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COMPTE RENDU
DES TRAVAUX
SOCIÉTÉ ROYALE
D'AGRICULTURE,
HISTOIRE NATURELLE
ET
ARTS UTILES DE LYON,
Depuis le 147 Avril 1822, jusqu'au 1.% Mars
1823,
COMPTE RENDU
DES TRAVAUX
DE LA
SOCIÉTÉ ROYALE D'AGRICULTURE, HISTOIRE
NATURELLE ET ARTS UTILES DE LYON,
Depuis le 1.* Avril 1822, jusqu'au 1.*% Mars
1823.
Pan Mr L. F. GROGNIER,
PROFESSEUR À L'ÉCOLE D'ÉCONOMIE RURALE ET VÉTÉRI-
NAIRE DE LYON, MEMBRE DE L’ACADÉMIE ET DU CERCLE
LITTÉRAIRE DE LA MÈME VILLE, SECRÉTAIRE PERPÉTUEL
DE LA COLONIE LINÉENNE LYONNAISE, CORRESPONDANT
DE LA SOCIÉTÉ ROYALE ET CENTRALE D’AGRICULTURE ;
DES SOUTIENS DE L'ART VÉTÉRINAIRE DE COPENHAGUE ;,
DES ACADÉMIES DE TURIN, DIJON , STRASBOURG, etc,
ÆT DE PLUSIEURS SOCIETÉS D'AGRICULTURE TANT NA
TIONALES QU'ÉTRANGERES ;,
SECRÉTAIRE DE LA SOCIÉTÉ,
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DES TRAVAUX
DE 14 SOCIÉTÉ ROYALE D'AGRICULTURE ;
: HISTOIRE NATURELLE ET ARTS UTILES de
Lyon, depuis le 1.7 Avril 1822, jusqu'au
1. Mars 1823.
MEesstreurs,
L'art précieux à la faveur duquel nous obte- Considérations
nons de la terre, avec économie, des produits A
abondans , est subordonné à la nature du sol, Âtes dans ses
l'influence du climat , aux frais d'exploitation ; FPP°T ee
à la facilité des transports et des déboucliés. an
a voulu conclure de ces considérations incontes-
tables, que, purement empirique, l'art nourricier
des hommes était étranger à toute théorie, n'était
fondé sur aucun principe général. On n’a pas
songé qu’un raisonnement de ce genre s'appli-
querait avec plus de rigueur à la médecine-pra-
tique , art éminemment rationnel , dont l'exer-
cice est néanmoins soumis à une infinité de
6 Sociélé royale d'Agriculture
données, les unes änhérentes aux individus
souffrans , les autres leur étant extérieures.
La médeoine-pratique ét l’agriculture sont
liées par une étroite analogie; aussi ont-elles été
placées sur la même ligne dans le magnifique
tableau des progrès de l'esprit humain , que M.
Guvier a tracé d’une main si savante.
Elles sont moins, je avoue, des sciences po-
sitives que des applications judicieuses de plu-
sieurs connaissances physiques. L'une et l’autre
ont pour objet des êtres vivans: l’une s'occupe
de l'entretien , du perfectionnement , de la pro-
pagation des plantes , et même des animaux qui
nous sont utiles ; autre se propose un but plus
élevé , celui d'écarter les maladies qui nous me-
nacent, de nous secourir contre celles qui nous
ont atteints; et lorsque c'est à des animaux
malades qu’elle donne des soins, elle se trouve
presque toujours dans le domaine de l'agronomie.
L’agronomie, ainsi que la médecine, em-
pruntent des lumières à la chimie, à la physique,
à la physiologie. L'une lui dévoile la nature des
terres et des engrais, l’autre la dirige dans la
construction de ses machines et la conduite de
ses irrigalions. Les principes qu'elle puise dans
la physiologie sont plus nombreux et plus im-
portans.
La physiologie est la science de la vie.
de Lyon. ?
La vie est une force inconnue dans son essence,
car elle est cause première ; mais dont nous pou
vons observer les phénomènes , calculer les lois
et modifier l’action,
C'est elle qui organise la matière, lui imprime
d'admirables propriétés , la dérobe pendant un
certain espace de temps à l'empire absolu de
l'attraction et de l'affinité ; c’est elle qui main-
tient inaltérable le type des espèces dans la lon-
gue succession ces individus.
Cette force qui, dans l'homme, chef-d'œuvre
de la création, déploie toute la plénitude de sa
puissance, va diminuant d'activité jusqu'au polype,
animal ébauché , jusqu'à la moisissure, rudiment
végétal. Toujours son action est soumise à lin-
fluence des agens de toute espèce qui entourent
les êtres qu'elle conserve , et qui lui doivent
leur formation, Et s’il n'en était ainsi, si la
force vitale ressemblait à celle de l'aflinité , tous
les individus dans une espèce vivante seraient
géométriquement identiques comme les cristaux
du même sel , les échantillons du même métal ; et
comme ces corps inertes, ils ne pourraient cesser
d'exister que par l'effet d'un accident extérieur.
11 est à remarquer que les agens physiques
exercent sur les êtres vivans une action d'autant
plus forte que l’organisation de ces êtres est
moins parfaite, que la vie dont ils sont pénétrés
8 Societé royale d’Agricullure
est moins développée. Il suffit d'une légère in-
tempérie pour faire disparaître d'innombrables
colonies d'insectes et de plantes ; les quadru-
pèdes et les oiseaux, quoique doués d’une vita-
dité beaucoup plus grande ne résistent point à
tous les climats, ne peuvent pas s'approprier
ous les genres de nourriture; l’homme seut,
doué de la perfection vitale, habite dans toutes
les régions de l'univers, se nourrit de toutes les
espèces d'alimens, se plie à tous les régimes,
succombe plus difficilement à toutes les causes de
destruction. Seul doué d'intelligence, il étudie
les lois de la vie dans lui-même et dans les êtres
vivans qu'il a soumis à sa domination. La con-
naissance et l'application de ces lois sur son
espèce , sur celle des animaux domestiques , sur
celle des plantes cultivées ; voilà la médecine, la
vétérinaire et l'agronomie. Ces trois branches des
connaissances humaines et leurs ramifications
nombreuses partent d’un tronc unique, la phy-
siologie générale.
Les principes de cette science fondamentale,
dans leurs rapports avec la végétation, sont plus
simples , d'une application plus facile que lors- |
qu'ils sont adaptés à l’économie animale. Aussi
pourrons-nous, en disposant convenablement des
agens que nous rendons physiologiques , pesex
plus fortement sur la vitalité des plantes que sur
de Lyon. 9
celle des animaux. Aussi pour satisfaire à nos |
besoins , augmenter nos jouissances, ou simple-
ment pour satisfaire à nos caprices , opérons-
nous plus de métamorphoses sur les herbes de
nos jardins , les arbustes de nos vergers , que sur
les quadrupèdes de nos étables et les oiseaux de
nos basse-cours. Voyez la rose et l'œillet prendre
sous la main de la culture toutes les formes , ré-
fléchir toutes les nuances, exhaler tous les par-
fums ; voyez ces arbres à fruit , le prunier, le
pêcher : leurs drupes , dans l'état sauvage, sont
uniformes, petites et d'un goût désagréable ; elles
prennent dans nos vergers un volume singulier,
des formes et des couleurs variées , une saveur
exquise. Pouvez-vous comparer la vigne sauvage
à cet arbuste domestique de la plus haute anti-
quité qui, sous la direction de l’homme, tantôt
semble ramper sur la terre, tantôt s'élève à la
hauteur du chêne, tantôt se soutient d'elle-
même, tantôt s'appuie sur un tuteur ; que l'on
voit ici étendre le long d’un mur des bras im-
menses ; là se contourner en guirlandes et en
festons , dont le bois, les feuilles et les fruits
changent de forme, de couleur et de volume, au
point de faire le désespoir éternel des nomencla-
teurs ? Et le produit de cet arbuste, le plus précieux
de tous, voyez comme il diffère dans le mème ter-
roir, selon les modes de culture et les procédés de
30 Sociélé royale d'Agriculture
vinification. Is sont bien remarquables, sans
doute , les caractères qui distinguent le porc et
Je sanglier, le moufflon et le belier, le cheval
sauvage et le cheval domestique; mais entre les
végétaux que nous cultivons et ceux de la même
espèce qui sont abandonnés à la nature, la difié-
rence est souvent immense.
C'est principalement dans la propagation de
ces êtres organisés que se manifeste notre puis-
sance physiologique. ‘Tandis que par des appa-
reillemens et des croïsemens les mieux combinés,
nous ne pouvons imprimer aux races des ani-
maux que des modifications légères de volume
et de forme, nous opérons d'étonnantes méta-
morphoses au moyen des boutures, des grefles
et des marcottes. Non contens de créer plusieurs
individus par la division d'un seul, nous unis-
sons dans une seule existence deux êtres qui
jusqu'à ce moment vivaient éloignés; nous exi-
geons qu'un arbre, sans cesser d’être prunier ou
amandier dans ses racines et dans une partie de
sa tige, devienne ou un pêcher ou un abricotier
dans ses feuilles, ses fleurs, sur-tout ses fruits.
C'est ainsi que :
À ses branches succède un rameau plus heureux ;
Bientôt ce trone s’élève en arbre vigoureux ,
Et se couvrant des fruits d’une race étrangère »
Admire ces enfaus dent il eroit être pére,
de Lyon. RE
Sans doute ils ignorent jusqu’au nom de la
physiologie végétale les jardiniers qui , néan-
* moins opèrent ces greffes avec succès. C'est à
leur insu qu'ils appliquent les principes de cette
science : semblables en cela à d’autres empiriques
qui , étrangers , à toute théorie de physiologie,
pratiquent quelquefois avec bonheur la méde-
cine des animaux, je n'ose dire celle de l’homme.
Résultat lumineux du raisonnement et de l'ex-
périence , les vérités physiologiques circulent
parmi les hommes, elles arrivent jusqu'aux
paysans qui remuent la terre, jusqu'aux arti-
sans qui ferrent et traitent les chevaux ; jusqu’à
des empiriques souvent plus grossiers qui osent
exercer la plas noble comme la plus savante de
toutes les professions. C’est ainsi que le flambeau
de la mécanique, celui de la chimie pénètrent
dans les ateliers des arts pour diriger des ouvriers
qui, sans le savoir , appliquent des théories
transcendantes.
Mais les auteurs de ces théories ne furent pas
de simples manœuvres; ce ne fut point par
d'aveugles tâtonnemens qu'ils arrivèrent à de
brillantes découvertes ; ils observèrent avec sa-
gacité , avec persévérance , et raisonnèrent avec
justesse, avec profondeur.
Les uns ont appliqué les lois de l'équilibre ,
celles du mouvement, celles de l’aflinité aux
12 Société royale d’ Agriculture
corps privés de vie; les autres ont pénétré dans
l'intérieur des corps organisés, ils en ont étudié
l'admirable économie ; ils ont cherché les mo-
yens de la maintenir ou de la réparer.
Parmi les physiologistes qui dirigèrent sur la
végétation leurs recherches savantes , furent
Duhamel et Varenne de Fénile, qui nous ap-
prirent à gouverner les forêts ; Miller et Roger-
Schabol qui nous enseignèrent l'art des vergers;
Rozier et Dussieux qui fondèrent sur des prin-
cipes la culture de la vigne; Full, Châteauvieux,
Parmentier et Arthur Young qui répandirent
des flots de lumière sur presque toutes les parties
de l’économie rurale. Tous ces hommes supé-
rieurs ne furent des agronomes du premier ordre
que parce qu'ils furent des physiologistes habiles.
Que la science de la vie végétale se perfectionne
et se généralise, et bientôt, comme on connaîtra
mieux les secrets de la germination, on dirigera
plus sûrement tous les semis. Les lois de la nu-
trilion des plantes étant mieux connues, on dis-
posera d'une manière plus convenable les irriga-
üons, les amendemens, les engrais ; du mo-
ment que l'on aura approfondi les modes divers
de la propagation des végétaux , on les sèmera
d’une main plus sûre et plus économe, on mul-
tipliera les moyens de les perpétuer , de les per-
iectionner sans le secours des semences.
de Iyon. St
Cé n'est pas tout : les végétaux comme les
animaux sont sujets à des accidens qui troublent
leurs fonctions, altèrent leurs tissus et leurs
humeurs, abrégent leur existence et détériorent
leurs produits , souvent encore les rendent vé.
néneux. C'est dans la physiologie végétale qu'il
faut chercher les moyens de prévenir ces acci-
dens ou d'en arrêter les ravages. La pathologie,
la thérapeutique végétale qui, depuis quelques
années ,isont dans toute l'Europe l'objet des re-
cherches d'un grand nombre de savans , sont-
elles autre chose que la science de la vie appli-
quée aux végétaux ?
A Dieu ne plaise, et c'est par cette considé-
sation que je mettrai fin à ce discours ; à Dieu
ne plaise que je refuse le titre d’agronomes ha-
biles à tous ceux qui, jusqu'à ce moment , n’ont
eu ni le loisir ni la pensée de considérer les phé-
nomènes de la vie dans les plantes qu'ils culti-
vent, dans les animaux qu'ils élèvent. Je sais
tout ce que peut un bon esprit à laide de la tra-
dition, de l'expérience , et par-dessus tout des
théories qu’on n’a point étudiées , qu'on n'ap-
précie nullement, et dont on applique les con-
séquences sans remonter à leurs principes.
Mais ce dont je suis certain, c'est que pour
fonder ces théories , pour les étendre et les per-
fectionner , il faut approfondir des questions qui,
14 Société royale d'Agriculture
au premier aspect, semblent être purement spé-
culatives et sans application directe aux arts
qu'elles intéressent le plus vivement.
Ce n'est pas à vous, Messieurs, qu'il faut
prouver cette vérité incontestable. Vous savez
trop bien que tous les arts, et notamment celui
qui nourrit l’homme, sont éclairés. par des théo-
ries , et souvent à l'insu de ceux qui s’ÿ livrent;
ces théories, Messieurs , et plus particulière
ment celles qui ont pour objet la vitglité dans
les plantes et les animaux utiles; vous savez les
appliquer aux diverses cultures qui sont l'objet
de vos travaux ; et si j'expose convenablement
vos opérations et vos succès, la présente notice
constatera de nouveau cette vérilé.
/
is
de Lyon. 15
STATISTIQUE.
Poursuivant avec un zèle au-dessus de tout Notice u
éloge, ses longues recherches de statistique, M. RANGER 4
Cochard s'est occupé cette année de Longes et Cochard.
Tréves ; il a décrit cette commune sous les
rapports de la topographie , de l'histoire natu-
relle, des antiquités, de Pagriculture , de l'in-
dustrie. La communication de son travail n’a pas
été reçue avec moins d'intérêt et de reconnais
sance que ceux du même auteur , qui, dans les
années précédentes , ont eu pour objet Ste Co-
lombe, Condrieu , Ampuis, St Cyr, Loire,
St Romain-en-Galles.
Longes et Tréves , vous at-il dit , sont deux
paroisses réunies en une seule commune, qui fait
partie du canton de Ste Colombe-les-Vienne; elle
est située au pied de la chaîne du Pila, à 400 met.
au-dessus du Rhône, entre le département de
la Loire et les communes des Hayes et de St
Romain-en-Gier ; sa longueur est de 8400 mèt.,
sa largeur de 5000.
