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Full text of "Compte rendu des séances de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève"

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COMPTE RENDU DES SÉANCES 


SOCIÈTÉ DE PHYSIQUE 


ET D'HINTOIRE NATURELLE 


DE GENÈVE 


SSL 


XXVIII. — 1911 


GENÈVE 
BUREAU DES ARCHIVES, RUE DE LA PÉLISSERIE, 18 
PARIS LONDRES NEW-YORK 
H. LE SOUDIER DULAU & C- G, E. STECHERT & C: 
174-176, Boulev. St-Germain 37, Soho Square 151-155, W 25th Street 


Dépôt pour l'ALLEMAGNE, GEORG xwr Cie, à BaLx 


1912 


- COMPTE RENDU DES SÉANCES 


DE LA 


SOCIÈTÉ DE PHYSIQUE 
PT D'HISTOIRE NATURELLE 


DE GENÈVE 


GENÈVE — SOCIÉTÉ GÉNÉRALE D’IMPRIMERIE 


Pélisserie, 18 


COMPTE RENDU DES SÉANCES 


SOCIETE DE PHYSIQUE 
ET D'HINTOIRE NATURELLE 


DE GENÈVE 


XXVIII. — 1911 


GENÈVE 
BUREAU DES ARCHIVES, RUE DE LA PÉLISSERIE, 18 
PARIS LONDRES NEW-YORK 
H, LE SOUDIER DULAU & C° G. E. STECHERT 
174-176, Boul.St-Germain 37, Soho Square 9, East 16th Street 


Dépôt pour PALLEMAGNE, GEORG & Ci, À Baze 


1911 


Extrait des Archives des sciences physiques et naturelles 
tomes XXXI et XXXII 


COMPTE RENDU DES SÉANCES 


DE LA 


SOCIÈTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE 


Année 1911 


Présidence de M. Emile Caarx 


Séance du 5 janvier 1911 
Briner. Sur la formation de l’eau à partir de ses éléments. 


M. E. Brixer. — Sur la formation de l'eau à partir de ses 
éléments. 

Comme on sait, la formation de l’eau à partir de ses éléments 
devient déjà manifeste dans un récipient de verre ou de porcelaine, 
en l'absence de catalyseur énergique, à des température notable- 
ment inférieures à la température, dite température d’explosion ; 
dans ces conditions, la réaction progresse avec une vitesse parfai- 
tement mesurable. 

Ce processus, à cause de son apparente simplicité, a tenté beau- 
coup de chercheurs, qui ont entrepris l'étude de son mécanisme. 

Parmi les nombreux travaux publiés sur cette question, citons 
ceux de Victor Meyer et de ses élèves Krause, Askenasy, Freyer et 
Raum*, qui ont constaté des divergences absolument anormales 
dans la vitesse de réaction, et cela bien qu'ils se soient attachés à 
opérer dans des conditions aussi identiques que possible, 

Hélier ?, dans ses recherches, reconnut que la proportion com- 
binée du mélange semblait atteindre une limite, à des températures 
où la combinaison aurait dû être totale. C’est en partie sur ces 
dernières expériences que Duhem s’est basé pour affirmer la réa- 
lité des faux équilibres. 

Quelques années plus tard, Bodenstein * reprit l'étude de cette 


1 Lieb. Ann. (1891), t. 264, p. 85 ; (1892), t. 269, p. 49. Ber. (1892) 
t. 25, p. 622 ; (1895), t. 28, p. 280. 

? Ann. Ch. et Phys. (7) (1897), t. 10, p. 521 ; (1897), t. 11, p. 78. 

% Phys. Ch., t. 29, p. 664. 


6 SÉANCE DU 5 JANVIER 


réaction, et, n'ayant pas constaté que la réaction fût limitée, 1] Lui 
appliqua l'équation des réactions trimoléculaires : 


vitesse — KC?x.Co: 


Les constantes K, qu'il a obtenues, variant quelquefois du sim- 
ple au double et même au triple, alors que les conditions expéri- 
mentales sont identiques, il ne nous semble pas que l’on soit en 
droit de conclure à une réaction du troisième ordre. Mais on peut 
considérer comme établi par les recherches de Bodenstein que les 
parois du récipient jouent, dans ce phénomène, un rôle prépon- 
dérant. 

Tous ces expérimentateurs ayant opéré aux pressions voisines 
de la pression atmosphérique, 1l nous a semblé intéressant de sou- 
mettre le mélange tonnant aux actions combinées de la tempéra- 
ture et des pressions de plusieurs centaines d’atmosphères, actions 
qui se sont montrées si efficaces dans d’autres cas'. Nous avons 
ainsi eu l’occasion de constater par nous-mêmes que la marche de 
la réaction est trop irrégulière pour que l’on puisse songer à lui 
appliquer les formules de la cinétique chimique. Malgré cela, pour 
nous faire une idée approximative de l’action de la pression, nous 
avons comparé les vitesses moyennes quotidiennes, déduites des: 
contractions observées après plusieurs jours. Voici quelques résul- 
tats extraits de nos mesures : 


Pression Température Proportion combinée 
quotidienne 
1 atm. 400° 1-77 
300 atm. 400° 1,2% 


On se trouve donc en présence d’une réaction qui aurait dû être 
fortement accélérée par l'élévation de pression et qui, à première 
vue, est à peine influencée. 

Cette apparente anomalie s’interprête bien si l’on attribue aux 
parois des tubes une action catalytique prédominante ; car le 
mélange, à l’état comprimé, est évidemment, à masses égales, en 
présence d’une étendue de parois beaucoup plus faible que lors- 
qu'il se trouve à la pression atmosphérique. 

Pour expliquer les discontinuités, qui se manifestent dans ce 
processus, il ne suffit pas, si l’on se place au point de vue du chi- 
miste, d'admettre qu'un système chimique est comparable à un 
système mécanique ; car on serait obligé de conclure qu'un arrêt 
pur et simple de la réaction, avant l'équilibre, implique des arrêts 
ou des ralentissements anormaux dans le mouvement des molé- 
cules. 

En nous basant sur les deux constatations expérimentales sui- 


? Voir les communications précédentes du même auteur. 


SÉANCE DU 19 JANVIER 7 


vantes : 1° la présence de la vapeur d’eau en de certaines propor- 
tions paraît gêner la réaction ; 2° les parois jouent le principal 
rôle dans le processus, il nous semble plus naturel d'attribuer 
l'arrêt ou plutôt un ralentissement anormal de la réaction à ceque 
l'accès des parois devient de plus en plus difficile aux molécules 
réagissantes, par suite de la formation d'une couche de vapeur 
d'eau sur ces parois. A d’autres égards, cette explication, d'ordre 
purement physique, semble parfaitement plausible, puisque de 
nombreuses expériences ont démontré que les gaz ou les vapeurs 
manifestent une adhérence plus ou moins grandes pour les parois 
des récipients qui les contiennent. 

En tenant compte en outre, dans ce phénomène, des actions 
chimiques perturbatrices, telles que : attaque du verre par l’eau 
formée, réductions ou oxydations des constituants des parois par 
l'hydrogène ou l'oxygène, on sera peut-être un peu moins étonné 
des résultats si discordants, obtenus dans l’étude de cette réaction. 


Séance générale annuelle du 19 janvier 


F. Reverdin. Rapport annuel. — Ed. Sarasin et Th. Tommasina. Consta- 
tation de quelques faits nouveaux en radioactivité induite. 


M. Frédéric REVERDIN, président sortant de charge, donne lec- 
ture de son rapport sur l'activité de la Société en 1910. Ce rapport 
renferme des notices biographiques sur Henri Dufour, Alexandre 
Agassiz, Stanislas Canizzaro et Edouard Hagenbach-Bischoff, 
membres honoraires, décédés dans le courant de l’année. 


Ed. Sarasix et Th. Tommasina. — Constatation de quelques 
faits nouveaux en radioactivité induite. 

Le phénomène de la radioactivité induite dont la découverte 
est due à M, et Mme Curie ‘, a attiré dès le début l’attention des 
chercheurs. Outre les travaux désormais classiques de Mr et Mme 
Curie, en collaboration, dans la suite, avec M. J. Danne et 
M. A. Debierne, il faut rappeler les recherches importantes de 
MM. Rutherford et Soddy et de MM. Elster et Geitel. Ce sont les 
belles et intéressantes expériences de ces derniers qui nous ont ame- 
nés, depuis quelques années déjà, à nous occuper presque exclusive- 
ment de l'étude de ce phénomène, dont la vraie nature n’a pas 
encore pu être dévoilée, et dont les lois mêmes, qu'on a cru pou- 
voir établir, présentent trop d'incertitude pour être acceptées 
telles quelles, A l’aide de quelques faits que nous venons de cons- 


! Comptes-rendus de l’Ac. des Se. de Paris. 6 nov. 1899. 


8 SÉANCES DU 19 JANVIER 


tater il nous sera peut-être possible d'apporter une contribution 
utile pour élucider certaines questions controversées, de façon à 
ouvrir probablement un champ pour de nouvelles recherches. 

40 — Cause des déformations de la courbe de désactivation 
des corps radioactivés. 

Nous avions été frappés par les irrégularités parfois très grandes 
des courbes de désactivation et pensions que la cause directe ou 
les causes devaient avoir leur siège dans les modifications des dis- 
positifs. Il en était bien ainsi. — Pour résumer brièvement nos 
observations nous donnons dans la fig. 4, les trois formes typiques, 
I, Il, III, des courbes de désactivation des corps radioactivés, et 
nous allons énoncer la méthode expérimentale à suivre pour 
passer à volonté de l’une à l’autre courbe, avec le même corps 
déjà activé, donc sans modifier ni la durée de son activation (que 
l’on donnait. comme cause des modifications des courbes), ni sa 
nature. On obtient facilement ces passages d’une courbe à l’autre, 
en activant au lieu d’une lame métallique, ou d’un corps quel- 
conque en vase clos, la paroi intérieure du vase lui-même. Nous 
avons activé, soit des récipients ou cloches cylindriques en laiton, 
soit des cloches en verre fermées en haut ou terminées en goulot, 
celui-ci pouvant être laissé ouvert ou fermé. — Veut-on obtenir 


Fig. 1 


la courbe I (fig. 4), on étudie la désactivation par la lecture des 
décharges successives par minute de l’électroscope, en plaçant sur 
le plateau de ce dernier, et en conservant toujours fermée la cloche 
radioactivée, — Veut-on la courbe II (fig. 1), on évente la cloche 
avant de la placer sur le plateau de l’électroscope, de nouveau fer- 
mée. Alors on a au début la descente rapide de la courbe, puis on 


SÉANCE DU 19 JANVIER 9 


voit se former le renflement qui disparaît dans la suite et la 
courbe prend une allure régulière, Nous avons constaté que le renfle- 
ment est dû à l'accumulation dans la cloche de l'air ionisé et de 
l'émanation. Notre constatation expérimentale consiste dans l’inter- 
ruption à un moment quelconque, de préférence lorsque le renfle- 
ment est à son maximum en r (fig.4 et 2), dans le renouvellement 
de l’air renfermé et dans la reprise immédiate des lectures à cloche 
fermée, On tombe ainsi de la courbe I dans la courbe II (fig. 2). 
Mais on tombe toujours dans une courbe du type IT (fig. 2), si au 
lieu de continuer les lectures des décharges à cloche fermée, on 
les fait à cloche ouverte. Il suffit de laisser un passage libre de 
quelques millimètres entre la cloche et le plateau de l’électroscope. 

Dans un travail plus complet qui paraîtra dans les Archives 
nous donnerons quelques uns des diagrammes très démonstratifs 
que nous avons obtenus par ce procédé, qui permettent de conclure 
que la vraie courbe de désactivation est la courbe [IT et non pas 
la ou la IT, ces dernières étant déformées par la condensation 
variable de l’émanation et de l’air ionisé. 

20 — Action de faibles élévations de température sur la 
radioactivité induite. 

À ce propos nous ne citerons que la Note de Pierre Curie en 
commun avec M, J. Danne (:) où les essais portaient sur des 
lames métalliques radioactivées chauffées depuis 1509 à 1400°, on 
y trouve démontré par plusieurs graphiques qu'il fallait dépasser 
2159 pour avoir une modification nettement indiquée, mais au 
dessus de 630° l'accélération de la désactivation par la chaleur 
était très forte, aussi cette Note conclut en ces termes : « Les expé- 
riences qui viennent d’être décrites prouvent que la nature de la 
radioactivité induite sur une lame peut se trouver modifiée par 
des variations de température ». 

M. Rutherford a fait aussi des recherches très suivies, ainsi que 
plusieurs autres physiciens, mais, à notre connaissance, personne 
n'a rien constaté, ayant trait aux métaux radioactivés, soumis à 
de faibles élévations de température. 

Les expériences que nous allons décrire, montrent, au contraire, 
qu'il suffit d'élever la température d’un métal radioactivé de quel- 
ques degrés seulement, par exemple de 20° à 30° pour augmenter 
son débit radioactif. Dans nos précédentes expériences nous acti- 
vions les différents corps, sur lesquels nous avons opéré, dans une 
enceinte close constituée par une cloche cylindrique en laiton de 
36 cent. de hauteur et 48 de diamètre. Dans cette cloche était 
placé un godet contenant un sel de radium, celui-ci agissait sur le 
corps à activer, tantôt directement, tantôt au travers d’un ou de 


! P. Curie et J. Danne. C. R. 21 mars 1904; et P. Curie, Oeuvres, 
p. 498. Paris 1908. 


10 SÉANCE DU 19 JANVIER 


plusieurs écrans, cloches en métal plein ou en toile métallique. 
Pendant les dernières vacances nous avions laissé exprès, entre le 
godet à radium et la grande cloche, un système d'écrans formé de 
trois grilles et une cloche en métal plein emboitées. Nous voulions 
voir dans quelle mesure la radioactivité induite, pendant cette 
longue période de temps, variait des grilles et de la cloche pleine 
intérieure à la cloche extérieure. Or, après deux mois nous ne 
trouvâmes qu’une radioactivité induite très faible, autant sur la 
cloche intérieure en métal plein que sur les autres en toile métal- 
lique, tandis que la grande cloche montrait une activité très forte. 
Nous jugeâmes alors, qu'il était intéressant de reconnaître par 
l'étude complète de sa désactivation, si une radioactivité induite 
de longue durée avait pris naissance en ces conditions sur sa paroi 
intérieure. 

En effet, au lieu de n'avoir plus au deuxième jour, qu’une 
action de décharge minime de /20000 par exemple, comme cela 
a été indiqué par MM. Curie et Danne dans la Note déjà citée, 
celle-ci ne diminua que des ?/, par rapport à sa valeur initiale, et 
resta depuis lors invariable, de façon que la courbe de désactiva- 
tion est une ligne horizontale. Le tracé monte lentement lorsqu'on 
laisse accumuler dans la cloche l’air ionisé et l’'émanation, jusqu’à 
atteindre la limite de saturation, aussi dès qu’on y renouvelle Pair 
on retrouve invariablement les mêmes chiffres. Avec circulation 
d'air, c’est-à-dire à cloche entr’ouverte en bas, on a une droite 
horizontale. Il nous faut pourtant ajouter, ici, que cette grande 
cloche nous ayant servi continuellement, depuis deux ans environ, 
comme enceinte close d'activation, on doit y voir la source pre- 
mière de sa radioactivité induite de longue durée. 

C'est le fait d’être en possession d’une radioactivité induite si 
parfaitement constante et ayant une intensité suffisante pour per- 
mettre facilement des mesures exactes, qui nous a donné l'idée de 
vérifier si ce phénomène était insensible aux faibles élévations de 
température comme :1l avait été établi. 

Ayant placé pendant quelques minutes notre cloche sur le radia- 
teur du calorifère, élevant sa température de 12 degrés seulement, 
de 180 à 30°, puis l'ayant éventée et replacée sur le plateau de 
l’électroscope, nous constatâmes immédiatement une forte montée 
de la courbe de désactivation, comme le montre le diagramme A 
(fig. 3) qui donne encore abus autres points de chauffe à 40°. 
L'étude du phénomène nous a confirmé l'effet dû à la chaleur par 
des diagrammes superposables, et nous a permis de reconnaîter 
la constance persistante du débit radioactif, qui semble jusqu'ici 
ne subir aucune perte par la répétition des opérations de chauffe, 
produisant pourtant chaque fois une émission plus énergique. 

Ces constatations nous permettent de conclure que même les 


SÉANCE DU 2? FÉVRIER 11 


faibles élévations de température agissent sur les métaux 
radioactlivés en accélérant leur désactivation par un accrois- 
sement immédiat et temporaire de leur débit radioactif. 
Nous donnons cette généralisation à notre conclusion, parce 


0 10 20 30 410 50 60 70 80 30 100 minutes 


qu'ayant activé par une action rapide et directe, c’est-à-dire sans 
écrans interposés une cloche neuve identique à la première, nous 
avons obtenu le diagramme PB (fig. 3) qui montre aussi l'effet 
d'une surdésactivation immédiate due aux mêmes faibles éléva- 
tions de température, bien qu'il soit ici moins énergique et qu'il 
aille en s’affaiblissant naturellement aussi rapidement que la 
radioactivité induite de courte durée. D'autre part nous avons 
restreint notre conclusion aux métaux, parce que tous nos essais 
avec des cloches en verre très fortement radioactivées, nous ont 
toujours donné un effet nul, tout au moins pour les limites entre 
lesquelles nous avons opéré, mais il est possible que cela change 
pour de plus grands écarts de température. C’est ce que nous 
vérifierons en poursuivant nos recherches. 


Séance du 2 février 


L. Duparc. Les gîtes platinifères de l'Oural. — G. Baume. Sur quelques 
essais métallographiques. 


M. le professeur L. Duparc expose devant la société les résul- 
tats des études qu'il poursuit depuis douze années sur les gites 
platinifères de l'Oural. Les recherches sont achevées actuelle- 
ment et le travail dans son ensemble fera l’objet d’un volume qui 
paraîtra vraisemblablement pour la fin de l’année, et dont M. Du- 
parc donne à la société le résumé . 


_! Voir Archives, 1911, t. XXXI, p. 211. 


12 SÉANCE DU 2 FÉVRIER 


Dans l’Oural, il existe une longue bande de roches éruptives 
basiques, qui suit la chaine du N. au $S. et se cantonne généra- 
lement dans le voisinage de la ligne de partage et un peu à l'E. sur 
la Sibérie; cette zone est formée par des types pétrographiques 
variés tels que gabbros, norites, diorites, péridotites etc. C’est exclu- 
sivement dans celles-ci que se trouvent les gîtes platinifères pri- 
maires. Plus à l'E. 1l existe une zone de roches basiques qui est 
moins longue et moins continue aussi, et formée surtout par des 
serpentines. Je l'appellerai zone orientale par opposition à la pre- 
mière. Il y a douze années déjà que j'ai dit dans une séance de 
cette société que la roche mère du platine était la dunite. En effet 
tous les grands gisements platinifères de l’Oural se trouvent dans 
ces conditions. Ceux-ci sont du N. au S.: Le gîte du Daneskin- 
kamen sur la rive gauche de la Soswa, le gîte de Gladkeïa-Sopka 
dans le Wagranskaya-Datcha, que j'ai découvert en 1900, le gîte 
du Tilaï-Kanjakowsky dans l'extrémité N. de la grande chaine de 
ce nom, que j'ai découvert en 1901, le double gisement du Kos- 
winsky (Sosnowsky-Ouval et Kitlim) ; ce dernier que j'ai décou- 
vert en 4901 également ; le gisement de Kaménouchky, dans la 
Pawdiskaya-Datcha ; le double gisement de l’Iss soit Swettli-bor 
et Weressowy-Ouval sur la Schouwalowskaya-Datcha, le gise- 
ment de Taguil le plus grand de tous sur la Taguillskaya-Datcha, 
et enfin très au $. le petit gisement de l’Omoutaïa. Tous ces gîtes 
ont une structure identique, qui se résume ainsi: au centre un 
affleurement plus ou moins grand de dunite massive. Celui-ci est 
fréquemment de forme elleptique, le grand axe de cette ellipse 
coïncide avec la direction des chaines. La dunite est compacte, et 
exclusivement formée d’olivine avec quelques octaèdres de chro- 
mite, elle est sur tous les gisements d’une composition chimique 
très uniforme. Si l’on défalque l’eau d’hydratation, élimine A,0, 
etCr,O, comme chromite, réduit Fe,O, en F,0 et calcule à nou- 
veau sur 100 parties, on trouve que l’olivine de ces dunites a une 
formule très constante qui oscille autour de 


Fe,SiO,+10Mg,SiO, 


Dans la dunite il existe des ségrégations plus ou moins impor- 
tantes et toujours irrégulières, véritables «schlieren » de fer 
chromé. L’affleurement dunitique est circonscrit par une ceinture 
de pyroxénites à olivine qui passent latéralement à la Koswite. 
Cette ceinture est continue ou au contraire discontinue selon les. 
gisements, elle peut être très large ou au contraire très étroite, les 
pyroxénites sont d’un type pétrographique absolument uniforme 
également sur tous les gisements, Des langues et des lambeaux par- 
tent de cette ceinture pyroxénitique et se trouvent à l'extérieur des 
affleurements dunitiques, les pyroxénites forment alors des cha- 
peaux sans racines sur la dunite. Uneseconde ceinture formée par 


SÉANCE DU 2 FÉVRIER 13 


des roches communément désignées sous le nom de gabbros-dio- 
rites circonscrit les pyroxénites, Celle-ci est formée par des roches 
d'aspect souvent différent, qui renferment généralement de l’am- 
phibole et sont plus ou moins fortement altérées; les gabbros- 
diorites malgré la diversité de leur aspect sont également d'une 
parfaite unité et les mêmes types pétrographiques et chimiques se 
retrouvent sur les gisements les plus divers. Lorsqu'on interprète 
les analyses de toutes ces roches et qu'on reporte les résultats sur 
le triangle de Becke, on voit que les types de même espèce sont 
uniformes sur tous les gîtes et que leurs points représentatifs 
coïncident presque sur le triangle. On voit de plus que tous les 
points s'échelonnent régulièrement dans le secteur supérieur de 
droite et forment une suite ininterrompue. Les roches des gise- 
ments platinifères sont donc issues d’un même magma, qui a 
subi les mêmes différentiations et produit des types identiques. 

Les différentes roches éruptives citées, notamment la dunite et 
les pyroxénites sont traversées par de nombreuses roches filo- 
miennes dont quelques-unes se retrouvent presque sur tous les 
gites. Elles appartiennent à deux types, l’un melanocrate l’autre 
leucocrate. Dans le premier ce sont les issites, les wehrlites filo- 
niennes, les garéwaïtes, les berbachites à olivine, des microgabbros 
etc. ; dans le second les plagiaplites antipode des issites, les albi- 
tites et les granulites à plagioclases ; le type mesocrate enfin est 
représenté par les gladkaïtes et les pegmatites dioritiques à élé- 
ments gigantesques. 

Le platine se trouve dans la dunite sous deux formes à savoir : 
4° cristallisé directement dans celle-ci; 2° cristallisé dans les 
ségrégations de chromite et avec cet élément, que le platine moule. 
Il existe en petits cristaux isolés. 
et amas plus volumineux. Considérée dans son ensemble la dunite 
d’après les recherches récentes est très pauvre en platine et ce sur 
tous les gisements, de sorte que nulle part le gîte primaire ne 
pourrait être exploité. Il est accumulé dans certaines régions, 
notamment dans les ségrégations de chromite, que rien malheu- 
reusement ne désigne à priori. 

Les analyses faites sur les platines de presque tous les gisements 
de l'Oural m'ont montré que tout d’abord dans un seul et même gi- 
sement, il existe des différences assez sensibles dans la composition 
d'échantillons qui proviennent de différents points d’un même 
massif dunitique, différences qui portent sur la proportion des 
osmiures, celle du fer, et des métaux accessoires. De plus en envi- 

sageant non pas les résultats isolés, mais les moyennes seulement, 
il existe de grosses différences dans la composition des platines de 
gisement très voisins. Tel est par exemple le cas pour le platine 
du Sosnowsky-Ouwal et celui de Kitlim; l’un riche en osmiures 


14 SÉANCE DU 2 FÉVRIER 


l’autre n’en renfermant que des quantités insignifiantes. Tel est 
aussi le cas pour les platines de Wéressowy et de Swetli-bor. 

Pendant plus de 7 années j'ai parcouru l’Oural convaincu que le 
platine ne se rencontrait que dans la dunite ; cette opinion était 
établie sur de très nombreuses recherches faites dans des condi- 
tions très favorables sur divers cours d'eaux qui ravinaient dif- 
différentes roches autres que la dunite et dont les alluvions étaient 
toujours stériles. 

Plus tard j'ai visité un gisement tout différent celui de la Gus- 
sewa affluent de la Wyja où j'ai dû me convaincre que le platine 
se trouvait aussi dans les pyroxénites lorsque celles-ci n'étaient 
pas accompagnées de dunitique. La Gussewa tient son platine 
de petits affluents qui descendent des Gussewi-Kamen, or ces 
montagnes sont exclusivement formées par des pyroxénites. Sur 
les pépites trouvées dans les cours d’eau, on voit fréquemment 
des fragments de diallage qui sont encore inclus dans le pla- 
tine, qui forme un véritable ciment autour d'eux. C’est la forme 
qui équivaut à celle du platine dunitique cristallisé dans la dunite. 
Il existe aussi une seconde forme dans laquelle le platine est cris- 
tallisé dans la magnétite qui dans les pyroxénites joue le rôle de 
la chromite dans la dunite. 

Depuis lors j'ai retrouvé 3 gisements semblables, l’un est celui 
de Barantcha avec trois rivières platinifères qui toutes descendent 
de la Sinaïa-Gora laquelle est entièrement en pyroxénites ; le second 
est celui de la Kiédrowka, sur la Taguilskaya-Datcha un peu au 
sud de la Barantcha, le troisième est celui de la Kamenka, sur la 
même Datcha, à l'E. du grand gisement dunitique de Taguil. A 
Barantcha on observe comme à la Goussewa, un platine cristallisé 
directement dans la pyroxénite et une seconde variété associée à 
la magnétite. Je rattache également aux gisements pyroxénitiques 
le platine des affluents du lac Tscherno-istotschnik bien que les 
affluents proviennent tous du gabbros, mais j'estime que ces 
gabbros ne sont que d'anciennes pyroxénites disloquées puis repé- 
nétrées et en partie résorbées par une veine feldspathique posté- 
rieure, Il y a donc parallélisme complet entre les conditions sous 
lesquelles se présente le platine dans les dunites et les pyroxénites. 
En ce qui concerne la genèse du gîte platinifère dans les deux cas 
indiqués, je me la figure comme suit: Une quantité quelconque 
de magma M qui contient initialement le platine à l’état de solu- 
tion magmatique est injectée dans une laccolithe. Ce magma se 
différencie concentriquement en 3 produits : a) qui représente la 
ceinture des roches leucocrates, b) celle des pyroxénites et c) de la 
dunite, produit le plus basique et le plus profond, C’est ce dernier 
qui draîne le platine, lequel se ségrègera au cours de la scorifica- 
tion magmatique qui donnera naissance à cette dunite. M est 


_ 


SÉANCE DU 2 FÉVRIER 15 


formé par la somme de ces trois termes qui ne sont pas égaux et 
dont € est certainement de beaucoup le plus petit. Telle est l’origine 
du platine dans la dunite, alors que ce métal fait défaut dans les 
pyroxénites de la ceinture. Si M est trop petit, le terme c ne peut 
devenir apparent et reste mêlé avec D. Il se forme la pyroxénite à 
olivine seule, qui conserve le platine qui en temps normal aurait 
passé dans € si ce terme avait pu devenir manifeste, telle est l'ori- 
gine du platine dans les pyroxénites. 

M. Dupare donne ensuite quelques indications sur la forme et 
la structure des alluvions platinifères. Celles-ci ont été fréquem- 
ment remaniées et enrichies par une concentration secondaire, 
Très souvent aussi le cours des rivières a changé et l’alluvion pla- 
tinifère se trouve dans des régions qui semblent n'avoir aucune 
relation avec les centres platinifères primaires. C’est ainsi que 
s'explique la présence du platine dans les alluvions de certaines 
rivières qui n'ont présentement aucun rapport avec les gîtes plati- 
nifères et qui n'en ont jamais eu. Il existe aussi certains cours 
d'eau encaissés dans les schistes du dévonien qui contiennent du 
platine. M. Duparc explique ce fait en disant qu'à l'époque dévon- 
mienne il existait déjà des îlots dans la région qui forme l’Oural 
d'aujourd'hui. Ces îlots présentaient des roches dunitiques qui ont 
été érodées aux temps dévoniens et dont le platine s’en est allé 
dans les formations sédimentaiers de l'époque. Ces sédiments ont 
été réémergés, ravinées à nouveau, et le platine qu'ils contenaient 
concentré dans le lit actuel de ces petits cours d’eau. 

M. Duparc parle ensuite des analogies que présentent d’autres 
gisements platinifères mondiaux avec ceux de l’Oural. En Colom- 
bie britannique le platine de la rivière Tulamen provient d'un 
gisement dunitique analogues à ceux de l’Oural. En Colombie 
équatoriale, on ne sait rien des gîtes primaires du platine mais la 
présence de pépites avec fer chromé fait supposer que le platine 
se trouve sur gisement dunitique également. À Bornéo le platine 
paraît être lié à des serpentins et semble avoir quelque analogie 
avec celui que l’on trouve dans l'Oural mais dans la zone orientale 
des roches basiques ; le platine est toujours rare, les gisements peu 
importants et distincts des vrais gisements dunitiques (Platine du 
Taguil et de la rivière Aïva, etc. 


