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Full text of "Voyage d'André Michaux en Canada [microforme] : depuis le lac Champlain jusqu'à la Baie d'Hudson"

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IMAGE  EVALUATION 
TEST  TARGET  (MT-3) 


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23  WEST  MAIN  STREET 

WEBSTER,  N.Y.  14580 

(716)  872-4503 


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CIHM/ICMH 
Microfiche 


CIHM/ICMH 
Collection  de 
microfiches. 


Canadian  Institute  for  Historical  Microreproductions  /  Institut  canadien  de  microreproductions  historiques 


Technical  and  Bibliographie  Notes/Notes  techniques  et  bibliographiques 


The  Institute  has  attempted  to  obtain  the  best 
original  copy  available  for  filming.  Features  of  this 
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Coloured  covers/ 
Couverture  de  couleur 

Covers  damaged/ 
Couverture  endommagée 

Covers  restored  and/or  laminated/ 
Couverture  restaurée  et/ou  pelliculée 

Cover  title  missing/ 

Le  titre  de  couverture  manque 

Coloured  maps/ 

Cartes  géographiques  en  couleur 

Coloured  ink  (i.e.  other  than  blue  or  black)/ 
Encre  de  couleur  (i.e.  autre  que  bleue  ou  noire) 

Coloured  plates  and/or  illustrations/ 
Planches  et/ou  illustrations  en  couleur 

Bound  with  other  matériel/ 
Relié  avec  d'autres  documents 

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along  interior  margin/ 

La  reliure  serrée  peut  causer  de  l'ombre  ou  de  la 
distortion  le  long  de  la  marge  intérieure 

Blank  leaves  added  during  restoration  may 
appear  within  the  text.  Whenever  possible,  thèse 
hâve  been  omitted  from  filming/ 
Il  se  peut  que  certaines  pages  blanches  ajoutées 
lors  d'une  restauration  apparaissent  dans  le  texte, 
mais,  lorsque  cela  ét£\!t  possible,  ces  pages  n'ont 
pas  été  filmées. 

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Commentaires  supplémentaires; 


L'Institut  a  microfilmé  le  meilleur  «exemplaire 
qu'il  lui  a  été  possible  de  se  procurer.  Les  détails 
de  cet  exemplaire  qui  sont  perjt-être  uniques  du 
point  de  vue  bibliographique,  qui  peuvent  modifier 
une  image  reproduite,  ou  qui  peuvent  exiger  une 
modification  dans  la  méthode  normale  de  filmage 
sont  indiqués  ci-dessous. 


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D 


Coloured  pages/ 
Pages  de  couleur 

Pages  damaged/ 
Pages  endommagées 

Pages  restored  and/or  laminated/ 
Pages  restaurées  et/ou  petliculées 

Pages  discoloured,  stained  or  foxed/ 
Pages  décolorées,  tachetées  ou  piquées 

Pages  detached/ 
Pages  détachées 


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Only  édition  available/ 
Seule  édition  disponible 


Pages  wholly  or  partially  obscured  by  errata 
slips,  tissues,  etc.,  hâve  been  refilmed  to 
ensure  the  best  possible  image/ 
Les  pages  totalement  ou  partiellement 
obscurcies  par  un  feuillet  d'errata,  une  pelure, 
etc.,  ont  été  filmées  à  nouveau  de  façon  à 
obtenir  la  meilleure  image  possible. 


This  item  is  filmed  et  the  réduction  ratio  checked  below/ 

Ce  document  est  filmé  au  taux  de  réduction  indiqué  ci-dessous. 

10X 


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14X 

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the  last  page  with  a  printed  or  illustrated  impres- 
sion, or  the  back  cover  when  appropriate.  Ail 
other  original  copies  are  filmed  beginning  on  the 
first  page  with  a  printed  or  illustrated  impres- 
sion, and  ending  on  the  last  page  with  a  printed 
or  illustrated  impression. 


L'exemplaire  filmô  fut  reproduit  grâce  à  la 
générosité  de: 

La  bibliothèque  des  Archives 
publiques  du  Canada 

Les  images  suivantes  ont  été  reproduites  avec  le 
plu3  grand  soin,  compte  tenu  de  la  condition  et 
de  la  netteté  de  l'exemplaire  filmé,  et  en 
conformité  avec  les  conditions  du  contra*"  de 
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papier  est  imprimée  sont  filmés  en  commençant 
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dernière  page  qui  comporte  une  empreinte 
d'impression  ou  d'illustration,  soit  par  le  second 
plat,  selon  le  cas.  Tous  les  autres  exemplaires 
originaux  sont  filmés  en  commençant  par  la 
première  page  qui  comporte  une  empreinte 
d'impression  ou  d'illustration  et  en  terminant  par 
la  dernière  page  qui  comporte  une  telle 
empreinte. 


The  last  recorded  frame  on  each  microfiche 
shall  contain  the  symbol  — ^>  (meaning  "COIM- 
TINUED  "),  or  the  symbol  V  (meaning  "END"), 
whichever  applies. 


Un  des  symboles  suivants  apparaîtra  sur  la 
dernière  image  de  chaque  microfiche,  selon  le 
cas:  le  symbole  —^-  signifie  "A  SUIVRE",  le 
symbole  V  signifie  "FIN". 


Maps,  plates,  charts,  etc.,  may  be  filmed  at 
différent  réduction  ratios.  Those  too  large  to  be 
entirely  included  in  one  exposure  are  filmed 
beginning  in  the  upper  lef  it  hand  corner,  left  to 
right  and  top  to  bottom,  as  many  frames  as 
required.  The  foKowing  diagrams  illustrate  the 
method: 


Les  cartes,  planches,  tableaux,  etc.,  peuvent  être 
filmés  à  des  taux  de  réduction  différents. 
Lorsque  le  document  est  trop  grand  poui  être 
reproduit  en  un  seul  cliché,  il  est  filmé  à  partir 
de  l'angle  supérieur  gauche,  de  gauche  à  droite, 
et  de  haut  en  bas,  en  prenant  le  nombre 
d'images  nécessaire.  Les  diagrammes  suivants 
illustrent  la  méthode. 


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LA  JIAIE  D'IIUDSON 


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OUVRAGES  CITES  DANS  CETTE  NOTICE. 


Michaux  A.    Flora  Burcali-Americana,  2  vol.  S''    Paris   1S03. 

Michaux  A.  Histoire  des  Cluncs  de  l'Amérique  septentrionale  1  vol.  fol  : 
Paris  ISU. 

Micliaiix  fils.  Histoire  des  Arbres  forestiers  du  rAraériqiic  septentrionale,  Paris 
3  vol.  1813. 

Michaux.  F.  A.     Voyage  à  roucst  des  montu  Allt'ganys  .  1  vol.  Paris  1804. 

Annales  du  Muséum  d'Histoire  nîifurelle,  Paris  ISOl. 

Amcricin  Journal  of  .Science  and  Arts.  Professer    SiUiman  and    Benjamin   Silli- 

nian. 
Relations  des  Jcsnites.  Québec  3.  vol.  8o 

Carte  de  cette  partie  du   pays  depuis  la  baie  d'Hudson  à  l'ouest,  jusqu'à  Mingan 

à  l'est,  dressée  par  le  Père  Laure  S.  J.  qui  a  parcouru  ces  contrées  pendant  13  ani< 


YOYAliE  D'ANDIΠ MICHAUX 


EN  CANADA 


Do  tontlomp?;,  la  ))ostériu';  n.  su  roiuln;   nu    trihnl  do    ro- 
connaissanco  à   ces  lioininns  courageux  (|iii,  pour  servir  la 
société,  renoncent  à  ses  douceurs  cl  vont  clierclier  les   tré- 
sors iiKîonniis  de  la  nature  dans  les  |)lages  désertes  et    sau- 
vages.  C'est  ainsi  que  Taduiinistralion  du  ]\[iisénin  d'ifis- 
toiro   naturelle,    (Paris),    voulut  honorer  André    IVlicliaux, 
on  plaçant  son  buste  sur  la  fac^.ade   iU\    la    serre    tempérée. 
Mais,    si  cet  homme  a  droit  d'être  compté  au   nombre  des 
bienfaiteurs   de  l'humanité  tout   entière,    il  a  droit    surtout 
à  la   reconnaissance  des  Canadiens   en  piirticiilier,   puis- 
qu'on doit  le  n^garder  ajuste  titre   comme  \c  jiremier  ion- 
dateur  de  îa  Holani(]UC  en  Canada.  Avant  lui,  nous  avions 
bien  une  courte  histoire  des  plantesde  notre  pays  publiée  eu 
1G35  par  Cornuti    sous  ce  titre  Planhfnim   ('(inadcnsiiuii 
J/ù/or/a  ;  mais  cet  ouvrage  ne  coiuientcine  la  description 
de  quelques  ])lantes  peu  nombreuses  et  disposées  sans  or- 
dre métliodi([ue.  Charlevoix,  dansf»on  Histoire  du  Canada, 
u  reproduit  cet  ouvrage  en    français,  et  y  a  ajouté  de  nou- 
velles plantes  découvertes  depuis.     Kalm,  célèbre  disciple 


