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Full text of "Castor et Pollux : tragédie-opéra en cinq actes, représntée pour la premiére fois sur le théatre de l'Academie Royale de Musique, en 1737; remise au Même Théatre le 14 Juin 1731, et le 16 Décember 1794; reprise le 28 Décembre 1814"

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LES  TROIS  BERNARDS. 


D 


AirscepaystroîsBernards  sont  connus  j 

L'un  est  ce  Saint  j  ambitieux  Reclus , 

Prêcheur  adroit  ,  fabricateur  d'oracles. 

L'autre  Bernard  est  l'enfant  de  Plutus , 

Bien  plus  grand  Saint ,  faisant  plus  grands 
miracles  : 

Et  le  troisième  est  l'enfant  de  Phébus  j 

Gentil  Bernard ,  dont  la  Muse  féconde 

Doit  faire  encor  les  délices  du  monde  ^ 

Quand  des  premiers  on  ne  parlera  plus. 

Voltaire. 


CASTOR 
ETPOLLU 

TRAGÉDIE-OPÉRA 

EN   CINQ  ACTES, 

REPRFSENTÊE    POUR  LA  PRlMlÈRE  FOIS    SUR  LE  THEATRE 

DE  l'academie  royalf.  DE  MusiQ^uE ,  FN  lySj; 

REMIbE  AU  MÊME  THEATRE  LE  14  JUIN  ly^I  ,  ET  LE  16 
DÉCEMBRE  I  794  ;  REPRISE  LE  28  DECEMBRE  J814. 


Prix:    i  fr.   5o   c. 


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A      PARIS, 

CbexRoULI.ET, Libraire  du  Théâtre  de  l'Académre 
Royale  de  Musique,  rne  des  Poitevin': .  r.°.  7  ,  et 
au  l'alais- Royal,  n°.  19,  attenant  la  ir-oiirse. 


1 


10 


1' 


V 


'  Ac^MsnB.r 


Les  paroles   sont  de  Bernard. 
La  Musique  de  M.  Candeille. 
Les  Combats,  le  Ballet  des  Furies  et  celui  du  dernier 
Acte  par  M.  MiLON.  Les  autres  Ballets  par  M. 
Gakdel. 


ACTEURS  ET  ACTRICES 

CHANTANTS  DANS  LES  CHCEURS. 


COTÉ     DROIT. 


Messieurs, 

Devilliers. 

Leroy    ler. 

Putheau. 

Adrien  Fd. 

Picard. 

Chapelot. 

Prévost. 

Chollet. 

Leroy  2e. 

Gobert. 

Fasquel. 

Gousse. 

Lemaire. 

Dumas. 

Courtin, 

Quelle. 


Mesdames, 

Hymmmère. 

Lefevre. 

Bertrand, 

Florigny. 

Chévrier. 

Valain. 

Beaumont, 

La  combe. 

Reine. 

Maze. 

Falcos. 


COTÉ    GAUCHE. 

Messieurs, 

Mesdames, 

Lhoste. 

Gambais. 

Lecocq. 

Mulot  aînée. 

Aube. 

Mulot  Cad. 

Gonthier. 

Royer. 

Nisi. 

Cantagrelle. 

Houëbert. 

Mante. 

Levasseur, 

Lorenzetti. 

Martin. 

Lebrun. 

Duchamp. 

Dubois. 

Nocart. 

Fasquel. 

iVIénard. 

Ménard  aîn. 

Léger. 

Casser. 

César. 

Murgeon, 

Legros. 

PERSONNAGES  DANSANS. 


n«TnrtiiitlMg 


ACTE  PREMIER. 


NOBLES    SPARTIATES. 
M.  Anatole,  Mlle.    Gaillet. 

MM.    Seiiriot  entier ,  Godefroy,  Chatillon. 
Mlles  Adélaïde,  Dupuis,  Jacorot,  Eulalie  ,  Boucher, 
Darmancourt. 

MM.  Maze  ,  Pupet  ^  Gallais. 
Mlles,   Guillet ,    Delphine^  Podevin ,    Césarine, 
Baudesson,    Narcisse. 

PEUPLE. 
MM.  Paul,  Ferdinand. 

Mme.     COURTIN. 

MM.    Auguste,  Eve,  Gogot. 
Mlles.  Lemicrc,  Molard,  Pivert ,  Nanine  ,  Seiiriot  ^ 
Brocard   aînée. 

OFFICIERS. 

'    Lincéc ,  M.  Poulet. 

MM.  Leulier,  Romain,  Lenfanr,  Rivière,  Baiise^ 
Alerme  ,  Louis  ,  Aniel,    Paul. 


ACTE    SECOND. 


LUTTEURS  ET  GLADIATEURS. 
M.  Albert. 

MM.    ÉLIE,    MÉRAISITE. 

Seuriot  cadet ,  Godefmy  ,  Rivière  ,  Lenfant ,  Paul , 
PouiUet  ,  Petit ,  Romain  ,  Banse  ,  Alerme  , 
Verneuil,  Chatillon. 

SPARTIATES. 

Mll^   Delille. 

Mlles  Adélaïde  ,  Dupuis,    Jacotot ,   Eulalie  , 
Boucher  ,  Darmancourt ,  Fodevin  ,  Césarine. 


ACTE   TROSIEME. 

Héhé  y    Mlle.   Gosselin    aînée. 

Suite  dHébe\  MU^.  Masrelliê  cadette ,   Marinette» 

Guillet;  Delphine,  Dupuis,  Baudessou  ,  Narcisse, 
Léquine,  Angéline  ,  Molard  ,  ,Lemière,  Nanine, 
Seariot ,  Pivert ,  Berry  aînée  ^  Noémie  ^  Barrée  , 
Perceval,  Aurélie^  Fiorestine. 


ACTE   QUATRIÈME. 


DÉMONS  DANSANS. 

La  Trahison  y  M.  BEAUPRE, 

Le  Crime  ,  M.  GOYOK. 

Bellonc  ,  M.  Élie. 

La  Mon  ,  M.  Louis. 

LES  FURIES. 

MM,    BrANCHU  .     MÊRANTE  ,     ToUSSAiNT. 

leulier,  Louis ,  Alerme^  Paul,  Auguste,  Eve,  Gogot, 
Beautin,  Martin,  Seuriot  l'aîné,  Leblond,  Courtois. 

LES   OMBRES, 
M.    Paul. 

Mm*^.   Gardel  ,    Mll=.    Fanny. 

M.  Montjoie.  M^c.  Gaillet.  M.  Ferdinad.  Masrelié  c. 

Mrs.Seuriotc.Aniel,  Petit, Godefroi, Romain, Bmce 

Mlles  Adélaïde  ,  Amanda  ,  Boucher,  Darmancourt  ^ 
Léquine  ,    Montjoie. 

Mrs  Rivière, Chatinon,Galaïs,Pupet,Maie,Faucher 

M^esEulalie,  Jacotot ,  Césarine,  Guillet,  Baudesson, 
Narcisse. 

M    Pecqueux,  Gronaux, Martin, Bertrand, Josse, Elie 
M^J^s.     Pudevin  ,   Delphine  ,     Pansard  ,     Molard  , 
Nainne  ,    Lemière. 

Mr-'.  Petit  2e,,   Guifîard  ,  Chatillon  2e.  ^  Quarré  , 
Gosselin  ,    LenFant   tils. 

Mlles    Pivert,   Brocard    l'aînée,    Seuriot,  Betii^ 

Noémie  ,  Barrée. 

M.   Leblond    se.    Mll^   Berry   aînée. 


ACTE  CINQUIÈME. 

Apollon-^  M.  Albert. 

T^r/^^jcore,  Mle.CL0TILDE;F/7Z«^,MicG0SSELIN 

Les  Grâces,  Mies  Angeline ,  Lauiiier  cad.  Aubri. 

V Amour  ^   Mlle.    Berry   aînée. 

PLAISIRS,  JEUX   ET  RIS. 

