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Microfiche
Séries.
CIHM/ICIVIH
Collection de
microfiches.
Canadian Institute for Historical Microreproductions / institut canadien de microreproductions historiques
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first page with a printed or illustrated impres-
sion, and ending on the last page with a printed
or illustrated impression.
The last recorded frame on each microfiche
shall contain the symbol — »■ (meaning "CON-
TINUED"), or the symbol V (meaning "END"),
whichever applies.
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plus grand soin, compte tenu de la condition et
de la netteté de l'exemplaire filmé, et en
conformité avec les conditions du contrat de
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Les exemplaires originaux dont la couverture en
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par le premier plat et en terminant soit par la
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d'impression ou d'illustration, soit par le second
plat, selon le cas. Tous les autres exemplaires
originaux sont filmés en commençant par la
première page qui comporte une empreinte
d'impression ou d'illustration et en terminant par
la dernière page qui comporte une telle
empreinte.
Un des symboles suivants apparaîtra sur la
dernière image de chaque microfiche, selon le
cas: le symbole — ► signifie "A SUIVRE", le
symbole V signifie "FIN".
Maps, plates, charts, etc., may be filmed at
différent réduction ratios. Those too large to be
entirely included in one exposure are filmed
beginning in the upper left hand corner, left to
right and top to bottom, as many frames as
required. The following diagrams iliustrate the
method:
Les cartes, planches, tableaux, etc., peuvent être
filmés à des taux de réduction différents.
Lorsque le document est trop grand pour être
reproduit en un seul cliché, il est filmé à partir
de l'angle supérieur gauche, de gauche è droite,
et de haut en bas, en prenant le nombre
d'images nécessaire. Les diagrammes suivants
illustrent la méthode.
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PROPERTY OF LIBRARY, DEPARTMENT OF
AGRICULTURE, CONFEDERATION BLOCK, OTTAWA
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L. Z. JONCAS.
PUBLIE PAR LE DEPARTEMENT DE L'AGRICULTURE.
OTTAWA.
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ETENDUE DES PECHERIES CANADIENNES.
Jo ne crains pas que l'on me taxa d'exagération, si je dis qiw la Confédération
Canadienne possède les pêcheries les plus étendues et les plus riches du monde entier.
" Comme domaine national," nous dit l'Honorable Peter ÎSIit(;hell, qui était Ministre
delà Marine et des Pêcheries en 1870, "elles sont inestimable-', et comme champ
ouvert à l'esprit d'entreprise et d'industrie, elles sont inépuisables. Outre leur impor-
tance au point de vue du commerce et de la richesse maritimes, elles ont aussi une
valeur particulière pour les habitants. La grande variété et la qualité supérieure dos
produits de mer et de rivières de cette colonie, offrent une nourriture copieuse et écono-
mique, admirablement propre aux besoins domestique d'une population mixte et labo-
rieuse- Elles ont encore, sous d'autres rapports, une valeur spéciale pour ceux qui
suivent la carrière maritime, comme industrie distincte ou jointe à l'agriculture. Les
principales localités où l'on se livre à la pêche, ne sont pas généralement favorables â
l'agriculture ; elles sont peu fertiles, ont peu d'étendue et sont soumises à certains
désavantages de climat. La fécondité des eaux avoisinantes, dont la popmlation pro-
fite sans empêchements, est une compensation pour les défauts du sol et du climat.
Pour cette seule raison, les pêcheries cotières et intérieures sur lesquelles les sujets
Britanniques out des droits, ont une valeur hors ligne."
A ces affirmations d'un de nos hommes publics les plus marquants, j'ajouterai
quelques chifires, qui feront mieux comprendre encore quel champ immense d'exploi-
tation nos pêcheries offrent à l'esprit d'initiative et d'industrie de nos habitants, aux
capitalistes canadiens et étrangers et à une émigration triple et quadruple de notre
population actuelle.
Le Canada égale en étendue la république des Etats-Unis, il est à peu de rnilles
près, aussi grand que l'Europe toute entière: soit environ la quatorzième partie de
toutes les terres du globe.
Borné au Nord par l'Océan Arctique, à l'Est par l'Atlantique et à l'Ouest par le
Pacifique, il possède au delà de 5,500 milles de côtes maritimes bordées par des eaux
riches en poissons commerciaux de toutes sortes. Au nombre de ses mers intérieures,
il compte la Baie d'Hudson, le Détroit, ou plutôt la mer de Davis, le Golfe St-Laurent,
tributaires de l'Atlantique, la mer Polaire, la mer de Bafiin sur l'Océan Arctique.
Signalons encore, à propos de mers : le Détroit de Belle-Isle au Nord du Golfe St-Lau-
rent, les Détroits de Canso et de Northumberland au Sud du même (iolfe, la Baie de
Fundy entre la Nouvelle-Ecosse et le Nouveau-Brunswick et la Baie des Chaleurs
entre cette dernière Province et la Province de Québec.
N'oublions pas de mentionner aussi les lacs Supérieur, Erié, Huron et Ontario qui
sont autant de mers intérieures et dont la superficie égale 27,000 milles carrés.
Laissant de côté, pour un instant, les 3,000 milles de côtes maritimes que possède
la Colombie Anglaise, et les immenses mers intérieures du Nord-Ouest, dont les
richesses, n'ayant pas encore été exploitées, nous sont en conséquence peu connues ; il
nous reste, dans les vieilles provinces de la Confédération, c'est-à-dire, dans la Nou-
velle-Ecosse, Québec, le Nouveau-Brunswick, l'Ile du Prince Edouard et Ontario, 2,500
milles de côtes maritimes, une nappe d'eau intérieure dont la superficie égale 122,000
milles carrés et un nombre considérable de rivières importantes où abondent une
variété de poissons d'une grande valeur commerciale.
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Ainsi, soit que nous les considérions au point de vue de lYîtandue, de l'importance,
de l'abondance do l'aliment (qu'elles fournissent, ou do leur valeur i)1un ^'rande encore
comme ressource susceptible d'un développement toujours croissant et d'une reproduc-
tion illimitée, les riches pêcheries qui bordent les côtes du Canada et colles que
renferment ses grands lacs et ses belles rivières, sont une propriété nationale précieuse
et durable. Employant annuellement un capital do [tlusiours millions do piastres,
donnant de l'occupation et des moyens de subsistance à des centaines do mille de
j)ersonnes, encourageant la carrière maritime, favorisant le développement do la
marine commerciale et notre commerce avec l'étranger, tenant constamment en
activité et en di.sponibilité une classe indépendante et énergique de marins, elles
méritent notre sérieuse attention, une appréciation éclairée et un encouragement en
rapport avec leur valeur et leur importance.
Aussi, constate encore l'Honorable Peter Mitchell, " les Canadiens comprennent
davantage chaque année, la vaste importance de leurs i)êcheries, et sont plus que
jamais disposés à les conserver comme la jjIus belle fortune matérielle de notre héri-
tage colonial."
" Le fait que les nations étrangères ont toujours tenu avec tant de ténacité aux
droits et à la liberté commune qu'elles ont pu s'assurer dans ces pêt:heries, et l'empresse-
ment que manifestent les étrangers à obtenir la jouissance do ces privilèges lucratifs
et étendus, constituent la plus forte preuve de l'importance grandissante de leur pos-
session ainsi que de leur valeur commerciale et industrielle.
II
VALEUR DES PECHERIES CANADIENNES.
L'on me demandera peut-être si la richesse et la valeur des pêcheries canadiennes
sont égales à leur étendue ?
Quoique, vu l'insuffisance de notre population, nos pêcheries soient encore loin
d'avoir acquis tout le développement dont elles sont susceptibles, leur produit annuel,
cependant, comparé avec le nombre d'hommes qui y sont activement et régulièrement
employés, comparé aussi au produit des pêcheries de même nature dans les autres
parties du globe, prouve éviaemment qu'elles sont des plus riches et des plus pro-
ductives.
A mesure que notre population augmente et que nous pouvons consacrer plus de
bras à cette industrie, sa valeur croît dans une proportion considérable.
Le Professeur Brown Goode, — commissaire représentant les Etats-Unis à l'exposi-
tion internationale des pêcheries de Londres, en 1883 — dans un discours qu'il prononça
au Congrès des pêcheries en rapport avec cette exposition, fit mention de Vimmense
accroissiment des pêcheries canadiennes pendant la dernière décade. Il déclara
qu'après une étude approfondie et attentive de ce l 'i>t, il était tout à fait étonné —
perfcctly amaztd — du développement rapide de cette industrie au Canada.
Eu effet, si nous consultons les chiffres soigneusement compilés tous les ans par
nos offi ciers des pêcheries, ces statistiques officielles nous montrent que la valeur des
pêcheries canadiennes, qui en ''870 n'était que de sept millions cinq cent soixante et
treize mille piastres, avait, en 1880) atteint le chifire de quatorze millions et demi,
conséquemment avait doublé pendant dix ans.
Et si nous étudions les derniers rapports officiels publiés par le Ministre de la
Marine et des Pêcheries, nous y verrons que ces mêmes pêcheries dont la valeur totale,
en 1880, était de quatorze millions et demi, ont produit dix-sept millions et demi en 1883.
Augm entation : trois millions en trois ans.
Quoiqu'il semble admis gue notre système d'inspection soit efficace; quoique
l'organisation du service extérieur de notre ministère de la Marine et des Pêcheries,
et nos moyens de recueillir les statistiques des pêches soient donnés comme modèles,
cette organisation, cependant, laisse encore à désirer. L'on comprend facilement que
<\ans un pays aussi vaste et aussi étendu que le Canada, où chaciuo colon a toutes les
facilités possibles pour pécher, où à quelques pas de sa demeure, tout habitant |)eut,
chaciue iour, aller chercher le iKjisson nécessaire à la nourriture do Ha famille, il est
impossible peur nos statisticiens d'arriver, dans leurs rapports, à une précision
mathématic|uo ; et ces rapports n'ont aucune prétention tl l'exactitude au sujet de la
consommation locale et journalière.
Le rédacteur de l'un des principaux journaux de la Nouvelle- Ecosse, la plus impor-
tante de nos provinces maritimes, disait le 25 de juin 1884 : " C'est un fait bien connu
que les rapports actuels de la quantité et de la valeur du poisson capturé dans les eaux
•canadiennes, sont bien au-dessous de la prise et de la valeur réelles, et hi publication
de ces chiffres comme statistiques officielles est de nature à induire en erreur."
" Nous croyons (|ue les officiers do la division des j)êcheries font tout en leur pou '
voir pour transmettre au ministère des chiffres aussi exacts que possible, mais i^
serait absurde do penser (pie les statistiques des poches que l'on nous fournit actuelle-
ment, donnent une juste idée de la quantité du poisson pris dans nos eaux."
" Considérant notro position actuelle et les propositions qui nous seront vrai-
semblablement faites par nos amis de Washington après l'abrogation du traité de
Halifax, il est très important que nous puissions avoir, sur le rendement do nos i)é(the8,
leur étendue et leur valeur, les données les plus exactes et les plus complètes possibles.
Quoique nos inspecteurs fassent bien leur devoir, à ce sujet, ils ne peuvent eux-mêmes,
croyons-nous, s'empêcher d'admettre ']'!0 leurs rapports no contiennent qu'un estimé
approximatif de la quantité et de la val ';r du poisson pris dans les différentes Pro-
vinces de la Confédération."
" Les statistiques officielles de H Province d'Ontario pour ISSo, évaluent la quan-
tité totale de poisson 'capturé à un ' ^ dion de piast : es, et des personnes bien renseignées
de cette Province, nous disent que ce chiffre iie représente pas plus que la moitié de
•la valeur réelle; donnant comme exemplr, les opérations d une maison engagée dans
îe commerce du poisson, qui, à elle se' le, a fait des affaires en cette branche pour au
<lelà d'un quart de millioa de piasties."
" Nous tenons de bonne source, que les statistiques pour le Cap Breton sont bien
au-dessous de la quantité réelle de poisson pris par lea pêcheries de cet endroit."
Les remarques qui précèdent peuvent s'appliquer, avec plus de force encore, à la
Nouvelle-Ecosse, au Nouveau-Brunswick et à Quél)ec, où les chiffres donnés sont loin
«de représenter la valeur réelle des pêcheries de ces Provinces.
Les dix-sept millions et demi de piastres jplus haut mentionnées, comme valeur
totale de nos pêcheries en 1883, n'ont donc trait, pour ainsi dire, qu'à la quantité de
poisson préparé pour notre commerce d'exportation et pour l'alimentation do quelques-
uns de nos marchés de l'intérieur. Dans ce montant ne sont pas compris les cinq
millions, calcul approximatif de la valeur du poisson capturé et consommé par la
population indigène de la Colombie Anglaise et de Manitoba. Et dans les autres
provinces de la Confédération, contenant une population de quatre millions d'habita.its,
pour qui le poisson est un des principaux articles de nourriture, l'on estime que la
<iuantité du poisson consommé est d'au moins cent livres par tête, ce qui donnerait
quatre cents millions de livres, qui, à trois contins seulement par livre, produirait une
«omme de douze millions de piastres. Ajoutant à la valeur du poisson p: t'^paré pour le
commerce, celle du poisson capturé pour la consommation locale, nous arrivons à un
■grand total de trente-quatre millions et demi de piastres, valeur du produit de nos
pêcheries en 1883.
Ces chiffres sont éloquents et donnent une idée de la richesse immense des eaux
canadiennes.
Mais l'on me permettra de prouver par une comparaison que les pêcheries de
l'Amérique Britannique du Nord sont les plus productives du monde entier.
L'Angleterre et les Etats-Unis, de même que le Canada, possèdent des pêcheries
très étendues et réputées aussi très productives- Pour mieux faire comprendre la
/;
6
richesse de nos mers extérieures et intérieures, j'établirai une compara4son entre leurs
produits et le produit des pêcheries anglaises et américaines.
Le Canada a cinquante mille hommes régulièrement employés à la pêche. D'après
les derniers rapports statistiques que nous avons sur ce sujet, le travail de ces cin-
quante mille hommes a produit dix-sept millions et demi de piastres; ou trùis cent
cinquante piastres pour clia(iuo pêcheur.
L'Angleterre, pour l'exnloitation de ses pêcheries, emploie cent treize mille six cent
quarante hommes, dont le iiavail, d'après les données fournies par Son Altesse Royale
le Duc d'Edinburgh, dans son intéressante étude sur les pêches de la Grande Bretagne,
produit annuellement six cent quinze mille tonneaux de poisson, représentant une valeur
de trente-cinq millions de piastres, ou trois cent neuf piastres pour chaque pêcheur.
