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I
LL^^q^J-^r^"^
J
I
CHARLES BAUDELAIRE
Il a été tiré des exemplaires sur papier vergé ,
et 6 exemplaires y numérotés , sur Chine.
CHARLES
BAUDELAIRE
SOUVENIRS — CORRESPONDANCES
BIBLIOGRAPHIE
SUIVIE DE PIECES INEDITES
TAI^IS
CHEZ RENÉ PINCEBOURDE
14, rue de Beaune (quai Voltaire)
87
1072
AVERTISSEMENT
DE L^ÉDITEUR
En 1868, nous avons fait un premier appel
aux amis de Baudelaire, aux curieux de litté-
rature, aux amateurs d'autographes qui pou-
vaient posséder ou des morceaux inédits, ou
des parties de la correspondance du poète.
Cet appel , souvent renouvelé , a été entendu ;
un volume, mais assez mince , est le résultat
de nos recherches et de nos sollicitations
obstinées.
Il sera parcouru avec intérêt, nous l'espérons.
Les pièces et documents que voici embrassent
à peu près dans son ensemble , par des côtés
particuliers, la vie littéraire d'un génie d'ex-
ception ; elles font pénétrer, plus avant qu'une
biographie régulière dans l'intimité, de ses ha-
— 2 —
bitudes, ide ses mœurs, de ses rêves,- de ses
vertus, de ses amitiés, de ses idées.
De compte fait, cette publication est la
quatrième consacrée à Charles Baudelaire,
depuis sa mort arrivée le i" septembre 1867;
— d^autres suivront, nous le savons.
La mémoire de Baudelaire a ses fidèles; ses
œuvres ont leur public; — non pas le plus
nombreux.
Un de nos illustres disait il y a quelque
vingt ans : a Ce Baudelaire est une pierre
de touche : il déplaît invariablement à tous les
imbéciles . »
Sa personne n'a pas cessé de partager ce
privilège avec ses écrits.
BIOGRAPHIE
ÎS^S«S*eS«S^S^iS*e3«S^S«£^Si
A Monsieur René Pincebourde, éditeur
ETAis^ comme on vous l'a dit,
If monsieur^ le camarade de Charles
Baudelaire, au collège de Louis-
le-Grand; nous avons usé, sur les
mêmes bancs, plus d'une culotte. Je
Tavoue pourtant, à ma honte, le Bau-
delaire en habit bleu troué aux coudes,
en bas chinés, en gros souliers, est
complètement sorti de ma mémoire. Je
me souviens seulement de sa brusque
disparition avant la fin de nos études.
— 6 —
Je ne le retrouvai qu'au sortir du
collège. Nous nous voyions le plus
souvent chez un ami commun/ dont
plus d'un contemporain devenu célèbre
pourrait vous décrire le logis très-fré-
quenté en 1840.
Deux petites chambres, au cinquième,
avec balcon; décor composite , comme
les aptitudes du locataire, helléniste
enragé, peintre de paysages, poëte,
alchimiste, mystagogue et chasseur de
serpents. Des bustes, des statuettes, des
ébauches, des bas-reliefs cloués aux
murailles ou traînant sur chaque
meuble , rien dans tout cela d'extraor-
dinaire au quartier latin. Les fourneaux,
les matras, les tubes en trombones, les
fioles inquiétantes, pleines d'or et de
diamants , en préparation , auraient
attiré davantage l'œil du bourgeois, et
son étonnement eût augmenté devant
l'ornement principal du sanctuaire,cette
fameuse armoire nauséabonde quoique
vitrée, où grouillaient dans l'alcool, sous
— 7 —
de formidables étiquettes^ les batraciens
invraisemblables^ les lézards géants et
les vipères de choix ^ assassinés à Fon-
tainebleau.
C'est dans ce cher, grenier, d*oîi se
sont envolées les heures les plus regret-
tées de ma jeunesse , c est dans ce cadre
étrange et sur ce fond bariolé, que je
retrouve l'image la plus nette de Bau-
delaire, que je Tai le mieux connu, à
vingt ans, cherchant sa voie entre Villon
et Ronsard, fou de vieux sonnets et de
jeunes peintures, raffiné, paradoxal,
bohème et dandy.
Dandy surtout, et grand théoricien
d'élégance. Pas un pli de son habit
qui ne fût raisonné. Aussi quelle mer-
veille que ce costume noir, toujours le
même, à toute heure, en toute saison!
Ce frac, d'une' ampleur si gracieuse,
dont une main cultivée taquinait les
revers; cette cravate si joliment nouée;
ce gilet long, fermant très-haut le pre-
mier de ses douze boutons et négligem-
— 8 —
ment entr'ouvert sur une chemise si
fine, aux manchettes plissées; ce pan-
talon « tirbouchonnant » sur des sou-
liers d*un lustre irréprochable ! Que de
cabriolets leur vernis m'a coûtés ! Hélas !
c'était le bon temps.
Baudelaire habitait déjà Tîle Saint-
Louis, mais pas encore cet hôtel Pi-
modan où Font connu ses amis de la
seconde époque^ plus intimement asso-
ciés à sa vie littéraire. C'était dans un
rez-de-chaussée du quai de Béthune que
notre camarade avait installé ses bahuts,
sa vieille table aux pieds tournés, ses
miroirs de Venise, ses livres, en très-
petit nombre ( Ronsard et sa Pléiade :
Régnier n'est venu que plus tard ), ses
chats, et certain lit de chêne brun, sans
pieds ni colonnes, sorte de cercueil
sculpté dans lequel je suppose qu'il cou-
chait quelquefois.
Nous allions rarement le relancer
dans son île, sûrs que nous étions de le
voir arriver lorsqu'il avait limé et poli
« quelque machine nouvelle »,
— 9 —
Après- s'être fait quelque peu prier, il
nous disait, ou plutôt nous psalmodiait
ses vers d'une voix monotone, mais
impérieuse, et qui forçait l'attention des
profanes : vers truculents, rimes mil-
lionnaires !
Je l'entends encore marteler avec un
contentement visible le quatrième vers
des strophes charmantes, dans sa toute
première manière, qu'il adressait à
« une mendiante rousse » :
Ma blanchelte aux cheveux roux,
Dont la robe, par ses trous.
Laisse voir la pauvreté
Et la beauté. . .
Ce n'est point, il s'en faut , la seule
« Fleur du Mal » dont le premier par-
fum ait corrigé les émanations de l'ar-
moire vitrée ; et pourtant, bien des
« juvenilia », très-goûtées au grenier,
n'ont pas trouvé place dans l'illustre
recueil de 1857.
— lO —
J'ai souvent regretté de n'y rîen voir
d'un poëme plus que bizarre^ il est vrai,
dans son ensemble, et difficile à produire
en public, mais dont un éditeur pudi-
bond aurait pu imprimer au moins
quelques strophes.
Baudelaire lui-même en était le
héros, ou plutôt la victime, rôle partagé
par sa maîtresse d'alors :
Bizarre déilé, brune comme ks nui(f,
Au parfum mélangé de musc et de havane,
•
Œuvre de quelque Obi, le Faust de la Savane,
Sorcière aux flancs d'ébène, enfant des noirs minuits,
sa négresse, en un mot, comme l'appe-
lait notre irrévérence.
L'œuvre abracadabrante dont je dé-
plore la perte probable échappe à l'ana-
lyse; à moins pourtant que vous ne vous
contentiez d'une sorte de programme
comme ceux que Pasdeloup fait distri-
buer pour expliquer aux fidèles le sens
intime des ouvertures de Wagner. En
ce cas, voici la chose :
— II —
CAUCHEMAR
Portrait du poète et de la bien-aimée.
Mélange des cœurs. Ciel sans nuage.
Béatitude,
II
Jalousie du roi. Il somme le poète de
lui prêter sa maîtresse. Refus du bien-
aimé. Menaces du tyran (Louis-Phi-
lippe)! Message royal annonçant une
vengeance inouïe.
III
Une même couche a réuni les deux
amants. Sommeil profond des lutteurs.
Une rumeur imperceptible surgit dans
le lointain...
IV
(Crescendo des djinns). Bruit d'é-
pées. Canons roulants, foule grondante.
Une armée en marche. Tumulte énorme
sur le quai.
— 12 —
Ce qui vient s'arrête ; la porte s'ouvre
au nom du roi! C'est Tarmée tout
entière^ tambour-major en tête^ qui sous
les yeux du bien-aimé, j)aralysé d'hor*
reurj vient souiller sa maîtresse. Des-
cription plastique des exécuteurs de
l'œuvre infâme. Costumes^ gestes, atti-
tudes divers de l'infanterie, de la cava-
lerie et des armes spéciales.
VI
Le poëte est devenu fou. La muse ne
lui envoie plus que des rimes insen-
sées. . . Malédiction ! !
C'était absurde et c'était superbe !
A défaut du portrait de Baudelaire ,
par lui-même, qui décorait cette épopée
perdue, j'en ai gardé un autre, cher
— i3 —
monsieur, portrait autographe, à la
plume et à Testompe, rehaussé de ver-
millon.
Ce dessin a son histoire : la voici..
Nous avions pris rendez-vous un jour
d'hiver, Baudelaire et moi, pour goûter
en compagnie de notre hôte du grenier,
les voluptés du haschisch, alors peu
connu à Paris. C'est sous l'influence de
cette pommade verdâtre, et en atten-
dant l'extase promise, que le futur
auteur des « Paradis artificiels », dessina
pour moi ce portrait en pied , le seul de
cette date qui lui ressemble.
De temps en temps (je le vois en-
core), il posait la plume, et roulant
entre ses doigts des estompes en papier,
il en caressait son image avec un visible
plaisir. Il y travailla longtemps, et
lorsqu'il me la remit enfin , après avoir
terminé les accessoires qui la com-
plètent, il parut me faire un notable
cadeau.
Ce fut aussi mon avis, et j'ai con-
servé cette relique avec un soin pieux.
— 14 —
Voulez-vous maintenant, non plus
un portrait du poëte, mais une pièce de
vers composée sur les bancs du collège,
^t qui est peut-être sa première œuvre;
la voici :
INCOMPATIBILITÉ.
Tout là-haut, tout là-haut, loin de la route sûre.
Des fermes, des vallons, par delà les coteaux.
Par delà les forêts, les tapis de verdure.
Loin des derniers gazons foulés par les troupeaux.
On rencontre un lac sombre encaissé dans Vabtme
Que forment quelques pics désolés et neigeux;
Veau, nuit et jour, y dort dans un repos sublime.
Et n'interrompt jamais son silence orageux.
Dans ce morne désert, à VoreUle incertaine
Arrivent par moments des bruits faibles et longs.
Et des échos plus morts que la cloche lointaine
D*une vache qui paît aux penchants des vallons.
Sur ces monts où le vent efface tout vestige.
Ces glaciers pailletés qu'allume le soleil.
Sur ces rochers ailiers où guette le vertigp.
Dans ce lac où le soir mire son teint vermeil.
— i5 —
Soiis mes pieds, sur ma tête et partout le silence.
Le silence qui fait qu'on voudrait se sauver.
Le silence éternel et la montagne immense.
Car l'air est immobile et tout semble rêver.
On dirait que le ciel, en cette solitude ,
Se contemple dans l*onde, et que ces monts, là-ltas.
Ecoutent, recueillis, dans leur grave attitude.
Un mystère divin que Vhomme n'entend pas.
Et lorsque par hasard une nuée errante
Assombrit dans son vol le lac silencieux.
On croirait voir la robe ou Pombre transparente
D'un esprit qui voyage etpaSie dans les deux.
Un dernier souvenir^ cher monsieur,
et j'ai fini.
Nous sommes encore place Sorbonne.
Un grand corps dégingandé vient d'en-
vahir notre grenier. C'est Privât d'An-
glemont , tout effaré, qui nous annonce
le suicide de Baudelaire. Notre poète
venait en effet de se donner, avec
quelque précaution, un coup de cou-
teau, destiné à toucher un autre cœur
que le sien . . .
— i6 —
A ma place ^ le chasseur de vipères
serait peut-être moins discret. Il n'a
pas encore pardonné à notre illustre
labadens un crime très-ancien , et j'en
conviens^ inexpiable !
Jugez-en : furetant un jour^ en 1844^
l'étalage d'un bouquiniste, il y trouva
(dans la boîte à cinq sous !) son premier
livre à lui, offert depuis peu à Baude-
laire, et portant sur la première page
son envoi d'auteur.
Cette trahison ( si peu payée !) dut
m'être aussi bien sensible; car ce livre,
un poëme commencé au collège et
publié sous un pseudonyme, était dédié
à votre serviteur
Charles C.
Bibliotaphe.
Décembre 1868.
^
LETTRES
DE CHARLES BAUDELAIRE
ms>!ssest^i!si^ies!^ies&i^
^
^V^ES dix lettres qui suivent, embrassent
m^ une période de trois années pendant
lesquelles Charles Baudelaire publia
les Fleurs du mal (1857), sa notice critique
sur Théophile Gautier (iSSg), le livre desPâ-
radis artificiels (x86o)^ et la seconde édition
des Fleurs du mal (1861). Elles sont relatives
à ces diverses publications et adressées à
M. Poulet-Malassis, à l'exception de la lettre
cinquième écrite à M. Charles Asselineau.
M. Asselineau a parlé dans sa vie de Charles
Baudelaire (') de la véhémence et de la ponc-
tualité que le poète apportait à la correction
de ses épreuves, et aussi de « l'importance qu'il
attachait à l'exécution de ses œuvres, impor-
tance proportionnelle aux soins qu'elles lui
avaient coûté. » En voici de bonnes preuves.
Ces lettres offrent de plus quelque intérêt
littéraire.
(*) Paris, Lemerre, 1869, in-i8, avec portraits.
2
— 20 —
I
14 mai 1857, 4 h.
Non, mon ami, vous ne serez pas en-
core délivré aujourd'hui, — Je ne Iç
serai que demain, et vous, naturelle-
ment, vous ne le serez que deux ou trois
jours après.
Je m'escrime contre une trentaine de
vers insuffisants, désagréables, mal
faits, mal rimants. Croyez-vous donc
que j'aie la souplesse de Banville ?
J'ai reçu une épreuve qui lui était
évidemment destinée; ce n'était pas une
bonne feuille (*). J'en ai conclu qu'il
avait reçu la mienne, c'est-à-dire la 8«;
à moins qu'elle ne soit pas encore
tirée.
Ce matin j'ai reçu ma 9® feuille ; dé-
cidément ne faites pas corriger une
(*) Les Poésies de M. Théodore de Banville
BMmprimaient à Âlençon en même temps que
les Fleursrdu maL
— 21 —
feuille avant de me renvoyer. Cela ne
sert qu'à introduire des fautes. — Ma
note sur Révolte est détestable (*) ; je
suis étonné que vous ne m'ayez pas fait
de reproche à ce sujet.
Bien à vous^
Ch. Baudelairei
II
1857.
Mais, mon cher ami, puisque je vous
rends si malheureux, et que vous êtes
si impatient de venir à Paris^ venez
donc^ sans vous inquiéter de la dernière
feuille. Le soin minutieux avec lequel
je corrige est une bonne garantie; d'ail-
leursj je vous soumettrai mon épreuve,
avant de la renvoyer avec « bon à ti-
rer. »
Aujourd'hui^ je vous envoie le Vin
des chiffonniers, que j'ai recopié pour
(*) Cette note fut modifiée ; elle ne se trouve
que dans la première édition des Fleurs du
maU
— 22 —
la commodité de vos ouvriers qui au-
raient trouvé le placard vraiment trop
surchargé.
Arrivez à Paris avec la table des ma-
tières, mais ne la faites pas tirer sans
que je Taie lue.
Bien à vous,
Ch. Baudelaire.
III
Vite, cachez, mais cachez bien toute
rédition ; vous devez avoir 900 exem-
plaires en feuilles. Il y en avait en-
core 100 chez L ; ces messieurs ont
paru fort étonnés que je voulusse en
sauver 5o. Je les ai mis en lieu sûr, et
j'ûi signé un reçu. Restent donc 5o pour
nourrir le cerbère Justice. '
Voilà ce que c'est que d'envoyer des
exemplaires au Figaro // Vous recevrez
cette lettre à temps, je l'espère. La saisie
n'a pas encore eu lieu. Le renseigne-
ment m'est venu par M:^ W , à
- 23 -.
travers le canal de Leconte de Lisle,
qui malheureusement a laissé s*écouler
cinq jours;
Je viens de voir L etV ^plusc
que la lune ; il ont poussé la platitude
jusqu'à faire la remise de librairie à
« M. l'inspecteur général de la presse »
pour le séduire 1!!
Bien à vous,
Charles BAUDELiURE.
II juillet 1857.
P. S. J'ai dit à M. L que
puisque Ton pouvait considérer les 5o
exemplaires que je lui laissais comme
sacrifiés, il fallait au moins les répandre
au plus vite chez les divers débitants
qui n'en avaient pas encore reçu. Mais
il s'y est refusé ; il croit que M. l'ins-
pecteur, en achetant son exemplaire, a
vérifié le nombre restant avec un coup
d'œil d'aigle.
— 24 —
IV
20 juillet 1857.
Sérieusement, j'ai besoin de savoir
tout de suite quel jour vous serez à
Paris.
Ici, pas de saisie. — Qu est-ce que
c'est que la saisie d' Alençon ?
Ici, conflit entre les deux ministres,
Moniteur et Intérieur. M. Abatucci a
dit : « Vous voulez donc entraver l'at-
taque ? »
Je vous supplie de ne pas bouger et
de ne faire aucune démarche sans moi;
vous pourriez me contrecarrer (*).
Bien à vous,
Charles Baudelaire.
V
Honfleur, le 20 février iSSg.
Mon cher.
Je vous serai bien obligé de me dire
si ma Danse macabre a paru, avec la
(*) Les Fleurs du mal furent condamnées le
jeudi 20 août 1857.
— 25 —
dédicace à Christophe (*) ? Cela aurait
dû paraître dans le n^ du i5. Je n'ai
pas reçu un mot de Calonne à qui j*ai
retourné les épreuves.
Pouvez-vous passer à rimprimerie
Ducessois^ et dire qu'il ne faut pas trop
tarder pour les épreuves du Gautier P
Comme cela a été écrit avec une rapi-
dité de démon^ il est bon que je les revoie
à loisir : or, un petit retard de ma part
dans le renvoi de l'épreuve, ajournerait
encore l'apparition. Ils ont eu très-lar-
gement le temps de composer; rappe-
lez-leur qu'il faut m* envoyer le tout
(placards et manuscrit), sous bandes
croisées avec la rubrique : Papiers daf-
faires^ à M.., de la part dé Af . . . , et af-
franchir. Insinuez en même temps qu'il
serait très-important pour le lecteur,
(*) M. Ernest Christophe, statuaire du plus
grand talent, ignoré de Vapereau. Ses œuvres
avaient le privilège de solliciter Pesprit du
poète qui lui a dédié deux pièces des Fleurs
du mal.
I
~ 26 -
le journal et moi que tout parût d*un
seul coup, quelle que soit la longueur.
Cela est fait pour être lu en une seule
séance. Bonjour à.G., à W., à S., à B., à
B. Dites à La Madelène (') que je viens
d'écrire quelques impiétés voltairiennes.
J*en rougis peut-être; par bonheur,
c'est en style lyrique. Si j'avais eu le
Gautier complet hier soir, il est évi-
dent que j'aurais pu tout renvoyer
après-demain, et cela aurait pu paraître
dimanche.
Autre histoire : tâchez donc de de-
mander pour moi à Edouard Houssaye
toutes les images de Méryon (vues
de Paris), bonnes épreuves sur chine,
pour parer notre chambrey comme dit
Dorine (•). Il est évident qu'il ne faut
(^) Jules de la Madelène, auteur du Marquis
de Saffras.
(') Ces estampes chargées d^une amère tris-
tesse, étaient pour le poète pleines d'attrait. U
eut, en 1860, Toccasion de s'intéresser directe-
ment et efficacement aux souffrances de Tar-
tiste.
- 27 -
pas les porter à mon compte^ car je
pourrais aussi bien les acheter. M^ûn-
tenant qu'on m'a pardonné toutes mes
lenteurs, je présume que ce o*est pas
une entreprise très-difficile.
Dans les premiers jours de mars, je
vais aller à Paris, avec un monstrueux
paquet pour Morel (*) : le Corbeau,
avec le fameux commentaire la Mé-
thode de composition, qui vous fait
tant horreur ; un article sur la peinture
espagnole j et quelques Poëmes noc-
turnes. Je vous demande mille pardons
de tant vous parler de moi. Il est na-
turel que j'aie besoin de bavarder.
D'ailleurs, c'est rare^ et je désapprends
à parler. Je suis ici en forte correspon-
dance avec Malassis qui^ à son dire^ a
été reçu triomphalement à sa rentrée.
C'est la famille romaine^ me dit-il.
Pour vous qui me l'avez peint rêvant
de nouvelles farces, pendant qu'on pré-
(*) Directeur de la Revue française.
— 28 —
parait les verges, vous m*avez fait bien
rire(*).
Et ce monstre parfait, le vieux mau-
vais sujet {^) y que djsvient-il, cet homme
vicieux qui sait se faire aimer ?