Quatre collines sont renfermées dans cet es-
pace, l'une d'elles le Mont Monay domine un
vaste et magnifique horizon , où se dessinent en
grande partie les départemens de l'Isère, de la
Drôme, de l'Ardèche, le Pont du St Esprit. On
16 Société royale d’Agricullure
découvre sur son sommet des vestiges d'anciens
travaux militaires ; est-ce les ruines d'un camp
où les Gaulois s'étaient retranchés contre les
Romains? est-ce celles d’un lieu fortifié où les
Druides célébraient les mystères les plus secrets
de leur religion ?
La deuxième colline a Chassenoud , est
un pic escarpé.
La troisième, qui porte le nom de Zonges,
est terminée par un rocher nommé S/ Martin ,
parce que les pâtres s’y rassemblent pour se di-
vertir le 11 novembre, fête de ce saint.
La quatrième, appelée La Tourrette , renferme
une mine de plomb.
Autour de Longes sont un grand nombre de
hameaux dont les noms rappellent ceux des pre-
mières familles qui les ont possédés. Ici M.
Cochard se livre à des discussions d’étymologie
dont nous passons à regret sous silence les
détails.
Tréves a pareillement plusieurs hameaux,
séparés les uns des autres par des vallons étroits ,
des ravins profonds , des côteaux presque arides.
Vainement on chercherait sur ce territoire iné-
gal des sites pittoresques et rians. On n’y voit
pas davantage des prairies verdoyantes , des bois
touffus ; de riches guérets ; presque partout l'œil
est attristé à l'aspect de rocs décharnés, de plages
de Lyon. 17
incultes , de genêts et de bruyères s'étendant au
loin avec la plus triste uniformité. Ce n'est qu’à
l'aide d’un travail opiniâtre qu’on peut arracher
d'un pareil sol quelques récoltes médiocres. Aussi
sur une étendue de plus de 3197 arpens, toute
Ja masse des propriétés n'ast-elle été évaluée par
le cadastre en 1809 qu’à 76213f. de revenu, qu’on
a grevée d'une imposition foncière de 15468f.
Quand on considère que les mauvais fonds sont
ceux dont la culture exige le plus d’avances , et
dont les produits sont les plus chanceux , on est
convaincu que cette imposition est exhorbitante.
Parmi les ruisseaux qui coulent sur cette terre
ingrate , il en est un nommé Malleval, de mau-
vaise vallée.
_ La population de cette commune paraît dé-
croître. Il résulte en effet des recherches de notre
savant confrère qu'elle était en 1658 de 1589
individus , tandis qu'elle n'est, au moment
actuel , que de 130r.
Passant aux usages, aux mœurs, aux habi-
tudes qui distinguent celte population , il en fait
ressortir la louable simplicité; mais ne serait-elle
pas bientôt altérée si, comme il le désire, une
grande route s'étendant de St Chamond à Vienne,
traversait le territoire de Longes ?
Jadis ce territoire était couvert de bois; M,
4
#
18 Société royale d'Agriculture
Cochard est porté à croire qu'il fut inconsidé-
rément défriché par des moines de l'Ordre de St
Benoît. Remontant à l'an r200, notre confrère
recherche quels ont été les seigneurs de Longes ,
et il prouve par des actes nombreux que le cha-
pitre de Lyon s'en arrogea long-temps la suze-
raineté : ces actes portent l'empreinte du temps
où ils ont été consentis, et plusieurs sont fort
curieux.
Quoique très-pauvre, ce territoire fut visité
par les protestans et les ligueurs. Un autre fléau,
la peste le désola en 1586 et en 1628. A cette der-
nière époque une grande partie de la population
fut emportée. On voit encore dans l’église de
Tréves une statue de St Roch que les habitans
y élevèrent , pour obtenir par l'intercession de
ce saint, la cessation du fléau.
En 1673 ils furent les victimes d’une autre
calamité, les limaçons se multiplièrent au point
de dévorer toutes les récoltes. On exorcisa les
pernicieux insectes; et c’est à cette cérémonie
qu'on attribua leur disparition.
L'église de Longes, dont l'architecture annonce
un ouvrage du 15° siècle, a pour clocher une
forte tour carrée qui, dans des temps barbares,
a dû servir de forteresse.
Non loin de cette église est une maison go-
thique , où des Sœurs de St Charles apprennent
de Lyon. 19
à lire à de petites filles : c'était un vieux château
que les chartreux de St° Croix achetèrent en
1656 , de Jean de Gagnières, baron de Sou-
vigny, maître d'hôtel du duc de Savoie , et gou-
verneur de la citadelle de Turin. Cet officier
général était-né dans la classe vulgaire ; il eut
deux frères qui, comme lui s'élevèrent par leur
mérite personnel ; il épousa une Duchoul, et
ce mariage le fixa dans le Lyonnais où sa fa-
mille existe encore; elle possédait à Grézieux
de belles terres qui, en 1656, furent érigées en
comtés, sous le nom de Souvigny, On rapporte
que devenus grands seigneurs , messieurs de
Souvigny ne méconnurent point leurs parens,
ils les réunissaient dans leurs châteaux avec
toute la noblesse du pays.
Dans le bourg de Longes était le fief de La-
combe qui , pendant plusieurs siècles fut possé-
dé par la famille des Baudran, ensuite par les
chartreux de St° Croix, enfin par M. le docteur
Vitet. |
Un autre fief de Longes , celui de Jurary,
appartenait dès le 15° siècle à cette famille Du-
choul , d'où sont sortis plusieurs hommes re-
marquables. Guillaume Duchoul qui,en 1556,
publia une dissertation savante sur la religion ,
la castramentation , la discipline militaire des
Romains; et Jean Duchoul son fils qui , en 1585,
20 Sociélé royale d'Agriculture
mit au jour une histoire du chêne , ainsi qu'une
description du mont Pila.
Le fief de la Jurary fut vendu en 1747 à
Christophe Vitet, chirurgien à Condrieu, qui
le transmit à son petit-fils Louis Vitet.
Celui-ci fut, comme on sait , maire de Lyon et
député à la convention nationale ; il s’était fait
connaître avant la révolution par plusieurs ou-
vrages de médecine très-estimés , et il tenait le
premier rang parmi les praticiens de notre ville :
pourquoi faut-il que les circonstances politiques
l'aient arraché à ses paisibles et honorables occu-
pations ? Ballotté par les orages révolutionnaires,
ses regards ont dû se porter souvent vers la
tranquille retraite sur la porte de laquelle il
avait, en des temps plus heureux, gravé ces mots:
Gaudium et sanitas.
M. Cochard nous a donné sur la vie publique
de M. Vitet, sur les traverses qu’il essuya,
plusieurs détails intéressans , dont quelques-uns
n'étaient pas connus, mais qui s'éloignent de
d'objet de cette notice. Il fait observer que c'est à
Jurery , chez M. Vitet, que trouvèrent un asile,
en 1793, MM. Suchet, dont d'un est devenu
«maréchal de France et duc d’Albuféra.
Indépendamment de Jurary, de Lacombe,
de Souvigny , d'autres fiefs existaient à Longes
ét Tréves , témoin La Bernardière dont était
de Lyon. 21
seigneur haut et puissant homme Charles de
Chamberon , qui recevait les hommages de ses
vassaux sous un orme séculaire qui vit encore.
Ainsi un village qui, dans le moment actuel,
ne compte pas même un seul bourgeois parmi
ses habitans, était dans le 16° siècle la résidence
de plusieurs châtelains.
Ce village possède une mine de plomb argen-
tifère, qui fut, dans le siècle dernier, exploitée
par de faux monnoyeurs : elle est l’objet d'une
demande en concession sur laquelle l'autorité n’a
point encore prononcé; mais cette entreprise
rencontrera de grands obstacles dans la difhculté
des chemins et l'insuffisance de l’eau pour laver
le minerai, etc.
Comme M. Cochard l'a fait ere au com-
mencement de sa notice , le sol de Longes et
Tréves est très-ingrat. La température y est su-
jette à de grandes vicissitudes. Les gelées prin-
tanières y sont, au rapport des vieillards , im-
minentes jusqu'à la disparition complète des
neiges du Pila, et on les aperçoit jusques au
mois de mai. En juillet s'élèvent fréquemment
des brouillards quicausent la rouille des biés.
Les orages sont devenus plus violens, et les
torrens plus dévastateurs depuis le déboisement
des sommités du Pila: On manque de bras et de
fumier pour mettre toutes les terres en valeur ;
22 Sociélé royale d’Agricullure
aussi n'y connaît-on pas la rotation des récoltes,
et les jachères y sont-elles en grand nombre ;
c'est au point que les deux cinquièmes de la su-
perficie territoriale sont en friche.
Les récoltes les plus ordinaires sont le froment,
le méteil, le seigle, l'orge, l’avoine , les pommes
de terre et quelques légumes. A Tréves seule-
ment on recueille du chanvre , mais en petite
quantité ; le colza et le sarrasin sont peu usités ,
parce qu’ils réussissent rarement.
Année commune, le froment donne à Longes
quatre pour un, à Tréves cinq ; dans les deux
endroits, l'orge de six à sept. Ces grains sont en
général bien nourris, de bonne qualité, aussi
se vendent-ils toujours un franc par hectolitre de
plus que ceux de la plaine. Les pommes de terre
réussissent très-bien et sont d'un goût excellent.
Les prés y sont assez étendus, et on ne né-
glige pas les moyens d'irrigation dont on peut
disposer ; mais ils sont en beaucoup d'endroits
abondans en joncs et autres mauvaises plantes ,
ce qu'on attribue à la présence de l'ocre dans les
eaux d'arrosement ; ces prés donnent à Longes
cinquante kilogrammes par hectare , et un peu
moins à Tréves.
Les vignes sont toutes en plants bas et à cor-
nes ; les gamés noir et blanc, le mornin rouge
et la persagne sont les espèces qui dominent. On
de Lyon. 23
replante tous les 4o à 50 ans, et alors on attend
la septième année pour obtenir une récolte. On
cultive comme dans le reste du canton ; on fait
du vin très-ordinaire, qui néanmoins se conserve
assez bien, et dont une partie est exportée à
Rive-de-Gier. On évalue à un hectolitre le pro-
duit de cinq ares. |
Les bois sont essence chênes , charmes, peu-
pliers , vernes , châtaigniers ; on les aménage à
neuf à dix ans. Les arbres fruitiers sont rares
et peu productifs à cause des vicissitudes de l'air.
L'hiver de 1789 fit périr un grand nombre
de châtaigniers qu'on n'a pas remplacés.
On emploie pour l'exploitation des terres et
pour les charrois, à Longes, 40 paires de
bœufs, 100 vaches , 5 à 6 chevaux, 3 à 4 mu-
lets ou ânes; à Tréves , 10 paires de bœufs, 60
vaches, 4 à 5 chevaux ; on entretient encore dans
la première de ces paroisses près de 300 chêvres
et de 15 à 1600 bêtes à laine; et dans la 2°, de
50 à 60 chèvres, et de 450 à 500 moutons. Ces
animaux sont en général de race très-commune,
et leur éducation est très-négligée.
Ce bétail était de beaucoup moins nombreux
avant la division des propriétés. À Tréves et
Longes , comme ailleurs , cette circonstance a
eu une heureuse influence sur l’agriculture. Ce-
pendant de combien d'améliorations n'est - elle
Rapport sur
la statistique
des récoltes du
département
en 1822, et sur
le bétail exis-
tant à cette é-
poque, par le
méme.
24 Société royale d'Agriculture
pas là, comme ailleurs, susceptible ? Ne pour-
rait-on pas, par exemple, soumettre à la culture
un terrain communal de 200 hectares , aban-
donné jusqu'ici au pâturage des moutons? Ne
devrait-on pas renoncer à l’écobuage pratiqué à
Longes sur des sols que recouvre la couche d'hu-
mus la plus mince, tandis que cette opération
ne convient qu'aux terrains marécageux ? Ne
serait-il pas possible de cultiver la pesette, la
gesse , le pois-lupin dans les champs qu'on laisse
en jachères après la récolte du froment, et en-
terrer ces légumineuses pour servir d'engrais ?
Tels sont les principaux conseils que M. Cochard
donne aux habitans de la commune dont il a
tracé la statistique avec sagesse.
Cette année, comme dans les précédentes , M.
Cochard a été l'organe de la Commission que
vous avez chargée de recueillir des renseigne-
mens précis sur les récoltes du département; (1)
ces renseignemens vous sont, toutes les années,
demandés par l'Administration, elle les réclame
de vous afin de mettre le Gouvernement à même
de donner au commerce des grains une impul-
sion conforme aux ressources et aux besoins de
chaque localité , de préserver l'agriculture du
(1) Les autres membres de la commission étaient MM.
Muthuon, Billon, Remond, Mognat de Liergues, Bou-
chard-Jambon , Vatel , Grognier.
de Lyon. 25
préjudice que lui causerait la stagnation de ses
produits ; enfin de provoquer et de faciliter soit
les exportations, soit les arrivages extérieurs,
soit les mouvemens de la circulation intérieure.
Voici les questions adressées par l'autorité,
et les réponses que vous avez faites.
Première quesrion. Combien de fois chaque
hectare a-t-il rendu en 1822, la semence pour
chaque espèce de grains?
Réponse. Terme moyen , à peu près quatre
pour un.
2€ Q. Quel a été en hectolitres le produit
d’un hectare pour chaque espèce de grains ?
R. Douze hectolitres.
3.2 (Q. Quel a été en hectolitres le produit
total de chaque espèce de grains , d'après le nom-
bre d'hectares ensemencés ?
À. En froment . . 230,000 hectares.
En méteil .-. . 55,000
En seigle . . , 180,000
En orge. . . . 15,000
En sarrasin . . 40,000
En maïs et millet. 3,000
En avoine. . . 150,000
En légumes secs. 9,000
En autres menus
grains . . . 9,500
4 Q. À combien d’hectolitres évaluez-vous
26 Socièté royale d’Agricullure
la récolte en châtaignes et farineux de toute na-
ture, autres que les graines et les pommes de
terre ?
À. À environ 3000 hectolitres.
Nota. Les marrons de Loire et ceux de St
Romain , connus sous le nom de marrons de
Lyon, ont cette année beaucoup de saveur ; mais
on craint généralement qu'ils ne puissent être
gardés. Pour ce qui concerne les autres fruits,
on en a beaucoup cueilli ; cette recolte a donné
néanmoins peu de bénéfice , attendu que les fruits
à noyaux n'ont pu acquérir tout leur dévelop-
pement, et que presque tous ceux à pepin se
gâtent en peu de temps. À l'égard des pommes
de terre , on peut dire que leur récolte printa-
nière a peu donné; maïs la seconde a été assez
abondante , et on peut l’évaluer à près de 200,000
hectolitres.
5. Q. Quel est le poids commun d’un hecto-
litre de froment et de seigle provenant de la ré-
colte de 1822, en distinguant , pour chaque es-
pèce , la première qualité de la deuxième ?
R. Le poids d'un hectolitre de froment , pre-
mière qualité, a été, cette année, de 80 kilo-
grammes, celui de la deuxième de 75 ; le seigle
première qualité a pesé 70 kilo., celui de la
deuxième 65. |
Noia. Le blé de la montagne, qui a été récolté
de Lyon. 27
sur des terrains profonds, a été beau, net , et
il a donné beaucoup de farine ; celui des terrains
légers a été fort maigre.
