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SOCIÉTÉ D'HISTOIRE NATURELLE
DE TOULOUSE.
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QUATRIÈME ANNÉE 4869-1870.
Séance de rentrée du 19 novembre 1269.
Présidence de M. le Dr Gurrarn, vice-président.
La Société reçoit :
_ Bulietin de la Société archéologique de Béziers , 2e série,
MoN IA:
Bulletin de la Société impériale zoologique d’acclimatation ,
juillet, août et septembre, n° 7, 8 et 9, 1869 ;
Bulletin de la Société polymathique du Morbihan, 1° sem.
4869 ;
Bulletin de la Société de climatologie algérienne, À, 2, 3, 1869;
Mémoires de l’Académie des sciences de Caen, 186) ;
Annales de la Société scientifique d’Apt, 1866-1867 ;
_ Bulletin de la Socièté des sciences de l'Ardèche, t. V, 1868 ;
Mémoires de la Société académique de Maine-et-Loire, t. XXII
et XXIV ;
Bulletin de La Société des sciences de l'Yonne, % trimestre 1869 ;
Mémoires de la Société d’émulation du Jura, 1868 ;
Mémoires de la Société académique de l’Aube, 1868 ;
Notices publiées par la Société du département de la Manche.
Ph EtS"";
Mémoires sur l’histoire du Cotentin, 1. I;
te
Rapport sur les travaux de la Soriété archéologique du Midi,
par E. Cartailhac; |
Journal d'Agriculture du midi de la France, août à oct. 4869 ;
Revue agricole du Midi ; |
Matériaux pour l’histoire primitive et naturelle de l’homme ;
livr. de mai, juin, juillet, août 1869 ;
La Minerve de Toulouse; livr. de août, sepl., oct. 1869.
De la part de M. Petit, surveillant militaire à la Nouvelle-Calé-
donie : hache polie en jade ; 2 pierres de fronde avec la fronde ;
une perruche ;
De la part de M. Cartailhac : 7 hachettes en pierre polie de
l’Aveyron ;
De la part de M. d’Aubuisson : un Agaric;
De la part de M. le Dr Guitard : des fruits mürs de l’Asclepias
seriaca venus en plein air.
Des remerciments sont votés aux donateurs.
M. le docteur Guitard rend compte des essais d’acclimatation
qu'il a pu faire cette année ; deux plantes lui ont donné de bons
résultats : le Pyrox et l’Asclepias seriaca. Le Pyrox est un arbre
mexicain dont les graines servent à la nourriture des oiseaux de
volière. L’Asclepias seriaca est un arbre à soie déjà cultivé aux
États-Unis sur une assez grande échelle. Un industriel a même
demandé un brevet pour employer cette plante dans le tissage de la
soie. Chez le docteur Guitard, l’Asclepias semé à porté des fleurs et
des graines à parfaite maturité ; mais l'hiver a été d’une clémence
exceptionnelle, et celte année, avec des froids plus rigoureux, la
plante est exposée à périr.
Séance du 3 décembre 1869.
Présidence de M. le D' Gutrar», vice-président.
La Société reçoit :
Matériaux pour l'histoire primitive ct naturelle de l’homme,
2e série, livr. de sept. et oct. 1869 ;
PME PE
Bulletin de la Société impériale zoologique d’acclimatation ,
2e série, t. VI ;
Mémoires de l’Académie des sciences de Toulouse, 7° série, t. };
Mémoires de la Société d'agriculture de la Marne, année 1868 ;
Annales de l’Académie de Mäcon, 1. VIT.
M. Cartailhac prend la parole pour annoncer à la Société que
M. Trutat et lui ont été assez heureux pour obtenir de leur cor-
respondant, M. Detroyat, une petite mais précieuse série de silex
taillés et d'ossemenis d’une station de l’âge du renne, voisine de
Bayonne. C'est le gisement de ce genre le plus méridional que
l’on connaisse ; le renne n’a pas encore été rencontré plus au sud.
Un autre envoi provient de la Société de Climatologie Alge-
rienne : cette compagnie savante a fait fouiller deux grottes, l'une
à Pointe-Pescade , l’autre dans le rocher de Guyotville. Dans la
première on trouva des ossements de bœuf, cheval, de divers
Antilopiens qui ne se rencontrent aujourd'hui qu’au loin dans le
sud et même dans la région subsaharienne, d’ours, de hyène ct
. de porc-épic. La plupart de ces ossements étaient dans des foyers
ct associés à des silex taillés. La seconde grotte contenait le
Bos bubalus , les mêmes Antilopiens, l'âne, une chèvre, une pan-
thère, une hyène , une tortue de terre, et des quantités considé-
rables de débris de coquilles marines ou même terrestres associées
à des couteaux en silex, des marteaux et deux haches de dimen-
sions bien différentes. En outre des moulages de ces objets tra-
vaillés, le don de la Société d’Alger comprend une belle série d'os
d'animaux et de coquilles trouvés dans les deux stations. Ce sont
les premiers spécimens de lindustrie primitive des grottes du
nord de l’Afrique qui arrivent en France. Sur la proposition de
MM. Trutat et Cartailhac, qui transmettent ces dons au Musée
d'Histoire naturelle, la Société vote des remerciements à la Société
de climatologie algérienne et à M. Detroyat.
M. Gourdon propose d'introduire un ordre du travail réglé
d'avance, pour l’année, par le bureau. Après une longue diseus-
sion, à laquelle plusieurs membres de la Société prennent part,
M. le docteur Gourdon retire sa proposition.
M. Timbal-Lagrave.fils lit une note sur une nouvelle localité du
Verbascum glabrum, Mill.
4 frs:
Le V. glabrum n’est indiqué en France que dans une seule
localité, à Civray (Vienne), sur un mur de jardin. Geux qui l’ont
découvert dans cette localité se demandent encore s’il y est vérita-
blement spontané.
M. Franchet constate ce fait dans sa monographie des Verbas-
cum, et le considère comme une bonne espèce, se distinguant
parfaitement à son feuillage vert de bronze, à ses fleurs blanches
et pourpres à l'extérieur et à ses poils glanduleux capités. Certains
floristes l’ont cependant confondu avec le V. Blattaria et le
V. Repandum, Reich. Ces deux derniers ont les fleurs jaunes.
Cette plante a été découverte, en 1865, juillet et août, à Saint-
Sulpice-sur-Lèze (Haute-Garonne), par MM. Filhol et Timbal-
Lagrave père. Depuis cette époque, ce Verbascum a été soumis à
des essais de culture; cette espèce s’est maintenue avec tous ses
caractères.
M. H. Magnan communique à la Société une Note sur le
terrain crétacé inférieur (néocomien, aptien, albien) des Pyrénées
françaises et des Corbières.
Après avoir indiqué les causes d’erreur qui ont fait ranger jus-
qu’à ces derniers temps cette puissante formation dans le terrain
jurassique (plissements, renversements de couches, failles, appa-
rences trompeuses du conglomérat cénomanien de Camarade),
et après avoir donné un aperçu de la composition générale du
terrain crétacé inférieur le long de la chaine pyrénéenne,
M. Magnan fait connaître en détail, la coupe de Saint-Lizier (près
Saint-Girons), à l’Église de Gajan, où apparaissent les trois termes
du terrain dont il s’agit.
Les deux étages inférieurs, le néocomien et l’aptien, sont sur-
tout admirablement représentés à Saint-Lizier. — Le premier re-
pose en concordance sur les dolomies noirâtres , fétides, plus ou
moins bréchoiïdes de l’oolithe supérieure (terrain jurassique) ; sa
puissance est de 300 mètres; il est formé de calcaires dolomiti-
ques et de calcaires marmoréens gris, à Caprotina Lonsdalii, Tere.
bratula sella, Nerinea indéterm. — Le second, dont l'épaisseur
est considérable et difficile à préciser, se trouve constitué par des
calcaires, des calschistes et des schistes noirâtres, qui renferment en
abondance l’Ostrea aquila et les Orbitolina conoidea et discoidea.
robe
L’albien, c’est-à-dire l’étage le plus supérieur du groupe, est com-
posé aussi de schistes noirs, puissants, et près de l’Église de Gajan,
de calcaires gris, marmoréens, à Caprotina Lonsdalii, ressemblant
à ceux du néocomien, mais s’en distinguant par leur position et par
certains fossiles : Discoidea conica, Pentacrinites cretaceus, etc.
Toute celte série bute par faille contre le terrain juras-
sique. Il est impossible de savoir ici quelles sont les couches
qui constituent la partie supérieure de l’étage albien. (Le terrain
jurassique qui se montre par faille au nord de l’Église de Gajan,
explique pourquoi les auteurs de la Carte géologique de France
ont rangé dans cette formation, les 4500 mètres de couches
appartenant en réalité au terrain crétacé inférieur.
C'est dans les Corbières, entre Vingrau et Rivesaltes , que
M. Magnan a pu compléter l'étude de l'étage albien. Il a vu dans
cette région, au-dessus des calcaires, des schistes noirâtres et des
calschistes à Orbitolina et à Ostrea aquila de l’aptien et de l’albien
inférieur, se développer une puissante série de calcaires gris à
Caprotina Lonsdalii, alternant avec des marbres blancs, des
brèches marmoréennes, à teinte pâle, qui sont surmontés par des
schistes terreux et ardoisiers noirâtres. La puissance de cet étage
dans les Corbières est de 45 à 1800 mètres.
M. Magnan, après avoir rappelé ce qu'il a écrit en 1868 (Comptes
rendus de l’Institut), à propos du rôle considérable que joue dans
les Pyrénées françaises le groupe du crétacé inférieur, dont l’épais-
seur totale peut être évaluée à 2,500 mètres, ajoute que tout ré-
cemment 1| a acquis la conviction que les calcaires gris et les
schistes noirâtres d’'Ussat et de Tarascon (Ariége), que l’on croyait
appartenir, d’après de récents travaux, au terrain Jurassique, dé-
pendent en réalité du terrain crétacé inférieur; il a recueilli à
Ussat et à Ornolac des fossiles de ce dernier terrain, entre autres le
Caprotina Lonsdalii et l’'Ammonîtes Carteroni, qui caractérisent
le terrain néocomien à Gigondas (Vaucluse).
M. Magnan termine en disant que le terrain crétacé inférieur,
qui a éte reconnu il y a quelques mois au sommet du pic de
Cagire (1,912 mètres) par la Société d'Histoire naturelle de Tou-
louse, entre aussi dans la constitution du massif du Gars (1,786
mètres), au nord de Saint-Béal.
— 10 —
Séance du 177 décembre 1869,
Présidence de M. le D° Frzuoz, président.
La Société reçoit :
Monuments mégalithiques du département de l'Aveyron, par
M. E. Cartailhac (ext. des Transactions, of the intern. Congres
of prehist., Arch.).
Journal d'Agriculture pratique du midi de la France, 3 série,
t. XX.
L'ordre du jour de la séance appelle la communication de
M. F. Regnault sur le résultat de fouilles faites par lui dans la
scrotte de Montesquieu (près Aulinac, H.-G.). Il se compose
d’ossements humains et d’ossements d'animaux qu'il n'a pu
encore déterminer.
. Après avoir fait la description de la grotte et du couloir qu'il a
explorés, M. F, Regnault se demande si celte grande quantité
d’ossements humains cassés, mêlés à ceux des animaux, trouvés au
milieu d’un foyer, dans une couche de terrain qui ne lui a pas
paru remaniée, ne seraient pas des débris de repas faits par
l'homme. — 1] a encore trouvé dans ces fouilles des ossements
humains cassés intentionnellement, au milieu d’un foyer ancien,
mêlés à des débris de divers animaux, indice de repas de can-
nibales. Pour M. Regnault, l’homme qui habitait la grotte de
Montesquieu devait pratiquer l'anthropophagie.
M. Regnault présente cette découverte sous toutes réserves ;
il se propose de compléter ses recherches sur une question si
intéressante par de nombreuses fouilles qui conduiront certai-
nement à de nouveaux résultats.
M. Cartailhac fait observer que, dans une aussi grave question,
il importe de ne rien avancer de douteux. Or, le contenu de la
grotte de Montesquieu, si l’on en juge par le travail de M. Ro-
un) Ni PRE
gnault, est entièrement remanié. Ainsi, on y trouve les espèces
de la pierre polie, le chien par exemple, associées à celles de
l’âge paléolithique.
M. Cartailhac croit qu'il n’est pas possible d’accuser d’anthro-
pophagie les sauvages qui ont laissé dans cette grotte les preuves
non équivoques de leur séjour. Les nombreux ossements humains
que M. l’abbé Pouech et, après lui, M. Regnault ont recueillis, ne
sont pas cassés comme ceux des animaux, et si quelques-uns sont
rongés, ce n’est pas par les dents humaines, mais bien par celles
plus puissantes des rats. Si on trouve des assements humains au
milieu des cendres et des débris de cuisine, c’est que peut-être
les morts étaient déposés sur les foyers domestiques, comme
on le constate dans les stations antéhistoriques de Saône-et-Loire,
à la manière de quelques tribus sauvages actuelles ; bien d’autres
explications peuvent être données. Tout en critiquant les conclu-
sions de M. Regnault, M. Cartaïlhac n'entend pas mettre en doute
des preuves d’anthropophagie établies ailleurs en France, et que
l’histoire même est bien loin de contredire.
MM. Filhol, de Malafosse et Trutat présentent à leur tour quel-
ques observations et partagent les idées de M. Cartailhac.
M. de Malafosse dépose ensuite sur le bureau, et offre à là
Société, un grand nombre d'échantillons et de fossiles de l’Infra-
has, parmi lesquels l’on remarque la Cypricardia porrecta, la
Turritella Dunkeri, la Gervilia obliqua, etc., au moyen desquels
il peut caractériser et fixer la position de cet étage dans la région
méridionale du plateau central. Il fait une coupe générale de
l’Infra-lias dans le département de la Lozère, et essaie de démontrer
que les premiers sédiments des mers jurassiques se sont déposés
dans ces contrées sur les terrains de cristallisation occupés alors
par une flore terrestre dont les empreintes ou les débris à l’état
de lignite abondent dans les grès, qui sont l'extrême base du lias.
Au moyen de fossiles recueillis par lui dans ces grès, M. de Mala-
fosse explique que l’Infra-lias commence dans cette localité, dans
la zone à Ammonites planorbis, appartenant à une période plus
calme et formée de marnes et de calcaires.
M. de Malafosse croit devoir faire remarquer à la Société que les
rares géologues, MM. Reynès et Kecklin Schlumberger, qui se sont
occupés de ces régions — N. de l’Aveyron et Lozère — n'avaient
pu caractériser l’Infra-lias, faute de fossiles. Notre confrère a
été plus heureux.
M. H. Magnan dit que la très-intéressante découverte que vient
de faire M. de Malafosse démontre, une fois de plus, l’analogie qui
existe entre les formations liasiques de nos régions et celles des
bassins du Rhône, de la Loire et de la Seine.
Les fossiles et les roches de l’Infra-lias des environs de Mar-
véjols, présentés à la Société par M. de Malafosse, lui rappellent,
de tous points, ceux qu’il a recueillis au même niveau géologique
sur les rives du Rhône, à Chateaubourg, vis-à-vis Valence, à
Vernoux, dans l’Ardèche, et en divers lieux des départements de
l’Aveyron, du Tarn, du Tarn-et-Garonne et du Lot.
M. Magnan fait ensuite remarquer que les dépôts infraliasiques
occupent sur Île plateau central de la France des altitudes bien
différentes : les couches fossilifères de Chateaubourg sont situées à
420 mètres au-dessus du niveau de la mer; celles de Vernoux à
017 mètres ; celles des environs de Villefort à 4030 mètres ; celles
de Marvéjols, étudiées par M. de Malafosse, à 635 mètres; enfin
celles des départemenrs de l’Aveyron, du Lot, du Tarn et du
Tarn-et-Garonne entre 150 et 600 mètres.
M. Magnan explique ces diverses altitudes par d’immenses
affaissements suivis de failles, et termine en rappelant le rôle
considérable que les brisures et les agents d’érosion ont joué sur
le plateau central de la France et sur les bords de ce plateau. Il a,
du reste, prouvé tout récemment, que dans la forêt de la Grésigne,
presque dans la plaine, 4630 mètres de couches ont été enlevées
par les eaux, dans une seule période géologique.
M. Trutat demande ensuite la parole pour rendre compte
d’une course qu’il vient de faire sur la nouvelle ligne d’Auch à
Tarbes. L’exécution de cette partie du chemin de fer d’Agen aux
Pyrénées présentait de très-grandes difficultés, car il fallait tra-
verser une région accidentée et entièrement formée de marnes et
de sables. Malgré cela, les travaux n’ont pas été arrêtés un seul
instant : tout avait été prévu et calculé par avance. C'est
qu’aussi la géologie pratique avait tout dirigé dans cette entre-
prise : plus de 300 sondages explorateurs, poussés à des profon-
deurs de 60 à 80 mètres, avaient permis d'établir des coupes
d’une exactitude complète. C’est la première fois, croyons-nous,
à
LS ua à
que les données géologiques ont été consultées avec autant de
soin ; aussi sommes-nous heureux de constater le véritable succès
obtenu par la Compagnie des chemins de fer du Midi dans cette
heureuse innovation.
Le but principal du voyage de M. Trutat était de reconnaître un
gite fossilifère d’une très grande richesse que la voie avait traversé
dans la tranchée du faite de Miélan.
La Société a déjà vu les nombreux débris que la compagnie du
Midi a généreusement offerts à notre Musée, Quoiqu’arrivé un peu
tardivement, M. Trutat a pu constater la nature des couches ossi-
fères, grâce aux précautions prises par M. l’ingénieur Boutillier.
Les stations précises des pièces principales avaient été piquetées
dans les talus, et une coupe d’une grande netteté avait été réservée
pour la visite.
Le fait le plus important que M. Trutat a constaté est celui-ci :
le dépôt ossifère était tout entier limité à une poche de terrain
remanié, limité en haut et en bas par des couches tertiaires, par-
faitement horizontales. Ce dépôt remanié était lui-même terminé
à sa partie inférieure par un banc de cailloux roulés de petite
dimension. La quantité d’ossements accumulés dans cette poche
était tellement considérable, qu’on a pu en remplir une vingtaine
de wagons ; malheureusement ils étaient dans un état de friabilité
telle que leur conservation a été souvent impossible ; il a été cepen-
dant facile de constater la présence des espèces suivantes : Dinothe-
rium, Mastodonte, Rhinoceros et Dicroceros.
M. Trutat a constaté la présence d’un banc de cailloux née
d’une puissance régulière d’un mètre, sur tous les sommets qui se
trouvent entre Mirande et Miélan, Ces cailloux, d’origine pyré-
néenne, permettent de reconnaitre l’origine récente des ravins qui
sillonnent la partie du bassin sous-pyrénéen, prolongement du
plateau de Lannemezan. Pour M. Trutat, ils se rattachent à la
grande période glaciaire qui a été la cause directe du creusement de
toutes les vallées sous-pyrénéennes. Notre confrère étudie, du reste,
ce magnifique phénomène : les tranchées ouvertes pour le chemin
de fer des Pyrénées faciliteront singulièrement ses recherches.
Séance du ? ianvier 1870.
Présidence de M. le D' Guiramn, vice-président.
La Société reçoit :
La Minerve de Toulouse, n° À, vol. I.
M. Fouque fait connaitre la : luation financière de la Société.
Conformément au règlemeit. M. le président nomme une
commission pour vérifier les comptes. D’après l’article 31 du
règlement qui la régit, la Société procède au renouvellement de
son bureau ct à la nomination de ses commissions.
Sont nommés :
Président, M. le Dr Guirarp;
4er Vice-président, M. E. TRUTAT ;
2e id. M. PLA ; 1
Secrétaire général, M. E. CARTAILHAC ;
Secrétaire adjoint, M. À. PEYRE;
Trésorier, M. MAaRQuET ;
Bibliothécaire-archiviste, M. TimBaz-LaGrave fils ;
Membres du. conseil d'administration , MM. Gourpox et.
MAGNa ;
Membres du comité de publication, MM. MaGNaN, JEANBERNAT,
TruTAT et D'AUBUISSON.
M. H. Magnan, continuant l’étude de la craie dans nos régions,
communique une Note sur la craie moyenne des Pyrénées fran-
caises et des Corbières (cénomanien et turonien).
Après avoir succinclement rappelé la composition de la craie
inférieure (néocomien, aptien, albien), groupe important essen-
tiellement formé de calcaires plus ou moins marmoréens, gris, de
calcaires noirâtres, etc., de schistes noirs souvent ardoisiers, qu'il
a décrit en détail dans une précédente séance (p. 8 ), M. Magnan
dit que la craie moyenne est presque entièrement composée de
roches détritiques (grès et conglomérats), ce qui s'explique très-bien,
si l’on se rappelle le fait important qu'il a démontré en 1868, à
savoir : qu’à diverses époques, les Pyrénées ont été disloquées et
D ES
dénudées, et notammeat pour le cas dont il s’agit, après l’époque
‘de la craie inférieure. En effet, ce sont les mille mètres de cou-
ches enlevées par les agents d’érosion, après le dépôt des terrains
albiens, qui ont constitué les roches gréseuses et les conglomérats
de la craie moyenne.
M. Magnan donne ensuite quelques détails sur le rôle important
que joue fe craie moyenne dans les Pyrénées; sa puissance est
d'environ 4,000 mètres. Ce terrain peut être suivi presque sans
interruption des bords de l'Océan aux rivages de la Méditerranée,
en constituant, ordinairement, au pied de la chaine, les montagnes
de 3° ordre. On remarque aussi cette formation dans le massif de
Gayarnie. |
Après ces grands traits, M. Magnan trace sur le tableau plu-
sieurs coupes qu'il a relevées en plusieurs points de la chaine
pyrénéenne, dans l’Aude, dans l’Ariége, dans la Haute-Garonne
et dans les Hautes-Pyrénées.
Les coupes les plus intéressantes, les coupes classiques, qui
montrent les vrais rapports de position du groupe qui nous
occupe avec les terrains qui l'ont précédé et ceux qui l’ont suivi,
sont celles que M. Magnan a faites dans les petites Pyrénées de
l’Ariége et dans les Corbiérès!:
+6 Entre Sainte-Croix et Baup, en remontant la petite rivière
du Volp;
2 Entre Ufferte et le moulin de Camp-Pataillé sur l’Arize ;
30 Entre le Milobre de Massac, Soulatge et Pierre-Pagès dus
les Corbières.
Ces.coupes, qui sont plus spécialement décrites par M. Magnan,
démontrent le fait important de la discordance de la craie
moyenne (cénomanien) avec les dépôts de la craie inférieure
(albien, aptien, néocomien) et avec ceux antérieurs à cette épo-
que ; elles permettent ensuite d'étudier avec profit la lithologie et
la paléontologie des étages Cénomanien et Turonien.
Le premier de ces étages débute par un puissant conglomérat,
plus ou moins incohérent, formé en certains lieux, de blocs
énormes (ces blocs souvent fossilifères ont été la cause de nom-
breuses erreurs. La plupart des géologues qui ont étudié les
Pyrénées les avant crus à leur vraie place, c’est-à-dire non rema-
niés, ont rangé le terrain qui les renfermail tantôt dans le lias,
tantôt dans ke corallien, tantôt dans l'aptien, suivant qu'ils y trou
— 16 _——
vaient tels ou tels fossiles). — Ge conglomérat auquel M. Magnan a
donné en 1868, le nom de conglomérat de Camarade, et qui corres-
pond aux couches à Orbitolina concava des Charentes, c’est-à-dire
au cénomanien inférieur, alterne à la partie supérieure avec des
couches schisteuses psammitiques, nettement stratifiées. Sa puis-
sance est en certains points (Ariége, Htes-Pyrénées) de 800 mêtr. ; il
passe quelquefois vers le haut à un poudingue bréchoïde, solidement
*
cimenté. Il est recouvert par des dalles gréseuses à empreintes
végétales (fucoïdes) (niveau de l’ile d'Aix), des grès sablonneux,
des argiles micacées, roches détritiques, auxquelles sont sou-
vent subordonnées, surtout dans la partie orientale et médiane
de la chaîne, des couches de calcaire renfermant de précieux
fossiles : Ostrea (Exogyra) Columba, Janira quinquecostata ;
Nautilus Charpentieri, Cyclolites semiglobosa, Caprina adversa,
Ostrea carinata, etc.
Le second étage, le Turonien, est formé par des grès siliceux
jaunâtres, rougeâtres et par des argiles plus ou moins micacées.
Ces grès renferment en certains lieux, surtout dans l’Aude et
dans la partie orientale de l’Ariége, des couches de calcaire qui
contiennent de nombreux corps organisés : Hippurites organisans,
H. striata, Cyclolites undulata, Sphærulites ventricosa, Spon-
dylus spinosus, Micraster brevis, ete. L’épaisseur de cet étage esi
de 200 mètres environ.
Dans la partie médiane de la chaîne, les calcaires sont moins
abondants ; ils sont généralement gris-bleuâtres (Sainte-Croix,
environs de Lescaladieu); dans la partie occidentale (Basses-
Pyrénées), les couches supérieures au conglomérat de Camarade
sont généra'ement argileuses (schistes pourris) et calcareuses avec
silex; elles renferment les même végétaux fossiles (fucoïdes) ;
l’élément franchement calcaire réapparaît, et avec lui les rudistes
de la base, notamment près de Sare (S. de Bayonne), où l’on a
recueilli entre autres espèces des Caprines (C. adversa).
M. Magnan termine en appelant l'attention de la Société sur
une coupe qu’il a relevée entre Bagnères-de-Bigorre et Orignac.
Cette coupe montre les difficultés qui attendent le géologue qui
veut étudier dans les hautes Pyrénées le groupe de la craie.
moyenne : ce ne sont partout que couches disloquées, renversées,
en partie recouvertes par des terrains récents ; aussi les vrais rap-
ports de position sont-ils souvent difficiles à établir dans cette région.
=. 4h =
‘Séance dù SA janvier 1870.
Présidence de M, le Dr Guirann, président.
.M. le Dr Guitard ayant appartenu à l’ancien bureau, est embar-
rassé pourile remercier au nom de la Société. Le nouveau bureau
tâchera de répondre à la confiance, de ceux qui l'ont nommé.
Son premier soin 4 .élé de reconnaître les services rendus à
la, Société par: M. le professeur. Filhol, durant: les trois années:
écoulées.. .et. il. propose à la Société de le nommer RRetsens
honoraire. |
Les. memb: es présents adoptent, par aoclaihe lion; a Moon
de:M. le président. Le bureau sera auprès de M. Lilhol l’intérprète
de leurs sentiments.
Sont nommés, au scrutin secret, conformément au règlement :
Membres de la commission des grandes excursions, MM. le
Dr. JEanBERnaT, Macnan, Lacaze, TrurarT, MarQuer.
. Membres dela commission des petites excursions, MM. d’ AÛ-
BUISSON, RIVIÈRE et FOUQUE.
La Société adopte ensuite les conclusions du couseil. d'admi-
nistration sur plusieurs points.
La Société: reçoit :
Mutériaux pour l'histoire primitive de l'homme, novembre et
décembre. 41869. |
M. le secrétaire-général dépose sur le TEA la première
livraison, du 3° solume de nos bulletins.
"M. MEL Lagrave lit un rapport sur les herhorisations: de la
Société durant l'année 1869, imprimé p. 107 du volume Hi.
M. Filhol met sous les yeux de la Compagnie les ‘ossements et
objets qu'il a recueillis dans quelques grottes de là’ Haute-
Garonne. LE
Grotte de Salech': Les premières fouilles y furent exécutées, 11
va.plusieurs années, par MM. Rames et Filhol fils. Elles ameno-
rent la découverte de poinçons en os, de dents perforées, de silex
e)
LD
LES EL A
luillés, d’ossemeuts humains et d'animaux domestiques ampâtés
dans une stalagmite compacte. Les, nouvelles recherches ont donné
les mêmes résultats.
Grottes du Massif d’Arbas : 1° La Tuto de la spigos de la
Quanquo con'enait les ossements d’un petit ours à l'exception de
ceux de l'ours des cavernes. — 2° Une seconde cavité au pied du
Mail de Penne blanco a livré des poinçons et lissoirs en os, des
outils en silex et en quartzite, des poteries d’époques bién diffé
rentes, des ‘ossements d'animaux domestiques et de femmes ct
d'enfants. Ges ossements humains ont été étudiés avec un vif
intérêt par l’un des plus éminents anthropologistes, Dr Pruner-Bey.
Avec tous ces débris dans les mêmes foyers et lits de cendres, se
trouvaient des ossements de l’ours des cavernes apportés 1à par’
l'homme de l'âge de la pierre polie, qui avait découvert leur gise-
ment dans une salle intérieure qui est aujourd’hui d’un difficile
accès.— 9° Enfin la Grotte du Mail de Bourusse, — qui peut-être
communique avec la précédente, par des couloirs très-longs et
sineuliérementréduits, sinon obstrués, —renfermait des ossements
de l'ours des cavernes. us
Deux grottes,ont été visitées par M. Filhol à [sault-de-l’Autel ;
l’une a livré des ossements d'animaux domestiques et des poteries,
l’autre des ossements humains.
Les objets recueillis sont destinés au Muséum de Toulouse.
M. Cartailhac fait remarquer Ia parfaite similitude des osse-
ments humains, exhibés par M. le professeur Filhol avee ceux que
M. Regnaull a retirés de la grotte de Montesquieu. Les têtes d’os
- manquent souvent, ce qui arrive toutes les fois que des ossements
déjà fragiles ont été remués ou retirés sans précaution. Aucun: '0$
n'est cassé en long; mais on peut voir un fémur fendu presque
complètement par la dessication ou tout autre cause naturelle, et
qui sé partagérait au moindre choc. Lès ossements des victimes
des cannibales ne demeurent presque jamais entiers, les anthropo-
phages n’ayant garde ae négliger Ja moelle (4). Enfin on peut
remarquer dans les ossements humains des stations nouvelles de la:
Haute-Garonne, un fait bien simple ct qui se retrouve presque
(1) Voir surtout : The eare cannibals of south africa. (Anthrop. R, april
1869 ) |
a
ter AND ne
toujours dans les os longs anciens, à savoir : que le canal médul-
laire est comme agrandi ou nettoyé. C’est le résultat de l'humidité.
Une raison qui fait croire à M. Cartailhbac que l’anthropophagie
ne régnait pas à l’époque de la pierre polie dans lAriége ou là
Haute-Garonne, c’est que le peuple de ces grottes est essentielle-
ment pasteur! ou agriculteur ; 11 ne présente rien de sacerdotal ;
ce n’est pas dans ces conditions que se trouvent les anthropo-
phages actuels; 1ls sont guerriers ou chasseurs, et si quelquefois
le connibalisme est un fait religieux, en somme, l’origine en est
dans Ja famine; or, ce fléau atteint rarement des populations
déjà civilisées. Celles des stations pyrénéenhes sont en apparence
essentiellement pacifiques, leurs mœurs devaient être trés-douces.
En Suisse, où les fouilles sont bien mieux étudiées que chez nous,
où des populations dans la même phase de civilisation ant séjourné
longtemps, on n’a rien trouvé qui puisse faire admettre le canni-
balisme, si ce n’est un tibia ou fémur humain, travaillé d’après
quelques-uns, et qui d’ailleurs ne prouverait qu’une chose, à
savoir : qu'on n’éprouvail pas plus de répugnance à utiliser un os
humain que les Romains, qui en faisaient des flûtes. Le seul
argument sérieux que l’on n’a pas d’ailleurs présenté, mais que
s'oppose à lui même M. Cartailhac : c’est la prédominence, au
Mail de Penue-Blanco, de femmeset d'enfants, à l’exclusion des
hommes. Gette délicatesse de goût est tout-à-fait dans les usages
des cannibales, C’est le fait remarqué à Chauvaux (Belgique).
M. Jeanbernat, sans exprimer à cet égard son epinion, fait
observer qu'il ne comprendrait pas que les sauvages dont il s’agit,
eussent choisi pour erypte funéraire une cavité si difficilement
accessible.
M. Malafosse répond que les grottes à momies du Pérou sont
bien plus inaccessibles encore.
M. Cartailbac ajoute qu'il serait plus étonnant que des gens
ayant des troupeaux fussent demeurés et cussent pris leurs repas
journaliers à pareille hauteur, Un fait qui a frappé tous les
explorateurs des grottes, c’est qu’il en est un nombre considérable
où l’on trouve des ossements humains plus ou moins entiers, plus
ou moins nombreux. L’imagination peut se donner aisément
carrière pour expliquer la présence de ces vestiges, et c’est après
avoir épuisé la série des causes simples et ordinaires que l'or peut
s'arrêter à une origine spééiale et étrange. Une mort violente,
as RO) 5
nne mort naturelle, la perte d’un membre par accident, l'ense-.
velissement, le transport de ces ossements par l’eau ou par
l'homme, le remaniement, sont des causes qu’il faut avant tout
invoquer. Nous admettrons le cannibalisme quand il expliquera
plus où mieux : lorsque les ossements seront dans des foyers
non remaniés, au milieu des débris de repas et qu'ils seront
manifestement brisés par l’homme comme ceux des animaux qui
ont servi de nourriture. :
Séance du A1 février 1879.
Présidence de M. Fiznoz, président honoraire.
La Société reçoit :
Matériaux pour l'histoire primitive et naturelle de l'homme,
liv. #, janvier 1870.
Après discussion, la Société décide qu’il sera publié dans les”
journaux de la localité un compte-rendu officiel des séances, et
point d’autres.
M. Magnan fait connaître à la Société une des régions les
plus intéressantes des Pyrénées Orientales qu'il vient tout récem-
ment d'étudier au point de vue géologique, région comprise entre
Soulatge et Je Pont de la Fou, près Saint-Paul-de-Fenouillet.
Ainsi que M. Magnan l’a montré, il y a quelque temps (1), du
Milobre de Massac (Corbières) à Soulatge, on peut passer en revue
les quatre étages de la craie moyenne et supérieure; mais t'est
entre Soulalse et le Pont de la Fou que l’on peut observer les
rapports de position de la eraie moyenne et de la craie inférieure
1) Séance da 7 janvier 1870, p. 15 de ce vol.
me CE pie
etles immenses dislocations qui ont donné à ce pays sa physio-
nomie si originale et si pittoresque. G
Au S.de Soulatge on voit le terrain cénomanien reposer en
discordance, tantôt sur le trias, tantôt sur la craie inférieure,
puis entre le col de Brézou (chaîne de St-Antoine-de-Galamus)
et le Pont de la Fou (chaîne de Lesquerde), les couches oolithiques
et crétacées inférieures, former un immense pli en S, qui bute par
faille, d’un côté contre les roches verticales du trias, de l’autre
contre le granite.
Ce pli gigantesque, dont la moitié supérieure a été enlevée par
les agents d’érosion, permet d'étudier par deux fois, en allant du
col de Brézou au Pont de la Fou, les terrains néocomien, aptien et
albien. L’aptien est presque aussi fossilifére qu’à la Clape ; l’albien
est remarquable par l'abondance des corps organisés qu'il ren-
ferme. M. Magnan à retrouvé à Prabas et le long du ruisseau
de San-Crista les ammonites slbiennes qui n'avaient pas été
vues en place depuis que Pailleïte les avait découvertes, il y à
plus de 20 ans, et que d’Orbigny les avait signalées dans son
Prodrome.
La faille qui met directement en contact, au Pont de la Fou, les
terrains granitique et néocomien, faille dont le joint est rempli de
silice ferrugineuse, est, pour M. Magnan, une preuve de plus en
faveur de lopinion qu’il soutient, à savoir : que les Pyrénées ne
sont pas dues à des soulèvements ophitiques où granitiques, mais
bien à d'immenses failles, linéaires, dont une des lèvres est restée
en saillie sur l’autre.
M. Magnan termine en donnant quelques détails sur les brisures
des roches néocomiennes, d’où sourdent les eaux thermo: minérales
du Pont de la Fou.
Répondant à une question de M. Filhol, M. Magnan dit que les
eaux sulfureuses des Pyrénées sortent généralement des terrains
primordiaux et de transition les plus anciens, et les eaux salines
des terrains calcaires (crétacé, jurassique et devonien supéricur ?)
M. Filhol ayant fait observer que les eaux du Boulou sont tout-à-fait
exceptionnelles au point de vue ckimique, puisque elles sont
franchement alcalines, que l’analogie entre les eaux de Luchon
et celles d'Aix, en Savoie, est plus grande qu'entre les eaux de
Luchon et de Barèges, M. Magnan ajoute que la géologie des
terrains anciens n'est pas encore assez avancée pour nya one
de lous ces faits.
M. le professeur Filhol fait passer sous les yeux de la Société
une planche représentant une coupe et une vue de la eavité
cérébrale du Felis spelæa. I entre dans quelques détails à cet
égard et donne les moyennes des chiffres de comparaison des gran-
deurs des os des membres chez le Felis spelæu, le lioncet le tigre.
Séance du 25 février 1870.
Présidence de M. le D' Guirarp président.
Le président annonce une présentation.
La Société reçoit
Journal d'Agriculture pratique el d'Economie rurale, numéros
de décembre et janvier.
Des Cryptes d'approvisionnement à propos de trois souterrains
de Saint-Pau, par M. le Dr J.-B. Noulet, in-8°, 34 p., 1870,
Toulouse (extrait de la R. archéol. du Midi).
De la part de M. le Dr Guitard, des Haricots, venus à Toulouse,
de deux espêces provenant de Pékin et de la Vera-Cruz.
M. C. Fouque entretient la Société de quelques recherches qu'il
a opérées dans les grottes de la Barousse (Haute-Garonne). Une
seule lui a donné des preuves.positives de son occupation à
l’âge de la pierre polie. Un foyer contenait les ossements des
animaux domestiques avec quelques objets travaillés, poinçons en
os, derits percées, poteries. Dans la salle où se trouve ce foyer,
vient aboutir un filet d'eau amené d’une source extérieure à la
grotte par un travail fort simple et qui peut être contemporain de
cetle occupation.
QU Es é
M. H. Magnan, voulant terminer la description des étages qui
se rapportent au groupe de la craie, communique aujourd’hui à
la Société, une Note sur la craie supérieure des Pyrénées et des
Corbières (senonien, craie de Maëstricht, danien, garumnien\.
Notre confrère rappelle d’abord, en quelques mots, ce qu'il a dit
dans deux précédentes séances (p. 8 et 14 de ce vol.), sur la com-
position des terrains de la eraie inférieure (néocomien, aptien,
albien) et de la craie moyenne (cénomanien, turonien). Il appuie
sur le fait important de la disrordance qui existe entré ces deux
terrains et de la concordance que lon remarque, au contraire,
entre la craie moyenne et la craie supérieure, si bien que dans
beaucoup de localités, notamment dans la région occidentale des
Pyrénées, quand les fossiles manquent ou deviennent rares, on ne
sait trop où faire commencer l’une et où faire finir l’autre. C’est
‘dire déjà que, quand elle n’a pas été postérieurement enlevée par
les agents d’érosion, la craie supérieuré se. montre Jà où apparaîl
la craie moyenne et que, comme celle-ci, elle constitue presque
partout, le long de la chaîne pyrénéenne, les basses montagnes,
cest-à-dire les montagnes de 3° ordre.
M. Magnan donne ensuite des détails sur la composition de la
erale supérieure. Il appuie ses dires sur de nombreuses coupes qu’il
a relevées en divers points des Pyrénées, notamment :
Entre Oloron et Cardesse (Basses-Pyrénées) ;
Entre Bagnères-de-Bigorre et Orignac (Hautes-Pyrénées) ;
Entre Saint-Michel et Fabas (Ariége) ;
Eutre Daumazan et Balança (Ariége) ;
‘Entre Alet et Quilian (Aude);
Entre la Roquelongue et l’ancien ermitage de la Vernède, dns
les Corbières (Aude).
D'après notre confrère, la base de cette formation est constituée
partout par des couches argileuses ou calcareuses, plus où moins
puissantes, blanchâtres, grisâtres ou bleuâtres, quélquefois ligni-
teuses, qui contiennent, en bien des points, et quelquefois en
abondance : Ostrea vesicularis, Ananchytes ovala, Inoceramus
Cripsi et regularis, Ammonites gallovillensis, F béées: C7 Ut
en d'autres, les nombreux fossiles du moulin Titus: près de
Rennes-les-Beins.: C’est là l'horizon de la craie de Villedieu, du
bassin de Paris, dont la puissance ‘est très-considérable dans les
Pyrénées occidentales et beaucoup moindre dans les Pyrénées
médianes et orientales. s ie Lolo :
Sur ,ces couches reposent :. d’une part, — dans les Corbières,
dans l’Aude et dans l’Ariége orientale, — des grès psammitiques,
siliceux, jaunâtres, fréquemment zonés, de 450 m. d'épaisseur,
avec argiles subordonnées, à fossiles jndsternsiabhles (Pecten,
Vénus, Mytilus, Cardium), que d’Archiac a rangé parerreur dans
le tertiaire (partie inférieure du groupe d’Alet); d'autre part, —
dans l’Ariége occidentale, la Haute-Garonne, les: Hautes! :et.les
Basses- Pyrénées, — des caleaires jaunes-nankins ou: gristres,
souvent à grains de quartz; calcaires qui renferment en-certains
lieux de nombreux fossiles de la craie de Maëstricht, notamment :
Orbitolites socialis, Hemipneustes radiatus, Nerita nr Ostrea
larva, Janira striato-costata.. |
Les assises détritiques, (grès d’Alet) de l Aude et dé usée
orientale et les calcaires de Maëstricht de l’Ariége occidentale et
de la Haute-Garonne, dont il vient d’être question, supportent
à leur tour, une formation Jacustre (partie supérieure du groupe
d’Alet de d’Archiac, Garumnien.de M, Leymerie), composée de: la
facon suivante : |
À la base, par des grès fortement colorés, rutilants ou jaunâ-
tres ; des sables et des argiles souvent ligniteuses,: couches qui
renferment des débris de Sauriens et de Tortues, la: Cyrena
garumnica, etc. ; et par. des calcaires pisolithiques ou cariés:; !
À la partie supérieure, par des cale :ires compactes, sab-ithogra -
phiques, fréquemment siliceux, qui alternent avec des marnes de
couleur rouge de sang et des poulingues fleuris: Ces ealeaires .
compactes — qui renferment des Physes, des Lymnées, des Palu-
dines, des Cyclostomes, des graines de Chara, — forment, dans
les Corbières, quatre puissantes assises séparées par des marnes
rulilantes, qui se réduisent à une seule dans l'Arsgéi occidentale
et dans la Haute-Garonne. iiq
Ce système lacustre. est recouvert, en concordänre, par des
marnes et des calcaires à Milliolites, base de la formation num-
mulitique; marnes dans lesquelles apparaissent: en: divers points,
avec des fossiles de. l’éocène, quelques fossiles àphysionomie
crétacée, tels que Hemiaster nasululus, Ostrea vesicularis, Vénus
Lapeyrusana.! C'est la colonie, que M. Lcymerie a surtout fait
conpaître dans la Haute-Garonne. oh 4
# LC
— 25 —
L'absence dans la partie occidentale de Ja chaine du terrain
lacustre dont il vient d’être parlé, — car personne jusqu'iri ne
l'y a signalé d’une manière certaine, — permet de croire que des
mouvements lents du sol, mais importants, ont eu lieu pendant la
période crétacée supérieure. Ges mouvements ont fait émerger les
parties orientale et médiane de la basse chaîne, qui ont été recoi-
vertes ensuile par des lacs d’eau douce, pendant qu’à la même
époque des sédiments marins, — continuation, de la craie propre-
ment dite, —se déposaient dans les Hautes et dans les Basses-Pyré-
nées. Cette manière de voir explique aussi pourquoi le terrain
lacustre varie de puissance. En effet, il atteint 5 ou 600 m.
d'épaisseur dans les Corbières, et 4 ou 500 m. à Ufferte, dans
l’Ariéce, tandis qu'il ne dépasse guère 450-m. dans la Haute-
Garonne.
M. Magnan termine en donnant quelques aperçus’ sur le’syn-
éhronisme ‘de : certaines couches W'origine marine et d’origine
lacustre ou d'eau douce, qui entrent dans la composition de la
craie supérieure. Ainsi, pour notre confrère, les argiles séno-
niennes, les grès d’Alet et les calcaires de la craie de Maëstricht,
soutsynchroniques des grès d’eau dauce et des lignites du bassin
de Fuveäu, puisque au-dessus de ces couches om trouve, dons lès
Pyrénées comme en Provence, les bancs à débris de Sauriens ct
de Tortues, et les calcaires lacustres à Physes du Garumnien, et
qu'au-dessous on y rencontre les strates marins du sénonien
inférieur de d'Orbigny à Janira quadricostata et à Ostrea Matli--
royiana. Relativement au groupe d’Alet supérieur ou Garumnien
de M: Leymerie, M. Magnan prétend qu'il s'est déposé-en même
tempsque le caleaire pisolithique de Paris (Danien) et que les
couches à Physa gigantea de Rilly. S'il le place entièrement dans
le terrain dé craie, c’est parce qu'il est surmonté dans la Haute-
Garonne et dans l’Ariége, par des couches contenant des fossiles
erétacés: |
iv:
Séance du 11 mars 18%0,
Présidence de M. le professeur PLa, vice-président.
M. Burrer DEL Mas est nommé membre titulaire, sur la pré:en-
tation de MM. le Dr Cuq et Calmels.
La Société a reçu : ET
Société des sciences et arts de Vitry-le-Français, t. I, 1869. *
Bulletin de la Soriété d'acclimatation, 1. VIE, 4870, liv. de
janvier. | M
La Minerve de Toulouse, liv. de janvier.
Note sur une grotte de Bagnères-de-Bigorre, par MM. Frossard,
in-8°, Bagnères. (Ext. du Bull. de la Soc. Ramond.)
M. Maine lit la note suivante : |
M. le président Guitard nous a présenté, dans la dernière séance,
quelques Haricots provenant de pieds nés à Toulouse de graines
apportées de Pékin,
Je me souviens avoir récolté moi-même, depuis une dizaine
d'années, des graines semblables sur une plante d'ornement con-
nue sous le nom de Haricot Mexicain et cultivée dans le jardin de |
mon père, à Saint-Louis (Haut Rhin). Je mets à la disposition de |
l1 Société une quinzaine des Haricots de cette provenance. Ils sont
un peu plus noirs et un peu plus petits que ceux qui mous ont
été présentés.
La plante, très-vigoureuse, atteint jusqu'à 3 ou # mètres: Sa
tige est couverte de stries en spirale très-rudes ; toute la plante,
tiges, pétioles, pédonsules et feuilles, très-rude au toucher, est
d’une couleur pourpre carminée assez vive ; le dessus des feuilles
est vert sombre rongeâtre, le dessous, franchement rouge, est cou-
vert d’un réseau de stries plus claires et plus brillantes.
L'inflorescence est surtout curieuse. Le long d’un pédoncule
commun de 45 à 20 centimètres, sont disposés 4 ou 5 verticilles de
bourgeons unis par la base et dépassés par le rachis du pédoncule.
De ces bourgeons sortent, toute l’année, des fleurs lilas tendre qui,
ot he. nos Ro dt +
Cne BNT T L
en vieillissant, virent au violet bleuâtre, puis livide. Dès que quel-
ques fleurs tombent ou meurent, elles sont remplacées par d’autres
qui sortent du bourgeon ou mamelon commun. La plante est ainsi
toute l'année en fleurs et en fruits.
Si mes souvenirs sont fidèles, la fleur n’a pas l'aspect débraillé
de celles des vrais phaséolns. Les ailes sont bien serrées contre la
carène, et l’étendard, maintenu par un calice serré et montant, ne
s’en écarte pas beaucoup non plus.
Le sivle élargi latéralement est incliné vers le milieu de la
gousse. Celle-ci est très-large, mais non gonflée, charnue, et d’un
pourpre très-vif qui, mêlé au lilas des fleurs, produit le plus char-
mant effet. Quand la maturité approche, elle passe au violet, puis
äu vineux el enfin au brun. Elle est alors sèche, les parois se sont
séparées et les graines, au nombre de 4 ou 5 seulement et très-
écariées, sonnent quand on agite le fruit.
Si la plante devient jamais alimentaire, je pense qu'il y aurait
intérêt à ne manger la gousse que lorsqu'elle est très-jeune. Je
n'ai Jamais vu faire d'essais dans ce sens. |
La plante aime les expositions chaudes et les terres bien fumées.
À Saint-Louis, je l’ai toujours vue tomber et périr dès les premié-
res gelées.
M. E. Cartailhac demande si le moment ne serait pas opportun
pour solfñeiter une réforme de l’enseignement des sciences natu-
relles dans l'instruction secondaire. Il expose en jeu de mots
l'état pitoyable de eet enseignement, et l'évidente nécessité d’une
amélioration sérieuse. Il dit que l'opinion publique se manifeste
dans ce sens d’une facon éclatante, et il ne doute pas que les
autres Sociétés savantes, qui gémissent loutes sur l'ordre de choses
actuel , ne donnent leur adhésion aux réclamations et aux
démarches dont la Société d'Histoire naturelle prendrait l'ini-
liative.
La Société approuve à l’unanimité la pensée de M. Cartailhae, et
charge d'étudier la question une commission ainsi composée :
MM. le Dr Clos, membre honoraire ; Dr Gourdon, D* Jeanbernat,
‘V. d'Adhemar, M. Lacaze, H. Magnan, L. de Malafosse.
RE Ga
Séance du 235 mars 4970.
Présidence de M. le D' Guitar», président. :
Le président annonce une présentation.
La Société reçoit :
La Minerve de Toulouse, liv. de mars 1870.
Bulletin de la Soc. de climatologie algérienne, 6° année, 1869,
n°s 4, 5 et 6. |
Bulletin de la Soc. d'Histoire naturelle de Colmar, 10e année.
1869. |
Revue médicale üe Toulouse, mars 1870.
Programme du Congrès des sciences géographiques à Anvers.
M. Cartailhac, rapporteur de la commission nommée pour
l'étude de la question de l'enseignement de l’histoire naturelle,
soumet la pétition suivante à l'approbation de la Compagnie :
« Monsieur le Ministre,
» C’est le devoir de ccux qui tiennent en honneur les Sciences
noturelles de les propager et de les défendre, et nous ne pouvons
larder plus longtemps à appeler sur le triste sort qui leur est
dévolu dans l’enseignement secondaire, l’attention toute puissante
de Votie Excellence, — Les Sciences de la nature ont merveilleu-
sement grandi et es même temps, chose étrange ! la part qui leur
était attribuée dans les programmes des deux Baccalauréats (com-
plets) a été sans cesse restreinte, enfin effacée !
» Nous n'avons pas à nous constituer les avocats d’une cause
depuis longtemps gagnée, mais il nous sera permis de dire que ces
Sciences méritent aujourd’hui l’un des premiers rangs. Elles nous
font connaitre nous-mêmes ; elles nous mettent en communication
avec la nature entière, avec la terre que nous devons exploiter, les
animaux et les végétaux au milieu, et aux dépens desquels nous
devons vivre. Incapables de faire un pas en arrière, elles ont
se QUE
l'avantage de pouvoir étendre à tout, le genre de certitude dont
elles sont susceptibles, et qui résulte de l'observation et de
l'expérience.
» Cuvier se méprenait-il, lorsqu'il leur reconnaissait le privilége
de répandre des idées saines jnsque dans les classes les moins éle-
vées du peuple, de soustraire les hommes à l'empire des préjugés
et des passions, de faire de la raison l'arbitre et le guide suprême
de l'opinion publique, et ainsi de concourir dans une large mesure
à avancer la civilisation ?
» Il n’est pas entré dans la pensée de ceux qui ont muulé les
programmes de l’enseignement secondaire de contredire ces vérités,
puisqu'ils ont fait à l’histoire naturelle une large mais légitime part
dans l’enseignement professionnel et dans l’instruction primaire.
Ces connoissances, d’ailleurs si atirayantes, ne seraient-elles pas
encore mieux placées dans les études classiques (1)? La moralité
des élèves affermie, leur intelligence fécondée, la sphère de leurs
idées agrandie, leur imagination nourrie et vivifiée, voilà, ce
semble, quels seraient les p'emiers bienfaits.
» Ensuite, sortis des colléges, l’homme du monde, l’agriculteur,
l'industriel, tous enfin retireraient une incontestable utilité des
notions sérieuses qu'ils y auraient acquises, et qu'ils n’ont, en
général, ni le loisir, nila possibilité de recevoir dans les facultés.
Nous ne demanderons pas, il importe de le dire, que l’on fasse des
naturalistes, nos vœux sont modérés et réalisables, nous souhai-
tous seulement que, par un enseignement un peu étendu, le goùt
puisse être inspiré, et la voie tracée pour des études approfondies
et Hbrement entreprises aussi bien dans l'intérêt général que dans
celui de lindividu. Car il n’est pas ur mot des sciences de
l’homme, des animaux, des plantes, du sol qui ne puisse être la
source d'avantages journaliers et de mille inventions usuelles ;
(1) Peu de personnes ignorent que, d’après les programmes universitaires,
2% leçons devraient être faites sur l’histoire naturelle (24 leçons pour toutes
les sciences naturelles !) et cela dans l’espace d’un semestre si le professeur le
veut. En général, il n’est pas possible de consacrer plus de 15 leçons à ces
études. Ajoutez que ce cours est insuffisant pour les élèves qui se préparent aux
examens des écoles Centrale ct de Strasbourg, ct que, dépourvu de la sanction
du Baccalauréat, il est négligé par les autres. — L'examen du Baccalauréat
restreint, qui porte sur l'histoire naturelle, n’est accessible qu'aux étudiants en
médecine,
ER
c'est là, en effet, le secret du goût profond que nourrissent, pour
les sciences naturelles, les: peuples les plus affairés et les xt
avares de leur temps.
» Si nous envisageons la question à un autre point de vue, nous
trouverons que les sciences elles-mêmes ont le plus grand intérêt
à celte vulgarisation ; sans doute, les savants, devenus cependant
plus rares, ne manqueront pas; mais, quels services nembreux et
considérables les ingénieurs, les soldats, les marins. surtout ne
readraient-ils pas à la science !
» Nous invoquerons, enfin, une dernière considération : mieux
instruit de la Rat pie de leurs eflorts et de leur succès, le publie
honorerait et respecterait davantage ces hommes: livrés à l’étude
de la nature, sans cesse occupés d’éclairer Jeurs. semblables et
d'élever l’espèce humaine à ces vérités générales qui forment son
noble apanage et d'où découlent tant d'applications utiles.
La pétition étant adoptée, le Secrétaire général est invité à la
faire connaître aux Sociétés savantes, en ces termes :
« Monsieur et très-honoré confrère,
La Société d'Histoire naturelle de Toulouse se propose de
inettre sous les veux de Son Excellence Je Ministre de l'fnstruc-
tion publique la pétition suivante : mais elle a pensé que, maloré
les excellentes raisons qui militent en faveur d’une trop juste
réclamation, le vrai moyen d’en assurer le succès, c’est d'obtenir
le concours des Sociétés scientifiques de France.
