe se ferme pour la première fois, en dessinant
la courbe cmkmc (voir fig. 2),
par exemple.
Concevons maintenant
deux molécules qui quittent
l'une Vioo de seconde après
l'autre la portion de la
nappe où les tangentes à la
méridienne de la surface de
révolution réalisée sont ver-
ticales ou à fort peu près ; on
trouve aisément pour la distance initiale de ces molé-
cules, en appelant a la vitesse aux points m les plus
éloignés de l'axe de la ligure :
\
1
100^ ^2 100
( 292 )
et pour l'accroissement de la distance au bout de '/loo de
seconde :
Rappelons-nous maintenant que l'énergie de mouve-
ment du liquide après le choc est transformée très rapi-
dement et pour une très grande part en énergie poten-
tielle renfermée dans la nappe étalée suivant tous les
azimuts; nous pouvons conclure de là que la vitesse a
du liquide aux points où les tangentes aux lignes méri-
diennes de la nappe sont verticales n'est qu'une fraction
- de celle qui correspond à la charge h à l'orifice; nous
pourrons donc écrire pour la distance ci-dessus :
Or, à mesure que /* diminue, la quantité de liquide
qui doit s'étaler dans le même temps sur la même
étendue de la nappe, devient évidemment moindre
aussi ; il s'ensuit que non seulement h diminue, mais
encore la fraction-. Dans ces conditions, l'accroisse-
ment relatif des distances intermoléculaires, c'est-à-dire
100^
n ^ 100 2
augmente rapidement, et comme la nappe devient gra-
duellement plus mince, les molécules éprouventde plus en
plus de difficulté à se maintenir aux mêmes distances, au
( 293 )
lieu d'aller eu s'écartaiit entre elles enijvertu des lois de la
pesanteur. Mais alors le liquide franchira de plus en plus
difficilement la portion la plus large de la nappe; cette
portion sera tendue, travaillée, elle fera parfois remonter
le bas de la ligure le long de l'axe (voir la ligne ponc-
tuée m'cm'); on verra se former sui' cette portion une
arête saillante, à cause de la force de traction développée
dans toute l'épaisseur de la lame, force dirigée de haut
en bas et réciproquement. Mais, dès ce moment, il n'y
aura plus assez de liquide pour alimenter la partie infé-
rieure delà nappe, qui s'ouvrira brusquement; aussitôt,
la portion supérieure, sollicitée par des forces de traction
dirigées en sens contraire à la pesanteur, sera soulevée
au-dessus du plan du disque et dessinera une lame
caibc, concave vers le haut, comme l'a si bien observé
Savart, sans pouvoir en indiquer la cause.
Ce qui vient entièrement à l'appui de cette théorie,
c'est que, d'après mes expériences, il n'y a jamais de
relèvement brusque quand on opère avec une charge
constante, ou bien lorsque la charge, au lieu de diminuer
graduellement, va au contraire en croissant; enfin le
phénomène ne se manifeste pas non plus dans le cas où
la nappe présente une ouverture.
La même théorie s'applique aux lames de Savart pro-
duites par le choc de deux veines liquides lancées par des
orifices circulaires dans des directions qui, au point de
rencontre, sont exactement opposées (*).
Comme il fallait s'y attendre, tant que la pression est
forte (de l'",o à i mètres) et que les nappes sont
(*) Annales de chimie et de physique, t. LV, 1833, p. "loi.
( ^294 )
entourées d'une auréole, elles paraissent sensiblement
circulaires, et le point central de rencontre des jets en
occupe le centre; mais à mesure que la pi'ession décroît,
leur rayon vertical supérieur diminue de longueur,
tandis que le rayon inférieur va en augmentant; on
reconnaît ainsi l'action de plus en plus efficace de la
pesanteur. Pour des pressions suffisamment réduites, les
nappes sont entourées d'un bourrelet arrondi d'où
s'échappent constamment des gouttelettes, à cause de la
compression trop intense du liquide dans les portions
terminales.
Il me paraît certain que mon explication s'applique-
rait à bien d'autres faits du même genre, dont on s'est
vainement efforcé de l'endre compte, parce (ju'on ne con-
sidérait pas les liquides comme élastiques.
IIecherches sur les alcools nitrés. — Sur les dérivés du
bromo-nitro-méthane
HX-Br(NO,);
par Joseph Maas, docteur en sciences.
M. le professeur L. Henry a fait connaître depuis
quelques années, par lui-même et par ses élèves, les pro-
duits de la condensation des paraffines nitrées avec les
aldéhydes aliphatiques.
Je me suis occupé, à son invitation, des dérivés de
cet ordre correspondant au bromo-nitro-méthane H^C
- Br(N02).
( 295 )
J'ai préparé le bromo-nitro-méthane par la méthode
indiquée par M. J. Tscherniak (*) : réaction du brome sur
le dérivé sodé du nitro-méthane.
Je ferai remarquer que l'emploi de l'éthylate de sodium
dissous dans l'alcool est préférable, pour obtenir celui-ci,
à l'emploi de la solution alcoolique de soude caustique.
On introduit ce sel sodé bien sec, par petites portions
successives, dans la quantité nécessaire de brome —
molécule pour molécule — refroidi de temps en temps.
On décolore le bromo-nitro-méthane au moyen de la
solution des réactifs sulfureux, SO^ ou sullites acides.
La liqueur aqueuse devenant acide, à la suite de la
disparition du brome, une partie du produit formé entre
en dissolution ; la saturation de cette solution acide par
NaHC0,3 en détermine la précipitation intégrale. En pro-
cédant ainsi, on arrive à un rendement d'environ 80 %
du rendement théorique.
Le bromo-nitro-méthane constitue un liquide incolore,
d'aspect plus ou moins huileux, d'une odeur très irritante,
insoluble dans l'eau, mais soluble dans l'éther. Il bout à
1470-1490 sous la pression ordinaire.
Selon la règle établie par M. Louis Henry, la capacité
de condensation des nitro-paraffines avec les aldéhydes
inférieures est déterminée par le nombre des atomes
d'hydrogène fixés sur l'atome de carbone auquel est
attaché le radical nitrile -NO.2 et égale à ce nombre.
Alors qu'elle est multiple, cette aptitude à la conden-
sation, comme la saturation des bases et des acides poly-
(*) Liebig's Annalen der Chemie, t. CLXXX, p. ^29 (année 1875).
( 296 )
valenls, peut s'exercer de deux manières : en une seule
fois et tolalement, ou bien incomplètement et d'une
manière successive.
Cela étant, alors que la capacité de combinaison du
nitro-métbane est égale à trois, celle du bronio-nitro-
méthane n'est que deux; et elle doit pouvoir s'exercer en
deux temps ou deux pbases successives, donnant succes-
sivement un dérivé mono-aldébydique et un dérivé bi-
aldéliydique.
On prévoit même (|ue les dérivés bi-aldéliydi(jues
peuvent être de deux sortes :
a) Simples, correspondant à deux molécules d'une
même aldéhyde;
b) Mixtes, correspondant à deux molécules d'aldéhydes
différentes.
Ces données générales ont été vérifiées par l'expérien»*'
d'une manière conmlète.
Avant d'en faire l'exposé dans les faits |)articuliers, je
ferai remarquer qu'il semble que le pouvoir réactionnel
du nitro-méthane a perdu de son intensité dans le bromo-
nitro-méthane, par suite de la présence d'un atome de
brome à la place d'un atome d'hydrogène. Ce pouvoir
additionnel est assez puissant, dans le nitro-méthane
notamment, vis-à-vis du mélhanal pour ne s'exercer que
d'une seule manière, en une fois et complètement. Dans
le bromo-nitro-méthane, au contraire, il ne s'é[)uise <jue
progressivement.
( 297 )
PREMIÈRE PARTIE.
Condensation du bromo-mtro-méthane avec le méthanal
H2C = 0.
A. ^ Addition à une seule molécule de méthanal.
Il en résulte de IVt/coo/ éthylique bronio-nitré (H0)GHc2
Rr
- CH < XTQ OU /-/ bromo-nitro-éthanol. Voici le fait :
Un mélange de 7 Vi> gi'atnmes de la solution acjueuse
d'aldéhyde formique à 40 % avec i i grammes de bromo-
nitro-méthane ne manil'este aucune réaction; malgré l'agi-
tation, la température reste constante et le liquide partagé
en deux couches insolubles l'une dans l'autre. L'in-
troduction d'un petit fragment de carbonate bipotassique
dans la masse liquide sulïil pour déterminer la réaction.
Celle-ci s'accomplit vivement, les deux liquides se
dissolvent l'un dans l'autre et la température, qui était
primitivement de 50", s'élève jusqu'à 7t2".
La réaction se fait suivant l'équation
H{ <' ^^
CH,Br(NO,) + H,C = 0 = , ^'0i.
HjC-HO
Le liquide homogène qui s'est formé après refroidisse-
ment, est épuisé par l'éther.
Après distillation de l'éther au bain d'eau, le produit
( 298 )
brut restant est rectifié par distillation fractionnée sous
pression réduite.
Les premières portions sont constituées d'éther et de
bromo-nitro-méthane qui ont échappé à la réaction. On
recueille ce qui passe entre 144" à 150°, sous pression
de 45 millimètres.
Il reste un produit épais, sirupeux, qui par refroidis-
sement devient solide. Celte masse, dissoute dans l'éther,
cristallise lentement.
Ce produit sirupeux est en grande partie le produit de
la condensation complète du méthanal avec le bromo-
nitro-méthane
Br(NO,)-C-(CH,OH>,..
Une seconde rectification du produit distillé donne un
produit limpide passant entre 147° et 148°, sous une
pression de 45 millimètres. Le rendement est d'environ
65 °/o du rendement théorique.
L'analyse de ce corps a fourni les résultats suivants :
I. Os^',o008 de substance ont donné 21''%1 d'azote,
sous la pression de 770 millimètres et à la température
de 10°.
II. a) Os',0122 de substance ont donné 0&',6762
d'AgBr.
[3) Osf',5183 de substance, suivant la méthode de Carius,
ont donné Os',5705 d'AgBr.
III. a) Oe',r)009 de substance ont donné Oe',0948 de
CO2 et Oe',044 de H2O.
(BJO^',2118 de substance ont donné 0e%0060 de CO2
et OS', 0570 deH^O.
( 299 )
D'où l'on déduit :
Trouvé,
!.
II.
III. IV.
V.
Calculé.
C . . U.59
14.27
— —
—
14.41 «/o
H . . 2.81
2.24
— —
—
2.41
N . . —
—
8 30 —
—
8.23
Br . . —
— •
— 46.94
47.34
47.07
Le bromo-nitro-éthanol Br (NO^) CH - CH.^ - (OH)
ainsi formé constitue un liquide plus ou moins épais,
jaunâtre, d'une odeur et d'une saveur piquantes; sa
vapeur irrite fortement les muqueuses de l'œil et le
liquide lui-même produit de violentes irritations à la
peau et cause des douleurs très aiguës.
Il est peu soluble dans l'eau, soluble dans l'alcool et
l'éther.
Sa densité à l'état liquide est égale à 2.084 à 10"; il
bout à 147''-148°, sous une pression de 45 millimètres.
Son indice de réfraction est de 1.52952 à la tempéra-
ture ordinaire.
Le poids moléculaire a été déterminé suivant la
méthode cryoscopique :
I. Os'",2540 de substance dissoute dans 20 centimètres
cubes d'eau ont produit un abaissement du point de
congélation de 0",1(>.
IL 0s'',7215 de substance dans les mêmes conditions
ont produit un abaissement de 0°,39.
D'où l'on déduit :
Poids moléculaire.
Trouvé.- Calculé.
1 147 i
Il .74 '™
( 300 )
Les propriétés du bromo-nitro-éthanol sont de deiiv
ordres :
a) Celles qui tiennent à l'existence du composant
alcool H^C - OH;
b) Celles qui tiennent à l'existence du composant nifre
"^ <N0./
A. — Composant alcool H.jC - OH.
J'ai constaté le caractère alcool dans ce composé par
l'action de l'acide nitrique et de l'anhydride acétique,
réactifs qui fournissent les éthers correspondants.
Éther nitrique Br (NO^) CH - CH^ (NO5), ou nitrate
d'ëthylc bromo-nitré 1-1 .
Dans un mélange refroidi de deux parties d'acide
nitrique ordinaire et de trois parties d'acide sulfurique
du commerce, on introduit par petites portions le bro-
mo-nitro-éthanol ; celui-ci se dissout.
Après quelques instants, un trouble se produit et une
huile vient surnager.
Pour la débarrasser des acides, on la lave à l'eau, dans
laquelle elle est insoluble.
Après plusieurs lavages, on la dessèche sur du chlorure
de calcium. Je n'ai pas tenté la distillation de ce produit;
à cause de la présence simultanée de NO3 et NO.2, il doit
être instable.
Le nitrate de bromo-nitro-éthyle desséché et non rec-
tifié constitue un liquide légèrement jaunâtre, plus ou
moins épais.
Sa densité à la température de 11" est 2.438.
/
( 301 )
Le dosage de l'azote a fourni le résultat suivant :
0^,5234 de substance ont donné 35' ',2 d'azote à la tem-
pérature de lO'' et à la pression de 768 millimètres, ce qui
correspond à
Trouvé, Calculé.
Azote '/o 13.08 13.02
Élher acétique
Br(iNOs)HC-CH5(C2HsO,)-
Acétale ou éthanoale d'éthyle bromo-nilré 1-1.
Je me suis adressé, à l'exemple de M. Louis Henry,
pour obtenir cet éther à l'anhydride acétique plutôt qu'au
chlorure d'acétyle, le gaz HCl pouvant réagir sur le
groupement -NO^.
Le mélange d'anhydride acétique et de bromo-nitro-
éthanol, en quantités équimoléculaires, réagit à la tem-
pérature ordinaire et s'échautle fortement. Après refroi-
dissement, j'ai traité toute la masse par l'eau. Il se
précipite une huile insoluble que j'ai lavée encore
plusieurs fois dans l'eau.
Le produit a été distillé; il bout de 138" à 142" sous
la pression de 50 millimètres.
Cet éther exhale une odeur acétique; c'est un liquide
incolore qui, à la température de 41", a pour densité
1.958.
Le dosage de l'azote a fourni le résultat suivant :
0s%4181 de substance ont donné 23'^%1 d'azote à 11»
et sous une pression de 769 millimètres.
( 302 )
Ce qui correspond à :
Trouvé. Calcule.
Azole«/o 6.65 6.60
En sa qualité d'alcool primaire, le bromo-nitro-élhanol
doit fournir successivement par oxydation une aldéhyde,
l'aldéhyde bromo-nitro-acélique Br(IN02)CH-CH = 0, et un
acide, l'acide bromo-nitro-acétique Bi'{^0<2) CE -CO {OU).
Ces corps sont de ceux que l'on peut regarder ajuste titre
comme très intéressants. Je regrette de n'avoir pas été à
même de m'occuper de leur préparation.
B. — Chaînon bromo-nitré Br(N02)CH.
" I
Au chaînon bromo-nitré du nitro-éthanol se rattachent
les propriétés qui tiennent à la présence des radicaux
Br et NO2, et celles qui tiennent à la présence de l'hydro-
gène.
i" Aux radicaux Br et NO2 je rattacherai l'action de
l'eau. J'avais espéré pouvoir obtenir ainsi Valdefujde glyco-
Hque selon l'équation
(HO)CH, - CH <^TQ + H,0 = (HO)CH, - CHO + [{JJ,^ .
Je suis autorisé à croire que les choses se passent
ainsi, quoique je ne sois pas parvenu à isoler celte aldé-
hyde comme telle, malgré la quantité relativement
notable — 12 grammes de nitro-éthanol — que j'ai con-
sacrée à cet essai.
J'ai chauffé l'alcool bromo-nitro-éthylique avec plu-
sieurs fois son volume d'eau en vase clos, à une tempéra-
ture d'environ 155" à 140" pendant quelques heures.
( 303 )
L'alcool disparaît, les acides formés ont été neutralisés
par du carbonate bipotassique.
Le liquide exerce une action fortement réductrice sur
la liqueur de Fehling et le nitrate d'argent ammoniacal.
Je l'ai soumis à la distillation; au produit distillé, j'ai
ajouté une solution de bisulfite sodique. Après un certain
temps, ce liquide fournit une belle cristallisation d'un
composé sodique, renfermant à peu de chose près la
quantité de sodium correspondant à la formule
^^' '^ CIl(OH) - CH,(OH).
Le manque de matière ne m'a pas permis d'examiner
à fond cette réaction.
2° A la présence de l'hydrogène dans le composant
HC-Br(N02) se rattache le pouvoir additionnel du
bromo-ni tro-éthanol .
Ce pouvoir additionnel est égal à 1. J'en ai constaté
l'existence vis-à-vis du methanal H.2G = 0 aq. et vis-à-vis
de Vethanal H3C - CH = 0 aq.
B, — Addition de deux molécules de methanal
H,C - OH
ll,C - Bi (NO,) + 2CHo = 0 = C < ^Q
H2C-OH '
Le résultat de cette réaction est la production du glycol
triméthulénique bromo-nitré 2-2, ou propanediol hromo-
nilro 2-2.
A 14 grammes de bromo-nitro-méthane, j'ai ajouté
une quantité de methanal, en solution aqueuse de 40 "/o,
correspondant à 2 molécules.
( 304 )
L'introduction d'un fragment de carbonate bipotassique
et l'agitation déterminent les deux composés à réagir, le
tout se dissout et la température s'est élevée de 28°
jusqu'à 70°.
Le même produit se forme et dans les mêmes condi-
tions, par la réaction sur l'étbanol bromo-nitré du mé-
tbanal en solution aqueuse, en quantité représentant
une molécule. Il y a à notei' que, cette seconde fois, la
réaction du mélhanal est moins vive que la première el
l'élévation moins considérable.
On extrait du liquide aqueux le produit obtenu, par
l'éther; l'évaporation de celui-ci le laisse à l'état de
l)eaux cristaux.
L'analyse de ce corps a fourni les résultats suivants :
L Os^oOGT de substance ont donné par la méthode de
Cari us 0^',5089 de AgBr, d'où
Trouvé. Calculé.
Br% . . . 40.28 40
IL 0^,504:2 de substance ont donné 17'^s9 d'azote à
la température de 10° et à la pression de 7G8 millimètres,
d'où
Trouvé. Calculé.
]N°/o . . . 7.116 7«/„
Le propane diol-bromo-nitré 2-2 (HO) CH^ - CBr(N0.2)
CHfl - OH ainsi préparé se présente sous forme de beaux
cristaux incolores, transparents ; j'en ai obtenu qui mesu-
raient au moins i centimètre de côté ; ils ont, d'une
manière générale, la forme octaédrique.
Ce corps est peu soluble dans l'eau, mais soluble dans
l'alcool et l'éther.
( 305 )
Son point de fusion est compris entre 106° et 107".
J'en ai déterminé le poids moléculaire selon la méthode
cryoscopique.
I. 0^^279 de substance dissous dans 20 centimètres
cubes d'eau ont déterminé un abaissement du point de
congélation de 0°,15.
1[. 0^,4871 dissous dans la même quantité d'eau ont
déterminé un abaissement du point de congélation
de 0%23.
Ce qui correspond à
Poids moléculaire.
Trouvé. Calculé.
I . . . 170 )
200
II . . . 200 ]
On remarquera que ce corps est très voisin de la dioxy-
acélone et par conséquent de la glycérine :
011
OH
OH
i\I. L. Henry (*) a déjà fait connaître qu'il s'occupait
d'efl'ectuer ces transformations; ainsi sera réalisée la syn-
thèse directe et complète de la glycérine par la soudure
des trois fragments monocarbonés qui la constituent.
{*) Bulletin de la Société chimique de Berlin, t. XXX, p. 2206
(année 1897), et Revue des travaux chimiques des Pays-Bas, t. XVI,
p. 250 (année 1897 j.
3"'" SÉRIE, TOME XXXVl. 21
H2C-0H
HjC - on
II2C
co
HC
1
H2C - OH
H,C - OH
HX
( 306 )
DEUXIÈME PARTIE.
(Condensation du bromo-nitro-méthank
AVEC l'éthanal.
La condensation du méthane bromo-nitré avec une
seule molécule d'éthanal a pour résultat la formation du
bromo-nilro 5 propanol 2
CH5-(:H-(0H)-CMBr(N0,),
ou alcool isopropylique bromo-nitré aldéhydique.
La réaction est en tous points analogue à celle du
méthanal; elle s'opère dans les mêmes conditions et
s'accompagne d'un dégagement de chaleur relativement
considérable, susceptible d'élever la température de 45° à
50'' pour de médiocres quantités de matière.
Il y a seulement à remarquer que cette condensation
monomoléculaire est plus aisée que celle du méthanal ;
elle s'opérait avec celui-ci de deux façons à la fois : alors
même que l'on n'en employait qu'une seule molécule
pour une de H2C - Br (NO2), on obtenait tout à la fois un
alcool mono et un alcool biatomiquc bromo-nitré. Avec
l'éthanal, il n'en est pas ainsi. On obtient exclusivement
ou presque exclusivement l'alcool monoalomique. On est
donc autorisé à croire que l'aptitude réactionnelle de
l'éthanal CH5 - CH = 0 est beaucoup moindre que celle
du méthanal.
Valcool isopropylique bromo-nilré H^C - CH - (OH)
- CHBr (NO2) est extrait de la masse liquide par l'éther.
Après expulsion de celui-ci, on le soumet à la distil-
( 307 )
lation sous pression raréfiée. Sa purification est des
plus aisées et le rendement est voisin du rendement
intégral.
L'analyse de cet alcool a fourni les résultats sui-
vants :
I. 0^',4181 ont donné 23 centimètres cubes d'azote
sous une pression de 7()9'"'" et à la température de iO°.
II. 0^,5711) de substance ont donné 0"^,M799 de
AgBr.
III. 0^'',3654 de substance ontdonnéf>',o655de AgBr.
IV. 0î^',3o20 de substance ont donné 0«% 1560 de COo et
Oe',0672 de H^O.
V. 0s'",47o0 de substance ont donné 0«^", 1839 deCO.j et
0^%0819 de H2O.
Ces chiffres correspondent à la composition centésimale
suivante :
Trouvée 0
I.
II. III.
IV.
V.
Calculé «/o
c . .
. 19.40
1 9.40 —
—
—
19.05
H. .
. 3.46
5.80 —
—
—
5.26
Br. .
—
- 43.15
42.80
—
45.48
N . .
—
-_ —
_
7.06
6.86
L'alcool isopropylique bromo-nitre H5C - CH - (OH)
- CH Br (NO2) constitue un liquide incolore, jaunissant à
la lumière, quelque peu épais, à odeur faible, piquante,
à saveur piquante.
Il irrite la [»eau, mais moins fortement que le nitro-
bromo-éthanol (HO) - CH^ - CH Br (NO^).
( 308 )
fi est peu soluble dans l'eau, mais soluble dans l'alcool
et l'étlier.
Sa densité à 10^ est égale à 1.899.
11 bout sans décomposition à 149M50" sous la pression
de 42 millimètres.
Son indice de réfraction à la température ordinaire
est 1.51728.
Son poids moléculaire a été déterminé par la méthode
cryoscopique.
0^,3015 de substance ont déterminé un abaissement
de 0%15o dans le point de congélation de 20 centimètres
cubes d'eau.
Ce qui correspond à 185.82; la formule exige 184.
Le bromo-nitro-isopropanol CH5 - CH - (OH) - CH Br
(N02),du chef du composant HC-Br(N02),est susceptible
de se condenser avec le méthanal, mais je ne suis pas
parvenu à le condenser avec l'éthanal.
J'en ai préparé les dérivés nitrique et acétique.
a) Déiivé nitrique ou nitrate d'isopropyle bromo-nitré
H5C-CH(N03)-CHBr(N02).
Il résulte de l'action du mélange nitro-sulfurique sur
le nitro-propanol bromo-nitré.
On opère comme avec le bromo-nitro-éthanol.
L'analyse du produit formé et desséché a donné le
résultat suivant :
0^',30G4 de substance ont fourni 52''%1 d'azote sous la
pression de 768 millimètres et à la température de 9".
Ce qui correspond à 12.09 % d'azote. La formule en
demande 12.17 "/o.
Le nitrate d'isopropyle bromo-nitré constitue un liquide
incolore, huileux, insoluble dans l'eau.
Sa densité à 10° est égale à 2.134.
( 309 )
()) llérivé acétique ou âcéiale d'isopropyle bionio-nitié
H^C - CH(C,HA)- CHBr(NOj).
Il résulte de l'action de l'anhydride acétique à chaud
sur l'alcool isopropylique bromo-nitré.
C'est un liquide incolore, huileux, d'une faible odeur
acétique, insoluble dans l'eau, d'une densité égale à 1.820
à 11°.
Il bout à lo9''-141'' sous la pression de 48 millimètres.
Son analyse a donné les résultats suivants :
Oë',5280 de substance ont fourni 16'^^s4 sous la pres-
sion de 769 millimètres et à la température de 11°.
Ce qui correspond à G.lo "/o.
Un isomère de cet alcool isopropylique bromo-nitré
"^ < S'a
ne - OH
CH5
a déjà été signalé par M. L. Henry (*). C'est V alcool pro-
pijlique primaire bromo-nitré
H^C - OH
^ '^ NO,
CH3
qui résulte de la condensation du méthanal CHo = 0 avec
l'éthane bromo-nitré aldéhydique H5C - CH Br (NO^).
("j Bull, de l'Acad. roy. de Belgique, 3« série, t. XXXIII, p. 426
(année 1897).
( 3i0 )
C'est un corps solide, fusible à 42°.
Il se distingue chimiquement du produit que j'ai pré-
paré en ce qu'il est dépwirvu de tout pouvoir addition-
nel vis-à-vis du méthanal. La différence des chaînons
bromo-nitrés que renferment ces corps
"V < NO., V ^ NO
rend compte de cette différence capitale.
Les alcools bromo-nitrés, éthylique et isopropylique,
(HO) - CH^ - CHBr(NO,) et CH3 - CH(OH) - C(lBr(NOA
du chef du composant encore hydrogéné HG-Br(N02),
doivent encore posséder un pouvoir de condensation
égal à 1, vis-à-vis des aldéhydes.
Dans le propanol bromo-nitré, il ne peut être mis en
évidence que par le méthanal CH2 = 0; l'éthanal, dont
le pouvoir réactionnel est plus faible, est inerte sur ce
composé.
Dans l'éthanol l)romo-nilré, au contraire, il s'exerce
tout aussi bien vis-à-vis de l'éthanal que vis-à-vis du
méthanal.
Un point important que je tiens à faire remarquer,
c'est que la réaction du méthanal sur l'isopropanol bromo-
nitré et la réaction de l'éthanal sur l'éthanol bromo-nitré
CH3 CH(OH) - CHBr(NO,) + CH, = 0,
(OH)CH, - CHBr(NO«) + CH3 CH = G
aboutissent l'une et l'autre à la formation du même pro-
( .IH
duit, en C4, le hutanediol 1-3 bromo-nitré 2-2
CH2-OH
^ NO.
CH - OH
CH-
Ces condensations s'opèrent dans les conditions ordi-
naires sous l'action stimulalrice d'un fragment de carbo-
nate potassique. L'élévation de température qu'elles
déterminent est inférieure à celle qui caractérise la pre-
mière condensation et ne représente guère qu'une ving-
taine de degrés.
Le butane-diol 1-3 bromo-nitré 2-2 cristallise en beaux
cristaux incolores et transparents, insolubles dans l'eau
et fusibles à 94''-96° en tube capillaire.
L'analyse de ce composé a fourni les chiffres suivants :
a) Composé résultant de (HO)- CH2-CH < ^Q + H3C
-CH = 0. ^ "
I. 0^'',412ô de substance ont fourni 0^,3701 de bro-
mure d'argent.
IL 0e',40o2 de substance ont fourni Oe'-,3D89 de bro-
mure d'argent; de là on déduit :
Calculé.
BrVo . . . 58.^20 37.69 r,7.38°/o
h] Composé résultant de H5C - CH (OH) - CH Br (NOc)
+ H2C = 0.
L 0^,3674 de produit ont fourni 0^",5i98 de bromure
d'argent.
H. Os',4702 de substance ont donné 0^,4152 de bro-
mure d'argent.
( 512
D'où l'on déduit
Trouvé.
I. il. Calculé.
Br«/o . . . 37.04 37.58 57.58°/..
Le bromo-nitro-métliane, comme les paiaftines nitrées,
jouit de la propriété de se condenser (*) avec l'alcool
OH
amvléno-méthyliqueHsC <J; .. „ , produit d'addition
de la pipéridine C5Hio = NH au méthanal.
Il en résulte un beau corps cristallin, incolore, soluble
dans l'éther, insoluble dans l'eau et fusible à 49"-5l^
Comme ce corps s'altère très rapidement, en devenant
brun foncé, il ne m'a pas été possible de l'obtenir dans
un état propre à l'analyse et de décider s'il résulte de
la réaction d'une ou deux molécules d'alcool amyléno-
méthylique sur H^C - Br(N0.2), et s'il répond à la formule
Br(NO,K.H-(CII., N(C5H,o))
ou
Br(NO.,) - C - (CH-, - NiQH.o))^.
Ce travail a été fait au laboratoire de chimie générale
de l'Université de Louvain. C'est assez dire tout ce que
je dois à MM. les professeurs Louis et Paul Henry. Je me
fais un devoir de leur exprimer mes sentiments de vive
reconnaissance.
(*) Voir L. Henry, Sur la condensation des alcools alkyl-amido-
mélhijliques avec les paraffi)ies nitrées. (Bull, de l'Acad. roy. de
Belgique, 3e série, t. XXXII, p. 33; 1896.)
(313 )
Siir la condensalion de l'aldéhyde benzoïque el de la
monocfiloracélone ; par J. Ghysen.
Parmi les corps se prêtant le plus facilement à la con-
densation, ce mode de synthèse si fécond en résultats, se
trouvent surtout les cétones qui, par élimination d'eau
entre molécules soit identiques, soit difïerentes, per-
mettent la construction d'édifices moléculaires très com-
plexes.
Ce fut par cette voie que, en 1881, Claisen et Clapa-
rède (*), en traitant par l'acide chlorliydrique gazeux un
mélange d'aldéhyde benzoïque et d'acétone, obtinrent la
dibenzylidène-acétone :
2C«II^C0H + H'C.CO.CIP = (.«[F Cil : Cil - CO
-CH : CILC^H^ + ^iHU
Et, chose remarquable, même une saturation incom-
plète ne fournit, à côté de l'aldéhyde benzoïque inatta-
quée, que du dérivé dibenzylidénique, jamais de mono.
L'identité des deux groupes méthyle avait donc eu pour
résultat une égale vitesse de réaction avec l'oxygène de
l'aldéhyde benzoïque.
Il nous a semblé intéressant d'étudier l'influence du
remplacement d'un atome d'hydrogène par le chlore dans
l'acétone: le groupe GH'* restant conserverait-il sa faculté
(■) Berichte der deutscit. chein. Gesellschaft, t. XIV, p. 350.
( 314 )
de céder H- à l'oxygène de la benzaldéhyde et, d'autre
part, le H- du groupe CH-Cl pourrait-il se combiner
comme le H- du groupe CH^?
En un mot, nous avons étudié l'action de l'acide chlor-
hydrique gazeux sur un mélange équimoléculaire d'aldé-
hyde benzoïque et de monochloracétone.
Nous ne dirons qu'un mot de ces deux matières pre-
mières suffisamment connues.
La monochloracétone a été préparée par la méthode
de Fritsch (*), qui nous a donné les meilleurs résultats.
Quant à l'aldéhyde benzoïque, le produit pur du com-
merce suffit.
Nous avons opéré à une température de — 10°; car,
faute de réfrigération, Baeyer (**), qui, en 18G7, avait déjà
essayé la synthèse réalisée quatorze ans plus tard par
Claisen et Claparède, n'avait obtenu que des produits
résineux.
Condensation de l'aldéhyde benzoïque et de la
monochloracétone.
Comme appareil producteur d'acide chlorhydrique
gazeux, nous nous sommes servi de celui basé sur la
réaction de l'acide sulfurique concentré sur le chlorure
ammonique et qui permet de régler à volonté la produc-
tion d'acide chlorhydrique.
Un flacon de Drechsel chargé d'acide sulfurique fai-
(*) Annales de Liebig, 279, p. 310.
(•*) Berichle. t. V!, p. '254.
( 315 )
sait suite ; il nous renseignait sur la rapidité du déga-
gement.
Le mélange équimoléculaire d'aldéhyde benzoïque et
de monochioracétone se trouvait dans un ballon à
distillation plongé dans un bain réfrigérant de glace et
de sel.
Pour terminer, un tube en U renlerniant un peu d'acide
sulfurique nous indiquait la plus ou moins grande inten-
sité d'absorption de l'acide chlorhydrique.
A cause du temps li'ùs long qu'exige la saturation, il
ne convient pas d'opérer sur de trop grandes quantités :
46^,:2o de monochioracétone et o5 grammes d'aldéhyde
benzoïque sulïisent.
Au commencement, rabsori)tion est très rapide ; elle
diminue petit à petit, sans toutefois jamais s'arrêter; on
règle l'arrivée de HCl de manière que de rares bulles se
dégagent du tube en U.
Le mélange devient peu à peu rose, rouge, rouge foncé;
en même temps, il s'épaissit fortement.
Après douze heures, l'absorption est très lente; il est
inutile de prolonger l'action de HCl : on ne ferait (jue
diminuer le rendement par suite de la formation de pro-
duits résineux.
Le contenu du ballon est versé dans de l'eau froide à
laquelle on ajoute petit à petit du marbre pulvérisé pour
neutraliser le très grand excès de HCl.
Quand la réaction se ralentit, on chaulfe légèrement
au bain-marie, tout en maintenant un excès de CaCO''%
jusqu'à cessation complète de tout dégagement.
Le produit plus lourd que l'eau se rassemble au fond
du vase sous forme d'une masse huileuse; il a perdu sa
couleur rouge foncé et est devenu jaune.
( 510 )
Oii (iltre sur lilue mouillé, lave à l'eau et porte à
l'éluve; quand le (iltre est sec, le produit le traverse et
est reçu dans un matras assez grand.
On obtient ainsi un liquide jaune possédant l'odeur
caractéristique et irritante de la monocliloracétone.
Quelque soin que l'on apporte à la condensation, il
reste en effet un assez grand excès des constituants.
Pour s'en débarrasser, le mieux est de se baser sur la
propriété que possèdent l'aldéhyde benzoïque et la
monochloracétone de contracter avec le bisulfite sodique
une combinaison cristalline, tandis que la benzylidène-
chloracétone ne le fait pas.
On agite donc vigoureusement et à diverses reprises
avec un volume égal de solution concentrée de bisullite;
on laisse en contact vingt-quatre heures.
Il se forme une masse cristalline de bisullîte-benzal-
déhyde et de bisulfite-chloracétone; on filtre sous pres-
sion et lave soigneusement les cristaux à l'éther.
l.a solution éthérée séparée de la solution de bisulfite
est lavée à l'eau aussi longtemps que cette dernière
devient acide, puis déshydratée par du chlorure calcique.
Après avoir chassé l'éther, on soumet à la distillation
fractionnée sous pression réduite.
Nous nous sommes servi de l'appareil de Briihl et
avons opéré à une pression de 15 millimètres.
Le ballon à distiller est chauffé au bain d'huile; le
thermomètre monte rapidement et, après que quelques
gouttes seulement ont passé, il atteint 145°; on recueille
alors dans un deuxième tube.
Le thermomètre reste aux environs de 145° ; un liquide
jaune, mobile passe en assez grande quantité, tandis qu'il
y a un faible dégagement de HCI qui se perd dans la
trompe.
( 3^7 )
A un moment donné, la distillation s'arrête; le ther-
momètre redescend; il reste encore dans le ballon une
masse noire assez importante.
On enlève le bain d'huile, on chauffe à teu nu et
recueille dans un troisième tube.
fl passe un liquide rouge de plus en plus foncé et de
plus en plus épais; bientôt la température de SCM)" est
atteinte; il ne passe plus que quelques gouttes noires; on
interrompt la distillation.
Le premier tube renferme de l'aldéhyde benzoïque et
de la benzylidène-chloracétone; on enlève la première
par un traitement au bisulfite et on retrouve un peu de
benzylidène-chloracétone qu'on ajoute à la portion prin-
pale qui se trouve dans le deuxième tube.
Cette portion principale est encore loin d'être pure;
elle émet des vapeurs d'acide chlorhydrique dont il con-
vient de la débarrasser avant de procéder à une redistil-
lalion; sans cette précaution, on aurait, lors de la
deuxième distillation, un charbonnement assez intense et
en conséquence une diminution du rendement; le mieux
est de la mettre une nuit dans un exsiccateur au vide en
présence de chaux vive.
Le troisième tube renferme, mais en petite quantité,
une masse rouge foncé, pâteuse; on la traite par un peu
d'alcool ou d'éther; bientôt il se sépare des cristaux
qu'on exprime entre des feuilles de papier à filtrer pour
les débarrasser des matières poisseuses qui les imprègnent;
quant à la purification ultérieure, nous en reparlerons à
l'article dibenzylidène-chloracétone (*).
('j Voir page 323.
( 518 )
Le contenu du deuxième tube, privé d'acide chlorhy-
drique, est distillé de nouveau sous pression réduite; le
produit passe à 145° et ne laisse qu'un léger résidu; tou-
tefois on ne peut encore obtenir une cristaUisation, à cause
de la surfusion opiniâtre que maintient la moindre impu-
reté.
Une troisième distillation est nécessaire; cette fois
on obtient un liquide jaune pâle à reflet vert, qui, mis
dans un mélange réfrigérant, ne tarde pas à se prendre
en une masse cristalline blanc jaunâtre. (Si l'on a déjà du
produit cristallisé, il sutïit d'amorcer à la température
ordinaire.)
Les cristaux sont exprimés entre des feuilles de papier
à filtrer, mais avec beaucoup de précaution, car, même
pur, le produit fond à 32".
Ensuite, les cristaux sont dissous dans le moins pos-
sible d'étber de pétrole additionné d'un peu de benzol ;
par évaporation spontanée, la benzylidène-chloracétone
cristallise en grandes tables rbombiques, absolument
blanches et pures; séparées de ces premiers cristaux, les
eaux mères donnent par évaporation de nouveaux cris-
taux semblables aux premiers.
A un moment donné, les dernières eaux mères colorées
en jaune et où se sont concentrées toutes les impuretés
se refusent à cristalliser, bien qu'elles renferment encore
une notable proportion de benzylidène-chloracétone; une
nouvelle distillation (sous pression réduite) est nécessaire,
et le distillât amorcé cristallise; ces cristaux seront puri-
fiés par recristallisation hors de l'éther de pétrole.
Le rendement en produit pur ne dépasse pas 40 % de
la quantité de monochloracétone employée.
(319)
L'analyse nous a donné les résultats suivants :
I. 0,2022 de substance ont fourni 0,4910 CO' et 0,096 H'-O
11.0,2005 — — 0,4887 CO- et 0,095 H-0
111.0,2085 — — 0,508 CO^ et 0,0985 H-0
IV. 0,5003 — — 0,235 AgCl.
Soit :
calculé pour : C*H' CH = CH.CO.CH^CI.
Trouvé.
Calculé. I. II. III. IV.
C" 1 20 = 66,48 . . 66,22 66,42 66,44 —
H' 9 = 4,98 . . 5,22 5,26 5,24 —
0 16 = . . — — — —
CI 55,5 = 19,66 . . — — — 19,48
180,5
Ce qui nous permet de conclure à la formule
C^^^H^OCl ; le fait que la substance ne contracte pas de
combinaison avec le bisulfite sodique indique que l'union
s'est faite par le groupe CH^ de la monochloracétone et
que la formule rationnelle est
eiPCH = CH - CO - CH-Cl.
Nous lui donnerons le nom de monobenzylidène-
chloracétone.
L'équation de la réaction est la suivante :
CW.COH + H^C.CO.CH^ = C'H^CH = CH.CO.CH^CI + HO.
( 320 )
Propriétés. — La monobenzylidène-chloracétone cris-
tallise le mieux de l'éther de pétrole additionné d'un peu
de benzol, en grandes tables rhombiques blanches, fon-
dant à 52°; fondue, elle se maintient longtemps à l'état
de surfusion.
Elle distille à
145° sous une |)i'essioii de 13 millimètres.
1G0»,5 _ _ 25 —
170° — — 40 —
Elle est très soluble dans l'alcool, l'éther, le benzol,
beaucoup moins dans l'éther de pétrole et d'autant moins
que son point d'ébullition est moins élevé; insoluble dans
l'eau.
Son odeur très agréable rappelle celle de la coumarine;
sa saveur est brûlante.
Pour caractériser sa fonction cétonique, nous en avons
fait deux dérivés : l'hydrazone et l'oxime.
Benzylidène-chloracélhydrazone.
Le meilleur procédé de préparation est le suivant : on
dissout dans de l'alcool la quantité théorique (une molé-
cule) de phénylhydrazine pure, fraîchement redistillée;
on y ajoute la quantité théorique (une molécule) de ben-
zylidène-chloracétone également dissoute dans l'alcool.
Au bout de quelques minutes, l'hydrazone peu soluble
se précipite en grandes masses cristallines jaune rou-
geâtre; les cristaux sont séparés, lavés avec un peu
d'alcool et purifiés par recristallisation.
On obtient de belles aiguilles jaune pâle qui ne tardent
pas, même à l'obscurité, à se colorer en brun et ce, quelle
( 32i )
que soit la pureté du produit; ce phénomène se produi-
sant encore avec une liydrazone à point de fusion con-
stant, purifiée par six cristallisations successives.
L'analyse nous a fourni les résultats suivants :
0,2553 de subslancc ont donne 0,6579 CO^ el 0,1324 H^O
0,2240 — _ 21,1 C'N (sur l'eau) à I7°,5
et sous 764 miiliinèlrcs Hg.
Calculé pour :
CH\CH = CH.C-(:H*C1.
!l
N
N- H
Trouvé.
Calculé. 1. n.
C'« = 192 70,97 70,78 —
11'" = 15 5,54 5,80
N^ = 28 10,72 — 10,88
CI = 55,5 — _ _
270,5
La réaction s'est passée comme suit :
C«H\CH :CH.C0.CH*CI + C«IP.NH.]NH* = C«H«.CH
:CH.C-CH*C1+H'0.
Il
N
N-H
3°'^ SÉRIE, TOME XXXVI. 22
( 322 )
Propriétés. — La benzylidène-Ghloracéthydrazone cris-
tallise en fines aiguilles jaunes fondant à 94".
Trèssoluble dans l'étber, dans l'alcool à chaud, beau-
coup moins dans l'alcool à froid, insoluble dans l'eau.
Les cristaux, même à l'obscurité, ne tardent pas à se
colorer.
Benzylidène-chloracétoxime.
A la solution métbylique de chlorhydrate d'hydroxyla-
mine (une molécule), on ajoute une solution métbylique
d'hydrate sodique (une molécule) et enfin, sans s'inquiéter
du précipité de chlorure sodique, on termine par l'addi-
tion de benzylidène-chloracétone (une molécule) à l'état
fondu; cette dernière, trèssoluble, n'a pas besoin d'être
dissoute au préalable.
On laisse en contact vingt-quatre heures, on filtre; le
liquide à peine coloré en jaune est évaporé à siccité au
vide.
Le précipité, qui renferme, outre le chlorure sodique,
une notable proportion d'oxime, est épuisé par l'étber qui,
par évaporation, abandonne de l'oxime presque pure.
Le résidu de l'évaporation de la solution alcoolique est
également épuisé par l'étber; d'où, par évaporation de ce
dernier, une nouvelle quantité d'oxime qu'on réunit à la
première.
Une seconde cristallisation de l'étber donne un produit
pur.
L'analyse nous a fourni les résultats suivants :
I. 0,1890 de substance ont donné 0,4265 CO'- et 0,090 H'^O
11.0,1802 — — 0,4060 CO- et 0,0872 HO
III 0,2830 — — 18C'ï\(sur l'eau) à 19,"5
et sous 762 millimètres Hg.
(
323 )
Calculé pour :
C«H\CH =
= CHX -
II
N
1
0
1
H
CH^CI.
Trouvé.
Calculé.
I.
II.
C» = \ 20
61,58
64,55
64,45
11'"= 40
5,41
5,29
5,52
N - 44
7,4 6
—
—
Cl = 55,5
—
—
—
0 = 16
—
—
—
III.
7,50
495,5
La réaction peut se formuler ainsi :
Cm^CH = CH.CO.CH^CI + NH'OH
= C'H'.CH = CH.C - CH'CI + H'O.
Il
N
I
0
H
Propriétés. — La benzylidène chloracétoxime cristallise
en petits prismes rhombiques blancs fondant à 130°-
131° en se décomposant; ils sonl solubles dans l'éther,
moins solubles dans l'alcool, insolubles dans l'eau.
L'odeur est faible, mais agréable.
Dihenzylidène-chlor acétone.
Nous avons vu que, lors de la première distillation sous
pression réduite, nous avons séparé une minime quantité
de substance ayant distillé de 170''-300'' et qui, traitée
par l'alcool, nous avait fourni quelques cristaux.
( 524 )
Ayant réuni les produits provenant d'une série de con-
densations, nous avons pu songer à une purification
complète.
Les premiers cristaux, redissous à chaud dans l'alcool,
se sont séparés par refroidissement sous la forme de
petites aiguilles jaunes.
Après plusieurs cristallisations, nous avons obtenu un
produit pur à point de fusion constant : 87".
L'analyse de celui-ci nous a fourni les résultats suivants:
I 0,2059 de substance ont donné 0,5735 CO' et 0,0942 H'O
IL 0,2044 — — 0,5688 CO* et 0,092 H'O
IIL 0,2890 - — 0,1545 AgCl.
Calculé pour : C«H^CH = CH.CO.CH = CH.C«H».
Trouvé.
III.
Calculé.
I.
II
C«' = 204
75,97
75,92
75,88
H'*= 14
4,80
5,08
4,99
0 = 16
—
—
—
Cl = 55,5
1 3,22
—
—
C'était donc la dibenzylidène-chloracétone.
La formule de la réaction est :
2C«H^C0H+CH^C0.CIP=C«H'' en : CH CO.CH : CILC«H''+2H^0.
Propriétés. — La dibenzylidène-chloracétone se pré-
sente en cristaux inodores jaune pâle, fondant à 87",
assez solubles dans l'éther, peu solubles dans l'alcool,
surtout à froid, insolubles dans l'eau.
Pour préparer ce corps, il faudrait chercher un autre
( 325 )
procédé; celui-ci ne nous le donne que comme produit
accessoire, et le rendement est à peine de 1 % de la quan-
tité de monochloracétone employée.
Conclusions.
L'introduction d'un atome de chlore dans l'un des
groupes méthyle de l'acétone n'a pas influencé la facilité
de l'autre groupe méthyle à se combiner avec un reste
benzylidénique; dans le groupe CH'^Cl, au contraire, ce
n'est qu'à grand' peine que H- se combine à l'oxygène
de la benzaldéhyde.
Dans l'acétone, où nous avons deux groupes méthyle
identi(iues, nous constatons l'égalité des vitesses réac-
tionnelles, ayant comme résultat l'obtention directe de
la dibenzylidène-acétone.
Dans la monochloracétone, oîi se trouvent un groupe
CH' et un groupe Cll-Cl, nous observons une très grande
différence de vitesses réactionnelles ; il en résulte la for-
mation d'une forte proportion de dérivé monobenzylidé-
nique et de très peu de dérivé benzylidénique.
[1 serait intéressant de poursuivre cette étude et de
voir l'influence d'un substituant monovalent R autre que
le chlore, sur l'aptitude à la condensation des groupes
CH'^et CH'^R de l'acétone monosubstituée.
COMITE SECRET.
II est donné lecture, par les sections, des listes des
candidatures présentées pour les. places vacantes.
( 326 )
€Iii%.l§$iiE: DES Iiï:TTRE:S.
Séance du i? octobre 1898.
M. F. Vander Haeghen, directeur.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents: MM. A. Giron, vice-direcleur ; S. Bor-
mans, Ch. Piot, Ch. Potvin, J. Stecher, T.-J. Lamy,
L. Vanderkindere, le comte Goblet d'Alvielia, Ad. Prins,
J. Vuylsteke, le baron de Chestret de Hanefîe, Paul Fre-
dericq, G. Kurtli, Ch. Mesdach de ter Kiele, H. Denis,
le chevalier Ed. Descamps, Georges Monchamp, Ern.
Discailles, membres; J.-C. Vollgraff, associé; V. Brants,
Ch. De Smedt, M. Wilmotte et Ern. Gossart, correspon-
dants.
M. Jules Leclercq s'excuse de ne pouvoir assister à la
séance.
COBRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'Intérieur et de l'Instruction publique
transmet une ampliation de l'arrêté royal en date du
25 juillet, décernant le prix quinquennal de littérature
française, pour la période de 1895-1897, à M. Albert
Giraud, pour son ouvrage : Hors du Siècle.
(327 )
— M. Charles Rivier, pasteur à Genève, remercie la
Classe, tant en son nom qu'au nom de sa famille, pour
les sentiments de condoléance exprimés lors de la mort
de son frère, Alphonse Rivier, associé de la Classe.
M. Descamps accepte de rédiger, pour VAnnuaire, la
notice de M. Alphonse Rivier.
— M'"*" veuve Banning remercie aussi la Classe pour
les sentiments de condoléance qui lui ont été exprimés
lors de la mort de son mari, M. Emile Banning, memhre
titulaire.
M, le Secrétaire perpétuel ajoute que M. le général
Brialmont a accepté de rédiger, pour VAnnuaire, la
notice de M. Banning.
— M. le Secrétaire perpétuel fait savoir qu'il a adressé
les félicitations de l'Académie à M. Arthur Hazelius, au
sujet du vingt-cinquième anniversaire de la fondation de
son musée d'ethnographie Scandinave, à Stockholm, qui
doit se célébrer le 25 octobre courant.
— M. le Ministre de l'Intérieur et de l'Instruction
publique envoie, pour la bibliothèque de l'Académie, un
exemplaire des ouvrages suivants :
1° Élude sur la propriété foncière dans les villes du
moyen dge et spécialement en Flandre; par G. Des Marez;
2" Histoire parlementaire de la Belgique, 3® série, t. II,
fasc. 1-5; par Paul Hymans et Alfred Delcroix.
— Remerciements.
— M. le Ministre des Affaires étrangères envoie le
tome III du Catalogue de la bibliothèque de son Départe-
ment. — Remerciements.
( 328 )
— M. Jules Frederichs, professeur à l'Athénée royal
(l'Ostende, remet le premier exemplaire imprimé de son
Manuel d'histoire moderne, qui a remporté un prix
De Keyn en mai 1898.
— Hommages d'ouvrages :
1° A. Fleurs de l'antique Orient; B. Les figures symbo-
liques du Yi-King; C. Le chinois parlé au VI" siècle A. C;
par le chanoine C. de Harlez ;
2° De l'intervention du ministère public dans le jugement
des affaires civiles; par Ch. Mesdach de ter Kiele;
3° A. Les reliques de sainte Julienne de Cornillon à
l'abbaye de Villers; B. De l'organisation religieuse dans les
colonies; par G. Monchamp;
4° L'Aurige de Delphes ; par Théophile Homolle ,
associé de la Classe;
5° Le libre arbitre; par Ernest Naville, associé;
6" La Révolution et les pauvres; par Léon Lallemand,
associé (présenté par M. Brants, avec une note qui ligure
ci-après) ;
7" Manuel d' histoire moderne ; par Jules Frederichs;
8*" A. Détresse financière du Gouvernement autrichien...
en i79S-l795; B. Fouilles dans l'ancienne abbaye de Sta-
velot; C. La collection numismatique de Charles de Lor-
raine; par G. Cumont;
9" A. Le noble de Gand à la bannière portant une
foi (1582); B. Un tiers de sou d'or inédit de Maestricht;
par le vicomte B. de Jonghe;
10** Une expédition belge au Nil; par Léon Chômé
(présenté par M. Discailles, avec une note qui figure
ci -après);
11** Jaques Bretex ou Bretiaus, — Le Tournoi de Chau-
( 329 )
vency; publié par Gaëtaii Hecq (présenté par M. Marchai,
avec une note qui figure ci-après);
12" Le Mahométisme d'après un (ivre récent; par Louis
de la Vallée Poussin.
— Remerciements.
NOTES BIBLlOGRAPmQUES.
J'ai l'honneur de présenter à la Classe un nouveau
volume dû à M. Léon Lallemand, correspondant de l'In-
stitut de France. Il a pour titre : La Révolution et les
pauvres (1).
Depuis longtemps, M. Lallemand s'est fait une spécialité
des questions de charité et d'assistance. Ayant appartenu
pendant de longues années au service de la bienfaisance
de la Seine, il était au courant des services techniques.
Il s'est, depuis lors, livré à de laborieuses études sur
l'organisation et l'histoire de la charité privée ou légale.
Il a réuni, en vue de ses études, une bibliothèque
spéciale vraiment précieuse, un vrai « fonds de l'assis-
tance ».
Ce n'est pas la première fois que l'Académie reçoit
les travaux de M. Lallemand. Ils sont nombreux et ils
ont amené l'élection du fécond écrivain en qualité d'asso-
cié de notre Classe.
Le nouveau volume qu'il publie fait partie d'une vaste
(1) Paris, Picard, 1898, 1 vol. in-8^
( 330 )
histoire de la charité dont il a conçu le plan. Il s'occupe
de l'œuvre révolutionnaire et de ses effets. Après avoir
donné un coup d'œil aux projets préconisés à la lin de
l'ancien régime, il analyse le rapport et le système du
Comité de la mendicité à l'Assemblée constituante. Tl y
relève, dit-il, trois erreurs fondamentales: nivellement
des secours, mise à la charge de l'État des dépenses d'as-
sistance, spoliation des biens hospitaliers.
C'est l'application de ces principes, telle qu'elle fut orga-
nisée par le gouvernement révolutionnaire, qu'analyse
M. Lallemand. Il le fait avec une richesse vraiment sur-
prenante de documents, puisés en grande partie aux
archives otïicielles: c'est à coups de faits multiples, de
citations serrées, à foison, qu'il expose les résultats
désastreux des spoliations, de la destruction de la charité
libre, qu'il montre la détresse lamentable qui en fut la
suite. De nombreux documents sont reproduits in extenso,
d'autres cités par extraits, ou analysés. Encore l'auteur
a-t il soin de nous dire qu'il ne s'agit que d'exemples qu'il
serait aisé de remplacer par des centaines de pièces ana-
logues. On en trouvera plusieurs concernant les départe-
ments belges. M. Lallemand a eu le louable souci de
laisser la parole aux faits, et les faits se sont groupés sous
sa plume avec une éloquence instructive.
Nous n'avons ni à analyser ni à examiner ici tout le
système de M. Lallemand, mais il faut remercier notre
savant confrère de cette nouvelle contribution, laborieuse
et importante, à l'histoire des pauvres et de la charité.
V. Brants.
( 351 )
Sous ce titre : Une expédition belge au Nil, M. Léon
Chômé, directeur de la Belgique militaire, a écrit une bro-
chure dont il fait hommage à la Classe.
Depuis quinze ans, la cause de la civilisation dans
l'Afrique centrale était gravement compromise par l'in-
surrection du Mahdi; en avril 1883, le dernier vapeur
égyptien avait descendu le Nil de Lado à Khartum.
Dans la province équatoriale, les Derviches régnaient
en maîtres, proscrivant, rançonnant, pillant les indi-
gènes.
Il importait de rétablir la libre navigation sur le Nil
entre Khartum et Redjaf-Lado.
L'Angleterre et l'Etat indépendant du Congo, unissant
dans ce but leurs efforts, décidèrent que les opérations
seraient menées simultanément par les troupes du Congo
vers Redjaf, par les soldats anglais vers Khartum.
Il y a cinq semaines, à la suite de la bataille d'Omdur-
man, Khartum était prise.
Dix-huit mois auparavant, les Belges, eux, avaient
occupé Redjaf.
C'est l'expédition de Redjaf qui fait l'objet de la bro-
chure de M. Chômé.
Le récit de cette expédition, qui fut menée avec autant
d'habileté que d'énergie par l'héroïque commandant
Chaltin, est inédit.
La brochure de M. Chômé est intéressante, bien docu-
mentée et écrite avec verve.
Ernest Discailles.
( 332 )
C'est Heuri-Florent DelmoUe, membre correspondant
de l'Académie depuis le 8 mai 1855 jusqu'au 7 mars 1856,
jour de sa mort, qui publia en 1855, dans la Bibliogra-
phie de la littérature romane en Belgique, le poème de
Jaques Bretex : Les Tournois de Cliauvenci, d'après une
copie faite par son père, Philibert Delmotte, à qui il
avait succédé en qualité de bibliothécaire de la ville
de Mons.
Cette édition était aussi parfaite qu'elle pouvait l'être,
en raison du degré d'avancement, à cette époque, de
la science philologique et de la science archéologique.
Mais depuis, la philologie romane, tout autant que
l'archéologie, a fait de grands progrès, grâce aux travaux
remarquables des Scheler, des Stecher, auxquels j'ajou-
terai ceux de notre jeune confrère Maurice Wilmotle;
aussi, les Tournois de Chauvenci, qui constituent une
source précieuse pour l'art de la guerre, l'étude des usages
somptuaires, l'histoire des costumes, des instruments de
musique, etc., méritaient-ils d'intéresser la jeune géné-
ration qui s'adonne à la culture des lettres et de l'histoire.
Et c'est un jeune romaniste, M. le capitaine commandant
d'infanterie Gaétan Hecq, déjà connu par quelques inté-
ressants ouvrages de philologie, qui a donné une nouvelle
édition du poème de Jaques Bretex dans la collection
des travaux publiés par la Société des Bibliophiles,
établie à Mons.
M. Hecq a fait précéder le poème du poète picard ou
hennuyer — on n'est pas tixé encore sur le lieu exact de
( 333 )
sa naissance — d'un résumé à l'usage des personnes non
initiées au langage écrit du XIÏP siècle.
J'ai l'honneur d'offrir ce volume à la Classe, au nom
de l'auteur.
Chev. Edm. Marchal.
ÉLECTION.
La Classe désigne M. Pirenne pour remplacer M. Wau-
ters en qualité de membre de la Commission de la Bio-
graphie nationale.
( 354 )
€IiANSE DEJS BEAUX-ARTS.
Séance du 13 octobre 1898.
M, Ch. Tardieu, directeur, président de l'Académie.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. J. Robie, vice-directeur ; F. -A.
Gevaert, Th. Radoux, Peter Benoit, J. Demannez, P.-J.
Clays, G. De Groot, Gustave Biot, H. Hymans, Th. Vin-
çotte, Alex. Markelbach, Max. Rooses, A. Hennebicq,
Éd. Van Even, Alfred Cluysenaar, le comte Jacques de
Lalaing, J. Winders, Ém. Janlet, H. Maquet, J. Van
Ysendyck, membres; J.-B. Meunier, FI. van Duyse,
C. Hermans, A. Bourlard et Em. Mathieu, correspondants.
M. le Secrétaire perpétuel adresse les félicitations de
la Classe à M. Ch. Tardieu au sujet de son heureux
retour du Congo, où l'honorable Président de l'Académie
avait été invité, avec d'autres journalistes belges, par le
Gouvernement central de l'État Indépendant, à l'inau-
guration, le 10 juillet dernier, du chemin de fer de
Matadi au Stanley-Pool.
Des applaudissements accueillent cette motion ainsi
que la réponse de M. Ch. Tardieu.
( 335 )
CORRESPONDANCE.
M. le Secrétaire perpétuel donne lecture d'une lettre de
M"'« Samuel, annonçant la mort de son mari, M. Adolphe
Samuel, membre de la Classe, né à Liège le 11 juillet
1824 et décédé à Gand le 11 septembre dernier.
M. Marchai ajoute qu'il a prononcé le discours acadé-
mique d'usage, accédant ainsi à la demande de M. ïar-
dieu, lequel se trouvait empêché par ses devoirs profes-
sionnels de parler au nom de la Classe aux funérailles,
qui ont eu lieu le 15 septembre.
La Classe, après avoir approuvé le dernier hommage
rendu, séance tenante, par M. le Directeur Tardieu à la
mémoire de l'éminent directeur du Conservatoire royal
de Gand, décide qu'une lettre de condoléance sera
adressée à M'"" veuve Samuel.
Elle vote l'impression au Bulletin du discours de
M. Marchai.
— La Classe prend ensuite connaissance d'une lettre de
M"'*" Charles Garnier, annonçant la mort de son mari,
M. Jean-Louis-Charles Garnier, membre de l'Institut
et associé de l'Académie, décédé à Paris le 5 août dernier,
à l'âge de 72 ans.
Une lettre de condoléance sera également adressée à
]y{me veuve Garnier.
— M. le Secrétaire perpétuel donne lecture du dis-
cours prononcé par M. Th. Radoux, directeur du Con-
servatoire royal de Ljége, le 25 septembre dernier, comme
( 556 )
délégué de l'Académie à rinauguratioii de la statue éle-
vée à Verviers, à Henri Vieuxtemps.
[.es remerciements de l'Académie sont adressés à
M. Radoux, dont le discours figurera au Bulletin.
— M. le Ministre de l'Agriculture et des Travaux
publies transmet :
1° Une copie du procès-verbal du jugement du grand
concours de peinture de cette année, décernant le grand
prix à M. Emile Vloors, de Borgerhout, élève de l'Insti-
tut des beaux-arts d'Anvers ; un premier second prix a
été voté à M. Camille Lambert, d'Arlon, élève du même
Institut; un deuxième second prix à M. Jules Van Bies-
broeck, de Portici, élève de l'Académie royale des beaux-
arts de Gand, et une mention honorable à M. Félix Gogo,
d'Anvers, élève de l'Institut d'Anvers.
Sur la demande de M. le Ministre, la proclamation de
ces résultats aura lieu dans la prochaine séance publique
de la Classe ;
2° a) Le premier rapport semestriel de M. Victor De
Haen, premier prix du grand concours de sculpture de
1894 ; 6) Le premier rapport semestriel de M. Jacques
Marin, boursier pour la sculpture de la fondation Gode-
charle en 1897. — Renvoi à la section de sculpture et à
M. Marchai, rapporteur;
5° Le compte rendu de son séjour à Paris (décembre
1897-avril 1898), par M. Martin Lunssens, premier prix
du grand concours de composition musicale de 1895. —
Renvoi à MM, Gevaert, Huberti et Mathieu.
4° Ln exemplaire des ouvrages suivants pour la Biblio-
thèque de l'Académie :
Uarl flamand; la renaissance du XIX" siècle; l'école de
( 337 )
1850 et les peintres contemporains; par Jules Du Jardin;
Ln peinture en Europe : La Hollande; par Georges
Lafenestre et Eug. Richtenberger.
— Remerciements.
Djsiours prononcé le 13 septembre 1898, au nom de la
(liasse des beaux-arts, aux funérailles d'Adolphe Samuel;
par M. le chevalier Edm. Marchai, Secrétaire perpétuel
lie l'Académie.
Messieurs,
i.a mort d'Adolphe Samuel ne saurait susciter qu'un
long et profond écho dans le sein de la Classe des beaux-
arts à laquelle a appartenu l'éminent musicien. Au
Directeur incombait de parler en cette douloureuse
circonstance. Malheureusement les devoirs professionnels
du journalisme retiennent en ce moment loin d'ici
M. Charles Tardieu. Toutefois, voulant rendre à la mé-
moire de Samuel le derniei- hommage des sentiments de
l'Académie, j'ai accepté de venir parler au nom de notre
distingué Directeur, en utilisant, à cet effet, les rensei-
gnements qu'il m'a fournis sur la carrière musicale de
notre regretté confrère.
L'Académie royale de Belgique perd, en la personne
d'Adolphe Samuel, un de ses coopérateurs les plus
dévoués et les plus éminents.
Membre de la Classe des beaux-arts depuis un quart
de siècle, il en fut le Directeur en 1893; son discours
eut pour sujet : L'art libre et l'enseignement de la musique,
3™* SÉRIE, TOME XXXVI. 23
( 338 )
question non dépourvue d'intérêt et qui souleva d'assez
vives controverses. Non seulement Samuel présida, en
cette circonstance, avec autant de tact et de courtoisie
que d'autorité, mais il se plaisait à intervenir par ses
idées dans les discussions des séances : il y déployait
un talent de parole qu'il exerçait avec une égale aisance,
soit que la question débattue se rattachât à l'art qu'il
professait et pratiquait, soit qu'elle fût du ressort des
arts plastiques, ou mèine qu'elle côtoyât l'érudition his-
torique ou littéraire.
Samuel, en effet, ne fut pas seulement un musicien de
mérite, il fut aussi un écrivain de valeur, un critique
abondamment informé, ainsi qu'en témoignent les écrits
qu'il donna à la Revue trimeslrielle, à la Palria belgica et
dans l'un des trois volumes de Cinquanle ans de liberté
publiés en 1880, et où figure son intéressant travail sur
La musique en Belgique et les musiciens belges depuis 1850,
travail qu'il se proposait de faire suivre d'une Histoire
générale et populaire de la musique, restée maliieureuse-
ment inachevée. Il fut aussi un collaborateur assidu de la
Civilisation, de ÏÉclio de Bruxelles, du National, du Télé-
graphe, de V Indépendance belge, de la Flandre libérale, etc.,
qui renferment de lui nombre d'articles de critique musi-
cale. La variété de ses connaissances et de ses aptitudes
dépassait même le cadre esthétique, comme l'Académie
en eut la preuve dans le zèle et l'intelligence qu'il mit à
s'acquitter de son mandat de membre de la Caisse cen-
trale des artistes.
Sa vocation musicale ne s'alïirma pas d'emblée. Né à
Liège le 11 juillet 1824, on le voit pendant dix années
de sa première jeunesse — de la septième à la dix-sep-
tième — se consacrer à la peinture, d'abord dans l'ate-
( 559 )
lier du peintre Van Marcke, puis aux Académies des
beaux-arls de Liège et de Bruxelles.
Toutefois, il avait déjà le goût de la musique, sinon le
dessein de s'y consacrer, ainsi qu'en témoignent quelques-
unes de ses compositions qui datent de ses premières
années. C'est à partir de i842 — il avait dix-huit ans —
que la musique le prend tout entier; et trois années ne
s'étaient pas écoulées que, déjà lauréat des cours de
piano et d'orgue, d'harmonie, de contre-point, de fugue
et de composition, tant au Conservatoire de Liège qu'à
celui de Bruxelles, et déjà pianiste applaudi dans les con-
certs, il remportait brillamment, en 4845, le premier
grand prix de composition musicale aux concours dits
de Rome, ces prix de Rome qui devaient bientôt compter
Gevaert, Stadfeldt, Lassen, Pierre Benoît, Radoux.
Il arrivait à Rome à une époque où l'illustre Verdi
commençait à prendre possession de la scène lyrique
italienne : son art de puissant mélodramaturge, qui ne
s'était pas encore affiné au contact des écoles d'Allemagne
el de France, se substituait victorieusement au rossi-
nisme épuisé et même à l'art des Bellini et des
Donizelti, ces rossinistes émancipés auxquels Verdi
lui-même doit beaucoup.
La jeunesse de Samuel — il n'avait pas viiigt-ciuq ans
— subit cette influence alors prédominante avec la même
candeur qui jette aujourd'hui dans le wagnérisme la
plupart des jeunes compositeurs de tous les pays. Lu
grand opéra italien en quatre actes, dont il rapporta la
partition en Belgique, en 1848, était du Verdi le plus
pur : Giovanni da Procida en était le héros. L'œuvre ne
fut jamais représentée, et son auteur ne tarda pas à la
renier.
( 540 )
Il connut Meyerbeer, Mendeissohn, Ferdinand Hilier;
il se lia d'amitié et entretint une correspondance active
et suivie avec Berlioz. Il admira Wagner. Ces influences
écartèrent la précédente, et dès lors Samuel fut tout à
la symphonie.
Sans énumérer ici toutes les productions d'un compo-
siteur auquel on doit des mélodies, plusieurs opéras, des
symphonies, des cantates et des messes, qu'il suffise de
rappeler que c'est comme symphoniste qu'il remporta,
avec son Christus , tour à tour acclamé à Gand , à
Bruxelles et à Cologne, le plus éclatant triomphe de sa
carrière, et cela, à un âge qui, pour d'autres, est celui
de l'abdication et de la retraite, alors que, pour ce
vaillant septuagénaire, ce fut celui de la maîtrise et de la
gloire.
Adolphe Samuel fut longtemps professeur au Conser-
vatoire royal de Bruxelles, et, pendant plus d'un quart
de siècle, directeur du Conservatoire royal de Gand.
Indépendamment de ses élèves Edouard Blaes, J.-B.
Vander Meulen et Nicolas Daneau, qui obtinrent aux
grands concours de composition musicale des seconds
prix et des mentions honorables, il a eu l'honneur d'y
voir remporter le premier prix par Isidore Devos, Pierre
Heckers et Paul Lebrun. De tels succès, sous sa haute
direction, suffisent pour justifler tout ce que fit Samuel
pour rehausser la réputation du (Conservatoire de Gand.
Pour finir, il faut citer à son actif deux initiatives qui
donnèrent une notable impulsion au développement
musical de notre pays : la création des Concerts popu-
laires de musique classique et l'institution des grands
festivals dont il fut le fondateur et le premier directeur.
A tous ces titres, le nom d'Adolphe Samuel est assuré
( '"5^1 )
de vivre dans la mémoire des artistes, tant à l'étranger
qu'en Belgique, et l'Académie a conscience d'être l'or-
gane de l'opinion publique en lui rendant ici un
suprême hommage.
Inauguration de la statue élevée à Henri Vieuxtemps à
Verviers, le 23 septembre 1898; discours par M. Th.
Radoux, délégué de l'Académie.
Messieurs,
Je dois à l'amitié profonde qui m'unissait à l'artiste
illustre auquel vous rendez aujourd'hui un suprême hom-
mage, l'honneur d'avoir été désigné par la Classe des
beaux-arts de l'Académie royale de Belgique pour expri-
mer en son nom les sentiments de reconnaissance qu'elle
éprouve en présence d'une manifestation qui glorifie l'un
de ses membres.
A un âge où la plupart des artistes, et des plus grands,
commencent leur carrière, Vieuxtemps était célèbre dans
les deux mondes, et sa place était marquée dans notre
Compagnie qui l'accueillit comme un espoir, dès la créa-
tion de la Classe des beaux-arts, en 1845.
( 542 )
Il avait vingt-cinq ans!
S'il est des artistes que l'Acaclémie honore en les
recevant dans son sein, il en est d'autres qui la glorifient
en y entrant. Vieuxtemps fut de ceux-là.
Enfant prodige, il tint toutes les promesses qu'avait
fait concevoir son tali^nt précoce, et jusqu'au jour où une
terrible maladie lit tomber de sa main l'archet magique
qu'elle avait porté comme un sceptre royal, Vieuxtemps
marcha de triomphe en triomphe.
Cependant, cette gloire du virtuose ne suifit bientôt
plus à son âme d'élite. Il voulut, comme quelques prédes-
tinés de l'art, les Mendelssohn, les Chopin et les Liszt,
être à la fois virtuose et compositeur, et, il faut le recon-
naître, Vieuxtemps fut un exemple éloquent de cette dua-
lité artistique.
Je l'ai dit dans le livre que j'ai consacré à sa glorifi-
cation, pour apprécier avec toute l'impartialité désirable
l'œuvre de Vieuxtemps, il faut se reporter à l'époque du
romantisme, qui commence vers 1823 avec CharlesNodier,
pour triompher avec éclat en 185D, avec V liernani de
Victor Hugo.
A partir de ce moment, le classicisme se débat en
vain contre le mouvement irrésistible du romantisme,
soulevant des querelles inoubliables entre les partisans de
ces deux manifestations de l'esprit humain.
Bientôt suivi par les George Sand , les Alfred de
Musset, les Balzac, Victor Hugo devint le chef d'un céna-
cle qui travailla avec passion à cette évolution de la litté-
rature, dont la puissance s'étendit peu après à tous les
arts libéraux.
Dans un manifeste resté célèbre, Victor Hugo disait :
ce L'esprit humain est toujours en marche. Quand le
(343 )
corps change, comment l'habit ne changerait-il pas?
La langue de iVfontaigne n'est plus celle de Rabelais,
la langue de Pascal n'est plus celle de Montaigne,
la langue de Montesquieu n'est plus celle de Pascal.
11 en est des idiomes humains comme de tout. Chaque
siècle y apporte et en emporte quelque chose. »
On ne peut donc en vouloir à Vieuxtemps d'avoir
parlé la langue musicale de son époque. C'est sous l'in-
fluence de ce mouvement romantique qu'il composa
toutes ses œuvres, et l'on peut affirmer que son concerto
en mi, entendu en Allemagne en 1841, révolutionna la
littérature du violon.
La forme en était neuve; le fond, d'une puissance
indéniable.
Exécutée plus tard à Paris, cette œuvre capitale y fit
sensation et captiva à ce point l'attention de ce grand
passionné des idées nouvelles, Hector Berlioz, qu'il en
exalta les mérites en ces termes dans le Journal des
Débats :
« Vieuxtemps est un violoniste prodigieux dans la
plus rigoureuse acception du mot. Il fait des choses que
je n'ai jamais entendues par aucun autre. Son concerto
en mi est une très belle œuvre, d'un effet splendide,
inondée de détails ravissants dans l'orchestre comme
dans la partie principale, et instrumentée en grand
maître.
)) Il maîtrise son archet et sait le faire durer tant qu'il
veut sur un son filé ou sur une cadence. Enfin, Vieux-
temps joint au mérite éminent du virtuose celui non
moins grand du compositeur. »
Un éloge aussi chaleureux de h. part d'un musicien
qui toute sa vie professa une sainte horreur de la banalité,
( 544 )
acquiert une importance capitale, et celui qui sut le
mériter ne pouvait être qu'un grand artiste. C'est ce que
fut Vieux temps.
Enumérer tous les titres de notre illustre compatriote
à l'admiration universelle me conduirait trop loin.
Il me faut cependant, avant de clore ce discours,
citer un trait qui fera connaître l'homme de cœur qu'était
Vieuxtemps :
C'était en 1875. La terrible guerre franco-allemande
avait ruiné des milliers de familles, et par suite de l'an-
nexion de l'Alsace et de la Lorraine à l'Allemagne, un
grand nombre d'habitants de ces contrées étaient venus
chercher un refuge dans la ville de Nancy.
Au récit des souffrances de ces pauvres affligés,
Vieuxtemps, n'écoutant que les élans de son cœur géné-
reux, informa la municipalité de cette ville de son inten-
tion d'y organiser un concert au bénéfice de ces
malheureux.
L'annonce seule du concours du grand artiste fit
réaliser une recette fabuleuse; mais il ne se doutait pas,
le cher grand homme, que là s'exhalerait son chant du
cygne et qu'après avoir séché les larmes de ses frères,
les siennes allaient couler.
Le fait est que, quelques jours plus tard, une attaque
de paralysie vint immobiliser cette main qui avait égrené
tant de perles! Cet archet magique, désormais muet, ne
devait plus faire vibrer les cordes de la lyre !
Ce supplice fut pendant plusieurs années encore le
triste lot du triomphateur de la veille, de l'affligé du len-
demain!
Ne semble-t-il pas vraiment que toutes les gloires
doivent s'assombrir à leur déclin?
( 345 )
Beethoven atteint de surdité, Bacli et Hàndel mourant
aveugles, et Vieuxtemps paralysé!
Eh qu'importe ! Si ces gloires chères sont entrées dans
la nuit, c'est une nuit de lumière, éclairée par le soleil
de leurs œuvres; et celles de Vieuxtemps marquent une
étape brillante dans l'art du violon et portent le sceau
d'une individualité puissante, que vous venez. Messieurs,
d'immortaliser par le bronze!
En ce moment solennel , où une cité tout entière
exalte les mérites d'un de ses enfants, les artistes des
deux mondes, émus à la pensée d'un spectacle aussi gran-
diose, entonnent avec nous l'hosanna de gloire et
saluent avec respect cette image d'un des favoris des
Muses !
CONCOURS ANiNUEI. POUR 1898.
■■ARTIK I.ITTKnAlKE.
M. Tardieu donne lecture de son rapport, auquel ont
souscrit MM. Rooses et Albrecht De Vriendt, sur les trois
mémoires reçus en réponse à la première question :
Quelles sont tes analogies ou les différences qui existent
entre l'allégorie et le sgmbole? Établir et caractériser^ par
des exemples empruntés à l'histoire de la peinture, les élé-
ments essentiels qui rapprochent ou distinguent ces deux
conceptions esthétiques.
— MM. Gevaert, Benoit et Mathieu donnent lecture
( 546 )
de leurs rapports sur le mémoire reçu en réponse à la
quatrième question :
Faire r/ilslorique de la partie spécialement musicale de
la chanson flamande {origine des mélodies et des formes
nilhmiques), depuis le haut mot/en âge jusquaux temps
modernes.
ART APPLIQUÉ.
M. Tardieu donne lecture de l'appréciation de MM. De-
mannez et Biot sur les deux gravures portant comme
devise, la première : Speranzrt, et la seconde : L'art est
l'âme d'un peuple, soumises pour le sujet suivant :
On demande le portrait en buste, fjraoé en taille-douce,
d'un Belrje contemporain, ayant une notoriété reconnue
dans le domaine politique ^ administratif, scientifique, litté-
raire ou artistique.
La Classe se prononcera dans sa séance du jeudi
27 octobre sur les propositions de ses commissaires.
RAPPORTS.
M. Marchai donne lecture de son appréciation, à
laquelle ont souscrit MM. De Groot et Vinçotte, du pre-
mier rapport semestriel de M. H, Boncquet, premier
prix du grand concours de sculpture de 4897.
Renvoi à M. le Ministre de l'Agriculture et des Travaux
publics.
Il ai8coiBBa«gT
( 347 )
CIiA.SSE DES BEAVX-ABTS.
Séance du 27 octobre 1898.
M. Ch. Tardieu, directeur et président de l'Académie.
M. le chevalier Edmond Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. J. Robie, vice-directeur ; Éd. Fétis,
Th. Radoux, J. Demannez, P.-J. Clays, G. De Groot,
G. Biot, H. Hymans, Th. Vinçotte, Jos. Stallaert, Alex.
Markelbach, Max. Rooses, G. Huberti, A. Hennebicq,
Éd. Van Even, le comte Jac(|ues de Lalaing, J. Winders,
Ém. Janlet, J. Van Ysendyck, membres; Alb. De Vriendt,
FI. van Duyse, G. Hermans, correspondants.
MM. H. Maquet, membre, etÉm. Mathieu, correspon-
dant, s'excusent de ne pouvoir assister à la séance.
M. le Secrétaire perpétuel adressera à M. Mathieu une
lettre de félicitations au sujet de sa nomination de direc-
teur du Gonservatoire royal de musique de Gand.
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'Agriculture et des Travaux publics
envoie le premier rapport semestriel de M. Alfred Bastien,
boursier de la fondation Godecharle pour la peinture, en
1897. — Renvoi à MM. Hennebicq, Clays et Stallaert.
( 3i8 )
JUGEMENT DU CONCOURS ANNUEL (1898).
PAaTIE E.ITTERA^IRE.
PREMIERE QUESTION.
Quelles sont les analogies ou les différences qui existent
entre l'allégorie et le symbole? Établir et caractériser, par
des exemples empruntés à l'histoire de la peinture, les élé-
ments essentiels qui rapprochent ou distinguent ces deux
conceptions esthétiques.
« Trois mémoires ont été adressés :
Le 11° I, portant celle devise : Apparence, réalité, fiction ;
Le 11° II, avec la suscription : Als ic can ;
Le n" III, ainsi étiqiielé: L'art symbolique est la forme
d'art la plus ancienne et la plus expressive.
Dans son ensemble, le concours est fort intéressant; il
témoigne de rimporlance qui s'attache à la question
posée, et la Classe a lieu de se féliciter de l'avoir inscrite
à son programme de l'année, en môme temps qu'elle doit
des éloges à tous les concurrents pour le soin qu'ils ont
mis à l'élucider.
Le choix entre les trois mémoires envoyés ne semble
pourtant pas prêter à la moindre hésitation.
Il n'y a pas lieu, en effet, de s'arrêter longtemps au
mémoire n" III, car, si l'on y peut noter quelques obser-
vations justes et d'un sens critique exercé, les exemples y
( 349 )
sont rares, médiocrement représentatifs pour la plupart,
et le travail du concurrent apparaît moins comme une
étude approfondie que comme un article de revue impro-
visé à la veille du tirage et laissant même une sensation
d'inachevé, d'écourté tout au moins.
Le mémoire n" II mérite plus de considération.
L'auteur s'est donné beaucoup de mal. Il envoie à la
Classe sept cahiers de texte illustrés de calques, et cinq
boîtes de dessins et vignettes, au nombre de plusieurs
centaines, dont il n'a pas eu le temps d'achever les
légendes explicatives, mais qui n'en attestent pas moins
des recherches érudites, de même que sa « Nomenclature
des ouvrages consultés » prouve de copieuses lectures.