M. Georges Baume. — Sur quelques essais métallogra- 
phiques. 

Parmi tous les essais métallurgiques, les plus simples, les plus 
généraux également, sont certainement les essais mécaniques, car 
l'emploi des métaux est dû au moins autant à leurs propriétés méca- 
niques qu'aux propriétés chimiques qu'ils peuvent posséder, 

Après avoir rappelé la forme des essais mécaniques actuelle- 
ment employés et les résultats qu'ils permettent d'obtenir, l'auteur 


16 SÉANCE DU 2? FÉVRIER 


mentionne les expériences de C. E. Guye et de Boudouard qui per- 
mettront sans doute d’arriver prochainement à une nouvelle série 
d'essais mécaniques, l’essar aux efforts alternatifs, dont l’im- 
portance sera considérable en raison de la forme du travail que 
doivent fournir un grand nombre de pièces métalliques. 

L'auteur indique ensuite les raisons qui ont conduit les indus- 
triels à accueillir favorablement l'essai de dureté par la bille de 
Brinell, dès son apparition, et il décrit le petit narteau à bille, 
fort simple, qu'il a étudié et mis au point en collaboration avec 
M. H. E. Watson ‘’ pour des essais analogues, qui permettent, 
comme l'essai de Brinell, de se rendre compte de la charge de 
rupture et de l’homogénité d’un métal déterminé. 

La notion d'homogénité d’un produit métallique peut être éga- 
lement acquise grâce à l'emploi du microscope ; l’auteur rappelle 
à cette occasion la techniqne micrographique courante, très sim- 
ple, dont 1l a fait usage pour la préparation, l'attaque et l'examen 
de ses échantillons ; il donne ensuite quelques exemples person- 
nels d'applications de la micrographie à l’homogénité de diffé- 
rents produits métallurgiques (laitons, etc.) dont l’étude se trouve 
considérablement simplifiée par l'emploi de l’analyse thermique et 
des diagrammes de fusibilité de systèmes métalliques. Ces derniers 
permettent en effet de connaître, par le simple examen microsco- 
pique d’un échantillon donné, sa composition chimique, la nature 
de son traitement thermique (sl est susceptible de prendre la 
trempe), et la forme des traitements mécaniques qu'on a pu lui 
faire subir. 

Il semblerait donc que l’essai microscopique dût, dans un grand 
nombre de cas, remplacer tout autre essai métallurgique ; 1l faut 
toutefois compter avec la propriété que possèdent beaucoup de 
métaux de retenir en solution, même à l’état solide, d’autres élé- 
ments qui, sans changer l’aspect microchimique de l'échantillon, 
en modifient les propriétés mécaniques et rendent par suite l'essai 
mécanique indispensable. Il est d’ailleurs facile, par le moyen très 
simple employé par l’auteur en collaboration avec M. M. Dubois, 
dans un certain nombre d'essais métallographiques?, de mettre 
en évidence les actions réciproques, physiques ou chimiques, que 
peuvent exercer deux métaux l’un sur l’autre : il suffit, en effet, 
de fondre par ordre de densité les deux corps que l’on se propose 
d'étudier ; on obtient ainsi une zone de passage comprenant la 
gamme complète des termes qui conduisent de l’un à l’autre élé- 
ment du système considéré (dans les conditions de l'expérience), 
et que le microscope permet d’étudier ensuite d’une manière très 
satisfaisante. 


1 Cf. ce recueil, 4° Période, t. XXX p. 408, 1910. 
2 Cf. ce recueil, 4° Période, t. XX VIII, p. 386, 1909. 


SÉANCE DU 16 FÉVRIER 17 


Séance du 16 février 


L. de la Rive. Sur les équations fondamentales de l'électrodynamique, — 
A. Schidlof. Sur quelques problèmes récents de la théorie du rayonne- 
ment. 


M. L. De LA Rive fait une communication sur les équations 
fondamentales de l'électro-dynamique. 

Il démontre qu'on peut établir une équation analogue à ces 
équations connues, relative non pas à un courant fermé comme 
Maxwell le fait, mais à l’action d’un élément de courant sur un 
pôle. 

Il faut d'une part admettre la loi de Laplace et de l’autre consi- 
dérer dans l'élément la masse électrique, dg qui se meut avec une 
vitesse constante donnée par v = ds/dt, tandis que l'intensité du 
courant est ? = dg/dt d'équation à démontrer est : 


dfdg} _|[4Z dY}x dX dZ|y dY dX|2 
ae | É F np D) = F æ ke L E T dy ls 
Elle exprime que la dérivée par rapport à # du flux de force 
électrique dû à l'élément est égal, pour un élément de surface 
normal à r, à l'élément correspondant de l'intégrale de surface 
équivalente à l'intégrale de contour de la force magnétique. La 
dérivée par rapport à £ s'obtient en multipliant par v la dérivée 
par rapport à ds considéré comme la direction suivant laquelle se 
meut dg et en prenant pour X, Y, Z, les composantes bien con- 
nues de la force F donnée par la loi de Laplace, on trouve que les 
deux membres ont la même expression multiphiée d’un côté par 
dq.v et de l’autre par 1ds qui sont des quantités égales. 


ids 


A. ScmpLor. — Sur quelques problèmes récents de la théo- 
rie du rayonnement. 

I. La loi de Planck.— Partant du fait que les équations fon- 
damentales de la théorie électro-magnétique de la lumière peuvent 
être ramenées à la forme des équations de Hamilton, on est con- 
duit à penser que le théorème de l’équipartition de l'énergie doit 
s'appliquer à un rayonnement en équilibre thermo-dynamique. 
M. Jeans! a calculé le nombre des paramètres indépendants, en 
supposant le rayonnement enfermé dans une enceinte cubique à 
parois réfléchissantes. Pour les ondes dont la fréquence est com- 
prise entre les limites y et y + dy, il trouve ce nombre égal à : 


16xv° 
c° 


vdy — 2a (1) 
v étant le volume de l'enceinte et € la vitesse de la lumière. En 


! Jeans. Phil. Mag. 10, p. 91, 1905. 


18 SÉANCE DU 16 FÉVRIER 


désignant par T la température absolue du rayonnement et par 
le le rapport de la constante des gaz parfaits R au nombre des 
molécules N, contenues dans 4 gramme-molécule, l'énergie à 
répartir sur chaque paramètre indépendant est 1/2 ÆT, ou : 


R 
k= © 9 
& @ 
On obtient alors pour la densité du rayonnement de fréquence y 
Uy = su dv KT 


Ce résultat étant en désaccord manifeste avec l’expérience, 1l 
faut modifier au moins l’une des hypothèses fondamentales de la 
théorie. 

Abandonnons donc le théorème de l’équipartition de l'énergie, 
et introduisons à sa place l'hypothèse due à M. Planck' que 
l'énergie rayonnante de fréquence y est constituée d'éléments de 
grandeur finie &. Le nombre de ces éléments soit égal à æ. 

Pour exclure toute contradiction avec les bases électrodyna- 
miques de la théorie, 1l faut supposer que l'élément d'énergie se 
répartit toujours également sur un paramètre électrique et sur un 
paramètre magnétique. Le nombre des paramètres indépendants 
se réduit alors à a. 

La répartition des éléments d’énergie est caractérisée par la 
condition du désordre élémentaire. L'état défimtif se trouvera 
réalisé, lorsqu'on aura effectué le plus d’échanges possible des x 
éléments entre les a paramètres du rayonnement. On arrive ainsi 
à la conclusion que a, paramètres restent à chaque instant 
dépourvus d'énergie, et on trouve le nombre a, déterminé par 
l'équation : 

A — Co — No (8) 

n étant le nombre d'éléments, tombant sur un paramètre dans la 
répartition moyenne, c’est-à-dire : 

spéaee (4) 

La probabilité qu'un paramètre donné porte au moins un élé- 
ment d'énergie est : 

&— Go __ % G) 
a a + x 

Pour calculer l’entropie du rayonnement, nous faisons usage 
du principe de Boltzmann sous une forme particulière, signalée 
par M. Einstein * : 


S — S — k log P 
S et S, sont les entropies, correspondant à deux états différents 


! Planck. Verh. deutsche phys. Ges. 2, p. 237, 1900. Vorles. über die 
Theorie der Würmestrahlung, $S 148-152. Leipzig, 1906. 
? Einstein. Ann. d. Phys. 17, p. 132, 1905. 


SÉANCE DU 16 FÉVRIER 19 


d'un même système, P est la probabilité relative de ces deux états, 
et Æ la constante universelle, définie par la formule (2). 
Envisageons donc la probabilité relative de l’état où tous les 
éléments + seraient réunis sur un seul paramètre, vis-à-vis de 
l’état qui s'établit et se maintient spontanément, La formule (5) 
permet le calcul de cette probabilité relative qui s'exprime au 
moyen d'un produit renfermant un très grand nombre de facteurs : 


æ 
11/ x \dx 
= (|. 


2x étant un nombre entier très grand et dx un nombre entier très 
petit en comparaison avec æ. L'application du principe de Boltz- 


manon donne alors : 
0 
S— 8, — # fäeiog * (7) 
a + x 


æ 
L'énergie E, du rayonnement est définie par : 
FE, + er 
On tire facilement de la formule (7) la relation : 
dE, edx æ 
ds — Poe = — kdx he 
La densité du rayonnement u, s'obtient par la substitution : 
PAU lse 
UN 0) 2 
Pour satisfaire à la loi de Wien t il faut remplacer : 
e — hv 
et on arrive à la loi de Planck * : 


LE EIR Lay (8) 


En calculant la grandeur moyenne de l'élément d'énergie à la 
température absolue T, on trouve : 
1.0823 
1.2010 

Cette énergie est presque deux fois plus grande que l'énergie 
cinétique d’une molécule monoatomique à la même température : 

 QARE 

Si l'énergie cinétique des molécules était constituée d'éléments 
de même grandeur que les éléments d'énergie de M. Planck, les 
formules (3) et (4) permettraient d'établir, qu'à chaque instant 
6/7 des 3N composantes de vitesse seraient dépourvues d'énergie. 


£ — 3 RT = 2.71 KT 


® W. Wien. Ber. kgl. Akad. Berlin. 9, II, p. 55, 1893. Planck. Vorles. 
etc. $S 71-90. 
? Planck. Loc cit. 


20 SÉANCE DU 2 MARS 


Cet exemple montre combien les bases théoriques de la loi de 
Planck s'éloignent des idées habituelles sur la nature de la cha- 
leur et de la lumière. 


Séance du 2? mars 
Th. Tommasina. Sur le magnéton de Weiss. 


M. Ta. Tommasina. — Sur le magnéton de Weiss. 

La cristallographie est pour la physique ce qu'est l’embryologie 
pour la biologie, C'est avec des vues, des notions et même un lan- 
gage de technique cristallographique que Curie avait traité dans 
une Note, communiquée à la Société Française de Physique en 
1894, de la possibilité de l'existence de la conductibilité 
magnétique et du magnétisme libre. 

« Le parallélisme des phénomènes électriques et magnétiques 
nous amène naturellement à nous demander, disait-1l, si cette 
analogie est plus complète. Est-il absurde de supposer qu'il existe 
des corps conducteurs du magnétisme, des courants magnétiques, 
du magnétisme libre? » et 1l concluait son raisonnement ainsi : 
« Un corps chargé de magnétisme libre serait donc nécessaire- 
ment dissymétrique énantiomorphe, c’est à dire non superposable 
à son image obtenue par mirage. Deux sphères chargées respecti- 
vement de quantités égales de magnétisme austral et boréal 
seraient symétriques l’une de l’autre. On voit, ajoutait-il, qu'il n’y 
a rien d’absurde, au point de vue de la symétrie, à supposer que 
les molécules dissymétriques douées de pouvoir rotatoire soient 
naturellement chargées de magnétisme libre.» Les recherches 
expérimentales que Curie fit alors pour établir l’existence d’une 
conductibilité magnétique donnèrent des résultats négatifs. Mais 
il fait remarquer que la méthode adoptée, étant fondée sur l’ob- 
servation d’un effet dynamique, ne permettait pas d'apprécier une 
très faible conductibilité magnétique. 

Après Curie, M. Langevin a publié en 1905 une fhéorte ciné- 
tique du magnétisme à laquelle, à l’aide de l'hypothèse du champ 
moléculaire, M. Weiss put faire embrasser les faits du ferroma- 
gnétisme de ses recherches antérieures, ainsi que de celles plus 
récentes, sur l’aimantation aux très basses températures ; 
expériences faites à Leyde dans le laboratoire de M. Kamerlingh 
Onnes et avec sa collaboration ?. Il suffit de lire dans ce travail, 
la description détaillée des expériences et des dispositifs en regar- 
dant les figures de la planche X, contenue dans le fascicule de 
novembre 4910 des Archives, pour se faire une idée de la com- 


1 Pierre Curie. Œuvres. Paris Gauthier-Villars 1908, p. 142. 
2? Archives, 4e période, t. XXX, octobre et novembre 1910. 


SÉANCE DU 2 MARS 21 


plexité et de la délicatesse de ces recherches ainsi que des nom- 
breuses difficultés même d'ordre pratique que les auteurs ont dû 
vaincre et éliminer, pour arriver aux résultats précieux dont ils 
ont par là enrichi la science, et dont tous ceux qui s'intéressent 
avec amour à son progrès doivent leur en être bien reconnais- 
sants. C’est donc en admirateur des travaux du professeur Pierre 
Weiss, travaux qui l'ont placé au premier rang entre les physi- 
ciens contemporains, que je vais lui adresser en cette Note quel- 
ques observations théoriques à propos du magnéton, cette nou- 
velle entité physique qu'il vient de découvrir, puisqu'il le définit 
un constituant universel de la matière *. Aussi ai-je cherché 
dans ses travaux l’origine des idées qui l’ont amené à la création 
du magnéton, ou, plutôt, à la décision qu'il fallait individualiser 
avec un nom le moment magnétique de l’aimant élémentaire. 

Si j'ai bien compris la pensée de M. Weiss, il ne semble pas 
qu'il veuille par cette individualisation soustraire le magnétisme 
fondamental ou naturel de certains corps à la théorie électroma- 
gnétique qui fait du magnétisme une catégorie de phénomènes 
dont la nature ultime et la cause est purement et exclusivement 
électrodynamique. Pourtant, J'ai trouvé dans ses écrits quelques 
idées, qui ne me laissent pas une certitude complète là-dessus. 
Ainsi, dans son récent mémoire paru dans les Archives, que je 
viens de citer, M. Weiss parle de forces exercées par la matière 
pondérable sur les électrons, et du rôle prépondérant que ces for- 
ces jouent quand la température tombe à celle de l’air liquide. 
« On peut leur attribuer, dit-il, en particulier l’importante dimi- 
nution du nombre des électrons conduisant le courant électrique 
dans les métaux qui sont en quelque sorte gelés sur les atomes 
par l’abaissement de la température. » A part cette image des 
électrons qui conduisent au lieu de constituer le courant, et qui 
sont gelés, quand le phénomène température doit s'arrêter par 
définition aux vibrations atomiques et moléculaires, je me demande 
comment M. Weiss peut avoir une vision physico-mécanique de 
cet ordre de phénomènes sans se préoccuper de l’action du milieu, 
actif sans arrêt possible, qui par son travail continu maintient 
aux atomes leur forme délimitée dans l’espace, car, en empêchant 
leur désagrégation par les forces centrifuges des activités cinéti- 
ques internes constitutives, il fournit à chaque type atomique ses 
propriétés caractéristiques, 

Mais l’auteur continue ainsi: «On aurait pu imaginer que 
les mouvements des électrons du magnétisme, invariables ou à 
peu près aux autres températures, commençassent, eux aussi, à 
subir des changements importants au bas de l'échelle thermomé- 
trique. Mais puisque rien dans nos résultats n’invite à faire cette 
hypothèse, on sera tenté plutôt de conclure que les électrons 


22 SÉANCE DU 16 MARS 


du magnétisme sont différents de ceux qui produisent les 
autres phénomènes. C'est moi qui souligne, car je vois dans ces 
conclusions contraires à la théorie électrodynamique du magné- 
tisme, l'embryon de l'idée de laquelle a germé le magnéton. 
Aussi, je passe à l’examen de ses récentes Notes du 9 et 23 janvier 
et du 13 février, lesquelles contiennent un résumé de faits de la plus 
haute valeur qui fournissent à l’auteur certes un fort appui pour 
ses conclusions et font franchir au magnétisme la barrière ato- 
mique par des inductions tirées directement de l'expérience ce qui 
constitue pour la science un progrès réel et important. Je trouve 
très suggestifs les diagrammes et les chiffres des tableaux qui met- 
tent en évidence cette partie aliquote commune ou constante, qui 
semble bien ne trouver d'explication plausible que dans une modi- 
fication magnétique intraatomique. Mais, je me demande si cela 
autorise la conclusion capitale de M. Weiss : « Le magnéton est 
donc un constituant universel de la matière ». S'il est un cons- 
tituant primaire ne l’est-il pas des atomes ferromagnétiques, seu- 
lement ? Et ce magnéton analogue de l’électron, quoique commode 
au point de vue des calculs et des applications analytiques, n'est-il 
pas un progrès à rebours au point de vue de l’ explication physique. 
Pourquoi ne si voir là, simplement, un jeu constant et spé- 
cial d'électrons, c’est à dire de modifications stables mais mobiles 
des champs électromagnétiques toujours actifs du milieu ? 
D'ailleurs M. Weiss déclare appeler magnéton le quotient m : 
N=15,94x10—??, qui est le moment de l’aimant élémentaire Iui- 
même et qui correspond à la partie aliquote des moments des ato- 
mes-gramme. Or, si le magnéton n’est qu'un quotient, il n’est pas 
une entité physique et alors comment peut-il constituer la matière, 
en être un constituant universel ? Le tableau de la troisième Note 
donne le nombre différent de magnétons que possède chacun des 
corps ferromagnétiques, étudiés par l’auteur, chiffres qui corres- 
pondent aux saturations moléculaires. Les magnétons seraient-ils 
des élémentarquantums magnétiques analogues, dans le sens de 
mon interprétation t, aux élémentarquantums lumineux de Stark? 


Séance du 16 mars 


Ed. Claparède. Introduction à l'étude du phénomène psycho-électrique. — 
W. Radecki. Le phénomène psycho-électrique au point de vue physique 
et physiologique. 


M. Ed. CLaparÈèDE rend compte d’une série d'expériences qu'il 
a commencées au Laboratoire de psychologie, en collaboration avec 
M. W. Rapecki, sur le phénomène psycho-électrique. 


1 [’élémentarquantum et la théorie électronique de l’éther. Archives, 
juillet 1910, p. 100-108. 


SÉANCE DU 16 MARS 23 


Depuis une trentaine d'années, divers savants, notamment Vi- 
gouroux, Féré, Tarchanoff, Sommer, etc. ont remarqué que le 
corps humain offre aux courants électriques qui le traversent, une 
perméabilité variant suivant diverses circonstances. Le Dr Vera- 
guth, de Zurich, en 4906, a montré que les processus psychiques, 
notamment les processus affectifs, produisaient d'assez fortes 
déviations du galvanomètre dans le courant duquel le sujet était 
intercalé. Mais jusqu'ici, la cause exacte, psycho-physiologique, 
de ces déviations, n'a pas été découverte. Tandis que les uns 
admettent qu'il s'agit de variations dans la résistance du corps 
humain, d'autres croient que les processus affectifs sont accom- 
pagnés du développement de forces électriques dans l’organisme, 
et que ce sont ces forces naissantes qui font dévier le galvano- 
mètre, mais on ne sait d’ailleurs ni par quel mécanisme la résis- 
tance du corps diminue sous l'influence d’une émotion ou d’une 
excitation affective, ni où prendraient naissance les nouveaux 
courants invoqués. Cette question de la nature du phénomène 
galvanique a été poursuivie par M. Radecki, qui exposera lui- 
même ses recherches. 

La première série d'expériences que nous avons entreprise et 
qui a porté sur 30 sujets (13 h. et 17 f.) avait pour but de nous 
rendre compte des variations individuelles du phénomène psycho- 
électrique. Chaque sujet a été soumis, après avoir été placé dans 
le circuit galvanique alimenté par deux piles Leclanché (même 
dispositif que celui de Veraguth), à 10 excitations successives, 
survenant de 10 en 40 secondes : lumière, piqüre, odeur, bruit, 
calcul mental, etc. Les déviations galvanométriques que ces exCI- 
tations ont occasionnées ont été enregistrées sur un cylindre. On 
a pu ainsi constater les différences individuelles qui se sont mon- 
trées considérables. Quant aux détails de ces différences, ils ont 
été étudiés par M. Radecki, qui les présentera lui-même dans une 
prochaine communication. 

Grâce à l'obligeance de M. le prof. Weber, j'ai pu soumettre à 
l'expérience psycho-électrique, il y a deux ans, quatre idiots com- 
plets venant de Bel-Air. Ces individus n’ont pas donné la moindre 
réaction au galvanomètre, quelle qu’ait été l'intensité des excita- 
tations auxquelles ils furent soumis. Et cependant, ils avaient des 
réflexes musculaires fort exagérés. Il semble que le phénomène 
galvanique nécessite l'intégrité de l'écorce du cerveau. 


W. Rapeckr. Sur les phénomènes psycho-électriques. (Rap- 
port sur la partie physique et physiologique des recherches). 

M. W. Radecki présente les résultats de ses recherches sur la 
nature physique et physiologique des phénomènes psycho-élec- 
triques. 


24 SÉANCE DU 16 MARS 


4 


Les résultats des expériences l’ont amené à admettre que les 
facteurs physiques jouant le rôle prépondérant sont les suivants : 

1) changements de la conductibilité d'ensemble du corps humain 
en rapport avec certaines excitations psychiques. 2) changements 
des potentiels de la peau humaine ; ces changements sont inégaux 
dans les régions qu’on met en contact avec les électrodes, et sont 
aussi concomitants aux certaines excitations psychiques. Le pre- 
mier fait peut être démontré de la manière suivante : On fait tra- 
verser le corps humain par le courant d’une pile électrique, en 
introduisant dans le circuit un galvanomètre. Si on renverse le 
sens dans lequel passe le courant par le corps humain, en con- 
servant le sens qu'il a dans le galvanomètre, les déviations du 
galvanomètre qui sont toujours concomitantes aux certaines exci- 
tations psychiques ne changent ni de direction ni d'intensité, Nous 
remarquons en outre le fait qu'aux états d’excitations du sujet 
correspond toujours une diminution de la résistance de son corps. 
Le galvanomètre comme ampéremètre se prête mal à l’observation 
du second facteur cité, qui ne peut être bien observé qu'au moyen 
d’un voltemètre. Dans mes recherches j'ai employé un électromètre 
capillaire de Lippman qu’on réunissait directement avec deux 
électrodes mis en contact avec les deux mains du sujet examiné. 
On remarque que le niveau du mercure dans l’électromètre se 
déplace chaque fois qu’on soumet le sujet à une excitation psy- 
chique. Ces déplacements nous montrent que pendant l'excitation 
psychique du sujet ont lieu des changements ou en sens contraire 
ou de même sens mais inégaux des potentiels de la surface des 
deux mains. Comme fait important nous devons noter le manque 
d'ordre et de constance dans la direction et dans la valeur quanti- 
tative de ces déplacements. 

Entre le moment où a lieu l’excitant et le commencement d’une 
réaction électrique ou galvanique dans l’organisme humain s'écoule 
une période latente de 0,5 à 15 secondes (2-3 secondes en moyenne) 
Ce fait indique que Ée phénomènes psycho- -électriques ne sont 
pas provoqués par simples réflexes mécaniques, car dans ce cas 
ils succèderaient l’excitant immédiatement, ou après une fraction 
de seconde, mais qu'ils sont les résultats des processus organiques 
compliqués qui ont lieu pendant la période latente. 

En analysant la nature physiologique des changements des 
potentiels sur la surface des deux mains, nous étions amenés à 
considérer ces changements comme une libération dans la peau 
humaine des certaines quantités d'électricité, qui accompagne la 
modification sous l'influence de l'excitation psychique des divers 
processus chimico-organiques. (phénomènes de sécrétion, d’assi- 
milation, etc.) Le fait que les changements des potentiels sont 
plus grands aux endroits de la peau, riches en glandes sudoripares 


SÉANCE DU 6 AVRIL 25 


nous amène à la supposition que ce sont les phénomènes de la 
sécrétion qui surtout influent sur ces changements. La différence 
des potentiels, qui s'établit entre les régions symétriques du corps, 
provient du fait que même dans les endroits symétriques les pro- 
cessus organiques manquent d'une symétrie parfaite, 

Avant d'énoncer une hypothèse sur la nature physiologique 
des changements de la conductibilité du corps humain en rapport 
avec les excitations psychiques, nous allons citer les résultats de 
quelques expériences où on observait les changements de sa résis- 
tance sous influence des processus physiologiques connus. Ces 
expériences nous montrent 1) l'influence des modifications volon- 
taires de la respiration sur la déviation du galvanomètre, qui 
augmente pendant une respiration fréquente et profonde, diminue 
pendant un arrêt volontaire de la respiration ; 2) la diminution de 
la résistance du corps par suite de quelques minutes de travail 
musculaire ou gymnastique. Nous savons en outre que quand les 
glandes expulsent les ‘produits de leur sécrétion, la circulation y 
est beaucoup plus active. Tous ces faits nous amènent à admettre 
que les changements de la conductibilité sont dûs aux effets phy- 
siques (changement du contact interne, modifications de l'échange 
gazeux) des modifications, qui ont lieu dans nos processus vaso- 
moteurs et respiratoire sous l'influence des états émotifs qui seuls, 
comme nous le verrons dans mon second rapport, contenant 
l'analyse des excitants et des sujets examinés, provoquent les phé- 
nomènes électriques et galvaniques dans l'organisme humain. 


Séance du 6 avril 


W. Radecki. Phénomènes psychoélectriques. — A. Schidlof. Sur quelques 
problèmes récents de la théorie du rayonnement. — Ed. Sarasin et 
Th. Tommasina. Etude de l’action de la chaleur sur l’air ionisé par la 
radioactivité induite. 


W. Ranecki. Recherches sur les phénomènes psycho-électrri- 
ques (Rapport sur la partie psychologique des recherches), 


En analysant le genre d’excitations psychiques auxquelles cor- 
respondent les phénomènes électriques dans l'organisme humain, 
on remarque qu'ils ont lieu exclusivement en rapport avec nos 
états émotifs et affectifs. Le fait que les phénomènes psycho-élec- 
triques sont provoqués par les excitants sensitifs, perceptifs, tra- 
vail intellectuel, effort mental, etc., etc., ne contredit pas à notre 
proposition. 

En réalité, nous savons qu'une excitation psychique correspon- 
dante à un genre classificatif unique, n'existe pas, chaque excita- 
tion étant un processus psychique compliqué possède parmi les 
autres facteurs psychiques un «tonus » affectif, C'est à ce tonus 


26 SÉANCE DU 6 AVRIL 


affectif et non à la qualité ou à l'intensité quantitative des exci- 
tants sensitifs que correspond le phénomène psycho-électrique. Si 
pendant ces excitants, c'était la qualité de la sensation qui provo- 
quait la réaction, un certain genre qualitatif des excitants devrait 
toujours provoquer une déviation plus grande qu'un autre genre, 
ce qui n’est pas le cas. Le sujet qui réagit une fois plus fortement 
à une lumière qu’à un bruit, peut, une autre fois, présenter pen- 
dant le bruit une réaction deux ou trois fois plus grande, qu’en 
voyant une lumière. Si, en second lieu, c'était l'intensité objective 
physique de l’excitant qui influait sur la réaction ps. el., un exci- 
tant d’une même intensité devrait provoquer toujours une réaction 
pareille, et l'augmentation ou la diminution de l’intensité physique 
de l’excitant devrait être en rapport constant avec les grandeurs 
des réactions (selon la loi de Weber). Ces deux phénomènes n'ont 
pas lieu. Les séries des répétitions des mêmes excitants nous mon- 
trent la variabilité de la réaction pendant ces excitants, les séries 
où on provoquait les excitants d’une intensité physique strictement 
mesurée (algésimètre, pendule acoustique, éclairage variable, 
olfactomètre), montrent l'absence absolue d’un rapport entre l'in- 
tensité physique de l’excitant et la grandeur de la déviation. (Eclai- 
rage avec une lampe de 10 bougies a provoqué, par exemple, une 
fois chez le AP sujet, une réaction deux fois plus forte que 
l'éclairage avec 4 lampes de 50 bougies.) Quant aux réactions 
provoquées par le travail intellectuel, l'analyse des périodes laten- 
tes qui précèdent ces réactions et qui ne correspondent jamais aux 
périodes latentes des autres cas chez le même sujet, nous montre 
que le travail intellectuel et l'effort mental sont accompagnés par 
une réaction psycho-électrique seulement quand ils sont réunis 
avec une excitation émotionnelle (impatience, embarras, etc.). On 
n’aperçoit point de déviation du galvanomètre pendant le travail 
intellectuel, dès que l'émotion fait défaut. Par contre, tous les 
excitants émotifs (émotions provoquées par association, par la 
lecture des mots dont le sens trouble le sujet, narration des faits 
qui l’émotionnent) sont toujours accompagnés par les réactions 
psycho-électriques intenses. En plus, les expériences, où on provo- 
quait les émotions subconscientes !, nous montrent que même aux 
émotions subconscientes correspondent les réactions psycho-élec- 
triques. 

Quant au genre physique des réactions en rapport avec les exci- 
tations, nous remarquons que les émotions provoquées par les 
impressions immédiates, perceptives, sont mieux notées par le 
galvanomètre, tandis que les déplacements du niveau de la colonne 
du mercure dans l’électromètre correspondent surtout aux émo- 
tions imaginatives et associatives. 


! Faites en collaboration avec M. Abramowski. 