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('(•  IJnii.'i>  cl  proO'^.^riird'Ilisloiro  nnlnrrllo  à  A])(>,  r)vail,(Mi 
17,li)_.-)|^  vi>ilr  rAiuriicinc  ans  (Vais  du  roi  di-  Siirdc,  et 
avaii  iiiciiic  ('iciidn  m-s  rci  licrclics  iiis(iii(' dans  l<>  Canada; 
liiais  !<•  iViiit  de  SCS  paisibles  (:i)n(|iicics  ne  servit  (ju'à  enri- 
chir le  Spccirs  Plnnlaninuh'  son  i^'rand  maître  (1).  (^noi- 
(pf  il  en  soil,  noas  aimons  à  mentionner  eelfe  eirconslanco, 
)Mns(pie  nixis  voyons  par  laipie  notre  Holanicpie  caiiadieimo 
remonle  à  im  temps  a<m'V.  ri'eidé,et  ([n'elle  toiiclie  pour  ain- 
si dire  à  Porii^Mne  de  la  .>eiiMiee,  la  liolaniipie  en  cH'ct  doit  ;\ 
Linnre  sa  nomenchilitreet  sacdassifieation  ratioiiidlcs,  deux 
élément-  ipii  eoH-liUient  vraiment  mie  science.  \ons  ])oiir- 
l'ions  a:;ssi  nifuliuimei  Micli(d  Saira/.in,  médecin  du  lîoi  à 
Qnébec  e!  m'aidn'c  ci/rrcspoiidant  de  V  \e:idémic  des  Scien- 
ces, {.'l'i  lio;ma'>  e- 1  le  picmier  botaniste  canadien  dont  Je' 
nom  soit  (b'N'cMM  cé!M)i('  \yw  la  découverte  de  la  plante  v\\- 
riense  (jni    j)or!'!   son  nom,   la  Sanu/ceniff purjntrcd.    (2) 

A  ces  noms  nons  pourrions  ajouter  (>ncore  ceuxdn  manpiis 
de  la  Cialissonnière, dn  do(;tenr(lauIlier  (3),  do  P.  Ii()iieli(<r, 
i,'-oiivernenrd(>s  Trois-llivières,  cl  de  plusieurs  antres  ;  niais, 
comme  notre  intention  n'esl  pas  de  faire  l'histoire  de  notre 
liotaniquc,  nous  juisserons  rapidement  sur  ces  noms  ;  noire 

(1)  On  voit  encore  aujciunl'liMi  tlaiis  le  ç^r.inJ  lirrbier  de  Liiini^e,  les  pl;mtns 
ciicillirs  \)nv  Iviitiu  on  Caiiuda.  Ces  t'L'lKiiililliiiis  se  distinguent  dos  autres  par  la 
]i(trp  K,  (jM'ils  ]ior(oiit. 

(2)  Nos  irons  de  lu  campaojnc  ont  donnr  ù  cette  plante  le  nom  tout  à  fait  vn1»airfc 
i\r1'itits  Ivilions  :  en  eflVt,  besIViiilii»  ei-eiisrs  et  cimtourntv's  en  cornet  i-iniulent 
la  lèie  de  eet  animal.  C'('ttc  plante  (jiii  llouril  en  juin,  se  trouve  ubondanimciit  dans 
Il  s  savaiies  ((ni  avoi-inent  Qiiéîjee. 

(3)  Le  nom  de  ce  iiiédL'ciu  a  été  donné  par  Kalm  à  une  i)etitc  plante  très-com- 
niiMie  dans  nos  tinisj  flaulthcrut  prncuinheiu-  On  en  extrait  une  huile  essentielle  qui 
porte  le  nom  d'hnilc  de  gauUheria  einjiloyéc  en  médecine.  C'ahours  dans  son 
t  aité  (le  Cliiniie  donne  la  composition  tout  à  fait  remarquable  de  cette  huile.  Voyez 
Calioiirs  Leçons  de  Cliinnc  Vol  II. 

Quelques  botanistes  se  sont  permis  de  changer  le  nom  de  cette  plante  et  lui  ont 
substitué  le  nom  de  Guufiera,  prétciulai\t  faussement  que  l'on  devrait  écrire  Dr 
Gautier.  La  véritable  orthoirraphe  de  ce  nom  est  Gaultier  comme  il  appert  par 
les  registres  de  Notre-Dame  de  Québec,  dans  lcs((uels  l'on'troiivc  la  .si;j:nutiirc  de  co 
médecin.  (Voyez  Registre  de  1751,  août  20.)  Au  reste,  il  serait  vnunicnt  rcgrcttublo 
de  changer  un  nom  maintenant  consacré  par  un  long  usage. 


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1 


—  9  — 

])iit,  cV'st  (lo  pré«onlcr  au  Icolour  un  travail  qui  pourra  (*lrn 
tU;  ((uchiui;  ntiliié  aux  hntanistcs,  o.i\.(!.  le;  rrcil  <ruu  voyni^i' 
<|U(î   Michaux    iit  eu  (^'luada  |){)ur  y  «''ludicr  u  -     ,)lanl('s. 
Cc\  aulc.'ur,  <li\us  uu  ()Uvi-a:j;o  <|u'il  a  'aissc  sur  les  plauirs  de 
l'Auiériciui'  scpiculrioualc,  uc  lucnliouuc  |)as  toujours  truno 
luanièrc  l>i('u  précise  le  lieu  où  il  les  a  rencontrées  :  cI(î    Iù 
il  arrive  (pi'il  y  <'n  a  un  ij;rand  uouibre  (pii  n'.)ul  pas  été    re- 
trouvées depuis  ;  d'autres  soûl  exeessivenicnt  riires  cl  en- 
core peu  conuuesi.  Le  récit  de  ses  pérégrinations  dans  le  liou- 
veau  nioud(!  ne  sera  donc  pas  inutile  ;  d'ailleurs  Miclnuix 
lui-même  avoit  senti  l'utilité  d'un  semblable  travail.    Dans 
son     Histoire  des  (.'1,'èues  d'Améri(|ue,  il  dit:  "  Il  est    un 
autre  ouvrage*  (|ue  j'iuirais  bien  désiré  nu'ltro  sous  les  yeux 
tlu  public  :  c'est  l'iiisloire  détaillée  de  mes  voyages  ;  mais 
des  circonstances  ne  m'ont  i)as  permis  de  l'entreprendre." 
Elleetivement  il  mourut  sans  avoir  eu  le  temps  de  réaliser  ce 
dessein,  et  ne  laissa,  eu  mourant,  ([ue  des  notes  (pie  l'on  re- 
trouve éparses  dans  les  ouvrages  de  sou  fils,  et  île  plus  un 
journal  manuscrit  ((ue  ce  dernier  a  présenté  à  la  So(;iété  plii- 
losophiipie  de  IMiiladelpIiie.     Celte  histoire  de  ses  voyages 
iuan(|uaut,  pour  y  sup|)léer^  nous  avons  entrepris  cetU;  courte 
notice  exécutée  d'ailleurs  d'après  les  meilleurs  renseigne- 
ments, (pic  MOUS   avons   pris  dans   des  ouvrages    devenus 
malheureusement  très-rare?. 


Il 


André  Michaux,  (juo  b.  nature  avoit  doué  d'une  extrême 
activité,  se  livra  d'abord  aux  paisibles  travaux  de  l'agricul- 
ture. Il  avait  pource  gcnrede  vie  le  goût  le  ))lus  vil"  :  il  ob- 
servait les  productions  de  la  terre, allait  examiner  les  jardins, 
et,  poui  jonidro  la  théorie  à  la  praticpie,  il  consacrait  à  l'é- 
tude tous  ses  moments  de  loisir.    Qnehiucs  années  s'étalcn  t 


—  10 


écoulées,  lorsqu'il  sontit  renaître  en  lui  le  désir  de  voya- 
ger, désir  qu'il  avait  eu  dans  son  enfance.  Ce  n'était  pas 
un  désir  vague  de  voir  de  nouveaux  ]>ays:  Michaux  voulait 
go  rendre  utile  à  sa  patrie  ;  il  voulait  visiter  des  contrées 
peu  connues  et  en  ra})porler  des  productions  qui  pouvaient 
s'acclimater  en  France.  Mais  ses  connaissances  n'étaient 
pa^;  encore  assez  étendues  pour  voyager  avec  iruit,  et  voilà 
qu'ji  se  livre  pendant  deux  ans  à  l'étude  de  la  Botanique, 
sous  i3ernard  de  Jussieu  ;  et,  en  1779,  il  vint  se  loger  à  Paris, 
près  du  Jardin  des  Plantes,  pour  y  prendre  des  notions  sur 
les  diverses  parties  de  l'histoire  naturelle. 

Déjà  André  Michaux  avait  visité  l'Angk terre,  parcouru 
les  Pyrénées  et  passé  en  Espagne  ;  déjà  il  avait  visité 
la  Perse,  et  en  avait  rapporté  un  herbier  magniJique  et  une 
nombreuse  CDllection  de  graines  ;  lorsque  le  gouvernement 
IVani^ais,  désirant  ePirichir  la  France  de  plusieurs  arbres 
qui  croissent  dans  l'Amérique  se})tentrionale,  le  choisit  pour 
cette  commission.  Il  avait  ordre  de  parcourir  les  Fitats- 
Unis,  d'y  recueillir  des  graines  et  des  plants  d'arbres,  et  do 
les  faire  passer  en  France. 