Mrs  Seuriot  cadet,  Romain,  Petit,  Maze,  Rivière, 
C^alais,  Godefroy,   Pupet.  ^ 

Mlles.  Adélaïde  Montjoie  ,  Guillet,  Delphine  , 
Leqmne,   Eulalie  ,   Podevin  ,  Ferette.  * 

Mrs.  Alerme,Banse,  Lenfant,  Courtois'-   Auguste 
Faucher,   Eve,   Pecqueux.  ^ 

Mlles.  Darmancourt,  Boucher,  Lily  Proche 
Baudesson  ,  Molard  ,   Nanine^    Pivert.  ^ 

Mrs  Beautain,  Verneuil  ,  Goaot ,  Seuriot  l'aîné 
Martin,  Leblond  ,   Gronaux  ,  Josse.  ' 

Mlles,  Xemière,  Pansard,  Jouberc  ,  Vifrneron 
Seuriot  ire.  Seuriot  2e.  ,  Betzi,  Brocard  Paînée.  ' 

DIEUX  ET  DÉESSES. 

Minerve  ,  Mlle.    St.  «-  Léger. 

Diane  ^  Mlle.     Laurence. 

Mars  ;  M.        Louis. 

Hercule  ,  M.        Pouliec. 

Bacchus,  M.       Pau!. 

Les  neuf  Muses. 
Les  Heures. 
Des   Amours. 
La  Rénommée. 


ACTEURS. 


POLLUX , 

CASTOR. 

THÉLAIRE  , 

PHÉBÉ  , 

JUPITER , 

MERCURE , 

LE  GRAND -PRETRE, 

UNE  OMBRE  , 

CLÊONE , 

UN  SPARTIATE, 

CORIPHÉES, 


M.  Lays. 
M.  Nourrit, 

Mme  BRANCHU. 

Mlîe  Armand. 

M.    DÉRIVIS. 
M.       ÉLOY. 

M.  Bertin. 

Mrne  GRANIER. 
Mlle   JaNNARD. 

Alexandre. 

Mesnard. 


Mines 


LORQTE. 


CAST 


E  T 

POLLUX, 

TRAGÉDIE. 

ACTE  PREMIER. 

Le  Théâtre  représente  une  partie  intérieure 
du  Palais  des  Rois  de  Sparte  ,  avec  tout 
l'appareil  d'un  hymenée. 


SCÈNE  PREMIÈRE 

PHEBÉ,     CLÉONE. 
C  L  É  O  N  E. 


L 


rH  I  TyI  E  N  couronne  votre  sœur  , 
Pollux  épouse  Télaïre; 
Ce  pompeux  apareil  annonce  son  bonheur  ; 
Mais  j'entends  Phebe  qui  soupire. 


2    CASTÔRetPOLLUX^ 

P  H  E  B  É. 

Mon  cœur  n'est  point  jaloux  d'un  sort  si  glorieux  ; 
Une  autre  voix  s  j  fait  entendre  ; 
Ah ,  que  n'est-il  ambitieux  I 
Peut-être  seroit-il  moins  tendre. 

Filles   du  Dieu  du  Jour ,  par  quels  présents  divers 

Le  Ciel  marqua  notre  partage  ! 
Je  reçus  le  pouvoir  d'évoquer  les  Enfers  ; 
Que  Télaïre  obtînt  un  plus  doux  avantage  ! 
Elle  commande  aux  cœurs  >  où  mon  art  ne  peut  rien  ; 

Un  coup  d'œil  lui  rend  tout  possible; 
Je  ne  fais  qu'étonner  ce  qu'elle  rend  sensible  : 
Que  son  pouvoir  est  au-dessus  du  mien  ! 

Que  l'univers  la  trouve  belle. 

Je  le  pardonne  à  ses  appas  ; 
Mais  que  l'ingrat  Castor  m'abandonne  pour  elle  , 
Voilà  ce  que  mon  cœur  ne  lui  pardonne  pas. 

C  L  É  O  N  E 
L'himen  du  Roi  ,  qui  va  rompre  leur  chaîne  » 
Doit  vous  rendre  l'espoir  de  fixer  votre  amant. 

P  H  E  B  É. 
Elle  aura  ses  regrets  ,  je  n'aurai  que  la  peine 

D  espérer  encor  vainement.  .  .  . 
Et  si  le  Roi  cedoit  aux  larmes  de  son  frère 

L'objet  qui  cause  son  tourment  ? 
Tu  vois  ce  que  je  crains;  voici  ce  que  j'espère  : 

Cléonc  ,  en  ce  moment  fatal, 

Pour  venger  ma  flanune  ollensée  , 

Je  leur  garde  une  autre  rival  . 
Et  je  puis  disposer  des  fureurs  de  Lincce. 


TRAGÉDIE.  3 

i 

Son  amour  ,  qu'on  oulrage  ,  est  toiU  près  déclater  ; 
Il  veut  de  ce  palais  enlever  Télaïre. .  . 
Je  la  ?ois  :  son  triomphe  augmente  jnon  marlj  re  ; 
Songeons  à  l'éviter. 

(  Elle  sort,  ) 


SCENE    IL 

/ 

TELAIRE,     seule. 


E 


C  LAT  E  Z  ,  mes  justes  regrets; 
Dans  un  moment ,  hélas  1  il  faudra  vous  contraindre 

Le  ciel  m'ôtera  désormais 

Jusqu'à  la  douceur  de  me  pla'ndre. 
La  gloire  unit  envain  tout  ce  qu'elle  a  d'attraits 
Pour  un  Dieu  qui  m'adore ,  et  me  force  à  le  craindre  ^ 

L'Amour  a  lancé  d'autres  traits  : 
Ces  honneurs  ,  que  je  fuis ,  ne  font  voir  que  Texcès 

Du  feu ,  que  je  ne  puis  éteindre. 

Eclatez  ,  mes  justes  regrets  ; 
Le  ciel  m'ôtera  désormais 
Jusqu'à  la  douceur  de  me  plaindre. 


4     CASTOR  ET  POL  LUX, 


SCENE     III. 

TÉLAIRE,    CASTOR. 
CASTOR. 


A 


H  !  je  mourrai  content ,  je  revois  vos  appas. 

TÉLAIRE. 

Prince,  osez-vous  encor  me  parler  de  tendresse! 

CASTOR. 
On  permet  nos  adieux. 

TÉLAIRE. 

Eh  !  ne  deviez-vous  pas 
Les  épargner  à  ma  foiblesse? 
CASTOR. 
Quand  j'ai,  pour  cet  adieu,  l'aveu  de  votre  époux. 
Quand  vous  m'allez  être  ravie  ; 
Cruelle!  me  reprochez-vous 
Le  dernier  plaisir  de  ma  vie? 

Mon  frère  a  vu  mes  pleurs ,  et ,  loin  de  les  cacher , 

J'ai  laissé  voir  toute  ma  flamme  ; 
La  pilié  lui  parloit ,  et  sembloit  le  toucher  ; 
Mais  Tamour,  plus  puissant  ,  l'écartoit  de  son  ame 
Achevez  son  bonheur  ;  je  quitterai  ces  lieux  , 
Sans  ine  plaindre  de  vous,  sans  accusermonfrcre: 
Ai-je  à  me  plaindre  que  des  Dieux? 

TÉLAIRE. 

Vous  partez  ? 

CASTOR. 
Je  m'impose  un  exil  n'ressaîre. 


TRAGÉDIE.  5 

Dans  ces  jeux  ,  maîtres  de  mon  sort, 
Si  j'ai  trouvé  cent  fois  la  vie  ; 
Quand  Tespérance  m'est  ravie  , 
y  y  trouverois  cent  fois  la  mort. 

T  É  L  A  ï  R  E. 

Et  le  Roi  permettra  cette  fuite  inhumaine  I 
Non  ,  son  cœur  est  trop  généreux. 
CASTOR. 
En  fesant  son  bonheur,  elle  adoucit  ma  peine  : 
Vous  m?  plaignez,  il  m'aime,  et  je  pars  trop  heureux. 

(    PoUux  ,  qui  les  obsenvif ,  paroit  en  ce 

moment,  ) 


S  C  E  N  E  I V. 

POLLUX,     TÉLAIRE,     CASTOR, 

P  O  L  L  U  X. 


N 


ON ,  demeure  Castor;  c  estmoi  qui  te  l'ordonne: 
^      L'amour  et  l'amitié  t'en  imposent  la  loi. 