6. Q. À combien d'hectolitres évaluez-vous
la quantité de grains de chaque espèce restant à
l'ouverture de la récolte , et provenant du sol du
département ou d'achats faits ailleurs ?
BR. À plus de 4000,000 hectolitres , Lyon
étant le point central où affluent les grains des
départemens de la Haute-Saône, de la Côte-
d'Or , de Saône-et-Loire , de l'Ain, etc.
7 Q. Quel est le nombre approximatif des
animaux domestiques , tels que chevaux, ânes,
mules et mulets, bêtes à laine ou à cornes,
pores etc. ?
Æ. Les chevaux employés dans le département
peuvent être divisés ainsi :
1.9 Petits chevaux, propres aux charrois,
qu'on tire de la Bresse , du Bugey, de la Franche-
Comté et de la Suisse. . . . . . . 1500
2.9 Gros chevaux dont se servent les
meüniers. , « . ROSE RE RENE 400
3.0 Chevaux pes au halage . . 600
Nota. Ces deux dernières espèces vien-
nent du Brabant , de la Flandre , de la
Belgique, de la Suisse, du pays de Caux,
de la Picardie, de la Brie , de la Beauce.
2500
28 Société royale d'Agriculture
D'autre part. + 2". 2500
4. Chevaux dont l’agriculture fait
usage ; ils sortent du Forez, de la Bresse,
du Bugey ; les plus forts viennent de la
Franche-Comté et-de la Suisse . . . 3000
5.0 Chevaux de carioles et de fiâcre ;
ils proviennent des réformes, ou ils
sont de rebué . .". 7. : ste ADO
6.2 Chevaux de poste et nr de
messageries ; on les tire de la Franche-
Comté :.. "CONCERTS
7° Chevaux de voitures bourgeoises ;
la plupart sont importés de la Franche-
Comté et de la Suisse; les plus beaux
viennent de la Normandieet dela Flandre. 400
8.° Chevaux de selle; on les tire du
Morvan, de l’Auvergne , de la Norman-
die , quelques-uns de la Navarre et du
Étinousin :. © d'A 4 Ce PE 70
oran: 4) 34 4° Tps
On élève si peu de chevaux dans le départe-
ment, qu'à peine y naît-il 200 poulains par an-
née. Cela tient à la pénurie des fourrages. Mais
c'est à Lyon que les départemens voisins vien-
nent se pourvoir de chevaux ; il s'en vend au
marché de Charabarat de 12 à 1500 par année;
de leur côté les marchands de la Guillotière en
vendent au moins 2500,
de Lyon. 29
On peut porter le nombre des mules
212 5 AU TES S VO APE LE SR LE ER 600
Celui des ânes, lesquels sont presque
tous élevés dans le département, à . . 1200
Celui des chêvres à . . . . . . 15000
Le Mont d'or seul en compte plus
de 11000. *
On porte le nombre des moutons et
152 0) AS er Re DURCe | Eu SE EEE ASS
Sur lesquels un dixième environ est
mérinos ou métis. Le département pour-
rait nourrir beaucoup plus de bêtes à
laine.
Malgré la pénurie des fourrages, qui a dimi-
nué le nombre des vaches, il est encore au
moins de 55000.
Celui des bœufs a d'autres causes de diminu-
tion dans la division des propriétés, et l'usage
d'employer les vaches au charrois comme au
labourage.
Ce n'est que dans les montagnes qu’on élève
quelques porcs. Les habitans de la plaine nour-
rissent , lorsque les pommes de terre sont abon-
dantes , de petits cochons qu’ils achètent pour
leur consommation, ou pour les revendre.
En terminant sa dépêche, M. le Préfet avait
demandé un aperçu sur la récolte des vins, avec
indication tant de la quantité que de la qualité,
30 Société royale d'Agricullure
comparativement avec les récoltes précédentes.
Votre réponse a été qu'en général cette récolte
a surpassé d'environ un cinquième celle de l'année
précédente; et cependant dans le cours de cette
année , la grêle et une chaleur soutenue ont nui
à la vigne. La qualité en paraît excellente; mais
comme ces vins ont acquis trop vite de la maturi-
té, on est porté à croire qu'ils ne vieilliront point.
Les rapés, dans plusieurs endroits, ont pourri;
partout le vin redoute l'influence de l'air at-
mosphérique, et contracte facilement un goût
d'évent. Il semble qu’un peu d’acidité est nécessaire
pour la conservation de cette liqueur. En effet,
les vins de 1811, qui furent remarquables par
leur maturité prématurée, ont tourné au gras
au bout de 8 à 9 ans. C'est pour conserver
leurs vins que les marchands , en plusieurs en-
droits , introduisent de l’eau-de-vie dans les
tonneaux. On sent aussi qu'il est nécessaire de
pratiquer de bonne heure le soutirage, pour pré-
venir une nouvelle fermentation.
Tels sont les documens que vous avez adressés
à l'Administration ; et en même temps vous lui
avez représenté la nécessité de l'exportation du
superflu de notre consommation en céréales.
Le blé est à un prix si bas, on en reçoit si peu
de demandes, la récolte future s’annonce comme
devant être si abondante, que tout nous fait
de Lyon. 31
présager une surabondance de blé décourageante
pour l’agriculture , à moins que le Gouverne-
ment ne favorise l'écoulement du superflu tou-
jours croissant de notre consommation.
Depuis long-temps les bons esprits qui ont ré-
fléchi sufPéconomie ruralede notre belle France,
ont remarqué qu'il n’y avait aucune proportion
raisonnée entre l'étendue des terres emblavées et
celle des pâturages. Nous cultivons beaucoup
trop de blé, et nous n'élevons pas assez d’ani-
_ maux. Il entre dans notre régime beaucoup trop
de pain, et pas assez de viande ; aussi nous es-
suyons la disette et nous sommes menacés de la
famine lorsque les intempéries nuisent aux cé-
réales ; et si Ja récolte en est abondante , leurs
produits nous embarrassent. .
Si à l’instar de l'Angleterre , de la Suissefède
la Flandre et de quelques parties de l'Allemagne,
nos troupeaux étaient plus nombreux , si con-
sommant moins de blé nous en réduisions la
culture, nous ne serions pas exposés à des va-
riations si calamiteuses dans le prix des denrées
de première nécessité; une nourriture plus saine,
plus tonique , serait donnée à ceux qui, soit au
milieu des champs, soit dans l'intérieur des
ateliers portent le poids du jour ; plus d’aisance,
plus de bien-être, plus de bonheur circuleraient
dans toutes les classes de la société. L'agricul-
Mémoire sur
la statistique
des chevaux du
Rhône , par M.
Vatel.
32 Société royale d'Agriculture
ture, le commerce, les arts auraient un plus
grand développement , et nous cesserions de de-
mander à l'étranger des bœufs pour nos bouche-
ries, des chevaux pour notre luxe et pour nos
armées , de la laine et du cuir pour nos manu-
factures , beaucoup d'autres produitsManimaux
pour nos arts industriels et notre économie
domestique.
T'elles sont , Messieurs, les réflexions qu'ont
fait naître dans votre esprit, tant le rapport de
M. Cochard, sur la statistique des récoltes du
Rhône en 1822, que le mémoire de M. Vatel,
sur les chevaux qui existent dans ce département.
Membre de la Commission dont M. Cochard
a été l'organe, M. Vatel s'était chargé de re-
cueillir des renseignemens sur la statistique par-
liculière des chevaux ; nous lui devons un dé-
nombrement approximatif de ces animaux, avec
la désignation précise des formes et des qualités
qui les distinguent, des genres de services aux-
quels ils sont propres, du régime qu’on leur fait
subir , des maladies qui les attaquent , des pays
d'où nous sommes forcés de les tirer, n'élevant
pas sur notre sol la vingtième partie de ceux
que réclament nos besoins.
Un petit nombre de ces documens ont pu
entrer dans le rapport que vous avez adressé à
Pautorité; mais comme tous vous ont paru im-
de Lyon. 33
portans , je remplirai vos intentions en les rap-
pelant ici en peu de mots.
Après avoir fait sentir combien était négligé
dans notre département l'élève des chevaux , et
avoir assigné les causes de cette funeste incurie,
l'auteur passe en revue les diverses espèces de
chevaux que nous importons , depuis celui de
halage le plus fort, jusqu'à celui de selle le plus
élégant.
Les chevaux des charrois, du roulage, des
brasseries , des meûneries n'ont rien de remar-
quable ; il n'en est pas de mème de ceux de
halage ; leur tailie s'élève jusqu’à 5 pieds 6 pouces,
( 1 mèêt. 786 millimèt, ); ils ont le corps bien
fait, le poitrail et la croupe larges , la tête grosse,
sans être lourde, les membres nerveux, sans être
chargés de chair, le pas allongé, le trot facile
et énergique, l'allure précipitée; c'est l'élite des
races du Brabant et de la Flandre. Le volume
est dans ces colosses une qualité recherchée ; leur
prix est de 1000 à 18oof.
On prétend que le service de la rivière est
propre à rétablir les jambes fatiguées de ces
chevaux, aussi ne refuse-t-on pas ceux qui sont
arqués , boulettés, affectés de vessigons et de
molettes. Sur presque tous on coupe la crinière
à l'endroit où porte le collier , et la queue à 8 ou
10 pouces de son origine; on leur met des fers
3
34 Société royale d'Agriculture
minces et couverts. Ils mangent, par jour , uñ
double décalitre d'avoine, deux de son, et qua-
rante à cinquante livres de foin sur le Rhône,
à peu près autant de luzerne sur la Saône. Le
fourrage, souvent avarié , leur est donné à plein
râtelier ; on ne crible pas l'avoine; aussi la hui-
tième partie de ces chevaux succombe-t-elle aux :
indigestions , aux coliques, au vertige abdominal.
Comme ces animaux sont mal pansés, ils sont
très-sujets à des gales , à des roux vieux, que la
tonte et la propreté seules feraient disparaître ,
et qu'on exaspère par des topiques absurdes.
Ils sont exposés à toutes les intempéries ;
couverts d'une sueur abondante, ils se plongent
dans l’eau froide. Les anciens chevaux résistent,
mais les nouveaux venus prennent souvent des
catarrhes mortels. ,
Un huitième perd la vue , un plus grand nombre
prend le farcin; cette maladie n'est point, le
long du Rhône, rangée parmi les rédhibitoires ;
si elle cause la mort d’un cheval de louage, la
perte est pour le bailleur. La maladie guérit
quelquefois sans traitement: on voit alors les
boutons s'amollir au centre, s'ouvrir, suppurer
et se cicatriser. On croit peu à la contagion; on
ne sépare les malades qu'autant qu'ils sont cou-
verts de boutons ulcérés. Quant à la morve, on
la regarde comme contagieuse. On isole les ani-
de Lyon. 35
maux qui en sont atteints, mais pour ne pas
se priver de leurs services, on les attèle en
renard, c’est-à-dire, à un cordage particulier;
ils mangent à part et bivouaquent.
Indépendamment de la morve et du farcin,
les chevaux de halage sont souvent affectés des
eaux aux jambes, du crapaud et des grappes.
Combien de ces maladies seraient prévenues
ou guéries, je ne dis pas par'des médicamens,
mais par un régime convenable |
Après avoir donné ces détails intéressans sur
les chevaux de halage, M. Vatel parle des che-
vaux qui servent à l'agriculture; leur nombre
est très-petit dans un département où c'est prin-
cipalement avec des vaches que se font les labours
et les charrois ; la plus grande partie porte tour
à tour le bât et la selle, et est dételée de la
charrue pour traîner une modeste cariole ; ils
sont si peu distingués que leur prix ordinaire
est de 2 à 3oof.
Dans aucune grande ville les chevaux de fiâcre
ne sont plus tarés, plus décharnés qu'à Lyon.
Les postes dans'le département sont en gé-
néral bien montées en chevaux suisses.
Pour ce qui concerne les chevaux de luxe, ils
deviennent de jour en jour plus rares dans la
seconde ville du royaume; un seul cheval, pour
l'ordinaire , suisse ou comtois , est attelé à une
36 Société royale d'Agriculiure
voiture à quatre roues; il mène le samedi, à la
campagne une famille nombreuse ; il la ramèera
le lundi , et dans le reste de la semaine il servira
à l'agriculture. Les chevaux de carrosse , eux-
mêmes , à l'exception d'un très-petit nombre,
traînent la charrue. Quant aux chevaux de seile,
ils sont en très - grande partie destinés à monter
les commis- voyageurs ; et parmi ces animaux,
il en est qui, achetés dans le Limousin, l’'Au-
. vergne, la Navarre, contrastent singulièrement
Mémoire sur
les dunes du
golfe de Gas-
cogne , et des-
cription des
moyens emplo-
yés pour les fi-
avec ceux des meûniers, des brasseurs, surtout
de halage.
Au reste, il arrive à nos marchés beaucoup
plus de chevaux que nos besoins ne pourraient
en réclamer ; mais comme des marchands de di-
vers pays, surtout du Midi, viennent s'y appro-
visionner , on ne peut pas porter à moins de
5000 le nombre des chevaux qui se vendent an-
nuellement dans le département entier.
Tels sont, Messieurs, les Mémoires relatifs
à la statistique de notre département, dont
vous avez reçu l’intéressante communication.
Un travail dont l'objet est encore plus impor-
tant, mais qui concerne la statistique de la Gi-
ronde, vous a été présenté. M. le comte de Tour-
non vous a parlé des dunes du golfe de Gascogne ;
il a décrit les moyens par lesquels ont été fixées
de Lyon. 37
des montagnes de sable qui, sur les rives de xer, par M. te
l'océan, roulaient au gré des vents. C'est dans comte de Tour-
une de vos séances solennelles, et en présence "re
d’un public éclairé , qu’il a tracé cette vaste opé-
ration. Vous auriez de justes reproches à nfe
faire si je retranchais ici un seul trait du beau
tableau que vous avez admiré.
» Les rives de l'océan offrent sur plusieurs
points le spectacle de montagnes de sable, qui,
dociles à l’action des vents, marchent pour ainsi
dire vers la terre , portant avec elles la dévas-
tation. Mais nulle part ce phénomène n'est
aussi remarquable que dans le pays borné par
les embouchures de la Gironde et de l'Adour,
et baigné par la mer de Gascogne. Là, s’élèvent
sur une surface de r0o lieues carrées des chaînes
de dunes de 50 mètres de hauteur , qui, sou-
levées par les orages , roulent périodiquement
sur les sols cultivés leurs flots dévastateurs , dis-
putent la terre à l'homme, et semblent destinés
à faire reculer la civilisation. »
» Décrire ces chaînes de montagnesambulantes,
montrer l'effrayante aridité qu’elles répandent sur
leur passage, peindre enfin le génie de l'homme
disant aux vagues de sable : Vous w’irez pas plus
loin : tel est le but de ce mémoire. Heureux si
à defaut de talent, je trouve dans l'intérêt de
mon sujet les moyens de captiver votre attenlion.»
Led
38 Societé royale d’Agriculiure
» Le golfe de Gascogne est formé au midi par
la côte d'Espagne, qui s’avance profondément
dans l'océan , et au nord par les côtes de Sain-
tonge et par les nombreuses îles qui en furent
sans doute détachées. Entre ces deux côtes géné-
ralement escarpées, s'étend vers lorient une
plaine sans bornes, appelée les Landes : elle
semble même se prolonger sous la mer ; car
l'océan roule au loin ses flots sur un sable légè-
rement incliné, qui sur sa trompeuse surface ,
n'offreaux navires qu’une inévitable destruction.