J'ai fait un long poëme à M. D.
C. ('), qui est à faire frémir la nature,
et surtout les amateurs du progrès.
Veuillez présenter mes respects à
votre famille, et écrivez-moi.
Votre bien dévoué,
Ch. Baudelaire.
(*) M. Malassis venaft d*être condamné pour
la publication des Mémoires de Lausçun, — - Il
préparait celle des Mémoires du comte de
la Mothe- Valois.
(2) Surnom d'amitié que Charles Baudelaire
avait donné à M. Jules Barbey d'Aurevilly.
(3) Maxime du Camp. Il s'agit du Voyage,
morceau final des Fleurs du mal, depuis la
seconde édition.
■
■
«
— 29 —
VI
Vendredi 29 avril iSSq.
Mon cher ami.
Le Théophile Gautier? — Voici une
nouvelle épigraphe à ajouter.
Vous avez Tarticle ; il est donc inu-
tile que je vous l'envoie.
Faites bien mousser le texte, afin
que ça ait Tair d'une brochure respec-
table.
Et le portrait ?
Enfin r Opium est fini ; cela va pa-
raître. Il est indispensable que nous
f fassions aussi une brochure: l'Opium
et le Haschich, en sous-litre : V Idéal
artificiel; brochure composée de 5
feuilles de la Revue contemporaine y
presque un livre. Nous sommes sûrs de
la vente d'une pareille brochure, et puis
nous déchargeons d'autant les malheu-
reuses Curiosités qui se trouveront
ainsi composées généralement d'articles
— 3o —
ayant trait aux beaux-arts^ et qui n'at-
tendent plus pour être réimprimés que
Tapparition du Salon de iSSg (fin! et
que je livre ce soir ou demain), des
peintres espagnols et des peintres idéa-
listes que je ferai en mai.
Je serai heureux d'avoir votre opi-
nîon sur le Gautier. Rappelez-vous
qu'il y a des fautes dans T Artiste^ et
qu'il faut que je lise les épreuves une
seule fois (à Honfleur) : si vous faisiez
cela tout de suite, je vous leç corrige-
rais en une heure. Je vais avoir un peu
de loisir.
Nouvelles Fleurs du mal faites. A
tout casser, comme une explosion de
gaz chez un vitrier.
Tout à vous,
Ch. Baudelaire.
P. S. Je viens de relire, pour la pré'-
mière fois depuis vingt-cinq ans, la
Grandeur et décadence des Romains,
le Discours sur rhistoire universelle^
- 3i —
et les Natche\, Je deviens tellement
Tennemi de mon siècle^ que tout, sans
en excepter une ligne^ m*a paru sublime.
Avez-vous lu Téloge insensé de Mi-
reiOy par le vieux mauvais sujet (*) ? A
propos de M. Mistral, il a eu soin de
ne pas rater Tinévitable calembour :
« un nom beau comme un surnom »,
« un poète plein de souffle I »
VII
i5 décembre 5 g.
Dans tout le paquet de vers que je
lui ai donnés, Calonne a repoussé le
galant Ex-voto (') comme pouvant
scandaliser ses lecteurs. Je lui ai adressé
le Cygne, et je lui envoie ces nouveaux
vers, le Squelette laboureur. Quand
j'aurai fait Dorothée (souvenir de l'île
Bourbon), la Femme sauvage (sermon
(*) Voir la note 2 de la page 26.
(•) C'est la pièce A une madone, p. 1 74 de
Téd. des Fleurs du mal de Michel Lévy.
- 32 —
à une'petite maîtresse)^ et le Rêve, enfin
la lettre-préface à Veuillot, que nous
aurons à discuter ensemble, les Fleurs
du mal seront prêtes.
Je vais vous adresser la presque tota-
lité des Notices littéraires, que nous ne
pouvons pas imprimer tout de suite, à
cause de la maison Gide qui doit en
publier une partie dans son anthologie
moderne.
Ce livre est composé ainsi qu*il suit :
I. Edgar Poe, sa vie et ses œuvres;
II. Nouvelles notes sur Edgar Poe;
III. Dernières notes sur Edgar Poe
(manuscrit resté à Honfleur) ;
(Ces trois morceaux font l'objet d'une
discussion avec Michel. Cependant mes
traités ne parlent que d'une quantité
déterminée de matière originale, et nul-
lement d'aperçus critiques sur l'auteur.
D'ailleurs, le bon sens indique que Je
puis réimprimer dans mes œuvres per-
sonnelles la partie critique et biogra- «
phique.)
— 33 —
IV. Théophile Gautier (imprimé) ;
V. Pierre Dupont (imprimé chez
Houssiaux);
VI. Leconte de Lisle;
VI I . Mm« Desbordes-Valmore ;
VIII. Auguste Barbier*
IX. Hégésippe Moreau ;
X. Pétrus Borel ;
XI. Gustave Le Vavasseur ;
XII. Rouvière (imprimé dans /'^r-
tisté) .
L Opium est si long qu'il sera publié
en deux fois ; le 3 1 décembre la pre-
mière partie.
Bien à vous,
G. B.
VIII
60.
Voilà une lettre navrante. La Revue
internationale elle-même m'a moinj^
humilié par ses sottises que vous^r *^
— 34 —
les miennes. Je reprends .votre lettre
article par article.
lo Du monde {éminitij mundi tnulie*
bri. — Comment osez-vous m*attri-
buer ce bizarre génitif? Comment
n'avez-vous pas deviné que Calonne,
qui est un pédant, a dû se dire (après
le bon à tirer) : Faut- il que ce Baude-
laire soit ignorant ! il prend la termi-
naison de l'ablatif pluriel pour celle
du génitif singulier. — Quant au reste
de votre critique, je réponds par le
travail d'imagination que j'ai fait et
que le lecteur intelligent doit faire :
qu'est-ce que l'enfant aime si passion-
nément dans sa mère, dans sa bonne,
dans sa sœur aînée ? Est-ce simplement
l'être qui le nourrit, le peigne, le lave
et le berce ? C'est aussi la caresse et la
volupté sensuelle. Pour l'enfant, cette
caresse s'exprime à l'insu de la femme,
par toutes les grâces de la femme. Il
>#ime donc sa mère, sa sœur, sa nour-
ric^pour le chatouillement agréable
— 35 —
du satin et de la fourrure, pour le par-
fum de la gorge et des cheveux, pour
le cliquetis des bijoux, pour le jeu des
rubans, etc.,.'. pour tout ce mundus
muliebris commençant à la chemise
et s' exprimant même par le mobilier,
où la femme met l'empreinte de son
sexe. Donc, j*ai raison, donc, je n'ai
pas fait une faute de latin, a Mais,
dites-vous, vous faites une faute de
français avec votre monde féminin. »
C'est vrai, et pour montrer que je la
fafîs consciencieusement et sciemment,
jesoulignele monde. Comme, en réalité,
il y a quelque chose de juste dans votre
critique, j'essaie de vous contenter par
un remaniement.
2® Quant au reste, c'est vraiment
grave. 11 m'est bien dur d'avoir dit
qu'une pâture pouvait éteindre une
soif, et que je suis un Dieu qui a. . . .
Il me semble que tout le monde verra
ça, et que je ne pourrai jamais ouvrir
le livre sans tomber juste sur ces deux
3
— 36 —
énormités. M'aimez-vous aséez pour
faire deux cartons ? et si vous y con-
sentez^ ayez bien soin que de nouvelles
fautes ne se glissent pas dans les quatre
pages composant les cartons.
Bien à vous,
Charles Baudelaire.
IX
Je viens de chipper chez Michel
(Levy) la Raison dEtat (de Ferrari).
Bien que la pétulance italienne, l'abon-
dance d'improvisation amène quelque-
fois un style lâché, bousculé, c'est
généralement très-beau. La préface
surtout (il faut absolument que vous
lisiez cela) est d'une certaine éloquence
éthéréenne, fataliste, résignée, qui fait
penser aux meilleurs morceaux de la
plus pure beauté classique française.
Le chapitre sur Machiavel, de qui
cependant Ferrari se détache, est aussi
-37-
très-étonnant. En somme, c'est partout
le génie qui pactise avec le destin :
a Laisse-moi comprendre tes lois, et
je te tiens quitte des vulgaires jouis-
sances de la vie, des vides consolations
de l'erreur (sic). »
11 faut aller très-vite pour les Fleurs
au risque de paraître en plein été. Je
devrais partir tout de suite pour Hon-
fleur.
Bien à vous,
C. B.
X
i3 mars 1860.
Voici encore des vers. Nous en sommes
maintenant à vingt-cinq pièces, sans
compter trois morceaux commencés :
Dorothée, idéal de la beauté noire ;
la Femme sauvage, dédiée à une petite
maîtresse, et Plutus, l'Amour et la
Gloire ; enfin une préface commencée;
tout cela resté à Honfleur. Comme
je vous l'ai dit^ il faudra absolument
qu'à la fin de ce mois je retourne là-bas,
- 38 —
au moins pour mettre le livre en ordre,
et si ces derniers morceaux ne sont pas
finis, je les sacrifierai, mais avec regret.
Je viens de relire ces vingt-cinq mor-
ceaux, je ne suis pas tout à fait content}
il y a toujours des lourdeurs et des vio-
lences de style. — A ce sujet, avez-
vous reçu Obsession et Un fantôme?
Que pensez-vous des deux derniers
tercets du premier sonnet d!Un fan-
tôme? J'ai tourné et retourné la chose
de toutes les façons. Quand le spectre
fut devenu tout à fait grand Je recon-
nus madame une telle^ voilà qui est
français, mais ceci :
A sa légère allure orientale (l'allure du speclre).
Quand il atteint sa totale grandeur.
Je reconnais ma belle visiteuse... î
Il y aura toujours des cas embarras-
sants.
Quand recevrai-je des épreuves?
Quand venez- vous à Paris ?
Tout à vous,
Ch. Baudelaire.
LE DRAME « L'IVROGNE »
ÎS^«^S«S««S«S«e2«S«fô«S*fô^
HARLES Baudelaire a projeté trois drames :
^^^ la Fin de don Juan; le Marquis du i"
hou:^ardSj et VIvrogne, Le dernier dont
l'idée mère se trouve dans la pièce des Fleursdu
mal intitulée le Vin de l'assassin, le préoccupa
longtemps. Le projet eut même un commence-
ment d^exécution; le scénario s'est retrouvé
dans uii brouillon de lettre adressée à l'acteur
Tisserant , auquel il destina d'abord le prin-
cipal rôle ; il l'offrit ensuite à Philibert Rou-
vière alors à la Gaîté.
En même temps il recommandait, comme
on va voir, à M. Hostein, directeur de ce théâ-
tre, une pièce de Diderot,
Nous avons pu retrouver l'ensemble des
correspondances relatives à cette double tenta-
tive sans résultat.
.- 42 —
Lettre de. M. Tisser ant à Baudelaire (')
i853.
Mon cher monsieur Baudelaire^
Vous êtes un de ces hommes qu'on
n'oublie pas quand on a du cœur, et
encore moins quand on est un peu ar*
tiste.
Je vous ai vu peu^ et cependan tcela
m'a suffi. J'ai bien souvent pensé à vous
pendant ma longue absence, et mes
réflexions à votre endroit me rame-
naient toujours à cette triste pensée
que comme beaucoup d'êtres bien or-
ganisés, vous dépensiez votre trésor
(*) Communiqué par M. Poulet-Malassis.
Nous n'hésitons pas à imprimer cette lettre
sans retranchements. Les opinions littéraires
de l'honnête artiste qui Ta signée s^expli-
quent assez par l'infatuation professionnelle ;
elles ne sauraient rendre moins estimable Fau-
teur du Vicaire de Wakefield,
-43-
spirituel (le seul vjaî trésor), sou à
sou, au lieu de risquer une grave af-
faire. En effet, vous enfermez de
grandes idées dans un petit moule, res-
semblant à cet homme qui se croit bon
marcheur parce qu'il fait cinquante
fois dans un jour le trajet d'un bout du
passage des Panoramas à l'autre ; au
bout de dix jours, il additionne ses pas,
et dit : J'ai été à Bordeaux.
Mais je vois avec joie que vous
n'êtes pas cet homme-là 1 Bravo ! déve-
loppez-vous ; votre pensée est large et
originale l Mettez-nous en scène des
gens qui se promènent dans le Champ-
de-Mars, histoire de fumer une ciga-
rette !
Venez me voir quand vous voudrez,
le plus tôt sera le meilleur.
Le haut du pavé dramatique n'est
pas encombré, allongez les jambes de
votre intelligence, et venez faire un
tour dans le grand drame.
La basé dont vous me parlez est so-
— 44 —
lide : la rêverie^ la fainéantise , la
misère, V ivrognerie et Y assassinat;
avec ces cinq notes-là, on peut faire
une mélodie terrible.
Si j'ai assez de savoir pour être votre
guide, je suis tout à vous. Si vous avez
besoin d*un artiste pour animer et
exécuter votre œuvre devant le public,
à défaut de Frederick Lemaître, comptez
sur mon audace et mes efforts. Si vous
avez besoin d'un ami qui aime votre
œuvre, comme vous l'aimez vous-
même, comptez, oh ! comptez sur moi !
Pas de timidité, pas de fausse modestie !
si nous doutons de nous-mêmes, per-
sonne n*aura foi en nous. Assez de
coups de pétards et de pistolets, c'est
un coup de canon qu'il nous faut !
Quant à mon camarade Laferrière,
je le crois artiste, mais je ne sais si ses
moyens se prêteraient à une transfor-
matioa radicale; c'est une chose à lui
proposer, le cas échéant.
Quand vous viendrez me voir, je sors
-45 -
rarement avant onze heures du matin^
et le mois prochain j'aurai peu de ré-
pétitions; dans tous les cas^ un mot
par la poste, et je vous attendrais ou
vous préviendrais.
De Taudace! de l'audace! de l'au-
dace ! et tout de suite !!
Bien à vous,
J*-H. TiSSERANT.
Lettre de Baudelaire à M. Tisserant.
Samedi, 28 janvier 1854.
J'ai reçu de vous une lettre, mon
cher monsieur Tisserant, qui contient
un gros paquet de compliments. At-
tendez donc que je les aie mérités. Nous
verrons plus tard s'il y a lieu pour moi
.d'être loué. Du reste, je sens très-bien
que je vais faire sur moi-même — et
cela aura été, il faut le dire, à votre
instigation — une grande épreuve.
-46-
Dans peu de temps d'ici^ je saurai si
je suis capable d'une bonne conception
dramatique. C'est, du reste, à ce sujet,
et pour vous mettre au courant de cette
conception, que je vous écris une lettre
un peu longue, que j'avais le projet
de vous écrire depuis plusieurs jours,
et que je remettais de jour en jour.
Je désire fortement que nous nous
entendions très-bien. — Je sens que je
peux avoir besoin de vous, et je crois que
dans de certains cas vous devez mieux
que moi distinguer le possible de l'im-
possible.
Quoique ce soit une chose impor-
tante, je n'ai pas encore songé au titre :
<
le Puits P l'Ivrognerie F la Pente du
mal? etc.
Ma principale préoccupation, quand
je commençais à rêver à mon sujet, fut :
à quelle classe, à quelle profession doit
appartenir le personnage principal de
la pièce ? — J'ai décidément adopté
une profession lourde, triviale, rude:
- 47 -
le scieur de long. Ce qui m'y a presque
forcé, c'est que j'ai une chanson dont
l'air est horriblement mélancolique^ et
qui ferait, Je crois, un magnifique effet
au théâtre, si nous mettons sur la scène
le lieu ordinaire du travail, ou surtout
si, comme j'en ai une immense envie, je
développe au troisième acte le tableau
d'une goguette lyrique ou d'une lice
chansonnière. Cette chanson est d'une
rudesse singulière. Elle commence par :
Rien n'est aussi'Z'aimable,
Fanfru-cancru-lon-Mahira,
Rien n'est aussi-z^aimable
Que le scieur de long.
Et ce qu'il y a de meilleur, c'est
qu'elle est presque prophétique et peut
devenir la Romance du saule de notre
drame populacier. Ce scieur de long
si aimable finit par jeter sa femme à
l'eau, et il dit en parlant à la Sirène
(il y a pour moi une lacune avant cet
endroit) :
-48-
Chante, Sirène, chante,
Fanfru''€ancru4on'la'lahira''
Citante, Sirène, cfianle.
T'as raison de chanter.
Car Cas la mer à boire,
FanfrU'CancrU'lon-la'lahiror
Car t*as la mer à boire.
Et ma mie à manger !
Mon homme est rêveur^ fainéant^ il
a, ou il croit avoir des aspirations su-
périeures à son monotone métier, et
comme tous les rêveurs fainéants, il
s'enivre.
La femme doit être jolie, — un
modèle de douceur, de patience et de
bon sens.
Le tableau de la goguette a pour but
de montrer les instincts lyriques du
peuple, souvent comiques et maladroits.
— Autrefois, j'ai vu les goguettes. —
Il faudra que j'y retourne, — ou plutôt
nous irons ensemble. Il sera peut-être
possible d'y prendre des échantillons de
poésie tout faits. De plus, ce tableau
J
— 49 —
nous fournit un délassement au milieu
de ce cauchemar lamentable.
Je ne veux pas ici vous faire un
scénario détaillé, puisque dans quel-
ques jours j'en ferai un dans les règles,
et celui-là nous l'analyserons de façon
à m' éviter quelques gaucheries. Je ne
vous donne aujourd'hui que quelques
notes.
Les deux premiers actes sont remplis
par des scènes de misère, de chômage,
de querelles de ménage, d'ivrognerie
et- de jalousie. Vous verrez tout à
l'heure l'utilité de cet élément nou-
veau.
Le troisième acte, la goguette , —
où sa femme, de qui il vit séparé, in-
quiète de lui, vient le chercher. C'est
là qu'il lui arrache un rendez-vous
pour le lendemain soir, dimanche.
Le quatrième acte, le crime — bien
prémédité, bien préconçu. — Quant à
l'exécution , je vous la raconterai avec
soin.
— 5o —
Le cinquième acte (dans une autre
ville), le dénoûment, c est-à-dire la
dénonciation du coupable parlui-même,
sous la pression d'une obsession. —
Comment trouvez-vous cela ? — Que
de fois j'ai été frappé par des cas
semblables, en lisant la Ga:{ette des
tribunaux !
Vous voyez combien le drame est
simple. Pas d'imbroglios, pas de sur-
prises. Simplement le développement
d'un vice et des résultats successifs
d'une situation.
J'introduis deux personnages nou-
veaux.
Une sœur du scieur de long, créature
aimant les rubans, lesbijouxà vingt-cinq
sols, les guinguettes et les bastringues,
ne pouvant pas comprendre la vertu
chrétienne de sa belle-sœur. C'est le
type de la perversité précoce parisienne.
Un homme jeune — assez riche —
d'une profession plus élevée — profon-
dément épris de la femme de notre
ouvrier — mais honnête et admirant
— 5i —
sa vertu. Il parvient à glisser de temps
à autre un peu d'argent dans le ménage.
Quant à elle^ malgré sa puissante
religion, sous la pression des souf-
frances que lui impose son mari, elle
pense quelquefois un peu à cet homme,
et ne peut pas s'empêcher de rêver à cette
existence plus douce, plus riche, plus
décente, qu'elle aurait pu mener avec
lui. Mais elle se reproche cette pensée
comme un crime, et lutte contre cette
tendance. — Je présume que voilà un
élément dramatique. — Vous avez déjà
deviné que notre ouvrier saisira avec
joie le prétexte de sa jalousie surexcitée
pour cacher à lui-même qu'il en veut
surtout à sa femme de sa résignation^
de sa douceur, de sa patience, de sa
vertu. — Et cependant il l'aime, mais
la boisson et la misère ont déjà altéré
son raisonnement. — Remarquez de
plus que le public des théâtres n'est pas
familiarisé avec la très-fine psychologie
du crime, et qu'il eût été bien difficile
/■
— 52 —
de lui faire comprendre une atrocité
sans prétexte.
En dehors de ces personnages, nous
n'avons que des êtres accessoires : peut-
être un ouvrier farceur et mauvais
sujet, amant de la sœur, — des filles,
— des habitués de barrières, de cabarets,
d'estaminets , — des matelots , des
agents de police.
Voici la scène du crime. — Remar-
quez bien qu'il est déjà prémédité.
L'homme arrive le premier au rendez-
vous. Le lieu a été choisi par lui. —
Dimanche soir, — Route ou plaine
obscure, — Dans le lointain, bruits
d'orchestres de bastringue. — Paysage
sinistre et mélancolique des environs
de Paris. — Scène d'amour — aussi
triste que possible — entre cet homme
et cette femme; — il veut se faire par-
donner ; — il veut qu'elle lui permette
de vivre et de retourner près d'elle.
Jamais il ne l'a trouvée si belle. ... Il
s'attendrit de bonne foi. — Il en rede-
— 53 —
vient presque amoureux ; il désire, il
supplie. La pâleur, la maigreur la
rendent plus intéressante, et sont pres-
que des excitants. Il faut que le public
devine de quoi il est question. Malgré
que la pauvre femme sente aussi sa
vieille affection remuée, elle se refuse
à cette passion sauvage dans un pareil
lieu. Ce refus irrite le mari qui attribue
cette chasteté à l'existence d'une passion
adultèrç ou à la défense d'un amant.