SÉANCE DU 6 AVRIL 27 


L'analyse des excitants permet d'établir les faits suivants : 

1) Pendant les séries courtes d’excitations (5 à 40 minutes), le 
niveau général de la courbe monte en majorité des cas; 2?) les 
séries plus longues (50-60 minutes) provoquent un abaissement 
final de ce niveau ; 3) du même le repos du sujet; #) les excitants 
répétés cessent de produire une réaction dès qu'ils cessent d'être 
accompagnés d’un sentiment de l'étonnement, et commencent à 
être neutres au point de vue émotionnel; 5) les excitants agréables 
ou désagréables provoquent une réaction toujours; 6) l'effort 
volontaire peut diminuer la réaction; 7) pendant deux ou plu- 
sieurs excitants produits simultanément, nous remarquons les 
interférences de la réaction. Le dernier fait s'explique par l'in- 
fluence d'un effort volontaire du sujet qui l’exerce consciemment 
ou subconsciemment sur la réaction, en voulant porter son atten- 
ion sur un des excitants, 

En ce qui concerne l'analyse des sujets, les expériences ont 
donné les résultats suivants : La série des mêmes excitants (lumière, 
bruit, son d'orgue, odeur, travail mental, etc. !) appliqués dans les 
intervalles de 30 secondes, montre les énormes différences indivi- 
. duelles dans les réactions et la sensibilité des sujets. Le nombre 
des déviations pendant cette série qui durait 8 minutes, varie 
depuis 3 jusqu’à 130 chez 30 sujets (13 hommes, 17 femmes). 
L'excitant qui, dans cette série, produit les maxima des dévia- 
tons, est l’excitant auditif (sifflet). La durée des périodes latentes 
oscille entre 0,8 et 5 secondes (2,37 en moyenne). Elle a, comme 
en général, peu de correspondance avec le genre physique d'exci- 
tants, pourtant les réactions provoquées par les excitants tactiles 
sont, dans cette série, presque toujours précédés par les périodes 
latentes plus courtes que les autres réactions. En tout, les sujets 
ont réagi sur 86 %/o d'excitants. Il est à remarquer que les hommes 
ont réagi sur 90 %/o d’excitants, les femmes sur 82 °/,. Si on com- 
pare les chiffres avec les nombres des déviations de la courbe pen- 
dant toute la série qui sont égales : 33,7 (en moyenne) pour les 
hommes, 39,8 (en moyenne) pour les femmes, cette comparaison 
nous montre qu'une grande partie des déviations a lieu chez les 
femmes pendant les intervalles entre les excitations (attente), tandis 
que les hommes réagissent surtout sur les excitants concrets. 

Dans une autre série d'expériences, j'ai appliqué le galvanomètre 
et surtout l’électromètre pour les psycho-analyses. On demandait 
au sujet de faire les associations libres en chaîne en partant d'un 
mot quelconque. Dans ce cas, les associations amènent toujours le 
sujet dans un domaine des idées ou des images, qui ne lui sont 
pas indifférentes. Dès qu'il s'en approche, on voit de considérables 
réactions psycho-électriques. Ce fait permet de découvrir les causes 


! Faite en collaboration avec M. le prof. Claparède. 


28 SÉANCE DU 6 AVRIL 


conscientes ou subconscientes de beaucoup de troubles psychiques 
(psychiasthénie), et peut rendre des services importants en médecine; 
il peut évidemment trouver aussi une application dans la justice. 

Pour conclure, ajoutons que quoique les énormes différences 
individuelles rendent la méthode exposée peu applicable, quand il 
faut comparer les sujets, sa grande valeur repose surtout dans le 
fait qu’elle rend la possibilité de comparer objectivement les con- 
tenus émotifs que présentent, pour un même individu, les diffé- 
rentes excitations, images, représentations ou idées. 


A. Somipcor. Sur quelques problèmes récents de la théorie 
du rayonnement. II. La signification électrodynamique de 
l'élément d'action h. 


Pour expliquer l’origine électrodynamique des éléments de 
l'énergie rayonnante, on peut essayer de se représenter la consti- 
tution des résonnateurs optiques qui, selon M. Planck, sont la 
cause de la structure particulière du rayonnement. M. A.-E. Haas! 
a indiqué une voie à suivre. En se basant sur le modèle de l’atome 
imaginé par M. J.-J. Thomson ?, il obtient pour l'atome d’hydro- 
gène une concordance numérique curieuse. 

En recherchant la signification générale et universelle de l’élé- 
ment d'action, j'ai dû modifier légèrement l'hypothèse de M. Thom- 
son. D’après ses idées, l'électricité positive forme une sphère de 
rayon À et de densité cubique n qui contient un certain nombre 
(N) d'électrons de charge e. On peut maintenant supposer que la 
plus grande partie de la charge négative se trouve réunie au centre 
de la sphère positive en un noyau sphérique compact. Cette sphère 
négative serait dans un état d'équilibre très stable. Elle est entou- 
rée d’un certain nombre d'électrons dispersés dans la sphère posi- 
tive qui, dans certaines circonstances, peuvent quitter la sphère. 

L'absorption de l'énergie rayonnante n’a lieu que si un électron 
quitte la sphère, et l’émission est toujours accompagnée de la 
rentrée d’un électron. L'énergie absorbée ou émise, égale à la 
variation de l'énergie potentielle du système, s'exprime par : 


E=,— (1) 


Sous l'influence d'un champ électrique uniforme la charge 
négative totale se déplace par rapport à la charge positive comme 
un système rigide. La force F sollicitant la charge Ne est propor- 
tionnelle à l’écart de la KI ANA d'équilibre Ar : 


2 0< 


N 
F= — = eNe Ar = US An 


* A.-E. Haas. C. R. de l’ Acad. de Vienne. T. 119. I Février 1910. 
* J.-J. Thomson. Die Korpuskulartheorie der Materie. Die Wissen- 
schaft Fasc. 25. 1908. 


SÉANCE DU 6 AVRIL 29 


Il en résulte pour la fréquence des oscillations propres du sys- 


tème, y : 
e N 


_ 2x Ay AM 
M représente la masse du système oscillant. La grande majorité 


des charges étant contenue dans le noyau central, on peut exprimer 
la masse électromagnétique des charges négatives par : 


M=N/m (3) 
m étant la masse électromagnétique d'un électron isolé. On a 


donc : 
Set À er qe sir (Ne (4) 


(2) 


v 


V N': 
La densité p de l'électricité positive étant la même dans tous les 
résonnateurs, on doit avoir : 


-… 


— Const. 


Il en résulte que À est une constante absolue dont la valeur ne 
dépend que des constantes universelles e, p, m. 

L'expérience vérifie cette prévision, Si on admet que le nombre 
d'électrons contenu dans un atome est proportionnel au poids ato- 
mique, le rapport AS/N doit être sensiblement proportionnel à 
uw. —1/N où y, est l'indice de réfraction pour des longueurs d'onde 
infinies et M le poids moléculaire du gaz". 

Les nombres suivants ont été tirés des mesures de dispersion 
des gaz faites par C. et M. Cuthbertson ?. 


| | 6 
| | jé ri RL ET 
6 La 6 Fo 

| | 
Hélium or 69.4 | 1284/4160 
. | ” : ei 133 6.65 | 1.37 
AO... | 40 559 | 14.0 1.55 
Krypton. ..…. | 80 840 | 10.5 1.48 
Xénon ...... | 128 1364 | 10.65 1.48 
Oxygène.....| 32 266 | 8.3 1.42 
Azote....... | 28 295 | 10.5 1.48 
Hydrogène... | | 136 | 68.0 2.02 
Phosphore. ..| 62 | 1165 18.8 1.63 
Arsenic...... | 150 1550 10,3 1.47 
Soufre....... | 64 | 1045 | 16.35 1.57 
Mercure. .... | 200 1765 8.82 1.44 
LE trie 64 641 10.0 1.47 
| : ER FOTERER | 34 624 | 18.3 1.62 


! u,, —1 est, comme l’on sait, proportionnel au volume des molécules. 
? C. et M. Cuthbertson. Proc. Roy. Soc. London (A.) 83 pages 149 
151 et 171. — 1909. 


30 SÉANCE DU 6 AVRIL 


Pour des gaz d’un poids moléculaire élevé le rapport y, —1/M, 
et par conséquent p, est approximativement constant. 
6 


Es 
M 


est sensiblement constant pour tous les gaz, excepté l'hydrogène. 

La formule (4) fournit donc un nombre très approximativement 
constant pour la plupart des atomes. En utilisant la donnée rela- 
tive à l'atome de mercure, j'ai obtenu : 


h—62X10 
Ce chiffre peut être encore augmenté, si l’on admet, conformé- 
ment aux résultats des mesures de dispersion, que Hi masse de 
l'électron à l’intérieur de l'atome est plus grande que dans le vide. 


Une méthode due à Drude permet de calculer le rapport e/m pour 
l’électron oscillant à l'intérieur de l'atome d'hydrogène. On trouve : 


— 1.37 X 10° U.E.M 
D'où l’on tire : 
m = 1.14 X 107°7 
Cette valeur introduite dans la formule (4) donne : 
h — 6.05 X 107 *" 
La valeur indiquée par M. Planck est : 
h = 6.5 X 107 


Ed. Sarasin et Th. Tommasina. — Ætude de l’action de la 
chaleur sur l'air ionisé par la radioactivité induite. — Con- 
statation d'une différence de nature entre le produit de la 
désactivation lente et celui de la désactivation rapide. 

Dès nos premières recherches sur la nature du phénomène de 
l'accroissement de l'effet de décharge par une faible élévation de 
température des cloches métalliques à radioactivité induite de lon- 
gue ou de courte durée, nous nous sommes préoccupés de la pos- 
sibilité que la convection calorique, agissant directement sur l’air 
ionisé, puisse y Jouer un rôle important, sinon exclusif, Voici les 
considérations qui nous avaient amenés, ensuite, à exclure cette 
interprétation. 

1° L'effet de la chaleur se mamifestait avec des cloches métalli- 
ques éventées avant la chauffe, chauffées ouvertes et éventées 
encore avant d’être placées sur le plateau de l’électroscope; puis, 
maintenues ouvertes sur ce dernier, pendant les lectures, pour 
empêcher toute condensation de l’émanation, toute augmentation 
de pression, de saturation ou de densité de l’air ionisé. 

20 Nos résultats toujours négatifs, pour l'effet de la chaleur, 


SÉANCE DU 6 AVRIL 31 


lorsque les cloches activées étaient en verre, même si l'on opérait 
à cloche fermée; tandis que l'air ionisé s'y conservant mieux à 
cause de leur mauvaise conductivité, aurait dû, en ce cas, subir 
davantage la modification calorifique. 

Cette anomalie apparente est expliquée en attribuant l'effet de 
la chaleur, au contraire, à une expulsion partielle plus facile par 
les corps conducteurs que par les diélectriques, étant établi que 
l'émanation pénètre ces derniers, y est absorbée et s'y conserve 
très longtemps active. 

Pourtant, comme ces résultats ne tranchaient pas la question, 
nous en avons continué l'étude à l’aide d’une série de modifica- 
tions expérimentales qui nous ont fourni les résultats que nous 
présentons, dans cette Note, avec une description sommaire des 
opérations exécutées. 

Après les importantes recherches de Rutherford ! sur la recom- 
binaison des ions dans l'air et dans d’autres gaz à la pression 
atmosphérique, M. R.-K. Me. Clung en poursuivit l'étude pour 
des pressions différentes et trouva que la valeur du coefficient de 
recombinaison est indépendante de la pression de l'air dans lequel 
l’ionisation se produit?. Ensuite, ce même auteur, par ses expé- 
riences sur les effets de la lempérature sur l'ionisalion pro- 
duite dans les gaz par les rayons de Rôntgen * put établir que 
pour des variations comprises entre 15° et 272 l'ionisalion 
est indépendante de la température, bien que dépendante de la 
densité et proportionnelle à la pression par unité de volume du 
gaz. L'accroissement de la vitesse de décharge électrique, produit 
par de faibles élévations de température sur l'air 1onisé, ne doit 
donc pas être attribué à l'accroissement de l’ionisation, mais à 
celui du nombre des chocs dû à l'accélération thermique de la 
vitesse des ions. 

Dans notre cas, la production des ions est due au dépôt actif et 
au rayonnement complexe «, B, 7, pouvant consister en une 
expulsion partielle du dépôt actif ou en sa désagrégation, qui est 
la source du rayonnement secondaire. Or, tandis que la désagré- 
gation atomique n'est pas influencée par la température, une telle 
influence peut parfaitement exister dans la cause mécanique qui 
accélère l'expulsion du dépôt actif en couches superficielles. C'est 
ce phénomène purement mécanique, que nous supposions dû à la 
vibration thermique des molécules de la surface intérieure de nos 
cloches métalliques, que nous avons indiqué par le mot surdésac- 
hivation. W nous fallait donc établir si une telle expulsion avait 
heu ou non, et, en ce dernier cas, si l'effet pouvait être obtenu en 


! Rutherford. Phil. Mag., Novembre 1897. 
* R.-K. Me. Clung. Phil. Mag., t. III, 1902, pp. 283-305. 
* Idem. Phil. Mag., t. VII, 1904. pp. 81-95. 


32 SÉANCE DU 6 AVRIL 


chauffant l'air ionisé renfermé dans nos cloches sans chauffer les 
cloches elles-mêmes; voici comment nous avons procédé. 

Nous avons commencé par confirmer, à l’aide du dispositif que 
nous allons décrire, la constatation déjà faite par Me Curie, qu'il 
y a un dépôt actif, en suspension dans l'enceinte activante, conte- 
nant de la vapeur d’eau, qui subit l’action de la pesanteur, de 
façon que les surfaces horizontales en reçoivent davantage, et sont 
donc plus radioactivées que les surfaces verticales ou inclinées. Le 
dispositif que nous avons imaginé dans ce but et utilisé est très 
simple. Un disque en métal, en verre ou en une substance quel- 
conque, sert de couvercle mobile à un cylindre métallique dans 
lequel est placé le sel de radium, le tout est recouvert par une 
cloche en verre constituant la chambre d'activation ou d’ionisa- 
tion. Le jour suivant, ou après 4 ou 5 heures seulement, on sort 
le disque et on le place sur un autre support cylindrique, identi- 
que au premier, mais non activé, qui se trouve sur le plateau de 
l’électroscope. On constate, en retournant le disque après chaque 
série de lectures, que les décharges produites par la face de des- 
sous du disque, qui était en regard du radium, sont plus faibles 
que celles produites par la face opposée qui a reçu le dépôt actif 
sous l’action de la pesanteur. Le gaz émanation se trouve partout 
dans l'enceinte activante, car le 
disque ne fermant pas herméti- 
quement le support cylindrique 
n'en empêche point la diffusion. 

On a ainsi les deux courbes 
de désactivation A et A’ de la 
figure 2, qui sont sensiblement pa- 
rallèles, et dont la forme est du 
type TI de la figure 4, de notre 
précédente Note, que nous repor- 
tons ici, car cela confirme nos pré- 
cédentes conclusions. 

Ensuite, nous avons fait cons- 
truire deux autres cloches métalli- 
ques de même dimension que les 
précédentes, dans le but d'utiliser , ri TD IIS LES 
l’action de la pesanteur pour le Fig. 1 
transvasement du gaz émanation 
et du dépôt actif solide qui s’y trouve en suspension, Nous avons 
pu reconnaître, dès le début, un fait important pour notre étude, 
qui consiste en ceci : que tandis qu'il nous a été facile de verser 
dans les nouvelles cloches non activées une partie du contenu 
actif de la cloche à radioactivité induite à désactivation rapide, 
aucune trace de dépôt solide n’a pu être transvasé, aucune trace 


SÉANCE DU 6 AVRIL 33 


d'émanation n'a pu être commu- 
niquée par diffusion de la cloche 
à radioactivité induite à désacti- 
vation lente à la cloche non acti- 
vée. Même en faisant varier les 
températures respectives des deux 
récipients, de façon à faciliter le 
mélange de l'air ionisé de l’un avec 
l'air chauffé ou refroidi de l’autre, 
rien ne nous à permis de cons- 
tater la moindre accélération de 
décharge; tandis, qu'au contraire, 
nous pouvions suivre, pendant des 
heures, la courbe indiquant la 
disparition lente de l'activité du 
mélange obtenu par le transvase- 
ment du contenu d’une cloche à 
activation de courte durée dans 


une cloche non activée. Ce sont les courbes B et B" de la figure 2, 
analogues au type [ de la figure 4, courbes qui constituent une 
nouvelle confirmation de nos conclusions sur ce sujet. 


Fig. 2 


70 80 930 100 minules 


Comme on sait, les surfaces métalliques facilitent la recombi- 
naison des ions, d’après cela, nous avons cru nécessaire de répéter 
ces essais avec une cloche en verre non activée, Le transvasement 
dans cette cloche nous a donné les mêmes résultats positifs pour le 
produit à évolution rapide, et toujours des résultats négatifs pour 
le produit à évolution lente. Il faut donc conclure que la cloche à 
désactivation lente ne renferme point, sensiblement, ni d'émana- 
tion libre, ni de dépôt solide en suspension. Or, comme cette 


3 


34 SÉANCE DU 20 AVRIL 


cloche montre si nettement l'effet des faibles élévations de tempé- 
rature, cet effet ne peut pas être dû à l’expulsion supposée, au 
moins en sa totalité. Nous sommes forcés de faire cette dernière 
restriction, à cause des faits suivants : Nous avons constaté que 
l’air ionisé contenu dans cette cloche, arrivait à saturation, ou 
mieux à un certain degré de saturation, sans chauffage, en quel- 
ques heures, et qu'il suffisait de la placer verticale, ouverte en bas, 
pendant quelques minutes, pour pouvoir ensuite reconnaître, 
immédiatement, la disparition du surplus de son air ionisé, qui 
paraît subir l'effet de la pesanteur, car, si la cloche est ouverte en 
haut au lieu de l'être en bas, la chose ne se vérifie pas. 

L'expérience qui nous a, enfin, montré qu’on peut obtenir l'effet 
thermique d’accélération de la décharge sans l'intervention de 
l'expulsion du dépôt actif, est la suivante : Au lieu de chauffer sur 
le calorifère la cloche active même, nous y avons chauffé une clo- 
che non activée et avons, au contraire, refroidi la première; puis, 
après avoir placé celle-ci, pendant quelques instants, sur la cloche 
chauffée pour recevoir une partie de son air chaud, nous l'avons 
placée rapidement sur le plateau de l’électroscope avant que le 
métal en fût sensiblement chauffé. Nous avons constaté que la 
décharge était accélérée presque autant que lors de la chauffe des 
parois mêmes de la cloche active. Ce qui montre que la modifica- 
tion apportée par de faibles élévations de température consiste 
dans une accélération, due à la convection calorifique, de la vitesse 
des ions produits par le rayonnement du dépôt actif, mais qui 
n'exclut pas qu'il puisse y avoir aussi une surproduction de ions 
par ce dernier, avec ou sans l'intervention de la vibration thermi- 
que moléculaire du métal activé, qui a lieu lorsqu'on chauffe les 
cloches activées mêmes. 

Il reste l’anomalie des cloches en verre, nous en poursuivons 
l'étude, car il se peut, comme nous l’avons déclaré dans notre pré- 
cédente Note, qu'il suffise, pour obtenir un effet analogue, d’éle- 
ver la température. 


Séance du 20 avril 


F,-A. Forel. Observations météorologiques faites à Genève au XVIII: siècle 
par Charles de Lubières. — Raoul Gautier. À propos de la communication 
de M. Forel. — Le même. La climatologie du Grand Saint-Bernard. — 
Arnold Pictet. Un nouvel exemple de l’hérédité des caractères acquis. — 
J. Carl. Sur un diplopode hermaphrodite. 


M. F.-A. Forez, de Morges, présente au nom de M° Aimée 
Dufour-Falquier, veuve du professeur Charles Dufour de Morges, 
cinq cahiers manuscrits d'observations méléorologiques faites à 


SÉANCE DU 20 AVRIL 35 


Genève de 1760 à 1789; ces cahiers proviennent des papiers 
de Ch. Dufour, et ses héritiers en font don à l'Observatoire de 
Genève. 

Ces cahiers sont dus à Charles-Benjamin de Langes, baron de 
Lubières, membre du Conseil des CC de Genève, né en 1744, 
décédé le 4° juin 4790 à Genève. Il était fils de François de 
Langes de Montmirail, gouverneur d'Orange puis de Neuchâtel, 
reçu bourgeois de Genève en 1703, et de Marie Calandrini; il 
avait épousé en 1760 Olympe Camp. Il est mort sans enfants. 

Les observations météorologiques ont été faites au lieu de sa 
résidence, en hiver à Genève, rue Beauregard, en été à Saconnex. 
Lubières avait des attaches au Grand-Saconnex, où la famille de 
sa grand'mère maternelle, née Julie de Pelissari, possédait une 
terre, aujourd'hui propriété Pasteur ; plus tard, en 1768, Charles 
de Lubières acheta une propriété au Petit-Saconnex, à l'angle des 
chemins du Bouchet et du Marais, près de ce qui est aujourd'hui 
l’Asile des Vieillards. 

Les observations comprennent entre autres : des lectures du 
thermomètre, deux fois par jour, du baromètre, de la girouette, 
de l'hygromètre, la caractéristique du temps et de ses accidents 
aux différentes heures de la journée, la pluie, la neige, l'évapo- 
ration, des notes phénologiques, des notes sur tous les phéno- 
mènes actuels locaux et généraux. 


M. Raoul GawrieR, directeur de l'Observatoire, remercie M. le 
prof. F.-A. Forel de ce qu'il vient de dire. L'Observatoire est très 
reconnaissant à Madame Charles Dufour et à M. Forel du beau 
don qu'ils font à notre institut astronomique et météorologique. 
L'observatoire possède déjà, pour le XVIII siècle, quelques docu- 
ments importants au point de vue météorologique, dans les 
registres manuscrits de Jaques-André Mallet, de Marc-Auguste 
Pictet et de Frédérie-Guillaume Maurice. Ces documents joints 
aux observations déjà imprimées dans le Journal de Genève de 
4787 à 17M et dans les £phemerides Soctetatis meteorologicæ 
Palatinæ de 1782 à 1789 fournissaient des données intéressantes 
au point de vue de la pluie jusqu’en 1782 en arrière, avec une 
lacune. La série de 30 ans des observations de Charles de Lubières 
comble la lacune et permettra de reculer cette série en arrière, 
peut-être jusqu'en 1770. C’est donc un précieux accroissement 
pour les archives météorologiques de Genève. 


M. Raoul Gaurier fait une communication sur la C'{imatolo- 
gie du Grand Saint-Bernard. Les observations météorolo- 
giques qui se font dans cette station élevée ont commencé au 
mois de septembre 1817 au moyen d'instruments qui y ont été 


36 SÉANCE DU 20 AVRIL 


installés à cette date par M.-A. Pictet. Elles n’ont pas cessé depuis 
lors et ont toujours paru dans les cahiers mensuels des Archives, 
par les soins de l'Observatoire de Genève, qui s'occupe actuelle- 
ment, depuis plusieurs années, à traiter l’ensemble de ces obser- 
vations en vue d’une climatologie complète de cette station. 

M. Gautier a déjà publié quelques aperçus de ce travail, relatifs 
à la température et aux précipitations *. 

Il expose à la Société les graphiques relatifs à ces éléments et 
d’autres relatifs à la pression atmosphérique et à la nébulosité, en 
opposant les courbes moyennes de Genève (Observatoire) et du 
Si-Bernard. On y constate aisément les différences que produit la 
différence de hauteur à notre latitude. La cuvette du baromètre 
du St-Bernard est à 2476 m., celle de l'Observatoire de Genève 
à 405 m. 


M. Arnold Prcrer. Un nouvel exemple de l'hérédité des 
caractères acquis. 

Nous avons signalé précédemment? deux exemples de l’hérédité 
des caractères acquis chez les Iépidoptères. 

Voici un nouvel exemple, que mettent en évidence les récentes 
expériences que nous avons entreprises à l’Institut de zoologie de 
l’Université de Genève, et qui montre encore la facilité avec 
laquelle une habitude nouvellement acquise à une espèce, peut se 
transmettre par hérédité, à la génération suivante. 

Nous sommes parvenus, en 4910, à accoutumer des chenilles 
de Lasiocampa quercus (nourriture normale : Chêne, Rosacées, 
etc.) à consommer des aiguilles de Sapin. Les chenilles de toute 
une ponte (150 environ) sont divisées en deux lots d’égale quan- 
tité ; les individus de l’un de ces lots sont nourris d’Evonymus 
japonicus et considérés comme témoins. Disons, en passant, que 
les chenilles qui ont coutume de se nourrir de feuilles plates 
entament celles-ci par le bord latéral en se fixant elles-mêmes à la 
tige ou à une branche voisine. L’écartement des mandibules des 
larves de lépidoptères est calculé pour l’épaisseur des feuilles et ne 
peut pas dépasser une certaine limite. 

Les individus du 2° lot sont placés, dès la troisième mue, en 
présence d’aiguilles de Sapin, à l'exclusion de toute autre essence 
végétale. Pour consommer ces aiguilles, les chenilles agissent 
tout d’abord comme si elles se trouvaient en présence de feuilles 


1 Neuvième Congrès international de Géographie. Compte rendu des 
travaux. Tome II, p. 348 et p. 466. 

? Voir Archives des Sc. phys. et nat. 4 pér., vol. XX VIII, p. 504, et 
Verhandl. der Schweiz. Naturforsch. Geselisch., 93, Jahresvers. Basel. 
1910, vol. I. p. 272. 


SÉANCE DU 20 AVRIL 37 


plates et essaient de les entamer par le côté; mais leurs mandi- 
bules ne peuvent donner assez d'écartement pour cela, en sorte 
que nos bestioles s'épuisent rapidement en de vains efforts. 
Cependant, plusieurs d’entre elles, en montant le long des aiguil- 
les, arrivent à conduire leur tête au sommet de celles-ci, qui est 
cônique, plus mince que le reste et, par conséquent, mieux appro- 
prié à l’écartement de leurs pièces buccales. Une fois que le som- 
met de l'aiguille a été mangé, il leur est facile de creuser dans 
l'épaisseur de celle-ci et c'est de cette façon que les chenilles arri- 
vent à se nourrir. Voici donc le caractère nouvellement acquis, 

ui consiste, pour les individus de nos expériences, à entamer 
les aiguilles de haut en bas et à les creuser, alors que leurs 
congénères, dans leur vie habituelle, entament les feuilles par 
le côté et les mordent. 

Voyons comment se comporteront les chenilles de la seconde 
génération, c'est-à-dire celles qui sont issues de parents adaptés 
au Sapin, une fois qu'elles se retrouveront dans les conditions 
normales, en présence de feuilles d'Evonymus. 

Il est manifeste qu'elles ne se rendent pas bien compte de la 
façon dont elles doivent s'y prendre pour ronger les feuilles 
de cet arbuste et qu'elles cherchent à les entamer par le sommet. 
Et, comme les larves de cette seconde génération sont chétives, 
le mortalité est assez élevée ; une vingtaine seulement arrivent 
à s'adapter à nouveau au régime avec des feuilles plates, mon- 
trant ainsi qu'elles sont revenues, quoique avec difficulté, au 
mode habituel de l'espèce. Mais, trois de ces chenilles ont tout 
particulièrement de la peine à se nourrir; suivons-les donc attenti- 
vement dans les efforts qu’elles font pour cela. Après avoir essayé, 
en vain, d'une feuille, nous les voyons passer à une seconde, puis 
à une troisième et se reposer un instant. Ensuite, elles recom- 
mencent les mêmes essais, arrivant à peine à ingérer quelque 
mince parcelle d’épiderme foliaire, pour devoir se reposer à nou- 
veau. Enfin, elles se promènent activement dans l’éleveuse et le 
long des branchages. L'une d'elles, au hasard de sa promenade, 
grimpe le long d’une petite branche et en atteint le sommet qui 
est légèrement pointu, nu et dépourvu de feuilles ; puis, elle se 
met à entamer le sommet de cette branche de haut en bas et à 
creuser dans l'intérieur de celle-ci, de la même façon que ses 
parents avaient pris l'habitude de consommer les aiguilles de 
Sapin. Les deux autres chenilles font de même. 

Ainsi donc, des larves de Lasiocampa quercus ont dû prendre, 

our l'ingestion de leur alimentation, une habitude nouvelle, et 
cette habitude se transmet, dans les conditions que nous venons 
de décrire, à trois de leurs descendants sur vingt. 

Lors de celles de nos expériences qui eurent pour résultat 


38 SÉANCE DU 20 AVRIL 


l'adaptation des chenilles d'Ocneria dispar à la nourriture avec 
des aiguilles de Conifères, les difficultés qu'ont éprouvées ces che- 
nilles ont été plus grandes que celles éprouvées par les Zasio- 
campa quercus dans les mêmes circonstances ; le 75 °/o des 
Ocneria dispar mis à ce régime, n’ont pas réussi à s’y accou- 
tumer et ont péri. Mais, ce qui montre que l'habitude acquise 
par nécessité peut se transmettre aux descendants, c'est le fait 
que les Ocneria dispar de la seconde génération se sont mises, 
très facilement et presque sans hésitation, à entamer les aiguilles 
par leur sommet, en sorte qne la mortalité a été presque nulle, 
Dans ce cas, le caractère acquis est manifestement transmis. 

Du reste, des exemples de ce genre sont fréquents dans la lépi- 
doptérologie expérimentale, principalement en ce qui concerne 
l'alimentation des larves. Nous savons, en effet, d’après les résul- 
tats d'expériences antérieures, que les chenilles de lépidoptères 
ont souvent de la peine à se nourrir de feuilles qui ne sont pas 
celles que consomme l’espèce habituellement. Cette adaptation se 
manifeste par un ralentissement dans la croissance et une dimi- 
nution de taille des larves, et, corrélativement, par un nanisme 
accentué et la pâleur des papillons. Or, si le régime nouveau est 
continué aux individus de la génération suivante, on observe fré- 
quemment que ces caractères d'infériorité tendent à disparaître 
dans bien des cas ; à la 3° ou 4° génération déjà, les larves ne 
sont plus gênées par le régime nouveau, et l’adaptation peut être 
considérée comme faite. Cela nous montre encore que ces indi- 
vidus héritent de leurs parents l'habitude nouvelle que ceux-ci 
ont été forcés de prendre et, aussi, qu’ils la perfectionnent. 