L'auteur s'excuse de n'avoir pu aller jusqu'au bout de sa
tâche. Par une lettre adressée à iM. le Secrétaire perpé-
tuel, il explique que, n'ayant consacré qu'un mois à son
ouvrage, il n'a malheureusement pas étendu ses compa-
raisons et démonstrations comme il l'aurait voulu, et que,
s'il le communique tel quel à la Classe, c'est afin de lui
donner une idée du long travail que nécessitera son
étude et de l'importance qu'il veut donner à l'édition
qu'il se propose d'en publier, en y mentionnant, avec
dessins et descriptions, cinq à six cents tableaux symbo-
liques, allégoriques et emblématiques des différentes
écoles de peinture.
Il y a là sans doute une alléchante [iromesse; même
en son état actuel, le mémoire Als ic can n'est nullement
indigne d'attention, et la Classe ne refusera pas d'encou-
rager l'auteur à le continuer. Mais, outre que « le temps
ne fait rien à l'affaire » et que le jugement d'un concours
ne saurait favoriser, si estimables qu'elles soient, des
intentions dont la réalisation demeure incomplète, il faut
( 330 )
noter que ce travail où sont analysés tant de textes litté-
raires et surtout d'exemples graphiques, où abondent les
citations et les énumérations, est plus documentaire que
synthétique.
Si le mémoire n" III est un essai auquel l'auteur n'a
pas mis la dernière main, se réservant peut-être de le
compléter sur épreuve, et si les exemples, sollicités par
la Classe, y sont plus indigents que typiques, le mémoire
n° Il est comme la vaste ébauche d'un livre à faire, les
documents amoncelés y étouffent l'éclosion des idées
essentielles; et, tout en souhaitant que l'auteur achève et
publie son travail, il n'est peut-être pas inutile de lui
conseiller d'y opérer quelques élagages pour éviter
l'apparence du fatras.
A notre sens, le mémoire n" I est le seul qui réponde
pleinement au programme du concours.
Une introduction, de tour métaphysique et mystique,
voire occultiste, indique dès le début un curieux coude-
à-coude avec l'ésotérisme contemporain. Et cette impres-
sion première se confirme, à la page 49 du manuscrit, où
l'auteur revendique pour notre époque le droit de ccrepro-
duire dans son art ses préoccupations littéraires, scien-
tifiques et morales, et de les caractériser par les signes
matériels qui répondent le mieux à son état d'âme »,
ajoutant aussitôt qu'il est « juste de considérer comme la
plus autorisée, quant à la justesse des symboles, l'école
ésotérique fondée sur des sciences exhumées par le Sar
Péladan, Stanislas de Guaita, Papus, etc. ».
Il y aurait des réserves à faire à ce sujet, et pour plu-
sieurs raisons. D'abord l'école ésotérique, qui lit quelque
tapage il y a six ou sept ans, a beaucoup perdu de son
ascendant sur l'opinion ou mieux sur la curiosité pu-
( 551 )
blique. Les Péladan, les Guaita et les Papus d'ailleurs
sont loin de s'entendre sur la portée de leurs révélations
de Mages, de Rose-Croix ou de démonologues. Et enfin
le caractère scicntificpie de leurs exhumalions est loin
d'être établi, encore qu'ils se réclament de tel savant
illustre pour les présenter comme définitives, quand l'au-
torité qu'ils invoquent se borne à y avouer des éléments
de recherche et des hypothèses à vérifier.
Mais c'est là simplement affaire de point de vue, et il
serait d'autant moins équitable de chicaner le concur-
rent sur ce point, qu'après avoir rendu hommage à la
justesse de la symbolique ésotérique, l'auleur, à la
page 27 de son manuscrit, réagissant à juste titre contre
une tendance à l'emploi systématique des recettes du
symbolisme, pour ainsi parler, — tendance qui se fait
jour dans les deux autres mémoires, — engage l'artiste à
se défier des hiéroglyphes, des accessoires, des attributs
et emblèmes, ou bien à les prendre tels quels, c'est-à-
dire comme des signes conventionnels toujours utilisables
si, entrés dans les mœurs, ils sont immédiatement com-
pris, et à peindre naïvement, avec autant de talent que
possible, plutôt que de s'égarer dans le dangereux
domaine des analogies et des déductions dont « la cul-
ture spéciale se pratique dans le silence du cloître ou de
l'occultisme ». Et il achève ainsi sa pensée : « L'art doit
être humain, c'est-à-dire palpable, émotionnel et spiri-
tuel à la fois; il ne doit pas dégénérer en un étalage de
figures scientifiques, »
Cette phrase du chapitre que l'auteur consacre au sym-
bole primitif, n'est certes pas la condamnation du sym-
bolisme des anciens maîtres, de ce symbolisme qui était
( 552 )
à la fois de rite et de sentiment, de conviction sincère
autant que d'obéissance à l'autorité ou à la tradilion ;
mais elle condamne évidemment le symbolisme de pas-
tiche ou de préciosité. De même (p. 86), il préfère « une
simple impression de nature, évoquant le mouvement et
la vie», aux abus, pour ne pas dire aux rébus de « l'argutie
allégorique )>. Il ne croit pas au symbole voulu, mais bien
au symbole deviné, perçu dans la Naturr qui seule, écrit-
il, délient le symbolisme. Et en proclamant (p. 52) que
« c'est surtout l'interrogation du spectateur qui marque
l'intérêt d'une œuvre », cela après avoir raillé cette manie
d'engouement qui porte par exemple les fanatiques
d'Ibsen à chercher, mieux encore à découvrir un motif
social ou philosophique dans le moindre mot de leur
auteur favori, fût-ce dans une exclamation parfaitement
insignifiante, il indique cette vue qui nous paraît profon-
dément juste, à savoir non seulement que le symbolisme
intentionnel de l'artiste n'est rien s'il ne trouve sa con-
trepartie dans le symbolisme du public, mais encore que,
si la Nature détient seule le symbole, c'est bien souvent
le public qui le crée à l'insu de l'artiste lui-même.
On raconte que Goethe, émerveillé des commentaires
suscités par son Faust, — déjà toute une bibliothèque, de
son vivant, et que serait-ce s'il pouvait lire ceux qui ont
paru depuis sa mort ! — s'écriait avec un enthousiasme
souriant : « Je ne savais pas avoir pensé tant de choses ! »
Anecdote d'autant plus vraisemblable qu'on a retrouvé
parmi les papiers posthumes du poète cette simple défi-
nition de son chef-d'œuvre : « Tableau hasardé du monde
et de la vie. » Mais la modestie de la définition n'exclut
pas le luxe des gloses et n'implique pas leur illégitimité.
( 355 ]
« Lire une œuvre, c'est la créer à nouveau », a dil juste-
ment un commentateur du Faust de Goethe. « Quand je
lis Faust, c'est mon Faust (1). »
Depuis plus de vingt ans, toutes les littératures
s'acharnent sur le lîing de Richard Wagner, et si les
interprétations symboliques en sont les plus nombreuses,
les interprétations naturalistes et réalistes n'en sont ni
les moins aisées ni les moins fondées. Bien qu'elles
semblent antinomiques, elles sont au fond également
vraies. Si Wagner est un profond symboliste, il n'en est
pas moins un puissant réaliste. Disons même qu'il n'eût
pas été l'un sans être l'autre, et recommandons à tous les
artistes cette dualité, en leur rappelant toutefois que le
maître de Bayreulh avait commencé par prendre la pré-
caution d'être un homme de génie sans dédaigner de
posséder à fond son double métier d'écrivain et de
musicien.
En risquant ici ces deux allusions, nous nous écartons
quelque peu du programme du concours. La Classe, en
effet, s'est bien gardée de livrer aux concurrents le
domaine intégral du symbolisme et de l'allégorie,
domaine immense qui s'annexe tous les cadres de la
pensée et du sentiment, puisque symbole et allégorie ne
sont en somme que deux tours d'esprit, aussi applicables
à la philosophie qu'à la religion et à toutes les formes
d'art, littéraire, plastique ou sonore. Elle a sagement
limité la question à l'histoire de la peinture, du moins
quant aux exemples à fournir à l'appui des différences
ou des analogies des deux conceptions esthétiques à étu-
(1) Anatole France, préface de la traduction de Camille tiENOii.
Ô""* SÉRIE, TOMK WXVI. 24
( 3o4 ;
dier. Si le rapporleur pousse iin peu an delà, c'est unique-
ment alin d'insister sur l'importaiice que prend en l'es-
pèce l'interprétation donnée à l'œuvre d'art par le
public qu'elle vise et prétend conquérir, et afin de mar-
quer qu'un simple paysage, vu et rendu sans arrière-
pensée par un artiste ému, ou un portrait d'inconnu,
saisi et pénétré par un figuriste soucieux de caractère,
seront matière à symbolisme à meilleur droit que tel
logogriphc pictural où la doctrine et la science des sym-
boles auront prodigué toutes leurs ressources. L'auteur
du mémoire n" I cite avec raison Gustave iVloreau parmi
les maîtres du symbolisme contemporain, mais ce serait
une erreur — et le concurrent ne la commet pas —
d'attribuer à l'initiation doctrinale ou scientifique le
charme et l'émotion qui se dégagent des belles pages de
ce grand peintre et la valeur d'art que tout le monde leur
reconnaît aujourd'hui. S'il est permis au rapporteur de
consigner ici un souvenir personnel, il dira qu'introduit,
il y a tout juste vingt ans, dans l'atelier de Gustave
Moreau, il tomba en airét devant sa Vieillesse du roi
David, très ému par l'impression de lassitude qui éma-
nait de l'expression et de l'attitude du vieillard à barbe
grise, au regard terne, à la tête inclinée, se détachant
sur un fond de ciel brumeux, envahi déjà par les ombres
de la nuit, comme le personnage était déjà guetté par les
ombres de la mort. Le peintre cependant lui signalai!, aux
architectures ambiantes, quatre chapiteaux de colonnes
dont les motifs étaient empruntés aux attributs des quatre
Évangélistes. Ils étaient pour lui le symbole du lien qui
rattache le Nouveau Testament à l'Ancien. Le visiteur
n'avait vu de symbole que dans le lien entre la Nature
et l'Homme. Il avait tort sans doute. Mais qu'importe.
( 5h'5 )
puisque de toute façon la sensation d'art était produite,
et puisque, pour parler comme l'auteur du mémoire n" I,
le peintre, visant le symbolisme religieux, avait fait de
l'art « humain, c'est-à-dire palpable, émotionnel et spi-
rituel à la fois »?
D'autre part, en limitant à l'histoire de la peinture la
documentation du concours, la Classe n'a pas entendu
interdire aux concurrents les appréciations philoso-
phiques inséparables de l'étude de deux conceptions
esthétiques aussi imprégnées de philosophie et de litté-
rature que le symbolisme et l'allégorie.
L'auteur du mémoire n° I ne s'est pas privé de ces
appréciations, mais, des trois mémoires soumis à la
Classe, le sien est celui où la part faite aux idées géné-
ratrices du symbole et de l'allégorie, à l'histoire de leurs
manifestations et aux exemples spécialement empruntés
à la peinture, est distribuée avec le plus de méthode, de
logique et de goût.
On en pourrait discuter certaines thèses, critiquer
divers détails, mais il n'en demeurerait pas moins que
ce mémoire constitue un travail sérieux, approfondi et
utile, composé avec soin, écrit avec talent, et, tant au
point de vue des recherches qu'il a nécessitées que du
sens philosophique et artistique dont il fournit la preuve,
digne des suffrages de l'Académie.
Par ces motifs, j'ai l'honneur de proposer à la Classe
des beaux-arts :
1° De décider qu'il y a lieu de décerner le prix;
2° D'attribuer le prix à l'auteur du mémoire n° I, por-
tant pour devise : Apparence, réalité, fiction;
3° D'en ordonner l'impression dans l'un des recueils
de l'Académie. »
( 356 )
MM. Rooses et Alb. De Vriendt déclarent souscrire à ces
propositions.
La Classe, se ralliant aux propositions de ses commis-
saires, a décerné le prix, d'une valeur de huil cents francs,
au mémoire portant la devise : Apparence, réalité, fiction.
L'ouverture du billet cacheté a fait connaître comme
auteur de ce travail M. Edgar Baes, à Ixelles.
QUATRIEME QUESTION.
Faire l'historique de la partie spécialement musicale de
la chanson flamande (origine des mélodies et des formes
rythmiques), depuis le haut moyen âge jusqu'aux temps
modernes.
RapftOÊ't de M. Gmwaerif pi'etttiet' ooiÊ*tnim»ai»'*>.
a Le sujet d'histoire musicale que la Classe des beaux-
arts a choisi pour le concours de cette année appartient
à un ordre de recherches qui implique, chez ceux qui s'y
adonnent, une sérieuse culture de la musique et des con-
naissances approfondies en matière de littérature et d'his-
toire, double condition qui se rencontre rarement chez
les érudits, même de nos jours. Aussi n'est-il pas éton-
nant qu'un seul concurrent ait répondu à notre appel.
Son travail est fort étendu et conforme au programme
tracé par l'Académie. En tant que production musicale
homophone, le chant populaire étant constitué par le
concours de deux éléments, mélodie et rythme, l'auteur
a judicieusement divisé son écrit en deux parties.
( 337 )
La première, la plus étendue, est consacrée à l'analyse
historique de l'élément essentiellement musical de la
chanson, la mélodie.
Dans un premier chapitre, l'auteur démontre dans les
chansons flamandes du moyen âge l'existence des quatre
échelles modales que le chant liturgique de l'Église
latine a héritées de l'antiquité :
1" Le mode éolien ou hypodorien, le mineur diato-
nique, encore connu de notre temps (/a, so/ >;, /a, mi, ré,
ut, si, la) ;
2° Le mode dorien, mineur diatonique dont l'avant-
dernier degré au grave est abaissé d'un demi-ton (mi, ré,
ut, si, la, sol, fa Ç[, mi) ;
5° Le mode iastien ou hypophrygien, échelle majeure
privée de note sensible {sol, fa t], mi, ré, ut, si, la, sol) ;
¥ L'hypolydien, mode majeur dont le quatrième degré
au-dessus du plus grave fait avec celui-ci un intervalle de
triton [fa, mi, ré, ut, si Ç\, la, sol, fa\
Dans le second chapitre, poussant son analyse plus à
fond, l'écrivain prend pour point de départ les thèmes
mélodiques que la musique gréco-latine a laissés dans
l'Anliphonaire romain, et s'attache à signaler ceux qui
ont guidé l'inspiration des compositeurs populaires du
moyen âge.
Dans son troisième chapitre, il examine la composition
mélodique, c'est-à-dire la manière dont les auteurs des
cantilènes médiévales ont traité les thèmes traditionnels :
tantôt les reproduisant presque sans modification, plus
souvent procédant par voie d'amplification, parfois enfin
se servant simplement du cadre général, l'échelle du
mode, et imaginant librement le dessin mélodique.
( 358 )
Le quatrième chapitre est consacré aux dernières vicis-
situdes du chant homophone, à l'examen des altérations
harmoniques que subirent peu à peu les mélodies du pays
flamand sous l'action lente et continue de l'art polyphone,
action qui amena vers 1600 la constitution effective des
deux modes de la musique moderne : le majeur, fusion
de l'iastien et de l'hypolydien, le mineur, modification
chromatique du mode éolien.
Un cinquième chapitre poursuit l'histoire de la chan-
son néerlandaise postérieurement à la création de la
monodie harmonisée et à l'apparition de la tonalité
moderne, alors que la muse du peuple cessa de s'inspirer
aux mélopées liturgiques et prit pour modèles les mor-
ceaux des chanteurs professionnels et les airs de ballet.
Période de déclin et de stérilité croissante. Le chant
populaire, de sa nature une mélodie sans accompagne-
ment, était coupé dans sa racine et fatalement destiné à
s'étioler et se dessécher dès que les musiciens eurent
désappris l'art de la composition homophone. Aussi ne
vécut-il plus, à partir du XVIII'' siècle, que dans la
mémoire des gens de la campagne, et là aussi a-t-il pres-
que disparu de nos jours, remplacé par des cantiques ano-
dins, ou, chose plus fréquente, par des refrains de car-
refour et de café-concert, la musique ordinaire des masses
dans nos sociétés démocratiques.
Le dernier chapitre de la première partie s'occupe de ce
que l'on pourrait appeler la vie posthume de nos anciens
chants populaires, résurrection qui est le fruit de l'érudi-
tion universelle de notre temps. L'auteur y examine,
d'après sa méthode d'analyse musicale, les mélodies
recueillies en partie de la bouche du peuple et consignées
dans les nombreuses collections spéciales qui ont paru
depuis le commencement du XIX'' siècle.
( 359 )
Moins (léveloppée que la première, la seconde partie
du mémoire traite exclusivement des formes rythmiques
de la chanson thioise. I^e premier chapitre contient les
notions indispensables à la connaissance des parties con-
stitutives du rythme : durées relatives, mesures simples
et composées, membres rythmiques. Le deuxième cha-
pitre montre l'application des divers cléments du rythme
musical au mécanisme particulier de l'ancienne versifi-
cation néerlandaise. Enfin le chapitre par lequel se ter-
mine tout le travail explique la structure des périodes
rythmiques et décrit brièvement la facture de la strophe
dans les deux divisions typiques de la chanson flamande :
les chants narratifs, les airs à danser.
L'auteur a rempli d'une manière plus que satisfaisante
le cadre imposé par le programme de l'Académie. Le
travail soumis à notre ap|)réciation est incontestablement
à la hauteur des connaissances positives qu'un esprit stu-
dieux de notre temps peut acquérir en ces matières diffi-
ciles. On reconnaît partout un musicien familier avec les
parties les plus diverses de son art, un érudit au courant
de toute la littérature du sujet à traiter.
En particulier, la première {>ar(ie du mémoire a une
valeur sérieuse par le soin minutieux que l'écrivain a
mis dans ses recherches comparatives, dans les rappro-
chements établis avec les mélodies liturgiques et les
cantilènes profanes du moyen âge. On y rencontre une
quantité de faits nouveaux et intéressants. Si l'on peut
regretter que la seconde partie n'offre pas le même inté-
rêt, si l'on doit y constater l'absence de toute recherche
sur le caractère ethnique de certains rythmes, il est juste
de se rappeler que la musicologie comparée est une
( 360 )
science encore à ses premiers débuts, et que jusqu'à pré-
sent aucun travail approfondi n'a paru sur cette question.
Il y a lieu de constater à la louange de l'auteur qu'il a
su exposer ses idées dans un style net et clair, et ceci ne
sera pas tenu pour un mérite insignifiant si l'on considère
(|ue la langue néerlandaise n'a pas de terminologie établie
pour les notions techniques propres à la musique de
l'antiquité et à celle du moyen âge.
En somme, je conclus en proposant à la Classe des
beaux-arts d'attribuer le prix allèrent au concours musical
de 4898 à l'auteur du mémoire portant pour devise :
De omie liedjes zijn de besle, et de voler l'insertion du sus-
dit travail dans la col lectionin-8'' des Wmo<rcscoj(/onnes. »
M. Peter Benoit, deuxième commissaire, déclare adhé-
rer aux idées exprimées dans ce rapport. 11 se joint
à son éminent confrère, ajoute-t-il, pour demander l'im-
pression du mémoire.
Happofi ttf .n. Kmile .fialhtvu, tfoisiôtitet romutisanii».
ce Attrayante et vraiment instructive a été pour moi la
lecture du mémoire sur les origines mélodiques et ryth-
miques de la chanson flamande. Il ne m'a pas été pos-
sible, pour plusieurs raisons, de me livrer à une étude
approfondie de cet ouvrage. Il m'eût fallu, pour exercer
un contrôle sérieux, raflraichir et raffermir mes connais-
sances trop sommaires relativement au plain-chant et à
la musique grecque. D'autre part, bien que le flamand
de l'auteur, - d'une simplicité, d'une clarté plutôt
( 36i )
gauloise, — soit à la portée d'un Wallon de bonne
volonté et quelque peu pratiquant, ce n'est qu'en mesu-
rant les doses que j'ai pu éviter la fatigue et l'inattention.
Or je n'avais reçu communication du mémoire que le
28 septembre, au moment de la rentrée des cours des
écoles de musique, époque d'encombrement et de corvées
administratives. J'ai toutefois noté au courant de ma
lecture quelques points d'interrogation, quelques remar-
ques; l'auteur y trouvera peut-être l'indice d'une légère
lacune que suffirait à combler une ligne de texte supplé-
mentaire.
Je soubaiterais, par exemple, que telle cbanson popu-
laire, inspirée d'un cbanl liturgique, lui-même issu de
tel bymne païen, ne fût \iAS isolément citée. Je la voudrais
parfois accompagnée de la mélodie mère, ambrosienne
ou grégorienne, de son aïeule iastienne ou dorienne.
A la page 23, l'auteur, après avoir résumé le système
musical des anciens, se sert brusquement de l'expression
« aanverwandlen durtoonaard », « ton relatif majeur »,
sans avoir fait connaître au préalable si les modes grecs,
devenus les tons du plain-cbant, disposaient comme la
musique moderne d'un /Wa///" majeur ou mineur.
Je me hâte du reste de me rallier à l'appréciation du
juge par excellence, à lui seul cour d'appel en la matière,
notre maître, M. Gevaert, et je recommande l'impression
de ce mémoire, monument bibliographique de la chanson
llamande ancienne et moderne.
Je regretterais cependant que le travail si considé-
rable, si consciencieux, d'un érudit doublé d'un délicat
musicien, fût lettre morte pour nos confrères de la Wal-
lonie; aussi exprimé-je le vœu qu'un texte français
( 362 )
accompagne l'original; que la publication ait lieu dans
nos deux idiomes nationaux, escortant en deux colonnes
l'insertion unique des mélodies. »
La Classe, se ralliant aux conclusions des rapports de
ses commissaires, a décerné le prix de tnille francs à ce
travail.
L'ouverture du billet cacheté a (ait connaître comme
en étant l'auteur, .VL Florimo)i(l van Duvse, correspon-
dant de l'Académie, à Gand.
ART APa>l.lQrK.
GRAVURE EN TAILLE- DOUCi:.
On donande le portrait en buste, gravé en taille-douce,
d\in Belge contemporain, aijant une notoriété reconnue
dans le doniuiite politique, administratif, scienti/iqni', litté-
raire ou artistique.
ttapinn'l (If fl. Ch. 'g'fiutiftt.
« La Section de gravure, bien ([ue je n'aie |)as l'honneur
d'en faire partie, m'a chargé de vous présenter son rap-
port sur ce concours.
Deux envois ont été adressés à la Classe :
L'un portant la devise : Speranza;
L'autre, cette suscription : //art est l'àme dun peuple
La Section de gravure estime que ce dernier mérite
le prix, à raison de sa supériorité sous le rapport de
l'élégance du dessin et de la linesse du travail technique.
( 3()3 )
Cependant, et tout en proclamant que le montant total
du prix doit être attribué à cet envoi, elle reconnaît
cependant à la planche portant la devise Speranza des
qualités assez remarquables pour légitimer une récom-
pense pécuniaire à titre d'encouragement, si les crédits
dont la Classe dispose permettent cette extension et si
la Classe juge à propos d'y consentir. »
La Classe a décidé de partager le prix de huit cents
francs entre les auteurs de ces deux gravures : M. Louis
,Peeters, d'Anvers, et M. Joseph Aerts, de la même ville,
tous deux élèves de l'Académie royale des beaux-arts
d'Anvers.
Les résultats des (-oncours seront proclamés dans la
séance publique.
PRÉPARATIFS DE LA SÉANCE PUBLIQUE.
Conformément à l'article 15 du règlement de la Classe,
M. Ch. Tardieu, directeur, donne lecture du discours
qu'il prononcera en séance publique.
( 364 )
ri^ASSE nV.H BEA VIL -A RTS.
Séance publique du dimanche 6 novembre 4898.
M. Ch. Tardieu, directeur, président de l'Académie.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Prennent également place au bureau :
MM. Éd. Dupont, directeur de la Classe des sciences,
et J. Robie, vice-directeur de la Classe des beaux-arts.
M. L. De Bruyn, Ministre de l'Agriculture et des Tra-
vaux publics, ayant les beaux-arts dans ses attributions,
assiste à la séance.
Sont présents : MM. Th. Radoux, J. Demannez, P.-J.
Clays, G, De Groot, Gustave Biot, H. Hymans, Th. Vin-
çotte, Jos. Stallaert, Alex. Markelbach, G. Huberti,
A. Hennebicq, Éd. Van Even, AltV. Cluysenaar, J. Win-
ders, H. Maquet, J. Van Ysendyck, membres; J.-B. Meu-
nier et FI. van Duyse, correspondants.
Assistent à la séance :
Classe des sciences. — MM. Devvalque, Brialmont,
C. Malaise, ¥. Folie, F. Plateau, Fr. Grépin, G. Van der
Mensbrugghe, Louis Henry, M. Mourlon, P. De Heen,
F. Terby, Léon Fredericq et A. Lancaster, membres.
( 565 )
Classe des lettres. — MM. S. Boimans, Ch. Piot,
A. Giron, Georges Monchamp, Ern. Diseailles, mem&res ;
J.-C. VoUgraff, associé; Alph. Willems et E. Gossart,
correspondants.
La séance s'ouvre à 1 heure et demie.
Sur l'art au XIX^ siècle, discours par M. Charles Tardieu,
directeur de h Classe, président de l'Académie.
Mesdames, Messieurs,
Ce XIX* siècle, qui n'a plus que deux années à vivre,
obtiendra sans nul doute une place illustre dans les
annales de l'humanité. Et pourtant, il y a quelque har-
diesse à la lui promettre dans cette solennité, car ce
siècle a perdu beaucoup de temps à se méconnaître, voire
à se calomnier, et il n'est peut-être pas une autre époque
de l'histoire qui ait été moins équitable pour elle-même.
Il est bien entendu que nous ne nous occupons ici que
des beaux-arts.
Oh! si nous avions la téméraire prétention d'encadrer
dans cette courte allocution toute l'activité de notre
temps, ne fût-ce que pour en caractériser les manifesta-
tions les plus significatives, il nous faudrait changer
d'antienne, et surtout si nous y faisions place à la science
et à l'industrie.
Le XIX* siècle, en effet, fut toujours fier de son œuvre
scientifique et de son expansion industrielle, et il n'est
pas de fierté plus légitime que celle-là, tant cet œuvre
est immense, tant cette expansion .tient du prodige.
Telle est la complexité du labeur scientifique contem-
porain, embrassant tout, depuis le cèdre jusqu'à l'hysope.
{ 366 ;
pour parler comme le roi Salomon, ou, si vous préférez,
depuis l'inlusoire jusqu'à l'iguanodon, et depuis le fond
des mers jusqu'au ciel inconnu, telle en est la spécialisa-
tion nécessaire, la division à l'infini, que la science est
presque dans l'impossibilité de se mettre au courant
d'elle-même. Vn de nos éminents confrères, qui fait
honneur à la science belge, nous confessait un jour son
embarras de s'initier à toutes les contributions qui enri-
chissent le domaine, limité, auquel il a consacré sa vie.
Ceci pour excuser, Mesdames et Messieurs, non pas
l'ignorance relative qu'il serait impertinent de vous attri-
buer, mais la nôtre, beaucoup plus embarrassée que
notre savant collègue de s'assimiler tant de notions
indispensables et incessamment accumulées, revisées et
renouvelées.
De même, alors que l'industrie moderne ap|)lique avec
une égale ferveur les sciences de la vie et celles de la
mort, celles de la guerre et celles de la paix; alors que,
de plus en plus à l'étroit dans les frontières des divers
États, par une contradiction piquante et féconde, souhai-
tant qu'on les hérisse de barrières monopolisantes, elle
ne s'en élance pas moins à travers le monde, cherchant
la lutte, instituant la concurrence, et poussant jusqu'au
tin fond des continents mystérieux pour y introduire la
civilisation et le progrès, on conçoit aisément que ce
siècle soit aussi glorieux de son labeur industriel qu'il
est orgueilleux de son œuvre scientifique.
Par contraste, et même à négliger les sciences de la
pensée et l'art des lettres pures, poésie, drame ou roman,
à nous en tenir aux arts de la forme et du son, comment
ne pas s'étonner que ce même siècle, aux diverses étapes
de sa carrière, se soit montré systématiquement hostile à
son propre effort artistique?
( 367 )
Je sais bien que, s'il y eut des attaques, il y eut des
défenses, dont plusieurs victorieuses; mais interrogez dans
son ensemble l'opinion publique du siècle sur son art, et
vous noterez qu'au milieu du bruit des autoditbyrambes
et des diatribes, contrepartie parfois utile, cette opinion
se résume en un mélancolique regret du passé, de ce qu'on
appelle les grands siècles d'art.
Certes, loin de moi l'intention de dénigrer les maîtres,
les pionniers, les fondateurs, les premiers promoteurs du
beau définitif, ceux qui ont laissé des exemples toujours
bons... à copier? — non pas, le pasticheur n'étant pas
même un apprenti sorcier, mais seulement un famulus
domestiqué, disant amen à tout, et jusqu'aux sénilités
du patron, — mais toujours bons à étudier, à pénétrer,
suscitant des interprétations nouvelles et jusqu'à des
initiations imprévues, quand, de ces exemples, l'émule
s'inspire en toute liberté de conscience.
Saluons ces anciens qui sont des éternels; mais il y a
un abîme entre ce respect, ce culte éclairé qui consacre
leur autorité en la prorogeant, et la dévotion étroite et
stérile qui se borne à pleurer sur les ruines abolies, sans
aucun espoir de les réédifier.
Feuilletez l'histoire des arts au XJX^ siècle, et vous y
lirez presque à chaque page ce mélancolique regret des
grands siècles d'art, corroboré par cette affirmation que
le nôtre ne serait qu'un très petit garçon, indigne et
incapable de se mesurer avec eux.
Ce vers a passé proverbe :
Qui me délivrera des Grecs et des Romains !
Protestation puérile, pour peu, qu'on la prenne à la
lettre, légitime si l'on y voit la négation d'un romanisme
( 368 )
de convention et d'une grécité barbare, et la ii;uerre
déclarée à ce préjugé nélaste qui assimile la beauté intrin-
sèque et la noblesse du style à la tyrannie aveugle de la
toge ou de la chlamyde.
A peine ce vœu est-il émis que le siècle dernier finit et le
nôtre commence par l'organisation de cette tyrannie, qui
du moins en s'imposant d'autorité et en proscrivant tout
le reste, était en barmonie avec ce tournant de l'bistoire,
crépuscule du XVIIF siècle, aurore du XIX'' : d'un côté,
proscriptions révolutionnaires aboutissant à la dictature
impériale; de l'autre, proscription de tout ce qui n'est pas
l'école de David, et, en fin de compte, dictature du style
empire, de ce style pesant qu'on s'évertue à rebabiliter
aujourd'hui, parce que, sur les marchés du bric-à-brac, il
n'est plus d'autre bibelot à la portée des collectionneurs.
11 appartenait à la science contemporaine, aux |)atientes
lecherclies des épigrapbistes, aux étonnantes trouvailles
des archéologues, de réconcilier l'art moderne avec la vie
anticjue en l'exhumant, en lui restituant sa physionomie
organique, et en donnant ainsi son véritable sens à un cri
libérateur.
Mais avant celte restitution qui s'accomplit tous les
jours sous nos yeux, nous révélant une antiquité insoup-
çonnée, substituant à la superstition classique une philo-
sophie plus profonde de l'histoire, et ce symbolisme élargi
dont s'inspirent aujourd'hui les arts et les lettres, une
œuvre de démolition était indispensable. Le romantisme
s'y donna tout entier et il eut tout au moins le mérite de
réagir contre une dictature esthétique qui serait l'excuse
de Sainte-Hélène, si l'esthétique avait une part quel-
conque dans la relégation d'un vaincu sur un rocher
mortel .
( 369 )
Réaction violente et incohérente, versant inévitable-
ment dans (ni moyen âge d'à-peu-près, aussi conven-
tionnel que le pseudo-classicisme, à peine le romantisme
a-t-il l'ait son temps qu'on le regrette déjà ; el l'on oppose
aux naturistes qui commencent à poindre les peintures à
cuirasses où brillait l'émail des heaumes empanachés, et
les statues des liers chevaliers enfourchant leurs destriers
caparaçonnés. Et par une anomalie singulière, alors
qu'on s'attendrit sur ses tics les plus irrémissiblemenl
démodés, on semble ne lui savoir aucun gré de ses titres
les plus sérieux à la gratitude esthétique du siècle et de
l'avenir même, à savoir la réhabilitation de la passion
et la revendication des droits de l'individu.
Ce n'est pas ici le lieu de rchercher si ces deux con-
ceptions se justiHenl pleinement du point de vue moral
DU social; mais ce sont assurément deux forces d'art
essentielles; et, sans promener nos réflexions de la pein-
ture à la musique, en passant par la sculpture et l'archi-
tecture, nous osons dire que toute l'évolution artistique
du siècle s'en déduit.
On en gémit pourtant, on professe que la passion
mène fatalement au dérèglement, en art comme dans la
vie, et que trop souvent l'individualisme s'infatue et
s'hypertrophie au point d'atlecter des prétentions incom-
patibles avec le sens commun. Et l'on verse d'abondantes
larmes sur la fin des écoles et sur l'anarchisme esthétique,
plaie de notre lin de siècle.
Que la passion se dérègle parfois, il serait dilïicile de
le contester; et, de même, que l'individu affranchi de
toutes lisières se permette trop souvent des licences dont
au surplus il est ordinairement la première victime.
Mais à considérer de plus près ces deux facteurs inéluc-
3™^ SÉRIE, TOME XXXVl. 25
( 3"0 )
tables de toute vitalité, artistique ou autre, on est amené
à reconnaître que la passion elle-même a ses lois et que
l'individualisme le plus forcené ne s'aurait s'en abstraire.
Or tout l'effort scientifique et artistique du siècle, voire
son effort philosopl)i(jue, moral et politique, se réduit en
somme à ceci : substituer à la règle arbitraire ou imagi-
naire la loi naturelle et irrécusable.
Dans un discours prononcé ici même, un vénérable
confrère dont nous déplorons la perte récente, Adolphe
Samuel livrait à son auditoire cet aveu pénible, mais
loyal, qu'après une longue vie absorbée par l'art musical
et la critique, il en était arrivé à se convaincre du néant
absolu des règles, de ces règles que prolonge à travers
les âges un enseignement traditionnel. Qu'il n'y ait plus
de règles, soit, et c'est exact, si l'on vise les règles a priori
dont le code est pareil à ce chapeau de Fortunatus qui
saute de tête en tête, sans que jamais personne s'avise
d'en contrôler le pouvoir magique. Mais il y a des lois,
des lois de nature, l'orateur les oubliait après les avoir
observées dans ses œuvres ; et les seules règles subsistent
qui s'attestent conformes à ces lois tour à tour ignorées
ou devinées, désormais objet d'un travail incessant de
vérification.
Convenons-en, la règle toute faite a bien son charme.
Qu'un instinct j^rofond la découvre ou qu'un caprice l'in-
vente; que, propagée par la mode, elle se maintienne
par habitude, c'est un point d'appui solide quand ce
n'est pas un oreiller assoupissant.
Mais à la recherche des lois, un oreiller ne saurait
suffire. Et, si le premier devoir de la loi est de se prou-
ver juste et vraie, il y a des chances pour que, la
démonstration faite, elle entraine une adhésion plus
( 5'" )
explicite que la règle imposée, surtout si la loi démon-
trée enfante plus de chefs-d'œuvre que la règle subie,
laquelle, après tout, en a bien quelques-uns à son actif.
Cet individualisme que déchaîna le romantisme, dans
la première moitié du siècle, eut son complément dans
la seconde, un complément logique qu'il est impossible
de ne pas rattacher à des circonstances politiques,
quelque désir qu'on ait d'arrêter la j)olitique au seuil de
cette salle.
La politique étrangère du premier empire avait pour
caractère prédominant, avec le blocus des idées et des
produits qui n'agréaient pas au maître du monde, le
mépris des nationalités, la méconnaissance de leurs élé-
ments constitutifs, de leurs instincts naturels, de lei rs
aspirations propres.
Au contraire, le second empire, — bien que le neveu
se donnât comme le continuateur de l'oncle, — s'il
renonce au blocus des produits, faisant de son mieux
pour rétablir le blocus des idées, et s'il commence parla
politique d'équilibre, — la guerre de Crimée n'aflîchait
pas d'autre tendance, — ce fut pour se jeter bientôt après,
tête baissée, dans la politique des nationalités.
Ce que ce revirement a pu coûter ou rapporter à son
promoteur et au grand pays dont il jouait les destinées
sur les champs de bataille, n'est pas de notre ressort ;
mais l'influence en est indéniable sur les mouvements
de l'art au XIX'' siècle, bien que la critique préfère géné-
ralement s'écarter de ce point de vue pour se complaire
à des dissertations plutôt dogmatiques.
Et la conséquence la plus remarquable en est le réveil
des nationalités artistes, formes naturelles de l'indivi-
dualisme, car si la première expansion de l'individu est
( 372 )
la famille, et la seconde l'association, la troisième est la
nation.
Que ce réveil soit, à certains égards, de coïncidence,
nous le voulons bien. La nation est le sol de l'art, comme
le champ l'est de la graine. Où il n'y a pas de germe,
l'engrais chimique abdique. Mais de même que certaines
conditions climatériques favorisent l'elfort du laboureur,
de même certaines circonstances politiques peuvent
stimuler l'effort de l'artiste. Et c'est ici que la coïnci-
dence se rehausse de causalité.
La politique des nationalités a fait ollice d'inlluence
météorologique ou de temps favorable; elle a été ce
ce moment » qui, d'après Taine, est l'une des causes
déterminantes de l'éclosion du génie et de l'œuvre. Elle
n'a pas été le germe, mais n'en a pas moins aidé à le
faire lever dans des sols laissés jusque-là plus ou moins
en friche.
Rappelez-vous ce qui était admis presque sans conteste
avant que cette politique, comme disait Cavour, remit
l'Europe en mouvement. On reconnaissait en peinture la
signature de l'Italie et des Pays-Bas. L'Espagne et
l'Allemagne n'apparaissaient que comme des souvenirs;
l'Angleterre comme un accident, encore qu'elle eût
modifié au commencement du siècle l'orientation de
l'art français. En musique, la signature de l'Italie et de
l'Allemagne. Et pour la peinture comme pour la musique,
comme pour tous les arts sans distinction, l'on assignait
à la France le rôle enviable d'ailleurs et la fonction
évidemment noble d'une sorte de Cour d'arbitrage et de
conciliation, distribuant la gloire jugée à sa mesure, qui
était celle de l'éclectisme.
Or la politique des nationalités n'a pas plus tôt fait son
( 375 )
apparition dans le monde, que tontes les nations capables
de facultés artistes se mettent en demeure de les déployer,
et que les individualités les plus sûres de leur « moi » en
cherchent dans leur nationalité même, dans les forces
antérieures de leur race, dans les encouragements de
leur milieu, le stimulant générateur et le souverain
épanouissement. Phénomène d'autant plus intéressant
que la facilité des échanges, des locomotions et des
transports semblait faite pour servir la neutralisation
cosmopolite des idées et le nivellement des tendances,
bien plutôt que l'émulation des originalités.
L'art anglais, qui d'ailleurs n'avait pas attendu 1859
pour jeter au naturalisme déjà débridé le déh du préra-
phaélisme et de la moralité esthétique, continue l'œuvre
de Ruskin et exporte son style sur le continent.
L'Espagne, avec Fortuny, inquiète les favoris de la vogue
parisienne. L'Allemagne, non contente de garder le
sceptre de la symphonie et de conquérir, avec Wagner,
celui du drame lyrique, veut avoir ses peintres et ses
sculpteurs. La sculpture belge élève les mineurs du pays
noir à la dignité du bronze héroïque. La Russie, plus
audacieuse encore; emprunte à la misère du moujik le
symbole de la souffrance du Christ, en même temps que
sa musique, presque italienne avec Glinka, se fait aussi
russe que possible avec Moussorgski, ses devanciers et
ses émules. Et il n'est pas une nationalité, pas une race,
si modeste qu'elle soit, qui ne tienne à honneur de
s'affirmer sans réticence dans les arts et les lettres : la
Norvège avec un compositeur que notre Académie s'est
associé, avec un dramaturge qui a partout des fanatiques;
la Rohême tchèque avec des musiciens applaudis jusqu'à
Vienne; tandis que dans notre pays, où la filiation pictu-
( 374 )
raie est ininterrompue, et dès les premiers symptômes de
ce mouvement, le drapeau de la musique llainande est
bravement arboré, aux applaudissements, bientôt, de la
Wallonie elle-même.
La France n'en reste pas moins le grand atelier où,
des quatre coins du monde artiste, et des Etats-Unis
comme de la Grèce, on vient chercher des maîtres et des
juges, puiser surtout les normes du goût établies par
une persistante tradition conciliatrice; mais chacune de
ses expositions universelles prouve que ses leçons les
plus précieuses et les plus sûres sont passionnément
adaptées au développement de ces deux forc(!S d'art qui
sont celles du siècle et se tiennent inséparables : person-
nalité de l'artiste, nationalité de l'œuvre.
Il y a peut être une exception, l'architecture. Il est
convenu que celle de notre époque n'a pas de caractère
propre; et, en admettant que ce préjugé soit justifié,
cela tient peut-être à ce que, plus que les autres arts,
elle se laisse hypnotiser par cette superstition du passé
dont se complique à notre époque un remarquable effort
de renouvellement. Mais sommes-nous au point de recul
nécessaire pour rendre justice aux manifestations les plus
récentes de cet art, le plus complexe de tous, de cet art
dont le libre essor est entravé, non seulement par la
destination, condition première de ses œuvres, mais
aussi par les fantaisies de la commande, par la transfor-
mation de la technique, par l'emploi de nouveaux maté-
riaux, et enfin, sauf quehjues exceptions prodigues, par
la pénurie des ressources? Et qui nous dit qu'au siècle
prochain, nos architectes n'auront pas leur revanche,
l'opinion les vengeant d'un injuste dédain, la critique
prenant un malin plaisir à jeter les moellons de leurs
( 375' )
édifices à la face de leurs pileux émules, de leurs indignes
successeurs?
Celte revanche, n'eu doutez pas, Mesdames et Mes-
sieurs, est assurée à l'arl de noire époque, et, si nous
survivons à l'année 1900, nous entendrons souvent et
nous savourerons malicieusement ces exclamations qui
se répercutent d'âge en âge : « Nos pères ne l'entendaient
pas ainsi. Et comme ils avaient raison ! Et comme ils
étaient plus sages et plus heureux ! » Encore deux ans et
nous aurons cette joie immense et cet honneur insigne
d'être à notre tour un passé. Et dès aujourd'hui, avec un
héros d'épopée, promu personnage de comédie, ce
XIX« siècle peut dire : « Et moi aussi je suis un ancêtre! »
— M, le Secrétaire perpétuel proclame les résultats
suivants du concours annuel de la Classe et des concours
du Gouvernement.
CONCOURS ANNUEÏ. PO[]R 1898.
PARTIE ■.ITTÉKAini:.
Trois mémoires portant comme devise :
Le premier : Apparence, réalité, fiction ;
Le second : Ah ic con;
Le troisième : L'art symbolique est la forme d'art la
plus ancienne et la plus expressive;
ont été soumis en réponse à la première question :
Quelles sont les analogies ou les différences qui existent
( 376
entre l'allégorie et le si/mbole? Etablir et caractériser, par
des exemples empruntés à l'histoire de la peinture, les élé-
ments essentiels qui rapprochent on distinguent ces deux
conceptions esthétiques.
La Classe, se ralliant aux conclusions du rapport de
ses commissaires, a décerné le prix, d'une valeur de huit
cents francs, au mémoire portant la devise : Apparence,
réalité, fiction.
L'ouverture du billet cacheté a fait connaître comme
auteur de ce travail M. Edgar Baes, à Ixelles.
M. le Secrétaire perpétuel t'ait remarquer que c'est la
quatrième fois que M. Edgar Baes remporte la médaille
d'or des concours académiques.
Son premier mémoire date de 18G3, époque où il fut
couronné en même temps que le peintre Antoine Wiertz,
pour leurs réponses à la question : Sur les caractères con-
stitutifs de r École flamande de peinture ;
Son second mémoire, datant de 1877, avait pour sujet :
L'influence italienne sur Rubens et Von Dijck,
Et le troisième : Sur le régime de la profession de
peintre avant Rubens, fit partie du concours de 1881.
Indépendamment de ces quatre médailles d'or,
M. Edgar Baes a remporté, en 1865, deux médailles
d'argent : la première, pour son mémoire Sur l'accroisse-
ment des arts graphiques et plastiques, et la seconde,
pour son mémoire Sur l'histoire de la peinture de paijsage.
M. Edgar Baes s'est donc acquis par ses travaux litté-
raires une place des plus remarquables, et l'Académie
applaudit bien sincèrement à ses brillants succès.
( "7 )
Un mémoire portant la devise : De onde liedjes zijn de
beste, a été soumis en réponse à la quatrième question :
Faire l'historique de la partie spécialement musicale de
la chanson flamande {origine des mélodies et dés formes
rythmiques), depuis le haut moyen âge jusqu'aux temps
modernes.
La Classe, se ralliant aux conclusions des rapports de
ses commissaires, a décerné le prix de mille francs à ce
travail.
L'ouverture du billet cacheté a fait connaître comme
en étant l'auteur, M. Klorimond van Duyse, correspon-
dant de l'Académie, à Gand.
La Classe des beaux-arts est d'autant plus heureuse de
féliciter M. Florimond van Duyse, dit M. le Secrétaire
perpétuel, que c'est pour la seconde fois que ce distingué
confrère remporte la médaille d'or des concours. Son
premier mémoire Sur la chanson populaire flamande en
Belgique, depuis le Xt siècle, couronné en 1893, lui a
valu son élection comme membre correspondant, tout
autant que le second prix de Rome, qu'il avait rem-
porté en 1875.
M. Florimond van Duyse est de ceux qui honorent,
par leurs travaux, non seulement l'Académie, mais aussi
leur famille ; et ses succès littéraires ne sauraient que
rehausser la gloire qui entoure le nom vénéré de son
père, feu Prudens van Duyse, que la Classe des lettres n'a,
hélas! compté que trop peu de temps dans ses rangs, et
qui fut une des illustrations de la littérature flamande.
( 378 )
ART .%PI>I.IQI.-K.
Deux gravures ont été soumises pour le sujet suivant :
On demande le portrait en buste, gravé en taille-douce,
d'un Belge contemporain, ayant une notoriété reconnue dans
le domaine politique, administratif, scientifique, littéraire
ou artistique.
La première gravui'e porte la devise : Spcrnnza, et la
seconde : L'art est l'âme d'un peuple.
\/à Classe a décidé de partager le j)rix de huit cents
francs entre les auteurs de ces deux gravures : M. Louis
Peeters, d'Anvers, et M. Joseph Aerts, de la même ville,
tous deux élèves de l'Académie royale des beaux-arts
d'Anvers.
Grand corscouRS de peinture pour l'année 1898.
Conformément aux résolutions du jury qui a jugé le
grand concours de peinture, dit Prix de Rome, pour
l'année 1898,
Le premier prix a été décerné à M. Lmile Vloors, de
Borgerhout, élève de l'Institut supérieur des beaux-arts
d'Anvers.
Un 1"^' second prix a été voté à M. Camille Lambert,
d'Arlon, élève du même Institut;
Un 2^ second prix, à M. Jules Van Biesbroeck, de
Portici, élève de l'Académie royale des beaux-arts de
Gand, et une mention honorable à W. Félix Gogo, élève
de l'Institut précité d'Anvers.
( 579 )
Prix quinquennal de littkhatuhk française.
Par arrêté royal du 25 juillet l<Sy8, le prix de cinq
mille francs, attribué à la X" période du concours quin-
quennal de littérature française (1<S912-1897), a été, sur
la proposition du jury, décerné à M. Albert Giraud, pour
son ouvrage : Hors du siècle.
La séance se termine par l'exécution de la cantate :
Comala, musique de M. François Basse, premier second
prix du grand concours de composition musicale de 1897,
poème de M. Paul Gilson, lauréat du concours des can-
tates françaises de la même année.
OUVRAGES PKESENÏËS.
Beneden {Edouard Van). Les Antbozoaires de la « Plank-
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der fran Skansen. Skiidringar af svensk natur- och svenskt
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Stockholm. K. Svenska Vetenskqys-Akndemien. Ofversigt,
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BULLETIN
DE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
DES
Lettres et des Beaux-Arts de Belgique.
1898. — N" 4L
CLAfliSK DKS S€iE;:«c:Eii.
Séance du 5 novembre l<Sf)S.
M. Éd. Dupont, directeur.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. W. Spring, vice-directeur; le
baron Edm. de Selys Longchamps, G. Dewalque, Brial-
mont, C. Malaise, F. Folie, Fr. Crépin, Alfr. Gilkinel,
G. Van der Mensbrugghe, L. Henry, M. Mourlon, P.Man-
sion, P. De Heen, C. Le Paige, F. Terby, J. Deruyts,
Léon Fredericq, J.-B. Masius, J. Neuberg, A. Lancasler,
membres; L. Errera, A. Jorissen, Jul. Fraipont et P. Fran-
cotte, correspondants.
MM. J. De Tilly et Ch. Van Bambeke s'excusent de ne
pouvoir assister à la séance.
Ô'"'' SÉRIE, TOME XXXVi. 27
( 390 )
CORRESPONDANCE.
M. le Minisire de l'Intérieur et de l'Instruction publique
envoie, pour la bibliothèque de l'Académie, un exem-
plaire du tome XV, 3® livraison, des At^chives de biologie.
— Remerciements,
Le même Ministre transmet une dépêche de son col-
lègue du Ministère de l'Industrie et du Travail demandant
l'avis de l'Académie sur le projet émis par le dernier
congrès international de géologie, à Saint-Pétersbourg,
de la création d'un observatoire flottant. — Renvoi à
MM. Dewalque, Renard et Malaise.
— Hommages d'ouvrages :
1" Discours prononcé aux lunerailles de M. le D' E. Can-
dèze; par le baron de Selys Longchamps;
ii" Sommaire du Cours d'éléments de botanique pour la
candidature en sciences naturelles; par L. Errera;
ô" Annales du Musée du Congo. Série I : Rotanique.
Illustrations de la flore du Congo, tome P', fasc. 1 ; par
Em. De Wildeman et Th. Durand;
4" A. Sur les organismes des a cannels »; R. ^'otice sur la
constitution des lignites el les organismes qu'ils renferment ;
parR. Renault, associé;
5" Où et comment il faut bâtir les sanaloria dans les
régions accidentées de moyenne altitude; par le F)'" G. Joris-
senne.
— Remerciements.
— Travaux manuscrits à l'examen :
A, Sur quelques dérivés chlorobromés en C^; R. Contri-
( 391 )
Imlion à l'étude de l'oxydation des étlujlènes halogènes ; par
M. Kréd. Svvarts, répétiteur de chimie générale à l'Uni-
versité de Gand. — Commissaires : MiNÎ. Spring et Henry.
RAPPORTS.
Il est donné lecture des rapports :
I" De MM. Fraipont et Malaise sur une note intitulée :
.\ouoelle exploration scientifique des grottes d'Engis, d'Engi-
houl et des environs; par Ernest Doudou. — Dépôt aux
archives, MM. les commissaires ayant reconnu que ce
Iravail est dénué de tout caractère scientifique;
H" De MM. Jorissen et Gilkinet sur une lettre de
M. Dauber relative aux Recherches du />' Buchner sur les
fermentations. — Dépôt aux archives.
Sur les vitesses de réaction; par A. de Hemptiniie et
A. Bekaert.
ttuitpai'l rfe n. If. Spt'ing, iit'tftnivi' cinttuti»anii'f.
et On sait que la vitesse des réactions chimiques
dépend, à un haut degré, de la nature du dissolvant qui
sert de milieu à l'acte chimique. MM. A. de Ilemptinne
et A. Bekaert se sont demandé si la vitesse de réaction
éprouve aussi un changement quand, au lieu d'opérer
dans un dissolvant unique, on fait usage d'un mélange, à
titre connu, de plusieurs dissolvants différents.
A cette fin, ils ont étudié l'action de la triéthylamine
sur l'iodure d'éthyle et sur le bromure d'éthyle dans des
mélanges d'acétone et de benzène à divers titres et à
( 5i)2 )
diverses températures, ou bien dans des mélanges de
benzène ebloré, de benzène et d'alcool benzylique, de
benzène et d'alcool méthylique, enfin, dans des mélanges
d'alcools divers et de benzène, de xylène ou d'acétone.
Le résultat général de leurs expériences tend à prouvei-
que la vitesse de la réaction dépend, dans les conditions
rappelées, des facteurs propres à chacun des dissolvants,
tels qu'on peut les déterminer en opérant avec chacun
d'eux isolément. Une élévation de la température semble
augmenter, dans les mêmes proportions, la vitesse de la
réaction dans les divers dissolvants.
J'ai l'honneur de proposer à la Classe l'insertion de la
note des auteurs dans le liulletin de la séance. »
— Celte proposition, ajjpuyée par M. De Heen, second
commissaire, est adoptée par la Classe.
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Vérificalion de l'exislence de la natation eulérienne dans
les latitudes observées à (rreenioich pendant les années
i880-i89l ; par F. Folie, membre de l'Académie.
Dans une note précédente, j'ai dit que la théorie du
mouvement de rotation de l'écorce terrestre indique, à
côté du terme chandlérien et du terme annuel, omis dans
les formules de réduction, la présence également du
terme eulérien proprement dit.
Les astronomes ont pensé que cette nutation de
( 595 )
7)04 jours s'était transformée (je n'ai jamais su pourquoi)
on celle de 451 jours; un astronome très distingué m'a
même écrit qu'il avait déduit des observations de Green-
wieh une valeur nulle pour la constante de la nutation
eulérienne.
Avant de la rechercher dans une longue série de lati-
tudes individuelles, obtenues par deux passages consécu-
lils de la polaire, j'ai voulu m'assurer, au moyen de celles
de Greenwich même, si l'on n'y constaterait pas la période
de 504 jours.
D'après moi, il doit exister trois périodes : celles de
504, de 505 et de 451 jours.
Donc les demi -sommes des résidus , pris deux à
deux, à cinq, à six et à sept mois d'intervalle, doivent
|)résenter, entre le maxinnnn et le minimum, des écarts
intérieurs à celui des résidus primitifs.
Je reproduis dans cette note le tableau de ceux-ci, que
jai déjà discutés antérieurement (*) ; l'amplitude des
variations est de \",V6.
En prenant les moyennes des résidus : 1" à cinq mois
d'intervalle; ^° a six mois; 5" à sept mois, l'amplitude
est réduite : 1° à 0",77; ^^ à 0",885; 5« à 0",84o (**).
Les trois périodes existent donc manifestement, et les
Irois nutations ont à peu près la même importance;
Teulérienne, toutefois, semble réduire les écarts plus
notablement que les deux autres.
Afin de m'assurer davantage de l'importance relative
des nutations eulérienne et chandlériemie, j'ai combiné
(*) Catéchisme correct d'astronomie sphériqne. Rome, 18!)."
C) Voir les tableaux ci-après.
( 594. )
toutes les latitudes moyennes {s et i) de Peters, en en fai-
sant les sommes deux à deux à six mois d'intervalle; cette
combinaison ne laisse absolument subsister que les deux
nutations en cause; et j'ai trouvé, pour les coefficients
respectifs de ces nutations : eulérienne, 0",iO; chandlé-
rienne, 0",09.
Je me propose de déterminer les trois termes à période
diurne (eulérien, chandlérien et annuel) au moyen de
toutes les latitudes [s -h i) de Peters, qui offrent trop [)eu
de combinaisons à six mois d'intervalle.
C'est en recherchant avec soin l'expression numérique
de ces trois nutations qu'on résoudra le problème de la
variation des latitudes.
Mais, je le répèle, on n'y arrivera sûrement que par
des combinaisons de passages supérieurs et inférieurs.
En etfet, à côté des trois termes à période diurne dont
je viens de parler, il existe, comme je l'ai montré dans
une i)récédente note, un terme annuel non diurne. Or
celui-ci, de même que l'aberration, est éliminé dans
la moyenne de deux latitudes {s et /), tandis que les trois
termes précédents seuls y subsistent.
Aucun autre procédé, si ce n'est celui de l'observation
des mêmes étoiles, le même jour, à 180° de différence de
longitude, ne permet d'effectuer cette élimination.
El si on ne la fait pas, le problème comporte tant
d'inconnues qu'il est pratiquement insoluble.
395 )
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s
( 599 )
Sur les vitesses de réaction; par A. de Hemptinne et
A. Bekaert.
Menschutkin et d'autres auteurs ont étudié l'influence
du milieu sur la vitesse de réaction; ils ont trouvé que
l'influence de la nature du dissolvant est très considérable.
Toutes ces recherches, fort intéressantes, méritent d'être
poussées plus loin; un chapitre entier reste à étudier:
c'est l'influence du mélange de diff"érents milieux sur la
vitesse de la réaction ; les résultats de ces recherches sont
présentés dans ce travail. Menschutkin (*) a étudié l'action
de la triéthylamine sur l'iodure d'éthyle et sur le bromure
d'éthyle dans différents milieux. Nous avons choisi les
mêmes réactions, parce qu'elles se prêtent particulière-
ment bien à l'étude que nous nous proposons de faire.
Méthode. ^
Dans une éprouvette A, on met 0^,505 de triéthyla-
mine; on introduit dans celle-ci une éprouvette beau-
coup plus petite, contenant 0*-', 543 de bromure d'éthyle;
on prépare ainsi trois éprouvettes, on met rapidement
dans chaque tube 10 centimètres cubes du dissolvant, on
(*) Zeitschrift fiir Pliys. Chem., t. V, p^SSO; t. VI, p. 41.
( 400 )
feime à la lampe el, après avoir mélangé les liquides, on
met les éprouvetles dans un bain ou dans une étuve à
température constante.
A des intervalles de temps assez long, on titre au
moyen d'une solution de nitrate d'argent, a|)rès avoir, au
préalable, détruit la triétliylamine au moyen d'une solu-
tion diluée d'acide nitrique; la méthode est basée sur ce
lait que les iodures et bromures de la série aliphatique ne
se laissent pas titrer par le nitrate d'argent, ce qui n'est
pas le cas pour les iodures et bromures de bases ammo-
niacales.
Menschutkin a opéré à 100'^ ; les réactions vont très
vite à cette température et l'on doit faire une correction
l)our le temps nécessaire à réchauffement des substances;
pour éviter ces difficultés, nous avons opéré ;i des tempé-
ratures plus basses, ce qui a encore l'avantage de donner
des chiftVes qui, comparés à ceux de Menschutkin, dé-
jnontrent l'intluence de la température. Les réactions
étant bimoléculaires, la constante est donnée par la for-
mule
a
ka =
{a — n)l
Dans la première colonne des tableaux suivants, le
temps se trouve indiqué en minutes; dans la seconde,
on trouve le nombre de centimètres cubes de nitrate
d'argent titrés, et dans la troisième, la constante ha.
(401 )
Benzol pur à 50".
reiiijis.
((X— Ji)t
1290
5.7
0.0000998
44.5 X 1290
!380
(')
O.O0UO988
44 X 1580
1695
77
42.5 X lt)9o
0,000100
^2670
10.75
0.000102
39.25 X 2670
4580
15 5
0.000100
54.7 X 4580
0.000500G
ka =
= 0.000100
Acétone à 50".
X
ka.
leiiips.
[a — x)t
420
14.8
35.2 X 420
0.00 1001
530
17.8
0.001042
32.2 X t50
1395
29. 1
0.000998
20.y X 1595
0.003041
ka
= 0.001013
( 402 )
Mélange d'acétone et de benzol a oO".
80 •/„ (Vacélone et W °/o de benzol.
Temps.
{a — x)t
KO.
585
13.7
0 000980
36.3 X 38Î)
483
iS
0 000851
55 X 485
460
15.6
0 000881)
54.4 X 460
0.002720
Au =. 0.000906
50 °/o d'acétone et SO °/o de benzol.
Temps. , — ^■''•
540 1 0.000650
37 X 540
iO 55
1036 0.000646
30.45 X «036
25.4
1440 0.000600
26.6 X 1440
0.001896
ka = 0.000632
( ^03 j
80" lo d'acétone et 20 % de benzol.
{a — x)t
360
0.6
44.41 X 360
0.000351
0.001028
ka = 0.000342
Benzol à 66°.
Temps. — ^L.- ka.
{a — x)i
4 9
^^^ /.r I ^ z^,, 0.000233
45.1 X 465
122
^**^ ^;rT tttt: 0.000224
' ^^^ -^ . .^,^ 0.000222
d5 X 1 950
0.000679
ka = 0.000226
( 404 )
Temps.
290
575
425
Acétone à 66°.
d-
ka
tu — ,r) C
20.7
0 00245
29.3 X ;290
^23.8
0.00255
24.2 X 575
26 1
0.00244
25.9 X 42y
0.0072-2
ka = 0.00240
80 "/o d'acétone et 20 "jo de benzol à 66°.
Temps.
[a— i)t
ka.
598
25.2
0 00'>I7
26.8 X 395
465
25.3
0 OOS'^O
24.7 X 465
1555
37.8
0 00''>''8
12.2 X 1355
0.00665
ka
= 0.00221
( 405 )
50 "/o (t acétone et 50 «/.. de benzol à 66°.
Temps, ka.
(a — x)t
i fi T
550 '- 0.00152
53.3 X 350
19.9
420 0.00157
501 X 420
0.00509
A'a = 0.00154
20 °/o d' acétone et 80 "/o de benzol à 66".
X
Temps. ka.
(a — x)t
11.2
545 0.000856
(a — x)t
11.2
38.8 X 345
27.5
2^.5 X 1475
1475 0.000845
O001G79
ka = 0.000859
o"** SÉRIE, TOME XXXVI. 28
( 406 )
Nous avons représenté graphiquement ces résultats
(fîg. 1) en portant comme abscisses la proportion des mé-
langes, et comme ordonnées les constantes correspon-
dantes; ainsi OA représente la vitesse dans le benzol,
FB dans l'acétone, DM dans \^ mélange à parties égales
d'acétone et de benzol. Le point D se trouve au-dessus
du point M de la ligne AB ; la vitesse dans le mélange
acétone et benzol est donc un peu plus grande que
celle que l'on obtiendrait par le calcul en admettant que
chaque liquide agit suivant la loi du mélange. Pourtant
cet écart n'est pas grand et ne dépasse pas de beaucoup
la moyenne des erreurs. En elïét, pour un mélange de
parties égales d'acétone et de benzol, l'erreur moyenne
est d'environ 5 "/o, la constante obtenue par l'expérience
est 0.000652, celle obtenue par le calcul est ().000o56,
soit un écart de 14 "/o environ.
( 407 )
Mélange de benzol et d'acétove a 66**.
Chlorbenzul à 66°.
Tcuip.-. ka
[a — X) l
4o() 0.000841
50. ;2 X 450
l-w(i -— 0.000846
"lo.i X 1570
0.001087
l.u = O.O0O843
Benzol et chlvrbenzol à 66".
Temps. : — — ka.
\u — J)l
1â50 — 0.000450
\U— J)l
189
21.1 X 1350
25
27 X 1800
28.0
21.4 X 2790
^^^^ ^ r^ 0.000475
27 X 1800
2i90 -— -— - 0.000479
0.001402
/,« = 0.000467
( 408 )
80 °/„ de benzol et 20 °/o de chlorbevzol à 66°.
Temps.
(a — x)t
ka.
480
7
0.000539
43 X 480
\ fifiO
16.5
0.000515
25.5 X 1560
1920
18.2
0.000298
21.8 X 1920
0.000952
ka
=--0.000317
20 "je de benzol et 80 "/„ de chlorbenzol à 66°
Temps. ka,
{a — x]t
12.9
488 0.000712
37.1 X 488
25 5
1485 '- 0.000700
1815 0 000678
22.4 X 1815
(a — x]t
12.9
37.1 X 488
25.5
24.5 X 1485
27.6
0.002090
ka = 0.000696
( i()9 )
Pour le mélange à parties égales de chlorbenzol et de
benzol, la constante calculée est 0.000535, la constante
trouvée 0.000467, soit un écart d'environ 14 "/o.
La figure 2 donne aux points ABC la valeur des con-
stantes trouvées. On voit que, dans le cas actuel, la vitesse
est un peu plus petite dans les mélanges.
Chlorbenzol et benzol à 66".
^■^
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^_,.,*-'^ "^
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"^ ^ '^
C
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B
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0 1 2 3 4 5 o
Fifi. 1
Alcool benzyliqiie à 66\
Temps.
2-J8
270
355
[a— x)t
32.7
17.3x^i28
54.6
15.4 X 'i70
12.7 X 353
ka.
0.008290
0.008321
0.008273
0.0-24884
ka = 0.008294
( 410 )
Benzol et alcool benzylique à
66".
Temps.
.r
Ln
[a — x] t
520
25 7
0.005305
520
32.5
0.005507
17 5 X 520
1400
42 1
0.003806
17.1) X 1400
0.010618
ka =
= 0.005559
La valeur calculée est 0.004201, la valeur trouvée
0.005539, soit un écart d'environ 17 %; l'erreur moyenne
a été d'environ 9%; la représentation graphique donne-
rait une figure analogue à la figure 2.
A Icool méthyliq u e .
lemps.
(a — x) t
««.
175
15
0.002i5
55 X 175
500
21.8
0 ()0'>'S(l
28 2 X 300
542
23.3
0 00"^ 55
2fi.7 X 342
0.00750
ka
= 0.00250
( 4H )
.4 Icool
méthylique et benzol
Temps.
JC
ka.
{a - x)C
270
18.5
0 00-> 1 7
31.5 X -270
v'«W/-* 1 ■
298
19 4
0.00212
50 G X 298
480
26 7
-
0.00230
25.5 X 480
0.00659
ka =
: 0.002 19
La valeur calculée est 0.00156; l'écart est donc de
61 °/o environ.
Alcool méthylique et acétone.
Temps.
185
404
\a - x]t
17.5
0.00295
52.5 X 185
28
22 X 404
0.00515
0.00610
ka
= 0.00505
La valeur calculée est 0.00245, âoit un écart de 24 "/o
environ.
( 412 )
Alcool éthylique.
Temps. — fca.
' {a-x)l
19 7
340 '- 0.001910
30.3 X 540
24. C
300 0.001957
25.4 X 500
n6 9
1364 0.002065
15.1 X 13t>4
0.005912
ka =
0.00197
Alcool éthylique et benzol
Temps.
X
ka
(a —jc)t
280
162
0 00171
33.8 X 280
352
19.1
0 0017*)
30.9 X 552
1375
56 5
0 001 9^
25.7 X 1575
0.00558
ka=:
: 0.00 179
La valeur calculée est 0.001099, donc notablement
inférieure : 70 "/« environ.
( 413 )
Alcool étiiylique et acétone.
Temps.
X
ka
{a — x)t
«57')
21.9
0.00286
28.1 X 272
<36n
40.4
0.003008
9.6 X I3G5
1755
42 2
0.005082
7.8 X 1755
0.008950
ka
= 0.002985
La valeur calculée est 0.01)218 ; elle est aussi notable-
ment inférieure : 36 °/o environ.
Alcool propylique.
Temps.
[a - x)t
ka.
260
U.9
0.00163
55.1 X 260
552
175
0.00155
32.5 X 352
470
22 5
0.00172
27.5 X i70
0.00488
A:u = 0.00162
( 414 )
Alcool propylifpie et benzol.
Temps. ka.
'^ (« — X) i
14.4
272 0.00148
(« — x) l
14.4
35.6 X -27-2
51.8
18.2X995
35.5
995 0.00175
18.2X995
1 \ 30 ^^^ 0.00 1 79
16 5 X 1150
0.0050-2
/fa = 0.00167
La valeur calculée est 0.0!>()9l2, soit un écart de 8i %
environ.
Alcool propiilique et acétone.
^ {a — x)i
-26.5
420
23.5 X 4-20
0.00268
S40
298
0.00275
20.2 X 540
0.00541
ka
= 0.00270
La valeur calculée est O.OOlâOl, soit un écart de 55 »/o
( 415'
Alcool mélhylique et éthyliqu
e.
X
ka:
'^""J'- {a-x)t
17.5
0 00^23
32.7 X 255
405 24.5
0 00253
25.7 X 405
0.00458
ka =
: 0.00229
La valeur calculée est 0.0203, soit un écart de 2 "/o
environ.
Alcool
mélhylique et
propylique.
Temps.
X
ka
(a — x)i
235
16
0 00200
34 X 235
435
24
0.00212
2G X 435
0.00412
ha = 0.00206
La valeur calculée est 0.00200.
( 416 )
Alcool
éthylique et 2 °/,
>d'
eau.
Temps.
X
ka.
{a—x)t
273
19
0 00224
28.1 X 273
i55
26
0.00240
24 X 453
1383
58
12 X 1583
0.00228
O.O0G92
ka
= 0.00250
Alcool éthylique -+- 2 "/» d'eau et benzol.
Temps. — ka.
[a—x)t
267 0.00186
254 X 267
22.8
420 0.00199
1 7.8 X 420
0.00385
yca = 0.00192
La valeur calculée est 0.00126, soit un écart de 52 "/o
environ.
(417 )
Acétone et 10 °/o d'eau.
Temps.
{a — x]t
*d.
285
nO.G
0.00557
19.4 X 285
ilK5
5S.4
0.00547
U6 X44f)
0.01104
Aa^
= 0.00552
L'addition de l'eau a donc pour effet d'augmenter
beaucoup la vitesse de la réaction.
Acétone et alcool benzylique.
remp-.
[a — x)t
ka.
98. H
32.6
0,00657
17.4 X ii«5
360
35.5
0.00680
1 4.5 X 360
0.01337
ka
= 0.00668
La valeur calculée est 0.0Ô534, d'environ 26 "/o
moindre que la valeur trouvée.
( 418 )
Temps.
1405
1940
femps.
uoo
5213
Xylol à 66\
X
ka.
(a — X) i
6.0
0 0001058
45.4 X l'«ti^
\J *\'\J\J 1 \J*J\J
8.5
0 00010-'>5
41.7 X li>45
V7\yU^ I V7«-tJ
O.OOO^iOGi
/.•a =
= 0.0001050
Xijlol et benzol.
T
lia.
{a — xi i
8.7
0 0001 50
41 5 X J400
V-v^V/t/ ■ fl\J
15.0
0 0((0140
54.0 X ^-15
\/»V/V/Vl 1 r\J
0.000290
ka :
= 0.000145
La valeur calculée est 0.000165, la valeur trouvée
0.000145, soit un écart d'environ 17 %.
( 419 )
Xylol et acétone à 66°.
Temps.
r
ka
'^it — a] t
508
U 1
0 001*274
55.9 X 308
545
20
0 001''23
50 X S45
1400
50.4
0 00 1 1 50
iOG X 1400
0.005(i47
La =
= 0 001215
La valeur calculée est 0.(101i25I , soit un écart de 3 "/o
environ de la valeur trouvée; ce qui est moindre que les
erreurs d'expérience.
Xi/lol el alcool.
Temps.
X
ka.
[Il — .r)t
498
-loi
0 001418
29.5 X498
1555
52.7
17.5 X 1553
0.001596
1458
55.2
0 001570
1G.8 X 1458
0.004184
;ca = 0.001594
La valeur calculée est 0.001067, soit 53 "/o d'écart
environ.
( 420 )
Xylol el chlorbenzol.
Temps.
317
1412
(a- x)t
5.6
44.4 X 317
0.0003978
1 G.4
0 000'^4H9
33.6 X 1412
0.0007430
ka
= 0.0003715
La valeur calculée est 0.000478; elle est notablement
plus grande que la valeur trouvée: 12 % environ.
lodure d'éthyle el triéthylamine dans 10 centimètres cubes de
benzol à 66°.
Temps.
(a — X) t
ka.
■=^90
185
0 00188
5I.5X5:iO
545
24.7
0 00179
25.3 X 545
1505
36.7
0 00185
15.3 X 1505
0.00550
/fa = 0.00183
( «< )
Mêmes substances dans l'acétone.
Temiis. '• ku.
(a —x)t
58.5
IGO 0.020y
H.5X 160
41.6
252 0.0215
8.4 X 252
0.0422
/fa = 0.0211
Mêmes substances dans le mêla7ige acétone et benzol.
X
Temps. ka.
{a — x)c
54
465 0.0124
{a-x)i
54
16 X «65
4i
405 0.0112
9 X 405 ____
0.0236
ku =0.0118
La valeur calculée eslO.OMi; elle s'écarte de la valeur
trouvée d'une quantité moindre que les erreurs d'expé-
rience.
En général, sauf pour les milieux à base d'alcool, le
bromure de tétracthylammonium qui se forme, se dépose
O'""" SÉRIE, TOMK XXXVl. 20
( m )
à l'élat de cristaux ; dans l'alcool, ce produit est dissous.
Or uous avons remarqué que dans ces milieux la con-
stante ka va en croissant ; cela s'explique si l'on admet
que la substance produite exerce une action accélératrice
sur la vitesse de la réaction. Nous nous sommes assurés
de la réalité de ce t'ait et nous y reviendrons dans un
autre travail. Cette action accélératrice n'est pas très
notable; c'est pourquoi on obtient une valeur satisfaisante
pour la constante ka, si l'on a soin de titrer les tubes
après un temps assez court, c'est-à-dire avant qu'une
grande quantité de (C2H5)4N n'ait été produite.
Atin de mieux nous rendre compte des résultats obte-
nus, formons le tableau suivant :
SUBSTANCES.
Benzol
Acétone ....
Ghlorbenzol . . .
Alcool benzylique.
Alcool mélhylique.
Alcool éthylique .
Alcool propylique .
Xylol
Alcool éthylique+^o/o H
Acétone + 10»/o U4O. .
Valeur
du coefficient ka
pour
N (CjHsU 15 à 66».
Chiffres calculés
d'après ceux
de Menschutkin
pour
le coefficient An
de
NlC^Hslilà-lOO».
0.000^2-20
0.002400
0.0008i;-i
0.008294
0.002501)
0.001970
0.001020
0.000103
0.002300
0.005S20
0.01314
O.i36oo
0.03197
0.2992O
0.41610
0.08233
O.0064C
Rapports.
o7 6
06.9
62.1
36
46.3
41.6
62.5
( 423 ;
Si l'on jette un coup d'œil sur le rapport des vitesses
de N(C2H5)iB2 et N(G.2H.-;)4l dans différents milieux, on
voit que le parallélisme est très grand; on peut même le
considérer comme absolu pour plusieurs milieux : ainsi,
par exemple, pour le benzol, l'acétone, le chlorbenzol et
le xylol ; il est à remarquer que c'est précisément pour
les alcools que l'on trouve une différence un peu
notable.
Influence de la température.
Un accroissement de la température semble augmenter
dans les mêmes proportions la vitesse de la réaction,
comme le montre le tableau suivant :
Pour (NCoH5)4Br.
à 30". lîappoits. i\ %". Rapports. à 100".
Benzol. . . 0.000 100 2.28 0.000228 8.48 0.00175
Acétone . . 0.01013 2.57 0.002400 8.98 0.00215
Pour N{C^U^^Ul.
à 66». Rapports. ;'. lUO».
Benzol. . . . 0.00185 7.17 0.0151;
Acétone . . . 0.02110 0.48 0.15655
( 424 )
Valeur de ka pour les mélanges.
COMPOSITION
(les
M ÉI- ANGES.
trouvée.
calculée.
Benzol et acétone ....
Benzol et chlorbenzol. . .
Benzol et alcool benzylique.
Benzol et alcool méihylique
Benzol et alcool éthylique .
Benzol et alcool proiiylique.
Alcool méthylique et acétone
Alcool étliylique et acétone.
Alcool propylique et acétone
Alcool benzyliaue el acétone
Xylol et alcool éthylique. .
Xylol et acétone
Xylol et chlorbenzol . . .
Xylol et benzol
Alcool méthylique et éthylique
Acool méthylique et propylique
Alcool éthylique -h "l "/o lUO ■+- ben
Alcool éthylique + S'/o HaO . .
0.00'184
0.000467
o.oo;^53
0.00249
0.00479
0.00167
0.00305
0.00298
0.00270
0.00668
0.00439
0.00124
0.00372
0.000143
0.00229
0.00206
0.00492
0.C0131
0.0J0S3O
0.00462
0.00136
0.00109
0.00092
0.00243
0.00248
0.00201
0.00334
0.00106
0.00123
0.00424
0 000165
0.00223
0.00206
0 00126
— 42
— 17
-+- 61
-t- 70
-h 81
-+- 24
-+- 36
-4- 35
-+- 26
+ 33
— 3
— 44
— 42
Il semble qu'il y a certaines lois qui régissent l'action
( 423 )
des mélanges. On peut les formuler de la manière sui-
vante :
I. Pour beaucoup de mélanges, l'écart entre la valeur
trouvée et la valeur calculée ne dépasse pas de beaucoup
Cordrede grandeur des erreurs d'expérience; les valeurs sont
tantôt supérieures, tantôt inférieures aux chiffres obtenus
par le calcul.
II. Lorsque des corps d'une même famille sont mélangés
avec un même corps, l'ordre de grandeur de ("écart entre
la valeur calculée et la valeur trouvée est le même et varie
régulièrement avec le poids moléculaire.
Ainsi nous voyons, pour les mélanges du benzol avec
les différents alcools, des écarts de 61, 70 et 81 "/o.
m. Pour les mélanges de deux corps de la même
famille, l'écart entre les valeurs trouvées et calculées est
moindre que les erreurs d'expérience.
Tel est le cas pour les mélanges de l'alcool mélhylique
avec l'alcool éthylique et propylique.
IV. Pour deux corps de familles différentes, l'écart entre
la valeur trouvée et calculée peut être moindre que les
erreurs d'expérience.
Exemple : le mélange d'acétone et de xylol, où l'écart
n'est que de 3 %.
On remarquera aussi dans le tableau précédent que
pour tous les mélanges où il y a un assez grand écart
entre la valeur calculée et la valeur trouvée, l'un des com-
posants contient le groupe hydroxyle.
( 426 )
Mélange de trois substances.
A Icuol éthylique, xylol et acétone à 66"
Temps. T. *"•
' {a — x)t
26.3
520 0.002154
25.7 X 520
37 4
U12 0.002102
12.6 X 1412
0.004256
A-a = 0.0021 18
La valeur calculée théoriquement est 0.0015(5-5, soit un
écart de 55 "/o.
La valeur calculée d'après les chiffres ohtenus pour les
mélanges binaires est 0.00161, soit un écart de 5i "/o-
On peut considérer le mélange des trois substances
comme composé de :
\ 2
- alcool, - xylol et acclonc.
3 5
1 2
- xvlol. - alcool el acelone.
5 ' 5
i 2
- acétone. - alcool el xylol.
5 5
La valeur calculée théoriquement est celle que l'on
obtient en prenant pour les mélanges binaires xylol el
acétone, etc., les nombres calculés.
( 427 )
On peut aussi prendre pour la constante de ces
mélanges binaires les chiffres obtenus précédemment par
les expériences et prendre alors pour la constante cal-
culée la moyenne des chiffres obtenus en introduisant
ces valeurs d'ans les trois combinaisons :
- alcool -♦- - xylol et acétone.
3 5
^ 2 , ,
- xvlol H alcool et acétone.
3 ' 3
I i2
- acétone -♦- - alcool et xylol.
3 3 ^
C'est ainsi que l'on a obtenu 0.00161.
Alcool, acétone et benzol.
Temps. Art.
'^ {« — X) t
2G2 0.00242
30.6 X 202
20.6
289 0.00242
29.4 X 289
39 \
1880 '- 0.00265
tO.9 X 1880
0.00749
ka = 0.00249
La valeur calculée théoriquement est 0.00155; l'écart,
de 62 °/o.
( 4-28 )
La valeur calculée d'après les mélanges binaires est
0.00180; l'écart, de 58 °/o.
Xylol, benzol, acétone.
X
' (a — X) t
11.5
290 r^^ r^rr 0.001006
0.001025
32.5 X K25
0.002051
^'a = 0.001015
La valeur calculée théoriquement est 0.000900;
l'écart, de 12 "/o.
La valeur calculée d'après les mélanges est 0.000950 ;
l'écart, de 8 "jo.
Xylol, chlorbenzol et ben.
zol.
X
ka
[a — x)t
415
6.(>
0.000506
43 4 X 415
1335
14.9
0.000518
35.1 X 1535
1425
15
35 X 1 425
0.000297
0.000981
ka '.
= 0.000527
( 429 )
La valeur calculée théoriquement est 0.000385; l'écart,
(le 84 »/o.
La valeur calculée d'après les mélanges est O.OOOôtJ ;
l'écart, de 9 °/o.
Le tableau suivant nous permet de nous rendre compte
de l'allure générale des phénomènes. Les chiflVes qui se
trouvent dans la colonne intitulée composition des mé-
langes, indiquent avec leurs signes l'écart entre la valeur
trouvée et la valeur calculée pour les dilïérents mélanges
binaires.
COMPOSITION
des
MÉLANGES.
5
p
Valeur calculée
d'après
les mélanges.
if S
U 3
■- .H"
O) o
^5
ça
•M
+ 33
2H
249
101
309
161
180
93
336
+ 31
+ 38
+ 8
— 9
156
153
90
385
+ 35
+ 62
+ 12
-24
Alcool -+- 36 acétone — 3 xylol.
+ 70
Alcool + 36 acétone + 17 benzol.
Xylol — 3 acétone + 17 benzol.
-42
Xylol —Il chlorbenzol— 12 benzol.