Entre cette plage inhospitalière de la plaine des
Landes, s'élève, comme une digue contre l'océan,
une chaîne de monts sablonneux qui s’étendent
de l'embouchure dela Gironde à celle del'Adour.»
» Vues de la mer ou des landes, ces dunes
présentent comme une multitude de coupoles di-
versement groupées , toutes de leur base à leur
sommet, éblouissantes de blancheur. Lorsque
cette ceinture éclatante se détache au-dessus de la
verdure foncée des bruyères et des ajoncs , on
dirait une chaîne de monts recouverts de neige,
au milieu d’une plaine brillante de la parure du
printemps. »
» Dès qu'on atteint ces monticules , toute végé-
tation disparaît ; le sol cède et fuit sous le pied ;
on enfonce jusqu'à mi jambe, et ce n'est qu'après
de longs eflorts qu'on parvient au sommet de
la dune. »
de Lyon. 39
» Delà se montre la chaîne des dunes dans
toute son horreur. De là l'œil n’aperçoit plus
que des amas de sable de toutes les formes: il
cherche en vain dans ces vallées, sur ces pentes
rapides quelques traces de végétation , une
mousse, la moindre graminée: seule , la des-
truction offre autour de lui son image : aucun
feuillage, aucune herbe ne croît, pour recueillir
les brises de la mer, et l'air n'est frappé que du
bruissement lointain des brisans , et du sifflement
du sable qu'enlève le vent. Partout une arène
ardente , étincellante, mobile, fatigue les yeux
de sa monotone blancheur, désole l'ame de son
aridité : quelquefois seulement un tronc d'arbre :
pourri, témoigne , en s'élevant au-dessus de ce
sol maudit, que jadis une terre plus heureuse
exista sous cette couche dévastatrice. »
» À chaque pas qu’il fait dans ce désert, un dan-
ger menace le voyageur ; il marche, et tout-à-
coup sans aucun signe précurseur , la terre fuit
sous ses pieds, le sable s’entr'ouvre , l'eau jaillit,
et il s'enfonce dans un gouffre qui se refermerait
sur lui si en se couchant précipitamment sur le
sable , l'habitant du pays n'évitait ce piége dan-
gereux. On appelle Bioures ces cavités pleines
d’eau , qu’un sable léger a recouvertes d'une
voûte trompeuse , présentant à l'extérieur toutes
les apparences d'un terrain solide. Telles sont
40 Société royale d'Agricullure
les dunes ; telle est cette portion de notre belle
France qui s'étend sur 60 lieues de longueur et
une lieue et demie de largeur, et qui offre une
superficie de 120,000 hectares dans le seul golfe
de Gascogne. »
» Non-seulement ces sables sont complètement
arides , ils deviennent encore les plus redoutables
des agens de destruction. Aussitôt que le vent
d'ouest commence à souffler , et dans ces parages
il dure huit mois par an, les légères molécules qui
couvrent la pente de la dune opposée au vent,
soulevées par lui, glissent:, s'élèvent , courrent
et en atteignent le sommet. Leur marche est si
rapide que la main opposée à cette multitude de
projectiles presqu'invisibles , est bientôt meurtrie
par leurs angles aigus. » .
» Lorsque ces atomes se sont accumulés au,
sommet de la dune , leur base ne pouvant plus
se soutenir s'écroule , et le sable précipité en
nappes, en torrens , roule au loin ses flots
arides, Qu'un mur , qu'une haie se présente , ce
sable arrêté samoncèle ; mais bientôt dominant
cet obstacle, ïl le franchit , et devenu plus rapide
dans sa course , il remplit les sillons , ensevelit
le ceps des vignes , les tiges des arbres , pénètre
dans les habitations , et partout il semble jeter
comme un linceul de mort sur la plus riante.
verdure. C'est ainsi que de riches territoires , que
de Eyon. 4r
des villages entiers ont à jamais disparu ; que le
village de Soulac entr'autres , que sa belle église
ont été détruits. Le voyageur s'arrête avec effroi
devant ce clocher qui seul témoin de l'ancienne
prospérité de cette plage , s'élève du sein des
sables au-dessus des voûtes ensevelies ; plus loin
il contemple en gémissant un vaste vignoble sur
lequel les dunes ont accompli leur révolution , et
dont les ceps séculaires sont maintenant le jouet
de la mer. »
» Quelquefois le progrès des sables s'opère
pendant une seule tempête , et on a vu des dunes
s’'avancer en quelques heures de 20 à 30 met. ;
d'autres fois des vents modérés donnent à ce
progrès une plus grande lenteur ; mais les ré-
sultats de ce mouvement peuvent être soumis au
calcul , et la moyenne annuelle de l'avancement
des sables peut être évaluée à 20 mètres; ce qui
fait une demi-lieue en un siècle.
» Les habitans des nombreux viilages qui tou-
chent le pied des dunes comptent en tremblant
le nombre des récoltes qu’ils peuvent encore de-
mander à leurs champs, avant que les champs
et les habitations soient détruits par les sables. »
» D’où viennent ces myriades de molécules ?
quelle puissance les enlève à l’océan et les amon-.
cèle sur le rivage ? La solution de ce problème
de géologie n'entre pas dans mon sujet : il me
suffira de dire que suivant M. Bremontier , ces
42 Sociélé royale d'Agriculture
sables proviennent du détritus des roches qui
forment Les côtes d'Espagne et de Bretagne , que
les flots enlèvent, broyent et rejettent au fond
du golfe en imperceptibles atomes. »
» Queile main arrêtera ce torrent dont aucune
saison ne tarit la source ? Quel génie préservera
de la destruction ces territoires si bien cultivés,
ces villages peuplés d'hommes si industrieux ? »
» Nicolas Bremontier , ingénieur en chef des
ponts et chaussées de la généralité de Bordeaux
en 1786, touché du malheur qui menaçait un im-
portant et vaste pays, examina attentivement les
dunes,observa l’efetdes ventssur leurs molécules,
étudia la marche des coulées de sable ; il vit ser
quelques points d'antiques forêts qui annoncent ,
de distance en distance, un primitif ensemen-
cement ; enfin, il interroggea la nature, et il
conçut l'espérance de rendre les dunes imme-
biles et de les couvrir de forêts. »
» Un Monarque dont lame s’ouvrait à toutes
les pensées grandes et utiles, et dont l'unique
passion élait amour de ses sujets, Louis XVI,
accorda une somme pour tenter des essais. »
» M. Bremontier encouragé par cet auguste
protecteur, se livra avec l'ardeur d'un ami de
J'humanité à ces orandes expériences , et dès l’an-
née 1787 il commença à ensemencer les dunes.
de la "Teste. »
de Lyon. 43
» Les premiers essais réalisèrent toutes les es-
pérances de l’habile ingénieur , et les semis le-
vèrent parfaitement : dès l’année suivante des
des dunes qui menaçaient Mimizau et la Teste,
arrachées à l'influence des vents, restèrentcomme
suspendues au-dessus de ces bourgs. »
» Mais à peine quelques centaines d'hectares
de sable étaient ensemencés et fixés , que la ré-
volution vint détourner les regards de toutes les
entreprises qui n'avaient pour recommandation
que leur utilité, La source des bienfaits fut tarie
dans la main du Roi, et les ensemencemens
cessèrent. » .
» Dix ans s'écoulèrent ainsi. Au retour de
l'ordre en 1802, M. Bremontier qui n’avait cessé
de solliciter des fonds pour continuer une entre-
prise dont l'expérience faite-en 1787 et 1788 dé-
montrait la possibilité, M. Bremontier obtint
l'autorisation de reprendre les travaux. »
» Îls commencèrent en effet sur une assez
grande échelle , et i!s continuèrent jusqu'en 1813.
M. Bremontier était mort dès 1810, après avoir
vu le succès le plus complet couronner ses
efforts. »
» Des circonstances malheureuses pendant les
années 1813,1814et1815 arrêtèrent les travaux.
Mais en 1816 je fus assez heureux pour faire adop-
ter à M. Lainé, alors ministre de l’intérieur , tous
44 Société royale d’Agricullure
les plans de M. Bremontier. Dès ce moment une
marche plus régulière, des fonds plus abondans
assurèrent à l’entreprise une rapide exécution. »
» Le succès obtenu par M. Bremontier était
le résultat d'une pensée très-simple. Il conçut
que les sables étant par leur ténuité, et par leur
défaut de cohésion le facile jouet des vents, ik
était indispensable pour leur confier des graines
de végétaux, de créer pour ainsi dire aux dunes
une surface plus compacte. C'est dans cette. vue
qu'il dirigea les travaux. »
» On commence par semer sur la dune un mé-
lange de graines de pins ( pinus marilima } et de
genêt ( genista scoparia ) on couvreensuite la sur-
face semée avec des branchages de pins , de genêt,
d'ajonc ou d’autres arbustes les plus à portée de
la dune. Ces branches sont couchées en recou-
vrement comme des tuiles , leur tige étant en-
foncée dans le sable ; ainsi arrangées elles pré-
sentent une surface factice qui recevant l'effort
des veñts, en garantit le sable qu'elle recouvre. »
» Sous cet abri les graines germent, et au
bout de deux ou trois ans leurs tiges pressées
couvrent le sol en surmontant ces restes pourris,
mais devenus inutiles , de la couverture de bran-
chages. A la quatrièmeannée, les pins ont déjà
poussé dans ce sol perméable, leur racine pivo-
tante a une profondeur de 3 à 4 pieds , les genêts.
: de Lyon. : 45
s’élancent au-dessus des têtes des jeunes pins,
et les protégent de leur ombre. »
» C’est alors que la dune se revêt d'une douce
verdure qui annonce au cultivateur qu'il n'a plus
riea à craindre de son eflrayant voisinage; car
un terrible instrument de dévastation est trans-
formé en un agent bienfaisant de production. »
» À cinq ans, la jeune forêt offre une masse
épaisse de 2 à 3 pieds de haut ; à huit ans les
pins se sont élevés au-dessus des genêts , et crois-
sant rapidement , ils atteignent à 25 ou 30 ans
une hauteur d'environ 35 pieds. C’est alors qu'on
peut commencer à en extraire la résine. »
» Tels sont, Messieurs , les moyens employés
pour fixer les dunes , et pour les rendre produc-
tives. Ces moyens n’ont pas été d'abord aussi
simples; mais l'expérience a été mise à profit,
et nous a conduits graduellement à la méthode
la plus économique. »
» [l me reste à vous montrer l'ensemble de
cette immense entreprise. »
» La surface des dunes du golfe de Gascogne
est d'environ 120,000 hectares , la moitié se com-
pose de vallées où le sable plus compact n'a pas
besoin d'être fixé, et où les arbres croîtront
naturellement, Il reste 60,000 hectares de dunes
mobiles. »
» De 1787 à 1822 on a ensemencé dans les dé-
46 Société royale d'Agriculture
partemens de la Girondest des Landes 7000 hec-
tares , il reste donc 53,000 hectares à ensemen-
cer. Pour calculer ce qu'il faudra de temps pour
rendre ces dunes immobiles , il faut rechercher
la dépense à faire ; car il est évident que c'est
ici une question d'argent. »
» Les 7000 hectares ensemencés ont coûté
1,300,000fr., ce qui met l’'hectare à 185 fr. »
» Mais les méthodes s'étant perfectionnées,
Phectare qui coûtait en 1787 25ofr. n'en coûte
plus que 130 au terme moyen. Ainsi les 53,000
hectares coûteront environ 7 millions. Le Roi
accorde dans ce moment 100,000fr. par an,
ainsi il faudrait 70 ans pour achever cette entre-
prise; mais comme à mesure que les arbres se-
ront mis en valeur, c'est-à-dire, au bout de 30
ans, ils donneront en résine un produit de 15fr.
par bectare, l'opération pourra être accélérée
sensiblement, en ajoutant au fonds primitif
de 100,000 fr. le revenu des forêts. Ainsi en 50
ans environ, et avec une somme qui n'est pas
excessive, vingt villages seront mis à l'abri de
la destruction , un vaste territoire sera conservé,
et l'Etat possèdera sur un sol aujourd’hui sans va-
leur, la plus vaste forêt de l'Europe, peuplée
de bois propres à tous les usages, et produisant
plus de résine que n'en consomme la France. »
» La mémoire de M. Bremonlier consacrée
de Lyon. 47
par un aussi grand succès, est immortelle sans
doute ; mais la reconnaissance faisait une loi de
rendre à ce bienfaiteur de l'humanité un public
et solennel hommage. En 1817, 30 ans après
ses premiers travaux, un cippe de marbre a été
élevé sur la dune que cet illustre ingénieur fixa
la première au moment où elle allait englontir
le territoire de la Teste. Une inscription apprend
à l'étranger (car c'est de sa mère que l'enfant du
village apprend et le bienfait et le bienfaiteur )
que Nicolas Bremontier trouva l’art de fixer les
dunes et de les couvrir de forêts ; elle lui dit que
l'infortuné Louis XVI encouragea cette grande
entreprise, et que son auguste frère, à peine
assis sur le trône de ses pères, jeta les yeux sur
ces plages désolées, et en ordonnant la conti-
nualion des travaux, rendit l'espérance à leurs
malheureux habitans. »
Notice sur
Y'art de creuser
des canaux,
d'ouvrir des
fossés, et des
roules par des
procédés éco-
nomiques, par
M. De lu Cha-
pelle.
48 Sociélé royale d'Agriculture
ÉCONOMIE RURALE.
Comme l'observe très-bien M. Passerat de là
Chapelle, « Vart de simplifier les travaux agri-
» coles et de les amener à leur plus grande éco-
» nomie , mérite de fixer l'attention des proprié-
» taires qui désirent opérer des améliorations,
» mais qui sont retenus par les dépenses , sou-
» vent excessives , qu'elles entraînent. »
Parmi ces améliorations , il en est peu dont
le besoin se présente si fréquemment , et dont
les résultats puissent offrir de plus grands avan-
tages que le creusement des canaux et l'ouverture
des fossés. En se livrant à ces travaux, on se
propose pour l'ordinaire un double but, celui
de donner un écoulement régulier à des eaux
stegnantes ou vagabondes, et de les utiliser pour
les irrigations des prairies et le mouvement des
usines.
Un changement de ce genre a été opéré par
M. De la Chapelle. Dans ses domaines coulait
un ruisseau dont les inondations couvraient
d'une vase stérile les champs et les prés voisins.
Hi résolat de le contenir, et pour cela ïl
redressa toutes les sinuosités qui ralentissaient
sa marche, il arracha les vieux arbres et les buis-
sons qui obstruaient son lit , il recula ses bords,
de Lyon. 49
il forma à 5 et 6 pieds de distance des chaussées
dont la hauteur fut calculée d'après le niveau le
plus élevé des grandes eaux ; des plantations de
peupliers , de frènes et de saules furent disposées
au pied de ces chaussées pour les protéger contrele
courant. Plusieursécluses furent construites dedis-
tance en distance, pour la facilité des irrigations.
Ces travaux étant exécutés , il fallut ouvrir
un canal assez grand pour recevoir les eaux sur-
abondantes du ruisseau ; il devait, avoir en lon-
gueur deux cent cinquante toises de sept pieds
et demi; sa profondeur devait varier depuis trois
pieds jusqu'à sept ; il devait avoir d'ouverture
quatorze pieds dans le haut , et au fond cinq , six,
jusqu’à neuf pieds.