Dr J. Car. Sur un Diplopode hermaphrodite. 

En étudiant la riche collection de Diplopodes rapportée de la 
Colombie par M. le prof. O. Fuhrmann j'ai pu constater chez un 
Polydesmide du genre Euryurus (E. tænia Pet.) une anomalie 
rare et digne d’être signalée. 

Cet exemplaire porte sur le septième segment, antérieurement, 
du côté gauche, une patte ambulatoire normale et du côté droit 
une patte copulatrice de la forme caractéristique pour l'espèce. 
Karson‘ avait déjà observé cette anomalie chez la même espèce, 
sur un des exemplaires ayant servi à la description de PETERs. 
Mais n’ayant pas disséqué l’animal il ne put trancher la question 
de savoir s’il s'agissait d’un arrêt de développement chez un g ou 
d’un exemple de véritable hermaphroditisme, 

En désarticulant l’exemplaire récolté par M. Fuhrmann nous 
avons constaté qu'il contenait un très grand nombre d'œufs. Il 


1 Zum Studium der Myriopoda Polydesmia. Archiv für Naturge- 
schichte. Bd. XLVII. 1881, p. 44, 45, fig. 29. 


SÉANCE DU 4 MAI 39 


possède aussi des vulves comme les Q normales et représente done 
une femelle à hermaphroditisme extérieur partiel. 

Une anomalie tout à fait analogue a été observée par Broele- 
mann* chez un autre Polydesmide, Aphelidesmus hermaphro- 
ditus Brül. Le genre Aphelidesmus est très voisin de £uryurus 
et habite aussi la Colombie. Ceci éveille l'idée que certains 
groupes de Diplopodes pourraient être plus disposés au herma- 
phroditisme que d'autres ou que certaines régions favoriseraient 
l'apparition de cette anomalie. 

Ces trois observations pourraient encore être invoquées pour 
prouver l'homologie des pattes copulatrices avec les pattes ambu- 
latoires si les données de la morphologie comparée n'en fournis- 
saient pas à elles seules déjà des preuves suffisantes, 


Séance du 4 mai 


J. Briquet. Sur la structure et les affinités d’Ilecebrum suffruticosum. — 
Perrot et Baume. Sur quelques constantes chimiques des gaz liquéfiés. 
— L. Duparc, Jeanneret et Wunder. Sur le dosage et la séparation du zir- 
conium d'avec la silice, le fer et l’alumine. 


M. J. Briquer. Sur la structure et les affinités de l'Ilecebrum 
suffruticosum L. — L'Illecebrum suffruticosum L. est une 
Caryophyllacée inférieure du groupe des Paronychiées — parti- 
culière aux garigues de l'Espagne, de l'Algérie et du Maroc — 
dont les affinités ont été diversement interprétées. On s’est sans 
doute rendu compte de bonne heure qu'elle n'appartenait pas au 
genre /{lecebrum, dans le sens où ce groupe est circonscrit depuis 
plus d'un siècle, mais on l’a rapportée tantôt au genre Herniaria, 
tantôt au genre Paronychia. Ce désaccord provient de ce que 
les auteurs n'ont pas fait une étude détaillée de la fleur et du fruit, 
fort petit, il est vrai, C’est pour combler cette lacune que le pré- 
sent travail a été entrepris, en complétant l'examen morphologi- 
que par une étude anatomique. Les principaux résultats de ce tra- 
vail sont les suivants : 

Le calice gamosépale se compose d’un tube obconique et de cinq 
pièces en forme de capuchon, pourvues d’une apophyse dorsale. 
Les cinq staminodes alternisépales sont insérés sur le tube À la 
hauteur des sinus; les cinq étamines épisépales sont logées à l'in- 
térieur des capuchons! Le pollen est à 10-12 pores. L'ovaire se 
compose de deux carpelles ouverts concrescents; il porte un style 


! Myriapodes du Haut et Bas Sarare. Annales Soc. entom. de France, 
vol. LXVII, 1898, p. 324, 325, PI. 28, fig. 9. BrœLEmaxx ne semble pas 
avoir eu connaissance de la note de Karsou. 


40 SÉANCE DU 4 MAI 


à deux stigmates antéro-postérieurs ; il est uniloculaire et contient 
un ovule unique, campylotrope, bitégumenté, placé au sommet 
d’un long funicule, à micropyle infère. Dans la suite, le funicule 
s'allonge, la semence se renverse, le micropyle devient supère, ce 
qui a pour conséquence que la radicule de l'embryon incurvé est 
dirigée vers le sommet de l'ovaire. 

Ces caractères font, sans contestation possible, de l’Z{lecebrum 
suffruticosum une espèce du genre Paronychia. A l’intérieur 
de ce genre, cette espèce doit former une section spéciale Pseud- 
herniaria, caractérisée par la présence de cymes terminales, fpar 
les stipules bractéiformes réduites, et par un phellogène caulinaire 
péricyclique. Ce dernier caractère est très remarquable : les Paro- 
nychia étudiés jusqu'ici ayant un phellogène hypodermique. 

L'auteur donne encore de nombreux détails sur la structure 
intime de la tige et de la feuille dans leurs rapports avec l'écologie 
de la plante. 

Le travail de M. Briquet fait d’ailleurs l’objet d'un mémoire 
détaillé, avec figures, dans l'Annuaire du Conservatoire et du 
Jardin botanique de Genève, t. XIII-XIV. 


M. F.-Louis Perror. Sur quelques constantes physicochimi- 
ques des gaz liquéfiés. 

Au cours des recherches sur les gaz liquéfiés, qu'il poursuit en 
collaboration avec M. Georges Baume, l’auteur a été conduit à 
déterminer ou à reprendre la densité et la tension de vapeur à 
différentes températures d’un certain nombre d’entre eux. 

La méthode employée, extrêmement simple, a permis de con- 
trôler d’une façon directe la méthode volumétrique utilisée dans 
les recherches des mêmes auteurs sur les courbes de fusibilité des 
mélanges gazeux; la précision a été trouvée de l’ordre de 1 :4000, 
conformément aux résultats du calcul. 

Les gaz étudiés, purifiés par liquéfaction et distillations frac- 
tionnées, étaient conservés à l’état liquide dans une ampoule con- 
venablement refroidie et réunie au reste de l'appareil; celui-ci, 
débarrassé de toute trace d’air, était entièrement construit en verre 


soudé. 
Les mesures de densité ont été effectuées au moyen d'un dilato- 


mètre annulaire (contenant le thermomètre indicateur), convena- 
blement gradué et calibré. Comme précédemment, MM. Perrot 
et Baume ont déterminé volumétriquement le poids du gaz, dans 
un ballon jaugé, maintenu à 0°, avant son introduction dans le 
dilatomètre; les indications d’un manomètre gradué, joint à l’ap- 


1 


Cf. G. Baume. Journal chim. phys., t. IX, p. 269, 1911. 
* Cf. G. Baume. Comptes rendus, t. 148, p. 1322. 


SÉANCE DU 4 MAI 41 


pareil, permettaient de calculer le poids du gaz contenu dans le 
ballon, à condition de connaître sa densité et sa compressibilité. Il 
suffisait ensuite de condenser la quantité voulue de gaz dans le 
dilatomètre, au moyen d'air liquide. 

Les auteurs ont déterminé la densité des gaz liquéfiés à diverses 
températures, par réchauffement très lent et agitation fréquente 
du liquide par le thermomètre indicateur, dans une enceinte trans- 
parente convenablement protégée contre le rayonnement ; les résul- 
tats obtenus au cours de mesures successives ont présenté une 
concordance satisfaisante. 

C'est par une méthode semblable qu'ont été mesurées les tens 
sions de vapeur des divers gaz étudiés au moyen de l'appareil 
employé pour l'étude du point de congélation des mélanges gazeux 
aux basses températures, la température étant maintenue uniforme 
au sein de la masse liquide par agitation électromagnétique; les 
tensions étaient indiquées par le manomètre soudé à l'appareil. 

Les auteurs publieront ailleurs les tables de densités et de ten- 
sions de vapeur établies suivant les indications qui précèdent; ils 
donnent simplement dans le présent résumé, à titre d'exemple : 

1° La concordance de quelques mesures effectuées sur SO, avec 
les mesures antérieures (densités) : 


— —52 —35° —1T 
Mesures anciennes.... 1.560 1.521 1.478 
Pat: Bx soie 1.559 1.520 1.479 


2° La concordance de trois séries de mesures sur l’oxyde de 
méthyle, correspondant à des remplissages du dilatomètre aussi 
différents que possible (Densités de (CH,),0 à —70°) : 


0.798; 0.797; 0.797. 


3 Un tableau résumant les résultats obtenus pour les divers 
gaz étudiés par MM. Perrot et Baume : 


(Tempér. de fusion) (Temp. d'ébull. sous 760®*) (Densité entre T,etT,) 


T; Ty T=temp. absol. 
absolue centigr. absolue centigr. 

CH,....  89.0(—184°) 108.3(—164°7) 0.466 (à —164°) 
C;Hy ... 100.5(—172°5) 188.9(— 84°1) … 
HCI....  161.6(—111°%4) 189.9(— 83°1) 1.706—0.00276 T 
AS. 2 "Il6fe0!o(-2 a 212.8(— 60°2) 1.328—0.00171 T 
(CH:):0.  134.5(—138°5) ai js 

NE x. 194.8(— 78°2) 239.5(— 33°5) 1.022—0,00145 T 


SOz ,...  200.7(— 72°3) 263.0(— 10°) 2.122—0.00232 T 


42 SÉANCE DU 1° JUIN 


M. le prof. L. Duparc, en son nom et en celui de MM. JEANNERET 
et WunpEr, fait une communication sur le dosage et la sépara- 
tion du sircon d'avec la silice, le fer et l’alumine. 

Ces messieurs ont d’abord constaté que l’oxyde de zirconium, 
traité par évaporation réitérée avec l'acide fluorhydrique et calci- 
nation subséquente perd progressivement de son poids. Par con- 
tre, un traitement analogue fait en présence d’acide sulfurique 
n’entraîne aucun changement de poids, ce qui permet en toute 
sûreté de volatiiser la silice sans entraîner le zircon. 

Puis ces messieurs ont essayé l’action du carbonate de soude 
fondu sur la zircone, ainsi que l’action de la potasse, puis celles 
d'acides à différentes concentrations. Il résulte de leurs recherches 
que sur un mélange des trois oxydes de fer, zircon et alumine la 
séparation de ces éléments peut être faite aussi. 

Le mélange est fondu avec le carbonate de soude avec répétition 
de l’opération. L’alumine passe intégralement en solution. Après 
lavage, le résidu insoluble est traité par l’acide chlorhydrique qui 
dissout totalement le fer sans entraîner de traces de zircon. Il 
reste simplement à calciner ce dernier élément, et dans chaque 
solution à reprécipiter le fer par l’ammoniaque et l’alumine par 
le nitrate d’'ammonium. 


Séance du 1% juin 


Raoul Gautier. Les retours de froid en juin. — Th. Tommasina. Sur une 
modification donnant une plus grande liberté d’allure et plus de sûreté 
aux aéroplanes. 


M. Raoul GauriEer fait une communication sur les retours de 
froid en juin’. Avec la collaboration de M. H. Duame, M. R. 
Gautier a étudié cette question sur les séries météorologiques de 
Genève et du Grand Saint-Bernard. Conformément aux résultats 
obtenus par MM. Xellmann, Krankenhagen et Marten, il y a, 
à Genève et au Saint-Bernard, comme ailleurs en Europe, en 
moyenne, un retour marqué de froid dans la deuxième décade du 
mois de juin, mais seulement pour la seconde moitié du XIXe 
srècle et le commencement du XXe. 

Si l’on remonte plus haut en arrière et, pour Genève, jusqu’en 
1796, on ne retrouve plus du tout ce retour de froid à ce moment- 
là du mois. Il n’est donc pas motivé de considérer ce retour de 


! Voir aussi : Archives 1910, t. XXX, p. 314, et, pour la note détaillée, 
1911, t. XXXI, p. 497; — puis : Verhandlungen der Schweiz. Natur- 
forschenden Gesellschaft, 93. Versammlung, Bâle 1910, vol. I, p. 328. 


SÉANCE DU 1% JUIN 43 


froid comme normal au milieu de juin. L'étude d'autres séries 
d'observations un peu prolongées donnerait probablement les 
mêmes résultats qu'à Genève. 


M. Th. Tommasia, — Sur une modification donnant une 
plus grande liberté d'allure et plus de sûreté aux aéroplanes. 

Le but de cette Note est de proposer une modification pour 
empêcher surtout le capotage. Les aéroplanes actuels, monoplans 
et biplans, ont, comme on sait, une partie rigide constituée par le 
châssis muni de roues et de patins, les supports des réservoirs à 
essence et à huile, les sièges pour les passagers, pour le pilote, 
avec levier et volant, ainsi que toute la partie non gauchissable de 
la voilure. En outre, ils ont en avant le moteur avec son propul- 
seur à hélice (je ne m'occupe pas des appareils avec moteur à deux 
propulseurs placés en avant ou en arrière), qui se trouve égale- 
ment fixé au bloc indéformable de la machine, de façon que l'axe 
de rotation du propulseur à une direction invariable. La modifi- 
cation que je propose, met à la disposition du pilote le change- 
ment de la direction de l’axe du propulseur par rapport à l'axe 
longitudinal de l'aéroplane, c'est dire que le pilote pourra changer 
à volonté et instantanément la direction suivant laquelle se fait 
dans l'air le travail d'avancement ou de traction dû exclusivement 
à l'hélice, faisant ainsi, quand cela est nécessaire, jouer le rôle de 
gouvernail à tout l’ensemble rigide de l'aéroplane. Ce nouveau 
pouvoir, que ma modification donne au pilote, a une importance 
capitale, car il lui fournit le moyen d'exécuter les opérations sui- 
vantes : 

4° Dominer les perturbations de l'air, les coups de vent, les 
remous, etc., ayant une plus grande agilité de mouvement pour 
pouvoir entrer normalement dans le vent, en l’empêchant ainsi de 
nuire à la stabilité de l'appareil, lui faisant produire, au contraire, 
un travail utile. 

2° Obtenir les avantages du vol plané sans couper l'allumage, 
et dans les conditions qui le rendent dangereux ou même impos- 
sible aux appareils actuels. 

3° Diminuer le rayon de courbure des trajectoires en spirale, 
soit à la montée, soit à la descente. 

4° Pouvoir atterrir en espace libre et convenable, relativement 
étroit. 

5° Décoller au départ, après un parcours de quelques mètres 
seulement. 

6° Éviter la rupture de l’hélice lors d’un atterrissage un peu 
brusque, permettant d’atterrir tangentiellement. 

7° Eviter, dans le même cas, un fossé, une barrière, un groupe 
de personnes ou un obstacle quelconque. 

8° Prendre le vol du pont d’un navire et y faire retour. 


Ad SÉANCE DU 1° JUIN 


Il y a d’autres avantages et opérations possibles, que je ne cite 
pas pour abréger, et la pratique en montrera d’autres encore. 
Mais, ce qui est important de constater, c’est que les opérations 
qui viennent d’être indiquées suffisent pour éviter, pour éliminer 
même, le terrible danger du capotage. On sait qu'il peut se pro- 
duire autant au départ qu’à l’arrivée, quand la vitesse est insuffi- 
sante pour que les voilures du gouvernail de profondeur donnent 
leur effet utile ordinaire. En d’autres cas, ce dernier ne peut agir 
à cause de l’instantanéité de réaction qu’on lui demande; c’est, par 
exemple, lorsqu'il se produit une panne du moteur, ou lorsqu'on 
coupe l’allumage pour atterrir rapidement avant d'atteindre un 
obstacle imprévu, qu'il faut éviter et qu’on ne peut autrement. Si 
l’aviateur n’est pas tué ou blessé, en tous cas, sa machine est ren- 
due inutilisable pour la continuation immédiate du voyage. 

Je me suis intéressé à cette question, par devoir humanitaire, 
posant le problème au point de vue de l'application exacte des lois 
qui régissent les réactions entre solides et fluides en mouvement. 

La machine actuelle vole en glissant entre deux couches d’air 
qu’elle sépare, entraînée par une hélice, qui, à cause de sa grande 
vitesse de rotation, crée dans l'air la résistance nécessaire pour s’y 
visser. Sa vitesse d'avancement est moindre que la précédente, mais 
elle est suffisante pour créer l’autre résistance qui sert de support 
à la machine glissante. C’est le vol de l’oiseau planeur, Or, la 
première chose qui frappe l’observateur, est la rigidité de la 
machine, qui fait contraste avec l’agilité de l'être vivant. Si on 
considère le moteur comme la tête de l’aéroplane, on voit qu’à la 
place du bec elle porte l’hélice qui est son organe de propulsion, 
Cette seule considération suffit pour montrer qu'entre les mul- 
tiples mouvements de l'oiseau, il y en a plusieurs qui ne seraient 
pas utiles à l’aéroplane. D’autres, qui le seraient, ont été étudiés 
et en partie réalisés, ce sont ceux qui ont donné l’idée du gau- 
chissement des ailes, et celle des gouvernails de direction et de pro- 
fondeur, qui fonctionnent comme la queue de l'oiseau. On n’a pas 
cru devoir tenir compte du rôle que joue, en certains cas, l’incli- 
naison et le relèvement instantané de la tête de l'oiseau. Ainsi, par 
exemple, quand en descendant en vol plané, suivant la trajectoire 
BA, l'oiseau veut modifier celle-ci en A, pour remonter suivant 
AC, le relèvement de sa tête a une importance évidente, autant 
pour une trajectoire plane que pour une elliptique ou quelconque. 
Cela rappelle l’atterrissage rapide de l’aéroplane et la décision de 
la modification instantanée qui donne lieu au capotage. Pour l’évi- 
ter, lorsque l’inclinaison est telle que l’action du gouvernail de 
profondeur postérieur n’est plus suffisante, il faut faire comme 
l’oiseau, faire relever la tête de l’aéroplane, et il suffira d’un rele- 
vement minime dans le plan vertical axial, l'effet utile étant prompt, 


SÉANCE DU 1‘ JUIN 45 


précisément parce que l’aéroplane porte son propulseur à la place 
du bec, ce qui, dans ce cas, lui fait un avantage précieux, car il 
faut naturellement que le moteur soit en marche pour que le relè- 
vement de l’axe de vissement puisse modifier instantanément la 
trajectoire du vol, Pourtant, son utilité se montrerait encore, tout 
en produisant une déviation moins rapide, dans le vol plané d’at- 
terrissage régulier à moteur éteint, par l'effet de l'inclinaison de 
la couverture métallique de forme spéciale qu'il faudra lui adapter. 

On modifiera donc le mode de fixage actuel du moteur sur le 
châssis, et on le remplacera par une suspension permettant une 
rotation minime sur son axe transversal et horizontal, normale- 
ment à celui-ci; l'essai pratique en fixera les limites, Cette rotation 
se fera ainsi sur l’axe qui passe par le centre de gravité du bloc 
rigide moteur-hélice, de façon que le soulèvement du point cen- 
tral correspondant à l’attache de l’hélice au moteur, n’occasionne 


A mL 


> L sd 


aucun déplacement de poids, pouvant modifier l'équilibre de l’aéro- 
plane, sauf dans le cas que la chose puisse être jugée utile. 
L'essentiel est que le bras du levier de commande se trouve près 
de la main droite du pilote. Une simple pression sur le levier, qui 
se déplacera par crans, avec cliquet d'arrêt, fera incliner vers le 
haut l’axe du bloc moteur-hélice donc la direction, comme il a été 
dit, du travail de propulsion. Il n’y aura aucune possibilité pour 
que l’aviateur affolé, en se trompant de sens, comme il est déjà 
arrivé pour le gouvernail de profondeur, puisse faire la manœuvre 
inverse, par la simple raison que la rotation doit s'arrêter au plan 
horizontal passant par l'axe longitudinal de l'aéroplane. Proba- 
blement, on a cru, jusqu'ici, avoir des bonnes raisons pour ne pas 
introduire la modification que je propose, j'insiste d'autant plus, 


46 SÉANCE DU 6 JUILLET 


s’il en est ainsi, sur son utilité, étant certain que l’actuation pra- 
tique la mettra immédiatement en évidence, son exécution ne 
présentant d’ailleurs aucune difficulté, et n’augmentant que de 
quelques kilos le poids de l’aéroplane. 


Séance du 6 juillet 


Ed. Claparède. Procédé pour contrôler l’authenticité de l’hypnose. — Le 
même. Etat hypnoïde chez un singe. — Th. Tommasina. Appareil d’avia- 
tion non renversable. 


M. Ed. CLapaRÈDE communique un procédé pour contrôler 
l'authenticité de l'hypnose. 

Divers auteurs estiment que l'authenticité des états décrits sous 
le nom d’hypnose n’est pas démontrée. 11 s’agirait le plus souvent 
d’attitudes simulées, par tromperie ou par complaisance. M. Cla- 
parède a donc cherché un procédé qui permette de distinguer la 
réalité d’un état particulier du psychisme correspondant à l'hyp- 
nose. Ce procédé, fondé sur l’amnésie posthypnotique, est le sui- 
vant: 

On lit à haute voix au sujet, se trouvant à l’état de veille, une 
série de dix mots quelconques (p. ex.: maison, justice, bougie, 
marcher, 1883, tampon, etc.). Après quoi, on endort le sujet, et 
pendant qu'il est en hypnose, on lui lit une série de dix autres 
mots, série analogue à la première. Puis on l’éveille et on passe à 
l'expérience d’épreuve, qui consiste à lire au sujet les vingt mots 
présentés précédemment, mélangés à dix mots entièrement nou- 
veaux, et à prier ledit sujet d'indiquer les mots qui lui ont été 
déjà présentés et ceux qui lui paraissent nouveaux. 

Si l’amnésie posthypnotique est simulée, le sujet s’embrouillera, 
se coupera, car il lui sera impossible, après une seule audition 
(celle-ci ayant eu lieu sans qu'il se doute du but de l'expérience), 
de se rappeler quels sont les mots qui appartiennent à la première 
série, dont il est censé se souvenir, et ceux qui appartiennent à la 
seconde, qu'il est censé avoir oubliée (puisque le sujet à l’état de 
veille perd le souvenir des faits qui ont eu lieu pendant l'hypnose). 

Si, au contraire, l’amnésie posthypnotique est authentique, le 
sujet distinguera sans difficulté les mots de la première série qu’il 
reconnaît, de ceux de la seconde série, qui, comme ceux de la 
troisième série, lui font l'impression de mots entièrement nouveaux. 

M. Claparède a vérifié sur un sujet l’efficacité de cette méthode, 
et il a pu du même coup se convaincre que, chez ce sujet tout au 


SÉANCE DU 6 JUILLET 47 


moins !, l'état d'hypnose correspond à une modification particu- 
lière du psychisme, inexplicable par la simulation, ou la complai- 
sance. En effet, lors de l'expérience d'épreuve, tous les mots qui 
ont été reconnus (six mots reconnus sans hésitation, et deux avec 
hésitation) appartenaient à la première série. Au contraire, 
pas un seul des mots de la deuxième ni de la troisième série n’a 
été reconnu. — Des expériences analogues, avec les mêmes résul- 
tats favorables, ont été faites avec des noms de ville ou des 
vignettes. 

Une fois l'expérience d'épreuve achevée, M, Claparède a endormi 
de nouveau son sujet, et lui a présenté encore une fois les trente 
mots précédemment montrés, convenablement mélangés, en le 
priant d'indiquer ceux qui faisaient partie de la série présentée en 
hypnose, Dans l'état d'hypnose, le sujet n'a pas perdu le souvenir 
de ce qui s'est passé dans l'état de veille; mais le but de cette 
expérience était de voir si les mots présentés en hypnose avaient 
acquis de ce fait un certain cachet affectif ou autre qui permit au 
sujet de les distinguer de ceux présentés en veille. Or, cela est 
bien le cas: sur les dix mots de la série-hypnose, sep{ ont été 
reconnus sans hésitation comme ayant été présentés em hypnose ; 
au contraire, aucun des mots présentés dans la première série n’a 
été reconnu pour avoir été présenté en hypnose (mais les réponses 
relatives à ces mots ont parfois été hésitantes, de même que pour 
les mots nouveaux de la troisième série). Pour la série avec vignet- 
tes, le sujet a distingué, sans aucune erreur, les vignettes présen- 
tées en hypnose de celles présentées en veille. 

Le sujet en question n'ayant nullement une mémoire exercée, 
et ignorant le but de l'expérience (de telle sorte qu'il n’a pu, au 
moment de la présentation des cartes, faire un effort de mémoire 
pour les associer en série), 1l est évident que cette distinction des 
mots ou vignettes présentées en veille ou en hypnose ne peut 
tenir qu'au fait que les souvenirs dépendant de chacun de ces deux 
états sont affectés d’une marque spéciale, sont colorés d’une façon 
non équivoque pour le sujet. ? Or, cette différence de marque, de 
coloration, ne peut tenir qu'à un état différent du psychisme dans 
chacun de ces deux états. A supposer donc que l'hypnose ne soit 
parfois qu’une simulation, elle correspond certainement dans cer- 
tains cas à une modification psychique réelle. 


| Il s’agit de la personne décrite sous le nom de M=° Bul, dans le 
travail de Claparède et Baade, Rech. exp. sur quelques processus psy- 
chiques dans un cas d’hypnose, Arch. de Psychol., VIII, 1909. 

? Le sujet étant endormi déclare notamment que les mots qui lui ont 
été dits en hypnose, «elle les voit beaucoup plus près, à sa droite; les 
autres sont dans le trouble, à gauche d’une sorte de barre.» 


48 SÉANCE DU 6 JUILLET 


M. Ed. CLaPpaRÈDE relate ensuite quelques observations sur un 
état hypnoide chez un singe. 

M. Claparède ayant essayé d' hypnotiser, au moyen de passes et 
de fixation du regard, un singe Cynocéphale femelle qu’il possède 
depuis deux ans, — singe très vif et mobile, nullement dressé, et 
peu affectueux, — fut assez étonné de voir que ces manœuvres 
plongeaient presque instantanément l’animal dans un état de 
calme complet : le singe reste couché sur le dos, immobile, et, si 
on fixe ses yeux, on voit ceux-c1 battre de la paupière et bientôt 
se fermer pour quelques instants (parfois les yeux restent clos 
une demi-minute, mais l’animal les rouvre au moindre bruit se 
produisant dans le lointain). Lorsqu'il est dans cet état, et même 
immédiatement après, alors qu'il s’est redressé, ce singe (d’ordi- 
naire intraitable) présente une docilité extraordinaire pour les 
mouvements qu'on lui imprime, et il garde les attitudes qu'on lui 
donne, ainsi que le font les sujets en catalepsie (flexrbilitas cerea). 
On peut ainsi lui faire garder les deux bras et les deux jambes 
étendus en haut et en avant, de sorte qu’il ne repose, en équilibre 
instable, que sur son derrière. 

Un phénomène de ce genre, qu'il n’y a pas de raison pour ne 
pas rapprocher des phénomènes d’hypnose obtenus chez l’homme, 
puisqu'il y ressemble à s’y méprendre, semble indiquer que l’hyp- 
nose n'est pas uniquement, comme on le prétend couramment, 
un produit de la suggestion, On ne voit pas bien le rôle que joue- 
rait ici la suggestion, n1 quelle serait l’idée ou la représentation 
suggérée qui s’'imposerait ainsi au cerveau du singe. 

Il vaut mieux considérer cette docilité momentanée, cette sorte 
d'état d'abandon, comme une attitude réflexe, peut-être attitude 
de volupté, comme on rencontre dans les phénomènes de l’amour. 
Un auteur de l’école de Freud, Ferenczi, a récemment proposé de 
considérer l'hypnose comme un état de soumission à base sexuelle. 
L’état hypnoïde observé chez ce singe s’accomoderait assez bien 
de ce genre d'explication. — Il serait intéressant de répéter cette 
expérience sur d’autres quadrumanes, notamment sur des mâles. 


M. Tu. Tommasina. — Sur un appareil d'aviation non ren- 
versable et effectuant automatiquement le vol plané en cas 
d'arrêt du moteur. 

Il suffit d'observer attentivement le vol des oiseaux pour être 
frappé de la complexité de leurs moyens, je dirai de la richesse 
mécanique qu'ils possèdent et qu'ils peuvent utiliser simultané- 
ment. On en a fait une analyse sommaire et on a distingué : 

Le vol orthoplère, par lequel certains oiseaux peuvent s'élever 
presque verticalement, par l’abaissement et le relèvement simul- 
tané des deux ailes. C’est la forme convexe vers le haut et la 


SÉANCE DU 6 AVRIL 33 


d'émanation n'a pu être commu- 
niquée par diffusion de la cloche 
à radioactivité induite à désacti- 
vation lente à la cloche non acti- 
vée. Môme en faisant varier les 
températures respectives des deux 
récipients, de façon à faciliter le 
mélange de l'air ionisé de l’un avec 
l'air chauffé ou refroidi de l’autre, 
rien ne nous a permis de cons- 
tater la moindre accélération de 
décharge; tandis, qu'au contraire, 
nous pouvions suivre, pendant des 
heures, la courbe indiquant la 
disparition lente de l’activité du 
mélange obtenu par le transvase- 
ment du contenu d’une cloche à 
activation de courte durée dans 


$S0 100 150 pnvret Les 
Fig. 1 


une cloche non activée. Ce sont les courbes B et B” de la figure 2, 
analogues au type [ de la figure 1, courbes qui constituent une 
nouvelle confirmation de nos conclusions sur ce sujet. 


| 


= 
LS 
ç” || 
a ‘ 


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" 


LE 
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152 

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NS HAE 


Fig. 2 


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Q) Ô 


0 
Ô © 
À 


790 80 90 100 minutes 


Comme on sait, les surfaces métalliques facilitent la recombi- 
naison des ions, d’après cela, nous avons cru nécessaire de répéter 
ces essais avec une cloche en verre non activée. Le transvasement 
dans cette cloche nous a donné les mêmes résultats positifs pour le 
produit à évolution rapide, et toujours des résultats négatifs pour 
le produit à évolution lente. Il faut donc conclure que la cloche à 
désactivation lente ne renferme point, sensiblement, ni d’émana- 
tion libre, ni de dépôt solide en suspension, Or, comme cette 


3 


34 SÉANCE DU 20 AVRIL 


cloche montre si nettement l'effet des faibles élévations de tempé- 
rature, cet effet ne peut pas être dû à l'expulsion supposée, au 
moins en sa totalité. Nous sommes forcés de faire cette dernière 
restriction, à cause des faits suivants : Nous avons constaté que 
l’air ionisé contenu dans cette cloche, arrivait à saturation, ou 
mieux à un certain degré de saturation, sans chauffage, en quel- 
ques heures, et qu'il suffisait de la placer verticale, ouverte en bas, 
pendant quelques minutes, pour pouvoir ensuite reconnaître, 
immédiatement, la disparition du surplus de son air ionisé, qui 
paraît subir l'effet de la pesanteur, car, si la cloche est ouverte en 
haut au lieu de l'être en bas, la chose ne se vérifie pas. 