Calme  l'inquiétude  où  ton  cœur  s'abandonne  : 
Pour  te  retenir  près  de  moi , 
La  main  qu'on  devoit  à  ma  foi 
Est  la  chaîne  que  je  te  donne. 

n  prend  la  mai?i  de  TÉLAIRE,  et  Vunit  à 
celle  de  CASTOR.  ) 

CASTOR. 
O  bonté  que  j'adore  ' 


6    CASTOR  ET  POL  LUX, 

T  É  L  A  I  R  E. 

O  grandeur  ,  qui  m'étonne; 

P  O  L  L  U  X. 

Je  connoîs  tout  ce  que  je  perds  ; 
Castor  à  mon  amour  rendra  cette  justice  ; 

Il  pourra  mieux  juge  r  du  prix  du  sacrifice  , 

Par  les  tourments  qu'il  a  soun'erts. 

(    La  suite  du  R  0  I  et  le  peuple  entrent  sur  la 

Scène,     ) 


S  C  E  N  E    V. 

POLLUX,      TELAIRE,    CASTOR. 

Spartiates. 
P  O  L  L  U  X  ,  au  peuple, 

n 

K^  E  s  apprêts  m'étoient  destinés  , 
J'en  fesois  mon  bonheur  suprême  ; 
Que  leurs  fronts  soient  couronnes 
De  ces  fleurs  qui  dévoient  parer  mon  diadcme  : 
Des  Dieux  objets  que  j'aime  , 
Je  fais  deux  amans  fortunés. 

CHŒUR  (f^  Spartiate  S. 
Chantons  Tcclatante  victoire 
D'un  héros  qui  dompte  l'amour  ; 
Si  la  vertu  triomphe  en  ce  beau  jour  , 
L'amour  ne  perd  rien  de  sa  gloire. 

(  0/2  danse,  ) 
CASTOR. 

Quel  bonJieur  rè^ne  dans  mon  ame  ! 


i»«       > 


TRAGÉDIE.  7 

Amour ,  as-tu  jamais 
Lancé  de  si  beaux  traîts? 
Des  mains  de  l'amitié  tu  couronnes  ma  iîainme  : 
Amour,  as-tu  jamais 
Lancé  de  si  beaux  traits  ? 

(  On  danse.  ) 

(  La  F  été  est  interrompue  par  unbrult  tumultueux.  ) 


SCENE    V  ï.  . 

Un    SPARTIATE    etleskCT^vviSdcla 

scène  précédente. 
Un     SPARTIATE. 


Q 


^  UITT  E  Z  ces  jeux  ,  courez  aux  armes; 
Lincée  attaque  ce  Palais  : 
La  jalouse  Phébé  semble  quitter  ses  traits. 

Le  C  H  Π U  R. 
Courons  aux  armes. 

Castor  et  Polîux ,  en  se  séparant  pour  aller  combat- 
tre aux  deux  côtés  du  théâtre  ,  où  Von  entend 
le  bruit  des  attaques 

Allons  dissiper  ces  allarmcs  : 
Aux  armes. 

T  Ë  L  A  I  R  E ,    à    Castor. 
Arrêtez,  Castor  ,  arrêtez  ! 
Les  dlfférens  CH(EU  RS  ,    derrière  le  lliéâtre. 
Combattons,  attaquons:  attaquez  ,  combattez. 

Une    voix  seule. 
Enlevons  Télaïre, 


8 


CASTOReïPOÎ^Ï^UX, 


T  É  L  A  I  R  E. 

Ab  !  quelle  fureur  les  inspire. 

C  H  CE  U  R  ,  derrière  te  théâtre. 

Combattons ,  etc. 

(  Après  un  grand  bruit  de  guerre ,  L  i  N  c  É  e  force 
Ventrée  du  palais  et  paraît  à  la  tête  des  siens. 
C  .4  s  T  OR  qui  etoit  sorti  du  théâtre  ,  rentre  pour 
le  combaiire ,  il  est  repoussé  et  tombe  dans  le 
coulisse,  scus  les  coups  rfeLi  N  CEE  ;  pendanile 
combat ,  T  É  L  AI  R  E ,  <7«;  i^eut  se  jette  r  dans  la 
mêlée  est  retenue  par  ses  femmes.  Il  se  fait  alors 
un  pro  fend  silence.  ) 

Une    voix. 

Castor  ,  hilas  !  Castor  est  tombé  sous  ses  coups! 

CHŒUR    des    Spartiates. 

O  perte  irréparable  ! 
O  malheur  efiioyable  ! 
T  É  L  A  I  R  E  ,  tombant  dans  lesbras'  de  ses 
•  suivantes. 

Je  me  meurs. 

Le  C  H  Π U  R. 
PoUux,  vengez-nous. 

(  Le  bruit  de  guerre  recommence.  Uvici^  reparaît 
et  trat^erse  la  scène  pour  enlei>cr  TÉlaire,  çuil 
entraine  hors  du  théâtre.  PoLLUX  i'ole  à  sa  ren- 
contre ,  dégage  la  princesse,  et  attaque  son  en- 
nemi. La  troupe  de  Castor  se  rallie  à  celle  de 
PoLLUX ,  qui  combat  L I N  C  É  E ,  /e  poursuit  et  le 
fait  tomber  sous  ses  coups.  ) 

FIN    DU    PREMIER    ACTE. 


T  11  A  G  E  D  I  E.  9 

ACTE  SECOND. 


gfaiii  iriiaan*itwiffWig»ri 


Le  tîiéâtre  représente  le  lieu  de  la  sèpuhuve 
des  rois  de  Sparte  j  au  milieu  duquel  est 
élevé  un  tombeau  militaire  pour  les  finie- 
railles  de  Castor:  il  est  éclairé  de  lampes 
sépulcrales.  Le  reste  est  une  forêt  sombre  ^ 
plantée  de  pa  loiiers  et  de  cyprès ,  où  se  ras- 
semble le  peuple  de  Sparte.  Le  commen- 
cement de  1  acte  se  passe  dans  la  nuit. 


i«gsE»aigi^ga<iHapManig3 


SCENE    P  E  M I E  R  E. 

CHŒUR  des  Spartiates  çui  arrivent  au 
tombeau  arec  toutes  les  niarçues  ifun  grand 
deuil ,  les  armes  renversées  et  garnies  de  crevés. 


UE  tout  gémisse  * 
Que  toat  s'unisse 
Pr  ^parons  ^  élevons  d'éternels  monumens 

Au  plus  malheureux  des  amans  : 
Que  jamais  notre  amour ,  ni  son  nom  ne  périsse. 
Que  tout  gémisse. 

B 


ïo    C  A  s  T  O  RetP  O  L  L  U  X, 


SCENE   IL 

r 

T  E  L  A  I  R  E  ,  dans  le  plus  grand  deuil ^  vient  se 
jettter  au  pied  du  mausolée. 

JL  RIS  TE  s  apprêts,  paies  flambeaux  , 
Jour,  plus  affreux  que  les  ténèbres, 
Astres  lugubres  des  tombeaux , 
Non  ,  je  ne  verrai  plus  que  vos  clartés  funèbres. 

Toi ,  qui  vois  mon  cœur  éperdu , 
Père  du  jour  ,  ô  Soleil  !  ô  mon  père  ! 
Je  ne  veux  plus  d'un  bien ,  que  Castor  a  perdu  , 
.,  Et  je  renonce  à  ta  lumière 

Tristes  apprêts ,  pâles  flainbeaux  , 
Jour  plus  affreux  que  les  ténèbres. 
Astres  lugubres  des  tombeaux  , 
Non,  je  ne  verrai  plus  que  vos  clartés  funèbres. 

(  P  H  É  B  É  paraît,  ) 


W0m 


TRAGÉDIE.  II 


4*1 


c 


SCENE  1 1  L 

PHEBÉ,    TÉLAIRE. 
T  É  L  A  I  R  E, 


R  u  E  L  L  E ,  en  quels  lieux  venez-vous  ! 
Osez-vous  insulter  encore 
Aux  mânes  d'un  héros  qui  pérît  par  vos  coups? 

P  H  E  B  É. 