« Il faut en finir ; cependant je n'en
aurai jamais le courage; je ne peux pas
faire cela moi-même. » Une idée de
génie — pleine de lâcheté et de supers-
tition — lui vient.
Il feint de se trouver très-mal, ce qui
n'est pas difficile, son émotion vraie
aidant à la chose : « Tiens, là-bas, au
bout de ce petit chemin, à gauche, tu
trouveras un pommier ; — va me
chercher un fruit. » (Remarquez qu'il
peut trouver un autre prétexte — je
jette celui-là sur le papier en courant.
— 54 —
La nuit est très-noire^ la lune s'est
cachée. Sa femme s' enfonçant dans les
ténèbres, il se lève de la pierre où il
s'est assis : « A la grâce de Dieu ! si
elle échappe, tant mieux ; si elle y
tombe, c'est Dieu qui la condamne ! »
Il lui a indiqué la route où elle doit
trouver un puits presque à ras de la
terre.
On entend le bruit d'un corps lourd
tombant dans l'eau, — mais précédé
d'un cri, — et les cris continuent.
a Que faire? On peut venir; — je puis
passer, je passerai pour l'assassin. —
D'ailleurs, elle est condamnée... Ah!
il y a les pierres — les pierres qui font
le bord du puits I »
Il disparaît en courant.
Scène vide.
A mesure que le bruit des pavés
tombants se multiplie, les cris dimi-
nuent. — Ils cessent.
L'homme reparaît: « Je suis libre!
— Pauvre ange, elle a dû bien souf-
frir ! »
— 55 —
Tout ceci doit être entrecoupé par
le bruit lointain de l'orchestre. A la
fin de l'acte, des groupes d'ivrognes et
de grisettes qui chantent — entr'autres
la sœur — reviennent par la route.
Voici, en peu de mots l'explication
du dénouement. Notre homme a fui.
— Nous sommes maintenant dans un
port de mer. — Il pense à s'engager
comme matelot. — Il boit effroyable-
ment: estaminets, tavernes de matelots,
musicos. — Cette idée : Je suis libre,
libre, libre! est devenue l'idée fixe,
obsédante. Je Suis libre! — je suis
tranquille! — on ne saura jamais rien.
— Et comihe il boit toujours, et qu'il
boit effroyablement depuis plusieurs
mois, sa volonté diminue toujours, —
et l'idée fixe finit par se faire jour par
quelques paroles prononcées à voix
haute. Sitôt qu'il s'en aperçoit, il cher-
che à s'étourdir par la boisson, par la
marche, par ia course, — mais l'étran-
geté de ses allures le fait remarquer. —
Un homme qui court a évidemment
— 56 —
fait quelque chose. On Farrête ; alors
— avec une volubilité, une ardeur,
une emphase extraordinaire, avec une
minutie extrême — très-vite, très-vite,
cumme s'il craignait de n'avoir pas le
temps d'achever, il raconte tout son
crime. — Puis il tombe évanoui. —
Des agents de police le portent dans
un fiacre.
C'est bien fin, n'est-ce pas, et bien
subtil ? mais il faut absolument le faire
comprendre. Avouez que c'est vraiment
terrible. — On peut faire reparaître la
petite sœur dans une de ces mai^ns
. de débauche et de ribotte faites pour
les matelots.
Je suis tout à vous.
Ch. Baudelaire.
Vous me ferez vos observations là
dessus.
Je serais bien disposé à diviser l'œu-
vre en plusieurs tableaux courts, au
lieu d'adopter l'incommode division
des cinq longs actes.
-57-
Lettre de Ch. Baudelaire à M. Hosiein (*)
Mercredi, 8 novembre 1854.
Monsieur, je n'accomplirais qu'avec
timidité et défiance cette singulière dé-
marche que je tente aujourd'hui, si je
ne savais que je parle à un homme
d'esprit.
L'ouvrage que je vous envoie, et qui
m'a donné un mal infini à trouver, —
(*) Communiqué par M. Le Maréchal, avec
une note explicative que voici :
Baudelaire eut vers i856 ou 1857 la vel-
léité de faire du théâtre ; comme Balzac^ il y
voyait non seulement une occasion d'exprimer
sa pensée d'une façon plastique, mais encore
un moyen merveilleux de gagner de l'argent.
L'argent, pour ces deux martyrs de la dette,
c'était la liberté, le droit de travailler à leurs
heures, et de corriger et de polir leur œuvre à
leur aise. Il me parlait souvent d'un drame non
encore écrit, mais fixé dans son cerveau, qui
avait pour titre VIvrogne, et que Rouvière
devait jouer; en outre il ne connaissait qu'un
seul directeur capable de monter la pièce, M.
Hostein. Je le menai donc un soir chez celui-ci
- 58-
la Bibliothèque ne voulant pas le prê-
ter, — la Revue rétrospective aypnt
disparu, — est à peu près inconnu ;
peut-être le connaissez- vous ? — en
tout cas il ne fait partie ni des œuvres
complètes, ni même des œuvres pos-
thumes, et il n'y a guère que les fure-
teurs qui raient lu (*). Depuis bien des
qui gouvernait en ce moment à la Gaîté. Après
une longue conversation , ils se quittèrent
enchantés Tun de l'autre, et d'accord sur tous
les points. Baudelaire allait écrire son draine,
et Hostein lui ouvrait son théâtre et lui pro-
mettait Rouvière. Malheureusement les néces-
sités de la vie entravèrent Baudelaire, et jamais
le drame ne fut terminé.
En quittant Hostein, Baudelaire lui parla
d'une pièce très-réaliste de Diderot; elle avait
pour titre Est-il bon ? Est-il méchant ? et
n'était connue que de quelques érudits. C'était
pour un directeur intelligent et artiste une
tentative séduisante. Hostein le pria de la lui
communiquer. Le lendemain il recevait la
pièce, avec la lettre que voici.
(*) Cette pièce de Diderot, Est-il bon ? Est-
il méchant ? publiée dans la première Revue
rétrospective, de M. Taschereau, a un mo-
-59-
années^ j'avais l'idée que cet ouvrage
aurait dans notre temps un vaste suc-
cès; un autre que moi aurait pensé à
la Comédie-Française ou au Gymnase ;
mais le choix que je fais me paraît meil-
leur^ d'abord à cause des qualités du
directeur^ mais aussi particulièrement
à cause de son apparence — permet-
tez-moi de vous le dire — paradoxale.
Je me suis dit :
M. Hosteîn a été l'ami de Balzac.
N'est-ce pas vous, monsieur^ qui avez
si bien fait la mise en scène de la Ma-
râtre? — M. Hostein doit parfaite-
ment bien comprendre la valeur d'un
ouvrage qui a l'âir d'un de ces rares
ment préoccupé les esprits inquiets d'une ré-
novation du théâtre. En i856, le i*' décembre,
la Gai(ette de Champfleury contenait une
lettre de 42 pages, adressée au ministre d'État,
pour lui proposer de faire monter cette pièce
au Théâtre-Français. Cette proposition n'eut
aucune suite, ainsi que l'a raconté M. Champ*
Heury dans un autre ouvrage.
— 6o —
précurseurs du théâtre que rêvait
Balzac.
Dans les théâtres subventionnés, rien
ne se fait, rien ne se conclut, rien ne
marche ; tout le monde y est timide et
bégueule.
Puis il serait curieux de vérifier si
définitivement ce public du boulevard,
si méprisé, ne serait pas apte à com-
prendre et à applaudir un ouvrage
d'une merveilleuse portée, — je ne veux
pas prononcer le mot littéraire, qui
appartient à Taffreux argot de notre
époque.
J'ai pensé que les succès infatigables
de votre théâtre vous autorisaient à
faire une éclatante tentative sans im-
prudence, et que les Cosaques et le
Sanglier pouvaient bien — à mettre
les choses au pire — payer la bienve-
nue de Diderot.
Si je voulais surexciter votre orgueil,
je pourrais vous dire qu'il est digne de
vous de perdre de Targent avec ce grand
— 6i —
auteur, mais malheureusement je suis
obligé de vous avouer que je suis con-
vaincu qu'il est possible d'en gagner.
Enfin^ — irai-je jusqu'au bout ? —
car ici, moi inconnu de vous, j'ai
l'air d'empiéter indiscrètement sur vos
droits et vos fonctions, — il m'a semblé
qu'un acteur merveilleux par sa véhé-
mence, par sa finesse, par son caractère
poétique , un acteur qui m'a ébloui
dans les Mousquetaires — j'ignore to-
talement si vous pensez comme moi —
j'ai présumé, dis-je, que M. Rouvière
pourrait trouver dans ce personnage de
Diderot écrit par Diderot (Hardouin),
personnage oti la sensibilité est unie à
l'ironie et au cynisme le plus bizarre,
lin développement tout nouveau pour
son talent.
Tous les personnages (ceci est une
curiosité), sont vrais, M. Poultier, le
commis à la marine, est mort très-
tard ; j'ai connu quelqu'un qui l'a
connu.
-- 62 ^
Les femmes sont nombreuses, toutes
amusantes et toutes charmantes.
Cet ouvrage est, à proprement parler,
le seul ouvrage très-dramatique de
Diderot. Le Fils naturel et le Père de
famille ne peuvent pas lui être com-
parés.
Quant aux retouches, — je désire
que votre sentiment s'accorde avec le
mien, — je crois qu'elles peuvent être
très-rares et n'avoir trait qu'à des
expressions vieillies, à des habitudes
d'ancienne jurisprudence, etc., etc. En
d'autres termes, je crois qu'il serait
peut-être bon de commettre, en faveur
du public moderne, quelques innocents
anachronismes.
Et maintenant permettez-moi, mon-
sieur, de profiter de l'occasion pour
vous avouer que depuis longtemps je
rêve à un drame aussi terrible et aussi
singulier qu'on peut le désirer, et que
dans les rares moments où je puis y
travailler, j'ai toujours devant les yeux
- 63 —
rimage de votre étrange acteur. Il s a-
git d'un drame sur ï ivrognerie, Ai-je
besoin de vous dire que mon ivrogne
n'est pas un ivrogne comme les autres ?
— Veuillez agréer, monsieur, l'assu-
rance de mon profond respect, et per-
mettez-moi d'avoir bon espoir.
Ch. Baudelaire.
Sj, rue de Seine,
Lettre de M. Hostein à Ch, Baudelaire (*).
Paris, le ii novembre 1854.
Monsieur,
Je vous remercie de la confiance que
vous avez en moi.
Je vous remercie également d'avoir
pensé à mon théâtre pour lui offrir ce
que vous considérez, et ce qui est en
effet, sous beaucoup de rapports, une
bonne fortune littéraire,
(*) Communiqué par M. Poulet-Malassis.
^64-
Mais permettez-moi de vous exposer
en peu de mots ce qui m'empêche de
donner suite à cette offre bienveillante.
D'abord, je ne partage pas complète-
ment votre enthousiasme pour l'œuvre
de Diderot.
N'auriez-vous pas été séduit par le
paradoxe, plus que par la réalité des
situations et des caractères ?
Certes, il y a une notable dépense de
fantaisie, d'entrain, d'humour, dans
cette pièce si mal intitulée : Est-il bon?
etc.
Mais est-ce là une pièce de théâtre ?
Je n'entends pas seulement parler du
Théâtre de la Gaîté, mais du théâtre en
général.
Peu ou point d'intérêt, des caractères
plutôt exprimés que finis, des situa-
tions où l'intrigue — et quelle intrigue !
— supplée à la passion et à la combi-
naison. Voilà pour le fonds.
Quant à la forme, je me montrerai
plus disposé à la louer. Non pas que le
- 65 -
dialogue étincelle de traits philoso-
phiques, satiriques ou comiques; mais
à défaut de ces qualités précieuses,
le style a une allure vive, animée,
pressée d'aller au but, ce qui ne
manque pas de charme pour nous
autres Français, toujours si affairés
quand nous écoutons, et si disposés à
tenir en grande estime la brièveté de
ceux, qui nous parlent.
Voilà mon opinion sur l'œuvre dans
son application à la scène française en
général ; en ce qui concerne la Gaîté,
en particulier, permettez-moi de vous
déclarer que nous ferions une bien
triste, bien déplorable épreuve, si nous
soumettions à ce public l'œuvre de Di-
derot.
Oh ! monsieur , venez-vous si peu
dans notre théâtre que vous ayiez pu
vous faire un seul instant d'illusion sur
ce point !
Je n'entreprendrai pas de vous dé-
crire l'esthéiique de notre genre. Qu'il
— 66 -
me suffise de vous affirmer que je fais
fausse route toutes les fois que je ne
me borne pas purement et simplement
à être le continuateur (je dis continua-
teur et non imitateur) des Pixérécourt,
CaigneZj etc.
Toutes les tentatives engagées par
moi, en dehors de ce genre, m'ont été
nuisibles ou funestes.
Maintenant, est-ce un bien, est-ce un
mal qu'il en soit ainsi ?
Au premier abord, on regrette ce
résultat ; à une seconde réflexion, on
s en console.
En effet, si le mouvement littéraire
procédait de bas en haut, c'est-à-dire de
la Gaîté à la Comédie- Française, le pro-
grès deviendrait bientôt impossible. La
Gaîté serait bientôt le Théâtre-Français,
et le Théâtre-Français, que serait-il?
— Tout enseignement veut d'abord
des écoliers, et non une classe de pro-
fesseurs. Réjouissons-nous donc d'a-
voir encore dans le peuple un public
d'écoliers.
-67-
C'est pour ce public, c'est pour ces
écoliers que le Théâtre de la Gaîté est
fait. Il y a tout un enseignement rela-
tif, et voilà pourquoi notre genre , ri-
dicule ailleurs, est encore si bon chez
nous, que certaines pièces dites pro-
gressives n'y ont pas fait le sou.
Ceci posé, je vous offre, pour /'/-
vrogne, tous mes bons offices.
Votre dévoué
HOSTEIN.
^
5
LETTRE
D'ALFRED DE VIGNY A CH. BAUDELAIRE
^ETTE lettre se rapporte à un épisode
)$^ assez mal connu de la vie de Charles
Baudelaire, et conséquemment assez
mal jugé.
En 1862 la seconde édition des Fleurs du
mal avait paru ; le livre des Paradis artificiels ,
publié Tannée précédente, et les trois premiers
volumes de la traduction de Pœuvre d'Edgar
'Poé avaient confirmé le succès du poète ; je
parle, bien entendu, du succès qu'il cherchait ,
le succès parmi les égaux et les maîtres.
Baudelaire eut alors la pensée de se porter
candidat à l'Académie française.
Cette résolution fut diversement jugée, ou
plutôt diversement blâmée. La petite presse ,
ce qu'on appelle aujourd'hui si singulièrement
« les jeunes » se cabrèrent. Les uns ne virent
dans cette prétention que le fait d'un orgueil
insensé et même impertinent , et se scandali-
— 72 —
sèrent de ce qu'un écrivain qui , il y avait peu
de temps encore, était des leurs, tentât une
démarche qu'ils n'étaient point en mesure de
tenter eux-mêmes. D'autres , plus profonds ou
plus retors, prétendirent que Baudelaire
mystifiait le public et l'Académie, et cédait, une
fois de plus, à son goût, tant accusé, pour
l'étrange et pour les coups de pistolet tirés par
la fenêtre en plein midi.
Tous se trompaient, et les derniers plus
encore que les premiers. Beaucoup de choses,
actes ou paroles, qui ont été vivement repro-
chés à Baudelaire, comme inspirés par le
désir d'occuper de soi et de faire esclandre ,
partaient, au contraire, d'une grande simplicité,
ou même d'une grande naïveté. Nous avons
raconté ailleurs (^) comment, au moment de
son procès, il se flattait de se voir adresser des
excuses par le ministère public , et combien il
s'étonna de voir la prévention soutenue à l'au«
dience. Dans la circonstance actuelle, il lui
paraissait tout simple que l'auteur d'un recueil
de vers et de quelques autres ouvrages se pré-
sentât, à l'âge de quarante ans« aux suffrages
d'une compagnie qui avait admis, à trente*huit
ans, l'auteur des Méditations poétiques et de la
{*) Charles Baudelaire , sa vie et son œnvre ;
Paris, Lemerre» 1859, in-18, avec portraits.
-73-
Mort de Socrate, CequMl poursuivait, dans le
suffrage de rAcadémie, c'était la cassation du
jugement qui avait mutilé son livre. Il en
appelait auprès de ses maîtres et de ses
confrères de Tarrét, de la critique du parquet ;
il leur disait: Relevez-moi, venges-moi! C'était
là toute sa rouerie, ou pour mieux dire toute
son illusion.
Qu'il n'y eût bien des objections khirt à ce
plan, nous ne le contesterons pas. Les amis
de Baudelaire, ses patrons, lui en proposèrent,
qui ne firent que Pétonner. Car ce mystifica-
teur qui, selon le dire des nigauds, aurait
passé sa vie à faire, comme on dit, poser les
gens, n'a jamais tant étonné les autres qu'il
s'est étonné lui-même.
Baudelafre commença donc sa tournée de
visites, et mit ses amis en campagne. Il alla
voir M. de Lamartine qui l'accueillit très-bien ;
M. de Sacy, toujours bienveillant; M. Ville-
main qui le reçut avec hauteur; M. Viennet,
et quelques autres. Il nous rapportait de quel-
ques-unes de ces audiences des récits , des mots
à mourir de rire, telle, par exemple, cette défi-
nition devenue fomeuse que lui avait formulée
M. Viennet : — a II n'y a que cinq genres ,
monsieur! la tragédie, la comédie, la poésie
épique, la satire... et la poésie fugitive qui
comprend la fable où f excelle! » Mais il n'eut
— 74 —
jamais la pensée que de moins délicats lui ont
prêtée d'écrire le journal de son expédition aca-
démique et de livrer publiquement au ridicule
des hommes quMl avait sollicités. Ses confiden-
ces n'ont diverti que ses amis.
Ses patron!^, cependant, les expérimentés, les
^ages, considéraient sa candidature comme
prématurée, et l'engageaient à la différer.
Sainte-Beuve qui Ta toujours aimé, et qui dans
un article sur les candidats à l'Académie lui
avait donné acte de ses prétentions et de ses
titres, lui écrivait le 9 février :
« .... Je vous ai'dit raisonnablement qu'il n'y
avait rien à faire, selon moi. Votre candidature
n'a pas été mal prise par le public. L'Académie
a été plus surprise que choquée ; ne la choquez
pas en revenant à la charge au sujet d'un
homme comme Lacordaire. Vous êtes homme
de mesure, et vous devez sentir cela... »
Baudelaire déféra à ce conseil, et retira sa
candidature, comme l'atteste cet autre billet de
Sainte-Beuve, daté du 1 5 du même mois :
a Mon cher ami ,
» Votre lettre a été lue avant- hier ; votre
désistement n'a pas déplu ; mais quand on a lu
votre dernière phrase de remerciement, conçue
en des termes si modestes et si polis, on a dit
tout haut: Très-bien!
-75-
» Ainsi vous avez laissé une bonne impres-
sion. N'est-ce donc rien ? — Tout à vous. »
La lettre d'Alfred de Vigny témoigne de la
même sollicitude, avivée peut-être, ou du moins
égarée et troublée par l'ignorance du caractère
véritable de celui qui en était l'objet. Car ,
comme on va le voir , M. de Vigny, lorsqu'il
écrivait cette lettre, ne connaissait encore de
Baudelaire que ses vers, et l'on peut supposer
qu'il avait été trompé sur son compte par les
sots rapports des malveillants et des envieux.
C'est ainsi, selon nous, qu'il fiaut s'expliquer
les appréhensions et les admonestations un
peu trop paternelles des dernières lignes. C'é-
tait, ainsi que nous l'avons déjà dit, de la
meilleure foi du monde et avec une parfaite
conscience de son mérite, que Baudelaire aspi"
rait à l'Académie, et maintenant que nous
n'avons plus que ses œuvres , il est permis de
penser qu'il n'eût pas déparé la compagnie.
Là où Sainte-Beuve instruit par une longue
familiarité ne pouvait recommander que la
patience, Vigny va jusqu'àl'eftroi. — A cela près,
à part cette coda un peu farouche^ ou mieux ,
d'efiforouché, les sentiments exprimés dans
cette lettre sont trop à l'honneur de Baude-
laire pour que ses amis hésitent à la publier.
C. A.
-76-
a Lundi 27 janvier 1862.
Depuis le trente décembre, mon-
sieur, j*aî été très-souffrant et; presque
toujours au lit. Là je vous ai lu et relu,
et j'ai besoin de vous dire combien de
ces Fleurs du mal sont pour moi des
fleurs du bien^ et me charment; com-
bien aussi je vous trouve injuste envers
ce bouquet, souvent si délicieusement
parfumé de printanières odeurs, pour
lui avoir donné ce titre indigne de lui,
et combien je vous en veux de l'avoir
empoisonné quelquefois par je ne sais
quelles émanations du cimetière de
Hamlet.