Michaux  arriva  à  New- York  en  novembre  1785.  Pen- 
dant deux  ans,  il  y  fit  sa  principale  résidence,  parcourant 
le  New-Jersey,  la  Pensylvanic  et  le  Maryland.  Dès  la 
première  année,  il  envoya  à  Paris  douze  caisses  de 
graines,  plusieurs  mille  pieds  d'arbre  et  des  perdrix  du 
Canada,  lesquelles  se  multiplièrent  à  Versailles.  Il  établit 
aussi  un  jardin  près  de  Charleston,  dans  la  Caroline,  re- 
gardant ce  lieu  comme  un  j)oint  central,  d'où  il  pouvait 
voyager   dans  les  ;> litres  contrées. 

Les  Notes  Manuscrites  ne  nous  apprennent  rien  des 
excursions  qu'il  ;lt  jusqu'au  mois  d'avril  de  1737,  épocmo 
où  il  entreprit  soi  voyage  dans  les  monts  Alléganys.  Il  re- 
monta alors  la  rivière  Savannah  jnrqn'à  sa  source  ;  ce  fut  là 
qu'il  découvrit  grand  nombre  ce  jolies  plantes  et  plusieurs 
espèces  de  chênes.     Encouragé  par  ces  succès,  il  voulut 


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parvenir  jusqu'à  la  cime  des  monts  Alléganyg,  se  lia  d'a- 
mitié avec  les  sauvages,  et,  remontant  avec  eux  les  rivières 
qui  se  jettent  dans  la  Savannali,  il  arriva  aux  sources  do  la 
rivière  Tennessee,  de  l 'autre  côté  des  monts  ;  ce  fut  là  le 
terme  de  son  voynge.  Il  revint  alors  à  Charleston  le 
premier  de  juillet,  après  avoir  parcouru  300  lieues  à  tra- 
vers la  Caroline  et  la  G«jorgic.  Les  Notes  Manuscrites  ren- 
ferment souvent  des  remarques  sur  les  plantes  les  plus  in- 
tèrcssanles  qu'il  renconira  ;  il  indi(iue  môme  d'une  ma- 
nière si  précise  les  lieux  où  il  les  découvrit  qu'il  serait  en- 
core facile  de  les  retrouver.  Les  années  HSS  et  1789 
furent  employées  à  vijiter  successivement  la  Floride  Espa- 
gnole, les  îles  Lucayes  et  la  Virginie.  Il  entradansce  der- 
nier état  au  premier  de  juillet  à  Washington  Court  House 
"  première  ville  dans  la  Virginie,  que  l'on  trouve,  sur  la 
côte  occidontn  le  des  montagnes,  en  sortant  de  la  Caroline 
septentrionale.  "  Les  N'otes  ajoutent  :  "  Première  ville,  si 
l'on  peut  nommer  ville  une  bourgades  composée  de  douze 
maisons  de  bois.  Dans  cette  ville,  on  ne  mange  que  da 
pain  de  maïs.  Il  n'y  a  viande  fraîche  ni  cidre,  mais  seule- 
ment du  mauvais  rlinra."(l) 

Michaux  fut  de  relonr  à  Charleston  au  mois  de  se]i1embre 
17S9.  Pendant  Phiver,  il  ))arcourut  de  nouveau  les  monta, 
gnes  qu'il  avait  visitées  l'été  précédent.  Ce  voyage,  que 
Michaux  fit  en  compagnie  de  son  lils,  dura  moins  qu'il 
ne  l'avait  projeté,  et,  au  priniem})s  de  1790,  nous  le  retrou- 
vons à  Charlciton,  après  une  absence  de  cinq  mois  et 
demi.  (2) 


(\)  American  Joui  nul  nf  Scionco,  vol:  42,  p.  f, 

(2)  Ici  se  trouve  nialhcurcuscincnt  une  lacune  dans  le  Journal  de  Michaux.  Tout 
ce  que  nous  savons?  c'est  qu'il  s'-journa  dau=i  lo  voisinage  di  Charleston  jusqu'au  mois 
d'avril  de  IT.Ol.  C'est  dans  cet  intervalle  (l'i'il  enseigna  aux  Américains  l'cpoqu"  où 
l'on  doit  cueillir  Ginscn^  et  la  maaim- do  le  préi)arer.  Les  notes  manquent  pour 
le  reste  de  l'annce, 


à 


12 


ni 


Il  y  avait  près  de  sopl  .\  liiii'  ans  que  Miolianx  clail  on 
AiTiéri(inc;  SCS  ressources  iiécniiiaires  s\'jiui.saiont  :  il  crai- 
gnit  d'être  obligé  de  retourner  vu  France,  et  cependant  le 
butqu'il  s'était  ])roposé  en  visitant  notre  continent    n'était 
pas  ]iarfailemcnt  atteint.     Ce  n'était  pas  seulement  le  des- 
sein de  faire  une  Flore  américaine  qui  l'avait  déterminé   à 
cntre])rendre  de  si  longs  et  j)érilleux  voyag(\s  ;  luais  depuis 
]ongtem])s  il  s'occupait  d'un  projet  infuiinient  utile  ])our  la 
science  :  c'était  d'étudier  la  topographie  des  arbres   et  des 
plantes  de    l'Amérique   septentrionale,  c't!st-;\-dire   de   dé- 
terminer leur  lieu  natal  ;  c'était  d'examiner   attentivement 
la  latitude  où  ils  comuieneent  à  croî  trc,  celle  oi'i  ils  devien- 
nent rares  et  chétifs,  celle  enfin  où  ils  disparaissent  entiè- 
rement.    Il  regardait  comme  la  patrie  d'nii  arbre  le  lieu  où 
il  atteint  son  plus  grand  degré  de  force  végétative,  c'est-à- 
dire  sa  plus  grand  hauteur  et  son  ])lus  grand  diamètre  (1). 
Prenons  pour  exemple  le  Tulipier,  Lyriodcndnan  luUpifau^ 
que  l'on  trouve  dans  le  I faut-Canada.     Cet  arbre  y  atteint  à 
peine  trois  pieds  de  diamètre   et  soixante-dix  d'élévation. 
Dans  un  voyage  que  nous  fîmes  l'été   dernier  dans  le  liant- 
Canada,  nous  le  rencontrâmes  ]iour  la  ])remière  fois  ])rès  de 
Hamilton,  sur  la  route  qui  conduit  à  la  station  du  chemin 
de  fer  ;  il  pouvait    avoir   à  })eu   ))rès  les  proportions    que 
nous  venons  de  mentionner.     Cependant  cet  arbre    a   com- 
munément dans  Ips  Etats  de  l'ouest  et  surtout  dans  le  Ken- 
tucky,  jusqu'à  '^ept  à  huit   jViecis  do   diamètre  et    ))'irvient 
jus(|u';i  cent(inarante  jiieds  d'élévation  ;  de  jilns  il  y  forme  à 
lui  seul  de  vastes  forêts. Plus  au  nord,  ces  arbres  deviennent 


(1)  AiiiKilcii  du  Muscuni  d'IIi^toiro  uaturLllc. 


—  13  — 

plus  rares  cl  plus  petits  :  ainsi  le  Kcntucky  pent  être  consi- 
déré coniine   le  sol  natal  de  cet  arbre.  (1) 

M ic'lianx  avait  donc  résola  do  tracer  la  topor^'raphic  dc!4 
arbres  de  i'Amérifine  seplenlrionab^  Déjà,  il  avait  visité 
le  sud  et  avait  parcouru  les  Florid  s;  il  lui  restait  encore  à 
faire  un  voyage  beaucoup  plus  long  et  plus  dillicile,  uiais 
en  mc'me  temps  beaucoup  plus  utile  (pie  ceux  qu'il  avait 
entrepris  iuscju'alors,  c'était  de  visiier  le  Canada  et  de  se 
rendre  jusqu'à  la  baie  d'fludsou  Ce  projet,  il  l'exécuta 
en  nî)J.  II  partit  de  Cliarleston  au  mois  d'avril,  et  réso- 
lut i]o.  se  rendre  par  terre  jusqu'à  Québec.  Son  journal 
mann^f•^it,  dont  nous  avons  déjà  ])arlé,  nous  donne  les 
dates  suivantes. 

André  IMicImux  se  rendit  d'abord  à  Xew-York,  j)uis 
ayant  ])ns  une  embarcation  à  Xew-llaven,  il  arriva  à  Al- 
bany  le  14  juin  ;  k;  18  nous  le  retrouvons  à  Saratoga  et 
le  20  il  s'embanine  à  Wliiteliall,  ])our  se  rendre  au  lac 
Champlain.  Le  reste  de  ce  mois  lut  employé  à  liert)oriser 
sur  les  bords  de  ce  lac,  Je  traversant  à  diderentcs  rei)riscs 
pour  herboriser  à  la  fois  sur  ses  deux  rives.  Sa  llore  fait 
mention  d'un  grand  nombre  de  plantes  qu'il  y  rencontra. 
Inutile  de  donr.cr  ici  le  nom  de  ces  ])lantes  :  nous  référons 
nos  lecteurs  (pii  ai'^icraienl  à  les  connaître  aux  pages  indi- 
quées dans  la  note  ci-jointe  (2). 