On remarquera que la valeur calculée théoriquement
s'écarte toujours plus de la valeur trouvée que la valeur
calculée d'après les chiffres obtenus pour les mélanges
( 430 )
binaires; ceci montre qu'on peut considérer les mélanges
ternaires comme nous l'avons fait, c'est-à-dire composés
de mélanges tels que
I 2
-alcool -I — (acétone -4- xylol) etc.
5 5
On peut, au moyen des chiftres obtenus pour l'écart
pour cent des mélanges binaires, calculer approximati-
vement celui des mélanges ternaires :
Écart Écart
calculé trouvé.
2
- (55 -H 55 — 3) -♦-43 -+-35
5
^(35 -4- 70 -t- 17) -+-81 -^ 62
3
2
- ( 3 — 12 4- 17) -H \ -H 12
3 ^
_ (_ Il _i2_i2) —26 —24
5
Il y a une assez grande ditlérence entre les écarts cal-
culés et trouvés, mais le signe est toujours le même, ce
qui démontre que chaque couple d'éléments exerce son
influence.
COMITÉ SECRET.
La Classe s'occupe de la présentation de candidatures
nouvelles pour les places vacantes.
( 431 )
CliAllilSi: DES LETTREHi.
Séance du 7 novembre 1898.
M. F. Vainder Haeghen, directeur.
M. le chevalier Edm. Marghal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : y\M. A. Gkon, vice-directeur ; G. Rolin-
Jaequemyns, S. Bormans, Ch. Piot, Ch. Potvin, J. Ste-
cher, T.-J. Lamy, Ch. Loomans, G. Tiberghien, L. Van-
derkindere, le comte Gohlet d'Alviella, P. Fredericq,
G. Kurth, Ch. Mesdach de ter Kiele, H. Denis, le che-
valier Ed. Descamps, G.Monchamp, P.Thomas, Ern. Dis-
cailles, membres; J.-C. Vollgraff, associé; V. Brants,
Ch. De Smedt, Jules l.eclercq, M. Wilmotle, Ern. Gos-
sart et Polydore De Paepe, correspondants.
M. le Directeur adresse les félicitations de la Classe à
M. Rolin-Jaequemyns au sujet de sa présence dans l'as-
semblée.
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'Intérieur et de l'Instruction pu-
blique fait savoir que le XII" Congrès international des
orientalistes se tiendra à Rome en 1899.
( 452 )
— M. Gossart présente (avec une note qui ligure
ci-après), au nom de la famille Banning, quinze volumes
et brochures publiés par M. Emile Banning, sous le voile
de l'anonyme, et destinés à la bibliothèque de l'Acadé-
III ie. — Remerciements.
— Hommages d'ouvrages :
1" Remarques critiques sur les œuvres philosophiques
d'Apulée; par P. Thomas;
2° Les élections du Reichstay; pai- Antonin Lefèvre-
Pontalis, associé ;
5" Du serment. Discours de rentrée à ht Cour d'appel de
Liège; par A. Faider ;
4" Le Conseil de Brabanl. Histoire. Organisation. Pro-
cédure, tome T'; par Arthur Gaillard (présenté par
M. Marchai, avec une note qui figure ci-a|)rès) ;
5° Compte rendu sommaire des travaux archéologiques
exécutés du 3 novembre 1897 au I"' juin 1898, en Perse;
par J. de Morgan;
()° Bibliotheca hagiographica latina, tasc. l; par la So-
ciété des Bollandistes (présenté par M. Ch. De Smedl,
avec une note qui figure ci-après).
— Remerciements.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
M. Emile Banning avait, peu avant sa mort, préparé,
pour être offerts à la bibliothèque de l'Académie, des
exemplaires de quinze volumes et brochures, qui consti-
tuent en partie son œuvre imprimée et que j'ai l'honneur
de déposer en son nom sur le bureau.
( 455 )
De ces quinze publications, une est signée : Charles
Donald, pseudonyme sous lequel Théodore Weustenraad.
l'oncle de notre regretté confrère, correspondant de la
Classe des lettres, a fait paraître, en 1831, ses Chants de
réveil.
Emile Banning est auteur de beaucoup d'écrits ano-
nymes. Parmi les ouvrages qui ne portent pas son nom,
je signalerai notamment : La Belgique et le Vatican,
exposé historique de leurs rapports (Bruxelles, 1880). C'est
un extrait des trois volumes publiés sous le même titre
en 1880-1881. On a quelquefois attribué La Belgique et
le Vatican à M. Frère-Orban. M. Frère lui-même, parlant
(le cet ouvrage, a dit, dans la séance de la Chambre des
Représentants du 8 août 1884 : « mon exposé » ; il faut
entendre le mot en ce sens que le Ministre entendait
réclamer la responsabilité d'un ouvrage dont l'impression
avait été ordonnée par lui.
La situation qu'il occupait dans l'administration supé-
rieure et surtout des motifs de convenance personnelle,
paraissaient à M. Banning lui faire un devoir de ne pas
revendiquer, de son vivant, cette publication comme
sienne. Nous pouvons dire aujourd'hui qu'elle est de lui
et qu'elle est digne de ce que nous connaissons de son
grand talent d'historien et de publiciste.
Il en est de même des suivantes, qui ne figurent pas
davantage dans le recueil des Notices biographiques et
bibliographiques des membres de l'Académie :
Vépiscopat et l'instruction publique en Belgique de I8ô0
à 1879 (Bruxelles, 1879);
La morale dans l'enseignement primaire (Bruxelles, 1879);
La Conférence de Bruxelles et les Pays-Bas (Bruxelles,
1890).
( 454 )
Notre éminent confrère de la Classe des sciences,
M. le général Briahnont, appréciera ces écrits dans la
notice qu'il prépare sur Emile Banning : je dois donc
me borner à n'en citer ici que les litres.
Ern. Gossart.
Le Conseil de Brabant {Hisloire, — Organisation, —
Procédure), tel est le titre d'un important ouvrage que
publie M. Arthur Gaillard, et dont il ofïïe à l'Académie
le tome P', consacré à YHisloire.
Le Conseil souverain de Brabant, qui eut l'administra-
tion supérieure de la justice dans les provinces de Brabant
et de Limbourg jusqu'à sa suppression par la loi du
G frimaire an IV (27 novembre 1795), avait déjà fait
l'objet d'une communication de Gachard, parue dans les
Mémoires de l'Académie {\). L'entreprise de M. Gaillard
vient continuer la série des ouvrages concernant l'admi-
nistration civile et judiciaire des anciens Pays-Bas, au
nombre desquels nous citerons ceux de A. Pinchart (2),
A. Vandenpeereboom (5), P. Alexandre (4), P. Alexandre
(i; Sur la composition et les attributions des anciens États de
Brabant (Mém. in-4o de l'Acad. uoy. de Belgique, t. XVI).
(2) Histoire du Conseil souverain du Hainaul (Mém. in-8° de i,'Acad.
ROY. DE Belgique, t. VII),
(3) Le Conseil de Flandre à Ypres.
(4) Histoire du Conseil privé aux Pays-Bas (Mém. in-8» de l'Acad.,
t. LU).
( 435 )
cl Tierenteyn (1), et surtout les remarquables travaux
d'Edmond Poullet (2).
Tout ce que je puis citer, à cette place, du livre de
M. Gaillard, c'est que, contrairement à l'opinion du Con-
seil de Brabant lui-même, lequel appuyait son origine sur
la charte de Cortenberg de 1512, l'auteur en fait remonter
l'institution aux ducs de Brabant de la Maison de
Bourgogne; or l'avènement du premier de ces princes,
Antoine, fils de Philippe le Hardi et de Marguerite de
Flandre, n'eut lieu qu'en 4404.
Les historiens et les juristes liront avec intérêt cette
première partie de l'œuvre entreprise par M. Arthur
Gaillard et que, nous l'espérons, il saura mener à bonne
fin, grâce à la situation qu'il occupe aux Archives du
Royaume et à ses connaissances en matière de droit et
d'administration.
La seule observation que je me permette de faire, c'est
que l'auteur ne parle guère des anciens auteurs qui se
sont occupés du Conseil souverain de Brabant, entre
autres P. Stockmans, J.-Ch. Verloo, Ph. Wielant et
surtout le comte Godwin Wynants, qui a rendu par
ses conseils et son érudition de si grands services à
Charles VI et dont l'ouvrage, imprimé à Bruxelles en
1744, porte le titre : De supremae Ciiriae Brabantiae deci-
siones recentiores.
Chev. Edm. Marchal.
(1) Swr les officiers fiscaux des anciens Paijs-Bas (Mém. in-8" de
l'Acad., t. XLV).
(2) Histoire du droit pénal dans l'ancien duché de Brabant jusqu'à
et depuis Charles-Quint (Mém. cour, et des sav. étrang., in-4o, de
i/AcAD. ROY. DE BELGIQUE, t. XXXIII et XXXV). — Histoirc du droit
criminel dans l'a7icienne principauté de Liège (Ibidem, t. XXXVIII).
( 456 )
J'ai l'honneur d'offrir à la Classe, au nom de la Société
des BoUandistes, la première livraison de la Bibliotheca
hagiographica latina antiquae et mediae aetatis.
Cette publication contiendra le relevé, par ordre alpha-
bétique, des noms des saints, de tous les écrits relatifs à
leur vie, à leurs miracles, aux translations de leurs corps,
etc., rédigés en latin avant le XVI« siècle, avec l'indica-
tion de tous les ouvrages et recueils oîi on les trouve
imprimés. En règle générale, nous n'avons pas mention-
né les documents encore inédits.
Pour chacune des pièces, nous avons marqué Vincipit,
— et aussi ceux des prologues et des lettres dédicatoires,
lorsqu'il y a lieu, — le desinit et toutes les indications
qui peuvent la faire reconnaître facilement, ainsi (|ue les
particularités notables des diverses éditions.
L'ouvrage entier comptera plus de douze cents pages.
Il rendra certainement de grands services aux érudits qui
sont amenés à étudier des questions relatives à l'hagiogra-
phie où à l'histoire de la littérature ecclésiastique, et leur
épargnera bien de pénibles recherches. Un autre grand
avantage de ce nouvel instrument de travail, c'est que,
grâce à lui, il sera extrêmement aisé désormais de con-
stater si un document hagiographique latin, rencontré
dans un manuscrit, est déjà publié.
FI a fallu un travail collectif et assidu de plusieurs
années pour rassembler les éléments de ce recueil. Pour
plus de sûreté, nous avons voulu voir de nos yeux,
autant que possible, les livres que nous y avons cités ;
plusieurs voyages, en France, en Allemagne, en Angle-
terre et en Italie, ont été entrepris dans cette vue, et
( /P37 )
certes nous ne regrettons pas notre temps et notre peine.
Nous osons croire aussi que les savants ne nous repro-
cheront pas d'avoir, pour le mener à bonne fin, retardé
un peu l'impression du troisième volume âesAcla sancto-
rum de novembre. Il abrégera du reste considérablement
le travail de la préparation des volumes suivants.
Ch. De Smedt.
RÉSULTATS DU CONCOURS ANNUEL POUR i899.
Quatre manuscrits ont été reçus.
Le premier porte pour devise : Droit oblige (Francis
Lieber) et répond à la troisième question :
Déterminer, d'après la doctrine et les traités, le régime en
temps de paix et en temps de guerre, de l'État neutre à titre
permanent. Les conséquences de la violation du territoire
neutre seront l'objet d'une attention particulière. Les con-
currents appuieront leurs déductions d'exemples empruntés
à l'histoire des États neutres et étudieront également les
antécédents de la neutralité belge.
Commissaires : MM. Descamps, Prins et De Paepe.
3'"* SÉRIE, TOME XXX VI. 30
( «8)
Le deuxième a pour devise : Mr.ôev ayav et répond à
la sixième question :
Faire, d'après les sources, l'histoire et la description du
sanctuaire d'Escidape, à Epidaure, en insistant spéciale-
ment sur le théâtre de PoUjcléte.
Commissaires : MM. Alph. Willems, Goblet d'Alviella
et Vanderkindere.
Les troisième et quatrième travaux portent comme
devises : Quid dcceat, quid non (Horace, Art poétique) et
Lucent in lenebris; ils répondent à la huitième question :
Exposer les théories de la colonisation au XIX^ siècle et
étudier le rôle de l'État dans le développement des colonies.
Commissaires : MM. Denis, Descamps et Brants.
Prix Teirlincr.
Aucun mémoire n'est parvenu en réponse à la question
posée pour la quatrième période du concours : Histoire
de la prose néerlandaise avant l'influence bourguignonne.
Une note intitulée : Nomina geographica belgica,
par M. P. Tack, professeur à l'Athénée royal de Huy,
est renvoyée à l'examen de MM. Kurlh, Fredericq et
Vuylsteke.
( 439 )
COMMUNICATION ET LECTURE.
Un curieux problème de transmission symbolique. — Les
roues lilurfjiqitcs de l'ancienne Egypte ; par le comte
Goblet d'Alviella, membre de l'Académie.
On donne en Belgique et en France le nom de « roues
de fortune » à des roues qu'on fait tourner pour consulter
le sort; pour obtenir un résultat magique; pour honorer
un personnage surhumain; pour démontrer, par une
image facile h saisir, l'instabilité des choses humaines;
pour in)primer plus de solennité à certaines fêtes mi-pro-
fanes, mi-religieuses. Nous connaissons tous les roues de
fortune qui jouent un rôle dans nos cavalcades, nos pro-
cessions, nos plantations d'arbres de mai, nos cortèges
de géants, etc. Plusieurs églises de la Basse-Bretagne
renferment encore des roues accrochées à la voûte on
suspendues aux piliers; les fidèles les font tourner à la
main ou au moyen d'une corde, en payant chaque fois
deux sous pour un saint dont l'image est placée à côté et
qui porte le nom de saint à la roue : Santic ar rod ou Sant-
he-rod. Parfois, c'est un véritable oracle que les jeunes
Bretonnes consultent pour savoir si elles se marieront
dans l'année, les gens mariés pour s'assurer s'ils seront
heureux ou malheureux dans certaines entreprises.
Ailleurs, on espère ainsi obtenir du saint la délivrance
( 4iO )
d'une maladie, la fécondilé du bétail, etc. Il s'agit évi-
demment là, comme le lait observer M. Gaidoz, de pra-
tiques, étrangères et antérieures au christianisme, dont la
signification originaire s'est perdue (1). Des roues de for-
tune se montrent, du reste, parmi les représentations
figurées des verrières et des bas-reliefs, "dans certaines
églises gothiques.
Fie. •!. Roue liturgique du Japon (2).
Le même usage se rencontre au Japon. On y trouve,
à l'entrée des sanctuaires bouddhiques, encastrées dans
(1) H. Gaidoz, Le dieu gaulois du soleil et le symbolisme de la roue.
Paris, -1886, pp. 38-39.
(2) D'après un exemplaire du musée de Brighton, re|)roduit par
M. Wiliam Simpson dans son ouvrage Tlie Buddldst Praying-Wheel.
Londres, 1896, p. 416.
( i^il )
les piliers de bois, des roues en bronze que les fidèles
font tourner à la main. De même que les roues bretonnes
sont parfois munies de clochettes, les roues japonaises
portent des anneaux de métal qui, glissant le long des
rayons, produisent un son argentin.
Au Tibet, ces roues sont remplacées par des cylindres,
les célèbres « moulins à prières » du lamaïsme.
II n'est pas dilïicile de reconstituer la genèse des roues
liturgiques du Japon. C'est un instrument d'origine
indienne, la représentation de la « Roue de la Loi «,
que le Bouddha mit en mouvement pour le salut du
genre humain ; elle-même a son antécédent, comme l'a
péremptoirement démontré M. W. Simpson, dans les
roues magiques que les brahmanes fiiisaient tourner pour
dominer le cours des forces naturelles et, en particulier,
du soleil (1). En réalité, nous avons là une combinaison
d'un symbole et d'un rite. Le symbole, c'est la représen-
tation du soleil par une roue ou un disque. Le rite, c'est
la circumambulation où l'on imite le mouvement appa-
rent de l'astre.
Comme ce rite et ce symbole ont été retrouvés, hors
de l'Inde, parmi les principales branches de la famille
indo-européenne, — notamment chez les populations
celtiques de l'Europe occidentale (2), — on peut se
(t) TheBiiddhist Praijing-Whed. Londres, 1896, cliap. IV.
(2) Cf. A. Bertrand, La religion des Gaulois. Paris, 1897, p. i8t.
« La rouelle a joué un rôle particulièrement important en Gaule. A
titre d'amulette, nous la trouvons répandue en abondance dans
nombre d'enceintes gauloises préromaines, centres de cérémonies
religieuses... On en faisait un commerce analogue au commerce des
médailles et autres souvenirs pieux, vendus en Bretagne les jours de
pardon à la porte de nos églises. »
( 442 )
demander si les roues liturgiques de la Bretagne et en
général nos roues de fortune se rattachent aux vieux
usages indo-européens, qui n'ont jamais complètement
disparu de notre sol, ou bien s'il faut y voir une impor-
tation tardive, qui serait venue se greffer sur un symbo-
lisme préexistant.
Le paganisme classique a connu à la fois la circum-
ambulation et la roue magique (1). Il y avait, tout d'abord,
la roue de la déesse Fortuna qui a passé dans notre
symbolisme artistique. M. Gaidoz la tient pour l'antécé-
dent direct de nos roues de fortune, mais il soupçonne en
même temps qu'elle pourrait bien se rattacher au symbo-
lisme solaire de la Grèce ou de l'Asie Mineure (2).
Chez les Grecs, il y avait, d'abord, les disques qu'on
utilisait dans les mystères : les xwvot. ou poix'jOL. — Un
scholiasle de Clément d'Alexandrie les définit comme un
morceau de bois, attaché à une cordelette, qu'on faisait
tourner dans les mystères pour produire une sorte de
ronflement (5). D'après M. Andrew Lang, ce serait le
bruyant jouet que nos enfants qualifient de grenouille,
en anglais biill-roarer . M. Lang l'a rapproché du turndum
— employé de la même façon dans les initiations reli-
gieuses des Australiens — ainsi que de certains engins
(1) Cf. mon article sur les Moulins à prières dans la Revue dk
L'IJNivEUsrrÉ DE Bruxelles, livraison de juin 1897.
(2) H. Gaidoz, op. cit., pp. 57 et suiv.
(3) Kôivot; ^uXiptov ou IcJ^tz-zoli to aTrapxtov xal Èv xalç TsXsTaT;
ÈSovâxo iva poi^T).
( 443 )
utilisés pour un objet analogue dans la Nouvelle-Zélande,
le Nouveau-Mexique et l'Afrique méridionale (i). D'autres
commentateurs estiment que les termes du scholiaste
s'appliquent plutôt à un véritable u sabot » , sorte de
toupie ronflante qui reste attacbée à sa corde. — Quoi
qu'il en soit, je me suis demandé s'il ne fallait pas voir
la représentation d'un instrument apparenté à l'engin
dont parle M. A. Lang, sur un vase peint reproduit par
Millingen : dans une scène figurant l'enlèvement de Per-
séphone, Eros, qui vole au-dessus du cbar de Hadès, agite
une corde à laquelle est attachée une rouelle.
FiG. 2.
(Millingen, Painted Greek Vases, pi. XVI.) (2).
Rentrant sans doute dans la même famille d'instru-
ments magiques, non moins que dans celle des roues à
invocations et même des moulins à prières, on peut éga-
lement mentionner le cercle que, sur un semnus apulien,
(1) Tlie Bull-roarer, dans Custom and Myth. Londres, 1884, pp. 29
el puiv.
(2) Cf. un autre exemple, moins caraclérisé, dans Lenormant et de
WiTTE, Élite des monuments céramotjrapldques de la Grèce, t. 11,^
pi. XXIII A.
( 444 )
Proserpine fait tourner autour d'un bâton ou d'une corde
tendue.
Fie. ;i.
(Stackk.lberg, Graeber dcr Hellcneii, pi. XLIIIJ
Aux roues magiques était parfois attaché un oiseau,
riying. L"'I'jyi, qui porte en français le nom significatif
de torcol (Yunx lorquilla), à raison de la facilité avec
laquelle il fait pivoter sa tète, passait pour exercer
une intluence aphrodisiaque (1). Afin d'accroître cette
influence, nous apprend le scholiaste de Pindare, on liait
l'oiseau — ou sa représentation — sur une roue qu'on
faisait ensuite tourner (2). Ces roues elles-mêmes s'appe-
laient des lyinges, "I-jvveç. — Philostrale rapporte que, à
Babylone, des ïyinges en or pendaient du plafond dans
la salle d'apparat où les rois de Perse rendaient la justice.
Pour peu que l'oiseau, les ailes épandues, dépassât la
circonférence, on ne peut s'empêcher de songer ici aux
disques ornithomorplics que les Perses avaient jadis
hérités des Assyro-Babyloniens. Mais Philostrate ajoute
(1) D'Arcy W. Thompson, A Glossary <>f Greek Birds, 1 vol. Oxford,
1895, p. 71.
(2) Schol. ad Pindar., Pyth. 4.
( 44-5 )
que ces lyinges, installés par les Mages en vue de refré-
ner la présomption des rois, passaient pour parler « la
langue des dieux (1) » ; ce qui semble indiquer qu'ils
émettaient un bruit de nature particulière. Je signale ce
passage à l'attention de M. Andrew Lang qui a relevé,
chez les sauvages, différents cas où le ronflement du
turndum est pris pour la voix d'êtres surbumains (2).
Les Grecs avaient également des roues ou des rouelles,
xuxXo!., en général à quatre rais, qu'ils suspendaient dans
certains temples, comme on le voit par les représenta-
tions figurées des vases peints ; ces représentations sont
le plus souvent en rapport avec les cultes d'Apollon,
d'Atbêna, d'Hadès. Notre regretté confrère, le baron de
Witte, qui les énumère dans sa Description de la collection
d'antiquités^ de M. Beur/not (ô), ajoute qu' « aucun écrivain
de l'antiquité n'a parlé de l'usage de suspendre des roues
dans les temples et les palais ». Cependant il existe un
passage de Clément d'Alexandrie signalant, d'après le
grammairien Denys de ïbrace, qui écrivait au dernier
siècle avant notre ère, « la roue qu'on tourne dans les
temples des dieux et qui est tirée de l'Egypte (4} ».
Ainsi, non seulement les Grecs auraient fait tourner
des roues dans leurs temples, mais encore ils auraient
emprunté cet usage à l'antique Egypte. Le savant égyp-
(1) KaXXoûjt ô'ahzaç Bsùiv yXojxxac. Vie d' Apollonius de Tyane,
liv. I, chap. XXV.
(2) Custom and Mylh, pp. 33-36.
(3) Paris, 1840, p. 25.
(4) Stromalmn, lib. V., dans Opéra Clementis Alexanduini. Pari.s,
1629, p. S68.
( U6 )
tologue, M. Flinders Pétrie, dans une communicalion
qu'il a récemment adressée à M. W. Simpson et que
celui-ci résume dans la dernière livraison du Journal of
f/ie Roijal Asialic Society (octobre 1898), vient d'appuyer
cette conclusion de deux textes empruntés aux œuvres
de Héron, un mathématicien grec qui vécut sous Plolé-
mée Philadclphe et Ptolémée Evergète, vers le milieu du
III*' siècle avant notre ère.
Le premier passage est ainsi conçu : « Sous les por-
tiques des temples égyptiens sont placées des roues
mobiles en bronze, qu'on fait tourner en entrant, dans
la pensée que le bronze purifie. » {Prop. 51.)
Le second texte décrit la construction d'une roue
mobile « en bronze, appelée un purilicateur, que les
fidèles ont l'habitude de faire tourner en entrant ».
[Prop. 69.] (1).
De ces textes je déduirai les conclusions suivantes :
1° Les Egyptiens et les Grecs ont connu l'usage —
encore pratiqué aujourd'hui dans certains sanctuaires
chrétiens et bouddhiques — de placer à l'intérieur des
temples une roue que les fidèles font tourner.
2° Cet usage a été emprunté par les Grecs aux Égyp-
tiens, qui n'en comprenaient plus le sens originaire.
A l'époque romaine, quand, par application d'une idée
facile à reconstituer, on eut rangé la roue parmi les attri-
buts de Tyché-Fortuna, elle-même parfois assimilée à
(1) Dans cette seconde proposition, il est question d'un aiipnivil
qui imiterait le cri d'un oiseau, quand la l'oue est mise en mouvement.
Celle-ci rentrerait donc plutôt dans la catégorie des vjyyt<;. Voy.
Vetertim Mctiheiiiaticonuit Opéra, Paris, 1643, p. 2'20. — Cf. Lobeck.
A(jlaopka)ints. Kœnigsbei-ii, 1829, t. II, pp. 905-908.
( 4.47 )
Isis, on ne vit plus dans les roues égyptiennes, au témoi-
gnage (le Plutarque, qu'un symbole de l'instabilité des
choses humaines (1).
5" Si, en Grèce, il ne représente pas une survivance
des usages communs aux races indo-européennes, mais
le rés»dtat d'une importation étrangère, on peut supposer
à plus forte raison (ju'en Gaule et en Bretagne, il a
pénétré avec les éléments gréco-latins introduits j)ar le
paganisme classique et, plus lard, par le christianisme
parmi les populations d'origine celtique (2).
L'emploi antérieur de la rouelle et de la circumamhu-
lation comme instruments magiques n'aura fait que favo-
riser l'adoption d'un rite aussi étroitement conforme
aux tendances du symbolisme local.
Il est à noter que l'emploi liturgique de roues mobiles
a été également signalé dans le midi de la ?>ance,
notamment dans les Pyrénées (5), c'est-à-dire précisé-
ment dans la région où l'on a découvert les principaux
autels gallo-romains portant l'image gravée d'une roue.
(1) Plularque, dans sa Vie de Nnina, fait une allusion aux « roues
égyptiennes qui nous rappellent l'instabilité des choses humaines et
nous enseignent à nous contenter des vicissitudes que nous envoie
la Divinité >'. Nuinn, XIV.
(2) Telle semble être l'opinion de M. Gaidoz, qui, après avoir cité,
d'après M. de Witte, les exemples de roues placées dans les repré-
sentations de temples, ajoute que « si nous avons bien là des roues
suspendues et non des images du soleil dues à un art naïf et à une
convention traditionnelle, ces exemples appartiendraient à la caté-
gorie des roues de fortune et seraient le prototype des roues suspen-
dues dans nos églises ». Le dieu gaulois du saleil, p. 46.
(3) H. Gaidoz, op. c/7., p. iW.
( 448 )
Reste à examiner comment ce rite s'est introduit dans
l'Egypte antique.
Les Égyptiens, comme en témoigne leur écriture hié-
roglypliiqne, ont fait du cercle un symbole du soleil.
Toutefois, chez eux, cette image s'est développée, non
dans le sens de la roue, comme parmi les Indo-Européens,
mais sous la forme ornithomorphe que présente le globe
ailé. Jusqu'ici on n'a trouvé, dans les textes ou les
monuments figurés, antérieurs aux Ptolémées, aucune
trace de roues suspendues dans les temples ou utilisées
par le culte. D'un autre côté, il ne faut pas perdre de
vue qu'à l'époque où apparaît l'usage décrit par Héron,
l'Egypte, soumise à une dynastie d'origine hellénique,
commençait à se départir de son antique isolement pour
s'ouvrir aux idées, aux symboles et aux rites de
l'étranger. Il est, du reste, probable que les temples
dont Héron nous décrit le mobilier appartenaient, non
aux vieux cultes égyptiens, mais à la religion alexandrine,
cette foi composite dont les dieux, déjà habillés à la
grecque, les Sera pis, les Harpocrale, les Isis même,
allaient bientôt pénétrer en Occident (1).
Le rite en question n'a pu venir de la Grèce, puisque, au
contraire, d'après les auteurs classiques, c'est à l'Egypte
que les Grecs en sont redevables, et ainsi nous sommes
naturellement amenés à nous tourner vers le seul pays où
nous savons de source certaine qu'il était depuis long-
(i) Cf. G. Lafaye, Histoire du culte des divinités d'Alexandrie hors
de l'Egypte. Paris, 1884, pp. 15 et suiv.
■ ( 449 )
temps connu et pratiqué : l'Inde, qui, lors du troisième
siècle avant notre ère, venait précisément d'entrer en
contact avec le bassin de la Méditerranée, à la suite de
l'invasion grecque et de l'expansion bouddhique.
Dans sa lettre à M. W. Simpson, M. Flinders Pétrie
apporte un fait nouveau qui n'est pas sans importance
pour établir l'existence, en Egypte, d'un courant religieux
parti de l'Inde. Il annonce avoir récemment découvert une
tombe de l'âge ptolémaïque, où ne se montre aucune
image de divinités égyptiennes, mais où figure un cercle
à quatre rais m , surmonté d'un trident i^ . Ces
deux images ont été de tout temps associées dans les
cultes naturalistes de l'Inde. Le bouddhisme les super-
posa l'une à l'autre, pour en faire un de ses symboles
favoris, le iriçûla, qui peut se définir, dans sa forme
la plus fréquente : un omicron radié, surmonté d'un
oméga fleuri, mais qui se ramène partout au disque (ou
à la roue) et au trident, comme éléments constitutifs.
FiG. 4, Triçùlas bouddhiques (1).
Aurait-on donc ici, comme le suggère M. Flinders
Pétrie, le tombeau d'un de ces missionnaires bouddhistes
que les Édits d'Açoka nous apprennent avoir été envoyés
d'Egypte dans les États de Ptolémée Philadelphe? L'hy-
pothèse n'a rien d'invraisemblable, bien qu'il convienne
(1/ Voy. Bull, de l'Acad. roy. de Belgique, S* sér., t. XVI,
pp. 338-341, 1888.
( 450 )
<Je l'élargir, en admettant qne cette tombe a pu renfermer
les restes de quelque Égyptien converti au bouddhisme.
J'ai exposé précédemment, dans un autre travail, les
indices qui, tout au moins pour le siècle suivant, tendent
à établir la présence d'une église bouddhique à Alexan-
drie (1). Celte influence exotique a pu rester sans action
sur la théologie officielle de l'Egypte ou même sur les
spéculations des écoles philosophiques contemporaines
(bien que la question soit controversée). Mais on sait
combien les symboles et même les rites se propagent
plus facilement que les doctrines. Déjà les bouddhistes
n'avaient plus conscience de la signilication primitive
des usages qu'ils avaient empruntés aux vieilles religions
de l'Inde. Faudrait-il s'étonner si parmi les pratiques
importées par des « sages » venus de l'Inde, les Gréco-
Égyptiens d'Alexandrie eussent retenu un rite à la fois
simple et original, revêtu du prestige qui s'est toujours
attaché aux pratiques magiques de l'Orient?
Ainsi, par une sorte de choc en retour, les roues litur-
giques, inventées peut-être par les brahmanes, seraient
venues se superposer aux traditions du symbolisme
solaire, que les Aryens de l'Occident avaient gardées de
l'unité indo-européenne. Ce ne serait pas, d'ailleurs, le
seul cas où une conception religieuse, développée dans la
branche orientale de la race aryenne, se serait transmise au
rameau occidental par l'entremise de populations appar-
tenant à d'autres groupes ethniques. Dans un autre ordre
de faits, n'avons-nous pas le culte de Mithra, — le grand
dieu solaire des Indo-Perses, — qui a passé dans l'empire
(1) Voy. BîUl. de l'Acad. roy. de Belgique, 3« série, t. XXXIV, p. 725,
1897.
( 45i )
romain par rinlermédiaire de l'Asie Mineure, et qui a
fleuri ensuite jusqu'aux extrémités de la Gaule, en y
apportant des thèmes iconographiques encore discernables
aujourd'hui dans les sculptures de nos cathédrales (1) ?
Si disposé que je sois à adopter la solution de MM, W.
Simpson et Flinders Pétrie, il me reste cependant quel-
ques scrupules, qui reposent, je l'avoue, sur une inter-
prétation un peu hypothétique de certains monuments
assyro-chaldéens.
Entre l'Inde et la Grèce, il y avait une troisième
région dont l'Egypte, en sa dernière période, a rencon-
tré, sinon subi, les influences iconographiques et symbo-
liques. C'est la Mésopotamie, dont les cultes n'avaient pas
disparu sans laisser de traces, après la conquête perse.
Or les Chaldéens, dont l'art et la religion ont réagi de
tout temps sur les religions de l'Asie Mineure, ont de
bonne heure symbolisé le soleil sous la forme d'un
disque ou d'un cercle radié.
Plus taid, ce symbole se combina avec le globe orni-
thomorphe de l'Egypte pour former ces rouelles ailées
et cornues dans lesquelles les Assyriens inscrivirent
l'image de leur grand dieu Assour (2).
A la vérité, aucun texte cunéiforme ne nous parle de
roues qu'on faisait tourner ou même qu'on suspendait
(1) H. Gaidoz, Pcpin le Bi-ef, Samson et Mithra, dans Mélusine,
mai-juin 1895.
(ïJ) Layard, Monuments of Nineveh, 1'' série, pi. XXI.
{ 452 )
dans les temples. Toutefois, certains monuments offrent
des représentations figurées qui pourraient bien faire
allusion à un ri(c de ce genre.
FiG. o.
(Perrot et Chipiez, L'An dans l'Aniiqaiié, t. Il, fig. 1\.)
C'est d'abord une tablette de pierre, actuellement
déposée au British Muséum, qui se rapporte à la restau-
ration d'un temple du Soleil, dans la ville de Sippara,
vers l'an 900 avant notre ère. Devant un dieu assis dans un
édicule se trouve une table qui supporte un large disque
radié. Deux personnages barbus, engagés à mi-corps
dans la corniche de l'édicule, tiennent en main des
cordes qui descendent jusqu'à la table, derrière le
disque (1). Un autre personnage amène deux orants vers
l'autel dont il saisit le pied.
(1) Ces personnages, suivant la description de M. Menant, « sou-
tiennent à l'aide de cordes un j^rand disque qui repose sur un autel «.
Pierres gravées, t. I, p. 245.
( 453 )
Un second monument, que j'ai déjà eu l'occasion de
reproduire et de commenter, à un autre point de vue, dans
les Bulletins de l'Académie (1), est un bas-relief de Ninive
qui représente un palmier accolé de deux génies et de
deuxM'ois. Les deux génies brandissent un cône dont la
pointe est dirigée vers un disque ailé qui plane sur la
couronne de l'arbie ; les deux lois sont à genoux et
tiennent cbacun en main l'extrémité d'une bandelette
qui descend du disque.
FiG. b.
(Layaki), Monuments oj Mneveh, pi. LIX*.)
M. Edw. B. ïvior, qui a consacré à ce bas-reliet" une
étude dont je me suis précédemment occupé (2), voit dans
ces bandelettes des cordes magiques destinées à guider
ou à maintenir le globe solaire au-dessus de l'arbre que
les deux génies sont en train de fertiliser avec les inflo-
rescences du palmier mâle. Nous aurions là une repré-
(1) Voy. Bull, de l'Acad. roij. de Belgique, 3« série, t. XX, 1890,
p. 359.
(2) E. B. Tylor, Wingcd figures, dans les Proceedings de la
Society of Biblical Archaeology, juin 1890.
51
SERIE, TOME XXXVI.
( 454 )
sentation symbolique de la fécondation artificielle des
palmiers.
Un savant botaniste, M. Bonavia, a combattu cette hy-
pothèse à laquelle je m'étais rallié. H soutient que le cône
est une pomme de pin ou de cèdre et que les génies s'en
servent comme d'un goupillon pour arroser le palmier
d'eau lustrale. Quant aux cordons, ils auraient simple-
ment pour objet d'établir une communication, un lien
moral ou plutôt symbolique entre les adorateurs et la
divinité dont on invoque la protection (i).
Il faut remarquer que, dans ce bas-relief, le disque ailé
est dépourvu d'éléments anthropomorphiques. Je me
demande si les deux rois agenouillés ne seraient pas cen-
sés faire mouvoir le soleil par l'application d'un rite où
l'on aurait fait tourner un disque à l'aide de deux
cordons. Nous aurions donc ici un symbole tiré d'un
engin qui était lui-même une traduction symbolique des
idées courantes sur la marche ou l'action du soleil.
11 convient de faire observer que, dans ce bas-relief,
les bandelettes disparaissent derrière la (jueue pennée.
Mais, dans d'autres exemplaires du même thème, les
cordons se rattachent directement au disque. (Voy.
lig. 7 et 8.)
La même disposition se rencontre encore dans deux
monuments dont j'emprunte la reproduction au précieux
ouvrage de M. J. Menant sin- les Pierres gravées de la
Haule-Asie. Dans un de ces cylindres (fig. 7), les deux
cordons sont tenus par un seul personnage : un dieu ailé
(l) Bonavia, The Flora of Ihc Aasyrian Monuments. London, iii9i,
pp. 77-79.
( Am )
et agenouillé. Dans l'autre (fig. 8), ils sont tenus par deux
prêtres debout (I).
Fie. 7 et 8. Cylindres assyriens.
(Menant, Pien-ex tjravées, t. 11, C g. o7 et GO.)
Sous le second empire de Chaldée, le disque solaire
reprend nettement la forme d'une roue pure et simple. Il
y avait alors à Babylone une puissante famille, les
Egibi, qui exerça le haut commerce jusque sous la domi-
nation perse. Le cachet de celte famille, qui nous a été
conservé sur plusieurs contrats, présente un personnage,
la tête rasée, probablement un prêtre, qui rend ses
hommages au soleil et à la lune. Dans l'exemplaire ci-
dessous, ce personnage s'avance, la main droite levée,
vers une roue qui est dressée au sommet d'un haut
(1) I^'Urim-Tliummin, dont les Israélites se servaient pour consulter
la volonté de Jaliveh, était peut-être une mécanique de ce ç;enre, si,
comme le pense Krncsi Renan, il s'aijit d'un p;lobe ailé à urceus.
Suivant la conjcclurc de Renan, les deux urœus, l'un signifiant oîa,
l'autre non, s'abaissaient et se relevaient tour à tour, au moyen d'un
ressoi-t caché derrière le disque. (E. Renan, Histoire du peuple
d'Israël. Paris, 1887, t. I, p. 276.) — Ne serait-il pas plus simple de
supposer que le ressort, si ressort il y a, faisait tourner le disque qui
fournissait ses réponses selon le point oiî il s'arrêtait? Nous aurions là
une véritable roue de fortune, un prototype de la « roulette '.
( 456 )
piédestal, — peut-être un béthyle, — lui-même juché sur
un autel. Le geste est celui de l'invocation. Mais c'est
aussi l'attitude du bouddhiste qui va mettre en branle sa
roue ou son] cylindre à invocations, comme on peut le
voir dans la planche de l'ouvrage de M. Simpson où
celui-ci' a [dessiné, d'après nature, des femmes se prépa-
rant à faire tourner des moulins à prières alignés le long
d'un mur, dans la lamaserie de Heinis, au Petit-ïibet (1).
Fie. 9. Cylindre du second empire clialdéen
[Gaidoz, Le dieu gaulois du soleil, fig. H] ("2).
Le type de ces cachets, fait observer M. J. Menant, s'e-st
continué sous les Achéménides, c'est-à-dire à l'époque où
la culture mésopotamienne fut portée, par les Perses, de
l'Indus au Nil. « En fait, ajoute-t-il, les mœurs, les cou-
tumes et l'art du second empire de Chaldée se sont
perpétués jusqu'aux conquêtes d'Alexandre (5). »
(1) The Buddhist Praying-Wheel, p. 18.
(2) Cf. d'autres reproductions de la raéme scène dans Menant,
Pierres gravées de la Haute-Asie, t. II, fig. 118 à 120, et dans le
Catalogue de la collection de Ciercq, Paris, 1885-1890, pi. XXXIV,
(3) J. Menant, Pierres gravées de la Uaute-Asie, t. II, p. 136.
î i37 )
Ézéchiel, dont la symbolique est presque tout entière
empruntée à l'iconographie mésopotamienne, décrit, dans
sa célèbre vision, «des roues remplies d'yeux tout autour»
qui tournaient d'un mouvement spontané, à côté des Ché-
rubins (1). L'archéologie contemporaine a établi que ces
Chérubins ou Keroubim devaient rappeler, par leur phy-
sionomie, soit les taureaux ailés à face humaine qui gar-
daient les abords des palais assyriens, soit les génies
humains à télé d'aigle qu'on trouve figurés aux deux
côtés du disque ailé. Quant aux roues, s'il laut conclure
avec M. Ed. Reuss qu'elles étaient formées de deux cercles
se coupant à angle droit afin de se mouvoir dans toutes
les directions, c'étaient bien des globes ou des sphères (2).
François Lenormant, au contraire, croit rester plus fidèle
à la description d'Ézéchiel, en se les figurant comme une
sorte de bobine cylindrique. « On peut, dit-il, se les
représenter comme des tambours d'une forte hauteur,
tournant sur leur axe vertical avec rapidité (5). » — Mais
c'est absolument la structure des moulins à prières tibé-
tains !
Le même archéologue explique le glaive de flamme
tournoyant que l'Éternel avait placé, avec deux Keroubim,
à l'entrée de l'Éden, comme une image empruntée à cer-
(1) Ézéchiel, I, 15 et suiv.
(2) Ed. Reuss, La Bible. Paris, 1876, t. II : Les Prophètes, p. 15, note.
(3) Les Origines de riiistoire. Paris, 2e éd., 1880, t. I, p. 132.
( 458 )
laines armes de jet, en forme de disque, qui auraient été
en usage dans l'Asie antérieure depuis les temps chal-
déens. Il cite à ce propos un passage significatif d'un
hymne gravé sur une tablette cunéiforme du British Mu-
séum. C'est le chant de guerre d'un dieu qui se prépare
à la victoire :
« De ma main droite, je tiens mon disque de feu; de
ma main gauche, je tiens mon disque de carnage.
» Le soleil aux cinquante faces, l'arme élevée de ma
divinité, je le liens.
» Le vaillant qui brise les montagnes, le soleil, dont
l'action ne cesse pas, je le tiens.
» L'arme qui remplit le pays de la terreur de sa force
immense, dans ma main droite puissamment, le pro-
jectile d'or et d'onyx, je le tiens (1). »
Lenormant ajoute que ce disque de feu et ce disque de
carnage contiennent, comme les roues d'Ezéchiel, un
esprit qui les fait mouvoir, et, comme le glaive tour-
noyant de la Genèse, une vie propre qui les anime; en
effet, dans d'autres textes cunéiformes, ils sont invoqués
à titre de dieux personnels et placés à côté de Samas, le
soleil, ainsi que de son épouse Goul (2).
Il résulte des expressions employées dans le texte
cunéiforme que l'arme du dieu symbolise ici le soleil —
plutôt que la foudre, comme l'ont supposé certains com-
mentateurs. Le même symbolisme s'est développé dans
(t) Cuneiform Inscriptions of Western Asia, t. II, pi. 19, 2.
(2) F. Lenormant, Origines de l'histoire, pp. 133-136, 2» éd., 1880.
I
( 4o9 )
l'Inde, où une arme de jet analogue, le ichnkra, ou
disque en métal à rebord tranchant, est devenue l'attribut
par excellence du dieu solaire Vichnou. Voici un passage
du célèbre poème en l'honneur de ce dieu, le Harivamça,
qui semble presque une paraphrase du texte cunéiforme
cité plus haut :
« Le dieu brandit le superbe Soudarçana, brillant
comme les rayons du soleil, aux mille rayons, destruc-
teur des ennemis, semblable à un feu flamboyant, ter-
rible.
» Incomparable dans le choc, bordé par un cercle
tranchant comme un rasoir, orné de couronnes et de
guirlandes, se mouvant à volonté, changeant de forme
à volonté, etc. (1). »
D'après M. Gaidoz, à qui nous empruntons cette cita-
tion (2), la Nrisimha Ïâpanîya-Oupanishad décrit le
tchakta de Vichnou sous la forme d'un cercle magique
avec sept, huit, douze, seize et trente-deux rayons. On
voit ici la transition au Dharnialdmkra, la pacifique
roue de la Loi, « faite de mille rais, lançant mille rayons »,
(1) Il est à remarquer que, dans la lutte d'Osiris et d'Horus contre Set,
— telle qu'elle est racontée dans les inscriptions du temple d'Edfou,
publiées par M. Ernest Naville, — quand les dieux solaires veulent
mettre leurs adversaires en déroute, ils assument la forme du disque
ailé. Rien qu'à l'entrevoir, les ennemis tombent morts de peur.
{Revue de l'histoire des religions, t. IX, pp. 332-336.)
(2) Le dieu gaulois du soleil, p. 12.
( Mi{) )
dont le mouvement est symbolisé par les cylindres à
prières et les roues liturgiques du bouddhisme.
FlG. 40. Le Dharmatchakra.
[Bas-relief de Buddha Gaya, III'^ siè.:le av. J -C] (1).
Y a-t-il eu emprunt entre la Chaldée et l'Inde? — Le
problème est moins de découvrir qui, le premier, a
inventé l'arme du disque aiguisé que de s'assurer qui, le
premier, en a fait une image du soleil. La culture méso-
potamienne est d'un âge trop reculé pour que nous
puissions la croire tributaire de l'Inde, et ainsi, par cette
voie encore, nous nous trouvons ramenés à la Chaldée
comme berceau des roues liturgiques.
Il ne faut pas oublier que les relations commerciales et
maritimes entre la Chaldée et l'Inde se sont surtout
(1) Reproduit par Fergusson, Historyof Indian andEastern Archi-
tecture, London, 1891, fig. 47. - Cf. plus haut le cylindre chaldéen,
tig. 9 ; aussi la fig. 5.
( 4(H )
<lévelo|)pées à paiiir du Vlh siècle avant notre ère (i).
C'est par ce canal que l'Inde semble avoir reçu les
premiers rudiments de son écriture et de ses arts plas-
tiques. Parmi les rares traces d'emprunt aux traditions
chaldéennes qu'elle révèle dans ses documents littéraires
ou religieux, se trouve le récit du déluge de Manou, qui
otï're incontestablement des traits de parenté avec la
tradition mésopotamienne du déluge de Xisouthros (2).
Or, ce récit se rencontre pour la première fois dans
une annexe du Yayour Véda, le Satapatha Bràhmana, et
c'est là précisément (jue M. AY. Simpson a découvert la
plus ancienne mention d'une roue magique, mise en
branle par des brabmanes avec accompagnement d'un
hymne au dieu solaire Savitri (5).
Rien, toutefois, n'empêche d'admettre que, si la Méso-
potamie a fourni soit l'idée de représenter le soleil par
le dis(|ue utilisé à la guerre, soit l'usage de mettre une
roue en mouvement pour ligurer le cours de l'astre, les
conceptions religieuses qui ont employé ces symboles
existaient antérieurement parmi les habitants de l'Inde
et même y remontaient, selon toute apparence, au fonds
commun des croyances indo-européennes.
Voici comment, dans cette hypothèse, on pourrait
tracer la généalogie de nos roues de fortune, soit en les
(1) .1. Kennedy, TheearLy conuiierce of Babylon with India, dans le
journal de la Royal Asiatic Society, avi-il 1898, pp. "Mi et suivantes.
(2) F. Lenormant, Les premières civilisations, Paris, 1874, t. II,
pp. 123 et suiv.
(3) Satapatha-Brahiiiana (V, %, dans le t. XL! des Sacral Bnoks of
ihe Enst.
( 46-2 )
faisant passer par l'iiule, soit en les faisant directement
descendre de la Ghaldée en Egypte :
X™" siècle.
VU'"" siècle.
ni"" siècle. i-
Égvp'e.
"1
l" siècle. Grèce.
I
Rome.
, I,
Gaule.
Ghaldée,
Inde.
Tibel.
I
463 )
classe: des BEAVIL-ARTS.
Séance du 10 novembre 1898.
M. J. RoBiE, vice-directeur, occupe le fauteuil.
M. le chevalier Edmond Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. Éd. Kétis, F.-A. Gevaert, Th. Ra-
doux, Peter Benoit, J. Demannez, P.-J. Clays, G. De
Groot, Gust. Biot, H. Hymans, Th. Vinçotte, Jos. Stal-
laert, Alex. Markelbach, Max. Rooscs, G. Huberti ,
A. Hennebicq, Éd. Van Even, Allr. Cluysenaar, le comte
Jacques de Lalaing, J. Winders, Ém. Janlet, H. Maquel,
J. Van Ysendyck, membres; J.-B. Meunier, Alb. De Vriendt
et G. Hennans, correspondants.
CORRESPONDANCE
MM. Edgar Baes et Florimond van Duyse remercieni
la Classe pour les distinctions qui leur ont été accordées
lors du dernier concours amiuel.
( 464 ;
RAPPORTS.
Il est donné lecture des appréciations :
i" De MM. De Groot, Vinçotte et Marchai, rapporteur :
a) sur le premier rapport semestriel de M, Victor De
Haen, premier prix du grand concours de sculpture de
1894; b) sur le premier rapport semestriel de M. Marin,
boursier de la fondation Godecharle pour la sculpture,
en 1897;
2" Des mêmes : a) sur le buste en marbre de feu Guil-
laume Geefs, exécuté pour la galerie des bustes d'acadé-
miciens décédés, par M. Georges Geefs, à Anvers; h) sur
le buste en marbre de feu J.-J. Haus, exécuté pour la
même galerie, par M. Jules Weyns, à Anvers.
— Renvoi à M. le Ministre de l'Agriculture et des Tra-
vaux publics.
COMMUNICATION ET LECTURE.
L'arl et la lumière; par Jean Robie,
membre de l'Académie.
Considéré dans son ensemble, le climat de nos contrées
n'offre rien d'excessif, à cause du voisinage de la mer qui
adoucit la rigueur des saisons et nous préserve des
longues sécheresses dont les conséquences sont parfois si
désastreuses dans les pays du soleil.
( 465 )
D'autre part, les perturbations atmosphériques que l'on
observe fréquemment sur la côte occidentale de l'Eu-
rope, modifient sans cesse l'état du ciel et l'aspect du
paysage, tantôt clair, rayonnant, tantôt sombre ou mélan-
colique.
A l'ordinaire, durant l'été, des brumes tièdes et dia-
phanes enveloppent la nature et nous font l'effet d'un
léger voile de mousseline qui, en estompant les contours
des objets, s'épaissit peu à peu jusqu'aux limites de l'hori-
zon noyées dans l'espace. Ce sont précisément les rosées
matinales et la moiteur de l'atmosphère qui donnent tant
d'attrait à nos campagnes par les temps orageux, lorsque
des nuées, mobiles comme l'onde, llottent au gré de la
brise et projettent çà et là des ombres errantes, capri-
cieuses, et des lumières argentées qui séduisent l'œil du
peintre.
Nulle part la saison printanière où tout renait, tout
reverdit, depuis les frêles graminéesdes prairies jusqu'aux
géants des forêts, ne se manifeste avec autant d'ardeur,
avec autant d'éclat! Plus tard enfin, au déclin des beaux
jours, quand le soleil accomplit son œuvre de maturation,
quelle symphonie pathétique pleine de contrastes ! Quel
doux spectacle nous présente l'automne développant sa
splendeur éphémère dans les bois éclaircis jonchés de
feuilles mortes! Il est à remarquer en outre que les con-
ditions particulières de notre climat se retrouvent en
partie dans les pays voisins, la France, la Hollande
et l'Angleterre, qui ont donné naissance aux grands
paysagistes, aux vaillants interprètes de la vie en
plein air.
( 4C6 )
Chose étrange, depuis la création des écoles de pein-
ture, le désir d'exprimer la lumière et l'espace au moyen
de la perspective aérienne ne cesse d'absorber l'esprit
des artistes européens, tandis qu'en Orient, en Asie, où
la clarté du jour est plus belle, olus limpide que partout
ailleurs, les peintres n'ont jamais franchi les bornes
resserrées de l'art byzantin, qui, réduit à sa plus simple
expression, prodiguait l'or, l'argent et les mosaïques pour
dissimuler son indigence et sa monotonie.
Sans nous aventurer en des parages aussi lointains,
examinons un instant quels sont jusqu'ici, dans la ques-
tion qui nous occupe, les avantages de la lumière
artificielle et ses applications les plus récentes aux arts
décoratifs.
Durant ces dernières années, tant de découvertes
scientifiques ont bouleversé nos habitudes et notre
manière de vivre, que la lutte pour l'existence nous
entraîne à prolonger sans cesse nos travaux nocturnes à
l'aide d'un mode d'éclairage ayant les apparences de la
lumière solaire. « L'industrie humaine s'étend, dit-on,
avec les besoins qui la font naître. » Ce qui, au siècle
passé, n'était qu'un rêve de lampiste, est devenu une
réalité éblouissante, grâce aux perfectionnements succes-
sifs apportés à nos divers appareils, depuis l'antique
lampe à l'huile, la vulgaire chandelle qui au moyen âge
fut un luxe dispendieux, la bougie, le quinquet fumeux,
ia lampe Carcel, le pétrole incendiaire, le gaz explosible,
jusqu'à la lumière électrique avec les rayons X qui n'ont
pas dit leur dernier mot.
( 467 )
C'est une loi physique invariable que, plus la lumière
artificielle se décolore et se rapproche de la clarté du
jour, moins nos yeux se fatiguent. Je me souviens des
temps fort éloignés, hélas! où loul l'éclairage de la mai-
son paternelle se composait d'un modeste lampion à
l'huile de colza dont la forme primitive rappelait singu-
lièrement les lampes étrusques et pompéiennes : cela
produisait des effets de clair-obscur très pittoresques,
mais fort incommodes par les longues soirées d'hiver,
lorsque, réunis autour de la table familiale, les plus
éveillés s'adonnaient à la lecture pendant que la mère
raccommodait les vêtements de la marmaille. Quand on
songe qu'il a fallu tant de siècles pour que l'homme sentit
la nécessité de modifier ce système rudimentaire qui
demeurait encore dans le même état, alors que, pour
tirer du feu d'un caillou, mes contemporains s'écorchaient
les doigts en battant le briquet !
Mais aussi quelle surprise, quel enthousiasme, lors-
que après une période d'essais et de tâtonnements de
toute espèce, la science proclama le Fiai lux qui devait
transformer l'art mécanique en lui donnant, du même
coup, une parcelle de lumière dérobée au soleil et une
force puissante et mystérieuse dont la source est iné-
puisable!
Il en fut de même au théâtre; qu'on essaie donc de
représenter aujourd'hui nos grands opéras et nos drames
lyriques à la lueur des chandelles, avec des premières
loges éclairées de la même façon! Ge serait évidemment
désastreux pour les couturiers de nos belles mondaines,
( 468 )
mais, par contre, quelle économie pour les maris!
Malheureusement pour eux, la modestie de l'obscure
violette n'est plus de saison, car il est reconnu que désor-
mais le luxe ostensible des toilettes se développe gra-
duellement, en raison du nombre prodigieux de bougies
que représente le nouveau luminaire des salles de
spectacle.
Dès son apparition, la lumière électrique transforme
l'art décoratif dans sa partie la plus essentielle; comme,
en plein soleil, les ciels rayonnent, les fonds de paysage
s'illuminent, la mise en scène, décors et costumes,
prennent un éclat merveilleux, tandis que l'électricien,
le Deus ex machina, muni en quebiue sorte d'une parti-
tion spéciale, suit pas à pas les changements à vue,
évoque à volonté la lune, le soleil, les ténèbres, et sou-
ligne successivement les éclairs fugitifs indiqués par l'or-
chestre, quand l'orage gronde et que la foudre éclate.
Nous sommes loin du théâtre de Shakespeare où l'imagi-
nation des spectateurs devait suppléer aux décors; il est
vrai que l'art prestigieux du grand dramaturge entraî-
nait tellement l'esprit du public qu'un simple paravent
semblait se transformer, par magie, en une vaste forêt el
au besoin en un superbe palais.
Les créateurs du théâtre, de la tragédie et de tout ce
qui a rapport aux jeux de la scène, comprenaient les
choses plus simplement encore ; sous le beau ciel de
l'Attique, toutes les manifestations d'art, quelles qu'elles
fussent, se faisaient en plein air, à la clarté radieuse de
( 469 )
ce climat fortuné. On comprend que, dans ces condi-
tions, les arts plastiques devaient prendre cette ampleur,
celte pureté de lignes que l'on admire dans les chefs-
d'œuvre de l'École d'Athènes.
Nous ignorons cependant si les peintres de cette
époque représentaient la nature sous tous ses aspects,
telle qu'elle nous apparaît dans l'espace, et si, en résumé,
leur jugement esthétique était aussi délicat, aussi subtil
que le nôtre; à cet égard, nous devons nous en rapporter
aux écrivains et orateurs qui propageaient sans cesse le
culte du Beau dans les assemblées publiques, en présence
des productions immortelles des grands maîtres. Aussi,
d'accord avec la tradition ancienne, on peut altirmer sans
crainte que, parmi cette démocratie privilégiée, dont les
titres de noblesse se composent de tout ce qu'il y a de
plus merveilleux en ce monde, la peinture ne le cédait
en rien à la statuaire : l'art noble par excellence, qui
élevait l'âme de la nation en donnant des formes palpa-
bles et sublimes aux héros de l'Iliade et en réalisant sur
le marbre de Paros toutes les fictions poétiques de
l'Olympe qui s'étaient développées dans les îles enchan-
teresses de l'Archipel...
Quittons maintenant ces rivages embaumés où les
vagues caressantes se perdent dans les myrtes et les lau-
riers-roses, et passons en Egypte.
Bien qu'au pays des Pharaons les arts et les sciences
aient précédé de beaucoup la civilisation hellénique,
nous sommes amplement renseignés sur la peinture
égyptienne, grâce aux fresques d'une conservation par-
5""^ SÉRIE, TOME XXXVI. 52
(470)
faite que l'on découvre sans cesse dans les hypogées de
la vallée du Nil. Ces documents graphiques, naïvement
coloriés, sans effets d'omhre ni de lumière, mais d'un
dessin exact, minutieux, nous dévoilent, en tous ses
détails, la vie intime de ce peuple spirituel et rafiiné, qui
envisageait la mort comme un acheminement au honheur
absolu, ce qui ne l'empêchait pas de festiner et de se
divertir à tout propos en songeant peut-être que, en ce
has monde, un tiens vaut mieux que deux tu l'auras. Exé-
cutées à la lueur des tlam beaux avant la fermeture défi-
nitive des tombes, ces peintures devaient se dérober à
toute critique de la part des vivants ; mais comme,
selon la croyance des anciens Egyptiens, les mânes des
justes, après un stage dans le royaume des lumières,
jouissaient pour toute éternité des plaisirs terrestres,
j'imagine qu'ils étaient à même de donner leur avis sur
la manière dont les artistes avaient interprété leur vie
pastorale et leurs aspirations vers la félicité perpétuelle,
dans le calme inviolable du tombeau.
Mais quel réveil plein d'épouvante, lorsque, après des
milliers d'années de repos et de bien-être, une multitude
de spéculateurs avides, guidés par des ravageurs indi-
gènes, vinrent bouleverser leurs cendres pour les livrer
en proie aux trafiquants de vieilleries! Ce fut bientôt un
pillage en règle, une véritable exploitation commerciale;
emballée et numérotée comme un vulgaire colis, puis
expédiée vers les quatre coins du monde, cette marchan-
dise nouvelle, si on peut l'appeler ainsi, embarrassait
singulièrement la douane qui, toute réilexion faite, ne
( ^71 )
trouva rien de plus simple que de classer les momies des
rois emmaillottées de bandelettes, parmi les articles de
mercerie... Ce vandalisme n'est plus possible aujour-
d'hui; la translation de ces restes précieux au musée
de Boulak s'opère avec tout le respect que l'on doit
aux plus anciennes dynasties des temps historiques.
Plus tard enfin, au commencement de notre ère, les
peintures des catacombes de Rome, qui, elles aussi,
n'étaient pas destinées à être vues au grand jour, mar-
quèrent la décadence de l'art gréco-romain et la for-
mation de l'art chrétien dont le développement tardif
ne devait s'accomplir que vers le milieu du XIV'' siècle.
Avant de terminer, il convient de jeter un coup d'œil
sur les grandes exhibitions de peintures modernes où
viennent s'accumuler, par milliers, les productions les
plus variées, les plus hétéroclites qu'il soit possible de
rêver. Chaque année, au retour du printemps, alors
que les esprits fermentent, la même utopie revient sur
l'eau, c'est-à-dire « l'égale répartition de la lumière entre
tous les exposants ».
Pour se faire une idée de l'importance de cette ques-
tion, il suffît d'assister, ne fùl-ce qu'une seule fois, à
l'ouverture d'un salon annuel le jour du vernissage. Là,
dans un tohu-bohu de chevelures incultes et de barbes à
tous crins, vous entendrez les imprécations des réprou-
vés qui, l'œil enflammé, les poings serrés, cherchent en
vain leur œuvre perdue dans un angle obscur ou triste-
ment accrochée sous la frise, dans l'ombre tutélaire de la
( 472 )
corniche. Peu à peu, la marée montante des rapins
s'écoule en tous sens, houleuse et désordonnée, tandis
que les échelles des vernisseurs se heurtent, se balancent
comme des mâts de navires par une mer démontée. Une
rumeur étrange, faite de blasphèmes et d'insultes à
l'adresse du jury, s'élève de toutes parts, tandis que de
loin en loin des groupes d'artistes décorés, la face épa-
nouie, le sourire aux lèvres, se prodiguent sans vergogne
la myrrhe et l'encens, avec la béatitude des élus du jour
dont quelques-uns des mieux lotis sont destinés, hélas !
à figurer tôt ou tard parmi les déchus. Mais qu'importe?
Leurs œuvres s'étalent le long de la rampe, en pleine
lumière ; elles seront discutées, éreintées comme de cou-
tume par la jeune école, ce qui vaut mieux, après tout,
que de demeurer inaperçues aux yeux du public, tou-
jours enclin à prendre des vers luisants pour des
étoiles. Rassurons-nous pourtant : la postérité, plus clair-
voyante, saura bien se débarrasser du clinquant et de la
fausse monnaie.
Si le point essentiel, pour les peintures de tout
genre, consiste en un bon éclairage, on peut citer cepen-
dant une foule de belles œuvres de la Renaissance qui,
bien qu'elles soient (ixées à demeure en un demi-jour
douteux et tranquille, s'emparent de nos sens et nous
invitent au recueillement, à la méditation : telles sont
les fresques des écoles italiennes que l'on rencontre dans
la plupart des monuments religieux de l'Italie. Inspirées
par la foi, par l'amour de la beauté idéale, toutes ces
nobles pages, exécutées sur place par des artistes renom-
( ^'5 )
mes, s'harmoniseiU avec rensenible des édifices dont elles
forment le complément indispensable : que serait la Cha-
pelle Sixtine sans les peintures grandioses et sublimes
de Michel-Ange?
En dehors des sculptures monumentales ornant les
places publiques, la statuaire s'accommode parfaitement
d'un éclairage égal et discret, qui laisse de l'ampleur à
l'ensemble sans se disperser confusément sur les détails :
le tombeau des Médicis et le mausolée de Jules II avec
le Moïse imposant de l'illustre Florentin, démontrent que
ces conditions de lumière font mieux ressortir encore
leur caractère humain et dramatique, où le sentiment de
la vérité s'allie à la splendeur du beau.
Notons aussi qu'à certains égards la pénombre vague
et sinistre qui règne dans nos vieilles cathédrales gothi-
ques est plutôt favorable à la sculpture religieuse, qui
emprunte à l'air ambiant un caractère de tristesse incom-
patible avec la grande lumière. L'esprit ascétique du
moyen âge réside en ces lieux austères, pavés de pierres
tombales usées et glissantes, sur lesquelles les pas de la
foule mettent une empreinte humide et glacée. Les
rayons vivifiants du soleil semblent bannis pour jamais de
ce séjour ténébreux, où la lueur vacillante des cierges vo-
tifs renforce les ombres épandues, comme un voile de
crêpe, dans l'éditice embrumé.
Du fond de l'abside s'élèvent, de temps à autre, des
paroles indécises et mystérieuses, qui se répercutent et se
confondent comme un sourd bourdonnement d'abeilles,
dont les dernières vibrations s'évanouissent dans le si-
lence. Partout, le long des bas côtés de la nef encombrés
de sarcophages et d'ornements funèbres, on voit surgir,
5™* SÉRIE, TOME XXXVI. 52.
( 474 )
comme des spectres, une foule de statues décliarnées et
macabres qui font songer aux peines éternelles et inspirent
la terreur de l'implacable justice humaine, tandis que sur
l'autel apparaît, dans toute sa gloire, l'image du divin
Rédempteur dont les yeux noyés de larmes et le doux
sourire de miséricorde promettent le pardon et l'oubli...
En ce qui concerne la sculpture monumentale, est-il
besoin de dire que l'artiste doit faire en sorte que son
œuvre s'accorde et s'harmonise avec le milieu spécial qui
lui est réservé, qu'il doit l'achever, autant que possible,
sur place ou en dehors du jour restreint et suspect de
l'atelier? L'art public, donnant la mesure du génie na-
tional, ne peut s'entreprendre à la légère, comme un
enjolivement banal et superflu.
Nous avons vu en commençant que les auteurs drama-
tiques se sont empressés de mettre à profit les merveil-
leux artifices de la lumière et de l'art décoratif, afin d'agir
directement sur l'esprit du spectateur par l'action rapide
et simultanée de la vue et de l'ouïe. Il y a pourtant là des
côtés matériels et prosaïques dilliciles à dérober aux yeux
du public attentif, que la moindre inadvertance des ma-
chinistes peut dérouter, tandis que les grandes œuvres
musicales, oratorios, symphonies et poésies lyriques, se
suffisent à elles-mêmes, sans nul apparat, ayant tout à
gagner à être entendues soit dans l'ombre, soit dans un
jour douteux empêchant nos facultés Imaginatives de se
laisser détourner, malgré nous, par la vue des choses
extérieures. Nous connaissons tous les belles auditions
nocturnes de la cathédrale de Fribourg où, dans l'obscu-
rité profonde de la voûte sonore, la grande voix de l'orgue
( ^i/^ }
transporte rimagination dans les sphères élhérées de
l'infini ; à Jérusalem, comme dans les mosquées de l'Inde
ou sur les bords du Gange, par les nuits étoilées et pai-
sibles, les invocations religieuses de tout un- peuple de
croyants forment un ensemble d'un caractère étrange et
grandiose, dont le souvenir ne s'efface jamais.
Je m'aperçois, un peu tard, que ces considérations
plus ou moins fontaisistes sur l'art et la lumière m'ont
fait perdre de vue les ombres et le clair-obscur dont le
rôle est tout aussi important dans les arts graphiques,
puisqu'ils ne sont que la conséquence de la lumière
assourdie ou partiellement interceptée. C'est par la com-
binaison et l'entente de ces éléments essentiels que
Rembrandt a su donner à son œuvre cet éclat magique,
plein d'harmonie, qui séduit l'âme comme une émana-
tion lumineuse, puisqu'il est évident que, en fait d'art
comme en toutes choses, la lumière, c'est la vie.
476 )
OUVRAGES PRESENTES.
Banning [Emile). Rapport sur l'organisation et l'ensei-
gnement de l'Université de Rerlin, présenté à M. le Ministre
de l'Intérieur, le 26 octobre 1861. Bruxelles, 1863; in-S"
(148 p.).
— L'Afrique et la Conférence géographique de Bruxelles.
'i" édition, revue et augmentée. Bruxelles, 1898; in-8°
{xvi-224 p., 3 cartes et 10 gravures),
— La morale dans l'instruction primaire et le parti
catholique. Bruxelles, 1879; in-8° (40 p.).
— L'Episcopat et l'instruction publique en Belgique, de
1830 à 1879. Bruxelles, 1879; in-S" (90 p.).
— La Belgique et le Vatican. Documents et travaux légis-
latifs concernant la rupture des relations diplomatiques
entre le Gouvernement belge et le Saint-Siège, précédés
d'un exposé historique des rapports qui ont existé entre
eux depuis 1830. Bruxelles, 1880; in-8Nxciv-LViii-83p.).
— La situation politique et la lutte des partis en Bel-
gique. Paris, 1882; in-8°(51 p.).
— L'Association internationale africaine et le Comité
d'études du Haut-Congo. Travaux et résultats de décembre
1877 à octobre 1882. Bruxelles, 1882; in-8° (32 p.).
— Mémoires sur les droits et les prétentions du Portugal
à la souveraineté de certains territoires de la côte occiden-
tale d'Afrique. Paris, 1883; in-8'' (111 p., carte).
— Mémorandum concerning the portuguese rights and
( 477 )
pretensions to sovereignty on the west coast of Afrika.
Londres, 1883 ; in-S" (iv-89 p., carte).
BanmiKj {Emile). La Conférence africaine de Berlin et
l'Association internationale du Congo. Bruxelles, 1885;
extr. in-S" (26 p.).
— La défense de la Belgique au point de vue national et
européen. Bruxelles, 1887 ; exlr. in-S" (36 p.).
— Le partage politique de l'Afrique, d'après les transac-
tions internationales les plus récentes (1885 à 1888). Bru-
xelles, 1888; in-8" (viii-181 p., carte).
— Die politische Theilung Afrika's, nach don neuesten
internationalen Vereinbarungen (1885 bis 1889). (Ueber-
tragen von D^ Arthur Pfungst). Berlin, 1890; in-8" (210 p.,
carte).
— La Conférence de Bruxelles et les Pays-Bas. Anvers,
1890; in-8»(24 p.).
— La revision. Vue générale d'une réforme constitution-
nelle. Bruxelles, 1892; in-8« (58 p.).
Sehjs Lougchamps [Le baron de). Funérailles de M. le D""
E. Candèze (2 juillet 1898). Discours. Liège, 1898; extr.
in-18(3 p.).
Errera [L.). Sommaire du cours d'éléments de botanique
pour la candidature en sciences naturelles. Bruxelles, 1898;
in-8° (vii-140 p.).
Thomas (P.). Bemarques critiques sur les œuvres philo-
sophiques d'Apulée. Bruxelles, 1898; extr. in-8"(22 p.).
Du. Caju (Marie). Le livre de l'épargne et de la pré-
voyance. Bruxelles, s. d.; in-18 (212 p.).
— Soyez prévenants. Lectures. Frameries, s. d.; pet. in-8"
(112 p.).
— De l'éducation delà prévoyance. Bruxelles, s. d., pet.
in-8«(16p.).
( 4.78 )
Du Cajii {Marie). Arithmétique de l'épargne et de la
prévoyance. Frameries, s. d., pet. in-8° (164 p.).
Faider {Alfred). Du serment. Discours prononcé à l'au-
dience de rentrée de la Cour d'appel. Liège, 1898; in-8"
(46 p.).
Gaillard {Arthur). Le Conseil de Brabant. Histoire. Orga-
nisation. Procédure. Tome I"'" : Histoire. Bruxelles, 1898;
in-4" (vi-492 p.).
Jorissenne {Le /)■■ G.). Où et comment il faut bâtir les
sanatoria dans les régions accidentées de moyenne altitude.
Rapport lu au V* Congrès international d'hydrologie
médicale, de climatologie et de géologie de Liège. 1898;
in-8° (13 p.).
Bollandistes {Les). Bibliotheca hagiographica latina anti-
que et mediae aetatis, fasc. 1. Bruxelles, 1898.
État Indépendant du Congo. Annales du Musée du Congo.
Série 1, Botanique. Illustration de la flore du Congo, par
Ém. De Wildeman et Th. Durand, tome !«'•, fasc. 1. 1898 ;
in-4».
Archives de biologie, tome XV, 3.
Office du Trayai/. Annuaire de la législation du travail.
1897.
Ministère de l'Intérieur. Annuaire statistique de la Bel-
gique. 1897.
Charleroi. Société paléontologique et archéologique. Docu-
ments et rapports, tome XXII. 1898.
Allemagne et Autriche-Hongrie.
Iéna. Medicinisch-naturwissenschaftlicher Verein. Denk-
schriften. Band VI, VII, VIII. 1897-1898; 5 cah. in-4».
Bvi>KPEST.Statistisches Bureau. Publications, XX V-XX VIII,
( 479 )
1898. Statistisches Jahrbuch der Stadt Budapest. 1894-
Ï896.
Ratisbonne. Naturwisseuschaftlicher Verein. Bericlite,
Heft VI. 1896-1897.
KixGEWvm. :\atiirhistonscliesLandes-Museum. Festschrift
zum 50 jâlirigen Bestehen des Muséums. 1898.
WiESBADEN. Aassauischer Verein fur Naturkunde. Jalir-
gang51.l898.
Halle. Verein fur Erdkunde. Mitteilungen. 1898.
France.
Henault (B.). Sur les organismes des cannels. Paris, 1898;
2 extr. in-8" (7 et 6 p.).
Reiiaull {B.) et Boche {A.). Notice sur la constitution des
ligniles et les organismes qu'ils renferment. Autun, 1898;
extr. in-8" (39 p.).
Lefèvre-Pontalis (Antoine). Les élections du Reichstag.
Paris, 1898; in-8'> (27 p.).
Serrure (/i.). Jetons rares ou inédits. Paris, 1898; extr.
in-8^ (3 p.).
Morgan [J. de). Compte rendu sommaire des travaux
archéologiques exécutés du 3 novembre 1897 au l^'' juin
1898. Paris, 1898; pet. in-8« (90 p.).
Pascmid [Henri). Les droits des femmes dans l'association
conjugale. Paris, 1898; in-8° (60 p.).
Grande-Bretagne et Colonies britanniques.
Markham {Sir Cléments). Antarctic exploration : A plea
fora national expédition. Londres, 18^8; in-8° (15 p., carte).
Basliforlh {Francis). Replica di Krupp alla protesta del
signor Bashforth. Cambridge, 1898; in-S" (39 p.).
( 480 )
Greenwich. Royal Observatory. Observations and results,
1895.
Cape of Good Hope. Royal Observatory. Results of meri-
dian observations of stars, made in the years 1892 to 189o.
In-4''.
— Annals, vol. IV. 1897; in-4°.
Ottawa. Société royale du Canada. Mémoires, t. lil, 1897.
Calcutta. Meteorological Department. Hainfall of India,
1896. In-4».
Pays divers.
Leyue. Physiologisch laboratorinni der Universiteil. Onder-
zoekingen, 'i^^ reeks, III (Einthoven).
San Fernando. Almanaque nautico para 1900.
Stockholm. K. Svenska Vetenskaps-Akademien. llandlin-
gar, Band XXX, 1897-1898 ; in-4".
»oe»090<
BULLETIN
DE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
DES
Lettres et des Beaux-Arts de Belgique.
1898. — IN° i2.
€I.ASI«ii: DKS iSClKIVrR».
I
Séance du 3 décembre 1898.
M. Éd. Dupont, directeur.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. W. Sprlng, vice-directeur ; le baron
Edm. de Selys Longchamps, G. Dewalque, Brialmont,
Éd. Van Beneden, C. Malaise, ¥. Folie, F. Plateau,
Fr. Crépin, J. De Tilly, Ch. Van Bambeke, Alfr. Gilkinet,
G. Van der Mensbrugghe, L. Henry, M. Mourlon,
P. Mansion, P. De Heen, C. Le Paige, Ch. Lagrange,
F. Terby, J. Deruyts, Léon Fredericq, J.-B. Masius,
J. Neuberg, A. Lancaster, membres; Ch. de la Vallée
Poussin, associé; A. -F. Benard, L. Errera et P. Fran-
eotte, correspondants.
O*"* SÉRIE, TOME XXXVI. 55
( 482 )
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'Inlérieur et de l'Instruction publique
soumet à l'avis de la Classe deux requêtes par lesquelles
MM. P. Francotte, correspondant de l'Académie et
professeur à l'Université de Rruxelles, et Louis Quer-
ton, lauréat de l'Académie royale de médecine, sollicitent
de pouvoir occuper en 1899 la table belge du laboratoire
de zoologie du D"" Dobrn, à Naples.
— Renvoi à MM. Éd. Van Reneden et Ch. Van Ram-
beke.
— L'Académie impériale militaire de médecine de
Saint-Pétersbourg prie l'Académie de bien vouloir s'as-
socier aux solennités de son centenaire, qui aura lieu le
18 (50) décembre de cette année.
Une lettre de félicitations sera adressée par M. le Secré-
taire perpétuel à celte institution.
— M. le Ministre de l'Intérieur envoie, pour la biblio-
thèque de l'Académie, un exemplaire des ouvrages sui-
vants :
Annales delà Société scientifique de Briixelles^^i^ année,
1896-1897;
Bulletin du Cercle des naturalistes de Uw/, 1898,
n"' l-!2. — Remerciements.
— M. le Ministre de l'Agriculture adresse un exemplaire
des Diagrammes des variations du niveau de la mer à
Oslende, en 1897. — Remerciements.
(483 )
— Hommages d'ouvrages :
4° Contributions à l'histoire de la constitution de l'œuf :
m. Recherches sur l'oocyte de Pholcus phalangioïdes
Fuessl.; par Ch. Van Bambeke;
2" Sur les propriétés fondamentales des liquides; par
G. Van der Mensbriigghe (présenté par l'auteur) ;
5" Travaux publiés à foccasion du Congrès national
dlu/gicnc et de climatologie médicale de la Belgique et du
Congo, tenu à Bruxelles du 9 au 1 4 août 4897, sous les
auspices de la Société royale de médecine publique (pré-
senté par M. Lancaster);
4° L'homme et le singe; par le marquis deNadaillac:
associé de l'Académie ;
5" liec/urches de chimie et de phi/siologie appliquées à
ragriculiure, tome III; par A. Pelermann (présenté par
M. Malaise);
6" Annales du Musée du Congo, 12^ série : Zoologie,
tome V', fasc. 1 ; par G. -A. Boulenger (présenté par l'État
Indépendant du Congo) ;
1° Mémoire analytique sur la théorie de Laplace rela-
tive au phénomène du flux et du reflux de la mer^ par
Eueène Ferron. — Remerciements.
Les notes bibliographiques lues par MM. Van der
Mensbriiggbe, Lancaster et Malaise figurent ci-après.
— Ti'avaux manuscrits renvoyés à l'examen :
Sur la luminescence des gaz; par A. do Hemptinnc. —
Commissaires : MM. De Heen et Van der Mensbrugghe:
Sur la cause de l\iccélération séculaire du mouvement
r/e/rt L?nif -parA. Jouveneau. — Coriimissaires : MM. Folie,
Lagrange et Terby;
Mémoire énonçant et démontrant un nouveau principe
( 484 )
de mécnniqne; par Eugène Ferroii. — Commissaires :
MM. DeTillyet Mansion;
Un nouveau détail de structure du protoplasme des cel-
lules nerveuses (état spiréniateux du protoplasme) ; travail
du laboratoire de neurologie de l'Université de Louvain ;
par Ch. Nelis. — Commissaires : MM. Éd. Van Beneden
et Van Bambeke.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
J'ai l'honneur d'oftrir, à titre d'hommage à l'Académie,
un exemplaire de ma note intitulée : Sur les propriétés
fondamentales des liquides. Dans cette note, qui a tait
l'objet d'une conférence donnée aux ingénieurs sortis des
Ecoles spéciales de Gand, j'expose brièvement la suite
des raisonnements au moyen desquels j'ai fait dériver de
l'élasticité des liquides l'énergie potentielle des couches
superficielles ainsi que leur évaporation incessante.
Qu'il me soit permis de rapporter ici l'un des faits les
plus curieux que je cite à l'appui de ma thèse : c'est une
observation faite en 18G2 par mon ancien élève M. Jos.
Saurel, major d'artillerie ; en voici l'exposé textuel par
l'auteur:
(c Je m'étais avisé de vouloir remonter en chaloupe le
» courant que la levée des barrages occasionne au pont
)) des Chaudronniers, à Gand. Cette levée se faisait le
» samedi, mais alors la chute était trop forte, et je savais
» par expérience qu'il fallait attendre au moins jusqu'au
» lundi pour effectuer le passage ; c'est ce qui explique
» que j'ai retenu le jour (un lundi) de ma petite aven-
)) ture.
( 4.8o )
)> Mon embarcation avait de 6 à 7 mètres de longueur
» sur i"\75 dans sa plus grande largeur; elle était bien
)) taillée à l'avant et bien dépouillée à l'arrière. J'y étais
» seul, et je manœuvrais à la godiMe (une seule rame à
)) l'arrière agissant en queue de poisson). L'avant de la
» cbaloupe s'élevait donc fortement et l'arrière plongeait.
» A celte époque, les culées du pont des Chaudron-
» niers étaient raccordées en amont par deux surfaces
» courbes aux côtés du cours d'eau ; aujourd'hui ce
» raccordement est obtenu par deux plans verticaux
)) obliques. Les dimensions de l'ouverture sont restées à
» peu près ce qu'elles étaient alors (8 mètres de lon-
» gueur du pont et 9 de largeur). J'étais parvenu à faire
» dépasser, par l'extrémité de ma chaloupe, de 1 mètre
» environ l'entrée amont du pont, lorsque je m'aperçus
» que le courant me laissait parfaitement immobile dans
)) l'axe du pont. Je suis resté là près d'un quart d'heure,
)) puis, après m'être fait dériver, j'ai répété l'expérience
)) à plusieurs reprises. »
Voilà un fait qui mérite assurément de fixer l'attention
des ingénieurs. Il prouve, selon moi, que l'eau sous le
pont est plus fortement comprimée que les couches de
même profondeur en amont ou en aval.
G. Van uer Mensbrugghe.
J'ai l'honneur d'offrir à la Classe, au nom de la Société
royale de médecine publique, un exemplaire des travaux
publiés à l'occasion du Congrès national d'hygiène et de
climatologie médicale de la Belgique et du Congo, qui
s'est tenu à Bruxelles du 9 au 14 août 1897, sous les
auspices de ladite Société.