» Elle ose espérer que votre savante Compagnie, pleine de
ièle pour l'avancement des -ssiences naturelles, accueillera avec
empressement l’occasion de leur rendre un véritable service. En
présence de la situation faite aux Sciences qui nous sont chères à
tant de titres, une protestation aussi légitime que modérée de la
part des corps les plus autorisés sera écountée, nous n'avons pas le
droit d'en douter. »
ER: GUERRE
Séance du S avril 18%0.
Présidence de M. le professeur Pca, vice-président.
M. L. Jour, ingénieur des poudres, est nommé membre titu-
laire, sur la présentation de MM. Guïtard et Magnan,
La Société reçoit :
Revue agricole du Midi, 4e avrit 4870.
M. Pevre, qui dans la dernière séance avait été chargé d'étudier
lé programme provisoire du Congrès international pour le pro-
grès des sciences géographiques, cosmographiques et commerciales
qui s'ouvrira à Anvers, au mois d'août 4870, fait valoir les motifs
qui doivent engager la Sociélé à s’assucier à celte œuvre, et lui
propose de donner son alhésion et de souserire pour un exem-
plaire du volume des Comptes-rendus. Ces propositions sont
adoptées.
M. H. Magnan donne un apereu de la constitution géognostique
de la vallée du Ger, vailée qu'il vient récemment de parcourir avee
M. le D' Jeanbernat. |
Des bords de la Garonne, sous le parallèle de Miramont jus-
qu’au sud de Lespiteau — où passe la grande faille E. O. qu'il à
désignée dans un travail des Petites Pyrénées de l’Ariége (4) sous
le nom de faille de l’Arize, — ce sont Îles couches détritiques,
vréseuses et schisteuses de la craie cénomanienne (conglomérat
de Camarade), qui jouent le rôle important. Ces couches sont
recouvertes, en bien des points, par des dépôts diluviens de
différents âges.
Entre Soueich.et Campagne apparaissent les montagnes conoïdes
(4) Bull, de la Société géologique de France, 2 sér., 1. XXV, p. 720 ; 1868,
— 32 —
et pyramidales de l’ élage albien. Une 2 faille met en contact cet
étage avec les daloinies bréchoïdes, les schistes et les calcaires
variés du lias, à fossiles assez nombreux en certains points. Le
lias incliné en divers: sens et :l’oolithe se développent jusqu’au
pont de Giret (sud d’Aspet), où une 3° faille E. O0. (faille de
Castelnau de Durban) fait apparaître le terrain cambrien, avec ses
eurites et les roches granitiques décomposées. sic
Le système cambrien est ici très-intéressant à étudier parce
qu'il offre, notamment près de Coué-de-Casse, des alternances
de granites-gneiss, avee petits banes de schistes euritiques.
On le suit sur plusieurs kilomètres de longueur jusqu'à Heone-
morte, où un accident grandiose, fait réapparaitre les groupes du
jurassique, aux couches très-bouleversées, groupes qui butent
d'un côté contre le système cambrien et primordial, dont il
vient d’être parlé, et de l’autre contre uu terralu très-curieux qui
s'étend du pont de la Houle à Couledoux, Costo de la Moloet au-
delà, sur la rive droite du Ger. Ce terrain, — formé de calcaires
marmoréens, de schistes graphitiques, de calcaires.variés plus. ou
moins cristallins, de brêches jaune pâle, à grands éléments, de
lherzolite et d’ophite, — qui avait été d’abord désigné pan, de
Lipeyrouse et de Charpentier, sous le nom de calcaire primitif,
puis elassé par lès auteurs de la carte géologique de la France, et
par M. Leymerie, dans le jurassique métamorphique, est rangé.
par M. Magnan dans le terrain de transition, parce qu’en certains
points de la chaîne , il se lie d’une manière intime , comme
ii d’ailleurs, avec la partie supérieure du système devonien
(gorges 'de l'Aude au sud du pont de Baïra et gorges de la Guette
(Aude) ; montagnes de Prades (Ariége), et “montagnes d'Aulus
et de l'étang a Lherz (id.); Cap det Mount de Sainit-Béat et
montagne d’Arri (Haute-Garonne); environs de Sost (flautes-’
Pyrénées) et de Ferriéres, vallée d’Asson (Basses-Pyrénées).
M. Magnan présume que la petite rivière du Gér coule dans
une faille N. S., quiéerait perpendiculaire à celles dont il a été
fait mention. Cette faille méttrait en contact le terrain de transi-
lion (jurassique métamorphique dés auteurs) dont il vient d’être
question avec le terrain crétacé inférieur du massif de Cagire et
des montagnes au nord de Gér-de-Boutx et du c6l de là Clin
(rive gauche du Ger), où 1 à tout dernièrement reconnu l'exis-
tence du néoromien supérieur. |
Notre confrère se propose d’ailleurs, d’ier à quelque temps, à
la suite d’une nouvelle exploration, de compléter l’esquisse géo-
gnostique de cette curieuse région.
M. Magnan termine en disant quelques mots de certains phéno-
mènes glaciaires très-intéressants, que M. le D' Jeanbernat et
lui ont observés entre le col de Menté et Saint-Béat, et entre cette
ville et Montréjeau. Ces phénomènes permettent d’affirmer
l’existence d’un ancien etimmense glacier, dont les moraines
latérales et profondes ont été démantelées presque partout, par les
agents d'érosion de la période diluvienne. C’est au nord et à
l’ouest de Montréjeau, dans le grand plateau de Lannemezan, qu’il
faut chercher, d’après M. Magnan, la vraie moraine frontale des
anciens glaciers réunis de la Garonne et de la Neste.
Séance du 22 avril 4870.
Présidence de M. le professeur PLa, vice-président.
La Société a reçu une lettre de M. Cabié, qui explore avec le
plus grand soin la région de Roquesérière et de Saint-Sulpice-de-
la-Pointe. M. Cabié a trouvé sur la rive gauche du Tarn, au lieu
dit Teyssode, une ou même deux stations de l’âge de la pierre, sur
le penchant faiblement ineliné d’une colline miocène. De nom-
breux débris de silex se remarquent à la surface du sol; mais en
général ce ne sont que des fragments informes, rejets de fabrica-
tion. [1 y a quelques mois, en défonçant le terrain, on trouva à
ui pied environ de profondenr, un groupe de grandes lames de
silex, dont les cinq ou six plus belles furent recueillies et que
M. Cabié à pa se procurer. Leur longueur, qui atteint 22 centi-
mêtres sur 4 de large en moyenne, est exceptionnelle. Elles ne
sont pas retouchées et le silex est complètement blanchi par la
3
— 34 —
patine. Un grand double grattoir contribue à ne pas laisser de
doute sur l’âge de ces antiquités. Il faut les rapporter à la période
archéolithique et à la fin de l’âge du renne.
M. le D' Gourdon donne quelques détails sur le relief du
Mont-Blanc que vient de terminer M. l'ingénieur Lezat. ‘Cette
œuvre remarquable, pour l'exécution de laquelle l’auteur a tiré
grand parti de l’excellente carte du capitaine Mieulet, embrasse,
outre la partie centrale du massif du Mont-Blanc et le bassin de la
Mer de Glace, une partie des vallées de Chamounix, de Saint-
Gervais et de la Doire, et la portion de la chaine des Aiguiiles
rouges qui se termine au Brevent, le point de vue le plus favorable
pour embrasser l’ensemble du Mont-Blanc. M. Gourdon expose
brièvement les procédés employés par M. Lezat.
Le secrétaire-général communique de la part de l’auteur la
note suivante :
Documents relatifs à la connaissance de la partie inférieure du
terrain de craie (néocomien, aptien, albien) des Pyrénées
françaises et des Corbières, et à certaines critiques faites
par M. Leymerie, à propos de ce terrain et des étages du
muschelkalk et du zechstein dans le Tarn et l'Aveyron, par
M. Herr MaGnan.
J'ai eu l'honneur d'entretenir à diverses reprises la Société
d'Histoire naturelle de Toulouse de mes recherches dans les
Pyrénées françaises et dans les Corbières à l'égard du terrain de
craie (1). Je crois devoir, pour la tenir au courant de cette ques-
tion et en attendant qu’un travail d'ensemble que je prépare sur
le sujet et que je destine à la Société géologique de France soit
achevé, faire connaître à mes confrères divers documents qui se
rapportent à ce terrain, et à un récent débat qui s’est élevé
entre M. le professeur Leymerie et moi à ce propos, et à propos
aussi des étages du muschelkalk et du zechstein, dont j'ai le pre-
(1) Bulletin de la Société d'Histoire naturelle de Toulouse, 1, IV, p. 8,
14, 31 ; 1869-1870.
MAR
mier signalé l'existence dans les départements du Tarn et de
l'Aveyron.
Voici, dans leur rang d’ordre, les documents que je tiens à
faire passer sous les yeux de la Société d'Histoire naturelle de
Toulouse :
19 Une Note que j'ai adressée à M. Daubrée, membre de
l’Institut, le mois de février 1870, qui a été présentée par ce
savant, à l’Académie des sciences, dans la séance du 7 mars 14870,
et dont les conclusions seules, ont élé imprimées dans les Comptes
rendus (1). Gette Note est intitulée : Sur Le terrain de craie des
Pyrénées françaises et des Corbières, et notamment sur la partie
inférieure de celte formation (néocomien, aptien, albien) ;
20 L’extrait d’une lettre adressée par M. Leymerie à M. Elie
de Beaumont, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences,
insérée dans les Comptes rendus de l'Institut, dans la séance du
28 mars 1870 (2), sous le titre suivant : Observations sur les
conclusions formulées récemment par M. Magnan sur le terrain
crétacé inférieur des Pyrénées. Dans cette lettre, M. Leymerie
critique mes conclusions à propos de ce terrain, ainsi que certains
passages de mon travail, imprimé dans le Bulletin de la Société
d'Histoire naturelle de Toulouse, intitulé : Etude des formations
secondaires des bords S. O. du plateau central de France, entre
les vallées de la Vère et du Lot (3):
30 La réponse à cette lettre que je crus devoir, dans l'intérêt
de la science et de la libre discussion, adresser le 16 avril 1870,
à M. Daubrée ; elle est intitulée : Réponse aux observations de
M. Leymerie à propos du terrain de craie des Pyrénées fran-
çcaises et des Corbières et des étages du muschelkalk et du zechstein
dans le Tarn et l'Aveyron. Je dois ajouter qu’elle ne fut pas
communiquée à l’Académie des sciences et qu'elle est restée, par
suite, entièrement inédite.
(1) Comptes rendus de l’Institut, t. LXX, p. 537.
(2) Comptes rendus de PInstitut, 1. LXX, p. 694.
(3) Bulletin de la Société d'Histoire naturelle de Toulouse, 1. HE, p. 5;
1869.
=: OS
Sur le terrain de craie des Pyrénées françaises et des Corbières,
et notamment sur la partie inférieure de cette formation
(néocomien, aptien, albien), avec trois coupes (PI. D), (1),
par M. H. Magnan.
J'ai fait voir en 1868 (2) que le terrain de craie du versant
nord de la chaîne pyrénéenne se divisait en deux grands groupes
bien distincts, discordants l’un par rapport à l’autre : le groupe
de la craie inférieure (néocomien, aptien, albien); le groupe de
craie moyenne et supérieure (cénomanien, turonien, sénonien,
garumnien ou danien). J'ai surtout montré qu’on pouvait différen-
cier chacun des étages du groupe inférieur, quoiqu'ils eussent
quelques fossiles communs.
Deux coupes que j'ai relevées tout récemment, en venant
corroborer mon opinion, m'ont fixé sur le véritable plan de
séparation des terrains aptien et albien, et sur l’énorme puissance
de ce dernier étage. Une troisième montre à quel point, dans la
Haute-Garonne, les couches de la craie inférieure sont disloquées
et faillées. Lt à
La première coupe (3) a éié faite entre Tuchan, Vingrau et
Rivesaltes, dans les Corbières ; sa longueur est de 20 kilomètres.
C’est la plus simple que je connaisse pour l’étude de la craie
inférieure. Elle a été relevée perpendiculairement à la direction
moyenne des Corbières, c’est-à-dire du nord-ouest au sud-est.
En suivant le chemin qui unit Tuchan à Rivesaltes, on rencon-
tre, après le diluvium de la plaine, de puissantes couches poudin-
giformes et argileuses appartenant au terrain tertiaire, qui se
(1) Les coupes graphiques de la pl. I, ont été copiées sur celles qui accom-
pagnaient la note par moi adressée à M. Daubrée ; elles ont été dressées avec
le plus grand soin à l'échelle de 75-455 pour les distances horizontales et pour
les hauteurs.
(2) Comptes rendus, t. LXVI, p. 1209. — Bulletin de la Société géologique
de France, 2e série, t, XXV, p. 709.
(3) PI. I, fig. 1.
Note de Mk Henri
MMA G NA NE
Ball de le Seerète d'Histoire Naturelle de Tiuloure, LI PLI,
Tachan Re de Deneuve
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Carnigue au MonSbBernand
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Coupe dans les Corbières entre Tuchan et Rivesaltes
Vingra Fas-de UEchelle
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Mas Caffard
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Fi 2 — Coupe entre le massif de Monthoumet et Ja chaîne de Lesquerde (£Pyr.
Giraire
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S'Antomede Ca Suulatge Berg
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trouvent en contact, dès avoir dépassé la bergerie de la Coste-
Longue, avec une nouvelle série essentiellement composée de
calcaires et de schistes.
À part un plissement en S à la bergerie du Pas-del-Tréou, les
couches de cette série s’inciinent constamment vers la mer Médi-
terranée, c’est-à-dire au sud-est, elles se recouvrent les unes les
autres comme les tuiles d’un toit. On passera donc successivement
en revue : | |
À. Calcaires gris ou bleuâtres, compactes, marmoréens, comme
corrodés à l'extérieur par les eaux, et calcaires plus ou moins
fétides, renfermant, en certains bancs, de nombreuses Caprotines
(C. Lonsdalii), des Huitres de petite taille, des Polypiers, des
Oursins (Cidaris Pyrenaica) , des Brachiopodes (Terebratula
sella), des Nérinées, etc. Ces calcaires, qui constituent la garrigue
du mont Saint-Bernand, ont 2 ou 300 mètres d'épaisseur ; ils
représentent le néocomien inférieur.
B. Un peu avant d'arriver à la bergerie du Pas-del-Tréou,
calschistes et schistes noirâtres, alternant avec des calcaires de
même couleur, à grain fin, souvent fétides; calcaires gris, bleuà-
tres, variés, veinés, marmoréens. Ces diverses couches, qui ont
450 mètres de puissance, contiennent en abondance les fossiles
du néocomien supérieur (urgonien) et de l’aptien, notamment :
Belemnites semicanaliculatus, Ostrea aquila, O. macroptera, Tere-
bratula prælonga, Rhynchonella lata et nuciformis, Terebratella
Delbosii, Cidaris Pyrenaïca, Diplopodia Malbosü, Orbitolina
conoidea et discoidea, Caprotina Lonsdalii, Serpula, etc. (4).
C,. A la bergerie du Pas-del-Tréou, calschistes gréseux, schistes
cris, verdâtres et sableux, avec bancs assez résistants, qui sont
suivis par des schistes noirâtres, légèrement jaunâtres par décom-
position avec calschistes subordonnés. Ces couches, un moment
interrompues par le pli en S dont j'ai parlé, qui fait reparaitre
les calcaires B au Pas-del-Tréou, se développent ensuite large-
ment dans le bassin de Vingrau, où ils constituent des sortes de
cônes et des mamelons arrondis. Ce système contient quelques
(1) Ce système B représente les couches de la petite montagne de la Clape,
près de Narbonne. La Clape n’est donc, on peut le dire, qu'un chapitre
intéressant du livre de la craie inférieure des Pyrénées, chapitre autrefois isolé
que l’on pourra mettre, à l’avenir, à sa vraie place.
US =
fossiles de l’albien : Nucula bivirgata, Discoidea conica, Belem-
nites minimus, Ammonites ind.
C;. Du Pas-de-l'Echelle, à l’est de Vingrau, jusqu'au Mas-
Gaffard, énorme série formée de calcaires gris, bleuâtres, marmo-
réens, à Caprotines, ressemblant à ceux du néocomien et de
l’aptien, mais s’en distinguant en ce qu’ils alternent avec de puis-
santes brèches calcaires de couleur pâle, avec des calcaires-
marbre d’une blancheur éclatante et avec des calcaires gris-rosés.
Cà et là, indépendamment des Caprotines, traces d'Huitres et
autres fossiles indéterminables. Ces diverses roches, qui sont à
l'extérieur comme corrodées par les eaux, constituent une
des régions les plus arides et les plus sauvages de la France
méridionale.
C3. Du Mas-Gaffard au Mas-Besombes, schistes terreux, gré-
seux, jaunâtres, verdâtres, rougeâtres, comme ophitisés, avec
petits bancs de calcaires subordonnés et schistes noirs un peu
micacés , passant à des schistes ardoisiers. Pas de fossiles.
Ces schistes sont recouverts par le diluvium de la plaine de
Rivesaltes.
On peut évaluer au moins à 1500 mètres la puissance des cou-
ches C;, C+, C3, qui représentent l’étage albien. Les calcaires ont
à peu près 500 mètres d'épaisseur.
La deuxième coupe (1) a été prise du nord au sud, entre le massif
de transition de Monthoumet et la chaîne de Lesquerde (Pyrénées-
Orientales), par le Milobre-de-Massac, Soulatge et Saint-Paul-de-
Fenouillet; elle est perpendiculaire à la chaîne pyrénéenne.
C'est une des coupes les plus intéressantes que l’on puisse faire
dans nos montagnes, si l’on veut étudier la plupart des étages de
la craie et leurs rapports de position; sa longueur est de 45 kilo-
mètres. |
De la base du Milobre--de-Massac à la rivière du Verdouble,
on observe les quatre étages de la craie moyenne et supérieure
(cénomanien, turonien, sénonien , grès d’Alet). Ces divers étages
(presque essentiellement composés de roches détritiques, légère-
ment inclinées au sud) se recouvrent l’un l’autre en concordance
parfaite. Le plus inférieur, le cénomanien, représenté par des
(1; PL. L fig. 2.
— 39 —
grès et par un calcaire à Caprinella , repose sur le terrain de
transition. | |
Des failles multiples font reparaître le turonien et le céno-
manien après le Verdouble. Près de la métairie d’En-Jarnedy
(sud-est de Soulatge), la base de ce dernier étage est constituée
par des schistes gris alternant avec des dalles gréseuses, à em-
preintes végétales, et avec des calcaires subordonnés à Caprina
adversa, Radiolites de grande taille, Polypiers, Oursins, Hui-
tres, etc. Ces roches reposent en discordance tantôt sur le néoco-
mien, tantôt sur les calcaires veinés, les cargneules et les marnes
gypseuses, colorées, du muschelkalk.
Au Col-de-Brézou (chaine de Saint-Antoine-de-Galamus), les
roches triasiques sont en contact par faille avec des couches appar-
tenant à l’oolithe et à la craie inférieure , lesquelles forment un
immense pli en S dont la moitié supérieure a été enlevée par les
agents d’érosion, pli qui bute par faille, d’un côté contre les roches
verticales du trias dont je viens de parler, de l’autre contre le gra-
nite de Lesquerde, ce qui permet d'étudier par deux fois, en allant
du Col-de-Brézou au Pont de la Fou, près Saint-Paul-de-Fenouil-
let, les couches néocomiennes, aptiennes et albiennes À, B, C;,
de la coupe de Tuchan à Rivesaltes. Les premières, qui constituent
les chaînes parallèles de Saint-Antoine-de-Galamus et de Les-
querde , reposent au Col-de-Brézou sur les dolomies fétides et les
brèches foncées de l’oolithe : leur épaisseur est de 400 mètres ;
les secondes sont presque aussi fossilifères qu’à la Clape; les
troisièmes sont remarquables par l’abondance des fossiles qu’elles
renferment. J'ai étudié , au point de vue stratigraphique, le gise-
ment des Plicatula radiola et Nucula bivirgata, signalé par
M. E. Dumortier, et j'ai retrouvé à Prabas et près du ruisseau de
San-Crista les espèces albiennes (Ammonites Milletianus, Cardita
lenuicosta, etc.), qui n'avaient pas été vues en place depuis que
Pallette les avait découvertes et que d’Orbigny les avait signalées
dans son Prodrome.
La troisième coupe (1) va de Saint-Gaudens (Haute-Garonne) au
sommet du pic de Cagire, par Encausse et Juzet-d’Izaut. Sa direc-
tion est nord-sud. Sa longueur est de 20 kilomètres.
Elle permet de voir que le petit massif d’Asprets et de Miramon{
(1) PL LL, fig. 3.
: Hp
est formé par des lambeaux de terrains aptien , néocomien et de
transition, qui sont souvent en contact avec les argiles grises à
dalles et les conglomérats plus ou moins incohérents du cénoma-
nien inférieur (mon conglomérat de Camarade). La faille de l'Arize
fait apparaître à Encausse les calschistes et les schistes albiens,
affectant, ici comme à Vingrau et à Saint-Paul-de-Fenouillet, des
formes coniques. Ces couches, probablement courbées en S ren-
versée , s’observent jusqu’à Izaut-de-l'Hôtel. Entre ce village et
Arbon, se montrent les caleaires-brèches du même étage. À Arbon,
une deuxième faille met en contact ces calcaires-brèches avec des
roches oolithiques , liasiques et triasiques. À Juzet-d’Izaut, une
troisième faille existe; elle fait réapparaître, dans le massif de
Cagire, le néocomien inférieur à Caprotines et à Nérinées (eouches
A de la garrigue du mont Saint-Bernand et des chaînes de Saint-
Antoine-de Galamus ct de Lesquerde), ainsi que les dolomies
noirâtres, fétides, de l’oolithe.
La conclusion qu’il est permis de tirer de ces coupes et de celles
que j'ai antérieurement publiées sur les Pyrénées est celle-ci :
Les étages néocomien, aptien et albien ont chacun une litho-
logie et une faune particulière, quoique possédant quelques fossiles
communs; ils sont recouverts en discordance par le cénomanien.
Il devient done impossible de réunir ces divers terrains dans un
même groupe, et d'adopter le nom de grés vert ou d’urgo-aptien,
proposé tout récemment par M. Leymerie pour les désigner (4) :
ce serait, à la fois, confondre ce qui est nettement séparé et
annihiler les étages néocomien et albien, qui, nous venons de le
voir, jouent un si grand rôle dans les Pyrénées.
Il
Observations sur les conclusions formulées récemment par
M. Magnan, sur le terrain crétacé inférieur des Pyrénées.
— Lettre de M. Leymerie à M. Elie de Beaumont.
« Je viens de lire les conclusions prises par M. Magnan à
l’égard de la question du terrain crétacé inférieur des Pyrénées
(1) Comptes rendus, t. LXVII, p. 82. — Bulletin de la Société geologique de
France, 2e série, t. XXVI, p. 277.
TS
CHU
(Compt. rend., p. 537 de ce volume). Ces conclusions étant
tout-à-fait opposées à celles que j'ai cru pouvoir tirer de l'ensem-
ble de mes observations, dans un Mémoire que j'ai soumis à
l’Académie il y a peu de temps, veuillez me permettre de faire ici
une courte réplique.
» Je ne reviendrai pas sur les considérations qui se trouvent
largement développées dans mon travail ; je me bornerai à faire
remarquer qu'il ne suffit pas, pour établir l’existence d’un terrain
dans une région, de signaler, en quelques points, la présence de
fossiles plus ou moins caractéristiques. Il faut que ce terrain ait
un corps, c’est-à-dire qu’il puisse être distingué physiquement par
des caractères qui permettent de le suivre dans une étendue suf-
fisante et d’en tracer les limites sur une carte. Or, je ne pense pas
queces conditions soient remplies notamment pour l'étage albien
que M. Magnan voudrait introduire dans notre chaîne. L'époque
albienne peut s’y trouver ; mais le terrain n’y est pas.
» Je ferai la même objection contre l’admission du muschelkalk
et du zechstein dans le Tarn et l’Aveyron. L'existence de ces étages
n’a été établie par M. Magnan que sur la présence toute locale de
quelques couches ou amandes calcaires ou dolomitiques, qui ne
sont pour moi qu’un accident du grès rouge. Je ferai remarquer, à
cet égard , que le grès rouge pyrénéen est tellement identique à
celui qui forme bordure vers le sud du plateau central, qu'il
semble évident qu'ils ont été déposés à la même époquect dans
le même bassin. Or, ce qui serait muschelkalk dans l’un ne pour-
rait être zechstein dans l’autre. »
Il
Réponse aux observations de M. Leymerie à propos du terrain
de craie des Pyrénées françaises et des Corbières et des étages
du muschelkalk et du zechstein dans le Tarn et l'Aveyron, par
M. H. Magnan.
Dans une récente note Sur le terrain de craie des Pyrénées fran-
gaises et des Corbières (Compt. rend., vol. LXX, p. 537), j'ai
dit, en m'étayant sur plusieurs coupes, que l’étage albien a, dans
notre chaîne, une puissance considérable, et j'ai été notamment
—s 110) —
amené à conclure que les étages néocomien, aptien et albien ont
chacun une lithologie et une faune particulière quoique possédant
quelques fossiles communs.
Cette note m'a valu dans les Comptes rendus (p. 694 du même
vol.) une réplique de M. Leymerie, d’où j'extrais le passage
suivant :
« Je me bornerai à faire remarquer qu’il ne suffit pas, pour
» établir l’existence d’un terrain dans une région, de signaler, en
» quelques points, la présence de fossiles plus on moins caracté-
» ristiques. Il faut que ce terrain ait un corps, c’est-à-dire qu’il
» puisse être distingué physiquement par des caractères qui per-
» mettent de le suivre dans une étendue suffisante et d’en tracer
» les limites sur une carte. Or, je ne pense pas que ces conditions
» soient remplies notamment pour l'étage albien que M. Msgnan
» voudrait introduire dans notre chaîne. L'époque albienne peut
» s’y trouver; mais le terrain n’y est pas. »
Ayant communiqué à M. Leymerie les coupes graphiques qui
accompagnaient ma note, ces dires ont tout lieu de me surprendre;
car ces coupes permettaient de juger d’un coup d’œil du rôle im-
portant que jouait le terrain albien dans les Corbières, dans les
Pyrénées-Orientales et dans les Pyrénées de la Haute-Garonne.
La note dont il est question, n’ayant été insérée qu’en extrait
dans les Comptes rendus, on me permettra, en réponse aux obser-
vations du savant professeur de Toulouse, de dire quelques mots
sur la puissance et la composition de l'étage en discussion.
L’étage albien, qui partout où il a été jusqu’à ce jour reconou
n’a qu’une très-pehte épaisseur , atteint, au contraire, dans les
Pyrénées et dans les Corbières, une puissance énorme : au moins
1,500 mätres. Il repose directement sur les calcaires, les schistes
et les calschistes à Ostrea aquila,|Orbitolina discoidea et conoidea
de l’aptien, étage qui ne dépasse guère 200 mètres et qui repose,
à son tour, sur les calcaires marmoréens à Nérinées, à Caprotines
et à Terebratula sella du néocomien proprement dit, dont l’épais-
seur peut être évaluée à 3 ou 400 mètres,
Le terrain albien est constitué de la manière suivante :
Ao A la base, par des calschistes et des schistes noirâtres, sou-
vent rougeâtres par décomposition, avec bancs résistants de cal-
caires tenaces, siliceux, comme un peu gréseux, qui contiennent
d’abord : Belemnites minimus, Nucula bivirgata, N. pectinata,
PRE) 2 PDP
Plicatula radiola, Discoidea conica, etc., mélangés avec quelques
espèces aptiennes : Cidaris Pyrenaica, Echinospatagus Collegnit
(env. de Vingrau, base des chaines de Saint-Antoine-de-Galamus
et de Lesquerde, sud d’Axat, env. de Quillan, env. de Foix et de
Pradières, Église de Gajan , N. de Taurignan et de Lacave ); puis
à 450 ou 200 mètres plus haut, des fossiles albiens sans aucun
mélange : Ammonites Milletianus et Mayorianus, Turritella
Vibrayeana , Trigonia Filtoni, Pecten Dutemplei, etc. (Prabas et
ruisseau de San-Crista, dans les environs de Saint-Paul-de-Fe-
nouillet, partie moyenne et supérieure de la montagne de Bitrague
près de Quillan, Laval, env. de Foix et de Pradières, Audinac).
L’épaisseur de ces schistes, calschistes et grès est d’au moins
500 mètres; ils sont très-noirs et azoïques vers le haut.
.20 A la partie moyenne, par des calcaires compactes, gris, à
Caprotines et à fossiles trop empâtés dans la roche pour pouvoir
être déterminés. Ces calcaires ressemblent à ceux du néocomien
et de l’aptien; mais ils s’en distinguent, d’abord, par leur position
au-dessus des schistes albiens, puis par certains caractères litho-
logiques, notamment par la présence de brèches à grands élé-
ments, de calcaires marmoréens d’une blancheur éclatante et de
calcaires rosés. C’est principalement à l’est de Vingrau, dans les
Corbières, à Estagel, dans les Pyrénées-Orientales et dans le
massif de Bac Estable et des gorges de Saint-Georges (Aude), que
j'ai pu étudier ce sous-étage, dont la puissance peut être évaluée
à environ 500 mètres.
30 A la partie supérieure, par des schistes terreux, gréseux,
jaunâtres, rougeâires, souvent comme opbitisés, contenant, sà et
là, de petits bancs de calcaires subordonnés et par des schistes
noirs, un peu micacés, passant à des schistes ardoisiers, où je n'ai
jamais rencontré un seul fossile. Epaisseur très-considérable, que
je ne puis pas encore déterminer d’une manière sûre. (Mas Gaf-
fard dans les Corbières, N. et S. O. de Bagnères-de-Bigorre dans
les Hautes-Pyrénées, environs d’Arthez d’Asson et de Tardéts.)
Ce sont ces schistes, plus ou moins ardoisiers, qui sont recou-
verts en discordance par les couches gréseuses et schisteuses à
empreintes végétales (Fucoïdes, etc.) de la craie cénomanienne,
laquelle renferme, en plusieurs points, des bancs calcaires à
Radiolites et à Caprines.
L’étage albien se poursuit tout le long de la chaîne pyrénéenne,
es RE en
Souvent plissé, il forme, en bien des lieux, des rubans parallèles
qui s'étendent sur de vastes surfaces. Les parties schisteuses ,
presque toujours de teinte foncée , affectent partout des formes
coniques, pyramidales ct mamelonnées caractéristiques. C’est cet
étage qui constitue les vallées noires de Vingrau à Estagel, et d’'Es-
tagel à Caudiès et à la Pradelle (Aude), le bois de la Pinouse et le
pic d’En-Brosse, près d’Axat; les couches schisteuses de la rive
droite de la Rebenti, entre ce dernier village et Joucou ; les mon-
tagnes de Saint-Just, de Saint-Julia et de Quillan; les bandes
schisteuses, parallèles, très-faillées, de Foix, de Pradières et du
château de Saint-Barthelemy (Ariége); les montagnes coniques,
qui forment une sorte de ruban, souvent de plusieurs kilomètres
de largeur, que l’on peut suivre, presque sans interruption, des
environs d’Audinac (Ariége\, à Tardets (Basses-Pyrénées), ruban
qui est limité au nord : dans l’Ariége, par l'Église de Gajan et
Lacave; dans la Haute-Garonne, par Castagnède, Ganties, En-
causse, Sauveterre et Valcabrère; dans les Hautes-Pyrénées, par
Tibiran, Montserrié, Lortet, Bulan, N. de Bagnères-de-Bigorre,
S. de Lourdes; dans les Basses-Pyrénées, par Betharram, N. d’Ar-
thez d’Asson, Arudy, Saint-Christau et Tardets.
On voit donc que, contrairement à l’opinion de M. Leymerie,
l’étage albien a un corps et qu’il peut être distingué physiquement.
Je mets d’ailleurs, en ce moment, la dernière main à un travail
d'ensemble, basé sur de nombreuses coupes, qui mettra bientôt
les faits que j'avance hors de doute. |
M. Leymerie n’admet pas non plus (Compt. rend., loc. cit.) les
étages du muschelkalk et du zechstein, que j'ai découverts en
certains lieux des départements du Tarn et de l’Aveyron (1). Ce
savant se base sur ce que ces étages ne constituent que des
« amandes calcaires ou dolomitiques qui ne sont, pour lui, qu’un
accident du grès rouge. » On me permettra de faire remarquer
que ces amandes, comme les appeile M. Leymerie, ont quelque-
fois plus de 400 mètres d'épaisseur ei qu’il faut nécessairement en
tenir compte quand, surtout, elles se développent sur plusieurs
kilomètres de longueur et qu’elles contiennent quelques fossiles.
(1) H. Magnan, Étude des formations secondaires des bords S. O. du plateau
central de la France, entre les vallées de la Vère et du Lot. (Bulletin de la
Société d'Histoire naturelle de Toulouse, t. AIT, p. 5 ; 1869).
MNT
M. Leymerie ne voit dans le trias etle permien du Tarn et de
l'Aveyron que du grès rouge, qu’il identifie avec le grès rouge
pyrénéen. C’est, on en conviendra, bien vague ; car peut-on dire
que tous les grès rouges des Pyrénées appartiennent à la même
formation ? (1) Je suis convaineu qu'il en est quelques-uns, notam-
ment ceux de la haute Ariége, de la Haute-Garonne et de la vallée
d'Aure, qui représentent le terrain devonien, avec lequel ils se
lient d’une manière intime (2), tandis que les véritables grès
secondaires, dans les Pyrénées et dans les Corbières, reposent
toujours en discordance sur le terrain de transition, ainsi que
Charpentier et Duafrénoy l'ont prouvé ; ceux du trias sont accom-
pagnés, comme en Espagne, de marnes irisées gypseuses et de
calcaires cargneuliformes, plus ou moins puissants (Ariége, Aude,
Corbières); ceux du permien renferment quelquefois de petites
couches de calcaire subordonnées (Basses-Pyrénées) et des
cargneules (haies Corbières).
(1) Voy. d’Archiac, Histoire des Progrès de la Géologie, t. VIII, p. 213, et
EH. Coquand, Bulletin de la Société géologique de France, re série, t. IX, p. 225.
(2) Depuis que cette Réponse aux observations de M. Leymerie a été adressée
à M. Daubrée, j'ai étudié de nouveau les vallées du Salat, de la Garonne et de
la Neste d'Aure, et je puis affirmer que les grès et les poudingues de Lez,
de Cierp, de Camous, que M. Leymerie range dans le terrain secondaire
(triasique ou permien), et auxquels il fait allusion dans sa réplique, repré
sentent, en réalité, le vieux grès rouge des Anglais. Ces grès et ces pou-
dingues de l’époque de transition, reposent en concordance sur les calschistes du
devonien et sont recouverts aussi en concordance, par de puissantes couches
de calcaires marmoréens, de calcaires variés, de schistes graphitiques et de
brèches, avec ophite, couzeranite, dipyre, amphibole, etc. (calcaires d’Aulus,
de Saint-Béat et de Cap de Ser d’Aouarjo, près de Cierp), qui au lieu d’ap-
partenir au lias mélamorphique, — comme le veut le savant professeur, —
doivent être rangés dans le terrain de calcaire carbonifère, En effet, dans des
couches semblables, M. H. Coquand vient de signaler tout récemment (a) dans
la montagne de Jetons, à l’ouest du village de Montplaisir (vallée d’Ossau),
la présence de plusienrs fossiles : Ampleæus coralloides, Sow., des Polypiers
du genre Michelinia (M. compressa, Michel.) et des Calamites, fossiles que
l’on recueille dans le calcaire carbonifère de la Belgique.
(a) Bullelin de la Société géologique de France, 2° série, t. XXVII, p. 54 ; 1869.
(Note communiquée pendant l'impression).
hr
Séance du 6 mai 1870.
Présidence de M. Pra, vice-président,
M. Peyre fait connaître à la Société les résultats des dernières
herborisations faites aux environs de Toulouse. M. Desjardins à
découvert dans les pépinières, derrière la gare, le Diplotaxis vimi-
nea, plante méridionale, nouvelle pour notre flore.
M. Timbal-Lagrave de son côté, a étudié avec soin le Potentilla
verna, de la flore de Toulouse. Il résulte de ses recherches que
cette plante est représentée par deux formes qui, pour notre col-
lègue, constituent deux espèces bien distinctes.
La première a été déjà nommée par M. Jordan P. xerophila, J.
dans les centuries de M. Billot, qui l’a publiée sous le n° 1863 :
c’est la plante du bois de Laramet ; elle est conforme au P. verna,
de Stocholm, publiée par Nyman. D’après cette origine, c’est la
plante que Linné a eu en vue en établissant son Potentilla verna.
La deuxième, à laquelle M. Timbal-Lagrave donne le nom de
P. agrivaga (Dynamidium agrivagum), est très-répandue dans nos
champs, nos tertres, nos bois ; elle se distingue par ses rhizomes
plus vigoureux, plus forts et plus courts, d'où partent des racines
pivotantes, fortes, grosses d’abord, puis plus fines, pénétrant
moins profondément dans le sol, quoique plus grosses, ses tiges
florifères plus courtes, plus hérissées, ses feuilles à 5 folioles,
même celles des jets stolonifères, qui poussent après la floraison ;
ses fleurs plus grandes, ses pétales plus échancrées, et ses calicules :
et calices plus larges et moins longs, celle-ci fleurit à Toulouse
la première, quinze jours au moins avant le P. æerophila de nos
bois de Tournefeuille. À la limite du bassin sous-pyrénéen, on
trouve encore deux autres formes du P. verna des auteurs : une
dans la région montagneuse de notre département, dans les rochers
et les pelouses herbeuses à Bagnères-de-Luchon, au sommet de
Cagire, à super-Bagnères, qui se distingue des deux premières par
ses fleurs plus petites avec une tache jaune à l'onglet. Ses tiges
florifères, courtes, très-nombreuses, fines, ses rhizomes grêles et
LT —
ses racines peu profondes, fibreuses, bien différentes à celles des
deux précédentes, qui s’enfoncent fortes et vigoureuses dans le
sol. — P. montivaga, Nob. (Dynamidium montivaqum, Nob.)
La quatrième, bien différente encore des trois autres, abonde
dans les pelouses herbeuses d’Avignonet, à la limite du départe-
ment de la Haute-Garonne, vers l'Aude. Celle-ci est bien plus
éloignée des précédentes. Elle est facile à distinguer par ses très-
grandes fleurs, à pétales très-émarginés, ses calicules grands,
étroits et allongés quoique obtus. Ses tiges, longues, diffuses, lon-
guement étalées sur le sol, très-hérissées de longs poils mous très-
vertes. Ses rhizomes souterrains, peu développés, longs, trainants et
grêles, bien différents en cela des trois premières. Ses racines, lon-
gues et fibreuses, ce qui n’arrive pas dans les autres qui ont à peine
quelques fibres gros et roides, dans celle-ci ils sont fins, déliés et
flexibles ; nous lui donnons provisoirement le nom de P. aus-
tralis, Nob. (Dynamidium australe, Nob.)
Nous poursuivons l’étude de ce groupe curieux, et nous pensons
pouvoir, avant peu, revenir sur la détermination de ces espèces
communes dans notre région.
En outre, des herborisations dirigées par MM. Timbal-Lagrave
et Peyre sur les bords du Touch, à Blagnac, aux vallons de Saint-
Geniez et sur les bords de l’Hers ont amené quelques résultats inté-
ressants, mais non encore suffisamment étudiés. Ils pourront
trouver place dans le précis que M. Timbal se propose.de faire à la
fin de l’année.
Le secrétaire général informe la Société que, sur sa prière,
M. Desiruges, de Guayaquil, envoie au Musée une série d’objets
ethnologiques et d'histoire naturelle du plus grand intérêt. I] lit
une notice de ce confrère donnant des détails sur les habitants
primitifs de la République de l’Equateur et combattant la théorie
qui fait peupler l'Amérique par des immigrations asiatiques.
RENE" Ve
Séance du 20 mai 1870.
Présidence de M. Pra, vice-président.
M. le président annonce une présentation.
La Société recoit :
Comptes rendus de la société scientifique et littéraire d’Alais.
T. 4er, Alais, 4870, in 8°; p. 218, pl. 8.
De la part de M. E. Cartailhac : une série de silex taillés recueillis
dans une station non loin du Tarn, à Teyssode, au-dessus de Saint
Sulpice de la Pointe, où 11 a été conduit par M. Cabié.
Il est donné lecture des lettres suivantes :
Académie des Sciences, Belles-Lettres, Arts, Agriculture et
Commerce de la Somme.
M. le Directeur de l’Académie d'Amiens a reçu la lettre-circu-
laire que vous lui avez adressée, et à laquelle se trouve joint un
projet de pétition à M. le Ministre de l'instruction publique ayant
pour but la propagation et la défense des sciences naturelles.
L'Académie d'Amiens ayant pris connaissance de votre lettre et
de la pétition projetée, me charge de vous annnoncer que dans sa
séance du 4% de ce mois, élle a donné l'adhésion la plus sympa-
thique et la plus complète au but vraiment utile et méritoire que,
dans l’intérêt de la science, se propose la Société que vous pré-
sidez.
E. YvEr, secrétaire perpétuel.
Société industrielle d'Angers et du département de Maine-et-Loire.
J'ai l’honneur de vous informer que la Société industrielle
d'Angers et du département de Maine-et-Loire a pris connaissance
de votre lettre et de votre pétition, en faveur de l’enseignement
de l’histoire naturelle, et qu’elle a-décidé qu’un extrait du procès-
verbal de sa séance du 42 mai vous serait adressé comme réponse.
Voici cet extrait que je suis tout particulièrement heureux de vous
transmettre : |
« M. le vice-secrétaire communique la circulaire de la Société
RS" mE
» d'histoire naturelle de Toulouse, et la pétition en faveur de
» l’histoire naturelle que cette Société veut adresser à Son Excel-
» lence le Ministre de l'instruction publique. Cette lecture excite
» le plus vif intérêt et détermine les adhésions unanimes de l’as-
» semblée qui résume ainsi ses vœux :
« L'histoire naturelle exige d’être enseignée plus sérieusement
» et avec plus d’extention ; elle devra toujours être plus spéciale-
» ment étudiée en vue de ses applications les plus utiles à l’agri-
» culture. »
F. Jeannin, secrétaire général.
Société académique de Saint-Quentin (Aisne) ; Sciences, Arts
et Belles-Lettres, Agriculture et Industrie.
Dans sa séance du 18 mai, la Société académique a reçu com-
munication de la pétition que la Société d’histoire naturelle de
Toulouse propose d'adresser au Ministre de l'instruetion publique
pour demander qu’une part plus large soit faite aux sciences natu-
relles dans l’enseignement secondaire.
La Société académique approuve complètement l'esprit et les
termes de cette pétition, et elle vous autorise, Monsieur le Prési-
dent, à faire de son adhésion l'usage que vous jugerez convenable.
H. SourLer, secrétaire général.
M. Chalande informe la compagnie de la trouvaille de nombreux
ossements humains mêlés à des bois de cerf dans une tranchée du
moulin du Bazacle. M. l'ingénieur veut bien mettre tous ces objets
à Ja disposition de la Société. Comme les ossements humains sont
datés du xvu° siècle par les monnaies et que les anciens plans de
1621 signalent sur ce point un cimetière dit des pestiférés, ils doi-
vent appartenir en majorité à des Toulousains et peuvent avoir
une certaine valeur anthropologique.
M. Peyre annonce à la Société la découverte par M. Timbal père
etlui-même du Muscari Lelievrei dans les vallons de Saint Geniez :
cette plante n’était encore connue que dans l’ouest de la France.
D'autre part un Ornithogalum rencontré par la Société le 25 mai
1869 dans le jardin de l’hôtel de Comminges à Saint Bertrand, et
indéterminable faute de fleurs ou de fruits, a fleuri cette année
dans le jardin de M. Timbal et a été reconnu pour l'O Boræanum
k
PM | PR
Jord, et Fourr. (O0. umbellatum, Borcan ; L. ex parte). Enfin dans
une course récente à Alzonne, MM. Pevre et Albert Timbal ont
rencontré l'Ornithogalum Peyrei, Timb., plus abondant que dans
la seule localité jusqu'ici connue de cetle plante, Lacroix Falgarde.
Ce dernier fait n’est pas sans importance, en ce qu'il rattacherait
celte plante à une colonie de plantes méridionales observées au
confluent de l’Ariége et de la Garonne, colonie dont font partie
notamment les Thymus vulgaris, Genista scorpius, Orchis papilo-
nacea, Philippea arenaria, Hetedypnois cretica, Doryenium suf-
fruticosum, ele.
M. Timbal-Lagrave fils annonce que dans une herboïisation
faite à la prairie de Portet avec son père et M. Filhol ils out ren-
contré les Narcissus biflorus, Ajuga Genevensis, enfin, à Pinsuguel,
le Cardamine sylvatica. Ces trois plantes sont nouvelles pour la
localité.
Séance du 3 juin 41820.
Présidence de M. le D' Guitar», président.
M. le professeur Lavocar, membre honoraire, assiste à. la
séance.
M. Léon FLorre, à Crépy-en-Valois, Oise, est nommé membre
titulaire sur la présentation de MM. Guitard ct Cartailhac.
La Société recoit :
Journal d'agriculture pratique, février, mars, avril, mai 4870.
De la part de M. Guitard : des échantillons de graines venant
du Mexique.
Une lettre de M. L. Donnadieu, professeur à l’école spéciale de
Cluny, annonçant un article en faveur de la pétition pour l’histoire
naturelle dans la Revue de l'instruction publique.
Les adhésions suivantes à cette même pétition.
Académie des Sciences, Agriculture, Arts et Belles-Lettres d'Aix.
L'Académie vient de délibérer sur le projet de pétition que vous
A RE
avez bien voulu soumettre à son appréciation. Une ville qui se
olorifie d’avoir donné le jour à Tournefort et à Adanson ne pou-
vait demeurer insensible aux dangers que court en France l’ensei-
gnement des sciences naturelles, par suite d’une mesure dont les
ficheuses conséquenceS n’ont échappé à personne. Je suis chargé
de vous annoncer que notre Société adhère de grand cœur à votre
projet de pétition et qu’elle est d'sposée à se joindre à vous pour
appuyer la démarche que vous annoncez.
Cte G. DE SarorTA, président.
Société d'histoire natureile de Colmar.
La Société d'histoire naturelle de Colmar, dans sa séance du
18 mai, a entendu avec le plus vif intérêt la lecture de la pétition
que la Societé de Toulouse se propose d'adresser à Son Excellence
le Ministre de linstruction publique en faveur de l’étude des
sciences naturelles.
Elle adhère pleinement aux vues si justes exposées dans ce
document, et souhaite ardemment que la demande de la Société
de Toulouse soit favorablement accueillie par Son Excellence et
examinée immédiatement avec toute la sollicitude qu’elle mérite.
La Société a chargé son bureau de faire connaitre ses sentiments
à cet égard à M. le Président de la Société d'histoire naturelle de
Toulouse.
F.-E. KamPMANN, vice-président.
D' Faupez, secrétaire perpétuel.
Société des Lettres, Sciences et Arts des Alpes Maritimes.
La Société des Lettres, Sciences et Arts des Alpes maritimes à pris
connaissance de votre circulaire et de la pétition que vous adressez
à Son Excellence le Ministre de l’instrustion publique; tous les
membres présents à la séance du 49 courant ont été d'avis que
nous devions nous associer à votre démarche. Je viens donc, au
nom de mes confrères, vous déclarer que, non-seulement nous
sommes très-sympathiques à l'œuvre que vous entreprenez, mais
que notre concours vous est assuré, dans la forme que vous vou-
drez bien nous indiquer.
BruN, secrétaire.
m7 Nes
M. Marius Lacaze donne lecture du Mémoire suivant (4) :
Etude critique de la Nutrition.
S'il fallait en croire nos physiologistes la nutrition serait une
fonction spéciale que nous retrouverions chez tous les êtres orga-
nisés : elle aurait lieu chez les protophytes comme chez les végétaux
les plus parfaits, chez les protozoaires comme chez l’homme.
Les actes intimes qui la constitueraient seraient encore l’objet
d’actives recherches, mais des résultats importants auraient été
obtenus et des théories réellement scientifiques existeraient sur
ectte fonction.
Exposer ces théories, les discuter en prenant pour base les faits,
et donner notre marière de voir sur Ja nutrition, tel est le triple
objet de ce travail.
Les théories qui existent sur la fonction qui nous occupe peu-
vent être réduites à deux. Dans la première, qui repose sur le
tourbillon vital de Cuvier, on admet que les principes constituants
des tissus sont sans cesse renouvelés par un double mouvement de
désassimilation et d’assimilation, et on attribue ce double mouve-
ment à une propriété des tissus vivants.
Dans la seconde, on reconnoit aussi la rénovation des tissus,
mais on lui donne une autre cause : on suppose que la désassimi-
lation provient de l’action comburante de l'oxygène, et l’assimi-
lation de l’affinité.
Pour fixer les idées et aussi pour être juste, 1l est nécessaire de
citer les propres paroles des principaux partisans de ces deux
théories et d'entrer dans quelques développements.
Guvier, dans son magnifique ouvrage sur le règne animal,
s'exprime ainsi ({ntroduction) :
« La vie consiste dans la faculté qu’ont certaines combinaisons
» corporelles de durer pendant un temps et sous une forme déter-
» minée, en attirant sans cesse dans leur composition une partie
(1) Dans la séance du 3 juin 1870, nous avons communiqué à la Société
un Mémoire intitulé : Ætude critique de la Nutrition. L'espace qui nous
est réservé dans ce Bulletin nons oblige à ne donner qu’un résumé de notre
travail,
US de
» des substances environnantes, ct en rendant aux éléments des
» portions de leur propre substance. La vie est done un tourbillon
» plus ou moins compliqué dont la direction est constante et qui
» entraîne toujours les molécules des mêmes sortes, mais où Îles
» molécules individuelles entrent et d’où elles sortent continuelle-
» ment, de manière que la forme du corps vivant est plus essen-
» lieile que la matière. »
Ces idées, nous les retrouvons commentées et développées, 1l est
vrai, mais non modifiées dans ce qu’elles ont d’essentiel, dans le
remarquable travail de chimie anatomique et physiologique, nor-
male et pathologique de MM. Ch. Robin et Verdeil, et ces savants
n’ont pas hésité à les admettre comme base de leur définition sur
la nutrition.
En effet, à la page 489, t. 1, on lit :
« La nutrition est caractérisée par un double mouvement con-
» tinu de composition et de décomposition sans destruction du
» Corps où 1l se passe. »
Et plus loin, page 266, après avoir parlé des principes qui
entrent dans le corps des êtres organisés et de ceux qui en sortent,
ces histogénistes ajoutent :
€ Partout donc où un corps organisé manifeste une propriété
» quelconque‘ de sensibilité, contractilité ou seulement de sécré-
» tion, reproduction, développement, il y a, de toute nécessité,
» dans ja matière de ce corps cette allée et cette venue de ces
» matériaux. Cette allée et cette venue sont la condition d’exis-
» tence de tout autre phénomène organique ou vital quelconque,
» et tant qu'elles continuent, il y a vie ; dès qu’elles cessent, il a
» mort, et il n’y a mort que lorsqu’elles cessent. »
M. Muller admet aussi que tous les tissus des êtres vivants sont
sans cesse renouvelés, mais il fait une exception pour le système
nerveux. Le système nerveux échapperait seul, d’après cet émi-
nent physiologiste, à la loi du renouvellement moléculaire.
Mais, s’il fallait eu eroire MM. Serres et Doyère, cette restriction
devrait être faite, non à l’évard du système nerveux, mais pour le
tissu osseux ; car ils disent dans leur travail sur la coloration des
0S par la garance, inséré dans les Annales des Sciences naturelles,
2e série, t. XVIE, page 173 :
« En ce qui concerne la nutrition, cet échange, ec rerouvelle-
sh =
» ment, ce tuurbillonnement perpétuel des molécules ne sont
» point une condition essentielle des tissus vivants, à moins qu’on
» ne veuille ranger le tissu osseux parmi les tissus morts. »
M. le docteur Emile Joly, après avoir fait de nombreuses expé-
riences sur la coloration des os au moyen du régime garancé,
arrive à la même conclusion que MM. Serres et Doyère, au moins
en ce qui concerne les os qui ont atteint leur complet dévelop-
pement.
« Les molécules, colorées ou non, ditil dans sa thèse pour le
» doctorat, page 28, ne disparaissent que dans les os incomplète-
» ment formés, et par le seul fait de l’accroissement de ces der-
» niers. Cette disparition des molécules est partielle et s'effectue
» lentement dans les os jeunes. Elle ne paraît plus avoir lieu chez
» ceux dont la croissance est terminée. »
Il est important de remarquer que M. le docteur Emile Joly
regarde la rénovation moléculaire dans les os jeunes comme un
fait de croissance et non comme un phénomène nutritif propre-
ment dit.
Un grand nombre d’autres physiologistes, dont il est superflu
de citer les noms, à l’exemple de MM. Cuvier, Robin, Verdeil,etc.,
considèrent la rénovation des tissus en général par le double mou-
vement de désassociation et d'association, comme une propriété
essentielle et comme une condition d'existence des tissus des êtres
organisés.
Mais il en est d’autres qui, comme nous l'avons dit en commen-
cant, tout en admettant en fait le renouvellement des tissus, sem-
blent regarder ce renouvellement, non plus comme un acte essen-
tiel, comme nne raison de vie, mais bien comme un accident dü à
la combustion des principes constituants des organes par l’oxygène
de la respiration, et au remplacement de ces principes par les ma-
tières alimentaires.
M. Milne Edwards écrit, en effet, à la page 439 de son anatomie
el de sa Physiologie comparées :
« Dans l’état normal, la combustion vitale est entretenue en
» partie par la substance des organes, et en partie par les subs-
» tances combustibles non azotées qui se trouvent dans le sang
» OÙ qui sont emmagasinées autrement dans l’intérieur du corps
» et qui ne sont pas aptes à servir de matériaux pour la combustion
» des tissus vivants. »
Le Re
. M. Longet n’est pas moins explicite que M. Milne Edwards :
« L'existence des animaux, dit-il dans son Traité de physiologie
page 1,059, ne se maintient qu’à la condition d’un travail mo-
léculaire incessant, accompli aux dépens des matériaux plus ou
moins complexes qui, en général, se métamorphosent et se
détruisent par des phénomènes analogues à la combustion ; les
animaux, dans ce but empruntent à l’air son oxygène. Dans ce
travail intime et de la dépense qu’il entraîne avec lui, résulte la
nécessité d’une réparation continuelle, indispensable à l’inté-
grité et à la permanence des organes. »
Et plus loin, page 4067 :
« L'animal longtemps privé d’une nourriture suffisante continue
à absorber de l’oxygène et diminue de poids, parce qu'il brûie
successivement, d'abord ses graisses, puis son sang et ses pro-
pres tissus; de telle sorte que, même des substances azotées
qui avaient fait partie de sa trame organique fournissent des
matériaux à l’oxygène de la respiration et accidentellement
deviennent aliments respiratoires.