DiflFérence en faveur des pêcheries canadiennes sur les pêcheries anglaises : qua-
rante, et une piastres par cha(iue homme.
Les statistiques américaines de 1882, nous disent qixe cent trente-deux mille hommeff
s'occupent de l'exploitation des pôclieries de la république voisin^. Le travail de ces
cent trente-deux mille homme a produit quarante-quatre millions et demi de piastres, ou
trois cent trente-sept piastres pour chaque pêcheur.
Différence en faveur des pêcheries canadiennes sur les pêcheries américaines r
treize piastres par chaque pêcheur.
Et il n'est certes pas téméraire de dire qu'une bonne partie de ces quarante-quatre-
millions et demi de piastres i>roduite8 par les pêcheurs américains, a été empruntée
aux eaux canadiennes.
Remarquons que je mets de côté dans cette comparaison 3,000 milles de côtes-
maritimes sur l'Océan Pacifique, dont les richesses ne nous sont pas encore connues,
pour lesquelles nous n'avons aucune statistique, parce que ce vaste champ, de même-
que les mers intérieures alimentant l'Océan Arctique, n'ont pu, faute de bras, être
exploitées jusqu'à présent.
Ce n'est donc que la moitié environ de l'étendue de nos pêcheries qui entre erk
comparaison avec la totalité des pêcheries anglaises et américaines.
N'oublions pas, non plus, que par suite de la rigueur du climat canadien, nous ne
pouvons exploiter nos pêcheries que pendant environ sept mois de l'année : du com-
mencement d'avril jusqu'à la lin d'octobre ; tandis que les anglais et les américain»
pèchent du mois de janvier au mois de décembre ; de sorte que, dans l'espace de sept
mois, le pêcheur canadien gagne quarante et une piastres de plus que le pêcheur
anglais et treize piastres de plus que le pêcheur américain qui travaillent toute l'année.
Ce qui précède suffirait amplement pour me justifier d'avoir dit que nos pêcheries-
étaient les plus riches du monde entier.
Pourtant, dans cette comparaison, je n'ai rien dit de la perfection des engins de
pêche employés par nos voisins et par les pêcheurs de la mère patrie, des millions de
piastres affectées chaque année par les américains et par les anglais à la construction
de bateaux-pêcheurs toujours de plus en plus améliorés et de dimensions de plus en
plus grandes, des sociétés patronnées par leurs gouvernements dans le but de perfec-
tionner davantage le mode de pêche et d'encourager le pêcheur en augmentant le
produit de son travail.
En 1882, à part environ mille vaisseaux pontés, dont la capacité totale ne dépasse
pas quarante mille tonneaux, nou.s n'avions au service de nos pêcheries maritimes-
que des petits bateaux ouverts, bien faits, sans doute, solidement bâtis, les meilleur»
du monde, peut-être, en leur genre, mais avec lesquels cependant, nos pêcheurs, tout
hardis et tout habiles qu'ils soient, ne peuvent s'aventurer sur la haute mer sans-
danger, sont dans l'impossibilité de suivre le poisson dans ses migrations fréquentes et
conséquemment ne peuvent donner à nos pêcheries tout le développement dont elle»
sont susceptibles.
Tous ceux qui ont fait une étude sérieuse de cette question, sont d'opinion que
1
loin d'avoir atteint le maximum de leur développement, les pêcheries du Canada n'ont
pas encore jusqu'ici dépassé vingt-cinq par cent de ce qu'elles peuvent produire.
Cette énorme capacité d'extension, ressort évidemment du fait que nous avons
des millions de milles de côtes maritimes non encore exploitées et que les pêcheurs
des autres pays viennent, tous les ans, cueillir dans nos eaux une moisson très abon-
dante dont il n'est fait aucune mention dans les rapports officiels de notre ministère
des pêcheries.
La flotte de pêche américaine, sans compter plusieurs milliers de bateaux de
moindres dimensions, se compose de six mille six cents goélettes d'une capacité de deux
cent neuf mille tonneaux ; et trente-deux mille six cent soixante et dix-huit bateaux-
pêcheurs anglais, tous de dimensions considérables, et dont bon nombre de bateaux à
vapeur, sillonnent en tous sens les mers qui entourent le Royaume-Uni,
Les armateurs de ces pays ne reculent devant aucune dépense d'exploitation, et
leurs pêcheurs, montés sur des bateaux coin modes et sûrs, j)euvent suivre le poisson
partout, s'aventurer sans danger loin de-* côtes et profiter de toutes les occasions de
faire une bonne capture. Une ligne régulière de petits bateaux à vapeur fait le service
-entre la flotte do bateaux-pêcheurs et les villes échelonnées de chaque côtés de la
Manche; et le pécheur, sans perdre un temps précieux, peut disposer, sans trouble et
avec profit, du produit de son travail.
Les gouvernements anglais et américains, de même que les capitalistes de ces
pays, comprenant toute l'inportance de leur pêcheries comme contribution à la ri-
chesse nationale, encouragent par tous los moyens possibles, ceux qui sont engagés
dans leur exploitation. Des sociétés ayant à leur tête les savants les plus éminents,
les hommes les plus influents et les pins pratiques, se forment pour chercher les mo-
yens de rendre la pêche de plus en plus productive. Des commissions royales sont
nommés pour l'enquérir des besoins des populations maritimes, protéger leurs intérêts,
rendre plus productif leur travail. Mettant de coté toute mesquine considération
politique, les gouvernements s'entoureut des hommes les plus compétents et dont les
•connaissances peuvent aider au développement de cette importante industrie. Des
havres de refuge construits à frais énormes, sont élevés pour protéger les points les
plus exposés des côtes. Des phares en grand nombre indiquent l'entrée des ports et
•des associations do sauvetage sont organisées partout ou le besoin s'en fait sentir.
Malgré tous ces encouragements, cependant los chiff'res sont là pour prouver que
ies pêcheries anglaises et américaines ne sont pas aussi productives que les pêcheries
canadiennes.
Je suis heureux de constater ici (jue, grâce à l'encouragement donné par nos
hommes publics pendant les dernières années, la construction de vaisseaux pêcheurs
fait chez nous de rapides progrès. Déjà les fines goélettes de la Nouvelle-Ecosse, du
Nouveau Brunswick et des autres provinces maritimes rivalisent avantageusement
par leurs qualités nautiques avec les bateaux pêcheurs américains réputés les meilleurs
dn monde.
Les bateaux à vapeur, emplo\ es déjà pour la pêche sur nos grands lacs, figureront
bientôt, sans doute, parmi les embarcations destinées aux grandes pêches maritimes.
Notre gouvernement consacre tous les ans de jolies sommes à la construction de
havres de refuge, érection de phares pour la guidance des pêcheries et autres amé-
liorations.
Cent cinquante mille piastres sont payées comme prime aux jiêcheurs comme
titres d'encouragement, et si notre gouvernement veut, dans la mesure des moyens à
sa disposition, continuer à aider au dévelop^xjment de cette industrie qui, pour l'avenir
de la Confédération est d'une importance vitale, il nous est permis d'espérer que dans*
un avenir prochain, nous n'aurions rien à envier à nos frères d'outre-mer m à riches
voisins.
Espérons que le gouvernement de la Puissance, mu par l'exemple que lui donnent
tous les pays possédant des pêcheries de quehiu'imçortance, va donner à cette question
toute l'attention qu'elle mérite ; car comme le dit si bien la " gazette de Montréal " du
8
4 Février 1884 : " L'histoire de toutes les grandes nations maritimes prouve claire,
ment l'inportance incalculable de pêcheries aussi riches que les pêcheTies canadiennes-
comme aide à la colonisation et au commerce, comme source où une population peut
aller puiser une partie de la nourriture nécessaire â sa subsistance et comme école pour
l'éducation de marins habiles et hardis. Nous trouvons dans les histoires de France,
de Hollande et d'Angleterre, les exempUs frappants des bénéfices immences que ces-
nations ont retiré de l'exploitation de leurs pêcheries maritimes. N'est-ce pas à l'ex-
ploitation de ses pêcheries le long d'une des côtes les exposées et les plus dangereuse»
du monde, n'est-ce pas à une expérience journalière du danger dans un petit bateau
de pêche, que l'Angleterre doit l'habileté et la bravoure proverbiale de ses marins, qui
sont l'admiration des autres pays et la terreur des ennemis de la grande Bretagne ?
C'est la familiarité avec le danger qni enhardit le marin et c'est précisément ce qui
explique pourquoi les pécheurs des Provinces maritimes du Canada se sont acquis une
réputation très enviable d'habilité et de sang-froid parmi les marins des autres-
nations- "
III
Les pêcheries canadiennes ne sont-elles pas susceptibles d'épuisement? Serait-iî
prudent d'engager de fortes sommes dans leur exploitation ?
Une question se présente ici naturellement à l'esprit du lecteur: Est-il ou serait-il
sage, d'engager de grands capitaux dans l'exploitation des pêcheries canadiennes, et
ces pêcheries ne s'épuiseraient-elles pas rapidement si elles étaient exploitées sur une-
plus grande échelle ?
Tous ceux qui, soit en Europe, soit en Amérique ont fait une étude spéciale et ap-
profondie de cette importante question, semblent être d'opinion unanime pour ad-
mettre qu'une pêche aveugle et non raisonnée, en toutes saisons et avec toutes espèces
d'appareils peut épuiser et même faire disparaître certains poissons tels que le saumon,
la ti'uitC) le poisson blanc, l'éturgeon et autres poissons d'eau douce, de même que les
huitres, les homards et autres crustacés.
Il est en conséquence bon d'assujétir la pêche de ces poissons à des restriction»
judicieuses, même à des règlements sévères.
Nos hommes publics l'ont compris, et à l'abri des sages règlements auxquels elles
sont soumises, nos pêcheries intérieures continueront, pendant des années et des
années encore, à enrichir ceux qui les exploitent.
Quant à ces poissons qui donnent surtout de l'importance à nos pêches maritimes,
qui fournissent le plus fort contingent à nos exportations et que nous sommes con-
venus d'appeler poissons commerciaux, tels que la morue, le hareng, le maquereau,
etc-, sans prétendre qu'il faille absolument les soustraire à toute protection, je partage'
l'avis des savants et des patriciens qui disent qu'il est pratiquement impossible de les
épuiser par les moyens actuellement en usage pour leur capture.
Depuis trois siècles, différentes pêches se pratiquent le long des côtes des pro-
vinces maritimes et dans le golfe St-Laurent ; depuis trois cents ans et au-delà, nos
pêcheurs, les pêcheurs européens, les pêcheurs américains avec leurs appareils les plus
améliorés, puisent à cette source ; et nonobstant les quantités énormes capturés, tous
les ans, depuis la découverte du Canada, aucun signe d'épuisement se manifeste- Au
contraire, le nombre des poissons semble augmenter; de vieux pêcheurs nous disent
(^u'il y a aujourd'hui, sur nos bancs, beaucoup plus de morue qu'autrefois et les statis-
tiques sont là pour prouver que des millions viennent annuellement s'ajouter aux mil-
lions déjà produits.
Dans certaines localités, le poieson n'est peut-être pas aussi abondant à une époque
donnée, mais cela est dû à des causes purement accidentelles. Il faut tenir compte
des variations de la température, des courants et de la dispaiition des myriades d&
petits poissons servant de nourriture aux gadus ; de même qu'il ne faut pas oublier
9
<\\\e le poisson est très capricieux dans
abondance anjourd'liui là où il n'avait p
ses migrations, et qu'il se iwrtera en grande
pas fait son apparition depuis plusieurs années.
D'ailleurs, cette diminution incidentelle du poisson le long do certaines côtes ma-
ritimes, ne se fait généralement remarquer que sur une étendue comparativement très
limitée de nos fonds de pêche.
De plus, l'énorme fécondité de la morue, du hareng et du maquereau, la quantité
infiniment petite tuée par l'homme, comparée à la destruction causée parmi eux par
les ennemis naturels de ces poissons, nous enlèvent, pour ainsi dire, toute idée qu'ils
puissent être détruits ou diminués en nombre par la pêche.
Une commission royale anglaise, ayant pour président le célèbre professeur Huxley
«t composée de savants et d'hommes éminemment pratiques, après une étude sérieuse
et approfondie de cette question, a déclaré, en 1882, que malgré les quantités énormes
toujours croissantes de poissons annuellement capturés, depuis des siècles, le long des
côtes d'Angleterre, les pêcheries britanniques ne donnaient encore aucun signe d'épui-
eement.
En présence de faits de cette nature, nous basant sur les écrits de grand nombre
d'homiT'es distingués, spécialistes et praticiens, ne pouvons-nous pas assurer, que pen-
dant des siècles à venir, à moins d'un grand bouleversement de la nature, les pêcheries
du Canada seront pour les capitalistes entreprenants et énergiques, un vaste champ
d'exploitation productif et fertile ?
Nous disons : " A moins d'un bouleversement dans la nature ; " il existe en effet
dans la nature de grandes lois de compensation. Tandis que certaines parties de notre
planète, favorisées d'un climat agréable, se couvrent, chaque année, de riches mois-
sons, produisent les fruits les plus beaux, les plus succulents et les plus variés, la Pro-
vidence, dans sa sagesse divine, a donné aux régions du nord, peu propres à toutes
sortes de culture et privées des faveurs accordées aux pays chauds, des mers fourmil-
lant de poissons d'espèces différentes et offrant aux habitants de ces régions une nour-
riture abondante en même temps qu'un excellent moyen de subsistance.
La morue, le hareng et le maquereau, surtout la première, fréquentent de préfé-
rence les mers froides qui sont, jusqu'à un certain point, essentielles à leur existence.
Le courant arctique qui arrose les côtes du Canada, est la source des immenses riches-
ses ichthyologiques auxquelles nous puisons depuis la découverte de notre pays et qui
promettent d'être toujours aussi productives que lors des premiers jours de leur exploi-
tation, et aussi longtemps que ce courant froid subsistera, car il apporte avec lui la
nourriture au moyen de laquelle tous nos poissons vivent, se propagent et gran-
dissent.
Messieurs Hatton et Hervey, dans leur intéressante "Histoire de Terreneuve,"
nous disent : " Le courant arctique qui arrose les côtes du Labrador, de Terreneuve,
du Canada et d'une partie des Etats-Unis, refroidissant l'atmosphère et traînant avec
lui d'immenses champs de glace, est la source des grandes richesses maritimes aux-
quelles les populations de ces pays pourront puiser pendant des siècles à venir. Si ce
courant froid faisait tout-à-coup défaut, la morue, le hareng, le maquereau, le flétan, le
loup-marin, etc., etc., qui aujourd'hui affluent dans les mers du nord, disparaîtraient
«ntièrement. Les grands intérêts maritimes dépendent donc autant du courant arc-
tique, que les intérêts agricoles de la pluie et du beau temps."