Pour creuser ce canal , M. De la Chapelle ap-
pela des pionniers qui demandèrent 6 fr. de la
toise courante ; ce qui portait à 1500 fr. le mon-
tant de la construction. L’habile agronome em-
ploya un moyen plus économique: il fit ouvrir
la tranchée avec une forte charrué à avant-train ,
dont l'oreille est mobile , et le soc pointu en
forme de coin ; six forts chevaux y furent atte-
lés , trois hommes étaient constamment assis
sur le manche et la perche pour la contenir lors-
qu'elle rencontrait de fortes résistances, comme
d'énormes cailloux; elle était suivie par trente
et jusqu’à cinquante ouvriers armés de pelles,
4
5o Société royale d'Agricullure
qui jetaient sur les bords les terres remuées ;
elles étaient repoussées par deux autres charrues..
Cet ouvrage, exécuté en novembre 1821 , a été
terminé en 13 jours ; en voici les frais :
482 journées d'ouvriers à rf. 25c.,
sans nourriture . . . .. , 602 50
13 journées de charrue pour creuser,
SM T 5 A N LS M ARS EE
6 journées de charrue pour niveler
les’terres des déblais ; les attelages
étant moins forts que pour la pré-
cédente, sont estimées 8 . . . . 48
Réparation à la grande charrue . . 6
Torar. . . 786 50
Ainsi au lieu de 6fr. par toise de sept pieds
-t demi que demandaient les pionniers , on n'a
dépensé , y compris le travail des charrues du
propriétaire , que 3fr. 14c.
Ce n'est pas tout, on a exécuté en 13 jours
une opération qui, par la méthode ordinaire,
aurait duré plusieurs mois. Eh, dans combien
de circonstances l'économie du temps n'est-elle
pas aussi précieuse que celle de l'argent !
Peu de jours après, l'auteur a appliqué le même
procédé au creusement d’un chemin sur le pen-
chant d’une côte rapide. Les premiers sillons
furent ouverts avec peine, les chevaux se tenant
difhicilement sur la pente escarpée. Dix ouvriers
de Lyon. | 51
suivaient la charrue, détournant la terre remuée.
Dès la seconde piquée , les chevaux se tenaient
mieux, et la charrue repoussait elle-même les
terres sur le bord de la pente; on la chargeait
de plusieurs hommes lorsqu’elle manœuvrait
contre la balme. Là où le sillon devait être creusé
plus profondément, on y repassait plus souvent.
Dans l’espace de trois jours, ce chemin fut rendu
praticable , au point que des tombereaux pesam-
ment chargés ont pu le gravir. Sa longueur est
de plus de 100 toises , sa largeur de 10 pieds, et
on peut évaluer à 60 pieds la hauteur perpendi-
culaire de la colline au sommet de laquelle il
aboutit. La dépense a été de 43fr. 75 c., ÿ com-
pris le travail de la charrue.
L'auteur fait observer que sa méthode n'est
inapplicable que sur les marais, les rochers , les
sols couverts de bois; il pense qu'elle pourrait
s'adapter aux entreprises les plus vastes, même
au creusement des canaux qui traversent les
empires et mettent les mers en communication.
C'est à l’aide d'une charrue encore plus forte
que celle de M. De la Chapelle , qu'un autre agro-
nome habile, M. De S/-Victor, a opéré à Rono
près Tarare, d'importantes améliorations.
M. De St-Did'er , qui a vu manœuvrer cette
charrue, en a donné une courte notice , et il Pa
Notice sur
une Charrue
charolaise ; par
M. De Si-Di-
dicr..
52 Société royale d’Agricullure
accompagnée d'un dessin exact. D’après ce dessin
auquel est jointe une échelle de proportion, on
peut facilement juger des dimensions extraordi-
maires de la charrue de M. De St- Victor. (x)
Attelée de 16 bœufs vigoureux, conduite par
‘deux laboureurs tenant les manches , suivie de
huit manœuvres marchant dans le sillon pour
en ôter les blocs de pierres qu'elle arrachait jus-
qu'à 22 pouces de profondeur , cette charrue
puissante a défoncé en 30 journées environ 25
mesures de 1200 pas, eten a extrait plus de 400
charges de pierres, dont les plus grosses étaient
à peu près du volume d’un tonneau de 3 ânées.
Ces défoncemens ont amélioré pour long-
temps les terres sur lesquelles on les a pratiqués;
c'est au point qu'elles donnent de superbes mois-
sons de froment , tandis qu'on n'en obtenait au-
paravant que de chélives récoltes de seigle.
C'est principalement au moyen de sa charrue
que M. De S1-Victor a pu se livrer dans sa terre
de Rono à beaucoup d'autres belles opérations
agronomiques , telles que des semis considérables
de bois sur des montagnes depuis long-temps dé-
pouillées et arides; la création de vastes prairies
artificielles ; la culture en grand de la pomme
de terre : il n'a pu en effet obtenir ces amélio-
rations que par des défrichemens considérables
et de profonds défoncemens.
(1) Voyez à la fin du volume,
de Lyon. 53
11 est dans tous les pays un grand nombre de SurlaPtéride
végétaux qu'on méprise parce qu’on n’en connaît es et
pas les propriétés : telle est parmi nous la ptéride :
aquilline, fougère femelle ( Pferis aquillina ),sur
laquelle M. HMadiot vous a donné des détails fort
intéressans,.
Tandis que dans quelques pays on a bien de la
peine à la détruire, dans d’autres on la fait servir
à divers usages précieux.
Elle a deux espèces de racines , dont l’une pi-
vote jusqu’à 30 pieds, et l'autre (qui est plutôt
une souche ) est traçante. La manière la plus
sûre de l’extirper , c’est d'en couper les jeunes
pousses avec la faulx, la faucille, ou par le bi-
nage d'été. Voilà pourquoi elle disparaît des pays
où l'on cultive les trèfles, les luzernes qui se
coupent souvent, et la pomme de terre, les ha-
ricots qui exigent plusieurs binages.
En Anjou et en Bretagne, on la récolte eton
ne la détruit point, on fait avec ses racines des
fagots qu'on nomme Souge, et qu'on donne aux
cochons. Ceux qu'on a nourris de cette manière
sont plus estimés que ceux qu'on à engraissés
avec du petit-lait, des pommes de terre , des dé-
bris de jardin; et leurs jambons rivalisent à
Paris ceux de Mayence.
Dans des années de disette, les Souges ont
servi à la nourriture des pauvres ; on les faisait
54 Sociélé royale d'Agriculture
cuire pour leur enlever un extrait amer et
purgatif qu'elles renferment avec de la fécule ;
ou mieux on en retirait par des procédés parti-
culiers cette même fécule qui est identique à
celle de pomme de terre, de sagou, de manioc.
Les jeunes pousses de ptéride sont également
du goût du bétail, on les garde pour l'hiver , en
les stratifiant avec de la paille à laquelle elles
communiquent leur odeur.
Les feuilles servent de litière, et donnent un
fumier qui, étant pourri, est préférable à celui
de paille. L'auteur a observé les effets de cet en-
grais sur des terrains qui semblaient condamnés
à la stérilité ; il a remarqué aussi que partout
où le fumier de ptéride était répandu , la plante
se multipliait abondamment.
Dans quelques départemens de l'ouest , cette
plante sert à couvrir les habitations des paysans
et celles de leur bétail ; elle entre aussi dans la
construction des murs : l'auteur a vu de ces
murs qui, quoique très-anciens, avaient con-
servé beaucoup de solidité.
Indépendamment de ces usages , la ptéride est
employée à chaufler le four, à cuire la chaux
et le plâtre, à couvrir les plantes qui craignent
les fortes gelées , à fournir de la potasse.
T'els sont les usages de la fougère femelle ,
( Pleris aquillina) en Bretagne et en Anjou.
de Lyon. 55
Dans d'autres provinces de France, M. Wadiot
a observé des végétaux plus importans : de ce
nombre sont les figuiers du midi ; il en a dis-
tingué plusieurs variétés, dont quelques-unes à
caractères si tranchés que , facilement, selon lui,
on pourrait les considérer comme des espèces.
Parmi elles , il en a distingué une qu'il croit
avoir été inconnue à Garidel et à M. de Suffren.
En voici les caractères les plus saillans : tige
tortueuse , écorce d'un gris cendré, parsemée
de taches fauves, ramifications nombreuses ,
boutons gros et renflés ; feuilles larges , forte-
ment palmées, d'un vert brun à la face supé-
rieure, de couleur olivâtre à l'inférieure , rudes
au toucher, nervures saillantes, pétioles gras.
et allongés; figues naissant le long des rameaux,
tantôt en groupes , tantôt solitaires, presque
sessiles , d’abord verdâtres et arrondies , ensuite
bleuâtres, violettes, et enfin noires, et de la
forme de l'aubergine.
L'arbre produit abondamment au printemps,
en été , en automne ; l'auteur en a mangé des
fruits à la fin d'octobre 1821 ; il en a rencontré
un pied entre des individus d'autres variétés dans
Pan des jardins de PObservance.
Cette variété lui paraît précieuse, non-seule-
ment sous le rapport du goût du fruit, mais en-
core sous celui de la précocité, et pour laccé-
Sur une nou-
velle variété de
Figuier , à gros
fruit noir , en
forme de fruit
d’aubergine ;
par Le méme.
Sur une va-
riété de noise-
tier à feuilles
pourpres ; Par
le méme.
56 Socièté royale d'Agriculture
lérer encore , il propose les moyens suivans : on
fait aux rameaux une légère incision corticale ;
on serre fortement les pétioles, comme si on vou-
lait les tordre ; on met une goutte d'huile sur
chaque ombilic. L’enveloppe du fruit étant
épaisse et dure, résiste à un insecte du genre
cinips , qui s'insinue dans les figues des autres
espèces.
Telle est la variété de figuier que M. Madiot
a signalée aux cultivateurs du Midi.
Le même cultivateur a obtenu par la voie
des semis une variété de noisetiers à feuilles
pourpres. Les graines lui en avaient été remises
par notre Confrère, M. De Fréminville, qui les
avait récoltées sur un vieux pied à feuilles cui-
vrées , dans un de ses domaines en Bresse.
Le nouveau noisetier est conservé à la pépi-
nière départementale , en voici les caractères :
Elévation ordinaire; tige droite très-ramifiée;
écorce d'un gris blanchâtre , tiquetée de points
cendrés, souvent cotonneux; rameaux opposés ;
bourgeons gonflés , écailleux , de couleur rousse.
verdâtre ; chatons cylindriques , longs de deux
pouces, se montrant à trois époques, juin,
octobre et décembre; noix de moyenne grosseur,
allongées ; pellicule intérieure rose; feuilles nais-
sanies presque rouges, un peu cotonneuses , en-
de Lyon. 57
suite de couleur cuivrée , enfin d'une belle teinte
violette , portées sur de courts pétioles , épaisses ,
dentelées sur les bords, hérissées de petits poils |
rougeâtres et rudes, nervures bien prononcées ;
port très-élégant , contrastant agréablement par
la couleur de ses feuilles avec les autres variétés
du genre.
Cet arbrisseau est robuste , il s'accommode,
pour ainsi dire , de toutes les expositions et de
tous les terrains ; il se plaît particulièrement sur
les sols sablonneux, et au nord ou au levant ; on
le multiplie facilement par marcottes, rejetons ,
semis ; mäis par cette dernière voie il peut perdre
ses caractères ; c’est par la grefle qu’on le con-
serve sûrement.
Les fruits de ce noïsetier sont d'un goût agréa-
ble , sur-tout à l’état frais ; les confiseurs pour-
raient en tirer parti; on en extrairait de l'huile
qui, pendant plus d’un an, servirait à la cuisine,
et qui, plus vieille ; servirait à l'éclairage , sans
fumée et sans mauvaise odeur. L'auteur pense
que deux livres de l'amande fournirait une livre
d'huile de bonne qualité.
C’est sous le rapport de leur bois qu'il a ob-
servé trois espèces d'érables indigènes, l’acer
pseudo platanus , le platanoïdes et l'opalus. M les a
vus sous diverses latitudes , sur presque tous les
Sur trois es-
pèces d’érables
indigènes ; par
le méme.
58 Société royale d'Agriculture
sols , à toutes les expositions , et toujours végé-
tant avec vigueur ; il pense avec raison qu'ils
devraient être plus communs dans les forêts.
L’Acer pseudo platanus est très-improprement
nommé sycomore ; car le sycomore des anciens
était un figuier, Ficus sycomorus. C'est un arbre
forestier qui aime les terrains arides. L'auteur en
a vu dont le tronc avait quatre mètres (12 pieds)
de cireonférence. On peut l'élever en tailliscomme
en haute futaie. Son bois, dur, compact, blanc-
marbré , est susceptible d'un beau poli, il brûle
facilement , et donne un feu clair et ardent; on
en fait des écrous de pressoir , des écuelles , des
cuillers , des meubles, des ouvrages de tour , de
marqueterie, des instrumens de musique, des
montures de fusil : pour tous ces usages ce bois
rivalise plusieurs de eeux que nous faisons
venir à grands frais d'un autre hémisphère.
L’érable plane , Acer platanoïdes s'élève plus
haut que le précédent. L'auteur en a vu dans les
forêts de Anjou , de la Bretagne , du Dauphiné,
des individus dont la circonférence au bas du
tronc était de 36 pieds, et la hauteur de 100;
il a compté sur la coupe d'un de ces arbres 264
rayons , ce qui suppose que ces géans végétaux
avaient vécu 300 ans. D'abord blanchâtre, le
bois de cette espèce ne tarde pas à prendre une
teinte jaunâtre ; moins compact que le précé-
_: de Lyon. 5g
dent ; il pèse 56 livres le pied cube ;on en fa-
brique en Anjou, des sabots, des cuves, des
coffres , des roues, des conduits d'eau. On en fait
ailleurs des échalas, des pieus , sur-tout des
cercles , préférables à ceux de châtaignier et à
ceux de saule marceau. Il est peu sujet à la ver-
moulure , et dure long}-temps sous terre. De
même que l’érable à sucre , il renferme dans les
vaisseaux propres, une grande quantité de ma-
tière sucrée , comme l'auteur s'en est assuré
en en faisant tailler 900 gros pieds sur les routes
royales.
L’érable opale, Acer opalus , est, dit-on, ori-
ginaire d'Italie. L'auteur l'a vu en grande abon-
dance dans les forêts de l'Anjou, dans celles du
Dauphiné, sur-tout dans celles de notre Con-
frère M. De Moidière. Sa croissance est plus
lente que celle des deux autres. M. Madiot n'en
a pas rencontré dont la circonférence ral
9 pieds, et la hauteur 50.
Le bois, dont le pied cube pèse 60 livres, est
jaunâtre , d’un tissu fin, serré, susceptible d'un
beau poli. Les menuisiers et les ébénistes en font
grand cas, même à Paris. Il offre des marbrures
singulières qui le rendent précieux pour certains
ouvrages de tour. Ces marbrures sont dues à
des ébranchemens pratiqués dans le moment de
la pleine végétation, parce qu'alors la sève s'extra-
Sur une es-
pèce d’orme
égyptien ; par
le méme.
60 Société royale © Agriculture
vasant à plusieurs reprises, donne lieu à des
noôdosités qui, coupées en divers sens, offrent
des figures souvent très-bizarres, capables de dé-
router les deridrologistes les plus habiles.