( 486 )
Ces travaux comprennent :
1" Le compte rendu des séances du Congrès;
2° Le Rapport sur la climatologie belge;
5° Le Rapport sur la climatologie, la géologie et la
situation sanitaire de l'État du Congo.
Ils forment trois volumes comptant en tout 1200 pages
grand in-8°.
La partie la plus étendue (GoO pages) est celle qui a trait
au Congo; elle est le fruit des études d'une Commission
nommée dès octobre 1893 dans le sein de la Société, et
qui, outre un certain nombre de documents imprimés, a
eu à sa disposition une quantité considérable de docu-
ments inédits, obtenus grâce à l'obligeance du Gouver-
nement de l'État Indépendant, de la Compagnie du
chemin de fer, des Directeurs des missions cbrétiennes,
des chefs de poste, médecins et agents divers disséminés
sur le vaste territoire de l'État. Le précieux concours de
tous ces collaborateurs donne au volume consacré au
Congo un intérêt particulier d'actualité et d'originalité.
Le livre comprend les chapitres suivants :
I. Le climat méléorique, par A. Lancasler et E. Meu-
leman ;
IL La constituliot du sol, par J. Cornet;
m. Morbidité, mortalité, statistique, par les D" A.
Bourguignon, G. Dryepondt et Ch. Firket;
IV. Adaptation, acclimatement et hygiène, par les
mêmes;
V. Conditions physiques, climalologiqucs et hygiéniques
des principales stations, missions, etc.
Ce dernier chapitre, auquel ont collaboré les six mem-
bres de la Commission, est le plus développé. Il consti-
tue un véritable répertoire de données relatives à l'état
physique et sanitaire du Congo.
( 487 )
J'ai l'honneur de joindre à ces divers ouvrages, en
mon nom et au nom de M. E. Meuleman, vétérinaire au
!«•■ régiment de guides, ancien commissaire du district
du Staniey-Pool, un exemplaire du Rapport traitant
exclusivement du climat. Ce rapport est accompagné de
nombreux diagrammes météorologiques.
A. Lancaster.
Le tome III des Recherches de chimie et de physiologie
appliquées à C agriculture {!), que j'ai l'honneur de pré-
senter au nom de M. Petermann, fait suite aux deux
volumes remis antérieurement à l'Académie. Il contient
l'ensemble des travaux que M. Petermann et ses colla-
borateurs de la Station agronomique de Gembloux ont
exécutés en vue de rassembler des matériaux destinés à
être utilisés pour la carte agronomique de la Belgique.
Ce volume comprend les chapitres suivants :
I. L'exploration chimique du sol, dans ses relations avec
la carte agronomique, accompagnée de considérations inté-
ressantes sur cette dernière ;
II. La méthode suivie à la station agronomique dans
l'analyse des terres ;
III. L'analyse complète de cent cinquante-cinq sols arables
et sols vierges du pays ;
IV. L'analyse de substances utiles à l'agriculture : cal-
caires, marnes, sables, et une étude complète sur les tourbes
de l' Hertogenwald et de la foret de Freyr ;
V. Résumé et discussion des premiers résultats obtenus.
Dans ce dernier chapitre, où l'auteur expose quelques
(1) Bruxelles, Mayolez et Audiarte; — Paris, Masson.
( 488 )
considérations ou déductions nouvelles, je signale parti-
culièrement : la détermination minéralogique des débris
minéraux faite par mes soins; le paragraphe traitant du
pouvoir absorbant des terres pour l'eau après un mouil-
lage complet, et de la proportion d'eau retenue après une
dessiccation à l'air et sans chaleur artificielle, et les pages
consacrées au taux des principaux éléments fertilisants :
azote, potasse, chaux, magnésie et acide phosphorique.
Au point de vue géologique, M. Petermann est arrivé
à cette conclusion intéressante que le rapport de l'argile
au sable est dans le limon très sensiblement comme 1 : 5.
Cette constante est établie par l'analyse de dix-huit échan-
tillons de limon prélevés entre les deux points extrêmes :
Acren et Tongres, et en éliminant dans le calcul de la
composition du limon primitif, le taux de la matière
organique dont la présence est une conséquence de la
mise en culture. Ce qui caractérise encore le limon, en
dehors de sa richesse en argile, c'est l'extrême ténuité
du sable qu'il contient, dont 98 "/o passent au tamis de
2/^Q de millimètre, produit qu'il convient par conséquent
de dénommer « poussiéreux ».
Au point de vue agronomique, c'est-à-dire de l'utilité
de l'analyse chimique des terres, l'auteur établit par les
dosages de l'acide silicique soluble une constatation à
laquelle il attache une grande importance et qu'il résume
dans les lignes suivantes :
« Cette constatation repousse la critique formulée
» depuis longtemps à l'adresse du procédé employé dans
» l'analyse des terres : les acides minéraux mettent en
« dissolution non seulement les principes nutritifs conte-
» nus dans les combinaisons devant être considérées
)) comme facilement attaquables par les racines et les
r 489 )
» principes nutritifs à l'état d'absorption pris dans le
» sens de Liebig, mais aussi les bases engagées dans des
» silicates assez réfractaires à la décomposition par voie
» naturelle. ->■>
« Le cliimiste n'ayant, pour ainsi dire, jamais déter-
» miné le taux de silice soluble et ne s'étant que rare-
» ment rendu compte de la quantité énorme de silicates
)) restant dans le résidu insoluble de l'attaque chlorby-
» drique, on comprend que la critique que nous venons
)) de mentionner n'a pu être réfutée et a passé finalement
» à l'état d'axiome. Mais nos analyses prouvent absolu-
» ment le contraire : la proportion d'acide silicique dis-
)) sous dans l'acide chlorhydrique est bien loin d'être
» assez élevée pour que les bases, dissoutes en même
» temps, puissent être considérées comme préexistantes
» dans le sol à l'état de silicates. » C. Malaise.
JUGEMENT DU CONCOURS ANNUEL (1898).
SCIENCES llIATHÉIIIj%TIQljeS ET PHYSIQUES.
Trois mémoires avaient été reçus en réponse à la
troisième question du programme des sciences mathéma-
tiques et physiques : Apporter une contribution importante
à l'élude des correspondances (Verwandtschaften) que l'on
peut établir entre deux espaces.
Ils portent pour devises :
N° 1. Geometry is hard (J.-H.-S. Smith).
N" 2. Nuîneri regunt lociim.
N° 3. Itinera ad verum.
( 490 )
Vu l'extension considérable de ces trois manuscrits
reçus le 1"' août, date du délai réglementaire pour leur
remise à l'Académie, et l'impossibilité pour MM. les Com-
missaires de présenter dans la séance du 15 décembre
courant leurs rapports, en vue de mettre la Classe à même
de se prononcer sur leurs conclusions, le jugement en ce
qui concerne ces trois mémoires ne sera prononcé qu'ulté-
rieurement.
«OIENCKS 1VAT1JREI.I.BS.
Il est donné lecture des rapports suivants :
1" De MM. Errera, Gilkinet et Crépin, sur le mémoire
portant la devise : L'aclivilé des plantes carnivores est, en
dernière anali/se, une question d'azole (Morren), envoyé
en réponse à la première question du programme pour les
sciences naturelles : On demande de nouvelles recherches
macrochimiques et microchimiques sur la digestion chez les
plantes carnivores ;
2° De MM. Plateau, Éd. Van Beneden et Van Bam-
beke, sur le mémoire portant la devise : La phijsiologie
des Invertébrés est presque tout entière à l'état de deside-
ratum (L. Fredericq), envoyé en réponse à la deuxième
question : On demande des recherches phtjsiologiques nou-
velles sur une fonction encore mal connue chez un animal
invertébré.
La Classe se prononcera sur les conclusions de ces rap-
ports dans sa séance du jeudi 15 décembre.
( 491 )
D'après une décision prise par la Classe en 1897, les
Œuvres complètes de J.-S. Stas sont olfertes chaque année
aux docteurs en sciences chimiques qui ont obtenu leur
diplôme légal avec la plus grande distinction.
Conformément à cette résolution, ces volumes seront
remis celte année à MM. Goldschmidt et Jules Denis,
élèves de l'Université de Bruxelles, dans la séance
publique de la Classe fixée au vendredi 16 décembre
courant.
RAPPORTS.
MM. Dewalque, Renard et Malaise donnent lecture
de leur rapport sur la proposition, adressée par le Con-
grès géologique international de Saint-Pétersbourg de
1897, d'associer la Belgique à la création d'un « Institut
flottant international ».
— Renvoi à M. le Ministre de l'Intérieur et de l'In-
struction publique.
Sur quelques dérivés chlorobromés en C^; par Fréd. Swarts,
répétiteur de chimie générale à l'Université de Gand.
ttapporl tt» .9M, tf. Sitfing, in'entifi- coiitittiMsniff.
« Ce travail est une étude des produits de la réaction
du pentachlorure d'antimoine avec l'élhylène tribromé :
C^HBrs.
( 492 )
Il se forme [U'incipalement un dichlortribromélliane
C^HBrsCl^, isomère avec un produit déjà connu, el
secondairement le monochlortétrabrométhane Cc2Br4CIH
et le tribromchloréthylène C^BrsCl. Le premier de ces
produits est liquide, il bout à 1 il2° sous 50 millimètres,
réagit avec la potasse pour donner le dichlordibrométhy-
lène C^Cli^Br^ ; avec le zinc en poudre et l'alcool, il donne
le dicblorbrométhylène CoHBrCla; il se décompose à
chaud pour passer à l'état d'hexachlorure (de Julin),
s'oxyde à l'air et donne avec le brome un produit d'addi-
tion : C2Br4CK2.
J'ai l'honneur de proposer à la Classe l'insertion de la
note de M. Fréd. Swarts dans le Bulletin de la séance. »
Cette proposition, à laquelle se rallie M. Henry, second
commissaire, est adoptée par la Classe.
Contribution à l'étude de l'oxydation des éthylènes halogè-
nes; par Fréd. Swarts, répétiteur de chimie générale
à l'Université de Gand.
Hapfiot't tlf^ m. II'. Sif'iiiff, pè'tfinieê' cotHtniaaaiâ'».
« Dans un travail antérieur (4), M. Fréd. Swarts avait
constaté l'oxydation du dibromfluoréthylène symétrique
et son passage à l'état de fluorure dibromfluoracétique;
aujourd'hui, il a tenu à vérifier si ce l'ait curieux et
(1) Bull, de l'Acad. roy. de Belgique, 3^ série, t. XXXV, p. 849.
( 493 )
important s'observait aussi cliez d'autres dérivés halo-
gènes de l'éthylène.
A cette fin, il a soumis à l'action de l'oxygène ou de
l'ozone, selon le cas, les dérivés halogènes de l'éthylène
qu'il a découverts lui-même ainsi que certains dérivés
déjà connus. Ses recherches ont permis de constater
que :
i'^' Le tribromfluorélhylène CBr^ : CBrFl donne, comme
produit principal de la réaction, un bromure acide, à
l'aide duquel l'auteur a pu préparer du tribromacetate
d'éthyle ;
2" Le dibromfluoréthtjléne CBrg : CHFl s'oxyde facile-
ment et donne nettement du bromure de fluorbromacélyle
qui a servi à faire l'éther correspondant : CHFlBr :
CO2.C2H5;
3" Le perchloréthylène que Demole a reconnu réfrac-
taire à l'air, s'oxyde au contact de l'ozone et passe lente-
ment à l'état de chlorure de trichloracélyle ;
A'° Le tétrabrométhyléne s'oxyde aussi par l'action de
l'ozone, mais plus difljcilement encore que le précédent;
5" Le dichlordibrométhylène symétrique s'oxyde très
difficilement au contact de l'ozone; il se comporte néan-
moins comme le dilluordibrométhylène, en ce sens que
c'est l'halogène le plus actif qui demeure uni au groupe
CO;
0° Le dibrométhylène symétrique CHBr - CHBr s'oxyde
difficilement en donnant du bromure de bromacétyle mêlé
d'aldéhyde dibromée et de tétrabrométhane dissymétrique :
CBrs - CHsBr.
L'auteur termine son travail par une discussion des pro-
cédés qui pourraient expliquer l'oxydation des éthylènes
[ 494 )
halogènes, discussion qu'il n'est guère possible de
résumer ici sans l'altérer dans sa clarté.
Je propose avec plaisir l'insertion du travail de
M. Fréd. Swarts dans le Bulletin de la séance, car il nous
apporte des faits complétant heureusement nos connais-
sances sur les dérivés halogènes du carbone. »
Ra/ii'Ofl tim m. Ijoni» Hvttfy, nccottil connni*»aiÈ'f.
a Le mémoire de M. Fréd. Swarts, dont M. Spring
vient de rendre compte, concerne un des faits les plus
étranges et partant les plus curieux de l'histoire générale
des composés non saturés.
Alors que l'éthylène se combine si aisément et si
vivement avec les corps halogènes, il manifeste, du moins
dans les conditions ordinaires, une inertie parfaite vis-à-
vis de l'oxygène, qui est cependant un élément négatif
puissant et doué d'affinités si faciles à éveiller.
Cette inertie cesse à la suite de la présence des corps
halogènes dans la molécule de cet hydrocarbure fonda-
mental. Il y a longtemps, en eftet, que l'on a signalé des
cas d'addition de l'oxygène à divers dérivés haloïdes de
l'éthylène (*) . Cette question a attiré autrefois mon
attention et fait l'objet de quelques recherches de ma
part, en ce qui concerne Vcllnjléne Irichloro-éthyl-oxylé
CI-Co(OC.)H^) (**). Je constate avec satisfaction la préfé-
(*) Demole, Bulletin de la Société chimique de Berlin, l. XI, pp. 316
et 1307 (année 1878).
(**) Bulletin de la Société chimique de Berlin, t. XII, p. 1839
(année 1870j.
( 495 )
rence que manifeste M. Svvarts pour la manière que j'ai
proposée de comprendre celle réaction ; si le mécanisme
en est simple en apparence, au fond il est complexe, si
l'on tient compte de la nature des produits, si éloignés de
l'éthylène, que fournit cette oxydation. Le temps n'a fait
que me confirmer dans ma manière de voir.
Je ne crois pas inutile d'ajouter qu'au cours de mes
reclierches sur les dérivés haloïdes de l'éthane, j'ai mis
au jour deux éthylènes halogènes, susceptibles de s'ajou-
ter aussi à l'oxygène, à savoir les éthylènes chloro-iodé
CH2=CC1I et bromo-iodé CH2 = CBrI dissymétriques (*).
Le premier de ces corps, qui renferme les deux termes
extrêmes de la triade halogénique et qui s'oxyde aisément,
mériterait certainement d'être examiné sous ce rapport.
Je ne puis non plus m'empêcher de faire remarquer,
à l'occasion de cette question générale de l'oxydabilité
des composés non saturés, que les dérivés haloïdes de
l'acétylène, du moins certains d'entre eux, tels que l'acé-
tylène monochloré CH = CCI et l'acétylène monobromé
CHs^CBr, manifestent pour l'oxygène une affinité bien
plus considérable encore que les dérivés éthyléniques.
Cette affinité est assez intense pour rendre ces composés
spontanément inflammables à l'air. Je ne doute pas qu'il
ne soit possible, par un dispositif expérimental conve-
nablement approprié, de modérer l'intensité de cette
oxydation, de manière à ne pas briser le noyau C=C.
Les produits de celte réaction me paraissent devoir être
curieux à examiner.
(*) Comptes rendus, t. XGVIIÎ, p. 741 (année 1884).
( 490 )
C'est là certainement une question aussi intéressante
que neuve à résoudre.
Je ne dois pas insister à présent sur la valeur que j'at-
tache à cette nouvelle communication de M. Fréd. Swarts
et le vif intérêt avec lequel j'en ai pris connaissance. Je
me joins volontiers à mon savant confrère et collègue
pour en proposer à l'Académie l'insertion dans le Bulle-
tin de ses séances. » — Adopté.
Sur quelques propriétés des polygones inscrits aux courbes
gauches; par Fr. Deruyts, chargé de cours à l'Université
de Liège.
« J'ai lu avec intérêt le nouveau travail de M. Fr. De-
ruyts. Il contient quelques résultats de valeur, application
de la méthode que l'auteur a employée avec succès à
l'étude des courbes et surfaces d'ordres supérieurs.
Je propose l'insertion du travail de M. Fr. Deruyts
dans le Bulletin de la séance. »
Cette proposition, à laquelle M. Neuberg, second com-
missaire, déclare, dit-il, se rallier volontiers, est adoptée
par la Classe.
497 )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
^ur l'oxydation directe de Véthylène trichloro-éthyl-oxylé
(;i2C = a:iiU(:,iii,);
par Louis Henry, membre de l'Académie.
Le mémoire de M. Swarls : Sur l'oxydation des dérivés
haloides de l'éthylène, a rappelé mon attention sur les
recherches que j'ai faites autrefois concernant le même
objet, en ce qui regarde Véthylène trichloro-éthyl-oxylé
CloC = GCl(OCA,).
Voici les faits que j'ai constatés :
Abandonnés à l'air ordinaire, dans un vase largement
ouvert, tel qu'une capsule, les élhylènes trichloro-mcthyl-
oxylé CLC=CCl(0CH3) et éthyl.-oxylé CL2C = CCl{OC.>Hj5)
jie tardent pas à devenir acides et à dégager d'abondantes
vapeurs chlorhydriques. Après quelque temps, le tout se
transforme en une cristallisation d'acide oxalique. Celui-ci
est l'aboutissant final de l'action simultanée de l'oxygène
et de la vapeur d'eau renfermés dans l'air.
Les choses se passent autrement avec l'oxygène sec.
Véthylène trichloro-éthyl-oxyl', agité avec ce gaz, l'absorbe
en s'échauffant sensiblement. Il se U^ansforme à la longue
en un liquide incolore, d'une odeur suffocante, fumant
fortement à l'air et se transformant avec l'eau en acide
oxalique.
5'"^ SÉRIE, TOME XXXVI. 34
( 498 )
Je lis dans mon journal de travail que j'ai mis en
réaction 107 grammes d'éthi/lène irichloro-étkijl-oxijlé pur.
A travers cette masse liquide, on a fait passer, en un
courant lent, 16 litres d'oxygène, dont une partie seule-
ment a été absorbée.
Il est utile de faire remarquer qu'une molécule-gramme
d'ethyléne trichloro-cthyl-oxijlé pèse 175.5 et qu'un atome-
gramme d'oxygène, 16 grammes, mesure, dans les con-
ditions normales, 11 litres 165 centimètres cubes.
Sans vouloir revenir, en ce moment, sur le mécanisme
de cette oxydation, j'ai déjà dit que j'en regardais le
produit comme constituant le chlorure de l'acide chloro-
Cl
oxa/o-ymîçue {*), {HO j CO -C <^^ „ , composé analogue
à l'acide oxalo-vinique (HO) OC - C<^p „ , que j'avais
fait connaître antérieurement (**).
OC - Cl
Chlorure de chloro-oxalo-vinvlc i
•' CloC - OC,H.,
OC - Cl
— d'oxalo-vinvie i
OC ~ OCJL
Après l'absorption de l'oxygène, ce liquide a été soumis
à la distillation, sous la pression ordinaire. Celle-ci s'est
opérée sans point fixe. Je lis dans mes notes qu'elle a
commencé vers 100°, qu'une bonne partie du liquide a
O Voir Bericlite (1er deutschen chomschen Gcsdlscliafft, t. XII,
p. 1838 (année \^1^ , e\ Association française pour U avancement des
sciences, Compte rendu de la VIII^ session, Montpellier, 1879, p. 461.
(" > Comptes rendus de l'Acad. des sciences de Paris, t. LXXIII. p. 39
(année 1871).
( 499 )
passé vers 440" et qu'à la fin le thermomètre est monté
au delà de 200°. Je m'attendais à plus de constance dans
les indications thermométriques et j'avoue que cette
variation m'a troublé dans mes prévisions.
Quoi qu'il en fût, la portion du produit qui avait passé
vers 140° a été analysée. Voici les résultats du dosage du
chlore :
Substance.
AgCl.
Chlore <>/« (*).
1 . .
. 0P^4M3
Oe',9124
55.0G
II . .
. 0K^4i56
Oe%9209
55.27
Le chlorure de chloro-oœalo-vinyle
OC -CI
I
cisC-or,H»
renferme 55.61 % de chlore.
L'accord est par conséquent satisfaisant.
Ces recherches remontent à l'automne de 1879. J'en ai
entretenu la section de chimie du Congrès de l'Associa-
tion française pour l'avancement des sciences, au mois
d'août 1880 (**).
Toutefois, je ne me suis pas décidé à livrer ces résultats
à la publicité, parce que je me proposais d'y revenir, ne
parvenant pas à m'orienter comme je le désirais dans
(•) Véthylène tnchloro éthylé qui avait seKvi à cette opération était
bien pur. Il avait bouilli, sous la pression ordinaire, à 154-155" et
l'on y avait trouvé 60 35 "/o de chlore, alors que la formule CI2C
= CCUOCaHs) en demande 60.57.
(**) Compte rendu de la /A'e session, Reims, 1880, p. 429.
( 500 )
les faits constatés pendant la distillation du liquide, après
l'absorption de l'oxygène.
Au milieu d'autres occupations, j'ai pendant longtemps
perdu de vue cet objet de recherches.
Depuis lors, les travaux publiés par MM. Anscbutz (*)
et Fauconnier (**) sur les produits de la réaction de PCI5
avec les élhers oxaliques, m'ont mis à même de com-
prendre ce qui se passe dans ces circonstances.
IJélher chloro-oxalo-vinique de M. Anscbutz :
OC - OC,Hb
cioC-OQng'
produit direct de l'action de PCI5 sm' l'éther oxalique,
bout, sous la pression de 10 millimètres, à SS^-SS". On
peut en inférer que, sous la pression ordinaire, ce com-
posé bout ou bouillirait vers 485'', sensiblement au même
point que Yéther oxalique lui-même
OC - OC^Hj
I ,
OC - OC.Hg
(jui bout à 180".
\! . Anscbutz a constaté encore que cet éther bichloro-
oxaliquo, soumis à l'action de la cbaleur, se dédouble
OC - OCjHs OC - OC.Us
I =1 + CJI.CI
CloC - OCJL OC - Cl
(*) LiehUfs Annalcn der Chenue, t. CGLIV, pj). 19 et 20 (année 1889).
("j Comptes rendus, etc., l. GXIV, p 122 (année 1892).
( 501 )
en chlorure d'élliyle et chlorure d'oxalo-vinyle CM^O
- C0(0aH5), bouillant à I5oM5G°.
Si l'on rapproche les points d'ébullition de ces com-
posés
(C,H,0)OC - COlOCallg) Éb. 186'
(Cjr,0)OC - CCK,f OC.Hj) Éb. vers 185°
(C.WsOjOC-COC! Éb. 135"- 136"
on peut légitimement conclure de leur comparaison :
a) Que le remplacement de 0 par Cl^ dans les dérivés
oxy-éthyliques de l'acide oxalique ne modilie pas sensi-
blement la volatilité;
b) Que la transformation du composant OC(OC2H5)
oxy-élher dans ces dérivés en composant chlorure acide
OCCl, abaisse le point d'ébullition de oO" environ.
Pour ce double motif, je suis autorisé, ce me semble,
à attribuer au chlorure de l'acide chloro-oxalo-vinique
CI,C - OC.Ils
I
OC-C!,
qui est, selon moi, le produit réel de l'oxydation de
Vélhylène Irichloro-ethyl-oxylé Cl2C= CC^OC^H^), 455°-
140" environ comme point d'ébullilion, la même volati-
lité qu'au chlorure d'oxalo-vinyle ClCO - C0{0C2Hg).
D'autre part, le chlorure d'oxalyle ClCO - COCl de
( 502 )
M. Fauconnier, produit de l'action complète de PCI5 sur
rélher oxalique
OC - OC2H5 Cl-C - OCJIs
I + 2PC1, = I + 2P0CU
OC - oCiiis eu: - ocHs
ClCO
ClCO
bout vers 70° {*).
De plus, il est à remarquer que ce composé renferme à
peu près la même quantité centésimale de chlore que le
chlorure de chloro-oxalo-vimjie lui-même.
Chlore «/c.
ClCO-CCI^lOCUj)
55.GI
ClCO - COCI
55.90
Tout cela étant, voici comment s'explique, à mon sens,
la distillation du produit brut de l'oxydation de Véthylène
trichloro-étlujl-oxylé.
(*) C'est à peu près le point d'ébullition que lui assignent ses rela-
tions avec l'élher oxalique et l'éthane perchloré.
(C^HsOjOC-COlOCiHs) Éb. ISB" \ gQ„
C10C-C0(0C«Hs) «30 /
\ -5O0
ClOC-COCl 85» /
CI3C-CCI3 485» \ g^„
CIOC-CCI3 US»
ClOC - cocu 54«
)^"
( o03 )
Ce produit étant conslilué exclusivement, ou au moins
en grande partie, par du chlorure de chloro-oxalo-vimjle
ClCO - CCU(OC2H5), a dû fournir une notable portion
bouillant vers 140°. Le dédoublement partiel de ce com-
posé, sous l'action de la chaleur, en chlorure d'éUtyle
C2H5CI et chlorure d'oxalyle ClCO - COCl, a permis à la
distillation de s'établir avant UX)". Si le produit analysé
n'était pas exclusivement du chlorure de chloro-oxalo-
vimjle ClCO - CCl2(OC.2H5), il ne pouvait renfermer que
du chlorure d'oxalyle dont la présence ne pouvait pas en
altérer la composition centésimale.
J'ajouterai enfin que l'oxygène qui avait servi à réaliser
celte oxydation n'étant pas probablement d'une siccité
absolue, il a dû se former de l'acide oxalo-vinique (HO)CO
- (^OlOCjHg), lequel bout à 117% sous la pression de
15 millimètres.
C'est la présence de ce corps qui, vraisemblablement,
a permis à la colonne mercurielle de s'élever jusque
vers 200".
Quoi qu'il en soit, je me propose de reprendre à nou-
veau cette question de Voxydation de Véthylène trichloro-
élhyl-oxyU'.
Le chlorure de chloro-oxalo-vinyle ClCO - CCl2(0C2H5),
qui en est le produit réel, est un composé qui mérite
certes un examen approfondi, car il est permis d'en
attendre des réactions d'un haut intérêt, notamment au
point de vue synthétique.
Lorsque je m'en suis occupé, il y a bientôt vingt ans,
la distillation dans le vide ou âous pression réduite
n'était pas encore entrée, comme aujourd'hui, dans la
pratique courante des laboratoires. J'ai tout lieu d'espérer
qu'en la mettant en usage, je pourrai isoler ce chlorure.
( 504 )
de composition si complexe, à l'état de pureté. Son
correspondant méthylique ClCO - CCU{0CH5) devant
être plus volatil el plus stable sous l'action de la
chaleur (*), j'aurai soin de mettre aussi en réaction
Vètinjlène trichloro-mélhyl-oxylc CL2C-CCI(OCH5), éb. vers
I50°-i35".
Sur l'origine de la couleur bleue du ciel; par W. Spring,
membre de l'Académie.
État de la question.
La cause de la coloration du ciel a, depuis longtemps
déjà, préoccupé les physiciens, sans que cependant le
problème se trouve résolu, aujourd'hui, de manière à
satisfaire tous les esprits.
Il n'entre pas dans le cadre de cette note de retracer
tous les travaux exécutés sur ce sujet depuis l'époque où
Newton lit voir, le premier, que des corps peuvent
paraître colorés dans certaines conditions, sans toutefois
posséder une couleur qui leur soit propre. Une histoire
suffisamment développée de la question a été faite par
J.-M. Pernter, il y a quelques années (**). Je puis me
borner à mentionner seulement les recherches princi-
(*) Selon M. Anschutz {toc. cit. , le chloro-oxalate biméthxjlique
ClaClOCHj)- COyOCH^) bout, presque sans décomposition, à 179'-i81",
sous la pression ordinaire. Le chlorure d'oxalo vinyle méthylique
C1G0-C0(0CH3) bout, sous la pression ordinaire, à llSo-lSO".
(") Scliriftcn des Vereins zur Verbreitung naturw. Kenntnisse, Wien,
t. XXX, pp. 197-219, 1890. A paru, en résumé, dans les Fortschrilte
der Physik, t. XLVI, (3), p. 441, 1896.
C 50o )
pales, indispensables pour comprendre l'observation
nouvelle que je désire faire connaître par ces lignes et
la valeur qu'elle peut avoir pour la solution du pro-
blème.
On a attribué, depuis longtemps, la lumière de
l'atmosplière à une réflexion ou à une diffusion des rayons
du soleil dans l'air. En etfet, si l'atmospbère était abso-
lument transparente, elle serait obscure; le disque
lumineux du soleil nous apparaîtrait sur le fond noir
des espaces stellaires et les phénomènes de l'aurore et
du crépuscule ne se produiraient pas. La preuve physique
directe de la réflexion atmosphérique a été fournie par
Brewster. Ce physicien constata que la lumière du firma-
ment n'est pas de la lumière ordinaire, mais bien de la
lumière partiellement polarisée. Le maximum de la pola-
risation a lieu quand, tournant le dos au soleil, on regarde
le ciel dans une direction perpendicnlaire aux rayons
qui nous atteignent. Il résulte immédiatement de là que
l'angle de polarisation atmosphérique est de 45 degrés,
car l'angle de 90 degrés correspondant au maximum
de polarisation, comprend l'angle d'incidence des
rayons directs et l'angle des rayons réfléchis, qui sont
nécessairement égaux. L'observation de Brewster a été
confirmée par Arago, Babinet, îTerscbel et par d'autres
savants; on peut donc regarder comme certain que le ciel
nous envoie de la lumière réfléchie.
Ce point étant acquis, Clausius s'est posé la question de
savoir 8ur quoi la lumière du soleil se réfléchit. Comme
il était difficile d'admettre une réflexion de la lumière
dans l'air sur l'air, il a cherché, par l'analyse mathéma-
tique des phénomènes de réflexion, les conditions phy-
siques que devaient remplir les particules servant de
miroirs pour que les propriétés optiques <le notre atmo-
( 506 )
sphère fussent satisfaites. Son travail, qui a paru en
1849 (1), conduit, en résumé, aux résultats que voici. La
réflexion ne peut avoir lieu sur des particules qui
seraient répandues dans l'air comme une fine pous-
sière (12), sinon la transparence de l'air se trouverait
diminuée plus fortement que nous ne le constatons;
elle ne peut pas non plus se faire sur des couches d'air
de densités différentes, enveloppant concentriquement
la terre, car la lumière du soleil, loin d'atteindre notre
œil, serait renvoyée vers les espaces planétaires. Si l'on
admet plutôt la présence, dans l'air, de parlicules d'eau,
on rencontre une difficulté. Tn milieu constitué de
cette fa^on ne transmettrait pas la lumière en ligne
droite. Les l'éfractions subies par un rayon passant succes-
sivement par des gouttelettes frappées, en général, sous
un angle quelconque, aurait pour effet une diffusion qui
nous effacerait le contour du disque solaire, comme si
nous le regardions au travers d'un verre dépoli. Il ne
reste donc qu'une hypothèse, celle de corps transparents
creux, ou de vésicules d'eau. Si on l'accepte, on s'assure
facilement que non seulement la réflexion de la lumière
s'explique, mais encore que la lumière réfractée, c'est-à-'
dire celle qui passe par la vésicule transparente, doit con-
tinuer son chemin dans une direction sensiblement la
même, lin effet, la lamelle sphérique d'eau qui consti-
tue la vésicule peut être assimilée, aux deux points où
elle est percée par le rayon lumineux, à deux lamelles
(l) Annales de Pogcjendorff, t. LXXVl, pp. 161-188.
("i) Celte ex|)lication a reparu néauinoins en 1872; voir l'article de
Collas Sur la cause de la couleur bleue du ciel, dans Les Mondes (2),
t. XXIX, ]). Oi7; il y est dit que l'air renfermerait des poussières
de silice [\).
( «07 )
planes parallèles, extrêmement petites, et l'on sait que la
réfraction à la sortie d'un milieu compris entre des plans
parallèles compense la réfraction à l'entrée. De celte
façon, la direction de la lumière qui traverse une vésicule
sera conservée dans son ensemble. Cette hypothèse est,
en outre, avantageuse à la réflexion, car elle met sur le
chemin du rayon lumineux quatre changements de milieu
par vésicule, le rayon incident se réfléchissant sur la sur-
face externe et sur la surface interne de la vésicule à
l'entrée et à la sortie. L'intensité de la partie réfléchie
de la lumière devra donc l'emporter de beaucoup sur
celle de la partie réfracté e
Clausius regarde donc comme très probable, sinon
comme démontré, que la vapeur d'eau passe, dans l'air,
par la forme vésiculaire avant de se condenser en
gouttes proprement dites. La cause de l'illumination du
hrmament serait dans la forme de ce premier degré de
la condensation.
Passant ensuite à la question de l'origine du bleu du
ciel ainsi qu'aux phénomènes de coloration de l'aurore et
du crépuscule, Clausius admet, dans un autre mémoire! 1),
(jue le bleu n'est pas propre à l'atmosphère, mais qu'il
apparaît, dans les vésicules d'eau, à la suite de l'interfé-
rence des rayons de grande longueur d'ondes. Le firma-
ment ne serait pas bleu par suite de Vabsorption des
rayons complémentaires, comme l'est une fleur bleue, par
exemple, mais sa coloration aurait la même cause que
l'irisation des bulles de savon dont les parois sont
devenues suflîsamment minces. Toutefois, il y aurait
à noter que le bleu du ciel serait exclusivement de
1) Annales de Poggendorff, t. LXXVI, pp. 188-195.
( 508 )
premier ordre, c'est-à-dire de même origine que celui
qui, dans l'expérience bien connue des anneaux de Neulon,
entoure la tache centrale obscure.
Les tons rouge orangé de l'aurore ou du crépuscule,
d'autre part, sont aussi expliqués bien simplement. En
effet, la lumière traversant les vésicules doit être nécessai-
rement complémentaire du bleu; mais nous ne pourrons
la percevoir que si les rayons du soleil ont passé par un
nombre considérable de vésicules, car, d'après ce qui a
été rappelé plus haut, la partie de la lumière réfractée est
bien plus faible que la partie réfléchie (l). Cette condi-
tion se trouve réalisée lorsque le soleil est à l'horizon ;
alors le nombre de vésicules traversées est bien plus
grand .
La théorie de Clausius parait bien expliquer les faits
observés. Elle a trouvé, en outre, un appui dans les
expériences de G. Govi sur la polarisation de la lumière
par diffusion (2), ainsi que dans celles de Tyndall sur
V illumination des nuages naissants (5). Le célèbre |)hysi-
cien anglais a notamment fait voir que si l'on éclaire for-
tement un mélange d'air, de vapeur de nitrite de bulyle
ou d'amylc et d'acide chlorhydrique, sous une pression
très réduite, il se produit « un azur splendide qui devient
» d'abord de plus en plus prononcé, arrive à son maxi-
» mum de pureté et d'intensité, et passe ensuite, les par-
» ticules devenant pins grosses, au bleu blanchâtre ».
(1) Si l'on prend pour imilé la lumière tolale, la partie réfléeliie
serait 0.922 et la partie réfractée 0.078, dans les limites extrêmes,
d'après les calculs de Clausius [loc. cit., p. 194).
(2) Comptes rendus, t. LI, p. 360, 1860.
(3) La chaleur mode de mouvement (traduction de l'abbé Moigno).
Paris, 1874, pp. 517 et suivantes.
( 509 )
Cette lumière bleue ayant été reconnue polarisée, Tyn-
(lail a regardé son expérience comme reproduisant, au
moyen de substances spéciales, le phénomène de la colo-
ration bleue du ciel; il résulterait de là que ce bleu serait
engendré par la réflexion et non par une absorption
propre à l'atmosphère.
(Juoi qu'il en soit, l'explication proposée par Clausius
a soulevé des objections de la part de J. W. Strutt (i),
au moins en ce qui concerne l'existence réelle de vésicules
de vapeur dans l'air. Le savant anglais a établi, de son
côté, par l'analyse mathématique, que des gouttelettes
pleines pouvaient aussi réfléchir beaucoup mieux les
rayons bleus. Il suffit pour cela que leur diamètre soit
extrêmement petit et de l'ordre de grandeur des lon-
gueurs d'ondes. Ce désaccord entre Clausius et Strutt n'a
cependant pas d'importance pour le sujet qui nous
occupe.
Ce résumé de la théorie de l'illumination du lirma-
ment porte à croire, malgré tout ce qu'il a forcément
d'incomplet, que la « grande énigme » du bleu du ciel,
comme l'appelait Herschel, a trouvé son explication.
Néanmoins, la solution proposée laisse encore place au
doute.
11 résulte des expériences mêmes de Tyndall que la
lumière réfléchie par un nuage naissant n'est bleue que
pendant peu d'instants ; elle passe bientôt au bleu pâle,
puis au blanc. Cette fugacité contraste singulièrement
avec la fixité et avec l'uniformité du bleu d'un ciel serein.
Si l'on admet même, avec Clausuis (2), qu'il se forme
(1) PkU. Mag., (4), t. XLl, p. 274, 1871.
(21 Loc. cit., p. 192.
( olO )
continuellement de nouvelles vapeurs, on ne comprend
pas sans autre explication pourquoi les vésicules devenues
trop épaisses pour former du bleu de premier ordre
s'évaporeraient à nouveau pour en reproduire de plus
fines, avec une régularité et une précision telles que l'œil
ne peut saisir aucune variation dans la nuance du ciel.
D'autre part, la théorie de Clausius veut que le bleu du
ciel soit un bleu de premier ordre; or celui-ci est plus gris
que celui du ciel : on s'en assure facilement par l'examen
des anneaux de Newton. Cette théorie postule encore que
la couleur des rayons de l'aurore et du crépuscule soit
exactement complémentaire du bleu du ciel; or, d'après
E. Briicke (1), il n'en serait pas ainsi. Ce physicien émet
donc explicitement un doute sur l'origine du bleu du ciel
et il regarde les couleurs crépusculaires comme indé-
pendantes, au point de vue de leur production, du bleu
du firmament.
Enfin, je rappellerai un fait bien connu de toutes les
personnes qui ont fait de grandes ascensions. A mesure
que Ton s'élève, le bleu du ciel perd de plus en plus son
ton blanchâtre ; au-dessus de 4,000 mètres environ, le
firmament parait blm sombre. En même temps, le drgré
de polarisalion de la lumière va diminuant (Tyndalli. Il
me parait que la vraie conclusion à tirer du parallélisme
de ces deux phénomènes, c'est que la cause de la polari-
salion réside dans ce qui blanchit le ciel et non dans ce
(jui le bleuit. Ce qui empêche de se prononcer catégori-
quement, c'est l'indétermination du problème : dans la
vallée, on observe un bleu moins sombre, mais on a
devant soi une épaisseur d'aii- plus grande et l'on pour-
(1) Poggendorff Annalen, l- LXXXVIII, p. 363.
( SH )
rait, avec Tyndall, attribuer la plus forte polarisation à
une réflexion plus multipliée des rayons lumineux.
Quoi qu'il en soit de la valeur de ces doutes, il ne sera
pas sans utilité de mentionner une observation que je
crois nouvelle.
Observations nouvelles.
Pour résoudre l'indétermination à laquelle il vient
d'être fait allusion, on peut opérer, me paraît-il, de la
manière suivante.
Si l'on regarde la polarisation comme la preuve de
l'origine /?«r réflexion du bleu du ciel, il faut nécessaire-
ment admettre qu'en interceptant les rayons bleus à l'aide
d'une substance de couleur exactement complémentaire,
on éteindrait, par le fait même, la partie polarisée de la
lumière du lîrmament. Si, au contraire, l'atmospbère
devait sa couleur à une absorption, la suppression de la
lumière bleue n'arrêterait pas la polarisation; celle-ci
serait alors due plutôt à la réflexion du contingent blanc
de la lumière du ciel. En réalité, le pbénomène à étudier
est plus compliqué que les lignes précédentes le sup-
posent. La polarisation peut être due en partie à la for-
mation du bleu et en partie aux réflexions nous amenant
de la lumière blancbe. Dans ce cas, l'interposition de la
couche de couleur complémentaire ne supprimera que
partiellement la polarisation.
Voyons ce que nous apprend l'observation.
Le choix de la matière dont la couleur est complé-
mentaire du bleu du ciel est une conséquence des recher-
ches que j'ai eu l'honneur de communiquer dernièrement
à l'Académie sur la Cause de l'absence de coloration de cer-
( 512 )
laines eaux limpides naturelles (1). On se souvient que
Vhématite, en parcelles assez fines pour être transparentes,
est de couleur complémentaire an bleu de l'eau. Si l'on
regarde le ciel à travers ces lamelles suspendues dans
un peu d'eau, on constate aussi la disparition du bleu.
Toutefois le maniement des lamelles d'hématite est très
incommode. J'ai renoncé à leur emploi pour me servir
des solutions ferriques limpides dont la couleur paraît la
même. Celle qui a le mieux répondu aux conditions dési-
rées a été une solution de sulCocyanure ferrique. Comme
l'hématite, elle cteint aussi le bleu de l'eau pure. Pour la
préparer, on ajoute une goutte d'une solution de chlorure
ferrique, à 5 °/o environ, à quelques centimètres cubes
d'une solution de sulfocyanure de potassium à 10 "/o,
puis on étend d'eau jusqu'à ce que l'intensité de la teinte
rouge-orange soit en rapport avec celle du bleu de l'eau
que l'on observe dans un tube de longueur suffisante. En
interposant entre l'œil et le tube une auge à laces paral-
lèles contenant le composé ferrique, la sensation du bleu
disparaît.
Si l'on regarde, de même, le ciel serein au travers de
cette auge, on remarque aussi la disparition du bleu pour
une concentration convenable du composé ferrique.
Celle-ci est à chercher par tâtonnements, d'après l'état
du ciel. Quand on la possède, on voit dans le ciel
comme une tache blanche, d'intensité lumineuse un peu
alfaiblie, ce qui doit être.
Ce résultat étant acquis, on place entre l'œil et l'auge
un polariscope (je me suis servi de celui de Savart, muni
d'une lame de quartz ou de gypse), et l'on constate nette-
(l) Bull, de l'Acad. roij. de Belgique, 3«sér., t. XXXVI, p. 266, 1898.
( SI3 )
ment que la lumière, bien que privée de bleu, est encore pola-
risée dans la même proportion que celle du ciel non regardé
à travers l'auge. En comparant le degré de polarisation
avec celui du ciel nu, il ne m'a pas été possible de
trouver une différence. J'ai répété souvent cette obser-
vation pendant les nombreux jours sereins des mois de
septembre et d'octobre derniers, à diverses heures, et je
suis arrivé invariablement au même résultat.
Conclusions.
On peut conclure, je crois, de ces observations que le
fait de la polarisation de la lumière du ciel ne prouve
pas nécessairement l'absence de couleur propre de notre
atmosphère. La suppression du bleu paraît sans influence
appréciable sur le degré de polarisation du firmament.
On est plutôt conduit à admettre que la polarisation est
due à la réflexion de la lumière sur des particules (vési-
cules ou gouttelettes de vapeur) assez épaisses pour ne pas
être le siège de phénomènes d'interférence. Le bleu du ciel
ne serait pas, comme on l'a pensé généralement, la cause
de l'illumination de l'atmosphère, mais nous le perce-
vrions comme une conséquence de celle-ci. La lumière du
soleil, en pénétrant dans notre atmosphère, y subirait
une difl'usion partielle à la suite de réflexions causées,
très probablement, par les vésicules ou les gouttelettes
de vapeur d'eau. Si le milieu était absolument incolore,
le ciel nous apparaîtrait blanc, mais moins éclairant dans
la direction perpendiculaire aux rayons solaires. Or, le
fait que nous voyons le ciel bleu nous oblige donc à
admettre que l'atmosphère n'est pas absolument incolore,
mais bleue.
5'"* SÉRIE, TOME XXXVl. 35
( 514 )
Nous devons examiner à présent si cette conclusion se
concilie avec V optique métf orologique.
D'abord, on remarquera que la rétlexion de la lumière,
dans l'air, sans phénomènes de coloration, n'exclut en
aucune façon la polarisation. Arago a vu, déjà en 1854,
qu'il suffit que la lumière passe par une couche d'air de
50 mètres, troublée par des vésicules de vapeurs, pour
se polariser notablement (1), Hagenbach a fait la même
remarque en 1872 (2). Enfin, Lallemand avait déjà émis
l'opinion que le bleu du ciel n'est pas polarisé, mais que
la lumière polarisée est blanche (5). Les considérations
théoriques sur lesquelles ce physicien se base, sont même
appuyées sur une expérience; néanmoins, comme celle-ci
peut être discutée, je n'insisterai pas.
L'atmosphère aurait- elle effectivement une couleur
propre : le bleu? Non seulement rien ne s'oppose à ce
qu'on admette la chose, mais je dirai que cette conclusion
découle de nos connaissances actuelles. En efiét, parmi les
substances dont le mélange forme l'air, il en est quatre
qui ont la couleur bleue. D'abord la vapeur d'eau. Tyndall
dit à ce sujet (4) que « la vapeur d'eau et l'eau liquide
» absorbent la même classe de rayons; c'est une manière
» d'établir que la couleur de l'eau pure est aussi la cou-
» leur de sa vapeur ». Il ajoute que probablement
l'atmosphère doit à la vapeur d'eau d'être un milieu de
couleur bleue, car on a remarqué que le bleu du firma-
ment et des montagnes lointaines de l'horizon se fonçait
(i) Loc. cit., p. 127.
(2) Dus Licht des Landschaftsdiiftes. (Der Naturforscher, t. V,
pp. 23-24, 1872.)
(3) Comptes rendus, t. LXXV, p. 707, 1872.
(4) La dmleiLr mode de mouvement, p. 365.
( 515 )
en proportion de la quantité de vapeur d'eau contenue
dans l'air. On se rappelle, en outre, que notre regretté
confrère Ch. Montigny (1) a vu, dans ses nombreuses
observations sur la scintillation des étoiles, la couleur
bleue apparaître plus fréquente et plus intense cbaque
fois que l'air était plus humide.
Enfin le fait que le bleu de l'eau et le bleu de l'air se
trouvent éteints par la même substance (voir plus haut)
ne parle certainement pas contre une origine commune.
D'autre part, l'oxygène lui-même n'est pas incolore.
k. Olszewsky (2, dit que l'oxygène liquide exempt d'ozone
est nettement bleu sous une épaisseur de 50 millimètres.
Sa coloration est donc environ cinquante fois plus pro-
noncée que celle de l'eau pure, puisque celle-ci ne com-
mence à se manifester que sous 1500 millimètres d'épais-
seur. Ce physicien s'est demandé aussi si le bleu du ciel
ne serait pas dû à la présence de l'oxygène.
Dans les régions plus élevées de l'atmosphère, là où
les émanations organiques du sol deviennent plus rares,
l'air renferme souvent, sinon toujours, de l'ozone et du
peroxyde d'hydrogène. Ces substances sont aussi bleues.
D'après Olszewsky (5), l'ozone liquide est si bleu qu'une
couche de 2 millimètres est presque opaque, et, d'après
Hautefeuille et Chapuis (4), V oxygène ozonisé autant que
possible à la température ordinaire est bleu sous 1 mètre
d'épaisseur. J'ai montré moi-même (5) que le peroxyde
(1) Bull, de VAcad. roy. de Belgique, Se sér., t VII, p. 304, 1884.
(2) Chemikcr Zeilung fRepertorium;, p. 66, 1891.
(3) Monatshefle fur Chemie, t. VIII, p. 69.
(4) Comptes rendus, t. XCI, p. 522.
(5j Bull, de l'Acad. roy. de Belgique, 3^ sér., t. XXIX, pp. 363-384,
1895.
( 516 )
d'hydrogène pur a une couleur bleue environ deux fois
aussi foncée que celle de l'eau. Il n'est donc plus possible
de regarder l'air comme absolument incolore. D'ailleurs,
W.-N. Hartley rappelle, dans son travail Sur les limiles
du spectre solaire, sur le bleu du ciel et la fluorescence de
l'ozone (1), que Liveing et Dewar ont constaté que
l'oxygène de l'air a effectivement un fort pouvoir absor-
bant pour les rayons à grandes longueurs d'ondes. Il
attribue lui-même le bleu du ciel à la fluorescence des gaz
de l'atmosphère, principalement à l'oxygène et à l'ozone.
Il regarde l'ozone comme se trouvant en quantité suffisante
dans l'air pour donner à l'atmosphère une couleur bleue
d'absorption.
Il reste à examiner si les phénomènes lumineux de
l'aurore et du crépuscule ne sont pas un obstacle à notre
manière de voir.
On s'en souvient, d'après la théorie de Clausius, le
bleu du ciel et les lueurs rouges du matin et du soir
auraient une origine commune, le bleu étant le résultat
de la réflexion et le rouge orangé celui de la réfraction
des rayons solaires dans les vésicules de vapeur d'eau.
En déplaçant à présent Vorigine du bleu, on doit se
demander s'il n'y a pas lieu de fournir une explication
nouvelle des lueurs crépusculaires. La réponse à cette
question se trouve dans les résultats obtenus par M. le
Prof' Cari Barus, dans ses recherches sur Les couleurs des
condensations nuageuses (2). L'auteur a constaté que ces
couleurs permettent de distinguer sûrement la vapeur
(1) Fortschritte der Physik, t. XLV, 3. Abth , p. 239, 1889.
(2) The colors of cloudy condensation. (American meteorologicai.
Journal, Mardi, 1893.)
( 517
d'eau d'un amas de gouttelettes infiniment petites ei
qu'elles donnent en même temps une mesure pour les
dimensions de ces dernières.
Il observait un jet de vapeur se détendant dans un tube
de 0'°,60 de long, fermé par des plans de verre, tandis
que la lumière passait par le tube dans la direction de
l'axe. Le résultat général de ces observations peut se
résumer en disant qu'une conclemation nuageuse produit
les phénomènes de coloration des milieux troubles. Sui-
vant le diamètre des gouttelettes, la première lueur visi-
ble vire du rouge au vert.
Ce sont, en somme, des couleurs d'interférence, d'ordre
supérieur, qui se produisent quand les dimensions des
gouttelettes ont grandi au point de rendre impossible la
formation du bleu de premier ordre. Si les rayons du
soleil traversent donc, le matin ou le soir, des couches
d'air chargées de gouttelettes dont les dimensions sont
comprises entre 0'"'",00004 et 0'°'",OD04, ils se coloreront
de nuances diverses, étrangères au bleu proprement dit du
firmament. Ces nuances ne seront pas nécessairement
complémentaires du bleu du ciel, comme devaient l'être
celles de la théorie de Clausius. La remarque de E. Brijcke
à ce sujet (voir plus hauti n'est donc plus une objec-
tion. On sait, en outre, que l'apparition de lueurs vertes,
à l'aurore ou au crépuscide, n'est pas un phénomène bien
rare. M. de Maubeuge en a signalé récemment une extra-
ordinaire qui a accompagné le lever du soleil derrière le
massif du Sinaï, « en lançant à la première seconde de
» son apparition un rayon lumineux vert émeraude
» absolument pur et net (4) ».
(1) Comptes rendus, t. GXXVII, p. 453, 1898.
( 518 )
L'explication des couleurs crépusculaires peut donc
être détachée de celle du bleu du ciel.
Pour terminer, je toucherai encore un point particulier
qui semble étranger au sujet actuel, mais qui s'y rattache
cependant au fond.
Lorsque Tyndall eut appelé de nouveau l'attention sur
l'origine probable du bleu du ciel, on a cru que le bleu
de l'eau pouvait être dû également à des phénomènes
d'interférence. Cette opinion a été renouvelée récemment
par M. R. Abegg (1) et regardée comme certaine et irré-
futable {sicher richtig und unwiderlegliclv , de sorte que,
pour cet auteur, le bleu de l'eau serait à la fois bleu de
réflexion et bleu d'absorption. Je crois que M, R. Abegg
fait erreur : la réilexion de la lumière dans l'eau donne
une illumination plus ou moins jaune orangé ou blanche,
et non bleue. Pour trancher la question, il suffira
d'éteindre la lumière bleue des eaux naturelles par sa
couleur complémentaire et de s'assurer si, oui ou non, la
polarisation disparaît en même temps et dans la môme
mesure. Je me propose de vérifier le fait sitôt que les
devoirs de ma charge m'en laisseront le loisir.
liège. Institut de chimie générale. Novembre 1898.
(i) Naturw. Rundschau, t. XIII, n" 14, 1898.
( 319 )
Sur quelques dérivés chlorobromés en €3; par Frécï. Swarts,
répétiteur de chimie générale à l'Université de Gand.
Dans les recherches que fit Sabanejeff sur les dérivés
chlorés et bromes que l'acétylène peut former par addi-
tion, cet auteur (*) a étudié l'action du pentachlorure
d'antimoine sur l'éthylène bibromé symétrique. Il a
observé qu'il se forme, non pas du dibromdichloréthane
symétrique, comme on aurait pu s'y attendre, mais un
composé de la formule CBr.jH - CCK2H, Il se produit tou-
jours en même temps un déplacement partiel du brome
par le chlore, avec formation de composés chlorés.
J'ai étudié l'action du pentachlorure d'antimoine sur le
tribrométhylène, préparé par le procédé de Lennox (**),
en chauffant du tétrabromélhane symétrique avec de l'acé-
tate de potasse et du carbonate de soude.
Pour éviter une réaction très vive, j'ai dissous une
molécule d'éthylène tribromé dans son poids de tétrachlo-
rure de carbone. Dans la solution, refroidie par immer-
sion dans de l'eau glacée, j'ai laissé couler lentement
une molécule de pentachlorure d'antimoine.
Il se produisit une élévation notable de température et
le liquide se colora fortement en rouge, par suite d'une
mise en liberté de brome. Après introduction de tout le
pentachlorure, le ballon dans lequel j'avais opéré fut
(*) Sabanejeff. Liebig's Annalen, t. GCXVI, p. 256.
(") Lennox, Liebig's Annalen, t. CXXIl, p. 215.
( 520 )
légèrement houché et abandonné à lui-même. Après
vingt-quatre heures, il s'y était produit une abondante
cristallisation: le liquide surnageant fut décanté, secoué
successivement avec de l'acide chlorhydrique, une solu-
tion d'acide tartrique et de la soude, puis séché sur du
chlorure de calcium.
J'ai distillé le chlorure de carbone au bain-marie; il
me resta un liquide très dense, que j'essayai de distillera
la pression ordinaire. Seulement, quand le thermomètre
atteignit 180°, il se manifesta une décomposition assez
importante, avec dégagement de brome et d'acide brom-
hydrique. 1
En fractionnant au Lebel dans le vide, j'ai obtenu, I
après deux rectilieations, un liquide incolore, bouillant 1
à 142° sous 50 millimètres de pression.
Deux dosages de carbone et d'hydrogène dans le pro-
duit obtenu m'ont donné les résultats suivants :
is%7i)77 de stibstaiice ont fourni 0c^0Gl8 H^O,
soil0g^00C8G i^oiiO.Sg"/,,
cl08^4818COi,soit0e^i5ll C, ou 7 20"/».
Is^SIC) de substance ont donné Os^OTôS H^O,
soit0g'-,008l4H, ouO./tôo/o,
et Oe^^OOO CO., soit Oe%1 33G3 C, ou 7. 1 9 "/„ .
Ces teneurs en carbone et hydrogène correspondent à
la formule CjHBrsClo, qui exige
C 7.! 5°/.,,
H 0.-29 ^/„.
Le tribromdichloréthane que j'ai obtenu et que j'appel-
( S24 )
lerai (3 diclilortribiométhane, pour le distinguer du di-
chlortribiométhane obtenu par Denzel (*J, est un liquide
incolore, brunissant à la lumière et se congelant à - 5°
environ. Sa densité à 21%o est de 2.6263; son indice
de réfraction, de 1.5989 à i5°,o.
J'ai pris sa densité de vapeur par le procédé de Hof-
mann à 184" et je l'ai trouvée normale. Cependant, le
mercure était légèrement attaqué; il enlève sans doute
du brome au dichlortribrométhane, comme le fait le
zinc.
Quand on distille le [3 dichlortribrométhane à la pres-
sion atmosphérique, on constate qu'il bout vers 210",
mais il se décompose en même temps assez fortement,
en dégageant du brome et de l'acide bronihydrique.
Sous pression réduite, il distille à 142'' sous 50 milli-
mètres, à 155" sous 35 millimètres de pression.
A côté du tribromdichloréthane, j'ai obtenu, en distil-
lant le produit brut de la réaction du perchlorure d'anti-
moine sur le tribrométhylène, un résidu ne bouillant pas
à 142° sous un vide de 710 millimètres et qui se prenait
par refroidissement en grandes lamelles cristallines.
Ces cristaux furent traités par l'alcool froid qui en
dissout la majeure partie, ne laissant qu'un résidu inso-
luble très minime. La solution alcoolique m'a donné, par
évaporation, de beaux cristaux, fusibles à 32" et distillant
vers 150" sous 50 millimètres de pression. Ces cristaux
sont très solubles dans l'alcool et l'éther et possèdent une
odeur camphrée. Ces propriétés appartiennent au tétra-
bromchloréthande écrit par Denzel^**) . Pour vérifler l'iden-
(*) Denzel, Liebig's Annalen, t. CXCV, j). ^201.
(**) Denzel, Berichten. L XII, p. "i'iOT.
( 522 )
tité des corps, j'ai tait un dosage de carbone et d'hydro-
gène.
16%522 de substance ont donné 0Êr%3t04 COs,
soit08^9284C, ou G.t "L,
et 0g^0548 HaO, soit Oe^.OOCm H, ou 0.40 "/„.
Calculé pour C^HriCIII.
C 6.50 1,
H 0.26 »/„.
Ce corps a déjà été obtenu par Denzel, en broniant
le chlorure d'élhylène, et par Wallach {*), en faisant agir
le brome sur l'acétylène monochloré. Sa formation dans
la réaction que j'étudie est évidemment due à une mise
en liberté de brome, qui forme du chlorure de brome,
lequel s'additionne au tribrométhylène.
Cette réaction n'est jamais que secondaire au point de
vue quantitatif; elle devient d'autant plus importante que
l'on opère à une température plus élevée et qu'on fait
arriver plus rapidement le pcntachlorure d'antimoine.
Le résidu insoluble dans l'alcool froid se dissout dans
une grande quantité d'alcool bouillant et recristallise par
refroidissement en petites aiguilles fusibles à 201". J'en
ai obtenu trop peu pour pouvoir l'identifier.
La substitution du brome par le chlore doit avoir pour
conséquence la production d'éthanes bromochlorés plus
riches en chlore que le dichlortribrométhane. Je ne les ai
pas recherchés dans les produits de la réaction, la quan-
tité de produit bouillant de 100° à 140° dans le vide étant
trop faible pour être soumise à un travail de séparation.
Le composé antimonique cristallin, qui constituait le
C) Wallach, Liebufs Annakn, t. CCIII, j). 89.
( 523 )
résidu de la préparation, était formé de trichlorure d'an-
timoine pur.
J'ai soumis le (3 dichiortribrométhane à l'action de la
potasse alcoolique. 100 grammes de produit furentdissous
dans leur poids d'alcool et traités par 20 grammes, soit
un léger excès, de potasse caustique dissoute dans
oOO centimètres cubes d'alcool.
La réaction s'accompagna d'une vive élévation de tem-
pérature et détermina la précipitation immédiate du sel
de potassium. Après addition de toute la potasse, j'ai
cbaufTé au reflux pendant une lieure pour acbever la
réaction, puis j'ai précipité par l'eau, séché et distillé à la
pression atmosphérique.
La distillation commença à lliiP, et entre 160" et 180°
je recueillis la plus grande partie du produit. Au-dessus
de 480°, le thermomètre monta lentement jusque 200° et
j'obtins, entre ces limites de température, un distillât qui
se prit partiellement en cristaux par refroidissement. Je
n'ai observé aucune trace de décomposition.
Le liquide récolté entre 160° et i80° fut rectifié au
Lebel et me fournit une substance bouillant à 172° sous
7(35 millimètres de pression.
J'en ai fait une combustion.
ie',48'24 de sub>lance ont donné 08^5134 COj,
soit 1s%4002C, ou 9.44 "/„.
Calculé pour CXf^Rr, : 9.45 »/»•
Le dichlordibrométhylèiie que^ je désignerai aussi par
la lettre (3, est un liquide incolore, d'une odeur agréable,
ne s'altérant pas à la lumière. Il se solidifie à une tempé-
rature un peu inférieure à 0°. Sa densité à 17°, 5 est de
2.3753 ; son indice de réfraction à 16°, de 1 .5800.
( 524 )
La densité de vapeur est normale, comme le montrent
les données de l'expérience :
Poids
de
substance.
Température.
l'ie>sioii
barométrique
réduite à 0".
Volume.
Densité.
l'oids
moléculaire
déduit.
os^ossa
1860
doS^'-'.O
63«,ti
8.82
2o:i9
Poids moléculaire théorique : 254.2.
Quand on distille un mélange d'alcool et de fi dichlor-
dibrométhylène, celui-ci (orme avec l'alcool une vapeur
mixte, distillant vers 85°, analogue à celle que j'ai
observée pour le dibronifluorélhylène. Il n'est donc pas
avantageux de distiller directement le produit brut de la
réaction, pour enlever l'excès d'alcool quand on prépare
le (3 dichlordibrométhylène; il vaut mieux précipiter par
l'eau.
L'acide sulfurique concentré est sans action sur le
(3 dichlordibrométhylène. Quand on entraîne la vapeur de
ce dernier par un courant d'anhydride carbonique à tra-
vers un tube de verre chaulïé au rouge, il y a décompo-
sition partielle. Une partie de la substance se carbonise
en dégageant du brome et du chlore, une autre portion
se décompose en brome et en perchlorbenzol, mais la
majeure partie de l'éthylène chlorobromé passe sans alté-
ration. En répétant l'entraînement à plusieurs reprises,
on parvient à obtenir une transformation plus complète
en chlorure de Julin.
Le (î dichlordibrométhylène s'altère lentement au
contact de l'oxygène en se transformant en un chlorure
( 525 )
acide. J'ai l'occasion de revenir sur cette réaction dans
un mémoire que je présente à l'Académie.
J'ai isolé, par distillation du produit bouillant de 180" à
200°, un corps solide, distillant à 202° et fondant à 34°.
Cette substance était soluble dans l'alcool, l'éther et le
chloroforme. Un dosage de chlore et de brome m'a donné
les résultats suivants :
'|6^054l de substance ont donné 2g%4418 AgBr -4- AgCI.
Par la transformation en chlorure d'arçfent, j'ai constaté une perte
de poids de 0g'',4598, correspondant à Is^OilS AgBr, ou 08^,8284- Br,
soit 80.01 o/o et à 0k>,4989 ClAg, soit Os', 14238 Cl, ou 11.86 <>/..
Calculé pour CaBrsCi.
Trouvé.
Br 80.15"/,
80.01 7o
Cl 11.90"/,
II.8G70
Les cristaux obtenus étaient donc formés de tribrom-
chloréthylène. Ce corps a été obtenu parDenzel et, d'après
cet auteur, fond à 34° et bout à 203°-20o°.
Dans la réaction de la potasse alcoolique sur le fi
dichlortribrométhanc, il s'était donc formé, à côté du (3
dichlordibrométhylène, qui constitue le produit le plus
important de la réaction, une certaine quantité de tri-
bromchloréthylène.
Pour établir l'importance relative des deux transfor-
mations, j'ai dosé le chlorure et le bromure de potassium
formés dans la réaction. Ces corps furent dissous dans
l'eau et précipités dans une partie de cette solution par
le nitrate d'argent.
0e'-,8820 de AgCI -+■ AgBr m'ont donné par l'action
du chlore 0^',70d2 AgCI, ce qui correspond à 0^,7485
AgBr ou 0g%31854 Br, et à Os',033 Cl.
J'ai tiré de ces données numériques que , pour une
( 526 )
molécule de chlorure de potassium, il se formait
4.28 molécules de bromure. La transformation du [3 tri-
bromdichloréthane en p dichloréthylène est donc envi-
ron quatre fois plus importante que la transformation en
tribromchlorétliylène.
Je rappellerai que M. Henry (*) a observé un phénomène
analogue pour le dichloriodéthane et pour le chlorbromé-
thane. Par l'action de la potasse alcoolique, il a obtenu,
pour le premier, un mélange de quatre parties d'iodure
de potassium et d'une partie de chlorure; pour le second,
de trois parties de chlorure pour une de bromure.
Il est à remarquer qu'il n'y a pas de règle fixe déter-
minant la nature de l'hydracide qui se forme en quantité
la plus forte. Tantôt, comme pour le chlorbrométhane,
c'est l'halogène le plus actif qui est enlevé en proportion
la plus forte ; tantôt, au contraire, c'est l'hydracide déri-
vant de l'halogène le moins négatif qui se forme en quan-
tité prépondérante.
Le fi dibromdichloréthylène se combine au brome par
addition, mais cette réaction est très lente, ne réussit bien
qu'à la lumière et demande plusieurs jours pour être
complète; le mélange se transforme en une masse cris-
talline. Si l'on opère en solution chloroformique, il se
dépose de beaux et grands cristaux. Ceux-ci sont formés
de tétrabromdichloréthane, comme le prouve le dosage de
carbone que j'y ai fait.
1g%l250 de substance ont donné 06%2491 CO,,
soit 0e',06GI1 C, ou 5.88 "/„
Calculé pour QCI.nr^ : (: = 5.80''/„.
(*) Henry, Comptes rendus, t. XCVIII, pp. S18, 680.
( 527 )
Le tétrabrom(licl)loréthane est très peu soluble dans
l'alcool et l'éther, plus soluble dans le chloroforme; son
meilleur dissolvant est le benzol bouillant.
Quand on le chaulle, il commence déjà à dégager du
brome à 140° ; il fond à 191° avec décomposition impor-
tante. Si on le chaufle rapidement, il se décompose sans
se fondre.
J'ai soumis également le (3 dichlortribromélhane à l'ac-
tion réductrice de la poussière de zinc en présence de
l'alcool. La réduction est violente, elle s'accompagne
d'une très forte élévation de température et demande à
être conduite avec précaution. 11 faut refroidir le ballon
dans lequel on opère avec de l'eau glacée, ajouter le zinc
lentement et par très petites portions, et agiter constam-
ment.
Lorsque l'addition de zinc ne produisit plus d'éléva-
tion de température, j'arrêtai l'opération. Le liquide fut
tillré à la trompe et l'éthylène obtenu précipité par l'eau
acidulée par l'acide acétique et distillé après la dessic-
cation.
L'ébullition commença à 100° et tout le liquide passa
à la distillation au-dessous de 115°. En rectifiant au
Lebel, j'ai isolé un corps bouillant à 112°-115°, dont j'ai
fait une combustion.
0e',8t09 de substance ont donné 08%0o8 H^O,
soit Oer^OOGSl H, ou 0.8%,
et 0B%41 30 CO2, soit O»',! I U C, ou \ 5.87 «/„.
Calculé pour C.3rCU. Trouvé.
C 13.67"/. 13.87 »/o
H 0.57 "/o 0.57 »/„
Le zinc, en agissant sur le (3 dichlortribrométhane, ne
( d28 )
lui enlève donc que du brome. Cette conclusion a été
vérifiée par l'analyse du sel de zinc formé : c'était du
bromure de zinc pur.
Le dichlorbrométhylène que j'ai obtenu est liquide et
ne solidifie pas à -20". Sa densité est de 1.87(>4 à
17°,5; son indice de réfraction, de 15.190 à 16".
La densité de vapeur a été prise à 100".
l'oids
de
substaïKîe.
Température.
Pression
barométrique
réduite à 0°.
Volume.
Densité.
Poids
niol6iul:iire
déJuit
06'',0645
lOti»
15-1 ""°,7
t)2«,;i
.'>;>.4
ni. 6
1
Le dichlorbrométhylène se combine aisément au brome
pour régénérer le fi dichlortribrométhane. 11 ne se poly-
mérise pas et ne paraît pas s'altérer notablement à l'air.
La constitution des différents corps que j'ai obtenus
peut, me semble-t-il, se déduire avec quelque certitude
des considérations suivantes :
Le tribromdichloréthane peut avoir pour formule
1.
I
CCI.H
II.
cnr.,ci
I
CBiCin
m.
CCUBr
I
CBrJI
La formule III est celle du dichlortribrométhane de
Denzel.
La formule I doit être rejetée pour le corps que j'ai
obtenu, car un composé de cette formule devrait donner
du dibromchloréthvlène sous l'action du zinc.
( 559 )
Il s'agit donc d'établir si le (3 dichlortribrométhane
est identique ou non au produit de Denzel. Ce dernier
composé bout entre 215° et 220°, et ne se solidifie pas à
- 20°. Denzel ne signale pas de décomposition à l'ébul-
lition. Le (3 dichlortribrométhane se décompose au con-
traire et se solidifie à - 5° environ. Denzel, il est vrai,
déclare n'avoir pu obtenir un produit complètement pur.
Ledichlortribrométhylène doit se transformer par la po-
tasse alcoolique en dichlordibrométhylène dissymétrique,
tandis que le corps de la formule IF doit fournir le dichlor-
dibrométhylène symétrique : (XIBr = CCIBr. Denzel a
préparé l'éthylène dissymétrique en faisant agir la potasse
alcoolique sur 1' « dichlortribrométhane (*). Ce corps a
aussi été obtenu par Bourgoin (**) en traitant le tétra-
chlordibrométhane CCI3 - CCIBr.2 par l'aniline. Ces au-
teurs ne donnent ni l'un ni l'autre le point d'ébullition
evact du produit, mais, d'après Denzel, il serait voisin
de l\)o\
Le dichlordibrométhylène de Denzel doit donner par
addition au brome un tétrabromdichloréthane de la for-
mule
CCUBf
CBi-j.
Cette substance a été obtenue par cet auteur en faisant
agir le brome sur le composé GHojBr-CHCl- (***). Ce tétra-
bromdibrométhylène ne commence à se décomposer qu'à
175° et fond à 180° avec décomposition.
(") Denzel, Liebig's Annalen, t. GXGV, p. 208.
(**) Bourgoin, Bulletin de la Société chimique, t. XXIV, p. 116.
('") Denzel, Berichte, t. XII, p. 2i207.
56
( 530 )
Le dichlordibrométhylène que j'ai préparé bout à
17^° ; il donne avec le brome un produit d'addition qui
commence à dégager du brome à 140" et qui fond à 19i°.
Il me paraît donc plus que probable que je me suis
trouvé en présence d'un composé différent de celui de
Denzel et qui ne peut être alors que le dichlordibrom-
éthylène symétrique.
Le (3 dichlortribrométhane aurait donc pour formule
CBr.Cl
I
CHBrCI.
11 doit donner par l'action du zinc un dichlorbrométhy-
lène de la formule
CBrCl
II
CHCI,
tandis que l'a dichlortribrométhane doit donner
CBrH
II
CCI2.
Ce dernier a été décrit également par Denzel, qui
l'obtint par l'action de la potasse alcoolique sur le dichlor-
dibrométhane dissymétrique CHCK2 - CHBra (*). Il bout à
II40-II50 et possède à 16° une densité de 1.906.
Le produit que j'ai obtenu a à peu près le même point
d'ébullition, mais sa densité à 17", 5 est de 1.8764. Une
différence de trois unités de la deuxième décimale ne peut
être due à une différence de température de 1",5.
(*) Denzel, loc. cit., p. 208.
( 53i )
L'ensemble de toutes ces différences me paraît consti-
tuer une preuve suffisante pour donner au tribromdichlor-
éthane que j'ai obtenu la formule II :
CBpjCI
I
CIlBrCl
Le pentachlorure d'antimoine ne provoquerait donc
pas de transposition du brome en agissant sur le tribrom-
éthylène, comme il le fait à l'égard du dibrométhylène
symétrique (*).
Les corps que je viens de décrire dans ce travail
auraient donc pour formule
(:Br,CI CBiCl CBrCl CBr.Cl
I II I I
CHBr(J CBrCl CHCI CBr^CI
Je me propose de vérifier encore, par de nouvelles
expériences, l'exactitude de ces formules.
Gand, le 1" novembre 1898.
(*) Pendant l'impression de ce travail a paru un mémoire de
K. Klbs et J. Newmann (*), dans lequel ces auteurs donnent le résultat
de leurs recherches sur l'action du chlore sur le tritrométhylène.
Ils n'ont pas constaté, comme on aurait pu le croire, l'addition
d'une molécule de chlore, mais, au contraire, une substitution de
l'hydrogène par le chlore, avec formation de tribromchloréthylène.
Le pentachlorure de phosphore produit le même phénomène. En
même temps, une partie du brome est remplacée par du chlore. Il est
assez curieux d'observer que le pentachlorure d'antimoine, qui joue
en général facilement le rôle de substituant, ne se comporte pas
comme le chlore ou le pentachlorure de phosphore dans la réaction
que j'ai décrite dans la présente communication.
(') Journal Jur prakl. Cliein., Bd. LVIII, p. 245.
( 532 )
Contribution à Vétude de l'oxydation des éthi/lènes halo-
gènes; par Fréd. Swarts, répétiteur de chimie générale
à l'Université de Gand.
Il y a plusieurs années que Demole (*) avait reconnu
que certains étliylénes chlorés et bromes possèdent la
remarquable propriété de s'oxyder à l'air en donnant
naissance soit à des chlorures, soit à des bromures
acides. Il avait observé ce phénomène notamment pour
le dibrométhylène dissymétrique et le tribrométhylène,
(jui donnent respectivement le bromure de bromacétyle
et le bromure de dibromacétyle. Le chlorbrométhylène
dissymétrique CClBr = CH2, auquel Demole avait assigné
erronément la formule symétrique, se transforme en un
mélange de bromure de chloracétyle et de chlorure de
bromacétyle ; ce dernier est le produit le plus important
de la réaction. Il se manifeste dans ces réactions un
déplacement d'un des atomes d'halogènes sur l'atome de
carbone voisin, la double soudure se défait et l'oxygène
se fixe sur l'atome de carbone dénudé. Il est à remarquer
que l'hydrogène ne subit pas de transposition dans
cette réaction. Demole a en même temps observé une
polymérisation partielle de l'éthylène, dont l'importance
variait avec les conditions de l'expérience.
J'ai cru intéressant d'étudier l'oxydation de quelques
éthylènes fluobromés que j'ai obtenus dans le cours de
mes recherches sur les composés organiques fluorés. J'ai
(*) Demole, Berichte, t. XI, pp. 316 et 1307.
( 535 )
également essayé d'oxyder l'éthylène percliloré, l'élhy-
lène peibromé, le dichlordibrométliylène symétrique et le
dibrométhylène symétrique. Je soumets le résultat de
mes investigations à l'appréciation de l'Académie.
Oxydation du dibronidifluoréthylène.
J'ai déjà eu l'occasion de signaler l'oxydation très facile
par l'oxygène du dibronidifluoréthylène symétrique, oxy-
dation qui m'a permis d'obtenir l'acide dibromfluoracé-
tique {*).
J'ai repris l'étude de ce phénomène, afin de vérifier si,
à côté du fluorure de dibromfluoracétyle, il ne se pro-
duisait pas de bromure de difluorbromacétyle.
J'ai introduit dans un ballon muni d'un réfrigérant
ascendant |18 grammes de dibromdifluoréthylène et
10 grammes d'alcool, et j'ai fait barboter dans le mélange
un courant d'oxygène bien sec. Il ne se produisit pas
d'élévation notable de la température; l'oxygène fut
beaucoup moins bien absorbé que par le dibromdifluor-
éthylène pur. Pour activer la réaction, j'ai chauffé le
ballon à 40" environ. II se condensa dans le réfrigérant
un liquide extrêmement volatil, que j'ai reconnu plus tard
être de l'aldéhyde, provenant de l'oxydation de l'alcool.
J'ai constaté en même temps un dégagement abondant
d'acide fluorhydrique, se traduisant par une corrosion
énergique du verre.
Au bout de six heures, j'ai interrompu le courant
d'oxygène et j'ai secoué le produit de la réaction avec de
(*) F. SwARTS, Sur l'acide dibrom fluor acéliqne. (Bull, de l'Acad.
Rov. DE Belgique, 3^ sér., t. XXXV, p. 849.)
( 534 )
l'eau, pour enlever l'excès d'alcool. Le liquide précipité
fut séché sur du chlorure de calcium et distillé.
Le thermomètre s'éleva rapidement de GO" à 170";
par rectitications répétées, je ne parvins à séparer qu'un
peu de dibromdifluorélhylène inaltéré et du dihromfluor-
acétate d'éthyle. Le thermomètre ne se fixa jamais aux
environs de 110", température voisine du point d'ébullilion
probable du difluorbromacétate d'étbyle. Je n'ai pu sépa-
rer, pendant l'ascension rapide du thermomètre, que
0^,4 de produit bouillant entre 110° et 120°, contre
20 grammes de dibromfluoracétate d'éthyle pur.
L'oxydation du dibromdiiluoréthylène symétrique ne
fournit donc qu'un fluorure acide.
Oxydation du tribromfluoréllujlène
CDi\,
H
CBrFI.
Le tribromfluoréthylène se laisse oxyder par l'oxygène,
mais moins facilement que le dibromdiiluoréthylène.
11 se produit une légère élévation de température au
début de l'expérience, mais après peu de temps le liquide
revient à la température ordinaire. L'oxydation marche
beaucoup mieux quand on opère à 100". Pour observer
les progrès de la transformation, je prélevais de temps à
autre une petite portion du liquide que je versais dans
l'eau, afin d'établir la quantité relative de bromure ou
de fluorure acide formé.
Pendant l'oxydation, le liquide brunit fortement et
subit une destruction partielle avecdégagement de vapeurs
de brome; celui-ci ne disparaît pas complètement par
refroidissement.
( 555 )
Après seize heures, la transformation était presque com-
plète : en secouant avec de l'eau, je pus constater la for-
mation d'un corps cristallin, insoluble dans l'eau, mais
soluble dans l'éther. Le courant d'oxygène fut interrompu
et je distillai le produit de la réaction.
J'ai obtenu ainsi un liquide bouillant entre 130° et
160°, qui fumait fortement à l'air en dégageant de l'acide
bromhydrique et fluorhydrique.
Il restait dans le ballon un résidu peu important qui
se décomposa assez facilement quand j'essayai de le
distiller et que j'ai traité par l'eau. J'ai séparé ainsi le
composé solide, cristallin, mentionné plus haut, qui fut
dissous dans l'éther. Par cristallisation, j'obtins de belles
aiguilles blanches, d'une odeur camphrée mais irritante,
qui fondaient à 176° et se décomposaient à une tempé-
rature peu supérieure. Toutes ces propriétés sont celles
du pentabromfluoréthane, dont la présence s'explique
aisément par le fait que le tribrométhylène subit une
décomposition partielle pendant l'oxydation, avec pro-
duction de brome, dont une partie est fixée par le tri-
brométhylène et le transforme en pentabromfluoréthane.
Le liquide distillé fut éthérifîé par l'alcool absolu. Il
se dégagea de l'acide fluorhydrique. En précipitant par
l'eau, j'ai séparé un liquide très dense, qui fut séché et
distillé. La distillation commença à 145°; le thermomètre
monta lentement jusque 170°, température à laquelle il
semaintint pendantia plus grande durée de la distillation,
puis s'éleva lentement jusque 225°. Au-dessus de 200°,
j'observai une décomposition partielle, avec dégagement
de brome et d'acide bromhydrique.
En rectifiant au Lebel le liquide bouillant au-dessous
de 180°, j'ai séparé un peu de tribromfluoréthylène inal-
( 550 )
téré et un corps bouillant à 174", 5, que toutes ses pro-
priétés ainsi qu'un dosage de carbone et d'hydrogène
m'ont démontré être du dibromfluoracétale d'éthyle.
Le distillât recueilli au-dessus de 180° m'a fourni
d'abord du dibromfluoracétate d'éthyle, ensuite un liquide
distillant avec légère décomposition à 2125° et qui ne
contenait pas de fluor. Un dosage de brome m'a démon-
tré que je me trouvais en présence du tribromacétate
d'éthyle, dont l'existence était à prévoir en raison du
dégagement d'acide fluorhydriquc qui avait accompagné
l'éthérificalion.
J'ai obtenu environ cinq fois plus de dibromfluoracé-
tate d'éthyle que de tribromacétate; il ne fut évidemment
pas tenu compte des petites quantités de liquide à point
d'ébullition intermédiaire.
La production du bromure acide est donc le phéno-
mène principal dans ce processus d'oxydation.
Oxydation du dibromfluorélhylène
Ce corps, comme j'ai déjà eu l'occasion de le signa-
ler (*), s'oxyde facilement à l'air.
1(X) grammes de dibromfluoréthylène furent oxydés
dans un appareil à reflux par un courant lent d'oxygène
sec. La fixation de l'oxydation est accompagnée au début
d'une forte élévation de température. Le liquide s'évapore
et l'oxydation de la vapeur se produit beaucoup plus éner-
giquement que celle du liquide; aussi l'atmosphère du
(*) F. SwARTS, Sur quelques dérivés (luobromés en C^ (première
communication). (Bull, de l'Acad. roy. de Belgique, 3° sér.,
t. XXXIII. p. 439.)
( '^37 )
ballon est-elle plus chaude que. le liquide lui-même. Au
commencement de rexpérience, l'absorption de l'oxy-
gène est complète pour un courant de ! centimètre cube
par seconde.