L'expérience qui nous a, enfin, montré qu'on peut obtenir l'effet 
thermique d’accélération de la décharge sans l'intervention de 
l'expulsion du dépôt actif, est la suivante : Au lieu de chauffer sur 
le calorifère la cloche active même, nous y avons chauffé une clo- 
che non activée et avons, au contraire, refroidi la première; puis, 
après avoir placé celle-ci, pendant quelques instants, sur la cloche 
chauffée pour recevoir une partie de son air chaud, nous l'avons 
placée rapidement sur le plateau de l’électroscope avant que le 
métal en fût sensiblement chauffé. Nous avons constaté que la 
décharge était accélérée presque autant que lors de la chauffe des 
parois mêmes de la cloche active. Ce qui montre que la modifica- 
tion apportée par de faibles élévations de température consiste 
dans une accélération, due à la convection calorifique, de la vitesse 
des ions produits par le rayonnement du dépôt actif, mais qui 
n'exclut pas qu'il puisse y avoir aussi une surproduction de ions 
par ce dernier, avec ou sans l'intervention de la vibration thermi- 
que moléculaire du métal activé, qui a lieu lorsqu'on chauffe les 
cloches activées mêmes. 

Il reste l’anomalie des cloches en verre, nous en poursuivons 
l'étude, car il se peut, comme nous l’avons déclaré dans notre pré- 
cédente Note, qu'il suffise, pour obtenir un effet analogue, d’éle- 
ver la température. 


Séance du 20 avril 


F.-A. Forel. Observations météorologiques faites à Genève au XVIII: siècle 
par Charles de Lubières. — Raoul Gautier. À propos de la communication 
de M. Forel. — Le même. La climatologie du Grand Saint-Bernard. — 
Arnold Pictet. Un nouvel exemple de l’hérédité des caractères acquis. — 
J. Carl. Sur un diplopode hermaphrodite. 


M. F.-A. Forez, de Morges, présente au nom de M®° Aimée 
Dufour-Falquier, veuve du professeur Charles Dufour de Morges, 
cinq cahiers manuscrits d'observations météorologiques faites à 


SÉANCE DU 20 AVRIL j 35 


Genève de 1760 à 1789; ces cahiers proviennent des papiers 
de Ch. Dufour, et ses héritiers en font don à l'Observatoire de 
Genève. 

Ces cahiers sont dus à Charles-Benjamin de Langes, baron de 
Lubières, membre du Conseil des CC de Genève, né en 1714, 
décédé le 4°° juin 4790 à Genève. Il était fils de François de 
Langes de Montmirail, gouverneur d'Orange puis de Neuchâtel, 
reçu bourgeois de Genève en 1703, et de Marie Calandrini; il 
avait épousé en 4760 Olympe Camp. Il est mort sans enfants. 

Les observations météorologiques ont été faites au lieu de sa 
résidence, en hiver à Genève, rue Beauregard, en été à Saconnex. 
Lubières avait des attaches au Grand-Saconnex, où la famille de 
sa grand'mère maternelle, née Julie de Pelissari, possédait une 
terre, aujourd'hui propriété Pasteur ; plus tard, en 1768, Charles 
de Lubières acheta une propriété au Petit-Saconnex, à l'angle des 
chemins du Bouchet et du Marais, près de ce qui est aujourd'hui 
l’Asile des Vieillards. 

Les observations comprennent entre autres : des lectures du 
thermomètre, deux fois par jour, du baromètre, de la girouette, 
de l'hygromètre, la caractéristique du temps et de ses accidents 
aux différentes heures de la journée, la pluie, la neige, l'évapo- 
ration, des notes phénologiques, des notes sur tous les phéno- 
mènes actuels locaux et généraux. 


M. Raoul Gavwrier, directeur de l'Observatoire, remercie M. le 
prof. F.-A. Forel de ce qu'il vient de dire. L'Observatoire est très 
reconnaissant à Madame Charles Dufour et à M. Forel du beau 
don qu'ils font à notre institut astronomique et météorologique. 
L'observatoire possède déjà, pour le XVIII siècle, quelques docu- 
ments importants au point de vue météorologique, dans les 
registres manuscrits de Jaques-André Mallet, de Marc-Auguste 
Pictet et de Frédéric-Guillaume Maurice. Ces documents joints 
aux observations déjà imprimées dans le Journal de Genève de 
4787 à 179M et dans les Æphemerides Soctetalis meteorologicæ 
Palatinæ de 1782 à 1789 fournissaient des données intéressantes 
au point de vue de la pluie jusqu'en 4782 en arrière, avec une 
lacune. La série de 30 ans des observations de Charles de Lubières 
comble la lacune et permettra de reculer cette série en arrière, 
peut-être jusqu'en 1770. C’est donc un précieux accroissement 
pour les archives météorologiques de Genève. 


M. Raoul Gaurier fait une communication sur la C{imatolo- 
gite du Grand Saint-Bernard. Les observations météorolo- 
giques qui se font dans cette station élevée ont commencé au 
mois de septembre 1817 au moyen d'instruments qui y ont été 


36 SÉANCE DU 20 AVRIL 


installés à cette date par M.-A. Pictet. Elles n’ont pas cessé depuis 
lors et ont toujours paru dans les cahiers mensuels des Archives, 
par les soins de l'Observatoire de Genève, qui s'occupe actuelle- 
ment, depuis plusieurs années, à traiter l’ensemble de ces obser- 
vations en vue d’une climatologie complète de cette station. 

M. Gautier a déjà publié quelques aperçus de ce travail, relatifs 
à la température et aux précipitations *. 

Il expose à la Société les graphiques relatifs à ces éléments et 
d’autres relatifs à la pression atmosphérique et à la nébulosité, en 
opposant les courbes moyennes de Genève (Observatoire) et du 
Si-Bernard. On y constate aisément les différences que produit la 
différence de hauteur à notre latitude. La cuvette du baromètre 
du St-Bernard est à 2476 m., celle de l'Observatoire de Genève 
à 405 m. 


M. Arnold Prcrer. Un nouvel exemple de l'hérédité des 
caractères acquis. 

Nous avons signalé précédemment? deux exemples de l’hérédité 
des caractères acquis chez les lépidoptères. 

Voici un nouvel exemple, que mettent en évidence les récentes 
expériences que nous avons entreprises à l’Institut de zoologie de 
l'Université de Genève, et qui montre encore la facilité avec 
laquelle une habitude nouvellement acquise à une espèce, peut se 
transmettre par hérédité, à la génération suivante. 

Nous sommes parvenus, en 4910, à accoutumer des chenilles 
de Lasiocampa quercus (nourriture normale : Chêne, Rosacées, 
etc.) à consommer des aiguilles de Sapin. Les chenilles de toute 
une ponte (150 environ) sont divisées en deux lots d’égale quan- 
tité ; les individus de l’un de ces lots sont nourris d'£Evonymus 
japonicus et considérés comme témoins. Disons, en passant, que 
les chenilles qui ont coutume de se nourrir de feuilles plates 
entament celles-ci par le bord latéral en se fixant elles-mêmes à la 
tige ou à une branche voisine. L’écartement des mandibules des 
larves de lépidoptères est calculé pour l'épaisseur des feuilles et ne 
peut pas dépasser une certaine limite. 

Les individus du 2 lot sont placés, dès la troisième mue, en 
présence d’aiguilles de Sapin, à l'exclusion de toute autre essence 
végétale. Pour consommer ces aiguilles, les chenilles agissent 
tout d’abord comme si elles se trouvaient en présence de feuilles 


! Neuvième Congrès international de Géographie. Compte rendu des 
travaux. Tome II, p. 348 et p. 466. 

? Voir Archives des Sc. phys. et nat. 4e pér., vol. XX VIII, p. 504, et 
Verhandl. der Schweiz. Naturforsch. Geselisch., 53, Jahresvers. Basel. 
1910, vol. I. p. 272. 


SÉANCE DU 20 AVRIL 37 


plates et essaient de les entamer par le côté ; mais leurs mandi- 
bules ne peuvent donner assez d’écartement pour cela, en sorte 
que nos bestioles s'épuisent rapidement en de vains efforts. 
Cependant, plusieurs d’entre elles, en montant le long des aiguil- 
les, arrivent à conduire leur tête au sommet de celles-ci, qui est 
cônique, plus mince que le reste et, par conséquent, mieux appro- 
prié à l'écartement de leurs pièces buccales. Une fois que le som- 
met de l'aiguille a été mangé, il leur est facile de creuser dans 
l épaisseur de celle-ci et c'est de cette façon que les chenilles arri- 
vent à se nourrir. Voici donc le caractère nouvellement acquis, 
qui consiste, pour les individus de nos expériences, 4 entamer 
les aiguilles de haut en bas et à les creuser, alors que leurs 
congénères, dans leur vie habituelle, entament les feuilles par 
le côté et les mordent. 

Voyons comment se comporteront les chenilles de la seconde 
génération, c'est-à-dire celles qui sont issues de parents adaptés 
au Sapin, une fois qu'elles se retrouveront dans les conditions 
normales, en présence de feuilles d'£vonymus. 

Il est manifeste qu'elles ne se rendent pas bien compte de la 
façon dont elles doivent s'y prendre pour ronger les feuilles 
de cet arbuste et qu'elles cherchent à les entamer par le sommet. 
Et, comme les larves de cette seconde génération sont chétives, 
le mortalité est assez élevée ; une vingtaine seulement arrivent 
à s'adapter à nouveau au régime avec des feuilles plates, mon- 
trant ainsi qu'elles sont revenues, quoique avec difficulté, au 
mode habituel de l'espèce. Mais, trois de ces chenilles ont tout 
particulièrement de la peine à se nourrir; suivons-les donc attenti- 
vement dans les efforts qu’elles font pour cela. Après avoir essayé, 
en vain, d'une feuille, nous les voyons passer à une seconde, puis 
à une troisième et se reposer un instant. Ensuite, elles recom- 
mencent les mêmes essais, arrivant à peine à ingérer quelque 
mince parcelle d'épiderme foliaire, pour devoir se reposer à nou- 
veau. Enfin, elles se promènent activement dans l’éleveuse et le 
long des branchages. L'une d'elles, au hasard de sa promenade, 
grimpe le long d’une petite branche et en atteint le sommet qui 
est légèrement pointu, nu et dépourvu de feuilles ; puis, elle se 
met à entamer le sommet de cette branche de haut en bas et à 
creuser dans l'intérieur de celle-ci, de la même façon que ses 
parents avaient pris l'habitude de consommer les aiguilles de 
Sapin. Les deux autres chenilles font de même. 

Ainsi donc, des larves de Lasiocampa quercus ont dû prendre, 
pour l'ingestion de leur alimentation, une habitude nouvelle, et 
cette habitude se transmet, dans les conditions que nous venons 
de décrire, à trois de leurs descendants sur vingt. 

Lors de celles de nos expériences qui eurent pour résultat 


38 SÉANCE DU 20 AVRIL 


l'adaptation des chenilles d'Ocneria dispar à la nourriture avec 
des aiguilles de Conifères, les difficultés qu'ont éprouvées ces che- 
nilles ont été plus grandes que celles éprouvées par les Lasio- 
campa quercus dans les mêmes circonstances ; le 75 °/5 des 
Ocneria dispar mis à ce régime, n’ont pas réussi à s’y accou- 
tumer et ont péri. Mais, ce qui montre que l'habitude acquise 
par nécessité peut se transmettre aux descendants, c’est le fait 
que les Ocneria dispar de la seconde génération se sont mises, 
très facilement et presque sans hésitation, à entamer les aiguilles 
par leur sommet, en sorte qne la mortalité a été presque nulle, 
Dans ce cas, le caractère acquis est manifestement transmis. 

Du reste, des exemples de ce genre sont fréquents dans la lépi- 
doptérologie expérimentale, principalement en ce qui concerne 
l'alimentation des larves. Nous savons, en effet, d’après les résul- 
tats d'expériences antérieures, que les chenilles de lépidoptères 
ont souvent de la peine à se nourrir de feuilles qui ne sont pas 
celles que consomme l'espèce habituellement. Cette adaptation se 
manifeste par un ralentissement dans la croissance et une dimi- 
nution de taille des larves, et, corrélativement, par un nanisme 
accentué et la pâleur des papillons. Or, si le régime nouveau est 
continué aux individus de la génération suivante, on observe fré- 
quemment que ces caractères d’infériorité tendent à disparaître 
dans bien des cas ; à la 3° ou 4° génération déjà, les larves ne 
sont plus gênées par le régime nouveau, et l’adaptation peut être 
considérée comme faite. Cela nous montre encore que ces indi- 
vidus héritent de leurs parents l'habitude nouvelle que ceux-ci 
ont été forcés de prendre et, aussi, qu’ils la perfectionnent. 


D' J, Carz. Sur un Diplopode hermaphrodite. 

En étudiant la riche collection de Diplopodes rapportée de la 
Colombie par M. le prof. O. Fuhrmann j'ai pu constater chez un 
Polydesmide du genre Euryurus (E. tænia Pet.) une anomalie 
rare et digne d’être signalée. 

Cet exemplaire porte sur le septième segment, antérieurement, 
du côté gauche, une patte ambulatoire normale et du côté droit 
une patte copulatrice de la forme caractéristique pour l'espèce. 
Karscn! avait déjà observé cette anomalie chez la même espèce, 
sur un des exemplaires ayant servi à la description de PETERS. 
Mais n’ayant pas disséqué l’animal il ne put trancher la question 
de savoir s’il s'agissait d’un arrêt de développement chez un Z ou 
d’un exemple de véritable hermaphroditisme. 

En désarticulant l’exemplaire récolté par M. Fuhrmaun nous 
avons constaté qu'il contenait un très grand nombre d'œufs. Il 


1 Zum Studium der Myriopoda Polydesmia. Archiv für Naturge- 
schichte. Bd. XLVII. 1881, p. 44, 45, fig. 29. 


SÉANCE DU 4 MAI 39 


possède aussi des vulves comme les @ normales et représente done 
une femelle à hermaphroditisme extérieur partiel. 

Une anomalie tout à fait analogue a été observée par Broele- 
mann! chez un autre Polydesmide, À phelidesmus hermaphro- 
ditus Brôl. Le genre Aphelidesmus est très voisin de Euryurus 
et habite aussi la Colombie. Ceci éveille l'idée que certains 
groupes de Diplopodes pourraient être plus disposés au herma- 
phroditisme que d'autres ou que certaines régions favoriseraient 
l'apparition de cette anomalie. 

Ces trois observations pourraient encore être invoquées pour 
prouver l'homologie des pattes copulatrices avec les pattes ambu- 
latoires si les données de la morphologie comparée n'en fournis- 
saient pas à elles seules déjà des preuves suffisantes, 


Séance du 4 mai 


J. Briquet. Sur la structure et les affinités d’Illecebrum suffruticosum. — 
Perrot et Baume. Sur quelques constantes chimiques des gaz liquéfiés. 
— L. Duparc, Jeanneret et Wunder. Sur le dosage et la séparation du zir- 
conium d'avec la silice, le fer et l'alumine. 


M. J. Briquer. Sur la structure et les affinités de l'Illecebrum 
suffruticosum L. — L'/llecebrum suffruticosum L. est une 
Caryophyllacée inférieure du groupe des Paronychiées — parti- 
culière aux garigues de l'Espagne, de l'Algérie et du Maroc — 
dont les affinités ont été diversement interprétées. On s'est sans 
doute rendu compte de bonne heure qu’elle n’appartenait pas au 
genre /{lecebrum, dans le sens où ce groupe est circonscrit depuis 
plus d’un siècle, mais on l’a rapportée tantôt au genre Æerniarta, 
tantôt au genre Paronychia. Ce désaccord provient de ce que 
les auteurs n'ont pas fait une étude détaillée de la fleur et du fruit, 
fort petit, il est vrai, C’est pour combler cette lacune que le pré- 
sent travail a été entrepris, en complétant l'examen morphologi- 
que par une étude anatomique. Les principaux résultats de ce tra- 
vail sont les suivants : 

Le calice gamosépale se compose d’un tube obconique et de cinq 
pièces en forme de capuchon, pourvues d’une apophyse dorsale. 
Les cinq staminodes alternisépales sont insérés sur le tube à la 
hauteur des sinus; les cinq étamines épisépales sont logées à l'in- 
térieur des capuchons. Le pollen est à 10-12 pores. L'ovaire se 
compose de deux carpelles ouverts concrescents; il porte un style 


! Myriapodes du Haut et Bas Sarare. Annales Soc. entom. de France, 
vol. LXVII, 1898, p. 324, 325, PI. 28, fig. 9. BRŒœLEmANN ne semble pas 
avoir eu connaissance de la note de Karscou. 


40 SÉANCE DU 4 MAI 


à deux stigmates antéro-postérieurs ; 1l est uniloculaire et contient 
un ovule unique, campylotrope, bitégumenté, placé au sommet 
d’un long funicule, à micropyle infère. Dans la suite, le funicule 
s'allonge, la semence se renverse, le micropyle devient supère, ce 
qui a pour conséquence que la radicule de l'embryon incurvé est 
dirigée vers le sommet de l’ovaire. 

Ces caractères font, sans contestation possible, de l’Z{/ecebrum 
suffrulicosum une espèce du genre Paronychia. A l’intérieur 
de ce genre, cette espèce doit former une section spéciale Pseud- 
herniaria, caractérisée par la présence de cymes terminales, fpar 
les stipules bractéiformes réduites, et par un phellogène caulinaire 
pérnicyclique. Ce dernier caractère est très remarquable : les Paro- 
nychia étudiés jusqu'ici ayant un phellogène hypodermique. 

L'auteur donne encore de nombreux détails sur la structure 
intime de la tige et de la feuille dans leurs rapports avec l'écologie 
de la plante. 

Le travail de M. Briquet fait d’ailleurs l’objet d’un mémoire 
détaillé, avec figures, dans l'Annuaire du Conservatoire et du 
Jardin botanique de Genève, t. XIII-XIV. 


M. F.-Louis PEerror. Sur quelques constantes physicochimi- 
ques des gaz liquéfiés. 

Au cours des recherches sur les gaz liquéfiés, qu'il poursuit en 
collaboration avec M. Georges Baume, l’auteur a été conduit à 
déterminer ou à reprendre la densité et la tension de vapeur à 
différentes températures d’un certain nombre d’entre eux. 

La méthode employée, extrêmement simple, a permis de con- 
trôler d’une façon directe la méthode volumétrique utilisée dans 
les recherches des mêmes auteurs sur les courbes de fusibilité des 
mélanges gazeux; la précision a été trouvée de l’ordre de 4 :1000, 
conformément aux résultats du calcul.* 

Les gaz étudiés, purifiés par liquéfaction et distillations frac- 
tionnées, étaient conservés à l’état liquide dans une ampoule con- 
venablement refroidie et réunie au reste de l’appareil; celui-ci, 
débarrassé de toute trace d’air, était entièrement construit en verre 
soudé. 

Les mesures de densité ont été effectuées au moyen d’un dilato- 
mètre annulaire (contenant le thermomètre indicateur), convena- 
blement gradué et calibré, Comme précédemment,? MM. Perrot 
et Baume ont déterminé volumétriquement le poids du gaz, dans 
un ballon jaugé, maintenu à 0°, avant son introduction dans le 
dilatomètre; les indications d’un manomètre gradué, joint à l’ap- 


! Cf. G. Baume. Journal chim. phys., t. IX, p. 269, 1911. 
* Cf. G. Baume. Comptes rendus, t. 148, p. 1322. 


SÉANCE DU 4 MAI 41 


pareil, permettaient de calculer le poids du gaz contenu dans le 
ballon, à condition de connaître sa densité et sa compressibilité. Il 
suffisait ensuite de condenser la quantité voulue de gaz dans le 
dilatomètre, au moyen d'air liquide. 

Les auteurs ont déterminé la densité des gaz liquéfiés à diverses 
températures, par réchauffement très lent et agitation fréquente 
du liquide par le thermomètre indicateur, dans une enceinte trans- 
parente convenablement protégée contre le rayonnement; les résul- 
tats obtenus au cours de mesures successives ont présenté une 
concordance satisfaisante. 

C'est par une méthode semblable qu'ont été mesurées les tens 
sions de vapeur des divers gaz étudiés au moyen de l'appareil 
employé pour l'étude du point de congélation des mélanges gazeux 
aux basses températures, la température étant maintenue uniforme 
au sein de la masse liquide par agitation électromagnétique; les 
tensions étaient indiquées par le manomètre soudé à l'appareil. 

Les auteurs publieront ailleurs les tables de densités et de ten- 
sions de vapeur établies suivant les indications qui précèdent; ils 
donnent simplement dans le présent résumé, à titre d'exemple : 

19 La concordance de quelques mesures effectuées sur SO, avec 
les mesures antérieures (densités) : 


T = —52 —35° —]7° 
Mesures anciennes... 1.560 1.521 1.478 
il sn 100415 Ca: 1.559 1.520 1.479 


2 La concordance de trois séries de mesures sur l'oxyde de 
méthyle, correspondant à des remplissages du dilatomètre aussi 
différents que possible (Densités de (CH,),0 à —70°) : 

0.798; 


0.797; 0.797. 


3° Un tableau résumant les résultats obtenus pour les divers 
gaz étudiés par MM. Perrot et Baume : 


(Tempér. de fusion) (Temp. d'ébull. sous 760®*) (Densité entre T,et T,,) 


T, Te T=temp. absol. 
absolue centigr. absolue centigr. 

CH,....  89.0(—184°) 108.3(—164°7) 0.466 (à —164°) 
C:Hs ..… 100.5(—172°5) 188.9(— 84°1) — 
HCI....  161.6(—111°4) 189.9(— 83°1) 1.706—0.00276 T 
B,9.%. ‘190.0{— 88°) 212.8(— 60°2) 1.328—0.00171 T 
(CH;):0.  134.5(—138°5) us = 

NHs....  194.8(— 78°2) 239.5(— 33°5) 1.022—0.00145 T 
SO .... 200.7(— 72°3) 263.0(— 10°) 2.122—0.00232 T 


42 SÉANCE DU 1% JUIN 


M. le prof. L. Duparc, en son nom et en celui de MM. JEANNERET 
et Wunper, fait une communication sur le dosage et la sépara- 
tion du sircon d'avec la silice, le fer et l’alumine. 

Ces messieurs ont d’abord constaté que l’oxyde de zirconium, 
traité par évaporation réitérée avec l’acide fluorhydrique et calci- 
nation subséquente perd progressivement de son poids. Par con- 
tre, un traitement analogue fait en présence d’acide sulfurique 
n’entraîne aucun changement de poids, ce qui permet en toute 
sûreté de volatiliser la silice sans entraîner le zircon. 

Puis ces messieurs ont essayé l’action du carbonate de soude 
fondu sur la zircone, ainsi que l’action de la potasse, puis celles 
d'acides à différentes concentrations. Il résulte de leurs recherches 
que sur un mélange des trois oxydes de fer, zircon et alumine la 
séparation de ces éléments peut être faite aussi. 

Le mélange est fondu avec le carbonate de soude avec répétition 
de l’opération. L’alumine passe intégralement en solution. Après 
lavage, le résidu insoluble est traité par l'acide chlorhydrique qui 
dissout totalement le fer sans entraîner de traces de zircon. Il 
reste simplement à calciner ce dernier élément, et dans chaque 
solution à reprécipiter le fer par l’ammoniaque et l’alumine par 
le nitrate d’ammonium. 


Séance du 1% juin 


Raoul Gautier. Les retours de froid en juin. — Th. Tommasina. Sur une 
modification donnant une plus grande liberté d’allure et plus de sûreté 
aux aéroplanes. 


M. Raoul Gaurier fait une communication sur les retours de 
froid en juin‘. Avec la collaboration de M. H. Duaime, M. R. 
Gautier a étudié cette question sur les séries météorologiques de 
Genève et du Grand Saint-Bernard. Conformément aux résultats 
obtenus par MM. Xellmann, Krankenhagen et Marten, 11 y a, 
à Genève et au Saint-Bernard, comme ailleurs en Europe, en 
moyenne, un retour marqué de froid dans la deuxième décade du 
mois de juin, mais seulement pour la seconde moitié du XIXe 
siècle et le commencement du XXe, 

Si l’on remonte plus haut en arrière et, pour Genève, jusqu’en 
1796, on ne retrouve plus du tout ce retour de froid à ce moment- 
là du mois. Il n’est donc pas motivé de considérer ce retour de 


l Voir aussi : Archives 1910, t. XXX, p. 514, et, pour la note détaillée, 
1911, t. XXXI, p. 497; — puis : Verhandlungen der Schweiz. Natur- 
forschenden Gesellschaft, 93. Versammlung, Bâle 1910, vol. I, p. 328. 


SÉANCE DU 1% JUIN 43 


froid comme normal au milieu de juin. L'étude d'autres séries 
d'observations un peu prolongées donnerait probablement les 
mêmes résultats qu'à Genève. 


M. Th. Tommasina. — Sur une modification donnant une 
plus grande liberté d'allure et plus de sûreté aux aéroplanes. 

Le but de cette Note est de proposer une modification pour 
empêcher surtout le capotage. Les aéroplanes actuels, monoplans 
et biplans, ont, comme on sait, une partie rigide constituée par le 
châssis muni de roues et de patins, les supports des réservoirs à 
essence et à huile, les sièges pour les passagers, pour le pilote, 
avec levier et volant, ainsi que toute la partie non gauchissable de 
la voilure. En outre, ils ont en avant le moteur avec son propul- 
seur à hélice (je ne m'occupe pas des appareils avec moteur à deux 
propulseurs placés en avant ou en arrière), qui se trouve égale- 
ment fixé au bloc indéformable de la machine, de façon que l'axe 
de rotation du propulseur a une direction invariable. La modifi- 
cation que je propose, met à la disposition du pilote le change- 
ment de la direction de l'axe du propulseur par rapport à l'axe 
longitudinal de l'aéroplane, c'est dire que le pilote pourra changer 
à volonté et instantanément la direction suivant laquelle se fait 
dans l'air le travail d'avancement ou de traction dû exclusivement 
à l'hélice, faisant ainsi, quand cela est nécessaire, jouer le rôle de 
gouvernail à tout l’ensemble rigide de l’aéroplane. Ce nouveau 
pouvoir, que ma modification donne au pilote, a une importance 
capitale, car 1l lui fournit le moyen d'exécuter les opérations sui- 
vantes : 

4° Dominer les perturbations de l'air, les coups de vent, les 
remous, etc., ayant une plus grande agilité de mouvement pour 
pouvoir entrer normalement dans le vent, en l'empêchant ainsi de 
nuire à la stabilité de l'appareil, lui faisant produire, au contraire, 
un travail utile. | 

2° Obtenir les avantages du vol plané sans couper l'allumage, 
et dans les conditions qui le rendent dangereux ou même impos- 
sible aux appareils actuels. 

3° Diminuer le rayon de courbure des trajectoires en spirale, 
soit à la montée, soit à la descente. 

4° Pouvoir atterrir en espace libre et convenable, relativement 
étroit. 

5° Décoller au départ, après un parcours de quelques mètres 
seulement. 

6° Éviter la rupture de l’hélice lors d’un atterrissage un peu 
brusque, permettant d’atterrir tangentiellement. 

1° Eviter, dans le même cas, un fossé, une barrière, un groupe 
de personnes ou un obstacle quelconque. 

8& Prendre le vol du pont d'un navire et y faire retour. 


44 SÉANCE DU 1° JUIN 


Il y a d’autres avantages et opérations possibles, que je ne cite 
pas pour abréger, et la pratique en montrera d’autres encore. 
Mais, ce qui est important de constater, c’est que les opérations 
qui viennent d’être indiquées suffisent pour éviter, pour éliminer 
même, le terrible danger du capotage. On sait qu'il peut se pro- 
duire autant au départ qu’à l’arrivée, quand la vitesse est insuffi- 
sante pour que les voilures du gouvernail de profondeur donnent 
leur effet utile ordinaire. En d’autres cas, ce dernier ne peut agir 
à cause de l’instantanéité de réaction qu'on lui demande; c’est, par 
exemple, lorsqu'il se produit une panne du moteur, ou lorsqu'on 
coupe l’allumage pour atterrir rapidement avant d'atteindre un 
obstacle imprévu, qu'il faut éviter et qu'on ne peut autrement, Si 
l’aviateur n’est pas tué ou blessé, en tous cas, sa machine est ren- 
due inutilisable pour la continuation immédiate du voyage. 

Je me suis intéressé à cette question, par devoir humanitaire, 
posant le problème au point de vue de l'application exacte des lois 
qui régissent les réactions entre solides et fluides en mouvement. 