Chargé de banquises et de champs de glace, le courant arctique se précipite des
mers du Spitzberg, tourne rapidement le cap Farewell, l'extrémité sud du Groenland,
monte au nord jusqu'au Cap Yc rk, et déviant vers l'ouest, se mêle aux eauxf roides des
rivières venant des contrées arctiques par le Détroit de Davis. De là il se dirige vers
le sud, et recevant une nouvelle force des eaux de la Baie d'Hudson, il se précipite le
long du Labrador et de Terreneuve jusqu'à ce qu'il rencontre les eaux chaudes du
" Gulf Stream,^' se dirigeant vers l'est. Ici il se divise en deux parties, l'une coulant
entre le " GulfStream " et la côte, l'autre se déchargeant en dessus des eaux chaudes
de cette seconde rivière de l'océan. Du Labrador en allant au sud, il prend le nom de
*' courant du Labrador," et la superficie qu'il couvre le long des côtes de l'Amérique du
Nord, est l'endroit par excellence où les poissons de mer viennent frayer et chercher
10
leur nourriture. Car, quoique la température particulière du courant du Labrador
soit nécessaire à la croissance de nos poissons commerciaux, ce n'est cependant pa»
uniquement à cause de cette température que ces poissons s'y pressent, mais aussi et
surtout parce qu'ils y trouvent une abondance de nourriture qui ne peut jamais
manquer.
Les mers Arctiques et les rivières qui les alimentent, fourmillent d'insectes for-
mant en plusieurs endroits, dit le Professeur Hind, " une masse grouillante, un océan
de limon vivant, qui donnent une solution à ce problème qui s'est bien souvent présenté
à l'esprit de ceux qui s'occupent de pêches maritimes, savoir: " De quoi se nourrissent
les innombrables millions de poissons, grands et petits, qui se pressent sur les côtes du
Canada, de Terreneuve et des Etats-Unis."
Le docteur Brown a démontré que de ce limon vivant, couvrant des centaines de
milles carrés, se nourrissent également des myriades d'oiseaux aquatiques qui, pendant
la saison d'été, fréquentent les mers du Nord.
Ce courant du Labrador, demeure de la morue et autres poissons contribuant
surtout à l'augmentation de notre commerce, couvre une vaste étendue des mers de la
Confédération Canadienne en dedans des cent brasses d'eau. L'on calcule que la
superficie des côtes des Etats-Unis arrosées par ce courant, est de quarante-cinq mille
milles carrés tandis qu'il occupe deux cent mille milles carrés des mers canadiennes.
De là l'immense supériorité des pêcheries canadiennes sur les pêcheries américaines,,
puisqu'il est admis par tous les auteurs, que le courant artique est le home des poissons
commerciaux et que la presque totalité de ce courant arrose les côtes du Canada.
Personne ne s'arrête maintenant à l'ancienne théorie de la migration des poissons
fréquentant nos côtes, aux mers Arctiques ou autres régions éloignées. La présence
ou l'absence de nourriture, l'instinct de la reproduction, la température de l'eau, sont
les causes qui, déterminent leurs mouvements. Généralement ils se meuvent, en
bancs immenses, à la recherche de nourriture ou de lieux propres à la reproduction de
leur espè'.e, des eaux profondes de la haute mer aux eaux plus chaudes des côtes, et
ils retournent par le même chemin, en ligne droite, à leur habitat. Tous les natura-
listes nous disent que le poisson revient au lieu de sa naissance, lorsque la nature l'a
mûri, pour frayer à son tour ; et le poisson capturé sur une certaine étendue de côtes,
est indigène à ces côtes ou aux rivages adjacents. Ainsi, durant les mois d'hiver l'on
capture du hareng et autres poissons de mer, le long des côtes des Provinces Maritime»
de la Confédération.
J'ai appuyé sur cette question. Je voulais prouver ce que j'ai avancé en premier
lieu, savoir : que les pêcheries maritimes du Canada sont dans un sens, inépuisable»
et que les capitalistes peuvent, en toute sûreté les exploiter sur une large échelle.
IV
LES FONDS DE PECHE LES PLUS IMPORTANTS ET LES PLUS RICHES
DU CANADA.
Les pêcheries du Canada peuvent se diviser en deux grandes catégories : les pêche»
maritimes, et les pêches d'eau douce, ou pêches de lacs et de rivières.
Les premières étant, de beaucoup, les plus importantes, à tous les points de vue,
nous leur donnerons la préséance.
L'insuffisance de notre population et d'autres causes encore, ne nous ont pas
permis, jusqu'à présent, d'exploiter plus de la moitié, ou environ, du vaste champ
maritime à notre disposition. Nous sommes encore loin de connaître toutes le»
richesses des eaux qui bordent la Colombie Anglaise et des mers intérieures de cette
importante partie de la Confédération. Cependant, des rapports officiels, basés sur
des inspections minutieuses et des expériences pratiq^ues, nous disent que dans ces
eaux abondent les poissons commerciaux les plus précieux et d'espèces variées ; et tout
11
jx)rte à croire que les eaux du Pacifique ne le cèdent pas en richesse à celles mieux
connues de l'Atlantique.
Nos fonds de pêche connus, les plus riches et les plus fréquenté-^, comprennent
toutes les côtes de la Nouvelle-Ecosse arrosées par l'Océan Atlantique, de la Baie de
Fundy jusqu'à l'extrémité sud de cette Province, et les alentours des îles du Cap
Breton et du Prince- Edouard ; embrassent toute la Baie des Chaleurs et les côtes du
district de Gaspé — 280 milles— et s'étendent jusqu'à l'Ile d'Anticosti, le Labrador et les
Iles de la Madeleine.
'* Aucune autre partie du monde," nous dit P. L. Simmons dans son intéressant
ouvrage sur " Les produits de la mer " ne possède des pêcheries maritimes aussi riches
■et aussi étendues que celles que renferme le Golfe St. Laurent. La nature y entasse
une immense variété de tous ces poissons offrant à l'homme, non seulement une
nourriture saine et substantielle, mais aussi des moyens de subsistance sûrs et rému-
nératifs et un aliment à son esprit d'initiative et d'industrie." ^
Aux endroits que nous venons d'énumérer, tant sur la haute mer que dans chaque
baie, havre, anse et bras de mer se reliant au Golfe St. Laurent ou à l'Océan Atlan-
tique, se font activement et avec beaucoup de succès, les pêches à la morue, au hareng,
au maquereau, au homard, etc., etc. ; et dans les hommes qui montent nos bateaux-
pêcheurs, le Canada possède les éléments d'une puissante marine qui fera sa force en
temps de danger.
V
PECHE A LA MORUE.
De toutes les pêches maritimes du Canada, la plus importante, de beaucoup, est
la pêche à la morue. Elle emploie des milliers de bras et fournit le plus fort conti-
gent à notre commerce d'exportation de poisson.
A la Nouvelle-Ecosse, au Nouveau-Brunswick et dans la partie inférieure de la
Province de Québec elle constitue une des insdustries les plus importantes.
En 1883, les pêcheurs canadiens ont pris et préparé pour le commerce, un million,
S1.T cent onze mille, cinq-cent quatre-vingt seize quintaux de morue, égaux en valeur à six
millions, trois ecnt soixante et six mille piastres.
A cela, il convient d'ajouter : deiix cent quarante cinq mille, quatre cent cinquante-trois
livres de morues et langues de morue et trois cent trente-trois mille, trois cent onze gallons
d'huile, valant un quart de million de piastres et nous donnant pour les produits de
la pêclie à la morue, un grand total de six millions six cent seize mille piastres divisé
comme suit entre les différentes Provinces maritimes de la Confédération, viz :
Nouvelle-Ecosse $3,977,599 00
Québec 1,778,290 00
Nouveau-Brunswick 716,496 00
lie du Prinde-Edouard 144,170 00
$6,616'555 00
Dans cotte somme de $6,616,555, ne sont pas compris les millions de livres de
morue consommées sur place par les vingt mille familles de pêcheurs que cette indus-
trie fait vivre.
La morue, conduit par cet instinct qui guide tous les êtres animés, fait son appa-
rition sur les côtes canadiennes à des dates incertaines, généralement du q^uinzième jour
de mai au commencement du mois de juin, quelquesfois dans les derniers jours du
mois d'avril et quelquesfois aussi, mais rarement, pas avant la dernière qninzaine de
juin. Ces variations de quelques lours ou quelques semaines dans l'époque de l'arri-
vée de la morue, ont pour causes, les courants, les vents, la température ce qui déter-
12
minent les migrations vers nos côtes des nombreuses variétés de petits poissons dont,
se nourrit le gadus.
L'on rencontre la morue en bien plus grande abondance dans certaines localité»
offrant plus d'avantages pour l'éclosion et la préservation du frai. Immédiatement
après avoir déposé ses oeufs, elle se rend sur les bancs ou haut-fonds où elle trouve en
abondance la nourriture nécessaire pour rassasier son appétit vorace. Vers le moi*
de décembre, elle quitte les côtes et les bancs qui les avoisinent pour se retirer à la
haute mer.
La saison de la pêche à la morue varie dans les différentes Provinces maritimes,
commençant plus tôt à la Nouvelle-Ecosse et au Nouveau-Brunswick où le climat est.
moins sévère que dans la Province de Québec. Généralement, les bateaux prennent
la mer, en avril à la Nouvelle-Ecosse et au Nouveau-Brunswick, en mai à Québec, et
la campagne se termine an mois de novembre.
Le hareng et le caplan, avant-coureurs de la morue, nous annoncent chaque prin-
temps l'arrivée de cette dernière.
Le caplan est un joli petit poisson de sept à huit pouces de longueur qui chaque
printemps, nous arrive en masses compactes, remplissant pour ainsi dire, chaque baie-
et chaque ause formée par la nature accidentée des côtes. Après un séjour de six ou
sept semaines près des rivages où il vient frayer, il disparail et va chercher une re-
traite dans les profondeurs de la mer où il demeure jusqu'à l'époque du frai l'année
suivante.
Durant tout le temps que le caplan, en bancs immenses, se presse le long des côtes,,
la morue qui suit de près, festoie, dévore des ^millions de cob petits poissons et peut
satisfaire la voracité bien connue de son appétit. Aussi le temps du caplan est-il tou-
jours pour le pêcheur le temps par excellence, car il est assuré d'une riche moisson
tant qu'il peut offrir pour appât à la morue ce petit poisson dont elle est très friande.
Pendant tout le temps que dure le caplan, chaque établissement de pêche un peu
considérable, emploie deux ou trois bateaux, montés chacun par sept hommes appelés
Seineurs. Jour et nuit ces bateaux parcourent les côtes à la recherche du caplan. Ren-
contre-t-on un banc de ce poisson, de suite la seine est jetée, le bateau est chargé, et le»
Seineurs font force de rames pour arriver le plus tôt possible à l'établissement et distri-
buer frais, aux pêcheurs, le caplan capturé ; chaque bateau pêcheur recevant une part
égale du poisson ainsi apportée par les Seineurs.
Les bateaux pêcheurs de grandes dimensions, employés à la pêche à la morue sur
les bancs et à la haute mer, sont obligés de venir de temps à autre dans les havres et
baies pour y capturer du caplan frais. Ils en prennent de grandes quantités, suffisante»
pour fappât de plusieurs jours, et le conservent au moyen de la glace ou de réfri-
gérants.
Il est difficile, à celui qui est peu au fait de nos pêches maritimes, de se faire une
idée du nombre incalculable de caplan qui s'entassent, chaque printemps dans les anse»
formées par les rives du golfe Saint-Laurent. Du rivage, un homme peut en quelques
minutes, avec une épuisette, remplir une charrette de ce poisson ; et dans le même
espace de temp:>, quatre ou cinq hommes, avec une seine onlinaire, peuvent charger un
bateau de huit â dix tonneaux.
Au dire des gourmets, le caplan frais est délicieux, et lorsque la science et l'expé-
rience auront trouvé les moyens de le préparer de la même manière, ou à peu près,,
que la sardine à laquelle il ressemble d'ailleurs, ce poisson acquerra une haute valeur
commerciale en raison des quantités immenses qui peuvent être capturées presque
sans frais. Déjà, en plusieurs endroits des Provinces Maritimes des quantités consi-
dérables de caplan sont séchées, soigneusement mises en boîtes et envoyées sur les
marchés dus Etats-Unis ; et cette industrie grandit tous les ans au profit de ceux qui
l'exploitent.
Vers là fin de juin, lorsque le caplan est complètement disparu des côtes, l'on offre
à la morue, comme appât, du lançon, du hareng, du maquereau, de l'encornet, de
l'éperlan et différentes espèces de mollusques.
13
Le lançon et l'éperlan se prennent à la seine de la même manière que le caplan, le
hareng et le maquereau au moyen de filets traînants ou fixes et l'encornet avec un
engin particulier que les pêcheurs nomment turlutte, morceau do plomb rond, long do
six pouces, et qui à l'une de ses extrémités possède une tête garnie d'épingles recourbées.
La pêche aux mollusciues se fait à la main, ou avec des râteaux, sur les fonds vaseux
de certaines baies et de certaines rivières.
La pêche à la morue se faisant, en Canada, presqu'exclusivement à la ligne, à la
main ou à la ligne de fonds ou ligne dormante, le coût de l'appât pour cette pêche
représente chaque année une somme très considérable, et qui, sans exagération, peut
être comparée à un quart, au moins, de la valeur totale de la morue capturée. En
outre, l'appât frais est presqu'indispensable à une bonne prise, et tous les ans, les
pêcheurs canadiens perdent un temps précieux pendant la meilleure saison de pêche,
parce qu'ils ne peuvent pas toujours offrir à la morue une boitte fraîche. Il serait donc
très désirable et bien important que l'on adoptât des moyens de diminuer le coût de
l'appât et la perte de temps qui résulte du système actuellement en vigueur.
La Norvège, qui, de toutes les contrées de l'Europe, possède les pêcheries à la
morue les plus importantes et qui fait aux produits canadiens une concurrence
sérieuse sur les marchés au poisson du monde entier, est parvenue, à l'aide de la
science, à améliorer, de beaucoup, son système de pêche pendant ces dernières années.