A la fin de l'opération, l'oxydation est beaucoup plus
lente, et l'expérience m'ayant prouvé que c'est surtout à
l'état de vapeur que le dibromlluoréthylène s'oxyde, j'ai
chauffé jusqu'à ébnllition tranquille pour achever la réac-
tion. Je n'ai observé aucune destruction pendant la durée
de l'expérience.
Après deux jours, la transformation était complète;
une prise d'essai se dissolvait complètement dans l'eau.
Le produit de la réaction lut soumis à la distillation.
L'ébullition commença à 1 lo" et le thermomètre se
maintint pendant presque toute la durée de l'opération
entre 115' et 120", puis monta lentement à 125", enfin
rapidement jusqu'à KJO". Entre 125" et IGO", je n'ai
recueilli ([u'une très faible quantité de substance. J'ai
pu distiller jusqu'à la dernière goutte de liquide sans
observer de décomposition.
J'avais obtenu environ HO grammes de produit bouillant
de 115" à 125". En le rectifiant au Lebel à quatre boules,
j'ai isolé 70 grammes d'un corps ayant un point d'ébulli-
tion absolument fixe de 116", plus une petite portion de
liquide distillant de 115" à 125".
Le composé bouillant à 1 16" fume à l'air en dégageant
de l'acide bromhydrique ; il réagit avec violence sur l'eau.
J'y ai fait un dosage de carbone et d'hydrogène.
O6',9o05 de substance ont donné 06%0592 H^O,
soil O8',00436o H, ou 0 45 »/„,
et 0s%3818 CO2, soit 06M04I5 C, ou 10.93 "/„.
Ces teneurs en carbone et hydrogène correspondent à
( S3S )
celles d'un corps de la formule C^Br^FlHO, qui contien-
drait
c H
10.91°/. 0.45 Vo
Cette formule appartient aussi bien au fluorure de
dibromacélyle qu'au bromure de fluorbromacélyle. Pour
déterminer la quantité de brome contenu sous forme de
bromure acide, j'ai détruit la substance par l'eau glacée
et j'ai titré l'acide bromhydrique formé par la méthode
de Volhardt.
2g',5244 de substance ont précipilé I03'=%2d d'AgNOj 7,0,
correspondant à Oe^S-235 Br, ou 35 86"/..-
Le bromure de fluorbromacétyle contiendrait 56.3 %
de brome sous forme de bromure acide.
Le liquide bouillant à 116° peut être considéré comme
du bromure de fluorbromacétyle presque complètement
pur. Traité par l'eau, il donne une solution aqueuse dans
laquelle l'acétate de calcium ne produit d'ailleurs qu'une
légère opalescence. Il ne contient donc que des traces de
fluorure de dibromacétyle.
J'ai éthérifîé ce bromure acide par l'alcool absolu : j'ai
obtenu ainsi du bromure d'éthyle et un éther bouillant
à 150"; oO grammes de bromure acide m'ont donné
40 grammes d'éther, soit un rendement théorique.
L'analyse de cet éther m'a donné les résultats sui-
vants :
1K%012I de substance ont fourni Ok^^TS^ C02,soit 0s^03036H,
ou 3.3 "/o,
et 0g%9375 CO2, soit 0?%2872 C, ou 25 8 »/..
Calculé pour CFlBrFl - CO^ - CaHs.
C 25 94 "/„
H 3.24 7,
( 559 )
La densité de vapeur, déterminée par le procédé
d'Hofmann à la température de 184°, a confirmé les
données analytiques.
Poids
de
substance.
Température.
Pression
b.irniiiélriqae
réiluitpàO".
Volume.
Densilé.
Poids
moléculaire
déduit.
0gs(t575
184°
146n"°,5
62", 1
6.^23
179.4
Poids moléculaire théorique de CHBrFl - CO^C^H.; :
184.6.
11 se forme donc du fluorbromacétate d'élhyle.
Les produits de queue de la distillation du bromure de
lluorbromacétyle m'ont également donné par éthérifica-
tion le fluorbromacétate d'éthylc ainsi qu'une très petite
quantité d'un autre éther, bouillant de 194° à 200°, ne
contenant pas de fluor et se transformant par l'ammo-
niaque en une amide fondant à 156°. Tous ces caractères
permettent d'identifier cet éther avec le dibromacétate
d'éthyle. Dans l'éthérification, il se dégageait de l'acide
fluorhydrique; la formation de l'éther dibromacélique
doit être attribuée à l'existence d'un peu de fluorure de
dibromacétyle dans les produits d'oxydation du dibrom-
fluoréthylène. Ce fluorure doit avoir un point d'ébuUi-
tion très voisin du bromure de fluorbromacétyie.
Quant au liquide qui distille, en très minime quantité
il est vrai, entre 125° et 150°, il est constitué probable-
ment par de l'acide fluorbromacétique, provenant de
l'altération du bromure acide à l'air humide.
Le dibromfluorbromacétyle se transforme donc presque
( 540 )
exclusivement en bromure de fluorbromacétyle ; la for-
mation de fluorure de dibromacétyle est tout à fait insi-
gnifiante; je n'ai en effet pas obtenu 2 grammes de
dibromacétate d'éthyle aux dépens de 100 grammes de
dibromfluoréthylène.
Dans le travail cité plus haut, dans lequel j'ai décrit le
dibromtluorétbylène, j'avais annoncé que ce corps s'oxyde
à l'air : la corrosion du verre, le dégagement d'acide
fluorhydrique que j'avais observés, m'avaient fait croire à
la production d'une quantité importante d'un fluorure
acide. Certes, ce dernier se produit, mais l'étude plus
approfondie du phénomène m'a montré que je m'étais
trompé sur l'importance de la transformation en fluorure
acide; celle-ci n'est que secondaire au point de vue
quantitatif.
Je me suis demandé si l'élhylène perchloré et per-
bromé, que Demole déclarait réfractaires à l'oxydation, le
sont bien autant que cet auteur le croyait. L'oxydabilité
facile du dibromdifluoréthylène et du tribromfluoréthylène
m'avaient en effet prouvé que les éthylènes persubstitués
sont capables de fixer l'oxygène.
Oxydation du perchloréthyléne.
Ce corps ne s'altère pas à l'air, mais on sait que
l'anhydride sulfurique le transforme en chlorure de tri-
chloracétyle à 130". Il était donc possible que l'oxygène
se fixât directement sur l'éthylène perchloré.
Au lieu d'oxyder par l'oxygène, j'ai essayé d'oxyder par
l'ozone.
Celui-ci était produit dans un ozonisateur de Siemens
( Ui )
et était envoyé, à l'aide de tubes rodés aux joints, dans le
ballon contenant l'étliylène à oxyder.
J'ai rapidement reconnu par une expérience prélimi-
naire que le bichlorure de carbone se transformait
partiellement, même à froid, et que le gaz sortant de
l'appareil avait une réaction acide et possédait l'odeur
irritante d'un chlorure acide.
L'oxydation du perchloréthylène par l'oxygène ozonisé
est cependant très lente, même à chaud, et je ne suis
jamais parvenu qu'à obtenir une transformation incom-
plète en chlorure acide, même en maintenant le courant
d'ozone pendant huit jours.
Comme le chlorure de trichloracétyle qui devait se
produire a à peu près le même point d'ébuUition que
l'éthylène perchloré, je ne pouvais espérer séparer les
deux corps par distillation.
Pour identifier le produit d'oxydation, j'ai traité par
une solution concentrée d'ammoniaque dans l'eau.
L'éthylène perchloré en excès fut séparé à l'entonnoir à
robinet et la solution ammoniacale secouée avec de
l'éther. Ce dernier fut décanté, séché et évaporé. Il se
déposa des cristaux incolores qui furent recristallisés du
chloroforme bouillant. J'obtins ainsi des lamelles fondant
à 141°, point de fusion de la irichloracétamide. Un dosage
d'azote a confirmé l'identité de ces deux corps.
06^357 de substance ont donné 06'',414NH3,
soit 0e^0538N, ou 9.5»/,.
Calculé pour CCIs - CONIL, : 9.55 •/,.
En opérant à 100° avec 15 grammes de perchloréthylène
et en faisant passer 25 litres d'oxygène ozonisé à raison
d'une bulle par seconde, j'ai obtenu environ Os'-,7 de
trichloracétamide.
( 542 )
Dans une autre expérience, faite à froid, j'ai titré
acidimétriqueinent le chlorure de trichloracétyle formé.
S^SS de perchloréthylène furent mis en expérience ; j'y
fis passer 20 litres d'oxygène ozonisé. Il se forma 0^',152
de chlorure de trichloracétyle.
Le perchloréthylène est donc susceptible d'oxydation
par l'ozone.
Je ferai remarquer incidemment que cette réaction
constitue une voie de synthèse totale assez simple de
l'acide acétique, par la succession des transformations
suivantes :
C -4- S »^- CSi »-*■ CCl^ B-^ CîCIi Br* CCI3 . COCl »* CCI3 . CO . OH
!^CH3-C0.0H.
Oxydation du tétrabrométhylène.
Ce corps a été obtenu par le procédé de Lennox (*),
en faisant agir la potasse alcoolique sur une solution de
pentabrométhane dans l'alcool. Le pentabrométhane a
été i)réparé par fixation du brome sur le tribrométhylène.
L'oxydation a été provoquée par l'ozone.
L'éthylène perbromé étant solide à la température
ordinaire, j'ai effectué l'oxydation à chaud, en opérant à
une température un peu inférieure à la température de
sublimation de l'éthylène.
J'ai observé également que le gaz sortant de l'appareil
avait une réaction acide et répandait des fumées d'acide
bromhydrique. L'oxydation était cependant beaucoup
moins rapide que celle du perchloréthylène.
Après avoir maintenu le courant d'oxygène ozonisé
(*) Lennox, Annalen der Chemie und Pharmacie, t. CXXII, p. 126.
( 8*3 )
pendant un jour, j'ai reconnu que l'éthylène perbromé
se prenait en cristaux par refroidissement, mais que
ceux-ci étaient visiblement humectés d'un liquide. En
continuant pendant plusieurs jours à faire passer l'ozone,
je suis parvenu à augmenter la quantité de liquide, mais
pas assez pour pouvoir le séparer des cristaux.
Ceux-ci furent triturés avec une solution d'ammo-
niaque, et l'amide qui avait dû se produire fut séparée
de la même manière que la trichloracétamide. J'ai
obtenu ainsi un corps fondant à 120" et présentant tous les
caractères de la tribromacétamide. Je n'ai cependant pu
en recueillir plus de 0^%1, soit une quantité trop faible
pour l'analyser.
La possibilité d'oxyder le perbrométhylène et de le
transformer en bromure de tribromacétyle par l'oxygène
n'en est pas moins démontrée.
Oxydation du dic/ihrdibrométhi/lène symétrique.
Le dichlordibrométhylène symétrique, décrit dans
une autre communication que j'ai l'honneur d'adresser
à l'Académie, a également été soumis à des essais
d'oxydation. Je signale dans ce travail, qui a surtout été
fait dans le but d'obtenir cet éthylène chlorobromé afin
de pouvoir le soumettre à l'action de l'oxygène, que ce
corps s'altère lentement à l'air en se transformant en un
chlorure ou en un bromure acide.
Cette oxydation à l'air est cependant extrêmement
faible et lente, même à chaud. Aussi ai- je préféré employer
l'ozone pour fixer l'oxygène.
Malgré l'emploi d'un courant d'oxygène ozonisé main-
tenu pendant huit jours et tout en opérant à la tempéra-
( 544 )
lure (l'ébullition de l'élhylène, je n'ai obtenu qu'une
transformation très incomplète.
J'ai transformé le produit d'oxydation en amide, qui
fut purifiée par cristallisation. Cette amide était insoluble
dans l'eau, très soluble dans l'éther et l'alcool, peu
soluble dans le chloroforme, presque insoluble dans le
tétrachlorure de carbone froid. Ce dernier dissolvant m'a
servi à obtenir un produit pur, qui fondait à 127°. Tous
ces caractères sont ceux de la chlordibromacétamide.
J'avais très peu de produit à ma disposition et les
purifications répétées m'en ont fait perdre assez pour
qu'il ne m'en restât plus une quantité sulfisante pour faire
une analyse de contrôle. Mais la constance du point de
fusion dans des produits de cristallisations successives,
m'a assuré de la pureté de la substance.
Dans une autre expérience faite à froid et en présence
de l'eau, j'ai déterminé la quantité de chlorure acide
produite.
15 grammes de dibromdichloréthylène furent oxy-
dés à froid sous une couche d'eau, à l'aide d'un courant
d'oxygène ozonisé maintenu pendant quinze jours. Ils
m'ont fourni Oe%86 de chlorure acide. On voit par là
que la transformation est extrêmement lente.
Le dichlordibrométhylène symétrique se comporte donc
comme le dilUiordibrométhylène symétrique : c'est l'ha-
logène le plus actif qui reste combiné au groupement
C = 0.
Il résulte de l'ensemble de ces expériences que les
cinq éthylènes persubslitués que j'ai soumis à l'oxydation
se laissent tous transformer soit par l'oxygène, soit par
l'ozone, avec plus ou moins de facilité.
( 345 )
Oxi/dalion du dibromélhylène stjmélrique
CHBr = CHBr.
J'ai soumis l'éthylène bibromé symétrique à l'action
oxydante de l'ozone, ce corps ne s'altéranl pas à l'air.
L'ozone oxyde le dibrométbylène à chaud, mais il se pro-
duit une décomposition importante, avec dégagement
abondant d'acide bromhydrique et résiniiicalion partielle
du liquide. Dans ces conditions, il m'était difficile de
tirer des conclusions bien sûres de la marche de l'oxy-
dation.
Celle-ci est très lente, à l'enconlre de ce qui se pré-
sente pour le dibrométbylène dissymétrique. Après avoir
maintenu le courant d'oxygène ozonisé pendant huit
jours, j'ai arrêté l'opération.
Le produit de la réaction fumait fortement à l'air, mais
possédait en môme temps une odeur manifeste d'aldé-
hyde bromée. Sa composition est fort complexe.
Je ne m'étendrai pas sur les difficultés que j'ai rencon-
trées dans la séparation des différents produits que je
suis parvenu à isoler. La réaction est surtout une réaction
destructive; le composé principal que l'on retrouve après
l'oxydation est le tétrabrométhane dissymélrique Œv-^
- CH^Br, bouillant sans altération à 255" sous la pression
atmosphérique et que j'ai identifié par analyse. J'y ai
trouvé :
Calculé pour CjH2Bi'4.
C 7.1 3 »/„ ^ 6.!)9 •/..
H O.G2''/„ 0.42 "/„
Br 92.27 "/o 92.51 "/.
S"* SÉRIE, TOME XXXVI. 37
( 546 )
A côté de ce corps, j'ai obtenu une petite quantité
d'un acide bouillant vers 225° et dont le sel de plomb
est bien soluble dans l'eau. Le point d'ébullition, les
caractères du sel de plomb m'ont fait conclure que c'est
de l'acide dibromacétique.
La formation de cet acide s'explique par le fait que
dans l'oxydation du dibrométhylène symétrique il se pro-
duit aussi une aldéhyde bromée, bouillant vers 145°, très
soluble dans l'eau, dont on peut la précipiter par l'acide
sulfurique concentré. La dibromaldéhyde bout à 142°,
En même temps se forme du bromure de bromacétyle,
mais en quantité si minime que j'ai dîi me borner à le
caractériser qualitativement.
Il résulte néanmoins de ce que je viens d'exposer qu'on
peut oxyder le dibrométhylène symétrique, que celui-ci
donne comme produits d'oxydation du bromure de bro-
macétyle et de l'aldéhyde dibromée, qu'une oxydation
ultérieure transforme en acide dibromacétique.
C'est probablement à la présence de l'aldéhyde bromée
qu'est due la résinification pendant l'oxydation.
Dans tous les phénomènes d'oxydation que j'ai étudiés,
je n'ai pas observé de polymérisation notable de l'éthy-
lène mis en œuvre. J'ai tout au plus constaté, en oxydant
le dibromdilluoréthylène et le tribromfluoréthylène, qu'il
se formait une très minime quantité d'un composé cris-
tallin, si peu abondant que je n'ai pu le recueillir et qui
est peut-être un polymère.
Pour interpréter l'oxydation des éthylènes halogènes,
Demole a admis qu'il se produisait un départ d'hydracide,
provoquant la formation d'un corps instable de la forme
CHR = C =. Celui-ci absorberait l'oxygène de l'air en
( ^^7 )
donnant un dérivé
CHR
II
C=0
qui fixerait ensuite l'hydracide primitivement séparé pour
donner soit un chlorure, soit un bromure acide.
Pour cet auteur, il serait aussi possible qu'il se formai
de l'acide hypochloreux ou hypobromeux aux dépens de
l'hydracide enlevé et de l'oxygène. Cet acide hypobro-
meux se décomposerait par la chaleur dégagée dans la
réaction en brome, oxygène et eau. Demole explique ainsi
la formation du tétrabrométhane dans l'oxydation du tri-
brométhylène.
A l'appui de sa théorie, qui repose sur l'hypothèse do
l'enlèvement préalable de l'hydracide, il invoque le fait
que les éthylènes persubstitués ne s'oxydent pas, qu'il
faut donc la présence des éléments de l'hydracide dans
la molécule.
G. Wagner (*), dans une étude sur l'oxydation des
composés non saturés, a émis une autre théorie. Il n'ad-
met pas l'oxydation directe de l'éthylène avec formation
d'un oxyde d'éthylène, car, dit-il, on ne conçoit pas
pourquoi on ne retrouverait pas une certaine quantité de
ce dernier. En outre, si l'oxydation était due à la pro-
duction d'un oxyde d'éthylène, qui se transformerait par
tautomérie, on ne comprend pas pourquoi les éthylènes
persubstitués ne se laissent pas oxyder. Pour lui, le rôle
important appartient à l'hydrogène : c'est celui-ci qui est
oxydable et c'est pour cela que les_^ seuls éthylènes qui se
(*) Wagner, Bericlile, l. XXI, p. 3356.
( 548 )
laissent oxyder sont ceux qui contiennent encore de
l'hydrogène.
11 paraît à ce chimiste que l'éthylène est par lui-même
incapable de fixer l'oxygène, mais il tend à se combi-
ner au brome et à l'hydroxyle. En raison de cette ten-
dance et de l'affinité de l'hydrogène pour l'oxygène, une
molécule d'éthylène bibromé, par exemple, enlèverait à
l'autre du brome et de l'hydrogène, et, en présence de
l'oxygène, fixerait les éléments de l'acide hypobromeux,
pour donner de l'alcool tribromé. Celui-ci se décompose-
rait en bromure de bromacétyle et en acide bromhydrique
qui serait fixé par la molécule d'acétylène bromée pro-
duite dans la première phase de la réaction.
CH, CH„
CH^Br
CH
Cllç>Br CHî
H -f- 0 + Il
=2 1
-+- '"
= 1 -+- u
CBi%. CBr,
CBr, -
OH CBr
BrC = 0 CBr
Les deux hypothèses de Demole et de Wagner ont un
point commun : elles font intervenir toutes deux la for-
mation d'acide bromhydrique, peut-être d'acide hypo-
bromeux, et sont basées sur le fait que les éthylènes
persubstitués ne se laissent pas oxyder.
Elles tombent toutes deux devant l'observation que les
éthylènes perhalogénés se laissent oxyder comme les
autres. Il y a déjà longtemps, avant même les recherches
de Wagner, M, Henry (*), s'occupant de l'oxydation
des éthylènes, avait mentionné l'oxydabilité d'un com-
posé éthylénique, l'éther trichlorvinylique
CCIs
11
CCI — OCjHs.
(*) Henry, Berichte, t. XII, p. 1839.
( 549 )
Or ce corps a les plus grandes analogies avec l'éthy-
lène perchloré, et pour expliquer son oxydation, il serait
difficile d'invoquer la formation d'acide chlorhydrique ou
d'acide liypochloreux.
Pour expliquer l'oxydation des éthylènès, M. Henry
admit qu'il y a (ixation directe d'oxygène avec production
d'un oxyde d'éthylène instable qui se transforme par tau-
tomérie en chlorure acide.
Il me parait que c'est là l'explication la plus plausible.
Nous connaissons déjà plusieurs phénomènes du même
genre, dans lesquels un oxyde d'éthylène se transforme en
un corps contenant le groupement C = 0 ; je signalerai la
production d'aldéhyde par déshydratation d'un glycol, la
transposition tautomérique des pinacolines. Pour ces
dernières, il est souvent difficile de dire si l'on se trouve
en présence d'une acétone ou d'un oxyde éthylénique.
Dans le cas des éthylènès halogènes, l'apparition de la
fonction si caractéristique du chlorure acide permet de
trancher immédiatement la question.
L'hypothèse qui consiste à admettre la formation d'un
oxyde d'éthylène rendrait d'abord mieux compte du fait
que le perchlorélhylène, l'éthylène tétrabromé et le
dichlordibrométhylène s'oxydent moins facilement que
le dilluordibrométhylène et le tribromtluoréthylène. Si
l'oxydation est un simple phénomène d'addition suivi
d'une transposition intramoléculaire, on comprend facile-
ment que les éthylènès dont le pouvoir de se combiner
par addition est peu marqué, doivent s'oxyder plus
difficilement que les autres. Or le perchloréthylène ne
se chlorure qu'à la lumière solaire, le perbrométhylène se
combine difficilement au brome, de même que le dichlor-
dibrométhylène. Au contraire, la fixation du brome'sur
( 550 )
le difluordibrométhylène et sur le tribromtluoréthylène
est des plus faciles. Il y a analogie complète entre la
façon dont les éthylènes substitués se comportent vis-
à-vis des halogènes et vis-à-vis de l'oxygène.
On pourrait, il est vrai, répondre que l'éthylène lui-
même se combine facilement aux halogènes, mais n'est
pas susceptible de fixer directement l'oxygène. Il en est
de môme pour beaucoup de composés non saturés. Cette
contradiction s'explique peut-être par les considérations
suivantes.
La transformation de l'oxyde d'éthylène formé doit se
faire d'autant plus facilement que, dan^ le cas des éthy-
lènes halogènes, l'oxygène n'a pas à s'échanger contre un
groupement à caractère plutôt positif, comme l'hydrogène
ou le méthyle, ainsi que cela a lieu dans les transpositions
énoliques de^ pinacolines, mais au contraire contre un
élément d'allures fortement négatives, comme le chlore,
le brome ou le fluor.
Le fait bien probable que l'oxygène s'échange de pré-
férence contre un élément négatif, nous expliquerait
pourquoi le dibrométhylène symétrique donne de l'aldé-
hyde dibromée par oxydation.
CBrH CBrH CBi\,H
I -+-0=1 )0 = ' ' •
CBrH CBrH ^ HC - 0
J'ai obtenu aussi du bromure de bromacétyle, il est
vrai, mais en quantité moins forte que l'acide dibroma-
cétique. L'échange se produit dans les deux sens, mais
avec prédominance de la transposition du brome avec
l'oxygène. J'ai d'ailleurs fait remarquer au début de ce
travail que, dans les expériences de Demole, celui-ci n'a
pas constaté non plus le déplacement de l'atome d'hydro-
gène.
( SEil )
D'autre part, l'expérience prouve que le chaînon
C-O-(CiBrFl) représente un groupement très stable qui
tend à se produire dans beaucoup de réactions chi-
miques.
Cette tendance est contrebalancée, dans l'oxydation du
dibrométhylène symétrique, par celle de l'oxygène à
s'échanger de préférence contre le brome plutôt que
contre l'hydrogène. Ceci nous explique pourquoi le
dibrométhylène symétrique s'oxyde si dilficilement,
tandis que le composé dissymétrique est oxydé avec la
plus grande facilité.
L'explication de M. Henry nous rend donc, mieux que
les autres, compte de la différence d'allures entre les
différents éthylènes halogènes, et c'est un argument de
plus en sa faveur.
Wagner invoque contre l'hypothèse de la formation
d'un oxyde d'éthylène instable le fait qu'on ne retrouve
pas cet oxyde dans les produits de la réaction. On peut
retourner cet argument contre lui, car on ne trouve pas
non plus d'acétylène brome ou de
CBrH,
CBr.OFI
Si nous admettons comme probable que l'oxygène
s'échange plus facilement contre un halogène que contre
l'hydrogène, nous trouvons dans la transformation du
dibromfluoréthylène en bromure de fluorbromacétyle un
argument nouveau en faveur de la formule
CBr. ^
CHFI
que j'ai donnée à ce corps.
( 5d2 )
Des deux formules possibles :
CBps CBrFI
Il il
CHFl CBrH,
la première explique la transformation presque exclu-
sive, et par conséquent la plus facile, en bromure de
fluorbromacétyle, par l'échange de l'oxygène contre le
brome, tandis que la seconde impliquerait une transpo-
sition entre l'oxygène et l'hydrogène.
On peut se demander s'il existe une règle déterminant
la nature de l'halogène qui prend la place de l'oxygène
dans l'oxydation des éthylènes halogènes mixtes.
Il semble que ce soit l'halogène le moins actif qui
s'échange de préférence contre l'oxygène. Il en est ainsi
pour les deux éthylènes symétriques que j'ai étudiés :
/CBrCl CBr.Cl /C— BrFI CBr,
0< I = I 0( I =1
\CBrCI 0=C-Ci \C-Br.FI 0 = (:.FI
Il en est de même pour le tribromfluoréthylène et le
dibromfluoréthylène : les équations
/CBpo CBr^FI /C-Br, 0 = CBr
\C.BrFl 0 = (:Br ^ CHFl CHBrFl
sont celles qui représentent la réaction prépondérante.
Enfin, Demole a montré que pour le chlorbrométhylène
symétrique, c'est le chlorure de bromacétyle qui constitue
le produit principal de la réaction.
Gand, le 1" novembre 1898.
( o55 )
Svr quelques propriétés des poli/gones inscrits aux courbes
gauches; par François Deruyts, chargé de cours à
l'Université de Liège.
A la suite de nos recherches antérieures, concernant
les éléments neutres des involutions quelconques, nous
avons montré l'importance des résultats que l'on pouvait
en déduire au point de vue des propriétés des courbes
gauches rationnelles, ainsi qu'au point de vue des pro-
priétés de certains systèmes de surfaces alliées à ces
courbes (*). Actuellement, en nous servant des résultats
acquis, concernant les éléments neutres, ainsi que d'autres
résultats que nous avons donnés, déjà depuis longtemps,
concernant les groupes communs aux involutions, nous
nous proposons d'établir quelques théorèmes relatifs
aux polyèdres dont les sommets sont les points d'une
courbe gauche, ou dont les (aces sont les plans d'une
surface développa ble.
1. Supposons d'abord que les groupes d'une involu-
tion du premier rang, I;', soient représentés par des
groupes de n points d'une courbe plane rationnelle,
d'ordre m, C„ : en unissant, deux à deux, par des droites,
les points des différents groupes de l'involution, nous
obtenons une simple infinité de droites, enveloppant une
(*) Bull, de l'Acad. roij. de Belgique, 3° sér.. t. XXXV, n°^ 2, 3, 4,
6; t. XXXVI, no 8, 1898.
( ^U )
courbe de la classe (n — 1) {m — 1); en effet, l'involu-
tioii r,' a en commun avec l'involution du premier
rang, \"\ marquée sur la courbe C„ par les sécantes
issues d'un point quelconque du plan, {« — 1) {m — 4)
couples.
Remarquons que les droites du plan marquent sur la
courbe C„ les groupes d'une l'î qui a en commun avec
l'involution proposée l',', [m — 2) ("ï') ternes : ces ternes
correspondent aux [m — 2) ("j') tangentes triples de la
courbe d'involution de I,'. De plus, l'involution I;* possède
2(n — 1) éléments doubles; donc la courbe d'involution
a 2(/i — i) tangentes communes avec la courbe C„.; ces
deux courbes ont encore {» — 2) [m — 2) autres tangentes
communes (sauf pour le cas de ni = 2), mais ces tangentes
unissent des points distincts, c'est-à-dire que le point
de contact de ces tangentes n'est pas un point double
de l;'.
Puisqu'une involution I,' est déterminée sur la courbe
C„. par deux groupes de n points, nous pourrons énoncer
le théorème suivant, généralisation d'un théorème dû à
Ém. WeyrH :
Les côtés de deux polygones complets de n sommets,
inscrits dans une courbe rationnelle plane d'ordre m, C„,
sont circonscrits à une même courbe, ^, de classe (n — 1)
(m — 1 ), possédant (m — 2) ("7') tangentes triples : de
plus, il existe une infinité d'autres polygones de n sommets,
inscrits à la courbe, C„, et circonscrits à la même courbe, S.
(*) Ueber Involulionen hôherer Grade. (Journal de Grelle, t. LXXII,
pp. "285, etc.)
( 555 )
2. Supposons maintenant que les groupes de l'invo-
lution l: soient représentés par des groupes de n points
d'une courbe gauche rationnelle, d'ordre m, C„ ; les
droites qui unissent les couples de cette involution,
forment le système des génératrices d'une surface réglée,
d'ordre (m — 4) (n — 1). En effet, l'involution I," a en
commun avec l'involution I;*, marquée sur la courbe C„.
par les plans passant par une droite quelconque de
l'espace, {m — i) [n — 1) couples.
L'involution I; possède 2(» — 1) éléments doubles,
donc {n — i) [m — 1) génératrices de la surface réglée
d'involution sont des tangentes à la courbe C„.; en
général, ce sont les seules génératrices jouissant de cette
propriété.
L'involution m, marquée sur la courbe C„. par les
plans de l'espace, possède une infinité de ternes neutres;
ces ternes neutres forment le système des trisécantes de
la courbe C„(*); recherchons combien il existe de ces
ternes neutres qui font partie de groupes de I;'.
Pour cela, considérons un point A de la courbe C,„; il
lui correspond, dans l'involution I3",
(m — 2) (m —5)
couples neutres B B' et donc {m — 2) {m — 5) points B.
A chacun des points B il correspond, dans I;', (h — 4)
points C : ainsi, à un point A il correspond
{n— I) [m — -2)^(m — 5j
(') Bull, de LWcad. roy. de Belgique, 3« sér., t. XXXV, n" 3, 1898.
( 556 )
points C; on verrait de même qu'à un point C il corres-
pond
{n— 1) (m — 2) (m — 5)
points A; le nombre des groupes cherchés est évidem-
ment égal à la moitié du nombre des coïncidences (AC) ;
ce nombre est par conséquent
(/*— 1) {m — t2) (m — 5).
Nous pouvons interpréter géométriquement ce résultai
en disant que la courbe C^ possède [n — 1) [m — 2)
[m — o) trisécantes qui sont des génératrices de la sur-
face réglée d'involution de I','.
Enfin, l'involution donnée l',' et l'involution V", mar-
quée sur la courbe C„. par les plans de l'espace, ont en
commun {m — 5) ("7") quaternes : donc la surface réglée
d'involution de li' possède {m — 5) ("i') groupes de six
génératrices, formant autant de groupes de quadrilatères
complets plans, inscrits à la courbe C,,..
iNous pouvons encore remarquer que la courbe C,„ est
située sur la surface d'involution de I;', et, de plus, qu'elle
est multiple d'ordre n — i pour cette surface.
Puisque l'involution l;' est déterminée par deux groupes
de n points, nous obtenons le théorème suivant :
Les cotés de deux jjultjgones gaiirJies complets de n som-
mets inscrits dans une courbe gauche d'ordre m, sont les
génératrices d'une surface réglée d'ordre (n — 1) (m — i);
(n 4) {m — 2) (m — 3) trisécantes de la courbe C„, sont
des génératrices de la surface réglée. De plus, il existe une
infinité d'autres polyones, inscrits à la courbe C„, dont
les côtés sont les génératrices de la même surface réglée.
( ^-^7 )
3. En particulier, nous en déduisons que les bisé-
canles d'une cubique gauche qui s'appuient sur une droite
de l'espace forment une surface réglée du quatrième
ordre. En effet, les bisécantes d'une cubique gauche qui
s'appuient sur une droite de l'espace, sont les droites qui
unissent deux à deux les ternes d'une involution I,; il
suffira donc de faire, dans l'énoncé précédent, m = 3,
n = 5. Remarquons que la cubique gauche est située sur
la surface réglée S4 et qu'elle est une ligne double de
cette surface : par conséquent, la surface S4 est réci-
proque à elle-même et peut être engendrée par l'inter-
section des plans correspondants de deux faisceaux de
plans projectifs du second ordre.
Si la droite donnée de l'espace s'appuie sur la cubique
ffauche, nous retrouvons le théorème bien connu : Les
bisécantes d'une cubique gauche qui rencontrent une droite
quelconque s'appuyant sur la courbe, forment le système de
génératrices d'une surface réglée du second ordre.
Ce théorème se déduit de l'énoncé général, en suppo-
sant ni=5, »j = 2.
4. Joignons trois à trois, par des plans, les points des
groupes d'une involulion I'/, représentée sur une courbe
gauche rationnelle C„. ; nous obtenons une infinité de
plans formant une développable de la classe ("7') ('» — 2).
En effet, les plans de l'espace qui passent par un point
fixe marquent sur la courbe C„. une involution I" qui a
en commun avec l'involution I" proposée ("â*) {m — 2)
ternes d'éléments.
L'involution lî a, de plus, en commun avec l'involu-
tion I3", marquée sur la courbe C„ par tous les plans
de l'espace, ("3') (//* — 5) quaternes d'éléments; par con-
( ms )
séquent, la développable d'involution d'une I;' possède
("3') ('" — 5) plans quadruples.
Enfin, l'involution I" possède une infinité de ternes
neutres qui forment le système de trisécantes de la
courbe C„, ; nous avons vu précédemment (n° 2) qu'il
existe
(w — 1 ) (m — 2) {m — 5)
ternes neutres de I^ contenant un couple de J," : donc
{n — i) (m — ;2) (m —3)
plans de la développable d'involution d'une I" con-
tiennent une trisécante de la courbe-support.
Nous pouvons énoncer le théorème suivant, comme
conséquence de ce que nous venons de voir :
Les faces de deux polyèdres complets dont les n sommets
sont inscrits à une courbe gauche rationnelle d'ordre m,
fonnent les plans d'une développable de classe (°7*) (m — 2);
celle développable coniient ("7') (m — 3) plans quadruples j
de plus,
(n— I) (m — i2) (m — 5)
plans de celte surface passent par une trisécante de la
courbe-support.
Dans le cas où la courbe est du troisième ordre, on
obtient l'énoncé suivant :
Les faces de deux polygones complets de n sommets
inscrits dans une cubique gauche, forment les plans d'une
développable de la classe {"ï*); de plus, il existe une infinité
d'autres polygones de n sommets inscrits à la inéme
cubiijue gauche et dont les faces sont les plans de la même
développable.
( 559 )
On obtiendrait de même Ténoncé corrélatif:
Les sommets de deux polyèdres complets de n faces,
osculatrices à une cubique gauche, sont situés sur une vième
courbe d'ordre ("7*); de plus, il existe une infinité d autres
polyèdres osculaleurs à la, cubique gauche et inscrits à la
même courbe d'ordre ("2').
En particulier, si nous supposons 7i == 5 et n = 4,
nous obtenons les deux théorèmes suivants :
Les vingt sommets de deux pculaèdres oscillateurs à une
même cubique gauche sont situés sur une courbe gauche
du sixièine ordre.
Les huit sommets de deux tétraèdres, oscillateurs à une
même cubique gauche, sont situés sur une seconde cubique
gauche et il existe une infinité d autres tétraèdres oscilla-
teurs à la première courbe et inscrits à la seconde.
Ce dernier théorème a été donné sous une forme un
peu différente par M. Reye (*).
5. Considérons actuellement une involution lâ', repré-
sentée par des groupes de n points d'une courbe gauche
rationnelle C,,.; les plans qui unissent trois à trois les
points des groupes de l'involution sont en nombre dou-
blement intini : ils enveloppent une surface de la classe
(n-2)(V).
En effet, l'involution proposée I" a en commun avec
l'involution I"', marquée sur la courbe C„, par tous les
plans qui passent par une droite fixe, (n — 2) ("7*) ternes
d'éléments.
L'involution L' possède 3(w — 2) groupes contenant un
(*) Die Géométrie der Laye, 3" édiu, t. II, p. 226.
( 560 )
élément triple : donc la surface d'involution contient
3(,i — 2) plans qui sont osculateurs à la courbe-support.
Les couples neutres de I^ sont en nombre
(/i— 1) (n-2)
chacun de ces couples neutres joint à un point quel-
conque de la courbe C„ donne lieu à un plan de la
surface d'involution; ils correspondent donc aux géné-
ratrices rectilignes de la surface d'involution.
D'autre part, la courbe C„ possède une inflnité de tri-
sécantes ; il en existe
{« — -2) (m — 2) (m — 5)
qui sont situées sur la surface d'involution.
En effet, les Irisécantes de la courbe C„ sont les ternes
neutres de l'involution 1',", marquée sur la courbe C„ par
les plans de l'espace : parmi ces trisécantes, il en existe
(n — t>) {m — 2) (m — 5)
2
dont les trois points de section font partie d'un groupe
de l'involution I" proposée.
Pour le démontrer, prenons un point A de la courbe ;
il lui correspond dans 1,' les groupes d'une P'^S possé-
dant
(m — 2) (m — 3)
( S6t )
couples neutres (BC), et à chacun de ces couples (BC) il
correspond dans lî, {n — 2) points D : au point A corres-
pondent donc
(n — 2) {m — 2) {m — 3)
2
points D. De même à un point D, il correspond dans
l'involution J" les groupes d'une involution IV Q»i con-
tient (voir n° 2) {n — 2) {m — 2) {m — 5) groupes, com-
posés d'un couple BC de I"r* et d'un terne neutre de I^,
ce terne neutre étant formé du couple BC et d'un élé-
ment A. Donc, à un point D il correspond
(» — 2) (»i — 2) (/» — 5)
points A. Chacun des groupes cherchés absorbe trois
coïncidences de la correspondance que nous venons
d'établir; leur nombre est donc bien
(w — 2) {m — 2) (m — 5)
2
En d'autres termes, si une involution I" est représentée
par des groupes de n points d'une courbe gauche C„, il
existe
(» — 2) (m — 2) im — 5)
groupes dont trois des points représentatifs sont en ligne
droite.
L'involution L" a en commun avec l'involution Ir
CTO ('"?') quinternes : c'est-à-dire que si les groupes
d'une involution l" sont représentés par des groupes de
n points d'une courbe C„, il existe (V') ("T^) groupes dont
5""® SÉRIE, TOME XXXVI. 58
( 502 )
cinq des points représentatifs sont dans un même plan.
Nous en déduisons encore que la surface d'involution
d'une I-i représentée sur une courbe gauche d'ordre m
possède ("7') ("'s') plans décuples.
Puisqu'une involution I;' est déterminée par trois
groupes de it éléments, nous pouvons énoncer le théo-
rème suivant :
Les faces de trois pnhjçfoiios complets de n sommets,
inscrits à une courbe r/atichc rationnelle d'ordre m, sont
tangentes à vue même surface de classe (n — 2) ("7') ; ^^
-plus, il existe une double infinité d'autres poh/gones de n
sommets, inscrits à la courbe et circonscjits à la même
surface.
I.a surface contient : ^ ("3') {"';') plans décuples;
in— 1) (n — 2)
génératrices rcctilignes qui sont des trisécantes de la
courbe-support;
(»— 2) 'ui — 2) (î» — ô)
génératrices rectilignes (iiii sont des trisécantes de la
courbe-support.
6. Cas particuliers. — Si nous supposons que la
conrbe-support est une cubi(jue gauche, on obtient
l'énoncé suivant :
Les faces de trois polygones complets de n sommets,
itiscrits (i une cubique gauche, sont tangentes à une même
surface de classe (n — 2) ; de plus, il existe une double
infinité d'autres poli/gones, inscrits à la même courbe et
circonscrits à la vième surface.
( 565 )
Ou bien encore :
Les sommets de trois poh/èdres complets de n faces
osculalrices à une même cubique gauche sont situés sur une
même surface d'ordre (n — '2).
En particulier, si nous supposons n = 4 et n = 5,
nous obtenons les deux tbéorèmes suivants :
1° Les sommets de trois tétraèdres, osculateurs à une
même cubique gauche, sont situés sur une même surface du
second ordre et il existe une double infinité d'autres tétra-
èdres à la fois circonscrits à la même cubique gauche et
inscrits à la même surface.
Ce théorème est, comme on le sait, dû à M. Cremona.
2" Les sommets de trois pentaèdres complets osculateurs
à une même cubique gauche, sont trente points situés sur
une même surface cubique : il existe une double infinité
d'autres pentaèdres, à la fois inscrits à celte surface cubique
et osculateurs à la cubique gauche. De plus, six droites,
situées chacune dans deux plans de la cubique gauche, sont
six droites d'un double-six de la surface cubique {*).
ADDITION.
En général, si nous supposons que l'on représente les
groupes d'une involution I',' par des groupes de n points
d'une courbe normale C,„ d'une variété linéaire à m
dimensions E,„ (m, < n), et si nous joignons par des
espaces E,„_,, m à m les points des groupes de l'involu-
tion I;, nous obtenons une simple infinité d'espaces
E,„_„ formant une développable d« la classe {l~\).
(*) Nous entendons par droite dans deux plans d'une cubique gauche
l'intersection de deux plans osculateurs de cette courbe. (Voir, à ce
sujet, les traités de géométrie de 51. Salmon.)
( o64 )
En effet, tous les plans E„,_j qui passent par un point
quelconque de E„, marquent sur la courbe normale C„
les groupes d'une involution I";_, : cette dernière involu-
tion a, en commun avec l'involution proposée 1", {l~\)
groupes de m éléments. Ces groupes correspondent aux
espaces E„,_, de la développable qui passent par le point
en question. Cette développable est donc bien de la
classe (",iî).
Si n = m -h i, la développable est de la classe m,
c'est-à-dire qu'elle est formée par les espaces E,„.,, oscula-
teurs à une courbe normale C,'„ de E,„ (*),
En remarquant que l'involution l""^' est déterminée
par deux groupes de /;/ -i- 1 éléments, on obtient le
théorème général suivant :
Les m H- 1 faces E„_, d'un polygone de m 4- 1 som-
mets, inscrits à une courbe normale C,„ , d une variété
linéaire E,„, sont osculatrices à une autre courbe normale
C,'„ de celte variété.
En particulier, pour m = i2, on retrouve le théorème
de Poncelet, et pour m =3, le théorème de M. Reye.
2. Cette propriété projective, qui se transmet dans
tous les espaces linéaires sous la même forme, permet de
construire les groupes d'une involution lï, dès que l'on
se donne deux groupes de n éléments de cette involution :
nous nous bornerons à le montrer pour le cas de n = 4.
La remarque suivante nous sera utile à ce sujet : Les
surfaces coniques du second ordre, ayant quatre génératrices
communes, dont l'une est bisécanle d'une cubique gauche,
(*) Par extension de ce qui se passe dans l'espace E5, nous appelons
espace Em-\, osculaleur à une courbe normale C«, tout espace E,„-i
qui rencontre cette courbe normale en m points coïncidents.
( 5(35 )
coupent cette courbe en des groupes de quatre points,
formant une involution l,*.
Nous pensons que cette remarque est évidente, mais
pour prouver que l'involution l\, ainsi définie, est la plus
générale, il faut que nous puissions, par le procédé que
nous venons d'indiquer, résoudre le problème suivant :
Étant donnés deux groupes, X^, Yj, Z^, Ui ; Xg, \^, Zg,
U|2, de quatre points d'une cubique gauche, construire les
trois points Y5, Z3, U3, complétant un groupe d'une \\, déter-
minée par un point X3 de cette même cubique.
Les deux plans (X^ Y^ Zi), (X^ Y.2 Z^) se coupent en une
droite d; le plan [dX^) rencontre la cubique gauche en
deux points, Bj, B2 : la bisécante (Bi B^) coupe la droite
d en un point A. Si nous appelons a et 6 les droites
respectives d'intersections des plans
(\,Y,Z,), (B.B,U,),
(X,YA1, (B,B,U,),
le plan («6) rencontre la cubique en trois points {Y5Z3 U5),
qui sont les points cherchés.
En etîet, les trois cônes du second degré, décompo-
sables, formés par les couples de plans,
(X,Y.Z,), (B,B,U,),
(X,Y,Z,), (B,B,UO.
(B,B,X3), (YsZjUj),
ont en commun quatre génératrices dont l'une (BjBa) est
bisécante de la cubique gauche.
Les plans (Y3 Z3 U3) forment une développable de la
troisième classe.
( 506 )
En effet :
1° Les droites a, dans le plan (Xj Y^ Zj), et les droites
b, dans le plan (X2 Y., Z.,), enveloppent deux courbes de
la seconde classe C72 et a^, tangentes à la droite rf; car
on peut remarquer que si M est un point quelconque du
plan (XjYi Zi), les plans du faisceau (MU^) marquent sur
la cubique gauche C3 les couples d'une If, tandis que les
plans du faisceau (d,) marquent sur la même courbe les
ternes d'une I^; ces deux involutions \\ et I^ ont deux
couples communs qui correspondent aux tangentes à la
courbe o-^, issues du point M ;
2° En joignant un point P de l'espace aux systèmes
de droites a et b, obtenues en faisant varier le point X3
sur la cubique gauche, nous formons deux cônes de la
seconde classe, ayant tous deux comme plan tangent le
plan (Prf) : ces cônes ont en commun trois plans qui sont
les plans de la développable (Y.- Z3 U3) passant par P.
D'après ce qui précède, il nous semble inutile de
démontrer que les faces des tétraèdres (Xi Y^ Zi Ui),
(Xq Y2 Z2 U2) sont des plans de cette développable.
COMITÉ SECRET.
La Classe s'occupe, en comité secret, de la discussion
des titres des candidats présentés pour les places vacantes.
— Elle procède ensuite à la nomination de sa Com-
mission spéciale des finances.
Les membres sortants sont réélus.
( ^67 )
CXAJlifi^E DWIH LETTltEt^.
Séance du 5 décembre 1898.
M. F. Vander Haeghen, directeur.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. A. Giron, vice-directeur ; S. Bor-
raans, Ch. Piot, T.-J. Lamy, G. Tiberghien, L. Van-
derkindere, le comte Goblet d'Alviella, P. Fredericq,
G. lùirth, Ch. Mesdach de ter Kiele, H. Denis, le che-
valier Ed. Descamps, G.Monchamp, P.Thomas, Ern. Dis-
cailles, membres; J.-C. Vollgratî, associé; V. Brants,
Ch. De Smedt, Jules Leclercq, M. Wilmotle, H. Pirenne
et Ern. Gossart, correspondants.
M. le Directeur adresse les félicitations de la Classe à
M. G. Kurtli au sujet de la manifestation dont il a été
l'objet le 20 novembre dernier, à l'Université de Liège.
Il assure l'honorable membre que l'Académie tout entière
s'est associée à ce témoignage de sympathie.
Les applaudissements de la Classe ont accueilli cette
motion, ainsi que les remerciements exprimés fpar
M. Kurth.
( 568 )
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'Intérieur envoie, pour la biblio-
thèque de l'Académie, un exemplaire de la Bibliotheca
Belgica, 102* et 103* livraisons. — Remerciements.
— Hommages d'ouvrages :
4 . Les rites de la moisson el les commencements de l'agri-
culture, à propos du dernier ouvrage de M. Grant Allen ;
par le comte Goblet d'Alviella;
2. A. Esquisse historique sur les insignes de souveraineté
et les décorations de l'armée russe. Période des grands
princes et des czars; B. Cent ans du corps militaire des
courriers de cabinet. 1796-'! 896; par le colonel d'état-
major Nicolas Nicolaeff. Saint-Pétersbourg, 189(3-1898.
(Présenté par M. Marchai, avec une note qui figure
ci-après);
5. Ménélik II, roi des rois de l'Ethiopie; par le marquis
de_Nadaillac, associé;
4. Le collectivisme; discours, par L. de Gamond ;
5. La participation aux bénéfices ; par Waxweiler ;
6. A. // carattere morale di Antonio liosmini; B. Una
fissazione hegheliana; C. Sulle dottrine psicofisiche di
Platone; D. Che cosa è l'educazione; E. Sull' ipotesi delV
evoluzione; F. L'unita délie scibile e la filosofia délia morale;
G. Lezioni di filosofia délia morale; par L.-M. Billia, pro-
fesseur à l'Université de Turin (présenté par M. Mon-
champ, avec une note qui figure ci-après);
7. De Oranje Nassau boekerij en de Oranje-Penningen
( 569 )
in de Koninidijke Bibliotheek en in het Koninklijk Penning-
Kabinet, te 's Gravenhage, 189S (offert par M. le Directeur
de la Bibliothèque royale et M. le Directeur du Cabinet
des médailles de La Haye).
— Remerciements,
— Le Comité organisateur du septième Congrès inter-
national de géographie invite les membres de l'Académie
à prendre part à cette session qui aura lieu à Berlin, du
28 septembre au 4 octobre 4899.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
I. Esquisse historique sur les insignes de souveraineté et
les décorations de l'armée russe. Période des grands princes
et des czars; — T[. Cent ans du corps militaire des courriers
de cabinet. 1796-1896. Esquisse historique; 2 vol. petit
111-4" (en russe), par le colonel d'état-major Nicolas
iNicolaeff, Saint-Pétersbourg, 1896-1898.
M. le colonel d'état-major Nicolas Nicolaeff, de l'armée
russe, offre à l'Académie un exemplaire du livre qu'il a
consacré au développement des notions et des idées sur
la manière d'interpréter, dans la plus large acception du
mot, les origines des marques de souveraineté et des
décorations, armes, armures, drapeaux, étendards,
armoiries, etc., de l'armée russe, depuis le commence-
ment de la période des grands princes et des czars.
L'auteur, pour arriver à réaliser son œuvre, a mis à con-
tribution les principaux dépôts d'archives de l'Empire. Il
a cherché ainsi à donner à son travail un caractère scien-
( 570 )
lilîque et archéologique qui n'a pas d'antécédents dans
les armées européennes.
Il commence en rappelant la manière des Slaves d'en-
visager les drapeaux comme des signes sacrés de rallie-
ment, ce qui se pratiquait déjà chez les Russes avant leur
baptême. Il fait ensuite valoir l'influence exercée par
le christianisme sur ces emblèmes et son action pour
arriver à transformer les drapeaux en reliques d'église.
Il y ajoute des considérations sur les préparatifs et le
cérémonial qui entouraient leur remise aux corps d'armée.
Le colonel Nicolaelf, atin de mieux faire ressortir
l'objet de son travail, y a joint un certain nombre de
belles planches gravées ou photographiées, dont les deux
premières représentent des ancêtres de l'armée russe,
armés pour le combat ou assiégeant une ville, et les
autres, des oriflammes, drapeaux, fanions, etc., depuis
1560, ainsi que les armoiries actuelles de l'Empire, telles
qu'elles ont été déterminées héraldiquement en 1700.
Le lecteur trouvera dans ce beau volume la description
détaillée des drapeaux des Cosaques, l'explication histo-
rique des causes qui déterminèrent ceux-ci à se soustraire
au protectorat des Polonais et des Turcs et leur soumis-
sion à l'ancienne Russie, ainsi que les drapeaux qu'ils
reçurent alors comme marque de leur indépendance.
On y trouvera aussi la description détaillée des autres
distinctions militaires, attributs, médailles, insignes de
service ou de commandement. L'auteur termine cette
partie de son livre en expliquant les changements arrivés
dans l'armée russe depuis sa réorganisation par Pierre le
Grand (ï172o), qui a donné à tous les régiments leurs
marques honorifiques, lesciuelles subsistent encore.
Les quatre appendices se rapportent à la création de
( S7I )
la chambre d'armes ou arsenal, le Musée numismatique
d'artillerie actuel et ce qu'il était sous l'ancien régime,
enfin des drapeaux comme monuments de l'ancienne
peinture d'images. Parmi ces drapeaux, il y en a qui ont
une réelle valeur historique et archéologique et leur dessin
est de toute beauté.
Le colonel Nicolaeff offre en même temps un exem-
plaire de son Histoire de la création du corps militaire
des courriers de cabinet, dont l'institution remonte au
siècle dernier. Son volume est illustré, entre autres, de
portraits et de tigures représentant les courriers dans
leur costume militaire.
Chev. Edm. Marchal.
J'ai l'honneur de présenter à l'Académie, de la part de
M. Billia, professeur à l'Université de Turin, sept publi-
cations de ce savant dont voici les titres :
Il carattere morale di Antonio Rosmini. Milano, 1897.
Una fissazione Itecjheliatia. Torino, 1898.
Sulle dottrine psicofisiche di Platone. Modena, 1898.
Checosa è l' educazione . Torino, 1896.
SuW ipotesi dell' evoluzione. Torino, 1897.
L'unità délie scihile e la filosofia délia morale. Toi'ino,
1898.
Lezioni di filosofia délia morale. Torino, 1897.
M. Billia, dont notre regretté confrère Alphonse Le
Roy a plusieurs fois entretenu la Classe, est un disciple
fervent du célèbre Rosmini et se réclame souvent de son
autorité : un des travaux qu'il offre à la Compagnie est
( Dli )
consacré tout entier à défendre le penseur de Roveredo
contre de compromettants éloges qui font de lui un
panthéiste, presque un hégélien; un autre exalte et,
dirais-je bien, chante les qualités morales du Maître. Je
ne veux point contester que Rosmini n'ait été brillam-
ment doué du côté de l'esprit et du cœur, et je reconnais
que son œuvre commande l'attention, ne serait-ce que
par l'influence considérable qu'elle a exercée et exerce
encore en Italie et ailleurs. Toutefois mes convictions
philosophiques et théologiques me séparent de cet écri-
vain et de son école sur des points de conséquence.
Ces réserves foites, je juge dignes d'être lus les travaux
de M. Billia. Ils se font remarquer par leurs vues synthé-
tiques et en même temps par des analyses qui ne man-
quent pas de finesse, et à certains moments d'humour.
L'auteur est érudit ; il a beaucoup hanté Platon et connaît
ceux qui se sont inspirés de la philosophie platonicienne.
Deux d'entre les travaux qu'il nous oftVe, ainsi que je
viens de le dire, s'occupent de Rosmini. Un autre montre
dans Platon les préoccupations de nos modernes psycho-
physiciens. Un quatrième nous donne la définition de
l'éducation, en tant que celle-ci comprend l'éducation
de nature et l'art de l'éducation, deux choses que l'auteur
distingue à bon droit. Un cinquième travail a pour objec-
tif ce que l'auteur appelle Vhypothêse de l'évolution. Il y
rejette catégoriquement la doctrine d'après laquelle il n'y
aurait au monde que de l'évolution, sans vérités absolues
ni substratums permanents des phénomènes, mais il ne
trouverait pas de raisons péremptoires dans les dogmes
chrétiens ni dans la philosophie pour rejeter l'évolution,
par exemple, dans le règne végétal, ou dans le règne
(875)
animal, dût celle-ci s'étendre à V animalité de l'homme.
Les deux derniers ouvrages s'occupent de la philosophie
delà morale. L'un d'eux est consacré à faire ressortir
l'unité des sciences et à montrer la place d'honneur
que tient dans leur ensemble la philosophie de la morale.
Entre autres choses, M. Billia fait toucher du doigt
la connexion entre les sciences naturelles et la psy-
chologie qui étudie l'instrument de toutes nos connais-
sances. Le Lezioni di filosofia délia morale, dont il nous
reste à dire quelques mots, est une œuvre plus considé-
rable que toutes celles dont il vient d'être question.
L'auteur y considère la notion de cette science et sa place
dans le scibile, puis successivement l'intelligence, la
volonté, la liberté et la loi morale. 11 s'y montre partout
spiritualiste et, aux occasions, rosminien. Je regrette
que le court espace réservé dans notre Bulletin aux notices
bibliographiques m'empêche de dire davantage sur ce
livre, auquel il serait utile de consacrer une analyse cri-
tique bien plus étendue.
Je me borne donc à ajouter que M. Billia est un des
collaborateurs les plus assidus de la revue IlAuovo Hisor-
gimento. Il y publie pour le moment une série d'articles
contre le néothomisme de Mercier et de son école, notam-
ment de M. le professeur De Craene. Le grand grief de
\L Billia, c'est que la jeune et active école, d'une part
courtise la doctrine positiviste, et d'autre part repousse en
bloc toutes les doctrines idéalistes, donc aussi celle de
Rosmini. Le ton de ces articles est courtois et sérieux :
je les signale à tous ceux qu'intéresse le mouvement des
idées. Georges Monchamp.
( 574 )
COMMUNICATION.
La Classe des lettres et des sciences morales et poli-
tiques a examiné récemment deux questions importantes
qui touchent à sa constitution. Ces questions concernent
l'organisation de la Classe dans ses rapports, d'une part,
avec la littérature pure, d'autre part, avec les sciences
morales et politiques. Comme des modifications statu-
taires et réglementaires pouvaient se rattacher à la solu-
tion de ces questions, la Classe a porté en même temps
son attention sur les conditions auxquelles sont soumis
les changements à apporter éventuellement à son organi-
sation.
En ce qui concerne ce dernier point, il y a lieu de dis-
tinguer entre les Statuts organiques de l'Académie, le
Règlement général commun aux trois Classes et le Règle-
ment intérieur de chaque Classe.
Les Statuts organiques forment la constitution stahle
de l'Académie dont le Roi est le Protecteur. Ils indiquent,
dans leur article final, les conditions nécessaires pour
leur revision : « Les dispositions qui précèdent, formant
les Statuts organiques, ne peuvent être changées qu'en
séance générale et du consentement de l'Académie,
donné par les trois quarts des membres présents. Tout
changement est soumis à l'approbation du Roi. »
L'article il des mêmes Statuts parle du Règlement
général en ces termes : « Le Roi décrète un Règlement
général. Il ne peut y être apporté de changements qu'une
fois par an dans la séance générale des trois Classes
mentionnée ci-après; ces changements doivent avoir
( s^n )
obtenu l'assentiment des deux tiers des membres pré-
sents et ils sont soumis à l'approbation du Roi. »
L'article 40 s'exprime comme il suit concernant le
Règlement de chaque Classe : « Chaque Classe forme
son Règlement intérieur qui est soumis à l'approbation
royale. » Il n'y a pas d'autres conditions posées à l'exer-
cice de cette dernière prérogative.
La question de l'accès à accorder dans la Classe à des
représentants de la littérature pure a été posée par
M. Kurth dans les termes suivants :
« A première vue, il semble qu'une question pareille
ne soit susceptible que d'une réponse affirmative; je n'hé-
site cependant pas à répondre négativement. Notre Classe
porte un nom qui donne lieu à un malentendu. Si on
l'appelle Classe des lettres, c'est faute de trouver dans le
vocabulaire actuel une expression qui la désigne d'une
manière adéquate. Cette Classe n'est en réalité qu'une
Classe des sciences qui se rapportent à l'homme et à la
société, et que je regrette de ne pouvoir, parce que
nous ne sommes pas les maîtres du langage, appeler du
vieux nom si expressif et si large (ï humanités . Son but,
c'est de cultiver en commun et d'aider à progresser, par
les moyens qui sont à sa disposition, les diverses sciences
qui forment son domaine. Elle ne se distingue en rien,
sous ce double rapport, de la Classe des sciences propre-
ment dite, au sujet de laquelle il n'y a jamais eu de
malentendu. Or, la littérature est un art et non une
science, et il n'y a rien ou presque rien de commun entre
les travaux de l'artiste et ceux du savant (1).
)) C'est la raison pour laquelle, à mon sens, il n'y a pas
l) On ne me fera jias dire, j'espère, que l'arlisle ne peut pas être
un savant, ou que le savant n'a pas à se préoccuper d'être artiste.
( S76 )
lieu d'introduire dans notre Classe les représentants des
belles-lettres. Ils seraient égarés parmi nous, non qu'ils
n'y trouvent pas le tribut de sympathie ou d'admiration
qui leur revient, mais parce qu'ils ne seraient pas dans
leur véritable milieu. Si donc on estime qu'il soit utile
pour les belles-lettres de grouper leurs membres en aca-
démie, il doit être bien entendu que ce n'est pas dans
notre Classe qu'il faut les introduire.
)) Il faut, ou bien créer à leur usage une Classe des
belles-lettres, sauf à donner à la nôtre un nom qui expri-
merait d'une manière plus exacte ses véritables attribu-
tions, ou bien les réunir dans une section spéciale de la
Classe des beaux-arts, qui deviendrait ainsi la Classe des
beaux-arts et des belles-lettres.
» Sera-ce rendre un vrai service à la littérature que
d'enrégimenter ainsi ses principaux représentants? Je ne
voudrais pas l'aflirmer sans réserve. Il est de la nature du
travail scientifique de progresser dans les ateliers com-
muns et grâce aux efforts collectifs; il est de l'essence du
travail artistique de devoir ses plus beaux chefs-d'œuvre
à la méditation solitaire et à l'inspiration personnelle. Au
surplus, et quelles que soient les diverses manières de voir
sur cette question, elles ne sauraient, je pense, nous
empêcher d'être unanimes quant à la distinction à éta-
blir entre les sciences que nous cultivons ici et l'art litté-
raire proprement dit.
» Cette distinction, si je ne me trompe, est rigoureuse-
ment observée dans toutes les académies du monde, sans
omettre l'Académie des inscriptions et belles-lettres,
qui, comme notre Classe, porte un nom traditionnel
peu en rapport avec la nature et avec l'étendue de ses
travaux actuels. »
La Classe ne méconnaît aucunement le très remar-
( »77 )
quable mouvement littéraire qui honore la Belgique
contemporaine. Mais ce fait ne supprime pas, à ses yeux,
la distinction « entre les sciences dont elle s'occupe et
l'art littéraire proprement dit ». Et elle ne peut que
faire siennes, à ce point de vue, les observations de
M. Kurth. Elle n'entend pas se prononcer sur les services
que rendrait à la littérature nationale le groupement des
littérateurs en institution ollicielle. Mais elle estime que
si quelque chose d'utile peut être réalisé dans cet ordre,
il conviendrait de le demander soit à la création d'une
Classe autonome, soit à l'adjonction d'une section parti-
culière à la Classe des beaux-arts. Augmenter de quel-
ques unités le nombre des sièges de la Classe des lettres
ne serait pas une solution. C'est en s'inspiranl de ces
motifs que la Classe a adopté la résolution suivante :
(c 11 n'y a pas lieu d'augmenter le nombre des membres
de la Classe en vue d'accorder une place particulière à la
littérature pure, la place de celle-ci étant plutôt dans une
section de la Classe des beaux-arts ou dans une Classe à
créer spécialement. » Cette résolution a été adoptée à
l'unanimité moins trois voix et deux abstentions.
En ce qui concerne l'organisation de la Classe dans ses
rapports avec les sciences morales et politiques, l'assem-
blée a été saisie de deux propositions, l'une demandant
la création d'une Classe nouvelle des sciences morales et
politiques, l'autre demandant l'attribution à la Section
des sciences morales et politiques d'une représentation
égale à la moitié des sièges de toute la Classe.
La première proposition a été rejetée à l'unanimité
moins une voix, celle de son auteur, et deux abstentions.
La Classe a estimé que la création de la Classe proposée,
non seulement n'aurait pas de raison d'être dans les
5'"'' SÉRIE, TOME XXXVI. 39
( 578 )
conditions actuelles, mais serait en contradiction avec
l'existence de la Section des sciences morales et poli-
tiques instituée, au sein de la Classe actuelle des lettres,
par les Statuts organiques et comprenant, aux termes des
Règlements, les matières suivantes : l'économie politique,
la statistique, la législation, le droit public, la jurispru-
dence, indépendamment de la philosophie morale et des
autres branches philosophiques. Mais la Classe a admis
qu'il y avait lieu d'attribuer, en tout cas, la moitié fixe
de ses siègesàla Section dessciences moralesetpolitiques,
afin d'assurer toujours à cette Section dans la Classe une
représentation correspondant à son importance.
La Classe a tenu en même temps à affirmer spéciale-
ment ce qu'il y a d'heureux et de fécond dans la rencontre
en une même assemblée d'historiens d'élite et de savants
s'occupant des sciences morales et politiques. Aujourd'hui
que l'on tend de plus en plus, dans les sciences écono-
miques, juridiques et même philosophiques, à faire large
la part des faits, l'histoire devient en quelque sorte un
terrain commun où toutes les sciences morales se ren-
contrent et que toutes ont également besoin d'exploiter.
L'histoire, à ce point de vue, est moins une science
spéciale que l'introduction nécessaire à la plupart des
sciences morales et politiques.
c( Tout en reconnaissant volontiers l'importance que
ces sciences ont prise et ne cessent de prendre de nos
jours, disait M. Rurth, en appelant sur ce point l'attention
de l'Académie, je ne saurais cependant consentir, pour ma
part, à un fractionnement qui détacherait de notre Classe
les savants qui les cultivent. Il est de l'intérêt des études
relatives à l'homme et à la société de rester groupées, et
les sciences sociales elles-mêmes perdraient beaucoup à
être cultivées à l'écart, en dehors du milieu où l'on se
( 579 )
livre à rétiide de l'histoire, de la philosophie morale el
du droit. Dira-t-on que ces derniers font partie du
groupe des sciences sociales et qu'ils doivent les suivre
dans leur exode vers la terre promise d'une Classe à elles?
Mais alors on ne voit pas ce qui resterait à la Classe qu'on
voudrait abandonner. Tout compte fait, si la sociologie,
pour employer ce terme barbare, se trouve tro|) peu
représentée parmi nous, ce n'est pas en faisant sortir de
nos rangs ses trop rares représentants, c'est au contraire
en les y faisant entrer en plus grand nombre que nous
remédierons à l'abus. »
Les mesures prises par la Classe ne peuvent manquer
d'avoir ce résultat. N'exigeant point de modifications
statutaires, elles peuvent être immédiatement mises à
exécution.
Toutes les résolutions de la Classe ayant obtenu un
assentiment presque unanime, puisent dans cette circon-
stance un surcroît d'autorité.
ELECTIONS.
La Classe désigne M. Ernest Gossart, correspondant,
pour remplacer M. Samuel dans la Commission de la
Biographie nationale.
Elle procède ensuite au renouvellement de sa Com-
mission spéciale des finances. Les membres sortants sont
réélus pour 1899. M. Descamps remplacera M. Wauters,
décédé.
( d80 )
CLASSE DES BEAUX-ARTS.
Séance du 1"' décembre 1898.
M. Ch. Tardieu, directeur, président de l'Académie.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. J. Robie, vice-directeur; F. -A.
Gevaert, G. Gufléns, Th. Radoux, Peter Benoit, J. Deman-
nez, P.-J. Clays, G. De Groot, Gustave Biot, H. Hymans,
Th. Vinçotte, Jos. Stallaert, Alex. Markelbach, Max.
Rooses, G. Huberti, A. Hennebicq, Éd. Van Even, Alfred
Cluysenaar, le comte Jacques de Lalaing, J. Winders,
Ém. Janlet, J. Van Ysendyck, membres; Jos. Meunier,
correspondant.
MM. Maquet, membre, et Mathieu, correspondant, font
motiver leur absence.
CORRESPONDANCE.
Le Gouvernement de S. M. la Reine des Pays-Bas offre
un exemplaire du livre portant pour titre : Le Musée
national à Amsterdam. Texte de Victor de Stuers; plan-
ches de l'architecte P.-J.-H. Cuypers. 1897, in-folio.
— Remerciements.
( S8i )
L'Athénée de Brescia offre un exemplaire de l'album
de phototypies portant pour titre : U opère di Bonvicino,
publié à l'occasion de l'inauguration de la statue de ce
peintre (1498-1555), à Brescia, et à l'occasion de l'expo-
sition récente de ses œuvres. — Remerciements.
La note lue par M. Marchai au sujet de ces deux
ouvrages ligure ci-après.
— M. E. Cremers fait hommage d'une brochure inti-
tulée : L'anali/se el la composition mélodiques. — Remer-
ciements.
NOTE BIBLIOGRAPHIQUE.
S'il est dans l'histoire de la peinture de la Haute-Italie
une intéressante figure du XVP siècle, à côté du Titien
et de Palma le Vieux, c'est Alexandro Bonvicino, de
Brescia, dit Moretto, qui vécut à Brescia de 1498 à
à 1555. Il parait qu'il n'a étudié que dans cette localité
qui a bénéficié de sa gloire artistique. Bonvicino peignait
déjà en 1516; il devait donc alors avoir environ 20 ans.
J. Burckhardt — une autorité en matière d'art — en
parle en ces termes dans son Cicérone, page 751 (tra-
duction française de M, Auguste Gérard, Ministre pléni-
potentiaire de France à Bruxelles) :
« Après une étude attentive des Vénitiens et surtout de
Palma, il se forma à l'école de Girolamo Romanino,
aussi de Brescia (1485-1566), surtout aux dernières
œuvres du maître, dont le coloris éclatant se fondit chez
lui en une tonalité argentée, d'un gris perlé très fin.
Ce n'est que dans les derniers tableaux de Moretto que la
tonalité devient d'un gris très monotone et le coloris d'un
rouge assez lourd, en même temps que les figures perdent
( 582 )
leur précision, leur l'orme et tournent au sentimental.
D'ordinaire elles ont une maturité (une opulence de
formes, aurait du dire le traducteur), une plénitude de
beauté, une noblesse d'attitude auxquelles il ne manque
que la chaleur et la vie du Titien ou de Palma. Certain
trait original de mélancolie leur donne encore plus de
charme. »
C'est surtout dans les églises de Brescia que l'on peut
admirer et apprécier la prodigieuse fécondité du Moretto,
et cette intéressante localité a le droit de s'enorgueillir de
cet élève et émule de Romanino.
L'Athénée de Brescia, fondé en 1802 pour la haute
culture intellectuelle, vient d'élever à Bonvicino une
statue sur l'une des places publiques de la ville; cette
statue est de Domenico Ghidoni. L'Athénée de Brescia a
organisé à cette occasion, en septembre de l'année
actuelle, une exposition de toutes les œuvres qu'il a pu
réunir du célèbre peintre. C'est au nom de cette institu-
tion artistique et littéraire que j'ai l'honneur de présenter
à la Classe l'album portant pour titre : L'opère di Bonvi-
cino, renfermant trente et une reproductions hélioty-
piques des tableaux du maître. Mes excellents confrères
de la Classe des beaux-arts parcourront cet ouvrage avec
intérêt, je n'en doute pas; cet album est accompagné
d'un texte qui jette un jour tout nouveau sur la vie et les
œuvres de célèbre peintre italien.
D'autre part, MM. les architectes feuilletteront avec le
même intérêt le beau volume que le Gouvernement
hollandais vient d'offrir à l'Académie et qui porte pour
titre : Le Musée national à Amsterdam, texte de Victor
de Stuers, planches de P.-J.-H. Cuypers, l'architecte du
monument. Chev. Edm. Marchal.
( 583 )
RAPPORT.
II est donné lecture des appréciations de MM. Winders,
Janlet et Maquet sur le premier rapport semestriel de
M. Cols, prernier prix du grand concours d'architecture
de 1896.
— Renvoi à M. le Ministre de l'Agriculture et des Tra-
vaux publics.
ÉLECTIONS.
La Classe fait choix de M. P'iorimond van Duyse pour
remplacer M. Samuel dans la Commission de la Biogra-
phie nationale.
Elle procède ensuite au renouvellement de sa Commis-
sion spéciale des finances pour l'année 1899; M. Huberti
y remplacera M. Samuel, décédé.
Elle se constitue en comité secret pour discuter les
titres des candidats présentés pour les places vacantes et
pour l'adoption de candidatures nouvelles.
( 58i )
€l.AISfSK DES SCIEIVCES.
Séance du 15 décembre 1898.
M. Éd. Dupont, directeur.
M. le chevalier Edmond Marchal, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. W. Spring, vice-directeur; le baron
Edm. de Selys Longchamps, G. Dewalque, Éd. Van
Beneden, G. Malaise, F. Folie, F. Plateau, Fr. Grépin,
J. De Tilly, Gh. Van Bambeke, Alfr. Gilkinet, G. Van
der Mensbrugghe, Louis Henry, M. Mourlon, P. Mansion,
P. De Heen, G. Le Paige, Gh. Lagrange, F. Terby,
J. Deruyts, Léon Fredericq, J.-B. -Voltaire Masius,
J. Neuberg, A. Lancaster, membres; Gh. de la Vallée
Poussin, associé; P. Francotte, correspondant.
M. Brialmont, niembre, s'est excusé de ne pouvoir
assister à la séance.
GORRESPONDANGE.
M. le Ministre de l'Intérieur et de l'Instruction publique
demande que la Glasse procède, conformément à l'ar-
ticle 42 du règlement général des concours quinquennaux
et décennaux, à la formation d'une liste de quatorze
( ^sn )
noms, pour le choix : I" du jury chargé de décerner le
prix décennal des « sciences botaniques » ; 2" du jury
chargé de décerner le prix décennal de « chiniie et de
physique expérimentales » , dont la première période
sera close le 51 décembre courant.
— Hommage d'ouvrage :
La courbure et la torsion dans la coUinéation et la réci-
procité; par Clément Servais, extr. in-S". — Remer-
ciements.
JUGEMENT l)i; CONCOURS ANNUEL (1898).
SCIKIVCES iMATIlÉ.llATlQt]Ii:S ET I>HYSI«[}IJKS.
Trois mémoires ont été reçus en réponse à la troisième
question :
Apporter une contribution importante à l'étude des corres-
pondances (Verwandtschaf'ten) que l'on peut établir entre
deux espaces.
Ils portent pour devises :
N°M. — Geometry is hard (J.-H.-S. Smith);
2. — Numeri regunt locum ;
5. — Itinera ad verum.
Sur la déclaration des commissaires-rapporteurs de ne
pouvoir encore présenter leurs conclusions, autant à
cause de l'importance de la question posée que des pro-
portions des mémoires soumis à leur appréciation, la
Classe ajourne le prononcé du jugement jusqu'à une
prochaine séance publique.
( 586 ;
KcmmcES i{.%ti;rel.i.es.
PREMIERE QUESTION.
On demande de nouvelles recherches macrochimiques et
microchimiques sur la digestion chez les plantes carnivores.
« Le mémoire qui nous a été adressé porte pour épi-
graphe cette phrase de feu notre confrère Ed. Morren :
«fL'activité des plantes carnivores est, en dernière ana-
lyse, une question d'azote. » Cette absorption d'azote,
l'auteur en fournit une démonstration plus complète que
tous ses devanciers, et qui parait décisive.
Gobel avait remarqué que les Nepenthes paraissent
l'emporter quant à l'énergie de leur digestion sur les autres
plantes insectivores : aussi l'auteur a-t-il été bien inspiré
en choisissant précisément ces végétaux pour étudier le
phénomène de plus près. Quant à la difficulté de se les
procurer en quantité suflisante, elle n'existait pas pour
lui, puisqu'il a eu la bonne fortune de faire une grande
partie de ses recherches pendant un séjour dans la forêt
vierge, à Java.
Ajoutons que les impressions de voyage exotique qui
percent, çà et là, discrètement, dans les descriptions
scientifiques des faits observés, donnent à ce mémoire un
certain charme spécial.
L'auteur commence par quelques considérations géné-
rales sur la digestion, puis il passe rapidement en revue
les phénomènes de digestion dans le règne végétal :
racines attaquant des composés minéraux insolubles,
( 587 )
plantes saprophytes et parasites digérant des matières
organiques complexes, plantules en germination utilisant
les matériaux de réserve, saprophytisme partiel des
plantes carnivores. Il résume alors ce que l'on sait de ces
dernières plantes et en particulier des Nepenthes : cet
exposé m'a paru présenter quelques légères omissions et
inexactitudes, mais qui n'ont pas grande importance.
Le problème chimique est abordé ensuite dans le cha-
pitre « sur les zymases protéolytiques et leurs produits
de dédoublement ». Examinant l'action de la pepsine
(en présence d'acide dilué) sur les albuminoïdes, l'auteur
y reconnaît, avec divers autres biochimistes, trois étapes
successives : transformation de l'albuminoïde en sijnto-
nines ou acidalbumines ; transformation de celles-ci en
albumoses; et de celles-ci, à leur tour, en peptones. 11
indique avec soin, d'après ses propres expériences, les
caractères de ces divers groupes de corps, notamment
des peptones.
Il y a lieu de signaler l'aliment (pie notre auteur a
donné aux urnes de Nepentlws : c'est du blanc d'œuf dilué
au dixième et rendu incoagulable par l'addition d'un
millionième de sulfate de fer. Cette « albumine incoagu-
lable», facile à doser, à manier et à stériliser, peutrendre,
en chimie physiologique et en bactériologie, de très
grands services, comme l'ont montré des recherches
entreprises, il y a déjà quelques années, à l'Institut bota-
nique de l'Université de Bruxelles, et que l'Académie a
bien voulu publier en 189:2 et 1895.
Les expériences faites dans la forêt vieige ont porté sur
le Nepenthes melampliora. Normalement, le liquide sécrété
par l'urne encore fermée est neutre. Mais il sullit de pro-
duire une excitation, soit en secouant l'urne un peu fort,
( 588 )
soit en y introduisant un corps étranger solide ou même
liquide, pour que la sécrétion s'acidifie bientôt. Les
insectes se noient beaucoup plus vite dans le liquide des
urnes que dans l'eau, très probablement parce que ce
liquide les mouille, tandis qu'il n'en est pas ainsi pour
l'eau. Une fois noyés dans le liquide des urnes, ils restent
encore vivants durant plusieurs heures, de sorte qu'il n'y
a probablement point là d'action toxique, comme quel-
ques-uns l'admettent, mais simple et graduelle asphyxie.
En regard de ces faits, il est intéressant d'apprendre
que l'auteur a observé deux espèces d'insectes qui bravent
impunément le liquide des urnes et qui y effectuent même
tout le cycle de leur développement. Une constatation
semblable avait déjà été faite pour les Sarracenia, mais
on était tenté de l'expliquer par l'absence de zymase
digestive dans le liquide de ces plantes. Chez le Nepenthes
melamphora, une zymase existe probablement, et il est
curieux de voir des larves vivre dans un tel liquide.
N'oublions pas toutefois que l'on connaît bon nombre
d'immunités tout aussi remarquables, à commencer par
la résistance de la muqueuse stomacale vis-à-vis du suc
gastrique.
L'addition d'albumine au liquide de l'urne y provoque
la réaction acide, ou l'exalte si elle existait déjà ; après
deux jours environ, l'albumine a disparu, sans qu'il soit
possible d'obtenir une réaction nette de peptones vraies.
Cela paraît tenir à ce que le liquide du Nepenthes melam-
phora n'est pas très actif et que la plante absorbe les
produits de dédoublement des albuminoïdes au fur et à
mesure de leur formation ; si l'on arrête la résorption de
ces produits en détachant l'urne de la plante, la digestion
elle-même est aussitôt arrêtée.
{ 589 )
L'auteur n'a point réussi à établir avec certitude l'exis-
tence d'une zymase peptonifiante chez le Nepenthes de la
forêt vierge. Mais il a obtenu à cet égard chez d'autres
espèces, étudiées dans les serres d'Europe, des résultats
probants.
Il a pu montrer que les sécrétions d'urnes les plus
fortement peptonifiantes perdent ce pouvoir par l'ébulli-
tion. Quant aux peptones, on n'en trouve presque jamais
dans les urnes, car, étant diffusibles, il est naturel qu'elles
soient résorbées les premières : on n'en constate la pré-
sence que dans les cas où l'absorption, consécutive à la
digestion, est probablement fort ralentie.
Un problème essentiel, et sur lequel les recherches
faites antérieurement étaient peu concluantes, est celui
de l'absorption par la plante des produits de la digestion.
L'auteur l'a aborde de front en dosant (par la méthode
de Kjeldahl) l'azote qui reste dans l'urne quelques jours
après l'ingestion d'une quantité connue d'albumine : la
proportion d'azote total est réduite à 20 7o de ce qu'elle
était dans l'albumine ingérée, et encore faut-il tenir
compte ici de l'azote de la zymase, de celui des particules
chitineuses d'insectes en suspension dans le liquide, etc.
L'absorption par la plante de la plus grande partie de
l'azote organique fourni à l'urne est ainsi clairement
prouvée.
L'auteur s'est occupé aussi de recherches microchi-
miques sur la digestion des Nepenthes : elles auraient pu
être plus nombreuses et plus approfondies, et l'on s'atten-
dait à le voir essayer, entre autres, les élégants procédés
de coloration employés dernièrement avec succès chez
les Drosera par M"^ Huie. Il n'en a pas moins constaté.
( 590 )
par (les expériences au moyen de bleu de méthylène et
par la marche de « l'agrégation » intracellulaire à la
suite de la digestion, que tout se passe comme si les
glandes sécrétrices étaient en même temps le siège de
l'absorption.
Des expériences relatives à la nature de la zymase de
l'urne et un petit chapitre consacré aux conclusions com-
plètent le mémoire.
Sans doute, ce travail laisse encore ouvertes quelques-
unes des questions soulevées; ses résultats, néanmoins,
sont intéressants à plus d'un titre. Pour ne rappeler que
les points principaux, l'auteur indique les conditions
dans lesquelles l'acidité apparaît; il réfute définitivement
un certain nombre de déductions inexactes — celles de
Raph. Dubois, par exemple ^; il améliore la technique
expérimentale par l'emploi de l'albumine incoagulable;
il établit d'une façon péremptoire, par le dosage de
l'azote, l'absorption des produits digérés.