Si votre santé vous permet de venir
voir comment je m'y prends pour ca-
cher les blessures de la mienne, venez
mercredi (29), à quatre heures japrès
midi; vous saurez, vous lirez, vous
toucherez comment je vous ai lu ; mais
ce que vous ne saurez pas, c'est avec
quel plaisir je lis à d'autres , à des
- 77 -
poètes, les véritables beautés de vos
vers encore trop peu appréciés et trop
légèrement jugés.
Vous m'aviez dît que votre lettre
officiellement académique était envoyée.
C'était à mes yeux une faute^ et je vous
l'ai dit ; mais elle était irréparable^ et
je me résignais à vous voir égaré dans
le labyrinthe. Mais à présent que vous
m'écrivez que c'était seulement un pro-
jet, je vous conseille franchement de ne
pas faire un pas de plus dans ces détours
qui me sont connus, et de ne pas écrire
lin mot qui ait pour but de vous faire
inscrire comme candidat à aucun des
fauteuils vacants.
J'aurai le temps de vous en dire les
raisons très-sérieuses, et vous les com-
prendrez....
Venite ad me,
Alfred de Vtgny.
G, rue des Écuries d'Artois.
LETTRES
D'EUGÈNE DELACROIX A CH. BAUDELAIRE
ia5es^îa^sss^s«a^s«g«^s«s*^
^>^A première de ces lettres est à la date
Ç j ^ de ï855 ; Eugène Delacroix y note, avec
Ci^^r-' une modestie hautaine^ l'effet produit
sur lui-même par la réunion de ses tableaux à
l'Exposition universelle. Dans les deux der-
nières, il montre son humeur contre les criti-
ques de son salon de iSSg et des peintures
murales de Saint-Sulpice.
A ce propos, faisons observer que le grand
peintre n'en n'était plus à compter les preuves
de fidélité de Baudelaire qui s'était montré de-
puis 1845 l'admirateur invariable de son génie.
Il pouvait donc s'épancher devant lui «n toute
sincérité et sécurité, aussi bien que lui confes-
^r en toute franchise son peu deo tendresse»
pour ses articles d'art de la Revue des deux
mondes.
- 82 -
I
Ce 10 juin i855, Champrosay.
Cher monsieur, je n*ai reçu qu'ici vo-
tre article (*) par-dessus les toits. Vous
êtes trop bon de me dire que vous le trou-
vez encore trop modeste. Je suis heureux
de voir quelle a été votre impression
sur mon exposition. Je vous avouerai
que je n en suis pas mécontent, et quel-
que chose de moi-même m'a gagné plus
qu'à l'ordinaire en voyant la réunion de
ces tableaux. Puisse le bon public avoir
mes yeux, mais surtout les vôtres, car
ils jugent encore plus favorablement,
j*en suis sûr, que je ne fais. Je regrette
bien de ne pas voir vos autres articles,
celui qui précède le mien et ceux qui
(*) Exposition universelle. Beaux-Arts. Eu^
gène Delacroix; article publié dans le Pays
du 3 juin i855; reproduit p. 284 et suiv. du
vol. des Curiosités esthétiques, dans les teuVres
complètes.
— 83 —
suivent. Je suis à la campagne: d'ail-
leurs à Paris il est impossible d'être pré-
venu de leur apparition dans un journal
auquel on n*est pas abonné. Mettez-les
moi à part, si vous y pensez, et vous me
les donnerez quelque jour.
Votre sincèrement dévoué,
E. Delacroix.
II
Ce 17 février i858.
Mon cher monsieur.
Je vous remercie beaucoup du cas que
vous voulez bien faire des articles (*)
dont vous pariez: je n'éprouve pas pour
eux la même tendresse, et d'ailleurs si
(*) Les articles publiés par Eugène Delacroix
dans la Revue des Deux Mondes» sur Michel-
Ange, Raphaël, etc., etc. Charles Baudelaire avait
demandé à Eugène Delacroix, pour M. Poulet-
Malassis, l'autorisation de les réunir en un vo-
lume.
-84-
je devais les publier, il faudrait des re-
maniements considérables. Il faut que
vous sachiez que j'ai récemment refusé
ce que vous désirez à M. Silvestre(*) qui
y avait mis beaucoup d'insistance, et à
qui j'^i toutes sortes de raisons de désirer
être agréable. Il faut donc absolument
que je vous fasse la même réponse qu'à
lui, quoi qu'il m'en coûte de vous déso-
bliger.
Je vous écris ceci à la hâte avant de
sortir. Mille remerciements de votre
bonne opinion. Je vous en dois beaucoup
pour les Fleurs du mal: je vous en ai
déjà parlé en l'air, mais cela mérite tout
autre chose.
A vous bien sincèrement.
E. Delacroix.
(*) M. Théophile Silvestre, auteur de VHis-
toire des artistes vivants.
— 85
III
Ce i3 décembre iSôg.
Mon cher monsieur.
Excusez-moi de n'avoir pas répondu
à votre lettre que j'avais égarée et sur
laquelle était votre adresse. Je suis si
arriéré dans mes travaux, par toutes sor-
tes de causes, que je ne puis savoir quand
je pourrai m'occuper du croquis ou es-
quisse dont vous me parlez et que je
voudrais cependant voir déjà dans vos
mains ou celles de vos amis.
J'ai trouvé effectivement un joli petit
livre de vous sur Théophile Gautier. Il
participe à l'inconvénient de plusieurs
de vos publications : le caractère en est
si fin que la lecture en est un travail
pour moi difficile. J'y ai cependant aper-
çu que vous appréciez notre critique
comme il doit l'être et comme je le fais
moi-même. Je vous dirai même que
depuis je suis tombé sur un ouvrage que
— 86 —
vous louez dignement, mais dont je n'a-
vais point connaissance, malgré son an-
cienneté. Mademoiselle de Maupin,
J'en ai été ravi : j'y ai trouvé Gautier
sous un aspect que je ne connaissais pas,
et ce qui augmente mon admiration,
c'est sa jeunesse à l'époque où il l'a com-
posé.
Mille excuses et amitiés.
E. Delacroix.
IV
Ce 27 juin 1859.
Cher monsieur.
Comment vous remercier dignement
pour cette nouvelle preuve de votre ami-
tié (*). Vous venez à mon secours au mo-
ment où je me vois houspillé et vilipendé
par un assez bon nombre de critiques
(*) Saloyi de i85g, publié dans la Revue fran-
'^ çaise, reproduit dans le volume des Curiosités
esthétiques des œuvres complètes.
-87-
sérieux ou soi-disant tels. Ces messieurs
ne veulent que du grand, et j'ai tout bon-
nement envoyé ce que je venais d'ache-
ver, sans prendre une toise pour vérifier
si j'étais dans les longueurs- prescrites
pour arriver convenablement à la pos-
térité, dont je ne doute pas que ces mes-
sieurs ne m'eussent facilité l'accès. Ayant
eu le bonheur de vous plaire, je me con-
soledeleurs réprimandes. Vous metraitez
commeon ne traiteque les grandsmorts;
vous me faites rougir, tout en me plai-
sant beaucoup; nous sommes faits
comme cela.
Adieu, cher monsieur; faites donc pa-
raître plus souvent quelque chose : vous
mettez de vous dans tout ce que vous
faites, et les amis de votre talent ne se
plaignent que de la rareté de vos ap-
paritions.
Je vous serre la main bien cordiale-
ment.
E. Delacroix.
1
— 88 —
Champrosay, ce 8 octobre i86i.
Mon cher monsieur,
Je ne vois qu'au retour d'un voyage
qui m'a éloigné quelque temps de Paris
votre article (') toujours si bienveillant
et d'une tournure si originale^ comme
tout ce que vous faites, sur mes pein-
tures de Saint-Su Ipice. Je vous remer-
cie bien sincèrement et de vos éloges et
des réflexions qui les accompagnent et
les confirment sur ces effets mystérieux
de la ligne et de la couleur, que ne sen-
tent, hélas ! que peu d'adeptes. Cette
partie musicale et arabesque n'est rien
pour bien des gens qui regardent un ta-
bleau comme les Anglais regardent une
contrée quand ils voyagent: c'est-à-dire
(*) Peintures murales d'Eugène Delacroix^
article publié dans le numéro de la Revue fan-
taisiste du i5 septembre i86i ; reproduit dans
le volume VArt romantique des œuvres com-
plètes.
- 89-
qu'ils ont le nez dans le Guide du voya-
geur, afin de s'instruire consciencieu-
sement de ce que le pays rapporte en
blé et autres denrées. De même, les
critiques 'bons sujets veulent compren-
dre afin de pouvoir démontrer. Ce qui
ne tombe pas absolument sous le compas
ne peut les satisfaire: ils se trouvent
volés devant un tableau qui ne démon-
tre rien et qui ne donne que du plaisir.
Vous m'avez écrit, il y a deux mois,
relativement au procédé que j'emploie
pour peindre sur mur; mais je ne sa-
vais oti adresser ma réponse. Je prends
le parti aujourd'hui de vous adresser
mes actions de grâces au bureau de la
revue.
Millesincèresamitiésetremercîments.
E. Delacroix.
f
LETTRES
DE MM. VICTOR HUGO, JOSÉPHIN SOULARY,
' JULES BARBEY d'aUREVILLY>
C. MERYON, PAUL DE SAINT-VICTOR, H. TAINE.
ÎS^S«S^«S^2«S^Ô2S^2fiS^2^
'^=^ouR être ici réunies en un chapitre,
ft) T^ les lettres suivantes n'ont entre elles
€^^ aucun lien.
On remarquera toutefois que la plupart ont
été écrites pour répondre à la préoccupation
constante et passionnée de Baudelaire de faire
rendre enfin justice à des génies méconnus
à son gré : Edgar Poe, Meryon, Philibert
Rouvière :
Dieux trahis par le sort, et privés de louanges.
Lettre de M, Victor Hugo.
Hauteville house , 29 avril 1860.
Vous m* avez envoyé, cher poète,
une bien belle page ; je suis tout heu-
reux et très-fier de ce que vous voulez
- 94 —
bien penser des choses que j'appelle
mes dessins à la plume ('). J'ai fini par
y mêler du crayon, du fusain, de la
sépia, du charbon, de la suie, et
toutes sortes de mixtures bizarres qui
arrivent à rendre à peu près ce que
j'ai dans Tœil et surtout dans l'esprit.
Cela m'amuse entre deux strophes.*
Puisque vous connaissez M. Meryon,
dites-lui que ses splendides eaux-fortes
m'ont- ébloui. — Sans la couleur, rien
qu'avec l'ombre et la lumière, le clair-
obscur tout seul et livré à lui-même :
voilà le problème de l'eau- forte. M.
Meryon le résout magistralement. Ce
qu'il fait est superbe. Ses planches
vivent, rayonnent et pensent. Il est
/digne de la page profonde et lumineuse
qu'il vous a inspirée ('). Vous avez en
(«) Salon de i85g, p. 338 des Curiosités
esthétiques, dans les œuvres complètes.
(2) Salon de i85g, p. 336 des Curiosités
esthétiques, dans les œuvres complètes.
- 95 -
VOUS , cher penseur , toutes les cordes
de Fart; vous démontrez une fois de
plus cette loi, que dans un artiste le
critique est toujours égal au poète.
Vous expliquez comme vous peignez,
granditer.
Je vous serre la main.
Victor Hugo.
Lettre de M. Joséphin Soulary,
Lyon , ce 22 février 1860.
Cher maître ,
Vous écrivez à notre ami Armand
Fraisse de trop aimables choses à mon
endroit pour que je ne vous en exprime
pas, et sans retard , toute ma reconnais-
sance.
En plaçant mon nom à côté du vôtre
dans un récent compte-rendu, M.
Fraisse m'a fait un honneur d'autant
plus insigne, que je vous tiens (je l'ai
-96-
dit en maintes circonstances) pour le
premier poète de notre époque. Vous
auriez pu, sans y mettre trop d'amour-
propre, décliner une association où
tout profit est pour moi. Loin de là,
vous voulez bien me reconnaître un
air de famille avec vous , et vous me
tendez la main comme à un frère.
Merci, cher maître! Je retiens votre
main dans la mienne, et je me per-
suade, non sans grande vanité , qu'à
défaut de ces points de ressemblance
qui constituent Tétat d'émulation entre
deux talents , nous avons du moins ces
points de contact qui mettent deux
cœurs en état de parfaite sympathie.
Daignez agréer, cher maître, l'ex-
pression de mes sentiments les plus
dévoués.
JOSÉPHIN SOULARY.
3 1 , Grande rue des Gloriettes.
— 97 —
Lettre de M, Jules Barbey d' Aurevilly,
Vendredi, 14 mai i858.
Homme de peu de foi, pourquoi vous
troublez-vous ?
Un titre !
Un songe... me devrais^je inquiéter d^un songe !
Et de quoi donc avez-vous peur et
vous étonne!{'Vous , mon ami?... Vous
savez mes opinions littéraires sur Edgar
Poe. Vous avez mon article du Pays,
et tel qu'il est, avec les réserves qui s'y
trouvent sur la valeur absolue des
œuvres du conteur américain, cet article
ne vous a pas mécontenté.
Je ne me déjuge point littérairement.
Mon article du Réveil est la confirma-
tion de mes opinions du Pays,
Voilà pour la littérature — le mérite
intellectuel de l'homme que vous ad-
mirez.
-98-
Quant à mes opinions morales et non
littéraires y vous savez ce que je suis,
— le Réveil , qui vous déplaît , vous
Ta assez dit et aussi tout ce que j'ai écrit
depuis sept ans, — Du point de vue de
cette moralité qui est pour moi le
sommet du haut duquel il faut em-
brasser et juger la vie, j'ai regardé Poe.
Je Tai trouvé coupable et je l'ai dit.
Pouvez- vous, avec ce que je suis,
vous étonner de cela ?
Bohême I il l'est. Ne l'ai- je pas dit
d'ailleurs avec cette expression dans
l'article même du Pays qui ne vous a
pas contrarié ? Il est bohème, et de tous
les littérateurs dignes de ce nom , il est
le plus fort, le plus poète , le plus grand
à sa manière , et voilà pourquoi à mes
yeux il en est le roi.
Bohême / Si vous lisiez mes articles
du Réveil^ qui ont une unité sous leur
variété apparente, vous sauriez ce que
je mets sous ce mot, — l'individualité,
l'absence de principes sociaux, etc., etc.,
etc.
— 99 —
D'ailleurs, je n'emprunte pas plus
ce terme au vocabulaire de Veuillot
qu'au vôtre. C'est un mot frappé depuis
longtemps et qui circule. JeTai pris,
parce qu'il dit bien ce qu'il veut dire;
vous vous en nomme:{ vous-mêmes, La
SAINTE BOHÊME — , a dit votre ami
M. Théodore de Banville.
Mon amij calmez-vous. L'article du
Réveil n'est pas d'ailleurs fait de ma-
nière à diminuer l'importance de Poe
et de votre publication. Au contraire.
Il ne vous lésera pas dans vos intérêts
de traducteur. J'y montre même des
entrailles pour votre homme de génie ,
tout en le condamnant , car vous savez
si j'aime l'esprit.
N'est-ce pas pour cela que je vous
aime?
Jules Barbey d'Aurevilly.
— lOO —
Lettre de C. Meryon,
Paris, 23 février 1860.
Cher Monsieur,
Je vous envoie un cahier de mes vues
de Paris. — Comme vous le pouvez
voir , elles sont bien imprimées, sur
chine collé sur papier vergé , par
conséquent de bonne tenue. — C'est de
ma part un faible moyen de reconnaître
le dévouement dont vous avez fait
preuve pour moi (*). Cependant , j'ose
espérer qu'elles serviront parfois à fixer
(*) Charles Baudelaire s'était ardemment
employé à faire acheter par le ministère des
exemplaires des Vues de Paris de Meryon ; il
y avait réussi.
Il s'était même proposé pour écrire une
introduction au cahier de ces chefs-d'œuvre,
sans acheteurs du vivant de l'artiste, et aujouf
d'hui hors de prix.
 défaut de ce morceau , nous renvoyons
aux articles de M. Philippe Burty ^ VŒuvre de
Meryon, n" des 1" et i5 juin i863 de la
Galette des ^eaux-o^rts.
— lOI -—
votre imagination curieuse des choses
du passé. Moi-même qui les ai faites à
une époque, il est vrai, où mon cœur
naïf était encore pris de soudaines aspi-
rations vers un bonheur auquel je
croyais pouvoir prétendre, je revois
quelques-unes de ces pièces avec un
véritable plaisir. — Elles peuvent donc
produire à peu près le même effet sur
vous qui aimez aussi à rêver.
Je n*ai point encore terminé les notes
que je vous ai promis de faire pour ai-
der votre travail; en tout casj'^irai vous
voir bientôt pour en causer encore.
Comme l'éditeur recule devant les dé-
marches^ qu'il y aurait à faire, dit-il,
pour le placement desdites pièces, il n'y
a rien qui presse. Ainsi que cela ne
vous inquiète point.
Adieu, Monsieur, j'espère qu'avant
votre départ, je pourrai profiter du bien-
veillant accueil que je reçois de vous.
Je suis votre très-humble et très-dé-
voué serviteur.
C. Meryon.
— 102 —
Je vais m'occuper du placement des
suites auprès des personnes qui ont eu^
sur votre recommandation, Textrême
bonté de s'intéresser à cette œuvre.
Meryon. — 20, rue Duperré.
Lettre de M. Paul de Saint-^ Victor.
Monsieur,
Je vous remercie de m' apprendre que
M. Rouvière ait reparu au théâtre. Je
n'ai pas vu la reprise des Mousquetaires
et j'ignorais qu'il y eût un rôle. Il me suf-
firait de votre recommandation pour
m'engager à l'aller voir, car j'attache un
trop grand prix au jugement d'un esprit
tel que le vôtre pour n'être pas sûr d'a-
vance de le partager. Puis, je me souviens
très-bien de l'impression qu'il me fit il y
a quelques années dans les rôles d'Ham-
let et de Charles IX, qu'il jouait d'une
façon tout à fait supérieure et poétique.
— io3 —
Il est très-vrai. Monsieur, que je suis
sous le charme des histoires vraiment
extraordinaires que vous traduisez à
l'eau-forte, pour ainsi dire. Je ne cesse
de réclamer leur publication suivie au
journal, et je me suis indigné autant
que vous des réclamations des quatre
ou cinq imbéciles qui ont protesté. En
pareille circonstance, et lorsqu'on est
sûr de servir du génie au public, mon
avis est qu'on doit passer outre, et conti-
nuer à jeter des perles aux pourceaux
malgré leurs grognements.
J'irai certainement à la Gaîté la se-
maine prochaine, et ce sera pour moi
un plaisir de parler de M. Rouvière.
Veuillez agréer l'assurance de mes
sentiments de considération et de sym-
pathie.
Paul de Saint-Victor.
Vendredi.
— Ï04 —
Lettre de M. H. Taine.
Cher Monsieur ,
Je suis tellement occupé et ma santé
est si médiocre, que je ne puis me char-
ger d'un article important comme celui
que vous me proposez. J*admire beau-
coup Poe ; c'est le type germanique an-
glais, à profondes intuitions^ avec la
plus étonnante surexcitation nerveuse.
Il n'a pas beaucoup de cordes , mais les
troisou quatre qu'il a vibrent d'unefaçon
terrible et sublime. Il approche de
Heine; seulement tout chez lui est
poussé au noir^ l'alcool a fait son office.
Mais quelle délicatesse et quelle jus-
tesse dans l'analyse ! — Je n'aime pas
trop Eurêka qui est de la philosophie
comme celle de Balzac dans Séraphita
et de Hugo dans les Contemplations.
Puisque vous le demandez, c'est le seul
des cinq volumes que j'aie reçu, et
encore c'était de votre main. M, Lévy
— io5 —
ne m'en a envoyé aucun , mais je Tai lu
tout entier.
Quel* malheur que vous n'ayez pas
inséré en anglais les io8 vers anglais
de Newermore ! Mais quel traducteur
vous faites^ et comme l'accent y est avec
toute son âpreté , toute son intensité et
toutes ses inflexions!
Mille remerciements , j'ai lu déjà la
moitié de ce nouveau volume (*), et je
vais faire voire commission à Flaubert.
Croyez-moi j je vous prie , votre très-
obligé et dévoué,
H. Taine.
3o mars i865«
(*) Histoires grotesques et sérieuses de Poe ;
Paris, Michel Lévy, 1864, in- 18.
LA TRADUCTION
DU « CALUMET DE PAIX «
DE LONGFELLOW
5a*fô«S^2«S^3«£^2«S^3«a^
^;^ES lettrés ne se sont pas expliqué la
H l[^ présence dans V édition des Fleurs du mal
Cjpr-> des œuvres complètes de la traduction
partielle d'un poème de Longfellow, le Calumet
de paix , qui rappelle les sujets préférés de
M. Leconte de Lisle.
En effet, ce fragment n'est pas à sa place
dans la division Spleen et Idéal , et peut-être
même devrait-il être retiré du volume.
Charles Baudelaire n'a, bien entendu , jamais
eu l'idée de rivaliser M. de Lisle sur le terrain
de la paléontologie lyrique. Son admiration
pour ce grand descriptif, chef d'une école qui
fait sa gloire, s'arrêtait en deçà de l'imitation.
Si le Calumet de paix est une sorte de poème
barbare, c'est affaire entre Longfellow et
M. de Lisle. Baudelaire n'y est pour rien ,
assurément.