» 51 d'un côté le sang, par mille canaux, porte la nourriture à
tous les organes, se transformant par une chimie spéciale en
lüssus et en humeurs ; d’un autre côté, à mesure que les parti-
cules organiques sont décomposées et fluidifiées, elles rentrent
dans le grand courant sanguin qui les emporte. Ainsi, dit Littré,
se fait et se défait cette toile de Pénélope, trame toujours sur
le métier, et ne subsistant qu'à la condition d’avoir ses fils
incessamment renouvelés. »
Nous devons à la vérité de dire que, en 1856 (cette date est à
noter), quand M. Longet est au moment de formuler sa conclusion
définitive sur la nutrition, il se préoccupe du désaccord (1) qui
existe entre les physiologistes au sujet du rôle que jouent les actes
nutriufs dans la coloration des os par la garance; et alors il
éprouve des doutes sur la théorie du renouvellement des tissus et
hésite à se prononcer d’une manière catégorique en sa faveur.
»
»
« Eu présence de données et d'interprétations aussi contradic-
toires, dit-1l page 1067, que penser du renouvellement de la
matière dans les parties solides des tissus? La plupart des faits
(1) Ce désaccord ne saurait exister aujourd'hui, grâce aux remarquables
travaux de M. le professeur N. Joly et de son fils sur cette importante question.
_— 56 —
» invoqués peuvent bien fournir des inéuctions concernant le
» mode d’accroissement des os; mais jusqu’à présent, il n’est pas
» démontré que toutes les molécules du tissu osseux ne doivent
» séjourner dans les os qu’un temps assez court, ni qu’elles soient
» incessamment remplacées par de nouvelles molécules que d’au-
» tres remplaceront bientôt. Or, ce qui peut paraitre contestable
» pour le tissu osseux, l’est également pour les autres tissus de
» l’organisme adulte. Aussi semble-t-1l plus rationnel d'attendre
» d’autres lumières pour prendre un parti relativement à cetle
» théorie qui, si elle n’est pas expérimentalement démontrée, se
» trouve pourtant assez en rapport avec la manière la plus géné-
» rale d'envisager les actes intimes de la nutrition. »
Mais en 1868, M. Longet semble avoir oublié cette sage réserve
qui lui était dictée par la prudence et par des faits, et être revenu
d’une manière absolue aux idées du renouvellement moléculaire.
Dans son nouveau Traité de physiologie (année 1868, introduc-
tion, page XXXHII), il écrit : « Ce qui caractérise surtout les com-
» binaisons qui se produisent au sein de l’organisme, c’est leur
» instabilité : elles se forment, se transforment, se détruisent sans
» cesse pour se reproduire de nouveau. On est parvenu à fixer
» image d’un boulet traversant l’espace, mais on ne parvient pas
» à donner de la stabilité aux éléments qui composent un orga-
» nisme vivant. »
Telles sont, rapidement exposées, mais cependant avec assez de
détail pour les bien faire comprendre, les deux théories sur la
putrition qui sont de nos jours enseignées. |
Nous devons maintenant les discuter.
Les objections que l’on peut faire à ces théories sont nombreuses
et de diverses natures : nous en trouvons dans la physique, dans
la chimie, dans l’histogénie, dans la physiologie, dans la patholo-
ole, etc. ; et cela n’a rien d'étonnant, car les phénomènes nutritifs,
par leur généralité et par leur complexité, touchent à un grand
nombre de lois naturelles, et dès lors ne peuvent être envisagés
sous un faux jour sans se trouver en opposition avec les données de
la plupart des sciences de la nature.
La première des théories que nous combattons, celle de MM. Cu-
vier, Robin et Verdeil, nous parait tout d’abord fausse parce qu'elle
est en contradiction avec cette loi physico-chimique générale, e’est
RS er
qu’une combinaison, un cristal ou un élément anatomique ne peut
se décomposer dans le milieu même qui convient à son existence.
Or, voilà cependant ce qu’il faudrait admettre pour expliquer, dans
la théorie qui nous occupe actuellement, la rénovation des tissus.
Des modifications nombreuses peuvent se produire, il est vrai,
dans les conditions d'existence des organismes, mais ces modifica-
tions déterminent toujours des états pathologiques.
MM. Robin et Verdeil ont compris toute importance de l’objec-
. tion que nous faisons dans ce moment et ont cherché à y échapper
en disant :
« Il n’y a point de décomposition spontanée ; celle-ci n’a lieu que
» parce qu’aussitôt après que la combinaison est faite, il se trouve
» auprès, en raison de l’état anatomique des principes (union
» intime par mélange et dissolution), quelque autre principe qui
» la décompose à son tour en se combinant à l’un de ces éléments.
» Celui-ci en éprouve ensuite autant, ou bien est expulsé, évacué,
» où bien encore il reste, incruste les tissus ou fait dépôt. C’est à
» ce qui constitue le doubie mouvement de composition et de dé-
» composition, dont l’ensemble s'appelle nutrition, phénomène de
» nutrition. — Page 273. »
Ces histogénistes disent encore :
« Cette prétendue force vitale qui préside, c’est l’état d’union
» complexe des principes immédiats qui fait que la plupart de leurs
» actes de formation et de décomposition sont des actions chimiques
» particulières dites de contact ou indirectes. Ce sont ces condi-
» tions complexes qui rendent l’aste d’une rature particulière ei
» l’éloignent de ceux que nous offrent généralement les corps
» minéraux. — Page 270. »
Mais comment l’état anatomique pourrait-il faire naître des
principes qui le détruiraient, alors qu’il est Le résultat d'une asso-
clation, d’une union moléculaire, d’une combinaison ? Si une com-
binaison déterminait par sa seule formation, l’apparition de corps
capables de la détruire, 1l ne nous serait jamais possible d’en cons-
tater l’état et à plus forte raison les propriétés, car il adviendrait
nécessairement qu'aussitôt après qu'elle aurait apparu, les prin-
cipes de décomposition la détruiraient. En admettant même la
présence de ces principes, on ne pourrait pas davantage expliquer
rationnellement la désassociation. En effet, de deux choses l’une :
ou les molécules avec lesquelles ils se combineraient n’existeraient
PER, DE
que dans les tissus, et alors ceux-ci seraient obligés d’en créer de
semblables à celles qu'ils perdraient pour se compléter ; ou elles se
trouveraient toutes formées dans le blastème, et, dans ce cas, elles
devraient préserver les tissus en s’unissant aux principes de dé-
composition.
Dans la première hypothèse, la désassociation serait possible,
mais ce qu’on ne comprendrait pas, c’est que l’état anatomique
créât alternativement des principes de décomposition et des prin-
cipes d'association ayant entr'eux la plus grande affinité.
Dans la deuxième hypothèse, la décomposition ne serait pas
compréhensible, puisque au fur et à mesure que les principes de
décomposition apparaîtraient, ils trouveraient près d’eux des mo-
lécuies libres pour lesquelles ils auraient une forte affinité, et
devraient s’unir à elles plutôt qu'aux principes immédiats des
tissus, ceux-ci étant déjà engagés dans des combinaisons.
Les explications données par MM. Gh. Robin et Verdeil pour
faire comprendre les phénomènes d'association et de désassociauon
n'éclairent donc rien : elles ne font que reculer les difficultés sans
les résoudre.
Dira-t-on par hasard qu'un protoorganisme ou qu’un élément
anatomique d’un organe composé ne reste pas inactif comme les
Corps iuorganiques, et que son action, son jeu, qui n’est que sa
fonction, amène dans les milieux où il vit des modifications qui
déterminent la décomposition de ses principes immédiats ?
Mais, dans ce cas, où cet élément anatomique trouvera-t-il les
principes qui lui permettront de se compléter ? Ce ne sera certes
- pas dans ces milieux, car, s'ils y étaient, ils devraient être décom-
posés comme ceux de lPélément anatomique.
Nous ne comprenons donc pas la possibilité de l’apparition des
principes de décomposition et des actes chimiques directs ou in-
directs, d'où, d’après MM. Ch. Robin et Verdeil, proviendrait le
double mouvement d'association et de désassociation. ‘
Toutelois, nous n’aurious pas eu l’imprudence d'attaquer des
théories établies et défendues par des savants illustres, si nous
n'avions eu à leur opposer que les objections que nous venons de
faire valoir. Nous savons lrès-bien qu’il existe un grand nombre de
faits scientifiques dont on n’a pu découvrir les causes, et nous
D'ignorons pas qu'il serait absurde d’arguer de celte ignorance pour
en nier l’existence.
es QU
Si donc nous avons entrepris la difficile tâche que nous accom-
plissons, c’est que toutes les sciences de la vie nous fournissent des
armes pour la lutte.
Nous venons de consulter la physique, la chimie et l’histogénie ;
interrogeons maintenant la physiologie chez les organismes supé-
rieurs.
Les organes et les appareils qui composent les êtres organisés
remplissent des fonctions d’où découle la vie individuelle.
Ces fonctions, comme il est facile de le comprendre, ne peuvent
s’exéeuter normalement que si les organes conservent intacts leurs
matériaux constituants. |
Comment, en effet, la fibre musculaire pourrait-elle être stimulée,
se contracter ou se dilater, si elle était incessamment renouvelée,
s'il existait en elle cette allée et cette venue de matériaux dont
parlent MM. Robin et Verdeil ?
La force nerveuse, quelle qu’elle soit lans son essence, ne pro-
duirait aucun effet utile, si elle agissait sur un tissu, sur des fibres
dont les matériaux constituants se décomposeraient et se reforme-
raient sans cesse.
La tonicité, la contractilité, la force potentielle des muscles et
leur élasticité supposent une grande solidité dans les fibres muscu-
laires, et cette solidité serait impossible sans la fixité des combinai-
sons qui forment ces fibres.
Si des fonctions des muscles nous passons à celles des glandes,
nous arriverons à des conclusions identiques. Les parois des élé-
ments anatomiques qui constituent les glandes agissent sur Île
plasma du sang, non-seulement physiquement, mais encore chimi-
quement. Ce qui donne aux glandes leurs propriétés spéciales, c’est
leur structure, c’est encore et surtout la nature de leurs principes
constituants. Or, si le tourbillon vital était une réalité, la struc-
ture glandulaire serait à chaque instant dérangée, et l’action chi-
mique des glandes serait rendue impossible, car à peine les principes
qui les forment auraient pris naissance qu'ils seraient rapidement
décomposés pour faire place à de nouveaux qui subiraient aussi le
même sort, sans pouvoir exercer aucune action spéciale.
… Mais s’il est des fonctions qui plaident contre le double mouve-
ment d'assimilation et de désassimilation, ce sont, sans contredit,
celles des organes des sens et de l’apparcil nerveux.
Nous nous bornerons, comme toujours, à quelques exemples.
si 00:
On sait que l’on voit un objet quand son image est venue se peindre
sur une membrane nerveuse, la rétine, qui tapisse le fond de l’œil ;
que l'impression produite par cette image a été transmise au cer-
veau par un nerf spécial, le nerf optique, et enfin que certains
éléments anatomiques cérébraux ont élaboré les im pressions qu'ils
ont ainsi reçues.
Or, n'est:l pas évident que le tourbillon vital, en décomposant
et recomposant sans cesse les principes constituants des milieux
réfringents oculaires, de la rétine, du nerf optique et des élé-
ments cérébraux, altérerait la pureté des images, gônerait la trans-
mission , s’il ne l’empêchait pas, et s’opposerait à la perception,
comme nous le verrons quand nous nous occuperons de la forma-
tion de l’idée.
Il en serait de même des autres sens, c’est-à-dire, de l’ouie, de
l’odorat , du goût et du toucher.
Si les organes des sens ont besoin, pour exercer normalement
leurs fonctions, de conserver leurs principes constituants, à fortiori
cela doit-il être vrai pour le cerveau.
La pulpe cérébrale est d’une délicatesse extrême; un ébranle-
ment un peu fort, une commotion suffit, dans la plupart des cas,
pour l’empêcher de remplir momentanément ou pour toujours ses
fonctions. Une goutte de sang ou de sérosité épanchée dans son
sein ou un simple ramollissement peut amener un trouble intel-
lcctuel, le naufrage même de l'intelligence, la folie.
Tous ces faits, et bien d’autres encore que le médecin est ap-
pelé tous les jours à observer, ne nous démontrent pas, il est vrai,
l'impossibilité du double mouvement de composition et de décom-
position dans le cerveau, mais ils nous portent à le mettre en doute
et nous engagent à examiner de très près s'il a lieu réellement.
Nous allons donc pénétrer, autant que nous le pourrons, dans
les actes intimes de lintelligence.
La première opération inteilectuelle qui est la base de toutes les
autres, c’est la formation de l’idée, On a une idée, c’est-à-dire
une notion, lorsqu'une impression transmise au cerveau a été
élaborée par les éléments anstomiques spécialement aflectés aux
actes intellectuels. |
Prenons un de ces éléments anatomiques au moment où une
impression lui parvicndrait, Cette impression agirait nécessaire-
ment sur des molécules qui seraient les unes en pleine décompost-
ON: 5" DPI
tion, les autres en voie de combinaison. Les premières ne pour-
raient réagir pour produire leur effet spécial, et, quant aux secondes,
elles se trouveraient dans le même cas, car, en admettant même.
qu'elles fussent impressionnées, leur rapide décomposition et les
inévitables désassociations qui s’opéreraient autour d’elles, s'oppo-
seraient à ce que leur action eût un résultat normal et utile.
L'idée donc ne pourrait se former. |
Or, si l’idée ne se produisait pas, nous serions dans l’impossibi-
lité de nous souvenir, de juger, de raisonner, d'imaginer, de com-
parer, etc., car tous ces actes intellectuels ont pour base l’idée.
Pendant tout le temps que s’accomplissent ces phénomènes d’im-
pression, de transmission, d'élaboration, d’idée de jugement, de
raisonnement, etc.; il est indispensable que les éléments anato-
miques cérébraux qui sont en jeu dans ces opérations conservent
leurs principes constituants. Il est également nécessaire que ces
principes se conservent pour servir aux opérations ultérieures qui
s'appuient sur des notions acquises.
En vain dirait-on que les molécules remplacées transmettent à
celles qui les remplacent les impressions qu’elles ont reçues ou les
idées qu’elles ont élaborées ; car lorsque ces dernières apparaissent,
les autres ont cessé d’exister.
On ne serait pas plus fondé à soutenir que les principaux orga-
nes des animaux supérieurs étant composés d’une infinité d’élé-
ments anatomiques et que le renouvellement moléculaire ne se
faisant pas en même temps dans ces éléments, il y en a toujours
assez d’intacts pour permettre à la fonction de s’accomplir; car
cette fonction dépend des propriétés des principes constituants des
éléments anatomiques et de leur mode d’association, et ces princi-
pes se trouvant tous dans les mêmes conditions, il n’est pas permis
de supposer chez eux un renouvellement alternatif.
Les partisans de la rénovation des tissus conviennent de ce fait
puisqu'ils disent que le double mouvement de composition et de
décompostion est continu.
Nous ne comprenons pas que des faits aussi simples, aussi fuci-
les à constater aient échappé aux physiologistes, surtout à ceux qui,
comme M. Taule, se sont prononcés en même temps pour le maté-
rialisme et pour le renouvellement moléculaire.
Comment, en effet, M. Taule a-t-il pu écrire dans sa thèse sur
ANT jPars
les propriétés de la matière organisée, des choses aussi contradic-
toires que celles-ci :
« Toute substance organisée, amorphe ou figurée, végétale ou
» animale, placée dans des conditions de milieu en rapport avec
» Sa Constitution immédiate moléculaire, présente continuement
» et sans se détruire un double mouvement de combinaison et de
» décombinaison simultanées, d’où résulte sa rénovation molécu-
» Jaire. Cet acte a reçu le nom de nutrition. — Page &7. »
« Les effets de fluorescence et du pouvoir émissif des cellules
» cérébrales sont faciles à prévoir : qu'est-ce autre chose, en eflet,
» que la mémoire, l'association des idées et le jugement qui en
» résulte, sinon l’expression de ce double pouvoir de conservation
» et de transmission des impressions reçues et modifiées par les
» différentes espèces de cellules nerveuses. » |
» Les impressions sensorielles, une fois perçues et transformées
» en idées, sont eminagasinées par le cerveau ; elles s'appellent;
» elles s'associent les unes aux autres en vertu de l’automatisme
» spontané de ces cellules et de leur influence réciproque, pour
» donner naissance aux actes plus complexes de l’entendement,
» tels que la comparaison, le jugement, ete. L’imagination elle-
» même n’est qu'un mode particulier de l’activité des cellules céré-
» brales qui, après avoir absorbé et retenu les impressions senso-
» rielles, les travaillent isolément, les amplifient d’une manière
» toute spéciale et les font apparaître sous des formes plus vives et
» des colorations plus brillantes. — Pages 137 et 138. »
Est-ce qu’il n’est pas contradictoire de soutenir que lo mémoire,
le jugement, le raisonnement, etc., sont le résultat du double pou-
voir de conservation et de transmission des cellules cérébrales et
d'admettre en même temps que ces cellules présentent continue-
ment un double mouvement de composition et de décomposition,
d’où résulte leur rénovation moléculaire.
Mais les physiologis'es spiritualistes seraient-ils fondés à nous
dire :
« Tout ce que vous venez d’éerire touchant les opérations intel-
» lectuelles ne prouve rien contre la nutrition telle que nous la
» Compreuons : Cela ruine simplement les doctrines matérialistes
» et fournit des preuves en faveur de l’existence de l'âme; car, si
» les idées se forment, si la mémoire existe, si toutes les autres
2
MON: CES
» opérations intellectuelles s’exécutent au milieu du tourbillon
» vital, n'est-il pas de la dernière évidence que ces opérations
» intellectuelles ne dépendent pas de la matière, mais qu’elles
» sont dues à un être simple, immatériel, un, indivisible, impéris-
» sable, en un mot à une âme?»
Non, les spiritualistes ne seraient pas en droit de nous tenir un
pareil langage, parce qu’il leur est impossible, sans nier les faits les
mieux constatés, de mettre en doute l’activité du cerveau dans les
actes intellectuels. |
Nous n’examinerons pas iei les doctrines spiritualistes et maté-
rialistes au point de vue physiologique, car cela nous éloignerait
de notre sujet, nous obligerait de rechercher Îes causes des pro-
priétés de la matière organique, de nous demander à quoi sont dus
les phénomènes merveilleux qui se révèlent à nous sous la forme
de l'attraction, de l’affinité, de l’instinet et de l'intelligence, et de
sortir du domaine scientifique, dans lequel nous désirons rester,
pour nous engager sur le terrain peu sûr de la métaphysique.
11 nous suffira pour prouver que le cerveau a un rôle actif, effectif
dans les opérations intellectuelles, de rappeler que la pensée, la
conscience, la liberté, la volonté n’existent pas sans cerveau ; qu'il
y à une embryogénie de lintelligence comme une-embryogénie
cérébrale ; que le développement de la pensée est parallèle au
développement du cerveau ; qu’à l’atrophie de cet organe corres-
pond une atrophie intellectuelle; qu'il est des substances qui
hébètent, qui alourdissent l'esprit, comme l’opium, tandis que
d’autres, comme le calé, le rendent plus fin, plus subtil; que les
émotions morales vives, peuvent amener et aménent, en effet, la
folie; que la folie est héréditaire; qu'enfin, le caractère, cette
constitution morale de l’individu dépend de la pulpe cérébrale et
même de l’alimentation.
Nous donnerons encore une autre preuve, qui nous parait
péremptoire, de l’activité du cerveau.
Il est bien des fous qui ont des moments de lucidité. La folie ne
se montre chez eux que par intervalle. Eh bien ! la plupart de ces
malheureux sentent venir le moment de l'attaque; ils avertissent
alors les personnes qui les entourent de se retirer, parce qu’ils
comprennent que dans le délire ils pourraient les blesser, peut-
être même les tuer. Dans cet instant terrible, ils emploient toute
l'énergie de leur volonté, 1ls luttent avec l'intelligence qui n’est
04
pas encore troublée, contre le mal qui les envahit; mais, hélas!
c'est peine inutile, la folie éclate dans toute sa fureur.
lei, peut-il y avoir du doute ? N'est-ce pas la matière qui agit,
qui commande et qui règne en souveraine ? Le cerveau n’est donc
pas un organe passif, quelque chose comme un instrument entre
les mains d’un artiste. Et, puisqu'il en est ainsi, les spiritualistes
ne sauraient, pas plus que les matérialistes, admettre la rénovation
continuelle des tissus.
Aux nombreuses objections que nous avons déjà faites contre
les enseignements de MM. Cuvier, Robin et Verdeil sur la nutri-
tion, nous en ajouterons d’autres, parce qu'elles sont plus frap-
pantes et qu’elles nous sont fournies par des faits que tout le monde
peu facilement observer.
Voyons d’abord l’hibernation.
Un grand nombre d'animaux parmi les insectes, les reptiles et
même les mammifères, passent l'hiver dans un état d’engourdisse -
ment, de torpeur, que l’on désigne sous le nom de sommeil
hibernal, Durant ee sommeil, qui peut se prolonger au-delà de six
mois, presque toutes les fonctions s’accomplissent, ralenties, il est
vrai, et pourtant les animaux qui y sont soumis ne prennent
aucune nourriture.
Or, si la désassimilation avait lieu d’une manière continue, ces
animaux maigriralient rapidement, et ils mourraient dès que leurs
corps auraient perdu les #0 centièmes de leurs poids normaux.
C’est ce qui n’a pas lieu : au retour de la belle saison, les animaux
hibernants sortent de leur retraite d’hiver, pleins de vie, alertes
ct pas trop amaigris. Get amaigrissement s'explique très-bien,
sans faire intervenir la dénutrition par la combustion des maté-
riaux respiratoires, surtout des graisses, et par les pertes résultant
des autres fonctions en exercice.
MM. Robin et Verdeil ne peuvent nous dire que durant ce som-
meil les actes intimes de la nutrition sont ralentis ou suspendus ;
ils ne peuvent pas soutenir davantage que la graisse accumulée
pendant la période de réveil fournit à l’assimilation, puisqu'ils ont
écrit, pages 278, 279 et 280 :
« Rien de moins soumis à une prévision quelconque que ce
» mouvement de décomposition, de dédoublement et d'expulsion
» des principes immédiats, nuisibles ou utiles Au contraire. ceux
» qui, introduits accidentellement, nuisent aux fonctions en alté-
tt RS
rant les éléments, étant ceux dont les combinaisons présentent
la plus grande fixité de tons, sont ceux qui se décomposent avec
la plus grande difficulté et sont le plus difficilement remplacés
par d’autres. Quant aux principes normaux, on pourrait croire
que lorsqu'on cesse tout exercice qui demande une grande
dépense de force, leur mouvement de décomposition cessera
aussi ou du moins seralentira au point de permettre la cessation
absolue ou presque absolue d'aliments. Mais il n’en est rien :
l’exhalation de l'acide carbonique, le dédoublement des subs-
tances organiques, en urée, acide urique, créatine, elc., n’en
continuent pas moins, et le décroissement du volume du corps
morche d’une manière rapide.
» Les corps gras, dira-t-on, sont des principes immédiats ali-
mentaires, en réserve pour suppléer aux substances alibiles
introduites du dehors lorsque celles-ci viennent à manquer.
Mais la raison est mauvaise, car 1 est bien vrai que ces prin-
cipes disparaissent par un lent mouvement de décomposition ;
mais, pour cela, les principes qui constiluent les éléments ana-
tomiques des autres tissus n'en disparaissent pas moins. On ne
voit pas que les premiers remplacent les seconds, et que les vissus
formés par ceux-ci soient conservés. Les uns et les autres dis.
paraissent, les uns plus, les autres moins vile, mais tout ne
disparait pas moins. Il y a bien quelque chose de moins brutal
dans le mouvement de décomposition, comparé à l’énergie et à
la rapidité avec lesquelles un principe étranger à ceux des corps
organisés se combine aux leurs; mais aussi rien de plus fatale-
ment nécessaire et continu que la décomposition de ces prin-
cipes normaux. »
Est-ce clair ?
Passons au développement des œufs des animaux dits ovipares.
Nous prendrons pour exemple un œuf d'oiseau fécondé. La
quantité de matière liquide et solide qu’il contient est parfaitement
déterminée ; elle ne peut ni augmenter, ni diminuer, si ce n’est
par la respiration. Si nous plaçons cet œuf dans les conditions que
suppose son développement, nous ne tarderons pas à voir les prin-
cipes immédiats qui le constituent s'organiser et former des
éléments anatomiques qui s’associeront à leur tour pour donner
naissance à des organes composés, lesquels constitueront par leur
réunion des appareils dont l’association formera l'individu.
D
2 ee Es,
Tous ces phénomènes d'organisation supposent la fixité des com-
binaisons moléculaires d’où ils dérivent, car, si dès qu’un élément
anatomique était formé, 1l se décomposait d’une manière continue
pour se recomposer, les produits de la désassimilation ne tarde-
raient pas à vicier le blastème de l'œuf et à s'opposer ainsi à son
développement. En admettant même que les produits de la décom-
position n’altérassent pas le blastème, au point d'empêcher dans
son sein les phénomènes de genèse spontanée, l'œuf ne tarderait
pas à être arrêté dans son évolution faute de matériaux organisa-
bles : les produits régressifs, de l’aveu de tous les physiologistes,
ne pouvant entrer dans la composition d'aucun organe.
Les insectes et les autres animaux qui peuvent supporter durant
des mois une diète absolue, prouvent encore contre la désassimi-
lation.
Enfin, nous emprunterons un dernier argument à une coutume
bizarre, répandue parmi les peuplades sauvages et pratiquée chez
les Européens dans des limites restreintes; nous voulons parler du
tatouage.
Le tatouage, comme tout le monde le sait, a pour but et pour
effet de produire sur le corps des dessins indélébiles.
Les procédés employés pour arriver à ce résultat sont très-
nombreux ; nous ne les examinerons pas. Ce qui nous importe,
dans ce moment, c’est de rechercher la cause del’indélébilité des
dessins. Cette indélébilité est-elle due à la matière colorante qui
reste dans les tissus, ou bien cette matière colorante agit-elle
sur les Lissus, et puis disparait-elle ?
Le Dictionnaire encyclopédique est très-clair à cet égard. On
trouve au mot tatouage : « Quant aux dessins tatoués dont nos
» marins et nos soldats ornent parfois leurs poitrines ou leurs
» bras, ils s’obtiennent en piquant la peau jusqu’au vif avec une
» aiguille, et en versant sur ces piqüres de la poudre à canon
» finement pulvérisée. On met le feu à la poudre, et les parti-
» Cules qui pénètrent dans la peau en la colorant en bleu, rendent
» indélébiles les traces de ces piqüres. »
Nous citerons à l'appui de cette opinion, nos propres ah à
tions :
Dans plusieurs circonstances, nous avons donné des soins à des
soldats qui avaient été blessés dans des parties du corps tatouées.
Ces blessures donnèrent lieu à une suppuration abondante qui
= (OU
dura plusieurs mois, et ecpendant les dessins tatoués ne disparu-
rent pas : l'intensité de leur couleur diminua seulement.
Or, il n’est pas possible de nier le pouvoir d'élimination de la
suppuration, et l'on peut dés-lors affirmer que si la matière colo-
rante avait existé dans ces tissus, elle aurait été chassée au dehors:
et par suite le tatouage aurait dû disparaître complètement.
D'après ce que nous venons de dire, on conçoit que les vési-
catoires ne peuvent pas non plus enlever les dessins tatoués ; c’est
aussi Ce que nous avons constaté.
Enfin nous ferons encore remarquer que les matières colorantes
employées sont absorbées, comme l’indique la coloration des gan-
glions lymphatiques.
Nous conclurons donc, jusqu’à preuve du contraire, que les
tissus sont colorés par le tatouage; ct nous sommes en droit,
puisque cette coloration est indélébile, de tirer decette pratique un
argument contre la dénutrition
Nous n'insisterons pas davantage sur le tourbillon vital de
Cuvier, et sur l'enseignement de MM. Ch. Robin et Verdeil. Nous
ex avons dit assez pour prouver qu'ils sont contraires aux faits et
aux sciences de la vie, et nous nous résumerons en disant :
Qu'il est faux que « partout où un corps organisé manifeste une
» propriété quelconque de sensibilité ou seulement de sécrétion,
» reproduction, développement, il y ait de toute nécessité, dans la
» matière de ce corps, une allée et une venue de matériaux. »
Qu'il est faux que « cette allée et cette venue soient la condi-
« tion d'existence de tout autre phénomène organique ou vital ; »
Qu'il est faux, enfin, que « tant qu'elles existent il y ait vie,
« que dès qu’elles cessent, il y ait mort. »
Tout cela est faux pour toutes les raisons que nous avons don-
nées ; c’est faux encore, car les spores, le pollen, les graines, les
œufs, les insectes et les reptiles gelés sont vivants. La vie, il est
vrai, est dans ces corps in potentid non in artu, mais enfin ils ne
sont pas morts ; s'ils l’étaient, 1ls ne tarderaient pas à se décom-
poser. Eh bien, dans les spores, le pollen, etc., il n’y a ni allée
_ni venue de matériaux.
C2
Mais pour réfuter d’une manière complète la doctrine du renou-
vellement moléculaire, il nous faut encore prouver qu’elle n’est
pas justifiée davantage par la seronde théorie, c’est-à-dire en attri-
SAUT de
buant la décomposition à l'oxydation, et la réparation des per-
tes qu'elle occasionne aux aliments.
Nous ferons tout d’abord remarquer que le plus grand nombre
des objections que nous avons faites à la théorie de Cuvier et de
MM. Robin et Verdeil, ne s'adressent pas seulement aux causes
qui déterminent l'association et la désassociation, mais encore et
surtout au fait même de la rénovation des tissus.
Qu'il faille attribuer à l’oxydation ou à des actes chimiques
directs et indirects les phénomènes de décomposition, il n’en
résulterait pas moins que les fonctions seraient troublées, empê-
chées même ; que l’hibernation serait incompatible avec la vie ;
que le développement de l’œuf serait impossible, etc.
Mais il est facile de démontrer la fausseté de cette seconde
théorie, non-seulement en discutant les phénomènes nutritifs tels
que les comprennent les partisans de l'oxydation, mais encore en
altaquant les causes de ces phénomènes.
En effet, si l'oxygène brülait la trame solide des tissus, il devrait,
indépendamment des aliments dits respiratoires, oxyder dans le
sang les substances protéiformes, puisque ces substances ont la
plus grande analogie avec celles des issus ; et il adviendrait alors
que tout l'oxygène introduit à chaque inspiration, serait rapide-
ment engagé dans des combinaisons, et qu’il se trouverait insuffi -
sant pour aller avec les plasmas former les milieux intérieurs des
organes. Bien plus, les produits de ces combustions altèreraient
le fluide nourricier et nous trouverions, dans ce fait, un nouvel
empêchement à la formation normale de ces milieux.
Et puis, il est une question qu'il est bien permis de se poser,
et qui aurait dû avant tout être résolue par les partisans de la
combustion des tissus. Cette question est celle-ci: Comment se
fait-il que l'oxygène, qui a une très-grande affinité pour les matiè-
res dites respiratoires, puisse, quand elles existent, attaquer les
issus qui ont une constitution chimique toute différente ?
Si nous consullons les lois les mieux établies de la chimie, elles
nous répondront que cela n’est pas possible, et que les substances
respiratoires doivent toujours protéger les tissus. Mais quand ces
substances font défaut, à se pourrait que l’oxygène allât porter son
action comburante sur les matières alibiles et sur les principes
constituants des tissus. Nous disons il se pourrait, parce qu'il n’est
démontré que ce gaz puisse se combiner avec ces substances. En
me (UD ee
admettant que cette démonstration ait lieu, on ne saurait faire de
ce phénomène une fonction normale de l’économie : il devrait être
placé parmi les’causes de destruction des êtres, puisqu'il aurait
pour effet de hâter la mortde lindividu.
Si l’oxygène attaquait la trame solide des tissus, l’amaigrisse-
ment devrait être en rapport avec l’activité de la respiration. Or,
c’est l’inverse qui a lieu, comme l’indique cette loi physiologique :
Ledéveloppement d’un organe est en rapport direct avec son
exercice.
Il faudrait encore que nous retrouvions dans les sécrétions, les
produits de cette oxydation.
On a bien dit que ces produits n'étaient autres que l’urée et
Pacide urique ; mais c’est là une erreur.
Si Purée et l'acide urique étaient le résultat de l'oxydation des
tissus, ces produits régressifs devraient toujours être en rapport
avec l'activité de la respiration et exister dans tous les organes;
ils devraient encore augmenter avec la diète et n’être nullement
sous l'influence de la nature des aliments. Or, rien de tout cela
ne se vérifie.
Nous disons d’abord que l’urée et l'acide urique ne sont pasen rap-
port avec l’activité de la respiration, et nous basons notre opinion
sur ce fait que l'urine, dite du sang, celle que l’on rend le matin,
est plus dense, plus chargée de ces produits que celle de la jour-
née. C’est l'inverse qui devrait avoir lieu, puisque pendant le
sommeil la respiration est notablement ralentie.
M. Sée, dans son cours sur les anémies, bien qu’il admette
la désassimilation, déclare formellement que ce rapport n'existe
pas, ct il ajoute : « El est aujourd’hui démontré que la destruction
» du muscle ne va pas jusqu'au dernier terme de la série
» rétrograde, c’est-à-dire jusqu’à l’urée, car l’urée n’existe pas
» dans les muscles. »
Cette absence d’urée dans les muscles a conduit M. Sée et
d'autres physiologistes, à abandonner cette idée qui régnait dans
la science, c’est que la force, le pouvoir musculaire, était le résul-
tat de Poxydation des substances protéiques qui constituent les
éléments anatomiques musculaires, et il a admis que cette force
était produite par la combustion des graisses et des hydrates de
carbone.
M. Bence Jones, dans sa conférence sur la matière et la force,
WE es
arrive aux mêmes conclusions , en se basant sur les expériences
des professeurs Frankland et Flint et sur celles du docteur
Parkes.
Les premiers de ces expérimentateurs ont reconnu, en compa:
rant le travail mécanique qui a lieu dans un temps donné,
avec la quantité d’urée produite dans le même temps, que le cin-
quième seulement du travail accompli peut provenir des chan-
gements chimiques qui s’opèrent dans le tissu azoté des mus-
cles.
Les expériences du docteur Parkes l’ont conduit encore plus
loin, puisqu'il déclare que l’action musculaire se lie non à la
décomposition, mais plutôt à la combinaison, et 1l donne pour
preuve la raison que nous avons donnée nous-même pour prouver
que l'oxygène n’attaquait pas la trame solide des tissus, c’est que
le muscle en action s’accroit, alors qu'il diminue, au contraire,
pendant le repos.
M. Sée n’admet pas non plus que l’urée augmente pendant
l’inanition. |
« Le phénomène le plus remarquable, dit-il dans le même
» cours, que l’on observe dnns la sécrétion urinaire pendant
» linanition, c’est la diminution de l’urée. Un homme qui, dans
» l’état ordinaire, rend 28 grammes d’uréc en 2% heures, n'eu
» donne plus que 17 grammes, après une abstinence de 24 heu-
» res, et la quantité va décroissant si l’abstinence se prolonge.
» L’acide urique qui dans l'état normal est représenté par une
» moyenne de 0 g. 50 par jour, tombe à O0 9. 33, par le fait de
» la diète. Par rapport à l’urée, l’acide urique diminue égale-
» ment; ce rapport n'est plus que de 4 : 71 au lieu d'être de
» 4:45, chiffre normal. »
M. Bouchardat, dans son annuaire thérapeutique (année 1868),
n'hésite pas à déclarer que la production de Purée dans l’écono-
mie ne résulte point de l’oxydation, mais du dédoublement des
principes immédiats.
Il avoue qu’il ne peut indiquer d’une manière süre les
organes dans lesquels s’effectucraient ces dédoublements ; mais
ses recherches lui feraient supposer qu’ils ont lieu dans des orga-
nes divers, suivant la nature des matériaux mis en œuvre.
Enfin, l’expérience de tous les jours prouve que les produits
régressifs dont nous parlons, augmentent avec un régime azoté et
A
qu'ils diminuent, au contraire, avec une alimentation, riche en
prineipes féculents. Ce fait est bien connu des médecins, puisqu'ils
recommandent aux personnes qui ont une trop grande quantité
durée et d'acide urique dans leurs urines, de se mettre à un
régime pauvre en matières azotées.
D’après tous les motifs que nous venons de donner, il nous est,
eroyons-nous, permis de conclure que l’urée et l’acide urique ne
sont pas des produits d’oxydation des tissus et qu'ils ont leur
principale source dans les aliments.
Enfin, les partisans des deux théories invoquent encore pour
prouver la dénuirition : 4° la présence de la cholestérine, prin-
elpe constituant du système nerveux, dans les vaisseaux qui reçoi-
vent le sang des extrémités ; 2° Ja perte de poids qu’éprouve un
animal soumis à la diète; 30 la nécessité de prendre des ali-
ments.
Flint, qui est l’auteur du premier argument, a tort, croyons-
nous, de considérer la cholestérine comme un produit de dénu-
trition, car si nous la retrouvons dans le sang qui vient des extré-
mités, ce n’est pas parce que, comme il le pense, le système
nerveux a cédé ce principe, mais par la raison fort simple que les
nerfs le produisent.
Il est aujourd’hui acquis à la science que tous les éléments
anatomiques d’un organisme quelconque, lorsqu'ils sont en acti-
vité, ont la propriété d'agir physiquement et chimiquement sur
les plasmas au sein desquels 1ls vivent, de manière à former
des principes immédiats, identiques à ceux qui les constituent.
Or, la cholestérine étant un des principes constituants du sys-
tème nerveux, celui-ci doit en produire, et 1l est dès-lors tout
naturel que nous la rencontrions dans les vaisseaux qui reçoivent
les produits de ce système.
Quant à la perte de poids qu’éprouve un animal soumis à la
diète, on ne saurait en faire un argument sérieux.
En effet, par la respiration, un homme adulte perd par jour
250 grammes de carbone et une quantité assez grande de vapeur
d’eau ; par les sécrétions, la perspiration, la sueur, elc., il éprouve
encore de grandes pertes. Il est de toute évidence que, s’il ne
se nourrissait pas, il devrait perdre beaucoup de son poids.
Un homme adulte perd ainsi, par jour, au moins 3 kilogram
PER | (RU
mes. Et dans toutes ces pertes, nous ne trouvons aucun produit
de dénutrition.
L’amaigrissement doit donc nécessairement résulter d’une
diète prolongée. Mais cet amaigrissement a encore une autre
ause : Il est aussi produit par la diminution du tissu cellulaire,
du tissu adipeux et des autres tissus, qui acquiérent un grand
développement lorsque la vie est dans toute son activité.
Les aliments que nous prenons journellement servent chez
les jeunes individus, à leur développement et à la réparation
des pertes que leur font éprouver les diverses fonctions qui s’ac-
complissent en eux (la nutrition mise de côté, bien entendu), et
chez l'individu adulte aux fonctions qui les intéressent direc-
tement et à celles qui ont pour but la propagation de l'espèce.
Les aliments servent encore, à tous les âges, à la réparation des
tissus qui sont accidentellement lésés.
C’est donc avec roison que M. Longet dit : « On sait qu'un
» animal adulte, soumis à Îa ration d'entretien ou un homme
» arrivé au terme de sa croissance et nourri avec une grande
» régularité peut conserver le même poids moyen et rendre
» dans les différents produits résultant de l'action organique,
» fèces, urine, sueur, exhalation pulmonaire, etc., une quan-
» tité de matière précisément égale à celle qu'il a reçue par
» les aliments. »
Mais c’est à tort qu’il ajoute : « Pourtant il y a assimiliation
» en ce sens que la matière élémentaire des aliments se fixe
» dans l’organisme en s’y modifiant, pour se substituer à celle
» que le mouvement de désassimilation expulse journellement. »
(Page 1059. Traité de physiologie.)
En rejetant le tourbillon vital de Cuvier, la théorie de l’asso-
ciation et de la désassociation de MM. Robin et Verdeil, et celle
de l’oxydation de MM. Loncet, Milne Edwards, etc., en un mot,
en admettant la fixité des combinaisons qui forment les élé-
ments anatomiques, nous n’obéissons pas à une idée syslémati-
que; mais nous nous rendons à l'évidence des faits, et nous
nous soumeltons aux lois de la logique et de la science.
C’est, croyons-nous, ce que nous avons établi en démontrant
que la nutrition , comme fonction spéciale, n’était justifiée ni
cas TEE Le
par les causes auxquelles on l’attribue, ni par les effets que l’on
dit résulter de ces causes.
De ce que nous nions l’existence de la nutrition, comme fonc-
tion spéciale, dont le rôle serait de renouveler incessamment les
principes constituants des organismes, il ne faudrait pas nous
accuser de rejeter tout acte nutritif. Nous croyons que tous Îles
phénomènes, qui ont pour but de conserver l'individu, sont des
phénomènes nutritifs, et nous pensons que, par extension, l’on
peut donner ce nom à tous ceux qui forment, développent et
propagent les êtres.
Aux nombreuses raisons que nous avons données pour prouver
notre thèse, nous aurions pu en ajouter un grand nombre d’au-
tres que nous auraient fournies le règne végétal et le règne animal ;
mais pourquoi les aurions-nous données, puisque ce que nous
avons dit suffit et au-delà pour démontrer l'exactitude de nos idées.
Cependant, avant de formuler notre conclusion définitive, nous
demanderons à ceux qui soutiennent que Îles tissus sont sans
cesse renouvelés par un double mouvement de composition et
de décomposition, comment il se fait que la vie passe par des
phases, que l’on désigne chez l’homme sous les noms, d’enfance,
de puberté, d'âge mür et de vieillesse, et aussi comment la
mort peut arriver. |
_ Quant à nous, nous pensons que si au fur et à mesure que
les matériaux étaient usés, ils se trouvaient remplacés par de
nouveaux, la vie d’un animal ou d’un végétal devrait être uni-
forme et sans fin; et si nous pensons ainsi, c’est parce que nous
sommes convaincu que la vie d'un être organisé est due d’abori
aux propriétés des principes constituants des tissus et puis aux
fonctions.
Nous n’insisterons pas davantage sur la nutrition, cette préten-
due fonction qui doit être rayée de nos traités de physiologie, et
nous terminerons celte étude critique en formulant ainsi notre
conclusion définitive.
Il y a dans l’économie des êtres organisés un véritable tourbil-
lon vital, un échange, un renouvellement continuel de molécules ;
mais ce tourbillon vital, cet échange, ce renouvellement moléculaire
n'est vrai que pour les gaz, les liquides organiques et les substun -
ces dites respiratoires, et nullement pour les principes immédiats
qui forment la trame solide des tissus.
— 7h
Les organismes sont de véritables machines qui possèdent en
elles-mêmes les principes de leurs actions, qui pour exister norma-
lement ont besoin d’agir et pour agir ont besoin d'aliments ; mais
en agissant, elles s’usent et il arrive un moment où l'usure est
telle, qu’elles eessent. de fonctionner : ce moment, c’est la mort!
c'est-à-dire l’instant fatal où ces individus disparaissent et où les
matériaux qui formaient leurs corps vont, selon leurs degrés
de décomposition et les conditions dans lesquelles ils se trouvent,
s'unir et donner naissance par hétérogénie à des protoorganismes,
ou bien rentrer dans les milieux ambiants pour aller, soit dans le
monde organique, soit dans le monde inorganique, recommencer
leurs rôles, toujours les mêmes et toujours nouveaux.
M. Lavocat, à propos de la communication précédente, prend
la parole.
Il déclare qu'il demeure persuadé que la matière est mobile,
que la forme seule persiste. Le volume des organes est variable ;
ils augmentent jusqu’à un terme — dans des cas pathologiques,
ils sont atrophiés; il est difficile de comprendre que l'ali-
mentation soit une acquisition perpétuelle de molécules non
employées ; — le travail cellulaire est constant. On ne saurait
admettre une cellule inactive, éternelle, bien que la difficulté de
comprendre une cellule nouvelle en fonction, à côté des cellu-
les adultes , fasse partie des régions obscures ; l’objection tirée du
tatouage tombe devant cette hypothèse que les molécules de la
peau qui sont colorées , sont des éléments frappés de mort; les
expériences faites sur les os sont des arguments en faveur du mou-
vement moléculaire. La nutrition de l'os est très-lente, vu le peu
d'éléments utiles dans le sang; — il semble qu'il y a un moment
où l’os reçoit moins et perd autant qu’autrefois : l'os du vieillard
devient fragile. — Quant aux animaux hybernants , ils s’endor-
ment gras et rondelets et se réveillent maigres.
La question de l’urée est une de celles où l’on craint toujours que
les réactifs ne vous trompent.
M. Lavocat entre dans quelques détails plus précis sur la choles-
térine et les expériences avec la garance, et il établit, en terminant,
que dans la vieillesse, la formation de nouvelles cellules se ralentit.
M. Gourdon, se rattachant à l’opinion qui ne comprend pas
= AO
l'organe vivant sans le mouvement rénovateur, annonce qu’il
entrelendra la Société de la nutrition, dans une autre séance.
Séance du 47 juin 1870.
Présidence de M. le professeur Gourpon, vice-président.
La Société reçoit :
Académie de Stanislas, mémoires, 1 vol. Nancy.
Revue médicale de Toulouse. |
Journal d'agriculture pratique, 3° série, t. XXI, Toulouse.
Les adhésions suivantes :
Socièté impériale d'Agriculture, Sciences naturelles et Arts
utiles de Lyon.
La Société à pris connaissance de votre lettre dans sa dernière
séance.
La démarche que vous entreprenez en faveur d’une réorganisa-
tion sérieuse de l’enseignement des sciences naturelles, ne pouvait
rencontrer que les sympathies les plus vives, auprès de la Société
d'Agriculture, Histoire naturelle et Arts utiles de Lyon. Tous les
membres de la Société que jai l'honneur de présider sont una-
nimes à reconnaitre que l'Université donne trop peu de place à
l’histoire naturelle dans ses programmes , et à regretter que les
quelques leçons qui sont encore consacrées à cette branche soient
pour ainsi dire signalées comme des leçons de peu d'importance,
par ce seul fait qu'on ne leur donne pas même la sanction des
examens. Ceux de mes collègues qui appartiennent à l’enseigne-
ment, savent combien des leçons dans ces conditions-là sont négli-
gées des élèves !
Nous ne saurions, Monsieur le Président, exposer en meilleurs
termes que vous, l’importance et l'utilité des études dont vous
plaidez la cause auprès du Ministre de l'instruction publique, la
part trop restreinte qui leur est dévolue dans l’enseignement
secondaire et l'urgence d’une prompte réforme à cet égard, Je me
bornerai donc à vous dire , au nom de tous mes collègues, que
nous sommes avec vous en parfaite conformité de vues, que nous
76 —
associons nos vœux aux vôtres, et donnons à votre démarche notre
entière adhésion.
Il est impossible que des vœux qui doivent être ceux de toutes
les sociétés savantes ne soient pas écoutés, et que les études natu-
relles restent plus longtemps aussi négligées qu’elles le sont aujour-
d’hui. Quand elles auront reconquis la place qui leur est due
c'est à votre Initiative qu’elles en seront redevabies. Que la Société
d'Histoire naturelle de Toulouse reçoive à ce sujet les félicitations
de la Société d'Agriculture, Histoire naturelle et Arts utiles de
Lyon.
| Praron, président.
P. Lorenri, secrétaire général.
Socièté des Sciences historiques et naturelles de Semur (Côte-d'Or).
J'ai soumis à la Société des sciences historiques et naturelles de
Semur, la pétition que vous vous proposez d’adresser à Son Excel-
lence le Ministre de l'instruction publique, pour lui demander de
donner plus de développement à l’étude des sciences naturelles
dans le programme de l’enseignement secondaire.
Des connaissances étendues en histoire naturelle sont non seu-
lement utiles, mais, er quelque sorte, nécessaires dans toutes les
positions sociales ; la Société de Semur s’empresse done de donner
une entière approbation à une réclamation qui présente un véri-
table intérêt; elle s’associe à vos efforts, et elle espère que vous
obtiendrez un résultat qui sera un bienfait pour toutes les classes
de la population. |
À. Bruzarp, président.
Société impériale des Sciences, de l’Agriculture et des Arts
de Lille.
J'ai l’honneur de vous adresser copie de la délibération qu’a
prise la Société des sciences, de l'Agriculture et des Arts de Lille,
au sujet de la communication que vous lui avez faite dans l'intérêt
de l’enseignement de l’histoire naturelle dans les lycées. J’y joins
le rapport de la commission de la société, adopté en séance le
3 juin 18”0.
Mencax pe Loisnes, président.
Extrait du registre des procès-verbaux de la séance du 3 juin 1870.
e ° . . LOU 4 L L . L o [1 . . L2 . . . . . . L] [2 . . . . . . L1 L]
« M. Dareste lit un rapport concluant à s'associer à la pétition
ne
que la Société d'Histoire naturelle de Toulouse doit adresser
au Ministre de linstruction publique pour que l’on prenne des
mesures à l’efiet de développer l'étude de histoire naturelle dans
les lycées, et de l’introduire dans le programme des matières exi-
gées pour le baccalauréat.
» Après une discussion à laquelle prennent part MM. Guiraudet,
Testelin, Blanquart et Gosselet, les conclusions de ce rapport sont
adoptées. »
Rapport sur une demande de la Société d'Histoire naturelle de Toulouse, par
MM. Corenwiver, Curesmen, Tesrezin ef Dareste, rapporteur.
La Société d'histoire naturelle de Toulouse, voyant avec peine
la part si restreinte qui est faite actuellement dans l’enseignement
secondaire à l'étude des sciences naturelles, a rédigé une pétition
au Ministre de l’instruetion publique, pour le prier d’améliorer
une situation si regrettable à tous égards. Pour donner plus de poids
à sa parole, et pour en assurer le succés, elle demande le concours
des Sociétés scientifiques de France. Nous sommes donc invités à
lui prêter notre appui. La Commission a pensé que la Société de
Lille devait s'associer à la démarche de la Société de Toulouse
pour les motifs suivants.
Ïl serait inutile d’insister longuement sur les avantages de l’en-
seignement de l'histoire naturelle. Contentons-nous seulement de
rappeler que l'instruction d’un homme ne peut être considérée
comme véritablement complète, s'il ignore les principaux faits de
l'organisation et de la vie des animaux et des plantes; s’il ne
connait pas, au moins dans Îles traits les plus généraux, la struc-
ture et l’histoire de la terre ; si son intelligence restée fermée aux
grandes découvertes de cette science, qui compte, dans notre pays
seulement, de si grands noms, les Buflon, les Cuvier, les Jussieu,
les Geoffroy Saint-Hilaire, et tant d’autres. Mais elle se recom-
mande encore plus peut-être par son influence sur l'esprit. Comme
elle repose entièrement sur des faits réels, elle est avant tout,
quoique d’une manière non exclusive, uue science d'observation,
et, plus peut-être que toute autre étude, elle force l'esprit, dans
l'examen d’une question, à tenir compte de tous les éléments de
la réalité et à rejeter toutes les idées préconçues ou systématiques,
qui donneraient une vue inexacte et fausse des objets. Assurément
bien peu d'hommes sont appelés à être naturalistes : mais tous
EP le |
peuvent et doivent profiter de la salutaire discipline que l’étude de
celle science imprime aux intelligences.
Quant à l’atlité pratique de l’enseignement de fhistoire natu-
relle, qui pourrait méconnaître que la médecine et l’agriculture
ne sont oue les applications de cette science ? Mais en dehors même
de toute considération professionnelle, est-ce que tous les hommes
re sont pas appelés à être chefs de famille, et à pourvoir, à ce
titre, à l’éducation physique, à la santé de leurs enfants ? N'est-ce
pas l’histoire naturelle, considérée dans sa partie physiologique,
qui forme la base de toutes les règles de l'hygiène, et qui apprend
aux hommes comment ils peuvent prévenir les maladies et
améliorer les conditions sanitaires de tous ceux au besoin des-
quels ils sont appelés à veiller ? Et pourtant, il suffit de regarder
autour de soi pour voir combien ces règles sont généralement
méconnues ou enfreintes.
Toutes ces considérations avaient engagé l’administration de
l'instruction publique, au lendemain de juillet 4830, à faire sa
part, dans l’enseignement secondaire, à l'étude de l'Histoire natu-
relle. Pendant trente ans, cet enseignement a existé dans les
établissements de l'État, dans des conditions trop restreintes peut-
être, et avec des ressources insuffisantes ; toutefois, il a donné,
pendant cette époque, d'excellents résultats. Un certain nombre
de jeunes gens sortaient des lycées avec des notions d'histoire
paturelle assez étendues. Mais depuis quelques années les choses
ont bien changé.
Si l’on excepte les lycées de Paris, l’enseignement de l'histoire
naturelle dans les lycées n’a jamais été ce qu’il aurait dû être, et
donné les résultats qu'il aurait pu donner, par suite de diverses
causes : d’abord, par le manque de professeurs spéciaux, qui
obligeait de le confier à des professeurs de physique n'ayant pas,
pour la plupart, spécialement étudié les matières qu’ils étaient
chargés d’enseigner ; ensuite, par le manque plus ou moins com-
plet du matériel nécessaire. Mais, depuis quelques années, celte
situation, déjà mauvaise, est devenue plus mauvaise encore par la
mesure qui à retranché l’histoire naturelle dans l’examen du bac-
calauréat ës-sciences complet. Aujourd’hui, l'étude de l’histoire
naturelle n’a plus de sanction officielle que par sa présence au
baccalauréat ès-sciences restreint, exclusivement réservé aux étu-
diants en médecine.
ms RON) me
Ce qui est résulté de cette mesure, c’est que la part de l’histoire
naturelle, dans l’enseignement normal des lycées, a été restreinte
autant que possible. Il n'existe plus aujourd’hui qu’un seul cours
de 25 leçons pendant la classe de seconde, et encore le nombre
réglementaire de ces leçons est-il souvent éliminé. Mais ce qu'il y
a encore de plus grave, c’est que les élèves n’accordent qu’une
attention très-médiocre aux leçons du professeur, ou même se
refusent absolument à consacrer une part, si minime qu’elle soit,
de leur temps, à des études qui ne sont pas représentées aux
examens.