L'arbre suivant est exotique, sa graine se
trouva parmi plusieurs autres qui furent remises
à M. Madiot par un de ses amis, naturaliste de
l'expédition d'Egypte ; il le sema, et en donna
des plançons à plusieurs eultivateurs botanistes
qui n'en avaient aucune connaissance.
Il a bien réussi à la pépinière départemen-
tale où il a offert des caractères remarquables.
Il ne s'élève pas au-dessus de 10 à 12 pieds,
et on ne peut l'empêcher de se former en buis-
sons. Le tronc est blanchâtre , grisaillé , à ger-
çures peu profondes ; branches efhlées , très rami-
fiées , tendant toujours à prendre une direction
horizontale ; boutons fauves , imbriqués ; feuilles
épaisses, lisses, ovales, crenelées, à nervures
très-saillantes, portées sur des pélioles courts ,
minces, ressemblant au premier aspect aux
feuilles du PAillyrea latifolia, L.; persistant
tout l'hiver, elles font place vers le commence-
ment ‘du printemps à celles qui doivent les
suivre.
M. Madiot aui en possédait plusieurs pieds, en
hasarda quelques-uns en pleine terre ; n'étant pas
de Lyon. 65
encore assez ligneux, ils souffrirent dans l'hiver de
1810 ; mais l’année suivante ils repoussèrent vi-
goureusement par le pied; et depuis ils se sont
propagés autour de Lyon, où ils se multiplient
par la grefle sur les ormes indigènes. Cet arbuste
aime les terrains frais et légers , ainsi que l’ex-
position du midi. Comme le filaria, il prend
sous la serpette toutes les formes. L'orme égyp-
tien qui, au milieu de l'hiver , oftre la plus belle
verdure, et qui, dans nos climats, a sa place
marquée dans les petits bosquets à paysage , est
néanmoins de la même espèce que les ormes gi-
gantesques qui ombragent les grandes routes et
les promenades publiques.
Le même naturaliste , revenant d'Egypte , re-
mit à M. Madiot des cônes d’une espèce de tuya.
Ils furent semés à la pépinière départementale;
ils y ont réussi ; et cette année ( 1822) quelques.
pieds de ces conifères ont fleuri , et fructifié pour
la première fois. En voici les caractères : tronc
droit , écorce unie, de diverses couleurs , bran-
ches etrameaux rapprochés , ces derniers applatis,
devenant fauves en vieillissant , feuilles écail-
‘ leuses imbriquées, courtes , opposées , tantôt ob-
tuses , tantôt aiguës, remarquables par une cou-
leur d'un verttrès-luisant , et par une odeur forte-
ment balsamique ; cônes plus petits que dans les
Sur un tuya
peu connu ; par
ie même.
Sur le poirier
du mont Sinaï;
pax le méme,
62 Société royale d Agriculture
autres espèces du même genre , groupés en grand
nombre, en général sur un seul côté des rameaux.
Dans un de ces groupes M. Madiot a compté
124 cônes.
Les amandes lui ont offert l'odeur et le goût
du sandarach du commerce. Le bois est compact,
liant, flexible, susceptible d'un beau poli, of-
frant une multitude de veines, de réseaux et de
nuances variées qui le rendent propre à la con-
fection de jolis meubles ; exhalant d’ailleurs une
odeur agréable.
Ce tuya, qui a quelques rapports avec celui
d'orient , paraît facile à multiplier , et peut four-
nir aux jardins d'agrément un joli arbuste de
pius.
Son bois étant-incorruptible a pu servir à
former les cercueils égyptiens ; c’est l'opinion
de M. Madiot , qui a cru remarquer de la parité
entre le grain de ce bois, observé à la pépinière
du Rhône et celui des cercueils qui renfermaient
les momies adressées au Muséum royal d’his-
toire naturelle.
D'autres graines encore furent confiées à M.
Madiot, au retour de l'expédition d'Egypte;
telle est celle du poirier du mont Sinaï. Notre
Confrère en ayant obteru plusieurs pieds , il en
adressa au savant 7houïr , directeur du jardin
de Lyon. 63
du Roi. Cest-là que M. Desfontaire V'a vu pro-
bablement pour la première fois. N'étant décrit
avec soin nulle part, M. Madiot a cru devoir en
tracer les caractères; voici les principaux :
Taille de l'aubépine , forme de buisson touffn ,
difficile à pénétrer, branches armées de grosses
épines de deux pouces de longueur , qui portent
des bourgeons d'où sortent des feuilles allongées
et blanchâtres , tronc noueux, très-uni, écorce
extérieure blanchâtre , liber roussâtre , avec
quelques taches grisâtres, bourgeons rougeîtres,
grèles , longs , petits et pointus, feuilles petites,
lancéolées , obtuses, à dentelures rapprochées et
peu profondes , glabres glauques en dessous ,
portées sur de courts pétioles , creusés en goat-
tières , réunies en groupes ; fleurs en corymbe,
pétales petites, couleur de chair, liserées de rouge,
blanchâtres , arrondies à l'extrémité, d'une odeur
agréable, variant par le nombre, de 4 à 8 éta-
mines longues ; pollen d'un rose pâle; fruits
ordinairement réunis en groupes, petits, irré-
guliers , bossués, d'une peau dure , épaisse , ra-
boteuse , olivâtre, d'un goût acerbe et grave-
leux. Cet arbre est facile à multiplier par pepins
et par grefle.
ll serait important de le propager, sous plu-
sieurs rapports , 1.° pour la construction des
haies, 2.° pour la fabrication du poiré, et, à cet
Sur le pavia
de la Floride,
à longues grap-
pes;
mére.
par
le
64 Société royale d'Agriculture
égard l’auteur s'est livré à des essais qui n'ont
pas été sans résultats; 3.2 pour la confection
des objets qui exigent un bois très-compact ,
très-dur , tels que des vis; sous ce rapport, ce
poirier ne le cède pas au cormier , sorbus domes-
tica ; il est d’ailleurs susceptible du plus beau
poli ; on peut le teindre en noir, au point de
lui donner l'aspect de l'ébène.
Nous devons encore à M. Madiot une notice
sur les fruits du Pavia à longues grappes, Escu-
lus macrostachia , que M. Michaux père apporta
en l'an 6 de la Floride. Cet arbre fut admis dans
les jardins à cause de l'élégance de son port et
de la suavité de ses fleurs. On ignorait ‘que son
. fruit fût savoureux comme celui de la châtaigne.
Soupçonnant ce fait, le savant Bosc voulut le
vérifier en septembre de cette année.
Visitant la pépinière du Rhône, il ramassa
aux pieds de ce pavia quelques fruits mürs; on
les fit bouillir. On observa qu’ils cuisaient plus
promptement que les châtaignes ordinaires, sans
doute parce que leur pellicule est plus mince ;
on en mit sous la cendre , et ils éclattèrent avec
plus de force que les châtaignes ordinaires qu'on
a négligé d'entailler. Des deux manières , leur
goût ne parut pas inférieur à celui des meilleures
châtaignes. M. Madiot voulut savoir s’il en était
de Lyon. | 65
de même des fruits des autres espèces de pavia.
Les ayant préparés de la même maniere, il
reconnut qu'iis n'étaient pas supérieurs aux mar-
rous d'Inde. ;
Au dire de M. Bosc, le pavia de la Floride
vésète plus vigoureusement sous le ciel de Lyon
que dans les environs de Paris , où il reste nain,
et où ses fruits ne mürissent pas.
Depuis plus de quinze ans que M. Madio! le
cultive, il s’est assuré que sa multiplication était
facile par graines , marcottes et drageons , que
toutes les expositions lui étaient bonnes, qu'il
supportait facilement la rigueur de nos hivers,
que sa grefle sur le marronnier d'inde , espèce
du même genre, n'était pas dé longue durée,
sans doute à cause de la différence qui existe
entre la croissance de ces deux arbres.
De concert avec M. Madiot M. Faissolle vous Surdeux pro-
a proposé de signaler à l'autorité les avantages j*ts de planta-
d'une plantation de müriers le de PU
P rs sur ja, roule de Fuissolle,
Cyr, depuis le port des pates, à Vaise, jusques
au pont qui sépare cette commune de celle de
St Didier. On placerait les arbres entre le che-
min et le fossé, et par le curage de celui-ci,
on nivèlerait le terrain , tout en procurant aux
jeunes müûriers un excellent engrais. La ligne
de plantation étant d'environ 1030 mètres, on
pourrait y planter au moins 154 pieds d'arbres,
Sur un ouvra-
ge relatif à la
culture du mü-
rier;par M. Bo-
nafous , rap-
porteur M.
Faissolle.
“66 Société royale .d'Agriculiure
qui, dès la sixième année, donneraient chacun
pour 3fr. de feuilles, ce qui procurerait à la
commune de Vaise un revenu annuel de 450 fr:
Notre confrère vous a soumis un autre projet
de plantation : celle de deux lignes d'érables pla-
taniers sur le quai de Bourgneuf, depuis la
fontaine qui est en face de la rue de l'Epine,
jusques à la hauteur de l'atelier de forges du
sieur Garnier. La longueur de cet espace est
de 427 mètres; sa largeur varie de 20 à 26.
Comme il suffit de celle de ro mètres pour les
routes de première classe , il serait facile d'établir
sur le quai de Bourgneuf un trottoir garanti par
des chasse-roues, et faire de ce trottoir une pro-
menade agréable, en ie bordant de deux lignes
d'érables plataniers ; ces arbres espacés à six
mètres , seraient au nombre de 142.
Si ce projet était adopté, l’entrée de Lyon,
par les deux routes de Paris, n’ofirirait pas un
aspect moins riant que celui qui frappe le voya-
geur arrivant dans nos murs par le quai St Clair.
Le même Confrère vous a fait connaître, par
un rapport judicieux, un mémoire sur les mû-
riers , que M. Bonafous , votre correspondant à
Turin, vous avait soumis. (1)
Les autres membres de la Commission étaient MM. Balbis,
De Martinel , Madiot, Billon et Groguier.
de Lyon. : 67
D'après ce rapport vous avez jugé Pouvrage
très-digne d’être publié sous vos auspices. Le pu-
blic l'a accueilli avec reconnaissance. Quoiqu'il
soit connu , je ne dois pas me dispenser d’en
rappeler quelques-uns des principaux traits , tels
que M. Fuissolle les a signalés à votre attention.
En examinant en chimiste la feuille du mü-
rier, M. Bonafous y a reconnu une substance
sucrée qui sert à nourrir le ver , et une matière
résineuse qui fournit les élémens de la soie. IL a
retiré de l'écorce 1.° cet acide encore inconnu
dans sa nature , qu'on a nommé morique ; 2.° de
la filasse analogue à celle du chanvre. On se rap-
pelle que M. Madiof avait précédemment exa-
miné cette substance textile, et qu'il avait dé-
montré qu’elle était capable de prendre à la
teinture plusieurs belles couleurs.
. Parlant de l'éducation de l'arbre, M. Bonafous
donne un conseil que M. le Rapporteur regarde
comme important , c'est d'employer pour le ré-
cépage , des tenailles à mâchoires bien tran-
chantes , au lieu de serpettes dont les coups im-
priment à la jeune tige un ébranlement qui se
communique à des racines encore très-délicates.
L'auteur veut qu’on grefle les jeunes plants
avant de les mettre en pépinière; il propose de
pratiquer l'opération en chalumeau, et le plus
près possible des racines. Il a observé que les
63 Sociélé royale d'Agriculture
plants qui ont resté trop long-lemps en pépi-
nière réussissent rarement à la transplantation ;
il a vu les mauvais effets d'une taille inconsi-
dérée, sur-tout quand elle était faite dans Île
temps où la sève est en mouvement. Parta-
geant l'opinion de M. Chance, il conseille forte-
ment de substituer des müriers nains aux arbus-
tes dont on forme les haies. On éviterait par là
des nuées dechenilles dévastatrices , et on aurait
des feuilles tendres pour la nourriture des vers à
soie nouvellement éclos. La cueillette de la feuille
+ exige, selon M. Bonafous , des soins attentifs ;
Sur la culture
des müriers et
l’édueation des
vers à soie; par
M. Chancey.
selon lui et d'autres agronomes , l'effeuillaison
doit être complète ; mais il est dangereux de
la pratiquer deux fois dans la mème année; et
n'eût-on fait aucune récolte au printemps, ilne
faut pas arracher des feuilles en août, comme
on le pratique en certains pays, pour nourrir
le bétail ou lui faire litière.
Parmi les propagateurs d’un arbre éminem-
ment précieux, on doit placer au premier rang
notre respectable confrère M. Chancey. Ce nestor
des agronomes Lyonnais ne borne pas à la pro-
vince sa sollicitude philantropique, c’est encore
aux cultivateurs du Bourbonnais qu'il recom-
mande avec force la culture du mürier ; il vous
a communiqué un mémoire sur ce sujet adressé
1
de Lyon. 69
à la Société d'agriculture de Moulins ; et comme
plusieurs des vues qui y sont exprimées peuvent
s'adapter à notre agriculture, je dois les rappeler
ici en peu de mots.
Sur les bords de l'Allier comme sur les rives
du Rhône, la révolution à fait disparaître les
müriers : tout en sollicite le prompt rétablisse-
ment. Le prix des cocons est double de ce qu'il
était en 1789; nous possédons le moyen de filer
la soie à la vapeur, celui de désinfécter les
magnaneries , nous pouvons trouver dans la pro-
pagation de la race des vers à soie blanche d'in-
calculables avantages. M. Poidebar, notre con-
frère , qui élève cette race, fait la plus belle soie
du royaume ; il la vend 75 fr. la livre, et chaque
once de graine lui fournit de 80 à 100 livres
de cocons.
Nous n'avons pas à craindre pour nos mûriers
la rigueur des frimats; ceux de ces arbres qui
avaient échappé à la hache, ont résisté aux hivers
de 1789, 95 et 99, qui furent si funestes à nos
vignes, à nos noyers eb même à nos arbres
fruitiers.
Si dans les départemens du Rhône et de l'Allier
les mûriers n’ont rien à craindre de la tempé-
rature , ils soufirent beaucoup par l'effet d'une
effeuillaison inconsidérée. Aussi M. Chancey ne
s'oppose pas seulement à ce que ces arbres soient
70 Societé royale d'Agriculture
dépouillés deux fois dans un an, mais encore
à ce qu'ils le soient toutes les années ; il veut
que sur les montagnes , où les hivers sont pré-
coces , la récolte des feuilles n'ait lieu en général
que tous les deux ans ; et comme alors , dit-il,
elle serait presque double, on pourrait , en sui-
vant cette méthode, et sans augmenter le nombre
de ses müriers , élever la même quantité de vers
à sole.
La plantation de mûriers sur le flanc des
montagnes de notre département serait aux yeux
de notre confrère une importante amélioration.
{1 croit que ces arbres y remplaceraient avec
avantage la plupart des vignes. En eflet, dit il,
la récolte en soie n’y manquerait qu’une fois en
dix ans , Si l'on y suivait le principe de Dandolo ,
tandis que les bonnes récoltes en vin , quel
procédé de culture et de vinification qu'on adopte,
seront toujours fort rares. Comme c'est en haie
qu'on y disposerait les mûriers , ils serviraient
à retenir les terres; une plantation d'un hec-
lare donveraït assez de feuilles pour élever dix
onces de graines ; on y ferait en outre tous les
cinq ans des coupes pour avoir des échalas et
des fagots.