Laisse  à  l'amour,  qui  me  dévore 
Le  soin  de  me  punir  d'un  crime  que  j'abhorre  ; 

Il  m'en  dit  plus  que  ton  couroux. 

Tu  pleures  l'amant  le  plus  tendre  ; 
Mais  de  nous  deux  encor  son  destin  peut  dépendre  5 

D'un  mot  tu  peux  le  rendre  au  jour. 

T  É  L  A  1  R  E, 
Ordonnez  •  que  faut-il  ? 

P  H  E  B  E. 

Immoler  ton  amour, 
-    Et  mon  art  forcera  l'Enfer  à  nous  le  rendre, 

T  E  L  A  I  R  E.      ^ 

Oui ,  je  m'en  impose  la  loi. 
Qu'il  vive  ,  que  pour  lui  voire  ardeur  se  signale, 

P  H  E  B  É, 

Tu  le  veux, 

T  É  L  A  I  R  E. 

Hâtez- vous;  je  cède  à  ma  rivale 
L'amour  dont  il  brûla  pour  moi. 


12  C  A  s  T  O  R  ET  P  O  L  L  U  X, 

(  0/2  enîendune  siinphonie  guerrière  et  des  chants 

de  çicioire.  ) 

Le     chœur,    derrière  Je  Théâtre, 
Triomphe ,  vengeance  ! 

T  É  L  A  î  R  E. 
C'est  le  Roi  vainqueur  qui  s'avance. 

P  H  E  B  É. 
Il  a  vengé  nos  maux  ;  il  faut  les  réparer. 

(  Elle  sort,  ) 

(  Le  jour  commence  à  paraître  ,^  et  découvre  les 
différents  inonumens  qui  sont  sur  la  scène.  ) 

SCÈNE     IV. 

POLLUX,  TÉLAIRE,  Troupe  de 
Spartiates,  d'ÀTHÉLÈTES  et  de 
Combattais,  portant  des  trophées  et  les 
dépouilles  des  ennemis^ 

POLLUX,     aux  Peuples. 


p 


E  U  p  L  E  s ,  cesse/  de  soupirer. 
Non,  ce  n'est  plus  des  pleurs  que  ces  jnânes  deman- 
dent; 

C'est  du  sang  qu'ils  attendent, 
Et  ce  sang  fatal  a  eoulé: 
Lincée  est  immolé. 
Tous    LES    CHŒURS. 
Que  l'Enfer  applaudisse 
A  de  nouveaux  concerts  ; 


TRAGÉDIE.  i3 

Qu'une  ombre  plaintive  en  jouisse. 

Le  cri  de  la  vengeance  est  le  chant  des  Enfers. 

P  O  L  L  U  X  ,     à     Ti^laire. 

Princesse  ,  une  telle  victoire 
Doit  adoucir  pour  vous  l'horreur  de  ce  séjour. 

,  >  T  É  L  A  I  R  E. 

La  vengeance  ilalte  la  gluire  , 
Mais  ne  console  pas  l'amour. 

Prince,  un  rajon  d'espoir  à  mes  jeux  se  présente  ; 
Le  pouvoir  de  Pliebé  peut  remplir  notre  atl  nte. 

Et  ravir  Castor  aux  Enfers. 
P  O  L  L  U  X. 

Non  ,  c'est  en  vain  qu'elle  le  tente, 
Et  c'est  encore  à  moi  de  réunir  vos  fers. 

Aux  pieds  de  Jupiter  j'irai  me  faire  entendre; 

Le  Dieu  qui  me  donna  le  jour , 
A  mon  frère  peut  le  rendre. 
Aux  larmes  de  son  fils  quelle  marque  plus  tendre 

Peut-il  donner  de  son  amour  ? 

T  É  L  A  I  R  E. 

Ah  ,  prince  !  osez  tout  entreprendre  ; 
Montrez  qu'aux  immortels  votre  sort  est  lié  : 
Jupiter  ,  dans  les  cieux  ,  est  le  Dieu  du  tonnerre  , 
Et  Pollux  sur  la  terre  , 

Sera  le  dieu  de  l'amitié. 
D'un  frère  infortuné  ressusciter  la  cendre  , 
L^arracherau  tombeau ,  m 'empêcher  à' y  descendre, 


\ 


14   CASTOR  ET  POLLUXj 

Tiriompher  de  vos  feux  ,  des  siens  être  Pappui , 
Le  rendre  au  jour  ,  à  ce  qu'il  aime  , 
C'est  montrera  Jupiter-même 
Que  vous  êtes  digne  de  lui. 

P  O  L  LUX,  aux  Peuples. 

Reprenez  vos  chants  de  victoire  y 
(^UQ  mon  triomphe  embelisse  ces  lieux  : 
Occupez  Télaïre  ,  et  charmez  ses  beaux  jeux 
Par  le  spectacle  de  ma  gloire. 

(  Il  sort,  ) 

(  La  scène  dallent  plus  éclairée ,  les  tombeaux 
sont  couverts  de  trophées  et  des  dépouilles  des 
ennemis,  Marche  des  combatans.  Entrée  et  com 
batsjîgurés  t/* Athlètes  et  de  Gladiateurs,  ) 

Un  A  T  H  L  È  T  E. 

Eclatez  ,  fiëres  trompettes  ; 
Faites  briller  dans  ces  retraites 
La  gloire  de  nos  Héros. 
Par  des  chants  de  victoire , 
Troublons  le  repos 

Des  échos. 
Qu'ils  ne  chantent  plus  que  la  gloire. 

(  Des  femmes  Spartiates  se  mêlent  à  la  fête 
des  guerriers  ^couronnent  les  i^ainqueurs^  etfor» 
ment  un  divertissement  de  réjouissance  pour 
célébrer  la  victoire  deVohLVX.  ) 


ACTE  TROISIÈME. 


Le  Théâtre  représente  le  vestibule  du  Teiî:*  pie 
de  Jupiter  , où  PoL LUX  doit  faire  nu 
sacrifice. 


SCENE    P  REMIERE- 

PO  LUX,  seuh 

X    R  É  S  E  N  T  des  Dieux ,  doux  charme  desliumains , 
O  divine  amitié  !  viens  pénétrer  nos  âmes  : 

Les  cœurs,  éclairés  de  tes  flammes, 
Avec  des  plaisirs  purs,  n'ont  que  des  jours  sereins. 
C'est  dans  tes  noeuds  charmans  que  tout  est  jodiV- 

sance; 
Le  temps  ajoute  encore  un  lustre  à  ta  beauté: 

L'amour  te  laisse  la  constance  ; 

Et  tu  serois  la  volupté , 

Si  l'homme  avoît  son  innocence. 

Présent  des  Dieux ,  doux  charme  des  humains, 
O  divine  amitié  !  viens  pénétrer  nos  âmes  : 
Les  cœurs ,  éclairés  de  tes  flammes , 
Avec  des  plaisirs  purs ,  n'ont  que  des  jours  sereins. 
(  Le  Temple  soui^re  y  etles  prêtres  en  sortent,  )• 
Mais  le  Temple  est  ou  vert ,  le  Graud-Prêtre  s'avance. 


i6    CASTOR  ET  P  O.L  L  U  X, 

SCÈNE     IL 

POLLUX,leGRAND-PRÊTRE 

du  JvTiTER^  Peuples  ei  suite 

^f^  G  R  A  N  D  -  P  R  Ê  T  R  E . 

iIe  grand-prêtre. 

X-/  E  souverain  des  Dieux- 

Va  paroître  eu  ces  lieux 
Dans  tout  l*éclat  de  sa  puiîîsaiice  :  •  î 

Tremblez,  redoutez  sa  présence! 

Fujez ,  mortels  curieux. 

Ce  n'est  que  par  les  feux  et  la  voix  du  tonnerre 

Qu'il  s'annonce  à  la  terre: 
Et  Taspect  redouté  de  son  front  glorieux, 

N'est  vu  que  par  les  Dieux. 

Qu'au  seul  nom  de  ce  Dieu  suprême  , 
De  respect  etd'eifroi  tous  les  cœurs  soient  glacés  ; 
FujeZ  et  frémissez: 
i  Fujons  et  frémissons  nous  même. 