— IIO —
Cette traduction lui avait été demandée par
un Américain des États-Unis, M. Robert
Stœpel, compositeur d'une symphonie sur
l'œuvre de Longfellow, qu'il avait entrepris de
faire exécuter au Théâtre-Italien. Mlle Judith
devait être chargée de la déclamation du
poème, par parties , en manière d'intermèdes
explicatifs.
L'affaire ne s'arrangea pas; elle causa à
Baudelaire bien des ennuis ; en fin de compte
il ne mit en vers que le début du Calumet de
paix.
Ceci se passait en 1860.
Nous devons ces détails à M. P.-Malassis
qui a mis à notre dispositioji une lettre à
l'appui.
Lettre à M. P.-Malassis.
M. Robert Stœpel a voulu encore
ce soir mardi entamer la question d'ar-
gent, et j'ai vu qu'il craignait une de-
mande trop forte.
Tout en sauvegardant vivement mes
intérêts^ soyez aussi poli et gracieux
— III —
que possible. M. Stœpel a Tair d'un
galant homme, vivement préoccupé de
se faire en Europe un succès aussi net
qu'en Amérique. Je crois que M. Stœ-
pel et sa femme vivent uniquement par
leurs talents ; tout cela m'inspire beau-
coup de pudeur ; mais d'un autre côté,
j'ai été obligé d'écrire à de Galonné, à
Crepet et à Grandguillot qu'il fallait
me faire encore crédit d'une quinzaine
de jours. D'ailleurs la besogne, sincè-
rement parlant, est rude. Figurez-vous
que M. Stœpel, en arrivant d'Amé-
rique, s'est adressé à Méry (qui s'est
joué de lui et a fini par lui déclarer que
puisque lui, Méry, n'en pouvait pas ve-
nir à bout, la chose était impossible); à
Emile Deschamps, à Henri Blaze (qui
a voulu l'adresser à SaintrGeorges), à
Philoxène Boyer, enfin à Banville qui
l'a adressé à moi. Il n*est venu à moi
qu'en désespoir de cause.
Il m'a dit ce soir qu'il pouvait con-
sacrer soixante-dix mille francs à la
— 112 —
première soirée. Je désire que vous
demandiez le plus possible^ et en même
temps que vous soyez charmant pour
ce monsieur qui d'ailleurs le mérite.
Sur seize ou dix-huit morceaux^ je
crois, je lui en ai livré deux.
Tout à vous.
C. B.
f
NOTICE RECTIFICATIVE
-ous attribuons à M. Auguste Vitu l'ar-
ticle suivant, remarquable par la viva-
cité et la précision des souvenirs qui
y sont consignés. On nous le communique
coupé, sans indication de provenance.
Il rectifie sur quelques points la notice de
M. Théophile Gautier , et donne de bien cu-
rieux détails sur la première publication^ dans
le feuilleton du journal le Pays, de la traduc-
tion des Histoires extraordinaires.
L'attention publique a été rappelée
cette semaine sur un mort célèbre et re-
grettable. Les deux premiers volumes
des œuvres de Charles Baudelaire ont
8
— ii6 —
paru, précédés d'une notice écrite par
Théophile Gautier
Nous ne pouvons accorder à
Théophile Gautier l'inconcevable er-
reur qui marque la deuxième ligne de
sa notice sur Baudelaire.
« La première fois que nous rencon-
trâmes Baudelaire, dit Théophile Gau-
tier, ce fut vers le milieu de 1849, à
l'hôtel Pimodan, où nous occupons
près de Fernand Boissard un apparte-
ment fantastique ; etc. »
Théophile Gautier nous permettra
de lui certifier qu'en 1849 ni lui ni
Baudelaire n'habitaient l'hôtel Pimo-
dan. Après un long séjour dans la rue
de Navarin, pendant les dernières an-
nées du règne de Louis- Philippe , Gau-
tier vint s'installer, vers 1848, dans la
maison qui fait le coin droit de la rue
Rougemont et de la rue Bergère, en
face du Comptoir d'escompte. Il y a
séjourné longtemps.
L'hôtel Pimodan, déserté par ses
— 117 —
nobles propriétaires, a vu passer bien
des hôtes légendaires : Théophile Gau-
tier lui-même, mais il doit y avoir
trente ans de cela ; Roger de Beauvoir ;
Baudelaire. C'est là que Baudelaire écri-
vit sa première œuvre remarquée, le
Salon de 1846. Je ne saurais le suivre
avec exactitude dans tous les méandres
de ses pérégrinations inattendues et inex-
pliquées. Après rhôtel Pimodan , il ha-
bita l'hôtel de la place Vendôme , oc-
cupé par son beau-père, le général Au-
pick^ qui commandait, la place de Pa-
ris. Je le retrouve ensuite, sans savoir
pourquoi, dans des gîtes de passage,
comme l'hôtel Folkestone, rue Lafitte,
et l'hôtel Corneille, rue Corneille, ce
même hôtel Corneille où Balzac , avec
la précise intuition du génie , a logé Z.
Marcas.
Je vois, en consultant une liasse
de lettres de Baudelaire qui n'a pas,
en toute sa vie, écrit une ligne de billet
qui ne fût expressément datée et signée.
— ii8 —
qu'en novembre i85o il demeurait
avenue de la République^ n^gS (*).
Il y a d'ailleurs d'autres confusions
dans les souvenirs de Gautier sur Bau-
delaire; pure affaire de détail. L'artiste
n'est pas mal jugé; l'homme y est plu-
tôt supposé que connu. Cela manque
d'intimité. Baudelaire n'en acceptait,
du reste, qu'avec un petit nombre d'a-
mis anciens, à qui son cœur et son âme
s'ouvraient complètement, devant qui
tombaient le masque et la pose , et qui
seuls ont vu, apprécié, aimé l'infortuné,
le charmant Baudelaire.
En dehors d'çux , Baudelaire s'était
donné des admirations qu'il célébrait
pon^peusemènt, à la manière d'un culte :
Delacroix, Théophile Gautier, Dau-
mier, en dernier lieu Wagner. Ce qu'il
y avait de sincère à la fois et d'artificiel
dans ces affinités électives, bien fin qui
(*) Le rectificateur est ici à rectifier : nous
avons vu des lettres de Ch. Baudelaire non
datées et signées C. B. seulement.
— 119 —
le discernerait ! Il m'a cependant con-
fessé que n'étant pas musicien et n'ai-
mant pas la musique^ il caressait dans
Wagner de certaines idées générales,
abstraction faite de son œuvre lyrique
et dramatique qui le laissait indifférent.
Théophile Gautier remarque avec
raison que la célébrité de Baudelaire
date de la traduction des contes d'Edgar
Poe. Ils eurent bien du mal à parvenir'
jusqu'au public^ ces contes aujourd'hui
si célèbres. Ce fut Dutacq^ cet homme
d'une sagacité si vive et si diverse^ car
il jugea^ dix ans avant la foule^ Charles
Baudelaire et Gustave Doré, ce fut
Dutacq qui ouvrit à la traduction d'Ed-
gar Poe le feuilleton du Pays. Mais à
quelles conditions, grand Dieu ! Les con-
tes parurent en second feuilleton, c'est-
à-dire en tranche quotidienne de cinq
colonnes à la troisième page, au prix de
vingt francs le feuilleton complet. Et que
de tiraillements ! que de tracasseries ! que
de quolibets contre l' Hoffmann améri-
— 120 —
cain et contre son interprète si étrange
lui-même !
Baudelaire souffrait beaucoup de ces
inclémences des hommes, lui y le plus
poli des poètes et le plus inquiet des
rêveurs. La nature particulière de son
talent , l'allure inusitée de ses idées , lui
suscitaient beaucoup d'objections et de
résistances. On jugera de ses transes et
'de ses précautions par la lettre suivante
adressée à un ami. Il s'agit d'articles sur
l'Exposition universelle des beaux-arts^
en i855 :
9 juin i855.
Mon cher ami, vous êtes pour moi
toujours si parfaitement aimable que je
compte sur vous pour les choses sui-
vantes.
I Viendrai-je demain, à midi, pour
mes épreuves, avec mon quatrième arti-
cle ? — Je n'en sais rien. — Ma vie er-
rante m'a disloqué... Revoyez donc mes
épreuves, après avoir lu mon article avec
/
— ^.121 —
M. Cohen. Défiez-vous bien du puis-
sant Guillaume ; — de l'insidieux Pel-
lerin qui aurait plu à Voltaire, ca
c'est un pèlerin couvert de coquilles.
Présentez mes excuses à M. Cohen, di-
tes-lui que c'est le dernier article consa-
cré à un seul homme, et qu'if veuille
bien ne pas trop user de sa puissance de
biffeur. D'ailleurs, vous connaissez si
bien mes pensées, que vous lui expli-
querez celles qui sont mal dites. Puis, le
père Ingres m'a donné un mal de chien.
Revoyez sur la copie. Peu de tirets
et de soulignages; mais pourtant quel-
ques-uns.
Ch. B.
Etait-ce donc à tort que Baudelaire
prenait tant de prudentes précautions
contre les ciseaux de M. Cohen , le
rédacteur en chef du Pays , contre
Guillaume, le metteur en pages aux
cheveux rouges, si redouté de Mme
— 122 —
Clémence Bader^ enfin contre M. Pel-
lerin , le correcteur ?
Le fait est que les articles de Baude*
laire ne parurent point. Du moins ^
je les ai vainement cherchés dans la
collection du Pays (*). En revanche,
j'y ai trouvé ceux de M. Louis Esnault
qui fut préféré à Baudelaire.
C'est un peu de ces choses-là, de ces
mécomptes amers , silencieusement su-
bis, que meurent les hommes de génie ;
il ne faut pas trop leur en youloir.
(*) Il y a erreur. Le compte-rendu de
l'Exposition des beaux -arts de i855 fut
interrompu au Pays après le second art;icle de
Baudelaire^ entièrement consacré à Eugène
Delacroix (n* du 3 juii\}. Cet article étonna
le rédacteur en chef. Il offrit alors la conti-
nuation du compte-rendu à M. Louis Esnault,
homme de lettres heureusement incapable
d'étonner personne que lui-même.
NÉCROLOGIE
<£^^5S^S«S!^S^S*^«S^2^î£^5i
'ous empruntons au journal l'Étendard
des 3 et 4 septembre 1867, les dis-
cours prononcés sur la tombe de
Charles Baudelaire ^ et la note de M. Auguste
Vitu, rédacteur en chef de ce journal , qui les
précédait.
Aujourd'hui lundi ont été célébrées,
à l'église Saint-Honoré de Passy, les
obsèques de Charles- Pierre Baudelaire,
mort le 3 1 août, à quarante-six ans.
Les invitations étaient faites au nom
de madame Aupick, veuve en premières
noces de M. Baudelaire, et en secondes
de M. le général de division Aupick,
sénateur, ancien ambassadeur à Cons^
— 126 —
tantinoplç; de madame Perrée^ sa
grand'tante ; de madame veuve Bau-
delaire, sa belle-sœur ; de M. le général
de brigade Levaillant; de M. le com-
mandant Levaillant et de M. le général
de division Levaillant^ ses cousins.
Charles Baudelaire est mort dans la
force de 1 âge , et sa robuste intelligence
a résisté jusqu'au bout aUx assauts
d'une horrible névrose qui ne lui per-
mettait plus l'usage de la parole. Pour
ceux qui ont connu Baudelaire^ ce cau-
seur élégant et coloré, ce vif esprit tou-
jours en éveil sur tous les problèmes,
on jugera des angoisses contre lesquelles
il a lutté pendant une année de supplice.
Il s'est éteint doucemenret, pour ainsi
dire , sans agonie , après avoir reçu les
secours de la religion.
L'art , dont le culte ardent a dévoré
la vie de Baudelaire, fait en sa personne
une perte considérable et dont l'étendue
ne sera mesurée que plus tard, lorsque
rhistoire littéraire aura marqué sa vraie
_ 127 —
place à Tauteur des Fleurs du mal, cet
étrange et magnifique bouquet de ma*
lédictions byroniennes^ écrites dans une
langue qui n'a d'analogue que celle du
Dante.
Baudelaire n'était ni un athée ni un
sceptique : c'était un souffrant; nul
esprit ne fut plus habile à se marty-
riser lui-même , à distiller la joie et la
douleur humaines, pour en extraire
des parfums violents comme des poi-
sons^ et des poisons doux comme des
par/ums.
Tout coin sombre l'attirait, comme
aussi toute idée nouvelle, étrange ou
chimérique; et cependant il avait de
rares facultés de clairvoyance, d'ordre,
de netteté dans l'esprit. Edgar Poe,
dont il se fit le traducteur passionné,
l'attirait par ce noble aimant : l'évo-
cation des fantômes et l'analyse mathé-
matique.
Charles Baudelaire était un homme
d'éducation et de manières exquises.
— 128 —
Vivement touché des beautés littéraires,
il ne connaissait pas l'envie ; il admi-
rait ses maîtres^ il aimait ses égaux.
Il était extrêmement sensible à Tamitiéy
et tous les liens qu'il a formés dans sa
jeunesse ont duré jusqu'à sa tombe.
Nous avons retrouvé, dans la petite
chapelle Saint-Honoré, les plus anciens
amis de Charles Baudelaire : Jean
Wallon, Théodore de Banville, Charles
Asselineau, Champfleury, Monselet,
Nadar, Louis Veuillot, Arsène Hous-
saye , Théophile Silvestre , Alfred Ste-
vens, le docteur Piogey, etc., etc., à qui
s'étaient joints beaucoup d'hommes de
lettres et d'artistes.
M. Ancel, maire de Neuilly, ancien
notaire de la famille, conduisait le deuil
en son nom.
Après l'absoute, le corps a été dirigé
sur le cimetière Montparnasse, où il a
été inhumé dans un caveau de famille.
MM. Théodore de Banville et Asseli-
neau ont prononcé sur la tombe de
— 129 -—
notre ami les paroles touchantes que
nous publions plus bas.
Charles Baudelaire était né à Paris
en avril 1821.
Auguste Vitu.
Discours prononcé par M. Théodore
DE Banville.
Messieurs^
Celui que la mort vient de frapper
emporte avec lui une large part de mon
cœur, et je ne puis encore regarder son
cercueil sans avoir les yeux obscurcis
par les larmes.
Egoïstement, je me donnerais tout
entier à cette douleur qui m'envahit et
qui me pénètre ; mais je dois oublier un
instant que Charles Baudelaire fut pou
moi un ami excellent et tendrement
chéri, car j'ai à remplir envers lui un
devoir plus sacré et plus impérieux que
— i3o —
celui de le pleurer. A défaut de ceux de
nos maîtres qui auraient eu qualité pour
accomplir cet acte de justice, il faut
que je trouve en moi la force nécessaire
pour dire quel est le poète qui vient de
nous être enlevé, et^ si insuffisant que
je sois pour une pareille tâche, je par-
lerai de lui sans orgueil excessif, sans
vaine modestie^ et avec une absolue
sincérité.
Aussi bien, pour louer dignement
Charles Baudelaire, la vérité suffit, et
il ne faut' rien de plus à sa mémoire.
Brisé par un mal cruel et mystérieux
qui avait défié les efforts de la science,
rhomme vientdes*éteindre; le triomphe
durable s'apprête pour le penseur élo-
quent, pour le merveilleux artiste qui
fut et qui restera un grand poète. De
son vivant même, son œuvre avait été
brillamment acclamée par les esprits
supérieurs de la poésie et de la critique,
en même temps qu'elle était durement
contestée par les hommes qui contestent
J
- i3i —
tout ce qui est beau. Mais tour à tour
louée et dénigrée , parfois même odieu-
sement calomniée et salie^ elle s'imposait
au public par une puissance virtuelle à
laquelle nul n'avait pu résister^ et de
jour en jour, d'heure en heure, son
succès grandissait avec ^une progression
d'abord lente, puis plus rapide, puis
tellement rapide que' rien au monde
n'aurait pu l'arrêter quand même Ta
mort ne serait pas venue placer dans
son vrai jour et mettre en pleine lu-
mière cette oeuvre qui , sans pâlir, peut
être comparée aux plus belles et aux
plus illustres.
En effet, et l'avenir prochain le dira,
d'une manière définitive, l'auteur des
Fleurs dtumal est non pas un poëte de
talent, mais un poëte de génie, et de
jour en jour on verra mieux quelle
grande place tient, dans notre époque
tourmentée et souffrante, son œuvre
essentiellement française , essentielle-
ment originale, essentiellement nou-
I
— l32 —
velle. Française^- elle Test par la clarté^
par la concision, par la netteté si fran-
che des termes qu'elle emploie^ par une
science de composition^ par un amour de
Tordre et de la règle qui très-rigoureuse-
ment procèdent du dix-septième siècle ;
originale... nul ne le lui a contesté;
c'a été le grand éloge et le grand re-
proche que lui ont sans cesse adressés
ses amis et ses ennemis; nouvelle, j'in-
siste là-dessus^ elle a été^ elle est,
elle restera étonnamment nouvelle et
primesautière; ceci est sa gloire^ la
meilleure et la plus vraie^ dont rien ne
peut la déshériter.
Elle fut nouvelle, Messieurs^ et par le
fond et par la forme; et songe- t-on bien
à ce qu'un pareil mot renferme d'éloges?
Rien que pour trouver dans la forme
d'un art un point de vue nouveau^ rien
que pour imaginer dans les procédés
qu'il emploie une légère et insignifiante
modification, quelle magnifique organi-
sation d'artiste ne faUt-il pas avoir
reçue?
— i33 —
Par quelles sévères et sérieases étu-
des^ par quels travaux incessants ne
faut-il pas Tavoir complétée I Eh bien 1
lorsqu'il arrive, une ou deux fois par
siècle^ qu'un homme d'élite apporte un
art qui lui appartient complètement^
dont la forme est sortie de lui tout en-
tière^ cet homme a déjà soulevé un
monde; mais si le fond même des sen-
timents qu'il traduit^ des idées qu'il
met en œuvre, des impressions qu'il
retrace^ est à lui et bien à lui; si^
comme La Fontaine au dix-septième
siècle, comme Prud'hon sous le pre-
mier Empire, il possède en lui une
originalité assez bien trempée pour
échapper absolument et comme sans
effort à la mode^ à la tradition^ aux
préjugés artistiques de son temps^ n'est-
il pas vrai et légitime de dire de lui
qu'il a du génie?
Je. ne veui pas^ Messieurs, entre-
prendre de toucher ici à notre histoire
littéraire; je n'en dirai qu'un mot, celui
— i34 —
qui est nécessaire pour faire compren-
dre ma pensée.
Tout le monde sait qu'un magnifique
et puissant écrivain règne chez nous
sans -conteste depuis trente ans^ et
depuis trente ans, a mis sur notre
littérature, poésie lyrique, drame,
roman , histoire , critique, l'empreinte
de sa griffe de lion.
Cette royauté de Victor Hugo, elle a
été tantôt subie , tantôt librement ac-
ceptée, mais toujours reconnue et obéie,
tant il semblait impossible de s'y sous-
traire 1
. L'imitation de Victor Hugo, tel a été
le commencement de tout poëte de ce
temps; aucun de nous n'a su ou même
voulu s'en affranchir; longtemps le
jeune poëte s'essayait à l'ombre de notre
cher et vénéré maître, et il restait aux
côtés du colosse, jusqu'à ce qu'il se fût,
à son tour, senti naître et grandir des .
ailes.
Eh bien! Messieurs, quand Charles
— i35 —
Baudelaire commença à faire connaître
ses premières poésies, (car elles ne furent
imprimées que bien plus tard) , on vit
avec étonnement qu'il apportait un
vers, une poésie à lui, où ni Hugo, ni
Musset, ni Lamartine, n'avaient rien à
réclamer, et à laquelle on eût difficile*
ment trouvé des ancêtres, à moins de
remonter jusqu'à la race vigoureuse des
Mathurin Régnier et des d'Aubigné.
Un poëte original était né, et soit
qu'on voulût Taimer ou le haïr, il fallait
en prendre son parti. Original par la
formé, sans doute; bien plus original
encore par le fond même de son inspi-
ration, car les idées et les sentiments
qu'il venait nous traduire, étaient pré-
cisément c^ux que l'admirable poëte des
Contemplations avait volontairement
mis en oubli.
Continuant, quoique novateur, la
tradition antique, Victor Hugo a tou-
jours transfiguré l'homme et la nature
à l'image d'un certain idéal voulu ; au
— i36 —
contraire, Baudelaire, comme Balzac,
comme Daumier, comme Eugène
Delacroix, accepta tout P homme mo-
derne, avec ses défaillancesj avec sa
grâce maladive, avec ses aspirations
impuissantes, avec ses triomphes mêlés
de tant de découragements et de tant
de pleurs ! Les côtés de Tâme qu'il était
convenu et classique de laisser dans
Tombre, l'hypocrisie d'une race faible
et diminuée, l'imjMiissance d'aimer et
de haïr, le désir d'une croyance qui ne
peut naître, l'inconsolable regret de
nous être fermé nous-mêmes les cieux,
toutes ces souffrances, tout ce vide,
toutes ces agonies, il les peignait en
traits ineffaçables, et, véritable poëte
romantique (il avait donné lui-même du
romantisme cette définition excellente :
l'expression la plus récente de la beauté),
il représenta avec le charme exquis dont
est doué un grand artiste, ce qui nous
reste de la beauté, c'est-à-dire uneombre
malade, mourante, adorable pourtant.