Ainsi donc, à l'heure qu'il est, l’enseignement de l’histoire
naturelle est à peu près nul dans les lycées, et nous pouvons
ajouter aussi, à bien plus forte raison, dans les établissements
libres, encore moins bien pourvus que les établissements de l'Etat
en professeurs et en matériel. Reste seulement l’enseignement
spécial, où l’histoire naturelle a sa place marquée en une place
importante ; mais cet enseignement est d’une origine encore trop
récente pour que l’on puisse en apprécier les résultats, D'ailleurs,
quel que soit l'avenir qui lui est réservé, il ne sera jamais suivi
que par une partie de la jeunesse française.
Les conséquences d’un pareil état de choses sont trop manifeste-
ment évidentes. Ceux d’entre nous qui, chargés d’examiner pour
le baccalauréat, sont par cela même en mesure de constater l’état
de l’enseignement dans notre pays, n’ont que trop souvent l’occa-
sion de reconnaitre que, dans le baccalauréat restreint, celui qui
ouvre la carrière médicale, les candidats sont généralement nuls
en histoire naturelle, et qu'il est infiniment rare de rencontrer
quelques réponses satisfaisantes. Cette année, par exception, trois
élèves du lycée de Lille ont subi cette épreuve avec distinction ;
mais 11 a fallu, pour obtenir ce résultat, que l’administration si
intelligente de notre lycée envoyât ces jeunes gens suivre le cours
de Ja Faculté des sciences, pour suppléer à l'insuffisance presque
absolue du cours qu'ils avaient dû suivre, deux ans auparavant,
dans la classe de seconde.
Si nous ne craignions de donner à ce rapport, déjà bien long,
une trop grande étendue, nous pourrions montrer cet autre fait
que, tandis que dans d’autres pays, les sciences naturelles se
développent incessamment, grâce à tous les encouragements
qu'elles trouvent dans l'administration et surtout dans le public,
es 0
elles sont très-généralement abandonnées en France, dans la patrie
des grands naturalistes que je citais plus haut, et qui ont pu être
égalés, mais jamais surpassés. Le manque de naturalistes est tel,
que le recrutement des chaires dans les Facultés des sciences est
souvent difficile.
Il va donc là un danger sérieux, dans notre pays, pour l’ins-
tuction publique en général, et pour l'avenir des sciences natu-
relles. Aussi la Commission n’hésite-t-elle pas à vous proposer
d'appuyer de votre autorité morale la pétition de la Société d'his-
toire naturelle de Toulouse. Elle n’ignore pas, il est vrai, les diffi-
culiés très-graves que soulète une pareille question. Il faut bien
reconnaitre que le mal que nous signalons a sa racine dans notre
société elle-même beaucoup plus que dans l’Université. L’ensei-
gnement de l’histoire naturelle, comme celui de toutes les autres
branches du savoir humain, est aujourd’hui, plus que jamais,
dans une lutte incessante contre les progrès que fait tous les jours
l'instruction hâtive. Dans .une société démocratique comme la
nôtre, où toutes les positions sont accessibles à tous, les diplômes
qui ouvrent l'entrée des carrières sont devenus, pour la plupart
des enfants et aussi pour la plupart des familles , le but palpable
et unique des efforts de l'élève et des sacrifices souvent onéreux
que les familles doivent s’imposer. De là des réclamations qui
s'élèvent de toutes parts contre la durée des études , contre l’éten-
due des programmes , contre la difficulté des épreuves de l’exa-
men; et malheureusement ces réclamations sont trop souvent
écoutées , trop souvent l’administration a la main forcée et cède à
une pression qu’elle devait combattre. Il ne nous appartient pas
d'indiquer les moyens pratiques de réagir contre cette fâcheuse
tendance d’une partie de la société française. Tout ce que nous
pouvons faire aujourd’hui, c'est de nous associer à une démarche
que nous approuvons, et d'appeler l'attention de l’Université et de
tous les hommes intelligents sur un état de choses regrettable à
tous égards, et qui, s’il se prolongeait, finirait par porter atteinte à
l’une des causes de la grandeur morale de la France, en amoin-
drissant sa gloire scientifique.
Société d'Agriculture du département de la Haute-Garonne.
J'ai l'honneur de vous transmettre copie de la délibération de la
Société d'agriculture de la Haute-Garonne , demandant que l’en-
di op 2
seisnement des sciences naturelles recoive un plus grand dévelop:
pement. La Société .a été heureuse d’avoir l’occasion de vous témol-
euer une adhésion complète à vos vues.
Caussé, serrélaire général.
Dans sa séance du 4 juin 1876, la £ociété d'agriculture de la
Haute-Garonne à pris la délibération suivante :
Convaineue de l'incontestable utilité des sciences de la nature,
sincèrement reconuassante des lumières qu’eiles lui fournissent
tous les jours, la Société d'agriculture de [à Haute-Garonne regrette
qu’elles aïént une part si minime daus lenscignenient secondaire.
D'un autre côté, elle sait de bonne source que les professeurs des
facultés se plaignent également de voir l’histoire naturelle occuper
une place si restreinte dans les programmes du baccalauréat.
Signaler le mal, c'est avoir la presque certitude qu'il y sera
apporté un remède aussi prompt qu’efficace.
Pour ce motif, la Société d'agriculture de la Haute-Garonne
tout entière s’assucie de grand cœur aux doléances respeclueuses
et aux vœux si pleins d’espoir de la Société d'histoire naturelle de
Toulouse, et prie instamment M. le Ministre de l’insiruction publi-
que de donner le plus tôt possible aux uns et aux autres une légi-
time salisfaction.
Société des Amis des Sciences naturelles de Rouen.
J'ai donné, à la séance d'hier, lecuure de la pétition que vous
m'avez fait l'honneur de m'adresser.
Les membres présents, à l’unanimité, ont aceucilli par acelama-
tion l’heureuse inspiration qui vous guide dans une si noble voie.
Aussi, interprète de tous mes confrères, je m’empresse de vous
adresser des félicitations sincères et de vous ap porter notre assen-
timent à la coopération de l'œuvre, au succès de laquelle ne man
queront pas de s’intéresser toutes les natures d'élite.
E. BocriLuer, président.
Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Rouen.
J'ai l'honneur de vous adresser ei-inclus le Rapport fait à
l’Académie, sur la pétition en faveur des sciences naturelles que
vous vous proposez d'adresser à M. le Ministre de l'instruction
publique. Notre Compagnie en a approuvé les conelusions et à
donné une adhésion complète aux réformes que.vous proposez. Je
6
D
to
suis personnellement trés-heureux de l'iuiliative que vous avez
prise et je lui souhaite tout le succès qu’elle mérite.
À. MAL8RANCHE, secrétaire perpétuel.
Rapport par MM. le Dr Duwesni, Houzeau, Dr More, Marsnanone el Fiscner,
rapporteur.
Messieurs, les membres de la commission chargée d'examiner
la pétilion qui vous a été communiquée par la Société d’histoire
naturelle de Toulouse ont échangé leurs idées à ce sujet, et J'ai
l'honneur de vous présenter le rapport de votre commission.
Unanimes sur le principe qui a inspiré la demande à faire au
ministère de l'instruction publique, de donner plus de place aux
études d'histoire naturelle dans les cours classiques des lycées ,
nous avons reconnu que le lycée doit effectivement à ses élèves un
enseignement encyclopédique comprenant des notions claires,
sommaires et exactes sur l’ensemble des connaissances humaines
et permellant de rattacher à une méthode bien exposée et iacile-
ment saïsie tout développement ultérieur d’études spéciales ; que
c’est en vain qu'on dirait que les exercices littéraires et les mathé-
matiques , en fortifiant le goût et le jugement des jeunes gens ,
les préparent suffisamment à toutes sortes d’études, car les scien-
ces naturelles ont une méthode et un langage qui, leur sont pro-
pres et qui restent lettre close pour quinces’en est pas occupé
dans de bonnes conditions ; que, d’ailleurs, les sciences naturelles
ontacquis une telle importanes dans notre vie sociale, qu’il n’est
plus possible à un homme bien élevé , soit législateur, juge ,
avocat, soit administrateur, officier, ministre d’un culte, ingé-
nieur, commerçant, industriel, littérateur, etc., d'en ignorer les
principaux résultats , et que, n'étant considérées que comme
aliment de l'intelligence et du cœur, elles devraient occuper un
très-haut rang daus l’éducation de la jeunesse.
Nous aecordons done facilement à nos honorables confrères de
Toulouse que le temps donné, dans nos programmes d’études, aux
sciences naturelles, en particulier à l’Histoire naturelle, qui n’y
figure qu’avec un contingent d’une heure par semaine dans une
seule année, celle de seconde, n’est vraiment pas suffisant ; et
considérant, en outre, que l'Histoire naturelle est justement la
branche la plus attrayante des sciences de la nature et propre à
captiver, bien conduite, même des intelligences très jeunes, nous
— 83 —
pe sons qu’il y à lieu d'adhérer à la proposition toulousaine et de
nous associer à la généreuse initiative contenue dans ce docu-
ment.
Il ne faut cependant pas se dissieuler les difficultés que ren-
contrerait ce projet de donner plus d'extension à l’étude de
l'Histoire naturelle.
D'un côté, on a relevé la surcharge des programmes actuels et
la grande préoccupation du baccalauréat.
Déià écrasés du travail obligatoire, nos élèves trouveraient:ils
encore du temps pour d’autres études, utiles et attrayantes sans
doute, mais qui n'ont pas la sanetion de l'examen ? ou faudrait-1l
diminuer encore la préparation littéraire, pour faire la part dési-
rée, et dans les études et dans Jes examens, aux sciences natu-
relles? Loin de nous la pensée de vouloir abaisser le nivean de
l'éducation littéraire. |
C’est certes ce grand héritage intellectuel et moral que nous ont
ligué les Platon et les Cicéron, les Sophocle et les Virgile, qui
doit toujours faire la base de notre éducation. Mais nous croyons
qu'en simplifiant les méthodes, en sortant de ceruaines routines
universitaires, on économiserait beaucoup de temps et même les
études littéraires y gagneralent. Sans parler des ennuis de la
urammaire et de la stérilité des dictées, permettez-moi de toucher
un point qui m'a singulièrement frappé.
Je trouve que l’on demande beaucoup trop de production à nos
élèves des classes supérieures, et cela sans qu'ils aient reçu assez
‘de matière dans leur mémoire et leur ‘esprit. Un discours, ou une
narration et une pièce de vers par semaine, c’est accablant ! Et
qu'est-ce que ces malheureux jeunes gens peuvent tirer d’eux-
mêmes, si l'étude des textes et des auteurs classiques est négligée ?
C'est là ce qui fait ces dissertateurs dans le vide, ces imaginations
surexcitées, ces faiseurs de romans et de vaudevilles, ces journa-
listes sans vocation ni connaissances, dont on à si souvent à se
plaindre. Ne vaudrait-il pas cent fois mieux leur: faire lire dix
pages de grec et de latin, avant de les forcer à en écrire une ? Et
puisque j'ai lâché le mot de grec, je tiens à déclarer que je suis
partisan, autant que personne, de la conservation de cette belle
langue, qui, avec de sages réformes, pourrait acquérir une nou-
velle prospérité. |
Je ne veux pas faire des hellénistes de nos collégiens, mais le
Li aié
grec doit être, dans notre système scolaire, l'étude contemplative
du beau littéraire, comme l’enseignement du dessin ne formera
pas des peintres, mais rendra apte à apprécier le beau en matière
de peinture et de sculpture. Le mécanisme du langage grec est
maintenant facile à saisir la lumière de la grammaire comparée :
il prendra peu de temps. Tout le reste sera consacré à l'étude des
textes d'Hérodote, d'Homère, de Sophocle, de Thucydide, de
Démosthène, de Platon, dont on voit si peu à présent et dont il
ne reste presque rien dans l'esprit. Ainsi, par quelques modifica-
tions intérieures, ce premier et plus grand obstacle qui s’opposait
au développement des sciences naturelles, disparaïtrait; une
meilleure distribution du temps et du travail des élèves, le perfec-
tionnement des méthodes et l’affluence même des connaissances,
sur la nature moralement et littéralement exploitées, concour-
raient à fortifier encore l’enseignement littéraire et à le rendre
plus substantiel.
Une autre difficulté a été vue dans le personnel qui était chargé
jusqu'ici de l’enseiynement de l'Histoire naturelle. Cet enseigne--
ment ne tenant que très-peu de place dans l’ensemble des pro-
grammes, on ne se donnait pas la peine de chercher des hommes
spéciaux pour y suffire ; il était imposé, par délégation, aux pro-
fesseurs de physique ou de chimie, qui, avec la meilleure volonté,
manquaient de temps pour le conduire d’une manière vraiment
féconde. Or, quand il s’agit de faire adopter un plan d’extension,
il est de première nécessité de créer des chaires spéciales d'His-
toire naturelle, Votre commission croit devoir insister sur cette
condition : elle pense qu’à défaut de fonctionnaires de l’Université
dans chaque ville où il y a un lycée, il se trouverait facilement un
jeune médecin qui, ayant fréquenté les cours du Muséum de
Paris, et cultivé par goût cette spécialité, serait à même de donner :
cet enseignement.
Un troisième point qui mérite bien d’être envisagé, c’est l’état
du matériel. Il est insuffisant partout, même dans les plus grands
lycées. Mais on conçoit sans peine que sans la vue des objets, Île
meilleur enseignement d'Histoire naturelle resterait fatalement
stérile. Il est donc indispensable de porter ici ses efforts et de faire
quelques sacrifices pécuniaires pour augmenter et compléter le
matériel nécessaire. D’un grand avantage seraient surtout les col-
lections locales ; on se souvient que feu le prince de Canino s’in-
= 98 2
téressait beaucoup à cette œuvre ; on pourrait prier le ministère de
la reprendre et d'encourager de tous ses moyens les professeurs et
les élèves à ramasser dans leurs excursions et à réunir dans l'en-
ceinte du lycée tout ce que la contrée offre de curieux et de
remarquable au point de vuc de la zoologie, de la botanique et de
la géologie.
Voici donc les conclusions que votre commission a l’honneu:
de vous soumettre :
4° Répondre à nos honorables confrères de Touluuse que nous
adhérons pleinement à la pensée qui a dicté leur pétition et que
nous appuyons celte dernière de toute notre sympathie et de notre
signature ;
2 Les inviter ou autoriser, sans rien prescrire, à compléter
leur Mémoire par quelques indications de détail sur les moyens el
le mode d'exécution, qui imprimeraient à leur démarche, si solide
en théorie, un caractère plus décisif et plus pratique.
L'auteur communique le Mémoire suivant :
Du véritable rôle des aliments dans la Nutrition, par M. J.,
GOURDON.
I
On sait, sans que le fait ait besoin d’être démontré, que l’en-
tretien des Lissus vivants est sous la dépendance directe de lPali-
mentation; que sous l'influence de la privation de nourriture, les
tissus s’atrophient, dépérissent, et que l'organisme entier ne tarde
pas lui-même à succomber; que, si l’on. peut constater des diffé-
rences dans la résistance que Îles corps vivants opposent au dépé-
rissement par une telle cause, une diète absolue n’a pas moins,
dans tous les cas, un résultat fatal pour conclusion nécessaire.
Mais 11 n'en est pas de même pour ce qui concerne le mode
suivant lequel les matériaux étrangers à l’économie et qui y sont
introduits par les surfaces digestive et respiratoire concourent à
son entretien. À cet égard, la science laisse encore une large place
aux conjectures et aux recherches, et si l'on peut constater la plu-
part des effets RUE il n’est pas moins vrai que l’action intime
constiluant le phénomène même de la nutrition, échappe complé -
tement à observation.
RES rt
Tenant compte principalement du résultat par lequel elle se
manifeste à nos sens, on s'accorde généralement à défiuir la
putrition : l’assimilation, par un mécanisme inconnu, de matières
uutrilives avec désagrégation el rejet des particules remplacées ;
les deux phénomènes marchant, duns l’état normal, parallèlement
et avec une activité égale, et prédominance seulement de lassimi-
lation dans la période d'accroissement.
Les aliments, dès lors, en fournissant l'équivalent des produits
rejetés, ont pour but d'entretenir cet équilibre fonctionnel, et la
proportion plus ou moins grande des prineijes utilisés à cet effet
qu'ils renferment, est ce qui constitue leur valeur nutritive. La
détermination de cette valeur, appréciée seulement par le goût, le
profit qu'en, retire l’économie, est restée longtemps vague, sans
base précise. Elle est devenue possible lorsque |: connaissance de
la composition des tissus à permis de poser en principe que les
aliments, pour servir à la nutrition, devaient renfermer Îes
éléments de ces mêmes tissus. |
Avant reconnu ainsi que l’organisme vivant renferme : des
principes protéiques ou azotés (albumine, fibrine, easéine),
des principes hydro-carbonés (sucre, amidon, corps gras), des
principes minéraux (eau, sels divers), on a dù naturellement con-
clure à la nécessité de la présence de ces principes divers dans les
aliments. C’est ce que l’expérience à confirmé en démontrant
que les aliments, pour concourir à l'entretien de l'économie,
doivent renfermer, en nature, les éléments complexes plus haut
énumérés des tissus vivants : l'absence, soit des uns, soit des
autres, ayant des conséquences loujours graves, el qui ne von
rien moins qu'à compromeltre la conservation même de la vie.
Inutile de rappeler, à ce propos, des expériences nombreuses
mentionnées dans tous les traités de physiologie élémentaire, et
desquelles il résulte, entre autres faits, que ces principes sont
également nécessaires aux carnivores et aux herbivores, qui les
reçoivent, d'ailleurs, uniformément dans leurs aliments respecuifs,
bien qu'ils soient en apparence nourris d’une façon toute diffé-
rente.
Il
On a cherché à assigner, à chacun des principes utiles à
l'alimentation, des fonctions spéciales. Aïnsi, considérant que,
Lun NOR
parmi les corps azotés, les seuls aptes à remplir le rôle d'aliments
offrent une composition identique à celle des tissus vivants, se
retrouvent même en nature dans les fluides cireulants : sang,
chyle, lymphe, liquides servant de véhicules, à travers l’organisme,
aux éléments de la vie, on en a conclu que ces corps sont directe-
ment assimilés et servent, de la sorte, à reconstituer les tissus
altérés par des déperditions incessantes. D’où le nom d’aliments
plastiques, sous lesquels ces principes sont aujourd’hui désignés,
et qui pourrait, au même titre, être attribué aux substances miné-
rales, non moins nécessaires à la nutrition et également assimilées.
D'une autre part, tenant compte de l’exhalaison incessante d’eau
et d'acide carbonique, et consécutive à l’action nutritive, qui
s'effectue par les voies respiratoires, exhalaison qui, coincidant
avec Ja disparition, dans l’air inspiré, d’une proportion équi-
valente d'oxygène, ne peut s'expliquer que par la combustion au
sein de lorganisme, d’une certaine proportion de carbone et
d'hydrogène, on a attribué naturellement aux substances alimen-
laires qui contiennent ces éléments eu proporiion plus consi-
dérable, un rôle plus spécial dans cette fonction ; d’où, le nom
d'aliments respiratoires, par lesquels on les désigne commu-
nément. |
Cette distinction, aujourd’hui admise et consacrée, fait presque
loi en physiologie. Elle est la notion préliminaire de toute étude
sur l’alimentation. Dans tous les livres, il est question de ces deux
ordres d'aliments : les aliments plastiques, qui fournissent les
principes azotés nécessaires à Ja reconstitution des tissus; les
aliments respiraloires, qui approvisionnent l'économie du carbone
et de l'hydrogène consommés par la respiration.
S'il en est ainsi, il faut admettre, par voie de conséquence, que
la nutrition est un phénomène double ou plutôt comprend deux
efleis parallèles et indépendants, s’associant dans un but commun,
l'entretien des actions vitales, mais restant l’un et l’autre subor-
donnés à la présence des agents spéciaux venus de l'extérieur qui
les provoquent. Or, cette manière de voir ne répond point aux
faits recueillis par l'observation.
Ainsi, en premier lieu, il est difficilede définir la signification de
ces mols : « reconstitution des tissus par assimilation des aliments
plastiques ; » de concevoir le caractère, le mode, l'utilité de cette
| prétendue assimilation. Admise comme une simple hypothèse
= DS
pour expliquer, avec une apparence de vraisemblance, le rôle
inconnu des aliments azotés, elle ne repose en réalité sur aucun
fait oppréciable. Et l’on sait, d’un autre côté, que, quel que soit
le mode d'alimentation, les produits résidus de la nutrition, fournis
par les reins, par le foie, par l'appareil respiratoire, ne varient
pas de nature et sont toujours, à de simples différences de pro-
portions près : de l’urée, de la cholestérine, de l’acide carbonique,
elc. : que, notamment, les animaux exclusivement nourris d’ali-
ments, dits plastiques, continuent à respirer et à exhaler cet acide
carbonique, tout comme s’ils ne consommaient que des aliments
respiratoires.
D'où il résulte que, la nutrition produisant dans tous les cas
les mêmes effets, donnant lieu à la formation de résidus identi-
ques, est une fonction unique, toujours semblable à elle-même,
indépendante du régime alimentaire, et qu'il n’y a pas lieu, dés
lors, de maintenir entre les aliments une distinetion qui ne
saurait physiologiquement, ni exister, ni se concevoir.
La seule différence, avons-nous dit, que l’on puisse signaler en
comparant les résultats divers de la nutrition, est dans la propor-
tion des principes exhalés. Mais il importe maintenant de faire
remarquer que cette différence, qui ne se manifeste guère d’une
manière sensible que sur les produits de la fonction respiratoire,
est subordonnée, non au mode d'alimentation, mais à l’activité
vitale du sujet, et qu’elle se caractérise essentiellement par une
augmentation de la quantité d’acide carbonique exhalé, autrement
dit, de carbone brûlé dans toutes les circonstances où l’activité
fonctionnelle est surexcitée. |
Ainsi, le travail aceroit sensiblement cette proportion. Lassaigne
a trouvé, par exemple, qu’un cheval qui exhalait au repos 341 gr.
d'acide carbonique par heure, en exhalait, après une demi-heure
d'exercice, 706 grammes. D'autres expériences ont confirmé le fait
et montré, en résumé, que le cheval qui, au repos, exhale en
moyenne, sous forme d'acide carbonique, 100 grammes de cer-
bone par heure, peut en exhaler le double pendant le travail.
Cette proportion varie encore avec l’âge, la puissance vitale.
D’après MM. Andral et Gavarret, un enfant de huit ans, de consti-
tution saine, consomme par heure 6 grammes de charbon ; à quinze
ans, il en consomme 8,7 gr.; à seize ans et demi, 40 gr.; à vingt-
huit ons, 42 gr. De quarante-cinq à cinquante ans, ce chiffre
pue * * Men
- commence à diminuer; il descend , vers l’âge de soixante ans, à
10 gr., et vers soixante-dix ans, à 9 gr. M. Bouchardat cite un
vieillard de cent deux ans, de haute taille, jouissant de toutes
ses facultés, se promenant seul et sans appui, d’ailleurs bien
nourri, et qui ne consommait plus que 5 grammes.
Ces différences montrent une corrélation directe entre l’activité
musculaire et la consommation du carbone par l’économie il y à
ainsi équivalence entre la force engendrée, le travail effectué et la
quantité de combustible employée. Sous ce rapport, les corps vivants
offrent avec les machines une remarquable analogie quant à la
source de la force mécanique produite , liée directement, chez les
uns comme chez les autres, à une combustion de carbone.
III
Un autre fait, consécutif à la nutrition et d’une importance toute
spéciale dans la question , c’est le maintien dans les corps vivants
d’une température constante, persistant dans tous les âges de la
vie, et constituant ce que l’on a nommé la chaleur animale. Cette
température pour l’homme est de 38° environ, avec un écart de
À degré en plus dans les circonstances ordinaires de la vie, et ne
se modifiant point par les variations extérieures de la température.
La source de cette chaleur est indiquée par la nature des pro-
duits qui S’exhalent incessamment de l’économie ; elle est évidem-
ment le résultat de la combustion de l'hydrogène et du carbone
rendus sous forme d’eau et d'acide carbonique, combustion s’opé-
rant dans toute l’épaisseur des tissus, de façon à distribuer la cha-
leur produite dans la totalité de l'organisme. Cette chaleur «se
trouve, par suite, directement subordonnée à la production de
l'acide carbonique et de l’eau et doit conséquemment augmenter
et diminuer en même temps que la proportion exhalée de chacun
de ces deux composés.
C’est ainsi que l'excès de travail entraine toujours une plus ferte
production de chaleur au sem de l’économie ; que ce surplus de
travail devient même nécessaire, quand la température extérieure
s'abaisse, pour conserver au corps exposé à se refroidir sa chaleur
normale, tandis que, lorsque la température s'élève, le calorique
pourrait se trouver en excès au sein de l’économie si la chaleur
dépensée par l’évaporation constante du produit de la transpiration
ne maintenait la temperature du corps à son degré normal. C’est
ainsiencore que la proportion de carbone consommé est plus grande
chez les animaux de petite taille, qui doivent produire plus de
chaleur pour résister aux causes de refroidissements plus actives
chez eux, la surface de rayonnement étant plus grande par rapport
à la masse du corps
D'où il résulte que la relation existante entre la force méca-
nique produite par le corps et la proportion de carbone consommé
au sein de l’économie, peut s'exprimer encore en substituant, à ce
dernier terme du rapport, la somme de chaleur produite. On
trouve de la sorte une corrélation exacte entre la force produite et
la chaleur dégagée, ce qui est parfaitement conforme aux lois ac-
tuelles de la mécanique et de la physique touchant les relations de
la force et de la chaleur dans les corps non organisés.
Cette chaleur constante du corps des animaux est-elle la cause
de l’entretien de la vie, une de ses conditions essentielles, ou bien
n'est-elle qu'un effet secondaire, un simple résultat de l’accomplis-
sement des phénomènes vitaux ? C’est ce qu’on ne saurait affirmer
d’une manière absolue, bien que l’on puisse considérer les deux
hypothèses comme également admissibles, car si d’une part la pro-
duction plus considérable de la chaleur est manifeste quand P’acti-
vité vitale s'accroît, quand les muscles multiplient leurs contrac-
tions ; d’autre part, il est démontré par les troubles qui se déclarent
au sein de l’économie quand sa température est modifiée par des
causes internes ou externes, que le maintien de la température nor-
male est indispensable à la conservation de la vie. La chaleur ami-
male serait donc à la fois cause et effet des phénomènes vitaux : ce
qui tendrait à démontrer la relation la plus intime et la plus directe
entre les fonctions nutritives et vitales et la production de la cha-
leur, et autoriserait à considérer cette production comme le phéno-
mêne essentiel de la vie, celui dont l’activité mesurerait avec le
plus d’exactitude l'intensité de la puissance vitale en exercice.
IV
Cette déduction, qui découle d'elle-même de l'observation seule
des faits, autorise à penser, que les corps élémentaires les plus
propres à la production de la chaleur animale doivent être en
même temps les plus utiles à l’alimentation ;: que les aliments
HA QE 2
enfin possèdent une valeur nutritive d'autant plus grande qu'ils se
prêtent d’une manière plus complète aux besoins de la calorifi-
cation.
Cette conclusion admise, on se trouve naturellement conduit à
placer au premier rang, parmi les substances nutritives, celles qui
renferment la plus forte proportion de carbone et d’hydrogène ; tels
sont lus corps gras, ayant pour formule générale G68 H66 05, c'esrà-
dire cu:.tenant en poids, sur 100 parties : 85 de carbone, 7 d'hy-
drogène et 8 d'oxygène, tandis que les amylacès, Ct2,H12,0%, ne
renferment que 42 de carbone, 7 d'hydrogène et 51 d'oxygène, el
que les albuminoïdes, G5,H5#,A26,Af, contiennent : 53 de carbone,
7 d'hydrogène, 24 d'oxygène, plus #6 d'azote
Cette doctrine a ét$, en effet, soutenue notamment par M. Ma-
gne, directeur et professeur à l’école d’Alfort, qui en a fait l'objet
de travaux nombreux présentés à la Société centrale d'agrieul-
ture, à l’Académie de médecine, publiés dans des livres et jour-
uaux divers, Et, nous-mêimne, nous avons eru pouvoir d’abord
nuus associer à cette nouvelle manière d'envisager la lot de l'ali-
mentalion, car elle nous paraissait théoriquement donner la fur-
mule la plus exacte des besoins réels de Péconomie, et, dans tous
les cas, offrait Pavantage de fixer l'attention sur le caractère
encore si obscur de la nutrition et le rôle véritable des aliments.
Mais cette théorie, prise dans un sens exclusif, soulève une
obyeetion grave. Elle ne tient nul compte d’un fait démontré par
une expérience journalière, la puissance nutritive des aliments
azotés, lesquels se trouveut réduits à un rôle aégatif ou secondaire,
si l'on fait des corps gras ou hydro-carbonés les agents essentiels
de la nutrition : conséquence pratiquement admissible.
D'un autre côté, l'on a vu que la doctrine généralement admise
touchant le rôle des albumiuoïdes, considérés comme destinés à
s'assimiler avec les tissus vivants, n’est pas beaucoup plus satis-
laisante.
En fait, ou ue peut fournir les preuves d'aucune assimilation
directe des agents de l’alimentation avec les tissus vivants. On ne
constale, par la simple comparaison des principes introduits dans
l’économie et des produits exhalés, qu’une série de mutations, de
transformations, dans lesquelles interviennent simultanément et
dans des conditions en apparence identiques, les corps azotés aussi
bien que les amylacés et les corps gras.
AT
Cela éiant, comment s'expliquer la part effective prise par les
albuminoïdes dans la nutrition ? De la manière la plus simple, ce
nous semble, en tenant compte, plus qu’on ne l'a fait, des sources
réelles de la chaleur animale, que l’on s’est borné jusqu’à ce jour
à considérer comme le produit unique de la combustion des élé-
ments simples des principes organiques, el à calculer seulement
d'après la quantité d’eau et d'acide carbonique exhalés par la peau
et l’appareil respiratoire.
Un tel caleul ne rend point compte effectivement de la véritable
quantité de chaleur dégagée au sein de l’économie par les réac-
tions chimiques qui s’y accomplissent sans discontinuilé.
Déjà Dulong et Despretz, dans leurs expériences sur la chaleur
animale, avaient constaté que la chaleur cédée au calorimétre par
les animaux excède d’un dixième environ celle produite par la
combustion directe du carbone et de l’hydrogène consumés. Et
encore l'observation faite sur des petits animaux au repos permet
de penser que la différence serait beaucoup plus grande si l'on
pouvait estimer de la même façon la chaleur dégagée par des ani-
maux soumis au travail. |
V
Mais l’on doit à un chimiste distingué de notre époque, M. Ber-
thelot, des données plus précises et qui nous paraissent devoir
fournir au problème les éléments d’une solution bien près d’être
absolument satisfaisante. Les recherches de M. Berthelot datent
déjà de plusieurs années (Ann. de chimie et de physique, 1865),
et l'on à lieu d’être surpris que les physiologistes ne les aient
point encore utilisées pour l’élucidation de la question qui nous
occupe. | |
Comme le fait d’abord remarquer M. Berthelot, les animaux,
pour produire la chaleur, ne brülent pas du carbone et de l’hy-
drogène libres, Ils absorbent de l’oxygèue, 1ls consomment des
aliments, et, d'autre part, ils rejettent au dehors de l’acide carbo-
nique, de l’eau et divers produits excrémentiels. Or, ce ne sont-là
que les termes extrêmes de toute une série de métamorphoses
chimiques correspondant à des effets calorifiques ; la relation avec
ces derniers, pour être établie d’une manière précise, exigerait
donc la connaissance détaillée des réactions qui se succèdent dans
le corps des animaux ; et c’est ce que l’on avait négligé de faire
— 93
jusqu'alors, en se bornant à traiter le problème comme s’il s’agis-
sait d’une simple oxydation des éléments mêmes des principes
organiques.
M. Berthelot, abordant ce côté du problème, a calculé que les
oxydations ou fixations d’oxygene fournissent des AUATés de
chaleur très- inégales suivant les conditions où elles s’opèrent (1).
Ainsi :
Dans l'oxydation complète par l’oxygène libre d’un corps orga-
nique jusqu’à sou entiére transformation en eau et en acide carbo-
nique, la quantité de chaleur est toujours plus considérable que
celle produite par la combustion seule du carbone brûlé, la
différence, pour une même quantité d'oxygène, pouvant aller jus-
qu’au double.
Dans l'oxydation d’un même composé formant des dérivés con-
tenant une égale proportion de carbone, la chaleur produite est
proportionnelle à l'oxygène fixé.
Dans l'oxydation incomplète des corps homologues plus con-
densés, c’est-à-dire à équivalent plus élevé, la chaleur dégagée
pour une même quantité d'oxygène fixée, sans perte de carbone,
est d'autant plus considérable que l'équivalent est plus élevé.
M. Berthelot a constaté, en outre, en considérant la production
d'acide carbonique :
Que la production par oxydation d'une même quantité de ce gaz
(4) La méthode employée par M. Berthelot pour déterminer les quantités
de chaleur dégagées par les réactions chimiques et qui ne peuvent être mesurées
directement, consiste à les calculer d’après la f{empérature de combustion, autre-
ment dit la température que prendrait un mélange gazeux, résultat d’une
réaction, si toute la chaleur dégagée était employée à chauffer le gaz formé.
Dans les circonstances ordinaires, le calorimètre donnant les chaleurs déga-
gées, on calcule les températures de combustion à l’aide des chaleurs spécifiques
des gaz et des vapeurs dans l'état actuel. four plus de précision et pour
pouvoir comparer entr'eux les différents corps, M. Berthelot se sert pour
ce calcul des chaleurs spécifiques des corps rapportés à l’état-limite de gaz
parfait, en la combinant avec la chaleur atomique de combinaison, c’est-à-dire
la chaleur dégagée par les affinités seules, ou Îles actions entre molécules hété-
rogènes supposées également dans la condition identique des corps rapportés à
Pétat-limite de gaz parfaits.
La température de combustion obtenue pour chacun des corps qui se com-
binent, on caleule Ja chaleur dégagée en multipliant le nombre de calories que
représente cette température par le chiffre des équivalents existant dans chaque
combinaison, et cela pour chacune des transformations qui s’opèrent,.
TR
dégage des quantités de chaleur très-variables, pouvant aller de 1
à 3, et qui sont alors en rapport avec la proportion d'oxygène
consommé et qui varie suivant que l’on s'adresse à un corps déjà
oxydé ou à un corps exempt d'oxygène ; |
Que lorsque l’acide carbonique produit est égal en volume à
l'oxygène absorbé — cas se rapprochant des conditions ordinaires
de la respiration animale, — le carbone libre est le corps dont la
combustion dégage le moins de chaleur. Les hydrates de carbone
en produisent loujours davantage, c’est le cas notamment du glycose,
tvpe des sucres et corps similaires, qui en dégage un tiers en plus ;
el certains corps azotés en fournissent une quantité plus considé-
rable encore.
Ces différences s'expliquent en partie par la combustion de
l'hydrogène existant dans les composés organiques, et qui, en
se transformant en eau, dégage aussi une certaine somine de calo-
rique qu'on ne peut négliger.
Il faut tenir compte également des oxydations incomplètes qui
se produisent parfois de manière à donner un maximum de cha-
leur. Ainsi, une quantité d'oxygène @, agissant simultanément sur
un corps gras et un hydro-carbure tel que du glycose, se rencon-
trant dans l’économie, — peut, en changeant le premier en acide
margarique eten provoquant la fermentation alcoolique du second,
dégager une quantité n de chaleur ; tandis que, si l’oxydation du
corps gras est plus complète, arrive jusqu'à sa transformation
totale en acide carbonique, et que le glycose reste sans altéra-
tion, la réaction ne dégage que la moitié de la quantité » de
chaleur, bien qu’il y ait la même proportion d'oxygène fixé. Le
résultat serait évidemment inverse, si le corps gras n’était point
brûlé et si lPoxygène était employé en totalité à entretenir la
fermentation de la matière sucrée.
Ces productions de ehaleur si inégales peuvent expliquer les
différences, quant à la chaleur produite et au travail effectué, que
l’on observe parfois chez des animaux qui absorbent la même quan-
tité d'oxygène, exhalant la même quantité d’acide carbonique, :
mais consommant des aliments différents ; — comment, avec une
même quantité d'oxygène absorbé et un même système d'aliments,
la chaleur produite, mesurant le travail accompli, peut varier du :
simple au double.
On doit enfin considérer les phénomènes d’hydratation et de
Eh | Pres
déshydratation, qui Gonnent de la chaleur parfois sans absorption
d'oxygène n1 production d'acide carbonique : l’eau, dans ce cas,
pouvant se former aux dépens d'éléments préexistants, sans inter-
vention de l'oxygène libre. Ge mode d’hydratation est possible avec
toutes les substances alimentaires : corps gras, corps hydro-car-
bonés, albuminoïdes, et par conséquent fait entrer de nouveaux
éléments qui ne peuvent pas être négligés dans la solution du
problème.
En résumé, ces faits démontrent qu’il existe de grandes diffé-
rences dans la puissance calorifique des aliments, et que cette
puissance n’est pont en conformité avec celle que les calculs ordi-
naires lui attribuent. Ainsi, en tenant compte seulement de l’oxy-
gène consommé, et en le considérant comme employé, en totalité,
à brûler du carbone et de l'hydrogène, ce poids du carbone con-
sommé étant fourni par celui de l’acide carbonique exhalé, et le
poids de l'hydrogène étant calculé d’après celui de l’oxygène en
exeès non employé à la production de l’acidecarbonique, on trouve:
A0 Que les acides et corps gras, en général, dégagent un peu
moins de chaleur que celle répondant à la combustion de leurs
éléments libres, c’est-à-dire à l’oxygène consommé et à l'acide
carbonique produit; la différence est seulement de 2 ou 3 cen-
tièmes ;
2 Que les corps plus oxygénés, les acides acétique, oxalique,
par exemple, en donnent davantage ;
30 Que l’excès est plus considérable avec le sucre ou glycose, la
quantité dépassant alors de plus d’un quart la chaleur répondant à
la même proportion d'acide carbonique dégagée ;
4° Enfin que cet excès existe encore avec les corps peu hydro-
génés, ainsi qu'avec le cyanogène et l’acide cyanhydrique, les seuls
corps azotés pour lesquels on possède des données convenables.
Cette dernière observation est des plus importantes si l’on con-
sidère qu’elle peut parfaitement s'appliquer aux albuminoïdes, qui
précisément sont caractérisés par un grand excès de carbone sur
lPhydrogène et par la présence de l’azote. Elle permet d’entrevoir
l'utilité spéciale, dans l'alimentation , des principes azotés ; donc
l'avantage serait de fournir, par la combustion de leur carbone,
une quantité de chaleur plus considérable que celle dégagée par
les hydro-carbures simples et surtout par les corps gras.
De ces faits, maintenant il est facile de tirer quelques conclu-
TT Re
sions. générales, Ainsi, la production de la chaleur étant l’objet
essentiel, le but final de la nutrition, et par suite, ia valeur
nutritive des aliments étant proportionnelle à la part respective
que ceux-ci prennent à la calorification, il y a lieu d'admettre :
40 Que tous les alimenis, corps gras, amylacés et aibuminoïdes,
jouent dans l’économie un rôle identique; qu'il n’y a pas lieu,
conséquemment, de maintenir la distinction établie entre les ali-
ments plastiques et les aliments respiratoires, attendu que tous
copstituent, au même titre, des aliments respiratoires ;
20 Qu'il n'existe, gntre les uns et les autres, d'autre différence
que celle tenant à la plus ou moins forte proportion de chaleur
qu'ils peuvent dégager par la combustion de leurs éléments ;
3o Enfin que la puissance nutritive, plus grande à poids égal,
des aliments azotés, s'explique uniquement par la quantité plus
considérable de chaleur qu’ils dégagent et la plus grande somme
de force qu'ils produisent pour une même proportion d’oxygêne
fixé et de carbone exhalé.
A la suite de cette lecture, une discussion s'engage entre
MM. Lacaze, Filhol et Gourdon.
M. Edmond Bonnal informe la Soctété qu’il a cru devoir pren-
dre l'initiative d’une pétition au Conseil manicipal pour demander
que le buste du célèbre chirurgien Delpech soit placé dans a
Salle des [lustres au Capitole de Toulouse. Après avoir indiqué
les raisons d'opportunité, 1l légitime, en quelque sorte, sa requête,
en faisant la lecture de l’éloge de Delpech, pour lequel il lui a été
donné de consulter les papiers et les souvenirs de la famille.
Cette lecture donne lieu à une discussion, de laquelle il résulte
que la Société, qui a entendu avec satisfaction cette Notice par
M. Ed. Bonnal, ne peut prendre l'initiative des démarches que
propose ce membre ; Delpech appartenait à la Société de Médecine
de Toulouse ; c'est à elle qu'incombent le droit et le devoir de
rendre hommage au grand chirurgien.
Le gf
Séance du 4 juillet 14870.
Présidence de M. le D' Guirar», président.
La Société reçoit :
Journal d'agriculture pratique, juin 4870.
Matériaux pour l'histoire primitive et naturelle de l'Homme,
avril 4870.
La Minerve de Toulouse, juin 4870.
Les adhésions suivantes :
Société Algérienne de Climatologie, de Sciences physiques et
naturelles.
Rapport de MM. Bonné, Dannu, Faune ef AGNELY, rapporteur.
L'ensemble des faits signalés au sein de notre commission, sur
l'insuffisance des moyens fournis et du temps consacré à l'étude de
ces sciences naturelles, a provoqué parmi nous l’unanimité sur
l'utilité, sur la nécessité, sur l'opportunité de la démarche projetée
par la Société d'Histoire naturelle de Toulouse.
Vos commissaires vous proposent done, Messieurs,
1° De remercier de sa communication la Société d'Histoire natu-
relle de Toulouse; 20 de lui adresser nos félicitations sur son heu-
reuse et intelligente initiative ; 30 de lui exprimer dans les termes
les plus chaleureux d’estime et de confraternité intellectuelle,
l'adhésion qu'elle nous a fait lhonneur de nous demander ; 4° de
lui envoyer enfin, comme élément d'instruction à l’enquête qu’elle
ouvre sur l’enseignement des sciences naturelles, les indications
réunies par vos commissaires sur l’état et sur les conditions de
l'étude des sciences naturelles en Algérie.
Cette dernière partie du travail de la commission ne ressort pas
essentiellement des termes du mandat qui nous a été donné ; nous
espérons, pourtant, vous voir accueillir favorablement des indica-
tions qui vous démontreront l'utilité et la nécessité, pour l’Algérie
elle-même, d'appeler Pattention de nos gouvernants et celle du
publie, sur l’intéressante question de l’élude des sciences natu-
relles, au sein de nos jeunes générations.
7
M
2 Mets
Etat et conditions de l'étude des sciences naturelles en Algérie, considérées
successivement dans les trois degrés d'instruction : — primaire, — secondaire,
— supérieure. RU A
Enseignement primaire.
Dans la pétition de la Société toulousaine, il est dit :
« Une large part est faite à l'Histoire naturelle dans l’Instruetion
» primaire. » |
Il en est ainsi, sans doute, en France, l’un d’entre nous ayant
fait connaître que sous le ministère de Monsieur Duruy, un pro-
cramme a été rédigé pour cette étude dans les écoles primaires, et
en outre, que toute une petite bibliothèque, pour enfants, avait
développé et appliqué en quelque sorte, les éléments de ce pro-
vramme, en vue de le rendre assimilable aux plus jeunes intelli-
wences. |
D’après les renseignements que j'ai pris en personne et directe-
ment aux meilleures sources, il n’en est point encore ænsi en
Algérie ; l’on m'en a donné cette ralson :
Les inslituteurs ne sont pas encore initiés à cette étude, on
commence à la leur apprendre dans l'école normale primaire,
et les prochaines générations de maîtres comprendront l'Histoire
naturelle dans leur enseignement.
M. Darru, chargé de l’enseignement agricole dans cette école
normale, nous a dit que l'Histoire naturelle s’y trouvait en-
seisnée en effet, et même d’après les programmes officiels de
1859, pour le baccalauréat ès-sciences sauf, toutefois, la Géologie
et la Chimie organique, dont les collections, dont l’enseignement,
n’y figurent encore qu’à l’état embryonnaire.
Cette restriction ne semble pas heureuse, la Géologie étant la
base essentielle de l'Histoire naturelle, étudiée sous le rapport agri-
cole, et la Chimie organique en étant, en quelque sorte, le cou-
ronnement, au point de vue pratique pour l'inäustriel et pour
l’agriculteur.
C'est dès le jeune-äâge qu’il importe d'ouvrir l'intelligence et le
cœur de l’homme à la connaissance des êtres au milieu etaux dépens
desquels il vit; c'est dans cette voie qu’il conviendrait de diriger
l'attention et l'esprit de recherches des jeunes générations indigènes
pour développer en elles la pitié pour tout ce qui a vie, l'attachement
à tout ce qui concourt à notre bien-être moral et matériel.
AT =
N'est-ce pas là le meilleur moyen de propager les sentiments qui
ont inspiré la création des sociétés protectrices des animaux ?
D'ailleurs, cette étude presque toute matérielle, et tangible à
l’aide d’une collection des corps et des êtres types, qui font passer
sous les yeux des élèves l’intéressant tablean de la Flore et de la
Faune terrestre, cette étude est réalisable, même par des collec-
tions de dessins qui parlent aux yeux ; elle est done éminemment
propice à l'instruction de l’enfance, à l’instruetion de tous ceux
retenus encore dans les langes de l'ignorance.
Nous devons conclure de ces considérations, que l’on ne saurait
trop se hâter de développer, par les attraits de cette étude, les sen-
timents de curiosité, l’habiude de l’observation, l'esprit de recher-
che, innés chez l’homme, et qui ne peuvent être mieux développés
que par la lecture des faits utiles, des anecdotes attrayantes, qui
doivent fourmiller dans la bibliothèque d'Histoire naturelle, créée
à cet effet, sous l'inspiration de M. Duruy, dans l'intérêt de l’en-
selgnement primaire.
Enseignement secondaire.
L’Enseignement secondaire se trouve aujourd’hui divisé en deux
grandes branches distinctes :
Celle du Cours professionnel ;
Célle du Cours classique. |
Dans la branche du Cours professionnel, l’étude de Histoire
naturehe est largement dotée de programmes et de temps ; en effet,
elle est enseignée d’après des programmes très-développés, très-
bien faits et dans lesquels les matières se trouvent réparties avec
intelligence entre les cinq années d’études que comporte ce Cours.
Ainsi, durant l’année préparatoire, l’on donne des notions pré-
liminaires sur la Zoologie, la Géologie et la Botanique.
Durant les trois années subséquentes, ces sciences sont étudiées
héoriquement en trois parties bien distinctes et complètes pour
chacune des trois années ; durant la cinquième année doivent être
données les applications de ces sciences à l’agriculture, à l'indus-
ltrie, à l'hygiène.
Un temps suffisant est accordé à cette étude, à laquelle sont attri-
[buées deux classes par semaine, durant tout le cours des cinq
années du Cours professionnel. |
Voïlà Pintention nettement accusée ct bien réglementée, d'un
— 100 —
sérieux enseignement des sciences naturelles ; mais, en réalité, les
professeurs, et conséquemment les élèves, attachent-ils à ces étu-
des, l'importance que l'étendue des programmes leur attribue ?
En un mot, cet enseignement est-il donné et peut-il l'être, com-
me on devrait le supposer d’après ce qui précède ?.…
A celte question nous répondrons par ce fait, l'on pourrait dire
brutal : « Que le matériel nécessaire à cet enseignement fait géné-
ralement défaut !... »
Au lycée d'Alger, notamment, les vitrines existent, mais abso-
lument vides ; les planches murales, les collections de dessins, qui
pourraient suppléer les objets eux-mêmes, qu’ils sont destinés à
compléter, pour la démonstration ; ces instruments auxiliaires, si
faciles à se procurer, font eux-mêmes défaut !!!
S'il en est ainsi dans les lycées de France, nous devons en con-
clure que l’amour de l’Université pour les sciences naturelles est
encore fout platonique.
C’est que les paroles de Napoléon I : « L’enseignement des
colléges a essentiellement pour objet le latin et les mathématiques, »
pèsent encore de tout leur poids sur cette institution universitaire ;
même, alors que reconnaissant le tort et le danger de telle restric-
tion, elle cherche à s'épanouir dans le sens des idées de la Société
moderne, qui commandent des études plus utilitaires que spécu-
latives.
Dans la branche du Cours elassique, l’étude des sciences natu-
relles a été, depuis mil huit cent soixanie-cinq, réduite à sa plus
simple expression. Ge Cours est divisé en deux branches secon-
daires : celle des lettres, celle des sciences.
Dans chacune de ces deux branches, l’enseignement des sciences
naturelles n’est donné que pendant le deuxième semestre d’une
seule année, à une leçon par semaine; et comme c’est durant
le semestre d'été qu’a lieu ce cours, semestre en partie absorbé
par les compositions générales, par la préparation aux examens,
l’enseignement de l’histoire naturelle se réduit généralement à
45 leçons ; ces sciences, d’ailleurs, n’étant plus comprises dans
les matières exigées aux deux baccalaurérats complets, sont
négligées par les élèves et vraisemblablement aussi par les profes-
seurs, on le comprendra fort bien !
Puisque l'étude des sciences naturelles qui, dans le programme
de 1852, figurait encore dans les classes de rhétorique et de
— 101 —
philosophie, a été ramenée à la classe de seconde, sous le prétexte
« d’alléger les hautes classes et de faciliter la préparation aux
» baccalauréats. »
N’était.ce point, effectivement, encourager les professeurs à ne
point trop se préoccuper d’une étude, en quelque sorte facultative?
N'était-ce point raffraichir, aux yeux de tous, la malheureuse
qualification d’accessoires , attribuée aux sciences naturelles ,
sous le premier empire ?.…
Pour qui connait l'influence des mots parmi nous, Français,
rien de surprenant de voir la part dérisoire faite par des hommes
graves, à ces sciences dites accessoires, dans les études de la section
la plus intelligente de notre jeunesse française, alors que, tout au
contraire, les nations rivales, les plus affairées, les plus avares du
temps, nous dit la pétition toulousaine, font de ces mêmes sciences,
qui sont bien les plus positives et les plus attrayantes, la base
essentielle de l'instruction publique.
C'est cet état de choses que les auteurs de la pétition, dans un
élan généreux de dévouement à la science et à l'avenir de notre
patrie française, ont signalé en ces termes :
« Les sciences naturelles ont merveilleusement grandi, leur
» enseignement s'impose de plus en plus à l'attention des nations
» modernes, et pourtant, chose étrange, c’est alors, qu’en France,
» Ja part faite à ces sciences dans les programmes des baccalau-
» réals complets a été sans cesse restreinte et enfin elfacée ! »
N'est-ce point, en effet, avoir annihilé cet enseignement, que
de réduire en principe, à vingt-quatre leçons, et en réalité, à
quinze seulement, l’étude des sciences naturelles,
Géo-Minéralogie.
comprenant : Botanique.
Anthropo-Zoologie.
« Nous ne demandons pas, ajoutent nos collègues de Toulouse,
» (que lon fasse de tous les élèves des naturalistes, nous souhai-
» tons seulement que, par un enseignement un peu étendu, le
» goût puisse être inspiré, et la voie tracée pour des études appro-
» fondies et librement entreprises, aussi bien dans l'intérêt géné-
» ral, que dans celui de lPindividu, à leur sortie des écoles, par
» ceux que la nature aura dotés d’une aptitude spéciale, d’une
» vocation sérieuse, pour la recherche des secrets de la nature,
— 102 —
» secrets dont l'intelligence humaine parvient ujon hui à tirer
» de si utiles applications. »
tr Paléontologie a étendu en profondeur, autant qu'il l’état
déjà en superficie, le champ de cette étude ; elle a joint à l’inter-
prétation des secrets ou mystères du pr ésent, les secrets ou
mystères du passé cachés dans les profondeurs de notre globe.
Et c’est alors que l'étude des sciences naturelles, pénétrant au
Join dans les profondeurs de l'écorce terrestre, fouillant les replis
les plus cachés, pour y découvrir des preuves matérielles de la
succession des phénomènes organiques, qui nous donnent l’his-
toire scientifique de la Création; c'est alors qu'il est besoin des
intelligences les plus affinées et les mieux dotées, pour vérifier la
théorie de l’évolution graduelle des organismes animaux, créée
par Darwin ; c’est alors que l’on soustrait en France, celte étude
aux générations qui suivent les cours classiques !..
Dans cette catégorie d’élèves se groupent les intelligences les
plus ouvertes, les mieux cultivées : là se recrutent les écoles gou-
vernementales, et tous les engrenages du mécanisme administratif,
tant civil que militaire, pour ce haut et puissant fonctionnarismre,
qui représente la France au-dehors et au-dedans; là, sont nos
sujets d'élite, et on les détourne de l’étude des sciences naturelles,
alors que les esprits les plus éminents proclament lPunion de
l’histoire naturelle avec l’histoire humaine, avec l’histoire univer-
selle !.. Alors que nous lisons dans l’œuvre d’Edgard Quinet,
La Création : |
« La mission de l’homme est de comprendre la loi des choses
» autour de lui, afin de s’en faire des instruments, et d'étendre
» avec leur concours, les limites de son pouvoir avec les limites
» de sa vie.» Voilà où en est, depuis mil huit cent soixante-cinq,
l’étude des sciences naturelles, dans les lycées français ! Voilà
donc où elle en est officiellement dans le lycée d’Alger avec l’ag-
gravation du manque absolu déjà signalé des moyens matériels de
démonstration !.… |
Ces moyens de démonstration sont l’âme, l'attrait et la facilité
de l’enseignement dés sciences naturelles. Si le dénuement des
lycées en France est comparable, sous ce rapport, au dénuement
qui existe dans celui d'Alger, ne devons-nous pas induire de ce
témoignage matériel, que l'esprit routinier domine encore dans
l’enseignement universitaire ? que les ministres de Napoléon I
— 103 —
s'inspirent encore des paroles de Napoléon Ier, que nous avons
déjà relatées ?.…
Contre cet esprit routinier semble avoir voulu pourtant réagir
M. le ministre Duruy.
Mais comment s'expliquer, qu’un administrateur aussi actif que
dévoué aux idées modernes, après avoir fait si large part aux
sciences naturelles, dans le cours professionnel destiné à fournir
la société d'agents en sous-ordres, se soit appliqué à rétrécir le
cadre de ce même enseignement, dans le cours classique d’où
sortent faconnés par des études d’un ordre supérieur les hommes
qui, sous les titres d'ingénieurs, de magistrats, d'officiers de
marine et des autres corps spéciaux de l’armée; d’où sortent, en
un mot, presque tous ceux que leur intelligence ou leur fortune
mettent au premier rang sur la scène du monde, comme les plus
aptes à éclairer, à guider leurs semblables, à élever, à pousser en
avant l’espèce humaine.