CHŒUR  DE  PRÊTRES.  M 

,     .Fujons  et  frémissons  nous  même.  ^ 

^  (    Z(?  Théâtre  change:  Jupiter  paroit  dans  son 

palais ,  assis  sur  un  trône  et  em^ironné 
i  de  toute  sa  gloire .    ) 

Il        .    ■ 


TRAGÉDIE. 


SCÈNE    1 1 L 

JUPITER;    POLLUX. 
VOLLIJX  aux  pieds  de  J  U  ?  l  T  E  R. 

IVx  A  voix,  puissant  maître  du  monde, 
S'^^ève  en  tremblant  jusqu'à  toi  : 
D'un  seul  de  tes  regards  dissipe  mon  effroi , 
Et  calme  ma  douleur  profonde. 

O  mon  père,  écoute  mes  vœux. 

L'immortalité ,  qui  m'enchaîne, 

Pour  ton  fils  désormais  n'est  qu'un  suplice  affreux. 

Castor  n'est  plus ,  et  ma  vengeance  est  vaine, 
Si  ta  voix  souveraine 

Ne  lui  rend  des  jours  plus  heureux. 

O  mon  père,  écoute  mes  vœux. 

JUPITER. 

Que  son  retour,  mon  fils,  auroit  pour  moi  de  char- 
mes ! 
Qu'il  me  seroit  doux  d'j  penser  ! 
Mais  l'enfer  a  des  ioix  que  je  ne  puis  forcer; 
Et  le  sort  me  défend  de  répondre  à  tes  larmes. 

POLLUX. 

Ah  !  laisse-moi  p?rcer  jusques  aux  sombres  bords. 
J'oviv.rira.i  ^spus  ;nes  pas  les  antres  de  la  terre: 


i8       CASTOR   etPOLLU  X, 

J'irai  braver  Pluton,  firai  chercher  les  morts 

A  la  lueur  de  ton  tonnerre; 
j'enchaînerai  Cerbère;  et  plus  digne  des  cieux, 
Je  reveirai  Castor  et  mon  père  et  les  dieux. 

JUPITER. 
J'ai  voulu  te  cacher  le  sort  qui  te  menace. 
D'un  frère  infortuné  tu  peux  briser  les  fers, 

Si  tu  descen  Is  dans  les  enfers; 
Mais  il  c*t  ordonné,  pour  prix  de  ton  audace, 

Que  tu  prennes  sa  place. 

Tes  jours  éternels,  tes  beaux  jours 
Sont  trop  dignes  d'envie. 
P  O  L  L  U  X. 
Non,  je  ne  puis  soufirlr  la  vie, 
Si  Castor  avec  moi  n'en  partage  le  cours. 
Je  reverrai  mon  frère,  il  verra  Télaïre; 
Il  est  aimé ,  c'est  k  lui  d'être  hc ureux. 
Chaque  instant  qu'ici  je  respire , 
Est  un  bien  que  j'enlève  à  son  cœur  amoureux. 

JUPITER. 
Avant  que  de  céder  au  zèle  (jui  t'inspire, 
Vois  ce  que  tu  perds  dans  les  cieux. 

Enfans  du  ciel,  charmes  de  mon  empire. 
Plaisirs,  vous  c[ui  faites  les  dieux, 
Triomphez  d'un  dieu  qui  soupire. 

(  Z/?5Pi  AisTRS  CE  LESTES,  conduîts parKi^t 

entrent  en  dansant ,  ils  entourent  P  o  L  L  U  X , 
J  u  p  I  T  E  R  5^  retire.  ) 


TRAGÉDIE.  19 


SCENE    IV. 

POLLUX,HEBE,/^5PlaisirsCelestes 

çui  tiennent  des  guirlandes  dejleurs  dent  ils 

çeuleni  enchaîner  P  o  L  l  u  x, 

(  Entrée  J'He  b  e  et  de  sa  suite ,  formée  par  les 
Plaisirs  CÉLESTES.  ) 

P  O  L  L  U  X. 


T 


Out  réclat  de  rOlirnpe  est  en  vain  ranimé  : 
Le  ciel  et  le  bonheur  suprême 
Sont  aux  lieux  où  Ton  aime, 
Sont  aux  lieux  où  Ton  est  aimé. 

LE  CHŒUR. 
Qu'Hébé,  de  fleurs  toujours  nouvelles  , 
Forme  vos  chaînes  éternelles. 
(  H  É  B  É  danse  et  ne  cesse  d'attaquer  P  o  L  L  u  x 
qu'elle  ^eut  enchanter,  ) 

UNE  SUIVANTE  d'Hébe. 

Voici  des  dieux 
L'asjle  aimable  ; 
Goûtez  des  cieux 
La  paix  durable. 

Plus  de  plaisirs 

Que  de  désirs  ; 

Des  chaînes , 


20     C  A  s  T  O  R  ET  P  Ô  L  L  U  X. 

Sans  peines; 
Et  de  beaux  jours 
Comptés  toujours 
Par  les  Amours. 

Si  Ton  soupire, 
C'est  sans  mai  ijre  : 
Est-  ©n  charmé? 
L'on  plàit  de  même  : 
On  dit  cju'on  aime  ; 
On  est  aimé, 

P  O  L  L  U  X. 

Ah!  sans  le  trouble  où  je  me  vois  , 
Charmans  plaisirs,  je  vous  serois  fidèle; 
Mais ,  dans  l'excès  de  ma  douleur  mortelle  , 

Plaibirs,  que  voulez-vous  de  moi  î 

(  Noiwelle  attaque  d'H  É  B  É.  ) 

UNE  SUIVANTE  D'HÉBii. 

Que  nos  jeux 
Comblent  vos  vœux  : 
Suivez  Hébé;  que  votre  jeunesse; 
Sans-cesse, 
Renaisse, 
Pour  être  à  jamais  heureux. 

La  grandeur  la  plus  brillante 
N'est  point  l'attrait  qui  nous  tcnlc; 


TRAGÉDIE.  21 

Venez ,  voyez  ,  goûtez 
Les  célestes  voluptés. 
Nous  aimons,  Jupiter-même 
N*est  heureux  que  quand  il  aime. 

Aimez ,  cédez ,  suivez 
Les  biens  qui  vous  sont  réservés. 

(  La  danse  recommence-,  7^5 P  L Aïs ïR S  Célestes 
font  de  nouveaux  efforts  pour  arrêter  P  o  L  L  U  x.  ) 

Si  je  romp  vos  aimables  chaînes , 
J'épargne  aux  dieux  ma  honte  et  mes  soupirs. 
Je  descends  aux  enfers ,  pour  oublier  mes  peines; 
Et  Castor  renaîtra ,  pônr  goûter  vos  plaisirs. 

(   P  o  L  L  U  X  rom^p  les  guirlandes  de  Jleurs  dont  il 
est  enchaîné -i  et  se  dérobe  aux  PLAISIRS 

qui  le  suivent.  ) 


FIN  DÛ  TROISIÈME  ACTE. 


22   C  A  S  T  O  R  E-r  P  O  L  L  U  X , 

ACTE  QUATRIÈME. 

Le  Théâtre  représente  Tentrée  des  enfers  , 
où  l'on  descend  par  des  rochers  escarpés. 
Dans  le  fond  est  une  caverne  qui  vomît 
des  flammes,  et  dontlePassageestdeffendu 
par  des  Monstres  ,  des  Spectres  et  des 
Démons. 


SCENE    P  REMIERE. 

P  H  E  B  É  ,    seule, 

XZj  s  p  r  I  t  s  >  soutiens  ^e  mon  pouvoir , 
Venez,  volez,  remplissez  mon  pouvoir. 
Descendez  au  rivage  sombre; 
Il  faut  lui  ravir  uu  ombre. 

(  Les  Esprits  et  Puissances  magiques  descendent 
des  rochers  à  la  iJoix  (/^  P  H  E  B  É ,  qui  forme  ses 
encliantemens.  ) 

SCÈNE    II. 

PHEBÉ,     ESPRITS     MAGIQUES. 

P  H  E  B  É. 

XVassemelez-vous  ,  secondez  mon  ardeur  : 


TRAGÉDIE.  a3 

Des  monstres  des  enfers  combaltez  la  fureur. 