La machine actuelle vole en glissant entre deux couches d’air 
qu’elle sépare, entraînée par une hélice, qui, à cause de sa grande 
vitesse de rotation, crée dans l’air la résistance nécessaire pour s’y 
visser. Sa vitesse d'avancement est moindre que la précédente, mais 
elle est suffisante pour créer l’autre résistance qui sert de support 
à la machine glissante. C’est le vol de l'oiseau planeur, Or, la 
première chose qui frappe l’observateur, est la rigidité de la 
machine, qui fait contraste avec l’agilité de l'être vivant. Si on 
considère le moteur comme la tête de l’aéroplane, on voit qu’à la 
place du bec elle porte l’hélice qui est son organe de propulsion. 
Cette seule considération suffit pour montrer qu'entre les mul- 
tiples mouvements de l’oiseau, il y en a plusieurs qui ne seraient 
pas utiles à l’aéroplane. D’autres, qui le seraient, ont été étudiés 
et en partie réalisés, ce sont ceux qui ont donné l’idée du gau- 
chissement des ailes, et celle des gouvernails de direction et de pro- 
fondeur, qui fonctionnent comme la queue de l'oiseau. On n’a pas 
cru devoir tenir compte du rôle que joue, en certains cas, l’incli- 
naison et le relèvement instantané de la tête de l’oiseau. Ainsi, par 
exemple, quand en descendant en vol plané, suivant la trajectoire 
BA, l'oiseau veut modifier celle-ci en A, pour remonter suivant 
AC, le relèvement de sa tête a une importance évidente, autant 
pour une trajectoire plane que pour une elliptique ou quelconque. 
Cela rappelle l'atterrissage rapide de l’aéroplane et la décision de 
la modification instantanée qui donne lieu au capotage, Pour l’évi- 
ter, lorsque l’inclinaison est telle que l’action du gouvernail de 
profondeur postérieur n’est plus suffisante, il faut faire comme 
l’oiseau, faire relever la tête de l’aéroplane, et il suffira d’un relè- 
vement minime dans le plan vertical axial, l'effet utile étant prompt, 


SÉANCE DU 1° JUIN 45 


précisément parce que l’aéroplane porte son propulseur à la place 
du bec, ce qui, dans ce cas, lui fait un avantage précieux, car il 
faut naturellement que le moteur soit en marche pour que le relè- 
vement de l’axe de vissement puisse modifier instantanément la 
trajectoire du vol, Pourtant, son utilité se montrerait encore, tout 
en produisant une déviation moins rapide, dans le vol plané d’at- 
terrissage régulier à moteur éteint, par l'effet de l'inclinaison de 
la couverture métallique de forme spéciale qu'il faudra lui adapter. 

On modifiera donc le mode de fixage actuel du moteur sur le 
châssis, et on le remplacera par une suspension permettant une 
rotation minime sur son axe transversal et horizontal, normale- 
ment à celui-ci; l'essai pratique en fixera les limites. Cette rotation 
se fera ainsi sur l’axe qui passe par le centre de gravité du bloc 
rigide moteur-hélice, de façon que le soulèvement du point cen- 
tral correspondant à l’attache de l'hélice au moteur, n’occasionne 


aucun déplacement de poids, pouvant modifier l'équilibre de l’aéro- 
plane, sauf dans le cas que la chose puisse être jugée utile. 
L'essentiel est que le bras du levier de commande se trouve près 
de la main droite du pilote. Une simple pression sur le levier, qui 
se déplacera par crans, avec cliquet d'arrêt, fera incliner vers le 
haut l’axe du bloc moteur-hélice donc la direction, comme il a été 
dit, du travail de propulsion. Il n’y aura aucune possibilité pour 
que l’aviateur affolé, en se trompant de sens, comme il est déjà 
arrivé pour le gouvernail de profondeur, puisse faire la manœuvre 
inverse, par la simple raison que la rotation doit s'arrêter au plan 
horizontal passant par l'axe longitudinal de l’aéroplane. Proba- 
blement, on a cru, jusqu'ici, avoir des bonnes raisons pour ne pas 
introduire la modification que je propose, j'insiste d'autant plus, 


46 SÉANCE DU 6 JUILLET 


s’il en est ainsi, sur son utilité, étant certain que l’actuation pra- 
tique la mettra immédiatement en évidence, son exécution ne 
présentant d’ailleurs aucune difficulté, et n’augmentant que de 
quelques kilos le poids de l’aéroplane. 


Séance du 6 juillet 


Ed. Claparède. Procédé pour contrôler l’authenticité de l'hypnose. — Le 
même. Etat hypnoïde chez un singe. — Th. Tommasina. Appareil d’avia- 
tion non renversable. 


M. Ed. CLapARÈDE communique un procédé pour contrôler 
l'authenticité de l'hypnose. 

Divers auteurs estiment que l’authenticité des états décrits sous 
le nom d’hypnose n’est pas démontrée. 11 s’agirait le plus souvent 
d’attitudes simulées, par tromperie ou par complaisance. M. Cla- 
parède a donc cherché un procédé qui permette de distinguer la 
réalité d’un état particulier du psychisme correspondant à l’hyp- 
nose. Ce procédé, fondé sur l’amnésie posthypnotique, est le sui- 
vant : 

On lit à haute voix au sujet, se trouvant à l’état de veille, une 
série de dix mots quelconques (p. ex.: maison, justice, bougie, 
marcher, 1883, tampon, etc.). Après quoi, on endort le sujet, et 
pendant qu'il est en hypnose, on lui lit une série de dix autres 
mots, série analogue à la première. Puis on l’éveille et on passe à 
l'expérience d’épreuve, qui consiste à lire au sujet les vingt mots 
présentés précédemment, mélangés à dix mots entièrement nou- 
veaux, et à prier ledit sujet d'indiquer les mots qui lui ont été 
déjà présentés et ceux qui lui paraissent nouveaux. 

Si l’amnésie posthypnotique est simulée, le sujet s’'embrouillera, 
se coupera, car il lui sera impossible, après une seule audition 
(celle-ci ayant eu lieu sans qu'il se doute du but de l'expérience), 
de se rappeler quels sont les mots qui appartiennent à la première 
série, dont il est censé se souvenir, et ceux qui appartiennent à la 
seconde, qu'il est censé avoir oubliée (puisque le sujet à l’état de 
veille perd le souvenir des faits qui ont eu lieu pendant l'hypnose). 

Si, au contraire, l’amnésie posthypnotique est authentique, le 
sujet distinguera sans difficulté les mots de la première série qu'il 
reconnaît, de ceux de la seconde série, qui, comme ceux de la 
troisième série, lui font l’impression de mots entièrement nouveaux. 

M. Claparède a vérifié sur un sujet l’efficacité de cette méthode, 
et 1] a pu du même coup se convaincre que, chez ce sujet tout au 


SÉANCE DU 6 JUILLET 47 


moins !, l'état d'hypnose correspond à une modification particu- 
lière du psychisme, inexplicable par la simulation, ou la complai- 
sance. En effet, lors de l'expérience d'épreuve, tous les mots qui 
ont été reconnus (six mots reconnus sans hésitation, et deux avec 
hésitation) appartenaient à la première série. Au contraire, 
pas un seul des mots de la deuxième ni de la troisième série n'a 
été reconnu. — Des expériences analogues, avec les mêmes résul- 
tats favorables, ont été faites avec des noms de ville ou des 
vignettes. 

Une fois l'expérience d'épreuve achevée, M, Claparède a endormi 
de nouveau son sujet, et lui a présenté encore une fois les trente 
mots précédemment montrés, convenablement mélangés, en le 
priant d'indiquer ceux qui faisaient partie de la série présentée en 
hypnose, Dans l'état d'hypnose, le sujet n'a pas perdu le souvenir 
de ce qui s'est passé dans l'état de veille; mais le but de cette 
expérience était de voir si les mots présentés en hypnose avaient 
acquis de ce fait un certain cachet affectif ou autre qui permît au 
sujet de les distinguer de ceux présentés en veille. Or, cela est 
bien le cas: sur les dix mots de la série-hypnose, sep{ ont été 
reconnus sans hésitation comme ayant été présentés en hypnose ; 
au contraire, aucun des mots présentés dans la première série n’a 
été reconnu pour avoir été présenté en hypnose (mais les réponses 
relatives à ces mots ont parfois été hésitantes, de même que pour 
les mots nouveaux de la troisième série). Pour la série avec vignet- 
tes, le sujet a distingué, sans aucune erreur, les vignettes présen- 
tées en hypnose de celles présentées en veille. 

Le sujet en question n'ayant nullement une mémoire exercée, 
et ignorant le but de l'expérience (de telle sorte qu'il n'a pu, au 
moment de la présentation des cartes, faire un effort de mémoire 
pour les associer en série), 1l est évident que cette distinction des 
mots ou vignettes présentées en veille ou en hypnose ne peut 
tenir qu'au fait que les souvenirs dépendant de chacun de ces deux 
états sont affectés d’une marque spéciale, sont colorés d’une façon 
non équivoque pour le sujet. ? Or, cette différence de marque, de 
coloration, ne peut tenir qu’à un état différent du psychisme dans 
chacun de ces deux états. A supposer donc que l'hypnose ne soit 
parfois qu'une simulation, elle correspond certainement dans cer- 
tains cas à une modification psychique réelle. 


| Il s’agit de la personne décrite sous le nom de M=* Bul, dans le 
travail de Claparède et Baade, Rech. exp. sur quelques processus psy- 
chiques dans un cas d’hypnose, Arch. de Psychol., VIII, 1909. 

? Le sujet étant endormi déclare notamment que les mots qui lui ont 
été dits en hypnose, «elle les voit beaucoup plus près, à sa droite; les 
autres sont dans le trouble, à gauche d’une sorte de barre.» 


48 SÉANCE DU 6 JUILLET 


M. Ed. CLaParèDE relate ensuite quelques observations sur un 
état hypnoïde chez un singe. 

M. Claparède ayant essayé d’hypnotiser, au moyen de passes et 
de fixation du regard, un singe Cynocéphale femelle qu’il possède 
depuis deux ans, — singe très vif et mobile, nullement dressé, et 
peu affectueux, — fut assez étonné de voir que ces manœuvres 
plongeaient presque instantanément l’animal dans un état de 
calme complet : le singe reste couché sur le dos, immobile, et, si 
on fixe ses yeux, on voit ceux-ci battre de la paupière et bientôt 
se fermer pour quelques instants (parfois les yeux restent clos 
une demi-minute, mais l’animal les rouvre au moindre bruit se 
produisant dans le lointain). Lorsqu'il est dans cet état, et même 
immédiatement après, alors qu’il s’est redressé, ce singe (d’ordi- 
naire intraitable) présente une docilité extraordinaire pour les 
mouvements qu'on lui imprime, et il garde les attitudes qu’on lui 
donne, ainsi que le font les sujets en catalepsie (flexibilitas cerea). 
On peut ainsi lui faire garder les deux bras et les deux jambes 
étendus en haut et en avant, de sorte qu'il ne repose, en équilibre 
instable, que sur son derrière. 

Un phénomène de ce genre, qu'il n’y a pas de raison pour ne 
pas rapprocher des phénomènes d’hypnose obtenus chez l’homme, 
puisqu'il y ressemble à s’y méprendre, semble indiquer que l’hyp- 
nose n’est pas uniquement, comme on le prétend couramment, 
un produit de la suggestion, On ne voit pas bien le rôle que joue- 
rait ici la suggestion, ni quelle serait l’idée ou la représentation 
suggérée qui s'imposerait ainsi au cerveau du singe. 

Il vaut mieux considérer cette docilité momentanée, cette sorte 
d’état d'abandon, comme une attitude réflexe, peut-être attitude 
de volupté, comme on rencontre dans les phénomènes de l’amour. 
Un auteur de l’école de Freud, Ferenczi, a récemment proposé de 
considérer l'hypnose comme un état de soumission à base sexuelle, 
L’état hypnoïde observé chez ce singe s’accomoderait assez bien 
de ce genre d'explication. — Il serait intéressant de répéter cette 
expérience sur d’autres quadrumanes, notamment sur des mâles. 


M. Tu. Tommasina. — Sur un appareil d'aviation non ren- 
versable et effectuant automatiquement le vol plané en cas 
d'arrêt du moteur. 

Il suffit d'observer attentivement le vol des oiseaux pour être 
frappé de la complexité de leurs moyens, je dirai de la richesse 
mécanique qu'ils possèdent et qu'ils peuvent utiliser simultané- 
ment. On en a fait une analyse sommaire et on a distingué : 

Le vol orthoptère, par lequel certains oiseaux peuvent s'élever 
presque verticalement, par l’abaissement et le relèvement simul- 
tané des deux ailes. C’est la forme convexe vers le haut et la 


SÉANCE DU 6 JUILLET 49 


vitesse plus grande de l'abaissement par rapport à celle du relève- 
ment des ailes, qui leur permet de monter. 

Le vol ornithoptère, qui se distingue du précédent en ce que le 
coup d’aile est oblique par rapport à la verticale. Il en résulte que 
l'oiseau se déplace parallèlement au sol. Il peut d'ailleurs se dépla- 
cer aussi suivant une trajectoire oblique, 

Le vol plané, quand le déplacement a lieu sans mouvement 
apparent des ailes, 

e vol à voile, quand l'oiseau utilise la pression du vent contre 
ses ailes, qui ne font que changer rapidement de position, sans 
faire un travail de propulsion. 

Puis, enfin, le vol ramé, c'est le vol des oiseaux qui parcourent 
des grandes distances. Ici, la sustentation est obtenue, grâce à la 
vitesse, c'est le principe fondamental de l’aéroplane ; l'oiseau y 
développe, avec une partie de l'aile, une propulsion horizontale. 

L'aéroplane réalise, avec l'angle d'attaque de ses ailes immobiles 
et par la rotation des pales hélicoïdales de son propulseur, ce 
dernier type de vol; à l’aide de ses ailerons-gouvernails et du gau- 
chissement partiel de ses ailes, 1l tâche d'obtenir les autres formes 
de vol. Si le pilote s'aperçoit à temps, par le bruit du moteur, que 
ce dernier marche mal, il peut réaliser le vol plané et atterrir sans 
danger. Mais, si le moteur s'arrête tout à coup, lorsque la faible 
hauteur et les conditions du régime de marche ne se prêtent pas 
pour commencer le vol plané, l’aéroplane tombe, comme l'oiseau tué. 

Les perfectionnements qu’on apportera aux moteurs actuels, et 
la création de nouveaux moteurs, diminuera toujours davantage la 
probabilité d’un accident de cette nature, mais ne l’éliminera pas. 
Or, si l’on veut que les voyages par la voie aérienne puissent deve- 
nir pratiques, comme ceux en automobile, 1l faut qu'un tel dan- 
ger soit supprimé, il faut que la vie de l’aviateur ne soit plus à la 
merci d’un arrêt instantané, toujours possible, du moteur. 

La vitesse actuelle des aéroplanes peut dépasser les 120 kilomée- 
tres à l’heure, donc les 33 mètres à la seconde, ce qui suffit pour 
dominer les vents ordinaires ; mais cette vitesse n’a été obtenue 
que grâce à la grande puissance, par rapport au poids, des moteurs 
à explosion, et grâce à des sacrifices ayant trait aux dimensions 
que la surface portante avait chez les simples planeurs, ce qui a 
amené une moindre sécurité dans le cas d’une panne imprévue du 
moteur. C’est dire que la stabilité des meilleurs aéroplanes actuels 


est inférieure à celle des anciens planeurs. 
Le problème : à résoudre mécaniquement était donc de faire que 


l'oiseau artificiel, venant de perdre en plein vol ses moyens de pro- 
pulsion, ne tombât pas comme l'oiseau tué. Aucun type de para- 
chute ne peut donner une solution pratique ; 1l faut que l'appareil 
lui-même soit son propre parachute, et il faut, en outre, que la 
descente soit dirigeable et non pas à la merci du vent. 

4 


50 SÉANCE DU 6 JUILLET 


L'appareil que j'ai inventé et que je crois répondre à ce but, est 
complètement différent des appareils d'aviation en usage; aussi, 
en le présentant, je lui donne le nom nouveau de voloplane, qui 


ai 
L. 


AAA 
SN 


vole et plane. Ce nom lui est bien approprié, parce que ses pro- 
pulseurs, d’un type également nouveau, produisent successivement 
à chaque tour la traction ou mieux la poussée horizontale ou lon- 
gitudinale par une action analogue au vol ramé des oiseaux, et 
un travail de sustentation produit par des surfaces portantes incli- 
nées, petites, mais actives pendant le vol et utiles pendant la des- 
cente. En outre, la constitution mécanique du voloplane est équi- 
librée de telle façon qu’elle lui procure une stabilité absolue et lui 
donne le pouvoir de commencer et de continuer automatiquement 
la descente en vol plané en cas d'arrêt du moteur. (Fig. 1.) 

Le régime du voloplane est plus régulier que celui de l’aéro- 
plane, et sa gouverne est plus sûre et plus facile, car 1l possède la 
qualité précieuse de ne pas être renversäble. 

On se convaincra de la réalité de ces avantages d’après la des- 
cription sommaire de l’appareil que je vais en donner : 

1°. — La projection horizontale de la surface portante, qui 
couvre tout l'appareil, est carrée. Cette aile unique (ou double, 
formant une quille longitudinale) n’est donc pas fixée au châssis 
de l’esquif, comme les ailes du monoplan, mais elle en forme le 
toit, ayant le même angle d'inclinaison ou d’attaque que les ailes 
des aéroplanes. (Fig. 1.) L’esquif long et mince est effilé en avant 
et en arrière. 

2°. — Les propulseurs au nombre de 2 ou de 4, et à deux ailes, 
tournent chacun sur un axe vertical et en sens contraire selon le 
côté. Tandis que les ailes des propulseurs à hélice forment un 
seul bloc rigide, celles-ci sont mobiles autour de leur axe longitu- 
dinal, A l’aide d’un engrenage intermittent ne présentant qu'une 
résistance minime, le frottement pouvant être atténué par un rou- 
lement à billes, les ailes produisent pendant chaque tour du pro- 
pulseur, successivement et alternativement, le vol ramé, avec une 
pression normale pour la translation horizontale pendant !/, de 
tour, puis une pression oblique glissante pendant ?/5 ; les autres ?/s 


SÉANCE DU 6 JUILLET 1 
étant utilisés pour les deux rotations de 90° de chaque aile sur son 
axe. Ces rotations de 90° des ailes ne sont pas influencées par la 
résistance de l'air quelle que soit la vitesse de travail du propul- 
seur. La pression de l'air est normale à l'aile, mais le mouvement 
d'une moitié d’aile étant en sens opposé de 
celui de l'autre moitié, la résultante des deux 
actions, l'une contraire, l'autre favorable à 
la rotation, est toujours nulle. (Voir fig. 2 
et 3.) 

30, — Les trois stabilités : latérale ou 
contre le roulis, longitudinale ou contre le 
tangage et la stabilité de route ou contre la 
giration, sont obtenues à l’aide de la symé- 
trie dynamique parfaite due au mode ‘spé- 
cial de propulsion par deux ou quatre pro- 
pulseurs conjugués. 

4°. — On pourra utiliser un seul moteur ou plusieurs, cela 
dépendra du moteur choisi, des dimensions du voloplane et sur- 
tout des résultats de la pratique. L'expérience seule peut trancher 
cette question comme beaucoup d’autres. 


mn pignon mobile avec l’aile. Fig. 3 
f pignon fixe. L 


5°, — Les virages peuvent se faire, soit par l'action d'un gou- 
vernail vertical, soit par la diminution de la vitesse du ou des 
propulseurs du côté où l’on veut tourner, ou par l'accélération du 
côté opposé. 

6°. — Le maintien du vol horizontal est produit par la vitesse 
et par l'angle d’inclinaison ou d'attaque de la surface portante et 
des ailes des propulseurs pendant leurs parcours en travail de 
sustentation. Les modifications verticales sont obtenues, soit par 
le gouvernail de profondeur, soit par les changements de vitesse 
des deux propulseurs antérieurs ou des deux postérieurs, dans le 
voloplane à # propulseurs, qui est certes le type présentant la 
meilleure stabilité, donc la sécurité maxima, 

7°. — La stabilité automatique longitudinale due à la queue des 
aéroplanes n'est en réalité qu'un état d'équilibre instable. Au con- 
traire, l'équilibre du voloplane à # propulseurs est stable, même 
à moteur arrêté ; il est dû, non seulement à la position basse du 


52 SÉANCE DU 6 JUILLET 


centre de gravité, mais encore à sa symétrie statique ou de forme 
et à sa symétrie dynamique ou de mode de propulsion et de sus- 
tentation glissante. L'action propulsive s’effectuant dans le plan 
qui contient la résultante des différentes résistances, plan qui se 
trouve au-dessus de celui parallèle passant par le centre de gravité 
du voloplane. C’est ce qui donne à celui-ci les propriétés qui le 
caractérisent de ne pas être renversable (car il ne peut ni se cabrer 
ni capoter) et de prendre immédiatement la glissade du vol plané, 
dès que le moteur cesse de fonctionner. En effet, à cet instant, 
tandis que les deux branches de l’hélice verticale, quelle que soit 
leur position, gênent l'opération, au contraire, les ailes du nou- 
veau propulseur horizontal, même arrêtées dans leur position de 
travail pour ramer, sont ramenées par la pression de l’air dans 
position où elles agissent utilement comme guides à la glis- 
Le De cette façon il suffit au pilote de manœuvrer avec le gou- 
vernail de direction pour atterrir convenablement à l’endroit le plus 
favorable et sans choc; la surface portante devant avoir les dimen- 
sions requises que l'expérience permettra de fixer exactement pour 
chaque type d'appareil. 
En plus des avantages qu’on vient d'indiquer, il faut encore 


ajouter les suivants : 
Théoriquement, le propulseur à hélice des aéroplanes serait par- 


fait, si l'avance par tour correspondait au pas de la surface héli- 
coïdale. En pratique, comme l’hélice doit faire un travail de 
traction ou de poussée, il se vérifie un recul, l'avancement réel est 
inférieur au pas. C'est ce qui donne lieu à une dépense d’énergie 
en pure perte, produisant, en outre, des mouvements tourbillon- 
naires de l’air, nuisibles, très complexes. Le fait est que le rende- 
ment actuel de l’hélice sur aéroplane n’est que du 40 pour 100. II 
y a donc une perte de 60 pour 100. On pourrait transporter un 
poids double, ou obtenir une double vitesse, avec le même appa- 
reil, si l’on avait un type de propulseur donnant seulement un 
rendement de 90 pour 100*. L'expérience montrera si mon propul- 
seur pourra atteindre ou dépasser ce dernier rendement; en tous 
cas, son mode de travail doit réduire au minimum les remous 
tourbillonnaires, et comme il demande une vitesse de rotation 
moindre pour obtenir la même vitesse de translation, cela dimi- 
nuera l’échauffement du moteur et augmentera conséquemment la 
régularité de sa marche et sa durée. 


? Il ne faut pas confondre le rendement de l’hélice propulsive au 
point fixe avec celui de la même sur appareil en marche à grande 
vitesse, dont il est question ici. (Note de l'auteur.) 


SÉANCE DU D OCTOBRE 53 


Séance du 5 octobre 


E. Yung. Structure de l'ovispermiducte et de la glande albuminipare chez 
l'Helix pomatia. — E. Cardoso. Sur les densités des phases coexistantes de 
l'anhydride sulfureux au voisinage du point critique, — R. Gautier. Journal 
météorologique fait à Genève par J.-A, de Luc au XVIII: siècle. — Le 
même. Quelques anomalies de la température et de la clarté de l'été 1911. 
— F. Reverdin et A. de Luc. Constitution de l'éther monométhylique de 
la dinitrohydroquinone et dérivés méthylés des p-anisidines dinitrées, 


M. le prof. Emile YuxG expose les résultats des recherches 
faites dans son laboratoire, par M. Lubecki, sur la structure de 
l'ovispermiducte et de la glande albuminipare chez l'Hélix 
pomalia. 

La paroi de la gouttière ovulaire de ce Gastéropode renferme 
de grandes cellules glandulaires pyriformes qui débouchent cha- 
cune séparément dans la cavité de la gouttière et y apporteut une 
substance mucilagineuse destinée à former la membrane externe 
de l'œuf. 

Outre ces glandes, 1l existe tout le long du canal séminal une 
glande dite prostatique composée de nombreux follicules tapissés 
par deux sortes de cellules dont les unes de forme pyramidale et 
de petite taille ont conservé les caractères de cellules épithéliales, 
alors que les autres plus grandes et prismatiques sont évidemment 
de nature glandulaire. Le protoplasma de ces dernières, fortement 
réticulé contient de nombreuses granulations calcaires et le noyau 
de ces mêmes cellules est très chargé de nucléine. Quelles sont les 
relations entre ces deux genres de cellules? M. Lubecki a réussi à 
établir que les cellules pyramidales représentent les éléments régé- 
nérateurs des cellules prismatiques. Quant à la fonction de ces 
dernières, nul doute qu'elles ne fournissent à la coque de l'œuf la 
matière calcaire qui incruste celle-ci. La glande prostatique serait 
done une glande éminemment calcaire. 

La glande albuminipare de son côté est aussi constituée de deux 
sortes de cellules ressemblant bea ucoup aux précédentes. Les cel- 
lules prismatiques glandulaires sont ici chargées d'albumine accu- 
mulée sous forme de gouttelettes dans leur POP et qui est 
conduite à l’oviducte par un canal excréteur à section triangulaire 
tapissé d'un épithélium cilié. Après la ponte, la glande albumini- 
pare contient encore beaucoup d’albumine, mais celle-c1 est ulté- 
rieurement utilisée comme réserve alimentaire pendant l'hiberna- 
nation, Si l’on suit l’état des éléments de la glande au cours de 
cette dernière, l’on constate la disparition progressive de l'albumine 


54 SÉANCE DU à OCTOBRE 


et la diminution de la chromatine dans les noyaux des cellules 
prismatiques dont la membrane nucléaire, en revanche, et le 
réseau de linine apparaissent alors avec une netteté remarquable. 


E. Carposo. — Sur les densités des phases coexistantes de 
l’anhydride sulfureux au voisinage du point critique. 

M. E. Cardoso expose le principe de la méthode qui lui a per- 
mis de déterminer des phases coexistantes de l’anhydride sulfureux 
au voisinage du point critique. L'auteur a employé pour chaque 
série de mesures deux tubes de Natterer de construction et rem- 
plissage particuliers. Ces deux tubes étaient placés simultané- 
ment dans la même étuve. L'étuve utilisée est du type Ramsay- 
Gonny légèrement modifiée. Parmi les différentes modifications 
apportées par l’auteur à cette étuve, il signale qu'il a plongé le 
ballon régulateur de pression (de très grandes dimensions, cinq à 
six litres), dans la glace fondante ; ce dispositif lui a permis de 
maintenir la température constante aussi longtemps qu'il le 
désirait. Le liquide de chauffe utilisé est du bromo-benzène 
extra pur. Dans une première série de mesures effectuées avec une 
paire de tubes de Natterer non munis d’agitateurs, l’auteur a ob- 
tenu un diamètre très courbé au voisinage du point critique. 

Les mesures reprises sur une autre paire de tubes munis d’agi- 
tateurs lui a permis de déterminer les densités des deux phases 
jusqu’à 7/10 de degré du point critique. Ici aussi, il trouve un dia- 
mètre courbé, moins cependant que celui obtenu dans la précé- 
dente série. La densité critique correspondant à 157°2 (tempéra- 
ture critique de SO, et concordante à 0,05° avec celle obtenue 
dans un précédent travail en collaboration avec M. Bell) est de 
0,513° chiffre différant de plus de 1 °/, de la valeur déduite de la 
loi du diamètre nuclitique (0,520). Il attribue cet écart à la con- 
ception que l’on se fait de l’état critique ou au dispositif expéri- 
mental utilisé. Il a entrepris de nouvelles recherches qui, espère- 
t-1l, lui permettront d’élucider cette question et de savoir à laquelle 
des deux causes énoncées plus haut ces divergences sont impu- 
tables. 


M. Raoul GauriEer communique à la Société un nouveau don 
fait à l'Observatoire de Genève et qui augmente d’une façon inté- 
ressante et utile les archives météorologiques de cet institut. Il s’agit 
1° du Journal météorologique fail à Genève par Gullaume- 
Antoine de Luc, en deux volumes manuscrits, admirablement 
tenus, et contenant les observations faites à la Cité (n° 219 ancien 
et n° 19 actuel) du thermomètre, du baromètre et du temps en 
général, du 4e janvier 1768 au 31 décembre 1800. Cette belle série 


Qt 


SÉANCE DU D OCTOBRE 5 


était déjà connue par les publications d'Alfred Gautier! et de 
George Picot?, mais M. Raoul Gautier désirait retrouver le 
manuscrit. Grâce à l’obligeance de M. William de Luc, arrière 
petit-neveu du météorologiste genevois qui a fait ces observations, 
cela a été possible, et M. W. de Luc a fait don gracieusement de 
ces registres et des suivants à l'Observatoire, 

C'est spécialement au point de vue de la température que cette 
série presque ininterrompue d'observations faites une fois par jour, 
le matin, au même endroit pendant 33 ans, est précieuse. Il y a 
quelques lacunes de courte durée, provoquées par les troubles poli- 
tiques de cette époque agitée, ou par les fonctions absorbantes 
d'hospitalier que Guillaume-Antoine de Luc a exercées pendant 
plusieurs années. Ces lacunes sont du reste peu importantes et 
pourront être comblées. 

20 Il s’agit aussi de deux gros cahiers contenant le /ournal 
météorologique fait par Jean-André de Luc neveu, fils du 
précédent, du 23 mars 4821 au 14 mai 1847, jour de sa mort. Ces 
observations ont moins d'intérêt que les précédentes, parce que 
nous possédons d’autres observations météorologiques de la même 
époque faites à Genève dans de meilleurs emplacements. Mais elles 
ont aussi leur intérêt, comme contrôle, quoiqu'elles n'aient pas 
été faites au même étage et dans la même exposition que celles de 
Guillaume-Antoine de Luc. À 

Grâce à M. William de Luc, après Mme Charles Dufour et 
M. F.-A. Forel, l’année 1911 a été ainsi profitable aux archives 
météorologiques de l'Observatoire de Genève, et son directeur 
réitère l'expression de sa reconnaissance à tous ces généreux 
donateurs. 