Aussi avons-nous l'honneur de proposer à la Classe
de décerner le prix à ce mémoire et d'en ordonner
l'impression. »
Rnppot't de ,F#. Giikinet, tlvMxiéme coÈttntiHmnirv.
(( Le mémoire envoyé en réponse à la première ques-
tion traite spécialement de la digestion des Nepenthes.
Le rapport détaillé de mon savant confrère, premier
commissaire, me dispense d'une analyse qui ferait double
emploi. Les premiers chapitres, consacrés aux considéra-
tions générales sur la digestion et à l'exposé des généra-
( 591 )
lités relatives aux plantes carnivores, sont suffisamment
étendus pour donner une idée exacte des connaissances
actuelles sur le sujet traité. Les chapitres suivants, con-
sacrés aux Nepenthes, constatent l'absorption des albu-
minoides par les urnes des Nepenthes, à la suite d'une
digestion préalable dans un milieu acide.
Pour ce qui concerne les organes de l'absorption,
l'auteur en arrive à la conclusion, peu inattendue du
reste, qu'elle a lieu par les glandes mêmes qui sécrètent
le liquide digestif. Ainsi que l'a fait remarquer le savant
premier commissaire, ce chapitre est écourté et les con-
clusions sur ce point manquent un peu de base expéri-
mentale.
Quoi qu'il en soit, le mémoire est intéressant, claire-
ment et simplement écrit; il étend dans une certaine
mesure nos connaissances sur la digestion des plantes
carnivores et je propose volontiers, avec le premier com-
missaire, de lui décerner le prix et d'en ordonner l'im-
pression dans un des recueils académiques. »
M. Crépin, troisième commissaire, déclare partager
l'opinion de ses deux collègues sur le mémoire examiné
par eux et adopter leurs conclusions.
La Classe, ratifiant les conclusions des rapports des
commissaires, a décerné sa médaille d'or, d'une valeur de
six cents francs, à l'auteur de ce mémoire, M. Georges
Clautriau, assistant à l'Institut botanique, à Bruxelles.
( nn )
DEUXIÈME QUESTION.
On demande des recherches physiologiques nouvelles sur une
fonction encore mal connue chez un animal invertébré.
Happoi't de ff. Plaiffau, pfemiet' coêntniataiftf.
« Kowalevsky, appliquant en 1889, après Schindler et
Solger, la méthode des injections physiologiques colorées
aux Invertébrés, dans le but de mettre en évidence les
éléments excréteurs, obtint des résultats d'une telle
valeur que les biologistes s'empressèrent d'employer ce
moyen d'investigation.
Kowalevsky avait utilisé le procédé pour l'étude d'or-
ganes d'excrétion chez des Lamellibranches, des Gastro-
podes et des Céphalopodes.
En 1892 parut dans les Archives de biologie l'important
travail de Cuénot où, se servant de la méthode avec cer-
taines modifications, ce naturaliste arrive à la conclusion
que, chez les Gastropodes pulmonés, il n'existe pas moins
de quatre espèces d'organes excréteurs : le rein, les cel-
lules vacuolaires et les cellules cyanophiles du foie, enfin
des cellules excrétrices disséminées dans le tissu conjonc-
tif.
En 1895, E. Hecht, élève du précédent, au cours d'une
étude sur les Nudibranches de Roscoff, s'est occupé de
l'excrétion chez ces animaux.
En dernier lieu (1896), les injections colorées ont été
mises en usage par P. Pelseneer pour l'examen des reins
de plusieurs Mollusques.
Nos connaissances sur la nature et, jusqu'à un certain
point, sur le fonctionnement des organes de désassimila-
tion des Mollusques, étaient donc assez avancées. L'auteur
du mémoire soumis à notre examen et qui porte la
( 593)
devise : La physiologie des invertébrés est presque tout
entière à l'état de desideratum (L, Fredericq), s'est proposé
de relier entre eux les résultats acquis jusqu'à ce jour et
de les étendre par une investigation portant sur l'ensem-
ble du groupe. Ainsi qu'on va le voir, son travail est tout
autre qu'une compilation et renferme beaucoup de choses
intéressantes, fruits d'efforts personnels.
Après quelques considérations sur le rôle de l'excré-
tion dans l'organisme, sur la méthode des injections, sur
l'aptitude particulière de telle ou telle catégorie de cel-
lules excrétrices à absorber plus spécialement certaines
matières colorantes et sur la technique qu'il a suivie,
l'auteur expose en détail les résultats de ses investiga-
tions sur des Mollusques appartenant aux principaux
ordres.
Chez les Amphineures (espèce étudiée: Acanthochiton
discrepans), on ne connaissait que les néphridies. Les
injections physiologiques y mettent en outre en évidence
deux autres espèces de cellules excrétrices : celles des
conduits réno-péricardiaux et des cellules éparses dans le
tissu conjonctif.
Chez les Solénoconques (espèce étudiée : Dentalium vul-
gare), l'injection de carminate décèle aussi la présence
de nombreuses cellules excrétrices du tissu conjonctif
s'ajoutant donc aux néphridies seules connues jusqu'à
présent.
Quatorze espèces marines et d'eau douce ont été étu-
diées par l'auteur dans le groupe des Gastropodes proso-
branches. L'excrétion y est dévolue.: 4'' aux néphridies ;
2° à des cellules closes du tissu conjonctif, puis, 5", dans
plusieurs genres, à certaines cellules du foie analogues
aux cellules vacuolaires du foie des Pulmonés.
5™^ SÉRIE, TOME XXXVI. 40
( 594 )
L'auteur décrit la façon dont le rein pair ou impair se
comporte vis-à-vis des injections colorées et constate que,
lorsqu'il y a deux reins, généralement très inégaux, ceux-
ci peuvent ou bien avoir des fonctions identiques (Paiera),
ou bien, ainsi que l'avaient déjà observé Kowalevsky et
Pelseneer, avoir des rôles ditférents {Haliotis, Trochus).
Tandis que si le rein est unique (gaucbe), l'organe impair
représente physiologiquement les deux glandes népbri-
diennes, contenant, en effet, les deux espèces de cellules
excrétrices respectivement localisées ailleurs dans le
rein droit et le rein gauche {Paludina, Cydostoma, Bucci-
num, Nassa, etc.).
Parmi les Opisthobranches, huit espèces ont servi aux
recherches. Les expériences ont permis de confirmer le
rôle de la néphridie étudié par Kowalevsky, celui de cer-
taines cellules du foie signalées par Cuénot et Hecht,
celui enfin des cellules excrétrices du tissu conjonctif
décrites par ce dernier.
Pour les Pulmonés, l'auteur renvoie au travail de Cué-
not et aux rectifications ultérieures du même naturaliste.
Dans le groupe des Lamellibranches, il a étudié
quatorze formes et a cherché à préciser et à étendre nos
connaissances sur les glandes péricardiques de ces Mol-
lusques.
Chez les Céphalopodes où l'on connaissait deux espèces
d'organes excréteurs, les néphridies et les cœurs bran-
chiaux, l'auteur prenant comme sujet d'étude la Sepia
ofjicinalis, a examiné spécialement le cœur branchial et
a pu ainsi ajouter à la liste des organes d'excrétion des
Céphalopodes Y appendice qui coiffe ce cœur. Cet appen-
dice renferme, en effet, deux catégories de cellules excré-
trices, les cellules épithélialcs et des cellules particulières
logées dans le réticulum conjonctif.
( m^ )
L'auteur, cherchant à grouper les résultats, passe
ensuite à des considérations d'une portée phis générale.
Il signale d'abord le phénomène fréquent de la fixation
du carminate des injections sur des substances amorphes
qui se colorent plus ou moins vivement, telles que le
lissu conjonctif de l'axe squelettique des branchies, les
baguettes logées dans l'épaisseur des lames de soutien de
celles-ci. Il rapj)e]le l'existence, chez les Gastropodes
d'eau douce et chez les Lamellibranches du groupe des
Naïades, de nombreuses concrétions constituées soit par
du carbonate de calcium seul, soit par l'association d'une
substance organique avec du carbonate et du phosphate
de calcium. Le rôle de ces concrétions logées dans le
lissu conjonctif est en grande partie inconnu, mais elles
possèdent aussi, chez le Mollusque vivant, une affinité
intense et persistante pour le carminate d'ammoniaque.
La constatation de ces faits ne manque pas d'importance
pratique; elle met en garde contre des erreurs possibles.
L'auteur consacre un chapitre intéressant au fonction-
nement des cellules excrétrices. Si ce fonctionnement et
l'évacuation des produits de désassimilation se comprend
aisément lorsque les cellules en question tapissent des
cavités en communication avec l'extérieur, il en est
autrement si les organes excréteurs sont clos, comme
les cellules éparses dans le tissu conjonctif des Aniphi-
neures, des Solénoconques et des Gastropodes, le cœur
branchial et son appendice chez les Céphalopodes, les
glandes péricardiques palléales des Lamellibranches. Ici
le fonctionnement n'apparaît plus avec évidence et des
recherches spéciales s'imposaient.
Dans le cas des glandes péricardiques palléales des
Lamellibranches, dont les cœcums ont en réalité leurs ori-
fices oblitérés, sans usage, et où les produits rejetés par
( 596 )
les cellules tapissant ces cœcunis ne peuvent gagner le
péricarde, les choses se passeraient, d'a|)rès l'auteur du
mémoire, de la façon suivante : de nombreux amibocytes
circulant dans les lacunes sanguines interposées entre
les tubes de la glande, passent au travers des parois,
pénètrent dans les tubes et, agissant comme phagocytes,
absorbent la sécrétion des cellules émise sous forme de
boules. Après un certain temps, ces amibocytes, bourrés
de produits d'excrétion, refont, en sens inverse, le chemin
parcouru, retournent dans les lacunes sanguines et de là
passent dans la circulation générale, où il est aisé de les
retrouver. Ce serait là une des origines des phagocytes à
inclusions rencontrés par plusieurs observateurs et, entre
autres, par C. De Bruyne, dans le sang des Lamelli-
branches, et qui, comme ce dernier l'a montré dans un
travail récent, finissent par traverser les épithéliums de la
surface externe pour quitter définitivement l'organisme.
Toutefois l'auteur du mémoire, s'appuyant sur diverses
observations, croit qu'il ne faut pas s'exagérer cette dia-
pédèse de phagocytes et que beaucoup d'entre eux, au
lieu de sortir du corps du Mollusque, se logent à demeure
dans le tissu conjonctif, où leur nombre augmente de plus
en plus avec l'âge de l'animal.
Quant aux cellules excrétrices closes du tissu conjonctif
des autres Mollus(iues, Amphineures, Solénoconques,
Gastropodes et Céphalopodes, il est possible qu'il y ait
aussi intervention de phagocytes pour enlever les produits
qu'elles forment.
Cependant, chez les Gastropodes et 'spécialement chez
Paludina, elles fonctionneraient plus ou moins comme
reins d'accumulation. A mesure que l'individu vieillit, les
vacuoles des cellules excrétrices du tissu conjonctif se
chargent de produits solides partiellement cristallisés,
( Sî>7 )
puis se fragmentent et sont la proie de phagocytes (pii
disséminent dans tout le corps du Mollusque des concré-
tions partiellement digérées.
Suit un court chapitre hypothétique sur la phylogénie
des cellules excrétrices du tissu conjonctif, puis vient un
chapitre final sur la comparaison des Mollusques avec
d'autres groupes. L'auteur y montre, en se basant sur les
résultats obtenus par divers biologistes, que le fait de la
collaboration de cellules excrétrices closes et de phago-
cytes qui distribuent dans les tissus une quantité consi-
dérable de granules solides augmentant graduellement
avec l'âge de l'individu, se retrouve, avec quelques
variantes, chez les Annélides oligochètes et polychètes,
les Hirudinées, les Sipunculides et les Échinodermes.
Tel est, en résumé, le contenu du mémoire; l'impres-
sion générale qui m'est restée après un examen appro-
fondi est celle d'un travail d'une valeur incontestable,
mais incomplet. Si l'auteur avait pris pour titre Applica-
tion de la méthode des injections colorées aux Mollusques,
je n'aurais rien à dire; mais en intitulant son mémoire
L'excrétion chez les Mollusques, il faisait espérer des
résultats qui ne s'y rencontrent pas.
Je précise : l'auteur nous donne (pages 2 et 12 du
manuscrit) l'énumération des quelques substances chi-
miques, urée, acides urique et hippurique, guanine ou
xanthine, connues jusqu'à présent comme sécrétées par
les néphridies ou la glande péricardique d'un certain
nombre de Mollusques, mais il n'a guère cherché soit à
allonger cette liste, soit à retrouver.les mêmes corps dans
des groupes de Mollusques où ils n'avaient pas été
signalés. Ainsi, par exemple, parlant du cœur branchial
des Céphalopodes, il dit (page 35 du manuscrit) : Chez
Octopus, ce il y a dans chaque cellule une grosse concré-
( 598 )
tion colorée; c'est à la présence de ces concrétions qu'est
due la couleur violette du cœur des Octopodes » ; puis,
signalant les granules nombreux qui chargent le cyto-
plasme de ces mêmes cellules chez Sepia : « Ce sont des
çranules à réaction acide qui fixent le carrainate et la
fuchsine; sans aucun doute, ils représentent le produit
de désassimilation fabriqué par la glande. »
Le lecteur est en droit, me semble-t-il, de demander
quelle est la nature chimique des concrétions des Octopus,
des nombreux granules des cellules du cœur branchial
des Sepia; il désirerait au moins voir l'auteur instituer
quelques expériences pour tenter d'arriver à une solution
de ces questions.
Le côté faible du travail me parait donc être celui-ci :
l'auteur, extrêmement habile dans l'emploi de la méthode
des injections physiologiques colorées, n'a pour ainsi
dire eu recours qu'à celte méthode. Précieuse comme
moyen d'investigation topographique pour mettre en
évidence des éléments à fonction excrétrice, elle peut
tout au plus nous renseigner parfois sur la réaction soit
acide, soit alcaline, ou nous permettre de deviner, par
comparaison avec des cas connus, quels sont les produits
d'excrétion probables. Mais ce ne sont là que les premiers
jalons dont le biologiste ne doit pas se contenter; il doit
chercher à déterminer la nature réelle des produits
excrétés par les diverses glandes. L'auteur fait preuve
d'assez de connaissances physiologiques pour montrer
qu'il serait capable de poursuivre ses recherches dans le
sens que j'indique. J'émets le vœu de le voir s'engager
plus tard dans cette voie.
Malgré ces critiques, le travail qui nous est soumis est
une œuvre très sérieuse, due évidemment à la plume d'un
naturaliste rompu de longue date aux recherches anatomo-
( o99 )
physiologiques sur les Invertébrés; ilHgurerait fort hono-
rablement dans les publications de l'Académie. Je pro-
pose à la Classe des sciences de lui décerner le prix et
d'en ordonner l'impression ainsi que la reproduction des
planches dans le recueil des Mémoires in-4° (1). »
MM. Éd. Van Beneden et Van Bambeke déclarent se
rallier aux conclusions de ce rapport.
LaClasse, ratifiant ces conclusions, décerne sa médaille
d'or, d'une valeur de six cents francs, à l'auteur du
mémoire : M. L. Cuénot, professeur de zoologie à l'Uni-
versité de Nancy.
ELECTIONS.
La Classe procède, conformément à l'article :2 du
règlement général et à l'article 44 de son règlement
particulier, aux élections pour les places vacantes.
— Les résultats du concours annuel et des élections
seront proclamés dans la séance publique fixée au vendredi
16 décembre.
PRÉPARATIFS DE LA SEANCE PUBLIQUE.
Conformément à l'article 17 de son règlement,
M. Dupont, en sa qualité de directeur, et M. F. Folie
donnent lecture de leurs discours.
(1) L'auteur a reçu l'autorisation de faire imprimer son mémoire
dans les Archives de Biologie, publiées par MM. Éd. Van Beneden et
Ch. Van Bambeke.
( GOO )
CLASSE DES SCIEMCES.
Séance publique du 16 décembre 1898.
M. Ed. Dupont, directeur.
M. le chevalier Edm. Marchal, secrétaire perpétuel.
Prennent également place au bureau :
MM. Ch. Tardieu, président de l'Académie, et W.
Spring, vice-directeur de la Classe des sciences.
Sont présents : MM. G. Dewalque, Brialmont, Éd.
Van Beneden, C. Malaise, F. Folie, Fr. Crépiu, Ch.
Van Bambeke, Alfr. Gilkinet, G. Van der Mensbrugghe,
L. Henry, M. Mourlon, P. De Heen, C. Le Paige, Ch.
Lagrange, F. ïerby, J. Deruyts, Léon Fredericq, J. Neu-
berg, A. Lancaster, membres; Ch. de la Vallée Poussin,
associé; A. -F. Benard, L. Errera, P. Francotte, Fr. De-
ruyts et Ch.-J. de la Vallée Poussin, correspondants.
Assistent à la séance :
Classe des lettres. — MM. A. Giron, vice-directeur ;
Ch. Potvin, T.-J. Lamy, Ern. Discailles, membres; J.-C.
Vollgraff> associé; J. Leclercq et E. Gossart, correspon-
dants.
Classe des beaux- arts. — MM. G. Guffens, J. Deman-
nez, G. De Groot, Gust. Biot, H. Hymans, Jos. Stal-
laert, G. Huberti, Éd. Van Even, J. Winders et Ém.
Janlet, membres.
\
( 601 )
Quelques mots sur l'Evolution; par É, Dupont,
directeur de la Classe des sciences pour 1898.
La recherche de \à relation des effets et des causes, <}ui
trouve sa formule abstraite dans la donnée que tout pro-
cède d'un antécédent, a, dès les premiers temps de la
pensée, préoccupé l'esprit humain. Par là, on abordait
le problème scientifique des origines que, de nos jours,
on traduit d'un mot, embrassant l'une des plus puis-
santes vues de la science et aussi l'une de celles (jui
eurent le plus de mal à se l'aire jour : l'Évolution.
Cette notion, comportant à la lois l'idée de dérivation
et l'idée de différenciation, est d'abord connexe à la
notion de la succession du temps ; avant tout, elle est dans
sa dépendance, car le temps en est le principal facteur, la
fonction essentielle. Or la notion scientifique du temps
fut elle-même longue à acquérir avec l'ampleur qui lui
convient.
Les géologues, dont les recherches reposent cependant
sur l'étude de la succession des événements, hésitaient
devant les instances des précurseurs qui les pressaient
d'adopter, dans la considération du passé terrestre, une
durée indéfinie et de rejeter radicalement tout appel à
des phénomènes imaginaires en vue de raccourcir ce
passé et d'en interrompre la continuité. Mais, lorsque
ce progrès de doctrine eut été accompli, la donnée
de l'évolution fit rapidement son cliemin. Elle est
aujourd'hui à la base de toute notre conception de la
nature. C'est ce qui me porte, dans la lecture que l'usage
( 602 )
impose aux directeurs sortants, à vous soumettre, avant
les résultats de mes études et de mes recherches, les
réflexions que son vaste domaine m'a suggérées.
I.
L'idée que les phénomènes de même ordre, quelque
variés qu'ils soient, sont fondamentalement liés dans le
passé, non seulement par leur succession, mais surtout
par une filiation directe, ouvrait aux investigations un
domaine d'une merveilleuse fécondité. Aussitôt, la suite
des changements observés dans la nature se précisa et
put exactement se classer.
Si les manifestations de même catégorie annoncent
une filiation, ou pour mieux dire une hérédité, elles
subissent aussi la réaction de l'ensemble de leur milieu
et se soumettent, dès qu'elles peuvent se produire, à des
adaptations corrélatives.
Ainsi les phénomènes, considérés dans leur succession,
étant sujets à deux actions : la filiation qui les rattache
à leurs précédents et les différenciations qui expriment
leur appropriation à d'autres circonstances, — de l'héré-
dité procèdent les ressemblances, de l'adaptation les diffé-
rences.
Mais, par le fait même qu'il y a filiation et que celte
filiation laisse toujours sa marque au milieu des transfor-
mations, nous trouvons avec sa relativité, comme support à
cette conception ou plutôt à cette constatation, une sorte
d'axiome scientifique que voici : « Les phénomènes se
» manifestent dans le présent et se sont manifestés dans
( 603 )
» le passé comme si les lois de la nature étaient im-
M muables. »
L'édifice de la compréhension et de la reconstitution du
passé repose sur ces prémisses. Sans elles, tout ce que
nous savons ou croyons savoir sur les époques lointaines
ou récentes, sur la corrélation de leurs phénomènes,
s'écroulerait à l'instant et irrémédiablement pour faire
place au chaos, à un amas de faits incohérents et sans
liaison. La science pour le présent et pour le passé aurait
cessé d'exister.
Heureusement le grand principe, que la science adopte
comme guide pour explorer l'espace et pour sonder le
temps, n'est pas un produit de raison pure, un simple
concept philosophique imaginé en vue d'expliquer le cours
des choses.
11 n'est pas davantage une simple théorie scientifique,
une sorte de tentative à caractère temporaire qui, faute
de mieux et sauf à se modifier ou même à être remplacée
suivant les nécessités, s'impose comme une orientation
vers de nouvelles recherches.
Le principe de la fixité des lois a de plus solides assises.
La science, dans ses études sur resj)ace et sur le temps,
l'a constamment vérifié. Quelles que soient les directions
qu'elle ait prises, il a acquis, par l'évidence que fournit
un fait constant, le rang d'une notion considérée comme
définitive. C'est donc bien là une loi scientifique et elle
est considérable, parce que, s'appliquant au temps aussi
bien qu'à l'espace, elle englobe les autres lois naturelles
et que, par elle, nous possédons un moyen assuré de
tenter la restauration du passé de l'Univers. Serait-ce
aller au delà de sa portée de l'appeler la loi suprême de
la science?
( 604 )
Mais, pendant que nous constatons cette permanence
des relations nécessaires des phénomènes, nous sommes
témoins de modifications, répétées et innombrables, dans
le passé et le présent, qui nous apprennent que la varia-
bilité des manifestations est dans la nature au même rang
que la fixité de ses lois. Principe de stabilité et prin-
cipe de mobilité marchent de pair, avec le même degré
d'évidence.
C'est que les causes en jeu, étant constantes dans
leurs éléments, sont multiples dans leur action; elles
réagissent sans relâche les unes sur les autres, s'adaptent
mutuellement en créant des résultantes nouvelles, des
effets différents d'intensité et, par conséquent, sont
variables dans leurs conditions. 11 en résulte une sorte
d'équilibre instable, une suite de transformations inces-
santes.
Ainsi apparait cet autre point fondamental de l'évolu-
tion : (c La variabilité des phénomènes se présente comme
» le résultat de l'action combinée des lois de la nature. »
Ces deux grandes données de la doctrine sont établies
par l'observation directe qui les a reconnues et vérifiées
dans toutes les voies, et leur constance les a douées
d'une force inébranlable. Mais, par elles-mêmes, elles
sont encore incomplètes, puisqu'elles exigent l'adjonction
d'une troisième notion, celle qui permet de suivre la
marche du temps, ce qu'on appelle une méthode chrono-
logique. Il a donc fallu que la géologie, avant ses essais
de reconstitution du passé, découvrit son procédé pour
apprécier la progression du temps, et elle l'a trouvé aussi
précis qu'elle pouvait le désirer, au point que, sous ce
rapport, elle n'a guère à envier aux sciences exactes :
« Lorsque deux dépôts horizontaux sont superposés, le
( 605 )
» dépôt recouvert est toujours plus ancien que le dépôt
» recouvrant. »
Ce principe chronologique, qui a été adapté aux
couches bouleversées et à quelques autres cas particuliers,
n'a pas de postulatum, à moins que l'on ne récuse la
permanence des lois d'un même phénomène, car les ter-
rains ont été surtout déposés par les eaux et, ne l'eussent-
ils pas été dans certaines occurrences, leur succession,
sauf des cas exceptionnels faciles à distinguer, serait
encore établie par les superpositions.
La science a pu ainsi entrer en possession de sa
méthode pour pénétrer d'une manière assurée, par les
assises de surface, dans le passé du globe, y reconnaître
la suite régulière des phénomènes à travers les temps,
y installer enfin de réelles tables chronologiques basées,
sinon sur les durées, du moins sur la succession exacte des
événements : sur ce point aussi, son armure est solide.
Cette conquête, aussi belle par la puissance de ses
résultats que par la précision de sa donnée, nous a ouvert
le passé terrestre et a donné issue à la méthode de l'évo-
lution.
Les terrains dont la succession dans le temps peut être
si sûrement fixée, allaient désormais pouvoir, par leur
nature et leur contenu, nous révéler leur histoire et nous
admettre à considérer les événements qui se sont déroulés
à travers des durées prodigieuses.
C'est alors que, de nouveau sous le couvert de la fixité
des lois de la nature, appelé par l,es géologues Causes
actuelles, s'est présentée à nous une suite variée de phéno-
mènes, sous l'aspect d'un vaste enchaînement, d'où il
semble clairement apparaître que les événements de
( 606 )
notre passé convergent pour tracer, simultanément avec
une longue suite d'adaptations et de transformations,
leurs filiations intimes et continues, et faire arriver le
globe à son état actuel. Chaque phénomène s'affirme
comme procédant d'un phénomène antérieur de même
ordre qui le rattache à sa souche et tend à le rendre fixe
et immuable, tandis qu'il ne tend pas moins à s'en écarter
par toutes sortes de variations et de différenciations.
Nous disons en conséquence qu'ici nous trouvons les
caractères d'une véritable évolution, puisque le double
processus, formant l'essence de toute action évolutive et
se présentant l'un comme centripète, l'autre comme cen-
trifuge, paraît diriger sans interruption les manifestations
du passé terrestre où nous pouvons avoir accès.
Tout d'abord, les phénomènes que nous révèlent la
suite des terrains, leur composition et leurs dispositions,
nous conduisent à une nouvelle donnée d'évolution de
haute importance. Aucun vestige de périodicité ne s'y
observe, aucune réapparition régulière ne s'y constate.
Dans la formation et le façonnement de la croûte terres-
tre, l'évolution suit une voie formellement continue, sans
retour sur elle-même. Les actions reposent sur les mêmes
causes de permanence, elles sont mutuellement contin-
gentes pour leurs variations, mais non soumises à des
inffuences de rotation qui les feraient réapparaître pério-
diquement et les placeraient, comme le globe lui-même,
dans la sphère des phénomènes astronomiques.
Ce sont, toujours et sans ordre alternatif régulier, des
dépôts à prédominance ou de silice ou de silicates alumi-
neux ou de calcaire; ce sont des roches éruptives de
natures et de dispositions similaires; ce 'sont des filons
( 607 )
ou des amas métallifères de mêmes allures; ce sont les
mêmes modifications de terrains accompagnant des cir-
constances analogues; ce sont encore des perturbations
et des bouleversements de couches avec les mêmes carac-
tères généraux.
Ces phénomènes se manifestent en développement
sériai, avec une amplitude, une intensité et des caractères
secondaires variables; jamais dans un cycle déterminé.
Telle se montre l'évolution de l'enveloppe terrestre, en
opposition saillante avec les mouvements dont la terre
est animée.
Mais quel que puisse être l'intérêt d'un examen détaillé
du façonnement de la partie du globe que nous pouvons
directement étudier, il cède cependant le pas à l'étude
du développement de la vie. Les relations mutuelles des
êtres organisés à travers les temps ne créent-elles pas,
à l'observation et à la méditation, une des questions les
plus vastes et les plus enfiévrantes? Même dépouillé de
tout esprit (Va priori, pris en lui-même dans la seule vue
de connaître curieusement par des faits, et non par idéo-
logie, comment les choses se sont passées, le problème
conserve ses côtés obsédants qui veulent que l'attention
s'y fixe sans relâche : il faut s'assurer comment les êtres
organisés se sont comportés au cours des âges. Ceux qui
nous entourent sont très variés ; ceux qui ont vécu dans le
passé géologique le sont plus encore. Y a-t-il entre tous
ces êtres, vivants ou fossiles, des relations organiques qui
démontrent ou seulement fassent pressentir une descen-
dance, et, s'il en est réellement ainsi, quels caractères ces
relations ont-elles revêtus et quelle signification annon-
cent-ils?
Or c'est précisément l'étude de cette grande inconnue
( 608 )
qui a donné naissance à la notion de l'évolution, en
faisant démêler son double facteur : la filiation et l'adap-
tation de l'être. Devenue d'une application générale pour
toute variation qui se produit en quelque sorte automati-
quement, la donnée évolutive exprime nettement l'orien-
tation actuelle de la science, dès que le temps entre en
considération.
En d'autres termes, la recherche des rapports de des-
cendance est la matière delà vaste enquête dont les espèces
organisées sont l'objet. Que nous a-t-elle positivement
révélé? D'une part, conservation des mêmes plans d'orga-
nisation dans le règne animal comme dans le règne végé-
tal, pour le temps comme pour l'espace; d'où il résulte
l'indication de la possibilité d'une filiation directe reliant
respectivement les animaux et les végétaux. D'autre part,
variations d'organisation souvent fort étendues, qui main-
tiennent néanmoins ces attaches respectives plus ou moins
voisines ou plus ou moins lointaines, suivant que les épo-
ques géologiques sont plus ou moins rapprochées ou plus
ou moins distantes, comme s'il y avait ramification pro-
gressive des types animés pour aboutir à l'état présent.
C'est ce qu'énonce avec une netteté parfaite l'écrivain
le plus récent sur ce sujet grandiose, lorsqu'il dit : « Il
» faut reconnaître que le monde fossile n'est pas distinct
)) du monde actuel ; il n'y a qu'un monde unique qui s'est
» continué depuis les plus anciens âges jusqu'à nos
)) jours. »
Ainsi exprimée, la donnée est incontestable. Elle
reflète, sans qu'il y ait une objection à y faire, ce que
nous pouvons discerner aujourd'hui dans le passé de la
vie et définit la direction des recherches. Elle nous dit
clairement que c'est à connaître les enchaînements des
( 609 )
êtres par voie de descendance que doivent tendre nos
efforts.
L'indication de ces rapports mutuels d'organisation
est l'objet même des classifications. Aussi, dès qu'on
eut une notion précise de la succession des temps et des
modifications simultanées qu'ils ont produites dans les
manifestations de la vie, on essaya de substituer des
classifications généalogiques aux simples classifications
séparant ou groupant les êtres d'après leurs seules
alFinités organiques.
Par d'ingénieuses figures, à l'instar de ce que font les
généalogistes pour les familles, on a cherché à retracer la
lignée des êtres. Mais il importe de ne pas leur donner
une portée qu'elles n'ont pas et ne peuvent avoir encore.
Elles expriment des réalités formelles : les relations
organiques combinées avec la distribution dans le passé,
et l'on y joint d'une manière saisissante, sous la forme
d'un arbre généalogique, une vue de théorie, l'orien-
tation synthétique coordonnant ces notions positives, —
en d'autres termes, l'interprétation rationnelle qu'on est
porté à donner à ces faits connexes. Car la généalogie
des êtres n'est encore que pressentie, et, je ne suis pas
le seul à le faire remarquer, nous devons reconnaître
que nos efforts n'ont pu aller au delà.
Ainsi que nous l'exposerons bientôt avec plus de
détails, il ne nous a pas encore été donné de voir, en les
suivant à travers les terrains, les espèces se transformer,
passer des unes aux autres et constituer la véritable trame
de l'action évolutive. Dans aucun cas, on n'a pu restaurer
une généalogie à l'état de fait définitivement acquis.
Même, pour ne rappeler que la plus célèbre, la lignée
S""^ SÉRIE, TOME XXXVI. 41
( 610 )
des Équidés, qui parut pendant plusieurs années établie
sur des bases certaines, a vu surgir récemment, surtout
pour les types du tertiaire ancien, des doutes et même
des dénégations parmi des autorités de la science. Les
données si curieuses de l'embryologie ont aussi soulevé
naguère des méfiances sur la portée décisive qu'on avait
cru pouvoir d'abord leur attribuer en faveur de la théorie
généalogique.
Est-ce à dire que, devant notre impuissance actuelle,
il faille renoncer à la doctrine de la descendance comme
à un beau rêve évanoui? Loin de là. Ce serait une
manière de voir aussi fâcheuse qu'erronée et l'on tombe-
rait dans un extrême bien plus malencontreux encore. Il
n'est au contraire nullement établi que la science ait fait
fausse route. Ce que nous avons à retenir de l'état des
choses, c'est que cette doctrine est une théorie de direc-
tion, que les relations des êtres dans le temps doivent
manifestement être recherchées dans ce sens, parce
qu'elle a pour elle toutes les vraisemblances, que seule
elle rend sérieusement compte des faits recueillis depuis
la naissance de l'histoire naturelle, qu'en même temps
qu'on ne peut lui opposer rien de sérieux et qu'elle
ouvre une voie à la fois féconde et rationnelle, elle porte
en elle tous les caractères de ces vues souvent appelées
des vérités logiques, source ordinaire des plus fortes
convictions.
J'ai quelquefois cherché si l'on ne pourrait trouver,
dans l'histoire de la science, des exemples de situations
analogues à celle où se présente en ce moment la théorie
de l'évolution, et il m'a paru que l'histoire de la décou-
verte de la rotation de la terre fournissait un parallèle
( 6ii )
s'adaptant bien à notre cas. Copernic, reprenant la
donnée de certains astronomes de l'antiquité, la rendit
plus probable que l'hypothèse contraire, la seule qui pût
lui être opposée, celle de la terre immobile, centre du
monde. Pendant trois siècles, les convictions ne firent
que croître avec les probabilités de plus en plus grandes,
mais ce n'étaient encore que des convictions et des pro-
babilités, une théorie, la seule admissible assurément.
Pour qu'elle passât à l'état de vérité scientifiquement
démontrée, sur laquelle il n'y eût plus à revenir, il a
fallu que d'admirables expériences nous fissent voir ht
terre en mouvement.
C'est dans l'un de ces stades transitoires d'élaboration
que se trouve la question de la descendance. La convic-
tion est unanime : elle exprime une loi existante, elle doit
répondre à des réalités formelles; la seule hypothèse
qu'on puisse lui opposer, celle des « créations succes-
sives », ne pourrait plus être soutenue ni scientifiquement
ni logiquement. Mais, jusqu'ici, elle n'a pu franchir les
limites de la théorie; elle attend encore sa démonstration.
Lorsqu'une question se trouve dans cet état, l'insuccès
des recherches peut venir à la fois de la complexité des
éléments en jeu et de l'insuffisance des documents. Nous
rencontrons ici ces deux conditions. Le thème est fort
complexe, car il doit être abordé par beaucoup de voies
différentes, toutes appelées à fournir d'indispensables
contingents. Quant à l'insufTisance des données acquises,
la suite de cet aperçu montrera une fois de plus combien
elle est encore considérable.
( 012 )
II.
Je dois maintenant exposer les résultats de mes études
et de mes recherches sur le problème en tentant de
l'aborder par les côtés qui m'ont été accessibles. Je pré-
senterai d'abord quelques réflexions sur les plans fonda-
mentaux de constitution des êtres; puis, des observa-
tions sur le développement stratigraphique de la vie et
la solution qu'elles semblent faire prévoir; enfin, un
examen sommaire des transformations du globe sous la
main de l'homme.
Il est constaté depuis longtemps que les êtres inorga-
nisés, les minéraux, sont partout soumis aux mômes lois,
tant chimiques que cristallographiques. On ne connaît
pas d'espèce minérale dont la composition n'obéisse aux
lois des combinaisons découvertes dans nos laboratoires
et dont les cristallisations ne soient assujetties aux lois de
symétrie de l'un des systèmes dans lesquels on a rangé
les cristaux. S'il en est ainsi pour le globe terrestre, nous
devons remarquer que le fait se retrouve pour les météo-
rites, ces fragments de matière cosmique qui accèdent
jusqu'à nous, de sorte que le principe peut dépasser en
généralisation, par des données immédiates, la sphère où
nous nous mouvons.
Mais ce phénomène, observé dans l'espace, s'applique
tout aussi nettement au temps. Que nous considérions
les minéraux des roches les plus anciennes, des divers
schistes cristallins notamment, que nous les prenions dans
la suite des terrains qui, au cours du passé, ont aidé à
façonner la croûte terrestre, terrains éruplifs ou terrains
de seconde formation, sédimentaires et autres, modifiés
( 615 )
ou non par des actions métamorphiques, toujours ils
présentent le même phénomène : ils sont constitués
d'après les mêmes lois chimiques et cristallographiques.
C'est le plan fondamental et unique de l'être inorganisé.
Et qu'observons-nous à l'égard de la matière placée
sous l'action de la vie ou que la vie a jadis animée? Nous
voyons les êtres s'y grouper en deux grandes catégories
qu'on a appelées le règne animal et le règne végétal, et
qui répondent à deux grandes fonctions opposées dans la
nature. Peu importe que, dans leurs êtres inférieurs, ils
présentent parfois des contacts ne permettant pas de les
répartir sûrement et de décider s'ils sont plutôt animaux
que végétaux. Ce défaut de ligne de démarcation précise
ne peut guère nous étonner, puisque le même élément,
la cellule, est à la base du règne végétal aussi bien que
du règne animal. Peut-être pourrait-il faire naître la
supposition qu'il y a unité au point de départ de l'être
organisé et que les deux règnes représentent seulement
des différenciations bifurquées. Mais la donnée prépon-
dérante qui est devant nous, est d'abord qu'on n'a pas
reconnu sur le globe d'être vivant qui ne soit susceptible
de prendre place dans un de ces deux règnes; ensuite,
que cette constatation sur l'espace se reproduit aussi pour
les êtres qui ont passé par la vie à travers le temps. Pas
plus dans le temps que dans l'espace, il ne se manifeste
de traces d'un troisième règne organique.
Les êtres animés sont végétaux ou animaux ; ils sont,
dans leur immense majorité, constitués sur l'un de ces
deux plans d'organisation et jamais .sur un autre. En
dehors de quelques organismes unicellulaires dont le
classement reste douteux d'une manière provisoire ou
définitive, tout être du globe qui est ou qui a été doué
( 614 )
de vie, ressortit de l'une ou de l'autre de ces deux consti-
tutions, toujours avec les mêmes lois anatomiques et,
par voie de conséquence, avec les mêmes lois physiolo-
giques.
Ainsi, dans le monde minéral, une forme fondamentale
unique; dans le monde animé, deux moules juxtaposés,
peut-être unis à leurs contins. De sorte que l'être, dans
l'acception qu'il prend en histoire naturelle, qu'il soit
organisé ou inorganisé, ne se montre et ne s'est jamais
montré propre à se constituer que sous trois modes
essentiels : minéral, végétal ou animal. Partout et tou-
jours, sans jamais y déroger dans la limite où l'observa-
tion a pu s'étendre, ces mêmes manifestations, produits
des mêmes lois, se représentent et se sont représentées
sans divergences. Voilà ce que nous enseignent les
recherches de la science à l'égard des êtres : trois plans
de constitution, pas un de plus!
Je ne serai pas assez téméraire pour tenter de démêler
le pourquoi de cette étonnante limitation de nombre.
Mais il me paraît qu'elle provoque du premier mot une
double réflexion. D'abord, on peut y voir une nouvelle
indication de la fixité des lois de la nature, et, sur un
thème aussi considérable, on ne saurait accumuler trop
de données. Puis, dans la constatation que les êtres orga-
nisés, aussi loin que nous retrouvions les traces de la
vie, n'ont fourni que les deux mêmes plans fondamen-
taux, on peut trouver un argument, sinon nouveau, au
moins renforcé, en faveur de la théorie de la descendance,
car, cette même double base d'organisation ayant toujours
servi à la formation de l'animal ou du végétal, on est
amené à concevoir d'autant plus facilement des liens
directs de filiation dans les représentants de ces deux
groupes d'êtres.
( 615 )
Mais nous devons quitter ce champ de considérations
générales et aborder plus directement quelques côtés
précis du problème de l'évolution.
L'examen, soit dans des collections (1), soit dans des
traités (2), de vastes assemblements de fossiles, classés sui-
vant leur ancienneté et provenant des diverses régions du
globe, conduit, ainsi que nous nous le sommes rappelés,
à la conclusion que le développement géologique de la
vie a pour mécanisme fondamental le phénomène de la
descendance. Et cependant, ainsi que nous nous le
sommes également rappelés, les passages des types spéci-
fiques les uns aux autres qui en seraient la conséquence
nécessaire, se dérobent de plus en plus à nos recherches
straligraphiques immédiates.
On doit dès lors se demander si ces observations con-
tradictoires n'expriment pas l'intervention de quelque
phénomène perturbateur, enveloppant le problème de
complications et écartant de nous la constatation pure et
simple des transformations.
C'était manifestement à l'étude des terrains de se pro-
noncer. Il s'agissait de suivre la marche de la vie dans
un ensemble de couches d'une même région, assez épais
pour que les faunes y eussent plusieurs fois changé
(1) M. Albert Gaudry, dont je reproduisais plus haut la définition
des constatations de la science sur le développement géologique de la
vie, a établi, il y a quelques mois, au Muséum de Paris, une galerie
de paléontologie générale qui est en quelque sorte le document sur
pièces de l'évolution du règne animal.
(2) J'ai ici particulièrement en vue l'ouvrage du professeur von
Zittel, qui est l'expression la plus complète des connaissances
paléontologiques que nous possédions. Il a été traduit en français par
M. Charles Barrois.
( 616)
d'espèces ; il fallait que cet amas de couches témoignât
d'une uniformité telle que les conditions des dépôts suc-
cessifs eussent peu varié, ou bien, si elles avaient varié,
qu'on pût préciser la nature des variations. Puis, ces
assurances prises, il fallait patiemment et minutieuse-
ment reconnaître et fouiller, à tous les niveaux de cet
ensemble, de nombreux gîtes de fossiles, afin de se mettre
en mesure de déterminer suivant quelles règles les muta-
tions d'espèces s'y sont produites.
Une grande partie de nos terrains primaires, sur un
énorme amas de 5,000 à 6,000 mètres de couches, se
prête merveilleusement à celte recherche (1).
Voici d'abord la grande série marine terminant le
devonien inférieur et généralement appelée coblenzienne.
Les évaluations s'accordent pour lui attribuer à elle seule,
sur la bordure septentrionale de l'Ardenne, l'étonnante
épaisseur de près de 5 kilomètres. C'est une suite répétée
de dépôts de schistes et de grès d'apport manifestement
continental, où aucun indice ne fait présumer des inter-
ruptions sédimentaires. Tout s'y annonce comme une
suite continue, formée le long d'une côte dans des con-
ditions absolument uniformes, sauf qu'à certains niveaux
prédomine le grès et à certains autres le schiste. Nulle
part ne se dénoncent par des discordances de stratifica-
tion de forts mouvements du sol, ni entre les couches
des dénudations produites par d'autres conditions de la
côte, ni de véritables conglomérats indiquant d'impor-
tantes variations dans l'apport des sédiments, ni des
(i) L'exposé qui va suivre, résume les résultats d'une élaboration
quasi séculaire commencée en i801 par d'Oraalius d'Halloy et
continuée par André Dumont, par M. Jules Gosselet et par moi-même.
( 617)
roches de calcaire marquant des changements dans le
régime marin. Les couches fossilifères, même abondam-
ment fossilifères, ne manquent pas et les fossiles y sont
généralement bien conservés.
Or, on relève, dans la verticale de cet énorme amas
stratiûé, les faits paléontologiques suivants :
Apparaissant ou disparaissant, tantôt à un niveau, tan-
tôt à un autre, avec un développement numérique varié,
généralement par groupes, parfois isolément, les espèces
ont eu des durées diverses. Les unes caractérisent de
faibles parties de l'ensemble, d'autres s'étendent dans une
longue suite de dépôts, d'autres traversent tout l'amas.
Le phénomène se produit en quelque sorte par échelon-
nement. Mais ces espèces apparaissent et disparaissent
sans que rien ne dénote sur place de quels ancêtres
elles viennent, ni quels descendants elles ont laissés.
Au cours de leur durée, elles ont conservé leurs carac-
tères propres et n'ont pas subi de transformations qui
permettent d'établir à aucun degré le passage de l'une
dans l'autre.
Les terrains qui surmontent ce Coblenzien nous pré-
sentent le phénomène sous un aspect quelque peu diffé-
rent. C'est qu'aussi la composition des dépôts y subit de
grands changements. Les dépôts de grès et de schistes s'y
montrent encore, mais la prépondérance appartient aux
amas de calcaire. Trois grands étages devoniens succes-
sifs en renferment de fortes masses dont l'une, à elle
seule, toute d'une venue, a une puissance de 700 mètres;
le Calcaire carbonifère ou Dinantien,^ ainsi que l'appellent
plusieurs autorités de la science, est presque intégrale-
ment calcareux, et l'un de ses termes stratigraphiques
( 618 )
réalise, égalemenl à lui seul, une épaisseur presque
égale à celle qui vient d'être mentionnée.
Ces roches de calcaire dont les éléments, au lieu d'être
des apports continentaux, ont été sécrétés par des orga-
nismes, caractérisent des états très particuliers du milieu
marin; elles sont coralliennes, crinoïdiques, foraminifé-
riennes ou détritiques. Parmi les calcaires coralliens, les
uns sont en couches sédimentées à l'égal des dépôts argi-
leux ou quartzeux; les autres sont de véritables récifs
coralligènes, construits comme de nos jours en amas
insulaires et ayant réclamé pour se former des conditions
strictement limitées de limpidité, de profondeur et de
température des eaux.
Ainsi, d'une part, de grandes variations de milieu se
sont produites dans la même mer pendant la seconde
période devonienne et pendant la période dinanlienne.
D'autre part, bien plus encore que les masses, d'épais-
seur kilométrique, des sédiments vaseux et sableux
coblenziens, l'accumulation des restes organiques, consti-
tuant ces puissantes masses calcareuses successives, nous
fait préjuger le temps énorme qu'ont embrassé ces
périodes. Le champ d'observation, en lui-même el par
ses contrastes avec celui qui l'a précédé, est ici encore
bien favorable à l'étude de la marche de l'action vitale.
En premier lieu, nous remarquons des moditications
plus répétées et plus marquées dans les faunes, de plus
fréquentes coïncidences dans le phénomène d'apparition
et de disparition simultanées des espèces. C'est au point
qu'à plusieurs reprises leur ensemble subit presque un
renouvellement.
En second lieu, nous n'y constatons néanmoins pas
davantage la transformation des espèces les unes dans les
( 619 )
autres, ce passage graduel qui témoignerait leur tiliatioii
directe. De nouveau, l'espèce, aux caractères nets et aux
représentants souvent innombrables, se présente comme
si elle était née et morte sur place, sans ancêtres et sans
descendants.
Des apparitions brusques pour des durées fort iné-
gales ; des disparitions plus ou moins anticipées, mais
non moins brusques, les unes et les autres d'ordinaire en
coïncidence; quelques traversées d'énormes épaisseurs,
survivant à quantité d'existences plus éphémères : telle
l'exploration détaillée nous montre la marche de la vie
au cours des espaces de temps incommensurables que
peuvent offrir à l'esprit, pénétré de la doctrine des Causes
actuelles, ces colossales accumulations de terrains de
toute origine. Les apparitions, comme les disparitions,
sont brutales ; ni le temps ni le milieu ne nous montrent,
même par un seul exemple direct, le moule organique en
voie de transformation continue.
J'ai fait appel aux lumières des géologues qui se sont
consacrés à l'étude de nos autres terrains d'origine marine
et leur ai demandé si les faits qu'ils y ont observés ne
tendent pas aux mêmes résultats paléonlologiques. Ils
m'ont répondu que c'est effectivement sous cet aspect
que le phénomène s'est présenté à leurs yeux.
N'est-ce pas, du reste, aussi ce qu'ont fait constater
tous les terrains oîi des recherches détaillées ont eu lieu
sur une échelle suffisante? La même donnée ne se repro-
duit-elle pas également pour les genres et les autres
groupes taxonomiques des deux règnes? De fait, ce sont
des notions depuis longtemps connues. La paléontologie
stratigraphique les répète à satiété.
J'v insiste néanmoins ici, je les rappelle et je les con-
( t)20 )
firme par quarante années de recherches, parce que, bien
qu'elles soient l'un des traits saillants du développement
vital dans le passé, la doctrine de la descendance ne me
parait pas les avoir encore mises en œuvre, parce que, par
leur constance, elles expriment comment s'est opérée la
distribution des êtres dans les terrains de chaque région,
parce que, enfin, si la donnée généalogique est réelle, elles
pourraient faire toucher du doigt la cause même qui a
voilé l'action du phénomène transformiste.
Donc, dans les recherches stratigraphiques d'une
région, la succession en ligne directe, — peut-on juste-
ment dire, — nous échappe complètement. Une conclu-
sion aussi fortement établie est naturellement appelée à
servir de point de départ pour une nouvelle poursuite de
la question. D'autres données, d'apparences plus secon-
daires, ne seraient-elles pas connexes à celle-là et de
nature, par leurs combinaisons mutuelles, à nous laisser
entrevoir par quels modes enchevêtrés les actes de
descendance ont pu géologiquement se propager? En
d'autres termes, quel sens serait-il possible en ce moment
d'attribuer, au point de vue généalogique, à l'absence de
passage entre les espèces?
Poursuivant nos remarques sur les faits biologiques
que nous pouvons relever dans cet ordre d'idées, nous
retenons deux groupes d'observations sur lesquels doit
se porter notre attention la plus sérieuse.
Les espèces ne sont pas représentées par des spécimens
toujours identiques. Elles offrent l'union de caractères
constants et de caractères variables. Tantôt les premiers
sont prépondérants et alors l'espèce paraît presque stable,
même à travers de fortes épaisseurs de terrains ; tantôt
les caractères variables prennent plus d'importance; en
( 624 ^
se fixant, ils deviennent héréditaires et donnent lieu à des
variétés, à des races, ou bien, affectant plus spécialement
pêle-mêle des spécimens, ils ne produisent que ce qu'on
nomme des variations.
Tout en conservant leur type spécifique et, par consé-
quent, leurs caractères d'ordre principal, les espèces
varient donc à des degrés divers et peuvent même le faire
dans des limites assez étendues. Mais ces modifications
d'ordre secondaire ont ordinairement pour caractéristique
essentielle de présenter les passages de leurs différencia-
tions, c'est-à-dire ce qui fait précisément défaut d'espèce
à espèce dans les gisements de la même région.
Nous constatons ainsi sur place un premier facteur
auxiliaire dans la vie de l'espèce : l'espèce n'est pas une
entité absolument immuable ; elle se modifie, mais ne se
transforme pas; — elle subit un commencement de
transformisme, sans qu'on puisse le suivre plus avant.
A côté se montre un autre facteur beaucoup plus dis-
simulé et non moins important. On peut reconnaître çà
et là que des espèces, anéanties en une place en coïnci-
dence avec des changements dans la nature du sédiment
et, par conséquent, dans les conditions du milieu, réappa-
raissent pour quelque temps dans un dépôt supérieur
analogue à celui de leur première époque d'existence.
Cette observation fait penser à un déplacement latéral
de ces espèces et introduit dans la question la donnée
probablement décisive des migrations.
En effet, que des groupes d'êtres, espèces, genres,
familles, ordres, se soient éteints au cours des temps,
faute de continuer à rencontrer dans les circonstances de
toutes sortes qui les entouraient leurs conditions vitales,
c'est un fait non contesté et non contestable. Mais il est
( 622 )
non moins certain — et nous allons en rappeler des
exemples précis — que la même action de milieu n'a
pas toujours amené des extinctions totales, mais seule-
ment des extinctions locales ou régionales. Il est non
moins certain encore — et nous en rappellerons aussi
des exemples probants — que des espèces ont étendu
leurs lieux de séjour et qu'elles ont même changé de
patrie.
La marche de la vie à travers les terrains d'une région,
se manifestant essentiellement par l'apparition et la dis-
parition répétées et brusques des espèces, pourrait dès
lors recevoir une explication fort satisfaisante par l'inter-
vention de changements géographiques, de déplacements
dans l'espace. Ainsi l'apparition d'une forme spécilique
prendrait la signification d'une arrivée, d'une immigra-
tion, sa disparition souvent celle d'un départ ou, pour
mieux dire, souvent d'une extinction locale.
Arrivés à ce point, peut-être verrions-nous s'entr'ouvrir
la voie où il y a lieu d'orienter le problème de la des-
cendance.
Puisque les espèces sont susceptibles de changer de
patrie et qu'elles ne se montrent pas moins sujettes sur
place à des variations plus ou moins rapides, ne serait-il
pas rationnel de se demander si, continuant à varier,
suivant leur plan d'organisation, au cours de ces muta-
tions d'habitats et de milieux, elles ne verraient pas leurs
caractères, maintenus constants dans leur patrie précé-
dente, devenir eux-mêmes variables dans leurs nouvelles
patries? Si bien que, de variations en variations et de
déplacements en déplacements, les espèces arriveraient
aux transformations étendues que prévoit la doctrine de
l'évolution : une espèce ayant abandonné son premier
( 625 )
séjour pour y revenir plus tard complètement différenciée
et à l'état d'espèce distincte, ou de forme spécifique qui
ne conserverait plus avec son ancêtre que des affinités de
genre, ou de genre devenu une nouvelle famille, et ainsi
de suite. Ce serait, en un mot, la continuation non limitée
de la faculté ancestrale.
Certes ces combinaisons, pouvant se diversifier à l'in-
fini dans la longueur des temps, produiraient l'aspect de
notre monde fossile avec ses éléments fondamentaux :
filiation directe, différenciations successives se dirigeant
vers le monde actuel, mais non saisissables de proche en
proche.
Dans cet ordre d'idées, les rapports généalogiques se
dissimuleraient donc au stratigraphe par des mutations
géographiques; l'évolution spécifique se refuserait à l'ob-
servation directe dans l'exploration méthodique d'un
bassin, parce qu'elle se serait poursuivie dans des régions
différentes, multiples, probablement distantes, où on
n'aurait pu encore suivre pas à pas la filiation.
Tel est le mode de solution que je crois pouvoir pro-
poser pour le problème.
C'est assez dire que, s'il répondait à une réalité, l'il-
lustre auteur de V Origine des espèces faisait un bien
légitime appel, il y a quarante ans, à l'insuffisance des
matériaux au sujet de l'objection du manque de passages
entre espèces. Cet appel serait encore aussi légitime
aujourd'hui, car, devant un tel ensemble de complications,
le problème réclamerait de nouvelles séries de recherches,
si vastes, que nous ne saurions assurément en attendre la
solution de notre époque.
Jugeons-en du reste en abordant un autre champ d'en-
quête.
( 624 )
Voici cette fois des mammifères terrestres récents : il
s'agit de notre faune quaternaire. Elle comprend des
représentants de beaucoup d'ordres de leur classe et, dans
nos régions à cavernes, elle se manifeste durant trois
époques géologiques se faisant suite sans interruption.
D'abord parait la faune du Mammouth dont nous ne con-
naissons pas les précurseurs immédiats, puis viennent
successivement la faune du Renne et la faune de l'Urus.
Nous pouvions nous attendre à reconnaître, dans cette
gradation chronologique, des faits d'apparition et de dis-
parition, comme dans les séries marines précédentes. On
y constate, en effet, de nombreuses et fort intéressantes
disparitions successives, mais la série des apparitions
manque.
La faune du Mammouth renferme, outre ses espèces
propres, les espèces des deux faunes suivantes. Pour deve-
nir la faune du Renne, elle a donc subi des extinctions
seulement. Mais celles-ci sont de deux sortes : extinctions
totales du Mammouth, du Rhinocéros tichorhin et de
quelques autres, et extinctions régionales de l'Hyène du
Cap et du Lion.
Ces deux espèces, aujourd'hui africaines, soulèvent une
première remarque. Les spécimens de nos cavernes sont
d'une époque relativement reculée : diffèrent-ils des sur-
vivants de l'autre continent? Leur ostéologie ne marque
d'autre différence qu'une taille généralement plus grande
dans les cavernes. Le temps, la distance et les milieux si
contrastants n'ont pas agi autrement sur elles; il n'y a
pas apparence de transformisme. Ce sont assurément les
mêmes espèces.
Une autre constatation de même ordre se présente
ensuite. Parmi les autres types spécifiques des mêmes
( 625 )
lieux, ayant vécu avec ces espèces pendant l'âge du Mam-
mouth et leur ayant survécu pendant l'âge du Renne,
figurent les animaux de notre extrême nord et plusieurs
espèces actuellement caractéristi(jues notamment de l'Eu-
rope orientale. Les uns et les autres disparaissent à leur
tour de notre région avec notre seconde époque. Mais il
n'y a plus d'espèces éteintes parmi eux ; tous ne subissent
que des extinctions régionales. Or, malgré leurs ditlé-
rences chronologiques et géographiques, la comparaison
de leurs restes quaternaires avec leurs représentants
encore vivants ne nous annonce pas davantage des trans-
formations anatomiques : noire Renne était le même que
le Renne actuel de Laponie; notre Bœuf musqué était le
Bœuf musqué des présentes régions polaires américaines;
nos Lemmings se rapportent aux deux espèces vivantes
de Lemmings. Il en est de même pour les espèces des
steppes et, en général, pour toutes les espèces ayant alors
quitté nos régions. Pas plus que le Lion et l'Hyène, dis-
parus précédemment de l'Europe occidentale et sauf peut-
être encore chez quelques-unes une diminution actuelle
dans la taille, ces espèces n'ont varié, — pour autant
que leur étude ostéologique soit jugée suffisante pour en
décider.
La même règle de fixité anatomique se reproduit, du
reste, pour les quarante à quarante-cinq espèces de l'âge
du Mammouth qui se sont perpétuées jusqu'à nous,
qu'elles aient changé ou non de patrie. Ce serait abusive-
ment qu'on voudrait déclarer y reconnaître de véritables
indices de transformisme.
Mais, a-t-on objecté, si cette faune quaternaire, dans
ses organismes les plus sensibles, semble-t-il, aux causes
des variations morphologiques, ne montre pas d'indices
S""* SÉRIE, TOME XXXVI. 42
( 626 )
de transformations spécifiques, c'est que le temps écoulé
a été trop court! Certes, pour ces dernières époques
géologiques, l'intervention des durées a une fort sérieuse
valeur, et on peut d'autant moins y contredire que le
même phénomène de stabilité s'applique à tous les repré-
sentants du règne animal et du règne végétal des mêmes
temps, alors qu'ils ont si largement varié dans les temps
antérieurs. Cependant le nouveau fait de la fixité des
types dont nous nous occupons, n'en doit pas moins nous
frapper, vu les différences de milieu ambiant aussi
saillantes que nous font préjuger à la fois cet assemblage
étonnant d'espèces aujourd'hui éteintes ou disjointes et les
conditions climatériques dans lesquelles il se développa.
Car, en premier lieu, nous venons de voir combien le
phénomène des migrations, qu'on peut souvent appeler
avec plus de justesse celui des extinctions régionales,
est le principal caractère des modifications de la faune
quaternaire. Les faits de ce genre y sont particulièrement
précis et méritent de servir de base à l'étude de la ques-
tion, puisque les migrations s'y sont produites de la
manière la plus caractérisée et la mieux définie à deux
reprises différentes et que, les espèces qui y ont été sou-
mises étant encore vivantes, leur habitat actuel, quelque
éloigné qu'il soit de leur habitat ancien, peut être reconnu
avec bien plus de facilité et de netteté que pour les
espèces n'existant plus.
En second lieu, ces mutations géographiques sont
susceptibles d'être mises en relation avec les événements
physiques les plus suprenanls de la fin des temps géolo-
giques, les époques glaciaires, dont le déchiffrement est
sans doute notre principale œuvre contemporaine sur
l'histoire de la terre.
( 627 )
A la période iiiterglaciaire, on rapporte, avec des faits
sérieux à l'appui, l'âge du Mammouth, ce qui ne concorde
guère, il est vrai, avec la constatation, indiscutable cepen-
dant, de ce qu'on a appelé un paradoxe zoologique : la
coexistence sous nos latitudes d'espèces aujourd'hui afri-
caines et d'espèces aujourd'hui exclusivement polaires, du
Lion vivant notamment en compagnie du Renne.
A la deuxième époque glaciaire peut correspondre
notre âge du Renne, et ceci concorde mieux avec la
disparition coïncidente des espèces africaines et avec le
maintien, souvent accompagné d'un plus grand dévelop-
pement numérique, des espèces de notre extrême nord.
Chacun enfin admet que le début de l'époque actuelle,
l'âge de l'Urus, a succédé à cette deuxième époque gla-
ciaire et qu'il a spécialement pour caractéristique la dis-
parition de ces espèces des latitudes extrêmes.
Par les changements climalériques que dénoncent de
tels phénomènes, nous pouvons sans peine nous rendre
compte des causes de certaines éliminations successives
désignées sous le nom de migrations.
Mais il nous est possible de faire un pas de plus. La
relégation au midi du Lion et de l'Hyène se manifeste
sous l'aspect d'extinctions locales, car nous ne pouvons
penser que les conditions de l'Afrique excluaient ces
espèces à l'époque quaternaire. Il n'en est pas de même
pour d'autres espèces et particulièrement pour le Renne,
qui vivait certainement chez nous toute l'année. Ici nous
trouvons une véritable émigration, un refoulement de
l'espèce au delà du cercle polaire, puisque, à la deuxième
époque glaciaire, la Laponie fut recouverte d'un épais
glacier qui aurait exclu son existence.
A tous points de vue, ces exemples de limitation d'ha-
bitat et de changement de patrie, caractérisant des époques
( 628 )
géologiques contiguës à la nôtre, nous sont précieux. Ils
nous font saisir sur le vif l'importance, la fréquence, l'ex-
tension, l'enchevêtrement du phénomène et prévoir, faits
en mains, le rôle que les migrations ont joué dans le
passé vital.
Ils sont d'autant plus à méditer que ce phénomène des
migrations n'y entraîne pas de marques appréciables de
transformations organiques, de variations du type spéci-
fique en relation avec les changements considérables de
milieu qui créaient inévitablement ces refoulements ou
ces migrations.
Par ces données complémentaires, nous sommes mieux
en mesure d'apprécier, dans ce seul côté de la doctrine
de la descendance, la complication presque inextricable
des actions en jeu. Ainsi que nous le disions plus haut,
s'il a été donné à notre époque de fournir la haute pro-
babilité du phénomène généalogique, nous ne pouvons
nous étonner qu'il ne nous ait pas été réservé d'en trouver
la démonstration de fait.
Cependant cette époque quaternaire, déjà si remai-
quable par ses manifestations dans l'ordre physique et
biologique, allait nous ouvrir un autre horizon d'une
incomparable grandeur, en préparant une transformation
totale de l'acte évolutif de la surface terrestre.
Dès l'âge du Mammouth, en pleine période intergla-
ciaire, des découvertes attestent l'existence de l'homme
en Europe et peut-être même en Amérique.
Depuis l'apparition de la vie, aucun phénomène ne
s'était produit sur le globe, dont les conséquences aient
été aussi graves, car l'homme allait bouleverser le monde.
La nature avait été seule à l'œuvre jusque-là; ses lois
seules avaient présidé à la vie du globe, et la géologie
( 629 )
n'avait eu à constater que l'histoire de ce que fut la terre
sous leur empire exclusif.
Quel spectacle nous est donné ensuite! Par la venue
de l'homme, la nature se rencontre avec le plus formi-
dable des antagonistes. L'entrée de l'intelligence, en
lutte avec les forces aveugles de la matière, ouvre à
l'évolution une phase que rien dans le passé ne rappelle.
A une nature dont les lois, à travers l'immensité des
temps, régnaient en maîtresses absolues, va se substituer,
avec une vertigineuse rapidité, en quelques dizaines de
siècles, en moins de temps encore pour des continents
entiers, une nature assujettie à l'intelligence, radicale-
ment transformée, dans toutes ses parties et dans tous
ses aspects, pour les seuls besoins de l'homme.
Le règne de la raison humaine succédant à la souve-
raineté de la nature, telle sera désormais la loi de l'évo-
lution du globe et par conséquent de l'histoire de la terre!
Pour embrasser dans son ampleur cet étonnant phé-
nomène, rien ne m'a semblé plus favorable que de le
réduire d'abord à une étude locale sur un tout petit pays,
le nôtre, afin de l'y suivre dans trois de ses étapes
humaines, en établissant ce qu'étaient nos régions lorsque
l'homme, encore investi d'un pouvoir rudimentaire, y
pénétra, — ce qu'elles devinrent lorsque l'homme, à
l'aurore de leurs temps historiques, commençait à se les
assujettir, — enfin où elles sont arrivées de notre temps
lorsque l'homme, pourvu de la toute-puissance que la
science lui donne, leur impose toutes les ressources de
la civilisation, c'est-à-dire lorsqu'il les a complètement
domptées et asservies, qu'il a mis ses lois économiques à
la place des lois naturelles.
Quand l'homme apparaît dans notre pays, il est en
( 630 )
possession d'outils et d'armes, en silex et en os, confec-
tionnés par lui; il sait se vêtir et se parer; il a des rela-
tions avec des régions distantes de quelques journées
de marche; il combat tous les animaux, les grands herbi-
vores et les plus redoutables carnassiers, il les tue et s'en
nourrit. Cependant il ne peut encore se créer parmi eux
des alliés et des aides; il n'en a réduit aucun en servi-
tude. Partout règne la forêt, legs des temps géologiques;
pas un indice ne fait penser qu'il ait assuré son existence
en s'assujettissant des plantes par la culture et qu'en con-
séquence il se soit livré à des défrichements. Il ne forme
pas encore de tribus, mais seulement quelques familles
éparses, choisissant les cavernes pour abris, s'il les a à sa
portée. Mais il sait produire et utiliser le feu et, par cela
seul, il est entré en possession d'une énorme supériorité
qui le met en état de transformer, au moyen de la cuisson,
en un régime artificiel herbivore et Carnivore son régime
naturel de frugivore ; par là encore, il s'est rendu capable
de vivre sous tous les climats. C'est assurément cette
acquisition qui lui a permis d'accéder justiu'à nos lati-
tudes et de les dépasser, car il est un immigrant; il n'a
pas pris naissance dans l'Europe occidentale.
Ces modestes débuts au milieu des forêts expriment le
pouvoir de l'homme dans ces premiers temps. Sa domi-
nation n'existe en quelque sorte qu'en germe et ne
s'exerce guère que par l'emploi de moyens d'un genre
tout nouveau pour se rendre maître et se nourrir des ani-
maux qui sont autour de lui. Il en est encore à l'état que
nous appelons sauvage ; il reste isolé et n'augmentera pas
son pouvoir pendant l'époque quaternaire.
Dépassons cette époque, traversons, sans nous y arrêter,
le dernier âge de la pierre, au savoir-faire déjà plus
( 631 )
étendu et aux populations plus deuses, puis notons les
premiers temps de la substitution des métaux à la matière
brute, pour arriver à l'époque romaine. De grands remous
de populations s'étaient déjà produits; des relations com-
merciales de toute nature s'étaient établies. La variabilité
dans les mœurs avait agi et amené le progrès, en même
temps que l'isolement avait pris lin. C'est le « phénomène
des migrations » et ses résultats s'exerçant par l'action
de l'homme.
César alors, ouvrant notre ère historique, décrit l'état
de nos contrées. Pendant qu'il insiste sur l'extension des
forêts vierges, sur les marécages et les débordements des
rivières, c'est-à-dire sur le maintien de la nature primi-
tive, il nous fait le tableau de l'étendue des champs
stériles, témoignant de l'importance des défrichements ;
il signale dans chaque tribu l'existence de vastes cultures
et de grands troupeaux ; il cite de nombreuses bourgades
et nous fait évaluer à 400,000 le nombre de nos habi-
tants.
Tel qu'il y a vingt siècles, notre pays apparut aux
convoitises romaines, l'action de l'homme s'y était déjà
largement exercée : les forêts, en voie de destruction,
remplacées partiellement par une végétation artilicielle
appropriée à sa nourriture; la grande faune commençant
à disparaître devant les espèces domestiquées propres à
l'alimenter et à l'aider dans ses labeurs ou ses combats.
En un mot, la nature, changée profondément d'aspect et
de condition, est entrée sous la domination humaine.
Ce n'est là encore qu'un état intermédiaire, celui que
nous appelons la barbarie. Encore une étape et nous
arrivons à notre époque même. L'antagonisme entre
( 632 )
les forces brutes et la volonté consciente a pris fin, il n'y
a plus de partage : le territoire appartient tout entier à
l'homme.
Tout le sol est cultivé, couvert d'une végétation desti-
née à nos besoins. Ce qui reste de forêts est devenu une
culture d'arbres soumise à des récoltes régulières, et toute
trace de la forêt vierge a depuis longtemps disparu. Notre
flore a changé de caractères à la fois par ces causes et
par des migrations artificielles, par des importations de
plantes et d'arbres cultivés à part ou mélangés à la végé-
tation première;
Des lois protectrices seules sauvent de la destruction
quelques représentants des grandes espèces sauvages. Non
seulement les animaux domestiques tiennent dans notre
faune une place analogue à celle de nos cultures dans la
végétation, mais il y a eu aussi des importations d'autres
espèces qui sont nos commensales ;
Les marécages, naguère si développés, ont été dessé-
chés ;
La nature du sol a été transformée sur de grands
espaces, et des terres qu'on vit stériles comptent mainte-
nant parmi les plus fécondes;
Les anciens cours d'eau ont été endigués et canalisés;
des cours d'eau artificiels ont été créés;
Les agglomérations de toute sorte et de toute grandeur,
peuplées par plus de six millions d'habitants et prenant
la place de la forêt primitive;
Les voies de communication de toute espèce sillon-
nant le pays et parcourues par de prodigieux engins ;
Ces transformations, imposées coup sur coup à la nature,
ont achevé de modifier l'aspect de nos régions, tellement
( 635 )
que tout ce que nous avons sous les yeux porte la pro-
fonde empreinte de l'homme. Tout y est rapporté à ses
besoins sociaux et économiques.
C'est l'expression matérielle de ce que nous appelons
la civilisation moderne. Et à quoi cet état inouï de civili-
sation est-il dû, sinon à l'entrée en scène d'un nouveau
progrès de l'intelligence humaine, aussi rapide que déci-
sif: la science, c'est-à-dire la compréhension de la nature
au point de vue de sa complète appropriation à la vie
de l'homme! On peut aussi bien dire d'abord : au point
de vue de l'accroissement de la puissance humaine!
Car, à ce moment, la puissance humaine s'est élevée
d'un bond à une ampleur que le monde n'avait pas
connue et ne pouvait prévoir, et la nature, perdant sa
fière et rude condition, est devenue son humble servante.
Peut-il être pour le géologue un spectacle plus éton-
nant que ces formes nouvelles, rapides, radicales, où s'est
transformé l'ancien ordre des choses? Depuis l'époque du
gneiss et du micaschiste, il a suivi les actions originaires
et l'évolution générale des phénomènes; grâce au prin-
cipe de la permanence des lois naturelles, il les a com-
prises et les a vues se développer graduellement, lente-
ment à coup sûr, avec le même caractère essentiel d'unité
dans leurs causes et leurs modifications. Et tout à coup,
vers la fin de l'incommensurable série des temps qu'il a
contemplée, il lui est donné de reconnaître une autre
action, sans précédent pour lui ; il en suit le développe-
ment progressif, de plus en plus puissant et étendu, et,
en un temps dont cette fois il sait el compte la durée,
qui n'est que de quelques siècles, souvent même quelques
années, il se trouve devant une nature sans ressemblance
( 634 )
avec la nature antérieure! Lorsque la science lui a révélé
ce passé, h lui aussi elle a montré de quels exploits elle
est capable pour accroître le pouvoir de la compréhen-
sion humaine.
D'autres événements d'un caractère grandiose nous
étaient encore réservés. Un dernier pas reslait à faire
dans l'évolution de notre époque.
Quand, il y a quatre siècles, la connaissance du globe
commença à nous être acquise, l'espèce humaine le
peuplait partout, sauf une partie des glaces polaires et
quelques petites îles perdues dans l'Océan. Partout aussi
la phase de développement que les cavernes nous ont fait
connaître, était dépassée tantôt par des civilisations déjà
prospères qui pliaient fortement la nature aux besoins
des populations; tantôt par une demi-barbarie où la civi-
lisation et la nature se balançaient; le plus souvent par
l'état sauvage et, même dans ce dernier état, le progrès
sur nos premiers âges se manifestait par des plantations
et des animaux domestiques, par un outillage varié quel-
quefois en métal, par des agglomérations de huttes et
des villages, par de grandes ablations de forêts surtout,
car l'homme est l'ennemi des arbres. Pour son déve-
loppement social, il lui faut d'abord l'anéantissement
des forêts; c'est par là qu'il commence et il les empêche
de se reconstituer par le feu, la dent de son bétail, ses
cultures ou ses constructions.
Aujourd'hui, par un phénomène sans exemple, le monde
est, peut-on dire, aux mains des Européens ou des peu-
ples qui en sont directement issus, et leur manière d'être
tend à devenir universelle.
Les mémorables découvertes de la fin du moyen âge,
( 635 )
fondamentales pour l'avenir de l'humanité, garantissaient
à l'Europe occidentale, avec les moyens d'une diffusion
indéfinie de la pensée, la supériorité définitive des armes
et le pouvoir de se diriger sûrement sur les mers. Inau-
gurant l'ère des grandes navigations, assurée de la sorte,
elles ouvrirent à l'Européen l'accès de tout le globe. C'était
lui donner l'hégémonie de tous les peuples.
L'Européen ne connaît plus d'obstacles. En notre
siècle, dirigé non plus par l'empirisme, mais par la
science dans des empiétements plus prodigieux encore, il
achève de mettre sous son joug toutes les l'oices naturelles
et toutes les parties de la terre; il ne compte pas plus avec
l'espace continental qu'avec l'espace maritime. Dans un
élan irrésistible, il impose uniformément à l'univers sa
science, ses industries et ses mœurs. Partout la nature,
d'abord adaptée suivant tant de plans divers par des
peuples isolés et disséminés, subit une unification com-
plète. Elle est en voie de se transformer de fond en
comble, pour être soumise à de nouvelles coordinations
sur un plan unique, le plan européen!
Cette surprenante évolution que la géologie du globe
traverse nous révèle ostensiblement le mécanisme qiii
la produit.
La faculté d'expansion et d'adaptation de l'homme aux
milieux les plus divers est indéfinie, et nous avons reconnu
à quelle acquisition première il faut faire remonter son
origine. Si les découvertes, les conquêtes initiales sur la
nature sont individuelles, comme l'est essentiellement le
génie, en s'épanchant chez un peuple, elles y créent un
foyer de civilisation, une variabilité j)rogressive. Tôt ou
tard, par voie violente ou pacifique, par voie de migra-
( 036 )
lion en un mot, le contact ou la fusion des peuples voisins
fait pénétrer chez eux ces progrès qui, en en subissant
de nouveaux, se généralisent de plus en plus et finissent
par se répandre sur tout le globe. Aussi, parmi les
avancements de la civilisation, se placent toujours en
première ligne les moyens plus actifs d'expansion, c'est-
à-dire de pénétration et de communication dans tous les
domaines.
Par conséquent, de même que nous avons cru l'entre-
voir pour l'évolution animale et végétale s'effectuant sous
l'influence des seules actions naturelles, les migrations
se retrouvent, ici encore, l'un des principaux éléments
des transformations progressives. Elles se traduisent par
le mutualisme entre peuples, par un véritable altruisme
universel, au sein duquel préside, avec une inexorable
rigueur, la grande loi darwinienne de la sélection. Dans
le fonctionnement de tout ce qui est doué de mobilité
organique, le progrès est-il en eff"et autre chose qu'une
meilleure adaptation aux circonstances, la substitution
du mieux dans son acception réelle?
Ainsi se produit à nos yeux l'évolution de l'activité
humaine sur le globe ou plutôt l'évolution de notre
période géologique : l'homme en lutte contre la nature
qu'il veut adapter à ses besoins, et il la veut tout entière.
Le monde est à sa merci et la puissance humaine se
mesure à ses conquêtes sur l'ordre établi des choses.
Si, en dernier acquit, les sciences naturelles n'ont
d'autre rôle ni d'autre ambition que d'agrandir cette
puissance, elles n'y ont certes pas failli au cours du siècle
qui va se clore.
( 657 )
Quelques grandes phases dans l' histoire de l'astronomie;
par F. Folie, membre de l'Académie.
L'astronomie est, après l'arithmétique, la plus antique
des sciences; elle a pris naissance au sein des peuples
pasteurs, sous ce beau ciel qui éclaira le berceau de
l'humanité.
Ils durent constater bientôt que la croissance et le
fanage de leurs fourrages, de même que la multiplication
de leur bétail, le chaud et le froid, la sécheresse et
l'humidité, étaient en connexion intime avec le cours du
Soleil à travers les constellations.
L'étude de ce cours et de ces constellations était donc
pour eux d'une importance capitale.
Telle fut l'origine de l'astronomie.
Elle ne fit de grands progrès, parmi nos ancêtres scien-
tifiques, que dans l'école d'Alexandrie, dont Hipparque
et Ptolémée sont les plus illustres représentants.
On peut dire, si l'on fait abstraction de la précession
des équinoxes, découverte par ce dernier astronome, que
l'astronomie spliérique des anciens se bornait à considérer
la Terre comme fixe, et le ciel des étoiles comme tournant
uniformément autour de l'axe géographique de la Terre.
Ils connaissaient assez exactement les mouvements des
autres astres, qu'ils désignaient tous sous le nom de
planètes; mais la cause de ces mouvements leur échappa
entièrement.
Les Grecs et les Romains ont poursuivi l'étude de
( 638 )
l'astronomie de Ptolémée, témoin les calendriers de
JNuma et de Jules César, mais sans rien y ajouter.
Les Arabes, malgré le grand zèle qu'ils ont apporté,
vers l'an dOOO, à l'étude de l'astronomie, ne lui ont fait
réaliser aucun progrès très marquant.
Un fait qui atteste toutefois la précision atteinte par
l'astronomie, avant sa renaissance, est l'exactitude remar-
(|uable de la réforme du calendrier effectuée par Gré-
goire XIII, dans le but de faire toujours tomber le
commencement du printemps à la même date qu'à
l'époque du Concile de Nicée, qui avait (ixé celle de la
fête de Pâques, réforme d'un intérêt général très grand,
en ce qu'elle ramène tous les ans, aux mêmes dates, tous
les travaux agricoles.
La seconde pbase de l'histoire de l'astronomie s'ouvre
à l'époque de Tycho-Brahé, de Copernic, de Galilée et
de Kepler.
C'est le véritable fondateur de l'astronomie moderne
qui s'écria, indigné de l'indifférence hostile de ses con-
temporains :
Que m'importe si mes découvertes ne sont appré-
ciées que dans un siècle, puisqu'il a bien plu au Créateur
d'attendre pendant quatre mille ans un contemplateur
de son œuvre tel que moi !
Copernic et Galilée, du reste, n'ont pas vu leurs décou-
vertes astronomiques plus appréciées que celles de ce
grand homme.
Quoique Kepler, après avoir trouvé les lois qui porte-
ront à jamais son nom, en eût assez nettement soupçonné
la source, il était réservé au génie de Newton de la
mettre en pleine lumière, en créant la haute analyse et la
Mécanique céleste.
( 639 )
L'alli-action solaire fut, dès lors, la cause du mouve-
ment de la Terre, des planètes et des comètes; l'attrac-
tion terrestre, celle du mouvement de la Lune; l'attraction
luni-solaire, celle de la précession des équinoxes et de la
nutation, entrevue déjà par Newton et confirmée un peu
plus tard par Bradley, qui, s'aidant de la découverte de
la vitesse de la lumière, faite par Rœmer, fonda bientôt
aussi la théorie de l'aberration.
Bradley, pas plus que ses illustres devanciers, n'eut à
se louer de la justice de ses contemporains; l'un d'entre
eux, un astronome et un ami, nia pendant dix ans sa
découverte de la nutation.
Les progrès réalisés par Newton et Bradley caracté-
risent la troisième grande phase de l'histoire de l'astro-
nomie, pendant laquelle les instruments et les méthodes
d'observation furent fort perfectionnés, et qui fut digne-
ment close par les découvertes de Herschel, particu-
lièrement celle de la planète Uranus, et celle du mouve-
ment de transport du Soleil dans l'espace.
A la lin du siècle dernier également fut découverte, par
Piazzi, la première de ces innombrables petites planètes
qui comblent la lacune, signalée par Bode, entre Mars et
Jupiter. Bientôt Olbers en trouvait une seconde. Mais
l'astronomie lui est redevable d'un service plus signalé :
c'est lui qui a découvert Bessel dans un comptoir de
Brème, et a fait du jeune commis un astronome illustre
entre tous.
Il restait cependant encore un pas décisif à faire.
Newton, en créant la Mécanique céleste, n'avait guère
fait que l'ébaucher. Sa démonstration du phénomène de
la précession des équinoxes, fort imparfaite, dut être
( Ui) )
reprise par d'AIeinbert. La démonstration de la nutation
fut l'œuvre d'Euler.
xMais, vers son époque, surgit un génie mathématique
incomparable, duquel la Mécanique céleste est sortie tout
armée, comme la Minerve antique du cerveau de Jupiter.
Laplace écrivit ce monument impérissable, que ses
successeurs n'ont pu (]ue perfectionner dans quelques
détails.
Dans celte science sublime, il eut pour émule Lagrange,
à qui les théories générales de la Mécanique céleste sont
redevables de méthodes marquées au coin de son puissant
génie.