Les pêcheurs norvégiens font usage sur une grande échelle et avec succès, de filets
fixes i)Our la pêche à la morue.
Nos voisins des Etats-Unis, prompts à faire usage de tout engin amélioré qu'ils
n'inventent pas eux-mêmes, se servent aussi de ces filets comparativement peu coûteux.
Pourquoi nos pêcheurs canadiens n'imiteraient-ils pas cet exemple ?
Suivant de récentes statistiques, de vingt-six mille hommes employés à la pêche à
la morue, au large des îles Lafoten, en Norvège, douze mille faisaient usage de filets ;
et il a été prouvé que ces derniers recueillaient une moisson bien plus abondante que
ceux péchant à la ligne à la main ou à la ligne de fonds.
Un journal de Gloucester, dans les Etats-Unis, relate le fait que le 12 décembre
1882, un bateau-pêcheur, monté par deux hommes seulement, et ayant à bord sept de
ces filets, captura cinq mille poissons dans une seule nuit.
Monsieur James Feehan, de l'Ile du Prince-Edouard, écrit aux journaux de cette
Province pour dire qu'il a admirablement bien réussi dans la pêche à la morue au filet,
capturant en moyenne quinze cent à deux mille morues tous les jours.
Espérons donc que nos pêcheurs feront bientôt un usage général de ce nouvel
appareil dont l'emploi produit de si beaux résultats dans les autres pays, et sauveront
ainsi un temps précieux et une quantité considérable de hareng, maquereau et autres
poissons, aujourd'hui dépensés comme appât, mais qui pourraient être expédiés aux
marchés et produire de jolies sommes.
On pêche la morue en Canada, soit sur les grands bancs dans les vaisseaux pontés
variant en dimensions de soixante à cent tonneaux, soit dans lés petits bateaux ou-
verts à quelques encablures du rivage.
La Nouvelle-Ecosse et le Nou veau-Brus wick semblent avoir le monopole de la
pêche dans de grands bateaux ■ Je suis heureux de constater ici que l'architecture
navale à fait des progrès sensibles dans ces deux Provinces pendant la dernière
décade. Ce mouvement progressif permet aux pêcheurs d'augmenter considérable-
ment la prise annuelle.
Il reste encore, cependant, dans ces deux Provinces, bon nombre de pêcheurs,
surtout parmi ceux qui mènent de front la culture et la pêche, qui exploitent cette
dernière industrie dans ^es petits bateaux ouverts à une faible distance de leurs
habitations.
De dix à quinze hommes montent les vaisseaux faisant la pêche sur les bancs ;'ce
nombre, .'ependant varie suivant les dimensions et le tonnage du bateau pêcheur. Géné-
ralement, l'armateur fournit au pêcheur un bateau gréé et pourvu de tous les appareils
14
«\c jMÎches nécessaires, et il a droit à la moitié de la prise, plus une part sur l'autre
moitié que l'on nommo "part du bateau " la balance est divisée entre les pêcheurs.
Aussitôt que les bateaux sont arrivés sur les fonds de pêche, on jette l'ancre danH
vingt, trente ou quarante brasses d'eau, la chaîne qui retient l'ancre étant remplacée
par un câble en chanvre ou en coton, (.'haque soir à quelque distance du bateau, l'on jette
des filets en bon nombre afin de se procurer de la boitte fraîche pour la journée du
lendemain, et la pêche à la ligne de fonds commence et continue sans interruption,
nuit et jour, en dépit du vent et la mer, jusqu'à ce que la cale du bateau soit remplie
de poisson tout tranché, salé et prêt pour le marché ou pour les manipulations du
séchage. Alors le bateau retourne à son port d'armement, et la morue est débarquée
et expédiée verte ou saumurée aux marchés des Etats-Unis et de l'intérieur du Ca-
nada, on bien lavée, sùchée et préparée pour l'exportation en Europe, aux Antilles, au
Brézil, etc.
Si la chance favorise le pêcheur, si la morue et surtout la boitte, sont abondantes à
l'endroit où il a d'abord jeté l'ancre, sa cargaison est promptement complétée ; mais
quelquefois la morue ne donne pas là où l'on s'est d'abord arrêté ; il faut chercher de
mouillage ; la boitte manque : il faut so rendre jusques dans les havres pour s'en
procurer ; tous ces mouvements font perdre un temps précieux et retardent l'heure du
retour au port d'armement.
Quoique plus coûteuse, la pêche avec de grands bateaux pontés est bien plas'pro-
ductive que celle qui so pratique le long des côtes sur des petits bateaux ouverts. La
momc de banc est aussi beaucoup plus grosse que la morue de terre ; elle est en outre de
qualité supérieure et se vend un prix plus élevé sur tous les marchés. En moyenne,
trente morues de banc sùchées suffisent pour faire un quintal.
Dans la Province de Québec et à l'Ile du Prince Edouard, la pêche se fait pres-
qu'entièrement sur des bateaux ouverts, soit dans le voisinage des anses et des baies
où le pêcheur séside, soit sur de petits bancs à dix, vingt ou trente milles de la côte,
Ces bateaux, les meilleurs de leur classe peut-être dans le monde entier, sont cons-
truits par les pêcheurs eux-mêmes. Leurs dimensions varient de vingt à trente pieds
de largeur, suivant l'usage auquel ils sont destinés. Ils sont fait à clins et de bois
légers tels que cèdre, pin, sapin, etc. Pointus à la poupe comme à la proue, leur
gréement consiste géiulralemonten deux voiles à baleston et un foc ; quelques-uns de
ceux qui servent à la pêche sur les bancs sont grées comme de petites goélettes. Afin
que l'on puisse facilement les tirer de l'eau et les monter sur les grèves, advenant une
tempête, ils sont comparativement très légers ; leur tirant d'eau ne dépasse pas trois
pieds, ce qui leur permet de se réfugier souvent dans les petites rivières, assez nom-
breuses, qui se jettent dans le golfe St Laurent. Ils sont bons voiliers et tiennent ad-
mirablement bien la mer.
Deux de ces bateaux, un du Cap Breton, un autre du comté de Gaspé, ont figuré à
l'Exposition Internationale des pêcheries de Londres en 1883 et y ont attiré l'attention,
même excité l'admiration des connaisseurs. L'un a mérité la médaille d'or et a été
offert par le gouvernement canadien à Son Altesse Royale le Prince de Galles qui avait
témoigné le désir d'en devenir possesseur ; l'autre, médaille d'argent, a été acquis par
un riche armateur anglais, et est employé à la pêche le long des côtes d'Ecosse où ses
bonnes qualités ont été et sont encore bien appréciées.
Malgré leurs bonnes qualités nautiques, malgré la hardiesse et l'habileté prover-
biales de ceux qui les montent, ces bateaux sont cependant trop petits pour nous per-
mettre de donner à la pêche à la morue tout le développement dont elle est susceptible.
Trop souvent forcés de fuir devant la tempête, d'abandonner, à peine arrivés sur les
fonds de pêche, la certitude d'une prise abondante pour ne pas s'exposera être pris au
large par un coup de vent, dont ils ne s'occuperaient guère s'ils montaient des bateaux
pontés, les pêcheurs de la Province de Québec perdent tous les ans un temps précieux
tandis que les pêcheurs des Provinces Maritimes recueillent une moisson abondante.
Les rapports des pêcheries des dernières années constatent une diminution sensible
dans la quantité de poisson prise par les pêcheurs de la Province de Québec ; or ce
déficit, de l'avis général, n'a pour cause que la perte de temps occasionné par les tem-
pêtes fréquentes qui ont sévi dans le golfe.
'è
15
Le cadre restreint d'une lecture ne me permet pas dem'arréter ici à une description
de modes de pèche en usage au Canada et de la manière dont on y prépare la morue
pour les marchés étrangers. J'ai d'ailleurs donné ces détails, assez au long, dans un
travail que j'ai eu l'honneur de lire à Londres, en 1883, au congrès des pêcheries, en
relation avec l'Exposition Internationale des pêches qui se tenait alors dan.s la métropole
commerciale de l'Europe.
Je ne puis cependant passer sous silence le fait que nous sommes encore dans
l'enfance de l'art de pêcher. Nous faisons un usage bien trop exclusif de la ligne et du
hameçon et les engms de pêche améliorés semblent nous être antipathique:^, tant ils
s'introduisent lentement dans notre pays.
Quoique nos rapports officiels constatent une augmentation annuelle assez mar-
quée dans la quantité de morue prise, si pourtant, nous prenons en considération le
nombre toujours croissant de nos pêcheurs, nous pouvons dire que nos pêcheries
restent stationaires. Et cet état de chose n'est certainement pas dû à une diminution
dans la quantité de morue qui fréquente les eaux canadiennes, mais uniquem ent, je
pourrais dire, aux moyens encore imparfaits que nous avons de faire la pêche, moyens
que la routine semble avoir consacré et qui ne changeront qu'avec le temps.
Si nous exceptons quelques armateurs, amis du progrès dans les Provinces Mari"
times, le3 capitalistes engagés dans l'exploitation des pêcheries canadiennes, sont, en
général, apathiques et ne témoignent aucun désir, ne prennent aucune mesure pour
tenir les pêcheurs qu'ils emploient au courant des idées progressives et des améliora-
tions noiabreuses que les autres pays apportent, presque tous les ans, à leur système de
pêche.
L'on est loin de suivre en Canada l'exemple que nous donnent l'Angleterre, les
Etats-Uris, la France, la Norvège, etc., où la science vient en aide à l'expérience pra-
tique et (ontribue puissamment au dévelot)pement rapide de cette importante indus-
trie.
Ce qii a le plus contribué, je crois, à paraliser les efforts industrieux de bon nombre
de pêcheurs et â retarder le développement de nos pêcheries, est ce système d'avance
et de crédit, qui permet au pêcheur do s'endetter, au commencement de chaque saison
de pêche, pour une somme à peu près égale au produit supposé de son travail pendant
cette saison. Système vicieux, souvent mineux pour le marchand comme pour le
pêcheur, inhérent à l'exploitation de certaines industries, inauguré ici il y a plus d'un
siècle etencore plus ou moins en vigueur dans les différentes Provinces de la Confédé-
ration, connue d'ailleurs dans tous les pays où se fait la jpêche, et dont la conséquence
est d'eilever toute énergie, tout courage, tout esprit d'mitiative et d'indépendance à
ceux qui y sont soumis.
Si nous avions en Canada, dans chacune des Provinces des bureaux des pêcheries
bien organisés, modèles sur les bureaux de commerce que possède chaque grand centre,
et sous la direction de savants et d'hommes intelligents et pratiques qui se tiendraient
au courant des inventions modernes, travailleraient à faire adopter ici les engins de
pêche améliorés en usage dans les autres pays, encourageraient l'esprit d'entreprise
chez les pêcheurs etc., les produits de notre pêche à la morue et autres pourraient être
indéfiiinient augmentés, car nous sommes singulièrement favorisés par la nature et
par une Providence bienveillante qui ont mis à nos portes une source inépuisable de
richesses maritimes.
Et les capitalistes qui engageraient des capitaux dans l'exploitation de nos
pêcheries, ont la certitude de pouvoir toujours écouler facilement leurs produits. La
morre sèche est considérée comme un article de nourriture indispensable par les habi-
tants des pays chauds et les poissons saumurés ont des marchés illimités en Europe,
auxEtat^-TJnis, aux Antilles et même en Canada.
Nous vendons chaque année aux pays catholiques de l'Amérique et de l'Europe
yioviT six millions de piastres de laoTUB sèché& et notre poisson saumurée nous rapport»
une somme encore plus élevée.
Tandis que très souvent, aujourd'hui, l'on éprouve beaucoup de diflBcultés à placer
16
sur les marchés et à écouler les articles produits par les manufactures, la demande pour
le poisson ne faiblit pas. Et lor8(]|ue les voies ferrées, maintenant en construction,
couvriront de leurs réseaux le Brézil, rEspatj;ne et autres contrées de la Méditerrannée,
<le même que le Canada, et permettront le transport facile, à l'intérieur de ces pays, de
denrées de toutes sortes, il n'est pas douteux que la demande pour nos poissons aug-
mentera encore. Il est donc évident qu'un pays possédant des pêcheries maritimes
aussi importantes <iue les péclieries canadiennes, trouvera toujours dans leur exploita-
tion, une source de prospérité et de richesse que ni les fluctuations du commerce, ni
les caprices de la mode ne peuvent diminuer.
Nos principaux marchés pour la morue sèche sont l'Italie, l'Espagne, le Portugal,
le Brézil, les Indes Antilles et les Etats-Unis.
La plus belle et la meilleure morue sèche est préparée sur les côtes de Gaspé, dans
la Province de Québec, où les effets détériorants des brouillards et des brumes, produit
par le Gnif Slream, se font moins sentir. Cette morue est bien connue et bien appré-
ciée sur les marchés de l'Espagne, de l'Italie, du Brézil, etc., où on l'expédie : la grande
en grenier dans des vaisseaux à voile de cent à trois cents tonneaux, la petite dins des
barils, de forme particulière, appelés toubes, du mot anglais tub, et contenant cent
vingt huit livres.
Pendant tout le temps qne dure l'opération du séchage et que la morue est exposée
à l'action du vent et du soleil, si la température est favorable et le soleil brillant, si
surtout les vents de l'ouest prédominent, ce poisson est séché sans peine et la qualité
en est excellente ; mais quelquefois les vents de l'Est, chargés de pluie, souflient pen-
dant des semaines entières et alors, en dépit de tout le soin et de toute l'attention
possibles, la morue se gâte, le produit de plusieurs jours d'un travail pénible est perdu,
<;ar ni les pêcheurs, ni les armateurs, ni les savants qui se sont occupés de cette (][ues-
tion, n'ont pu encore trouver les moyens d'oUvier aux effets destructeurs de l'inimidité
et des brouillards sur le poisson longtemps exposé à leur action.
Avant son expédition aux marchés, la morue est soigneusement choisie : la meil-
leure qualité est envoyé en Europe et au Brésil et l'inférieure aux Etats-Unis et aux
Antilles.
la, Nouvelle-Ecosse, le Nouveau-Brunswick et l'Ile du Prince-Edouard exportent
principalement aux Etats-Unis, aux Antilles et au Brézil. La Province de Québec
envoie sa morue marchande en Europe et au Brézil, les Antilles achètent la qualité
inférieure.