Des haies de müûriers existent près de Mont-
merle , on en loue la feuille à raison de Sfr. le
mèfre ce qui donne un produit de 5oof. par hectare.
de Lyon. 7T
Veut-on que ces mûriers soient vigoureux et
touflus , qu’on les taille immédiatement après
la cueillette des feuilles, et qu’on leur donne
pour engrais la litière des vers qu'ils ont nour-
ris. Il est prouvé qu’une éducation de dix onces
laisse pour résidu 74 quintaux de litière.
Qu’on se pénètre bien que dans les pays un
peu froids, les filières de l’insecte étant plus
resserrées , il doit en sortir une soie plus five,
plus nerveuse. Ce n'est pas dans la plaine mais
_sur les côteaux que se forme la belle soie qui
nous vient du Piémont. C’est auprès du Bourg-
Arvental , sur les flancs du Mont Siché, à une
élévation trop grande pour la vigne, qu’on ré-
colte de la soie blanche qui, pour l'éclat et la
finesse , rivalise celle de M. Poidebar. Cette soie
blanche est-elle due à une race de vers créée ik
y a quarante à cinquante ans par Mad. Matton
de Fougère, qui pendant longues années fut
attentive à choisir les plus beaux cocons blancs
de ses récoltes ? ou devons-nous cette soie à une
race qüe M. Bertin fit venir de la Chine pen-
dant son ministère ?
Quoi qu’il en soit , cette soie du Bourg-Ar-
gental est depuis long-temps très-recherchée ,
elle se paye de 60 à 75fr. la livre , et elle s'est
encore améliorée depuis qu'on la file à la ma-
‘ chine à vapeur de M. Gensoul.
72 Société royale d'Agriculture
On croit communément que c’est dans le midi
que les éducations des vers à soie sont les plus
certaines; il est prouvé néanmoins qu'en Lan-
guedoc on a eu dans l’espace de 21 ans 8 bonnes
récoltes , 6 médiocres, 7 mauvaises ; tandis que
. dans le même temps, on a obtenu près de Mou-
lins, 12 bonnes récoltes, 6 médiocres, 3 mau-
vaises. M. Chancey pense que dans presque toutes
les contrées du département du Rhône cette
proportion ne différerait pas sensiblement; et
c'est par cette considération qu'il a terminé son
intéressant mémoire.
Partout où croît la vigne, on peut aisément
cultiver le mürier , et de plus cet arbre végète
avec vigueur sur tel sol où la vigne languit.
La vigne couvre une très-grande partie du
centre et du midi de notre belle France; elle
nous fournit un objet important d'exportation.
Il n’en est pas de même du müûrier ; telle est la
rareté de cet arbre dans nos campagnes , qu'il est
bien loin de nous fournir les moyens de nous
alranchir du tribut que nous payons à létran-
ger, pour l'importation de la matière première
de nos plus riches manufactures; peut-être cul-
Uvons-nous trop de vignes, mais certainement
nous n’élevons pas assez de müriers.
Que de terrains où l'on ne peut songer à plan-
ter des vignes, pourraient se couvrir de müriers !
de Tyon. 73
Combien de vignobles misérables seraient rem-
placés avec avantage par des plantations de l'arbre
qui nourrit le ver à soie |
Tout en recommandant avec sollicitude la
propagation des müriers, nous devons conseïller,
non l'extension des vignes, mais le perfection
nement et l'économie de leur cullure.
‘Tel est l’objet d'un mémoire qui vous a été
soumis par M. Rubat, et sur lequel M. J'anson
l'atné vous a fait un rapport plein d'intérêt.
L'agronome mäconnais propose de substituer
aux méthodes usitées pour le renouvellement de
la vigne un procédé plus économique et plus
expéditif. Il consiste dans le recouchage complet
des vieilles souches. Dès lors, dit-il, on n’est
pas tenu d'acheter de nouveaux plants, et l'on
n'éprouve aucune interruption de produits entre
la destruction d'une vieille vigne ét le plein
rapport d'une nouvelle. Cette période de stéri-.
lité n'est pas moindre selon lui de sept où huit
ans, pendant lesquels on fait des frais considé-
rables sans aucun dédommagement.
Dès l'année 1813, l’auteur a renouvelé ses
vignes par ce procédé, et il a obtenu des récoltes
presque égales à celles que donnent les jeunes
plants; ses ceps rajeunis depuis dix ans ont l’air
de ceps de même âge, et rien n’annonce leur
Rapport sur
un Mémoire de
M. Rubat, re=
latif au renou-
vellement de la
vigne ; par M.
Janson l’ainc.
74 Société royale d'Agriculture
prochaine décadence. Un pareil succès, ajoute
l’auteur , a engagé plusieurs cultivateurs du voi-
sinage à suivre cet exemple. Quelques-uns se sont
bornés au renouvellement partiel ; mais M. Ru-
bat trouve beaucoup plus avantageux le renou-
vellement intégral. Voici son procédé.
« Supposee la distance des ceps de vingt-six
» pouces , on tirera un cordeau entre les deux
» premières chaponnières ; c’est-à-dire, à 13
» pouces de chacune , et tout le long de ce cor-
» deau, de 26 pouces en 26 pouces, on fera
» un creux destiné à recevoir la recouchée; cela
» fait, on déracine chaque cep jusqu'à quinze
» pouces , on le couche avec précaution, et on
» le fait ressortir dans le creux préparé le long
» du cordeau. Le sarment recouché devient bien-
» tôt le cep primitif , l'ancienne souche se pour-
» rit et sert d'engrais. »
« Cette première ligne couchée, on en ouvre
» une deuxième entre la seconde et la troisième
» chaponnière ; et la terre extraite de cette nou-
» velle tranchée sert à combler la première. »
Quant à l'époque de l'opération , l'auteur pré-
fère le printemps sur les terrains argileux , l'au-
tomnesu r les siliceux.
Après avoir fait connaître avec tous ses dé-
lails le système de M. Rubat, M, le rapporteur
s'étonne que mis en pratique depuis dix ans, il
de Lyon. 79
ne se soit pas propagé davantage dans le Mä-
connais et le Beaujolais; il a de la peine à croire
qu'un cep languissant, prêt à être arraché, puisse,
par la recouchée, donner lieu à une tige vigou-
reuse , il voudrait comparer à neuf ans une vigne
ainsi renouvelée , avec un plantier de même âge,
et surtout mettre en parallèle leurs produits. Il
ne pense pas , avec l'auteur , qu’en suivant la
méthode ordinaire , il y ait, pendant buit ans,
nullité de produits. Ne peut-on pas en eflet,
obtenir dans les quatre premières années deux
récoltes de blé et deux de trèfle; et le profond
minage qu’on fait ensuite ne rajeunit il pas en
quelque sorte le fonds? et ce dernieravantage peut-
on l'obtenir par la méthode proposée ? On con-
vient qu'en suivant la marche ordinaire , trois
années sont perdues pour le produit ; ce sont
celles de l'enfance de la plante; mais aussi le
sol se repose dans cet intervalle, et il prépare
les récoltes souvent prodigieuses des premières
années de plein rapport.
Quant au procédé mécanique de recouchage,
tout simple qu'il paraît , il exige plus de soin,
plus d’aitention qu'on ne peut en attendre des
vignerons ordinaires.
Postérieurement au rapport dela commission,
M. Rey - Monléan vous a fait parvenir de sa cam-
Sur le pro-
cédé de M. Ru-
bat ; par M.
Rey-Monléan.
76 Sociélé royale d'Agriculture
pagne quelques notes sur le procédé de M.
ÆRubat. Cette méthode, ditil, n’est pas nou-
velle , Rozier l’indiqua, et l'essai en fut fait en
1791 à la Duchère , près Lyon, chez M. De
Varax-de-Gages. Les funestes événemens de
l'époque ne permirent pas de suivre cette expé-
rience. Notre respectable confrère pense que le
recouchage des vieilles vignes convient mieux
dans les plaines que sur les côteaux , lorsque l'in-
tervalle entre les chaponnières est au moins de
26 à 28 pouces, lorsque le cepage est uniforme;
mais sur les côteaux du département du Rhône
où l'on plante la vigne à la distance de 22 à 23
pouces ; cette méthode présente selon M. Rey-
Monléan , deux inconvéniens. Le premier résulte
de l'insuffisance d’une largeur de onze pouces au
fossé dans lequel on couche la mère du cep nou-
veau, il est difficile alors de ne pas endommager
le chevelu des racines. Le deuxième inconvé-
nient, c’est le peu de profondeur du fossé à creuser
pour déchausser le cep primitif; cette profondeur
n'étant, selon le procédé, que de 15 pouces,
les sarmens dont les bourgeons enterrés doivent
donner les racines , lors de la séparation au bout
d'un certain temps, ces sarmens ne pourront
jamais se trouver qu'à onze ou douze pouces au-
dessous du sol, et ils ne pourront résister à un
. froid long et rigoureux, comme celui de 1819,
de Lyon. 27
qui pénétra jusqu'à 18 pouces de profondeur,
et rendit pendant deux ans les récoltes presque
nulles. De cette considération M. Rey-Monléan
conclut qu'aucune plantation de vignes ne doit
avoir lieu à moins de 18 à 20 pouces.
Il ne pense pas, avec M. Aubat, que le cep
primitif se désorganise en peu de temps pour
fournir un engrais au cep régénéré ; il croit au
contraire qu'il est long à périr, et que dans cet
intervalle il s’approprie, en pure perte, des sucs
de la terre.
Ainsi, quoique M. Rey-Monléan connût le
procédé de recouchage long-temps avant que M.
Rubat en eût parlé, il n’a pas cru devoir le
mettre en pratique, et il s’en tient, pour renou-
veler ses vignes, à la méthode qui suit :
Il arrache les vieux ceps, en pratiquant un
minage de 20 à 21 pouces ; il purge soigneuse-
ment le terrain ; ( le bois mort paye la façon }; il
cultive avec famure complète, la premièreannée,
des plantes sarclées ; la seconde du froment, dans
la troisième nouveau minage, et immédiatement
après planialion selon la méthode de Duhamel.
Deux ans après, les jeunes ceps présentent une
végétation vigoureuse , et déjà ils donnent des
raisins; au bout de quatre ans la récolte est
passable; six ans au plus tard après l'arrache-
ment des vieux ceps, les vignes sont en plein
Nouvelles ob.
servalions sur
leprocédé Ger-
vaisien par Je
méme.
78 Société royale d'Agriculture
rapport ; et dans cet intervalle, qui est moins
long que ne l’avait indiqué M. Aubat, on n’a
pas éprouvé cette nullité de produit dont nous
menace l’agronome mâconnais.
Cependant comme le procédé par recouchage
peut convenir sur certains sols où l'on peut creu-
ser profondément les fossés, les élareir et les
espacer à volonté ; comme certaines espèces de
plantes peuvent s’accommoder particulièrement
de ce mode de renouvellement, nous ne devons
pas nous hâter de rejeter une pratique qui a
attiré l'attention du comice agricole de Saône et
Loire, et attendre , pour asseoir un jugement
définitif , des expériences plus nombreuses , des
documens plus sûrs , et les résultats d'ane dis-.
cussion calme et désintéressée.
Que d’expériences n’ont pas été faites dans
tous les cantons vignobles de la France, sur le
procédé Gervaisien ! Quelle est la pratique agri-
cole qui a eu plus de panégyristes enthousiastes ;
et plus de détracteurs |
Cette discussion eùt-elle été si vive, ‘si des
intérêts étrangers à ceux de l’agronomie ne
l'avaient pas animée? Aussi pensez-vous avec
M. Rey- Monléan, que s'il est vrai que le
procédé Gervaisien offre de grands avantages ,
ce n'est point par des licences , des droits exclu-
de Lyon. 79
sifs de vente, mais par une récompense nationale
qu'il fallait en rémunérer l'inventeur : dès lors
on n'eût pas vu de mercantiles spéculations danS
les éloges pompeux qu'on a prodigués à une mé-
thodeagronomique dans les efforts combinés aux-
quels on s’est livré pour la propager, dans les
moyens de genres différens qu’on a mis en usage
pour en assurer le succès.
Sans examiner s'il ne serait pas digne d'une
grande nation de substituer d’honorables distri-
butions de récompenses au système fiscal de bre-
vets d'invention, nous gémirons du moins de
voir que ce système ne se bornant pas à l'industrie
manufacturière, cherche encore à envahir l’agri-
culture.
En effet, Messieurs, supposons à l'appareil
vinificateur tous les avantages qu'on lui a attri-
bués , ne devrait-il pas être à la portée du pauvre
vigneron qui cultive à moitié fruits , et du petit
propriétaire pour lequel la vigne n’est qu’un objet
de culture secondaire?
Et si ce procédé est nul ou peu favorable, on
doit s'élever contre lui avec d'autant plus de vé-
hémence qu’on le préconise avec plus de chaleur,
et qu'on s’obstine davantage à l'imposer comme
une espèce d'impôt. ,
Il est probable , au reste, que dans cette
discussion , comme dans la plupart de celles
80 Société royale d'Agriculture
qui divisent les hommes, la vérité réside entre
les opinions extrêmes. |
Quoi qu'il en soit, je dois, d’après la mission
que vous m'avez confiée , consigner dans vos an-
nales les faits qui vous sont communiqués , sur-
tout lorsque partant d'une source qui vous est
connue , ils ne peuvent vous donner aucun soup- .
çon d'inexactitude. Tels sont les résultats d'une
expérience à laquelle s'est livrée M. Rey-Monléan,
dans le mois de septembre 1822, sur la méthode
Gervaisienne. Il a opéré en présence de deux
vignerons de St° Foy et de son jardinier.
Deux cuves avaient été mises en comparaison.
L'une d’elles a été gouvernée d’après les procédés
ordinaires , l’autre selon la méthode Gervaisienne.
Procès-verbal de lopération , jour par jour , vous
a été adressé. Cette pièce n’est pas susceptible
d’analise, et je dois regretter de ne pouvoir l'in-
sérer ici textuellement ; vous en avez ordonné le
dépôt honorable dans vos archives pour ÿ avoir
recours au besoin.
Quant aux résultats définitifs , les voici : Bé-
néfice en quantité d'après l'appareil Gervaisien ,
10 p. °/, et de plus un vin secondaire , supé-
rieur de beaucoup à la piquette qu'on a fabriquée
partout cette année. C'est pour prouver ce dernier
fait que M. Æey-Monléan vous a adressé un
échantillon de cette piquette : réellement , elle
de Lyon. 8r
vous à paru de fort bonne qualité; et vous lui
avez trouvé le goût du vin mêlé avec de l’eau.
M. Rey-Monléan vous a envoyé d'autres échan-
tillons comparatifs, et vous les avez examinés
avec attention dans votre séance du 7 févier 1823.
L’un était d’un vin obtenu par la méthode ordi-
naire, dans l’expérience de l’auteur , en septembre
1822; l’autre, d'un vin fabriqué comparative-
ment par l'appareil Gervaisien ; vous avez donné,
sous tous les rapports, la préférence à ce der-
nier; il est vrai que l’autre avait un goût peu
agréable , indépendant de sa qualité, et tenant au
tonneau ou à d’autres causes.
Mais comme on pourrait croire que l’appa-
reil Gervais ne présente d'autres avantages que
ceux que depuis long-temps on a reconnu dans
les cuves couvertes, et tel est le sentiment des
chimistes œnologues; c'est pour répondre à cette
assertion que M. Rey-Monléan a soumis à votre
examen deux échantillons de vin, fabriqué en
1821 , l'un à St° Foy, chez M. Périsse, dans
une cuve couverte; l’autre, en même temps
et au même lieu, dans un appareil Gervaisien.