,-i37-
qui s'enfuit en exhalant une plainte
harmonieuse et désolée.
Oui^ il fut rhomme, il fut Tartiste
moderne avec toute son énergie et avec
toute sa vivifiante tristesse.
Sorti d'une famille où il avait pu
puiser à la fois les enseignements les
plus virils et les traditions des plus
parfaites et des plus aimables élégances,
Baudelaire appartenait à une aristo-
cratie par la naissance et par la fortune;
mais il fut peuple par la vaillance avec
laquelle il supporta les revers et la
souffrance lorsqu'il plut au ciel de les
lui envoyer.
La souffraacel il l'aima^ il l'idolâtra
chez lui et chez les autres; loin de la
cacher et de la nier^ il la chantait^ il la
célébrait, comme étant le grand moyen
de rachat que Dieu nous a donné.
Vous le savez, Dieu n'en fut point
avare envers lui ; à cet homme si bon ,
si doux, si inoffensif, qui si ardemment
sut admirer et louer ses émules^ et qui^
— i38 —
en vingt ans d'existence littéraire, n*a
attaqué ni blessé personne, il a donné
trois années de tortures qui auraient
suffi à racheter la vie d'un criminel.
Ah I maintenant, cette âme si durement
éprouvée doit être rachetée et triom-
phante! Son Créateur lui donnera le
repos infini, comme la postérité don-
nera la gloire, une gloire vraie et com-
plète, au poëte qui n'a dédaigné aucun
de nos maux et aucune de nos blessures.
Adieu, Baudelaire! tes amis ne se
lasseront pas de te pleurer, toi qui as
été leur exemple et leur orgueil. La
France te connaîtra et t'admirera.
Adieu, honnête homme , excellent ami,
grand artiste, noble poëte, adieu !
— i3j —
Discours prononce par M. Charles
ASSELINËAU.
Messieurs ,
Après les rayonnantes paroles que
vous venez d'entendre^ et qui sont
comme Tauréoie anticipée du poëte , il
n'y a plus ni à louer ni à glorifier , et
le plus humble des amis de Charles
Baudelaire ne viendrait pas troubler
rimpression religieuse de cet adieu
fatidique^ s'il n'était poussé par sa
conscience à une dernière protestation.
Si la gloire commence aujourd'hui
pour Charles Baudelaire, l'histoire
aussi commence avec elle. Devant cette
«
tombe, trop tôt ouverte, et qui va se
refermer derrière vos pas, la vérité
réclame ses droits , et le -devoir seul
qu'elle m'impose me donne la force de
rompre le silence oti je voudrais vous
laisser, où surtout je voudrais me
recueillir moi-même.
— ï4^ —
On a trop parlé de la-« légende » de
Charles Baudelaire, sans prendre garde
que cette légende n'était que le reflet de
son mépris pour la sottise et pour la
médiocrité orgueilleuse.
Je parle au nom de ceux qui Font
constamment aimé, suivi, compris, et
je Tàffirme dans ce moment solennel,
avec la gravité de la conviction devant
la mort : — Oui, ce grand esprit'fut en
même temps un bon esprit; ce grand
cœur fut aussi un bon cœur.
Il en est, qui sont morts, qui auraient
pu le dire. Il en est encore, grâce à Diei;i,
qui sont vivants, et qui l'attestent.
Charles Baudelaire ne manquera
pas seulement à ses admirateurs; il
manquera à ses amis dont il était la joie,
le conseil, le serviteur dévoué et fidèle ;
à cette mère affligée, exemplaire, mais
fière dans sa douleur, et qui se console
par la gloire de son fils de la perte
d'une tendresse pieuse qui ne lui a
jamais fait défaut. Il manquera aux
— 141 —
faibles qu*il encourageait^ aux déses-
pérés qu'il secourut, à tous ceux à qui
il donnait Fexemple du travail, de la
constance et du respect de soi-même.
Son âme sincère et délicate avait la
pudeur de ses vertus, et, par horreur
de Taffectation et de l'hypocrisie > se
remparait d*uné réserve ironique qui
n'était en lui qu'une forme suprême de
la dignité. Je ne pourrais que plaindre
ceux qui s'y seraient trompés.
Faut-il bénir, Messieurs, ffiut-il
déplorer le miracle qui, dans ce corps
malade, paralysé, sans voix, a maintenu
jusqu'à la fin l'esprit lucide et le cœur
intelligent ?
Ah ! qu'on n'évoque pas ici les hor-
reurs de la démence et de l'imbécillité !
Le mal, que ce fût un bienfait ou une
torture, a laissé jusqu'au bout intacte
et vaillante cette raison souveraine du
poëte : c'est bien assez qu'il l'ait fait
muet et immobile.
Croyez-en ceux qui l'ont assisté
— 142 —
assidûment; croyez-en les médecins
qui Font soigné , la mère qui la veillé ,
servi avec une énergie infatigable, et
qui, clairvoyante et ingénieuse, con-
versait avec lui comme aux temps
heureux : ses yeux n'ont jamais cessé
de reconnaître les yeux aimés et de les
comprendre; sa main s'est toujours
tendue la première vers les mains
fidèles.
Au plus fort de la maladie , il s'en-
tretenait, par l'intermédiaire d'un ami
avec son éditeur.
Ses regards ont été des testaments
clairs, éloquents, qui épargneront tout
embarras aux exécuteurs de ses volon-
tés. Non, il ne faut pas qu'il y ait là-
dessus d'équivoque. C'est pour cela
d'ailleurs que je suis ici; c'est pour cela
que je vous parle et que je trouve le
courage de vous arrêter encore et de
suspendre votre attention pendant ces
dernières minutes.
Ce que Charles ^Baudelaire a souffert
— 143 —
dans ces deux ans est inénarrable pour
quiconque entrevoit le supplice d'un
génie ardent et actifs condamné à Tinac-
tion et au silence^ d'un poète pour qui
l'avenir était si beau^ enfermé dans son
passé comme dans un cachot sombre.
Il a subi toutes les douleurs et toutes
les agonies ; et ce qui est plus^ il les a
subies noblement, dignement, en philo-
sophe résigné et fort.
Il a été faible, abattu, brisé, miséra-
ble : insensé , jamais !
Je le dis bien haut, j'y insiste parce
que j'en ai été témoin, afin que vous le
sachiez et que vous puissiez le redire
à votre tour, en réponse à des plaintes
malavisées qui ne seraient qu'un ou-
trage.
Messieurs, avant de nous séparer, je
vous recommande la mémoire de
Charles Baudelaire.
Je vous la recommande comme un
exemple d'abord, et aussi comme un
dépôt que vous ne laisserez altérer ni
par l'envie ni par l'indiscrétion. •
— 144 —
Vous vous souviendrez et vous répé-
terez qu'en notre ami encore s est mani-
festée cette loi consolante^ admirable,
qui veut que les plus forts soient les
meilleurs, et que les plus grands esprits
soient les plus droits.
f
BIBLIOGRAPHIE
SS*féi5S*fô«S^2&S^2^ÎS*fêfig^3^
PREMIÈRE PARTIE
LIVRES
SALON DE 1845, par Baudelaire Dufays.
Labitte, 1845, in-12, 72 p. Annoncé sur la
couverture : sous presse du môme auteur :
io De la peinture moderne, 2o De la cari^
cature. 3® David, Guérin et Girodel, Aucun
de ces ouvrages n'a paru.
SALON DE 1846, par Baudelaire Dufays.
Lévy, 1846,in-12, 132 p. Annoncé sur la
couverture : pour paraître prochainement, du
même auteur : lo Les Lesbiennes , poésie.
2o Le Catéchisme de la femme aimée» Ces
10
— 148 —
deuï ouvrages sont encore annoncés sur
la couverture de la deuxième éd. des Sta-
lactites, par Théodore de Banville ; 1846,
in-8; et sur celle de Chien-Caillou, fantai-
sies d* hiver, par Champfleury; 1847, in-12;
seulement sur cette dernière ils sont indiqués
.sous le nom de Pierre de Fayis, et Le Caté-
chisme de la femme aimée y porte le sous-
titre de : romans physiologiques sur Vamour
moderne. Aucun de ces ouvrages n'a paru.
HISTOIRES EXTRAORDINAIRES, traduites
d'Edgar Poe , par Charles Baudelaire ; Lévy,
1856, in-18 de XXXlI-332 pages. Ce volume
contient:
Edgar Poe, sa vie et ses œuvres. — En
partie, dans le pays, 25 février 1856.
Double assassinat dans la rue Morgue. —
{Facultés divinatoires d'Auguste Dupin.) h le
PAYS, 25, 26 février; 1, 2, 3, 5, 6 et 7
mars 1855.
La Lettre volée. (Facultés divinatoires
d'Auguste Dupin.) 11. le pays; 7, 8, 12 et 14
mars 1 855.
Le Scarabée, d^or.
Le Canard au ballon. - le pays; 31 janvier,
2 et 3 février 1855.
— 149 -
Aventure sans pareille d'un certain Hans
Pfaall— LE pays; 14, 15, 16, 22, 27, 31 mars;
1, 2, U, 17 et 20 avril 1855.
Manuscrit trouvé dans une bouteille. —
LE pays; 21 et 22 janvier 1855.
Une descente dans le Maelstrom. — le pays;
5, 6 et 7 février 1855.
La Vérité sur le cas de Jf. Valdemar.
{Mort ou vivant) le pays; 26 septembre 1854.
Révélation magnétique. — la liberté de
PENSER du 15 juillet 1848, et le pays du 30
juillet 1854.
Les Souvenirs de M. A. Bedloe. {Une
aventure dans les Montagnes rocheuses,) le
pays; 25 et 26 juillet 1854.
Morella. — le pays; 18 septembre 1854.
Ligeia. — le pays ; 3 et 4 février 1855.
Metzengerstein, — le pays; 17 septembre
1854.
NOUVELLES HISTOIRES EXTRAORDI-
NAIRES, traduites d'Edgar Poe, par Charles
Baudelaire; Lévy, 1857; in-18 de XXIV-288
pages. Ce volume contient :
Notes nouvelles sur Edgar Poe,
Le Démon de la perversité. — le pays; 14
septembre 1854.
— i5o —
Le Chat noir. — le pays; 31 juillet et ier
août 1854.
"William WiUon. — le pays; U, 15, 18 et
19 février 1855.
L'Homme des foules. - le pays; 27 et 28
janvier 1855.
Le Cœur révélateur. — le pays; 29 juillet
1854.
Bérénice. — le pays; 2 août 1854.
La Chute de la maison Usher. '^ le pays;
7, 9 et 13 février 1855.
Le Puits et le pendule. — revue de paris;
( non signé ) octobre 1852, et le pays, 3 et 4
août 1854.
Hop-Frog. — le pays; 23, 24 et 25 février
1855.
La Barrique d' Amontillado. — le pays;
13 septembre 1854.
Le Masque de la mort rouge. — le pays;
22 et 23 février 1855.
Le Roipeste.— LZ pays; 23, 26 et 27 janvier
1855.
Le Diable dans le beffroi. — le pays;
20 septembre 1854.
Lionnerie. (Être un lion , conte moral) —
LE pays; 19 et 22 février 1855.
— i5i —
Quatre bêtes en une, (L'homme camétéo-
pard ou). — le pays; 28 juillet 1854.
Petite discussion avec une momie. — le
pays; 11 et 42 décembre 1854.
Puissance de la parole. •— le pays; 5 août
i854.
Colloque entre Monos et Una. — le pays;
22 et 23 janvier 1855.
Conversations d'Eiros avec Charmim. —
LE pays; 27 juillet 1854.
Ombre, — le pays; 5 août 1854.
Slence. — le pays; 22 février 1855.
L'Ile de la fée. — le pays ; 28 et 30 janvier
1855.
Le Portrait ovale. — le pays; 28 janvier
1855
LES FLEURS DU MAL, par Charles Bau-
delaire. Poulet-Malassis et de Broise, 1857;
grand in-12, 252 pages Cette édition qui
annonce sur sa couverture : c Pour paraître
en juin 1857: Curiosités esthétiques, par
Charles Baudelaire, » ouvrage qui n'a jamais
paru, contient six pièces qui ont été con-
damnées par un arrêt devenu célèbre : Les
Bijoux; Le Léthé; A celle qui est trop gaie;
— l52 —
Lesbos ; Femmes damnées {A la pâle
clarté... } ; Les Métamorphoses du vampire.
La pièce coadamnée intitulée Lesbos, parue
pour la première fois, en 1850, dans Les
Poètes de V amour, anthologie publiée par
Julien Lemer, supprimée en 1858 dans la
nouvelle édition de ce recueil, fut rétablie,
après sa condamnation, dans Fédition
suivante, parue sans date chezr Garnier en
1865, sans avoir été poursuivie depuis.
Une deuxième édition des FLEURS DU
MAL , diminuée des six pièces condamnées et
augmentée de trente-cinq morceajix, a paru
chez les mêmes éditeurs, 1861, grand in-12 de
320 pages. Gomme on le verra plus loin,
plusieurs des pièces de ce volume avaient été
publiées d'abord en 1851, dans le messager
DE l'assemblée; elles y sont annoncées
comme extraites des Limbes, volume de
Charles Baudelaire, sous presse {sic) chez
Michel Lévy. Le titre de Fleurs du mal
fut trouvé par MvHippolyte Babou, La revub
DES DEUX-MONDES, si jalouse de ne publier que
de rinédit, a donné, dans son numéro du
1er juin 1855, plusieurs pièces de Gb. Bau-
delaire déjà connues* Les trente^cinq pièces
— i53 —
ajoutées à la seconde édition des FLEURS
DU MAL, sont ici précédées d*un astérisque :
Dédicace à Théophile Gautier, (en prose.)
Au lecteur. — revue des deux-mondes ;
icr juin 1855.
Spleen et Idéal.
Bénédiction.
* U Albatros. — revue française; 10 avril
1859.
Élévation.
Correspondances.
«( Taime le souvenir de ces époques nues. »
Les Phares.
La Muse malade.
La Muse vénale.
Le Mauvais moine. — le messager de
l'assemblée; 9 avril 1851.
U Ennemi. — revue des deux-mondes ;
1er juin 1855.
LeGuignon. — revue des deux-mondes ;
1er juin 1855.
La Vie antérieure. — revue des deux-
mondes ; 1er juin ig55.
Bohémiens en voyage.
VHomme libre et la mer. — revue de
paris; octobre 1852.
— i54 — '
Don Jmn avx enfers. {UJmpénitent)
l'artiste; 6 septembre 1846.
ChcUiment de l'orgueiL ~ magasin des
FAMiiXEs; juin 1850 (*).
La Beauté, — revue française; 20 avril
1857.
Uldéal. — le messager de l'assemblée;
9 avril 1851.
La Géante. — revue française ; 20 avril .
1857.
* Le Masque. — revue contemporaine;
30 novembre 1859.
* Hymne à la beauté. — l'artiste; 15
octobre 1860.
Parfum exotique.
* La Chevelure. — revue française ; 20 mai
1859.
« Je t'adore à Végal de la voûte nocturne. »
c( Tu mettrais l'univers entier dans ta
ruelle. »
(*) Cette pièce parut dans ce recueil en même temps
que L'Ame du vin {Le Vin des honnêtes gens) , avec la
note suivante : < Ces deux morceaux inédits sont tirés ^
d'un livre intitulé Les Limbes, qui paraîtra trés-
procbainement et qui est destiné à représenter les
agitations et les mélancolies de la jeunesse mo-
derne. •
— i55 --
Sed non satiata.
ce Aree$es vêtements ondoyants et nacrés. »
^ REVUE française; 20 avril 1857.
Le Serpent qui danse.
Une Charogne,
De profundis elamavi, (La Béatrix.) le
MESSAGER DE L'ASSEMBLÉE; 9 avril 1851.
Le Spleen, revue des deux-mondes; 1«r juin
1855.
Le Vampire.
tt Une nuit que j'étais près â*une affreuse
juive. »
Remords posthume. — revue des deux-
mondes; 1er juin 1855.
Le Chat.
* Duelhtm, — l'artiste; 19 septembre
1858.
Le Balcon.
* Le Possédé. — revue française; ÎO jan-
vier 1850.
* Un /«n/<5m^.— l'artiste; 15 octobre 1860.
— Contient :i^ Les Ténèbres ; 2*> Le Parfum ;
3o Le Cadre; 4® La Portrait.
" Je te donne ces vers , afin que si mon
nom. » — revue française; 20 avril 1857.
* Sempereadem. — revue contemporaine;
15 mai 1860.
— i56 --
Tout entière.
« Que dira$-tu ce soir^ pauvre âme soli-
taire? n
Le Flambeau vivant. — bevcb française;
20 avril! 857.
Réver^biUté. — revue des deux-mondes;
1er juin 1855.
Confession. •— revue des deux-mondes;
1er juin 1855.
L'Aube spirituelle. — revue des deux-
mondes; 1er juin 1855.
Harmonie du soir. — revue française ;
20 avril 1857.
L^F^o^^on.— revue française; 20 avril 1867.
Le Poison. — revue française; 20 avril
1857.
Ciel brouillé.
Le Chat.
Le Beau navire.
UInvitation au voyage. •— revue des deux-
mondes; 1er juin 1855.
UIrréparable. {A la belle aux cheveux
d'or.) revue des deux-mondes ; 1er juia
1855.
Causerie»
* Chant d'automiie. — revue contempo-
raine; 30 novembre 1859.
- i57-
* A une madone. — là causerie; î2 jan-
vier 1860. l'artiste; !•' février 1861.
* Chanêon d'après-midi, — l'artiste; 15
octobre 1860.
* Sisina, — revue française; 10 avril 1859.
FraneiScœ meœ laudes. — l'artiste; 10 mai
1857.
A unedame créole.— l'artiste; 25 mai 1845.
Mœsta et errabunda. — revue des deux-
mondes; l«r juin 1855.
Le Revenant.
* Sonnet d'automne, — revue contempo-
raine; 30 novembre 1859.
iSristesses de la lune.
Les Chats. — Cité, sans nom d'auteur, dans un
feuilleton de Ghampfleury ; le corsaire, n» du
14 novembre 1847. Reparu dans le messager
DE l'assemblée, 9 avril 1851 ; et dans les
Aventures de MademoiseUe Mariette^ de
Ghampfleury.
Les Hiboux. — le messager de l'assemblée;
9avrill851.
La Pipe.
La Musique.
Sépulture.
* Une gravure fantastique. {Une gravure
— i58 —
de Mortimer.) le présent ; 15 novembre
1857.
Le Mort joyevx, {Le Spleen.) le messa-
ger DE l'assemblée; 9 avril 1851.
Le Tonneau de la haine, — ls messager de
l'assemblée; 9 avril 1851. revue bes deux-
mondes; 1er juin 4855.
La Cloche fêlée. {Le Spleen.) le messa-
ger de l'assemblée ; 9 avril 1851 . La Cloche.
REVUE des deux-mondes; 1er juin 1855.
Spleen. « Pluviôse irrité, etc. » — le mes-
sager DE l'asseiIblée; 9 avril 1851.
Spleen. « J'ai plus de souvenirs, etc. »
Spleen, ce J^ suis comme le roi, etc. »
Spleen. « Quand le ciel bas et lourd, etc. »
* Obsession. — revue contemporaine; 15
mai 1860.
* Le Goût du néant. — revue française;
20 janvier 1859.
* Alchimie de la douleur. — l'artiste; 15
octobre 1860.
* Hoyreur sympathique. — l'artiste; 15
octobre 1860.
UHeaufontimoroiimenos. — l'artiste; 10
mai 1857.
L'Irrémédiable, —l'artiste; 10 mai 1857.
* U Horloge. - l'artiste; 15 octobre 1860.
— i59 —
TABLEAUX PARISIENS.
* Paysage parisien. — le présent; i5 no-
vembre 1867.
Le Soleil.
A une mendiante rousse.
*Le Cygne. — la causerie; 22 janvier 1860.
. * {Fantômes parisiens) fjes sept vieil-
lards. — REVUE contemporaine; 15 sep-
tembre 1859. l'artiste; 15 janvier 1861.
* {Fantômes parisiens.) Les Petites vieilles.
~ REVUE contemporaine ; 15 septembre
1859.
* Les Aveugles, — l'artiste; 15 octobre
1860.
* A une passante, — l'artiste; 15 octobre
1860.
* Le Squelette laboureur. — la causerie;
22 janvier 1860. l'almanach parisien, année
1861.
Le Crépuscule du soir. {Les Deux crépus-
cules,) semaine théâtrale; 1er février 1852.
Le Soir. Fontainebleau, 1 vol., par divers ;
1855.
Le Jeu.
— i6o —
* Danse macabre. — revue contemporaine;
15 mars 1859.
* U Amour du mensonge, — revue contem-
poraine; 15 mai. 1860.
<c Je n'ai pas oublié, voisine de la ville, »
c La servante au grand cœur, dont vous
étiez jalouse, n
Brumes et pluies,
* Rêve parisien, — revue contemporaine ,
5 mai 1860.