D'après les dernières statistiques que nous avons sur ce sujet et qui nous sont
fournies par les rapports de la navigation et du commerce, les Antilles ont payé aux
négociants canadiens, en 1883, deux millions de piastres pour morue sèche, les Etats-
Unis au delà d'un demi million, le Brézil et l'Europe, chacun au delà d'un demi naillion
et la Guyanne Anglaise deux cent cinquante mille piastres. D'autres contrées ont
acheté pour des sommes moindres mais encore assez rondes.
Ji
VI
INDUSTRIES INHÉRENTES A LA PÊCHE A LA MORUE.
La morue est le plus profitable de tous les poissons : aucune de ses parties qui ne
soit utilisée. Le corps est séché pour l'exportation, la tête, la langue et la nove sont de
très bons articles de nourrituie ; l'on tire du foie une huile employée pour lubrifier les
machines, pour la préparation des cuirs, etc , etc., et dont les propriétés médecinales
sont inappréciables ; les os et les entrailles, soumis à certains procédés chimiques, sont
transformés en un engrais égal comme fertilisant au célèbre guano péruvien ^ les œufs
salés sont un appât très apprécié pour les pêches à la sardine et à l'anchois et de la
vessie natatoire séchée, l'on obtient une excellente colle.
L'Angleterre et les Etats-Unis ont acheté du Canada, en 1883, de l'huile de morue
pour un montant de cent ciquante mille piastres et des langues et noues saumurées
1
II
11
pour cent vingt-cinq mille piastres. I^s fabriiiuos de guano de la Nouvello-Ecosse,
■au Nouveau-Brunsiwick et de la Colombie Anglaise ont mis sur les marchés des pro-
iluits estimés à cent mille piastres.
J'ai le regret do constater ici que la province do Québec ne possède pas encore
une seule manufacture de guano. Des milliers de tonnes de débris de poisson, qui
pourraient produire du guano pour une valeur d'au moins trente à trente-cinq mule
j>iastres, sont jetées tous les ans à la mer et complètement perdues ; tandis (\ue si des
fabriques étaient établies sur les côtes du Labrador et de la Gaspésie, les fabriquants
y trouveraient de beaux profits et les pêcheurs, sans trouble, sans frais, sans augmen-
tation de travail, pour ainsi dire, pourraient disposer de produits jusqu'ici complète-
ment perdus pour eux.
Ce que je viens de dire des débris de poissons fiput également s'appliquer aux
lofînes de morue qui ne figurent pas dans le chifl're de nos exportations. Et {xturtant,
nous pourrions avantageusement disposer de ce produit.
En France et en Espagne, où se font les pêches à la sardine et à i'anchois, l'on a
besoin comme appât, pour ces pêches, d'au moins cinquante mille barils de rognes de
morue tous les ans-
Dans des meilleures années de pêche, la Norvège envoie sur les marchés français
et espagnols trmtc-cinq mille barils de ce produit : c'est la plus grande quantité que ce
pays puisse fournir, et pendant les années 1881, 1882 et 1883, les pêcheurs norvégiens
n'ont pu exporter que vingt-cinq mille barils. Il reste donc un déficit de vingt mille
barils qu'il serait trts facile aux pêcheurs canadiens de fournir, car ils jettent des
milliers de barils de rognes tous les ans.
Lorsque les rognes leur font défaut, les pêcheurs à la sardine sont obligés, pour les
remplacer d'avoir recours aux expédients et à des compositions chimiques très coû-
teuses.
Observons qu'un baril de rognes de morue bien préparé, vaut en moyenne cin-
ij^inte francs ($10.00) sur le marché français. Multipliant vingt mille barils parce
chiffre de dix piastres nous avons une somme de deux cent mille piastres, jetées à la mer
tous les ans par nos pêcheurs, parce que chez nous, aucun négociant ne s occupe sérieu-
sement de ce commerce.
Il y a quelques années des vaisseaux français parcouraient nos places de çêche,
achetant toutes les rognes qu'ils pouvaient se procurer ; mais le déiaut d'expérience,
chez nos pêcheurs, dans la salaison de ce produit, et surtout l'absence d'une loi le sou-
mettant à l'inspection, avant qu'il fut paqué pour l'exportation, ont été cause qu'un
article de qualité inférieure a été fourni et a fait cesser ce commerce qui promettait de
beaux bénéfices.
Nos pêcheurs pourraient aussi faire grandir et prospérer des fabriques de cor-
dages, filets, hameçons, lignes, etc., et des établissements de tonnellerie. Jusqu'à pré-
sent, notre pays, jeune encore, est allé acheter des labriquants de la mère-patrie et de
la république vosine tous les agrès de pêche dont nos pêcheurs font usage ; mais le
besoin de manufactures de ce genre se fait maintenant sentir au Canada. Nos pêche-
ries sont assez étendues, notre commerce de poisson assez considérable pour faire pros-
pérer ces industries chez nous, si nous leur donnions le million de piastres que nous
distribuons chaque année parmi les marchands étrangers.
Ajoutons aussi, ce qui n'est pas d'une moindre considération, que l'établissement
de fabriques d'agrès de pêche sur nos côtes fournirait de l'ouvrage à des milliers de
bras et retiendrait au pays grand nombre de nos concitoyens.
la
18
VII
PÊCHE AU HAF.ENG.
Nous trouvons dans le dernier rapport du Ministre de la Marine et des Pêcheries,
que la pêche au harenjî, qui occupe le second rang parmi les pèches maritimes du
Canada, a produit, on 1883, deux millions et un quart de piastres. Cotte somme ne
comprend pas les quantités prises pour la consommation locale, employées comme
uppàt pour la pécho à la moruo, et charroyées sur les terres, comme engrais, dans plu-
sieurs endroits de la Confédération.
Le chiffre est rond, le résultat paraît beau, mais ils ne sont certainement pas en
rapport avec l'abondance de ce poisson dans les eaux canadiennes. L'on ne donne
pas ici à cette i)êche toute l'attention qu'elle mérite. Jo dirai même, qu'il n'y a, à
proprement parler, pas do pêche au hareng régulière au Canada.
Plusieurs armateurs de la Nouvelle-Ecosse, du Nouveau-Brunswick et de l'Ile du
Prince-Edouard équippent des goélettes spécialement pour cette pêche qu'ils font d'une
manière très intelligente ; bon nombre de pêcheurs de ces trois provinces s'en occui)ent
également ; mais ces tentatives, toutes louables qu'elles soient, ne sont que des entre-
prises isolées.
Je surprendrai probablement plusieurs de mes lecteurs, en constatant que de
toute la Province do Québec, (lui compte six mille pêcheurs et possède onze cent»
milles de côtes maritimes et des baies nombreuses renommées par l'abondance du
hareng qui s'y presse, il n'est pas exporté deux mille barils de ce poisson annuellement.
Les pêcheurs québecquois pourraient retirer d'immenses avantages de l'exploita-
tion de cette industrie, mais ils se contentent d'en prendre ce qu'il leur faut pour
les besoins de la pêche à la morue et pour la consommation dans leurs familles.
L'on trouve la raison de cette apathie dans le fait que les négociants de cette
Province qui s'occupent do pêche, donnent tout leur temps et toute leur attention à la
pêche à la morue et à la préparation de ses produits.
Pourtant, tous les printemps, à la saison du frai, une quantité énorme de harengs»
se presse sur les côtes de la Province de Québec, leurs masses compactes couvrent des
milliers d'arpents de la mer, et si nos pêcheurs étaient pourvus des appareils néces-
saires, si surtout ils avaient l'espoir ou la perspective de disposer du produit de leur
travail, ils pourraient facilement, en quelques jours, réaliser des milliers de piastres.
Le long du littoral du Golfe St. Laurent, du Cap-Chatte à la Pointe-au-Maquereau,
dans la Baie des Chaleurs, et surtout dans les baies magnifiques formées par le groupe
des Iles de la Madeleine, les bancs de harengs sont si épais chaque printemps, que la
pression qu'ils exercent les uns sur les autres, pression augmentée encore par la force
du courant les tuent par milliers.
" Il est absolument impossible, sans en être témoin," nous dit le Dr. P. Fortin, " de
se faire une juste idée de la prodigieuse abondance d'œufs de hareng déposés tout 1©
long des côtes où ce poisson va frayer. J'ai vu maintes fois plusieurs mille,» continus du
rivage couverts de ces reufs sur une épaisseur de deux et trois pieds."
Sur la somme de deux millions et un quart, chi Jre de nos exportations de hareng,
la Nouvelle-Ecosse, le Nouveau-Brunswick et l'Ile du Prince-Edouard, comptent au
delà d'un millions et trois quarts, Ontario cent mille piastres et la Colombie Anglaise
vingt-cinq mille piastres ; laissant à la Province de Québec une proportion ridicule
comparée à l'étendue de ses côtes maritimes.
L'Angleterre emploie à la pêche du hareng une véritable flotte de vaisseaux
variant de cinquante à cent tonneaux. Elle engage dans cette industrie des capitaux
énormes et une population de quatre-vingt mille hommes. Ses pêcheurs, munis de
bons engins de pêche et montés sur de bons bateaux, vont à la recherche du hareng,
jusque dans la mer du Nord.
Ut
de
le
de
La Noivè;,'t', la rrancc, riiUiinle, l'Hcosso, les KtaLs-l'iiib l'out cette i»êcliO sur une
i^raiule éclielle et la Ilollando lui doit aa richesse.
Dans tous ces pays, un bAteau muni de tdus les onj;ins nécessaires pour la pêche
au hareng, coûte juscju'à cinc] et sept mille piastres. Il faut que les produits de cette
})éclie, convenablement faitt^ soient donc bien almndants puistiu'ils suJIisent non seule-
ment a couvrir tous ces frais d'exploitation, mais encore rapportent des i)rotits consi-
ilêrables aux exploitatours.
Et cei)endant les jiêchories au haren;? en I^ur<»i)e, ne valent pas mieux, no sont pas
même aussi productives que Ic-s nôtres. Les américains viennent ù grands frais cueillir
«îans nos eaux une moisson abondante, tandis que sans nous déranger beaucoup, avec
bien moins de dépenses, nous pourrions faire ce «lu'ils font.
.le no crains donc pas d'avancer que si des capitalistes canadiens ou étrangers
«xploitaient cette industrie sur une échelle on rapport avec son importance et avec
l'abondance de la matière première que les eaux canadiennes fournissent; si des
«•ompagnies se formaient, pourvoyant nos pêcheurs de bâtear.x et d'appareils de pêche
;iméliorés tels que ceux en usage on Europe, je n'hésite pas, dis-je, à avancer <iue la
i^êclie au haren».' en Canada, au lieu do deux millions, en rapporterait six ou huit tous
les ans.
Et les marchés pour ce iK)isson «jui est à la |)ortée do toutes les bourses, qui est
surtout la nourriture du pauvre, no manquent pas. Outre nos villes principales, Mani-
toba, l'Ouest, les besoins de notre commerce intérieur eniin, nous avons les Etats-Unis,
l'Angleterre, l'Allemagne, les Antilles, etc., qui nHrentdes marchés illimités pour toutes
sortes de poissons saumurés.
La population Euroi)éenne et celle du Sud de l'Amériijne augmente rapidement,
et les produits de pêcheries dans ces pays sont loin d'être assez abondants pour suf-
fire à la consommation et à la demande. Des sj^êculateurs y trouveront donc toujours
un débouché excellent pour leurs poissons salés, i)Ourvu qu'ils soient préparés avec
âoin et caques dans les barils solides et étanches.
Aussitôt que les glaces ont laissé nos rivages le printemps, le hareng fait son
apparition. Du mois d'avril au mois de décembre, on le rencontre, en bancs im-
mences et serrés, partout dans le Golfe St. Laurent, le long des côtes Atlantiques de la
Nouvelle-Ecosse dans le Détroit de Canso, etc. Même dans les mois d'hiver il reste
•chez nous, et une quantité considérable en est prise en janvier, février et mars par
les pêcheurs de la côte Sud du Nouveau-Brunswick.
Le hareng du printemps n'est pas d'aussi bonne qualité, n'a pas autant de saveur
que celui qui est capturé du mois d'août au mois de décembre. Le premier, dont la
préparation exige peu de frais, est caqué rond dans les barils de deux cents livres et
ivinsi expédié aux Etats-Unis et aux Antilles ; tandis cjue le second, pris à la fin de
saison de pêche, étant plus gras demande plus d'attention et de soins dans sa salaison.
Soigneusement vidé et mis en rangs, divisés chacun par une couche de sel, dans des
et bien faits on l'expédie en Europe et aux Etats-Unis et dans les prin-
barils solides
•cipaux centres de la Confédération.
Notre meilleur hareng est celui du Labrador bien connu sur les marchés du
inonde entier. •
Dans les Provinces maritimes, depuis quelques années, l'on prépare en boîtes,
comme ^J, sardine un petit hareng ressemblant au produit français tant par le goût
que par la forme. Ce nouveau commerce réussit bien et progress'e rapidement.
Une autre
■d'amérique, est . _
et dorées, dont grand nombre font leurs délices au repas du matin et qui est pris et
préparé à Digby dans la Nouvelle-Ecosse Cent soixante-et-dix mille boîtes de ce
poisson ont été expédiées aux Etats-Unis et en Europe en 1883.
Les pêcheurs canadiens ont fourni aux marchés étrangers l'année dernière :
500,000 barils de hareng saumuré. 1,000,000 boites de hareng fumé. 17,000,000
livres de hareng frais.
espèce de hareng, aussi bien connu des gourmets d'Europe que de ceux
t le célèbre " Digby Chickbn, " petit hareng fumé, aux couleurs brillantes
20
Tout le hareng frais et fumé compris dans l'état ci-dessus est expédié de la
Nouvelle-Ecosse, du Nouveau-Brnswick et de l'Ile du Prince-Edouard, aux Etats-Unis.
La plus grande partie du même poisson, saumuré, part aussi des mêmes Provinces
pour les marchés anglais, américams et des Antilles.
Mais, je le répète, nos exportations de hareng pourraient être doubles, triples et
quadruples, si nous pouvions donner à cette pêche toute l'attention que mérite son
importance-
Espérons dans un avenir prochain, que quelques-uns des capitalistes canadiens,
ou, à leur défaut, des spéculateurs étangers, viendront développer puissamment cette
industrie, que seul le manque de^moyens suffisants à jusqu'ici empêcher d'être plus
productive.
VIII.
PECHE AU MAQUEREAU.
Longtemps, trop longtemps, nos énergiques et entreprenante voisins des Etats-
Unis ont eu le monopole exclusif de la pêche au maquereau dans les eaux canadiennes.
Je suis heureux de pouvoir dire : ce monopole est disparu, pour toujours, il faut l'es-
pérer, et tout porte à le croire.