Poursii-ii^'ant  alors  son  chemin,  il  arriva  le  30  juin  à  Mon. 
Iréal,  qu'il  laissa  (piehjues  jours  aj)rès  pour  se  rendre  à 
Québec.  En  descenc'antle  Ileuve,  il  s'arrêta  à  Sorel  :  c'est 
cncoHi  sa  ilorc  qui  nous  fournit  ce  dernier  renseignement. 
Il  y  rencontra  le  Rhodora  canadcnsu  (3)    Ce  joli  aibuste  a 

(1)  I.o  '.l"ulijii(  r  rt  te  Mii'inrd'ri  snnt  les  dcuv  i)!iis  brî^nx  înbrrs  ('."onirmcnt  do 
nos  foi  et-  r;iiKi(lii')iiiC!i.  La  richo?5'(.  do  liMir  i'tuiiiliiL^c  t't  l;i  !ir:iiilc  de  leurs  llctus  les 
font  rcc'"  relier  di's  .-inKiteiirs.  Le  preirirr  roniine  nous  Tuvoiis  dit,  coriiniencc  à 
parailie  à  Haiiiilton,  le  second   se  imcontre  siii-  l's  bords  de  la  riviriv?  Niiijriira. 

(2)  rUiiii      Voreiili-(iwir>c(n}a.     fn    Canada     ad     ri[ins     laeiis      Clr(mplain, 
Vol.  I.  loi  17,  7.J,  131),  1.');!,  301  Vol.  II  fol  :  2S,  li).»^,  3:7,  ei.j. 

(3)  rioi'u  Ijorcali-americaua.    lu  frulicelis  Canada;  circa  Sorcl.  Vol  :  I.  f.  2.5'J, 


.  ;^ 


—  14  — 

ceci  de  romarqnable,  c'est  qu'il  so  couvre  de  Heurs  avant 
l'ap])arit.ioii  de  ses  feuilles  cl  dans  le  temjis  même  où  la  lerrc 
est  encore  couverte  de  ncii^c  en  plusieurs  ciidroils.  Quel- 
ques jours  plus  tard,  c'est-à-dire  vers  la  mi-juillel,  Mi- 
chaux arriva  à  Québec. 


IV 


Michaux  ne  resta  que  peu  de  temps  dans  celte  ancienne 
métropole  du  Canada.  La  saison  avançait  ;  il.so  hàla  de 
prendre  des  informations  sur  la  baie  d'IIadson,  et  se  munit 
des  provisions  nécessaires  et  d'objels  d'échan!:};e  ;  puis  des- 
cendant le  fleuve  Saint-Laurent,  il  se  rendit  à  l'embouchuro 
du  Saguenay. 

A  l'entrée  du  Saguenay  se  trouve  Tadoussac,  premier 
poste  de  la  Compagnie  delà  baie  d'fîudson  ;  c'est  là  que 
les  sauvages  venaient  tous  les  ans  faire  la  traite  des  pelle- 
teries :  il  y  débarqna,  afin  d'y  acheter  deux  canols  d'écorce. 
Tadoussac  est  un  joli  petit  village  bâli  sur  une  pointe  de  ro„ 
cher  qui  s'avance  à  l'endroit  où  les  eaux  du  Saguenay  vien- 
nent se  mêler  à  celles  du  S  aint-Laurcnt.  Sa  petite  chapelle, 
longue  de  vingt-cinq  pieds  environ  ?c  distingue  des  antres 
habitations  par  son  toit  roug(j  et  son  joli  petit  clocher.  Les 
édifices  qui  l'environnent,les  hautes  montagnes  dont  les  som- 
mets sourcilleux  contrar-'tent  ave"  la  sombre  forêt  de  sapins 
qui  se  trouve  au  j^icd,  tout  contribue  à  donnera  c;  lieu  un 
aspect  de;>  plus  pittoresques.  Michaux  profila  du  séjour 
qu'il  \  (i- pour  cxphirer  les  mornes  voisins  et  les  rivages 
ci.viromiants  ;  sa  (lorc  mentionne  plusieurs  plantes  (p. 'il  y 
trouva  (  l).  Mais  le  temps  le  prL-ssail  ;  il  s'embarqua  de  nou  • 

(I).  .Mic'iiitiv.  A-  rUiva.  llorcfi'i-Ai  irrii^Mia.  /.il  ripn.s  iiuriiiis  5".  L.jurcn'.'ii 
ju.^iu  Tudoii.vsac.  Vol.  I  fol.  ]0ii,177.  In  flumiaU'  S.  Lan.  entti  a'/iis  ullluciitc  mnnj 
siiluilsia  Vol.  I  foi.  1,  07,  95,  102,  13;?. 


—  15  — 


1 


vcaiijCl  bienlôt  après  il  onlradaiis  1ns  eaux  du  Sagucuay. 
Cette  rivière, peudaiil  l'espace  de  vinijt-se|)t  milles,  c'esl-ii 
dire  jusqu'à  Tance  Saiut-Jean,  coule  entre  deux  immenses 
murailles  de  gneiss  et  de  gianile  qui  surjjasscnt  de  beaucoup 
Jes  palissades  de  l'IIudson.  Ses  rivag(îs  sont  })resque  dénués 
de  toute  végétation  ;  seulement  dans  les  aniVactuosités  des 
rochers,  on  remar(|ue  (pu;l([ue;iî  })ins  cl  quelques  sapins 
très-courts!,  des  groseilliers  sauvages,  des  vucciiiiumn 
(l)luels)  chargés  (le  leur  fruits  bleuâlres  et  nu  g-nièvre 
Juniperus  sabhia,  formant  un  vaste  lapis  de  verdure  sus- 
])endu  à  ces  escarpements  abruptes  qui  s.'élèvent  quelque- 
fois jusqu'à  1 100  piedsde  hauteur  (1).  En  approchant  de  la 
baie  des  lia  !  lia  !,  les  rivages  s'abaissent  et  alors  commen- 
cent ces  immenses  forêts  de  pins  (pii  font  la  richesse  de  ces 
contrées.  C'est  à  Chicoutimi  (juele  Saguenay  cesse  d'être 
navigable  pour  les  vaisseaux  d'un  gros  tonnage.  Ku  cet 
endroit,  la  rivière  s'élargit  et  forme  nu  vaste  bassin  ([ui  rc' 
coit  les  eaux  d'une  jolie  cataracte  dont  la  hauteurest  de  40 
pieds  environ.  Michaux  y  arriva  vers  le  commencement 
d'août. 

Chicoutimi  (dérivé  d'un  mot  sauvage  qui  signifie,  eau 
profonde)  n'était  alors  qu'un  jx^tit  village  au  conilucnt 
de  la  rivièrf!  Chicoutimi  avec  le  Saguenay.  Sarune  pointe 
qui  se  proj(;tle  dans  le  bassin,  s'élevait  une  })etiic  chapelle, 
longue  d'environ  25  pieds  et  bâtie  par  les  Jésuites,  jiremiers 
apôtres  de  ces  contrées  alors  sauvages.  On  y  voyait,  à 
l'intérieur,  un  autel  nui  (H  ([aelqucs  peintures  ([ui  ])ortaient 
des  maniues  non  é([uivoques  de  vétusté  et  à  l'extérieur, 
la  pierre  sépulcrale  du  Père  Coquart,  dernier  des  Jésuites, 
qui  ait,  avec  le  Père  Labrosse,  évangélisé  le  Saguenay.  A 
rexein])le  de  tons  les  étrangers  (jui  débarquent  à  Chicouti- 
mi, IMichanx  voulut  visiter  ces  lieux  riches  en  précieux 
souvenirs.  Dans  les  noies  manuscrites  qu'il  laissa  à  son  fils. 


(1).  Flora  norfuli-Arïiciicana  Vu!.  IL  In  suxos!s  ad  auincm   Sasticnd'j.  Vol,  I 
fol.  111.  Vol.  II.    j1.  21(3. 


\0 


il  parle  ainsi  :  "  I.ors  de  mon  voyngo  à  labaio  d'IIndson, 
j'arrivai  au  mois  d'août  près  du  lac  Cliicoulimi  (1),  situé 
près  \v.  Ibe  dogrô,  o1  j'y  trouvai  encore  l'égliïsc,  clublic  en 
1728  (ainsi  (pie  j'indiiiiv.iit.  la  date  placée  au-de:?sus  do  la 
porte  i)rincipal(')  ])ar  les  P.''res  .1 ''suites,  ])oiir  y  rassembhîr 
Jes  sauvages  des  environs,  ^'e  bal  i  nient,  consirniten  pontrcs 
('quarries  de  Tlunja  occiilanfdli'^  (cèdie  blanc)  élevées  les 
unes  au-dessns  des  antres,  était  encore  en  bon  étal,  et, 
<|uoi(ine  ces  pouirrs  n\Miss(Mil  jamais  élé  couvertes,  ni  eu 
dedau:-^,  ni  (mi  (lejuirs,  je  ji's  trouvai  tellement  intactes, 
qu'elles  n'avaient  pas  élé  altérées  de  l'épaisseur  d'une 
demi-ligne,  depuis  ])!us  de  soixante  ans."  (2)  Celte  petite 
chapelle,  ([ui  est  tombée  il  y  a  environ  trois  ans,  avait  donc 
alors  près  de  130  ans. 