M. Raoul Gaurier attire l'attention sur quelques anomalies de 
température et de clarté de l'été exceptionnel que nous venons 
de traverser et qui a dépassé sa longueur normale, puisqu'il 
s'étend jusqu’au 15 septembre 1914. 

Au mois de Juin, anomalie, qui est normale depuis plus d’un 
demi-siècle, que la température de la 1"e décade soit plus élevée 
que celles des deux dernières, a été particulièrement caractérisée. 


! Notice historique sur les observations météorologiques faites à 
Genève. Bibliothèque universelle, 1843, t. XLIII, p. 128. Voir p. 129 à 
137. 

? Notice sur la température de Genève. Mémoires de la Société de 
physique et d'histoire naturelle de Genève, t. X, p. 247. Voir p. 365 à 367. 
(L'écart de 100 pages est dû à une faute d'impression dans le volume 
des Mémoires.) 


56 SÉANCE DU 5 OCTOBRE 


C’est en juillet que la température est montée haut; mais c’est 
seulement à partir du 18 qu'elle a été vraiment exceptionnelle. La 
température moyenne du mois a atteint 21°,35, en excès de +9°,54 
sur la normale. Il y a eu d’ailleurs, depuis 14826, quatre mois de 
juillet plus chauds à Genève, en 1859, 1870, 14881 et 1905. Le 
maximum absolu du mois 36°,1, le 24, a été dépassé seulement 
par ceux du 30 juillet 1827 (36°,2) et du 6 juillet 1870 (36,°4). 

La clarté du ciel a été exceptionnelle : la nébulosité est caracté- 
térisée par le chiffre 2,3 et est un minimum à Genève depuis que 
l’on note cet élément, soit depuis 1847. La durée d’insolation est 
de 337 heures à l’ancien héliographe et de 389 au nouveau. C’est 
aussi un maximum, naturellement, depuis les 15 ans que cet appa- 
reil est installé à l'Observatoire. 

Août se distingue par sa température exceptionnellement élevée, 
21°,28, un chiffre qui n'avait pas été atteint à Genève depuis 1826, 
origine de la série vraiment homogène des températures. Pour la 
nébulosité, août est très clair, avec 2,6, battu seulement par août 
1861, avec 2,2. La durée d’insolation est de 317 et de 347 heures 
aux deux héliographes. C’est un maximum depuis 1897. 

Septembre enfin fournit dans sa première quinzaine le jour le 
plus chaud que l’on ait jamais eu à Genève dans ce mois, le 9, 
avec 24°,34 et un écart de Æ7°,70. Comme écart, ce n’est pas un 
maximum, car le 13 septembre avec 22°,89 a un écart de +-7°,77. 

L'été véritable a commencé le 26 juin au point de vue de la 
sécheresse qui a duré jusqu’au 13 septembre, interrompue seule- 
ment par les orages, dont quelques-uns violents et avec averses de 
grêle, du mois d'août. Au point de vue de la {empéralure, il n’a 
commencé que le 30 juin. Et si l’on compte seulement la période 
de jours vraiment trop chauds, on trouve une durée de 66 Jours, 
du 12 juillet au 15 septembre, où {ous les jours ont eu des tem- 
pératures supérieures à la normale. Sauf peut-être en 1834, 1l 
n'y a pas eu de période continue aussi chaude dans le passé. 


Frédéric Revernix et Armand pe Luc. Constitution de l’éther 
monométhylique de la dinitrohydroquinone de Weselsky et 
Benedikt ; dérivés méthylés des p-anisidines dinitrées. 

M. Reverdin a décrit précédemment? la nitramine, { à 125”, 
d’une dinitro-p-méthylanisidine dont la constitution restait à 
déterminer et qui fournissait par l’action de la lessive de soude 
l’éther méthylique d’une dinitrohydroquinone préparé autre- 
fois par Weselsky et Benedikt !, à constitution également indéter- 


? Bul. Soc. chim. de France, 4, t. IX, 1911, p. 43. 
? Monatshefte, Vienne, t. IT, 1881, p. 369. 


SÉANCE DU 2? NOVEMBRE 57 


minée. D'après les réactions de cette nitramine elle devait néces- 
sairement correspondre à l’une des formules : 


OCH* OCH* 
NO? NO° 
ou NOK /NO* 
CH" “CHF 
NXO, NX 0. 


et l’éther méthylique de la dinitrohydroquinone de W. et B. à une 
formule analogue. 

MM. Reverdin et de Luc ont préparé la dinitro-9-6-diméthyl- 
p-anisidine pour la soumettre à la nitration. Cette base, F à 450”, 
est un isomère d’un dérivé, f au-dessus de 300°, obtenu par Mel- 
dola!; ce savant en étudie actuellement la structure qu’il suppose 
être « quinoïdique ». Comme la base f à 150°, fournit par nitra- 
tion une nitramine, f à 139-140°, différente de la nitramine, dont 
on cherchait à établir la constitution, il en résulte que cette dernière 
(F—125°) correspond à la formule IT et que l’éther méthylique 
de W.et B. f à 102°, a la constitution CfH?, OCHS. NO?: NO?. OH. 

: (1) (8) (5) (4) 

Les auteurs ont essayé, en vain jusqu'à présent, de «méthyler » 
la dinitro-3-5-p-anisidine pour la transformer ensuite en nitramine 
f à 125° ; le voisinage des deux « nitro » et de l” « amino » paraît 
être un obstacle à cette réaction ; 1ls ont, en revanche, pu « mé- 
thyler » la dinitro-2-3- et la dinitro-2-5-p-anisidine, mais ils n'ont 
obtenu que des dérivés « monométhylés » ; ces deux dinitro-ani- 
sidines, possédant chacune un groupe « nitro » voisin de | € amino » 
il est du reste normal qu'elles fournissent de préférence des déri- 
vés « monométhylés », 


Séance du 2 novembre 
Amé Pictet et Alphonse Gams. Synthèse de la berbérine. 


MM. Amé Picrer et Alphonse Gams. — Synthèse de la berbé- 
rine. 

Nous avons réalisé la synthèse de la berbérine en passant par 
celle de la {étrahydroberbérine. 

On sait que la tétrahydroberbérine s'obtient aisément par 
réduction de la berbérine et qu’elle régénère celle-ci sous l'action 
des oxydants faibles. Sa constitution, établie par les travaux de 


1 Proc. of. chem. Soc., t. XXVI, 1910, p. 232. 


58 SÉANCE DU 2? NOVEMBRE 


Perkin, Gadamer et Faltis, est exprimée par la formule IV 
ci-après. 

Nous avons obtenu ce composé au moyen des quatre réactions 
suivantes : | 

1° Condensation de l’homopipéronylamine, 

CH:0, — CHs — CH — CH — NH, | 
avec le chlorure homovératrique, (CH,0), = CH, — CH, — CO CI, 
en présence de soude caustique. On obtient l’homovératroyl-homo- 
pipéronyl-amine (formule 1) en longues aiguilles incolores, 
fusibles à 136°. 

20 Déshydratation de ce composé par l’action de l’anhydride 
phosphorique sur sa solution xylénique bouillante. Il se forme 
par cyclisation une base isoquinoléique tertiaire et non saturée 
(point de fusion 68°-70°) dont la constitution répond à la for- 
mule I. 

3° Réduction de cette base par l’étain et l’acide chlorhydrique. 
Cette opération donne naissance à la vératryl-norhydrohydras- 
tinine (formule IT), base secondaire, cristallisant en fines aiguilles 
incolores et fondant à 208°-210°. 


CH, CH. | CH, 
CH, JXCH CH, 
CH, “ED CH, <° HE ou, <° , 
à 0 N 0 NH 
NZ 
Û ft 
il | | 
(a : CH, 2 CH, 
| | | 
& cu pe 
OCH, OCH, OCH, 
[ | Il 11 


4o Traitement de la vératryl-norhydrohydrastinine, dissoute 
dans l’acide chlorhydrique concentré, par le méthylal, à la tem- 
pérature du bain-marie : 


CH CH 
O0 CH AN: 
CE< à + CH(OCH) = CH <° AL: + 2 CHOH 
0 NH 0 N 
Ÿ DEN 
| 
| 
FAQ H,C | 
_ NN o0R 
| 
OCH. 00: 


SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 59 


Le produit de cette dernière réaction s'est montré, de tout point, 
identique à l'hydroberbérine obtenue par réduction de la berbé- 
rine naturelle. Les deux substances, ainsi que leur mélange, 
fondent à 168° et donnent les mêmes colorations avec l'acide 
sulfurique concentré (jaune vif) et avec le réactif de Mandelin 
(brun jaunâtre, virant au bout de quelques minutes au rose). 
La même identité se remarque entre les sels des deux bases, dont 
les points de fusion coïncident exactement : chlorhydrate 213°-214, 
picrate 492°, iodométhylate 234°-236°, 1odéthylate 226°-227° 

La synthèse de la tétrahydroberbérine entraîne celle de la ber- 
bérine, la première de ces bases ayant déjà été transformée en 
la seconde, ainsi que nous l'avons rappelé plus haut, par l’ac- 
tion de divers oxydants. Nous avons néanmoins répété l’opéra- 
üon avec notre produit et obtenu, en le traitant par le brome 
ou l'acide nitrique, les différents sels de berbérine avec tous les 
caractères que présentent ceux de l’alcaloïde naturel. 


Séance du 16 novembre 


A. Sprecher. Recherches sur la variabilité des sexes. 


M. Caopar présente au nom de M. le D' Andreas SPRECHER un 
mémoire intitulé : Recherches sur la variabilité des sexes chez 
Cannabis sativa et Rumex acetosa. I fait précéder l'exposé des 
résultats obtenus par ce botaniste de quelques remarques sur la 
question posée, En particulier 1l montre comment chez les Muco- 
rinées le sexe peut être dissocié de l’hermaphroditisme au cours 
de l'évolution des espèces homothalliques, tandis que dans les 
espèces hétérothalliques la sexualité s'affirme dès la formation de 
la zygote ou à la première apparition d’un sporange. 

Partant de la découverte de Blakeslee, M. Chodat à proposé à 
Mie Korpatchewska d'étudier la nature de la sexualité dans quel- 
ques espèces hétérothalliques. Les recherches physiologiques 
entreprises à partir de microorganismes satisfont à cette demande 
qu'on travaille sur un grand nombre de cas pour éliminer les 
erreurs individuelles. Le résultat de ces recherches étendues c’est 
que ni par la variation du milieu, ni par l’action de la tempéra- 
ture, on n'arrive à modifier la sexualité de ces plantes dimorphes 
à peu près dépourvues de caractères morphologiques sexuels et 
qui ne différent que par des potentiels physiologiques. 

Cependant, selon les milieux, la vigueur de croissance des races 
+ et — diffèrent. Un autre point important c'est que le pouvoir 
ferment des deux races est différent vis-à-vis des disaccharides 


60 SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 


(saccharose et maltose). Il ÿ a comme une polarité stéréochimique 
(voir Korpatchewska, Thèse, 1910). 

Dans des recherches de ce genre, on a égalisé toutes les circons- 
tances et le coefficient individuel se perd au milieu de la popula- 
tion comprenant un si grand nombre d'individus que l’on peut 
bien dire que l'expérience a la rigueur d’une recherche de chimie 
ou de physique. 

Dans les recherches que M. Chodat a fait exécuter dans son 
laboratoire par Mile Stefanowska, ou en partie à l'Ecole d’horti- 
culture, par MM. Monnier, Deleano et Rabinowitch et qui ont 
pour objet l’absorption et la migration des substances minérales 
dans les végétaux, le même principe a été inauguré à savoir 
éliminer les variations individuelles en expérimentant sur de 
grands nombres. Des valeurs obtenues on a pu déduire que le 
germe agit sur les matières chimiques en présence, comme un 
catalyseur et que la vitesse de croissance suit la loi des masses. 

Le D' A. Sprecher dans le travail présenté, s'inspire aussi des 
idées et des résultats de la biométrie contemporaine. Non seule- 
ment 1l cherche à éliminer les facteurs individuels, mais 1l calcule 
chaque fois l'erreur probable, et la compare avec les résultats 
obtenus, considérant chaque fois comme inutilisables les diffé- 
rences qui n'excèdent pas de beaucoup la valeur de cette dernière. 

Deux plantes phanérogances ont été choisies par l’auteur, Can- 
nabis sativa et Rumezx acetosa deux végétaux dioïques. 

.Toutes ces expériences sont faites sur des grands nombres et 
chaque catégorie de recherches, en partant de la sélection faite sur 
les semences (foncées, claires, petites, grosses, nervures, sans 
nervures). Il critique les résultats déjà acquis à propos de Can- 
nabis et expose les siens. Il n’oublie pas de tenir compte du facteur 
mortalité. Il voit cependant que dans les expériences de plusieurs 
années, alors que la mortalité est très variable d’une année à 
l’autre, les résultats en ce qui concerne le sexe n’oscillent pas 
sensiblement. 

Lorsqu'il s'agit de la proportion des mâles et des femelles, on 
a affaire à une variation alternative pour laquelle l’indice de 
variabilité 6 = + V2) Po X Pi. Ii 0 = Q® et1 = g. 

Les fréquences (Q) sont 14789 et (3) 13260, la somme (n) 
28049. Ce qui donne p. 6 = + 49.92% J ou ©. 

Erreur moyenne est calculée en posant E — 5 : Vn — + 0,3. 

La proportion des sexes chez le chanvre comme chez l’oseille 
est indépendante de la fumure. (Chanvre Œ 47.27%, Q , 52.72 °/0 
soit 100 Get 112 8) indépendante de la précocité, indépendante 
de la sélection d’après les caractères indiqués. 

Pour le Rumex acelosa il en est de même, les variations 
observées sont toutes trop faibles en comparaison de l'erreur 


SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 61 


probable. Mais la proportion des mâles et des femelles est tout 
autre. (Rumex Œ 29.33 °/, © 70.67 °, soit n — 6049 indiv. — 
100 Z et 241 Q — dans la nature il a constaté 32.81 Q ec 
67,18 °/, Q soit 100 et 204 femelles). 

Ces recherches, d'une très grande précision, n'ont done donné 
aucun résultat en ce qui concerne la détermination du sexe déjà 
donné dans la graine. 

Dans une seconde partie, l’auteur étudie la variabilité comparée 
des deux sexes selon la méthode de la biométrie. 

Dans le chanvre le mâle est plus élancé que la femelle, mais le 
poids de la femelle l'emporte. (4 1420 : © 100 ; p. l’homme 
d 108.07 : © 100 d'après Pearson). Dans le Rumex c'est le 
contraire (4 100 © 122). Chez les deux, l'amplitude de variation 
est plus grande dans la femelle, de même l'indice de variabilité. 
La variabilité des uns et des autres se laisse exprimer par une 
courbe empirique, sensiblement voisine de la courbe binomiale 
idéale, mais avec une légère asymétrie positive. Nous laissons de 
côté de nombreuses expériences sur la variabilité en fonction de la 
fumure. Elle varie beaucoup. 

Enfin M. Sprecher examine, au moyen de la méthode cryosco- 
pique, la différence des sucs, exprimé par le Poids moléculaire 
moyen, la Pression osmotique. Le résultat est que, dans les deux 
espèces, il y a entre les sucs du mâle et de la femelle, une difté- 
rence de concentration équivalent à une demi-atmosphère. 


Séance du 7 décembre 


André Chaix. Géologie du massif des Brasses (Haute-Savoie). — Raoul 
Gautier. Installations pour utiliser les anciennes séries d'observations de 
la température à Genève. — De la Rive. Sur la trajectoire circulaire de 
l’électron autour de la molécule dans un champ magnétique uniforme. 


M. André Cuaix rend compte d’une étude détaillée qu'il a faite 
de la géologie de la chaîne des Brasses. 

Cette chaîne, située au S.E. des Voirons et au N. du Môle, 
fait partie du bord frontal des Préalpes médianes et chevauche 
sur la nappe des Préalpes externes, représentées ici par l'énorme 
masse de Flysch des Voirons et du Mont Vouan ; elle représente 
le prolongement direct du Môle, dont l'étude a été magistrale- 
ment faite par Marcel Bertrand. 

La zone des Brasses et du Môle a été énergiquement plissée ; 
la structure a été en outre compliquée par l'incurvation assez 
brusque qu'y ont subie tous les plis, dirigés d'abord S.E.-N.W. 


62 SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 


au Môle, puis S.-N. aux Brasses, et finalement S.W.-N.E. entre 
Mégevette et Pérignier. Cette incurvation a eu ici pour consé- 
quence moins un étirement des éléments externes, comme on 
le constate fréquemment ailleurs, qu’une compression des plis 
internes, qui ont ainsi formé des ensellements transversaux, en 
particulier à St-Jeoire, à Onion et à Mégevette, et qui ont subi 
des modifications brusques dans leur forme et leur ampleur. 

La série stratigraphique des Brasses débute par les cornieules 
et les calcaires dolomitiques du Trias. Le Jurassique comprend, 
à sa base, des dépôts infraliasiques intéressants, qui n'avaient pas 
encore été décrits ; ce sont, de bas en haut : des bancs de luma- 
chelle dans des schistes noirs (Rhétien) ; puis des calcaires gré- 
seux ou oolithiques ferrugineux, et enfin des calcaires blancs, 
massifs, semblables au Malm, et qui avaient été confondus avec 
lui jusqu'ici. L’Infralias supporte deux puissants complexes qui 
ont été séparés pour la première fois par Marcel Bertrand : 
premier est un calcaire échinodermique, dont certaines couches 
contiennent des fossiles sinémuriens ; le second est un calcaire 
noirâtre, lité, qui représente probablement une partie du Lias 
et une partie du Dogger. Puis viennent des marnes schisteuses à 
Posidonia alpina, considérées en général comme calloviennes, 
mais qui doivent, d’après les fossiles qu'elles contiennent, corres- 
pondre à la fois au Bathonien et au Callovien. L’Oxfordien com- 
prend les calcaires grumeleux rouges et verts habituels dans cette 
zone sédimentaire, associés à des marnes rouges ; 1l supporte 
la masse homogène des calcaires gris du Malm. 

Le Crétacique prend aux Brasses le développement qui lui 
est habituel dans les plis externes des Préalpes médianes, mais 
le Néocomien y montre des variations d'épaisseur très importantes, 
qui peuvent aller jusqu’à la disparition complète. 

Le massif des Brasses est formé de quatre plis principaux, 
dirigés à peu près S.S.W.-N.N.E. 

Le 4° anticlinal (n° 4 du croquis) présente cette particularité 
que son axe est marqué par une longue zone de Crétacique supé- 
rieur, qui a été considérée jusqu'ici comme synclinale. En réalité 
ce crétacique n’est pas bordé, comme on l'avait cru, par du Malm, 
mais bien par du Trias et de l’Infralias en série normale. Il doit 
donc être considéré comme une lame de charriage, sous-jacente à 
la nappe des Brasses et relevée anticlinalement sous celle-cr. 

Le 2e pli (n° 2 du croquis) forme l’arête qui culmine à la Pointe 
des Brasses et se poursuit jusqu’au col de Chaîne d'Or. Presque 
vertical, il comprend : au cœur, du Trias, puis les calcaires 
blancs infraliasiques considérés jusqu'ici comme Malm, et le 
puissant complexe liasique. 

Le 3° pli (n° 3 du croquis) est à peu près semblable et parallèle 


SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 63 


1) 
au précédent, dont il est séparé par le vallon de Vernand ; il dis- 
paraît également après le col de Chaîne d'Or (n° 3° du croquis). 

Entre la racine du 5° pli et le précédent s’intercalent, au-dessus 
de Pouilly, un ou deux plis secondaires écrasés et fortement 


redressés (n° 4 du croquis). 


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4 


. anliclinaux. HEIN 


Raccord entre les Brasses et le Môle. 


La partie inférieure du croquis reproduit à peu près la 
figure que donne M. Marcel Bertrand dans son étude du 
Môle!; les numéros entre parenthèses sont les siens. 


Le 5° pli (n° 5 du croquis) se distingue des précédents par sa 
forme chevauchée ; ayant sa racine dans la région de Pouilly, 
il recouvre en effet le pli 3 jusque près de son axe, et son jambage 
renversé est supprimé, à la seule exception d'une écaille. Du côté 


! Bulletin de la Carte géologique de France, n° 32, décembre 1892. 


64 SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 


du N. ce pli s'amortit très brusquement vers l’ensellement trans- 
versal d'Onion, tandis que dans son prolongement, à la Pesse, 
renaît tout aussi brusquement un anticlinal chevauchant corres- 
pondant. | 

A l'E. du Risse, un dernier pli forme la montagne du Mont ; 
il s'enfonce, lui aussi, sous le bassin d'Onion, pour reparaître 
2 km. plus loin et élever sa voûte de Malm jusqu'au niveau 
de 1300 m. 

Les éléments tectoniques des Brasses peuvent être raccordés 
à ceux des régions voisines. Au N. les trois premiers plis dispa- 
raissent, tandis que le prolongement du 5° doit être cherché dans 
la chaîne de Miribel ; en effet on voit surgir au N. de la Pesse 
trois zones triasiques chevauchantes, qui ne peuvent correspondre 
qu'à ce 5° pli et aux plis écrasés sous jacents, sans qu’on puisse 
préciser davantage. 

Vers le S. les plis des Brasses trouvent leur équivalent dans 
ceux du Môle. Le pli 4 n’est peut-être pas représenté au Môle, 
Le pli 2 doit être la continuation du pli Bovère-Ville (2b) de 
Marcel Bertrand. Le pli 3 prolonge le pli Riondet-la Tour (3). Le 
5° pli des Brasses correspond, soit par sa forme, soit par sa posi- 
tion, avec le grand pli chevauchant du Môle, et par conséquent 
les plis écrasés de Pouilly doivent être considérés comme équiva- 
lents aux plis 48 et 4b (Champfleury-Pouilly) de Marcel Bertrand. 
Enfin le pli 62 de M. Bertrand est ininterrompu et peut être suivi 
jusque dans la gorge du Risse. 


M. Raoul Gaurier fait une communication sur les mesures 
qu'il a prises récemment pour wtiliser les anciennes séries 
d'observations de la température à Genève. 

Il rappelle le beau don fait à l’observatoire par M. William de 
Luc! des deux registres des observations poursuivies par Guil- 
laume-Antoine de Luc, de 1768 à 1800. Afin d'en tirer parti, il 
fallait pouvoir les raccorder à la série de l'observatoire et, pour 
cela, déterminer exactement où elles avaient été faites. Grâce à 
l’aimable collaboration de MM. Benjamin Soullier, propriétaire de 
l'immeuble n° 19 de la Cité, Isaac Soullier, imprimeur, qui y 
habite, Archinard, régisseurs, et en consultant les anciens actes 
relatifs à cette maison et à celles qui sont voisines, il a été possible 
d'identifier le local où G.-A. de Luc a observé. Comme le dit son 
fils Jean-André, dans ses registres d'observations faites ultérieure- 
ment, «le thermomètre était placé en dehors de la fenêtre d'un 
grenier, regardant sur les toits des Rues Basses de la ville, élevé 
d'environ 90 pieds au-dessus du niveau du lac. » 


l Archives 1911, t. 32 p. 439. 


SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 6 


Ce grenier est unique en son genre et a donc pu être identifié 
au 5e étage de la maison ; ilest muni de deux fenêtres, et c'est en 
dehors de l’une d'elles que M. Gautier à fait installer un thermo- 
mètre à mercure à grosse boule qui est observé tous les matins à 
8 heures de temps local (comme G.-A. de Luc en hiver), soit 
8 h. 35 m. de temps moyen de l'Europe centrale, par un des 
employés de M. LE. Soullier, M. Louis Galleano, mis obligeamment 
à la disposition de l'observatoire. Une observation concomitante 
est faite à l’observatoire par M. F. Münch, concierge, chargé de 
toutes les observations météorologiques. 

En outre, et pour assurer une comparaison plus complète entre 
le climat de ce haut galetas de la Cité et la station météorologique 
de l'observatoire, on a installé en avant de la même fenêtre, une 
cage en bois à jalousies, contenant un thermographe Richard, 
donné à l'observatoire par M. Lucien Gautier. De cette façon le 
raccord entre la série de 33 ans des observations de de Luc et la 
série plus moderne de l'observatoire sera assuré dans la mesure 
du possible. 

De 1801 à 1826, époque où commence la série homogène moderne 
utilisée par Emile Plantamour dans ses belles études sur le « Cli- 
mat à Genève »t1l y aurait une lacune. Ne peut-elle être aussi com- 
blée”? M. Gautier espère y arriver en utilisant les séries genevoises 
publiées par la Bibliothèque britannique et la Bibliothèque 
universelle, Sciences et Arts. 

De 1799 à 4821, les observations météorologiques se faisaient à 
« l'ancien jardin botanique » situé sur le Cavalier Micheli, qui est 
devenu plus tard une terrasse attenante, au sud-est, au Palais 
Eynard, Puis de 1822 à 1825, les observations ont été poursuivies 
au «nouveau jardin botanique», celui d’Augustin-Pyramus de 
Candolle, actuellement supprimé. 

Avec l’aimable autorisation de M. le Conseiller administratif 
Imer-Schneider, et grâce à l’obligeance de M. Nitzschner, jardi- 
mer-chef de la Ville, et de M. Taponnier, chef de service au 
laboratoire de sérothérapie au Palais Eynard, les installations 
nécessaires ont pu être faites. Il s'agissait de reproduire le mieux 
possible les conditions dans lesquelles les thermomètres étaient 
placés au commencement du XIXe siècle. 

De 1799 à 1821, d’après les indications de Frédéric-Guillaume 
Maurice? «le thermomètre à mercure, à boule isolée, était au 


1 Le climat de Genève, 1863 et Nouvelles études sur le climat de Genève, 
1876. 

? Bibliothèque britannique, Sciences et Arts, 1796, t. I, p. 113 et Biblio- 
thèque universelle, Sciences et Arts, 1822, t. XIX, p. 64. — De 1796 à 
1798, les mêmes instruments météorologiques étaient installés à Gen- 


thod, dans la propriété de F.-G. Maurice, 
5 


66 SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 


nord, adossé à un cabinet de charmille qui le mettait à l'ombre, 
indépendamment de la présence d’un poteau auquel il était appli- 
qué ». Le «cabinet de charmille» du Cavalier Micheli, qui était 
jardin botanique vers 1800, a naturellement disparu, et les arbres 
de la terrasse ont grandi. Pour obtenir une exposition analogue, 
les thermomètres ont été placés à l’ombre de cadres en bois à 
jalousies, à l’est, au sud et à l’ouest, mais sans toit. 

De 1822 à 1825, les instruments météorologiques étaient conte- 
nus dans une «cage à quatre pans, de deux pieds de côté!. Cha- 
cun de ces côtés était revêtu de lames de verre horizontales, 
inclinées en façon de jalousie... et rendues opaques par un 
enduit de peinture blanche à l'huile... sur les faces qui regardent 
l'est, le midi et l’ouest... » La cage actuelle est en bois, mais elle 
est aussi semblable que possible à l’ancienne. 

Quant à l'exposition, « la cage était voisine d’une allée d'arbres 
qui la maintenait à l'ombre dans la partie chaude de la journée » ; 
actuellement, elle est aussi située de façon qu'en été elle sera 
abritée par l'ombre de quelques arbres peu épais. L'emplace- 
ment ancien n’est pas connu exactement, mais son niveau était en 
tous cas le même que celui de l'emplacement temporaire actuel. 

Aux deux stations sont placés un thermomètre à mercure 
et un thermomètre à minimum. De plus, deux thermographes 
Richard sont installés à côté d'eux : au jardin botanique, dans 
la même cage ; au Cavalier Micheli, dans une cage spéciale placée 
à l’est des thermomètres ; ceux-ci sont observés régulièrement deux 
fois par jour, à 8 h. 35 m. du matin et à 2 h. 35 m. de l'après-midi, 
en temps moyen de l’Europe centrale. Autrefois les observations se 
faisaient au lever du soleil et à 2 h. après-midi, temps local. Il 
va de soi qu'une observation concomitante est aussi faite à 
l'observatoire à 2 h. 35 m. de l'après-midi par le concierge 
chargé des observations météorologiques. 

Les observateurs sont : au Cavalier Michel, M. A. Dettwiler, 
employé du laboratoire de sérothérapie, et au jardin botanique, 
M. Leyvraz, jardinier. 

Quant aux instruments : on ne possède plus aucun de ceux qui 
ont fonctionné autrefois. Du thermomètre de G.-A. de Luc, on sait 
qu'il avait été établi par son frère, le célèbre physicien Jean-André 
de Luc, et on peut croire qu'il était bon. 

De celui qui a servi aux observations dirigées par F.-G. Mau- 
rice, de 1796 à 1821, à Genthod et à Genève, on sait qu’en 1829 il 
marquait trop haut de 0,°5 Réaumur. Aussi fut-il remplacé 
pour la série suivante, de 1822 à 1825, par un thermomètre 
à alcool, servant aussi de thermomètre à minimum et construit 


! Bibliothèque universelle; 1822, t: XIX, p. 64. 


Led 


SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 67 


par Gourdon, «célèbre artiste genevois» de l’époque, et qui 
fut plusieurs fois vérifié dans la glace fondante. 

En 1826, la station météorologique de Genève a été transférée 
dans un emplacement voisin de l'observatoire de Jacques-André 
Mallet, voisin lui-même de l'observatoire actuel, Cet emplacement! 
était «le parapét d’une contregarde de l'enceinte de la ville, por- 
tant la pile centrale du pont de fil de fer construit en 1823 ». 
Plantamour a utilisé la série de 1826 à 1835 avec la suivante de 
l'observatoire actuel, où la station a été établie en 1836, parce que 
l'exposition était presque identique et l'altitude la même. Il a 
eu raison, 

Pour amener une comparaison, au point de vue de la plute, 
pour la série de 1822 à 1825, un pluviomètre a aussi été installé 
au jardin botanique, à proximité de la station thermométrique. 