Le Crépuscule du matin, {Les Deux crépus-
cules,) semaine théâtrale ; 1?' février 1852.
Le Matin, Fontainebleau; 1 vol., par divers,
1855.
le vin.
VAme du vin, {Le Vin des honnêtes gens,)
— MAGASIN DES FAMILLES; juin 1850. Sous le
litre de : VAme du vin, dans la république
DU peuple, almanach démocratique, année
1852.
le Vin des chiffonniers.
Le Vin de Vassassin, ^ l'écho des mar-
chands de VINS ; 1848.
Le Vin du solitaire.
Le Vin des amants.
-r l6l —
FLEURS DU MAL.
La Destrtiction. {La Volupté*) rewe des
deux-mondes; 1©' juin 1855.
Une Martyre,
Femmes damnées.
Les Deux bonnes sœurs.
La Fontaine de sang.
Allégorie.
La Béatrice. — revue des deux-mondes;
1er juin 1855.
Un voyage à Cythère, — revue des deux-
mondes; lef juin 1855.
L'Amour et le crâne. — revue des deux-
mondes; ler juin 1855.
RÉVOLTE.
Le Reniement de Saint Pierre. — revue
DE paris; octobre 1852.
Ahel et Caïn.
Les Litanies de Satan.
LA mort.
La Mort des amants. — le messaoer de
l'assemblée; 9 avril 1851.
— 102 —
La Mort des pauvres.
La Mort des artistes. ~ le messager de
l'assemblée; 9 avril 1851.
* La Fin de la journée,
* Le Rêve d'un curieux. — revue contem-
poraine; 15 mai 1860.
* Le Voyage. — revue française; 10 avril
1859.
AVENTURES D'ARTHUR GORDON PYM.
— Annoncées sur le faux-titre des nouvelles
histoires extraordinaires sous le titre de :
DERNIERE HISTOIRE EXTRAORDINAIRE ;
traduit d'Edgar Poe, par Charles Raudelaire;
Lévy, 1858, in-18 de 280 pages, ont paru dans
le MONITEUR universel, 25 février 1857 el jours
suivants.
THÉOPHILE GAUTIER, par Charles Bau-
delaire , notice littéraire précédée d'une
lettre de Victor Hugo ; Poulet-Malassis et de
Broise, 1859, in-12. — Brochure de viii-68
pages; travail paru d'abord dans l'artiste du
13 mars 1859. Annoncé sur la couverture;
io fs^otices littéraires; 2o Machiavel et Con-
dorcety Aiu\ogue philosophique. Ces deux ou-
vrages n'ont pas paru.
— i63 —
LES PARADIS ARTIFICIELS ; OPIUM ET
HASCHISCH, par Charles Baudelaire ; Paris,
Poulet-Malassis et de Broise, 1860; grand
in-12, de 306 pages. Annoncé sur la couver-
ture : c Sous presse, du même auteur: Ré-
flexions sur quelques-uns de mes contempo-
rainsi un volume contenant: Edgar Poe, Théo-
phile Gautier, Pierre Dupont, Richard Wagner,
Auguste Barbier, Leconte de Lisle, Hégésippe
Moreau, Pétrus Borel, Marceline Desbordes-
Valmore, Gustave Le Vavasseur, Gustave
Flaubert, Philibert Bouvière ; la famille des
Dandies, ou Chateaubriand, de Custine, Paul
de Molènes et Barbey d'Aurevilly. » Ce volume
n'a jamais paru; cependant tous les articles
qui devaient le composer existent, sauf le
dernier, pensons-nous. LES PARADIS ARTI-
FICIELS contiennent:
Dédicace à J. G. F.
Le Poème du haschisch. {De Vidéal artifi-
ciel Le Haschisch.) revue contemporaine ;
30 septembre 1858.
Un mangeur d'opium, {Enchantements et
tortures d'un mangeur d'opium.) revue con-
temporaine; 15 et 31 janvier 1860.
Cette dernière partie du livre est une con-
1 1
— 104 —
densation de l'ourrage d'un littérateur anglais,
De Quincey : Confessions of an english opium-
ealer, being an extract from the life of a
scholar,
RICHARD WAGNER ET TANNHAUSER A
PARIS , par Charles Baudelaire ; Dentu, 1861;
brochure in-18 de 70 pages. Ce travail avait
paru d'abord dans la revue européenne du
1er avril 1861 ; Fauteur y ajouta une post-face
sous ce titre : Encore quelques tmots.
EUREKA, traduit d'Edgar Poe, par Charles
Baudelaire; Lévy, 1864; in-18 de 252 pages.
Cet ouvrage commeuça à paraître dans les nos
2 à 5 de la revue internationale — octobre
1859 à janvier 1860 — publiée en Suisse; il
n'y fut pas terminé.
HISTOIRES GROTESQUES ET SÉRIEUSES,
traduites d'Egar Poe, par Charles Baudelaire;
Lévy, 1865; in-18 de 372 p.; le volume con-
tient : »
Le Mystère de Marie Roget.
Le Joueur d'échecs deMaelzé'L— le monde
illustré; 12) 19, 26 juUlet et 2 août 1862.
— i65 —
Éléonora. — revue française; 10 mars
1859. REVUE fantaisiste; 15 novembre 1861.
Un Événement à Jérusalem, — revue fran-
çaise; 20 mars 1859.
L'Ange du bizarre. — la presse ; 17 fé-
vrier 1860.
Le Système du docteur Goudron et du pro-
fesseur Plume. — I^ MONDE ILLUSTRÉ ; 7, 14,
21 et 28 janvier 1865*
Le Domaine d'Ainheinu
Le Cottage Landor, — Réimprimé dans la
VIE PARISIENNE du 24 jnin 1865, après la pu-
blication en volume: la mise en vente des HIS-
TOIRES GROTESQUES ET SÉRIEUSES avait
eu lieu en mars 1865.
Philosophie de V ameublement. — le maga-
sin DES familles, octobre 1852; le monbe
LITTÉRAIRE; 27 mars 1853 ; le pays; 14 sep-
tembre 1854. Tirage à 20 ex.^ en une brochure
in-8o de 16 pages; Alençon, veuve Poulet -
Malassis, 1854.
La Genèse d'unpoëme. {Le Corbeau.) l'ar-
tiste, 1er mars 1853 ; le pays, 29 juillet
1854; revue française, 20 avril 1859.
LES ÉPAVES DE CHARLES BAUDELAIRE
Ce livre a été publié, en même temps « à 250
i
— i66 —
ex. papier Tergé et 10 chine, sans nom d'im-
primeur, sous la désignation de Amsterdam,
à V enseigne du Coq, avec une eau-forte fron-
tispice de Félicien Rops; 1866, grand in-12
de 164 pages ; et à 500 exemplaires papier
vélin, sans eau-forte, avec le nom de l'impri-
meur Briard, à Bruxelles, et l'adresse Bruxel-
les, chez tous les libraires. Il contient, outre
les six pièces condamnées dans la première
édition des Fleurs du mal :
Le Coucher du soleil romantique-, le boule-
vard; 12 janvier, 1862. Soleil couché, sonnet-
épilogue dans les MÉLANGES tirés d'une petite
BIBLIOTHÈQUE ROMANTIQUE, par Gh. Asselineau,
in -8», René Pincebourde, 1867,
Le Jet d'eau, — la petite revue; 8 juillet
1865, avec une variante au refrain.
Les Yeux de Berthe. — revue nouvelle ;
1er mars 1864.
Hymne, — le présent; 15 novembre 1857.
LA PETITE REVUE ; 16 décembre 1865.
Promesses étun visage.
Le Monstre,
Franciscœ meœ laudes, — Se trouve dans
LES FLEURS DU MAL ; reproduit ici avec la
dédicace et la note supprimées dans la seconde
édition de ce livre.
— 167 —
, Vers pour le portrait de M. Honoré Dau-
mier. — histoire de la caricature moderne,
par Champfleury, 1865; in-18, page 64.
Lola de Valence. — Au bas d'un portrait à
Teau-forte de cette artiste, par M. Manet, à
TEsposition de Paris, 1863.
Sur le Tasse en prison^ d'Eugène Delacroix.
revue nouvelle; 1er mars 1864.
La Voix. — REVUE contemporaine ; 28 fé-
vrier 1861. l'artiste; le*" mars 1862.
L'Imprévu. — le boulevard; 25 janvier
1863.
La Rançon.^ le présent; 15 novembre
1857. LA petite REVUE; 16 décembre 1865.
A une Malabaraise. {A une indienne.)
— Signé Pierre de Fayis. — l'artiste; 13 dé-
cembre 1846. A une Malabaraise; le présent;
15 novembre 1857, et la petite revue ; 14 oc-
tobre 1865.
Sur les débuts (à Bruxelles) d'Amina Bos-
chetti. la petite revue; 13 mai 1865.
A propos d'un importun.
Un cabaret folâtre.
— i68 —
POST-SCRIPTUM.
Une édition des œuvres complètes de Gh.
Baudelaire a paru; elle contient un Sonnet à
Théodore de Banville, daté de 1842, et un
article intitulé L'Art philosophique, qui sont
inédits, ainsi que les poèmes en prose suivants:
Mademoiselle Bistouri; Le Galant tireur; La
Soupe et les nuages; Perte d'auréole; Assom-
mons les pauvres; Épilogue (en vers.)
Les pièces des Epaves qu'il était possible
de réimprimer ont été intercalées, peut-être
arbitrairement , dans les fleurs du mal ;
et un complément, contenant les six pièces
condamnées et celles difficiles ë faire paraître
àans les œuvres complètes, a paru à Bruxelles,
en 1 869, sous le titre de : Complément des
Fleurs du mal, édition définitive,
Emile Deschanel, dans un article du jour-
nal des DÉBATS du 15 octobre 1864, a cité
quelques vers inédits de Gh. Baudelaire.
DEUXIÈME PARTIE
ARTICLES
Les morceaux précédés d'un astérisque ont reparu
aujourd'hui dans les œuvres complètes de Ch. Baude-
laire; Michel Lévy> 1869; 4 volumes in-12.
NOUVELLES
* Le Jeune enchanteur, histoire tirée d*un
palimpseste d'Herculanum. — l'esprit public;
20, 21 et 22 février 1846. le magasin litté-
raire; no 61, juillet 1846.
* La Fanfarlo. — bulletin de la société
DES GENS DE LETTRES; janvier 1847; signé
Charles Dufayis. les veillées littéraires
illustrées livraison, 15, 1849.
— lyo —
TRAVAUX SUR EDGAR POE
Note accooipagnant Révélation magnétique;
— non réimprimée, la liberté de penser ;
15 juillet 1848.
Edgar AUan Poe; sa vie et ses ouvrages. —
REVUE DE paris; mars et avril 1852. Cette no-
tice est différente de celles qui ont été impri-
mées en tête des deux séries à^Hisioires
extraordinaires; elle contient, entre autres cu-
riosités, une appréciation critique de Charles
Baudelaire sur la plupart des ouvrages de
Poe. C'est cette notice qu'il faudrait placer dans
Touvrage : Réfleanons sur queîqu^es-uns de mes
contemporains, — Voir plus loin études lit-
téraires.
Lé Cœur révélateur ; traduit de Poe.— pa-
ris-journal; 4 février 1853. Autre version
que celle des Nouvelles histoires extraordi-
naires.
Dédicace des Histoires extraordinaires; tra-
duit d'Edgar Poe; non réimprimé, le pays;
25 juillet 1854.
Note de : Aventure sans pareille d'un cer-
tain Hans Pfaal, traduit de Poe. — Longue
et intéressante, supprimée en volume; le
pays; 20 avril 1855.
— lyi —
ÉTUDES SUR LES BEAUX-ARTS
* Le Musée classique du bazar Bonne-Nour.
telle. — LE CORSAIRE-SATAN; 21 janvier 1846.
Sur le Prométhée délivré , de monsieur de
Senneville {Louis Ménard). — le corsaire-
SATAN; 3 février 1846.
* Exposition universelle de i855. Méthode
de critique. Ingres, Delacroix. — le pays ;
26 mai et 3 juin 1855. L'article sur Ingres n'a
jamais paru, il n'existe qu'en épreuve.
* Les Caricaturistes français. — le pré-
sent; l^r octobre 1857. l'artiste , 24 et 31
octobre 1858.
* Les Caricaturistes étrangers. — le pré-
sent; 15 octobre 1857. l'artiste; 26 sep-
tembre 1858.
* Salon de 1859. — revue française; 10,
20 juin; 1er et 20 juillet 1859.
* Peintures murales d'Eugène Delacroix,
— revue fantaisiste; 15 septembre 1861.
* Peintres et aqua-fortistes. — le boule-
vard; 14 septembre 1862.
* A propos d* Eugène Delacroix. — l'opi-
nion nationale; 2 septembre, 14 et 22 no-
vembre 1863.
— 172 —
* Le Peintre de la vie moderne (M. Cons-
tantin Guys.) — LE FIGARO i 26, 29 novembre
et 3 décembre d863.
* Vente du cabinet d'Eugène Piot. — le fi-
GARO; 24 avril 1864.
ÉTUDES DIVERSES
Choix de maximes consolantes sur l'amour.
— LE CORSAIRE-SATAN; 3 mars 1846.
* Conseils aux jeunes littérdteurs. — l'es-
prit public, 15 avril 1846.
* Du vin et du haschisch, — le messager de
l'assemblée ; 7, 8, 11 et 12 mars 1851. Très-
curieux : première ébauche du livre les para-
dis artificiels.
* Morale du joujou, — le monde litté-
raire; avril 1853. le triboulet-rabelais ; 13
juin 1857.
* De Vessence du rire, — Publié en 1853
dans un journal qui n'a pu être retrouvé.'
(Note de M. de la Fizelière.) le présent;
1er septembre 1857.
POÉSIES
lo — Pièces réunies sous le titre de : Nour
.velles Fleurs du mal, dans le parnasse con-
temporain; in-8o, par divers; 1866.
- 173-
* Épigraphe pour un livre condamné.— re-
vue européenne; 15 septembre 4864. le
boulevard; 12 janvier 4862.
* U Examen de minuit. — le boulevard ;
4er février 4863.
* Madrigal triste. — revue fantaisiste;
45 mai 1861.
* A une Malabaraise. — Voir les épaves.
Les six derniers vers manquent dans toutes
les réimpressions ; ils ne se trouvent que dans
l'artiste; 13 décembre 1846.
* L'Avertisseur. — revue européenne, 15
septembre 1861. le boulevard; 12 janvier
1862.
* Hymne. — - Voir les épaves.
* La Voix. ~ Voir les épaves.
* Le Rebelle, —revue européenne; 15
septembre 1861. le boulevard; 12 janvier
1862.
* Le Jet d'eau. — Voir les épaves.
* Les Yeux de Berthe. — Voir les épaves,
* La Rançon. ■— Voir les épaves.
* Bien loin d'ici. — revue nouvelle; ler
mars 1864.
* Recueillement. — revue européenne ; 1er
novembre, 1861. le boulevard; 12 janvier
1862.
- 174 —
* Le Gouffre. — l'artiste ; 1er mars 1862.
REVUE NOUVELLE ; 1er mars 1864.
* Les Plaintes d'un Icare. — le boule-
vard ; 28 décembre 1862.
* Le Calumet de paix. — revue contempo-
raine ; 28 février 1861.
* La Prière d'un paien. — revue euro-
péenne; 15 septembre 1861. le boulevard;
12 janvier 1862.
* Le Couvercle. — le boulevard ; 12 jan-
vier 1862. LE PARNASSE CONTEMPORAIN;^ page
278, 1vol., 1866.
* La Lune offensée. — l'artiste ; 1er mars
1862.
Vers laissés chez un ami absent.— ïapetite
revue; 29 avril 1865.
Pour ne pas aller à Namur, — la petite
REVUE; 29 avril 1865.
Venus belga. — Pièce gaillarde, nouveau
PARNASSE SATYRiQUE ; Bruxelles 1866.
Sonnet.— la silhouette; 1er juin 1845.
la PETITE REVUE; 24 juin 1865. nouveau par-
nasse SATYRIQUE ; Bruxelles, 1866. '
* Le Coucher du soleil romantipis. —Voir
les épaves.
— lyS —
* Vers pour le portrait d'Honoré Daumier.
— Voir les épaves.
* Sur le Tasse en prison d'Eugène Delacroix,
— Voir les épaves.
* L* Imprévu, — • Voir les épaves.
Sur les débuts de iK'^® Amina Boschetti. —
Voir les épaves.
A propos d'un importun. — Voir les
épaves.
Un cabaret folâtre. —Voiries épaves.
ÉTUDES LITTÉRAIRES.
Morceaux qui devaient composer l'ouvrage :
RÉFLEXIONS SUR QUELQUES-UNS DE
MES CONTEMPORAINS.
* Théophile Gautier, i^. — Voir dans la pre-
mière partie la brochure publiée sous ce titre.
* Théophile Gautier. 2». —Écrit pour l'antho-
logie crépet. revue fantaisiste; 15 juillet
1861.
Edgar Poe. — revue de paris ; mars el
avril 1852. Voir plus haut: Travau>x sur Poe.
* Pierre Dupont, lo. Notice parue en tôle
de ses œuvres, 1852.
* Pierre Dupont. 2o. — Éérit pour l'antho-
logie CRÉPET. REVUE FANTAISISTE; 15 aOÛt
1861.
* Bichard Wagner. — Voir dans la pre-
mière partie la brochure publiée sous ce titre.
* Auguste Barbier. — revue fantaisiste;
15 juillet 1861.
* Leconte de Liste. — Écrit pour l'antho-
logie CRÉPET. revue fantaisiste ; 15 août
1861.
* Hége'sippe Moreau. — Écrit pour l'an-
thologie CRÉPET ; n'y a pas paru. Existe en
épreuve.
* Pétrv^ Borel. — revue fantaisiste ; 15
juillet 1861.
* Marceline Desbordes-Valmore. — Écrit
pour l'anthologie crépet. revue fantai-
siste. 1er juillet 1861.
* Gustave Le Vavasseur. — Écrit pour
l'anthologie CRÉPET. REVUE FANTAISISTE; 1©^
août 1861.
* Gustave Flaubert. — l'artiste; 18 oc-
tobre 1857.
* Philibert Bouvière. — 1 . Nouvelle biogra-
phie des artistes dramatiques. N^ôl, 1855. —
l'artiste; 1er décembre 1859.
— ^11 —
Le Comédien Rov\ière. — 2. Signé Ch. B. la
PETITE REVUE ; 28 octobre 4865.
Comment on paie ses dettes quand on a du
génie, — l'écho des théâtres j 23 août 4846.
Contes de Champfleury, — le corsaire-
satan; 18 janvier 1848.
* Les Drames et les romans honnêtes, — se-
maine théâtrale; 27 novembre 1851.
* U École païenne. — semaine théâtrale;
22 janvier 1852. revue de poche; 25 décem-
bre 1866.
Lettre à Fernand Desnoyers. — Fontaine-
bleau ; 1855, in-12,par divers.
Lettre à Jean Rousseau, sur Victor Hugo ;
etc. —LE FIGARO; 13 juin 1858.
* Victor Hugo. — Écrit pour l'anthologie
crépet. revue FANTAISISTE; 15juin 1861.
* Charles Asselineau. — la double vie.
l'artiste ; 9 janvier 1869.
* Théodore de Banville, — Écrit pour
l'anthologie crépet. revue fantaisiste; 1er
août 4861.
* LéonCladel, Préface des Martyrs ridicules,
par Léon Cladel. revue fantaisiste ^ 15 oc-
tobre 1861.
— 178 —
* Les Misérables, jiar Victor Hvgo. — le
BOULEVARD; 20 avril 1862.
* Note biographique. — bibliographie, par
A. de la Fizelière; 4868, p. vl
Lettre à Auguste Vacquerie, — le temps ;
43 février 4869.
Lettre à Armand Fraisse. — paris-journal:
26 mai 1869.
Lettre à Charles Asselineau. — Charles
BAUDELAIRE, par Asselineauj 1869, p. 92.
POÈMES EN PROSE.
Ils devaient d'abord être réunis sous le titre
de : LE SPLEEN DE PARIS.
* LES DEUX CRÉPUSCULES. - fontaine-
BLEAU ; 1855, in-12, par divers. — Contient :
* Le Crépmcule du soir. — Reparu dans le
PRÉSENT; 24 août 1857* revue fantaisiste;
4«r novembre 1861. le figaro; 7 février
1864; cette dernière version très augmentée.
* La Solitude. — Reparu dans le présent
24 août 1857. revue fantaisiste ; 1er novem-
bre 1 861 . revue de paris ; 25 décembre 1864 ;
cette dernière version très*changée.
— Î79 -
POÈMES NOCTURNES. — le présent ; 24
août 1857. Contient, outre les deux pièces
précédentes :
* Les Projets. — Reparu dans la revue
FANTAISISTE; !«' novembre i861. — Autre
version , très-changée, dans : la vie pari-
sienne; 13 août 1864; et revue de paris ; 25
décembre 1864.
* UHorloge. — Avec note supprimée dans
toutes les réimpressions. Reparu dans : la
REVUE FANTAISISTE; 1er novembre 1861, et
dans la presse; 24 septembre 1862.