Ceux  de  nos  lecteurs  (|ui  ont  déjà  visité  le  lac  Saint-Jean 
pavent  (jue,  ])our  y  arrivm',  il  faut  remonter  la  rivière  Clii- 
coulimi, ([ui  [)ren(l  sa  source  dans  le  lac  Kinog;nni,  parcourir 
ce  lac  dans  toule  sa  longueur,  puis,  après  un  |)orluge  d'une 
quinzaine  d'ar[)enls,  tomber  dans  le  lac  Kinogamichich  dont 
la  décharge  lente  et  tortueuse  (rivière  des  Aulnets)  va  so 
perdre  tlans  la  iîelle-Rivière  ;  celle-ci,  à  son  tour,  vous  porte 
jus(pi'au  lac  Sainl-Jcan.  Telle  fut  aussi  la  route  que  suivit 
notre  inrali^:^able  voyageur.  Mais,  au  moment  de  s'aven- 
turer dans  CCS  pays  à  peine  explorés  et  jiarcourus  seulement 
par  les  sauvages  et  quchpies  rares  missionainv*,  il  jugea 
prudent  de  ])rendre  avec  lui  trois  sauvages  et  un  métis, 
et,  malgré  les  dillicullés  sans  nombre  qui  existaient   alors, 

(]).  Micliau:.  aiipclle  aoisi  ri'larîisspiiient  ûv  la  rivirro  en  cet  endroit. 
(2).  Michaux  fils.  Arbres  ioresticrs  Vol.  111.  pa^e  31. 


17  — 


I 


I 


voilà  qu'il  se  mr't  on  devoir  de  parnoiirir  li  di.'^tanco  ()ne 
nous  vriioi)?:  do  dét-riro.  l'iU  1rav(M'.xi\Mt  lo  lac.  Ivinogami , 
Michaux  reiicîoiilra  une  plante  ([ui  n'a  pas  oncoro  été  retrou- 
vée en  Canada  ])ar  ceux  ((ui  se  sont  octcupés  do  botanique 
depuis  :  e'ost  la  Lnhiiia  Dorimanna  (1),  connue  vulijaire- 
ment  en  l^rance  sous  )o  nom  do  Lobélie  lubuhure.  Ses 
feuilles  sont  ontièrouionl  submergées,  tandis  ([uc;  sacc^roilo, 
d'un  bleu  l'aie,  Hotte  à  la  surface  de  i'(!au.  A|)rès  six  jours 
de  navii^alion,    les  canots  arrivèrent  au  lac  Saint-Jean. 

Le  lac  Saint-Jean  est  situé  entre  48  ^  ,  2um.  et  18  ^  , 
42m.  de  latitude,  et  entre  71  ®  ,  29m.  v.l  1?,  ®  .  9m.  do  lon- 
gitude. Sa  plus  grande  longueur  est  do  IG  lienos.  Michaux 
le  p;irconrnl  ilans  toute  son  étoiifUio,  et  découvrit,  dans 
sor-  horUorisaiions,  dos  ])lantes  Irès-nombreusos  (2).  JMais, 
tout  (Ml  examinant  les  végétaux  cpii  crois-îont  sur  les  ri  vag(îs 
du  lac,  iMichaux  ne  ])erd:iit  pas  do  vue  le  plan  d'étude 
qu'il  fr-'élait  fait  :  aussi  ne  se  contonla-t-il  ));is  d(;  ])arrourir 
les  bords  des  eauK  ;  il  pénétrait  dans  l'épaisseur  di'S  forùls, 
observait  les  o-^soncos  qui  y  j>ré(lomiaaion1.  Les  (luohiues 
détails  (]ni  suivent,  fournis  pas  les  noies  f|a'il  laissa  à  son 
fils,  feront  connaître  le  g(M)ro  do  ses  observations. 

I/'s  iorcts  qui  entourent  le  lac  Saint-Jean  se  composent 
de  diverses  espèces  de  bois  très-précieux,  tels  que  pins, 
mélèzes,  épinoltes,  j)ruches,  cèdres,  oio.  Pour  plusieurs  do 
ces  espèces,  telles  que  le  Pinus  ruhra  {\)\\\  rouge) ,  VAbics 
ulba  (épiivMto  blanche),  le  Thuya  occidentalls  (le  cèdre), 
c'est  le  point  le  plus  avancé  vers  le  nord  où  on  lo<  observe. 
"  Le  Piiius  strobu  (3)  (pin  blanc)  se  trouve  dans  une  vaste 

(1)  Mi  'iTiiî:.  Floca  Borcali-americaca.  Vol.  II.  fol.  loi.  In  lacu  Kinogaml  aliis- 
que  vieillis. 

Le  -^f-nifi  T.ohcHa  fournil,  à  nos  p.irtr^r-os  plusieurs  ticllcs  •il:ntci  d'oi'nc- 
mniit.  rnli"  i"lr(:s  Va  Lob  eu  p  cardiii  île  qui  siirpas  ,e  eu  écl.it  cL  en  b-^at'ti.!  1 -s  plus 
bciiiri /w'-r/i/V/.  Coltc  plante  qui  croît  cpontiiiûmcnt  autour  du  lac  Saiu'.-Picrrc, 
niôrît"r;iit  \V"\ri}  iotrodiiitc  d-tis  toiw  Irn  jui<lins. 

(2).  î'ic.hi'.nx.  Flora  i^orciP-amc'.'icnu.i.  Vol.  I.  fol,  210.  vol.  II.  fol  205,  220,  22j. 

(3).  Mil  liaiiK.  fils.  Arbn'«  foveolicrs.  Vol  I  page  104. 


—  18  — 

t'ionduo  do  i)ays,  mais  non  ])as  partout  avrc  nue  vgnle 
alwiidaiicc.  Vers  lu  nord,  c'est  su.  les  bords  de  la  rivière 
des  Mislassins,  A  cuviroii  'lO  lieues  tie  sou  embouchure 
dans  le  lae  Saiul-.lean,  (juo  l'on  renooulre  les  premiers  j)ins 
de  celte  es[)ùcc  ;  UKiis,  en  avaui^ant  de  deux  dei,a-és  au  sud, 
il  devieul  assez  (  ommun." 

"1^0  mùVc/.c  {Lfn'ic  aniericanct)  t2»t  très-abondaul  aux 
environs  du  îac  S:iint-.)ean  ;  il  y  vient  en  corps  de  forêt,  cou- 
vrant à  lui  seul  des  es|)aces  de  plusicMU's  milles  d'étendue 
en  tout  sens"  (1).  On  Tt^ppelle,  en  Canada,  vpinf Ile  rouge, 

''  La  Pruclie  (  Abics  tanadcnsis)  commence  à  croître  à  la 
baie  d'IIudson  ;  mais,  au  lac  Saint-Jean,  elle  en  remplit 
déjà  les  Corel  s  (2)." 

A  ces  arbres,  nous  pourrions  en  ajouter  un  autre  qui  sn 
fait  remar([U(;r  par  ses  gigantesques  jM'oportions  :  c'est  le 
Popul.ush:(lsamil''!nf,  coima  vulgairement  sous  le  nom  d^ 
Lianl.  Il  est  en  très-grande  abondance  autour  de  ce  lac 
et  dans  tout  le  ])ay3  traversé  par  la  rivière  Sagucnay,  eniro 
le  47c  et  le  49e  degré  de  latitude.  Dans  ces  parages, 
ofi,  dit  Michaux,  la  températin-e  est  très-rigoureuse  en 
L'iver,  et  le  sol  humide,  cet  arbre  s'élève  à  80  piedo  dv'  haut 
sur  o  pieds  de  di;i mètre  (3)  .  ...  Mais  il  est  temps  de 
quitter  les  bords  du  lac  Saint-Jean. 


VI 


Avant  d'aller  plus  luin,  nou?  allons  nous  pcrmctlr'^  nnc 
digression  géographiciue  aiin  do  l'acilitc'-  a'ix  luct;!arF  l'in- 
tclligrncc  de  ce  qui  va  suivre.  Le  lac  Saint-Jcan  est  an  vaste 


(1)    A:ic'  ,iiix,  m-,  Ailrcs  fi.ic.llcrji.   ^  .■!.  III.  \.;^■;rc  CS. 
(2).  ?.!i<:h;iux,fi  s    «  «        '^'■■1.  f.  p'/;'  l:^*^- 

(3).  .Aiicluiux,  .au    "'  «»        Vol  II.  page  30'J. 