Toutes ces observations comparatives seront poursuivies au 
moins pendant une année, 


M. L. DE LA Rive fait une communication sur la {rajectoire 
circulaire de l'électron autour de la molécule dans un champ 
magnétique uniforme. 

L'auteur montre analytiquement par une démonstration très 
simple que la trajectoire circulaire satisfait aux équations du 
mouvement. Il suffit de remplacer respectivement æ et y par 
r cos at et r sin af dans l'équation 

dx uæ  eHv dy 


de m ds 


et l'équation analogue en y ; il en résulte pour toutes les deux 


aie = È eHa 
Hot fu GE 

a+ —+,/H,6 
2m GRR 


En l'absence du champ magnétique, la valeur du carré de la 
vitesse angulaire est y/r°, elle est donc diminuée par l'action 
magnétique, ce qui s'explique comme suit : l’action magnétique 
s'ajoute à la force centrifuge et puisque la force attractive reste la 
même, 1l faut que la force centrifuge diminue, d’où résulte la 
diminution de la vitesse angulaire. 

Depuis sa communication l’auteur a constaté que ce résultat est 
connu et a été établi par Lorentz dans son explication de l'effet 
Zeemann. 


" Bibliothèque universelle, Sciences et Arts, 1826, t. XXXI, p. 90. 


68 SÉANCE DU 21 DÉCEMBRE 


Séance du 21 décembre 


Duparc. Sur quelques gisements anormaux de platine. — H. Gans. Les 
lycénidées dans les environs de Genève. Variations des couleurs des 
lépidoptères dans la plaine et à la montagne. — Tommasina. La nature 
de l'électricité et la dynamique de l’électron. — Chodat et Monnier. 
Recherches sur l’augmentation en poids des plantes. 


M. le Prof. L. Duparc fait une communication sur quelques 
gisements anormaux de platine de l'Oural, récemment étudiés 
par lui. 

En premier lieu, il parle de celui de la Petite Koswa qui 
s’amorce dans le massif du Koswinsky. L'auteur a vérifié que 
de sa source à son embouchure celle-ci coule dans des roches 
exemptes de platine. En réalité, le platine des alluvions du M.Koswa 
provient de la dunite, mais les recherches de l’auteur montrent 
qu'à une époque ancienne la topographie était différente, les sour- 
ces de M.Koswa étaient rejetées vers le Nord, et cette rivière 
s’amorçait dans le centre dunitique qui alimente la rivière Kitlim, 
laquelle coule sur le versant européen. Plus tard, la ligne de par- 
tage a été rejetée plus au Sud, dans une région où cette dunite 
fait défaut, et à partir de ce moment le platine n'est plus arrivé 
dans les alluvions de M.Koswa qui coule sur le versant européen. 
Par contre, la Kitlim platinifère s’amorce encore aujourd’hui dans 
le centre dunitique qui forme l’éperon du Koswinsky. 

Un second gisement anormal est celui des petites rivières de 
Molitchewka, Beresowka et Gloubokaïa, toutes trois affluents 
droits de la grande Koswa, où ces rivières sont entièrement encais- 
sées dans le devonien moyen et énormément distantes de tout centre 
platinifère primaire. Leurs alluvions platinifères ne renferment 
que des cailloux de dolomie et quelques galets de quartz provenant 
du D*. 

La première idée qui vient est que jadis la grande Koswa, dont 
les alluvions sont platinifères, coulait plus au Nord, à un niveau 
supérieur à celui d'aujourd'hui. Elle a formé ainsi un ancien lit 
qu’elle a abandonné plus tard pour couler dans le lit actuel. Puis 
les affluents latéraux se sont établis et ont reconcentré localement 
à leur profit le platine contenu dans cet ancien lit de la Koswa. 

La seule objection à cette manière de voir est que l’on ne trouve 
pas de galets de la Koswa dans les alluvions de ces petits cours 
d’eau. 

Une seconde explication serait celle-ci: M. Duparc a démontré 
qu'antérieurement au Devonien inférieur une partie de l’Oural 


SÉANCE DU 21 DÉCEMBRE 69 


était déjà émergée et dénudée, A ce moment déjà des massifs 
platinifères primaires étaient soulevés et dénudés, et leur platine 
allait dans les sédiments qui ont formé depuis lors les dépôts dévo- 
niens, carbonifères et artinskiens. Plus tard, ‘ces dépôts ont été 
émergés à leur tour par le plissement qui a créé la chaîne actuelle, 
et après dénudation du relief et formation des vallées quaternaires, 
ce platine, là où il existait, a été reconcentré dans l'axe des cours 
d'eau qui occupent ces vallées, 

On sait, en effet, que l’on vient de découvrir du platine dans des 
cours d’eau entièrement encaissés dans les conglomérats d'Artinsk 
(Outkinskaya- Datcha) et très loin de tout centre primaire, on con- 
naît aussi dans le Nord deux petites rivières encaissées dans le D 
qui sont aussi platinifères, Il se peut que le platine trouvé dans 
les petits affluents de la Koswa en question ait une origine sem- 
blable. De prochaines recherches décideront laquelle de ces deux 
alternatives est la bonne. 


M. H. Gaxs. Les lycénidées dans les environs de Genève. 
Variations des couleurs des lépidoptères dans la plaine et à la 
montagne. 

M. Gans rappelle une série d'observations qu'il a faites en 1868 
et 1869 sur les lycénidées, en étudiant leur nombre et leurs varié- 
tés en Suisse et particulièrement dans les environs de Genève. En 
outre, M. Gans avait fait plusieurs remarques sur les variations 
de couleurs que présentent dans la plaine et à la montagne plu- 
sieurs lépidoptères suisses. Ces travaux avaient été publiés dans 
le périodique, le Rameau de Sapin. 


M. Th. Tommasixa. La nature de l'électricité et la dynamique 
de l’électron. 

Les nombreux et importants travaux déjà parus sur la dyna- 
mique de l’électron sont encore loin d'avoir épuisé un tel sujet. I 
y a même un point qu'on dirait avoir été laissé intentionnellement 
de côté, peut-être dans la crainte d'affaiblir plutôt que de renforcer, 
en le touchant, la base de la théorie électronique; je vais l'indiquer 
franchement, ayant la conviction que la recherche des points fai- 
bles d’une théorie est un travail qui aide à mieux l'établir. 

L'hypothèse fondamentale de la théorie électronique est que 
l'électricité doit être considérée comme étant de nature corpuscu- 
laire et que les corpuscules qui la constituent sont des électrons. 
Cela étant admis, en chaque phénomène électrique on étudie un 
mouvement d'électrons et leurs chocs avec les molécules ou les 
atomes des corps, on s "occupe des agglomérations ou des sépa- 
rations, des vibrations, des émissions, des bombardements, des 
trajectoires et de leurs déformations. Or, tous les auteurs, en déeri- 


70 SÉANCE DU 21 DÉCEMBRE 


vant et en étudiant ainsi les phénomènes électriques, font inter- 
venir, et ils y sont forcés, non pas une simple dynamique, mais 
une électrodynamique, c’est-à-dire qu’il ne peuvent faire jouer aux 
électrons leur rôle explicatif de tous les phénomènes électriques 
qu'à la condition de supposer les électrons, eux-mêmes, dans un 
milieu où les champs et les forces électriques interviennent pour 
les déplacer. C’est là le point scabreux, le point faible de la théorie 
électronique, que l’on saute, car en s’y arrêtant, on serait forcé de 
reconnaître qu’on n'a point de théorie électronique de la force 
électrique et du champ électrique. Autrement dit: que champs et 
forces électriques restent en dehors de l’explication électronique 
de l'électricité et, ce qui est plus grave encore, que cette nouvelle 
théorie est forcée de les utiliser avec la même signification qu'ils 
avaient dans la théorie ancienne. 

Une fois mise en évidence cette faiblesse si frappante de la 
théorie électronique, la première idée qui se présente est un doute 
sur sa valeur réelle, et on se demande si l’on n’a pas exagéré 
l'étendue et la portée de la notion d’électron. 

Après une étude approfondie de cette question, voici la solution 
que je propose : 

Si, pour expliquer une certaine catégorie de phénomènes élec- 
triques nous avons été amenés à formuler et à admettre, jusqu’à 
preuve du contraire, l'hypothèse que les choses se passent comme 
si existaient et intervenaient directement dans ces phénomènes des 
charges électriques élémentaires, très petites, mobiles, sans sub- 
stratum pondérable appréciable, les électrons, cela ne nous auto- 
rise nullement à conclure qu'avec l'hypothèse corpusculaire nous 
établissons la nature de l'électricité. En effet, prenons comme 
exemple le phénomène des rayons cathodiques qui a été le point 
de départ de la nouvelle théorie, nous y voyons immédiatement 
que même en supposant qu’un faisceau de ces rayons ne soit 
constitué que par des électrons en mouvement de translation, avec 
une certaine vitesse qu'on peut mesurer pour les caractériser, nous 
ne pouvons nous 1illusionner d’avoir ainsi expliqué le phénomène 
électrique qui intervient pour les produire. On peut répéter la même 
observation pour chacun des autres phénomènes électriques. 

Pour expliquer le rayonnement cathodique, il ne suffit pas de 
considérer les projectiles, leurs dimensions, leur forme déformable 
ou non et leur vitesse, il faut tenir compte de la nature des forces 
qui agissent pour provoquer l'explosion et de la nature de cette 
dernière. Nous savons que dans l’ampoule de Crookes existe entre 
l’anode et la cathode, une différence de potentiel périodique, pro- 
duite par le travail de la bobine d’induction, dont le courant 
secondaire oscillatoire provoque l'expulsion positive anodique et 
l'expulsion négative cathodique. Mais nous savons aussi que dans 


SÉANCE DU 21 DÉCEMBRE 71 


l’ampoule, il y a encore des molécules de l'air ou de gaz raréfiés, 
lesquelles possèdent une vibration thermique propre et se meuvent 
dans un milieu rempli d'autres vibrations énormément plus rapi- 
des, celles de l'éther, dues à la lumière du laboratoire qui nous 
permet de voir dans l'intérieur de lampoule. 11 faut donc tenir 
compte de cette complexité expérimentale, d'autant plus que la 
nouvelle théorie, en reconnaissant la nature électromagnétique de 
la lumière, admet en outre que les particules qui vibrent pour la 
transmettre sont aussi des charges élémentaires, des électrons 
comme ceux qui constituent les rayons cathodiques. Or, si soit la 
lumière, soit les rayons cathodiques, sont constitués par les 
mêmes corpuscules, cela montre que ce qui les différencie est: que 
dans la lumière les électrons vibrent en se déplaçant seulement 
pour transmettre de proche en proche leur vibration avec la vitesse 
connue, tandis que dans les rayons cathodiques, les électrons se 
déplacent comme des projectiles, mais avec une vitesse toujours plus 
faible que celle de la lumière. On dit que tout déplacement élec- 
trique est accompagné d’une modification électromagnétique du 
milieu, il faut renverser et dire que tout déplacement électrique 
est toujours produit par une modification électromagnétique du 
milieu, car ce qu'on croît être l'effet est au contraire la cause, et 
vice-versa. La première affirmation n'est exacte que dans le cas du 
déplacement artificiel et purement mécanique d’une charge élec- 
trique. 

La définition de l’électron qui en fait une charge électrique élé- 
mentaire, signifie qu'un phénomène électrique déjà complexe 
existe dans l’électron même. La théorie électronique aide done 
l'explication des phénomènes électriques, mais n’explique nulle- 
ment leur nature qui dépasse la simple dynamique de l'électron, 
car l’électron ne fait qu'obéir à l’électrodynamique qui l'entoure 
et le transporte. L'hypothèse électronique n’amène point la con- 
clusion que l'électricité soit une substance corpusculaire constituée 
d'électrons, il n'y a pas de substance électricité, comme il n'y a 
pas de substance chaleur ou de substance lumière, ces noms n’in- 
diquent que des catégories spéciales de phénomènes, catégories 
qui se distinguent entre elles non seulement par la diverse consti- 
tution des mobiles, mais surtout par la diversité des mouvements 
et des activités qui en résultent. Il nous faut une électrodynamique 
pour expliquer le mouvement des électrons dans l’effluve et dans 
le courant, pour expliquer leur équilibre statique dans les charges 
électriques, pour expliquer enfin la nature électrique de l'électron. 

Aucun électron n’est en mouvement, s il n’y a pas une différence 
de potentiel entre les deux extrêmes opposés de sa trajectoire ; 
aucun électron n'est en mouvement s'il n'existe pas uné modifica- 
tion du champ extérieur, modification qui ne l'accompagne pas 


72 SÉANCE DU 21 DÉCEMBRE 


seulement dans son déplacement, mais qui le transporte. Ces deux 
conditions sont nécessaires dans tous les phénomènes. Aussi, Je le 
répète, l’électron est une partie inhérente, essentielle, mais une 
partie seulement, de chaque phénomène où il y a une manifestation 
électrique quelconque. L’électron n’est qu'un mopnile, une inertie 
électromagnétique pendant son déplacement et proportionnelle à 
sa vitesse, tandis que le moteur ou l’activité qui le déplace est une 
fonction de l'énergie électromagnétique du champ extérieur, 
donc du milieu. Ce milieu est le nouvel éther, conçu tout autre- 
ment que l’ancien et dont les modifications dynamiques internes, 
toujours actives parce qu'il les reçoit incessamment de tous les 
centres radiants de l'univers, constituent la source de l’électricité, 
l’origine unique de la catégorie de phénomènes qui porte ce nom. 

D'autre part la théorie nouvelle nous permet d’établir l’existence 
réelle de deux substances électroniques. L'une, exclusivement élec- 
tronique, invariable comme constitution, répandue en tout l’uni- 
vers sans discontinuité et égale partout; c’est le nouvel éther, le 
milieu actif, électromagnétique, qui sert d’intermédiaire entre les 
astres, de même qu'entre les atomes de tous les corps. L'autre 
substance est également électronique, mais reçoit toute sorte de 
modifications complexes de structure, donnant lieu à la formation 
des ions positifs et négatifs qui sont les atomes avec leurs affinités 
chimiques; de façon qu'on peut affirmer que la possibilité de 
variabilité de cette deuxième substance n’a point de limites ; c’est 
la matière pondérable dont tous les corps inorganiques et orga- 
niques sont constitués. Voilà ce que la nouvelle théorie nous donne 
comme grande synthèse physique. 


M. le Prof. R. Caopar expose l’ensemble des recherches qu'il a 
entreprises avec la collaboration de M. le prof. A. Monnier et de 
leurs élèves! (Stefanowska, Deléano, Rabinowictch). Dans ces 
recherches on est parti de cette notion qu'il faut examiner l’aug- 
mentation en poids des plantes comme on étudie une réaction 
chimique en présence d’un catalyseur. M. Chodat rappelle qu’en 
190%, il a déjà formulé cette théorie en se basant sur les travaux 
qui étaient en voie d'exécution dans son laboratoire et à l'Ecole 
d'horticulture. Cette théorie a été développée dans la thèse de 
M. Monnier, puis dans les « Principes de Botanique ». M. Jacques 
Loeb, en 1906, a développé une théorie analogue, puis en 1908, 
MM. Ostwald et T. B. Robertson ont confirmé cette manière de 
voir. Ce dernier en s'appuyant sur les chiffres fournis par nous, a 
calculé que la formule applicable à l’augmentation du poids des 
organismes et qui se laisse dériver de la formule bien connue des 
réactions autocatalytiques monomoléculaire est 

SUBALNROE 44 


ed 


log X 


SÉANCE DU 21 DÉCEMBRE 73 


où æ est le poids du corps au temps /, À le poids maximum, K 
une constante déterminée par les valeurs successives de æ, /, le 
temps auquel l'organisme a atteint la moitié de la valeur de son 
poids maximum. Les valeurs obtenues par nous correspondent si 
bien aux valeurs caleulées qu'il n'y a pas lieu de douter de la 
théorie qui considère l'augmentation en poids comme une autoca- 
talyse dont le plasma est le ferment et le milieu nutritif externe la 
masse invariable. MM. Chodat et Monnier ont montré que chaque 
élément qui entre dans la composition du végétal suit la même 
loi d'absorption qui s'exprime par une courbe logarithmique à 
coefficient propre pour chaque substance. Il ressortait aussi de 
leurs recherches que, à partir d’un certain moment la catalyse 
diminue de vitesse (facteur d’inhibition de Blackmann), En outre, 
ils ont observé le fait curieux d’une desassimilation très impor- 
tante qui suit la période d'aplatissement de la courbe de croissance 
et qui parfois atteint le 40 °/ des cendres. Ils ont vu dans cette 
migration négative vers le sol un phénomène de diffusion centri- 
fuge due à la vitalité diminuée des cellules, mais qu’on pourrait 
tout aussi bien considérer comme un phénomène d'équilibre en ce 
que les matières non utilisées par les plantes sont rendues de nou- 
veau solubles par son métabolisme. 

Cette manière de voir a été mise en doute, on a pensé que la 
désassimilation pouvait provenir du lavage des plantes par la pluie. 
MM. Chodat et Monnier ont cette année établi des cultures sous 
chassis de manière à éliminer le facteur de lixiviation. D'ailleurs 
l'été 1911 ayant été sans pluie, cette précaution aurait été inutile. 
Les chiffres se rapportent à des avoines sélectionnés et corres- 
pondent à 100 plantes choisies au hasard. 


Prises successives Poids humide Poids sec Cendres 
1 324 48 6,12 
2 606,5 130 14,78 
3 420 125 12,98 
4 pr. X X 
5 180 87 9,47 


IL y a donc eu dans ces conditions inéquivoques, migration 
négative comme dans les anciennes expériences (Chodat, Monnier, 
Deléano). Ces résultats sont confirmés indirectement par des 
recherches de Mazé, relative à l’exosmose radiculaire et dont la 
conclusion est la suivante : « La plante excrête les substances 
minérales qu'elle n'utilise pas ; si dans les aliments minéraux qu'on 
lui offre la base est assimilée, c'est l'acide qui fait retour à la 
solution nutritive » (et vice-versa n° 56). 


! Recherches sur la physiologie végétale. Ann. Inst. Past., XXVW, 
n° 10, 1911. 


74 SÉANCE DU 21 DÉCEMBRE 


Partant des recherches de R. Chodat sur l'activation excessive 
de la croissance des algues vertes par le chlorure ferrique, 
MM. Chodat et Monnier ont traité des avoines dans les mêmes 
conditions que celles dont il vient d’être question. La quantité de 
F, CI, était de 1°/,, par litre d’eau. On arrosait la base des plan- 
tes tous les huit jours avec cette solution ferrugineuse 


100 plantes Poids humide Poids sec Cendres 
1° a Ÿ 4 + 100 10,6 
20 1002 238 35,5 
3° 638 218 21,5 
4° 666 293 23,8 
5° 383 192 20,9 


la végétation se prolonge plus pour les plantes arrosées au fer que 
pour celles arrosées à l’eau. Mais on reconnaît aussi chez elles la 
désassimilation. L’accélération des plantes ferrugineuses atteint 
donc plus du 70 ‘/, en ce qui concerne le poids sec et près du 
100 °/, et même plus, si on considère les cendres. Ces résultats 
excessivement remarquables et inattendus engagent les auteurs à 
établir en 1912, des recherches comparatives sur la valeur des 
divers sels de fer et sur l’accélération qu’ils produisent. Ils ont 
aussi dosé le fer dans les plantes témoins et les plantes ferrugi- 
neuses. 


Prises : Témoins PI. ferrug. (F, Cl) 
* 0,039 0,239 
29 0,103 0,738 
90 0, 05 0,276 
49 0,024 0,228 
5° 0,056 0,386 


Le chlore est éliminé, selon la loi de Mazé : 


Prises Témoins PI, ferrugineuses 
1° 0,0024 0,178 
29 0,0078 0,048 
3 0,00375 0,0043 : 
49 0,00138 0,0055 
D” 0,00261 0,0056 


Ces recherches seront continuées. 


LISTE DES MEMBRES 


DE LA 


SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE 


au ler janvier 1912 


{. MEMBRES ORDINAIRES 


Casimir de Candolle, botan. 
Lucien de la Rive, phys. 
Arthur Achard, ing. 
Jean-Louis Prevost, méd. 
Edouard Sarasin, phys. 
Ernest Favre, géol. 

Emile Ador, chim. 

William Barbey, botan. 
Adolphe D'Espine, méd. 
Eugène Demole, chim. 
Théodore Turrettini, ingén. 
Pierre Dunant, méd. 


Auguste-H. Wartmann, méd. 


Gustave Cellérier, mathém. 
Raoul Gautier, astr. 
Maurice Bedot, zool. 

Amé Pictet, chim. 

Robert Chodat, botan. 
Alexandre Le Royer, phys. 
Louis Dupare, géol.-minér. 
F.-Louis Perrot, phys. 
Eugène Penard, zoo. 

Chs Eugène Guye, phys. 
Paul van Berchem, phys. 
André Delebecque, ingén. 


Théodore Flournoy, psychol. 


Albert Brun, minér. 

Emile Chaix, géogr. 
Charles Sarasin, paléont. 
Philippe-A. Guye, chim. 
Charles Cailler, mathém. 
Maurice Gautier, chim. 
John Briquet, botan. 

Paul Galopin, phys. 
Frédéric Reverdin, chim. 
Théodore Lullin, phys. 
Arnold Pictet, zoolog. 
Justin Pidoux, astr. 
Auguste Bonna, chim. 

E. Frey Gessner, entomol. 
Augustin de Candolle, botan. 
F.-Jules Micheli, phys. 
Alexis Bach, chim. 
Thomas Tommasina, phys. 


- B.-P.-G. Hochreutiner, botan. 


Frédéric Battelli, méd. 
René de Saussure, mathém. 
Émile Yung, zoolog. 

Ed. Claparède, psychol. 
Eug. Pittard, anthropol. 

L. Bard, méd. 

Ed. Long, méd. 


76 LISTE DES MEMBRES 


J. Carl, entomol. 

A. Jaquerod, phys. 

H. Cristiani, méd. 

P. de Wilde, chim. 
Ch. Du Bois, méd. 
M'e L. Stern, physiol. 
Aug. Eternod, méd. 
Léon-W. Collet, géol. 


Et. Joukowsky, géol. 
Henri d’Auriol, chim. 
Edmond Weber, zoolog. 
Roger de Lessert, zoolog. 
Humbert Cantoni, chim. 
Emile Briner, chim. 
Arthur Schidlof, phys. 
George Baume, chim. 


2. MEMBRES ÉMÉRITES 


Henri Dor, méd. Lyon. 
Raoul Pictet, phys., Berlin. 
J.-M. Crafts, chim., Boston. 
D. Sulzer, ophtal., Paris. 
F. Dussaud, phys., Paris. 


E. Burnat, botan., Vevey. 
Schepiloff, Mlle méd., Moscou. 
Etienne Ritter, géol., Col. Springs. 
Edouard Bugnion, entomol., Laus. 


3. MEMBRES HONORAIRES 


Ch. Brunner de Wattenwyl, 
Vienne. 

Ern. Chantre, Lyon. 

P. Blaserna, Rome. 

S.-H. Scudder, Boston. 

F.-A. Forel, Morges. 

S.-N. Lockyer, Londres. 

L. Cailletet, Paris. 

Alb. Heim, Zurich. 

Théoph. Studer, Berne. 

Eilh. Wiedemann, Erlangen. 

L. Radilkofer, Munich. 

H. Ebert, Munich. 

A. de Baeyer, Munich. 

Emile Fischer, Berlin. 

Emile Noelting, Mulhouse. 

A. Lieben, Vienne. 

M. Hanriot, Paris. 

Léon Maquenne, Paris. 

A. Hantzsch, Wurzbourg. 


Ch.-Ed. Guillaume, Sèvres. 

K. Birkeland, Christiania. 

J. Amsler-Laffon, Schaffhouse. 
Sir W. Ramsay, Londres. 
Aug. Righi, Bologne. 

H.-A. Lorentz, Leyde. 

H. Nagaoka, Tokio. 

J. Coaz. Berne. 

R. Blondlot, Nancy. 

C. Græbe, Francfort. 

Wilhelm Ostwald, Grosshbothen. 
Otto Lehmann, Carlsruhe. 
Fritz Sarasin, Bâle. 

Pierre Weiss, Zurich. 

Henri Blanc, Lausanne. 
Arnold Lang, Zurich. 

Alfred Werner, Zurich. 

Albin Haller, Paris. 

G. Cappellini, Bologne. 


James Odier. 
Ch. Mallet. 
Ag. Boissier. 


Luc. de Candolle, 


Ed. des Gouttes. 
Wil., Favre. 
Aug. Prevost. 
Alexis Lombard, 
Louis Pictet. 
Ed. Martin. 
Edm. Paccard. 
D. Paccard. 
Edm. Eynard. 
Edm. Flournoy. 


Georges Frütiger. 


LISTE DES MEMBRES 77 


. ASSOCIES LIBRES 


Aloïs Naville. 
Ed. Beraneck. 
Emile Veillon, 
Guill. Pictet. 

G. Darier. 

H. Fatio. 

E. Turrettini. 
J. Albaret. 
H.-E. Gans. 

E. Cardoso. 
Aug. Rilliet. 
Henri Lombard. 
Ed. Brot. 

Henri Flournoy. 
André Chaix. 


TABLE 


Séance du 5 janvier 1911 


Briner. Sur la formation de l’eau à partir de ses éléments ........... 6) 


Séance générale annuelle du 19 janvier 
F. Reverdin. Rapport annuel. — Ed. Sarasin et Th. Tommasina. Constata- 
tion de quelques faits nouveaux en radioactivité induite ........... 7 
Séance du 2 février 
L. Duparc. Les gîtes platinifères de l’Oural. — G. Baume. Sur quelques essais 
MOAIlOSPADEIQUES 2:52 Le seen soudés RE I 5 11 
Séance du 16 février 


L. de la Rive. Sur les équations fondamentales de l'électrodynamique. — 
A. Schidlof. Sur quelques problèmes récents de la théorie du rayonne- 
MOT Sen eme seven er hmr este meta nas sudiste Deere 17 


Séance du 2 mars 


Th. Tommasina. Sur le magnéton de Weiss ....................... : RD 


Séance du 16 mars 


Ed. Claparède. Introduction à l’étude du phénomène psycho-électrique. — 
W. Radecki. Le phénomène psycho-électrique au point de vue physique 
BTP DEMO arte hesehees manne dau Serre TEINTE 22 


Séance du Ô avril 


W. Radecki. Phénomènes psychoélectriques. — A. Schidlof. Sur quelques 
problèmes récents de la théorie du rayonnement. — Ed. Sarasin et Th. 
Tommasina. Etude de l’action de la chaleur sur l’air ionisé par la radio- 
ROIS RATE PEN RE as mme he PEU RUN IN RMS De BR r ce 25 


1 
© 


TABLE 


Séance du 20 avril 


F.-A. Forel. Observations météorologiques faites à Genève au XVIILe siècle 
par Charles de Lubière. — Raoul Gautier. À propos de la communication 
de M. Forel. — Le même. La climatologie du Grand Saint-Bernard, — 
Arnold Pictet. Un nouvel exemple de l’hérédité des caractères acquis. — 
J. Carl. Sur un diplopode hermaphrodite ..,,...., era RE 


Séance du 4 mai 


J. Briquet. Sur la structure et les affinités d’Illecebrum suffruticosum. — 
Perrot et Baume. Sur quelques constantes chimiques des gaz liquéfiés. 
— L. Duparc, Jeanneret et Wunder. Sur le dosage et la séparation du 


zirconium d'avec la silice, le fer et l’alumine..................... 39 


Séance du 1° juin 


Raoul Gautier. Les retours de froid en juin. — Th. Tommasina. Sur une 
modification donnant une plus grande liberté d’allure et plus de sûreté 
DOS AMrODIAnes...:.......... us tee CR és: 42 


Séance du 6 juillet 


Ed. Claparède. Procédé pour contrôler l’authenticité de l'hypnose, — Le 
même. Etat hypnoïde chez un singe. — Th. Tommasina. Appareil d’avia- 
OO rm tee 'adleshe des Nain eat de 0 à sois 2 45 


Séance du 5 octobre 


E. Yung. Structure de l’ovispermiducte et de la glande albuminipare chez 
l'Helix pomatia. — E. Cardoso. Sur les densités des phases coexistantes 
de l’anhydride sulfureux au voisinage du point critique. — R. Gautier. 
Journal météorologique fait à Genève par J.-A. de Luc au XVIII: siècle. 
— Le même. Quelques anomalies de la température et de la clarté de 
l'été 1911. — F. Reverdin et A. de Luc. Constitution de l’éther mono- 
méthylique de la dinitrohydroquinone et dérivés méthylés des p-anisidines 
CU RP CE EC 57 2 FO NSRARAERERERRERER re. 2 5 20 


Séance du 2 novembre 


Amé Pictet et Alphonse Gams. Synthèse de la berbérine ..,,....., TR | 


Séance du 16 novembre 


A. Sprecher. Recherches sur la variabilité des sexes ..,..,..,....... 99 


80 TABLE 


Séance du 7 décembre 


André Chaix. Géologie du massif des Brasses (Haute-Savoie). — Raoul 
Gautier. Installations pour utiliser les anciennes séries d'observations de 
la température à Genève. — De la Rive. Sur la trajectoire circulaire de 
l’électron autour de la molécule dans un champ magnétique uniforme 61 


Séance du 21 décembre 


L. Duparc. Sur quelques gisements anormaux de platine. — H. Gans. Les 
lycénidées dans les environs de Genève. Variations des couleurs des 
lépidoptères dans la plaine et à la montagne. — Tommasina. La nature 
de l'électricité et la dynamique de l’électron. — Chodat et Monnier, 
Recherches sur l’augmentation en poids des plantes.............. rs 00 


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