Le  C  H  Π U  R. 
Des  monstres  des  enfers  combattons  la  fureur. 

P  H  E  B  É. 

Redoublez  vos  charmes  ^ 

Pénétrez  ce  séjour  , 

Impénétrable  au  jour  : 

Redoublez  vos  charmes  ; 
Empruntez  les  traits  de  T Amour 
Pour  avoir  de  plus  fortes  armes. 

Le    C  H  Π U  R, 

Des  monstres  des  enfers,  etc. 

P  H  E  B  É.   . 

Mais,  que  vois -je  l 

(  Elle  apperçoit  Mercure  ,  qui  descend:  PoLLUX 
paroît  en  méme-îems,  ) 

S  C  È  N  E  1 1  L 

MERCURE,   PHEBÉ,  POLLUX, 

EspritsMagîques, 

MERCURE. 

jL    ke  2  é ,  tu  fais  de  vaîns  elforls; 
De  tes  encliantemens  vois  l'inutile  usage  r 
Le  fils  de  Jupiter  aura  seul  l'avantage 
De  pénétrer  aux  sombres  bords. 


7^4    CASTOR  ET  POLLUX, 

,      P  H  E  B  É. 

Ah!  Prince  ,  où  courez-vous  ? 

POLLUX. 

Je  vole  à  la  victoire 
Qui  doit  couronner  mes  traveaux. 
Le  chemin  des  enfers^  sous  les  pas  d'un  héros, 
Devient  le  chemin  de  la  gloire. 

P  H  E  B  É. 

Laissez-moi  devancer  vos  pas  ; 
Laissez-moi  braver  tout  obstacle, 
A  l'Amour  est  dû  le  miracle 
De  triojnpher  du  trépas. 

POLLUX. 

Allons,  Mercure  ,  où  tu  m*"  guMes. 
L*ardeur  que  j'éprouve  en  c  •  jour 
Prête  à  mon  amitié  des  ailes  plus  rapides 
Que  ne  sont  celles  de  l'Amour. 

(  //  f^eul  entrer  dans  la  cai^erne  ;  les  monstres  et  les 
dénions  sortent  des  enfers  ,  pour  dépendre 

le  passage.  ) 


SCENE    IV. 

r 

Les  ACTEURS  delà  scène  précédente  ,  DEMONS , 
MERCURE,  POLLUX^/PHEBÉ. 


T 


Ombez,  rentre?  Jane  lescla vage; 

Arrêtez 


TRAGEDIE,  ^5 

Arrêtez,  Démon*  furieux. 
P  o  L  L  u  X.  Livrez-moi 


>  Livr?z-iui 

•3 


PhebÉ      )  ,,  )  cet  affreux  passage 

Mercure, 


P  0  L  L  u  X.  Et  redoutez 

PhebÉ.    *)  /lefilsdupluspLiissaiitdes 

MERCURE.r^'^'P^'^^M       Dieux. 

C  H  Œ  U  R  J^'5  D  É  M  o  N  s. 

Sortons  d'esclavage; 
Fermon<3-lui  cet  afIVeux  passage. 

(  Danse  des  Démons,  qui  i^eulent  effrayer  PoUux.  ) 

C  H  Œ  U  R  c/^5  D  É  M  o  N  S. 

Brisons  tous  nos  fers;  ^ 

Ebranlons  la  terre , 
Embrasons  les  airs  ; 
Qu'au  feu  du  tonnerre 
Le  feu  des  enfers 
Déclare  la  guerre  : 
Brisons  tous  nos  fers» 

Jupiter,  lui-même; 

D 


26  CASTOR  ET  POLLUX, 

Doit  être  soumis 
Au  pouvoir  suprême 
Des  enfers  unis. 
Ce  Dieu  téméraire 
Veut-il  pour  son  îils , 
Détrôner  son  frère  l 

Brisons  tous  nos  fers  ,  etc. 
(  LesDénwnscontinuenlleurdame,  ctredouhlent 
leurs  efforts  poin-écarter?oLi.VX.  Les  Fîmes 
sorlent  des  enfers ,  armées  defambeaux  et  de  ser- 
pents. Cette  action  est  suivie  d'u.e  reprise  du 
chœur  précédent ,  pendant  laquelle   Jol^vx 
combat  les  Démons  :  M^^CV^^  Us  frappe  de 
son  caducée  et  passe  a,ec  P  o  L  L  U  x ,  dans  la  ca~ 
,erne.  P  H  E  b  É  ,  qui  ne  peut  les  suivre,  se  h.re 
au  désespoir  ,  se  donne  un  coup  de  poignard  et 
se  précipite  dans  l'abîme.  ) 

SCÈNE    V. 

LeTkédtrecMn^^eetrcprésentelesCbamp^^^^^^^^^ 
On  roit  lefleiwe  Léthé,  qui  serpente  dans  ce  se 
■our  délicieux.  Des  O..^^S  Heureuses par^^ 
sent  errer  dans  l'JMgnemcnt ,  et  tiennent  a  la 

rencontre  deCxSTOR. 
CASTOR,  OMBRESHEUREUSES. 

CASTOR. 

SkJour  de  l'éternelle  paix. 


TRAGÉDIE. 


27 


Ne  calmerez-vous  point  mon  âme  Impatiente? 
L'Amour  jusqu'ences  lieux  me  poursuitde  ses  traits  : 

Castor  ïij  voit  que  son  amante  , 

Et  vous  perdez  tous  vos  attraits. 

Séjour  de  l'éternelle  paix, 
Ne  calmerez-vous  point  mon  âme  impatiente  l 

Que  ce  murmure  est  doux!  que  cet  ombrage  est  frais! 
De  ces  accords  touchans  la  volupté  m'enchante  : 

Tout  rit,  tout  prévient  mon  attente  ;, 

Et  je  forme  encor  des  regrets. 

Séjour  de  l'éternelle  paix 
Ne  calmerez-vous  point  mon  âme  inpatlent»? 

(  Les  Ombres  Heureuses  dansent.  ) 

CHŒUR  des  Ombres  Heureuses. 

Qu'il  soit  heureux ,  comme  nous  ! 
Des  biens  que  nous  goûtons  sur  cet  heureux  rivage 
Nos  cœurs  ne  sont  point  jaloux: 
Il  les  voit,  qu'il  les  partage  ! 
■  Qu'il  soit  heureux,  comme  nous  ! 

(    Différens  quadrilles  d'Ombres  Heureuses  s'ap- 
prochent ^^  C  A  s  T  o  R.  ) 

Une    ombre. 

Pour  toujours 
Ce  rivage 
Est  sans  nuit  et  sans  orage  : 
Pour  toujours 
Cette  aurore 
Fait  éclore 


28   CASTOR  ET  P  O  L  L  U  X, 

Nos  beaux  jours. 

C^est  le  port 

De  la  vie; 

C'est  le  sort 

Qu'on  envie. 
Le  monde  et  ses  faux  attraits. 

Sout-il  faits 
Pour  nos  reo^rets  ? 

Noti,  jamais 

Lieux  propices , 
Vous  n'odrez  que  des  délices; 

Non,  jamais 

Cet  empire 

Ne  respire 

Que  la  paix. 

(  Des  Danses  légères  exprunent ,  par  des  jeux 

différens ,  le  caractère  des  O  m  b  R  E  S.  ) 

Une    ombre. 

Sur  les  ombres  fugitives 
L'Amour  lance  encor  des  feux  ; 
Mais  il  ne  fait  sur  ces  rives 
Qu'un  peuple  d'amans  heureux. 

(  On  danse  ^  et  les  Ombres  suwent  toujours  Castor.  ) 

Une     ombre,     altematU^ement  a^'ec  le 

CHŒUR. 

Dans  ces  doux  asiles 
Vos  vœux  seront  couronnés 
Yvntz  : 


TRAGEDIE.  29 

Aux  plaisirs  tranquilles 
Ces  lieux  charmans  sont  destinés. 