—  19 


réservoir  où  vioiiiioiit  st^  |)nilrc  ))liisieiir.''  rivirros  dont 
qnohlUP.s-uiKîS  prcniiciil  leur  soinci;  dam  les  liaulciirs  (pii 
séparent  le  torriioirc;  de  la  baie;  d'Ilddsoii  du  lias  ('•iiiada. 
Au  nombre  de  ces  dernières  se  Ironvr,  la  rivii-re  Mi.slassini, 
appelée  aussi  rivière  des  Sables,  à  cause  (h^  la  i^rande 
quantité  de  sable  (|u'ell(î  charrie.  Le  cours  de  celli'  rivière 
est  d'environ  150  milles.  Kile  est  naviiif.able  pour  les  canots 
jus({u'à  IL'O  milles  de  son  end)oucliure  ;  quchpies  rapides 
et  qncliiacs  petites  cliules  en  interrompent  néanmoins  la 
navigation  ;  on  y  supplée  j)ardes  portai^n-s.  C'est  le  cliemiii 
par  lequel  descendaient  antrelois  et  descendent  eneoro 
aujourdMmi  les  Mistassins,  peuple  sauvau^e  cpii  habite  les 
C  ntrées  situées  aux  environ^  du  î^^rand  lac  Mislassin.  ('es 
sauvages  viennent  Taire  latraitc  i\rs  pclleieiies  à  la  Pointo- 
Bleue,  dernier  ])oste  situé  dans  la  partie  se)>l('ntiionale  du 
Canada  :  ils  deseendenf  ordinaircui'Mif  vos  le  mois  de  juin 
pour  le  commerce  et  en  même  temps  pour  rencoiilrer  le 
missionnaire.  Ce  l'ut  par  là  (|iie  Michaux  résolut  de 
se  rendre  à  la  baie  tl'Iludson.  Il  renionta  donc  la  rivière 
des  RJistassins.  Pendant  la  jiremière  pariio  de  sou  cours, 
cette  rivière  coule  à  trav(>rs  ime  belle  contrée;  les  arbres 
qui  la  bordcMit  sont  "mag :n(i([ues.  Je  w.}  m'arrèlorai  pas  à 
peindre  les  dangers  (pic;  courut  notre  intrépide  voyageur 
dans  CCS  solitudes  :  le  cours  de  la  rivière  est  généralement 
paisible,  et  permetuiie  iiavigiiioii  douce  et  commodt;  ;  mais 
dans  certains  endroits,  il  faut  g'avir  (L's  roclu-rs  escarpés, 
faire  des  portages  da^b-  l'éi^ai-v-c^nr  de  la  lo;él  et  niarcher  sur 
des  troncs  d'arbres  ponn-is  (pii  ctjfencjiit  sous  les  'pas  (I). 

Après  une  marche  de  iO  li(Mie>  environ,  nos  voya;.,^eurs 
arrivèrent  au  pie  1  criin"  (t'iscade.  },  i  rivière  resserrée 
entre  dni\  r.)(  hers,  ;  ;•  préeip'ie  (l'nii-  montagne  eoupév!  "ii 
amp'.iilhéAtre,  jiarnne  hauteur   de  'J-J  pieds  ;  siu-  lesdi^grés 


(1)  '.c:  phn'cs  qii:  ?\Tif!iMii.\-  rccoatra  fin-  la  l'ivi.'rc:  ilc.s  T'iîist  is!i)-  sont  'm!i  ^iii^A 
aux  pa'^oî  Miivn'jîcs  'Ir  s  i  l!)i(;. 

In  Cinu';:»,  a(J  ,u;iii'.'in  I\h  .t'iiVji'n  Xt,].  I,  fr!  Z  \;  (JI,  !  10. 


V 


20 


de  col  ampliillu'ûlrr  rroir^i^cnl  <li'.s  arbros  qu'on  npcrroit  à 
truvcrs  I;i  iiiij):)!!  (rtuiii,  tiourb'iMMi  vofilf  îiii-dcssiix  df  leur 
citnc.  I''u  loinhaiil  iivcc  im  I'imcus  rpoiivaiifiihlc,  elle.'  se 
brise,  cl  It's  v;i()tMirs  s'clcvaiil  (•(nniiic  iiii  niiiii,^',  bait,Mi(M!l 
nu  loin  li's  rMiviroiis.  ()  1  lV(''iiiil  :"i  lu  ix'iisrc  de  le  voir 
escidiidiT  les  murclics  di;  tu;  ii,it^;uiti's(|U('  niupliidiràtrc^ 
pour  cueillir  <|ii('l(|ii('>  piaule-  sur  \vs  rocs  iiioudcs  cl  s'ur- 
rctcr  à  couiU'uiplcr  celle  scène  iniposanle. 

r.a  cliiile  doiit,  nous  venons  de  parler  csi  le  Wtmk^  i\r  la 
naviiialion  sur  la  'ivii-re  Mistassiiii  Du  sommet  des  mou- 
tagnesipii  la  loriniMi!,  Pcil  ploiiL-'e  dans  une  lon^nie  vallée, 
embrassant  uwc  innnense  ctendue  i\v.  terrain  uni,  (pli  :ui- 
ijoiie(>  la  |)rés{'nec  de  (juebpies  hics.  Nos  voyageurs  priMi- 
uenl  celle  direction  ;  hienhit  ils  tombent  dans  une  suite  do 
petits  lacs  remplis  d\'au  st'iL;iianie.  Mn  ))assant  par  le  lac 
des  Cyi^aes,  Michaux  s'y  arrêta  nu  instant  pour  en  explorer 
les  bonis  (1).  Après  avoir  traviM'sé  les  hauteurs  <pii  sépa- 
rent le  Canada  <.\\.\  lerritoire  de  la  baie  d'IIudson,  l'on  tombe 
dans  une  peiile  rivière  qui  ( onduil  au  jjfiand  lac  des  Mis- 
tassins.  Il  faisait  un  l'roid  (>\ccssi(';  il  lotrd)ait  de  la  iici^'c. 
Cependant  Michaux  continua  sa  route  et  arriva  le  4 
sepiembro  dans  le  lac  des  Mislassins. 

Le  journal  manuscrit  de  Michaux  renlermc  un  rapport 
très-inléressanl  sur  le,  vcgélaliou  et  le  climat  de  ces  contrées 
boréales.  Il  serait  à  souhaiter  (pie  io  (iouvernemeul  ou 
quelque  institution  publnjuc  fit  copier  ce  manuscrit  qui  iii- 
tércsse  au  dernier  point  le  Canada. 


1- 


(1)  M'icliaux,  riora  l'orr'li-iiim  ricana.  Pcr  Irac'iis  monliiim.  a  sinii  Iliul'jonis  cd 
CanuduiU;  pra;scitiiii  ad  laouni  C^i /lo.  «m  dictuiu  Vol.  I.  101:190,225,  Vol.  II 
fol  :  172. 


-y^m^ 


__    01     


!• 


VU 


Le  grand  lac  dos  Mistassins  est  une  vaste  mer  iiuéricurc 
iini  (Ktcnpe  un  ospaco  de  j)liis  de  deux  degrés  entre  le  71  ® 
cl  le  7  i  ^  de  l()rjj:;iUidG  :  il  est  situé  sur  le    jIo     degré    do 
latitude  nord  et  se  déeliarqe   dans  la  baie  d'iludson  |)ar  la 
rivière  Rupert.  Près  du  lac  et  sur  une  petite  rivière  qui  s'y 
jette,  se  trouve  un  autre  de  marbre   iiilorme  ([ue  les  sau- 
vages appellent  la  "  tnaison  du  grand  génie;  "  ;  de   l'autre 
coté,  e'cst-à-dirc,  près  de  la  décharge,  s'élève    une  roche 
énorme  et  isolée  qui  domine  le  lac.  Frappés  de  sa  grosseur 
piodigieuse,  les  peuples  infidèles   du   nord   iuvo(iuent    le 
inanilou  de  cette  roche  ;  lorsqu'ils  traversent  le  lac,  ils  sont 
saisis  d'une  religieuse  frayeur  et  délournont  soigneusement 
les  regards  dans  la  crainte  d'exciter  par  là  (iuel{[ue  tempête. 
Voici  ce  qu'on   dit  dans  le  llclation  du   Père    Albanel. 
"  Nous  avions  déjà  fait  six  iieues  au  travers   des  îles  qui 
l'entrecoupent   (le  lac   des  Mistassins),   ([uand  j'a[)erc'us 
comme  une  éminence,  d'aussi  loin  que  la  vue  peut    s'éten- 
dre :  je  demandai  à  nos  gens  si  c'était  vers  cet  endroit  que 
nous  devions  aller  ?  Tais-toi,  me  dit    noire  guide,   ne   re- 
garde i)oint,  si  tu  ne  veux  point   périr.  Les  sauvages  de 
ces  contrées  s'imaginent  que  c[uiconque    veut  traverser   ce 
lac,  se  doit  soigneusement  garder   tic  la  curiosité  do  regar- 
der cette  roche,  et  principalement  le  lieu  où  l'on  doit  abor- 
der; son  seul  aspect,  disent-ils,  cause  l'agitation  des  eaux 
et  forme  des  tempêtes  qui  font  transir  de  frayeur  les  })lus  as- 
surés."(l). 