Quoi qu'il en soit des motifs ou des causes de cette sorte de
contre-sens, en vue du progrès dans l’enseignement des sciences
naturelles, constatons-le comme un fait malheureux pour lavenir
de la société française et pour lintérêt de cette étude de la nature,
qui ouvre à l'intelligence humaine des horizons nouveaux si
étendus et si féconds sur la solution des difficiles problèmes de la
eréation du globe sur les origines et sur les destinées de l’homme,
alors qu'’unesi haute portée est attribuée à Ja philosophie naturelle,
dans sa tendance générale à donner de nos jours aux spéculations
de l’ordre le plus élevé, l’observation de la nature pour contrôle et
pour appui !.
Quel inconvénient y aurait-il done à tenir en éveil sur ces
seiences de la nature, nos jeunes intelligences, durant toute la
série des années qu’on les maintient sur l’aride étude des gram-
inaires de tous genres ?
Quel avantage, au contraire, n'y aurait-il pas à varier celte
étude de mots, par l’étude attrayante des choses et des êtres animés
dans les classes primaires, élémentaires et de grammaire, de’ ma-
nière à pouvoir, dans les hautes classes, prendre des notions phy-
siologiques sur la structure, et philosophiques sur la coordination
des êtres animés qui concourent pour nous à l’embellissement, à
l’utilisation du globe terrestre ?
La raison que l’on donnera sans doute, comme on l’a fait déjà
— 104 —
pour motiver la dernière restriction des programmes, c’est le man-
que de temps !.…
En. cas de péril, on ne jette à la mer que les objets les moins
utiles et les plus embarrassants ; telle serait done l’appréciation
que ferait encore l’Université de ces sciences, par elle autrefois
dénommées sciences accessoires !.…..
Quand cessera-t-elle de les juger et de les traiter d’après cette
étiquette imméritée ou tout au moins honteusement arriérée ?
C'est contre cette immutabilité universitaire, c’est contre sa
marche rétrograde même, dans l’enseignement des sciences natu-
relles fait aux élèves des cours classiques, que la Société d'Histoire
naturelle de Toulouse vous a conviés, Messieurs, à réclamer
avec elle auprès de M. le Ministre, et d’après l'exposé de la
situation, vous apprécierez la valeur de notre opinion sur lutilité,
sur la nécessité même de cette démarche.
Quant à son opportunité, elle résultera pour nous tous de la
présence au ministère, comme chef de bureau, dans cette spécialité,
de M. Gandon qui a secondé M. Duruy dans la création de l’en-
seignement professionnel, dans la rédaction des programmes que
nous avons loués sans restriction, et qui vient tout récemment de
lire un rapport à la Société des Agriculteurs de France, pour ja
vulgarisation, pour l’extension des études d’histoire naturelle au
milieu des populations vouées au travail éminemment naturel de
la culture, aux soins dus à leurs auxiliaires animés et vivants.
Enseignement supérieur.
L'enseignement supérieur des sciences naturelles n’est repré-
senté officiellement, en Algérie, que par les cours faits à l'Ecole
de médecine, dont ne profite qu'un nombre. d'élèves bien res-
treint, parce que cette institution ne réalise pas le véritable but de
son importation en Algérie.
[lest, heureusement, dans la population, quelques natures d'élite,
qui se vouent librement et par plaisir à ces études intéressantes ;
la plupart comptent parmi nos collègues, sans les désigner tous,
il nous sera permis de citer notre savant et honoré président,
le bon et tant dévoué M. Durando, et M. le D' Bourgeot, dont les
travaux en Géologie, en Ichtyologie, ont fait honneur à notre
Société et ont tant intéressé la colonie des touristes, nos hiver-
NeUrs.
— 105 —
Avec de tels éléments, notre Société prenant à cœur son titre
annexe, serait en mesure de constituer aux sciences naturelles un
centre d'enseignement supérieur et libre, en organisant chaque
année une série de coniérences, d'après un plan déterminé et
approprié aux particularités de l'Histoire naturelle algérienne.
Mesures à prendre pour étendre et pour vulgariser l’étude des sciences naturelles
en Algérie.
M. Bonné, membre de la commission, nous a livré une nole à
laquelle nous avons déjà fait plus d’un emprunt dans la première
partie de ce rapport.
Nous alions mettre encore à profit ces utiles indications, dans
l'exposé des mesures à prendre, pour provoquer une plus large
part dans l’enseignement des sciences naturelles, puis les com-
pleler, à notre point de vue, dans l’ordre déjà suivi, pour les
trois degrés d'instruction publique.
Enseignement primaire.
Exiger de tous les instituteurs, la connaissance pratique des
éléments de l'Histoire naturelle, et plus particulièrement tout ce
que les mœurs des animaux, ettout ce que les utilités et singula-
rités spéciales des êtres, au milieu desquels nous vivons, offrent
de plus frappant et de plus attrayant.
Placer dans toutes les écoles primaires, la petite bibliothèque
d'Histoire naturelle, qui a été éditée, selon les indications don-
nées par M. Darru, à la librairie de de la Grave et en provoquer
des traductions en langue arabe pour les écoles algériennes.
Ges livres devront servir, concurremment avec ceux des autres
matières de l’enseignement, pour la lecture en commun, être pris
surtout, pour texte de quelques conversations familhières de la
part du maître, sur les anecdotes auxquelles donnent lieu les
mœurs, les particularités des êtres et des animaux.
Lustituteur devrait inciter ses élèves à s'occuper do l’éduca-
tion de quelques animaux, chacun suivant sa propension natu-
relle; c’est là un goût inné chez les enfants; il importe de le
développer et de le mettre à profit pour leur faire connaitre
l’utilité spéciale des divers animaux, même de ceux réputés
nuisibles, et pour développer en eux les sentiments de charité ct
d’attachement envers tous les êtres animés.
— 106 —
Ces notions sur la Zoologie seraient le complément naturel de
celles que l’on cherche à répandre dans ces mêmes écoles, sur
l’industrie horticole, sur les procédés les plus usuels de Pagri-
culture.
Enseignement secondaire.
Cet enseignement se trouvant encore presque en entier aux
mains de l’Université, 1l conviendrait de prime-abord que le
conseil supérieur de l'instruction publique fût sollicité de rompre
publiquement avec les errements anciens, en effaçant le qualifi-
catif accessoire aitaché à la dénomination officielle des sciences
naturelles, et en faisaat à leur étude une part convenable dans les
épreuves probatoires des examens publies.
Ce premier acte de réhabilitation entraînerait la nécessité de
pourvoir tous les établissements d'instruction secondaire, des plan-
ches et des collections matérielles, appropriées à la démonstration.
La répartition d’un enseignement gradué de l’histoire naturelie,
dans toute la série des années consacrées au cours classique, ren-
draicnten outre nécessaire une mesure bien désirable : le recul
de la limite d'âge, imposée prématurément aujourd’hui pour
l'admission aux examens des grandes écoles gouvernementales.
Cette sage mesure répondrait à l’objection de l'insuffisance du
temps sur laquelle on a motivé la dernière et déplorable restriction
apportée à l'étude des sciences naturelles, dans le Cours classique.
Elle serait, en outre, d’un heureux effet simultanément, et pour
la santé des élèves et pour la solidité des études, toutes deux com-
promises par la nécessité d’un labeur ardu, abstrait, à l’époque du
développement physique. | |
Les études universitaires ne sont, en France, ni assez pratiques,
ni assez utilitaires ; la liberté d'enseignement qui est à l’ordre du
jour, ne tardera point à les faire sortir de l’ornière classique. Il
importe à nos gouvernants de se préparer aux conséquences de la
libre concurrence.
Cest par une large part faite à l’étude des sciences naturelles,
surtout dans le Cours classique, qu'ils entreront dans les voies nou-
velles, où nous ont déjà précédés les nations les plus affairées et les
plus avares de leur temps. |
Encourager par des récompenses les professeurs qui se dislin-
gueraient dans cette branche de l’enseignement, aujourd’hui si
négligé ; |
— 107 —
Rechercher des méthodes d'enseignement, propres à développer
le goût, les aptitudes des élèves pour ces sciences, et, à cet effet,
donner de temps en temps un but utile aux promenades en les diri-
geant de manière à pouvoir étudier sur place les végétaux, les roches,
les animaux qui se trouvent dans la zône particulière de chaque
établissement d'instruction, vrai moyen de réunir et de muluplier,
à peu de frais, la collection des objets d'Histoire naturelle, propre
à chaque localité.
Le programme pour l'étude de l'Histoire naturelle devrait être
différent pour les deux Cours, si différents eux-mêmes, de l’enset-
anement classique, de l’enseignement professionnel!
Pour le premier, études plus complètes, plus générales, plus
théoriques ; les élèves de ce Cours étant destinés à se déplacer et à
vivre, d'une existence plus relevée, au point de vue intellectuel.
Pour le second, études plus pratiques, plus localisées, en quelque
sorte, ce qui élait d’ailleurs dans les prévisions de M. Duruy,
disant, le 14 décembre 1865, au sein du conseil impérial de lIns-
truction publique :
« Cet enseignement ne peut prétendre à embrasser dans chaque
» école l’étude de toutes les matières portées aux programmes. Il
» "doit rester assez flexible dans l'exécution, pour se plier aux
» besoins des populations des diverses régions. »
C'est à ces réformes que devraient s'appliquer les conseils dits
de perfectionnement, si celte institution, comme tant d’autres en
France, n’était un rouage de parade bien plus que de pratique !..
Enseignement supérieur.
L'enseignement supérieur des sciences naturelles est donné offi-
clellement, en France, par les Facultés existant dans chaque chef-
lieu d’Académie.
Nous reconnaissons qu’à ce degré de linstruction publique,
l’enseignement des sciences naturelles est libéralement organisé et
convenablement doté.
Mais l'insuffisance jusqu'alors des études d'Histoire naturelle
dans lédueation scolaire, n'a point encore permis à ces facultés
d'acquérir toute leur importance et de porter les fruits qu’on a le
droit d'en attendre, car 1ls ne peuvent être que proportionnels à la
quantité et à la qualité de leurs auditeurs !.….. |
Une mesure simple, autant qu’efficace, de relever cet enscigne-
oo
rh etant tte
Pre
RAT OU :
ment, serait d'imposer l'obligation à tout étudiant dans les facultés
de droit et autres écoles gouvernementales, d'ordinaire réunies au
chef-lieu d’Académie, de prendre inscription et de suivre comme
élève l’un des Cours professés dans ces facultés, soit des lettres soit
des sciences, chacun d’eux restant libre d’opter entre les divers
Cours, suivant son goût et ses aptitudes.
La même obligation devrait être imposée aux jeunes surnumérai-
res, dans les divérses administrations publiques, et la résidence de
ces chefs-lieux devrait être accordée de préférence à ceux qui don-
neralent des preuves de leur goût, pour cetenseignement supérieur,
si propre à élever le niveau de l'intelligence.
Les chefs-lieux d’Académie étant tous, villes de garnison, pour-
quoi ne pas inciter et même récompenser les militaires qui utilise-
raient leurs loisirs à de telles études ?.…
Cet enseignement officiel, forcément théorique, essentiellement
technique, serait utilement complété dans les chefs-lieux d’acadé-
mie et suppléé dans les autres villes, par un enseignement libre,
sous forme de conférences, dont les sociétés scientifiques, dont les
ligues pour l’enseignement, dont les municipalités elles-mêmes de-
vralent prendre l'initiative et la direction.
Ces conférences, faites plus particulièrement le soir, s’adressant
à toutes les classes de la société, constitueraient les cours scientifi-
ques pour les adultes, en fait d'Histoire naturelle, appropriée sur-
tout aux particularités de la production, soit naturelle soit artifi-
cielle de la localité, de la région ; elles mettraient à profit dans
l'intérêt de tous, les collections municipales, dont nous allons
demander la formation.
Ainsi l'avait compris M. Duruy, qui projetait la création
de chaires d'Histoire naturelle, dans tous les chefs-lieux de dépar-
tement, en vue d'y enseigner et d’y faire étudier surtout ce qui est
relatif aux industries manufacturières ou agricoles, spéciales à
chacune de ces localités.
Le complément rationel de l'extension et de la vulgarisation
imprimées à l'étude de l'Histoire naturelle serait l'affectation, dans
chaque municipalité, d'un lieu de dépôt, de conservation et d’ex-
position de tous les objets, utiles ou curieux, se rapportant aux
sciences naturelles et aux industries qui en découlent.
Ces collections d'intérêt local occuperaient une modeste pièce à
la Mairie, dans les petites communes, sous la surveillance des secré-
— 109 —
taires, sous la direction d’un amateur naturaliste, s’il en existe dans
la commune.
Dans les communes plus importantes, dans les pelites villes, ces
collections croitraient en étendue et en valeur, proportionnellement
aux ressources, en personnel et en matériel, de chaque localité, et
ces lieux de dépôt prendraient le nom de Musée, quand leur ri-
chesse en objets naturels ou fabriqués leur en donnerait l’impor-
tance, leur en mériterait les attributs.
Enfin, dans les villes de premier ordre, soit au point de vue
social, soit au point de vue scientifique ou industriel, ce Musée
prendrait les proportions d’un établissement scientifique, d’une
sorte d’Institut ou de Palais des Arts et des Sciences, ainsi que
Lyon, Marseille, Toulouse et tant d’autres villes importantes en
ont déjà donné le généreux exemple. |
Cet exemple sera suivi, à n’en pas douter, par toutes les autres
municipalités, lorsque délivrées des lisières administratives que
tient la centralisation gouvernementale, elles vivront chacune de
leur vie propre, indépendante, auto-nomique ; alors une noble
émulation créera partout la vie artistique et intellectuelle, en pro-
portion des aptitudes et des ressources de chaque groupe communal.
Dans les grandes villes et dans les chefs-lieux d'académie, une
disposition importante à prendre serait de réunir dans un même
local tous les objets ou éléments de collections, disséminés aujour-
d'hui dans divers établissements publics ou privés, officiels ou
libres ; ainsi, l’on pourrait créer une installation confortable, aussi
complète que possible, avec économie de tout genre. Dans ces Mu-
sées d'Histoire naturelle, servant d'exposition permanente pour les
produits de la localité, devraient se faire toutes les conférences,
devraient se tenir toutes les réunions d'intérêt artistique ou scien-
tifique, devraient se faire tous les Cours d'Histoire naturelle, même
pour les établissements d'instruction publique et privée, qui seraient
ainsi dispensés de former des collections, et qui pourraient dès lors
se borner à en posséder le complément auxiliaire, les planches
et les dessins; c’est ainsi qu'en usent les lycées de Paris et de
Versailles.
Leurs élèves sont conduits dans les Musées et au Muséum d’His-
toire naturelle, où les professeurs leur donnent des leçons sur les
collections importantes qui s’y trouvent réunies dans des propor-
tions nationales.
|
— 110 —
À Alger, par exemple, quel avantage n’y aurait-il pas à réunir
dans un même local, sous des dispositions prises, en vue d’en
faciliter l'étude, tous les objets d'Histoire naturelle ou s’y rappor-
tant, qui se trouvent enfouis dans les salles de l'exposition per-
manente, accumulés dans le modeste cabinet de notre société,
disséminés à l’école de Médecine, au coilége arabe, aux mines, à
l'École Normale, et laissés, peut-être, à l’abandon, dans l’ancien
jardin publie d’acelimatation, créé à si grands frais, avec les deniers
de l'Etat; mais qui, depuis 4868, se trouve livré à Pexploitätion
d’une puissante compagnie, la Société algérienne, trop peu sou-
cieuse, nous dit-on, des réserves expressément inscrites dans le
décret du 7 décembre 1867, en faveur des intérêts du public et des
seiences naturelles.
En attendant, d’ailleurs, qu’Alger soit doté de facultés des scien-
ces et des lettres, complément de son académie, pourquoi ne pas
eréer une ou plusieurs chaires pour constituer un centre d’études
d'Histoire naturelle de l’Alsérie, selon les utiles intentions du
Ministre Duruy, pour tous les départements de la France ?
Pourquoi l'autorité ne se déchargerait-elle pas, sur notre Société,
concurremment avec les Sociétés de médecine et d'agriculture, du
soin de veiller à ce que le jardin d’acclimatation ne soit pas sous-
trait à sa mission de jardin scientifique, conformément à l'esprit
et à la lettre du décret qui en a cédé temporairement l'exploitation
à l'industrie privée ?..
Si ces lignes parviennent jusqu'à M. Gandon, l'actif coo-
pérateur de M. Durny, dans ses tentatives de perfectionne-
ment pour l'instruction non classique, espérons qu’il prendra en
sérieuses considérations les vœux multiples qui ressortent de ce
rapport : si toutefois ce rapport reçoit votre approbation, Messieurs,
et si vous croyez utile de l’annexer à la réponse qu’attend de vous
la société d'Histoire naturelle de Toulouse ; ce rapport pouvant ser-
vir d’appendice à la pétition par laquelle cette sociélé se propose
d'évoquer la haute sollicitude de Monsieur le Ministre, en faveur
de l’enseignement des sciences naturelles, dans tout l'empire
français.
La lutte entre les nations est aujourd’hui dans les voies de l’ins-
truction, dans les procédés de la production, bien plus que dans les
manœuvres de la destruetion ; il est donc très-opportun que notre
Ministre de l’Instruction publique s’empresse de soiliciter la cons-
— 11 —
titution et le perfectionnement de son matériel d’action ; comme
font depuis trop longtemps et dans de si vastes et si coûteuses pro-
portions, hélas ! les Ministres de la Guerre et de la Marine.
. Quelques canons rayés, un seul bâtiment cuirassé de moins dans
les arsenaux de la France, ne feraient point périeliter sa puissance
militaire et cette économie suffirait pour la création des Musées
d'Histoire naturelle dans toutes les villes ; pour réaliser en France
l’enseignement des sciences pratiques, à l'instar de ce qu'il est en
Allemagne et en Angleterre.
Parmi les nations voisines et rivales, le budget de l’Instruction
publique est richement doté; les plus petits états de l'Allemagne
s'imposent constamment de généreux sacrifices pour le progrès de
leurs établissements littéraires et scientifiques ; chaque Université
allemande coûte en moyenne cinq cent mille francs au pays qui
l'entretient, sans compter les sommes considérables qui sont al-
louées chaque année, en dehors du budget régulier, pour la cons-
truction de laboratoires, de cabinets, d’'amphithéâtres, pour lachat
de collections précieuses ; tandis que, en France, l’état spécule sur
quelques Facultés, s’y fesant un revenu avec les frais d'inscriptions
et d'examens !... La Prusse, qui est cependant un pays relativement
pauvre, ne refuse rien à ses savants, à ses centres d'instruction
publique, alors qu'en France tout est misère, tout est parcimonie,
suand il s’agit de pourvoir aux besoins d'ordre purement intellec-
tuel ; ainsi que le démontre le promoteur de tant d'initiatives,
l'infatigable Monsieur Guerrier de Dumast, dans la préface dont
il a enrichi une brochure piquante, publiée par un magistrat de
Naney, sous ce titre : Réforme de l’enseignement supérieur. De
par les progrès de la science, c'est-à-dire de la raison humaine,
c’est désormais au développement des arts de la paix, à l'étude des
sciences pratiques, que la France doit appliquer ses ressources; ce
sont ses académies bien plus que ses places de guerre, qu'il lui
importe de fortifier pour se maintenir au premier rang parmi les
puissances du jour.
Aux jours de la barbarie, ses vertus militaires, aidées de ses
ressources pécuniaires, lui ont valu cette glorieuse devise : Gesta
Dei per Francos. |
Ce n’est pas avec un budget de l’Instruction pubiique donnant
un quotient de 30 centimes par individu, qu’elle pourra conquérir
cette même devise dans le monde nouveau, qui se constitue, sous
— 112 —
l'égide de la fraternisation des peuples, dans l’œuvre productive du
sénie scientifique.
Il y a des chiffres que le Ministre de l’Instruction publique devrait
présenter tous les ans au Corps législatif; on finirait peut-être Der
se lasser de l’humiliation de les entendre.
La réorganisation de notre Instruction publique se ramènera
toujours à une question d'argent ; ce n’est qu'avec beaucoup d’ar-
sent que la France s’est illustrée dans l’art de la guerre, que nos
vouvernants adoptent résolument comme épigraphe de nos budgets :
(Cedant arma scientiis); et la France conservera sa gtorieuse devise
dans le monde nouveau. |
Elle est déjà la fille ainée de la science, qu’elle ne sacrifie pas
aux errements du passé ce droit d’ainesse; car la gloire pure, la
prépondérance Incontestée, appartiendront dans l’avenir à la nation
la plus libérale et la plus féconde.
La Société entend cette lecture avec le plus vif intérêt. Plusieurs
membres prennent la parole pour faire remarquer combien l’ac-
cueil fait à la pétition est chaleureux, combien ces adhésions sont
précieuses. Dès à présent on peut prévoir l’heureux résultat de
tout ce mouvement.
Après discussion, on décide qu'aucune hâte ne sera apportée à
la remise de la pétition, ainsi appuyée, à M. le Ministre. On
attendra le moment le plus favorable, mais les documents seront
imprimés dans le Bulletin.
le Dr Jeanbernat communique à la Société ses récentes
recherches Sur la période glaciaire dans les vallées de la Garonne
et de la Pique.
L'auteur entre, d’abord, dans quelques considérations générales
sur la formation, la progression et le régime des glaciers. Il passe
rapidement en revue les diverses traces qu'ils laissent sur les
parois encaissantes, telles que usures, stries, sillons, polissage et
moutonnement des roches, et il donne les caractères distinctifs
des moraines, ces amas de matériaux de transport que les glaciers
charrient sans cesse et déposent sur tous les points où ils séjour-
nent et dont on distingue quatre sortes principales : moraines
profondes, latérales, médianes et frontales.
Après ces indispensables préliminaires, M. le Dr Jeanbernat
— 113 —
énumère avec soin tous les faits saillants qu’il a constatés dans
ses nombreuses courses scientifiques dans nos montagnes, el il
décrit les innombrables accidents glaciaires qui prouvent jusqu'à
évidence l'ancienne extension des glaciers dans toutes nos
vallées, extension déjà établie d’une manière générale par Char-
pentier, Nérée Boubée, Durocher, etc., ete. Nous nous hornerons
à citer dans ce compte-rendu abrégé les conclusions de ce travail
important.
1° À une certaine époque, époque qui n’est cerlainement pas
ce.le de leur plus grande extension, les embryons glaciaires, au-
jourd’hui confinés dans les cirques du Graouës, du Lys et d'Oo, à
une altitude de 2800 mètres, s'étaient accrus au point d’envahir
toutes les vallées luchonnaises et venaient à Cierp se jeter dans le
slaeier descendu de la vallée d’Aran. Le grand fleuve de glace
ainsi formé remplissait toute la vallée de la Garonne et se ter-
final à Montréieau, à l’origine de la vaste plaine de Valentine.
20 Le glacier avait une épaisseur moyenne de 700 à 800 mètres.
30 Sa plus srande longueur, depuis le pic de Montarto jusqu’à
Sa lerininalson, n’était pas moindre de 84 kilomütres.
40 Sa moraine frontale s’étendait transversalement et en demi
cercle, de Saint-Bertrand de Comminges à Barbazan, formant un
énorme barrage, aujourd’hui démantelé, large de 3 à 4 kilomètres,
sur 209 à 300 mètres d'épaisseur.
5e Le retrait du glacier, loin de s’opérer brusquement et par
fonte subite, s’est effectué, au contraire, avec lenteur et par
oscillations de longue durée.
Go On retrouve les traces de ces oscillations dans les nom-
breuses moraines frontales échelonnées à des distances variables,
depuis Montréjeau jusqu'aux modestes dépôts des glaciers
lillipuliens actuels.
7° Dans la vallée de la Pique, par exemple, trois moraines
frontales, plus importantes que les autres, méritent d’être signalées.
La première, située entre Cierp et Luchon, à Garan ; la deuxième,
entre Luchon et le confluent de la Pique et du Lys, au pont de
Lapadé ; la troisième, à un kilomètre et demi en evant de la
cascade d’Enfer.
86 Chacun de ces barrages a donné naissance, après le retrait
du vlacier, à un lac morainique, aujourd’hui desséché par lPaf-
fouillement des eaux qui se sont ouvert un passage facile à travers
| 8
— 11% —
les matériaux sans cohésion de ces sortes de digues. Le petit lac
de Barbazan est un reste encore existant de l’ancien et vaste lac
morainique de Labroquère.
99 Le glacier de la vallée d’Aran l’emportait en puissance sur
celui de la Pique, car il a déversé ses moraines latérales jusque
dans le val de Burbe par le Portillon (1308 mètres), et aussi
dans la vallée du Ger par le col de Menthé (1331 mètres). C'était
peut-être le plus vaste glacier de toute la chaîne des Pyrénées.
À propos de la communication précédente, M. H. Magnan, qui
a observé avec le D' Jeanbernat quelques-uns des anciens dépôts
glaciaires des vallées de la Garonne ct du Ger (anté p.33), prend
la parole et dit qu’il a étudié des dépôts semblables dans plusieurs
autres vallées pyrénéennes ; 1l a reconnu, en effet, en remontant
lPAude, l’Ariége, le Salat, le Garhet, la Neste d’Aure, lPAdour,
.le gave de Pau et ses affluents, sur le flanc des montagnes, des
restes de moraines latérales et profondes, et au fond des vallées
des dépôts qui appartiennent sans doute à d’anciennes moraines
frontales, alors que les glaciers se trouvaient dans leur période de
retrait. De plus, il a remarqué assez loin de la grañde chaine,
notamment dans les petites Pyrénées de l’Ariége et de la Haute-
Garonne, l'existence de moraines latérales, profondes et frontales,
qui ont laissé de curieux dépôts au fond et sur le flanc des
vallées du Job, du bas Salat, du Lens, du Volp, de l’Arize et de
la basse Ariége.
Notre confrère ajoute qu’une ligne qui passerait par Loubières
au nord de Foix, Balança près du. Mas-d’Azil, Sainte-Croix,
Martreset Lannemezan, marquerait, à peu près, la limite nord des
moraines frontales des anciens glaciers de la Neste, de la Garonne
et de l'Ariége. — Gette ligne, dirigée E. O., irait rejoindre à l’oc-
cident les dépôts glaciaires de la vallée de l’Adour à Lescaladieu et
Bagnères-de-Bigorre, et plus loin ceux au sud de Lourdes.
M. Magnan s'attache à démontrer que le facies arrondi et
conoïde des montagnes qui constituent les petiles Pyrénées est dû
à l'agent glaciaire. En effet, on observe presque partout, dans cette.
région, des roches rabotées, polies, striées et surtout moutonnées.
Il fait ensuite remarquer que l'étude des anciens glaciers se
complique au pied des Pyrénées, comme partout, de phénomènes
d’érosion et de remaniement : les agents d’érosion de la période :
— 15
diluvienne ou quaternaire auraient enlevé et quelquefois remanié
de puissants dépôts glaciaires préexistants, en même temps que
d'autres terrains, et auraient façonné le sol de nos plaines tel que
nous le voyons aujourd’hui. C’est ce qui expliquerait pourquoi les
vraies moraines frontales des glaciers anciens, qui étaient les
plus étendus, ont échappé jusqu'ici aux regards des géologues.
M. Magnan signale, à l'appui de cette manière de voir, à des altitudes
relativement élevées au-dessus des vallées, près de Miramont, de
Saint-Girons, de Sainte-Croix, de Betchat, de Touille, des dépôts di-
luviens formés d'argiles jaunâtres emballant des cailloux dequartzite,
qui reposent sur des roches morainiques, et qui correspondent aux
dépôts diluviens des piateaux élevés du bassin sous-pyrénéen, que
les auteurs de la Carte géolcgique deila France ont rangés dans le
plivcène, maïs qui appartiennent en réalité au quaternaire ancien.
M. Magnan termine en appelant l'attention de la Compagnie sur
lu ressemblance de certains dépôts morainiques et cénomaniens,
ces derniers appartenant au conglomérat de Camarade, et donne
la caractéristique des uns ct des autres. Les premiers n'offrent
jamais de dépôts nettement stratifiés, tandis que les seconds alter-
nent avec des couches de grès, à empreintes végétales, et des
poudingues fortement cimentés, en bancs épais.
M. le D' Guitard communique à la Société la première partie
d'une Notice sur le pastel, qui sera imprimée dans le Bulletin dès
que l’auteur aura entièrement terminé le travail qui se rapporte à
ce sujet.
Séance du 15 juillet 4870.
: Présidence de M. le Dr Guirarp, président.
La Société reçoit :
(à et là dans les Pyrénées, parle D' Srezæus. [n-12, Toulouse.
Bulletin dela Société d'Histoire naturelle du département de
la Moselle, 12e cahier.
= V6
Bulletin de la Société imp. zoologique d’acclimatation, juin
1870, Paris.
Rapport sur les travaux de la Société archéologique du Midi
de la France, par E. CarraiLHac, in-8. |
Mémoires de la Société d’émulation de Montbéliard, 2° série,
t. [Let III.
Les adhésions suivantes :
Société industrielle de Mulhouse.
Le Comite d'Histoire naturelle de la Société industrielle de
Mulhouse a pris connaissance du projet de pétition de votre savante
Compagnie, et propose d'appuyer auprès de M. le Ministre de
Pinstruetion publique vos vœux qu'il ne peut qu'approuver.
Toutefois, en nous demandant notre concours, vous ne nous
dites pas en quoi il doit consister; nous attendrons donc votre
réponse, avant de faire aucune démarche.
D' Pexor, vice-président.
Société Linnéenne de Normandie.
La Société Linnéenne de Normandie a pris connaissance, dans
la réunion qu'elle a tenue hier soir, de la pétition en faveur
de lPHistoire naturelle que vous avez l’intention d'adresser à Son
Excellence le Ministre de l’Instruction publique. — Notre Cem-
pagnie ne peut que donner une entière approbation à ce document ;
elle partage complètement les idées de la Société d'Histoire natu-
relle de Toulouse, et elle appelle de tous ses vœux la réforme que
vous sollicitez.
J. MorièRE, secrétaire.
M. le Dr Guitard donne lecture de la note suivante :
Un mot sur le Sarracenia purpurea.
Au moment où l’on veut faire grand brut, dans notre ville et
peut-être ailleurs, des prétendues vertus mirifiques du Sarracenia
purpurea, il m'a paru opportun de vous en dire un mot et de
vous en présenter un échantillon.
Cette plante herbacée, aquatique ei vivace, croi pou inémen!
en abondance dans les marais de l'Amérique du Nord.
— 117 —
Elle est, dans les Polypétales hypogynes à placentation axille,
e type du genre Sarracenia de la famiile des Sarracéniées.
Les feuilles sont radicales; elles poussent toujours à l’extrémité
d’une racine épaisse, traçante, peu enterrée qui s’allonge d’un
côlé et pourrit de l’autre.
Ces feuilles, semi-engainantes à leur base, forment un cornet
ventru, curviligne, creux dans son intérieur, avec une crête
membraneuse plus ou moins saillante à la face interne.
Elles sont de couleur verte teintée de rouge sur les nervures et
sur les bords,
L'ouverture de ce cornet est taillée en biseau. A la partie la
plus élevée, il y a une expression membraneuse, plus mince,
découpée au bord libre, plus large que l’ouverture elle-même et
qui, pouvant s’y appliquer, en devient l’opercule.
À la partie la plus basse de ec biseau, l'extrémité de la feuille
s’enroule en dehors comme pour servir de crochet à l'opereule.
La bouche de ce cornet, c’est-à-dire la face interne de l’oper-
cule est veloutée, comme hérissée de fins piquants.
Cette disposition remarquable me fait supposer que c’est la
feuille et non la fleur, comme le veulent quelques auteurs, qui
a fait donner à cette plante le nom de Attrape-mouches.
La cavité de ces cornets est presque toujours remplie d’eau ;
mais celle-ci est de mauvaise qualité à cause des quantités innom-
brables de cousins et d’autres insectes qui viennent s’y noyer.
C’est ainsi que cette plante a pu être appelée la Coupe, la
Cruche ou la Tasse indienne, la Coupe du chasseur, le Bonnet du
chasseur et les Guêtres de grenouilles.
Ces cornets grands de 41/2 pied dans le S. purpurea, ont plus
de 2 pieds dans le S. Drummondi.
Les fleurs, :solées, poussent en été.
Elles sont portées sur une hampe qui sort d’entre les feuilles et
qui est 2 ou 3 fois plus grande que les feuilles.
Le calice est à 3-5 sépales persistants.
La corolle est à 5 pétales hypogynes, égaux en nombre, alternes
avec eux et onguiculés.
Les fleurs sont grandes et remarquables par leurs couleurs et
par le vif éclat de ces dernières.
Les étamines, hypogynes, sont en nombre imdéfini ; les anthères
sont arrondies.
DRE: So
L'ovaire est supérieur et arrondi, à style cylindrique et à
stigmate très-long pelté, à 5 côtés et persistant.
Une capsule arrondie, divisée intérieurement en 5 loges, s’ou-
vre en 5 valves et contient un grand nombre de semences sur un
placenta central et pentagone.
La plantule, dicotylédonée, est munie à la base d’un albumen
charnu.
Les principales espèces de cette plante exotique sont le S. à
fleurs rouges ou de Drummond, celle qui est représentée à la
page 323 de la Botanique organographique et taxonomie de Le
Maout, le S. à fleurs jaunes, le S. à fleurs purpurines en dehors
et vertes en dedans, et le S. bec de-perroquet.
D’après le D' Morren, les racines ou plutôt les rhyzomes de cette
plante, sont employés par les riches Indiens pour combattre effi-
cacement la variole et la rougeole.
Ils boivent en 2 fois, à 3 heures d'intervalle et sans sucre, une
décoction faite avec 30 parties de la plante pulvérisée par 4000
parties d’eau réduite à moitié par l’ébullition.
En 1865, M. Stanislas Martin a trouvé l’aléaloide de cette
plante et lui a donné le nom de Sarracénine.
Celle-ci, blanche, en aiguilles prismatiques, très-soluble et très-
amère, forme des sels avec des acides. |
Il serait peut-être bon de apte celte analyse en sous-
œuvre.
Aujourd’hui, après avoir été complètement délaissée, si ce n’est
même oubliée, la Sarracénia purpurine veut reparaitre et s'impo-
ser comme spécifique de la variole pourprée, soit comme euratif,
soit comme préventif.
Aussi, désireux de faire sa connaissance, j'ai prié mon ami,
M. Th. Laforgue, pharmacien, de m'en faire expédier un échan-
tillon de Paris.
Plusieurs autres sont arrivés avec lui pour d’autres destina-
tions. |
J'ai pu en confronter deux paquets pour juger de leur identité
et pour constater leur état dans le commerce.
Dans le paquet remis par M. Lalorgue, il y avait surtout des
feuilles avec quelques racines; le commerce ne les avait point
travaillées.
Dans un autre spécimen, les racines dominaient, au contraire,
— 119 —
avec quelques feuilles brisées, et les racines étaient coupées,
ratissées et mondées.
Les feuilles et les racines étaient bien les mêmes dans les deux
échantillons. |
Les radicelles sont coupées à peu près de 10 à 20 centimètres
de longueur ; elles sont au plus de la grosseur d’un plume d’oie ;
elles sont rougeâtres à l'extérieur, cylindriques et bosselées à
intervalles inégaux ; leur cassure est nette et leur structure fibreuse;
leur saveur est amère.
Les feuilles, quelquefois entières, quelquelois déchirées, quel-
quefois en petits fragments desséchées, sont aplaties et d’un vert
jaunâtre, maculées de rouge pourpre, soit en plaques, soit en linéa-
ments.
Trempées dans l’eau, mêmé froide, elles se déroulent et le
cornet se forme spontanément. L’on peut alors constater la véri-
table forme de la feuille et tous les caractères indiqués plus haut,
sans en omettre les impuretés et les détritus de certains insectes.
Il estdonc bien certain que j'ai entre mes mains le Sarracenia
Purpurea, et c’est pour cela que j'ai l'honneur de vous le pré-
senler.
Je n’avais pas à vous dire ici que j'en ai commencé l’expérimen-
tation dans ma salle spéciale de clinique de l'Hôtel-Dieu.
Maïs pour donner quelque utilñé pratique à cette simple Note,
je dois vous l’annoncer, tout en vous faisant part de mon
opinion a priori. ;
Je crains, en effet, et je le regretterais fort, que cette plante ne
soit venue tout simplement grossir le nombre de ces médicaments
qui devaient guérir une maladie avec laquelle ils avaient quelque
ressemblance, ainsi la carote dans la jaunisse, les marrons dans la
poche pour faire passer les hémorrhoïdes, la pulmonaire contre la
phthisie, la patte de lièvre en frictions dans le cas de sciatique et
tant d’autres dont la raison et l'expérience ont fait justice depuis
longtemps.
M. Gourdon, prenant la parole après cette lecture, rappelle que
depuis des siècles le Sarracenia a été employé comme préservatif
de la variole, et conclut que ses propriétés peuvent être réelles
mais peu prononcées comparées à d’autres préservatifs, au vacein
par-exemple, dont la découverte aurait fait abandonner l’usage de
— 120 —
la plante dont il s’agit ; M. Gourdon rappelle les observations de
M. Mille, et exprime le désir que des expériences précises vien-
nent éclairés la science sur ce sujeL. |
M. A. Timbal déclare que les observations de M. Mille lui parais-
sent demander confirmation; il s'appuie sur l'opinion des médecins
de Bourges.
M. Gourdon insiste sur ce point, que l'on a employé surtout le
Sarracenia cultivé en France, et rappelle que diverses plantes dont
les propriétés sont bien connues, n’agissent que lorsqu'on les
prend dans leur pays natal, I cite particuliérement le Quinquina.
Il est certain que le climat, la composition du sol et bien d’autres
causes influent directement sur les propriétés des plantes.
M. Marquet fait observer que la feuille de lAtriplexz halimus
des haies de Toulouse, est aussi salée que celle de la même plante
recueillie sur les rivages de la Méditerranée. |
M. Filhol dit qu'il a analysé des feuilles d’Afriplex halimus
des bords de la Méditerranée et des environs de Touiouse, et qu'il
a trouvé des quantités peu différentes de chlorure dans l’une et
dans l’autre. Mais les premières contiennent du chlorure de sodium,
tandis que celles de notre pays renferment surtout du chlorure de
potassium. M. Filhol donnera ultérieurement un exposé complet
de ses recherches.
M. H. Magnan communique à la Société le travail suivant :
Notice sur le terrain quaternaire des bords de la Montagne-Noire,
entre Castres et Carcassonne. et sur l'ancien lit de l'Agout ,
par M. Hexri Mana.
Le terrain quaternaire a été l'objet, dans ces dernières années,
de nombreux travaux. On est arrivé généralement à reconnaitre :
qu’à diverses époques les vallées, dans les pays de plaine, avaient
été creusées par érosions et par affouillements successifs ; qu’au-
trefois, les fleuves charriaient des eaux puissantes ; que ces eaux
diminuant ensuite de volume, les vallées se rétrécissaient en s’ap-
profondissant, d'où la formation, le long de nos cours d’eaux, de
terrasses en retrait, les unes par rapport aux autres, les plus
élevées étant les plus anciennes, les plus basses étant les” plu
ONU" —
modernes. Maïs quelques géologues émettent des doutes sur quel-
ques-unes de ces conclusions, et puis d’ailleurs-la science est loin
d’avoir dit son dernier mot sur la puissance, la grandeur et la
durée des phénomènes d’érosion pendant la période quaternaire,
sur les lits primitifs de nos fleuves et de nos rivières. C’est ce qui
m'engage à publier cette note, espérant qu’elle intéressera, à un
certain point de vue, ceux qui s'occupent de nos terrains
récents.
Mes courses dans le Midi de la France, surtout dans les Pyré-
nées, sur les bords du plateau central et dans la vallée du Rhône,
m'avaient mis, bien des fois, aux prises avec les terrains de trans-
port de la période quaternaire : j'avais souvent observé, le long
des fleuves et des rivières, divers dépôts d’âge différent, en retrait
les uns par rapport aux autres, c'est-à-dire des plateaux ou des
terrasses qui me permettaient d'apprécier la grande largeur de
nos anciens cours d’eau et l’importance des érosions par affouille-
ment, puisque certains dépôts diluviens se trouvaient comme
ceux de la petite montagne de Crussol, vis-a-vis Valence, à plus
de 200 mètres au-dessus du Rhône, comme ceux de Pujaudran,
à 170 mêtres au-dessus de la Garonne, comme ceux des Landes
du Pont-Long, à 60 mètres au-dessus du gave de Pau; maïs ces
observations , je les avais faites en suivant les cours d’eau
actuels dont je pouvais facilement reconstituer les anciens lits ;
tandis qu'il y a trois ou quatre ans, — alors que j'étais chargé
avec M. Leymerie de dresser la Carte géologique du département
de l'Aude, — je fus assez étonné d’observer, presque à la limite
de ce département et de celui de la Haute-Garonne, sur la ligne
de faite, des bassins de l'Océan et dela Méditerranée, à 248 metres
au-dessus du niveau de la mer, loin de tout cours d’eau impor-
tant à l'Enmaurel, — est de Saint-Félix de Caraman, —des dépôts
diluviens sous forme de terrasses. Comment ces dépôts avaient-ils
pu.se former ? D'où venaient les eaux qui les avaient amenés là ?
C'était un problème à résoudre, problème que le travail de
de Boucheporn n’effleurait même pas. — Ce savant, dans l’Expli-
cation de la carte géologique du département du Tarn, avait d’ail-
leurs, sur l’âge et le mode de dépôt des terrains diluviens, des
théories qui ne sont plus admissibles aujourd'hui et sur lesquelles
je reviendrai plus loin. — Plus tard, un séjour à Champlis, près
de Saix, chez un de mes amis, M. J. de Lacger, me permit d'ob-
— 122 —
server des cailloux roulés su sommet du Mont de Saïx, à 140
mètres au-dessus du lit actuel de l’Agout, ou si l’on veut à 292
mètres au-dessus du niveau de la mer, Enfin, dans ces derniers
temps, une exploration géologique faite à Saint-Félix de Cara-
man, me donna l'explication du fait, me fit voir, grâce au
relief et à la configuration générale du pays, que je pus embras-
ser d’un coup-d’œil, que le dépôt diluvien que j'avais observé sur
la ligne de faite des bassins Océanien et Méditerranéen avait été
amené là par l’Agout, qui autrefois, presque au début de la période
quaternaire, se déversait dans la Méditerranée, au lieu de se jeter
comme aujourd’hui dans l'Océan.
L'observateur qui se rendra à Saint-Félix de Caraman (Haute-
Garonne), jouira d’une des plus splendides vues que je sache.
Après avoir admiré au loin, sur près de 800 kilomètres de lon-
gueur, les sommets des Pyrénées, depuis les montagnes de Ja’
haute vallée du Bastan jusqu'au Canigou, ce dominateur des
régions orientales, débrouilié le chaos des Corbières, reconnu le
pic de Bugarach, qui ressemble d’iei à un lion couché, et remar-
qué les croupes arrondies du terrain de transition de la Montagne-
Noire et des régions granitiques du Sidobre et de Lacaune qui
appartiennent au plateau central de la France, il pourra recon-
naître, presque à ses pieds, une dépression ou plutôt un large sillon
de plusieurs kilomètres de largeur, qui borde le massif ancien de
la Montagne-Noire dont je viens de parler. Gette dépression, qui
est très visible dans les environs de Castres et de Saix, se conti-
nue par Soual, Revel, Soupex, Aiïrous et Castelnaudary jusqu'à
Carcassonne ; elle est indiquée sur la carte jointe à ce travail
(pl. I, fig. #) par un léger pointillé, affecté aux parties recou:
vertes autrefois par les dépôts diluviens, et qui représente l’ancien
lit de l’Agout, alors que cette rivière se déversait dans l Aude et
de là dans la Méditerranée.
Le sillon en question est assez nettement indiqué sur les cartes
du dépôt de la guerre (feuilles de Castres, de Toulouse, de Pamiers
et de Carcassonne). Les rivières et les ruisseaux qui l’arrosent
sont élevés de 150 mètres à 200 mètres au-dessus du niveau de la
mer, entre Castres et l’Engranot (ligne de faite) et de 210 à 400
— 123 —
- mêtres entre ce dernier point et Carcassonne ; 1l entoure, en fur-
* mant presque un angle droit, le massif primordial de la Montagne-
Noire, dont le point culminant atteint, au signal de Nore, 1210
métres au-dessus du niveau de la mer; et il est limité à l'ouest et
au sud, du côté de la plaine tertiaire, par les hauteurs d'Entounty,
à l’ouest de Soual (350 mètres) ; de Saint-Félix de Caraman
(326 mûtres) ; de Montferran, à l’ouest de l’Obélisque de Naurouse
(284 métres); du Mas-Saintes-Pnelles (320 mètres) ; de Fanjeaux
(317 mètres) et de Montréal (280 mètres).
C’est dans ce large sillon que se trouve placé le chemin de fer
qui fait communiquer Castres avec Castefnaudary et que coule la
rigole qui alimente le canal du Midi, entre Saint-Ferréol et Nau-
1ouse, point de partage des eaux. Vu de Suint-Félix de Garaman,
il a l’air de former une dépression aux flancs adoucis, légèrement en
pente; mais si on l'étudie de près, —ainsi que nous le ferons tout
à l'heure, — on voit qu’il est constitué par des terrasses diluvien-
nes en retrait et par des coteaux plus ou moins mamelonnés à
la suite d'érosions, coteaux sur lesquels on constate des témoins
de l’action diluvienne.
Sur la carte de la pl. Il, fig. 4, certaines cotes de hauteur, pri-
ses dans la dépression dont il s'agit, ont été indiquées, là où
existent d'anciennes terrasses diluviennes, afin que le lecteur
puisse faire une sorte de profil en long, qui lui permette de
rétablir facilement le cours et on peut presque dire aussi la pente
de l’ancien lit de l’Agout. Ainsi, on voit qu’à Pucch-Auriol, nord
de Castres, la cote qui représente la hauteur en mètres du dilu-
vium ancien de la terrasse la plus élevée, indique le chiffre de
298 mètres, et qu’en se dirigeant vers le sul, ou mieux vers la mer
Méditerranée, cette cote diminue . on trouve, en effet, au Mont
de Saix, sud de Costres, 292 mètres ; à les Escudiés, sud de Saint-
Afrique, 276 mètres ; à Cahuzac, nord de Sorèze, 262 mètres ; à
PEmbreoussou, entre Saint-Félix de Caraman etla Pomarède, point
de partage des eaux de l'Océan et de la Méditerranée, 218
mètres. Plus loin, le lit actuel du Fresquel, qui se jette dans
l’Aude et de là dans la Méditerranée, représente l’ancien cours
de l’Agout : certains dépôts diluviens anciens se retrouvent sur
les bords de la Montagne-Noire, près du château de Castelet, à
230 mètres; non loin d’Issel à 220 mètres ; à Sainte-Catherine,
près de Gastelnaudary, à 209 mètres ; à En-Dreuille, près de Saint-
3
— 12% —
Martin-Lalande, à 177 mètres ; à Sauzens, au S. E. de Villepinte,
à 148 mètres; à la Trivalle, faubourg de Carcassonne, à 124
mètres.
Gette carte montre aussi que l’ancien lit de l’Agout, entre Cas-
tres et Carcassonne, avait 7 à 8 kilomètres de largeur en moyenne
et en certains points plus de 45 kilomêtres, notamment sous le
parallèle de l’ancien confluent du Thoré, tandis qu'entre Vielmur,
Saint-Paul-Cap-de-Joux et la Pointe-Saint-Sulpice , la vallée
actuelle de l’Agout ne dépasse pas deux ou troiskilomètres, si bien
que, sur la Carte géologique de la France, les dépôts diluviens le
long de cette rivière, entre les points que je viens de désigner, »’y
sont même pas indiqués.
Pour démontrer certains de ces dires, les plus importants, je
m'étalerai sur plusieurs coupes, que j'ai relevées dans la région
comprise entre Castres et Castelnaudary ; mais auparavant on me
permettra de parler des recherches faites par de Boucheporn dans
le département du Tarn, à propos du terrain quaternaire.
Il
De Boucheporn, dans l’Explication de la carte géologique du
département du Tarn (4), consacre un chapitre de son livre au
terrain qui nous occupe, chapitre qu’il intitule : Second étage ter-
liaire, alluvions (p. 96). Après avoir dit qu’on trouve à la fois
sur le sommet des plateaux élevés et sur le sol des plaines, un
terrain formé de couches de gros galets et de bancs d’alluvion,
qu'il croit contemporain de la molasse marine et qu'il range par
suite dans le tertiaire moyen, ce savant émet l’opinion « que tou-
tes les grandes vallées du département l'ont traversé déchiré,
affaissé. C’est de là, — ajoute-t-1l, —que nous avons tiré la preuve
principale de la formation récente de ces vallées. »
De Boucheporn croyait que les dépôts caillouteux des vallées,
désignés par les auteurs sous les noms d’alluvions anciennes, que
ceux que l’on observe à des hauteurs moyennes sur les flancs des
coteaux et que ceux que l’on remarque encore plus haut jusqu'au
faîte des plateaux tertiaires, étaient exactement identiques : «Ge
sont, — disait-il, — différents lambeaux d’une même nappe d’al-
(1) Imprimerie nationale, Paris ; 1848.
— 1925 —
luvion, occupant autrefois le niveau le plus élevé, mais abaissée
maintenant en divers points par les grands affaissements qui ont
produit les vallées et Les plaines basses » (p. 98). Pour cet ingénieur,
les alternances de dépôts et d’érosions ne répondaient pas à la
grandeur des phénomènes observés : l’affaissement du sol des
vallées donnait seul, — d’après lui, — « la solution la plus simple
et la plus naturelle.»
Plus loin (p. 99), recherchant l’origine et l’âge de la nappe
ailuvienne et de galets, — comme il l'appelle, — il dit que « cette
alluvion est contemporaine du grand mouvement qui a donné aux
Pyrénees leur relief caractéristique,» et 1l confond les dépôts ditu-
viens des plateaux avec les grès sablaux et les poudingues de
Puylaurens, c’est-à-dire avec le terrain éocène proprement dit, ce
qui le conduit à ajouter (p. 401) : « Qu'on doit admettre sans
aucun doute, que ces deux terrains ont été formés en quelque
sorte dans les mêmes eaux, à deux époques contigués. »
Plus loin encore, nous le voyons « disposé à joindre » au ter-
rain d’ailuvion, le conglomérat éocène de Tonnac et de Cordes
qui appartient en réalité, ainsi que je l'ai démontré, à l’éo-
cène (1).
Il parait surprenant, au premier abord, qu’un observateur
aussi distingué que de Boucheporn, soit arrivé à des conclu-
sions semblables ; mais n'oublions pas que cet ingénieur tenait
peu compte des fossiles; ainsi, il émettait l'opinion que le ter-
rain tertiaire du bassin sous-pyrénéen devait être rangé dans
l’étage inférieur et non dans le moyen, comme le voulaient d'une
manière beaucoup trop exclusive, il faut le dire, MM. Dufrénoy et
Elie de Beaumont. C'était simple, mais ce n’était pas exact. Notre
savant paléontologiste, M. le D: Noulet, l’a prouvé; 1l a fait
voir dans divers travaux importants (2) que les terrains d’eau
(1) H. Magnan, Etude des formations secondaires des bords S.-0. du plateau
central de la France entre les vallées de la Vère et du Lot. — Bulletin de la
Société d'Histoire naturelle de Toulouse, 1. IL, p. 17 ; 1869.
(2) J. B. Noulet, Mémoires sur les coquilles fossiles des terrains d’eau douce
du Sud-ouest de la France, Paris ; 1854. — Bulletin de la Société d'Histoire
naturelle de Toulouse, t. I, p. 108 ; 1867. — Fossiles de la molasse et du
calcaire d'eau douce (éocène sup.) de Briatexte (Tarn), Mémoires de l'Académie
des Sciences de Toulouse, 5e série, t. IV, p. 405 ; 1860, — Etude sur les fossiles
du terrain supérieur du bassin de PAgout (Tarn), Mémoires de l’Académie des
Sciences de Toulouse, 6e série, t. I, p. 181. n]
se A
douce du Sud-ouest de la France étaient constitués par des couches
renfermant les unes, des fossiles de l’époque miocène, Îles autres
des corps organisés de l'éocène, puis que les dépôts quaternaires ou
pleistocènes, — comme il les désigne, —- contenaient dans le bas-
sin du Tarn de nombreux débris d'Elephas (machelière, fémur,
défense) , une molaire de Rhinoceros à narines eloisonnées,
ele. (1).
Ce qui se comprend moins facilement, c’est que de Boucheporn,
pour expliquer la formation des vallées et des terrasses, ait invo-
qué des affaissements et des brisures qui n'existent pas, affaisse-
ments et brisures purement imaginaires, que l’on ne voit d’ailleurs
pas indiqués sur les cinq'grandes coupes qui accompagnent sa
Carte géologique du département du Tarn. Quoi qu’il en soit, la
science doit à ce géologue, d’avoir observé, en divers points de
ce département, de vastes dépôts diluviens à diverses hauteurs,
observations qui, ajoutées à celles que j'ai faites, nous serviront
à faire quelques remarques sur la manière dont se sont formés
ces dépôts et sur le rôle considérabie qu'ont joué les agents d’éro-
sion pendant la période quaternaire.
Il
Je vais maintenant décrire, d’une manière aussi concise que
possible, trois coupes que j'ai prises dans la région comprise entre
Castres et Castelnaudary, et qui sont figurécs dans la pl. 1}, qui
accompagne ce travail.
La première a été relevée dans le bassin Océanien, entre Enge-
lis, près de Mazamet, le Mont de Saïx, sud de Castres, et les
Ormeaux, près d'Entounty (Tarn).
La seconde, sur la ligne de faîte des bassins Océanien et Médi-
terranéen, entre le massif au sud de Vaudreuille, Armengaud
(Tarn) et Saint-Félix de Caraman (Haute-Garonne).
La troisième, dans le bassin Méditerranéen, entre le Mouhn-
d'Escande, près de Labécède, Castelnaudary et le massif de Ville-
neuve-la-Comptal (Aude). |
(4) J. B. Noulet, Note sur les dépôts pleistocènes des vallées sous-pyrénéennes
et sur les fossiles qui en ont été retirés, Mémoires de l'Académie des Sciences \
de Toulouse, 4e série, 1. IV, p. 125; 1854.