Ce  fleuve  enchanté, 
L'heureux  Léthé , 
Coule  ici  parmi  les  fleurs  : 
On  n'y  voit  ni  douleurs^ 
Ni  soucis  5  ni  langueurs , 
Ni  pleurs  : 
L'oubli  n'emporte  avec  lui 
Que  les  soins  et  Tennui  : 
Ce  Dieu  nous  laisse 

Sans  cesse 
Le  souvenir 

Du  plaisir. 

(  Les  Ombres  reprennent  leurs  danses ,  qui 
sont  Lout-à-coup  interrompues^  ) 

CHŒUR,  derrière  le  Théâtre. 
Fuyez  ,  fuvez  ,  ombres  légères  ! 
Nos  jeux  sont  prophanés  par  des  jeux  téméraires. 

(  P  o  L  L  u  X  paroît ,  et  les  O  m  B  r  e  S  étonnées 

fuient  dei^ant  lui.  ) 


SCENE     VI. 

POLLUX,  CASTOR,  LES  OMBRES, 
MERCURE,     dans  Véloignement, 
P  O  L  L  U  X. 

ASSUREZ-vous,  habitans  fortunés. 


3o    C  A  S  T  O  R  ET  P  O  L  L  U  X, 

Loin  de  troubler  ce  favorable  asile , 

y  y  viens  goûter  la  paix  que  vous  donnez. 

C*est  ici  des  Héros  la  demeure  tranquille. 
Chère  ombre  ,  paroissez  ! . . 

CASTOR,     appercevant    P  O  L  L  U  X. 

O  mon  frère  1  est-ce  vous  ? 
O  rbomens  de  tendresse  ! 

ENSEMBLE. 

O  momens  les  plus  doux  î 
O  mon  frère  est-ce  vous  \ 

P  O  L  L  U  X. 

C*est  moi  qui  viens  briser  la  chaîne  qui  te  lie  : 
C*est  moi  qui  t'ai  vengi  d'un  rival  odieux. 

CASTOR. 
Je  verrois  la  clarté  des  Cieux  \ 

P  O  L  L  U  X. 

C'est  peu  de  te  rendre  à  la  vie  , 
Le  sort  t' élève  au  rang  des  Dieux. 

CASTOR. 

Qu'entends-je  !  quel  bonheur!  jequitterois  ceslieux  \ 
Et  le  Ciel  près  de  toi  me  permettroit  de  vivre  ? 

P  O  L  L  U  X. 

Non!  tu  jouiras  seul  d'un  partage  si  doux; 

Et  L"  destin  jaloux 
Va  mUmpôser  les  fers ,  dont  ma  main  te  délivre. 


TRAGEDIE. 

CASTOR. 

Par  ton  suplice,  ô  Ciel  !  j'acheterois  k  jour  l 

P  O  L  L  U  X, 

Tout  l'univers  demande  ton  retour  : 
Règne  sur  un  peuple  fidèle. 

CASTOR. 

Le  fils  de  Jupiter  doit  lui  donner  la  loi. 

P  O  L  L  U  X. 

Vois  dans  les  Cieux  la  gloire  t'appelle, 

CASTOR. 

J'immole  au  seul  plaisir  qui  m'approche  de  toi 
Toute  la  grandeur  immortelle, 

P  O  L  L  U  X. 

Télaïre  t'attend. 

CASTOR. 

Cruel ,  épargne  -  moi  : 
Elle-même ,  à  ce  prix,  verroit  avec  effroi 
Renouer  de  mes  jours  la  trame  criminelle. 

P  O  L  L  U  X. 

Castor,  nous  la  perdrons  tous  deux. 
Si  tu  tardes  encor,  tu  lui  coûtes  la  vie  ; 
Hâte- toi,  va;  le  Ciel  t'ordonne  d'être  heureux 

Et  c'est  ton  rival  qui  t'en  prie. 

(  Il  embrasse  son  frère,  ) 
CASTOR. 
Oui ,  je  cède  enfin  à  tes  vœux  : 


32     C  A  s  T  O  RetP  O  L  L  U  X, 

J*irai  sauver  les  jours  d'une  amante  fidèle^ 
Je  renaîtrai  pour  elle. 

Maïs,  puisqu'eniin  je  touche  au  rang  des  immortels, 

Je  jure,  par  le  Stix  ,  qu'une  seconde  aurore 

Ne  me  trouvera  pas  au  séjour  des  mortels. 

Je  ne  veux  que  la  voir  et  Tadorer  encore  , 

Et  je  te  rends  le  jour ,  ton  Trône  et  tes  Autels. 

POLLUX,àMERCURE. 

Ses  jours  sont  commencés; 
Volez  ,  Mercure  ,  obéissez. 
Rendez  un  Immortel  au  séjour  du  tonnerre, 

Un  Héros  à  la  terre  ; 
Volez,  Mercure  ,  obéisez. 

CHŒUR    DES    OMBRES. 

Revenez ,  revenez  sur  les  rivages  sombres  : 
Habitez  tous  deux  parmi  nous  , 
Et  nous  rendrons  les  Dieux  jaloux 
De  la  félicité  des  ombres. 

(  Mercure  enlève  Castor  dans  un  nuage  : 
P  o  L  L  u  X  lui  tend  les  bras ,  et  se  relire  ai^ec 
les  Ombres  fortunées,  ) 

FIN    DU    QUATRIÈME    ACTE. 


TRAGÉDIE.  3 


*:► 


ACTE    CINQUIÈME. 

Le  Théâtre  représente  une  vue  agréable  des 
environs  de  la  ville  de  Sparte  ,  précédée 
d^un  arc  de  triomphe  ,  orné  de  festons  et 
de  guirlandes  pour  le  retour  de  Cas  toPu. 

SCÈNE    PREMIÈRE. 

CASTOR,  TÉLAIRE. 

TÉLAIRE. 

JLj  E  Ciel  est  donc  touché  des  plus  tendres  amours  i 
Au  jour,  que  je  quittois,  votre  voix  me  rappelé: 
Vous  vivrez ,  pour  m'être  fidèle  , 
Et  vous  vivrez  toujours. 

CASTOR. 

Hélas  ! 

TELAIRE. 

Mais  pourquoi  ces  allarmes  ? 
Vous  m'aimez  ,  je  vous  vois. . . 

CASTOR. 

Télaïre,  vivez. 


34    CASTOR  ET  POLLUX, 

T  É  L  A  I  R  E. 

Qu'entends -je  !  quels  discours  ? 

CASTOR. 

Télaîre. . . 

T  É  L  A  I  R  E. 

Achevez. 
Le  plus  beau  de  nos  jours  est-il  fait  pour  des  larmes î 

CASTOR. 
A  d'éternels  adieux  il  faut  nous  préparer? 

TELAIRE. 

Que  dites -vous  ?  6  Ciel  1 

CASTOR. 

Il  faut  nous  séparer: 
Je  retourne  aux  rivages  sombres. 

TELAIRE. 

Castor!  et  vous  m'abandonnez? 

CASTOR. 

Mon  frère  et  mes  serinens  m'attendent  chez  les 
ombres. 

TELAIRE. 

A  vous  pleurer  encor  mes  yeux  sont  condamnés  ! 
A  peine  je  vous  vois  !  à  peine  je  respire, 
Castor  !  et  vous  m'abandonnez  ? 

CASTOR. 
Viiistant  fatal  approche,  11  me  presse,  11  expire... 


TRAGÉDIE.  35 

Que  cet  instant  a  d'horreurs  et  d'appas  ! 

T  É  L  A  I  R  E. 

Hélas  !  te  puis- je  croire  , 
Quand  parjure  à  Tainour,  ingrat,  tu  ne  fais  gloire 
Que  d'être  fidèle  au  trépas  ? 

(  On  entend  des  chants  de  réjouissance.   ) 

Mais  j'entends  des  cris  d'allégresse. 

SCÈNE    II. 

CASTOR,  TÉLAlRE,i/-oMyt7^<feSpARTiATES, 

qui  viennent  au-devant  (/^Castor. 

Le  C  H  Π U  R. 


V 


I V  E  z ,  heureux  époux. 

T  E   L  A  I  R  E. 

Au-devant  de  tes  pas  tout  ce  peuple  s'ejnpresse  : 
Veux-tu  troubler  ses  jeux  ?  ils  étoient  faits  pour  nous. 

C  A  S  T  O  R ,  az^  Peuple. 