Fatigués d'assister aux succès toujours croissants des pâcheurs de Gloucester qui,
chaque année, venaient à leurs portes, reeeuillir une moisson abondante, les pêcheurs
de la Nouvelle-Ecosse et du Nouveau- Brunswick se sont mis à l'œuvre. Aujourd'hui
ils font eux-mêmes cette pêche sur une grande échelle et en retirent de beaux profits,
ils peuvent avec orgueil montrer une belle flotte de fines goélettes qui, par la symétrie
de leurs lignes et leurs qualités nautiques, soutiennent avantageusement la comparai-
son avec les goélettes américaines réputées les meilleures du monde entier. Non seu-
lement possèdent-ils ces goélettes équippées avec le plus grand soin, mais ils ont
aussi adopté les engins de pêche les plus modernes et les plus améliorés, et ils ex-
ploitent cette industrie avec tout le tact et toute l'intelligence nécessaire au succès
d'une entreprise quelqu'elle soit, mais surtout indispensables pour la pèche au maque-
reau. Cette pêche, en effet, est difficile, précaire et incertaine. De deux goélettes,
parties ensembles du même port d'armement, l'une peut sillonner le golfe St. Laurent
en tous sens pendant plusieurs jours sans rencontrer un seul banc de poisson, tandis
que l'autre complétera sa cargaison dans une quinzaine et quelques fois en moins de
temps encore. Elle demande donc, de la sagacité, une vigilance de tous les instants
et une persévérance à toute épreuve — qualités qui distinguent nos pêcheurs des pro-
vinces maritimes, mais aussi faite avec ces conditions, elle est généralement heureuse,
donne do gros profits et est certainement digne de l'attention sérieuse de nos popula-
tions maritimes et des capitalistes de tous les pays,
Il est à espérer que la Province de Québec, qui jusqu'à ce jour n'a donné que peu
ou point d'attention à cette pêche aura aussi bientôt sa flotte de goélettes à maquereau.
Grand nombre d'amateurs et de pêclieurs américains, en venant exploiter cette
industrie chez nous, ont acquis, les uns de grandes fortunes, les autres une honnête
aisance : Nos concitoyens des Provinces maritimes imitant cet exemple, y trouve
une source précieuse de bons revenus. Québec ne pourrait-il faire la même chose ?
Les hommes d'afiTaires sont-ils moins intelligents, les pêcheurs moins habiles et moins
hardis ?
Ceux qui, à l'époque de la canicule, fuient les chaleurs et l'abmosphère vicié des
villes pour venir respirer à pleins poumons l'air pur et vivifiant du golfe St. Laurent,
et qui, généralement, prennent passage à bord du " Miramichi. " ou autre steamer
de la populaire " Compagnie des ports du Golfe," ont souvent rencontré dans leurs
visites aux Provinces maritimes, ces jolies goélettes de la Nouvelle-Ecosse et de l'Ile
du Prince-Edouard, et les ont aussi souvent prises pour autant de bateaux de plaisir
croissant dans le golfe, tant elles luttent entre elles de propreté et d'élégance, tant elle*
21
des
[irent,
amer
leurs
l'Ile
laisir
elle*
paraissent coquettes avec leurs mats élancés et leurs grandes voiles blanches. " Mais
nous dit le Dr. Fortin, si vous les approchez, vous reconnaissez bien vite votre erreur ;
car sur le pont de chacune d'elles, vous pouvez voir dix, quinze on vingt hommes acti-
vement occupés les uns à prendre du maquereau, les autres à saler et caquer le poison
déjà capturé ou à réparer les filets et autres engins de pêche. Ce qui frappe surtout le
visiteur, c'est l'ordre admirable qui règne à bord de ces bateaux-pêcheurs, nonobstant
que leur cales soient remplies de poisson et leurs ponts encombrés de barils, filets, sacs
de sel, lignes, etc.
Les " goélettes à maquereau " ont ordinairement une capacité de 60 à 100 ton-
neaux et sont montées par dix à quinze hommes péchant " à la part." Elles ont j)eu
de profondeur, mais, par contre, sont très larges et très élancées à la poupe et à la
proue ; ce qui leur donne un pont spacieux où peuvent se faire facilement les opéra-
tions du caquage et de la salaison. Les grandes voiles en coton qui les couvrent, leur
Eermettent de profiter de la moindre petite brise lorsqu'elles sont à la recherche de
ancs de poisson.
Pour la pêche au maquereau dans le golfe, l'on se sert de la ligne et du hameçon,,
du filet traînant et de la seine-bourse. Le filet fixe, la seine ordinaire de grandeurs
diflFérentes, les trappes, nasses, etc., sont en usage le long des côtes, dans les anses,
havres et baies où se fait cette pêche.
La pêche au hameçon supix)se de l'appât : avant de quitter leur port d'armement,
les pêcheurs se pourvoient de plusieurs barils d'un petit poisson, très gras, appelé en
anglais " poggie." Ce poisson, haché menu par un instrument resseaiblant assez à une-
machine à couper les légumes, sert à attirer le maquereau à la surface de la mer et
à amorcer les hameçons.
Les filets traînants, variant en dimensions de vingt à trente brasses de longueur
et de quatre à six de profondeur, s'attachent au nombre de trente, quarante, cinquante,
etc., à l'arrière ou à l'avant — suivant les circonstances— d'un bateau qu'on laisse aller
à la dérive.
Avec la seine-bourse, l'on entoure rapidement les bancs de maquereau que la dif-
fusion du " poggie " a attiré à la surface de la mer, et lorsque le filet est jeté, on plisse
la partie inférieure, en forme de bourse, au moyen d'un système ingénieux de cor-
dages, anneaux et poulies. Le filet ainsi plissé tient enfermé le maquereau que l'on
prend à loisir et à mesure que les hommes de l'équipage salent et encaquent.
Le filet fixe est attaché le soir à l'entrée d'un havre ou d'une baie où le macjue-
reau abonde, et le matin suivant le pêcheur va prendre le poisson qui s'est maillé
pendant la nuit.
La seine ordinaire dont les dimensions varient de cinquante à deux cent cin-
quante brasses de longueur sert à entourer les bancs de poisson qui approchent du
rivage. Un des bouts de la seine est confié à un certain nombre d'hommes sur le
rivage et le bateau contenant le filet fait aussi rapidement que possible le tour du
banc de poisson. Cette opération terminée, les hommes du bateau sautent à terre
avec l'autre bout de la seine ei l'on tire le filet aussi près que possible de la rive. Sui-
vant la grandeur de la seine dont on fait usage, quatre cent, mille, deux mille barils
de maquereaux sont capturés d'un seul coup de filet.
Les trappes, nasses, etc., varient de formes presqu'à l'infini, suivant les besoins <lu
moment, les circonstances des lieux et l'esprit plus ou moins inventif de celui qui en
fait usage.
De tous les poissons qui fréquentent les eaux canadiennes, le maquereau est un
des plus appréciés. On le rencontre au large des côtes de la Nouvelle-Ecosse, dans lu
Baie de Fundy, dans le Détroit de Canso, mais nulle part plus abondant que dans lo
golfe St^Laurent, surtout autour de l'île du Prince-Edouard, dans la Baie des Chaleurs
et aux îles de la Madeleine.
Les produits de notre pêche au maquereau sont encaqués en saumure pour la plus
grande partie. L'on en exporte aussi à l'état frais ou conservés en boîtes de la n ême
manière que le homard. Nos meilleurs marchés sont les Etats-Unis, quoique la
22
<jrrande-Bretagne et les Antilles nous en achètent aussi une certaine quantité. La
vente de ce poisson a rapporté, en 1883, un million deux cent cinquante mille piastres,
mais cette somme pourrait être considérablement augmentée, car il y a place encore
pour un bon nombre d'autres goélettes et pour des milliers de bras.
IX
PÊCHE Ai: HOMARD.
Encombrer tout genre d'yiaires, tout commerce qui semblent devoir être rémuné-
rateurs, telle est la tendance générale dans ce siècle de concurrence. La mise du
homard en boîtes n'a pas échappé à cette règle.
" Il y a à peine dix ans, nous dit M. Hunter Duvar, inspecteur des pêcheries de
l'Ile du Prince-Edouard, dans son rap|)ort de 1879, lorsque nous pouvions avoir, deux
ou trois homards pour un sou, un homme vint du Nouveau-Brunswick à l'Ile du
Prince-Edouard et y fonda une fabrique de conserves de homard. Attirés par ses
«uccès, d'autres personnes mirent des capitaux dans cette industrie qui augmenta
graduellement jusqu'à il y a trois ou quatre ans, époque à laquelle, prenant un essor
f)lus rapide elle se développa en d'immenses proportions."
L'Ile du Prince-Edouard prépara pour les marchés :
în
1871....
6,711 boîtes de
conserves de homard
1875....
151,248
((
li
1876....
352,676
<(
«
1877....
663,900
'>■
K
1878....
1,649,800
'<
«
1879....
2,272,825
«
«
1880....
3,551,000
i(
(<
1881....
5,200,000
((
«
1882....
6,300,000
«
«
C-ette môme Province qui ne comptait qu'une fabrique en 1871, en possédait, dix
ans après, en 1881, cent vingt en pleine opération.
La même progression ascendante s'est manifesté au Nouveau-Brunswick et à la
Nouvelle-Ecosse.
En 1870, au Nouveau-Brunswick, le propriétaire de la seule fabrique alors en
opération en cette Province, mit sur le marché, environ vingt mille boîtes de homard.
Douze ans après, en 1882, au delà de six millions de boîtes partaient du Nouveau-
Brunswick pour les Etats-Unis et l'Europe.
La Nouvelle-Ecosse qui ne pouvait offrir en 1870 que trente mille boîtes en expé-
diait cinq millions en 1883.
Québec est loin derrière les Provinces-Sœurs dans l'exploitation de la pêche au
homard. Elle n'a livré au commerce que huit cent mille boîtes en 1883.
En additionnant les chiffres ci-der jus, nous trouvons que la pêche au homard
presqu'entièrement inconnue au Canada en 1870, fait aujourd'hui prospérer au delà de
six cents fabriques qui, l'année dernière, ont fourni à nos exportations un contingent
de dix-huit millions de boîtes, valant trois millions de piastres : presqu'autant que
les produits de la pêche au hareng et de la pêche au maquereau mis ensemble.
Ces dix-huit millions de boîtes, à trois homards pour chaque boîte, représentent
<inquante-quatre millions de homards capturés dans les eaux canadiennes en 1883. Le
nombre total de ces crustacés pris chaque année en Angleterre n'est que de trois
millions.
Cette énorme progression dans la prise annuelle, tout en faisant voir l'étendue et
la richesse de nos pêcheries à homard, noua signale en même temps le danger d'une
■
La
ires,
core
une-
8 du
s de
leux
) du
' ses
enta
issor
23
production excessive : deux faits qui démontrent la nécessité d'économiser à temps et
de perpétuer cette resource que la Province a mise à notre disposition.
M. W. F. Witcher, qui pendant plusieurs années a présidé notre Département de»
Pêcheries, dit " qu'il n'est rien de si facile que d'épuiser promptement des pêcheries de
crustacés, (sheil fisheries^ mais aussi rien de plus difficile que de les faire revivre; et
le gouvernement de la Confédération, convaincu de ce fait, a pris les mesures néces-
saires pour prévenir sur nos côtes toute pêche au homard aveugle et non raisonnée.'^
Si la pêche excessive que l'on fait maintenant, se continuait sans être soumise à
de sages règlements, la prospérité des propriétaires de fabriques et autres intéressés,
grandirait encore pendant quelque temps et le pays semblerait bénéficier du développe-
ment rapide de cette industrie, mais la réaction viendrait nécessairement et serait
d'autant plus forte que nous aurions été moins prudents.
Il me paraît presqu'inutile de mentionner que cette industrie tient une place
importante dans l'économie générale de la Confédération. Chacun comprendra que
l'érection des bâtisses nécessaires à l'exploitation, les ouvrages en fer ot en ferblanc, la
construction des bateaux, la coupe du bois de chauffage, etc., etc., font circuler de
larges sommes d'argent parmi notre population maritime et donne de l'ouvrage bien
payé à des milliers de bras, hommes, femmes et enfants.
L'Angleterre est notre meilleur marché pour le homard. Elle nous en achète tous
les ans environ douze millions de boîtes. La balance est repartie entre les Etats-
Unis, la France, l'Allemagne, le Brézil, les Antilles et quelques autres contrées d©
l'Amérique du Sud.
PECHE AUX HUITRES.
dix
la
en
ard.
eau-
xpé-
au
lard
à de
»ent
que
tent
Le
rois
et
une
Un mot de la pêche aux huîtres trouve ici naturellement sa place. Ce mollusque,
bien connu des gourmets de tous les pays, est encore assez abondant au Canada. En
Europe, sa rareté le fait vendre à un prix presque fabuleux, et les riches seuls peuvent
se permettre de temps à autre une bonne soupe aux huîtres.
Nous avons ici la " Malpèque," la " St. Simon," la " Caraquet" et autres variétés
qui empruntent leurs noms aux localités où se trouvent situés les bancs sur lesquels
on les pêche.
Cette pêche se pratique surtout sur les côtes et dans les baies de l'Ile du Prince-
Edouard et du Nouveau-Brunsvvick et rapporte annuellement une somme ronde de
deux cent mille piastres.
PECHE AU LOUP-MARIN.
Les troxipeatix de loups-marins qui fréquentent le golfe Saint-Laurent et l'océan
Atlantique, arrivent ici dans le mois de novembre. Ils viennent dans le golfe, princi-
palement par le détroit de Belle-Isle. Ils se tiennent près des côtes du Labrador et de
Terreneuve, pénétrant dans toutes les baies, rasant la rive en doublant les jxjintes. Us
aiment beaucoup à s'étendre sur le sable du rivage ou sur les roches plates pour se
chauffer aux rayons du soleil ; mais au moindre bruit, et surtout s'il aperçoivent les
pêcheurs, ils plongent et disparaissent aussitôt.
Le loup-marin est d'une grande valeur, non seulement à cause de sa graisse qui
produit une huile supérieure à celle de la baleine, mais aussi pour la peau qui se tanne
facilement et fait un excellent cuir.
Les premiers marins qui visitèrent le golfe Saint-Laurent, comprirent de suite
l'importance, au point de vue commercial, do cette pêche qui commença aussitôt après
la découverte du Canada, Si nous ajoutons foi aux récits de maints voyages faits sur
24
ïa côte du Labrador pondant le siècle dernier, un nombre immense de loups-marins
furent alors tués.