Le  nom  de  ce  lac  vient  du  mot  sauvage  MisJa-Wi'smi  qui 

(1)  lîelation  des  Jésuites.    Vol  III.  Uclatioii  de  1G7.2,  page  49. 


22  — 


vont  clin;  grosso  roclio,  ol  les  pinjplos  ({iii  soiil  aux  oiivirons 
portonl  II!  nom  do  MistasHÎiis,  soit  à  oaiiso  du  lien  ([u'ils 
liabiteiif,  soit  pont-Ain;  anssi  à  raison  do  ccllo  cspèco  do 
culte  qu'ils  rondonl  à  ocilo    nu'ho. 

Le  lac  dos  Mistassins  est  pou  connu  :  voitn  co  que  nou.s 
en  ap[)rond  un  nommé  .lénurio  St.  Oni^o,  canadien  ilc  la 
paroisse  dos  Eboulomenls,  (jui  a  passé  la  plus  grande 
partie  do  sa  vie  soit  au  service  de  la  compagnie  du  \ord- 
Ouest,  soit  ù  celui  d»;  la  conr.pagnit;  dos  postes  du  Koi. 
"  Après  avoir  stationné  pondant  plusieurs  années  au  lac 
Mislassini  pour  faire  le  iralie  avec  les  sauvages,  il  dit 
que  l'étendue  de;  co  lac  est  bien  peu  eoniuie,  car  il  mit 
trois  jours  à  le  traverser  chins  Peinlroit  le  plus  étroit,  allant 
d'îles  en  îles,  qui  sont  dans  cette  partie  partieuIi«3ro  du  lac. 
Il  supj)oso  {juc  la  distance  entre  elles  et  la  terre  ferme  n'est 
pas  moindre  de  trente  milles,  ce  qui  donnerait  au  lac  dans 
celle  partie  environ  90  milles  do  largeur.  Les  sauvages 
moltent  ordinairement  tout  l'été,  une  partie  du  printemps 
et  de  l'automne  jniurse  rendre  du  haut  du  lac  Mistassini  à 

son  extrémité    inférieure La  rivière    Ruport   qui   y 

prend  sa  source,  est  bien  ])lns  considérable  cpie  le  Sague- 
nay  ;  il  l'a  descendue  jusqu'à  une  journée  de  marche  de  la 
baie  James,  il  suppose  que  la  distance  entre  la  baie  et  le 
lac  Mislassini  est  d'environ  50  à  (50  lieues."  (Rapport  de 
l'explorp.tion  du  Saguonay  do  I8i8,  page  1G3.).  .  .  .  Mais 
il  est  tem))s  do  revenir  à  nos  voyageurs. 

Michaux  après  avoir  reconnu  les  bords  du  lac,  descendit 
une  rivière  qui  communiiiue  avec  la  baie  d'IIudson 
(rivière  Ruport.)  ;  il  la  suivit  pondant  deux  jours  et  il 
n'était  qu'à  une  petite  distance  do  coite  baie,  lorsque  les 
sauvages,  croyant  dangereux  de  s'avancer  ])lus  au  nord 
dans  celte  saison,  refusèrent  d'aller  plus  loin,  et  voulurent 
absolument  revenir  :  ils  assuraient  que,  si  les  neiges  con- 
tinuaient, il  serait  impossible  de  s'en  retourner.  Le  retour 
fut  donc  dét'idé  ;  au  reste  Michaux  avait  reconnu   la  posi- 


—  23  — 

lion  (loH  lioux  rtdrtrrminé  quels  i'Maiont  les  points  le»  plus 
l'Ievés  et  (juello  étiiil  lii  cotiunuMicutiou  entre  les  divcrrt 
lîics  et  lii  l)îiie  d'Hudsou.  il  avuii  exactement  mar(|u6  à 
«juelle  lalilude  linissenl  de  croître  les  arbres  du  nord  :  il 
ne  trouvait  plus  dans  (uîs  solitudes  ({uNine  vcgétation  clié- 
livc  ;  c'étaienl  des  pi'is  rabou^'ris,  d»vs  bouleaux  nnin« 
{Uetula  nawi)^  un  jj[(;nièvrier  rampant,  desî^roseillicrs  sau- 
vages (  /it/>fs  o.'f/canthoides  et  llibes  tri(i(liun),\v.  thé  velouté 
(Leduta  pulustre)  et  (|uel(|ues  espèces  de  bluets  (  Vaccinium 
ceupitusuin  et  V.  mijrUUoidet  ;)  (1)  mais  plusaui\m  de  ces 
beaux  arbres  que  l'on  rencontre  autour  du  lac  Saint-Jean. 
Au  reste,  rien  ne  peut  mieux  faire  connaître  la  nature  de 
la  végétation  de  ces  contrées  boréales  que  l'extrait  suivant 
pris  des  notes  manuscrites  de  Michaux.  "  Aux  environs 
de  la  baie  d'Hudson  et  des  grands  lacs  Mistassins,  les 
arbres  <pii,  quelques  degrés  plus  au  sud,  forment  la  masse 
des  forêts,  ont,  sous  cette  latitude  presqu'entièremcnt  dis- 
paru et  i)ar  la  sévérité  des  hivers  et  par  la  stérilité  du  sol  ; 
toutes  ces  contrées  sont  e'itrccoupées  de  milliers  de  lacs, 
et  couvertes  d'énormes  rochers  entassés  les  uns  sur  les 
autres,  qui  sont  le  plus  souvent  tapissés  de  larges  lichens 
de  coul(!ur  noire,  ce  qui  ajoute  encore  à  l'aspect  sombre  et 
lugubre  de  ces  régions  désertes  et  prescpie  inhabitables. C'est 
dans  les  intervalles  de  ces  rochers  cpie  l'on  apperçoit  cù 
et  là  quelques  individus  d'un  pin  rabougri  (Pinusrupes- 
tris)  qui  fructifient  à  trois  i)ieds  de  terre  et  (jui,  à  ce  ))eu  de 
hauteur,  portent  avec  eux  toute  l'empreinte  de  la  décrépi- 
tude. Cependant,  à  150  milles  plus  au  sud,  cet  arbre  offre 
déjà  une  végétation  plus  forte  ;  mais  il  ne  s'élève  presque 
jamais  au-dessus  de  8  à  10  pieds." (2) 

Ce  fut  aussi  près  du  lac  des  Mistassins  que   Michaux 

(1)  Flora  ïîoroali-amcricana.  Ad  siniini  Huâsonis  i^tjnxtn\a.ei\s  Mistassins  Vo! 
I.ô,  11,  14,  Gl,(i4,  111.  124,  191, '223.  VolII.  2,  1 15,  121,  123,  153^  154,  171  172 
173,  175,  1«0,  2^^3. 

(2).  Michaux  fils.    Aibres  forestiers  Vol  I,  page  49t 


—  24  — 


trouva  la  jolie  Primevère,  ;i  laquelle  il  donna  le  nom 
du  lac,  en  l'appellant  Primula  mistcssinica^  nom  si 
étrange,  qu'il  étonne  d'ordinaire  ceux  qui  n'ont  pa.s  en- 
tendu parlerdu  lac  des  Mistassins. 

Nous  avon.:  diurne  Michaux,  pour  se  rendre  à  la  demant  c 
de  ses  guides,  s'était  décidé  à  terminer  ici  son  voyage. 
Le  retour  fut  très-pénible;  la  plupart  des  rivières  étaient  gon- 
flées, et  les  canots  les  descendaient  avec  une  rapidité  im- 
possible à  décrire  :  les  sauvages  les  faisaient  passer  entre 
des  rochers  avec  cette  adresse  qui  leur  est  propre  ;  ajou- 
tez à  cela  que  les  portages  étaient  devenus  très-dilliciles. 
Ceux  qui  ont  voyagé  dans  nos  forêts  connaissent  les  dif- 
ficultés et  les  fatigues  que  l'on  rencontre  :  tantôt  il  faut 
franchir  des  arbres  abattus  sur  lesquels  s'élèvent  d'autres 
générations  d'arbres,  tantôt,  il  faut  descendre  un  ravin  à 
travers  les  orties  et  les  lianes,  pour  remonter  un  instant 
après  ;  souvent  traverser  des  savannes  toutes  couvertes  de 
sphagnum  (mousse  de  savanne),  où  Ton  enfonce  jus(iu'au 
genou  et  où  l'on  est  continuellement  mouillé.  Ce  qui  le 
remit  un  peu  de  ses  fatigues,  îe  furent  deux  compagnies 
de  sauvages  qu'il  rencontra  et  avec  les(iucls  il  alla  à  la 
ciiasse.  Enfin  Michaux  arriva  à  Tadoussac  le  premier 
octobre  ;  il  prit  congé  de  ses  compagnons  de  voyage,  qui 
lui  avaient  rendu  tous  les  services  qu'il  pouvait  attendre 
d'eux. 


I 


l' 


VIII 


De  Québec,   Michaux  retourna  à   Philadelphie,  par  la 

roule  (ju'il   avait  suivie  au  mois  de  juin,   c'est-à-dire    par 

Montréal  et  le  lac  Champlain  ;  il  y  arriva  le  huit  décembre. 