Hélas  !  vous  ignorez  que  votre  attente  est  vaine. 

T  É  L  A  I  R  E  e/  /^  C  H  Œ  U  R. 

Pourquoi  vous  dérober  à  des  transports  si  doux  ? 

CASTOR. 

Peuples ,  éloignez-vous. 
Vos  désirs  augmentent  ma  peine. 

(  Le  Peuple  sort,  ) 


36     C  A  S  T  O  R  ET  P  O  L  L  U  X^ 


SCENE     III. 


E 


CASTOR,     TELAIRE. 
T  É  L  A  I  R  E. 


H  quoi  !  tous  ces  objets  ne  peuvent  t'atteuJrir  l 

CASTOR. 
Vouiez-vous  qu'aux  enfers  j'abandonne  mon  frèreî 

TELAIRE. 
Les  DieuY  nous  le  rendront  ;  Jupiter  est  son  père. 

CASTOR, 
Vivez,  et  laissez -moi  mourir. 

TELAIRE. 
Tu  meurs  ..!  pour  qui  veux-tu  (jue  je  respire  encore? 

CASTOR. 

Régnez  ;  mon  frère  est  immortel , 
Mon  frère  vous  adore. 

TELAIRE. 

Non,  je  n'attendrai  pas  un  destin  si  cruel  :      » 
J'en  atteste  lesDieux  et  la  mort,  que  j'implore. 

CASTOR. 

ArrêtcE,  redoutez  le  charme  de  vos  pleurs. 
Si  j'ôsois  balancer,  il  est  des  Dieux  vengeurs  : 
Sur  moi,  sur  vous,  peut-être,  ils  puniroient  mallame. 

TELAIRE. 

De  quelle  horreur  encor  viens-tu  frapper  mou  arncî 


TRAGÉDIE.  Z^ 

CASTOR. 

'  J'armerois  Jupiter  ;  son  fils  a  mes  serraens. 

T  É  L  A  I  R  E. 
Ils  ont  aimé ,  ces  Dieux  ;;  ils  plaindront  des  amans. 

(  On  entend  plusieurs  coups  de  tonnerre,  ) 

Qu*al-je  entendu  î  quel  bruit  !  quels  éclats  de  tonnerre! 
Héla»  1  c'est  moi  qui  t'ai  perdu. 

CASTOR. 

J'entends  frémir  les  airs  !  je  sens  trembler  la  terre  î 
C'en  est  fait  !  j*ai  trop  attendu. 

ENSEMBLE. 

Arrête,  Dieu  vengeur,  arrête! 

(  Le  bruit  redouble,  ) 

CASTOR. 

L'enfer  est  ouvert  sous  mes  pas  1 

La  foudre  gronde  sur  ma  tête  ! 

(  T  É  L  A  I  R  E  tombe  évanouie  de  frayeur,  ) 

Ciel  !  ô  Ciel  !  Télaïre  expire  dans  mes  bras  ! 
Arrête ,  Dieu  vengeur  ,  arrête  ! 

(    Une  simplionie  mélodieuse  succède  au  bruit  du 

tonnerre,  ) 

Mais  le  bruit  cesse .  .  .  Ouvrez  les  veux  r 
A  nos  tourmens  la  nature  est  sensible, 
Et  ces  concerts  harmonieux 
Annoncent  un  Dieu  plus  paisible. 

(Jupiter  descend  du  Ciel  sur  son  Aigle,  ) 


38    C  A  S  T  O  RetP  O  L  L  U  X, 


S  C  E  N  E  I  V. 

JUPITER,     CASTOR,     TÉLAIRÇ, 

JUPITER. 


L 


ES  Destins  sont  contens  :  ton  sort  est  arrêté; 
Je  te  rends  à  jamais  le  serment  qui  t'engage  : 

Tu  ne  verras  plus  le  rivage 

Que  ton  frère  a  déjà  quitté. 
Il  vit  5  et  Jupiter  vous  permet  le  partage 
De  rimmortalité. 

(  P  o  L  L  u  X  paraît,    ) 


SCENE    V. 

JUPITER,  TÉLAIRE,CASTOR,POLLUX. 

CASTOR. 


M 


ON  frère  !  ô  Ciel  ! 

P  O  L  L  U  X. 

Dieux  !  je  retrouve  ensemble 
Tous  les  objets  de  mon  amour  ! 

CASTOR, 

J'allois  te  délivrer  du  ténébreux  séjour  , 
Quand  le  Ciel  enûn  nous  rassemble. 

CASTOR  ^^TÉLAIRE. 
Dieux,  qui  formez  pour  nous  un  sort  si  pkia  d*appas  ^ 


TRAGÉDIE.  39 

O  !  Dieux  ne  nous  séparez  pas. 
JUPITER. 
Séjour  de  ma  grandeur,  où  je  dicte  mes  loix:. 
Vaste  empire  des  Cieux  ,  ouvrez-vous  à  ma  voir. 

SCÈNE    DERNIÈRE. 

(  Les  Cieux  s'oui^^rent  et  font  i^oîr^  au  milieu  des 
airs^  le  palais  de  Jupiter  ^  d'  U7ie  architecture  écla- 
tante et  légère ,  porté  sur  des  nuages.  Il  comjnu- 
nique  des  deux  côtés].^  par  des  colonnades  ,  aujc 
pavillons  des  principales  divinités  célestes  ,  dési- 
gnés par  leurs  divers  attributs.  Dans  le  lointain 
paroît  une  partie  du  Zodiaque  .^  où  se  voit  la  pla- 
ce destinée  à  la  constellation  des  Jumeaux.  Le 
globe  du  Soleil  est  au  milieu .,  parcourant  sa  car- 
rière. Toutes  les  divinités  du  Ciel  se  rassemblent^ 
ainsi  que  les  génies  qui  préside Jit  aux  planettes 
et  aux  constellations.  ) 

JUPITER,POLLUX, CASTOR,  TEL  AIRE, 
7^5  G  É  N I E  s  célestes ,  7^5  H  e  u  R  e  S ,  etc. 

JUPITER, ûCastor^/Pollux, 


T 


AN  T  de  vertus  doivent  prétendre 

Au  partage  de  nos  autels. 
Offrons  à  l'univers  des  signes  immortels 
D'une  amitié  si  pure  et  d'un  amour  si  tendre. 
Venez  ,  jeune  Immortelle,  embellissez  les  Cieux; 

Le  Sort  accomplit  ses  promesses. 


4o     CASTOR  etP  O  L  L  U  X. 

C'est  la  valeur  qui  fait  les  Dieux  / 
Et  la  beauté  fait  les  Déesses. 

Tous    LES    CHŒURS. 
Que  les  Cieux  ,  que  la  terre  et  l'onde 
Brillent  de  mille  feux  divers  ; 
C'est  l'ordre  du  maître  du  monde , 
C'est  la  fête  de  l'univers. 

(  Ballet  Ji givré  des  Heures^/  des  Planettes.  ) 

CASTOR. 
Qu'il  est  doux  de  porter  tes  chaînes  , 

Tendre  Amour!  tes  plaisirs  font  oublier  tes  peines. 

J'ai  fait  briller  tes  feux  dans  cent  climats  divers , 
Pour  montrer  à  tout  Tunivers 
Qu'il  est  doux  de  porter  tes  chaînes. 

Tout  m'a  dit  dans  les  enfers 
Qu'il  est  doux  de  porter  tes  chaînes  : 
Et ,  quand  les  Cieux  me  sont  ouverts, 
J'entends  retentir  dans  les  airs 
Qu'il  est  doux  de  porter  tes  chaînes. 

(  Les  Chœurs  se  mêlent  à  la  ^'oix  de  C  \ST oK^et 
répètent  ce  dernier  ters.   Lafétc  continue.  ) 
Le  C  H  Π U  R. 
Que  les  Cieux,  (jue  la  terre  et  Ponde 
Brillent  de  mille  feux  divers  ; 
C'est  l'ordre  du  maître  du  monde  , 
C'est  la  fête  de  l'univers. 

(     Un  dii^ertissement  général  termine  V  Opéra    ) 

FIN., 


Ca^c^  ^  ^lùi^c 


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