— 197 —
Ces trois coupes sont toutes plus ou moins perpendieulaires au
large sillon dont j'ai parlé. En d’autres termes, elles sont trans-
versales par rapport à l’ancien Hit de l’Agout ; ns ont élé Cons-
truitesavec le plus grand soin, à l'échelle de 5-55 - Eu égard à la
faiblesse des altitudes, j'ai cru devoir doubler les béttEEs! ce qui
n’empêche pas ces coupes de rendre aussi bien compte qu’il est
possible de le faire, à une aussi petite échelle, de l’orographie de
la région qu’elles sont destinées à représenter.
Coupe d'Engelis au Mont de Saix et aux Ormeaux, prés
d’'Entounty, pl. I, fig. 1
Cette coupe est dirigée S.E.-N.0, entre Engelis et le Mont-
de-Saïx, et E.O., entre ce mont ét les Ormeaux. Sa longueur est
de 20 kilomètres. La partie orientale, à partir du Mont-de Saix, «a
été en partie construite sur l’ancien lit du Thoré, rivière qui se
jette dans l'Agout, non loin de Saix. C’est ce qui explique pourquoi
Jleterrain duvien se développe beaucoup plus en surface ici qu’ail-
leurs. Un coup-d’œil jeté sur la carte (pl. If, fig. #) fera comprendre
ce que je viens de dire. |
À Engelis (ouest de Mazamet), sur les gneiss à mica noir, du
terrain primordial, qui constitue les premières croupes de la
Montagne-Noire (y de la coupe) et sur les calcaires à Planorbis
castrensis, Nouletet pseudammonius,Voliz, de l’éocène d’eau douce
(el) qui forment le substralum entre La Cartayrié, Prades et la Borie-
Basse (carte du dépôt de la guerre), on voit reposer une singulière
formation : c’est un dépôt (d. g.) formé de roches généralement
granitiques et gneissiques, quelquefois calcaires, — d’un volume
variant entre un petit caillou et une tête de bœuf, et plus encore, --
qu'emballent des argiles grumelées, jaunâtres. Ces roches sont
presque toujours décomposées ou aréneuses ; elles paraissent plus
ou moins roulées ; quelques-unes cependant sont à arêtes vives et
entourées d'argile sableuse et de terres ayant l’apparence de boues
glaciaires (1). Ce terrain de transport me rappelle de tous points
celui que j'ai observé entre Lannemezan et Labarthe-de-Neste, au
-(t) Je n'ai pu y rencontrer les cailloux striés caractéristiques ; mais il con-
vient d'ajouter que les roches tendres qui reçoivent d'ordinaire l'empreinte des
rayures ou des stries ne s’y montrent guère.
— 128 —
pied des Pyrénées, et que l’on croit généralement appartenir à
une ancienne moraine. Je puis dire, en outre, qu'il est entiére-
ment différent des terrains diluviens proprement dits.
Si cette manière de voir se confirmait, nous aurions ici des
traces d’une ancienne moraine profonde ou peut-être frontale,
qui aurait été ultérieurement démantelée par les phénomènes
d’érosion de l’époque diluvienne, ce qui expliquerait pourquoi
elle est restée iusqu'iei cachée aux yeux des géologues.
Quoi qu'il en soit, et en continuant à marcher vers le N.O.,
nous remarquerons entre la Borie-Basse, Labruguière et Salle-
picussou, un dépôt franchement diluvien (d*) — principalement
formé de petits cailloux, de quartz blanchâtres, laiteux, vitreux, à
éclat gras, perdus au milieu de limons noirâtres, — dont l'altitude
(190 mètres) est à environ 20 mètres au-dessus du lit actuel du
Thoré. Ce dépôt représente un lit relativement récent de cette
rivière, à l’époque où celle-ci se jetait dans l’Agout, par Saint-
Affrique et Viviers-lès-Montagnes.
Plus loin, de Sallepieussou à Gaches, apparaît le terrain éocène
supérieur (e?), qui est formé de grès et d’argiles plus ou woins
colorées, jJaunâtres, rougeâtres ou orangées, en couches presque
horizontales et qui constitue des mamelons plus ou moins arrondis,
dont l'altitude ne dépasse pas 224 mètres, lesquels sont dominés
par une terrasse élevée, sorte de plateau, dont la hauteur atteint
près des Aguls 254 mètres. Cette terrasse, qui s'étend sur 4 kilo-
mètres de longueur, entre Gaches et les Gayrauds, et sur laquelle
les métairies des Aguls, de Lacalm, du Pioch, etc., se trouvent.
assises, est formée de cailloux pugilaires et céphalaires empruntés
aux roches primordiales et de transition de la Montagne-Noire,
surtout aux filons de quartz (quartz blanchâtre, vitreux, laiteux, à
éclat gras), qui lardent ces terrains. Il y a aussi, mais ils ne
jouent qu’un rôle accessoire, des cailloux de gneiss, des schistes
micaicés durs, des sortes de quartzites, des schistes amphiboliques.
Ces cailloux, dont la forme est souvent assez irrégulièrement
arrondie, sont plus gros que ceux que nous avons observés près de
Labruguière. La terre qui les entoure est jaunâtre. Il devient donc
impossible, en laissant même de côté la différence d'altitude, de
confondre les deux dépôts. C’est sur le terrain de transport de la
terrasse des Aguls (d?) que croissent, grâce à la perméabilité du
sol, de nombreuses vignes. Cette terrasse, nettement indiquée sur
__ 199 —
ma coupe, est dominée à son tour, au nord-est, par des hauteurs
bien connues des habitants de la région de Castres, par le Mont de
Saix que j'ai esquissé à l'arrière-plan, petite montagne remar-
quable, en ce sens, que sur les grès et argiles de l'éocène supérieur
qui la constituent, reposent à 292 mêétresd’altitude ou à 140 mètres
environ au-dessus de l’Agout, d'anciens témoins de la période
diluvienne (1). Ces témoins consistent en quelques cailloux géné-
ralement quartzeux, — ressemblant à ceux de la terrasse des
Aguls,— qui indiquent ici l’existence d'une ancienne terrasse, la
plus élevée de la coupe (d‘), qui a été en majeure partie érodée,
et qui correspond à celle que je signalerai hientôt aux Ormeaux.
En descendant des Aguls et du Pioch, vers Cambounet, dans la :
vallée du Sor, on trouvera, un peu en contre-bas, deux autres
terrasses inférieures : l’une d’elles,' qui fait suite et qui se lie
insensiblement à celle du Pioch et des Aguls, porte sur ma coupe
la lettre d° ; elle est composée de cailloux roulés ressemblant à
ceux que je viens de décrire; l’autre, celle indiquée par la lettre
d*, et sur laquelle les hameaux de Longuegineste et d’En-Bouisse
sont situés, a des cailloux plus petits. Plus bas enfin, dans la vallée
proprement dite, où se trouve établi le chemin de fer de Castres à
Castelnaudary, on observe des dépôts diluviens (d5) composés
aussi de cailloux de petite dimension (2).
Des rives du Sor aux Ormeaux, nous passerons en revue les
divers horizons diluviens déjà indiqués (voir la coupe). Cambou-
net nous laissera voir, grâce aux affouillements de Ja rivière, les
couches horizontales ou très peu inclinées de l’éocène supérieur (e?),
formé de grès sableux et d’argiles peu colorées. Le village est assis
sur le terrain diluvien (d*). La montée, vers le château de la
Serre nous permettra de reconnaitre : des dépôts caillouteux à une
(41 De-cette petite montagne on jouit d’un très-beau coup-d’œil sur le bassin
de Castres, et sur les régions du Sidobre et de la Montagne-Noire, On voit
auss' et surtout se dessiner nettement la vaste dépression qui longe cette der-
nière montagne dans la direction de Revel, ct qui représente, — ai-je dit, —
l’ancien lit de PAgout. Cette dépression, due aux érosions de la période qua-
ternaire, permet de voir, de loin, quand le temps est favorable, quelques-uns
des sommets des Pyrénées. Je ne saurais assez recommander l’ascension du
Mont de Saïx, par le plateau des Aguls, à ceux qui voudront avoir une idée de
la grandeur des phénomènes diluviens au début de la période quaternaire,
(2) Quelques ossements fossiles encore indéterminés ont été trouvés à ce
niveau près de Castres.
9
— 130 —
altitude d'environ 200 à 210 mètres, qui correspondent à ceux de
la terrasse marquée d; plus haut, à l’ouest de la Métairie-Haute,
à 255 mètres de hauteur, des cailloux rouiés qui forment une
sorte de plaine élevée, — l'équivalent de celle du Pioch et des .
Aguls (4), — cailloux qui ressemblent de tous points à ceux que
j'ai signalés à cette altitude; enfin, plus haut.encore, à la métairie
des Ormeaux et à 500 mètres au-dessus du niveau de la mer, des
dépôts diluviens qui constituent la terrasse la plus élevée de toutes,
dépôts correspondant à ceux du sommet du Mont de Saïx, que
j'ai désignés par la lettre dt et qui sont formés, iei comme là,
par des cailloux ordinairement quartzeux.
Je ferai remarquer que le terrain tertiaire — éocène supérieur —
alfleure en divers points sous les dénôts quaternaires, notamment
près de Maraval, où les grès de l’éocène passent à un poudingue
formé de cailloux ordinairement calcaires, de petite dimension,
toujours impressionnés, c’est-à-dire montrantdes parties convexes
s'emboitant dans des parties en creux ou concaves. C’est ce pou-
dingue que de Boucheporn a confondu en divers lieux, surtout à
Puylaurens (anté p. 195), avec le terrain diluvien. Nous le retrou-
vons à l’ouest des Ormeaux et à un niveau plus élevé que la ter-
rassse la plus baute, c’est.à-dire à 550 mètres d'altitude. Il constitue
là une petite région plane, couverte de petits cailloux calcaires,
qui pourraient facilement en imposer à un observateur qui ne
serait pas familiarisé avec la lithologie du terrain tertiaire.
Pour résumer la coupe que nous venons de passer en revue,
je dirai qu’on trouve, entre Engelis et les Ormeaux, des dépôts
diluviens à cinq niveaux différents :
Ceux de la terrasse la plus élevée, du Mont de Saïx et des
Ormeaux (d1), à 292 et 500 mètres d’alutude;
Ceux de la terrasse des Aguls et de la Métairie-Haute (d?), à 254
et 255 mètres ;
Ceux de la terrasse, au bas de celle des Aguls et du château de
la Serre (d%), à 220 et 230 mètres ;
Ceux des environs de Labruguière, de Longuegineste et de
Cambounet (d‘\, à 180 et 490 mètres ;
Ceux de la vallée du Sor, proprement dite (d5), à 160 mètres.
J’ajouterai : que les dépôts des terrasses les plus élevées sont.
constitués par des cailloux roulés d’un volume plus considérable que
ceux des basses vallées, les uns, d’ailleurs, sont entourés de terres
— AS1 —
argileuses jaunâtres, les autres de limons noirâtres ; qu'indépen-
damment de ces dépôts, il en existe un autre qui pourrait peut-
être appartenir à l’époque glaciaire (d. g.) ; et qu’en dehorsde mes
coupes, il existe aussi des terrains caillouteux — indiqûés depuis
longtemps sur la Carte géologique de la France, par MM. Dufrénoy
et Elie de Beaumont, — qui apparaissent notamment sur les hau-
teurs, entre Puylaurens et Toulouse.
Je crois devoir dire, d'ores et déjà, que les terrasses supérieures,
d'et d?, que nous venons d'étudier, représentent l’ancien ft de
l’Agout, à l’époque où cette rivière se déversait dans la Méditer-
ranée. Nous retrouverons, en effet, ces terrasses dans la coupe
suivaute, sur la ligne de faite des bassins Océanien et Méditerra-
néen, et à un niveau un peu inférieur à celui que nous avons
observé ici, par suite de la pente de l’ancien lit.
D'un autre côté, je ferai remarquer que le terrain constitutif du
pays Castrais, l’éocène supérieur, n'est pas faillé et que ses couches
sont lésèrement inclinées, vues en grand, vers l’ouest. Getieabsence
de brisures nous conduit à admettre que les vallées se sont formées
par voie d’érosion et d'affouillement successifs : les terrasses les
plus élevées étant les plus anciennes : mais Je reviendrai plus loin
sur cette question, dès que J'aurai terminé la description des
coupes qui accompagnent cette notice.
Coupe entre le massif de Vaudreuille, Armengaud, l’Enmaurel
et Saint-Félix de Caraman, pl. H, fig. 2.
La direction de cette coupe est E.S.E. à O.N.0. ; sa longueur
ne dépasse pas 10 kilomètres.
Des hauteurs situées à 2 kilomètres au sud de Vaudreuille —
et indiquées sur la carte du dépôt de la guerre (feuille de Castres)
par la cote 436, — à Armengaud, on remarque des granites-gneiss,
avec filons de quartz, vitreux, blanchâtre (y). Ces roches primor-
diales, qui constituent les premiers ressauts de la Montagne-Noire,
sont, ainsi que l’indique la coupe de la pl. Il, fig. 2, en bancs
très-relevés. Sur elles reposent, près d’Armengaud, des sables et
des argiles, en couches presque horizontales, qui appartiennent à .
l'éocène supérieur (e?). A leur tour, ces couches tertiaires sont
recouvertes, entte Armengaud, Perairol et l’Enmaurel, par un
terrain de transport de l’époque diluvienne (dt), qui rappelle celui
— 132 —
que nous avons reconnu dans la coupe précedente, aux Ormeaux
et au Mont de Saix ; il est formé de cailloux roulés, ordinairement
céphalaires, généralement quartzeux, avec terres jaunâtres. Ce
terrain constitue un plateau — en certains points raviné laissant
par suite affleurer, çà et là, les marnes de l’éocène, —dont la hau-
teur au-dessus du niveau de la mer varie entre 239 et 248 mè-
tres et dont la largeur peut être évaluée en moyenne à 3 kilo-
mètres. |
Si les érosions de la période quaternaire n'avaient pas façonné
le sol postérieurement au dépôl du terrain que nous venons de
reconnaître à Perairol et à l’Enmaurel, nous aurions pu suivre ce
terrain, sans solution de continuité, depuis là jusqu’au plateau des
Ormeaux ou jusqu'au Mont de Saïx, où nous l'avons signalé;
mais des ruisseaux le Laudot, le Sor et beaucoup d’autres qui
naissent dans le massif ancien u’Arfons, l’ont découpé de mille
manières, l’ont enlevé en certains lieux. Il en reste, néanmoins, de
nombreux témoins, notamment entre Cahuzac, Lagardiolle et
Saint-Affrique. Du côté opposé, en descendant le Fresquel, qui se
jette dans la Méditerranée, ce même dépôt se reconnaît dans le
plateau sur lequel se trouve assis le château de Castelet et sur les
bords du massif ancien, dans les environs de Peyrens et de Labé-
cède ; mais ici, il a été encore plus érodé que partout ailleurs, et
il devient souvent difficile d’en suivre les traces.
Revenons à notre coupe, et nous verrons que non loin de l'En-
maurel, Le plateau en question est interrompu. Un ressaut de 20 à
25 mètres existe, et une terrasse diluvienne rudimentaire id?)
beaucoup mieux développée au sud, se montre en contre-bas.
C’est sur cette sorte de terrasse, ou plutôt de méplat diluvien, que
coule la rigole qui alimente le canal du Midi, et qu'est assise la
métairie d'Enraban. Un peu plus bas, et sur des alluvions de cou-
leur noirâtre, qui s'étendent sur un kilomètre et demi de largeur,
et auxquelles sont mélangés des cailloux quartzeux de petite
dimension, le chemin de fer de Castelnaudary à Castres se trouve
établi,
En continuant cette coupe vers Saint-Félix de Caraman, on
trouvera, avant de gravir les hauteurs sur lesquelles ce village
s'étend, un dépôt de Iehm jaunâtre avec concrétions calcaires,
dépôt que nous reconnaîtrons aussi à un niveau un peu plus bas,
à Sainte-Catherine, près de Castelnaudary. lei ce lehm se trouve
— 133 —
à 220 mètres d'altitude; il doit recouvrir le terrain caillouteux
proprement dit (d”). La montée de Saint-Félix de Caraman, nous
permettra d'observer le terrain tertiaire en couches presque hori-
zontales non faillées. Ce sont des argilss colorées, des poudingues
à cailloux de petite dimension, ordinairement calcaires et 4mpres-
sionnés, et de petites couches de calcaire argileux et noduleux qui
entrent dans la composition de l’éocène supérieur (22). — Les éro-
sions ont façonné ces couches d’une manière toute particulière, et
la présence de l’assise calcaréo-argileuse s'affirme de loin par une
sorte de plateau, qui est dù à la résistance relative de cette roche.
C’est la surface plane que l’on voit sur ma coupe entre le Crucifix
et Saint-Félix de Caraman, et qui porte la cote 286.
La coupe d’Armengaud à Saint-Félix de Caraman nous permet
de dire que l’Agout, au commencement de l’époque quaternaire,
avait au moins une largeur de 6 à 7 kilomètres. Cette largeur
paraît, au premier abord, beaucoup moindre que celle que nous
avons reconnue à ce cours d’eau, sous le parallèle du plateau des
Aouls (pl. IE, fig. 4); mais n'oublions pas ce fait important,
c’est que la coupe fig. À, a été relevée presque dans l’axe de
l’affluent principal de cette rivière, c’est-à-dire dans l’axe du
Thoré.
Je crois devoir faire remarquer de nouveau, que la coupe fig. 2,
que nous venons rapidement de décrire, a été construite sur la
ligne de faite, ou en d’autres termes, sur la ligne de partage des
eaux de l'Océan et de la Méditerranée, c’est-à-dire loin de tout
cours d’eau actuel important.
Coupe entre Labécède, Castelnaudary (Sainte-Catherine) et
Villeneuve-la-Compial, pl. IL, fig. 8.
La coupe dont il s’agit a 45 kilomètres de longueur ; sa direction
est N. 10° E. à S. 10° 0. Transversale aux vallées actuelles du
Fresquel et du Tréboul, — ruisseaux qui ont creusé leur lit
depuis que l’Agout ne coule plus sur le versant méridional de la
Montagne-Noire, — cette coupe est très-intéressante, en ce sens
qu’elle montre, sur le versant Méditerranéen, le large sillon qui
a été creusé par les affouillements de l’Agout, sillon de 10 à 42
kilomètres de largeur, qui ne s’expliquerait pas si on invoquait
seulement l’action érosive produite par les ruisseaux — le Fres-
134 —
quel et le Tréboul — dont je viens de parler, lesquels prennent
naissance à quelques kilomètres de distance, près de Saint-Félix
de Caraman et de Naurouse. J’ajouterai que ce sillon se poursuit
jusqu’à Carcassonne et au-delà, c’est-à-dire jusqu’à la Méditer-
ranée; la carte du dépôt de la guerre le dessine, du reste,
assez bien. |
Je dois dire, une fois de plus, que les érosions qui se sont pro-
duites pendant la période quaternaire, ont joué ici un rôle con-
sidérable. Le plus ancien lit de l’Agout a été, sinon totalement,
du moins en majeure partie, enlevé à la suite d’affouillements
successifs ; 11 n’en reste que quelques traces -— quelquefois même
discutables, — du côté de la Montagne-Noire; mais le second lit
de cette rivière, celui que nous avons observé à 254 et à 255
mètres d'altitude aux Aguls et à la Métairie-Haute et signalé au sud
d'Enraban et près de Saint-Félix, à 220 mètres environ, se voit
très-bien à Sainte-Catherine, près de Castelnaudary, où 1l constitue
un plateau élevé de 60 mètres au-dessus du niveau des petites
vallées actuelles du Treboul et du Fresquel, plateau qui s'étend
jusques auprès de Naurouse (1) et qui supporte les villages de
Souilhanel, de Ricaud, d’Airous, de Labastide-d’'Anjou. C'est sur
lui que la grande route de Toulouse à Narbonne se trouve
assise.
Si maintenant nous étudions la coupe pl. If, fig. 3, nous ver-
rons que sur les roches calcareuses et amphiboliques, que sur les
schistes micacés, xyloïdes, que sur les pegmatites et les gneiss for-
tement relevés, du terrain primordial, qui se montrent dans les
environs du Moulin d’Escande cet de Labécède, reposent des
roches de détritus, des cailloux roulés quartzeux, qui sans doute
appartiennent à la période diluvienne (dt); je dis sans doute,
parce que le terrain éocène {et) formé à la base d’argiles rouseâtres,
vineuses, jaune-orangées, quelquefois blanchâtres, paraît aussi
contenir des cailloux roulés et des sables jaunâtres. À ces argiles
diversement colorées, succèdent des sables, des grès friables, légè -
(1) Des témoins à invoquer, pour prouver la réalité des érosions, sont les
bancs de poudingue sur lesquels on a établi l’obélisque de Naurouse, au point
de partage des eaux du canal du Midi. Ce petit affleurement pierreux devait
former autrefois une île ou une presqu'île au milieu de l’ancien lit de
VAgout. .
— 135 —
rement, inclinés au sud, qui renferment à Issel de nombreux
fossiles de l’éocène (Lophiodon, Tortues, etc.) et qui sont suivis
jusqu’au Fresquel, par des marnes avec bancs sableux et poches
sableuses. Ces roches étaient autrefois recouvertes par le terrain
diluvien. C’est donc à la suite d’érosions qu’elles apparais-
sent là.
Sur les bords du ruisseau du Fresquel, — ainsi que l'indique
la coupe fig. 3, — on peut reconnaître des alluvions récentes
(d #v4 5) noirâtres, avec cailloux roulés, généralement quartzeux,
de très petite dimension.
La montée vers Sainte-Gatherine ou vers Castelnaudary, laissera
voir de nouveau les roches de l’éucène supérieur, — marnes,
argiles, sables et grès peu résistants, — qui sont surmontées par
un dépôt diluvien qui les cachait autrefois (d*). Ce dépôt qui a,
en cerlains endroits, six mètres d'épaisseur, forme lassiette du
plateau dont j'ai déjà parlé dans la page précédente, lequel, nous
avons vu, s'étend jusque vers Naurouse. On y remarque des
cailloux roulés, ordinairement quartzeux, vitreux, laiteux, jaunâ-
tres, à éclat gras, ressemblant à ceux que nous avons étudiés et
désignés dans les coupes précédentes sous la lettre d?; mais ici
les cailloux sont plus petits, ce qui est dû sans doute à l’éloigne-
ment des montagnes d’où ils proviennent. Les limons qui les
entourent paraissent noirâtres et sont recouverts en quelques
points par un terrain de lebm jaunâtre, qui a les caractères
de celui précédemment reconnu au-dessous de Saint-Félix de
Caraman.
‘La descente vers le ruisseau du Treboul, ou si l’on veut, dans la
vallée du canal, nous permettra d'étudier de nouveau les couches
de l’éocène supérieur (e?), toujours un pen inclinées au sud et
qui apparaissent Ici, comme près du Fresquel, à la suite d’éro-
sions relativement trés-récentes. Plus à l’ouest, à partir du canal
du Midi et jusqu’à Villeneuve-la-Comptal, nous pourrons observer
leterrain diluvien de la vallée actuelle (d* * 5). Ce terrain
qui recouvre les couches gypseuses du Mas-Saintes-Puelles, un
peu au nord de ma coupe, est formé de très-petits cailloux roulés,
quartzeux, et de limons noirâtres.
Dans lés coteaux auprès de Villeneuve-la-Comptal, se dévelop-
pent des couches calcaires et argileuses, de couleur généralement
blanchâtre ou jaunâtre, ça et là rosâtres et verdâtres, exploitées
— 136 —
pour alimenter des fours à chaux (1). Ces couches sont recouver.
tes par des poudingues à cailloux (le petit volume, ordinairement
calcaires s'impressionnés, que j'ai signalés (anté p. 439 et 433) dans
le terrain éocène supérieur, notamment à Saint-Félix de Caraman
et à l’ouest des Ormeaux.
J'insisterai, en terminant la description de cette coupe, sur le
fait stratigraphique suivant : C’est que les bancs du terrain ter-
tiaire des environs d’Issel, de Castelnaudary et de Villeneuve-la-
Comptal sont légèrement inclinés au sud, mais nullement faillés,
nouvelle preuve de la formation des vallées actuelles par voie
d’érosion.
Je crois devoir dire que j'ai observé les phénomènes diluviens
sur le pourtour de la Montagne-Noire, en des points nombreux,
assez éloignés de ceux que j'ai décrits. Mais, pour ne pas m’expo-
ser à des redites continuelles, j'ai du choisir quelques exemples,
c’est-à-dire les coupes que nous venons de passer en revue. J’ajou-
terai que, partout, les faits principaux que J'ai indiqués se retrou-
vent : ainsi, au nord et à l’ouest de Castres, tous les mamelons
tertiaires sont recouverts de témoins diluviens ; il en est de
même, en bien d’autres lieux, notamment entre Castelnaudary et
Carcassonne.
IV
Les travaux de nos devanciers nous amènent tout d’abord à
reconnaitre qu'il existe à un niveau élevé au-dessus des vallées,
des témoins d’une action diluvienne générale ; — ces témoins,
MM. Dufrénoy et Elie de Beaumont les ont signalés depuis longtemps
sur les hauteurs entre Puylaurens et Toulouse, et de Boucheporn
en a figuré quelques-uns sur ses coupes d'ensemble dans le Tarn ; —
puis, que des terrasses diluviennes à divers niveaux, c’est-à-dire
(1) Ce sont dans ces calcaires, supérieurs aux sables et aux grès d’Issel à
Lophiodon, que l’on trouve de nombreux Palæolheriums (P. magnum, medium
et minus de Cuvier); le Chœropotamus parisiensis, Cuv.; le Dichobune
leporinum, id. : le Plerodon, dasyuroïdes, de Blainville ; etc., associés à des
coquilles fossiles terrestres et d’eau douce d’une conservation parfaite, coquilles
qu'ont fait connaître Boubée, Marcel de Serres et M. le Dr Noulet.
— 137 —
des nappes en retrait, les unes par rapport aux autres, s’observent
le long des cours d’eaux.
D'un autre côté, les coupes qui accompagnent ce travail, nous
oùt montré : que l’âge de ces terrasses peut être, jusqu’à un certain
point, reconnu de diverses manières, par leur altitude, par le
volume des cailloux, par la couleur des limons ou des terres plus
ou moins sableuses ou argileuses qui les emballent; que les ter-
rains constitutifs du sous-sol, c’est-à-dire les formations infra-dilu-
viennes n’ont pas été faillées, ainsi que le supposait de Bouche-
porn, et que par suite, les vallées et les terrasses ne sont pas dues,
comme le pensait ce savant, à des affaissements et à des brisures,
mais bien à des érosions ou à des affouillements successifs suivis
de dépôts caillouteux.
Enfin, ces mêmes coupes et la carte de la pl. IL, nous ont aussi
fait voir, grâce aux cotes de hauteur, que certaines terrasses les
plus élevées, — celles qui sont marquées d'! et d?, — ont dû se
former alors que l’Agout se déversait dans la Méditerranée.
De ces faits qui se rapportent d’ailleurs, pour certains d’entre eux,
à ceux qui ont été étudiés dans les bassins de la Seine, du Rhin,
du Rhône et de la Garonne, il ressort des considérations générales
et des remarques que je vais indiquer. |
Je dirai en commençant, et quoique ceci ait l’air de sortir-un
peu de mon cadre, que des glaciers immenses, dont ceux des Alpes
ne nous donnent qu’une faible idée, s’étendaient autrefois sur
toutes nos montagnes du Midi. Ainsi, les Pyrénées avaient des
glaciers qui recouvraient, on peut le dire, toute cette chaîne (1).
Sur le plateau central de la France, les anciens glaciers devaient
(1) Depuis M. Fargeaud, qui paraît être le premier qui ait signalé, en 1839,
des phénomènes de l’époque glaciaire dans les Pyrénées, divers savants, —
MM. Angelot, de Charpentier, Boubée, Durocher, de Boucheporn, Max Braun,
Garrigou, — ont fait connaître, en divers points, des roches polies, striées,
moutonnées et des moraines ; mais on doit surtout à MM. Ch. Martins et Ed.
Collomb des travaux importants sur le sujet. (Bulletin de la Société géologique
de France, 2 série, t. XI, p. 442 ; 1854. — Idem, t. XXV, p. 141 ; 1867.)
À mon tour j'ai remarqué dans les Pyrénées et à leur base, de nombreux
témoins de la période glaciaire : le long des vallées et sur le flanc des mon-
tagnes, des restes de moraines latérales et profondes ; dans la plaine ou presque
dans la plaine, des traces de moraines frontales ; partout des roches polies,
striées et surtout moutonnées. (Voir à ce propos certaines observations relatées
dans le Bull, de la Société d'Histoire naturelle de Toulouse, t. IV, p. 33 et 114).
Es RE 7, 7
LS
jouer un rôle tout aussi considérable, à en juger par certains tra
vaux récemment publiés (4).
Les moraines des glaciers les plus anciens furent remaniées ct
érodées vers la fin de la période pliocène, je le crois du moins.
C'est ce qui expliquerait, peut-être, la formation singulière que lou
remarque à la base des Pyrénées, surtout dans le plateau de Lan-
nemezan et dans certaines parties des Petites-Pyrénées de l’Ariége
et de la Haute-Garonne, au contact de la plaine, et que j'ai cru
retrouver entre Engelis, La Cartayrié et la Borie-Basse, au pied de
la Montagne-Noire (antè p. 127), et c’est ce qui expliquerait en
même temps, pourquoi on ne rencontre pas, à la base de nos
grandes montagnes pyrénéennes, les immenses moraines frontales
que l’on devrait y trouver, si l’on considère l'altitude considérable
qu ‘atteignent au-dessus des vallées, près de la plaine, certaines
moraines latérales et certaines roches moutonnées.
À ces glaciers, on peut dire presque pliocènes, succédèrent des
glaciers de la période quaternaire, proprement dite, mais ceux-e1
furent beaucoup moins étendus que les précédents. Leurs moraines,
plus ou moins entamées par des érosions postérieures et que l’on
commence à étudier dans les vallées des Pyrénées (2), seront uu
jour, je n’en doute qas, signalées sur bien des points du plateau
central de la France.
Quoi qu’il en soit, et pour en revenir au sujet qui m'occupe
plus spécialement, il n’en est pas moins certain qu’au commence -
(1) Voyez : Ch. Martins, Sur Pancienne existence, durant la période qua-
ternaire, d’un glacier de second ordre occupant le cirque du haut de la vallée
de Palhères dans la partie orientale du massif granitique de la Lozère,
Comptes rendus de l’Institut, t. LXVIT, p. 933 ; 1868.— À. Julien, Phénomènes
glaciaires dans le plateau central de la France et en particulier dans le Puy-
de-Dôme et le Cantal, Paris; 1869. — J. Martin, Les glaciers du Morvan,
Bulletin de la Société géologique de France, 2 série, t. XXVII, p. 225 ; 1869.
— J. Marcou, Notes pour servir à l’histoire des anciens glaciers de l’Auvergne,
Bulletin de la Société géologique de Fraace, 2e série, t. XXVIT, p. 361 ; 1870.— à
Tardy, Note sur les glaciers du Velay, Bulletin de la Société géologique de
France, 2e série, t. XXVI, p. 1178 ; 1869. — Sur les traces d'anciens glaciers
dans la vallée de la Cèxe, idem 1. XXVIE, p. 488 ; 1870.
(2) Notre confrère le Dr Jeanbernat vient d'appeler l'attention sur de nom-
breuses moraines qu'il a observées dans les vallées de la Garonne et de la
Pique, (Bulletin de la Société d'Histoire naturelle de Toulouse, 4. IV, p. 112).
L ADD —
ment de la période quaternaire, de puissantes eaux, qui provenaient,
sans aucun doute, de la fonte des neiges et des glaces accumulées
sur nos montagnes, déposèrent à leur pied, un manteau diluvien
composé de cailloux roulés et d'argile jaunâtre ou rougeàtre. Les
rivières de nos plaines n'étaient pas encore ébauchées; aussi ce
dépôt se répandit-il en nappe presque horizontale sur les couches
tertiaires ou d'âge différent, et, fait très-mportant, sur les moraines
des glaciers anciens où de la fin de la période pliocène (1). C’est là
la premiére phase, la grande phase, on peut dire, de l’action dilu-
vienne proprement dite. Ce sont ces premiers dépôts quaternaires
qui constituent ce que plusieurs géologues désignent sous le nom de
diluvium des plateaux ou de pléistocène ancien. On les trouve dans
nos régions, au pied des Pyrénées comme autour du plateau cen-
tral, à une altitude généralement élevée, constituant des parties
planes, à environ 100 ou 209 mètres au-dessus des vallées
actuelles (2). MM. Dufrénoy et Elie de Beaumont les ont rangés
dans le midi de la France dans le terrain pliocène, ce qui n’est
pas admissible, puisque les couches réellement pliocènes de l'Aude
et des Pyrénées-Orientales, qui se lient intimement avec les mar-
nes du miocène à Ostrea crassissima ont été relevées-et disloquées
comme celles-e1, tandis que les dépôts diluviens des plateaux dans :
les mêmes régions, — dépôts synchroniques de ceux du bassin
sous-pyrénéeu, — sont demeurés horizontaux.
Plus tard le volume des eaux descendu des montagnes diminue ;
— la cause doit en être sans doute attribuée à une moins grande
abondance des neiges et des glaces ; — les rivières commencèrent
à se former et affouillèrent les premiers dépôts diluviens, c’est-à-
dire le diluvium des plateaux. Ce fut là la deuxième phase du
phénomène qui nous occupe, et sur les parties creusées ou affouil-
l‘es se déposérent, à plusieurs reprises, des cailloux roulés et des
argiles. C’est alors que l’Agout suivait les bords du plateau central
et de la Montagne-Noire pour se jeter dans la Méditerranée, par
(4) J'ai remarqué, notamment, ce fait dans les petites montagnes connues des
géologues sous le nom de petites Pyrénées de la Haute-Garonne et de l’Ariége.
(2) Je dois dire que les dépôts diluviens des plateaux, d’origine pyrénéenne,
se lient à ceux du plateau central de la France, non loin d’une ligne qui pas-
serait par Toulouse et la vallée de lAriége jusqu’à Saverdun, Au-delà, cette
limite n’est encore qu’ébauchée.
MAO
Saix, Revel, Soupex, Castelnaudary, Alzonne et Carcassonne, et
c'est alors aussi que se formèrent ces terrasses élevées (d! et d? de
mes coupes) des Ormeaux, du Mont de Saïx, des Aguls, de la
Métairie-Haute (pl. Il, fig. 4), d'Enmaurel et d’Enraban (pl. Il,
fig. 2), de Labécède et de Sainte-Catherine (pl. IE, fig. 3) que nous
avons observées.
Après un temps plus ou moins long. le volume des eaux dimi-
nua encore, sans doute d’une manière brusque, et à leur tour
les dépôts dt et d?, dont nous venons de parler, furent érodés,
affouillés. En certains autres points, le diluvium des plateaux le
fut aussi. Cette période correspond à la troisième phase diluvienne.
Certaines rivières modifiérent leur cours ou le changèrent même
complètement. Ge fut à cette époque que l’Agout, au lieu de longer la
Montagne-Noire, suivit la direction d’un de ses affluents principaux,
le Thoré, et qu’au lieu de courir $.8. O. marcha dans la direction
E. O. pour se déverser dans le Tarn, à la Pointe-Saint-Sulpice, et
de là dans l'Océan. Ce fut immédiatement après que se formèrent
les terrasses que l’on trouve le long de la vallée actuelle de PAgout,
entre Vielmur et le confluent de cette rivière.
Plus tard, — et les effets intermittents que nous avons invoqués,
et dont la cause reste encore dans l’ombre, se continuant, — de
nouveaux affouillements eurent lieu, de nouvelles érosions se pro-
duisirent, de nouveaux dépôts caillouteux se formèrent et les val-
lées actuelles prirent leur dernière forme. Ceci représente la qua-
trième phase diluvienne. Dans les parties abandonnées par l’Agout
coulèrent des ruisseaux, le Sor, le Fresquel, etc., qui se conformé-
rent, on peut le dire, à la loi des grands cours d’eau et qui, eux
aussi, eurent leurs petites terrasses et leurs récents dépôts alluviens
(d3, d' et d° de mes coupes).
Ce qui surtout — au premier abord, — dans l'interprétation des
faits étonne et surprend l’observateur, ce sont les diverses érosions
qui se sont produites pendant l’époque quaternaire. Nous avons pu,
en effet, reconstituer les anciens plateaux diluviens, grâce à certains
témoins, et voir que des centaines de mètres de couches ont élé
enlevées. Mais qu'est-ce que cette ablation en présence de celle des
terrains de transition secondaires et tertiaires, dont l'imagination
demeure, on peut le dire, confondue? N’a-t-on pas prouvé que des
milliers de mètres de couches ont été érodés à diverses reprises. Re
se rappelle-t-on pas les coupes du Buet à Chamonix et du massif du
a à —
— 141 —
Mont-Blanc, par M. Favre (1); celles des Alpes du Dauphiné, par
M. Lory (2); celles de M. Ebray, à travers le Nivernais et le Mor-
van (3). N’ai-je pas indiqué l'énorme puissance des terrains détri
tiques des Pyrénées, provenant de l’ablation de formations entié-
res (k) ; ne se souvient-on pas que j'ai démontré que sur les bords
S. O. du plateau central de Ja France, divers élages Jurassiques,
triasiques et permiens, dont l'épaisseur peut être évaluée à 1630
mètres, ont été enlevés par dénudation (5); et mon ami, M. le
D: Bleicher, ne vient-il pas defaire voir que dans les Vosges et au
pied de ces montagnes des agents d’érosion avaient fait disparaître
plusieurs termes des séries de transition et secondaire (6).
Mais ces agents, qui: faconnent d’une manière si grandiose nos
montagnes, nos vallées et nos plaines, quels sont-ils ? Aux époques
| anciennes, l’eau, l’atmosphère et le temps, associés aux déplace-
| ments alternatifs de la mer, à la suite d’affaissements et de brisures
gigantesques de la croûte terrestre; aux époques relativement
récentes, l’eau et l’atmosphère seuls, mais aidés comme auparavant
par le temps avec lequel la nature ne compie pas ; Lyell et d’au-
tres géologues n’ont-ils pas calculé que les alluvions du delta du
Mississipi avaient mis plus de 100,000 ans à se former ! (a):
(1) Bulletin de la Société géologique de France, % série, t, V, p. 263 ; 1848.
Recherches géologiques dans les parties de la Savoie, du Piémont et de a Suisse
| voisines du mont Blanc, Paris; 1867.
on
(2) Description géologique du Dauphiné, p. 113, Paris ; 1860-64. — Bulletin
| de la Société géologique de France, % série, t. XX, P. 233, pl. IV ; 1863. —
| Idem, t. XXILL, p. 480, pl. X ; 1866.
(3) Bulletin de la Société géologique de France, 2e série, t. XVI, p. 46-47 ;
MI858. — Idem, 1. XIX, p. 38-43 ; 1861. — Idem, 1, XXL, p. 350 ; 1864.
(4) {Bulletin de la Société géologique de France, 2 série, 1, XXV, p.718 ; 1868.
(5) Bulletin de la Société d'Histoire naturelle de Toulouse, t, XIL, p.77 ; 1869,
(6) Essai de géologie comparée des Pyrénées, du Plateau central et des Vosges,
| p. 102, Colmar ; 1870.
(7) In d’Archiac, Géologie et Paléontologie, p. 745. Paris : 1866.
us ARR ue
Le Président donne lecture du Mémoire suivant que M. le
D' Joly à adressé de Saint-Germain-en-Laye.
Contributions pour servir à l'histoire naturelle des Ephémérines,
par M. le Dr Rue Jory.
INTRODUCTION.
M. le professeur Pictet, dans la remarquable Monographie des
Éphémérines qu'il a publiée à Genève en 1843-1845, admet
comme devant être distingués dans ce groupe de Névroptères les
sept genres suivants :
4° Ephemera (Liriné).
20 Palingenia (Burmeister).
30 Baëtis (Leach).
4° Potamanthus (Pictet).
5° Cloë (Burmeister).
69 Cœnis (Stephens).
0 Gligoneuria (Pictet).
Grâce aux travaux de Swammerdam, de Ré:amur, de Geer,
de Scheffer, de Cornelius, de Letzner, ete., les cinq premiers
de ces genres ont été étudiés, de telle sorte qu’il y a peu à ajouter
à leur histoire, tant à l’ÉTAT PARFAIT (subimago et imago) qu'a
l'état de vers (larves et nymphes) (1).
Il n’en est pas de même des genres Cænis et Oligoneuria, dont
on ne connait aujourd’hui encore que l'état parfait : leurs méta-
morphoses restaient à découvrir.
(4) La dénomination de Vers aujourd’hui bannie du langage de la Science
relativement aux Insectes proprement dits, me paraît cependant mériter, eu
égard à la commodité du langage, d’être remise en circulation, pour désigner
l’état correspondant à la période entière pendant laquelle les Éphémérines vivent
dans l’eau, sans qu’il soit besoin d'indiquer si c’est la larve ou la nymphe qu’on
a spécialement en vue. Dans le cours de mes recherches, j'ai souvent senti
l'utilité d’un terme à acception plus large que ceux de larve ou de nymphe ;
pouvais-je mieux faire que d'adopter le mot caratéristique dont se sont unique-
ment servis mes illustres devanciers Swammerdam, Réaumur, ue Geer ?
— 143 —
De nombreuses explorations que j'ai faites à Toulouse, pendant
trois années consécutives (1867, 1868, 1869), en dilférents
endroits du lit et des bords de la Garonne, m’ont amené, entre
auires résultats, et pour ne citer que les plus saillants :
A A constater dans la Faune toulousaine la présence de tous
les genres d'Éphémérines admis par M. Pictet ;
20 À combler en partie, et le premier jai tout lieu de le croire,
les lacunes, jusqu'ici absolues, de la science touchant les premiers
âges (vie aquatique) des genres Cœnis et Oligoneuria (1) ;
30 À établir dans cette curieuse famille des Éphémérines un
. nouveau genre que Je désigne sous le nom d’Eucharis ;
4° À ramener à sa véritable place, c’est-à-dire à distance de Ja
classe des Crustacés (!), pour le joindre au groupe des larves
d'Éphémérines, le singulier articulé dont Latreille a fait le genre
Prosopistoma ;
Bo Enfin, à ajouter aux espèces d'Éphémérines actuellement
connues les suivantes :
Eucharis Reaumurxii $
Palingenia tolosana ;:
Oligoneuria garumnica.
Je consacrerai la première partie de ce Mémoire à faire connaître
dans quelles circonstances il m'a été donné de découvrir le ver du
senre Cœnis. Dans la seconde partie, je décrirai la nymphe de la
plus grande des deux espèces que j’ai été à même d'observer.
_ Quant aux divers autres points dont je me borne, pour le
moment, à donner ci-dessus le bref énoncé, je me propose de les
traiter successivement, dans des publications ultérieures, avee tous
les développements qu'ils comportent.
: PREMIÈRE PARTIE.
Le 42 février 1868, au retour d’une pêche aux vers d'Éphé-
(4) M. Pictet, donnant les caractères des Ephémérines qui constituent le
groupe générique établi par Stéphens sous le nom de Cœnis, dit p. 273 de son
ouvrage : « Je ne connais pas leurs métamorphoses, » On retrouve ces mêmes
mots, p. 289 de l'ouvrage cité (Voir notre Index bibliographique), à propos du
genre nouveau que le professeur de Genève a introduit sous le nom d’Oligoneuria.
| — 144 —
mérines, faite dans le bassin de la Garonne, à hauteur du quai
de Tounis, près du Pont-Neuf, examinant au microscope diverses
larves encore vivantes d'insectes de cette famille (Baëtis, Cloë,
Potamanthus), j'en remarquai spécialement une, excessivement
petite, quasi-hyaline, très poilue dans toutes ses parties. Cette
larve me frappa, d’une part, à cause de Ja difficulté que j’éprouvai
à la débarrasser de la couche de particules vaseuses qu’elle faisait
adhérer avec une singulière ténacité à la surface de son corps ;
et elle attira, d'autre part, mon attention eu égard au jeu et à la
disposition de ses organes respiratoires eRternes. Les mouvements
de ces appendices me rappelaient très bien ceux que j'avais déjà
eu occasion d'étudier sur les fausses branchies de la larve de
l'Ephemera vulgata ; mais ils étaient en partie masqués par deux
organes protecteurs que je Comparai aussitôt, à cause de leur
analogie de situation et de fonctions, aux opercules qui recouvrent
latéralement les branchies des Poissons. C'est en vain que je
cherchai dans la Monographie de M. Pictet, ainsi que dans les
auteurs qui ont écrit depuis sur la matière, soit une figure, soit
quelques lignes qui se rapportassent à ce petit animal ; je ne
trouvai rien (1) Je pris en conséquence bonne note de l’ob-
servation, et je dessinai ma larve à opercules.
Quelques jours après, je trouvai dans les interstices d’un ais de
bois en décomposition, pêché sur mes indications par mon batelier
tout contre la chaussée du moulin du Bazacle, au point où la
digue touche l’Hôtel-Dieu, trois grosses larves noirâtres semblables
à la précédente. Il me fut facile de reconnaitre à l’œil nu qu'elles
“appartenaient au même genre (certé), peut-être aussi à la même
espèce (c'était encore une question), mais alors beaucoup plus
avancée en âge, que celle qui, depuis le 42 février, me préoccupait
à si juste titre, comme on le verra par la suite.
Vivement intrigué, je me mis à élever ces bestioles dans l'espoir
d'arriver à obtenir leur état parfait.
Sur ces entrefaites arriva l’époque de la réunion annuelle des
(1) La proximité de Paris de la ville de Saint-Germain où je me trouve au-m
jourd’hui en garnison, m’impôsait le devoir de compléter, au miliea des riches
bibliothèques de la capitale, mes premiers renseignements bibliographiques : or
je n’ai là non plus absolument rien rencontré qui eût trait, de près on de loin,
au singulier petit animal dont il est question dans ce Mémoire,
-.
— 145 —
Sociétés savantes à Paris. Mon père, délégué comme membre de
l’Académie impériale des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres
de Toulouse, voulut bien emporter vivante une de ces larves,
pour la soumettre à l'appréciation d’un entomologiste autorisé. Le
frêle animal mourut en route; mais, soigneusement mis aussitôt
dans l’alcoo!, il fut montré, bien conservé, à M. Émile Blanchard,
de l’Institut. Ce savant naturaliste déclara cette larve entièrement
inédite, et m'encouragea à persévérer dans mes recherches, et à
les compléter, si possible (4).
Par malheur les deux seuls individus que je possédais dans
mon laboratoire ne tardèrent pas à succomber à leur tour, et je
restai assez longtemps sans avoir la chance de rencontrer d’autres
individus de cette bizarre espèce. Néanmoins je continua à pour-
suivre avec ardeur la solution du problème scientifique proposé à
mes efforts, et quelques mois après, j'avais la bonne fortune,
j'ajouterai même, on le comprendra, la vive satisfaction de saisir
enfin la Nature sur le fait.
Nous étions au 31 août 1868 : il était environ six heures dn soir;
la journée était chaude, et le soleil déclinait sensiblement à l’hori-
zon. La Garonne, à cette époque de l’année, ordinairement très
basse, était presque guéable le long de la chaussée qui joint l’île
des Grands-Ramiers au Moulin-Vivent. Posté au milieu de l’eau,
dans le simple appareil du nageur, à égale distance des Kamiers
_ étdu Moulin, assez commodément assis sur une grosse pierre,
j'eus, une heure durant, un spectacle vraiment ravissant, et dont
je ne pouvais me lasser. Sous le niveau de l’eau très transparente
en cet endroit, et de dessous les grosses pierres et les divers
objets qui m'environnaient (énormes blocs de maçonnerie déta-
chés de la chaussée, plantes aquatiques éparses çà et là, feuilles
de peuplier submergées, etc., etc.), je vis surgir de mille côtés,
et tout-à-fait à la manière de ludions fantastiques, une multitude
de nymphes excessivement petites, munies des opercules caracté-
ristiques dont j'ai parlé, et qui se transformèrent sous mes yeux
(4) J'avais remis à mon père, et uniquement pour son usage personnel, en
même temps que ma larve, une note forcément incomplète, et d’ailleurs rédigée
à la hâte. M. le professeur Blanchard l’a jugée cependant assez intéressante
pour la faire insérer, telle quelle, dans la Revue des Sociétés savantes, année
1869,
40
— 146 —
émerveillés en insectes parfaits. Je recueillis en quantité nymphes
et dépouilles de nymphes, ainsi qu’un certain nombre d'insectes
parfaits sur le point d’être engloutis au moment même où, mal-
adroitement, ils quittaient leur frêle esquif, je veux dire leur
enveloppe de nymphe; enfin, je pus même prendre aw vol plu-
sieurs insertes parfaits. L’un de ces derniers, mis immédiatement
dans un flacon bien sec, passa à l'instant de l’état de subimago à
l’état d’imago : le fait qui, cette métamorphose ultime opérée, me
frappa le plus, fut le retrait rapide, le ratatinement soudain de
l'enveloppe épidermique qui, à l’état de subimago, dissimule en
partie la transparence propre aux ailes de l’imago.
Rentré chez moi, j'étudiai les caractères de l’insecte parfait, et
je trouvai :
« Tête courte et large, yeux simples dans les deux sexes et
toujours séparés par un intervalle considérable. Ailes au nombre
de deux, très arrondies au bord interne, en éventail et presque
dépourvues de nervures transversales. Corps court et large.
Crochets des tarses terminés par deux lamettes. Trois soies cau-
dales égales, très longues dans le mâle et très courtes dans la
femelle. » Voy. Pictet, op. cit., p. 2173.
Il n’y avait pas à en douter: j'étais en présence du genre
Cœnis, et c'était la larve, jusqu'ici inconnue, d'une des espèces
de ce genre, que j'avais rencontrée pour la première fois, sans le
savoir alors, six mois auparavant.
Quant à l’espèce que j'avais sous les Ven c'était la Cœnis
grisea (Pict.). :
Voici la caractéristique de cette espèce, telle que la donne le
professeur de Genève.
Cœnis grisea,
PI. XLV, Fig. 4-2.
Dimensions.
Mâle imago. Mâle subimago, Femelle subimago.
Longueur du corps... 3 1/2 4 1/2 o millimètres.
Envergure.….......s..s: 17 8 10 —
Soies caudales....... 9 3 2 —
Description. — Mâle imago (PI. XLV, Fig. 2). La tôte et le .
thorax sont d’un gris un peu violacé, avec quelques légers traits
«
— 147 —
noirs longitudinaux. L’abdomen est blanchâtre, avec une nuance
de gris; les soies caudales sont blanches. Les pattes antérieures sont
grises, les autres blanches. Les ailes sont transparentes, incolores,
avec les nervures blanches, sauf la costale et les sous-costales
qui sont violettes et entourées d’une teinte de même couleur.
À l’état de subimago (Fig. 4), les soies caudales sont beaucoup
plus courtes, comme on le voit par les dessins ci-dessus indiqués.
Les ailes sont un peu opaques, d’un gris violacé.
M D Cbdiférences. — 1. 2. Lu A, à EU
Habitation. — J'ai trouvé cet insecte au mois de juin, dans
un petit marais situé au pied du mont Salève. Voy. Pictet,
DIEU, p.270.
Pour compléter l’histoire de cette espèce, il ne me reste plus
qu’à donner les dimensions de la nymphe :
Dimensions de la nymphe de la Cœnis grisea (Pict.).
Longueur 2 Lio) AIN NE IEErE L'ART EN EESSS" millimètres
Lonsgeurtdes soies caudales. . . .. . . . . , 3 —
Largeur du corps (dans son plus grand diamètre). 1 1/4 —
SECONDE PARTIE.
Au mois de juin 4869, explorant attentivement deux autres
points favorables de la Garonne : 1° le bassin de la Daurade,
près des Ecoles de natation et des bateaux des laveuses ; 20 ce
bras du fleuve qui, sillonnant l'ile des Grands-Ramiers, passe sous
le petit pont en briques, récemment construit non loin de l’an-
cienne papeterie Rochelort, je rencontrai quantité de grandes
nymphes d’une certaine espèce du genre qui nous occupe. Gette
espèce ne me paraît pas avoir encore été déterminée, et je n’ai pu,
jusqu’à présent, être témoin de ses métamorphoses; mais, à en
juger par les dimensions de la nymphe, elle doit être surtout
remarquable par sa taille (4). |
(4) La démonstration de ce fait, qu’un des membres résidants de notre
Société pourrait aujourd'hui aisément fournir, viendra naturellement infirmer
Vassertion de M. Pictet qui dit, p. 174 de sa Monographie : « Toutes les espè-
ces qui composent le genre Cœnis sout peliles, »
— 118 —
Quoi qu’il en soit, la nymphe de cette espèce diffère si peu de la
Cœnis yrisea, et peut être facilement rencontrée à Toulouse en si
grande abondance que, à raison même de ses dimensions relative-
ment considérables, j'ai cru devoir la faire représenter de préférence
à l’autre, et la prendre pour type de la description qui va suivre :
qu’il me soit permis, jusqu’à plus ample informé, de désigner cette
espèce, non encore décrite, que jesache du moins, sous le nom
de Cœnis maxima (1).
Dimensions de la nymphe de la Cœænis maæima (?).
Longueur du corps (tête, thorax et abdomen). . 9 millimètres
Longueur des soies caudales. . . ... . . . . . 6 —
Largeur du corps (dans son plus grand diamètre). 21/2 —
Description de lanymphe. — La coloration générale est d’un
brun verdâtre. La tête, triangulaire, est plus large que longue.
Le prothorax est très distinct de la tête et du reste du thorax, Sur
l'ensemble du mésothorax et du métathorax, on voit deux sortes
de carquois de forme subtriangulaire, et qui ne sont autre chose
que les fourreaux des ailes dont, par transparence, on peut, avec
un faible grossissement, apercevoir les délicats replis. Les pattes,
très poilues, principalement à la partie interne, et près du crochet
terminal, vont en augmentant de longueur de la première paire à
la dernière. À la partie ventrale de chacun des neuf anneaux
dont se compose l'abdomen, on remarque deux petites taches
noirâtres latérales; et, à leur bord postérieur, ces segments
abdominaux présentent deux prolongements épineux dont la
longueur va en augmentant du premier anneau au neuvième ; à
ce dernier se trouvent fixées les trois soies caudales propres à
toutes les larves et nymphes d’Ephémérines : elles sont ici d’égale
longueur et munies, comme chez la larve du Potamanthus
erythrophtalmus (Schrank), de poils verticillés.
Caractère spécial. — Les organes respiratoires externes sont
protégés et entièrement recouverts par deux lamelles quadrangu-
(1) Cest M. A.-G. Poujade, artiste dessinateur aussi consciencieux qu’habile,
et spécialement attaché au Muséum d'Histoire naturelle de Paris, qui a bien
voulu se charger de reproduire, d’après nature, sur mes indications, la nymphe
de notre Cœnis maxima., Je suis heureux de pouvoir le remercier ici de l’utile
concours qu’il a bien voulu me prêter.