Dans ce temps, comme aujourd'hui encore, l'on se servait de filets pour la capture
■de ces amphibies- Ces filets sont en cordes de chanvre, très fortes quoique fines.
Leurs mailles mesurent huit pouces carrés et laissent entrer la tête de l'animal. Quel-
•ques-uns ont au delà de six cents pieds de longueur sur une profondeur de soixante
pieds.
L'époque du passage du loup-marin près des côtes étant généralement connu, les
iilets sont tendus quelques jours auparavant. Un des pêcheurs est placé comme sen-
tinelle sur un rocher avancé et donne avis de l'approche des troupeaux. Aussitôt qu'ils
sont entrés en dedans de la ligne des filets, le signal est donné et les pêcheurs se
hâtent de lever, à l'aide d'un fort cabestan, un filet retenu au fond de l'eau, à l'entrée de
la pêche, par des poids en plomb. Ce filet ferme l'ouverture par laquelle les loups-
marins sont entrés dans l'enclos et les emprisonnent. Alors les pêcheurs sautent dans
leurs bateaux, frappent l'eau de leurs avirons et effraient par tous les moyens possibles
«es animaux qui, cherchant une issue pour s'enfuir, plongent et se prennent dans les
filets dont les mailles sont tenues ouvertes par des câbles placés d'une manière parti-
•culière à leur partie supérieure inférieure.
Cette pêche se pratiquant en novembre et en décembre, est très ardue en raison de
la sévérité du climat en cette saison de l'année.
Les loups-marins, gelés quelques minutes après avoir été retirés de la mer, sont
placés dans de grands hangards où ils demeurent jusqu'à ce que le soleil du printemps
les ait assez amollis pour permettre de les coupei par morceaux et de faire fondre leur
^graisse.
L'on ne se borne pas à attendre l'entrée des loups-marins dans les baies pour les y
prendre au moyen de filets, mais on va leur faire la chasse le printemps sur les champs
de glace qui couvrent le golfe Saint-Laurent et le nord de l'océan Atlantique. Cette
dernière manière de les capturer est la plus pratiquée et aussi la plus productive.
L'on équippe pour cette chasse des voiliers fortement construits et des bateaux-à-
vapeur qui partent au commencement de mars afin de rencontrer ces aniphibies sur
les champs de glace, car une fois qu'ils ont pris la mer, il est inutile de les poursuivre
et ils peuvent défier les chasseurs les plus habiles.
Les pêcheurs du Labrador et des îles de la Madeleine sont les seuls qui en Ca-
nada s'occupent de cette pêche qui certainement paierait de gros dividendes à ceux
qui y placeraient des capitaux.
Terreneuve fait la chasse aux loups marins sur une grande échelle. Elle y em-
ploie dix mille hommes. Les capitalistes, bien connus pour leur esprit d'initiative et
d'entreprise, ont remplacé les voiliers, autrefois en usage, par une flotte de magni-
fiques bateaux-à-vapeur qui ont sur les goélettes l'avantage de faire et de compléter
deux voyages au lieu d'un.
Malgré les dépenses très grandes que nécessite l'exploitation de cette industrie,
les produits sont tellement rémunérateurs, que des hommes compétents et expéri-
mentés affirment que les capitaux qu'on y engagent ne peuvent rapporter moins de 25
p. c. mais le plus souvent donnent 50 et 60 p. c.
Chaque printemps les journaux nous annoncent que les steamers de Terreneuve
sont revenus de leur campagne, les uns avec dix, quinze et vingt mille loups marins,
les autres avec vingt-cinq, trente et quarante mille. Or un loup marin, huile et peau,
vaut en moyenne trois piastres.
En 1883 les pêcheurs de Terreneuve ont tué quatre cent mille de ces animaux ;
valeur : un million cent vingt mille piastres. Les pêcheurs canadiens n'en ont tué
<iue soixante-et-quinze mille et pourtant cette chasse serait aussi productive ici qu'à
Terreneuve si nos hommes d'affaires voulaient s'en occuper.
25
XI
PÊCHERIES INTÉRIEURES.
PÊCHE AU SaUMOX.
Moindres en importance, au point de vue commercial que les pêches maritimes,
les pêcheries intérieures du Canada sont néanmoins d'une grande valeur au point d&
vue économique.
Faisant abstraction des trois millions de piastres qu'elles ajoutent annuellement
au chiffre de nos exportations, elles sont une source presqu'inépuisable, où ceux (jui
habitent les rives de nos grands lacs et de nos principales rivières vont chercher partie
de leur nourriture quotidienne et le poisson nécessaire à l'alimentation de nos mar-
chés de l'intérieur.
Pêche au saumon. — Au premier rang parmi les poissons d'eau douce, se tient le
saumon, qui préparé à toutes les sauces, s'étale sur l'humble assiette du pauvre de-
même que sur le somptueux couvert du riche.
Nos rivières, autrefois célèbres par l'abondance dn saumon qu'elles contenaient,
commencent à s'épuiser par suite d'une pêche non raisonnes et du défaut de lois pro-
tégeant ce poisson dans les premières années de la découverte de ce pays.
L'on serait peut-être porté à se demander comment il se fait que r 'aintenant,.
pendant la dernière décade, par exemple, en dépit des sages règlements limitant la
durée de la pêche au saumon, prescrivant la dimension, le nombre et le genre des-
filets dont on se servira pour la capture de ce poisson ; en dépit des efforts tentés
par le gouvernement pour ramener l'abondance dans nos rivières; quoique nous dé-
pensions, tous les ans, des milliers de piastres pour aider à la propagation naturelle du
saumon par la pisciculture ; en présence du fait que des millions et des millions de
jeunes poissons, partent chaque été de treize établissements de pisciculture que nous
maintenons, pour être distribués dans les rivières ; comment il se fait, dis-je, qu'il n'y
a pas une augmentation marquée dans la quantité annuelle de saumon capturé ?
Quoique nos côtes et nos rivières soient aujourd'hui comparativement bien gar-
dées, quoique les officiers nommés pour faire exécuter nos lois de pêche, fassent bien,
^rès-bien, leur devoir, cependant, je suis humblement d'opinion <]u'uae protection i)lu»
étendue et plus efficace encore est nécessaire.
Le nombre des gardiens pourrait être augmenté et de bons salaires donnés à cha-
cun d'eux afin de leur permettre de donner tout leur temps aux devoirs de leur charge.
Nous devrions enfin, par tous les moyens possibles, empêcher l'œuvre destructrice des
nombreux maraudeurs (]ui tous les automnes se rendent dans nos meilleures rivières
à saumon et tuent ces poissons par milliers dans les fosses où il« montent pour frayer.
Je ne suis certes pas l'ennemi de la i)êche au saumon à la mouche, ou d'aucun
autre genre do sport. Je mo rappelle même avec beaucoup de plasir les journées agré-
ables, les heures délicieuses que j'ai passées à faire cette pêche dans quelques-unes de
nos magnifiques rivières ; mais je ne puis m'eiupêcher de penser et de dire que la
saison pour la pêche au saumon à la mouche est, à, mon avis, trop longue.
Je suis intimement convaincu que si le pêcheur à la mouche était obligé d'empa-
queter ses lignes le jour même où le pêcheur au filet est forcé par la loi de laisser
un libre passage au saumon, nous en retirerions de grands bénéfices.
Ceux pour qui la pêche au saumon est un moyen de subsistance et qui fournissent
A nos exportations le plus fort contigent de ce poisson, sont obligés, par une loi variant
avec les différentes Provinces, dedever leurs filets à une époque donnée : à la fin <le
juillet dans la Province de Québec, un peu plus tard dans la Nouvelle-Ecosse et le
Nouveau-Brunswick ; tandis que l'on permet au pêcheur à la mouche, qui n'a d'autre
objet en vue que son amusement, de pêcheur jusqu'à la fin de septembre, même jus-
qu'au 15 octobre.
26
N'y a-t-il pas là une anomalie ? La conséquence d'un tel état de choses, est que
les saumons qui échappant aux filets, montent dans les rivières pour y reproduire
leur espace, tombent victimes de l'abileté du pêcheur à la mouche. Des centaines de
«amons qui en produiraient des milliers d'autres sont ainsi détruits. En résumé : qu'un
nombre suffisant de gardiens bien payés soient nommés pour protéger nos rivières
contre les dépradations périodiques des êeumeurs ; que la saison pour la pêche à la
mouche soit la même que celle pour le pêche aux filets ; que l'on redouble de vigilance
et d'énergie pour faire exécuter les lois et les règlements prohibitifs et nous ne serons
peut-être pas obligés d'encourir des dépenses élevées, tous les ans pour la reproduc-
tion artificielle, dont les résultats pratiques ne sont pas encore bien prouvés.
De ce que je viens de dire, il ne faudrait pas conclure néanmoins que nos pêcheries
à saumon sont épuisées. Loin de là.
Comparées à ce qu'elles étaient il y a un demi siècle, leur abondance a diminué,
mais elles conservent Une importance considérable, ainsi que je le prouverai bientôt
par des chiflTres.
Elles sont encore une source de bien être, même de richesse, pour une bonne partie
'de notre population maritime et grand membre de riches gentils-hommes,, tant d'Eu-
rope que d'Amérique, viennent chaque année, pendant la belle saison, y goûter les
plaisirs du sport.
Les Etats-Unis achètent presque tout notre saumon frais et saumuré- Celui con-
servé en boîte (tins) est expédié sur les marchés anglais.
L'on a déjà essayé, avec succès, le commerce du saumon frais entre le Canada et
l'Europe et il n'est pas douteux que la qualité exportée en cet état augiïientera main-
tenant tous les ans et à mesure que la science aura trouvé des moyens de transport de
plus en plus économiques.
Dans un avenir assez prochain, lorsque nos villes de l'intérieur seront par la cons-
truction de voies ferrées, mises en communication facile et rapide avec nos principaux
endroits de pêche, le commerce du saumon frais prendra certainement des proportions
inconnues jusquici.
De toutes les Provinces de la Confédération, la Colombie- Anglaise est la pltis cé-
lèbre pour ses pêcheries au saumon, et dans l'espace de quelques années, le développe-
ment de cette industrie y a pris des proportions presque colosales.
La prise qui en 1879 n'était que de trois millions de livres, s'est élevée jusqu'à
douze millions en 1882, montrant une augmentation de neuf millions en trois ans.
*' Et pourtant," nous dit M. A. C. Andersen, inspecteur des pêcheries de la
Colombie, " vu le manque de bras, occasionné par la demande toujours constante et
l'engagement des ouvriers sur les chemins de fer et ailleurs, les propriétaires des
fabriques pour la mise du saumon en conserves, dans cette Province, malgré l'abon-
dance du poisson, n'ont pu livrer au commerce les quantités qu'ils auraient pu livrer
dans d'autres circonstances."
Les chiff'res du rapport de la marine et des pêcheries nous disent qu'il a été pris»
dans les rivières du Canada ou à leur embouchure, en 1882, quinze millions, deux cent
vingt mille, cent quarante-six livres de saumon. Supposant à chaque pièce une pesan-
teur moyenne de quinze livres, ce qui n'est pas exagéré, nous avons un million,
trente-quatre mille, six cent soizante et seize saumons. Et les statistiques de 1883
constateront certainement encore une augmentation sur les chiffres ci-dessus.
J'avais donc raison de dire que la pêche au saumon était encore loin d'être épuisée
au Canada. Aucun pays au monde peut se vanter de posséder des pêcheries de cette
abur.
Espérons que les pêcheurs de la Colombie seront assez sages pour économiser par
> :;e pèche judicieuse, les richesses qu'ils possèdent dans leurs pêcheries au saumon, et
qu ils ]u> seront pas, comme dans les autres Provinces, obligés plus tard de faire des
efforts coûteux pour arrêter leur déclin ou empêcher leur épuisement. Cette réflection
f
27
J
m'est suggérée par le fait que l'on parle déjà de jeter les fondements d'un établissement
de pisciculture sur les bords de la rivière Fraser, une des meilleures de cette Province.
Nous remarquons dans le rapport du commerce de 1882, qu'un capital d'au delàde>
deux millions de piastres et sept mille hommes étaient employés à l'exploitation de la.
pêche au saumon dans la rivière Colombie seule.
" A part la quantité de saumon frais mis on conserves pour l'exploitation l'année
dernière, dans la Colombie-Anglaise, au delà de cinq mille barils du même poissoiv
salé ont été encaqués."
" La demande pour le saumon en saumure semble augmenter rapidement et il
n'y a aucun doute que si les pêcheurs veulent donner à sa préparation tout le soin et
toute l'attention qu'elle requiert, le saumon salé de la (.blombie aura bientôt une
réputation universelle. Cette branche d'industrie exigeant moins de capital que la
mise en boîtes, oflre un large champ aux efforts industrieux des pêcheurs dont les
moyens sont restreints."
" La grande valeur commerciale des pêcheries de la Colombie est maintenant
mieux connue et tout porte à croire à leur rapide développement."
" L'énergie qui préside à la construction du Chemin do fer Pacifique Canadien,
fait présumer qu'avant longtemps, nous serons en communication directe avec le.?
provinces de l'Est, et il est facile, dès à présent, do concevoir quel essor va donner si.
toutes les industries de la côte du Pacifique le parachèvement de cette importante voie
ferrée." {A. C. Avderson. Rapport de lHii2).
XII
PECHES A LA TRUITE, AU POISSON BLANC ET AUTRES.
La truite aborde dans nos rivières et dans nos grands lacs. Nous en avons une
grande variété. Les meilleures sont la truite de mer et la truite saumonée.
C'est sur les grands lacs de la Province d'Ontario que la pêche à la truite, au ix)isson.
blanc, etc., se fait sur la plus grande échelle.
Ces lacs, que l'on a avec raison appelés mers intérieures, sont peut-être les plus-
grands du monde entier.
Le lac Supérieur seul, couvre une superficie de trente et un milles carrés et l'éten-
due des lacs Erie, Huron et Ontario est égale à cinquante deux milles carrés.
Plusieurs rivières importantes, sillonnant l'intérieur, viennent s'y jeter, oc ces
rivières, aussi bien que les lacs eux-mêmes, sont remplies de différentes espèces de
poissons recherchés pour leur saveur et délicatesse.
Le pêcheur d'Ontario peut choisir entre la truite saumonée pesant jusqu'à quatre-
vingts livres, le poisson blanc estimé à l'égal du saumon, l'esturgeon, le brochet, ledoré^
la perche, le maskinongé, etc., etc.