Pour appliquer les lormules de la Mécanique céleste,
il tallait un astronome qui les connût, et qui sût bien
observer. Il se rencontra dans Bessel, dont les Funda-
menla nova forment, avec la Mécanique céleste et la
Theoria motus de Gauss, la base de l'astronomie du XIX"
siècle, et ouvrent la quatrième phase de l'histoire de la
science.
C'est dans celle-ci que lurent déterminées pour la pre-
mière Ibis, d'une manière plus ou moins correcte, mais
non pas encore à moins du 0",01 près (ce qui serait abso-
lument indispensable pour les calculs de réduction), les
constantes de la précession, de la nutation et de l'aber-
ration, grâce aux travaux de Bessel et des deux Struve.
C'est dans celle-ci également que la Mécanique céleste
trouva une confirmation tout à fait inattendue dans l'ad-
mirable découverte de Le Verrier, qui n'a pas évité, je ne
dis pas à son auteur, mais au gouvernement de l'époque,
la honte de l'avoir révoqué.
Qui n'a entendu parler de cette découverte?
( 641 )
Herschel avait trouvé, depuis un demi-siècle environ,
une grosse planète, Uranus, qui, à raison de son éloigne-
ment, avait échappé à ses devanciers.
Le mouvement de celte planète présentait des anoma-
lies qu'il fallait expliquer, sous peine d'avoir à modifier
et les lois de l'attraction newtonienne et les formules
de la Mécanique céleste.
Le Verrier attribua les anomalies d'Uranus à l'attrac-
tion d'une grosse planète, plus éloignée encore.
II s'agissait de calculer la position que devait occuper
cette dernière planète, pour occasionner les perturbations
constatées dans le mouvement d'Uranus : problème exces-
sivement compliqué, à cause, surtout, de son indétermi-
nation; car on ne pouvait se donner ni la masse de cette
planète, ni sa distance au Soleil, ni l'inclinaison et le
nœud de son orbite,
Le Verrier parvint, après d'immenses labeurs, à
résoudre le problème qu'il s'était posé, et avec tant de
bonheur, qu'après avoir signalé la position de sa planète
à l'Observatoire de Berlin, il recevait, trois jours après,
la nouvelle de la découverte de Neptune par Galle, à la
place même que ses calculs lui avaient assignée dans
le Ciel.
Adams avait eu la même idée que Le Verrier, mais il
n'est arrivé à la solution du problème que six mois après
son heureux émule.
Quelles déceptions cruelles on peut rencontrer dans
les labeurs scientifiques!
Un remarquable progrès, intéressant l'astronomie, fut
réalisé par Fizeau. Ce grand physicien eut la hardiesse
de mesurer directement la vitesse prodigieuse de la
lumière, qui est de 500,000 kilomètres par seconde.
3"^ SÉRIE, TOME XXXVI. 43
( 642 )
L'ingénieux Foucault améliora son procédé, qui a atteint
aujourd'hui une perfection telle que la vitesse de la
lumière, grâce surtout aux déterminations de Michelson
et de Cornu, est connue avec une précision que l'on sou-
haiterait voir atteinte par les constantes astronomiques,
par celles de l'aberration et de la parallaxe solaire en
particulier, liées toutes deux à la vitesse de la lumière,
de telle sorte que, si l'une d'elles était exactement con-
nue, l'autre le serait également.
Le pendule de Foucault aussi mérite d'être signalé, de
même que son gyroscope, non au point de vue des appli-
cations astronomiques, mais comme les preuves les plus
frappantes du mouvement de rotation de la Terre. Fait
singulier. Poisson avait traité, longtemps auparavant, la
question du mouvement d'un pendule oscillant librement
autour d'un point fixe à la surface de la Terre, et avait
trouvé qu'il ne se déplacerait que d'une quantité imper-
ceptible, à raison du mouvement de rotation de celle-ci.
Mais si Poisson avait été aussi bien un esprit philoso-
phique qu'un analyste habile, il se serait dit, à priori,
que le plan d'oscillation du pendule restant invariable
dans l'espace, devait effectuer, en apparence, une révo-
lution journalière, par rapport aux objets entraînés dans
le mouvement de rotation du globe, et l'analyste eût
aperçu l'erreur de calcul qu'il avait commise en écrivant,
par méprise, un sinus au lieu d'un cosinus. C'est seule-
ment après l'invention de Foucault, qui eût été faite par
Poisson sans cette méprise, que Plana s'aperçut de celle-
ci en reprenant les calculs du géomètre français.
Il me reste à signaler, parmi les grandes découvertes
du siècle en astronomie mathématique, les recherches sur
les parallaxes, autrement dit sur les distances des étoiles
( (545 )
au Soleil, sur les orbites des étoiles doubles et sur le
déplacement du système solaire dans l'espace, travaux
dans lesquels se sont illustrés surtout Bessel, Struve et
Argelander, que je suis beureux d'avoir eu pour maître
en astronomie pratique ; entîn, les méthodes, véritable-
ment nouvelles, imaginées en mécanique céleste par Gyl-
dén, et poursuivies ensuite par Poincaré, pour le calcul
des perturbations.
A cette dernière phase de l'histoire de la science
appartient aussi presque entièrement la création de l'as-
tronomie physique.
Le siècle dernier ne peut guère revendiquer, dans cette
partie, que la découverte de l'anneau de Saturne et de
ses satellites par Cassini et par Huygens, l'inventeur de
la pendule astronomique, et les travaux des P. Schrôder
et de Vico sur la rotation des planètes.
Le nôtre a vu éclore deux modes entièrement nouveaux
de recherches astronomiques. L'un est dû au génie de
Kirchhof et de Bunsen, qui ont démontré que les raies,
constatées par Frauenhofer dans le spectre solaire, pou-
vaient servira caractériser les éléments chimiques existant
dans la source lumineuse dont les rayons sont étalés en
spectre par le prisme.
Parmi les travaux astronomiques les plus considérables
auxquels cette découverte a donné lieu, il faut citer
d'abord la détermination exacte de la position des raies
du spectre solaire et des longueurs d'ondes lumineuses
correspondantes.
Nous possédons aujourd'hui plusieurs travaux impor-
tants sur cette matière. L'un des premiers dessins du
spectre solaire complet a été exécuté à l'Observatoire de
Bruxelles, par Fiévez.
( Ui )
Plus étendus et plus détaillés sont les spectres de Piazzi
Smith, de Roeland et tout particulièrement celui de
Thollon, qui a été interrompu, à moitié achevé seulement,
par la mort de son habile auteur.
La seconde moitié a été heureusement terminée à Nice,
au moyen de l'appareil même de Thollon, par l'ini des
astronomes d'Uccle, qui a consacré de longs mois d'ob-
servalions, de dessin et de calculs à cette œuvre, et qui
est allé la contrôler ensuite à l'Observatoire d'Alger,
pourvu également d'un appareil de Thollon.
Notre Compagnie peut se dire, avec une fierté légitime,
qu'en achevant le spectre de l'astronome français, il a fait
une œuvre qui restera ; et la Belgique doit quelque recon-
naissance à MM. Perrotin et Trépied, qui ont gracieuse-
ment mis leur observatoire et leurs conseils à la disposi-
tion de l'astronome belge.
Il reste encore bien des découvertes à faire en cette
matière, surtout dans les régions extrêmes du spectre,
l'infra-rouge et l'ultra-violet, dont Abney, Cornu et Lang-
ley se sont occupés avec beaucoup de succès.
Il me sutfira de dire ici que le spectre photographique
est six fois |)lus étendu que celui que nous voyons à l'œil
nu dans les circonstances ordinaires.
Les raies spectrales servent, comme on sait, à ana-
lyser chimiquement le Soleil et les étoiles, et ont permis
de constater ainsi l'identité de constitution de la matière
dans tous les astres de l'univers.
Un instant, Lockyer avait même cru pouvoir ramener
à l'unité tous les corps réputés simples par les chimistes.
Ce n'était qu'une noble illusion, et c'est à l'avenir qu'il
appartient d'en prouver la réalité.
Parmi les premiers travaux, et les plus considérables,
( 645 )
sur la speclroscopie stellaire, on tloit nienlioniier ceux
de l'illustre P. Secchi; il a étudié au spectrosco|)e plus
de 4, (MX) étoiles et les a classées en quatre types, d'après
la nature de leur lumière. Ses recherches ont été pour-
suivies avec heaucoup de zèle et de succès par Duner.
On connaît l'ouvrage classique de Secchi sur le Soleil,
ouvrage dans lequel sont résumés ses travaux spectrosco-
piques relatifs à cet astre, ses recherches sur la photo-
sphère, les protuhérances, les taches, la température du
Soleil; et cet autre ouvrage sur l'unité des forces phy-
siques, qui le montre aussi profond philosophe et physi-
cien qu'astronome éminent. Fait étrange, qui m'a été
rapporté par un de ses élèves , et qui témoigne de la
grande modestie du savant, Secchi ne prétendait con-
naître un peu bien que l'archéologie.
Une des applications les plus ingénieuses de la spec-
troscopie est celle qui est relative à la détermination de
la vitesse absolue des étoiles, et même à celle de la
vitesse de rotation du Soleil.
C'est Doppler qui s'est dit le premier que, si une
étoile se rapproche de nous avec une vitesse assez consi-
dérable, la longueur des ondes lumineuses qu'elle nous
envoie doit se raccourcir par le fait même, et produire,
par conséquent, une variation dans la position des raies
du spectre.
Les premiers résultats tangibles de cette méthode ont
été obtenus par Huggins en 18G8.
Christie, Maunder, Vogel ont pu déterminer, par la
suite, les vitesses d'un grand nombre, d'étoiles.
En 1870, Zôllner invente le spectroscope à reversion,
et Vogel l'applique immédiatement à la détermination
de la vitesse de rotation du Soleil au moyen du déplace-
( 040
ment des raies des deux bords. Young, en 1870, trouve,
par le même moyen, une vitesse de rotation de 2.27 ki-
lomètres par seconde.
Christie,Thollon et Cornu ont également fait de beaux
travaux sur ce sujet. Le premier de ces savants a même
appliqué le principe à la détermination de la vitesse de
rotation de Jupiter (1877).
Houzeau a émis cette idée très ingénieuse qu'au moyen
du déplacement des raies spectrales, on arriverait à
déterminer l'inclinaison relative des orbites des étoiles
doubles.
D'après les observations de Young, eniin, l'atmosphère
solaire tournerait plus rapidement que le corps de l'astre.
Les importants travaux de Secchi et de ses successeurs,
sur le Soleil, avaient éveillé, chez les astronomes, le désir
de pouvoir en étudier, en tout temps, les protubérances,
qu'on n'avait pu apercevoir encore que durant les éclipses
totales.
C'est à Lockyer que revient l'honneur d'avoir émis la
première idée de leur observation au spectroscope, et à
Janssen, l'infatigable directeur de l'Observatoire astro-
physique de Paris, l'honneur non moins grand de l'avoir
réalisée (1808).
Le second mode de recherche inauguré en ce siècle est
la photographie. Quelle facilité merveilleuse ses progrès
ont donnée aux astronomes, qui, auparavant, passaient
de longues nuits à dessiner patiemment quelques détails
de la Lune, de Vénus, de Jupiter, etc., ou de longues
heures à fixer les contours d'une tache solaire, tandis
qu'ils obtiennent aujourd'hui tous ces détails en quelques
minutes ou en quelques secondes!
Les agrandissements des magnifiques photographies
( 6i7 )
lunaires de Lick Observatory, dont notre Compagnie a
reçu les premiers exemplaires, ont ouvert également une
voie nouvelle, dans laquelle se distingue supérieurement
aujourd'hui l'Observatoire de Paris. Je regrette vivement
que l'habile auteur de ces forts agrandissements n'ait pu
être chargé, à Uccle, d'un service de photographie astro-
nomique, pour lequel il avait et le talent et les instru-
ments nécessaires.
A côté des photographies lunaires, une mention spé-
ciale est due aux magnifiques photographies du Soleil
obtenues à Meudon, depuis plus de dix ans, par Janssen,
qui a réussi également le premier, avec Gill, à photogra-
phier une comète.
Quelle facilité également otïre la photographie pour la
découverte de petites planètes! L'objectif photographique
reste invariablement fixé sur un même secteur du ciel,
qu'il suit dans son mouvement, grâce à l'appareil sur
lequel il est placé, appareil animé d'un mouvement égal
et directement contraire à celui de la Terre. Tout est
donc fixe, étoiles et plaque photographique. La pose dure
un assez grand nombre d'heures. Si une petite planète se
trouve dans le champ exploré, comme elle se meut à
travers les étoiles, ce n'est pas un point lumineux qu'elle
laissera, comme ces dernières, sur la plaque, mais une
petite trace qui permettra de la reconnaître immédiate-
ment.
Il n'est pas possible de passer ici sous silence une
invention très ingénieuse, sans laquelle les grands pro-
grès de l'astronomie physique étaient irréalisables; je
veux parler de l'application du mouvement d'horlogerie
aux équatoriaux. C'est Hooke qui en a eu la première
idée. Elle a été réalisée, vers 1755, par Vayringe, à
( 648 )
Lnnéville, et a surtout progressé, peu de temps après, en
Aiii^Ieterre.
L'une des œuvres les plus utiles à l'astronomie future
est certainement cette carte du Ciel, due à l'initiative de
l'amiral Mouchez, et qui s'exécute actuellement dans un
grand nombre d'observatoires des deux mondes. Déjà
Pickering s'était signalé dans cette voie; c'est une justice
qu'il convient d'autant plus de lui rendre, qu'on a paru
oublier un peu les grands progrès qu'il avait réalisés dans
la photographie stellaire. Son catalogue photoméirique
de 4,200 étoiles, déduit de 19,000 observations, lui
mérite également la reconnaissance des astronomes.
La théorie des ondulations, due au puissant génie de
Fresnel, et, en particulier, celle de la polarisation de la
lumière, ont eu également, entre les mains d'Arago, leurs
applications à l'astronomie physique.
Notre siècle aussi a vu les instruments astronomiques
arriver à une perfection inespérée. Les objectifs des
lunettes astronomiques ont atteint jusqu'à 1"',03 de dia-
mètre.
C'est l'Amérique qui tient le record dans celte direc-
tion, grâce surtout à la générosité de Lick et de Yerkes.
Et cette générosité a déjà été récompensée par de magni-
fiques découvertes, comme celle du cinquième satellite
de Jupiter, faite, par Barnard, à . Lick Observatory,
en m)±
A. Hall avait trouvé à Washington, en 1877, les deux
satellites de Mars, qui, fait digne de remarque, furent
déjà soupçonnés en 1600 par Kepler. Lorsque le grand
astronome apprit que Galilée venait de découvrir les
quatre satellites de Jupiter, il dit : « On en trouvera un
à Vénus, deux à Mars, six ou huit à Saturne », prophétie
réalisée de tous points, sauf en ce qui concerne Vénus.
( 649 )
Il est vrai que, d'après Schiaparelli, Vénus, de même
que Mercure, ne seraient pas, comme on l'a cru depuis
l'antiquité, des planètes analogues à notre Terre ou à
Mars, mais de simples satellites du Soleil, c'est-à-dire
des corps dont la vie est absente, et qui n'ont nul besoin
d'être éclairés durant leurs nuits.
Kepler croyait aux causes finales, rejetées par l.aplace.
Le grand géomètre français avait dit : «. Si la nature
s'était proposé d'éclairer la Terre pendant la nuit, elle
aurait fort mal rempli son but; elle n'avait qu'à lancer
la Lune dans le plan de l'équateur avec une vitesse
déterminée, et cet astre eût éternellement éclairé la Terre
durant toute la nuit. » Or Delaunay, qui a consacré vingt-
cinq années à la tbéorie du mouvement de la Lune, a
trouvé que, quand bien même la nature en eût agi de la
sorte, il n'en serait pas moins arrivé, par suite des per-
turbations, que la Lune fût sortie du plan de l'équateur
pour parcourir son orbite actuelle.
A côté de la belle découverte de Kirchbof et Bunsen,
on ne peut passer sous silence celle qui est la plus féconde
du siècle, la théorie mécanique de la chaleur, dont le
premier principe, le principe fondamental, est dû au
génie de Robert Mayer, médecin à Heilbronn , et le
second à Rodolphe Clausius.
On sait la profonde déduction que Thomson a tirée
de ce second principe, relativement à la dissolution linale
de tous les corps de la nature, et à la résolution de tous
les mouvements stellaires et planétaires en de simples
mouvements moléculaires, déduction que Tyndall expri-
mait en ces termes, tirés d'une épître de saint Pierre :
c< Les éléments seront dissous par le feu. »
Un principe aussi vaste que celui de Mayer a d'impor-
( G5'0 )
taiU(3S applications à toutes les sciences; l'astronomie, eu
particulier, en a tiré des conséquences très remarquables
relativement aux mouvements des corps célestes, à leur
température, à leur âge même, enfin à leur destinée
finale.
Mais je m'arrête (la matière est trop vaste), sans donner
plus qu'une simple mention aux ondes herziennes et aux
rayons Rônlgen, dont la découverte aura certainement son
contre-coup en astronomie physique.
En pensant aux progrès immenses réalisés, durant ce
siècle, dans la connaissance des astres, vous serez aussi
surpris que moi de lire, dans l'un des discours prononcés,
l'an dernier, à l'inauguration de l'Observatoire Y'erkes, à
Chicago, que l'astronomie est peu cultivée parce qu'elle
ne rapporte pas des dollars.
Si le culte de l'astronomie était aujourd'hui abandonné,
et si tel en était le motif, n'en pourrait-on pas dire autant
de toutes les sciences, même de la physique, de la chimie
et de la mécanique? Très rares sont les vrais savants qui
ont acquis, par leurs travaux, plus que Votium cum
digiiitale.
En aucun siècle, les recherches scientifiques n'ont été
plus nombreuses, en aucun siècle, les observations astro-
nomiques n'ont été plus universellement répandues. Et
ce n'est certes pas en Amérique, où l'astronomie, née
d'hier, est aujourd'hui mieux dotée et plus cultivée peut-
être qu'en aucun pays, grâce aux Peabody, Lick,
Washburn, Yerkes, Miss Burns et autres protecteurs
intelligents, que l'on est en droit de se plaindre de
l'abandon de cette science.
Et n'avons-nous pas vu créer ou ressusciter, en Europe,
des observatoires, bien connus déjà par leurs beaux
( 631 )
travaux, et dont le plus récent est l'Observatoire du
Vatican?
L'astronomie n'est certes pas près de s'éteindre;
non seulement des princes s'y intéressent encore, comme
jadis Rodolphe de Habsbourg, Léon X, Grégoire XIll,
Alphonse de Castille, Albert de Saxe, Louis XIV, Nicolas,
Maximilien, Don Pedro; mais l'opinion publique, plus
éclairée et plus puissante, serait de force peut-être à
empêcher un gouvernement peu clairvoyant d'abandonner
un observatoire, sous prétexte qu'il ne répond à aucun
besoin pratique.
Non certes. A la fin du siècle qui a vu éclore les tra-
vaux des Laplace, des Bessel, des Struve, des Le Verrier,
des Newcomb, des Gyidén, qui a vu créer à Poulkovo la
plus grande école d'astronomie des temps modernes, on
n'a aucune raison de douter des brillantes découvertes
que le XX' siècle réserve à l'astronomie.
Avant de plonger nos regards dans l'avenir, embras-
sons un instant le passé d'un coup d'œil.
1"^^ phase. Antiquité : liipparque et Ptolémée.
Terre fixe, Ciel mobile autour d'un axe fixe.
S*" phase. Renaissance : Copernic, Galilée, Kepler.
Le Soleil est fixe, la Terre et les planètes tournent
autour d'axes fixes, et circulent autour du Soleil.
5" phase. Temps modernes : Newton, Bradley.
L'attraction newtonienne explique la précession des
équinoxes, les marées, les mouvements planétaires et
cométaires, présume la nutation, bientôt découverte,
ainsi que l'aberration, par Bradley;
4*^ phase, contemporaine : Herschel, Laplace, Bessel,
Struve, Le Verrier, Gyidén.
Explication de tous les mouvements célestes.
( 652 )
Formules correctes du mouvement de rotation de la
Terre supposée solide. Nouvelle méthode pour le calcul
des perturbations.
Perlectionnements très considérables des instruments.
Fondation de l'astronomie physique, et, particulière-
ment, de la spectroscopie et de la photographie céleste.
Nous allons très prochainement entrer dans la cin-
quième phase.
Les astronomes qui sont à la tête des grands annuaires
astronomiques ont déjà voulu s'y préparer, en s'enten-
dant sur les constantes et les formules de réduction dont
ils feront usage au XX^ siècle. D'autres ont pensé, avec
raison, que les résolutions qu'ils ont prises étaient pré-
maturées.
Nul astronome n'ignore, en effet, combien incertaines
sont nos connaissances quant aux valeurs des constantes
de la précession, de l'aberration et de la parallaxe
solaire.
Nul n'ignore, non plus, que l'astronomie en est encore
aujourd'hui réduite au pur empirisme dans la solution
d'une question soulevée par l'Observatoire de Berlin, et
activement étudiée dans les deux mondes, grâce surtout
à l'initiative éclairée de son savant directeur : la question
de la variation des latitudes.
Nul enfin ne peut plus ignorer (pie, si la nutation eulé-
rienne n'est pas insensible, les formules de réduction
usitées sont incorrectes, parce qu'elles la suppriment
purement et simplement, pour la remplacer par la seule
variation de la latitude, dont les apparences, on va le
voir, sont dues à des causes très diverses.
Ce sera certes un sujet d'étonnement pour nos succes-
seurs immédiats, que la légèreté avec laquelle tous les
( 655 )
astronomes du X1X« siècle ont admis, en dépit de nom-
breux avertissements, les formules d'Oppolzer, qui était
moins bon analyste qu'astronome distingué et calcula-
teur très habile. Je dois déclarer cependant que Tisse-
rand, dans son traité de Mécanique céleste, n'a pas suivi
Oppolzer; il s'est borné, malheureusement, de même
que Laplace, à considérer la nutation eulérienne et la
nutation diurne comme insensibles. Un seul géomètre,
du reste, et non l'un des moins illustres, a aflirmé inci-
demnient l'exactitude des formules de l'astronome vien-
nois (*) ; il est vrai qu'à cette date je n'avais pas encore
fait sauter aux yeux la subtilité incorrecte d'analyse sur
laquelle sont fondées ces formules.
Aujourd'hui, l'aslronome-géomètre dont je parle n'en
affirmerait plus l'exactitude, mais sa grande autorité, et le
silence qu'il a gardé depuis ma démonstration, n'en auront
pas moins contribué à accréditer, chez les contemporains,
une erreur des plus préjudiciables à la science.
J'ai démontré {**) que si l'on rapporte correctement,
comme Oppolzer a voulu le faire, les formules du mou-
vement de rotation de la Terre à son axe instantané, la
nutation eulérienne disparaît, à la vérité, en obliquité,
mais non en longitude, et qu'elle apparaît même, chose
excessivement grave, dans l'expression de l'heure sidé-
rale.
Et veuillez remarquer qu'il s'agit, non d'astronomie,
mais d'analyse mathématique, et qu'ici, ce qui n'est pas
(*) Newcomb, The cléments of tlie four inner planets and tlie funda-
mental constants of aslronomy, p. 131, 1895.
(*') Vierteljalirsckrift, 1896. — Annuaire de rObservatoire pour
1897, et Bull, de l'Acad. roy. de Belgique, 3^ sér., t. XXXIII, pp. 154
et 397.
( 654 )
exact est radicalement faux. Mais en astronomie, me
dira-t-on, nierez-vous l'exactitude des formules usitées,
relatives à la variation des latitudes? Non certes. Mais je
nie absolument l'exactitude des formules relatives à l'as-
cension droite et à l'heure. On m'a répondu : Mais les
quantités négligées sont si faibles ! Elles sont absolument
du même ordre que les variations de la latitude : si l'on
néglige les unes, on doit, logiquement, négliger aussi
les autres. Si ces dernières sont appréciables, et mille
faits l'attestent, il en est de même des premières; et le
grand tort de l'astronomie contemporaine est de n'en
tenir nullement compte. L'heure et l'ascension droite y
sont incorrectement déterminées ; il en est de même du
méridien, qui, dans la méthode de Laplace, est fixe, dans
celle d'Oppolzer, sujet à trois variations périodiques,
l'une annuelle, les deux autres de 504- et de 451 jours.
Comment déterminer un azimut sans rien connaître des
formules de ces variations, puisque l'heure même en
dépend ?
Le prochain siècle en fera un grave reproche à ceux-là
qui, étant capables de le faire, auront omis d'approfon-
dir la question, ou négligé le strict devoir de proclamer
bravement la vérité devant les nombreux astronomes,
très méritants et très habiles, qui consacrent plus spécia-
lement leurs veilles aux observations et à leur critique
qu'aux théories de la Mécanique céleste.
Depuis Laplace donc, tandis que les observations
acquéraient une précision inespérée, leur réduction effec-
tuait un progrès à rebours, qui, depuis une trentaine
d'années environ, a considérablement nui à la science,
en substituant aux formules rigoureuses du maître et au
méridien fixe de Bessel et de Struve, des formules incor-
( 655 )
rectes et un méridien mobile, et en rendant impossibles
une définition et une détermination exactes de l'heure.
Et il serait fort regrettable, je le répète, que les grandes
éphémérides astronomiques fissent usage, dans le XX«
siècle, de formules qui reposent sur une transformation
analytique radicalement fausse, et même de constantes
fort sujettes à caution, celles de la précession et de l'abei--
ration en particulier.
Je n'hésite pas même à proclamer hautement que
l'établissement scientifique qui sera le premier à rompre
avec ces errements, non seulement fera franchir à l'astro-
nomie sphérique du XIX*' siècle le fossé profond qui la
sépare de celle du XX% mais sera suivi bientôt par tous
les observatoires des deux mondes.
Beaucoup trouveront, sans doute, cette déclaration
bien présomptueuse. Ils ont, depuis huit ans, à leur dis-
position un moyen fort simple de la réduire à néant.
Qu'un seul prouve publiquement l'exactitude des formules
dont ils font usage, ou la fausseté de la démonstration
que j'ai faite de leur incorrection, et je serai le premier
à reconnaître mon erreur.
L'astronomie sphérique mathématique a encore un très
grand pas à faire pour atteindre au degré de précision
auquel notre siècle a porté l'astronomie pratique.
L'existence des volcans a fait supposer, même dans
l'antiquité, que l'intérieur de la Terre est en ignition. On
se rappelle que Maupertuis avait soulevé cette question, au
XVIH" siècle, devant l'Académie des sciences de Berlin.
Les géomètres, toutefois, ont toujours considéré la
Terre comme solide. Depuis une trentaine d'années seu-
lement, ils se sont demandé si l'on ne devrait pas étudier,
au lieu du mouvement d'une Terre solide, celui de
( 656 )
l'écorce terrestre. Plusieurs, notamment Hopkins, Delau-
nay, W. Thomson, G. -H. Darwin, ont émis sur ce sujet
(les idées en général justes et ingénieuses. Les conclusions
principales en sont que :
Dans les mouvements à longue période, l'écorce et le
noyau se meuvent comme s'ils étaient solidaires; telles la
précession et la nutation bradiéenne.
Dans les mouvements à courte période, l'écorce se
meut indépendamment du noyau; telle la nutation
diurne.
Quant aux mouvements à période intermédiaire, on a
cru qu'ils seraient d'autant plus altérés que leur période
est plus courte; mais c'est là, je pense, une erreur.
Au surplus, ces théorèmes ont été énoncés sans
démonstration, à l'exception de celle de Hopkins, qui est
insullîsante. M. Ronkar les a démontrés plus tard dans
nos publications (*).
Il s'agissait donc d'établir la théorie du mouvement
de l'écorce terrestre, en tenant compte des actions
intérieures.
J'ai fait mettre cette question au concours pour 1893; il
y a été répondu par l'envoi d'un mémoire que je considère
comme excellent, et qui, ne la résolût-il même pas com-
plètement au point de vue pratique, n'en était pas
moins la première ihéorie correcte qu'on eût donnée du
mouvement de rotation de l'écorce terrestre: théorie qui
doit être la base de l'astronomie sphérique du XX® siècle,
et ouvrir la cinquième phase de l'histoire de la
science.
•) Mt'in. couronnés et Mém. des savants étrangers, t. LI, 1889.
( 6S7 )
IiKlépendammeiil de ce grand pas à franchir, quelques
progrès déjà eussent pu (Hre réalisés, si l'on avait mis,
à perfectionner les formules, autant de zèle et de talent
qu'à perfectionner les observations.
Quelques astronomes s'en sont préoccupés : Peters,
Wagner, Fabrilius, Seeliger, Oppolzer; mais leurs for-
mules sont, ou incomplètes, ou même incorrectes. Nul,
en particulier, n'avait recherché les termes qui pro-
viennent, soit de la combinaison de l'aberration annuelle
et de l'aberration systématique, soit de celle de la réfrac-
tion, avec la nutation ou l'aberration.
Cette lacune est comblée aujourd'hui (*).
Plusieurs autres desiderata ont été signalés dans cette
lecture.
La constante de la précession a besoin d'une détermi-
nation nouvelle, et je veux montrer ici qu'on n'a pas
encore correctement abordé sa recherche.
Supposons qu'une étoile, sans mouvement propre
objectif, ait été tout à fait correctement observée, en
ascension droite et en déclinaison, par Bradley en 1755,
par Wagner en 1855, et, pour simplifier l'analyse, que
les deux observations aient été ramenées au Soleil pris
pour origine.
Les deux positions observées seront différentes, malgré
la fixité absolue de l'étoile, en premier lieu, à cause de
la précession, ou, plus explicitement, de la variation de
l'équinoxe et de l'équateur de 1755 à 1855; en second
lieu, à cause du déplacement du Soleil, ou du mouve-
(') Catéchisme correct d'astronomie sphérique. Rome, 1893 —Revue
{les constantes de l'astronomie stellaire. Bruxelles, 1896.
3™* SÉRIE, TOME XXXVI. 44
( 658 )
ment systématique, entre ces deux dates ; en troisième
lieu... car il y a un tertio auquel nul des astronomes qui
se sont occupés de la question n'avait songé. Le premier
des Struve avait bien pensé à tenir compte du mouve-
ment ou de la parallaxe systématique, et son fils Otto,
l'illustre doyen des astronomes contemporains, réalisant
cette idée, avait déterminé une constante de la préces-
sion, qui, à raison de cette circonstance, fut pendant
longtemps prétërée à celle de Bessel par un grand nom-
bre d'astronomes. Des doutes ayant surgi au sujet de
cette supériorité, Dreyer, puis Louis Struve, fils d'Otto,
firent une nouvelle détermination, cette dernière fondée
sur les catalogues pour 1755 et 4855 publiés, après une
revision laborieuse et des observations personnelles dans
l'hémisphère austral, par les soins d'Auwers.
Mais il manque à ces déterminations d'avoir tenu
compte de la troisième cause de la variation de position
dans les lieux observés.
Nul astronome n'ignore que le mouvement systéma-
tique produit une aberration, tout comme le mouvement
annuel.
Seulement, ont-ils dit tous, cette aberration est une
qualité constante pour chaque étoile, et ne peut, par
conséquent, nullement être déterminée par l'observation.
Ils reconnaissent cependant que cette aberration varie
d'une étoile à une autre, c'est-à-dire avec la position de
l'étoile. Elle n'est donc pas la même, pour une même
étoile, en 1755 et en 1855, et voilà la troisième cause
dont ils ont omis de tenir compte. Seeliger l'avait soup-
çonnée,— c'est une justice que je me plais à lui rendre, —
mais ses formules sont fort incomplètes.
Il existe donc trois termes dans la variation du lieu
( 659 )
moyen truiie étoile, d'une date à une autre date très
éloignée : le terme de précession, celui de la parallaxe
systématique, et celui de la variation de l'aberration
systématique entre ces deux dates.
A la rigueur, il y aurait un quatrième terme, prove-
nant de la combinaison de la parallaxe et de l'aberra-
tion systématiques; mais ce dernier peut être considéré
comme négligeable, sauf peut-être pour les circompo-
laires.
Et voilà pourquoi une nouvelle détermination de la
précession, sur de nouvelles bases, s'impose absolument.
Alors seulement, le catalogue d'Auwers aura produit tous
les fruits que l'auteur était en droit d'attendre de son
œuvre, et l'on aura, non seulement une détermination
véritablement correcte de la précession, mais on con-
naîtra, en même temps, exactement la vitesse et la
direction du mouvement systématique. Alors aussi on
pourra recbercher s'il existe un mouvement galactique,
c'est-à-dire un mouvement général des étoiles de la voie
lactée autour d'un centre inconnu, question dont plusieurs
astronomes, Màdler, Schônfeld et L. Struve, entre autres,
se sont occupés.
On voit que l'astronomie sphérique eût déjà pu faire
quelques progrès assez marqués, si les astronomes de ce
siècle avaient été aussi bons mathématiciens qu'ils étaient
bons observateurs, et s'étaient bornés à développer ou à
compléter les formules absolument rigoureuses de
Laplace-Bessel, au lieu d'y substituer d'autres formules
qui sont absolument incorrectes.
Ces progrès peuvent se résumer en quelques lignes:
Déflnition d'une heure, non pas à 1res peu prés, mais
rigoureusement uniforme ;
( 000 )
Développement des formules de la nutation diurne et
détermination de ses constantes;
Calcul correct des termes du second ordre, tant de la
nutation que de l'aberration, et particulièrement des
termes périodiques et séculaires de l'aberration systéma-
tique, au moyen desquels on parviendra à déterminer
exactement la vitesse et la direction du mouvement du
Soleil dans l'espace (*).
Indépendamment des perfectionnements apportés, à
l'aurore du XX'' siècle, aux formules usitées, celui-ci
aura une tâche plus considérable à accomplir. Il devra
établir, comme il a été dit, les formules du mouvement
de rotation de l'écorce solide du globe, qui jetteront un
jour tout à fait nouveau sur ces variations de latitude,
objet bien digne de la grande préoccupation des astro-
nomes en ces dernières années du XIX*" siècle, qui se
clôturera, sans doute, par un grand point d'interrogation
relativement aux causes de ce phénomène.
L'une des causes les plus dilïiciles à analyser réside
dans les déviations périodiques de la verticale, qu'on a
traitées un peu trop superficiellement.
J. Plantamour, frère du célèbre astronome et géodé-
sien, les avait étudiées près de Genève, et avait cru pou-
voii' les attribuer à des mouvements du sol, occasionnés
par des variations de température. La conclusion tirée
par Becker de ses observations à Neufchâtel a été iden-
tique.
(*) Ce n'est pas ici le lieu d'entrer dans des détails techniques sur
ces différents points. On les trouvera exposés complètement dans la
Revision des constantes de l'astronomie stellaire. Bruxelles, Hayez,
1896.
( 661 )
On n'a malheureusement, à la suite de ces deux
déductions, accordé aucune importance aux observations
de nadir faites à Abbadia, avec une persévérance digne
de lous les éloges, par A. d'Abbadie, qui a généreuse-
ment doté son petit observatoire, afin que ses travaux y
fussent continués après sa mort.
La question est aujourd'hui étudiée dans plusieurs
observatoires d'Allemagne, au moyen du pendule extrê-
mement sensible de von Rebeur-Paschvvitz, et sera
peut-être poursuivie à Uccle, grâce à la généreuse inter-
vention d'un prolecteur très éclairé des sciences.
On sera surpris, quebpie jour, du peu d'importance
qu'on a attaché assez longtemps aux déviations pério-
diques de la verticale, en présence de l'influence relati-
vement considérable qu'on sera obligé de leur reconnaître
sur les coordonnées apparentes des astres.
L'explication de ces déviations est cependant limpide,
quoique la formule n'en soit pas aisée à établir.
Il est bien certain, vu les grandes irrégularités de
l'écorce terrestre, que le centre de gravité de celle-ci ne
coïncide pas avec celui du noyau.
Supposons l'écorce fixe, et, pour cela, animons la
Terre tout entière d'un mouvement égal et directement
contraire au mouvement diurne. 11 en résultera que le
centre de gravité du noyau effectuera, en un jour, une
révolution entière, rétrograde, autour de l'axe de rotation
de l'écorce. Et, comme la pesanteur est la résultante des
attractions des centres de gravité de l'écorce et du noyau,
on voit clairement que, si l'on prend pour position
moyenne de la verticale celle qui passe par le premier
de ces centres, la direction de la verticale réelle, c'est-
à-dire de la résultante des attractions des deux centres.
( 6li-i )
tournera en un jour, d'un mouvement rétrograde, autour
de sa position moyenne, et que le grand axe de relli|)se
qu'elle décrit sera situé dans le méridien.
Probablement existe-t-il également une période an-
nuelle de ces déviations.
Car si les masses du noyau et de l'écorce sont sensi-
blement différentes, il en résultera des différences plus
ou moins considérables entre les vitesses de leurs centres
de gravité, et elles se traduiront surtout par des variations
annuelles de position de l'un de ces centres par rapport
à l'autre.
Enfin, si, comme l'alfirment W. Tbomson et G. Dar-
win, l'écorce est élastique, il y aura non seulement des
déviations annuelles, mais encore des déviations men-
suelles de la verticale.
Je n'en parle ici qu'au point de vue des variations de
latitude, mais il va de soi qu'elles exercent également
une influence dans la détermination de l'ascension
droite.
On voit que l'observation de ces déviations mérite, à
divers litres, d'être assidûment poursuivie.
Sans doute, il existe d'autres causes de variation appa-
rente des latitudes; et il va de soi que toute erreur sur
la déclinaison de l'étoile observée en est une.
Peut-être chacune de ces dernières, prises isolément, ne
dépasse-t-elle guère en importance la nutation diurne,
dont on n'a pas encore tenu compte dans les réductions.
Et de là précisément la grande difficulté de leur détermi-
nation.
Dans tous les cas, c'est aux observations, discutées
scrupuleusement à l'aide des formules correctes du mou-
vement de rotation de l'écorce terrestre, qu'il faudra
( 603 )
recourir, pour établir les valeurs des constantes qui
figurent dans les termes, plus nombreux qu'on ne le
suppose très généralement, des variations de la lati-
tude.
Et s'il convient de louer sans réserve l'initiative clair-
voyante de M. Foerster, à laquelle la science est rede-
vable de ces nombreuses observations faites dans les deux
mondes, durant ces derniers lustres, et de la belle décou-
verte de Chandler, qui en a été la conséquence, il nous
sera permis peut-être d'indiquer les observations qu'on
pourrait joindre très utilement à ces dernières, afin
d'arriver, aussitôt que possible, à la détermination des
différents termes indiqués par la théorie du mouvement
de rotation de l'écorce terrestre.
Tous les efforts des astronomes, et même de l'Associa-
tion géodésique internationale, se sont portés vers la
recherche empirique du mouvement du pôle astrono-
mique, question spéculative certainement intéressante,
mais qu'un Kepler ne parviendrait pas à résoudre, tant
les éléments en sont compliqués, s'il ne pouvait s'aider
de la théorie.
Les astronomes disent : Puisque c'est autour du pôle
astronomique que la Terre tourne, c'est à l'équateur
astronomique que doivent être rapportées nos coordon-
nées.
Mais c'est dans ce plan également que devraient alors
être calculées les coordonnées que l'on prétend y obser-
ver. Et l'on ne s'est pas aperçu que, tandis qu'Oppolzer
rapporte la latitude au pôle astronomique, l'ascension
droite et l'heure sont rapportées, dans ses formules,
incorrectes du reste, à l'équateur et au méridien géogra-
phiques.
( 664 )
C'est donc à l'axe d'inertie de l'écorce terrestre que
j'ai rapporté les formules relatives à sa nutation.
Empruntant au savant mémoire inédit, dont j'ai parlé
ci-dessus, les équations dilïerentielles du mouvement de
l'écorce, et y introduisant une hypothèse qui, si même
elle n'est pas entièrement réalisée dans la nalure, permet
du moins d'ahoutir à des loimules absolument suflisantes
dans la pratique astronomique, je suis parvenu à intégrer
ces équations aussi rigoureusement qu'on a pu le faire
pour celles du mouvement de la Terre solide.
Dans cette lecture, je dois me borner à résumer les
résultats auxquels j'ai abouti :
1" La nutation eulérienne proprement dite, celle de
la Terre solide ou de mon ellipsoïde fictif, existe égale-
ment pour l'écorce. Sa période est de 504 jours;
ï^ii 2° L'écorce est sujette à une deuxième nutation de
caractère eulérien, dont la période dépend de ses moments
d'inertie, comme la période eulérienne proprement dite
dépend de ceux de la Terre ou de mon ellipsoïde fictif,
et ne peut donc être déterminée que par voie empirique.
J'ai admis, et tous les astronomes seront d'accord avec
moi, que cette période est celle de 451 jours, génialement
découverte par Chandler, et à l'existence de laquelle je
n'ai pas cru, aussi longtemps que je n'en avais pas une
explication théorique satisfaisante ;
5" A cette nutation chandlérienne vient s'ajouter, pour
l'écorce, une nutation bradiéenne (c'est-à-dire sans carac-
tère diurne) de même période (*);
(*) En recherchant ce terme dans la série des latitudes déterminées
par Peters, j'ai trouvé 0".07 pour son coefficient et réduit l'erreur
probable d'une observation à la moitié de sa valeur; c'est un argu-
( (565 )
Les coefficients de ces trois nutations sont des con-
stantes arbitraires;
4° L'axe de l'écorce est, de pins, soumis à la nutation
diurne, dont j'ai exposé les formules il ya quinze ans (*).
Dans les modifications que notre théorie apporte aux
formules usuelles de la nutation, n'apparaît aucun terme
solaire nouveau, mais des corrections seulement aux
coefficients des termes connus; comme ces coefficients
sont déjà faibles quant aux termes annuels, et que, au
contraire, la recherche dont je viens de parler (**), ainsi
que celles de Chandier, du reste, indiquent la nécessité de
l'introduction d'un terme solaire nouveau assez impor-
tant; comme on ne peut pas admettre que la constante
de l'aberration serait en défaut ou en excès de 0",1, je
ne vois d'autre cause de l'existence du terme solaire que
j'ai trouvé moi-même, que dans les déviations périodiques
de la verticale (***).
Je ne suis pas en mesure, actuellement, de donner les
ment décisif en faveur de l'existence de ce terme, et celle-ci est la
preuve la plus frappante de la fluidité intérieure du globe, car un terme
semblable ne peut pas se rencontrer dans la théorie du mouvement
d'une Teri'e solide. Mais, en même temps, j'ai trouvé un terme annuel
beaucoup plus important, sans caractère diurne, et dont nulle théorie
n'a soupçonné l'existence. (Voir le Bulletin d'octobre 1898.)
(*) Théorie des mouvements diurne, annuel et séculaire de l'axe du
monde. Bruxelles, Hayez, ISS'^, 1894.
("") Voir la note de la page précédente.
(***) Il est possibh^, comme je l'ai fait voir dans mon Essai sur la
variation des latitudes, que l'accumulation -des neiges hivernales sur
notre hémisphère occasionne une variation de l'axe d'inertie de
l'écorce, et par suite, de la latitude, même rapportée à cet axe. 3Iais
cette variation est éliminée dans les différences des latitudes {s et /:,
d'où j'ai déduit, pour le terme solaire, le coefficient 0",07.
( 666 )
formules théoriques de ces déviations, non plus que celles
des variations de latitude occasionnées par les déforma-
tions élastiques de l'écorce.
Il y a lieu d'espérer que cette lacune sera bientôt com-
blée. Auparavant, il ne sera guère possible de déduire
des observations une valeur quelque peu correcte de la
constante de l'aberration, à cause surtout de la difficulté
d'exprimer empiriquement les termes solaires provenant
des déviations périodiques de la verticale.
D'après ce qui vient d'être exposé, on voit bien claire-
ment que, puisqu'on ne peut obtenir de formules cor-
rectes en astronomie sphérique, qu'en prenant l'axe ou
le pôle d'inertie pour axe ou pour pôle de. référence, c'est
relativement à ce pôle, et non au pôle instantané, que
doit être délinie la latitude; on voit alors aussi qu'une
partie notable des variations de latitude (rapportée à ce
dernier pôle) se traduit par des variations de déclinaison
(rapportée au pôle d'inertie), une autre partie résultant,
pour nous, des déviations périodiques de la verticale.
Seules les variations météorologiques ou élastiques du
pôle d'inertie de l'écorce terrestre seraient des variations
réelles de la latitude, rapportée à l'un ou l'autre pôle
indifféremment.
C'est cette opinion que j'ai défendue depuis huit
ans (*).
Elle a été combattue par un astronome-géomètre très
distingué (**), qui n'a jamais répondu nia ma réplique (***)
(*) Comptes rendus, mai 1890.
(*') Tisserand, B. A., 1890.
(*") Bull, de l'Acad. roij. de Belgique, 3« sér., t. XXIII, p. 84, 1893.
Réponse à M. Tisserand.
(667 )
ni à un article postérieur (*), et a néanmoins pris, comme
j'ai soutenu qu'on devait le faire (**), l'axe d'inertie pour
axe de référence dans ses formules du mouvement de
rotation de la Terre.
Des formules correctes du mouvement de rotation de
l'écorce terrestre, résultent deux conséquences de la plus
haute importance à l'égard de la détermination des diffé-
rents termes de la nutation.
Les deux nutalions eulérienne et chandlérienne s'éli-
minent dans la moyenne des ascensions droites ou des
déclinaisons d'une étoile observée dans le méridien
tixe à deux passages consécutifs (.set i), et, par suite, dans
la différence des latitudes déduites de ces deux passages.
Il en est de même des déviations diurnes de la verticale,
ainsi que des variations météorologiques ou élastiques du
pôle d'inertie.
C'est de semblables 'combinaisons d'observations qu'on
peut donc espérer les meilleurs résultats, quant à la
détermination des constantes de la nutation diurne ou
de l'aberration (***) et quant aux corrections à apporter
aux termes de la nutation bradléenne.
(*) Acta Muthematica, 1892.
(*') Annuaire de l'Observatoire royal, 1890 à 1897.
('"> Voir ces déterminations dans la Révision des constantes de
rastronomie stellaire. — Je ferai remarquer à ce sujet que Chandler a
déduit (A. . J, n" 293), comme moi-même {Révision des constantes, etc.1,
des observations de latitude de Gyldén, les meilleures peut-être
qu'on possède, une correction négative de la constante de l'aberration
de Struve. Mais si je suis entièrement d'accord avec lui (A. J., n" 427)
sur l'inopportunité de modifier actuellement cette constante, je
réserve absolument mon opinion quant au sens de la correction qu'il
y aura lieu d'y apporter, lorsque les termes solaires dont j'ai parlé
seront suffisamment connus.
( 668 )
Au contraire, cette dernière nulation, ainsi que l'aber-
ration, s'éliminent dans les différences des ascensions
droites ou des déclinaisons, et, par suite, dans la moyenne
des latitudes obtenues à ces deux passages. Il en serait
naturellement de même pour deux observations d'une
même étoile, faites à douze heures d'intervalle, en deux
lieux différents.
Dans les formules correctes de la nutation (rapportées
à l'axe d'inertie), celle-ci existe donc, quant aux termes
dont l'existence n'a été bien clairement révélée que par
les observations de latitude faites durant ces dernières
années (eulérien, chandlérien, annuel), aussi bien en lon-
gitude qu'en obliquité, en ascension droite qu'en décli-
naison ; et c'est là un point qui a été nié ou négligé par
tous les astronomes (*).
Depuis bien des années, nous avons signalé ces deux
conséquences de la théorie, que Chandier a appliquées
dans ses laborieuses recherches sur la variation des lati-
tudes, quoi qu'il ne semble pas encore avoir admis com-
plètement notre manière de voir, qui consiste, comme il
résulte des formules de la nutation, à remplacer les
variations de la latitude rapportée à l'axe instantané
(pour lequel il n'existe pas de formules correctes) par des
(*) Les expressions de ces variations sont, dans le méridien, quant
aux deux nutations eulérienne et chandiérienne :
col ?SoL = ±: rsin (/3, -4- ;3/) qr y' sin (5' -\- 0'1),
A^ = =F rcos (3, -+- 31) ± r' cos (3; -t- d'i),
les signes supérieurs et inférieurs correspondant aux passages de
même nom. {Théorie du mouvement de rotation de l'écorce solide du
globe. Bruxelles, Hayez, 1898, p. 34.)
( 669 )
variations de Ja déclinaison rapportée à l'axe d'inertie
(pour lequel les formules sont absolument correctes) et
par des déviations périodiques de la verticale (abstraction
faite des variations réelles qui pourraient provenir d'un
déplacement de l'axe d'inertie).
Cette négation des variations de la latitude rapportée
au pôle d'inertie, sur laquelle j'ai déjà appelé l'attention
des astronomes, il y a six ans, à cette même tribune,
diminue-t-elle en rien le mérite de la découverte de Ber-
lin? Évidemment non. Que cette découverte se traduise
par l'expression de varialions de la lalitude, rapportée au
pôle instantané, ou par celle de varialions en obliquité et
en longitude relatives à l'axe d'inertie, elle n'en aura pas
moins grandement contribué à combler le fossé qui
sépare l'astronomie du XIX'" siècle de celle du XX''.
Je dirai même que le retentissement de cette décou-
verte, et de celle de Chandler, dans le monde entier, a
excité en moi, plus encore peut-être que celle de la nuta-
tion diurne, le désir d'aboutir à l'établissement définitif
des formules du mouvement de rotation de l'écorce
terrestre.
Une procbaine aurore montrera la solution théorique
complète de cette question, que la lin du siècle a léguée
au siècle futur comme une énigme indéchiffrable. Et
quand cette solution définitive aura été confirmée par les
faits, on s'étonnera à bon droit, tant on la trouvera alors
limpide, que les meilleurs esprits se soient refusés si
longtemps à l'admettre.
Une tâche complémentaire, qui incombe également à
nos successeurs immédiats, peut-être même à nos con-
temporains, sera la détermination plus correcte d'un
certain nombre de constantes fondamentales, telles celles
( 070 )
de la précession, de raberration, de la parallaxe solaire
et des nutalions à courte période.
Ces constantes connues, l'astronomie spbérique du
XX® siècle sera édifiée.
11 m'eût été doux de pouvoir poursuivre, dans les
publications de l'Observatoire, ma revision des constantes
de l'astronomie stellaire, tâcbe pour l'accomplissement
de laquelle j'ai accepté, un peu malgré moi, la direction
de l'établissement.
Des influences administratives, absolument inexcusa-
bles en matière scientifique, m'en ont empêché, malgré
le zèle dévoué de mes astronomes, sur le précieux con-
cours desquels je suis très heureux de pouvoir compter
encore aujourd'hui.
Eux, dont la compétence en ces matières, qu'ils ont
scrutées avec moi pendant douze ans, n'est pas douteuse,
ont eu foi dans mon œuvre, et leurs travaux ont été
appréciés à l'étranger (*),
Une administration incompétente l'a considérée comme
une chimère, et j'ai dû renoncer à les y faire collaborer.
J'en étais donc réduit à la poursuivre seul, charge
écrasante, jointe aux devoirs multiples qui incombent
au directeur d'un observatoire à la fois astronomique,
météorologique et magnétique.
Il ne me restait qu'à choisir : ou continuer mon
œuvre et donner ma démission, ou conserver la direc-
tion en abandonnant mon œuvre.
C'est le premier parti que j'ai pris, et je n'ai pas lieu
de m'en repentir, quoi qu'il arrive.
(*) GiiNTHER, Physique géogrnpliiqice, 2* éd., pp. 270 et 350.
ScHMiDT, Jahresber. des Wiirt. Naturiv. Vereins, 1897, p. 240.
^ ( 671 )
Les loisirs de la retraile m'ont permis de faire faire,
aux questions dont je poursuis l'étude, le pas le plus
décisif qu'elles aient franchi depuis seize ans.
Et si les publications de l'Observatoire ne me sont plus
accessibles aujourd'hui, du moins, grâce au bienveillant
concours de mes confrères, celles de l'Académie me le
restent-elles, et la science ni le pays n'y perdront
rien.
Grivegnée (l^iége), décembre 1898.
ANNEXE.
Sur la théorie de la variation des latitudes.
Jusqu'en ces derniers temps, je me suis toujours refusé
à admettre les formules que Chandier avait déduites d'un
grand nombre d'observations, relativement à la variation
des latitudes, parce que ces formules me paraissaient tout
à fait injustifiables en théorie : la période de 431 jours
me semblait inexplicable, et le terme annuel, dont l'ar-
gument dépend de la longitude du Soleil et de celle de
l'observateur, plus inexplicable encore (*).
Je ne pensais pas alors qu'il put exister, dans la nuta-
tion de l'écorce terrestre, des termes essentiellement
différents de ceux qui se rapportent à la Terre solide.
Je me trompais.
C) Quoique Chandier, depuis la publication de mon Essai sur la
variation des latitudes, ait, en ses dernières formules, supprimé la
longitude de l'observatoire dans l'argument de son terme annuel, je
crois néanmoins très explicable la présence de ce terme, sous sa
première forme.
( 672 ) «
Lorsque j'ai établi les formules <lu mouvement de
rotation de l'éeorce terrestre, je suis arrivé aux résultats
suivants :
La précession et le terme nodal de la nutation sont les
mêmes pour l'éeorce que pour la Terre solide, ainsi que
la nutation eulérienne de 304 jours.
Certains termes de nutation peuvent être altérés, et
dans leur forme, et dans leur grandeur, par les actions
mutuelles de l'éeorce et du noyau. La théorie, aidée de
l'observation, découvrira quels sont ces termes, et de
quelle quantité ils seront altérés.
Ces actions mutuelles introduisent, de plus, un nou-
veau terme de forme eulérienne, et d'une période de
-^ jours, «2 *^''iiit "" coelTicient qui dépend des actions
mutuelles, ainsi qu'un terme, non eulérien, de même
période.
Le premier de ces termes me semble être indubitable-
ment celui de Chandler.
S'il en est ainsi, le coefficient a^, dépendant des
actions mutuelles, est connu ; alors aussi on connaît le
dénominateur N = u^«^ (1 -^- 0^2) — 2 a^, qui intervient
dans le coefficient de tous les termes de nutation (*).
Et l'on voit que ce sont les termes dépendants de la
simple longitude du Soleil qui seront les plus altérés dans
les expressions de la nutation de l'éeorce.
Ceci explique les discordances considérables entre les
diff'érentes déterminations de la constante de l'aberration
qui ont été faites depuis Delambre et F.-W. Struve
jusqu'à nos jours.
(') Voir Théorie du mouvement de rotation de l'éeorce solide du globe.
Bruxelles, Hayez, 1898.
( 673 )
Mais ceci n'explique pas encore la présence du second
terme de Cliandler dans l'expression de la variation des
latitudes.
Dans la théorie du mouvement de l'écorce terrestre,
dont je viens de résumer les principaux résultats, j'ai
supposé, à cause de la difliculté du problème, que les
centres de gravité du noyau et de l'écorce coïncident.
Or, si l'on peut admettre, quant à celui-là, que son
centre de gravité coïncide avec on centre de ligure, il
n'en est pas de même quant à celle-ci, à cause de ses
irrégularités considérables.
Il ne sera pas hors de propos de signaler, à ce sujet,
une concordance tout à fait remarquable entre une
déduction à priori, relative à l'épaisseur de l'écorce, et le
résultat déduit d'un très grand nombre d'observations.
On sait que M. Faye a énoncé cette opinion judicieuse
que l'écorce doit être plus épaisse sous les mers que sous
les continents, parce que le refroidissement y a été plus
considérable (*).
C'est donc au sein de l'océan Pacifique que doit se
trouver l'axe du plus petit moment d'inertie de l'écorce,
et, par suite, le méridien auquel nous avons donné le
nom de premier méridien. Les déterminations que nous
avons faites de sa position (**), qui est une des deux
constantes de la nutation diurne, le placent à Poulkovo,
c'est-à-dire entre les îles Marquises et les îles de la
Société, au beau milieu du Pacifique; ce qui confirme
(*) Comptes rendus, 12 janvier 1891.
(") Révision des conslnntes de l'astronomie stellaire, 1896. (Extrait
du t. VII des Annales astronomiques de l'Observatoire royal de
Belgique.)
5"'* SÉRIE, TOME XXXVl. 45
( 674)
absolument les vues de M. Faye et fournit une jireuve, à
ajouter à toutes les autres, de la réalité de la nutation
diurne, et, par conséquent, de l'existence d'une écorce
solide, indépendante du noyau dans les mouvements à
courte période.
Nous devons donc admettre que le centre de gravité de
l'écorce ne coïncide pas avec celui du noyau.
Examinons les conséquences de ce fait.
Considérons un lieu déterminé de la Terre. La gra-
vité, en ce lieu, sera la résultante des attractions du
centre de gravité de l'écorce et de celui du noyau. Nous
appellerons verticale moyenne la direction de la pre-
mière de ces deux attractions.
Quelle sera la direction réelle de la verticale et à
quelles déviations sera-t-elle sujette?
Pour nous en faire une idée exacte, rendons l'écorce
terrestre fixe, imprimons à tout le système un mouve-
ment égal et de sens contraire au mouvement diurne de
celle-ci, et faisons provisoirement abstraction de son
mouvement de révolution autour du Soleil.
Dès lors, le centre de gravité du noyau tournera autour
de l'axe de rotation de l'écorce, d'un mouvement égal et
directement contraire au mouvement diurne.
Il en résulte, à l'évidence, qu'en tout lieu la verticale
décrira, en un jour sidéral, d'un mouvement rétrograde,
un cône autour de sa position moyenne, résultat confirmé
par les observations du nadir; que c'est dans le méridien
que la direction de l'attraction du noyau fera le plus
grand et le plus petit angle avec celle de l'attraction de
l'écorce, et, par suite, que les déviations de la verticale
seront, en un môme lieu, les plus considérables, fait
également confirmé par l'observation ; que c'est dans le
{ 67o )
premier vertical qu'elles seront les plus faibles; qu'elles
dépendent de la latitude du lieu, et qu'aux pôles la verti-
cale décrira un cône circulaire droit autour de sa position
moyenne; qu'en des lieux de même latitude, les dévia-
tions seront égales, mais qu'elles se présenteront une
heure plus tard pour un lieu situé à 15'' de longitude
occidentale du premier.
Or toutes les déterminations de latitude, et notamment
les déterminations directes, reposant sur des observations
de distances zénithales, ont été fondées sur l'hypothèse de
l'invariabilité du zénith.
Puisque celui-ci est variable, il en résultera des varia-
tions périodiques de la latitude, qui affecteront le carac-
tère eulérien, c'est-à-dire qu'elles se produiront en sens
contraire en deux lieux situés à douze heures de longitude
l'un de l'autre.
Telle est la conséquence des déviations diurnes de la
verticale, en ce qui concerne les variations de latitude.
Mais les déviations de la verticale ont également une
période annuelle, comme on le verra ci-dessous.
Imaginons, en effet, le noyau solide séparé de l'écorce
par une couche fluide. Ces deux corps diffèrent notable-
ment entre eux par la masse.
De plus, les distances de leurs centres de gravité à celui
du Soleil sont très généralement différentes entre elles.
Il en résulte que les orbites décrites par ces deux cen-
tres autour du Soleil ne sont pas identiques, et, quoique
le noyau soit inclus dans l'intérieur de l'écorce, la flui-
dité de la couche interposée permet certains mouvements
de leurs centres l'un par rapport à l'autre ; il est possible
même que les phases lunaires ne soient pas sans exercer
une légère influence sur ces mouvements.
( 676 )
Il est certain, toutefois, que c'estsurtoutdu Soleil qu'ils
dépendront, et que la distance mutuelle de ces deux cen-
tres sera une fonction périodique de la longitude de cet
astre.
Il en sera de même des déviations de la verticale, qui
dépendent de cette distance ; et, puisque, comme on l'a
vu ci-dessus, ces déviations affectent également le carac-
tère eulérien, la forme en sera, pour un lieu déterminé,
celle du second terme de Chandier, sous sa première
forme, à ceci près toutefois, que le coefficient dépendra
de la latitude de l'observateur.
Il résulte des considérations qui viennent d'être expo-
sées que les deux termes chandlériens de la variation des
latitudes existent, mais que le terme eulérien d'une
période de 504 jours existe également ; qu'il existe de
plus un terme rétrograde d'une période de 431 jours (*),
mais qui n'affecte pas la forme eulérienne, c'est-à-dire
que ce terme rentre parmi ceux de la nutation générale,
qui sont les mêmes pour tous les observatoires ; enfin,
que les termes solaires de nutation, calculés pour une
Terre supposée solide, devront être un peu modifiés pour
l'écorce terrestre.
Mais si nous nous demandons quels sont, parmi ces
termes, dont la théorie du mouvement de l'écorce terres-
tre révèle l'existence, ceux qui indiquent une variation
réelle de la latitude astronomique (c'est-à-dire rapportée
au pôle instantané de rotation, et non au pôle géogra-
phique de l'écorce), nous voyons clairement que ce sont
(*) L'existence de ce terme est établie par les différences des lati-
tudes (5 et i) observées par Peters. {Bull, de l'Acacl. roy. de Belgique,
3« sér., t. XXXVI, octobre 1898.)
( 677 )
les deux termes eulériens seuls, celui de 304 jours et
celui de 431 jours; que le terme annuel de Chandler,
malgré sa forme eulérienne, se rapporte à des déviations
périodiques de la verticale et produit des variations du
zénith, et par suite des variations apparentes seulement
de la latitude astronomique. Il en est de même, à plus
forte raison, des autres corrections que la théorie du
mouvement de l'écorce apporte aux formules de nutation
calculées pour une Terre solide, et qui sont, du reste, les
mêmes pour tous les lieux d'observation.
Je fais ici abstraction des termes du second ordre en
général, dont j'ai donné les expressions dans ma Révision
des constantes de l'astronomie steUaire, et qui rentrent
également dans la catégorie précédente.
Il est encore deux causes, plus secondaires probable-
ment, de variations de la latitude.
La première est le déplacement du pôle d'inertie de
l'écorce terrestre par suite des précipitations atmosphé-
riques et, en particulier, de l'accumulation des neiges
pendant l'hiver sur les masses continentales de l'hémi-
sphère boréal. J'ai exposé, dans mon Essai sur les
variations de latitude, les effets de cette cause sur les
coordonnées apparentes des astres et, par suite, sur le
calcul de la latitude déduite des observations de ceux-ci (*).
La seconde cause est l'élasticité de l'écorce terrestre.
On conçoit que cette cause a pour effet de renfler l'écorce
aux deux extrémités du rayon vecteur mené de son centre
à l'astre (Soleil ou Lune), et, par conséquent, de produire
(*) La seconde forme donnée par Chandler à son terme annuel
concorde avec la formule que j'ai déduite de cette hypothèse. \ Essai
sur la variation des latitudes. Extrait de I'Annuaire pour d894.)
(678)
des dtWiations de la verticale, dont l'effet viendra s'ajouter
à celui des déviations qui ont été signalées ci-dessus.
Le théorie des déformations élastiques de l'écorce ter-
restre n'a pas encore été faite. Des observations suivies
de la verticale permettront cependant de s'assurer rapi-
dement de leur existence; car, dans ce phénomène,
l'intluence prépondérante de la Lune se manifestera pro-
bablement, comme dans les marées, par l'existence de
périodes mensuelles.
Voici donc quelles sont les raisons théoriques, bien
plus multiples qu'on ne l'a cru, des variations de latitude :
1° L'existence, dans l'expression de la nutation géné-
rale de l'écorce solide, d'un terme à mouvement rétro-
grade d'une période de 451 jours : la nutation générale
est celle qui affecte l'axe d'inertie de l'écorce, et qui est
la même pour tous les points de celle-ci.
2" Les corrections à apporter, pour l'écorce, aux
termes solaires de la nutation générale, calculés dans
l'hypothèse de la solidité du globe.
5° Incertitude de la constante de l'aberration.
Ces trois premières causes ne produisent que des
variations purement apparentes de la latitude, qui pro-
viennent d'une négligence dans le calcul de la déclinai-
son de l'étoile.
11 en est de même de la quatrième cause, qui se rap-
porte à la nutation spéciale, variant avec la longitude du
lieu de l'observation :
4° Négligence des termes de la nutation diurne.
Celle-ci produira les différences apparentes les plus
grandes de latitude entre deux lieux dont les longitudes
diffèrent entre elles de 0 heures.
5'' La nutation eulérienne proprement dite, d'une
période de 304 jours.
V <>"9 )
6" La nutation chandiérienne, de même caractère que
la précédente, mais d'une période de 451 jours. Ces deux
nutations sont des causes réelles de variations de la lati-
tude astronomique, c'est-à-dire rapportée à l'axe instan-
tané de rotation (*). Elles produisent les différences les
plus grandes entre les latitudes de deux observatoires
distants de douze heures en longitude l'un de l'autre.
7° Les déviations périodiques de la verticale, qui pro-
viennent de la non-coïncidence des centres de gravité du
noyau et de l'écorce, et qui présentent, outre une période
diurne, une période annuelle. Celles-ci expliquent la
présence du premier terme annuel de Cliandler dans
l'expression de la variation des latitudes.
8° Les déviations de la verticale qui proviendraient de
l'élasticité de l'écorce. Celles-ci produiraient également
des variations apparentes de latitude à double période,
l'une diurne, l'autre annuelle et mensuelle.
9° Les variations annuelles de position de l'axe d'iner-
tie de l'écorce, provenant des précipitations atmosphé-
riques, et dont l'effet maximum se fera sentir, en latitude,
sur le méridien suivant lequel s'est effectué le déplace-
ment du pôle, tandis qu'il sera nul sur le méridien situé
à 90° du premier (**).
Parmi ces neuf causes théoriques, dont les sept pre-
(*) Il a été démontré que, si la nutation euléfienne (ou la chandié-
rienne^ disparait correctement de la nutation en obliquité pour se
traduire par une variation de la latitivde, elle ne disparait pas en
longitude, et intervient même, chose plus grave, dans l'expression de
l'heure sidérale. [Vierteljahrsckrift, 1896; Annuaire de l'Observatoire
pour 1897.)
(*') L'existence de ces dernières variations semble confirmée par la
seconde forme donnée par Chandler à son terme annuel.
( 680 )
mières sont certaines, les deux autres simplement proba-
bles, la plupart n'occasionnent que des variations pure-
ment apparentes de latitude, qui proviennent d'une
incorrection dans le calcul de celle-ci : négligence, soit
de quelques termes de nutation indiqués par la théorie,
soit des déviations de la verticale, ou incorrection de la
constante de l'aberration.
Deux termes seulement sont relatifs à des variations
réelles de la latitude aslronomique : c'est le terme eulérien,
d'une période de 304 jours, et le terme chandiérien,
d'une période de 451 jours.
La présence du terme annuel dans les premières for-
mules de Chandler s'explique, comme il a été dit, par
les déviations périodiques de la verticale, qui produisent,
dans les distances zénithales des étoiles, des variations
dont aucune formule n'a encore tenu compte; ces varia-
tions revêtent, comme les deux termes précédents, le
caractère eulérien, c'est-à-dire que la longitude de l'ob-
servatoire intervient dans leur argument.
L'angle horaire interviendrait également dans ces trois
termes, s'il s'agissait d'observations faites hors du méri-
dien, cas dont nous ne nous occuperons pas ici.
On trouvera plus loin les expressions de la plupart des
termes précédents, à l'exception de ceux qui proviennent
des déviations de la verticale, et que l'on doit se borner,
actuellement, à rechercher d'une manière empirique.
Analysons néanmoins les déviations qui sont dues à
la non-coïncidence des centres de gravité du noyau et de
l'écorce.
Nous désignerons ces deux centres par N et E, le lieu
de l'observation par L, et nous poserons LE == R,
LN = r, EN = d, sa projection sur R, égale à d\
l'angle ELN = y.
(681 )
Soit I l'attraction de E, i celle de N sur L, G leur
résultante, g l'angle qu'elle fait avec R.
En projetant G sur R. on a
Or
cos r ■■
» = I —
G cos g = \ -\- i cos ■y.
2Rr
d'Y d«
I -H 2-
R/ R'
en se bornant aux termes du second ordre en d. Donc
. , , d'Y R — rf' d^
G cos o = I 1 -t- I H- 2 ,
^ ' ^ R/ r rM
ou, en remplaçant
R — ri!'
1 d' -t- d"
par 1 ; —
^ 2 R^
Mais
^/' 1 d" 5 r/'
Gcosg = 2II -♦-2— H
y ' R 2 R' 2 R'
G* = P -+- i' -H 2h* cos r
= 1* 1 -t-
r/ ri'\* rfq R _ ,
L\ R/ R'^J r
( 682 )
En réduisant, on trouve
et
J d' 5] <r 5 rf*\
G* = 4IM1 -+-4--+- ,
\ R 4 ir 4RV
/ d' 5 3rf'* — d*\
G =21 1 -+-2- H — ;
\ R 8 R^ /
d'où l'on tire
q \ ,-d 13 (/"
a ou 2 sin -^ = - 1/7 - I
■' 2 2 R\ 14 ri*
Telle est l'expression de l'angle que la verticale fait
avec sa position moyenne.
Le rapport j est le cosinus de l'angle de d avec R,
cosinus dont l'expression est
:Rf/
j atteint donc son maximum et son minimum en même
temps que r, c'est-à-dire dans le méridien.
On aura, pour ces deux cas, en désignant par e la
demi-ouverture du cône diurne décrit par le centre du
noyau autour de l'axe de l'écorce, et par <ï> la latitude du
lieu,
d'
— == sin(* =b e).
a
( 683 )
Désignons par Ag la différence entre les valeurs maxi-
mum et minimum de l'angle g :
A9= 1.23- ! sin'('î>-t-f) — sin*('i> — f ) !
cl
= 1.23 — sin 2* sin 2f.
R
Pour que cette différence soit la plus grande possible,
il faut que la latitude du lieu soit égale à 45% de même
que l'angle que la ligne des centres du noyau et de
l'écorce fait avec l'axe de celle-ci.
Il semble que cet écart puisse s'élever aujourd'hui,
sous notre latitude, 5(>',5, à 0",6 :
On aurait donc actuellement (janvier 1898) ^ sin 2e
= 0",5 environ, et la distance des centres du noyau et
de l'écorce serait de 16 mètres approximativement, en
admettant que e soit égal à 45".
Cette faible valeur est parfaitement admissible; et il
n'en résulte pas moins des écarts très sensibles entre les
directions de la verticale à 12 heures d'intervalle, ou, si
l'on veut, en deux lieux, situés à 12 heures de longitude
l'un de l'autre, et où l'on a observé une même étoile.
Comme on ne peut pas, actuellement, tenir compte de
ces déviations de la verticale dans le calcul des distances
zénithales, cette négligence se reportera naturellement sur
ie calcul de la latitude déduite de tes distances.
Indépendamment de la période diurne qui vient d'être
signalée dans les déviations de la verticale, elles ont
également une période annuelle.
La distance des centres du noyau et de l'écorce dépend,
( 684 )
en effet, des rayons vecteurs menés de ces centres au
Soleil, ainsi que de l'angle compris entre eux. Les
expressions de ces rayons sont des fonctions de la diffé-
rence des longitudes du Soleil et du périgée; il en est
de même de l'angle compris et, par conséquent, de la
distance des centres.
Pour trouver l'expression de cette distance, il faudrait
connaître la théorie des mouvements des deux centres
autour de leur centre de gravité commun, théorie qui ne
sera peut-être pas établie avant longtemps.
Mais on voit, d'après ce qui vient d'être dit, que la
première formule empirique de Chandler est parfaite-
ment justifiée.
La seconde l'est également, si les précipitations hiver-
nales modifient la position de l'axe d'inertie de l'écorce.
Il y aurait, en ce cas, deux termes annuels distincts ;
le premier affecterait un caractère diurne, l'autre pas.
Nous donnerons ci-dessous, aussi complètement qu'il
nous est possible de le faire, les termes complémentaires
que la théorie du mouvement de l'écorce terrestre intro-
duit dans l'expression de la déclinaison rapporlée au
pôle d'inertie, en y ajoutant un dernier terme, provenant
des déviations périodiques de la verticale.
Formules de réduction du XY° siècle.
Dans les expressions suivantes, N,9, N,-]; désignent les
nutations en obliquité et en longitude de l'écorce, qui
proviennent des constantes arbitraires; N^Q, N^^Jj la nuta-
tion diurne.
cf est l'heure sidérale du premier méridien; celui-ci est
situé par 245™ de longitude E. de Greenwich. Pour un
( m )
observatoire qui est à l heures de longitude W. du pre-
mier méridien, ce = / -i- t, - étant l'heure sidérale de
l'observation.
Ne^ = ri sin (p; — ,J) — y sin [(I + /)« + p]
4-risin[(l -t-/,)îP -+- p,].
sineN,./- = ricos(p; — /,<) — rcos[(t -t- z)-^ -+- p]
-4-riC0s[(l -4-/,)y + p,].
Les périodes de U et de 4^ sont respectivement de 304
(Euler) et de 431 (Chandler) jours.
N^e = 0:0G7 (I, cos2î> -+- 2^ sin 2?).
sin eN^.f = 0'.'067 ( — 2, sin 2? -+- 1^ cos 2?).
2, = — 1.15 — 0.154 cosQ -+- 0.3G cos 2© -t- 0.82 cos 2(([.
22= —0.18 sin Q + 0.39 sin 2© -H 0.88 sin 2(;.
Les termes qui proviennent du déplacement annuel du
pôle d'inertie sont, M désignant la longitude de l'obser-
vatoire relativement au méridien sur lequel s'eflfectue ce
déplacement, et z l'heure sidérale (*) :
Ae= — i sin (M -+- t) cos(© — A),
sin dA<i> = — i cos (M ■+- z) cos(© — A);
d'où, en appelant r, l'angle horaire :
Aâ= — i cos (M -+- ij) cos (O — A).
(*) Essai sur les variations de lalitude.
I
( 686 )
C'est là le terme annuel de Chandler, sous la seconde
forme qu'il lui a donnée.
Mais, comme il a été dit ci-dessus, la première forme
pourrait exister, par suite des déviations périodiques de
la verticale. Il est à présumer que celles-ci se traduiront
par des expressions de la forme
Ad= gf sin(» -H O — F),
sin e^<^ = g cos(î) -t- © — F),
la constante g variant avec la latitude de l'observatoire.
On déduira aisément, des formules précédentes, l'ex-
pression de
AJ == sin aNg -+- cos a sin 0N«,.
L'introduction de cette expression dans la réduction
de l'étoile au lieu apparent montrera, lorsque les con-
stantes (y compris celle de l'aberration) en seront bien
connues, V invariabilité de la hauteur du pôle moyen géogra-
phique (*), que nous affirmons depuis huit ans.
{*) Nous ne parlons pas ici des termes du second ordre, quoiqu'on
n'en tienne pas un compte exact, parce qu'ils sont insignifiants dans
la réduction des observations aujourd'hui en faveur, et renverrons,
sur ce sujet, au Catéchisme correct d'astronomie spliériqice et k la
Revision des constantes de L'astronomie stellaire.
( 687)
M. le Secrétaire perpétuel proclame de la manière sui-
vante les résultats des concours et des élections :
CONCOURS ANNUEL DE LA CLASSE (4898).
SCIE^VCES lIATnÉlUATIOlJES ET PHYSIQUES.
Trois mémoires ont été reçus en réponse à la troisième
question :
Apporter une contribution importante à l'étude des cor-
respondances (Verwandtschaften) que l'on peut établir entre
deux espaces.
Ils portent pour devises :
N°' i. — Geometry is hard (J.-H.-S. Smith) ;
2. — Numeri regunt locum;
5. — Itinera ad verum.
Sur la déclaration des commissaires-rapporteurs de ne
pouvoir encore présenter leurs conclusions, autant à
cause de l'importance de la question posée que des pro-
portions des mémoires soumis à leur appréciation, la
Classe ajourne le prononcé du jugement jusqu'à une
prochaine séance publique.
SCIENCES IVA.TVREEEES.
Un mémoire portant comme devise : L'activité des
plantes carnivores est, en dernière analyse, une question
( 088 ) il
d'azote (Morren), a été reçu en réponse à la première
question :
On demande de nouvelles recherches macrochimiques et
microchimiques sur la digestion chez les plantes carnivores.
La Classe, ratifiant les ('onclusions des rapports des
commissaires qui ont examiné ce mémoire, a décerné une
médaille d'or de la valeur de six cents francs à l'auteur,
M. Georges Clautriau, assistant à l'Institut botanique, à
Bruxelles.
Un mémoire portant pour devise : La physiologie des
Invertébrés est presque tout entière à l'état de desideratum
(L. Fredericq), a été reçu en réponse à la deuxième
question :
On demande des recherches physiologiques nouvelles sur
une fonction encore mal connue chez un animal invertébré.
La Classe, ratifiant les conclusions des rapports des
commissaires qui ont examiné ce mémoire, a décerné une
médaille d'or de la valeur de six cents francs à l'auteu",
M. L. Cuénot, professeur de zoologie à la Faculté des
sciences de l'Université de Nancy (France).
La Classe, conformément à la demande du Comité qui
a publié les oeuvres de J.-S. Stas, a l'honneur d'offrir un
exemplaire de ces volumes à M. Robert Goldschmidt et
à M. Just Denis, élèves de l'Université de Bruxelles,
qui ont obtenu, cette année, avec la plus grande distinc-
tion, leur diplôme légal de docteur en sciences chimiques.
( 689 )
ELECTIONS.
Depuis ses dernières élections, la Classe a eu le regret
de perdre deux de ses membres titulaires, MM. Alph. Briarl
et Ern. Candèze, el trois de ses associés : MM. François
Brioschi, de Milan; Rodolphe Leuckart, de Leipzig, et
James Hall, d'Albany.
Ont été élus :
Dans la Section des sciences mathématiques et phy-
siques :
Correspondants : MM. François Deruyts, chargé de
cours à l'Université de Liège, et Ch.-J. de la Vallée
Poussin, professeur à l'Université de Louvain.
Associé: M. Louis Cremona, sénateur, professeur à
l'Université de Rome.
Dans la Section des sciences naturelles :
Membres titulaires, sauf approbation royale: MM. Al-
phonse-F. Renard et Léo Errera, correspondants.
Associés : MM. Edwin Ray Lankester, directeur du
Musée d'histoire naturelle au Brilish Muséum, et Alexan-
dre Karpinsky, directeur du Comité géologique russe à
l'Institut des mines de Saint-Pétersbourg.
3™* SÉRIE, TOME XXXVI.
46
( 690 )
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Bambeke {Ch. Van). Contributions à l'histoire de la
constitution de l'œuf. III. Recherches sur l'oocyte de
Pholcus phalangioïdes (Fuessl.). Liège, 1898; extr. in-S*
(88 p., 6 pi.).
Goblel d'Alviella {Le comte). Les rites de la moisson et
les commencements de l'agriculture, à propos du dernier
ouvrage de M. Grant Allen. Paris, 1898; exlr. in-8° (25 p.).
Lancaster (Alb.) et Meuleman [E.). Le climat du Congo.
Bruxelles, 1898; in-S» (iv-464 p., cartes).
Van lier Mensbrugghe [G.]. Sur les propriétés fondamen-
tales des liquides. Bruxelles, 1898; extr. in-8" (10 p.).
Gamond {L. de). Le collectivisme. Discours. Gand, 1898;
in-8° (4o p.).
Cremers {E.). L'analyse et la composition mélodiques.
Paris-Bruxelles, 1898; in-8° (92 p.).
Pelermann [A.). Recherches de chimie et de physiologie
appliquées à l'agriculture, tome III. Bruxelles-Liège, 1898;
in-S" (427 p.).
Bruxelles. Société royale de médecine publique. Congrès
national d'hygiène et de climatologie médicale de la Bel-
gique et du Congo (Bruxelles, août 1897). Rapport avec le
résumé des mémoires envoyés en vue du Congrès ; l""" partie,
Belgique; "1^" partie, Congo : climat, constitution du sol et
hygiène de l'État Indépendant. 1898; 2 vol.
— Compte rendu des séances du Congrès national
d'hygiène. 1898.
Ministère de V Agriculture et des Travaux publics. Dia-
(«91 )
grammes des variations du niveau de la mer, observées à
l'extrémité de l'estacade d'est du chenal d'entrée du port
d'Ostende, 1897. In-folio.
État Indépendant du Congo. Annales du Musée du Congo,
série 11 : Zoologie. Matériaux pour la faune du Congo;
Poissons nouveaux, par G. -A. Boulenger, tome 1*% fasc. 1,
Bruxelles, 1898; in-4°.
Société scientifique de Bruxelles. Annales, 21" année,
1896-1897.
Arlon. institut archéologique. Annales, t. XXXIIl, 1898.
Gano. Bibliotlteca Belgica. Bibliographie générale des
Pays-Bas, 102« et lOS" livraisons. 1898.
HuY. Cercle des Naturalistes. Bulletin, 1898, n<" 1-2.
France.
Nadaillac {Le marquis dé). L'homme et le singe. Louvain,
1898 ; extr. in-8° (88 p.).
— Mënélik II, Négûs Négûsti, roi des rois de l'Ethiopie.
Paris, 1898; in-8M39 p.).
Gaudry {Albert). Notice sur les travaux scientifiques de
Victor Lemoine et particulièrement sur les découvertes à
Cernay. Paris, 1898; extr. in-8" (12 p.).
Serrure {Baymond). Quelques mots sur les moutons et les
doubles moulons d'or de Jeanne et Wenceslas, ducs de
Brabant. Mâcon, 1898; extr. in-8" ;5 p.).
Paris. Société tiationale des Antiquailles de France. Bulletin
et Mémoires, 1897. 2 vol.