PR ee d'Itictorse-Naturelle de loulousestTVP1 III.
(C.Maxima ?)
L
NYMPHE DE CŒNIS.
G.A.Poujade ématura del et Pinx.
— 149 —
laires, véritables opereules, convexes supérieurement, unis à
charnière par leur bord supérieur au bord correspondant du second
anneau abdominal, libres par leurs bords latéraux et inférieur.
On ne peut mieux comparer la forme de ces opercules qu'à celle
des basques de la veste de nos artilleurs.
Qu'on élève à la fois les euvettes de deux montres symétrique-
ment placées l’une à côté de l’autre dans un même plan horizon-
tal, puis qu’on les abaisse encore à la fois, et qu’on répète alterna-
tivement un certain nombre de fois ces deux petites manœuvres,
et onaura une très bonne idée des mouvements de ces lamelles
protectrices.
Ces opércules que l’animal peut à volonté, mais d’un mouvement
synergique, alternativement soulever et abaisser, recouvrent cha-
un quatre fausses branchies ramenées à la surface dorsale du
corps à la manière de celles des vers de l’Ephemera vulgata. La
forme de ces organes respiratoires externes est celle d’une feuille
irréguliérement ovale, à pourtour élégamment cilié de cæœcum
trachéens s’éntrecroisant, et comme enchevêtrés, à l’état de vie, avec
ceux du eôté opposé. On n’a qu’à se rappeler les mouvements des
cils vibratiles de certaines muqueuses de l’économie animale,
pour avoir une bonne idée de la manière dont la nymphe fait
fonctionner ces délicats organes de respiration aquatique.
Cette nymphe est essentiellement rampante: je l'ai rencontrée, :
en compagnie de larves de Potamanthus : lo au milieu de la
couche de vase qui garnit en certains points ces faisceaux de
plantes aquatiques ou ces grosses pierres que l’on trouve généra-
lement au fond des fleuves et des ruisseaux de nos pays; 2° dans
les excavations de ces résidus de la distillation de la houille, que
lon peut, aisément, retirer de l’eau en si grande abondance, si
Von suit les bords de la Garonne parallèlement aux quais de
Brienne et de la Daurade (1).
Je terminerai ce travail en rappelant que M. Pictet a mis en
(4) Que l’on mette quelques-unes de ces larves dans une assiette à soupe, par
exemple, pleine d’eau, et on les verra toutes avec curiosité relever leurs soies
caudales à la manière du paon lorsqu'il fait la roue, mais ici moins pour se
faire admirer probablement, que pour se donner une attitude LES qui
peut quelquefois réussir à éloigner certains de leurs ennemis.
— 150 —
évidence, dans deux tableaux fort commodes, d’après des carac-
tères tirés de l’état parfait, les différences des sept genres d’Ephé-
mérines qu’il a admis. (Voy. Pictet, op. cit., p. 114-415). Dans
un troisième tableau, ce savant naturaliste a cherché à confirmer
par les larves ses premiers résultats ; mais il n’a pu le faire qu'in-
complètement : car il avoue lui-même, en divers endroits «le son
beau livre (Voy. Pictet, op. cit., p. 114, 273, 289), son igno-
rance absolue des métamorphoses des genres Cœænis et Oligoneuria.
Je m’estime heureux d’avoir pu, à ce sujet, faire faire, pour ma
faible part, un pas de plus à la science. On peut donc aujourd’hui,
ce me semble, essayer de combler une des lacunes de ce cadre en
le complétant de la manière suivante (4) :
Organes respiratoires en forme
de houppes.. . . .. . « « ÆEphemera.
Larves
fouisseuses |} Organes respiratoires en forme
ORGANES de feuilles frangées. . . . Palingenia.
RESPIRATOIRES EXTERNES ;
etre Marcheuses | ( COFPE Es ARS Baëlis.
Larves Ê da si le corpsnonapl. Potamanthus
non {
fouisseuses. Nageuses, à queue ciliée de
très grands poils. . . . . Cloë..
ORGANES
RUSPIRATOIRES EXTERNES( A
LR EE axve ‘raifpants. :.1124./INORENE IR Cœnis.
PAR DEUX OPERCULES.
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE.
F.-J. Picrer. — Histoire naturelle générale et particulière
des Insectes Névroptéres. — Famille des Éphémérines. Genève,
1843-1845 (avec Atlas.)
H. Mixxe-Enwarps. — Leçons sur la Physiologie et l Anatomie
comparée de l'Homme et des Animaux. Paris (en cours de publi-
cation).
H.-A. HaGex. — Bibliotheca entomologica. Leipzig, 1863.
H. Troscnez. — Archiv. für Naturgeschichte, 1840-1870.
(1) Tout ce qui est en Penres LETTRES capiraLes, ainsi que le mot souligné
Cœnis, indique les additions que j’ai faites au tableau primitif de M. Pictet..
(Voy. Pictet, op. cit., p. 115.)
— 151 —
ADDENDUM.
Comme preuves à l'appui des faits consignés dans ce Mémoire,
j'ai l'honneur d'offrir en don au Muséum d'Histoire naturelle de
Toulouse trois petits tubes renfermant :
Le n° 1, quatre nymphes de la Cœnis grisea ;
Le n° 2, une femelle subimago de la Cœnis grisea ;
Le no 3, une nymphe de la Cænis maxima ?
EXPLICATION DE LA PLANCHE I.
1. Nymphe de Cœnis maxima ? grossie trois fois.
2. Face ventrale de l'abdomen de cette nymphe, pour montrer
les taches latérales des anneaux abdominaux.
a. Ligne représentant la grandeur naturelle de la nymphe (abs-
traction faite des soies caudales). |
Séance du 29 juillet 4S8%0.
Présidence de M. le D: Frcnoz, président honoraire.
La Société reçoit :
Journal d'Agriculture pratique, 3° série, t. XXI, juillet 1870,
Toulouse.
L’adhésion suivante :
Société havraise d'Etudes diverses.
J'ai l'honneur de porter à votre connaissance que la Société
havraise d'Etudes diverses vient d'écrire à M. le Ministre de l’Ins-
truction publique la lettre dont voici la teneur :
« Monsieur le Ministre, |
» La Société d'Histoire naturelle de Toulouse nous a commu-
= AG —
niqué le texte d’une pétition qu’elle a adressée à Votre Excellence
afin d'appeler son attention sur l’exiguité de la place occupée par
l'étude des sciences naturelles dans les programmes de l’instruction
secondaire, et cette Société nous invitait à vous faire connaître
notre opinion sur la question qu’elle soulève.
» En conséquence, nous avons l'honneur de vous déclarer,
Monsieur le Ministre, que les raisons invoquées par la Société
d'Histoire naturelle de Toulouse nous paraissent très-judicieuses,
et que nous applaudissons à la solicitude qui a inspiré à ses
membres l'initiative de soumettre cet objet à l’examen éclairé de
Votre Excellence. Nous sommes persuadés qu'il en résultera des
mesures capables d’inspirer aux jeunes intelligences le goût d’un
genre d’études dont la propagation serait de la plus grande utilité. »
J. BAILLIARD, secrétaire-général.
M. le professeur E. Filhol donne lecture de la Note suivante :
Note sur la composition des ossements fossiles trouvés dans la
caverne de Lherm (Ariége).
Dans une série de Mémoires qu’il a publiés dans ces derniers
temps, M. Scheurer-Kæstner a signalé l’altération remarquable
qu’a subie l’osséine des ossements fossiles. Cette matière, qu’on
peut isoler des os frais en les traitant par l'acide chlorhydrique
étendu, se présente sous la forme d’une substance solide, trans-
parente, ayant la consistance d’une gelée, et pouvant se tranformer
en gélatine par une ébullition prolongée avec l’eau. Les ossements
fossiles contiennent encore de l’osséine normale, mais la majeure
partie de cette substance a subi une transformation remarquable,
et est devenue soluble dans l'acide chlorhydrique étendu.
M. Scheurer-Kæstner pense que l’on peut juger de l'ancienneté
relative des os fossiles, d’après leur richesse plus ou moins grande
en osséine modifiée.
Les analyses de ce savant montrent d’ailleurs que FA quantité
d’osséine contenue dans les os fossiles, soit à l’état normal, soit à M
l’état soluble, est très-variable.
Il m'a paru intéressant de rechercher si les os fossiles de l'époque
quaternaire qu’on trouve dans les cavernes de l’Ariége renferment
_— 153 —
encore de l’osséine, soit soluble, soit insoluble, et de rechercher
surtout, s’il est possible, d'arriver à des conclusions bien posi-
tives touchant l’âge relatif des os, en se fondant sur leur
richesse absolue en matière azotée, ou sur les modifications
qu'a subies cette matière, |
Avant de rapporter les résultats des analyses que j’ai exécutées,
je vais donner, au sujet des ossements fossiles que j'ai trouvés
dans la caverne de Lherm, quelques détails qui me semblent n’être
pas dépourvus d'intérêt.
L'aspect des os que j'ai recueillis dans les diverses parties de
cette caverne varie beaucoup. Ceux qui ont été trouvés sous des
couches épaisses d’une stalagmite dure et cristalline sont blancs,
absolument comme les os calcinés qu’on destine à la préparation
du phosphore. Ces os happent fortement à la langue ; ils sont
très-fragiles. Soumis à la calcination, ils ne répandent pas la
plus légère odeur de matière animale qui brüle. Caleinés en vase
clos, 1ls se colorent à peine en gris très-clair.
Les os qu’on rencontre au milieu des couches de terre offrent
un tout autre aspect ; leur couleur est brune, leur fragilité est
moindre ; soumis à la calcination, ils répandent une odeur très-
forte de matière animale qui brûle, et si la calcination a lieu en
vase clos, 1ls donnent du noir animal.
J’ai à peine besoin d’ajouter que les os blancs qu’on trouve
au-dessous des couches de stalagmites, et souvent entre deux cou-
ches de stalagmite, n’ont pu subir aucune calcination. Il est aisé
de s’en convaincre en considérant les maxillaires munies de leurs
dents. Ces dernières sont dans un état de conservation qui exclut
toute idée de l’action du feu. Il est donc facile de constater, sans
avoir recours à l'analyse, que des os fossiles appartenant à une
même espèce et provenant d'une même caverne, présentent, au
point de vue de leur richesse en matière organique, des différences
considérables.
Voici quelques-uns de mes résultats :
Ao Un maxillaire d’Ursus spelœus, très-blanc, trouvé entre
deux couches de stalagmites très-épaisses et cristallines, a donné,
pour cent parties, 0,668 d’osséine soluble, et n’à pas fourni la
moindre trace d’osséine insoluble.
Ce maxillaire a pris à peine une légère teinte grise par la cal-
— 154 —
eination à l'abri de l'air, et n’a répandu at aucune odeur pendant la
durée de l'opération.
Un fragment d’un deuxième maxillaire d’ours des cavernes,
recueilli dans une autre salle de la caverne de Lherm, au milieu
d’une terre argileuse mêlée à du sable grossier et de nombreux
fragments d’une roche calcaire, a été soumis à l’analyse. Cet os
était coloré en brun rougeâtre. Soumis à la calcination, il a pro-
duit des fumées abondantes, dont l'odeur désagréable rappelait
celle des matières animales qui brülent. Calciné à l'abri du
contact de l'air, il s’est transformé en noir animal. Soumis à
l’analyse, il a donné une quantité d’azote correspondant à 46,62
pour cent d’osséine, dont 4,85 étaient insolubles dans l'acide
_Chlorhydrique étendu, et 11,77 étaient solubles dans cet acide.
Un métacarpien d’ours des cavernes, moins blanc que le premier
maxillaire, a donné une quantité d’azote correspondant à 8,72
d’osséine, dont 5,36 soluble dans l'acide chlorhydrique étendu, et
3,36 d’osséine insoluble ou normale.
Un métacarpien d’ours des cavernes presque blanc, happant à
la langue, mais moins fort que le premier maxillaire, a donné
à l'analyse une quantité d’azote correspondant à 3,64 d’osséine,
dont 3,06 d’osséine insoluble, et 0,58 d’osséine soluble. Cet os
a pris une teinte brune-grisâtre par la caleination en vase clos, et
n’a produit qu’une très-légère odeur de matière animale hrûlée.
Enfin, un fragment d’os humain (métacarpien), provenant de
la grotte d’Arbas (Haute-Garonne), a donné une quantité d'azote.
représentant 18,30 pour cent d’osséine, dont 13,50 à l'état
insoluble, et 4,80 soluble.
Ces résultats s'accordent sur plusieurs points avec ceux qu’a
obtenus M. Scheurer-Kæstner ; ils confirment l'existence de
l’osséine modifiée et son abondance relative dans les os fossiles ;
mais ils nous montrent qu’on peuttrouver dans la même caverne
des ossements appartenant à des animaux de la même espèce,
dont les uns contiennent une quantité notable d’osséine, tandis
que les autres n’en contiennent que des traces; d’où l’on peut
conclure, à mon avis, qu’il n’est pas possible de se fonder sur la
quantité d’osséine, soit normale, soit modifiée, qui existe dans
des ossements $olubles, pour établir leur ancienneté plus ou moins
grande.
Les circonstances qui déterminent l’allération ou même la
— 155 —
destruction complète de la matière organique dans les os, me
paraissent faciles à reconnaître : ce sont le contact simultané de
l'air et de l’eau.
Pour préparer des squelettes, on fait macérer les os pendant un
temps plus ou moins long, et une bonne partie de la matière
organique disparait. Or, des os fossiles qu’on trouve entre deux
couches de stalagmite très-épaisse et cristalline ont été, selon toute
apparence, soumis à une macération très-prolongée ; peut-être
cette macération a-t-elle duré pendant des siècles, et il ne faut
pas s'étonner si la matière organique a disparu d’une manière
* presque complète dans la plupart d’entre eux.
S1 les idées que je viens de développer sont vraies, des os
fossiles, qui ont subi pendant un temps très-considérable l’action
d'une eau calcaire, doivent être riches eux-mêmes en car-
bonate de chaux, et l’être d'autant plus qu’ils ont subi plus
longtemps l’action du liquide. Tout autorise, d’ailleurs, à prévoir
que la richesse des os en matière organique sera d'autant moindre,
que ceux-ci seront plus riches en carbonate de chaux. C'est ce
qui a lieu pour ceux qu’on trouve dans les diverses parties de la
caverne de Lherm. Cependant, il pourrait se faire que des os fussent
appauvris en matière organique par une eau qui ne serait pas
calcaire ; dans ce dernier cas, le rapport que je viens de signaler
n’existerait pas.
Vorei les résultats que J'ai obtenus en examinant des os prove-
nant de la caverne de Lherm : |
A0 Maxillaire blanc d’ours des cavernes, contenant à peine des
traces de matière organique. Carbonate de chaux 12,40 pour cent.
20 Métacarpien blanc d'ours des cavernes. Carbonate de chaux
25,80 pour cent.
30 Métatarsien de felis spelæa, presque dépourvu de matière
organique. Carbonate de chaux {9 pour cent.
40 Maxillaire brun d’ours de caverne. Carbonate de chaux
9 pour cent.
5° Métacarpien brun d'ours des cavernes. Carbonate de chaux
41,20 pour cent.
6° Peroné blanc d’ours des cavernes. Carbonate de chaux
46,8 pour cent.
_ T° Peroné brun d'ours des cavernes. Carbonate de chaux
11,90 pour cent.
— 156 —
Je conclus des faits précédents :
1° Que Paltération ou la destruction de l’osséine dans les os
fossiles n’est pas nécessairement en rapport avec leur ancienneté,
et que des os provenant d'animaux de la même époque peuvent
présenter des différences énormes au point de vue de leur richesse
en matière organique ; L
2° Que le contact prolongé de l’eau est l’une des causes les plus
efficaces d’altération de la matière organique.
M. Timbal-Lagrave communique à la Société le Mémoire
suivant : |
Précis des herborisations faites par la Société d'Histoire naturelle
de Toulouse pendant l'année 1870, par M. En. TimBaz-LAGRAve,
pharmacien. |
La Société d'Histoire naturelle de Toulouse avait, comme pré-
cédemment, organisé, pour l’année 1870, une série de courses,
qui n’ont pu s'effectuer à cause des événements malheureux qui
sont venus accobler notre chère patrie. Un grand nombre de nos
confrères, dispersés sur les champs de bataille ou dans les ambu-
lances ont dû abandonner leurs pasibles travaux ,'pour consacrer
tout leur temps à la défense nationale ; la Société, devant le deuil
général, a même suspendu ses séances jusques après la paix.
Notre compte-rendu devra nécessairement se ressentir de ce
fâcheux état de choses, et présentera même quelques lacunes
regrettables ; cependant, dès les premiers jours du printemps jus-
qu’à l’époque où la guerre a été déclarée, plusieurs de nos con-
frères avaient fait des courses, d’où ils ont rapporté des plantes
très intéressantes. Pour notre part, nous avons peu herborisé cette
année, mais nous avons dû continuer nos études dans notre Jardin
d'essai ; ces observations et les quelques recherches faites dans la
campagne par nos collègues; permettront cependant, je l'espère, de
fixer l’attention de ceux qui s’intéresserit aux progrès de la bota-
nique dans notre pays. |
Aquilegia vulgaris, L. et auct. *
La plupart des auteurs réunissent sous le nom d’Aquilegia
vulgaris, non seulement les À. atrata, Koch. , et À. viscosa,
Gouan, des Cévennes, mais encore une foule d'espèces que
M. Jordan a décrites avec le plus grand soin. Afin d'appeler sur
ces plantes critiques l'attention de nos collègues, nous allons
désigner celles que nous avons récoltées dans nos courses et que
ous avons soumises à des essais de culture depuis plusieurs
années, sans en avoir vu changer les caractères.
A0 Aquilegia nemoralis, Jord., diag. 83. Se distingue facilement
à ses pédoncules pubescents, à poils mous non glanduleux, par ses
fleurs courtes, par ses pétales tronqués, en cornet obtus, à base
en crochet, par ses étamines exertes, par ses capsules pubes-
centes sans poils glandulenx, terminées par un style grêle, flexueux,
recourbé à son extrémité; par les feuilles biternées glabrescentes,
un peu.glauques en dessous, les supérieures entières.
Cette plante est rare dans nos bois; nous l’avons vue cependant
souvent au bois de Bouconne ; elle représente l’Aquilegia vulgaris
de la Flore du bassin sous-pyrénéen ;
20 Aquilegia collina, Jord., diag. 84. A. alpicola, Nob., olim ad
amic. Celui-ci se distingue du Nemoralis, Jord. par ses pédoncules
pubescents aussi, mais glanduleux, un peu visqueux même ; par
ses fleurs plus grandes, ses pétales non tronqués, en cornet plus
obtus, par ses capsules plus grandes à styles persistants plus dressés,
par ses feuilles plus grandes, plus vertes, biternées, à lobes bien
plus arrondis.
Cette plante abonde dans la région alpine inférieure de nos
montagnes ; de Bagnères-de-Luchon, elle descend dans le bas des
vallées, à Montréjeau, Saint-Gaudens, Cagire, etc.
3° Aquilegia præcox., Jord., diag. 85. L’Aquilegia præcox,
Jord., se distingue de l'Aquilegia nemoralis par ses fleurs plus
petites et d’un bleu plus foncé ; par ses feuilles d’un vert glauque,
même en dessus ; par ses pédoncules velus, glanduleux, visqueux ;
par ses capsules Le courtes à style ps don plus court et
plus large à-la base.
De l’Aquilegia collina, Jord., par ses fleurs beaucoup plus petites,
plus foncées ; ses pédoncules rouges, visqueux ; par ses capsules
plus courtes, à style plus étalé ; par ses feuilles glaucescentes en
dessus, à pétiolules plus courts. Gelui-ci vient dans le bassin du
Tarn et la Montagne-Noire : Lampy, la Louvatière, etc.
On peut encore, comme l'indique M. Jordan, distinguer ces
trois plantes d’après les graines, L’Aquilegia nemoralis, Jord., a
— 158 —
les graines ovalés et courtes; l’Aquilegia collina, Jord., avales
aussi, mais plus grosses et plus longues ; l'Aquilegia præcox, Jord..,
a ces mêmes organes lancéolés.
La floraison de ces trois plantes est aussi caractérisée. L’À. præcoxæ
fleurit le premier dans mon jardin vers le commencement de mai.
Huit à dix jours après vient le collina. Enfin, à la mi-mai ou juin,
le nemoralis est en fleur. s
Outre ces trois Aquilegia, assez répandus dans notre région,
nous avons trouvé dans le massif d’Arbas une quatrième forme
parfaitement distincte des trois premières. Pour pouvoir être facile-
ment distinguée, nous lui donnons le nom de :
Lo Aquilegia speciosa, Nob. Elle se distingue de toutes celles que
M. Jordan a décrites par la grande proportion de tous ses organes.
Quoiqu’elle soit de la même taille, ses fleurs sont très-grandes;
d’un lilas azuré, ses sépales sont ovales, atténués au sommet et
obtus, terminés par un mucron noir; ses pétales sont arrondis au
sommet et terminés par un cornet moins contourné que dans les
autres formes, et terminé à son tour par une callosité noire, cornée
et dure ; ses capsules sont très-grandes et longues, d’abord très-
resserrées à la base, puis les styles sont larges à la base et divergents :
au sommet, très-fins, étalés; les graines sont ovales, très grosses,
un peu écourtées ; les tiges sont vertes, velues, un peu hérissées au
sommet et sur les pédoncules ; les feuilles sont grandes, biternées,
à divisions peu profondes, obtuses, inégales, vert-pâle, un peu
glaucescentes en dessous.
Cette plante, très-répandue dans les prairies d’Arbas (Haute-
Garonne), fleurit vers le milieu ou la fin de juin; elle est très-
commune dans cette région. Nous l’avons vue encore dans la forêt
de Barricaudo, dans le bois qui domine l’hospice d’Artigue-Telin,
et dans la vallée d’Aran, où elle était en pleine fleur en juillet
1869. Elle paraît très-répandue dans cette région, mais elle man-
que à Luchon, où nous n’avons vu que l’A. collina, Jord.
Papaver Rheas, L. et auct.
D’après les botanistes les plus autorisés, le Papaver Rheas des
auteurs serait une plante étrangère à l’Europe, elle aurait été
introduite sur le continent avec le cortége des plantes messi-
coles que nous a apportées la culture des céréales.
M. Alph. Decandolle, dans son bel ouvrage sur la géographie
— 159 —
botanique, donne la Grèce pour patrie au Papaver Rheas, d'après
Dioscoride, Liv. IV, chap. LXIV, mais toujours dans les champs.
Il en est de même en Crimée, d’après Bieberstein; cependant
Maryot et Reut l’indiquent à Zante, in campis et pratis ; Visiani,
dans les endroits herbeux, en Dalmatie. Enfin Gussonne, F4.
sicula, p. 8, indique cette plante, in cultis et collibus apricis
herbosis ubique ; M. Boissier, F1. orient., p. 113, in collibus, et
pratis Græciæ, Asiæ Minoris omnis et Styriæ Maritimæ et inte-
rioris.
. Devant ces faits, M. Alph. Decandolle, dans le livre remarquable
que J'ai cité et auquel j’emprunte la plupart de ces citations, se
demande, si le Papaver Rheas L., le Centaurea cyanus L., et
d’autres espèces messicoles sont naturalisées en Sicile, ou si, au
contraire, elles y étaient originairement à l’état sauvage. Il pense
que cette dernière alternative est plus probable, parce que, dit-il :
10 « Ces espèces ne se naturalisent pas facilement dans des pays
_» assez analogues à la Sicile; 20 Ja Sicile est un des premiers
» pays où les peuples gréco-latins aient cultivé les céréales, et
» l'on sait que Rome en tirait habituellement du blé. »
Quoi qu’il en soit, une lacune regrettable se fait maintenant sen-
tir pour donner à ces renseignements toute la précision désirable,
parce que ces auteurs, obéissant à l’idée réductrice, ont malheu-
reusement confondu sous le même nom de Papaver Rheas plu-
sieurs espèces distinctes, d'où est venueune grande confusion
que l’on ne pourra éclaircir que par de nouvelles recherches.
Quelques auteurs anciens, tels que Fuschius, Dodoneus, avaient
cependant donné des indications et des figures qui prouvaient
jusqu’à l'évidence que leur Papaver erraticum contenait plusieurs
formes distinctes que Linné, d’après son système, réunit en une
seule. Depuis cet illustre botaniste, ceux qui n’ont pas suivi sa
méthode réductrice, se sont bornés à voir dans les différentes
formes du Papaver Rheas des auteurs des variétés; cependant
M. Viguier, de Montpellier, fit aux dépens du P. Rheas un Papa-
ver Roubiæi, qui est très-répandu aux environs de Montpellier et
de Perpignan, que MM. Grenier et Godron s’empressèrent de ranger
aussi parmi les variétés. M. Boissier a suivi le même système.
Après avoir fait un Papaver syriacum très-distinct, selon nous,
du Rheas, il le réunit dansla Flore d'Orient à ce dernier, en se
fondant sur le caractère tiré de la forme de la capsule et des
— 160 —
anthères; le premier de ces caractères est sans doute très-variable,
mais le second est du premier mérite ainsi que la coloration du
pollen. Ce qui enträîne, selon moi, un peu de confusion, quand
on veut prendre les caractères spécifiques sur la forme de la capsule
et sur la grandeur relative du disque stigmatique, c’est qu’il arrive
le plus souvent que des insectes viennent déposer des larves dans
les loges de l’ovaire, ces larves épaississent les tissus, les grossissent
outre mesure, la paroi extérieure de la capsule ou ovaire grossi se
moule sur ces espèces de concression osseuse, et alors la capsule
est toute déformée ; ainsi que le disque stygmatique, qui ne suivant
pas le même accroissement se trouve déplacé, souvent plus court
que la capsule, quand il est normalement plus grand, ou bien c’est :
l'inverse qui se produit. La même chose arrive aux formes du
P. dubium ; mais chose étrange beaucoup plus rarement.
Pour ma part, je considère aussi comme variable, la présence
ou l’absence de taches à la base des pétales. Les sujets vigoureux
en possèdent le plus souvent, tandis que dans les individus
chétifs elles manquent ou sont simplement indiquées; mais si
elles existent, leur forme est constante, tantôt toutes noires, ou
noires et hordées de blanc, ou noires et bordées de pourpre ;
enfin, les feuilles prises dans leur ensemble ont un caractère qui
ne varie pas, comme ces plantes foisonnent dans nos moissons.
Il est nécessaire, pour bien les déterminer, de prendre des sujets
très vigoureux et de grande taille, pour bien saisir leurs caractères
distinctifs. | | LR
Parmi les caractères spécifiques, je dois une mention spéciale
à la forme du bouton avant l'épanouissement de la fleur; cette
forme est constante, quelle que soit la taille de la plante et la gran-
deur des fleurs. Globuleux dans le Pinnatifida Moris du midi;
ovoide obtus dans le Dodonei, Nob. ; ovoide aigu dans ie Fuschü,
Nob.
M. Jordan, dans ces dernières années, a publié plusieurs espèces
dédoublées du Papaver Rheas, qu'il a rencontrées dans les
moissons des environs de Lyon. Nous n'avons pas adopté ses
déterminations, parce qu’il nous a semblé que les espèces ne sont
pas aussi nombreuses que l'indique ce savant botaniste. Nos cul-
tures, commencées en 1860 et continuées jusqu’à ce jour sur des
individus nombreux, nous forcent à réunir quelques formes que
M. Jordan disingue. Ne comprenant pas comme lui les diverses
— 161 —
espèces confondues dans le Rheas, nous n’avons pas pu adopter
les noms qu’il leur a donnés ; nous avons préféré, d’ailleurs, les
emprunter aux anteurs qui les ont les premiers signalés ou
figurés, afin de ratlacher les études des anciens aux nôtres.
Jai le projet de revenir avec de longs détails sur les formes du
Papaver Rheas auct. dans mon travail, qui a pour ütre : Des
variations que présentent quelques plantes de la Haute. Garonne.
En attendant, je vais signaler les principales espèces qui ont été le
sujet de mes études depuis dix à onze ans, et que j'ai toutes sou-
mises à des essais de culture.
4° Papaver Dodonei, Nob.
Fleurs très-grandes, boytons ovoïdes elliptiques, obtus; sépales
hérissés de gros poils appliqués ; pétales extérieurs uniformes, sans
onglet, les intérieurs plus atténués, mais toujours plus larges que
longs, avec une tache noire à la base, bordée de blanc ou sans
tache dans les sujets peu vigoureux ; dans les deux cas, la base des
pétales est plus colorée; étamines à filets pourpre noir, anthères
ovales obtuses de même couleur, pollen cendré ; capsules ovoides à
disque stygmatique dépassant la capsule ; stygmates pourpre-noir ;
feuilles inférieures très-grandes, bipinnatifides à lobes dentés, dents
unies très-profondes non surdentées ; les supérieures sont aussi
pinnatifides, mais les lobes n’atteignent jamais la nervure mé-
diane ; les lobes sont à leur tour dentés, à dents alternes écourtées,
et le lobe terminal est conforme aux lobes latéraux. Cette dispo-
sition de dents est caractéristique.
Le Papaver Dodonei, tel que nousle comprenons, est très-carac.
térisé, mais il offre une foule de variétés dans la taille, dans la
forme et la grandeur des feuilles, la disposition de leurs dents, et
dans la grandeur des fleurs, que l’on croirait avoir sous les yeux des
espèces différentes. Je crois qu'il comprend le P. cereale, Jord. et
arvaticum, Jord. ; la figure du Papaver erraticum de Dodoneus
lui convient parfaitement. (Dod. pemp., p. 457, ch. XVII.)
20 Papaver erraticum, Nob ; Papaver erraticum primum, Fusch.,
Hist. stirp., p. 515.
Fleurs moyennes, boutons elliptiques un peu atténués au
sommet; sépales couverts de poils longs et appliqués, plus fins
que dans le P. Dodonei; pétales extérieurs un peu onguiculés non
“1
— 468 =
réniformes, les intérieurs atlénués en onglet plus larges que longs,
sans taches à la base, sur les individus faibles et chétifs, ou
avec une légére tâche noire, sans bordure grise sur les sujets
vigoureux ; étamines à filets noirs, pourpres; pollen jaunâtre ou |
gris-jaunâtre ; capsules ovales, très aplaties ; stigmates d’un gris |
foncé ou jaune un peu brunâtre ; feuilles plus courtes, ovales dans
leur pourtour ; les inférieures pinnatifides à dents plus courtes,
plus obtuses et plus arrondies dans leur ensemble que dans les
autres ; les supérieures, au contraire, ont les dents plus nombreu-
ses, plus aiguës et un peu courbées aux bords, toujours réunies
quatre à cinq, sous les ramifications supérieures de la tige.
Le Papaver erraticum, Nob., par la forme de ses feuilles,
pourrait prendre un autre nom qui @aractériserait mieux cette
plante. Mais j'ai voulu, en lui donnant le nom de P. erraticum,
rattacher, autant que nos nomenclatures le permettent, le nom le
plus ancien à notre plante, afin de conserver la tradition que l’on
néglise, il nous semble, trop aujourd’hui dans les travaux phyto-
graphiques de l’école moderne.
Cette plante est très commune dans nos cultures, où elle donne
une foule de variations remarquables dont la plus curieuse est une
variété à fleurs ponceau, due sans doute à l'influence chimique
du sol ou à la culture.
30 Papaver Fuschii, Nob.; Papaver erraticum aiterum, Fusch..,
Hist. stirp., 156 ; P. trilobum, Wallr ?
Fleurs de taille moyenne, comparées aux deux précédentes ;
boutons elliptiques et atténués au sommet, surtout dans les indi-
vidus faibles et chétifs ; sépales couverts de poils, plus fins, moins
appliqués ; pétales inférieurs réniformes, les intérieurs, presque
de même forme et presque aussi grands, ce qui n’a pas lieu dans
les autres, atténués en onglets assez longs, avec ou sans tache
violacée, plus foncés en forme de coin ; étamines à filets jaunes
livides, à anthères brunes-jaunâtres, obtuses aux deux bouts, mais
plus longues que dans les deux précédents ; pollen cendré-jau-
nâtre ; les feuilles, dans cette espèce, sont tout-à-fait différentes,
comme on peut s’en convaincre d’après la figure 156, de Fusch.,
qui représente un petit échantillon de notre plante. Dans cette
espèce, il faut considérer les feuilies inférieures, qui sont en rosette,
pinnatipartites, à lobes tantôt très écartés, tantôt au contraire très
— 163 —
rapprochés, inégalement dentés. Le lobe terminal très grand, régu-
lièrement denté par des dents écartées, aiguës à la base du limbe
et obtuses ensuite. Après les feuilles radicales, la tige se bifurque
en plusieurs rameaux qui ont chacun à leur base de grandes ou
petites feuilles, selon la vigueur du sujet ; elles sont d’une forme
différente, quoiqu’on puisse cependant les rapporter aux feuilles
radicales ; celles-ei se divisent en trois ou quatre folioles opposées, :
mais alors la terminale prend un très grand développement, elle
est ovale ou mieux obovale, atténuée fortement à la base et dentée
à dents de scie sur tout leur pourtour. Les supérieures affectent
Ja même forme et sont réduites à trois folioles, deux qui com-
mencent dès l'insertion de la feuille sur la tige, inégalement
dentées par des dents aiguës écartées. La terminale est toujours
très grande, avec deux ou quatre dents à la base, à limbe prin-
cipal lancéolé, plus ou moins denté, ou même entier, selon la
vigueur des sujets.
Cette plante, très connue dans nos cultures, est essentiellement
variable. On trouve des individus exigus, tels que Fusch le
représente, mais souvent dans les lieux gras on rencontre des
échantillons tellement robustes, à grandes fleurs et à feuilles, à
lobes presque entiers, ce qui donne à cette forme l’aspect le plus
étrange.
Lo Papaver caudatifolius, Nob.
Fleurs grandes, boutons globuleux, ovoides, obtus ; sépales
couverts de poils jaunâtres très decidus ; pétales extérieurs très
orands, avec un onglet prononcé; les intérieurs de même forme,
Miderneirt ne sans tache à la base ; étamines à filets noirs
pourpre ; anthères noires, pollen cendré, comme dans le Dodonei ;
capsules ovoides, très élargies à la base ; disque stigmatique, attei-
gnant les bords, et dépassant la capsule ; stigmate brun foncé, à dix
ou douze rayous ; feuilles inférieures réunissant dans leur ensemble
la forme que présente le Papaver Dodonei, avec le lobe terminal
très allongé du Fuschii ; elles sont dentées, à dents profondes,
inégales et écartées. Les feuilles supérieures sont aussi très carac-
téristiques; elles ont trois lobes principaux, comme le Fuschü,
mais avec des dents inégales et profondes comme dans le Dodonei,
seulement le lobe terminal est très-allongé en une he e de queue
hérissée de dents profondes et inégales
ARMES ©) AE
Cette espèce est très commune dans nos cultures, elle semble
intermédiaire entre le P. Dodonei et Fuschii, ce qui d’abord me
l'avait fait prendre pour une hybride entre ces deux plantes ; mais
ayant observé qu’elle est encore plus commune dans nos cultures
que les précédentes, je l’ai semée pendant dix ans sans trouver un
seul individu qui ait abandonné ces caractères pour prendre ceux
de ses parents présumés.
50 Papaver syriacum, Boissier et Blan.
Fleurs de taille moyenne, boutons globuleux légèrement ovoiïdes,
couverts de poils étalés, non appliqués ; sépales non decidus ;
pétales extérieurs réniformes sans onglets, les extérieurs de même
forme avec un onglet peu sensible, sans tache à la base ou avec
une tache purpurine peu élargie; filets des étamines purpurins,
noirâtres, ainsi que l’anthère ; pollen cendré bleuâtre; capsules
allongées pyriformes, atténuées à la base ; disque stigmatique coni-
que, à six ou sept rayons ; stigmates noirs purpurins ; feuilles ovales
dans leur pourtour, semblables en petit au P. erraticum, mais à
dents moins profondes, un peu roncinées, à lobes terminés par
un long poil roux, avec le lobe terminal conforme aux latéraux,
les supérieures de même forme que les inférieures, à lobes peu
profonds, tous terminés par un poil. Toutes sont en outre couvertes
sur les nervures de poils épars ; les pédoncules sont grêles, cou-
verts de poils étalés, comme dans les autres espèces , ses tiges
sont nombreuses, étalées, asvendantes et beaucoup plus courtes
que les autres, d’un à deux décimètres au plus.
Cette espèce, que M. Boissier a, comme nous l’avons déjà dit,
d’abord distinguée comme type, a été réunie par le même auteur
dans le Flora orient., p. 113, en variété au Rheas, elle est assez
répandue dans le bassin sous-pyrénéen. Mais elle croit de préfé-
rence dans les vignes, à l’Ardenne, Saint-Simon, où elle fleurit
avant les autres espèces. Elle est très-distincte des précédentes,
même de leur forme exiguë et élancée.
Il aurait été très intéressant de connaître à quelle espèce se rap-
portent les Papaver Rheas du Caucase, de Bieberstein et celui de
Sicile de Gussonne, ou bien encore, celui que signale M. de
Visiani en Dalmatie. Mais, en province, nous manquons de col-
lections suffisantes et ne pouvons jamais compléter nos observa-
tons. Ce n’est que par hasard que nous possédons un échantillon
— 165 —
du P. syriacum, Boissier, récolté par Blanche en Syrie, ce qui
nous a permis ce rapprochement. |
Nous recommandons à nos collègues ces plantes communes et
les prions de nous adresser leurs observations ; il est probable que
nous reviendrons sur ces déterminations.
Anacampseros J. Bauhin, Jord. et Fourr. Brev. 1, page 7.
MM. Jordan et Fourreau ont proposé de rétablir le genre Ana-
campseros de Bauhin (non Linné), pour placer plusieurs espèces
confondues dans le Sedum maximum, Krock. Sedum purpuras-
cens, Koch. Sedum fabaria, Koch. Sedum telephium, Linné, qui,
d'après ces savants botanistes, représentent des groupes d'espèces
affines, qu'ils proposent de distinguer entr’elles par des caractères
très sérieux.
En suivant les règles que nous nous sommes imposées, dans le
précis de l’an passé, et après plusieurs années de culture dans
notre Jardin du boulevard Saint-Pierre, nous allons signaler les
espèces qui peuvent, selon nous, être facilement distinguées par
des caractères tranchés et offrant une permanence irrécusable.
Aer Groupe. — Sedum maximum, Krock. et Aut. (1).
Anacampseros ternata, Jord. et Fourr. Brev. 4, p. 21. Icon.
LXXX VIT.
Trouvé par la Société, à Najae (Aveyron), juin 1869.
. 2. Anacampseros cebennsnsis, Jord. et Fourr. Brev. À, p. 18.
Icon., tab. LXXXII.
Trouvé par M. Peyre, au pont de Guittard, près Alzonne (Aude).
3 Anacampseros præruptorum, Jord. et Fourr. Brev. p. 20,
Icon. tab. LXXXIV.
Trouvé par M. Baillet, à Conques (Aude), sur le calcaire.
4. Anacampseros pachyphylla, Jord. et Fourr. Brev. 1, p. 47,
Icon. LXXXIL.
Sur les rochers et les murs de Cazaril, près Bagnères-de-
Luchon (Haute-Garonne).
({) Nous ne décrirons pas avec détail, les espèces publiées et figurées par
MM. Jordan et Fourreau, quand il n’y aura pas de doute sur leur détermi-
nation ; nous renyerrons au texte et aux figures citées par ces auteurs, pour de
plus grands détails. On consultera aussi avec fruit, la note de M. Boreau,
Mém. soc. Acad. d'Angers, tom. XX, qui, le premier, a appelé sur ces plantes
l'attention des botanistes.
— 166 —
5, Anacampseros collina, Jord. et Fourr. Brev. 1, p. 23, Icon.
tab. LXXXIX.
Hab. dans les broussailles, les vieux murs, sous le village de
Cazaril, Trébons, près Luchon (Haute-Garonne).
6. Anacampseros assurgens, Jord. et Fourr. Brev. [, page 24
Icon. XCII.
Habite le massif d’Arbas, sur le calcaire, à la grotte de Ja
Bourrusse , Penne-Blanque, près le village d'Arbas (Haute-
Garonne).
de Groupe. — Sedum telephium, Auct.
7. Anacampseros Rhodanensis, Jord. et Fourr. Brev. L, page 24,
Icon. XCII.
Habite les environs de Luchon, à Saint-Aventin, Cazaux, vallée
du Lys, dans la fente des murs et des rochers (Haute-Garonne).
MM. Filhol et Meilhés l’ont trouvée aussi à Carcanières, Pyrénées
de l'Aude.
3° GROUPE. — Sedum fabaria, Auct.
8. Anacampseros Lugdunensis, Jord. et Fourr., Brev. I, p. 98,
Icon. XCIV.
Habite Avignonet (Haute-Garonne), dans les vignes. M. Des-
jardins a trouvé aussi cette espèce à Arreau (Hautes-Pyrénées).
9. Anacampseros Julliana, Boreau monogr. Sedum. Tirage à
part. Page 40, Lcon. Jord. et Fourr. XOVIT.
Hab. très-abondante dans les Pyrénées de la Haute-Garonne,
dans la région sous-ulpine à l’ombre, dans les rochers humides,
près des cascades, etc.
Notre plante semble être un intermédiaire, entre les Anacamp-
seros conferta, Bor. et Julliana. Bor. Les fleurs sont en corymbe,
moins fournies et moins développées que nous le présente la figure
que nous donnent MM. Jordan et Fourreau; les fleurs sont roses
comme dans ce dernier, mais les carpelles sont tous jaunes,
comme dans le Julliana, dont il a aussi les feuilles et le port, ce
qui nous a déterminés à adopter ce dernier nom.
10. Anacampseros aurigerana, Jord. et Fourr. Brev. 1, p. 30.
Habite, en grande quantité, dans la Haute-Garonne, aux envi-
rons de Toulouse; au Touch, Saint-Geniés, etc.
Cette plante est très-commune dans notre région et se dsrthgé
facilement par ses feuilles étalées, ses grandes fleurs purpurines,
ses tiges vertes, toujours ascendantes.
— 167 —
A1. Anacampseros Borderi, Jord. et Fourr. Brev, 1, page 50,
Icon. tab. XCVI.
Très répandue dans la vallée de la Garonne, jusqu'à re
où elle abonde au Picon, devant la Gare.
12. Anacampseros bell, Jord. et Fourr. Brev. I, p. 50, Icon.
tab. XCVIIT.
Très-commun à Saint-Béat, Seint-Aventin, Portillon de Burbe
(Haute-Garonne).
Observations. — Cette plante perd, dans nos jardins, la teinte
rouge vif, qu’offrent les feuilles à l’état sauvage. Il en est de même
du ternata et Cebennensis ; sans cependant devenir complètement
glauques ni vertes, les tiges et la nervure des feuilles conservent
plus longtemps ce caractère. Notre plante n’est peut-être pas exac-
tement la plante des Ardennes ; d’après la figure que nous avons
sous les yeux, le portest bien le même, les fleurs sont cependant
plus purpurines, et notamment les anthères, qui sont un peu pâles,
tirant sur l’orange, tandis que, dans notre plante, elles sont pour-
pre, trés-vif. Ses feuilles sont aussi plus larges, moins profondé-
ment dentées, et plus épaisses. Nous croyons cependant devoir lui
donner le nom énoncé en attendant de nouvelles recherches.
13. Anacampseros repens, Jord. et Fourr., Brev. I, p.31, Icon,
Jord. et Fourr., tab. XCIX,
Habite le massif d’Arbas, sur le calcaire, à Coumovère, Penne-
Nère et Penne-Blanque, à Bagnères-de-Luchon, à Gouron, etc.
Outre ces espèces, qui nous paraissent assez bien déterminées,
nous avons rencontré d’autres formes qui méritent, au même titre
que les précédentes, de constituer des espèces distinctes. Nous
nous bornerons à signaler aujourd’hui les suivantes, que nous
avons longtemps cultivées, nous réservant, pour l'an prochain, de
nouvelles observations.
Anacampseros Silvatica, Nob. Sedum Brunfelsü, Bor. ?
Fleurs roses, en corÿmbe aplati, pédicelles non condensés,
dressés, glauques ; calices verts ; pétales roses, grands, renversés;
étamines à filets pourpre, ainsi que l’anthère, insérés aux trois
quarts inférieurs des pétales ; carpelles grands, roses ; stigmates
roses, divergents ; tiges de deux à trois décimètres, ascendantes,
roses pâle d’un côté, peu rameuses au sommet; feuilles étalées,
arquées, ovales, inégalement dentées au sommet, à partir du milieu
du limbe, sessiles non cordées, atténuées en pétioles courts, glau-
— 168 —
ques en dessus et en dessous, à mérithales espacées, les inférieures
un peu plus grandes, et plus longuement atténuées en pétioles.
Cette plante, avec l’Anacampseros aurigerana, est commune aux
environs de Toulouse, mais au lieu de croître dans les bois humi-
des et suivre le cours des rivières, elle se trouve toujours dans
les bois secs, et les vignes qui les entourent, comme à Bouconne,
Larramette, l’Ardenne et Saint-Simon.
Anacampseros formosa, Nob.
Fleurs en corymbe, très-large et très-long, portant de 15 à 20
rameaux très-condensés, et formant ainsi un immense corymbe
formé de 3 à 4 rameaux principaux’, se subdivise en une
foule d’autres, en nombre indéterminé. Les fleurs compa-
rées aux espèces voisines sont de petite taille, très-nombreuses ;
calice vert, lancéolé, triangulaire; pétales roses au sommet,
blanc mat à la base, étalés, ovales, lancéolés, aigus, concolores
et rouge vineux en dessous ; étamines insérées un peu au-dessus
de la base des pétales, à filets roses; anthères roses, mais tirant
sur l’orangé; carpelles rouges vineux sur le dos, stigmates rouges
aus.
Tiges de 5 à 4 décimètres, couchées, ascendantes, grosses comme
le doigt, vertes ou vert jaunâtre, à mérithalles très-rapprochés,
feuillées également jusqu'au sommet, sessiles excessivement nom-
breuses, glaucescentes ou jaunâtres, ovales, lancéolées, obtuses au
sommet, dentées ; dents très prononcées à partir de la moitié du
limbe, obtuses, atténuées en courts pétioles. Sessiles non en cœur
ni embrassantes.
Cette plante est très-abondante dans le massif d’Arbas, notam-
ment à la grotte de la Bourrusse. Les jeunes sujets ont les premiè-
res feuilles entières. Les boutons sont glauques, très-1mbriqués,
l'A. formosa a un port très-singulier. Ses grosses tiges, le nombre
immense de ses feuilles, et la grandeur considérable du corymbe,
la distinguent de toutes les autres.
Anacampseros angustifolia, Nob.
Fleurs en corymbe, aplati, à rameaux étalés, dressés, courts
fleurs roses, à sépales triangulaires lancéolées ; pétales roses, avec
uue tache blanche à la base, renversés; étamines à filets roses,
anthères purpurines ; carpelles et styles entièrement roses; tiges
dressées ascendantes blanc jaunâtre. Feuilles vertes, glauques, très.
étroites; longuement atténuées en pétioles, lancéolées, dentées;
a. 169 —
dents nombreuses, inégales, l’une courte, l’autre longue, comme
surdentées.
Cette plante fleurit ensjuillet. Elle est commune dans le massif
d’Arbas ; elle a été trouvée à Chein-Dessus (Haute-Garonne), par
M. Desjardins.
Anacampseros pyramidalis, Nob.
Fleurs en corymbes globuleux, peu développés ; rameaux courts,
rougeâtres ; sépales verts, triangulaires ; pétales roses à peine
blanchâtres à la base, étalés ; étamines à filets roses ; anthères pour-
pres ; tiges dressées, ascendantes, un peu roses d’un côté seule-
ment ; feuilles obovales, atténuées en pétioles sessiles non embras-
santes, alternes, assez rapprochées et toutes appliquées contre la
tige, diminuant insensiblement de grandeur, de la base au som-
met, ce qui, avec leur position appliquée, donne à cette espèce une
forme pyramidale, bien caractéristique.
Elle est très-répandue dans les Pyrénées de la Haute-Garonne.
Nous l'avons vue à Cagire, Saint-Gaudens, Bagnères-de-Luchon,
où elle est cependant plus rare; mais sa véritable région paraît
être les basses montagnes.
Anacampseros subpyrenaica, Nob.
Fleurs en corymbe aplati, assez fournies ; rameaux de 5 à &,
alternes, dressés, serrés non étalés ; fleurs de grande taille, roses ;
sépales triangulaires, aigus; pétales roses et blanc mat à la base,
un peu sur les bords et légèrement canaliculés en dessus, plus
päles en dessous ; étamines à filets blancs, ou à peine rosés ; anthè-
res rouge vineux, très-obtuses, insérées sur les tiers inférieurs
des pétales ; carpelles vert jaunâtre, avec une teinte vineuse sur
le dos ; styles roses, mais blancs sous le stigmate ; tiges de 5 à 4
. décimètres, grosses, vert jaunätre, glaucescentes ; feuilles glau-
ques, très rapprochées, étalées, ovales, lancéolées, obtuses, inéga-
lement dentées; dents peu profondes. Toutes les feuilles sont, en
outre, atténuées en pétioles, sessiles non embrassantes, si ce n’est
celles placées à la base des rameaux.
Fleurit un des premiers en juillet et août. Il est très-commun
sur les bords du Touch et dans les parties humides du vallon de
Pressac, près de Saint-Geniës.
On donne dans le pays Toulousain le nom d'herbe de Notre-
Dame, à tous les Anacampseros à fleurs roses et à feuilles glau-
ques.
— 170 —
Polentilla verna auct., Plerum.
Dans le Bulletin de la société, nous avons signalé trois formes
remarquables que présente cette espèce Linnéenne dans les envi-
rons de Toulouse. Les Polentilla australis, Nob., agrivagua,
Nob., et æerophila, Jord., qu’on peut nommer aussi Dynamidium
australis, agrivagum et æxerophilum, si à l'exemple du savant
botaniste de Lyon on adopte ce dernier genre. Ces trois espèces
appartiennent au bassin sous-pyrénéen. L’australis marque sa
limite vers le midi, où il devient très-commun, comme M. Bail-
let l’a constaté à Segala (Aude); le Chaubardiana, plante de
l'extrême Sud-Ouest, ne croit pas dans le pays toulousain, il cesse
à Agen. Le xerophilum et l’agrivagum sont au contraire très-com-
muns dans les bassins de la Garonne et du Tarn. On peut les dis-
tinguer très-aisément : le P. agrivagum a les feuilles inférieures
à 5 folioles aiguës, le P. æerophila a 7 folioles obtuses ; le pre-
mier vient dans les champs et les pelouses herbeuses et fleurit en
avril, tandis que le second préfère les bois et les bruyères élevés
et fleurit quinze jours après.
Pour compléter ces renseignements, nous avons cherché depuis
notre première publication si ces mêmes espèces remontent
les vallées Pyrénéennes ou si, dans ces localités spéciales,
elles sont représentées par d’autres. Il résulte de nos nouveaux
travaux que le æerophila se trouve encore dans les bois de Mira-
mont et du Puy à St-Gaudens. Mais dès qu'on monte vers Cagire,
Paloumère, Pic-de-Gard et Luchon, 1l est remplacé par une autre
espèce, très-répandue dans toute la région alpine inférieure, et
que nous nommons Dynamidium montanum. Il se distingue des
autres par ses feuiiles, très petites, arrondies, à 5 folioles, se
recouvrant par les bords, à dents aiguës, mucronées par un long.
poil; par ses tiges grêles, filiformes, très-allongées, très-peu héris-
sées ; ‘par ses petites fleurs, à pétales en cœur, avec une tache
orangée à Ja base; 1l fleurit en juin. Ainsi que nous l’avons dit,
cette plante est très-commune dans toutes les Pyrénées. Elle
monte jusqu’au sommet de Cagire, à Super-Bagnères, Mail du
Cric, elc. ET
Au-dessus de la région Alpine, on trouve une autre espèce qui
se distingue de cette dernière, par des racines peu profondes, don-
nant destiges vertes assez grosses, glabrescentes et peu feuillées.
Celle-ci a 5 folioles, à dents obtuses, à mérithales, très-allongées,
— 171 —
les feuilles supérieures, à pétioles très-courts, mais avec de grandes
stipules qui la caractérisent. Les fleurs sont très-grandes, à péta-
les, se recouvrant par les bords. Elle est très- répandue à Super-
Bagnères, près Luchon, où elle fleurit en juillet. Cette espèce
pourrait bien être le Polentilla filiformis de Lapeyrouse, mais non
celui de Villar ou bien encore le P. salisburgensis des auteurs
Pyrénéens. Nous lui donnons le nom de Dynamidium stipula-
ceum, nom qui rappelle un de ces caractères importants.
Nous recommandons à nos confrères ce groupe de Potentilles,
qui, mieux étudié, pourra encore fournir quelque forme remar-
quable.
Genre ROSA, Auct.
Le genre Rosa est, sans contredit, malgré les nombreux travaux
dont il a été l’objet depuis ces dernières années, l’un des plus diffi-
ciles de la Flore française. Abandonné par Linné et ses disciples,
ce ne fut qu'en 1813, que Decandole le divisa en deux groupes,
prenant pour base les styles libres ou soudés. Depuis, on a proposé
différentes manières de distinguer les espèces de ce genre, selon
qu'on prend pour base tel ou tel caractère. On arrive à faire des
groupes qu'on a fractionnés en espèces et en variétés. Malheu-
reusement, dans ce système, tel caractère spécifique dans une
classification n’a aucune signification dans une autre; il résulte
de ce système des doutes et même souvent de la confusion, ce
qui a fait dire que, malgré vingt classifications proposées, 1l y a
encore beaucoup à faire, pour terminer l'étude du genre Rosa
et en déterminer surtout les espèces, les variétés et les hybrides.
Il semble a priori, qu'en bornant ses recherches à une contrée
où un espace limité de terrain, comme le pays dont Toulouse est
le centre, on puisse éviter toutes ces difficultés, ou au moins une
partie. Cela n’est pas possible. Il faut, au contraire, connaître les
travaux qui se sont faits ailleurs pour se fixer sûrement sur les
quelques espèces, qui habitent nos haies et nos bois. Aussi, dès
1850, avec M. Arrondeau, avons-nous cherché à déterminer les
rosiers de nos environs. M. Arrondeau, à cette époque, s'inspirant
de la Flore du centre de la France et des conseils de son illustre
auteur, publia ses recherches sous le titre de Monographie du genre
Rosa, des environs de Toulouse. Ce travail , avec quelques addi-
tions et corrections, fut réimprimé dans la Flore toulousaine
RL ue
du même aufeur. Presque en même temps, notre savant professeur
publia à son tour la Flore analytique de Toulouse. Dans ce
travail , supplément de la Flore du bassin sous-pyrénéen, M.