Il  et  ait  parti  de    Charleston  depuis  huit  mois,  et   il  avait 


U 


25 


i 


employé  trois  mo'.s  ot  dix-liui!  jours  à  aller  de  Québec 
jusqu'au  lac  dos  IVIistassins,  c'esl-à-dirc,  à  IGO  lieues  de 
loule  habitation.  (1) 

Ici  se  tcriuiiie  la  tâche  que  nous  ikhis  sommes  uTiposée. 
Mais  qu'il  nous  soit  permis   d'y  ajouter  le  récit  d'un  acci- 
dent qui  i'aillit    faire  perdre  en  un   seul    jour    le    iVuit   de 
tant  lie  labeurs  (2).     Michaux,  après  avoir   passé    quatre 
ans  aux  Etats-Unis   s'en  retournait  en  France.  Il  partit  de 
Charleslon  le  13  août  1796  ;  la  traversée   ne  fut  pas  mal- 
heurease,    mais    le    10   octobre,   comme   on    était  en   vue 
des  cotes  de  la  IIol  ande,  il  s'éleva  une  furieuse  tempête  : 
les  voiles  furent  djchiiées,    les   mâts  brisés  et   le   navire 
échoua  et  s'entrouvrit  sur  les  rocliers  :  matelots  et  passa- 
gers, tout  était  épuisé  de  fatigues  et    la    plupart  auraient 
péri,  si  les  habitans  d'Egmond,  petit  village  voisin,  ne  leur 
eussent  donné  du  secours.     Michaux  était  attaché   à   une 
vergue,  et  il  avait  perdu  connaissance,  lorsqu'on  l'emporta 
au  village  ;  il   ne  la  reprit,  que  quelques   heures   a})rès,  se 
trouvant   auprès   du  feu   avec  d'autres   habits  et  entouré 
d'environ  cinquante   personnes.     Sa  première   pensée,  en 
revenant    à  lui,  fut  de  demander   des  nouvelles  de  ses  col- 
lections.    Il    apprit   que,   les  malles  qui   contenaient  ses 
cHels  se  trouvant  sur  le  iKint,  elles  avaient  été   emportées 
par    les   vagues  ;  mais  on  lui  dit  que  les  caisses  j)lacées  à 
fond  de  cale  avaient  été  retirées,  et  il  fut  consolé.  Malgré 
le  mauvais  état  de  sa  santé,  il  fut  obligé  de   rester  un  mois 
et  demi  à  Egmond,    et   d'y  travailler  jour   et    nuit:  ses 
plantes  ayant  été  mouillées  par  l'eai/.  de  mer,   il  fallut  les 

(1)  Nous  avons  indiqué  tous  les  endroits  oxi  s'est  arrêté  Michaux.  Il  est  cepen- 
dant un  point  quo  nous  n'avonj  pu  *>.onst;ittT  ;  c'est  sa  visite  à  la  Malîisie.  Qu'il  s'y 
«oit  arrête,  1j  chose  est  c  i  t:dne,  comi. :e  on  le  voit  par  les  indications  suivantes  de  sa 
flore,  A'ol  II,  page  263,  ainsi  que  par  son  Histoire  ile^  Chi'tun  de  l'Amérique  à  l'arti- 
cle de  Quirciisi  rnbrit.     t^e  qu'il  nous  reste  i\  savoir  c'i  s(  l'éponue  de  cette  visite. 

(2)  Ce  rérit,  avec  ^tous  se»  détails,  ejt  empru'.iti  aux  An)iul''i  ilv  Musiium 
d'Hiitoirc  nulutillc 


..I 


MIHlMtfwMMiaaM 


—  26  — 


tremper  toutes  dans  l'eau  douce  et  les  sécher  l'une  après 
l'autre  dans  de  nouveaux  papiers.  Cet  herbier  si  intéressant 
est  allé  enrichir  les  immenses  collections  du  Muséum 
d'Histoire  naturelle.  On  le  conserve  encore  aujourd'hui 
tel  qu'il  était  alor^,  seiilemint,  on  en  a  détaché  les  plantes 
qui  se  trouvaient  en  double. 

Nous  terminerons  cette  courte  notice  sur  Michaux  par 
le  portrait  que  nous  en  trace  Deleuze,  son  contemporain 
qui,  ayant  eu  avec  lui  des  rariports  très-intimes,  noas  en  a 
laissé   une   intéressante  biographie. 

"  Michaux  était  d'un  caractère  franc,  quoique  d'une  hu- 
meur taciturne  ;  il  faisait  peu  de  démonstration  d'amitié, 
mais  si  on  lui  demandait  un  service,  rien  ne  lui  sem- 
blait difficile.  Ayant  rencontré  en  Amérique  plusieurs 
Français  infortunés,  il  leur  ouvrit  sa  bourse,  et  leur  pro- 
cura des  ressources;  on  en  voit  la  preuve  dans  lu  note 
de  ses  dépenses,  où  le  nom  de  ceux  qu'il  avait  oblii^és,  est 
en  blanc.  Son  extrême  simi)licitô  et  le  goùi  de  l'indépen- 
dance qu'il  avait  pris  dans  sa  vie  crraiile  et  solitaire,  lui 
donnait  un  extérieur  singulier  ;  mais  cette  singularité  ne 
tenait  nullement  au  désir  de  se  faire  remarquer.  Ses  ma- 
nières n'étaient  celles  d'aucun  piys  parliculier,  parro 
qu'elles  convenai(mt  également  à  tous.  Il  n'était  ni  un 
Français,  ni  un  Anglais,  ni  im  Canadien;  mais  partout  on 
Je  trouvait  plus  rapproché  dos  naturels  que  ne  l'aurait  été 
tout  autre  étranger.  Il  prenait  i)eu  de  part  à  la  conversa- 
tion, parce  qu'il  ne  disait  et  n'écoutait  que  des  choses  utiles. 
Passait-il  par  une  ville,  il  visitait  les  marchés  et  s'inCor- 
mait  d'où  venaient  toutes  les  denrées  :  dans  les  canipagiies, 
il  interrogeait  les  habitants  sur  les  jjIus  petits  détails  rehi- 
tifs  à  la  culture.  Aune  activité  qui  ne  lui  permeftnit  )»as 
de  perdre  un  moment,  il  réunissait  une  patience  (jui  ne  j-e 
lassait  jamais." 

"  Ses  qualités  morales  étalent  si  bien  coiiniies,  que  lors- 
qu'on l'envoya  en  Amérlcjne,   après  avoir  fixé  son  traite 


27  — 


ment  on  lai  donna  une  lettre  de  crédit  illinnitée,  avec 
laquelle  il  pouvait  toucher,  dans  les  villes  où  il  passerait, 
tout  TargcMit  nécessaire  pour  les  acquisitions  qu'il  jugerait 
convenables  et  pour  Ir^,  frais  de  ses  voya^es^.  Michaux  ne 
fit  jamais  usage  de  cette  lettre,  que  pour  l'objet  particulier 
auquel  elle  était  destinée,  et  ne  se  fit  jamais  payer  de  ses 
appointements  ;  aussi  n'a-t-il  laissé  à  son  fils  que  la  plus 
petite  partie  de  la  forlime  avec  laquelle  il  était  né.  Mais 
il  reste  à  ce  jeune  homme  un  nom  considéré,  les  connais- 
sances acquises  par  ses  trnvaux  et  ses  voyages  avec  son  ■ 
père,  et  des  titres  à   la  faveur  du  gouvernement." 

Disons  maintenant  un  mot  des   ouvrages   de  Michaux. 
Ces  ouvrages  sont  ptm   nombreux,   parce  que  voyageant 
continuellement,    il   n'a  pas   eu  le    temps    de  rédiger   ses 
observations  ;  d'ailleurs  comme  le  fait  observer   Deleuze, 
Michaux  jugea  plus  utile  d'introduire  en  Europe  des  plantes 
nouvelles,  que  de  les  décrire.     Nous  avons   cependant  de 
lui   une   Hi'^tolre  des  Chênes  d'Amérique,  publiée  à  Paris 
en  1801.  Cet   ouvrage,  écrit  en  français,  renferme  la  des- 
cription de    vingt   espèces  de  chênes  disposées  dans    un 
cidre  méthodique. 

Un  autre  ouvrage  qui  intéresse  davantage  le  C  mada 
osi  une  flore  publiée  en  latin  sous  le  titre  de  Flora  Boreali- 
Americana,  sislens  charadcres  Plantaruin  quasiii  Amer  ira 
.septeiilrionali  coUe</d  et  detexit  Andréas  Michaux.  Cet 
ouvrage  parut  en  1803  (raiinée  du  décès  do  Michaux^,  for- 
mant deux  volumes  in  8<>  ,  enrichis  de  53  gravures.  [1  fut 
rédi'^c  par  les  soins  dti  l'éminent  botaniste  Cianrle  L  )ais 
Ricluvrd,  d'après  les  notes  et  les  herbiers  de  Michaux.  On 
y  trouve  plus  de  1700  plantes  décrites.