— Académie des inscriptions et- belles-lettres. Comptes
rendus des séances de l'année 1898.
( 092 )
Granue-Biœtagne et Colonies britanniques.
Aitchison. The Royal gold medal, 1898, presented to
Professer Aitchison, 20"' june 1898, by Mr. F.-C. Penrose.
Aitchison's reply. Londres, 1898; exlr. in-4'' (6 p., portrait).
— The opening address at the first gênerai meeting of
the Royal Instilute of British Architects, 7"' november 1898;
extr. in-4° (9 p.).
Coghlan (T.- A .). A statistical account of the seven colonies
of Australasia, 1897-98. Seventh issue. Sydney, 1898; in-8\
Londres. Royal historical Society. Transactions, vol. XIl,
1898.
— Royal Society. Proceedings, 1898.
Sydney. Australian Muséum. Report for the year 1897.
Sydney, 1898; in-4° (46 p.).
LivERPOOL. Biological Society. Proceedings, vol. XIL
1897-98.
Madras. Observatory. Report for the year 1897-98, and
on the éclipse expédition of January 1898.
Italie.
Galilée. Le Opère di Galileo Galilei, vol. VIII. Florence,
1898; in-4».
RiUia(Lorejizo-Michelanç]elo). Il carattere morale di Anto-
nio Rosmini, studio pel centenario dalla nascita di Anto-
nio Rosmini, 24 marzo 1897. Milan, 1897; gr. in-8'' (21 p.).
— Une fissazione Hegheliana. Turin, 1897; in-8'> (24 p.).
'' ■ — Sulle dottrine psicofisiche di Platone. Modène, 1898 ;
in-4» (17 p.).
— Che cosa è l'educazione. Turin, 1897 ; in-8'' (16 p.).
— Suir ipotesi dell' evoluzione. Turin, 1897 ; in-8'' (41 p.).
I
( 695 )
Billia (L.-M.). L'unilà dello scibile e la filosofia délia
morale. Turin, 1897; in-S" (22 p.).
— Lezioni di filosofia délia morale. Turin, 1897; in-8*
(107 p.).
Brescia. Ateneo. L'opéra del Moretto. (Alessandro Bonvi-
cino, 1498-1554.) Brescia, 1898; vol. in-fol. (143 p., 30 pi.).
Pays-Bas.
Stuers {Victor de) et Cuypers (P.-J.-H.). Le Musée national
à Amsterdam. Amsterdam, 1897; in-folio (47 p., 60 pi.).
La Haye. Kon. Bibliothecl', De Oranje Nassau boekerij en
de Oranje-penningen in de Koninklijke Bibliotheek en in
het Koninklijk Penning-Kabinet te 's Gravenhage, 1450-
1702. La Haye [1898]; in-8°.
— Département van Koloniën. Dagb-Register gehouden
int Casteel Batavia vant passeerende daer ter plaetse als
over geheel Nederlandts India, 1631-1634 (H. -T. Colen-
brander). La Haye, 1898; gr. in-8».
Pays divers.
JSicolaeff' [Le colonel iC étal-major). Cent ans tlu corps des
courriers de cabinet. 1796-1896. Esquisse historique. Saint-
Pétersbourg, 1896; vol. gr. in-8» (106 p.).
— Esquisse historique sur les insignes de souveraineté
et les décorations de l'armée russe. Période des grands
princes et des czars. Saint-Pétersbourg, 1898; gr. in-8°
(322 p.).
Hildebraml Hildebrandsson {Le IP H.) et Teisserenc de
Bort {Léon). Les bases de la météorologie dynamique histo-
rique. État de nos connaissances, l""* livraison. Paris, 1898 ;
m-S" (58 p., une carte).
( 694 )
Ferron {Eug.). Mémoire analytique sur la théorie de
Laplace relative aux phénomènes du flux et du reflux de la
mer. Luxembourg, 1898; extr. in-8° (62 p., une pi.).
GoiRE. Naturforschcnde fMesellschaft. Jahresbericht, Band
41, 1897-1898, und Beitrage.
Helsingfors. Sociélé des sciences. Acta, tom. 22 et 23,
1897. In-4».
— Ôfversigt, XXXIX, 1896-1897.
TiFLis. Physikalisches Observalorium. Beobachtungen im
Jahre 1896. In^".
Ups\l. Observatoire méléorologique. Etudes internatio-
nales des nuages. 1896-1897: Observations et mesures de la
Suède, vol. 1 et II. 1898; in-4'';
L'Académie a reçu en outre, pendant l'année 1898, les
Recueils ainsi que les Publications des Établissements et
des Société? savantes dont les noms suivent :
Anvers. Académie d'archéologie. — Société royale de géo-
graphie. — Société de médecine. — Société médico-chirurgi-
cale. — Sociélé de pharmvJe.
Bruges. Sociélé d'émulation.
Bruxelles. Académie royale de médecine. — Analecla Bol-
landiana. — Annales de médecine vétérinaire. — Annales
des travaux publics. — Association belge de photographie. —
Association belge des chimistes. — Bibliographie de la Bel-
gique. — Bulletin de statistique démographique et sanitaire
(D"" Janssens). — Ciel et Terre. — Commission royale d'his-
toire. — Commissions royales d'art et d'arcliéologie. — In-
stitut des sciences sociales. — Institut international de biblio-
graphie. — Ministères des Affaires étrangères, de l'Agriculture,
de l'Intérieur, du Travail. — Moniteur belge. — Moniteur
industriel belge. — Observatoire royal. — Presse médicale
( 693 )
belge. — Revue bibliographique belge. — Revue de Belgique.
— Revue générale. — Sociétés : d'Agriculture, d'Anthropolo-
gie, d'Archéologie, d'Architecture, d'Astronomie, royale de
Botanique, d'Électriciens, Entoniologique, de Librairie, royale
belge de Géographie, de Géologie et d'Hydrologie, royale
Malacologique, royale de Médecine publique, de Microscopie,
royale de Numismatique, royale de Pharmacie, des Sciences
médicales et naturelles. Scientifique.
Charleroi. Société paléontologique et archéologique.
Enghien. Cercle archéologique.
Gand. Koninklijkevlaamsche Académie. — Cercle historique
et archéologique. — Willems fonds.
— Messager des sciences historiques. — Société de médecine.
Gembloux. Institut agricole.
Huy. Cercle des sciences et des beaux-arts. — Cercle des
Naturalistes.
Liège. Écho vétérinaire. — Institut archéologique. — Revue
de l'instruction publique. — Société géologique de Belgique:
— Société médico-chirurgicale. — Wallonia.
Louvain. Le Musée belge. — Le Muséon. — Revue néo-
scolastique. — Revue sociale catholique.
Maredsous. Abbaye.
Namur. Société archéologique.
Saint-Nicolas. Cercle archéologique du Pays de Waes.
Termonde. Cercle archéologique.
Verviers. Société d'archéologie et d'histoire.
Berlin. Kôn. Akademie der Wissenschaften. — Deutsche
chemische Gesellschaft. — Geologische Gesellschaft. — Gesell-
schaft filr Erdkunde. — Gesellschaft fur Anthropologie, Ethno-
logie und Urgeschichte. — Jahresbericht ûber die Fortschritte
der Chemie. —Physikalische Gesellschaft. — Meteorologisches
Institut. — Verein fur Geschichte der Mark Brandenburg.
Bonn. Naturhistorischer Verein der preussischen Rhein-
lande und Westphalens.
( 696 )
Brème. Nalurwissenscliafïlicher Verein.
Budapest. Institut royal de géologie. — Académie des
sciences. — Statistisches Bureau.
Cracovie. Académie des sciences.
Francfort-sur-Main. Senckeuberg. naturforsch. Gesellschafl.
Francfort-sur- Oder. Naturwissenschaftlicher Verein.
Gotha. Geographische Anstalt.
Gottingen. KiJn. Gesellschafl der Wissenschaften.
Halle. Natvrwiss. Verein fur Saclisen mid Thiiringen.
léna. Medizinisch-natunvissevschaftliche Gesellschafl.
Leipzig. Archiv der Mathematik vnd Physik. — Beiblàtter
zuden Annalen der Physik uml Chemie. — Forschungen zur
brandenbiirgischen und y.reussischcn Geschichte. — Kvn.
Gesellschafl der Wissenschaften. — Zaologischer Anzeiger.
Munich. Kôn. Akademie der Wissenschajien.
Prague. Académie tchèque des sciences. — A'on. Gesell-
schafl der Wissenschaften. — Le Journal scientifique
« Krok ». — Société mathématique.
Strasbourg. Société des sciences, agriculture et arts.
Vienne. Kaiserl. Akademie der Wissenschaften.— Anthro-
pologische Gesellschafl. — Zoolog.-bctanische Gesellschafl. —
Kais. geologische fîeichsanstalt. — Monatshefte fur Mathe-
matikund Physik.— Kais. Naturhistorisches Hofmuseum. —
Zool. botanische Gesellschafl.
"Wurzbourg. Physikal.-medizinische Gesellschafl.
Universités r/e Carlsruhe, Fribourg-en-Brisgau, Giessen,
Heidelberg,Kiel,IVlarbourg, Strasbourg, Tubingueet Vienne.
Copenhague. Institut météorologique. — Société royale des
sciences. — Société des Antiquaires.
Madrid. R. Acade7nia de la historia.
Albany. University of the slate of New York.
Baltimore. John Hopkins University.
( «97 )
Boston. Academy of arts and sciences. — Natural llislary
Society.
Buenos- Ayres. Sociedad cientifica Àrgenliiia. — Bulletin
mensuel de statistique municipale.
Cambridge. Muséum ofcompar. zoôlogy. — Observatory.
Chicago. Field Columbian Muséum. — Kenwood Observa-
tory.
Cordova. Academia de ciencias.
Granviile. Denison University.
Halifax. Nova-Scolian Institute.
Ithaca. Journal ofphysical chemistry.
Lincoln. University of Nebraska.
Mexico. Observatorio. — Sociedad de historia natural.
Montevideo. Universidad.
Mont-Hamilton. lÀck Obsei^atory.
Montréal. Natural history Society.
New-Haven. Journal of sciences.
New-York. Geographical Society. — Academy of sciences.—
Muséum of natural history.
Philadelphie. Academy of naUiral sciences. — Franklin
Institute. — The american Naturalist. — Philosophical
Society. — Historical Society.
Rio de Janeiro. Instituto historico. — Soc. de.geographia.
Rochester. Academy of sciences.
Saint-Louis. Academy of sciences.
Salem. Essex Institute.
San-Francisco. California Academy of sciences.
Santiago de Chili. Société scientifique.
Toronto. Canadian Institute.
Washington. Bureau of éducation. — Department of agri-
culture. — U. S. national Muséum. -^ Smithsonian Institu-
tion. — U. S. Geological Survey.
Abbeville. Société d'émulation.
Amiens. Société ijidustrielle. — Société des .Antiquaires.
( 698 )
Arras. Commission des antUfidtés départementales.
Bûnc. Académie d'Hippone.
Bordeaux. Société des sciences physiques et naturelles.
Gaen. Société linnéenne. — Société des beaux-arts.
Dax. Société de Borda.
Le Havre. Société d'études diverses.
Lille. Société géologique du Nord. — Société des architectes.
Marseille. Société scientifique industrielle. — Faculté des
sciences.
Montpellier. Académie des sciences.
Nancy. Société des sciences.
Paris. Académie de médecine. — Bulletin scientifique
(Giard). — École normale supérieure. — École des CJiartes. —
Journal de Vaijriculture.— Journal des Savants.— Le Cosmos.
— La Nature. - Le Progrès médical . — Le Polybiblion. —
Ministère de l'Instruction publique. — Moniteur scientifique.
— Musée Guimet. — Muséum dliistoire naturelle. — Revue
britannique. — Bévue des questions liisloriques. — Revue
générale des sciences. — Bévue politique et littéraire. —
Bévue scientifique. — Sociétés : d'agriculture, d'anthropolo-
gie, astronomique, de biologie, rjiimique, géologique, de
géograpliie, matliématique, météorologique, philomatique,
zoologique.
Saint-Omer. Société des Antiquaires de la Morinie.
Toulouse. Société archéologique.
Valenciennes. Société d'agriculture.
Adélaïde. Royal Society of South Australia.
Birmingham. PhilosopJiical Society.
Brisbane. Royal geograpliical Society.
Calcutta. Asialic Society of Bengal. — Meteorological
Department. — Geological Survey.
Cambridge. Piiilosopiiical Society.
Dublin. Boyal Irish Academy. — Dublin Society.
( 699 )
Edimbourg. Botanical Society. — Geological Society. —
Physieal Society. — Royal Society. — Laboratory of tlie R.
Collège ofphysicians.
Glasgow. Geological Society.
Le Cap. Philosophical Society.
Londres. Anthropological Institule. — R. Society of Anti-
quaries. — Royal Astronomical Society. — Royal Institute
of British Architects. — Chemical Society. — Royal Geogra-
phical Society. — Geological Society. — Institution ofmeclia-
nical Engineers. — Institute of civil Engineers. — Royal
Institution of Great Britain. — Linnean Society. — Mathe-
matical Society. — Meteorological Society. — Royal Micro-
scopical Society. — Nature. — Niimismatic Society. — Zoolo-
gical Society.
Manchester. Literary and Philosophical Society.
Newcastle-upon-Tyne. Institute ofmining and mechanical
Engineers.
Sydney. Linnean Society. — R. Society of N. S. Wales.
Florence. Biblioteca nazionale centrale. — Società entomo-
logica italiana. — Rivista scienti fico-industriale.
Milan. Società di scieuze naturali. — R. Istituto di scienze.
Modène. Società dei naluralisti. — R. Stazione agraria
sperimentali.
Naples. Società Reale.
Padoue. Società veneto-IreiUina di scienze naturali.
Palerme. Circolo giuridico. — Circolo matematico.
Parme. // nuovo Risorgimento.
Pise. Società toscana di scienze naturali. — Il nuovo
cimento.
Rome. Reale Acadeniia dei Lincei. — Academia pontificia
de Niiovi Lincei. — Comitato di arligliera e genio. — Gazetta
chimica. — Ministerio dei Invori pubblici. — Società per gli
studi zoologiche.
( 700 )
Turin. Academia reale délie scienze.
Venise. R. Istituto di scienze,
Vérone. Accademia d'agrkoltura.
Amsterdam. A'. Akademie van wetenschappen.
Batavia. Genoolscliap van kunsten en ivelenscliap pen. —
Natuurkundifie Vereeniging.
Buitzenzorg. Jardin botanique.
Delft. École poliiteclinique,
Harlem. Société hollandaise des sciences, — Musée Teyler.
La Haye. Imtituut voor... volkenkunde. — Entomologische
Vereeniging.
Leyde. Mautschappii der Nederlandsche lelterkunde. —
Nederlandsclie dierkimdige Vereeniging.
Utrecht. nislorisch Genoolschap.
Bukarest. Institut météorologique. — Société des sciences
physiques. — Ministère de V Instruction publique.
Jassy. Société scientifique et littéraire.
Dorpat. Université. — Naturforschende Gesellschaft.
Kazan. Université impériale.
Moscou. Société impériale des Naturalistes,
Nowa-Alexandrya. Annuaire géologique et minéralogique.
Odessa. Société des Naturalistes.
Saint-Pétersbourg. Académie impériale des sciences. —
Institut impérial de médecine expérimentale. — Comité géo-
logique. — Jardin impérial de botanique. — Société impériale
de géographie. — Société de chimie.
Christiania. Société des sciences. — Université.
Stockholm. Nordiskt medicinsk Archiv. — Acta mathema-
tica. — Institut royal géologique. — Société des Antiquaires.
— Société entomologique.
Upsal. Université»
( vol )
Berne. Le Droit d'auteur.
Genève. Archives des sciences physiques et naturelles. • —
Société de géographie.
Lausanne. Société vaudoise des sciences naturelles.
Zurich. Naturforschende Gesellschaft. — Astronomiscfie
Mittheilungen (Wolf).
Alexandrie. Institut égyptien.
Belgrade. Académie royale des sciences.
Coïmbre. Jornal malhematicas (Teixeira).
Le Caire. Société khédiviale de géographie.
Luxembourg. Verein fur Geschichte.
Manila. Observatorio meteorologico.
Tokyo. Gesellschaft fur Natur- und Vôlkerkunde Oslasiens.
— Impérial University.
BULLETINS DE L ACADEMIE ROYALE DE BELGIQUE.
TABLES ALPHABÉTIQUES
DU TOME TRENTE -SIXIÈME DE LA TROISIÈME SÉRIE.
1898.
TABLE DES AUTEURS.
Académie impériale militaire de
médecine de Saint-Pétersbourg.
Célébration de son centenaire
(félicitations), 482.
Académie royale de Belgique.
Rapport sur les questions rela-
tives à l'organisation de la
Classe des lettres, 674.
Académie royale suédoise des
sciences de Stockholm. Célébra-
tion du S0« anniversaire de la
mort de Berzelius (adresse de
félicitations), 139.
Aerts (J.'i. Lauréat du concours
d'art appliqué 'gravure en taille
douce). Rapport de M. Ch. Tar-
di(^u, 36i; proclamé, 378.
Albert A''' (S. A. S. le prince) de
Monaco. Hommage d'ouvrage,
227.
Anor2î/mc5( Mémoires de concours).
Sur les analogies ou les diffé-
rences qui existent entre l'allé-
gorie et le symbole (rapports
de MM. Tardieu, Rooses et Alb.
De Vriendt), 348, 356.
Athénée de Brescia. Hommage
d'ouvrage avec note par le che-
valier Edm. Marchai (L'opéra
di Bonvicino), 581.
Baes {Edgar). Sur les analogies
ou les différences qui existent
entre l'allégorie et le symbole
(Mémoire couronné). Rapport
de MM. Tardieu, Rooses et
Alb. De Vriendt, 348, 356; pro-
clamé lauréat, 376; remercie,
463.
Bambeke {Ch. Van). Hommage
I
TABLE DES AUTEURS.
705
d'ouvrages, 139, 483. — Rap-
ports : voir Ctiéiiot iL.); Pelse-
neer (P.).
Banning [Emile). Décès, 205; note
dcM. VanderHaegen et discours
prononcé aux funérailles par le
baron E. de Borchgrave, 207,
209. M. Brialmont accepte de
rédiger pour V Annuaire la no-
tice du défunt, 327.
Banning {W^" veuve Emile).
Remerciements pour les senti-
ments de condoléance qui lui
ont été exprimés, 327. — Hom-
mage d'ouvrages publiés sous
le voile de l'anonyme par feu
son mari (avec note bibliogra-
phique par Ern. Gossart), 432.
Baslien lAlfr.). Réception de son
premier rapport semestriel, 347.
Bekaert (A.) et Hemptinne [A. de).
Sur les vitesses de réaction,
399; rapports de MM.Spring et
De Heen, 391, 392.
Beneden (Éd. Va7i). Remercie pour
le nouvel hommage rendu à la
mémoire de son père (inaugu-
ration, à Malines, de la statue
de P.-J. Van Beneden), 138. —
Hommage d'ouvrage, 226. —
Rapports : voir Cuénot (L.) ;
Pelseneer (P.).
Beneden (feu P.-J. Van). Inaugu-
ration de sa statue, à Malines,
138 ; discours prononcé par
M. Éd. Dupont, 228.
Benoit (P.). Félicité au sujet de sa
nomination de directeur du
Conservatoire royal d'Anvers,
222. — Rapports : voir Duyse
[Flor. van) ; Lunssens {M.).
Berzelivs (feu J.-J.). Célébration
du cinquantième annivei'saire
de sa mort (Adresse de félicita-
tions), 139.
Bibliothèque royale de La Haye
(M. le Directeur de la). Hom-
mage d'ouvrage, S69.
Biesbroeck (Jules Van). Deuxième
second prix du grand concours
de peinture de 1898, 33C; pro-
clamé, 378.
Biliia [L.-M.K Hommage d'ou-
vrages de philosophie et de
morale, avec note par G. Mon-
champ, 568, 571 .
Bodio (L.). Remercie pour son
diplôme d'associé, 73.
Boncquet (H.). Premier rapport
semestriel (lecture des appré-
ciations de MM. De Groot, Vin-
çotte et Marchai), 346.
Bormans (Stan.). Membre de la
Commission spéciale des linan-
ces, 579.
Boukleieff (B.). Soumet un travail
sur le symbole de la vie et de la
création, 140; dépôt aux archi-
ves après avis de MM. Masius et
Vanlair, 232.
Bovy {Arthur). Hommage d'ou-
vrage avec note parfti. VVilmotte
(Adenet le Roi et son œuvre),
206, 212.
Brant.s (V.). Remet pour VAji-
nvaire de 1899 sa notice sur
P. Willems, 74. — Note biblio-
graphique : voir Lullcniand
(Léoni.
704
TABLE DES AUTEURS.
Brialmont {A.). Hommage d'ou-
vrage avec note par le chevalier
Edm. Marchai (Progrès de la
défense des États et de la for-
tification permanente depuis
Vauban), 2, 6. — Accepte de
rédiger pour V Annuaire la no-
tice de feu Ém. Banning, 327.
— Membre de la Commission
spéciale des finances, 566.
Burne-Jones (Sir Edward). Décès,
120.
Cabinet des médailles de la Haye
(M. le Directeur du). Hommage
d'ouvrage, 569.
Candèze(Ern.). Décès, 2; discours
prononcé à ses funérailles par
M. le baron Edm. de Selys
Longcharaps, 4.
Chauvin{V.). Hommage d'ouvrage
avec note par J. Stecher (Biblio-
grapliie des ouvrages arabes,
3® livraison), 74, 80.
Chômé (Léon). Hommage d'ou-
vrage avec note par Ern. Dis-
cailles (Une expédition au Nil),
328, 331.
ClatUriau (G.). Mémoire couronné
sur la digestion dans les urnes
de Nepcnthes (rapports de MM.
Errera, Gilkinet et Crépin), 586,
590, 591 ; proclamé, 688.
Congo (État Indépendant du).
Hommage des Annales de son
Musée, 390, 483.
Cols (Aitg.). Premier rapport
semestriel (lecture des appré-
' dations de MM. Winders, Janlel
et Maquet), 583.
Cremers [E.]. Hommage d'ou-
vrage, 581.
Cremona (Louis) . Élu associé,
689.
Crépin ' Fr .) . Membre de la
Commission spéciale des finan-
ces, 566. — Rapports : voir
Clautriuu (G.); De Wildeman
^ [É.).
Cuénot (L.). Mémoire couronné
sur l'excrétion chez les Mollus-
ques (rapports de MM. Plateau,
Éd. Van Beneden et Van Bam-
beke). 592, 599; proclamé lau-
réat, 688.
Cumont (G.). Hommage d'ou-
vrages, 227, 328.
Cuypers [P.-J.-H.). Voir Pays-Bas
(Gouvernement de S. M. la
Reine des).
D
Dauber. Nouvelle lettre relative
aux recherches du D"" Buchner
sur les fermentations (Dépôt
aux archives après lecture du
rapport de MM. Jorissen et Gil-
kinet), 391.
de Borchgrave (baron Emile). Dis-
cours prononcés aux funérail-
les : 1° d'Emile Banning, 209;
2o d'/Mphonse Rivier, 211.
De Groot (G.). Rapports : voir
Bonrquet (IL); De Haen (V.);
Geefs (G.); Marin (/.j; Weyns
iJ-).
De Haen (K.). Premier rapport
TABLE DES AUTEURS.
705
semestriel (lecture des appré-
ciations de MM. De Groot, Vin-
(;otte et Marchai), 464.
De Heen (P.). Quelques faits rela-
tifs à la décharge produite par
la radiation infra-électrique, 55.
— Rapports : voir Heinptinne
(A. de) et Bekaert (A.).
deJonç/lie (vicomte B,). Hommage
d'ouvrages, 328.
de la Vallée Poussin [Ch.-J.). Sur
la fonction C {s) de Riemann et
le nombre des nombres pre-
miers inférieurs à une limite
donnée (rapports de MM. Man-
sion et J. Deruyts), 10, 21.— Élu
correspondant, 689.
de la Vallée Poussin (Louis). Hom-
mage d'ouvrage, 329.
Demannez (/.). Membre de la
Commission spéciale des fi-
nances, o83.
Demoulin (A.). Sur les surfaces
minima réglées et les surfaces
minima à lignes de courbure
planes (rapports de MM. De-
ruyts, i\euberg et Mansion), 232,
233, 234.
Denis (Just). Reçoit, en séance
publique, un exemplaire des
■ OEuvres de J.-S. Stas, 688.
Deruyts (Fr.). Sur la détermina-
tion des éléments neutres d'es-
pèce quelconque, 187. — Sur
quelques {)ropriétés des courbes
gauches, 194. — Sur quelques
propriétés des polygones in-
scrits aux courbes gauches,
5S8 ; rapports de MM. Le Pagie
et Neuberg sur ces trois com-
Ô'"^ SÉRIE, TOME XXXVI.
munications, 148, 496. — Élu
correspondant, 689.
Deruijts {Jan/ues). Rapports : voir
de la Vallée Poussin {Ch.-J ):
Demoulin (A.).
Descamps (chevalier Ed.). Accepte
de rédiger pour V Annuaire la
notice de feu Alpli. Rivier, 327.
— Membre de la Commission
spéciale des finances, 579.
DeSmedt (Ch.). Note bibliogra-
phique : voir Société des Bollan-
distes.
Devillo's (L.). Hommage d'ou-
vrage avec note par le chevalier
Edm Marchai (Chartes du comté
de Hainaut de l'an 1200), 74, 80.
De Vriendt {Alb.). Rapport : voir
Anonymes; Baes (Edgar).
Dewalque (G-). Rapport : voir
Institut international flottant.
De Wildeman (É.). Hommage
d'ouviage avec note par Eéo
Errera (Prodrome de la flore
belge: Thallophytes, fasc. I-lIl),
3, 8. — Sur la réparation
de quelques Algues (Mémoires
in^", t. LVIII). Rapport de
M31. Errera et Crépin, 22.
Discailles (Ern.). Notes bibliogra-
phiques : voir Chômé (Léon);
Guilliaume (Jules). — Rapport :
voir Garsou [J.).
Doudou (Ern.). Nouvelle explo-
ration scientifique des grottes
d'Engiç, d'Engihoul et des envi-
rons. Dépôt aux archives après
lecture des rapports de MM.
Fraipont et Malaise, 391.
Dupont (Éd.). Discours prononcé
47
706
TABLE DES AUTEURS,
à l'inaugu ration de la statue de
P.-J. Van Beneden, 228. —
Quelques mots sur révolution
(discours), 601.
Duy.se {Florimond van). Historique
de la partie spécialement musi-
cale de la chanson flamande
(Mémoire couronné). Rapports
de MM. Gevaert, Benoit et Ma-
thieu, 3.^6, 360; proclamé lau-
réat, 377 ; remercie, 463. —
Membre de la Commission de
la Biographie nationale, 583. —
Rapport : voir Lunssens {M.).
Ë
Errera {Léo). Hommage d'ou-
vrages, 227, 390. — Élu membre
titulaire, 689. — Note bibliogra-
l)liique : voir De Wilde}nan{É.).
— Rapports : voir ClaiUriau (G) ;
Dr Wildeman (É.).
Faider (A.). Hommage d'ouvrage,
432.
Fcrron (Eug.). Hommage d'ou-
vrage, 483. Soumet un mémoire
énonçant et démontrant un nou-
veau principe de mécanique,
483.
Folie (F.). Fondements de la théo-
rie de la variation des latitudes,
.27(3. _ Vérification de l'exis-
tence de la nutation eulérienne
dans les latitudes observées à
Greenwich pendant les années
1880-1891, 392. — (Quelques
grandes phases de l'histoire de
l'Astronomie, 637. — Rapports :
voir Ministre de Vlntérieur,
Ziegler {V. de).
Fraipont {J.). Rapport: voir Dou-
dou (Ern.).
Francotte (P.). Demande à pou-
voir occuper, en 1899, la table
belge du laboratoire de Naples,
482'.
Frederichs (/.). Remet un exem-
plaire de son livre (Manuel
d'histoire moderne) couronné
par le jury De Keyn en mai
1898, 328.
Fredericq (L.). Rapports : voir
Waroux (J.), Willem {V.) et
Minne (A.).
Fredericq (P.). Hommage d'ou-
vrage avec note (Een Noord-
Nederlander over zijn omreisje
door Belgie, in 1823), 74, 75.
Gaillard{Artliur). Hommage d'ou-
vrage avec note par le chevalier
Edmond Marchai (Le Conseil de
Brabant : Histoire. Organisation.
Procédure), 432, 434.
Gamond (L. dé). Hommage d'ou-
vrage, 568.
Garnier [Charles). Décès, 335.
Garsou (Jules). Barthélémy et
Méry étudiés spécialement dans
leurs rapports avec la Légende
napoléonienne (Mémoires in-8'',
t. LVIII). Rapports de MM. Dis-
cailles, Stecher et Wilmotte, 88,
91, 92.
TABLE DES AUTEURS.
707
(•eefs (Georges). Appréciation ver-
bale, par MM. De Groot, Vin-
çotte et Marchai, de son buste
en marbre de feu Guillaume
Geefs, 464.
Gegenbaur (Ch.). Hommage d'ou-
vrages, 227.
Génard (P.). Hommage d'ouvra-
ges, 120.
Gevaerl (F.-A.). Rapport : voir
Duyse(FL. van).
Gkysen (J.). Sur la condensation
de l'aldéhyde benzoïque et de
la monochloracétone, 313; rap-
port de MM. Spring et Henry,
240.
Gilkinet {Alfr.). Rapports : voir
ClaiUriau (G.); Dauber.
Gilson (G.). Hommage d'ouvra-
ges, 227.
Giraud (Alb.). Prix quinquennal
de littérature française (X" pé-
riode, 1893-1897), 326 ; proclamé
lauréat, 379.
Giron (Alfr.) Élu directeur pour
1899, 206.
Goblet d'Alviella (comte Eug.). Un
curieux problème de transmis-
sion symbolique. Les roues li-
turgiques de l'ancienne Egypte,
439. — Hommage d'ouvrage,
568.
Gogo (Félix). Lauréat (mention
honorable) du grand concours
de peinture de 1898, 336; pro-
clamé, 378.
Goldschmidt (Robert). Reçoit, en
séance publique, un exemplaire
des OEuvres de J.-S. Stas, 688.
Gossart (Ern.). Membre de la
Commission de la Biographie
nationale, 579. — Note biblio-
graphique : voir Banning (M'"<^
veuve Emile).
Gréhant [N.). Hommage d'ou-
vrage, 3.
Guilliaimie (Jules). Hommage
d'ouvrage avec note par Ern.
Discailles (Le vers français et
les prosodies modernes), 74,
82.
U
Hall (James). Décès, 226.
Hurlez (Ch. de). Hommage d'ou-
vrages, 328.
Hazelius (A.). Félicité au sujet de
l'anniversaire de son musée
d'ethnographie, à Stockholm,
327.
Hecq [Gaëlan). Hommage d'ou-
vrage avec note par le chevalier
Edm. Marchai (Jacques Bretex
ou Bretiaus. Le tournoi de
Chauvency), 328, 332.
Hemptinne [Alex. de). Sur l'action
catalytique de la mousse de
platine et de palladium, 155. —
Sur les vitesses de réaction (en
collaboration avec A. Bekaert),
399; rapports de JIM. Spring
et DeHeen, 145, 146, 391,392.
— Soumet une note sur la
luminescence des gaz, 483.
Henry {LJ). Sur les dérivés de
quelques nitriles- alcools ali-
phaliques, 22. — Sur divers
composés non saturés, 31. —
Sur divers composés nitrés ali-
708
TABLE DES AUTEURS.
phatiques à fonctions multiples,
149. —Sur divers nilriles-alcools
penta- et hexacarbonés, '241. —
Sur l'oxydation directe de l'é-
thylène tricliloro - éthyl - oxylé,
ClaC = CGI (OC2H3), 497. — Rap-
ports : voir Ghysen (J.); Maas
(J.); Swaris [Fréd.].
Homolle {Th.}. Hommage d'ou-
vrage, 328.
Huber-^ti (Giist.). Membre de la
Commission spéciale des finan-
ces, 583. — Rapport : voir
Lnnssens (M.).
Hymaiis (//.). Membre de la Com-
mission spéciale des finances,
583. — Note bibliograpliique :
voir Jacquot {Alb.).
Institut international flottant
(Projet de création d'un). De-
mande d'avis adressée au nom
de M. le Ministre de l'Industrie
et du Travail, 390; lecture du
rapport de MM. Dewalque, Re-
nard et Malaise, 491.
Jacquot (Alb.). Les Michel, les
Adam et Clodion (Note biblio-
graphique par H. Hyraans), 129.
Janlei [Èm.). Rapport : voir Cols
(Aug.).
Jaquet [Jcs.). Décès, 119; discours
prononcé à ses funérailles par
le chevalier Edm. Marchai, 120.
Jenkins [B.-G.). A method for
determining astronomically the
variations in the température
and pressure of the atmosphère
(Dépôt aux archives après lec-
ture du rapport de MM. Lan-
caster, Lagrange et Terbyj,
142.
Jorissen (A.). Rapports : voii-
Dauber; Sduujten [M.-C).
Jorissenne (G.). Hommage d'ou-
vrage, 390.
Jouveneau (A.). Soumet une noU'
sur l'accélération séculaire du
mouvement de la Lune, 483.
Karpinsky (Alexandre). Élu asso-
cié, 489.
Kayser (G.). Notes sur la physique
du globe et la météorologie
(dépôt aux archives après avis
de MM. Terby et Lancaster), 142.
Kôlliker [Albert von). Hommage
d'ouvrage, 139.
Kurth (G.). Manifestation en son
honneur à Liège (félicitations 1.
567.
Lagrange [Ch.). Rapports : voir
Jenkins (B.C.); Ministre de
l'Intérieur.
Lallemand (Léon). Hommage d'ou-
vrage avec note par V. Branis
(La Révolution et les pauvres),
328, 329.
Lambert [Camille). Premier se-
cond prix du grand concours
TABLE DES AUTEURS.
709
de peinture de 1898, 336; pro-
clamé, 378
Lamy (T.-J.). Membre de la Com-
mission spéciale des finances,
579.
lAincaster (Alb.). Note bibliogra-
phique : voir Société royale de
médecine publique. — Rapports :
xoirJenkins B.-G.); KayseriG.).
Lankester (Edwin-Ray). Elu asso-
cié, 689.
LefèvreVontalis {A.). Hommage
d'ouvrage, 43^.
/.<! Paige (C). lUipports : voir De-
ruyts (Fr.); Minisire de Vlnté-
rieur.
Ijwtens (Ch.). Hommage d'ou-
vrage avec note par G. Van der
Mensbrugghe (Recherches expé-
rimentales sur la formation du
son dans les instruments à
bouche de flûte ), 139, 140.
Lunssens (M.). Trois poèmes pour
voix et orchestre (lecture des
appréciations de M.M. Huberti,
Mathieu, van Duyse et Benoit),
132. — Réception: de son ouver-
ture-fantaisie sur la légende de
Geneviève de Brabant, 223; du
compte rendu de son séjour à
Paris, 336.
]»I
Mans (/.). Recherches sur les
ALCOOLS NiTRÉs: Sur les dérivés
du bromo-nitro -méthane HjG
- Br(N02), 294; rapports de MM.
L. Henry et Spring, 236, 239.
Malaise (C). Ra[)ports : voir Dou-
dou (Ern.); Institut interna-
tional flottant. — Notes biblio-
graphiques : voir Meunier (F.);
Petermann (A.).
Mansion (P.). Rapports : voir de
la Vallée Poussin {Ch.-J.) ; De-
moulin (A.).
Maquet {H.). Rapport : voir Cols
{Aug.).
Marchai (Chevalier Edm.). Dis-
cours prononcés aux funérailles
de Joseph Jaquet, 120; d'Adol-
plie Samuel, 337. — Notes
bibliographiques : voir Athénée
deBrescia; Brialmont(A.); De-
villers (L.); Gaillard {A.); Hecq
(G.); Nicolaetf' dV.); Pays-Bas
(Gouvernement de S. M. la Reine
des). — Rapports . \oir Boncquet
(«.); De Hacn(V.); Geefs (G.);
Marin [J.)\ Weyns{J.).
Marin (Jacques). Réception de
son premier rapport semestriel,
336; lecture des appréciations
de MM De Groot, Vinçotte et
Marchai, 464.
Masiiis (J.-B.-Voltaire). Rapports :
voir Boukteielf {B.}; Waroitx
(J.).
Mathieu (Êm.). Félicité au sujet
de sa nomination de directeur
du Conservatoire royal de Gand,
347. — Rapports : voir Duyse
(Flor. van); Lunssens (M ).
Mercier (D.). Hommage d'ouvrage,
74.
Mesdach de ter Kiele {Ch.). Hom-
mage d'ouvrage, 328.
7dO
TABLE DES AUTEURS.
Meunier (Fevji.). Hommage d'ou-
vrage avec note par C. Malaise
(Les insectes des temps secon-
daires), 227, 231.
Meijer (P.). Remercie pour son
diplôme d'associé, 73.
Ministre de l'Agriculture et des
Travaux publics. Envoi d'ou-
vrages, 336, 482.
Ministre de la Guerre. Envoi
d'ouvrage, 226.
Ministre de l'Intérieur et de l'In-
struction publique. Demande
l'avis de l'Académie : 1° Sur la
représentation de la Belgique
au Congrès de Paris de 1900
(décimalisation du temps et de
la circonférence), 139; lecture
du rapport de MM. Folie, La-
grange et Le Paige, 724 ; Sur
la proposition adressée par le
Congrès géologique interna-
tional de Saint-Pétersbourg,
d'associer la Belgique à la créa-
tion d'un Institut international
flottant, 390; lecture du rap-
port de MM. Dewalque, Renard
et Malaise, 491. — Envoi d'ou-
vrages, 139, 206, 226, 327, 390,
482, 568.
Ministre des Alfaires étrangères.
Hommage d'ouvrage, 327.
Minne (Aclnlle) et Willem (V.).
Recherches expérimentales sur
la circulation sanguine chez
l'Anodonte (rapport de MM. L.
Fredericq et F. Plateau), 235.
Monchamp (G.). Hommage d'ou-
vrage, 328. — Note bibliogra-
phique : voir Billia (L.-M.).
Morgan (J. de). Hommage d'ou-
vrage, 432.
Mourlon [M.). Membre de la Com-
mission spéciale des finances,
666.
Millier (Max). Hommage d'ou-
vrage, 73.
Musée du Congo. Hommage d'ou-
vrages (Annales de botanique
et de zoologie), 390, 483.
N
Nadaillac (marquis dej. Hommage
d'ouvrages, 74, 483, 568.
Naville {Ern.). Hommage d'ou-
vrage, 328.
Nélis {Ch.). Soumet un travail
intitulé : Un nouveau détail de
structure du protoplasme des
cellules nerveuses (état spiré-
mateux du protoplasme), 484.
Neuberg (J.). Rapports : voir Dc-
moulin (A.); Deruyts (Fr.).
Nicolaeff (iV.). Hommage d'ou-
vrages avec note par le cheva-
lier Edm. Marchai [A. Esquisse
historique sur les insignes de
souveraineté et les décorations
de l'armée russe; B. Cent ans
du corps militaire des courriers
de cabinet, 1796-1896 , 568, 569.
Pasquier (Ern.). Hommage d'ou-
vrages, 3, 227.
Pays-Bas (Le Gouvernement de
TABLE DES AUTEURS.
711
S. M. la Reine des). Hommage
d'ouvrage avec note par le che-
valier Edm. Marchai (Le Musée
national d'Amsterdam, j^ar V
de Stuers et P.-J.-H. Guypers ,
580, 581.
Peeters(Ed ). Hommage d'ouvrage,
206.
Peeters (L.). Lauréat du concours
d'art appliqué (gravure en taille
douce 1. Rapport de M. Ch. Tar-
dieu, 362; proclamé, 378.
Pelseneer (P.). Recherches mor-
phologiques et phylogénétiques
sur les Mollusques archaïques
(rapport de MM. Éd. Van Bene-
den, Plateau et Van Bambeke),
U3, 145.
Petermann (A.). Hommage d'ou-
vrage avec note par G. Malaise
(Recherches de chimie et de
physiologie appliquées à l'agri-
culture, t. III), 483, 487.
Piot [Cil ).Les Écossais, dits Scoten
ou Schotte, en Flandre, 94. —
Le camp de Labienus pendant
la guerre des Trévires, 104. —
Membre de la Commission spé-
ciale des finances, 579.
Pirenne {H.). Remercie pour son
diplôme de correspondant. 73.
— Désigné pour l'emplacer
M. Wauters dans la Commission
de la Biographie nationale, 333.
Plateau (F.). Rapports : voir Cué-
not (L.); Pelseneer (P.); Willem
(V.) et Minne (Achille).
Popelin [Marie). Hommage d'ou-
vrage, 74.
Que) Ion (L.). Hommage d'ou-
vrages, 227. — Demande de
pouvoir occuper, en 1899, la
table belge au laboratoire de
Xaples, 482.
B
Radoux [Th.). Discours prononcé
à l'inauguration de la statue
d'Henri Vieuxtemps, 341.
Rasse (Fr.). Exécution de sa can-
tate Comala, 379.
Renard (A. -F ). Élu membre titu-
laire, 689. — Rapport : voir
Institut international flottant.
Renault [R.). Hommage d'ouvra-
ges, 390.
Rivier [Alphonse). Décès, 206. —
Discours prononcé à ses funé-
railles par le baron Em. de
Borchgrave, 211 — M. le che-
valier Descamps écrira sa notice
pour l'Annuaire, 327.
Rivier (Ch.). Remercie, en son
nom et au nom de sa famille,
pour les sentiments de condo-
léance qui lui ont été exprimés,
327.
Robie [Jean). L'art et la lumière,
464. — Membre de la Commis-
sion spéciale des finances, 583.
Rolin-Jaequenujns [G.). Félicité au
sujet--de sa présence à la séance
du 7 novembre 1898, 431.
Roo.'^es (Max.). Rapport : voir Ano-
nymes ; Baes [Edgar).
712
TABLE DES AUTEURS.
Samuel (Ad.). Décès, 335; dis-
cours prononcé à ses funé-
railles par le chevalier Edm.
Marchai, 337.
Scimylen {M.-C ). Sur les salicy-
lates doubles de métal et d'anti-
pyrine (3« communication), 172;
rapport de MM. Jorissen et
Spring, 146, 147.
Selys-Longckamps (baron Edm.
de). Discours prononcé aux
funérailles d'Ern. Candèze. 4.
— Hommage d'ouvrage, 390.
Servais {Clém.). Hommage d'ou-
vrage, 585.
Société des Bollandistes. Hommage
d'ouvrage avec note par Ch. De
Smedt (Bibliotlieca hagiogra-
phica latina, fasc. I), 432, 436.
Société roijale de médecine ptibli-
que, à Bruxelles. Hommage
d'ouvrage avec note par Alb.
Lancaster (Travaux publiés à
l'occasion du Congrès national
d'hygiène et de climatologie
médicale de la Belgique et du
Congo, 1897), 483,485.
Spring ( W.). Sur la cause de l'ab-
sence de coloration de certaines
eaux limpides naturelles, 266.
— Sur l'origine de la couleur
bleue du ciel, 504. — Rapports :
voir Ghijsen (J.); Hcmptijine
(A. de) et Bekaert (A.); Mans
ij.); Schmjten [M.-C): Swarts
(Frcd.).
Stullaert (J.). Membre de la Com-
mission spéciale des finances.
583.
Steclier (J.). Note bibliographique :
voir Chauvin (Y.). — Rapport :
voir Garsou (J ).
Stuers ( V. de). Voir Pays-Bas (Gou-
vernement de S M. la Reine
des).
Swarts {Fréd.). Sur quelques déri-
vés chlorobromés en Ca, 519. —
Contribution à l'étude de l'oxy-
dation des éthylènes halogènes,
532; rapports de MM. Spring et
Henry sur ces deux communi-
cations, 491, 492, 494.
Tack (P.). Soumet une note inti-
tulée : Nonmia geographica bel-
gica, 438.
Tardieu (Cli.). Félicité au sujet de
son retour du Congo, 334. —
Sur l'art au XIX^ siècle (dis-
cours), 365. — Rapports : voir
Anonymes; Aerts (J.); Baes
(Edgar); Peeters{L.).
Terby (Fr.). Sur l'aurore boréale
du 9 septembre 1898, observée
à Grammont et à Louvain, 263.
— Rapports : voir Jenkins
[B-G.y, Kayser (G.)
Thomas (Paul). Hommage d'ou-
vrage, 432.
Tilly (/. De). Membi-e de la Com-
mission spéciale des finances,
566.
Toussaint (Le chanoine). Hom-
mage d'ouvrante, 78
TABLE DES AUTEURS.
7i;
Vander Hueghen [Ferd.]. Note au
sujet de la mort d'Emile Ban-
ning, 207.
Van der Mensbriigghe (G.) Remet
pour VAi27iuni)'e de 1899 sa
notice sur Hubert Valérius, 2.
- Sur les nombreux etï'ets de
l'élasticité des liquides (troi-
sième communication , 281. —
Hommage d'ouvrage avec note
bibliographique (Sur les pro-
))riétés fondamentales des li-
quides), 483, 484. — Note
bibliographique : voir Lootens
[Ch.). — Rapport : voir Ziegler
(V.de).
Vanlair {C). Rapport : voir Bonk-
leietf'{B.).
Vial(D.). Dépose un pli cacheté, 2.
Yieuxtcmps (feu Ht')iri). Inaugura-
lion de sa statue à Verviers
(discours par M. Radoux), 341.
Vinçotte (Th.). Rapports : voir
Bçncquel (//.); De Haen (F.);
Geefs{G ); Marin iJ.r, Weyiis (J.).
Vloor^ {Ém.). Lauréat (pi'emier
prix) du grand concours de
peinture de 1898, 336 ; |)ro-
clamé. 378.
Warou.v (J.). Du tracé myocar-
dique du cœur exsangue (deu-
xième note), 62; rapport verbal
de MM. L. Fredericq et J.-B.
Masius, 10.
Westlake {John). Remercie pour
son diplôme d'associé, 73.
Weyns {Jides). Appréciation ver-
bale de MM. De Groot. Vinçotte
et Marchai sur son buste en
marbre de feu J.-J. Haus, 464.
Wiilem (F.) et Minne {Achille).
Recherches expérimentales sur
la circulation sanguine chez.
l'Anodonte (rapport de MM. L.
Fi-edericq et F. Plateau), 235.
Wilniotte (M.). Note bibliographi-
que : voir Bovy {Arthur). —
Rapport : voir Garsou {J.).
Wii^ders (/.). Rapport : voir Cols
{Aug.)
Ziegler {V. de). Soumet une note
sur les tremblements de terre
et les marées dépôt aux archi-
ves). Rapport de MM Folie et
Van der Mensbrugghe, 240, 241.
TABLE DES MATIÈRES.
Action (Sur 1') caialytique de la
mousse de platine et de palla-
dium; par A. de Hemptinne,
155; rapports de MM. Spring et
De Heen, 145, 146.
Adenet le Roi et son œuvre ; par
Arthur Bovy (Note bibliogra-
phique par M. VVilmotte), 212.
Agronomie. Recherches de chimie
et de physiologie appliquées à
l'agriculture, tome III; par A.
Petermann (Note bibliogra-
phique par G. Malaise), 487.
Alcools. Recherches sur les alcools
nitrés : Sur les dérivés du bro-
mo-nitro-méthane HaC - BriNO»);
par J. Maas, 294; rapports de
3IM. Henry et Spring, 236, 239.
— Voir Nitriles.
Aldéhyde. Voir Condensation.
Algues. Sur la réparation de quel-
ques Algues (Mé) noir es in-8°,
t. LVIII) ; par É. De Wildeman.
Rapport de MM. L. Errera et
Crépin, 22.
Allégorie. Voir Concours de la
Classe des beaux-arts, 1898.
Annuaire de l'Académie (Notices
pour 1'). Voir Biographie.
Anodonte. Voir Circulation.
Anthropologie. Voir Grottes.
Arabes (Ouvrages). Voir Biblio-
graphie.
Armée russe. I. Esquisse histori([ue
sur les insignes de souveraineté
et les décorations de l'armée
russe. Période des grands
princes et des czars. — II. Cent
ans du Corps militaire des Cour-
riers de cabinet, 1796-1896; par
N. Nicolaeff (Note bibliogra-
phique par le chevalier Edm.
Marchai), 569.
Art (L') au XI\e siècle (discours);
par Ch. Tardieu, 365. — L'art
et la lumière; par J. Robie,
464.
Astronomie. Quelques grandes
phases de l'histoire de l'astro-
nomie; par F. Folie, 637. —
Voir : Latitudes; Lune; Nuta-
tion.
Atmosphère. A method for deter-
mining astronomieally the va-
riations in the température and
pressure of the atmosphère
(Dépôt aux archives après lec-
ture du rapport de MM. Lancas-
ter, Lagrange et Terby), 142.
Aurore boréale (Sur 1') du 9 sep-
tembre 1898, observée à Gram-
mont et à Louvain ; par F.
Terby, 263.
TABLE DES MATIERES.
715
B
Beaux-arls. Voir Art ; Biographie;
Bonvicino; Bustes-, Concours de
la Classe des beaux-arts; Con-
cours {Grands). Py'i.v de Rome.
Belgique. Note bibliographique ,
car P. Fredericq (Een Noord-
Nederlander over zijn omreisje
door België in 18ïi3), 75.
Bibliographie des ouvrages arabes,
3e livraison: par V. Chauvin
(Note bibliographique par J. Ste-
cher), 80.
Bibliotheca hagiographica latina,
fasc. 1 ; par la Société des Bol-
landistes (Note bibliographique
par Ch. De Smedl), 436.
Bienfaisance. Voir Révolution.
Billet cacheté déposé par M Vial, 2.
Biographie. Notice sur Hubert Va-
lérius; par G. Van der Mens-
brugghe {Annuaire de 1899), 2.
— Notice sur Pierre Willems;
par V. Brants (Aimuaire de
1899), 74. — M. Descamps ac-
cepte d'écrire, pour V Annuaire,
la notice d'.\lphonse Rivier, 327.
M. Brialmonl, celle d'Emile
Banning, 327. — Note de
M. Vander Haeghen (annonce
de la mort d'Emile Banning ,
207. — Les Michel, les .\dam
et Clodion; par Alb. Jacquot
(Note bibliographiciue par H.
Hymans), 129. — Voir Funé-
railles, Jubilés, Monuments.
Biologie. MM.Francotte et Querton
demandent à pouvoir occuper
en 1899 la table belge au Labo-
ratoire de Naples, 482.
Bonvicino (L'opère di). Album de
phototypies publié par l'Athé-
née de Brescia (Note bibliogra-
phique par le chevalier Edm.
Marchai), 581.
Botanique. \oir Algues ; Concours
de la Classe des sciences ; Flore.
Brabant (Le Conseil de). Voir
Conseil.
Bretex (Jaques) ou Bretiaus : Le
Tournoi de Ciiauvency; par G.
Hecq (Note bibliographique par
le chevalier Edm. Marchai), 332.
Bustes des académiciens décédés.
Appréciations verbales de MM.
De Groot, Vinçotle et Marchai
sur les bustes en marbre de feu
Guillaume Geefs, par Georges
Geefs et de feu J.-J. Haus, par
J. Weyns, 464.
Camp (Le) de Labienus pendant
la guerre des Trévires; par Ch.
Piot, 104.
Catalyse. Voir Action.
Chanson flamande. Voir Concours
de la Classe des beaux-arts.
Chartes du comte de Hainaut de
l'an 1200; par L. Devillers (Note
bibliographique parle chevalier
Edm. Marchai), 80.
Chimie. Voir : Action catalytique;
Agronomie; Alcools; Coloration;
Composés; Condensation ; Déri-
vés; Fermentations; Nitriles-
716
TABLE DES MATIERES.
alcools; Oxydation; Réaction;
Salicylales.
Ciel. Voir Couleur.
Circulation. Recherches expéri-
meiilales sur la circulation du
sang chez l'Anodontej par V.
Willem et A. Minne 'rapport
de M3I. L. Fredericq et F.
Plateau», 235.
Cœur. Sur le tracé myocardique
du cœur exsangue ; par J . Wa-
roux, 62; rapport verbal de
MM. L. Fredericq et J.-B.
Masius, 10. — Voir Circulation.
Coloration. Sur la cause de l'ab-
sence décoloration de certaines
eaux limpides naturelles; par
W. Spring, 266.
Commission de la Biographie na-
tionale. Membres : MM. H. Pi-
renne, 333; Ern Gossart, 579;
Florim. van Duyse, 583.
Commission royale d'histoire. Ou-
vrages déposés dans la biblio-
thèque de l'Académie, 136.
Commission spéciale des finances :
Classe des sciences. Reélec-
tion, 566.
Classe des lettres. Réélec-
tion, 579. — M. Wauters rem-
placé par M. Descamps 579.
Classe des beaux-arts. Ré-
élection, 583. M. Samuel
remplacé par M. Huberti. 583.
Composés. Sur divers composés
non saturés; par L. Henry, 31.
— Sur divei's composés nitrés
alii)liatiques à fonctions multi-
ples; par L. Henry, 149.
Concours annuels :
Classe des scienxes (1898).
Mémoires reçus et désignation
des commissaires, 141. — Ajour-
nement du jugement des mémoi-
res sur la question de mathéma-
tiques. 489, 585. — Lecture des
rapports sur les mémoires reçus
en réponse aux questions de
sciences naturelles, 490. — Mé-
moire couronné sur la digestion
dans les urnes de Nepenthes;
par G. Clautriau (rapports de
MM. Errera, Gilkinet et Crépin),
586, 590. — 3Iémoire couronné
sur l'excrétion chez les Mol-
lusques (rapports de MM. F. Pla-
teau, Éd. Van Beneden et Van
Bambekei, 592, 599. — Procla-
mation, 688.
Classe des lettres (1899).
Blémoires i-eçus et désignation
des commissaires , 437 . —
(1901) Programme, 213, 217.
Classe des beaux -arts
(1898; : Partie littéraire. Sur
les analogies et les différences
qui existent entre l'allégorie et
le symbole (Mémoire couronné
de M. Edgar Baes.) Rapport de
MM. Tardieu, Rooses et De
Vriendt, 348, 356 — Historique
de la partie spécialement musi-
cale de la chanson flamande.
(3Iémoire couronné de M. F.
van Duyse.) Rai)ports de MM.
Gevaert, Benoit et Mathieu, 356,
360. — Remerciements des lau-
réats, 463. — Art appliqué.
TABLE DES MATIERES.
717
(Portrait en buste, gravé en
taille-douce, d'un Belge contem-
porain.) Rapport l'ait au nom
de la Section de gravure par
M. Tardieu, 3Q± MM. L. Peeters
et J. Aerts, prix en partage,
363. — Proclajnation des résul-
tats, 375.
Concours (Grands). Pri.x: de Rome :
Architecture (1896). Pre-
mier rapport de M. Cols . Lecture
des a[»préciations de MM. Win-
ders, Janlet et Maqueli, 583.
Musique (1895). Lecture des
appréciations de MM. Huberti,
3Iathieu, van Duyse et Benoit
sur l'envoi réglementaire de
M. Martin Lunssens (Trois poè-
mes pour voix et orchestre),
132. — Réception d'une ouver-
ture-fantaisie sur la légende de
Geneviève de Brabant et du
compte rendu de son séjour à
Paris, par le même lauréat, 223,
336. — (1897). Exécution de
la cantate de M. Fr. Rasse, pre-
mier second prix, 379.
Peinture (1898). Lauréats,
336; proclamation, 378.
Sculpture (1894). Premier
rapport semestriel de M. Victor
De Haen, lauréat (Lecture des
appréciations de 5IM. De Groot,
Vinçotte et 3Iarchal), 464. — -
(1897). Premier rapport de
M. H. Boncquet, lauréat (Lec-
ture des appréciations de MM.
De Groot, Vinçolte et Marchai),
346.
Condensation (Sur la) de l'aldé-
hyde benzoïque et de la mono-
chloracétone, par J. Ghysen,
313; rapport de MM. Spring et
Henry, 240.
Congo. M. Tardieu félicité au sujet
de son retour du Congo, 334. —
Voir Expédition ; Congrès na-
tional d'hygiène, etc.
Congrès géologique international
de Saint-Pétersbourg. Voir In-
slilul international flottant.
Congrès pour la décimalisation du
temps et de la circonférence, à
Paris. Demande d'avis sur la
représentation de la Belgique
à ce Congrès, 129. (Communica-
tion au Ministre de l'Intérieur du
rapport de MM. Folie, Lagrange
et Le Paige», 724.
Congrès national d'hygiène et de
climatologie médicale de la
Belgique et du Congo (Note bi-
bliographique par A. Lancaster),
485.'
Conseil{Le) de Brabant : Histoire.
Organisation. Procédure, t. I^'',
par A. Gaillard (Note bibliogra-
phique par le chevalier Edm.
Mai'chal), 434.
Couleur bleue du ciel (Sur l'ori-
gine de la); par W. Spring, 504.
Courbes gauches (Sur quelques
propriétés des) ; par F. Deruyts,
194 ; rai)port de MM. Le Paige
et Neuberg, 148. — Voir Poly-
gones.
Courriers de cabinet. — Voir
Année russe.
718
TABLE DES MATIERES.
D
Décimalisation du temps et de la
circonférence. — Voir Congrès.
Décorations. Voir Armée russe.
Défense des États. Voir Fortifica-
tion.
Dérivés. Sur quelques dérivés
chlorobromés en C^; par Fr.
Swarts, 519; rappoits de M3I.
Spring et Henry, 491, 492. —
Voir JSitriles-alcooh.
Dons. Ouvrages imprimés offerts :
par S. A. S. le prince Albert Je"" de
Monaco, 227 ; l'Athénée de Bres-
cia, S81 ; par MM. Bambeke iCh.
Van), 139, 483; Banning (M'"«
veuve Emile), 432 ; Beneden (Éd.
Van), 226 ; Bibliothèque royale
de La Haye (M. le Directeur de
la), 569; BUlia (L.-M.), 568 ; Bovy
(A.), 206; Brialmont {A.\ '2;
Cabinet des médailles de La
Haye (M. le Directeur du), 569;
Chauvin (V.), 74; Chômé (L.),
328; Congo (État indépendant
du), 390, 483; Créraers (E.),581 ;
Cumont (G. ), 227, 328 ; de Jonghe
(vicomte B.), 328; de la Vallée
Poussin (L.), 329; Devillers(L.),
74; De Wildeman (E.), 3 ; Errera
(L.), 227, 390; Faider (A.), 432;
Ferron (Eug.), 483; Fredericq
(P.), 74; Gaillard (A.), 432; Ga-
mond (L. de), 568; Gegenbaur
(Ch.),227; Génard(P.),i20; Gil-
son (G.). 227 ; Goblet d'Alviella
(Comte Eug.), 568; Gréhant (N.),
3; Guilliaume (J.), 74; Harlez
(Ch. de), 328; Hecq (G.), 338;
Homolle (Th.), 328; Jorisseniie
(G.), 390; KoUiker (Alb. von),
139 ; Lallemand (L.), 328 ; LelV-
vre-Pontalis (A.), 432; Lootens
(Ch.), 139; Mercier (D.), 74;
Mesdach de ter Kiele (Ch. ,
328; Meunier (F.), 227; Ministre
de l'Agriculture et des Travaux
publics, 336, 482; Ministre de la
Guerre, 226 ; Ministre de l'Inté-
rieur et de l'Instruction publi-
que, 139, 206, 226, 327, 390,
482, 568 ; Ministre des Affaires
étrangères, 327; Monchamp(G.),
328; Morgan (J. de), 432; Mill-
ier (M.), 73; Musée du Congo,
390 , 483 ; Nadaillac (marquis
de), 74, 483, 568; Naville (E.),
328; Nicolaeff(N.),568; Pasquier
(E.), 3, 227; Pays-Bas (Gouver-
nement de S. M. la Reine des".
580; Peeters (Ed.), 206; Peter-
mann (A.), 483; Popelin (M''e), 74;
Querton (L.), 227; Renault (B.),
390 ; Selys Longchamps (baron
Edm. de), 390; Servais (Clém.\
585 ; Société des Bollandistes,
432 ; Société royale de médecine
publique, à Bruxelles, 483;
Thomas (P. ), 432 ; Toussaint (Le
chanoine I, 74; Van der Mens-
brugghe (G.), 483. — Voir
Ouvrages présentés.
E
Eaux. Voir Coloration.
Écossais (Les) dits Scoten ou
Schotte en Flandre; par Ch.
Piot, 94.
TABLE DES MATIERES.
719
Egypte ancienne. \oïr Symbolique.
Élasticité. — Voir Liquides.
Élections, nominations :
Classe des sciences. JIM. Re-
nard et Errera, élus membres
titulaires; F. Deruyts et Ch.-J.
de la Vallée Poussin, élus corres-
pondants; L. Cremona, Edwin-
Ray Lankester, A. Karpinsky,
élus associés, 689.
Classe des lettres. Remer-
ciements pour les diplômes, 73.
— M. Giron élu directeur i)our
1899, 206.
Classe des beaux - arts .
M. Benoit, nommé directeur du
Conservatoire royal d'Anvers
(Félicitations), 222. — M. Ém.
3Iathieu, nommé directeur du
Conservatoire royal de Gand
(Félicitations), 347.
Élasticité. Voir Liquides.
Électricité. Quelques faits relatifs
à la décharge produite par la
radiation infra-électrique; par
P. De Heen, 35.
Éléments neutres d'espèce quel-
conque (Sur la détermination
d'); par F. Deruyts, 187; rap-
port de MM. Le Paige et Neu-
berg, 148.
Enseignement et politique. Voir
Politique.
Entomologie. Voir Insectes.
Éthylènes halogènes. Voir Oxyda-
tion.
Évolution. Quelques mots sur
l'Évolution; discours par Éd.
Dupont, 601.
Expédition (Une) belge au Nil
(Prise de Redjaf) ; par Léon
Chômé (Note bibliographique
par Ern. Discailles), 331.
Fermentations. Nouvelle lettre de
M. Dauber relative aux recher-
ches du D'- Buchner sur les fer-
mentations (dépôt aux archives).
Lecture du rapport de MM. Jo-
rissen et Gilkinet, 391.
Flandre. — Voir Écossais.
Flore belge (Prodrome de la) :
Thallophytes, fasc. I-III; par
E. De Wildeman (Note biblio-
graphique par Léo Errera), 8.
Fonctions. Sur la fonction Ç (s)
de Riemann et le nombre des
nombres premiers inférieurs à
une limite donnée; par Ch.-J.
de la Vallée Poussin (rapport de
M3L P. Mansion et J. Deruyts).
10, 21.
Fondations. Voir Prix.
Fortification. Progrès de la dé-
fense des États et de la fortifi-
cation permanente depuis Vau-
ban; par le général Brialmont
(Note bibliographique par le
chevalier Edm. Marchai), 6.
Funérailles. Discours prononcés
aux funérailles : d'Ern. Can-
dèze, par le baron Edm. de
Selys Longchamps,4; de Joseph
Jaquet, parle chevalier Edmond
Marchai, 120; d'Emile Banning
et d'Alphonse Rivier, par le
720
Table des matières.
baron de Borchgrave, !209, 211 ;
d'Ad. Samuo.l, parle chevalier
Edm. Marchai, 837. — Voir
Monuments.
G
Gaz. Voir Luminescence.
Géographie. Voir Noniina geogra-
phica beUjica
Géologie : voir Évolution ; Institut
international flottant.
Grottes . Nouvelle exploration
scientifique des grottes d'Engis,
d'Engihoul et des environs; par
Ernest Doudou (dépôt aux ar-
chives). Lecture des rapports
de MM. Fraipont et Malaise, 391 .
H
Hagiographie. Voir Bibliotheca...
Huinaut. Voir Chartes.
Histoire. Voir Armée russe; Bel-
gique; Ca)np; Chartes ; Conseil;
Écossais.
Histoire des religio)is. Voir Sym-
bolique.
Histoire littéraire. Voir Adenet le
Roi; Bretex; Napoléon.
Insectes (Lesj des temps secon-
daires; par Fernand Meunier
(Note bibliographique par G. Ma-
laise), 231.'
Insignes. Voir Armée russe.
Institutinternationalflottant{?TO-
jet de création d'un). Demande
d'avis adressée au nom de M. le
Ministre de l'Industrie et du
Travail, 390. Lecture du rap-
port de MM. Dewalque, Renard
et Malaise, 491.
J
Jubilés. Cinquantième anniver-
saire de la mort de Berzelius
(Adresse de félicitations), 139.
— Vingt- cinquième annivei--
saire de la fondation du Musée
d'ethnographie , à Stockholm
(Lettre de félicitations), 327. —
Centenaire de l'Académie impé-
riale militaire de médecine de
Saint-Pétersbourg (Lettre de
féhcitations), 482. — Vingt -
cinquième anniversaire de l'in-
stitution par M. Kurth de sou
cours de critique histori(|ue
(Félicitations), 567.
Labienus(Le camp de).Voir Camp.
Laboratoire de Naples. Voir Biolc-
gie.
Latitudes. Fondements de la théo-
rie de la variation des latitudes ;
par F. Folie, 276.
Liquides. Sur les nombreux effets
de l'élasticité des liquides (troi-
sième communication); par G.
Van der Mensbrugghe, 281. —
Sur les propriétés fondamen-
tales des liquides ; par G. Van
der Mensbrugghe (note biblio-
graphique), 484.
Liturgie. Voir Stjmboiique.
TABLE DES MATIERES.
7^1
Lumière{La)ei l'Art; par J.Robie .
46 i.
Luminescence des gaz (Note sou-
mise par A. de Hemplinne),483.
Liine. Sur la cause de l'accéléra-
tion séculaire de la Lune (Note
soumise par A. Jouveneau), 483.
M
Malacologie. Voir Concours de la
Classe des sciences; Mollusques.
Marées (Sur lesi et les tremble-
ments de terre; par V de
Zicgler (Dépôt aux archives).
Rapports de MM. Folie et Van
der Mcnsbrugghe, 240, 241.
Mathématiques. Voir Courbes;
Éléments neutres ; Fonctions ;
Mécanique ; Polygones ; Sur-
faces.
Mécanique pure. Mémoire énon-
ç;uit et démontrant un nouveau
prin('i|)e de mécanique (soumis
par Eiig. Ferron), 484.
Météorologie. Voir Atmosphère;
Aurore boréale; Couleur; Phy-
sique du globe; Tremblements de
terre.
Mollusques. Recherches morpho-
logiques et phyiogcnéliques sur
les Mollusques ai'chaïques; par
P. Peiseneer (rapports de M.\I.
Éd. Van Beneden, Plateau et
Van Bambeke), 143, 143. —
Voir Concours de la Classe des
sciences.
Monochloracétone. Voir Condensa-
tion.
Monuments. Inauguration, à Ma-
S"* SÉRIE, TOME XXXVI,
lines, de la statue de P.-J. Van
Beneden, 138; discours pro-
noncé par M. Éd. Dupont, 228;
remerciements de M. Éd. Van
Beneden et de sa famille, 138.
— Inauguration, à Verviers, de
la statue de Henri Vieuxtemps
(Discours prononcé par Th Ra-
doux), 341.
Morale. Voir Philosophie .
Moretto. Voir Bonvicino.
Musée (Le) national d'Amsterdam,
texte de Victor de Stuers, plan-
ches de l'architecte P.-J. -H. Cuy-
pers (Note bibliographique par
le chevalier Edm. Marchai), 581.
Musique. Voir Concours de la
Classe des beaux-arts ; Concours
{Grands). Prix de Rome; Son.
Myologie. Voir Cœur.
Napoléon. Barthélémy et Méry
étudiés spécialement dans leurs
rapports avec la légende napo-
léonienne. (Mémoires in - 8»,
t. LVIIL) Rapports de M.W. Dis-
cailles, Stecher et Wilmotte,
88. 91, 92.
Nécrologe. Banning (Emile), 206;
Burne-Jones (sir Edward), 120;
Cmdèze (Ernest), 2; Garnier
(Cliarles), 335; Hall (James),
226; Jaquet (Joseph), 119; Ri-
vier (Alph.), 206; Samuel (Ad.).
335.
Nepenlhes (Urnes de). Voir Con-
cours de la Classe des sciences
de 1898.
Neurologie. Voir Protoplasme.
48
722
TABLE DES MATIERES,
Nil. Voir Expédition.
Nitriles-?dcooh aliphatiques (Sur
les dérivés de quelques); par
L, Henry, 22. — Sur divers
nitriles-alcools penta- et hexa-
carbonés; par le même, 241.
Nomina geographica bel£çica(Note
soumise par P. Tack), 438.
Nutation. Véritication de l'exis-
tence de la nutation eulérienne
dans les latitudes observées à
Greenwich pendant les années
1880-1891; par F. Folie, 392.
O
Ouvrages présentés. Juillet, 133;
août, 223; octobre, 379; novem-
bre, 47G; décembre, 690. —
Voir Dons.
Oxydation. Contribution à l'étude
de l'oxydation des éthylènes
halogènes; par Fréd. Swarts,
532; rapports de MM. Spring et
Henry, 492, 494. — Sur l'oxy-
dation directe de l'éthylène tri-
chloro-éthyl-oxylé CI2C = CCI
(OCîHï); par L. Henry, 497.
Paléontologie. Voir Grottes, In-
sectes.
Palladium. Voir Action cataly-
tiqiie.
Pauvres (Les) et la Révolution.
Voir Révolution.
Philosophie et morale. Ouvrages
offerts par L.-M. Billia (Note
bibliographique par G. Mon-
champ), o71.
Physiologie Voir Agronomie; Cir-
culation ; Cœur; Concours de la
Classe des sciences.
Physique. Non- Électricité ; Liqui-
des; Réaction; Son.
Physique du globe (Sur la) et la
météorologie; par G. Kayser, 3;
dépôt aux archives après avis
de MM. Terby et Lancaster, 142.
— Voir Marées; Tremblements
de terre.
Platine. Voir Action catalytique.
Poésie. Le vers français et les
prosodies modernes, par Jules
Guilliaume (Note bibliographi-
que par Ern. Discailles), 82.
Politique et Enseignement (Ou-
vrages publiés sous le voile de
l'anonyme par Ém. Banning et
offerts par sa veuve (Note biblio-
graphique par Ern. Gossart).432.
Polygones. Sur quelques proprié-
tés des polygones inscrits aux
courbes gauches; par Fr. De-
ruyls, 5o3; rapport de MM. Le
Paige et Neuberg, 496. — Voir
Courbes.
Prix Anton Bergmann. Program-
me de la seconde période, 217,
221.
Prix de Keyn (IX* concours, II»
période). M. J. Frederichs remet
un exemplaire imprimé de son
a Manuel d'histoire moderne »,
couronné en mai 1898, 328.
Prix de Saint-Génois. Programme
de la IVe période, 216, 220.
Prix de Stassart (Notice sur un
Belge célèbre). Programme de
la huitième période, 215, 219.
TABLE DES MATIERES.
725
Prix fondé en mémoire de J.-S.
Stds. Il est fait remise, en
séance publique, d'un exem-
plaire des OEuvres de J.-S. Stas
à M. R. Gold?chmidt et à M. J.
Denis, 491.
Prix Godecharle. Sculpture
(1897). Premier rapport de
M. J. Marin (Lecture des appré-
ciations de MM. De Groot, Vin-
çotte et Marchai), 464. — Pein-
ture (1897). Réception du
premier rapport de M. Alfr.
Bastien, 347.
Prix Teirlijick (quatrième pé-
riode). Aucun mémoire n'a été
reçu en réponse à la question
posée, 438.
Prix décennaux :
Sciences botaniques ( pre-
mière période). Formation du
jury, 585.
Chimie et physique expéri-
mentales (première période).
Formation du jury, 585.
Prix quinquennaux :
Littérature française (X»
période, 1893-18971. M. Albert
Giraud, lauréat, 326; proclamé,
379.
Prosodie. Voir Poésie.
Protoplasme. Un nouveau détail
de structure du protoplasme
(état spirémateux du proto-
plasme) ; travail soumis par
Ch. Nélis, 484.
R
Radiographie. Voir Électricité.
Redjaf. Voir Expédition.
Réaction. Sur les vitesses de réac-
tion; par A. de Hemptinne et
A. Bekaert, 399; rapports de
MM. Spring et De Heen, 391,
392.
Révolution (La) et les pauvres;
par L. Lallemand (Note biblio-
grapliique par V. BrantS', 329.
Rôties liturgiques. Voir Symbo-
lique.
Russie. Voir Armée russe.
Salicylates (Sur les) doubles de
mélal et d'antipyrine (troi-
sième communication;; par
M -C. Scliuylen, 172; rapport
de MM. Jorissen et Spring, 146,
147.
Son. Recherches expérimentales
sur la formation du Fon dans
les instruments à bouche de
fliUe; par le P. Ch. Lootens.
(Noie bibliographique par G.
Van der Mensbruggiie), 140.
Station zoologique de Naplcs. Voir
Riologie.
Statues. Voir Monuments.
Statuts et règlements de l'Aca-
démie. Rapport sur l'organisa-
tion de la Classe des lettres, 574.
Surfaces (Sur les) minima réglées
et les surfaces minima à lignes
de courbure planes; par A.
Demoylin ^rapports de MM. J.
Deruy ts, J. Neuberg et Mansion),
232, 233,234.
SijDihole. Voir Concours de la
Classe des beaux-arts, 1898.
Symbole de la vie et de la création ;
par B. Boukteieff. Dépôt aux
724
TABLE DES MATIERES.
archives après avis de MM. Ma-
sius et Vanlair, 232.
Symbolique comparée. Un curieux
problème de transmission sym-
bolique Les roues liturgiques
de l'ancienne Egypte; par le
comte Goblet d'Alviella, 439.
Toponymie. Voir Nomina geogra-
pliica belgica.
Tournoi de Ghauvency Voir Bre-
tex.
Tremblements (Les) de terre et les
marées ; par V. de Ziegler (dépôt
aux archives). Rapports de MM.
Folie et Van der Mensbrugghe,
240,241.
Vers français (Le). Voir Poésie.
Voyages. Voir Belgique.
Zoologie. Voir Biologie.
TABLE DES PLANCHES ET DES FIGURES.
De Heen iP.). Quelques faits rela-
tifs à la décharge produite par
la radiation infra- électrique
(4 figures), 56-Gl.
Goblet d'Alviella (Comte EuG.i.
Un curieux problème de trans-
mission symbolique. — Les
roues liturgi(iues de l'ancienne
Egypte (lO' figures), 439-462.
Hemptinne (A. de). Sur l'action
catalytique de la mousse de pla-
tine et de palladium (4 ligures),
157-171.
Hemptinne (A. de) et Bekaert (A. ).
Sur les vitesses de réaction
(2 figures), 405, 409.
Terby' iF.). Aurore boréale du
9 septembre 1898, observée à
Grammont et à Louvain (1 fi-
gure), 263.
Van der Mensbrugghe (G.). Sur
les nombreux elfels de l'élasti-
cité des liquides, troisième com-
miinication(2 figures), 283, 291.
Waroux (Jules). Du tracé myo-
cardique du cœur exsangue,
deuxième note (18 figures),
63-72.
ERRATUM.
Classe des sciences. Séaiif.' du
m octobre. Rapports.
Ajouter : MM. Folie, Lagrange et
Le Paige donnent lecture de
leur rapport sur la demande
adressée par M. le Ministre de
l'Intérieur au sujet de la repré-
sentaùon de la Belgique au Cori-
grès de Paris en 1900. ^Décimali-
sation du temps et de la circonfé-
rence.) Ce rapport sera adressé
en copie au Gouvernement.
PUBLICATIONS ACADÉMIQUES.
Depuis la rcoiganisation, en 1816.
IVouvcaux Mëmoires, t. 1-XlX (I820-I84S); in-4o. — >iénioires,
t XX-LllI (18i6-18il8); in-4'>. - Prix : 8 fr. par volume à parlir du tome X.
Mémoii-es couronnés, t IXV (lS17-18f2); in-40. — Mémoires
couronnés et Mémoires des savants étrangers, t. XVl-LM
(184;M89!>). — Prix : 8 Ir. |)af volume à partir du tome XII.
Mémoires couronnés. in-S», t. I-LV, LVIi. Prix : 4 fr. par volume.
Tatoles ae Logarithmes, par A. Namur et P Maiision, in-S».
Taljles des Mémoires (l816-IS.'i7) (18;.8-1878. ln-18.
a^aljles des Mimnires, nouvelle éilition, 4772-1897; in-8'>.
Annuaire. 1-^' à Go""- Minute, ia3j-18!l9; in-i8.
Règlements et Documents. coii(:ernantlestroisClasses;i896,in-18.
Bulletins, 4« scr.t.l-XXIII — 2- s6r.,t. i-L;-8<^sér..t. l-XXXVl.in-B». —
Annexes aux lUtUeiins de 18ol, in-80. — Prix : 4 fr. par volume.
Tables générales des r.ulletins : t. I-XXI II, !'« sér. (1832-1856). iSbS;
in-80. -2- sér., t l-X\ (18,-)7-1866!, t. XXI-L (1867 18801 1883; in-S». - 'A' sér..
t 1-XXX il8vl-lt9.^ii, 1898; iii-80.
BiUiiograplxie académique, 1" édit., 18.-;4, 2'' édit., 1874, 'à'^ édit.,
188(î; 4" édit.. 1^9.i;iii-18.
catalogue de la B.bliollKHiue de lAcadémie, l"" partie : Sociétés savantes et
Kecueils pirioiliiiues; 2''« partie : sc.eiices, ieities. arts, 1S81-90; 4 vol. in-80.
Catalogue de la l)ililiotlié(|ue du baron de Slassart, I8(i3; in-S».
Centième anniversaire dt'/"<-«(i«no/((1772-1872).1872; 2 vol.gr. in-S»
Monuments de la littérature flamande.
CEuvres de Van Mae riant : I)ER NATUKEN ni.OEME, tome i«^ publié
par J. r.ormans, 1831; 1 vol. in-S». — RysitiViiEi.. avec Glossaire, ]iub]ié par J. David,
1858-1860; 4 vol.; — Ai.exanders Geesten, publié par Snellaert, 1860-1862; 2 vol.—
IVederlandscne gedicUten, eie., publiées par Snellaert, 1869; 1 vol. —
partnonopeus van Bloys, publié par J. Bormans, 1871; 1 vol. —
Spegliel der ^Vyslleit, van Jaa Pract, publié par J. Bormans, 1872; 1 vol.
Œiii'ies des grands écrivains du pays.
CEuvrés de Cliastellain, publiées par le baron Kervyn de Lettenbove.
1863-1860, 8 vol. in.8». — Le l" livre des Clironiques de Frois-
sart, par le même. 186 ', 2 vol. — Chroniques de Jelian le Bel,
par L. Polain. 186-^2 vol. — Ll Roumans de Cléomadès, par André
Van Hasselt. 1866, 2 vol — Dits et Contes de Jean et Uaudouin
de Condé. par Auguste Sehf'ler. 18i6, 3 vol. — Li ars d'amour, etc.,
par J. l'élit. lb6(M872, 2 vol. — Œuvres de Froissart : Chroniques, ^iv
le baron Kervyn de Leiienhove. 1867-1877, 26 vol.; — Poésies, par Aug. Scheler.
1870-1872. 3 vol.; — (ilo^toire, par le même. 1874, 1 vol. — Letres de Corn."
mines, par Kervyn de Leiienhove. 181)7, 3 vol. — Dits de ^Vatriquet
de Couvin, par A. Scheler. 1868, 1 vol. — Les Enfances Ogier, par
le même. 187i. 1 vol. — Bueves de Commarciiis, par Adenès li Rois,
par le même 1874, 1 vol. — Li Ttoumans de :Berte aux grans
pies, |iar le même. 1874, 1 vol. — Trouvères toelges du X-IIc au
XIV* siècle, i)ar le même. 1876, I vol. — Nouvelle série. 1879, 1 vol. —
Li Bastars de Bullion, par le même. 1877, 1 vol. — Récits d'un
:Bourgeois de Valenciennes (X.tV= siècle), par le baron
Kervyn de l.etienhove. lS77, 1 vol. — Œuvres de Ohilletoert de
Lannoy. par Ch. Polvm. 1878, 1 vol. — P»oésies de Gilles li
Muisis. par Kervyn de Leltenhove. 1882, 2 vol. — CEuvres de Jean
Lemaire de Belges, par J. Stccber. 1882-91, 4 vol. avec notice. —
Li Regret Guillaume, par A. Scheler. 1882, 1 volume.
Biographie nationale.
BiograpHie nationale, t. I à XV (1" fasc). Bruxelles, 1866-1898,
gr. in-80.
Commission royale d'histoire.
Collection de Chroniques Ijelges inédites, publiées par
ordre du r.ouvernement; 101 vol. in-'»o. (Voir la liste sur la couverture des Chroniques.)
Comptes rendus des séances. I^'' sér., avec table (1837-1849), 17 vol
i„.8o. _ 2me scr.^ avec table (1830-1859). 13 vol. in-80. _ 2""' sér., avec table (1860-
1872),15 vol. in-80.— 4"'^ sér., 17 vol. in-80 (1873-1891;.— 5«"- sér., t. 1-VII.
Annexes aux Dullcti'is, 21 vol. in-80. (Voir la liste sur la couverture des Chro-
niques et des Comptes rendus )