La pêche sur nos grands lacs se fait au moyen de filets fixes, en coton, très fins et
très solides, nasses, trappes, etc., et avec des bateaux à voiles, ouverts, de vingt à trente
pieds de quille, ou sur des petits bateaux-à- vapeur appelés remorqueurs yis/tmgr tugs.
Deux beaux modèles de ces petits bateaux-à-vapeur, dono l'usage s'introduit rapi-
dement parmi les pêcheurs de la Province d'Ontario, figuraient, dans la galerie cana-
dienne, à l'exposition des pêcheries de Londres en 1883 et y ont attiré l'attention spé-
ciale des visiteurs.
De cinquante pieds de long sur douze de large, généralement, ces remorqueurs-pê-
cheurs sont la propriété de marchands de poissons qui mettent à bord des hommes à
salaires fixes, ne partageant aucunement dans les profits de la pêche.
Dans certains cas de prise plus qu'ordinaire, les propriétaires donnent une prime
aux pêcheurs à titre d'encouragement.
28
Les avantages que possèdent ces bateaux-à-vapeur sur les voiliers sont faciles à
concevoir.
D'abord, si le temps est trop calme où la mer trop houleuse, le bateau à voiles reste
amarré au rivage, mais le steamer gagne facilement le» Tonds de pêche, et tandis que la
moitié de son équipage est occupée à lever les filets mis à l'eau le jour précédent, l'autre
moitié jette de nouveaux filets et sauve ainsi un temps précieux.
Chaque steamer possède une machine, espèce de moulinet, servant à lever les filets
«t à les faire sécher en même temps.
Des réfrigérants — refrigerators — de petites dimensions, montés nur quatre roues en
fer et allignés sur le pont du bateau, reçoivent le poisson au fur et à mesure qu'il est
retiré de l'eau et aussitôt les filets levés, l'on se rend à toute vapeur à la gare de chemin
<\e fer la plus voisine, les boîtes réfrigérantes sont roulées du bateau sur le convoi, prêt
à. partir, et le poisson expédié frais, sans transbordement et sans manipulations, aux
Etats-Unis et sur nos marchés de l'intérieur.
A part quatre millions cinq cent mille livres de truite, poisson blanc, etc., r^ne les
pêcheurs d'Ontario ont ainsi expédié frais aux marchés, en 1882, ils ont mis en saumure
©t encaqué, cinq mille soixante-et-dix-neuf l)arils de poisson blanc, neuf mille sept cent
cinquante-huit barils de truite et qnarante-et-un mille trois cent soixante barils de
brochets, esturgeon, maskinongé, perche et autres poissons ; total, cinquante six mille
-cent quatre-vingt-dix-sept barils de toutes variétés.
Si nous multiplions ce dernier chiffre 56.197, — par 200, nombre de livres qu'il y a
dans chaque baril, nous avons onze millions, deux cent trente-neuf mille, sept cent
livres, qui ajoutées aux quatre millions cinq cent mille livres de poisson frais plus haut
mentionnées, nous donne un grand total de quinze million?, sept cent trente-neuf mille
^cpt cent litres pour l'année 1882.
Je ferai remarquer ici que la population de la Province d'Ontario est composée
surtout de cultivateurs et de fermiers, et que comparativement à leur étendue et à leur
importance, des pêcheries des lacs occupent peu de bras.
Nous pouvons avec raison aftirmer (]u'elle sont susceptibles d'un bien plus grand
•développement, que leurs produits annuels seraient doubles et même triples si l'on y
consacrait plus de temps et si l'on y engageait un capital plus élevé.
Outre les produits de la pêche des lacs dans Ontario, nous avons, dans les Pro-
vinces maritimes, la pêche à l'éperlan, qui durant les mois d'hiver emploie plusieurs
centaines de personnes et dont la valeur annuelle est de $200,000-00
La pêche à l'alose, valeur annuelle 185,000 .00
" l'anguille " 80,000.00
" " la sardine, " 175,000.00
" " au winnonish " 50,000.00
et plusieurs autres encore dont l'énumération serait trop longue.
En résumé, quoique leurs produits se vendent à un prix relativement bas, les
pêcheries intérieures du Canada, sans parler de la consommation locale, ont donné au
commerce, en 1883, une somme de quatre millions de piastres.
Il est un point sur lequel je désire attirer tout particulièrement l'attention du
lecteur. C'est l'extrême facilité de prendre ''u poisson qui existe dans toutes les
Provinces de la Confédération. Ce fait doit être un puissant motif d'encouragement
pour les membres de la classe pauvre d'Europe qui désirent é migrer au Canada.
Ils peuvent être sûrs d'avance que dans n'importe quelle partie de la Puissance
ils fixeront leurs demeures, ils trouveront dans les pêcheries un moyen certain de
subsistance et une nourriture saine et abondante qui ne leur coûtera souvent que la
peine de la receuillir.
A la Nouvelle-Ecosse, au Nouveau-Brunswick, à l'Ile du Prince-Edouard, au Cap-
Breton, dans presque toute la Province d'Ontario, dans toute la partie Est de la Pro-
vince de Québec, à la Colombie-Anglaise, au Nord-Ouest, l'émignant trouvera à un prix
,
29
nominal des terres bonnes et fertiles ; et dans tous ces endroits, il pourra, ou mener
de front la culture et la pèche ou seulement faire la pêche comme aide à sa culture ;
et avec de l'énergie, de la sobriété et de l'économie il arrivt
l'aisance, même à la prosp«''rité.
vera en i)eu de temps a
XIII
SYSTÈME TÉLÉGRAPHIC'E ET BULLETINS DE PÊCHE.
Il est des hommes qui semblent se dévouer entièrement au progrès et à l'avance-
ment de leur pays ; qui consacrent à cette œuvre toute leur intelligence et toute leur
énergie, «'imposant une somme énorme de travail et ne se laissant décourager ni par
les difficultés, ni par les obstacles.
L'Honorable P. Fortin, député de Gaspé aux Communes du Canada, bien connu
dans notre monde politique, est du nombre de ces patriotes, qui. Dieu merci, ne sont
pas rares parmi nous.
Homme instruit et pratique, ayant consacré plusieurs années de sa vie à l'étude
des questions touchant aux intérêts des pêches maritimes, connaissant leur impor-
tance comme richesse nationale, le Dr. Fortin ne laisse échapi)er aucune occasion de
travailler à leur développement.
Nous devons à ses efforts énergiques et à sa persévérance les communications
télégraphiques établies tl grands frais par le gouvernement canadien pour venir en
aide à la navigation et aux pêcheries.
Cette ligne télégraphique qui comprend 27,000 milles carrés de nos meilleurs fonds
de pêche, reliant entre elles nos stations de pêche les plus importantes, communiquant
à tout un système de sémaphores, phares, etc., a été jugé le plus parfait actuellement
existant dans le monde entier, par les jurés de l'Exposition Internationale de Londres
en 1883, et a eu les honneurs d'une médaille d'or et d'une mention spéciale.
Contribuant dans une large mesure à rendre plus sûre la navigation du Golfe et
du Fleuve St. Laurent et à faire éviter aux marins les nombreux dangers qu'ils y ren-
contrent, ce système télégraphique a eu pour résultat immédiat de faire réduire
considérablement le taux des primes d'assurance et d'encourager le commerce géné-
ralement. Aux pêcheurs et aux pêcheries, il est aussi très utile et d'une grande
importance.
Tous les jours, dans chaque bureau, sont affichés et distribués des bulletins indi-
quant la température probable pour les vingt-quatre heures à venir, la présence de la
BOITTE — bait — dans certaines localités, le mouvement des bancs du poisson, la quantité
des différentes espèces capturées, etc., etc.
M. W. F. Witcher, ex-commissaire des pêcheries de la Puissance, consulté sur
l'à-propos d'établir une ligne télégraphique le long de nos côtes maritimes, écrivait
en 1876 :
" L'xeploitation d'une industrie aussi importante que celle de la pêche, se faisant
sur une étendue de neuf cents milles de côtes, est nécessairement accompagnée de
nombreux dangers et de fréquents mécomptes."
" Il faut souvent exposer sa vie et sa propriété. Le succès dépend beaucoup de la
température, des saisons et de diverses autres causes. Plusieurs espèces de poissons,
d'habitudes errantes, sont excentriques dans leurs mouvements, abondent aujourd'hui
dans une localité d'où ils seront complètement disparus le lendemain. A vingt milles
d'un établissement de pêche important, sur une côte aride et inhabitée, le poisson
peut donner et séjourner plusieurs jours sans qu'il soit possible aux pêcheurs voisins
de s'en assurer. A d'autres endroits le poisson est trop abondant, les pêcheurs, en
trop petit nombre, ne peuvent suffirent à sa capture et à sa préparation ; tandis que
dans un poste voisin, les hommes ignorant ce fait, sont les bras croisés et peuvent à
peine prendre assez de poisson pour leur provision d'hiver."
30
" Des bateaux-pêchours reviennent souvent vides au port, de certains fonds de
pêche, où un peu auparavant ils auraient trouvé le poisson en abondance. D'autres
perdent la meilleure partie de la saison de poche à croiser le golfe à la recherche des
bancs de poissons, C^nendant nos mors sont remplies de poissons qui approchent
certains points ignorés des côte"? et fréquentent les haut-fonds."
" Il doit être possible à l'esprit de progrès moderne de trouver un moyen d'obvier
à tous ces inconvénients et le plan qui me paraît le plus exécutable et devoir mieux
rencontrer le but proposé, est l'établissement d'une ligne télégraphique reliant entre
elles nos meilleures places de pèche."
" L'idée d'établir le long des côtes des stations d'où l'on peut observer les mouve-
ments du poisson et en donner avis aux pécheurs a déjà eu un commencement d'exé-
cution en Norvège, on Hollande, en Allemagne, en Sicile et sur la côte de Cornwall ; et
dans tous ces endroits ces observations ont rendu de grands services aux pêcheurs et
ont aidé beaucoup au développement des pêcheries."
"Je ne doute nullement que l'établissement d'une ligne télégraphique serait très
avantageuse aux pêcheurs canadiens. L'existence d'une telle ligne encouragerait les
capitalistes, inspirerait plus de confiance à ceux qui journellement s'exposent aux
fatigues et aux dangers de la pêche et nous permettrait indubitablement d'augmenter
la production de nos pêcheries et le chiffre de nos exportations do poisson."
XIV
CONCLUSION.
Je ne puis mieux terminer cette étude, qu'en citant quelques lignes de M. P. L.
Simmons dans son intéressant ouvrage : " The commercial prodwts of the sm."
" Les produits que la mer fournit au commerce sont plus nombreux et plus im-
portants que le croient généralement ceux qui n'ont pas fait une étude spéciale de
cette question.
" La capture de la morue, du hareng, du maquereaii, du saumon, delà sardine, du
loup-marin, et autre poisson est d'une immense valeur pour une grande partie du
monde civilisé et emploie plusieurs centaines de milles personnes. L'huile que l'on
obtient de la graisse de la baleine, du loup-marin, du marsuin, du requin, etc., et du
foie de la morue, sert à l'éclairage , à la médecine et à l'industrie. Les arts et les ma-
nufactures tiennent dans plusieurs des parties du poisson leur matière première. Les
peaux de loup-marin, de marsuin et de requin, font de bon et excellent cuir. Nous
obtenons une très bonne colle de la vessie natatoire de plusieurs des poissons. Les
rognes de morues et autres, sont non seulemnt un met délicat et rechercher, mais
offrent aussi un excellent appât pour certaines pêches. Un guano très apprécié est
fait avec les entrailles et les débris de poisson de toutes espèces. "
" La mer est plus abondamment pourvue d'êtres animés que la terre. Dans toutes
les parties du monde entier, une côte aride et inhabitée, contient souvent et nourrit,
dans un espace donné, plus de poissons et d'animaux aquatiques qu'aucun autre
endroit. "
" La mer est remplie d'animaux de toutes sortes et chaque couche d'eau semble,
pour ainsi dire, posbMer une espèce qui lui est particulière, depuis les plus grands jus-
qu'aux infiniment petits, depuis l'immense baleine, la morue, le requin, jusqu'aux
mollusques crustacés et insectes microscopiques. La mer, les lacs, les rivières ont
chacune leurs espèces différentes. "
" L'Océan a aussi les plantes marines, les unes naissant et vivant au fond de la
mer, les autres flottant à la surface, jetées au rivage par les vagues, et toutes jouant
un rôle particulier dans l'économie générale. "
" Jusqu'ici les diverses populations du globe ont donné plus d'attention à l'agricul-
31
ture aux insJustries minières, lorestièros et antres (in'à l'exploitation de leurs richesses
mantnnes Quelques nations la Chine par exemple, s'occupent depuis lotiRtomps de
retirer le plus de profits possibles des profits do la mer ; plusieurs contrées de l'EuroDe
exploitent aassi certaines pèches sur une grande échelle, mais ce n'est cnie depuis peu
de temps qne l'on a adopté un système régulier d'exploitation et que l'on a aoDelé la
science en aido à la pratique. " x i a «.pin^n m
1 ^'I^^ pisciculture, Vaquiculturc, VostrciciUturc, le transport des petits poissons d'une
isfoncl """^*" ^'^'^"'^'^"^ °"^''''®' ^°"'' "^'"^^ '^'^''' '1"® q»el(iues aimées d'ex-
" T,9"te« lef nations à la tète du progrès de la civilisation et du commerce, et en
particulier les Anglais, les Français, les Hollandais et les Américains, tiennent les
produits de la mer pour aussi importants que ceux de la terre."
♦«, /' S^^i® question de pêche et de pêcheries est donc pleine d'actualité, et tout travail
u,wf ^^^' T' renseignement de nature à ftiire connaître davantage leur valeur et
leur étendue, devrait être favorablement accueilli du public ; car leur importance n'est
pas seulement en raison des richesses immenses qui peuvent être tirées du fond de la
mer, sans, apparemment, en épuiser la source, mais parce qu'elles sont une école à
nulle autre pareille pour un grand nombre d'hommes solides, aguerris contre les
lîr.Sif» jiT ^" commerce en temps de paix et parmi lesquels la patrie trouvera
de vaillants défenseurs en temps de danger national."
Je désire sincèrement et j'ai l'espoir que nos hommes publics, de même nue nos
capitalistes, donneront à cette importante question toute l'attention qu'elle mérite et
uu Us uniront leurs eflorts pour donner à cette industrie, source de richesse et de gran-
deur nationales, tout le développement dont elle est susceptible
L. Z. JONCAS.