Noulet, qui avait aussi beaucoup étudié les Rosa de nos environs,
signala quelques espèces nouvelles, et corrigea même quelques
déterminations hasardées.
Depuis cette époque, on a beaucoup étudié les Rosa, en France,
en Suisse,en Belgique et en Angleterre, mais personne n’a cherché
dans notre pays à élucider nos espèces litigieuses. Je dis persoune,
quoique je sache, d’une manière certaine, que mon ami Baillet de
l'Ecole vétérinaire de Tou:ouse, avait entrepris cette étude, qu’il
fut bientôt obligé d’abandouner en changeant de résidence. Ayant
été remplacé par des professeurs de botanique ne faisant pas de
phytographie, ces messieurs négligèrent les essais de culture déjà
faits dans le jardin de l'établissement qui furent ainsi perdus pour
la Flore toulousaine.
Resté seul, j'ai dû reprendre ces travaux et poursuivre les
recherches commencées. Je me suis mis en rapport avec MM. Dese-
glise et Crépin, afin de concourir de mon mieux au travail eom-
mencé, c'est-à-dire, à un ouvrage d'ensemble sur ce genre trop
délaissé dans notre pays et dans nos Pyrénées centrales.
J'espère donner un jour un catalogue raisonné de ce genre ; en.
attendant, je crois devoir appeler lPattention de nos confrères sur
quelques espèces nouvelles, adoptées provisoirement par M: Crépin,
qui, avec M. Deseglise, me paraissent être les botanistes les plus
compétents pour continuer l'étude de ce genre critique.
4e Rosa Clotildea, Nob.
Le Rosa Clotildea est peu répandu dans nos environs ; il est
cependant commun à Bouconne, du côté de Brax, prés la métairie
dite du Bégué. Il appartient à la section stylosæ par ses styles un
peu en colonnes agglutinés. Les fleurs sont grandes et roses ; les
feuilles grandes, vertes en dessus et glauques en dessous avec des
glandes sur les pétioles et les nervures. Le fruit est bleuâtre avant
la maturité, puis rouge globuleux; les sépales tombent quand
le fruit devient rouge.
J'incline à penser que cette plante est le R, suavis de M, Arron-
deau, mais non le suavis Willd, comme le croit d’ailleurs
M. Noulet.
Men
20 Rosa Tolosana, Nob.
Cette Rose est très abondante dans nos bois : à Saint-Geniés,
Montrabe, Larramet et ailleurs. Elle est indiquée dans nos Flores,
sous le nom de Rosa Junzilliana, mais ce n’est ni la plante de
Besser ni celle publiée par M. Déseglise sous ce nom. Elle est voi-
sine du R. Pujeti, Bor. et du Terebenthinacea; c’est un rosier de
pétite taille en buisson, d’une odeur suave; non-seulement la
fleur, mais toute la plante a une odeur résineuse, sentant la
rose. Les fleurs sont rose pâle, à pétales très grands ; sépales très
pinnatifides et glanduleux ; pédoncules glanduleux, couverts de
soies raides, ou de piquants fins, très nombreux ; les feuilles sont
vertes en dessus, päles en dessous, très glanduleuses sur les ner-
vures principales et secondaires, bidentées très glanduleuses, odo-
rantes ; aiguillons fins, droits, ou un peu erochus.
30 Rosa Ladanifera, Nob.
Le Rosa Ladanifera est très répandu à Balma, au bois de Las-
serre, et à Saint-Jean-de-l’Union. Il semble appartenir à la section
Tomentosa ; il a les fleurs roses très petites ; les sépales glanduleux
et chargés de soles raides, ainsi que le tube du calice ; ses pétales
sont très petits, échancrés fortement au sommet ; les pédoncules
sont chargés de soies glanduleuses ; les feuilles à folioles petites ,
obovales, très atténuées à la base, sont dentées ; à dents surden-
tées, très glanduleuses. Arbrisseau de petite taille à aiguillons
crochus, le calice tombe avant la maturité du fruit; celui-ci est
rouge orangé, gros, ovoide, et a souvent les soies raides du tube
du ealice qui ne sont pas tomhées à la maturité.
Ce Rosier mérite d’êlre encore étudié, ainsi qu’une forme que
nous supposons hybride et qui croît en société avec lui. Outre ces
trois Rosiers, très intéressants pour notre Flore, nous signalerons
le Rosa mollissima, de Fries, qui a été trouvé à {Bouconne, du
côté de Brax, et à Larramette. à
Enfin, parmi les nombreux types que j'ai adressés à M. Crépin,
qui à bien voulu me fournir de très-utiles renseignements, il a
eru reconnaitre dans le Rosier récolté, avec le docteur Jeanbernat ,
au bois de Fonsorbes, le Rosa Boreythiana Bess qui n’a pas encore
été signalé en France, et qui diffère du R. Collina, par ses styles
RO EPL RS SI ES LES RE M PE RSI EE
— 174 —
moins velus et la présence sur les rameaux flonfères de soiès
glanduleuses.
Encore : Rosa Gaudini, Pujet, haie devant la gare de Manne
(Haute Garonne).
Rosa permixta Deseg|., au bois de Larramet.
— trichoneura, Ripart, A et
— senticosa, Desegl]., — se
— cladoleia, Ripart, — ee
— dumalis, Desegl., bois de Pressac.
— inodora, Fries, bois de Balma.
— dumetorum, Desegl., en montant à Cagire.
Ieracleum, L. et auct.
Sous le nom d’Heracleum spondylium L. et Panarces L., les
botanistes confondent, depuis longtemps, une foule de types que
les savantes et judicieuses observations de M. Jordan ont pour but
de séparer (Jord , in. Billot, archives, pag. 14), ce savant explora-
teur de la flore européenne a distingué dans ce groupe plusieurs
espèces, qu’il décrit avec soin et qu’il propose comme autant de
types distincts.
Dès la publication de ces recherches, préoccupé comme lui des
différences notables que les espèces de ce genre présentent dans
notre région, nous avons cherché à mettre en lumière les diffé-
rences que nous avons à notre tour observées. Comme M. Jordan
nous avons constaté plusieurs types bien tranchés ; mais nous ne
pouvons partager son avis ni celui de notre ami M. Boreau, pour
quelques espèces comme les H. stenophyllum J., et angustanum
Bor., qui ne sont pour nous que des variétés. À notre avis,
toutes ces plantes présentent, quelquefois dans les mêmes lieux,
une forme à feuilles plus profondément découpées, à lobes plus
étroits, plus allongés, à dentelure plus fine, plus aiguë. Ainsi,
l’'Heracleum panaces L., qui est à mon sens le même que l’'H
montanum Gaud., Æ. œstivum Jord., a une forme à feuilles étroi-
tes, représentée par l’H. angustifolium Vill., H. stenophyllumJord.,
l'A. occidentale Boreau, a une variété semblable, l’H. angustanum
Bor., que j'ai eu la satisfaction de récolter avec son auteur aux
sources de l'Yonne en Morvan ; l’H. pyrenaicum Lamk., a aussi
sa forme étroite, qui est l’H. setosum Lap., elles viennent toutes
deux ensemble dans nos Pyrénées ; l'H. pyrenaicum offre encore
dans ces mêmes montagnes une variété que l’on peut dire opposée,
— 175 —
c'est-à-dire à immenses feuilles, à lobes profonds, mais dont les
bords se recouvrent un peu de manière à ne pas laisser de vides
entre eux; c’est alors l’Heracleum amplifolium Lap. Pareille chose
arrive aussi à l’œstivum, à l'occidentale, comme nous l’avons vu au
Morvan et dans le Jura, à la Dôle, dans les lieux toujours humides.
Nous avons vu aussi l’H. Lecoqü, Gren. et God., présenter trois
formes pareilles aux précédentes.
Toutelois, nous faisons des réserves pour deux espèces que nous
avons dans nos cultures et qui devront, à notre avis, être distin-
ouées : la première a été trouvée à Conques (Aude), par mon ami
Baullet ; et La seconde à Léguevin, par M. Filhol et par moi. Gelle-
ci Se rapproche un peu du Lecoqii, mais elle est encore dans des
localités trop limitées pour porter sur elle un jugement définitif.
Nous en parlerons plus tard, dans nos prochains travaux.
Galium silvivagum, Baïill. et Timbal, Mem. acad., Toul.,
SeniNE vol. V. |
M. Thiëlens, zélé botaniste de Belgique, a écrit que notre
G. silvivagum toulousain lui paraissait représenter une simple
forme du G. commutatum Jord. Nous ne pouvons accepter eette
détermination, à moins que M. Thiélens ne réunisse toutes ces for-
mes sous le nom de Silvestre Poll., ou mieux G. montanum Vill.,
comme on le faisait avant le dénombrement proposé par M. Jordan
et par mol.
Le G. silvivagum a les feuilles bordées de cils raides, qui ren-
dent la plante très-rude au toucher ; les inférieures , chargées de
papilles fines, des pédoncules longs à trois fleurs ; le G. commuta-
tum est glabre dans toutes ses parties. Les feuilles sont plus lar-
ges, douces au toucher, sans papilles, le pédoncule plus court et
plus pauciflores. Ces caractères rapprochent beaucoup le commuta-
tum du G. læve. Thuill. Je crains que M. Thièlens ne se soit pas
rendu un compte bien exact de ce petit groupe de Galium papil-
leuæ et qu’il ne les ait confondus avec ceux du groupe montanum
et silvestre. Ce qui semble le prouver, c’est que ce botaniste, dans
le Hickxia, herbier excicata qu’il publie avec M. Devos, a donné
le nom de G. nitidulum, Thuill. au G. commutatum, Jord.
Le nitidulum est une forme à feuilles et tiges inférieures pubes-
centes du G. silvestre Poll., tandis qu’il donne à ce même G. silves-
tre Poll, le nom de G@. saxalile, Koch (G. hercynicum Weigg.),
qui est certainement une plante différente, et à l'abri de toute
critique.
Je profite de cette occasion pour dire un mot du Galium supi-
num Lamk. signalé par M. Boreau, à Chdâteau-Chinon, c’est une
des espèces les plus rares de la Flore française, Le G. supinum
marque le passage entre les Galium du groupe papilleux et mon-
tanum , il n’a pas de papilles comme le premier, mais il est cespi-
teux, il thale un peu comme eux. Les feuilles sont chargés d’as-
pérités moins longues et moins rudes. Le vrai montanum a les
tiges réunies et terminées par une racine qui permet de l’arracher
facilement ; tandis que, pour le G. supinum, qui est cespiteux, il
faut fouiller profondément le sol à cause de ces racines ram-
pantes.
Le Galium supinum, quoique plus voisin du groupe Montanum,
par Fabsence de papilles et de poils à la base des feuilles, se rap-
proche par ses pedicelles courts, ses fleurs petites et son feuillage
jaunâtre de notre G. chlorophyllum. Mais ce dernier, outre ses
papilles et ses feuilles plus rudes, les a plus courtes et plus larges,
il est en outre plus cespiteux encore et à fleurs plus petites et plus
ramassées.
M. Boreau et moi l'avons cueilli sur les ruines du château, à
Château-Chinon (Nièvre), en 41870.
Inula dubia, Pourr. mem. Acad. Toul. sér. À, tom. 5.
J'avais, dans une note sur les synonymes de Pourret, rapporté,
en synonyme, cette plante à l’Inula montana, L. Me fondant, à
défaut de description suffisante, sur ce que cet Inula est très-
commun dans la Gaule Narbonnaise, ayant fait de nouvelles
recherches, je me suis convaincu que l’Inula helenioïdes Dec. est
aussi, si ce n’est plus, abondant dans ces mêmes lieux. 1l vient à
Conques et dans tout le Minervois ; localités que Pourret a parcou-
rues, puisqu'il y signale plusieurs plantes, notamment l’Althea
narbonnensis, que nous y avons retrouvée. Je crois aujourd’hui
que c’est l’Inula heleinoïdes, que Pourret a voulu indiquer dans
son Chloris narbonnensis; ce nom étant plus ancien que celui
de Decandolle, doit avoir la priorité. Celui de Dubia lui avait été
donné sans doute, par Pourret, pour marquer son hésitation à le
distinguer de l’I. Helenium, L., et Oculus christi, Jacq. entre
lesquels on peut le placer. Lapeyrouse (Hist. abr., FE. pyr., p.
522, sup. page 157) n'hésite pas mêine, après les justes observa-
— 177 —
tions de Decandolle, à nommer ainsi l’Helenioides ; mais il ne
parle pas du dubia Pourret, qui, d’après les localités et le rap-
prochement qu'il fait de l’Oculus christi de Jacq., dont l’un et
l’autre connaissaient la figure, doit être la plante de Decandolle
et non le Montana, comme je l’avais dit d’abord.
J'ajoute que mon ami M. Grenier m’a prévenu de mon erreur,
en m’assurant qu'il avait vu dans l’herbier Pourret, à Paris, l’Inula
helenioïdes sous le nom d’Inula dubia Pourr. Cest donc au
savant botaniste de Besançon que revient la découverte de ce syno-
nyme et la restitution qu’on devra en faire au botaniste de la Gaule
Narbonnaise.
L'Inula dubia ne se trouve pas sur la liste des plantes de Pourret,
que me donna autrefois le docteur Bubani, et qu’il avait étudiée
à Madrid, dans l’herbier Salvador. Cette liste m'a beaucoup servi
dans mes recherches sur mes synonymes du Chloris Narbonensis.
Bellis perennis, L. auct.
Le Bellis de nos Flores appartient incontestablement au Bellis
hybrida Tenore. Bellis minor hortensis. Fusch. hist. t. 146. Nous
avons aussi le Bellis, auquel les auteurs italiens conservent le
nom de perennis. Bellis minor Silvestre. Fusch. hist. t. 447.
Celui-ci est plus rare et semble appartenir exclusivement aux
prairies sèches. Ces faits constatés, il reste à savoir s’il y a deux
espèces ou bien un seul type constituant deux'variétés dues aux
* influences chimiques et physiques du sol. Si nous consultons nos
auteurs Allemands, représentés par Koch, synopsis, éd. 2, p. 387
et les botanistes français, tels que : Decandolle, Duby, Grenier
et Godron, il n’y en a qu’une seule ; car ils ne font pas mention
du Bellis hybrida de Tenore. Duby cite la figure 677 des illustra-
tions de Lamk, qui nous donne celle du Bellis perennis ; il ne se
doutait pas qu'on püt établir deux espèces sur la plante qu’il
foulait tous les jours sous ses pieds.
MM. Grenier et Godron, qui citent encore cette même figure
de Lamark, partagent l'opinion de Duby et perpétuent ainsi Ja
confusion qui existe dans l’opinion des auteurs, sur le Bellis
perennis. Si on consulte les botanistes italiens, le doute cesse.
Tenore d’abord et Gussonne ensuite dans Îe Son F1. sicula,
quyrage très-répandu, n'hésitent pas à reconnaitre deux espèces
que ce dernier auteur caractérise ainsi :
B. Hybrida. Radice fibrosa caulibus ascendentibus diffusisque,
12
RTE
ramosis, foliosis, pedonculis elongatis, foliis spatulato-obovatis,
crenato dentatis villoso-hirsutis, anthodii foliolis hirsuto obtus-
iusculis. |
Et il ajoute : Habitus subsequens aqua prϾter caulem ramo-
sum, et foliosum recedit ; habita robustiore, et pubescentia majore
omnium partium.
Ü cite encore la figure 146 de Fuschius, comme représentant le
B. hybrida, Ten.
B. perennis, L., sp., pl. 1248, Guss., syn. F1. sicula 2, p. 507.
Radice sub repente, scaponudo-unifloro foliis spathulato-obovatis
crenato-dentatis glabris pubescentibusque, anthodii foliolis hir-
suto ciliatis obtusis.
Gussonne, comme Duby, et MM. Grenier et Godron, citent la
figure 146, «les tlustrationes, de Lamark, dont nous avons déjà
parlé, et il ajoute comme caractère différentiel de la précédente :
Folia, læte viridia crassiuscula, obtusa, aliquando integra, supra
venosa subtus absolete nervosa ; ligulæ sæpe subtus rubentis ; scapi
foliis subæqualis, non duplo triploque longiores ut in Bellis
hybrida. |
D'après Gussonne, le Bellis perennis fleurit en mai et novem-
bre, et l’hybrida en janvier et juin. Le Bellis perennis vient in
pascuis apricis montosis, raro in demissis ; l’Hybrida, au contraire,
in pascuis herbosis apricis et ad vias in submaritimis, passim in.
Sicilia.
En présence de ces faits contradictoires, nous avons longtemps
cherché à étudier cette question, ayant journellement sous les
yeux des Bellis qui représentent chacune de ces formes. Nous
nous demandons si, réellement, il fallait établir dans le Bellis
perennis des auteurs, deux espèces ou deux variétés.
Devant l’autorité de Gussonne et de Tenore, nous avons long-
temps hésité. Mais examinant avec soin les caractères des plantes,
que M. de Notaris nous a communiquées d'Italie, après avoir étudié
les figures citées de Lamark et de Fuschius, et avoir soumis ces
plantes à la culture, nous pouvons affirmer qu’il n’y a qu’une seule
et même espèce.
Pour arriver à une démonstration complète, nous n’aurions qu’à
discuter les diagnoses de Gussonne, d’où les différences peuvent
très-bien s'expliquer par l’action combinée des influences physi-
ques du sol. Mais les figures citées par cet auteur prouvent, d’une
— 179 —
manière évidente, que ces deux plantes doivent être réunies. Nous
avons dit que la figure 446 de Lamark convient aux deux espèces,
mieux au Bellis perennis qu'à l’hybrida qui serait la plante
luxuriante et cultivée; mais les deux figures de Fuschius
citées comme très-exactes, l’une fig. 447 représente la plante sau-
vage Bellis minor silvestris, et l’autre 146 Bellis minor hortensis,
n’est autre que la plante luxuriante et cultivée, telle qu’on la
trouve encore dans nos parterres, plus ou moins simple ou doublée
par la transformation des fleurs sexuées en fleurs neutres ligu-
lées.
Il n’y a donc, à mon avis, qu’une seule espèce sauvage et une
autre luxuriante et cultivée, et le Bellis hybrida Tenore, nom
déjà tout-à-fait impropre, doit disparaître. Opinion déjà formulée
par tous les floristes français et allemands, par le silence qu'ils ont
tous gardé sur cette espèce litigieuse.
Salvia pratensis et verbenaca, Auct.
Depuis la publication de notre travail sur les Salvia de nos en-
virons, nous n’avons cessé d'étudier, dans nos différentes courses,
les diverses formes et variétés que nous présentent ces plantes, con-
sidérées par beaucoup de botanistes comme étant le résultat du
polymorphisme, tandis que MM. Jordan et Fourreau pensent que
ce sont des espèces parfaitement tranchées.
D'après nos nouvelles recherches; nous sommes obligés de
déclarer que nous persistons, dans la manière de déterminer nos
Salvia indigènes. Il ne nous est pas possible de considérer les Galli-
tricum rosulatum, J.et F., G. virgatum, J. et F., G. arvale, J. et
E., G. ptychophyllum, J. et F., G stereocolon, J. et F., G. ru-
bellum, J. et F., comme de bonnes espèces. Nous trouvons toutes
ces formes à Toulouse, mélangées avec leur véritable type, les
Gallitricum pallidiflorum, Saint-Amans, G. mixtum, Timb.,
Verbenacum, L. G., Horminoïdes, Pourr., G.clandestinum, L. Elles
fleurissent en même temps, et eroissent souvent dans les mêmes
lieux. Ces prétendues espèces ne sont, pour nous, que des varia-
_ tions parallèles des types que nous avons indiqués dans notre tra-
vail ou des formes aduliérines résultant de leur croisement.
Orchis fallaci,-Laxiflora, Nob.; O. alata Fleury ex parte.
Cet orchis hybride a été trouvé en juin, au milieu de notre
rs
A
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180 7e.
O. fallax et laxiflora, par MM. Peyre et Chalande fils, à Palefi-
cat, quartier situé entre Lalande et Croix-Daurade. |
Dès 4854, dans notre mémoire ayant pour titre hybrides d’Or-
chis, page 12, nous disions : « dans le genre Orchis, » un pédi-
» celle visqueux, attache au caudicule les masses polliniques. Or,
» quand ces derniers sortent de l’anthère, ce qui a lieu vers le
» mois de juin, l'atmosphère est sillonnée par une foule d'insectes,
» qui, attirés par l’odeur particulière du pollen sectile, viennent
» sur les fleurs arracher quelques tétrades polliniques, qu'ils por-
» tent ensuite dans les fleurs des espèces voisines. »
Depuis que nous avons écrit ces lignes, M." Darwin à publié un
savant travail sur la participation des insectes dans la fécondation
des Orchidées. Dans cet ouvrage, les faits sont parfaitement expo-
sés, et le phénomène très-exactement décrit. Mais dans la préface
de son livre, M. Darwin signale comme ayant observé l’interven-
tion des insectes dans la fécondation de ces plantes, Spenner en
1793, Hocker et R. Brown en 1854, À la même époque, nous
faisions les mêmes observations. M. Darwin, qui n’a jamais connu
notre travail, ne pouvait nous citer. Nous ne nous en plaignons
pas, mais nous réclamons notre petite part de cette décou-
verte, Car, à celte époque, nous ignorions les observations de
Spenner comme celles de Brown et de Hocker , puisque ces
dernières avaient lieu en même temps que les nôtres.
Note sur les Festuca du département de la Haute-Garonne.
Festuca ovina, L. — Nous n’avons jamais pu rencontrer dans
notre département le Festuca ovina type, ni le Festuca tenuifolia
de Sibth. La plante que nous avions rapportée à cette espèce paraît
devoir, mieux étudiée aujourd’hui, rentrer dans le Festuca durius-
cula, L., variété à feuilles radicales, courtes et à panicules appau-
vries des lieux secs. Elle vient ici dans les bois du bassin sous-
pyrénéen jusqu’à la forêt de Buzet.
Festuca duriuscula, L. — Abonde partout avec les variations
glabres, hérissées, à feuilles longues ou courtes. Cette plante pré-
sente aussi une variété à épillets presque sessiles et condensés, et
une forme glauque qui est, pour nous, le Festuca glauca de
Schrader et non celui de Lamark, qui a les feuilles de la tige
aplaties et constitue une espèce, malgré la savante autorité de
— 181 —
M. Duval Jouve, qui ne voit dans le glauca Lamark qu’une variété
du duriuscula L.
Festuca glauca Lamark, non Schrader. — Cette plante est une
espèce montagnarde, commune dans les Pyrénées de Luchon, d’où
elle descend jusqu’à Saint-Bertrand-de-Comminges, où l’on trouve
la variété hirsuta. Elle vient ailleurs dans la chaîne pyrénéenne,
sans arriver dans la plaine. La plante des Pyrénées est semblable
à celle d'Auvergne, qui est le type Lamark,
Festuca rubra, L. — Très-répandu aussi avec ses variétés, à
feuilles courtes ou longues, à panicules glabres ou velues; mais je ne
puis y joindre le F. heterophylla, Lamark, qui me paraît distinct,
et qui, à son tour, nous présente les mêmes variations que le
duriuscula et rubra linnéens.
_ Le type vient dans les bois. Il a iés feuilles molles, vert-
sombre, la taille élevés, la panicule grande et étalée, velue ou
glabre, verte ou colorée en violet. La (opté qui croît sur les som-
mets élevés des Pyrénées est, au contraire, à feuilles inférieures
rudes, d’un vert clair, de taille toujours élevée, à fleurs en pani-
cules plus étroites, blanc-jaunâtre, à épillets glabres ‘ou velus,
outre l’heterophylla qui, à notre avis, constitue une espèce sépa-
rée. Nous pensons qu’on a tort de le réunir au F. nigrescens
Lamark. Cette plante, telle qu'elle se présente dans les
Pyrénées, ne peut être assimilée aux grandes formes que nous
_avons déjà signalées, et que nous avons rencontrées aussi dans le
nord de la France.
Le F. nigrescens Lamark est toujours de petite taille, les feuilles
inférieures sont enroulées, douces au toucher, fines. Celles de la
tige sont aplaties, bien plus courtes et plus larges que celles que
nous offre l’heterophylla; il vient malgré cela dans les Pyrénées,
aux lieux les plus humides, même au bord des lacs, comme à
Spingo. Il a les épillets rouge-pourpre, et quelquefois verts ou
Jaunâtres comme les autres Festuca.
Le Festuca rubra, qu’on distingue toujours à sa souche un peu
rampante, varie dans nos contrées, à grande taille et feuilles lon-
gues (F. fallax, Thuill.), ou à petite et à feuilles courtes et larges
(F. rubra, Duval Jouve.)
… Festuca ochroleuca, Nob. — Cette espèce est: voisine aussi de
l’heterophylla. Nous avons vu cette année à Saint-Béat, la forme à
— 182 —
épillets hérissés, avec tous les caractères du type que nous avons
écrit légèrement pubescens.
Festuca varia, Hœnke.
Le Festuca varia, Hœnke , ne peut se réunir au Festuca
eskia, comme le veulent nos auteurs, parce qu’il a les feuilles
vertes, courtes, fines et molles, tandis que le Festuca eskia
présente des feuilles grosses, raides, glauques et jonciformes ;
ces deux espèces n'ont pas le même mode de végétation. Le
varia vient en tapis, serré, il donne des tiges fleuries «et non
fleuries, et forme des espèces de nappes qui couvrent de grands
espaces de rochers. Le Festuca eskia croit aussi en grandes
touffes isolées, mais elles n’ont ni la forme, ni l’aspect, ni l’éten-
due des premières; chacune d’elles, d’ailleurs, offre les variations
parallèles signalées par M. Duval Jouve dans la coloration de la
panicule. Outre ces deux plantes, nous avons encore dans les
Pyrénées le Festuca flavescens, Bellardi, qui est aussi une espèce
distincte des deux premières. |
Festuca cagiriensis, Nob. — Nous ne reviendrons pas sur les
caractères que nous avons assignés à celte espèce remarquable.
Nous dirons seulement que la culture ne les a pas changés. Toute-
fois, nous ajouterons que les feuilles ont pris, dans notre jardin,
une couleur bleue glauque, plus prononcée que celle qu’elle pré-
sente au sommet de Cagire.
Festusa dura, Dec. et Auct. Nous donnons provisoirement ce
nom à une espèce qui n’est pas exactement la plante de Decandolle
ni le Festuca arduennensis de Lejeune, que l’on réunit à cette
dernière. Notre plante est abondante dans la région sous-alpine,
et monte quelquefois plus haut, comme au port de Vénasque, où
elle croit en société du Festuca Halleri, AI.
Dans le second groupe, nous avons dans notre département le
Festuca spadicea, L., qui vient dans la région alpine inférieure,
tandis que dans la plaine nous trouvons, non dans les prairies mais
dans les bois, le F. consobrina, Nob., que nous avons décrit l’an-
née dernière. Ce F, consobrina est certainement le F. spectabilis
de M. Godron et non celui de Jan, comme nous en avions le.
soupçon précédemment. Aujourd'hui, d’après les échantillons de
Fonfroide que nous a communiquésM. Duval Jouve, nous en avons
acquis la certitude. Nous ajouterons que, d’après ce savant agrosto-
graphe, notre consobrina serait une forme méridionale ou forme
— 183 —
de la plaine du F. spadicea. Nous recommandons l’étude de cette
espèce aux botanistes, qui pourront décider cette question.
Nos Pyrénées, depuis Cagire jusqu’à Esquierry , nous donnent
en quantité le F. silvatica, Vil., qui a toujours la panicule verte
et glabre , et n'offre pas comme les autres des variations pubes-
centes jaunes ou violettes. Elle n’a pas non plus les feuilles lon-
gues ou courtes. Aussi, ne figure-t-elle pas dans les espèces à varia-
tions parallèles, proposées par M. Duval Jouve. (Bull. soc. bot.,
Franc, 1865.)
Dans nos plaines et nos prairies, nous avons le F. pratensis
qui présente deux formes : l’une grêle et petite, l’autre grande et
Juxuriante, selon la nature physique ou chimique du sol. Enfin,
nous avons encore le F. arundinacea , mais la forme interrupta.
Ce qui semblerait prouver que ce Festuca de Desfontaines est peul-
être une espèce, c’est qu’il ne présente pas de retour au type, et
que l’on ne trouve jamais la forme décrite par MM. Grenier et
Godron, que nous avons récolté à Pontarlier, aux bords du Doubs,
avec M. Grenier.
Dans ce groupe, nous devons mentionner une autre forme qui a
été trouvée au sommet de Cagire, et qui, selon nous, doit consti-
tuer un groupe très-curieux. J'en avais déjà dit un mot dans mon
précis de l’an passé.
Festuca Bartherei, Nob. Paniculegrande, allongée, étalée, pen-
dant l’anthèse ; rameaux inégaux, rudes, hérissés, aplatis, striés ;
les inférieurs allongés, étalés, puis d’un seul côté, les supérieurs
plus courts. Epillets de 4 à 5 fleurs, lancéolés, très-glauques et
même d'un blane mat. Glumes inégales, lancéolées, sans nervures
visibles, blanchâtres, scarieuses aux bords, un peu verdâtres sur
le dos ; glumelles plus grandes, l’inférieure concolore, termi-
née par une arête plus courte que la glumelle, dentée, les dents
se prolongent même sur le dos de la glumelle à peu près à moitié, :
la supérieure elliptique au centre, ciliée et verte aux bords.
Feuilles vert-jaunâtre, larges et planes, mais se repliant en deux
avec la sécheresse ou la dessication, et offrant alors la forme d’un
ruban ; face inférieure de la feuille, glabre et lisse, mais la supé-
rieure est hérissée de poils rudes au toucher, très-longs ; atteignant
toutes la panicule, celles de la tige de même forme, la dernière
enveloppe la base de la panicule.
Souche cæspiteuse formant de grands gazons, avec des tiges
fat
floriféres de 2 à 4 décimètres, et d’autres sans panicules, hérissés
à la base, aveo un nœud noir vers le tiers inférieur.
Ce Festuca est très-remarquable. Il doit être placé par ses feuil-
les aplaties dans la section Schenodorus, et cependant sa panicule,
quoique plus grande, semble le porter vers le véritable Festuca,
rubra et heterophyllia, etc. |
Il est parfaitement distinct de toutes les espèces de ce groupe,
par tous les caractères que nous avons cités, par son port, etc. Ses
feuilles surtout sont caractéristiques par leur largeur, relativement
à la plante et aux autres Festuca des autres groupes. Elles sont rudes
à la surface par des poils. Par un temps sec, elles se plient en deux,
mais avec la fraicheur et la rosée, elles s'ouvrent et sont larges et
aplaties en les desséchant et en herbier ; il est impossible de les
conserver ouvertes ; aussi sont-elles lisses au toucher et non rudes,
comme quand elles sont vertes. Il faut tenir compte de cette obser-
vation, si l’on étudie cette plante en herbier.
Elle vient avec le F, cagiriensis, le varia et une autre forme du
groupe heterophylla, au sommet de Cagire, en allant vers la Croix.
Elle a été distinguée pour la première fois par M. Barthère, habile
horticulteur de notre ville, qui, en m'accompagnant à Cagire,
me fit remarquer les carartères qui distinguent cette plante de ses
congénères, qui croissent dans ces lieux si fertiles en riches pâtu-
rages.
PLANTES RARES OU NOUVELLES POUR LA FLORE DE LA HAUTE-GARONNE.
Sisymbrium sophia, L., à Cornebarrieu, Peyre et Chalande fils,
mai,
Diplotaxis viminea, L., à la Colonne, dans les pépinières, dé-
couverte par M. Desjardins.
Cardamine sylvatica, Link. et Hoffman. — Nous avons dit dans
le précis de l’année dernière que nous n’avions pas vu cette plante
dans le bassin sous-pyrénéen. Ce printemps, plus heureux, nous
l'avons récoltée à Saint-Geniés, dans le vallon de Pressac, localité
citée par M. Noulet. Nous l'avons vue aussi en très-grande abon-
dance dans une course faite par la société à Pinsaguel et à Lacroix-
Falgarde.
Cardamine monticola, Nob., est très-commun dans toutes les
prairies des environs de Luchon, où il est en pleine floraison au
15 mai.
— 185 —
Viola multicaulis, Jord. — Vallon de Pech-David, découvert par
M. Chalande fils.
Viola canina var. Lucorum Rech. — Bois de Fronton, près de
Grisolles, mai, découvert par MM. Peyre et E. Timbal-Lagrave.
Gypsophyla repens des auteurs Pyrénéens , est la même
plante que le Gypsophyla erecta de Jordan et Fourreau, qui divi-
sent le Gypsophyla repens des auteurs en plusieurs espèces.
Dianthus Sequieri, Chaix ? a été trouvé au mois de juillet, au
Picon-de-Palomère, en allant à Milhas, par M. Jeanbernat ct
Labéda.
Cerastium pætreum, Schultz, a été récoltée dans les bois
d'Avignonet, par MM. Filhol, Peyre, Jeanbernat et'E. Timbai-
Lagrave. |
Tillia corallina, Ait., Til. rubra Dec., est commun dans les
bois de Juzet-d’'Izaut, près d’Encausse. Filho!, Jeanbernat et
E. Timbal-Lagrave.
Daucus arvensis, Jord., abonde à Toulouse dans les pelouses
herbeuses, notamment à Croix-Daurade, Périole, dans les prairies
des bords de la Garonne et de l’Ariége, à Portet et à Lacroix-Fal-
garde. |
Bupleurum affine, Sadler, dans les coteaux cultivés de Lacroix-
Falgarde, découvert par M. Contejean. | |
Scorzonera parviflora , Linné , assez répandue dans les
bois de Miramont, près Saint-Gaudens. MM. Baillet et E. Timbal-
Lagrave.
Campanula ficarioïdes, Timbal L., Mail-du-Cric, près Luchon,
très-commun d’après M. Peyre.
Lobelia urens, Linné, dans les champs à Chein-Dessus, M. Des-
jardins ; à Ganties, M. Gourdon ; ces deux localités appartiennent
au massif d’Arbas.
Swertia perennis, Linné, vallon de la Frèche, près Luchon,
très commun en juillet d'après M. Peyre.
Muscari Lelievrei, Bor., bords da ruisseau de Saint-Geniès, en
avril, Peyre et E. Timbal Lagrave.
Ornithogalum Peyrei, en abondance dans les champs sur les
bords du Fresquel à Naurouse et dans les garrigues d’Alzonne
(Aude), découvert par MM. Peyre et Albert Timbal-Lagrave.
Ajuga genevensis, L., que nous préférons appeler avec M. Lagrèze-
Fossat (FL, Tarn-et-Gar., p. 305.) Ajuga cryptostolon, a été
ES CR Te
or
— 186 —
découvert cette année dans la prairie communale de Portet,
mêlée par places, avec l’Ajuga reptans, L.
Cette espèce n’avait pas encore été signalée dans le bassin sous-
Pyrénéen, quoiqu’elle soit commune sur la rive droite du Tarn, en
face Buzet, par E. Timbal-Lagrave. |
— 187 —
ÉTAT
DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ D'HISTOIRE NATURELLE
DE TOULOUSE.
Août 1870.
Membres nés.
M. le Préfet du département de la Haute-Garonne.
M. le Maire de Toulouse.
M. le Recteur de l'Académie de Toulouse.
Membres honoraires.
MM. Cos, Professeur à la Faculté des sciences, Directeur du Jardin des
Plantes de Toulouse.
DaçuIN , Professeur à la Faculté des sciences, Directeur à l’Obser-
vatoire de Toulouse.
E. Duraurier, Membre de l’Institut, Professeur à l'Ecole des Langues
orientales vivantes.
E. Ficnoz, Professeur à la Faculté des sciences, Directeur de l'Ecole
desmédecine de Toulouse. |
Lavocar, Directeur de l'Ecole vétérinaire de Toulouse.
Edouard Larrer, Professeur au Muséum d'histoire naturelle.
J.-B. Nouzer, Professeur à l'Ecole de médecine de Toulouse.
Léon Sougéiran, Professeur à l’École de pharmacie de Paris.
Membres titulaires.
MM. D’Anxémar (Victor), Mainteneur de l’Académie des Jeux Floraux.
AuziEux, Médecin, à Axiat (Ariége).
D' ArmiEux, médecin-major, à Toulouse.
D’Ausuisson (Auguste), Fondateur.
Bain, Chirurgien-orthopédiste.
BeLLEviLce, Commandant en retraite.
BErpouzar (Jules), Fondateur.
BEsaucÈèLE, Etudiant en médecine.
BIROTEAU.
— 188 —
MM. Dr Boxamy, Professeur à l'Ecole de Médecine.
Bonxaz (Edmond), Fondateur.
Dr Boxxans, aux Cabanes (Ariége).
BorDENAvE, Chirurgien-dentiste.
Brun (Emile), Conservateur du Muséum de Montauban.
Burrer DEL Mas.
CaALMELs (Henri).
L'abbé Carrière, Directeur de la Société archéologique du Midi,
CarraizHAG (Emile, Directeur des Matériaux pour l'histoire pri-
mitive de l'Homme, Secrétaire de la ‘Société archéologique du
Midi, Fondateur. |
CassanmoL (Edmond), Fondateur.
CHALANDE, Fondateur.
De ConsTANT-BoNNEVAL.
Dr Cv, à Pau.
Dusouz (Léopold). |
Fagor (Paul), notaire à Villefranche (Haute-Garonne).
Fizaor (Henri), interne des hôpitaux de Paris.
FirrÈèrE, Pharmacien, à Auch.
Frorte (Léon), Membre de la Société Géologique de France, à
Crépy-en-Valois (Oise).
Fouque (Charles), Membre de la Société géologique de France,
Fondateur.
À. Ganrier, au château de Picayne, près Cazères.
Dr Gounbon, }rofesseur à l'Ecole Vétérinaire de Toulouse.
Dr Gracerre.
GRAVELLE, Professeur. °
Dr Guiraup, à Montauban.
Dr Guirar», Professeur à l’Ecole de Médecine, Fondateur.
Isarn, Premier commis des douanes.
Dr JeanBennaT, Membre de la Société botanique de France.
Jozy (Arthur), Professeur au Lycée de l'Ile de la Réunion.
D: Jorx (Emile), Médecin aide-major, Fondateuf. |
JouGLa (Joseph), interne des Hôpitaux de Paris.
L. Joux, Ingénieur des poudres. |
Dr Laséna, Chef des travaux anatomiques à l'Ecole de Médecine.
Lacaze (Marius), Fondateur.
Lacroix (Adrien), Fondateur.
Lamserr, Fondateur.
LassèrE, capitaine d'artillerie.
Macnax (Henri), Membre de la Société géologique de France,
Fondateur.
MaGxes fils, Dr en pharmacie.
— 189 —
MM. De Mararosse (Louis), Membre de la Société archéologique du Midi.
Marquet, Membre de la société Entomologique de France, Fondateur
Marty, Fondateur.
Mezuiés, Professeur à l'Ecole des Arts, Fondateur.
De Monrzezux (Armand), Fondateur.
Mussy, Ingénieur des mines, à Vicdessos (Ariége).
PENDaRIES (Emmanuel).
PEyre (Armand), Membre de la Société botanique de France, et de
la Société de géographie, Fondateur.
Pierre (Alexandre), Fondateur.
Pra, Professeur à l'Ecole Normale, Fondateur.
De PLaner, Ingénieur civil.
REGNAULT (Félix).
Rivière, Fondateur.
Rozy, Professeur à la Faculté de Droit de Toulouse.
De Samsucy (F.), Mainteneur de l’Académie des Jeux Floraux.
Dr Taomas (Philadelphe), à Gailiac (Tarn).
Taoumaine, chef de gare, à Foix.
TimBaz-LaGRAvE (Ed.), Pharmacien.
. TimBaz-LaGrAve (Albert).
Tousan, employé des Ponts et Chaussées.
Trurar, Conservateur du Muséum d'histoire naturelle de Toulouse,
Dirr des Matériaux pour l'histoire prim. de l'Homme, Fondateur.
VipaL.
& Membres correspondants.
MM.Armarp, Archiviste, au Puy (Haute-Loire).
D'Aquiza (Philippe), à Paris.
D'AQuiLa (Louis), à Paris.
Augoux, Profes. d'histoire naturelle au Collége de Lodève (Hérault).
Dr Bzeicuer, Répétiteur d'Histoire naturelle à l'Ecole du service de
santé militaire, à Strasbourg.
D: Bras, à Villefranche (Aveyron).
CaanTRe (Ernest), Membre de la Société géologique de France, et
de la Société des sciences industrielles de Lyon.
Dusax (Bruno), Directeur de la Revue archéologique du Midi.
Fourcane (Charles), Naturaliste à Bagnères-de-Luchon.
Lazanne (Philibert), correspondant de la Commission de topographie
des Gaules, à Brive (Corrèze).
Maznowsxt, Professeur au Collége d’Alais (Gard).
Massenar (Elie), Manufacturier, à Brive (Corrèze).
De Messemeker, à Bergues, près Dunkerque.
Pararez, à Mende (Lozère).
— 190 —
MM. Pousoz (Henri), à Mérueys (Lozère).
Tourxaz, Directeur du Musée de Narbonne.
Vazvemar Scuminr, attaché au Musée des antiquités du Nord, à
Copenhague.
Vencxes, Naturaliste, à SfrAsbOUrg,
Officiers de la Société
Pendant l’année 1869—41870.
Président honoraire : M. le Dr Ed. Fiznoz, président sortant.
Président : M. le Dr Gurrarn.
Vice-présidents : M. Eugène Trurar.
M. P1a.
Secrétaire-général : : M. Emile CarTaAILHAC.
Secrétaire-adjoint : M. Armand Pevyre.
Trésorier : M. MARQuET.
Archiviste : M. Albert TIMBAL-LAGRAVE.
Membres du Conseil | M. le D' Gourpon.
d'administration : M. H. Macxan.
M. le Dr JEANBERNAT.
Comité de M. H. MaGnaw.
publication : M. Eugène TRuTAT.
M. D’Auguisson. ‘
— 191 —
LISTE
des Académies et Sociétés savantes
Avec lesquelles la Société d'Histoire naturelle est en correspondance.
Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse.
Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon.
Académie des sciences, arts et belles-lettres de Clermont-Ferrand.
Académie de la Rochelle (section sciences naturelles).
Académie des sciences, arts et belles-lettres de Caen.
Société académique de Maine-et-Loire.
Société de médecine, chirurgie et pharmacie de Toulouse.
Société linnéenne de Bordeaux (Gironde).
Société zoologique d’acclimatation, Paris.
Société des sciences naturelles de Strasbourg (Bas-Rhin),
Société d'agriculture, sciences, arts et commerce du Puy (Haute-
Loire).
Société d'agriculture de la Haute-Garonne.
Société des lettres, sciences et arts de l'Aveyron.
Société des sciences naturelles de Colmar (Haut-Rhin).
Société d'agriculture, d'archéologie et d’histoire naturelle du
département de la Manche.
Société d'études scientifiques et archéologiques de Draguignan.
Société des sciences physiques et naturelles d’Ille-et- Vilaine.
Société d'agriculture, sciences et belles-lettres de l'Aube.
Société archéologique, scientifique et littéraire de Béziers.
Société des sciences et arts de Vitry-le- Français.
Société des sciences historiques et naturelles de Semur (Côte-d'Or).
Société d'archéologie, sciences, lettres et arts de Seine-et-Marne.
Société polymatique du Morbihan.
Société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne.
Société Algérienne de climatologie et des sciences physiques et
naturelles, Alger.
— 192 —
Socièlé d'agriculture, industrie, sciences, arts el belles-lettres de
la Loire.
Société d’émulation du Jura (Montbéliard).
Société d'agriculture, sciences et arts de la Marne.
Société littéraire et scientifique d’Apt (Vaucluse).
Société des sciences naturelles et historiques de l'Ardèche.
Journaux et Revues.
Revue agricole du Midi. Directeur : Dr Gourdon.
La Minerve de Toulouse, Directeur : Gatien-Arnoult.
Matériaux pour servir à l’histoire primitive et naturelle de
l'Homme, Directeurs : Trutat et Cartailhac. |
— 193 —
TABLE DU VOLUME.
ORDRE CHRONOLOGIQUE:
( Les travaux rédigés par les auteurs sont indiqués par des lettres grasses )
Séance de rentrée du 19 novembre 4869... ......
Essais d’acclimatation du Pyrox et de l’Asclepias seriaca (D' Garno)
Cire AE CO te OT de es sure
Renseignements sur des silex de l’âge du Renne, donnés par
M. Detroyat et sur divers objets recueillis dans des grottes,
etenvoyés par la Société de Climatologie algérienne (E. Car-
RP AMEN SACS ES el at UT
Nouvelle localité du Verbascum glabrum, Mill. (Argent TimBaL-
A) SE SOTAQ-STN LE. beau o À A rt.
Note sur le terrain crétacé inférieur (néocomien, aptien, albien)
des Pyrénées françaises et des Corbières (H. MaGnaw). . . .
mo décembres . £h. Marie nb: sine sdtnt share
Fouilles faites dans la grotte de Montesquieu près Audinac —
Haute-Garonne. — Anthropophagie (F. REGNAULT). . . . .
Discussion sur l'anthropophagie (E. CarraiLac, Ficnor, L. pe
D TRUEAR)TR Je eo al. etre miatedion rh .+s
Infra-lias de la Lozère (L. DE MALAFOSSE). . . . . . . . . . . ..
Comparaison et altitude des dépôts infra-liasiques du plateau cen-
Morde France L. MAGnan) TT afro elite oil rh
1
— 19% —
Fossiles du miocène de Miélan, — Gers (E: TRUTAT).. . . . . ..
Séance ‘du’ 7 janvier 1870, 4... 0; HUILE DRE
Élections annuelles Tite 0 RROROMENTONMART IN RSS
Note sur la craie moyenne des Pyrénées Fa et des Corbières
(cénomanien et turonien) (H. Fyaess ds
Séance du SE janvier. 41 ETES EP EEE RE an he ne -
FnStalltion du’bureau! : ENTER ESS SN ONE
Fouilles dans les grottes de la Haute-Garonne (E. Fiznor) . . .‘.
Anthropophagie préhistorique (E. CarrTaïznac, J EANBERNAT, L. DE
MALMOSSE).. + SOI PE NE
Séance A/R VrIerr ENTERREMENT RR
* Aperçu géologique de la région comprise entre Soulatge et le
Pont de la Fou, — Pyrénées-Orientales (H. MAGnan). . . . .
Origine des eaux sulfureuses (E. Fizuoz, H. MaGnan). . . . ..
Description du Felis spelæa (E. Firmor). . . . . . . . . . . ..
Séance du 25 février ue LS ROAUAMTEME STONE
Grottes de la Barousse, — Haute-Garonne (C. FouquE).. . . . .
Note sur la craie supérieure des Pyrénées et des Corbières. —
(senonien, craie de Maëstricht, danien, garumnien) WE MAGNAN)
Séance du PT'mars! eULESIRMMELUMDE ENIGMES RNRREREES
Nomination d'une commission pour étudier une question intéres-
sant le progrès des sciences naturelles. . . . . . . . . . ..
Séanceidur Rare Ait e iron rt RAC ENERREES
E. CarrarzHac. — Pétition au Ministre en faveur de l'His-
toire naturelle! 12 GET AK em E M T2 SONT
Séance due dpril?uicn 42H00 AIDANT RO SEL
Aperçu de la continue géognostique de la vallée du Ger
ES MAGRANPE MLUNICS ERNST JT IA
Séancel due avril UPS Os ts Na ON NES
Silex taillés de Roquesérière. — Haute-Garonne (CaBré). . . . . .
Plan en relief du Mont-Blanc par M. Lézat (Dr Gournon). . . . .
H. Macnax. — Documents relatifs à la connaissance de la
partie inférieure du terrain de craie (néocomien,
aptien, albien) des Pyrénées françaises et des Cor-
bières, et à certaines critiques faites par M. Leymerie,
à propos de ce terrain et des étages du muschelkalk
et du zechstein dans le Tarn et l'Aveyron. (PI. I.) .
Séance du 6 mal: : :.: : 2: AW, AE MR AR ATP EAN
Découverte du Diplotaxis viminea, par M. Desjardins (A. PeyrE).
Etude du Potentilla verna (En. TimBa-LAGRAVE). . . , . . : ..
344
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46
46
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Adhésions de trois sociétés à la éiton pour l'histoire naturelle.
Découverte d’ossements humains au moulin du Bazacle (CHALANDE)
Découverte du Muscari Lelievrei, etc (A. PEYRE). . . . . . . ..
Herborisation à la prairie de Portet (ALBERT TIMBAL-LAGRAVE, fils).
RU... | RS a rldine-E C RE N
Adhésions de trois sociétés à la pétition pour l’histoire naturelle.
Mais Lacaze. — Etude critique de la nutrition. . . . ..
DC UMIOn (DE LANOCAT, DT GOURDON). : . : +. : . : . . . . .,
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Adhésion de six sociétés à la pétition pour l’histoire atirelle.
Dr. J. Gouron: — Du véritable rôle des aliments dans la
RO ne Mr eee pod RAR Nec kcyi ts Tiré
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Adhésion d’une société à la pétition pour l’histoire naturelle. . .
Sur la période glaciaire dans les vallées de la Garonne et de la
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Sur les anciens glaciers des Pyrénées (H. Magna). . . , . . . .
MU AT es DU banas D erohl beton
Adhésions de deux sociétés à la pétition pour l’histoire naturelle
De Guirarp. — Un mot sur le Sarracenia purpurea.. , . ..
Discussion (Dr Gourvon, TimBaz-LaGrAve, E. Ficnoz, MarQuET). .
H. Macxan. — Notice sur le terrain quaternaire des bords
de la Montagne-Noire, entre Castres et Garcassonne,
et sur l’ancien lit de l’Agout. (PI. IL.) . . . . . . . . . .
D' Ewize Jocy. — Contributions pour servir à l'histoire
naturelle des Ephémérines. (PI IIL.) . . . . . . . ..
EL nn, Nu ee
Adhésion d’une société à la pétition pour l’histoire naturelle. . .
D'E. Fimo. — Note sur la composition des ossements
fossiles trouvés dans la caverne de Lherm (Ariége).
Ep. Timpa-LaGrave. — Précis des herborisations faites par
la Société d'Histoire naturelle de Toulouse, pendant
a ht. ioahen ne cie Lois
Liste des Académies et Sociétés en correspondance avec la com-
ne de mual sure
4142
114
116
116
419
— 196 —
TABLE MÉTHODIQUE.
Géologie et Paléontologie.
Notessur le terrain crétacé des Pyrénées françaises et des Corbières
(H. Macnan).
10 Sur la craie inférieure (néocomien, aptien, albien). .
20 Sur la craie moyenne (cénomanien, turonien). . . . ..
3° Sur la craie supérieure (sénonien, craie de Maëstricht,
danien, garumnien). ......... MP ee
Infra-lias fossilifère de la Lozère (L. DE Mb te PAT +
Comparaison et altitude des dépôts infra-liasiques du plateau central
de la France TH MAcnan) ent LS 10 ST TES RM
Fossiles du miocène de Miélan, — Gers (E. TRUTAT). . . . . . . .
Aperçu géologique de la région des Pyrénées-Orientales comprise
entre Soulatge et le Pont de la Fou (H. MaGnaw). . . . . . .
Terrains où prennent naissance les eaux sulfureuses (E. Fiznou,
EC MELGNENRS ON SUITE RER TT TE OT CREER
Description du Felis spælea (E. FizmoL). . . . 4 . . . : 0.
Aperçu de la constitution géognostique de la vallée du Ger
(H. MAGNan). . . . . Qt oh à À nd RS TN 18 eV PT O0 SRI
Documents relatifs à la connaissance de la partie inférieure du
terrain de craie (néocomien, aptien, albien) des Pyrénées
françaises et des Corbières, et à certaines critiques faites par
M. Leymerie, à propos de ce terrain et des étages du mus-
chelcalk et du zechstein dans le Tarn et L'AIR
(PL 1): (Hs : Magnan).-t, 2 à. CON etiEs
Sur la période glaciaire dans les vallées de la Garonne et de la
Pique (Dr, JEANBERNAT) 4447 11 eue fée ét ARR A ETATS
Sur les anciens glaciers des Pyrénées (H. MaGnan). . . . . . . .
Notice sur le terrain quaternaire des bords de la Montagne-Noire,
entre Castres et Carcassonne, et sur l’ancien lit de l’Agout
(PL:IE.). (Maggie ce ie ui 6e ARS
34
412.
114
— 197 —
Note sur la composition des ossements fossiles trouvés dans la
, caverne de Lherm (Dr E: Fiznoc). . . . . . . .. A Hat ai
Anthropologie.
Renseignements sur des silex de l’âge du Renne donnés par
M. Detroyat et sur divers objets recueillis dans des grottes et
envoyés par la Société de Climatologie algérienne (E. CARTAILHAC)
Fouilles faites dans la grotte de Montesquieu près Audinac, —
Haute--Garonne, — station préhistorique. — Traces d’An-
Mponlacie (EE REGNATENNNE. 2! 24 rio PUR,
Discussion sur l’Anthropophagie (E. CarrarzHac, E. Ficroz, L. DE
MALAFOSSE, E. TRUTAT, D' JEANBERNAT). . , . . . . . . . 11
Fouilles dans les grottes de Salech et du massif d’Arbas, — Hautc-
RP AP ARIER OLA. HIT IS PANNES A LENCO,
Grottes de la Barousse, — Haute-Garonne (GC. FouQuE). . . . . .
Silex taillés de Roquesérière, — Haute-Garonne (CABIÉ). . . . . .
Ossements humains du 17° siècle, au moulin du Bazacle 'CHALANDE)
Zoologie.
Etude critique de la nutrition (M. Lacaze), . . . . . . . . . .|.
D cusson (DE LavocaT, D' Gouapon): : .: 4. . . 4. .
Du véritable rôle des aliments dans la nutrition (D' GournoN). .
Contributions pour servir à l’histoire naturelle des Ephémérines
D Es JOLY) MC La ae Li at si ss
Botanique.
Essai d’acclimatation du Pyroæ et de l’Asclepias seriaca (D' Guirarp)
Nouvelle localité du Verbascum glabrum, Mill. (Arsert TimpaL-
VO AO aie il a, te fa nntals
D daricot Mexicain (MAINE).. . 4 UC il. à
Découverte du Diplotaxis viminea par M. Desjardins (A. PEvrE).
Etude sur le Potentilla verna, En. TimBAL-LAGRAVE . . . . . : .
Découverte du Muscari Lelievrei, et de l’'Ornithogalum Peyrei
22 LIEN MAN ANA SAT TP En CE CR
Herborisation à la prairie de Portet (AzBerr TImBAL-LAGRAVE, fils).
Un mot sur le Sarracenia purpurea (Dr Gurrar»)
152
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