* La Chevelure. Reparu dans la revue fan-
taisiste; lor novembre 1861 ; et sous le litre
de Un hémisphère dans une chevelure, poème
exotique, dans la presse; 24 septembre 1862.
* L'Invitation au voyage, — Reparu dans
la REVUE FANTAISISTE; lef novembre 1861 ; et
dans LA PRESSÉ ; 24 septembre 1862.
POÈMES EN PROSE. - revue fantaisiste ;
ler novembre 1861. — Contient, outre les six
pièces précédentes :
* Les Foules.-^ Reparu dans la presse; 27
août 1862.
* Les Veuves, — Reparu dans la presse; 27
août 1862.
12 -
— i8o —
* Le Vieux saltimbanque. - Reparu dans
LA presse; 27 août 4862.
POÈMES EN PROSE. — la presse ; 26,27
août et 24 septembre 1862. ^ Contient, outre
les poèmes désignés plus haut :
* A Arsène Houssaye, Dédicace.
* L'Étranger.
* Le Désespoir de la vieille.
' Le Confiteor de Vartiste.
* Un plaisant.
* La Chambre double.
* Chacun la sienne {sa chimère).
* Le Fou et la Vénus.
* Le CUen et le flacon.
* Le Mauvais vitrier.
* A une heure du matin.
* La Femme sauvage et la petite maîtresse,
* Le Gâteau.
* Le Joujou dà pauvre.
* Le Don des fées.
PETITS POÈMES EN PROSE. — revue
NATIONALE ; 10 juin, 10 octobre et 10 dé-
cembre 1863. — Contient :
* Les Tentations, ouEros,Plutusetla Gloire.
* La Belle Dorothée.
* Une mort héroïque. — Reparu dans L' ar-
tiste; l®"* novembre 1864.
— i8i —
* Le Désir dépeindre.
* Le Thyrse. A Frantz Liszt.
* Les Fenêtres.
* Déjà.
POÈMES EN PROSE. — le boulevard; 14
juin 1863. — Contient :
* Sans titre. — Reparu sous le titre .de :
Les Bienfaits de la luneràBXis là revue na-
tionale; 14 septembre 1867.
* Laquelle est la vraiel — Reparu sous le
titre de L'Idéal et le réel, dans la revue na-
tionale; 7 septembre 1867.
LE SPLEEN DE PARIS, POÈMES EN PROSE.
— LE FIGARO ; 7 et 14 février 1864.— Contient,
outre JjB Crépuscule du soir :
" La Corde. A Edouard Manet. — Reparu
dans l'artiste; 1er novembre 1864.
* Le Joueur généreux. — Reparu sous le
titre: Petits poèmes lycanthropes; le Diable;
dans LA revue du dix-neuvièbie siècle; juin
1866.
* Enivrez-vous.
* Les Vocations.
* Un cheval de race.
PETITS POÈMES EN PROSE. - l'artiste;
1er novembre 1864. — Contient, outre La
Corde et Une mort héroïque :
— l82 —
* La Fausse monnaie. — Reparu dans la
REVUE DE PARIS ; 25 décembre 1864; aussi dans
LA REVUE DU DIX-NEUVIÈME SIÈCLE; juin 4866,
sous le titre général de : Petits poèmes lycan-
thropes.
LE SPLEEN DE PARIS, POÈMES EN PROSE.
— R^VUE DE paris; 25 décembre 1864. Con-
tient, outre 1^5 pro/Ws et La Fausse monnaie:
* Les Yeux des pauvres.
* Le Port.
* Le Miroir.
* Les Bons chiens j poème en prose. A Jo->
seph Stevens. — l'indépendance belge ; 21
juin 1865. la petite revue; 27 octobre 1866.
îE GRAND journal; 4 novembre 1866. lare-
vue nationale^ 31 août 1867.
* Portraits de maîtresses. — revue natio-
nale; 21 septembre 1867.
* Any where oui of the world. {N'importe
où hors du monde.) revue nationale ; 28 sep-
tembre 1867.
* Le Tir et le cimetière.— revue nationale;
12 octobre 1867;
Ici ce termine notre travail ; il ne nous reste
plus que quelques mots à dire. Deux notes, si-
gnées appartiennent encore à Charles Baude-
— i83 -
laire dans le mémoire qui fut publié en 1857
pour la défense des Fleurs du Mal; et il a
collaboré au journal le salut public, 2 nos,
parus les 27 et 28 février 4848. Les articles
y sont anonymes ; on lui attribue le premier
de chaque numéro ; ils sont intitulés : Au
peuplfij et Les Châtiments de Dieu, D'après une
autre opinion, l'article du premier n% intitulé :
Aux chefs du gouvernement provisoire, lui
appartiendrait seul dans ce numéro; cette opi-
nion est celle de MM. de la Fizelière et Decau]^,
dans un opuscule dont nous parlerons tout à
l'heure {*).
Nous laissons à ces messieurs la respon-
sabilité d'attribution à Charles Baudelaire de
quelques travaux anonymes ou signés des ini-
tiales G. B., que nous nous contenterons d'in-
diquer :
Contes normands de Jean de Falaise (le
marquis de Chennevières-Pointel). — Ano-
nyme. LE GORSAmE'SATÀN ; 4 novembre 1845.
Sapho. — Fragment anonyme de tragédie,
en collaboration ; le gorsaire-satan , 25 no-
vembre 1845.
Causeries du Tintamarre ; en collaboration
et sous pseudonyme, — le tintamarre ; 1er
(*) Essais de bibliographis contemporaine. —
Charles Baudelaire, par MM. A. de la Fizelière et
Georges Decaux. Paris» 1868» in-12.
— i84 -
septembre 1846 à mars 1847. Note de M.
Auguste Vitu, dans la brochure de MM. de la
Fizelière et Decaux.
Chanson, — Publiée sous le nom de
M. Privât d'Ânglemont dans son petit livre :
La Closerie des Lilas; 1848.
Une Réforme à V Académie. Anonyme. —
REVUE ANECDOTiQUE ; no 2 de janvier 1862.
Paul Gaschon de MoVenes. Anonyme. - re-
vue ANECDOTIQUE; n© 2 de mars 1862.
U Eau- forte est à la mode. AnonYtûe, — re-
vue ANECDOTIQUE ; n» 2 d'avril 1862.
Anniversaire de la naissance de Shakes-
peare , lettre anonyme, r— le figaro; 14
avril 1864.
Lettre surProndhon^ signée G. B. — petite
revue; 11 mars 1865.
Amcenitates belgicœ. — brochure signée
G. B., 1866. Détruite avant publication (*).
(') M. P.-Malassis nous a confirmé Tattribation à
Charles Baudelaire de quelques articles et du re-
cueil d'épigrammes dont il est question dans la noie
précédente.
Il était rédacteur^propriétaire de la Revue anecdo-
tique en 1862,. Tannée où les arlicles Une réforme à
r Académie; — Paul G. de Molènes ; — L'Eau- forte
est à la modCy y parurent. 11 possède une lettre de M.
Sain(e-Beuve h propos du premier de ces arlicles.
— i85 —
Baudelaire a corrigé de sa main, sur un exem-
plaire du Parnasse salyrique du XIX' siècle, la chan-
son publiée sousle^ nom de Privât d'An glemont dans
le petit livre La Closerie des lilas, en 1848.
Le recueil Amœnilates belgicœ (in-8* de 16 p.)
n'a pas été détruit jusqu'au dernier exemplaire, com-
me le suppose notre collaborateur. Il en est resté
un, sur peau de vélin, auquel nous avons pu emprun-
ter trois épigrammes pour notre appendice. Les au-
tographes existent d'ailleurs en double, entre les
mains de M. P.-Malassis et de M. Charles Âsselineau.
Enfin« comme propriétaire de La Petite Revue en
1865, nous-méme avons eu sous les yeuxTautographe
de la lettre sur Proudhon, signée C. B. (n* du 11 mars).
Sur tous ces points, MM. de; la Fizeliére et
Decaux étaient parfaitement renseignés.
APPENDICE
sîessaîesssîeeisîeasaeaisaKi
^
^>^ES pièces de vers que voici sont de pure
y\{S: c^^^os^t^' Lesdeux premières ont paru
Ci:^-» dans la Petite Revue (29 avril i865) ;
les trois autres sont empruntées à un recueil
d^épigrammes détruit^ à un exemplaire près.
VERS LAISSES CHEZ UN AMI ABSENT
JlfoA cher, je suis venu chez vous
Pour entendre une langue humaine.
Comme un qui parmi les Papous
Chercherail son ancienne Alhéne.
Puisque chez les Topinambous
Dieu me fait faire quarantaine.
Aux sots je préfère les fous
Dont je suiSt chose, hélas ! certaine.
— 190 —
SONNET POUR S'EXGUSER DE NE PAS ACCOMPAGNER
UN AMI A NAMUR
Puisque vous allez vers la viUe
Qui, bien qu*un fort mur l'encastrai,
Défraya la verve servile
Du fameux poète castrat:
Puisque vous aUei en vacances
Goûter un plaisir recherché.
Usez toutes vos éloquences.
Mon bien cher CocO'Malperché (*),
(Comme je le ferais moinnêmej
A dire là^bas combienj'aime
Ce tant folâtre monsieur Itops,
Qui n*est pas un grand prix de Rome,
Mais dont le talent est haut comme
La pyramide de Chéops ï
(*)Pèeudonyme IraDsparemde M.Poulel-Malassis.
— 191 —
AMŒNITATES BELGICiE (*)
VENUS BELGA (')
EN FAISANT L^ASCENSION DE LA RUE MONTAGNE
DE LA COUR^ A BRUXELLES
Ces moUels sur ces pieds montés.
Qui vonl sous ces colles peu blanches.
Ressemblent à des troncs plantés
Dans des planches.
(*) Amœnitates belgirœ, auctore C.B; s. nom dMrnp.
s. 1. D. d. (Bruxelles, février 1866), petit in-8 de
16 p. — Recueil de seize épigrammes sur la Belgi-
que, tiré à 10 ex. mis au pilon, moins un sur peau
de vélin,
(') Cette pièce a déjà été réimprimée dans le ^OU'
veau Parnasse satyrique du XIX' siècle.
— 192 —
Les seins des mimdres femmektles
Ici péseni plusieurs quinlaux.
Et leurs membres sonl des poteaux
Qui donnent le goût des squelettes.
Une me suffit pas qu^unsein soit gros et doux;
Il le faut un peu ferme — ou je tourne casaque.
Car s... n.. d. D..,î je ne suis pas Cosaque,
Pour me soûler avec du suif et du saindoux!
OPINION DE M. HETZEL SUR LE FARD
— > Buv^ei-vous du faio? > dis'je à M. Helzel;
Je vis un peu d'effroi sur sa mine barbue :
— « Non, jamais! Le faro (je dis cela sans fiel)
C'est de la bière déjà bue. *
— 193 —
LES BELGES ET LÀ LUNE
On n'a jamais connu d^ race si baroque
Que ces Belges I Devant le joli, le charmant.
Ils roulent de gros yeux et grognent sourdement ;
Tout^ce qui réjouit nos cœurs mortels les choque.
Dites un mot plaisant, et leur œil devient gris
Et terne, comme Vœil d'un poisson qu'on fait frire;
Une histoire touchante, ils éclatent de rire.
Pour faire voir qu'ils ont parfaitement compris.
Comme fespritils ont en horreur les lumières.
Parfois, sous la clarté calme du firmament.
J'en ai vu qui, rongés d'un bizarre tourment.
Dans l'horreur de la fange et du vomissement.
Et gorgés jusqu'aux dents de genièvre et de bière,
Aboyaient à la lune, assis sur leur derrière l
DERNIER CHAPITRE
i3
E chapitre eût été le troisième du livre et
non le dernier, si les pièces qui le com-
posent ne nous étaient pas parvenues si
tard. Nous les devons à l'obligeance de M. P.,
bibliophile bien connu.
Elles semblent avoir fait partie d'un dossier
composé par Baudelaire pour M. Chaix d'Est-
Ange fils, son avocat dans l'affaire des Fleurs
du mal. La chemise porte écrit de sa main :
a Articles relatifs aux Fleurs du mal, —
Lettres. — Notes et documents pour mon
avocat. — Plan de plaidoirie. — Pièces incri-
minées. — Sommaire de mon interrogatoire
et ma justification devant le juge d'instruc-
tion. »
De cet ensemble il est resté: copie d'une
lettre d'Emile Deschamps à Baudelaire (impri-
mée dans V Appendice des Fleurs du mal, éd.
Michel Lévy); — copie d'une lettre de M. Gus-
- 198 —
tave Flaubert ; — copie d'une lettre au ministre
d'État; l'une et l'autre inédites.
La lettre de M. Gustave Flaubert est pleine
de compliments ; ce n'est pas pour cela
qu'elle figure au dossier, mais sans doute pour
cette seule phrase: « VoUs chantez la chair
sans l'aimer, d'une façon triste et détachée; »
jugement concordant avec celui que les plumes
les plus autorisées dans la presse venaient de
porter sur les Fleurs du mal.
La lettre au ministre d'État offre un tout
autre intérêt ; elle est un témoignage vraiment
précieux de l'état d'esprit de Baudelaire après
la saisie de son livre , une affirmation irrécu-
sable de l'étonnement naïf du poète et de ses
illusions persistantes jusqu'au verdict. M.
Charles Asselineau a excellemment exposé
cela dans sa biographie. Les poursuites étaient
et restèrent pour Baudelaire , comme il le dit
ici , une mésaventure incompréhensible , un
inexplicable malentendu; — il ressentit sa
condamnation comme une avanie gratuite , un
inconscient affront : « J'attendais, disait- il en
sortant de l'audience, qu'on me ferait réparation
d'honneur. »
Avec une conviction parfaite de l'incompé-
tence de la magistrature dans les questions
littéraires, il ne fit pas appel , Bt en effet, il
n'avait pas de raison d'espérer plus d'intelli-
— 199 —
gence d'une nouvelle juridiction. Ses juges
venaient de prononcer, lui semblait-il , dans un
cas où ils auraient dû se récuser ou bien absou-
dre ; ils n*avaient pas su ce qu'ils faisaient.
Tel était du moins son sentiment , — et il y
a persisté.
Copie de ma lettre à M, le ministre
dÉtaty après que j'ai eu connais-
sance de la saisie des Fleurs du
- mal.
\
Monsieur le* Ministre^ la lettre que
j'ai l'honneur d'écrire à Votre Excel-
lence n'a pas d'autre but que de la
remercier de tous les bons offices que
j'ai reçus d'elle et du Moniteur ; je
n'accomplis qu'un simple devoir^ en un
moment où par suite d'une mésaventure
incompréhensible, j'ai peut-être été
pour vous l'occasion d'une petite con-
trariété, ce qui serait pour moi l'objet
d'une véritable affliction.
— 200 —
Le Moniteur a publié un excellent
article sur le second volume des œuvres
d'Edgar Poe, dont je suis le très-
orgueilleux traducteur. M. Turgan a
mis en lumière le troisième volume
(Arthur Gordon Pym) ^ un roman
admirable. En dernier lieu, le Moniteur
a imprimé un article merveilleux de
M. Edouard Thierry sur un livre
de moi actuellement incriminé : les
Fleurs du mal, M. Edouard Thierry,
avec une prudence vraiment louable,
a fait bien comprendre que ce livre ne
s'adressait qu'à un petit nombre de
lecteurs; il ne l'a loué que pour les
qualités littéraires qu'il a bien voulu y
reconnaître, et il a merveilleusement
conclu en disant que le désespoir et la
tristesse étaient l'unique mais suffisante
moralité du liv/e en question.
Que ne vous dois-je pas, Monsieur
le Ministre? Je vous dois plus encore
que toutes ces inférieures satisfactions
de la vanité littéraire. J'ai longtemps
— 201 —
hésité à vous remercier, parce que je
ne savais comment m'y prendre. Peut-
être M. Pelletier vous a-t-il dit que
Mme Aupick^ que son mari laissait
sans aucune fortune ^ m'avait^ avant
de quitter Paris, parlé de la part que
Votre Excellence avait prise à la discus-
sion du conseil d'Etat. C'est sous mes
yeux que ma mère vous a adressé une
lettre particulière de remerciements,
à laquelle je n'ai pas osé m'associer
par une absurde timidité. Je saisis
aujourd'hui l'occasion de vous témoigner
ma gratitude pour ce grand service
vraiment personnel.
J'avais hier l'intention d'adresser une
espèce de plaidoirie secrète à M. le
garde des sceaux; mais j'ai pensé qu'une
pareille démarche impliquait presque
un aveu de culpabilité, Qt je ne me
sens pas du tout coupable. Je suis au
contraire très-fier d'avoir produit un
livre qui ne respire que la terreur et
l'horreur du mal. J'ai donc renoncé à
— 202- —
me servir de ce moyen. S'il faut me
défendre j je saurai me défendre conve-
nablement.
Aussi bieuj Monsieur le Ministre,
pourquoi ne vous dirais-je pas avec
candeur que je vous demande votre
protection, en tant .qu'il soit possible
de l'obtenir, à vous qui par votre
esprit, encore plus que par votre posi-
tion, vous trouvez le protecteur naturel
des lettres et des arts ? Et les lettres et
les arts malheureusement ne se sentent
jamais assez protégés. Mais croyez bien
que s'il ne vous est pas loisible de me
l'accorder, je n'en persisterai pas moins
à me regarder comme votre obligé;
je vous prie donc d'agréer les sentiments
de gratitude et de respect avec lesquels
je suis, Monsieur le Ministre, de Votre
Excellence, le très-humble et très-obéis-
sant serviteur.
— 203 —
Lettre de Af . Gustave Flaubert.
Mon cher amî ,
J'ai d'abord dévoré votre volume
d'un bout à l'autre, comme une cui-
sinière fait d'un feuilleton , et mainte-
nant , depuis huit jours je le relis , vers
à vers, mot à mot, et franchement cela
me plaît et m'enchante.
Vous avez trouvé le moyen de rajeu-
nir le romantisme. Vous ne ressemblez
à personne (ce qui est la première de
toutes les qualités). L'originalité du
style découle de la conceptipn. La
phrase est toute bourrée par l'idée, à en
craquer.
J'aime votre âpreté, avec ses déli-
catesses de langage qui la font valoir,
comme des damasquinures sur une
lame fine.
Voici les pièces qui m'ont le plus
frappé: le sonnet xviii, la Beauté 'y
c'est pour moi une œuvre de la plus
— 204 ""
haute valeur, — et puis les pièces
suivantes : V Idéal y la Géante (que je
connaissais déjà ; la pièce xxv :
Avec ses vêtements ondoyants et nacrés.,..
Une Charogne; le Chat (p. 79) ; le
Beau Navire; A une dame créole;
Spleen (p. 140), qui m'a navré, tant
c'est juste de couleur! Ah! vous com-
prenez Tembêtement de Texistence^
vous ! Vous pouvez vous vanter de
cela, sans orgueil. Je m'arrête dans
mon énumératiouj car j'aurais l'air de
copier la table de votre volume. Il faut
que je vous dise pourtant que je raffole
de la pièce lxxv^ Tristesse de la lune :
Qui d'une main distraite et légère caresse.
Avant de s*endormir, le contour de ses seins (*)...
(^) tt Délicieux sonnet qui semble de quelque
poôte anglais contemporain de la jeunesse de
Shakespeare », écrivait de son côté Sainte-
Beuve. Voir sa lettre dans V Appendice des
Fleurs du mal, éd. Michel Lévy.
— 205 . —
et l'admire profondément le Voyage à
Çythère, etc.^ etc.
Quant aux critiques , je ne vous en
fais aucune, parce que je ne suis pas
sûr de les penser moi-même dans un
quart d*heure. J*ai, en un mot, peur
de dire des inepties , dont j'aurais un
remords immédiat. Quand je vous
reverrai cet hiver ^ à Paris ^ je vous
poserai seulement, sous forme dubita-
tive et modeste j quelques questions.
En résumé , ce qui me plaît avant
tout dans votre volume j c'est que l'art
y prédomine. Et puis' vous chantez la
chair sans l'aimer^ d'une façon triste et
détachée^ qui m'est sympathique. Vous
êtes résistant comme le marbre , et
pénétrant comme un brouillard d'An-
gleterre.
Encore une fois mille remerciements
du cadeau. Je vous serre les deux mains
très-fort.
A vous^
G. FlJlUBERT.
Croisset, i3 Juillet.
TABLE
Avertissement. i
Biographie. 3
Lettres de Charles Baudelaire. 17
Le drame « l'Ivrogne » Sg
Lettre d'Alfred de Vigny à Ch. Baudelaire. 69
Lettres d'Eugène Delacroix à Ch. Baude-
laire. 79
Lettres de MM. Victor Hugo, Joséphin
Soulary, Jules Barbey d'Aurevilly,
C. Meryon, Paul de Saint- Victor,
H. Taine. 91
La traduction du a Calumet de paix n
de Longfellbw. 107
—
208 —
Note rectificative.
ii3
Nécrologie.
123
Bibliographie .
145
Appendice.
187
Dernier chapitre.
195
X
M«BtM. — imp. Vincent rorut et Énlle criauittd, flMft da Coamei*;, 4.
62632914
m