Le premier a paru assez agréable, quoique de
qualité médiocre; le second était plus âpre, mais
avait plus de feu.
Ces résultats, quoiqu'inférieurs aux promes-
ses fastueusement annoncées, sont encore très-
| 6
82 Societé royale d'Agricullure
au-dessous de ceux qu'on a obtenus en d'autres
lieux, dans le Mäconnais, par exemple. La
plupart des Œnologues regardent la question
comme jugée ; quelques-uns plus lents à se pra-
noncer , disent encore avec le poète latin:
Adhüe sub judice lis est.
de Lyon. 83
ART VÉTÉRINAIRE.
Du moment que M. Vatel fut attaché, comme
professeur , à l’école d'économie rurale et vété-
rinaire de Lyon, il dut ambitionner l'honneur
de vous appartenir. Il forma une demande d'ad-
mission, qu'il appuya d'un mémoire sur la fer-
rure des grands animaux domestiques , dans le-
quel il établit la nécessité d’avoir sur cette opé-
ration des connaissances exactes pour se livrer
avec fruit à la pratique de l'art vétérinaire.
M. Rainard vous rendit de ce travail le compte
le plus favorable , et M. Valel fut admis dans
votre sein.
Avant de déposer son mémoire dans le porte-
feuille de la Société, notre nouveau Confrère
la revu avec soin , il lui a donné de grands
développemens , il y a fait entrer des considéra-
tions sur le même sujet qu’il avait lues dans une
séance publique de l'école vétérinaire ; c'est par
conséquent un ouvrage tout nouveau , dont j'ai
à vous présenter ici une rapide analise.
L'auteur , avant d'entrer en matière, se livre
à quelques considérations sur l'art vétérinaire,
son objet et sa dignité; il cite ces mots de Végèce:
Sunt enim animalia post hominem , ità ars vete-
rinaria ; post medicinam secunda est.
Sar l'utilité .
de la ferrure
des grands ani-
maux domes-
tiques ; par M.
Vatel,
84 Société royale d'Agriculture
La maréchalerie lui paraît une branche essen-
tielle de cet art. On ne peut, selon l'auteur , re-
jeter ce fait , à moins de prétendre que la ferrure
n’est pas nécessaire aux solipèdes; et c'est pour
démontrer cette nécessité qu’il examine en na-
turaliste la conformation et la structure des pieds
dans les différentes espèces domestiques. Les
mammifères onguiculés, tels que le chien et le
chat, font leur appui, non sur des parties dures,
s’usant par le frottement ; mais sur des surfaces
molles, élastiques, se prétant aux inégalités du
sol, augmentant en épaisseur et en dureté lors-
que les frottemens deviennent plus considérables,
pourvu toutefois qu'ils n'aient pas lieu sur des
corps assez rugueux pour détruire les couches
épidermoïdes extérieures , à mesure qu’il s’en
forme de nouvelles.
Les mammifères à sabots, tels que l'éléphant,
le chameau, le bœuf et le cheval ont les pieds con-
formés de manière à résister plus ou moins au
frottement. Ceux de l'éléphant sont terminés par
un vaste matelas cartilagino-corné, entouré de
cinq sabots qui ne supportent l'appui que dans
les exercices violens. Chez le chameau , dont le
pied se divise peu profondément, en deux doigts,
cet appui se fait principalement sur un coussin
cartilagineux d’une grande élasticité ; ce n'est
que chez le bœuf et le cheval que le sabot porte
de Lyon. 85
à terre. Le premier de ces animaux, dont le
pied est fourchu , a sur l'autre un grand avan-
tage, celui que donnent la souplesse et l'élas-
ticité pour supporter un poids considérable, et
résister au frottement. L’ongle du cheval est
tout d’une pièce ; c’est principalement sur le
bord inférieur de ses parois , nommés muraille,
que se fait l'appui, et qu'a lieu le frottement ;
aussi l'usure doit-elle en être beaucoup plus ra-
pide que dans les pieds de tous les autres ani-
maux, sans que la réparation puisse lui être
proportionnée , d'autant que le frottement excité
par la sécrétion réparatrice n’a pas lieu comme
dans les onguiculés , sur la surface sécrétoire.
Après avoir établi ces faits sur des considéra-
tions anatomiques étendues, dont les détails,
quoique peu liés à son sujet , n'en sont pas
pour cela dépourvus d'intérêt , l’auteur jete un
coup d'œil sur le cheval de la nature ; comme
il ne porte que son corps et qu’il ne marche que
quand il le veut et là où il lui plaît, son sabot
s'use et s’exfolie de manière à conserver toujours
la même forme et le même volume; la muraille
perd de sa cohérence , elle se relève comme les
bords d’une cloche et tombe, la sole s’exfolie
par lames ou plaques, la fonrchetté se résout en
écailles farineuses , etc. Mais dans l’état de do-
mesticité, toute proportion cesse entre la des-
86 Societé royale d'Agriculture
truction et la réparation. De là la nécessité d'un
moyen artificiel de conservation.
Pour savoir si ce moyen était mis en usage
dans l'antiquité , l'auteur s'est livré à des re-
cherches historiques; il en a conclu que si la
ferrure n'était pas connue des anciens, ils avaient
du moins senti la nécessité de protéger par un
moyen quelconque les pieds du cheval , et même
celui du bœuf , celui du chameau. C'est ainsi
qu'Aristote conseille de mettre un soulier de cuir
aux pieds fatigués des chameaux ; que Columelle
veut qu’on place sous les pieds douloureux du
bœuf une semelle, sans doute de tige de genêt,
qu'il nommait so/ea sparta. Cette semelle fut de
fer , d'argent, même d'or du temps des empe-
reurs romains , comme le prouvent divers pas-
sages de Catule , de Suétone, de Pline, rapportés
par M. Vatel.
En quoi censistait cette chaussure , ce. solea
Jerrea, argentea , etc. ? C'est ce que l'auteur n’a
pas pu déterminer complètement, il s’est seule-
ment assuré qu'elle était fixée au pied par des
lanières , des courroies attachées aux paturons.
Nous lisons dans des traités anciens sur l'hip-
piatrique , que ces lanières déchiraient la peau,
et donnaient lieu à des ulcères fort graves; et c'est
sans doute pour obvier à ces inconvéniens , et
pour fixer plus solidement aux pieds la chaussure
de Lyon. 87
conservatrice qu’on a inventé la ferrure propre-
ment dite.
Si cet usage , qui remonte au 5° ou au 6° siècle,
n'est pas répandu partout; c'est, selon l’auteur,
parce qu'il est des pays comme la Perse, l'Ethio-
pie, la Tartarie, le Japon , les Colonies améri-
caines , où les chemins ne sont pas pavés , encore
dans ces dernières régions est-on souvent obligé
de recourir aux chaussures des anciens. C'est
ainsi qu'au rapport de Kempfer, les Japonais
mettent à leurs chevaux des souliers de paille
cordonnée , attachés. avec des cordes de la même
matière ; et comme ces sortes de chaussures doi-
vent s’user promptement , les voyageurs en ont
toujours provision, et on trouve à en acheter
dans tous les villages.
Les chemins des anciens étant formés de
pierres plattes , étant peu fangeux, usaient beau-
coup moins que les nôtres , l’ongle des chevaux;
et ces animaux n'étaient pas soumis à un travail
si pénible, et ils étaient traités avec plus de
douceur. C’est à ces causes , à l'influence du cli-
mat, des localités , aux écarts du régime plutôt
qu’à la ferrure qu'il faut , selon notre confrère,
attribuer un grand nombre de maladies qui sur-
viennent aux pieds du cheval, Ainsi la fourbure
chronique et tous les accidens que M. Bracy-
Clark regarde comme étant toujours les effets
88 Societé royale d’Agricullure
de la fourbure , peuvent être causés par deschocs
violens. La raison qu’en donne M. Watel, c'est
que ces affections arrivent le plus fréquemment
aux chevaux ardens qui trottent ou galoppent
sur le pavé.
On ne peut pas non plus attribuer à la ferrure
les javarts cutanés et les tendineux , les engorge-
mens des tendons , les enchevêtrures et toutes les
altérations du pied qui peuvent en être la suite.
La faiblesse ou la mauvaise conformation , et
non la ferrure, voilà la cause des atteintes de
toute espèce, des meurtrissures de la couronne,
des plaies du boulet , de celles du genou; les cra-
paudines, les peignes , les teignes et les seimes se
déclarent souvent aux pieds du cheval, sur-tout
à celui de l'âne , à celui du mulet qu'on n'a pas
encore ferrés. Il est rare qu'on puisse rapporter à
la ferrure les tumeurs osseuses , connues sous le
nom de forme, pas plus que l’étonnement de sa-
bot ,les déchiremens des tendons et des ligamens,
les fractures de l'os du pied et de l'os sesamoïde.
N'a-t-on pas vu la fourbure aiguë, dont les suites
sont souvent si funestes, survenir aux pieds non
encore ferrés de chevaux et de bœufs ? N'en est-il
pas de même des blessures de la sole et de la four-
chette , des foulures et des bléimes ? Peut-on at-
tribuer à la ferrure l'engravé qui survient non-
seulement aux bœufs , Mais encore aux chiens ?
de Lyon. 89
C'est à tort, selon M. Vatel, qu'on a dit que
l'usure du pied était la cause principale et pres-
que l'unique de la réforme des chevaux ; il pré-
tend que lorsqu'ils subissent cette ignominie ils
ont encore en général des sabots assez forts pour
donner attache à des fers. Mais c'est le principe
même de leur vie qui est usé par l'excès de fa-
tigue , la continuité des mauvais traitemens, et
tous les vices du régime.
Si la ferrure cause des accidens quand elle
est pratiquée par des mains ignorantes et mal-
adroites ; qu’elle le soit toujours par des artistes
habiles , et elle deviendra tantôt un moyen d'hy-
giène, tantôt un secours thérapeutique : et c'est
principalement dans les grandes villes, sur les
grands chemins, à la suite des armées que le vé-
térinaire maréchal est appelé à conserver , à re-
dresser un grand nombre de chevaux ; ses con-
naissances lui seront encore utiles pour résoudre
un grand nombre de questions judiciaires , sur
des causes de claudication.
Ce n'est donc pas sans motifs que le Gouver-
nement a voulu que la maréchalerie fit partie
de l'enseignement vétérinaire. Quelques person-
nes nesentant pas la nécessité de ces motifs, notre
Confrère a cru devoir les développer dans un
discours qu'il a prononcé à une séance de l'école
à laquelle il est attaché. Il y prouve que la plus
90 Société royale d’Agriculiure
grande partie des maladies du cheval ayant leur
siége aux extrémités , le vétérinaire maréchal
avait, pour traiter ces aflections, un avantage
immense sur le praticien étranger à la maré-
chalerie ; il démontre en même temps que l’ou-
vrier le plus habile , qui n’est point initié
dans les connaïssances physiologiques est hors
d'état d'appliquer la ferrure qui convient à cer-
faines circonstances déterminées. La dextérité
dans la main ne supplée point les lumières d'une
saine théorie,
Qu'on ne s'imagine pas, dit fort bien M. Vatel,
que l'intelligence d'un vétérinaire purement théo-
ricien, puisse diriger la main de l'ouvrier dénué
de théorie; un pareil accord est , pour diverses
raisons , à peu près impossible : car c’est particu-
lièrement dans la pratique de l'art vétérinaire
qu'il faut être à même d'exécuter ce qu’on com-
mande.
La maréchalerie ne se borne pas à la consi-
dération du pied , à celle de sa conformation et
de sa structure , elle recherche encore l'influence
de cet organe sur les mouvemens, sur la station,
sur toute l'économie du cheval; et pour déter-
miner cette influence, des connaissances étendues
ct précises sont indispensables ; c’est ce que M.
Vatel démontre jusqu'à l'évidence , d'après les
principes de Bourgelat, et il en conclut le service
de Lyon. 91
éminent que rend le vétérinaire maréchal , non-
seulement pour conserver l’ongle du cheval,
mais encore pour lui rendre l'intégrité, lorsque,
par l'effet d'une mauvaise ferrure, ou d’autres
causes , elle l'a perdue ; et de plus , pour redres-
ser des aplombs faussés , faciliter le jeu des ar-
ticulations dans beaucoup de chevaux , et rendre
leurs mouvemens plus faciles et plus sûrs.
Le cheval est, sans doute, suivant l'expression
du Pline français, la plus noble conquête de
l'homme ; mais le bœuf , mais le mouton sont
peut-être des conquêtes plus utiles:ce dernier
deviendra pour nous plus précieux encore, lors-
que sa race sera généralement perfectionnée.
C'est pour atteindre ce but que peu d'années
avant l'époque funeste de nos troubles civils,
plusieurs savans philantropes unirent leurs efforts
pour introduire et naturaliser en France la belle
race des moutons mérinos.
Parmi les propriétaires qui ont entendu la voix
de ces philantropes , et ont répondu parleur zèle,
il faut placer au premier rang M. De la Chapelle,
notre confrère , dont j'ai eu souvent occasion de
vous rappeler les améliorations agricoles de tout
genre.
M. De la Chapelle a bien voulu vous donner
une notice sur le nombreux troupeau de mérinos
Notice su
troupeau dk
Rouge ; par
de la Chapi
92 Sociélé royale d'Agriculture
qu’il nourrit dans ses domaines de la Rouge,
près Meximieux.
Après quelques considérations judicieuses sur
l'introduction dans notre patrie de la race des
moutons espagnols , sur les obstacles nombreux
qui s'opposaient à cette grande mesure , sur les
succès qui l'ont couronnée, l’auteur recherche
les causes qui , depuis quelque temps , semblent
compromettre ces succès , il les trouve princi-
palement dans les caprices de la mode, si natu-
rels augcaractère français. On voulait naguère des
draps qui eussent du nerf et du corps ; on de-
mande aujourd'hui des étoftes fines, souples et
moelleuses. Aussi ceux qui , dans l'éducation de
leurs troupeaux, se sont attachés à la force et
au tassé des toisons, ont perdu leurs soins;
a race même de Rambouillet , si renommée jus-
qu’à ce jour , n’a plus le même crédit; c’est au
point que les laines de cet établissement n'ont
pas trouvé d'acheteurs à la dernière vente pu-
blique. S'il faut en croire les manufacturiers,
c’est aux dépens de la finesse des toisons qu'on
a donné aux mérinos plus de volume et même
de plus belles formes. Les propriétaires qui, par
le choix des étalons les plus grands et les mieux
conformés , ainsi que par la dispensation d'une
nourriture trop substantielle, ont peut-être trop
imité le régime de Rambouillet, se trouvent
avoirsuivi une fausse direction.
de Lyon. 93
À vette cause de discrédit des laines mérinos,
signalée par M. De la Chapelle , nous pourrions
en ajouter d’autres non moins puissantes ; mais
nous devons nous borner à présenter l'analise
de la notice des troupeaux de la Rouge. Nous
retrancherons fort peu des détails donnés par
notre Confrère , et souvent nous nous servirons
de ses propres expressions.
« Mes troupeaux, dit-il, tirent leur origine
d’un faible détachement de celui que M. Gilbert
avait importé lui-même pour former un trou-
peau de choix dans le parc de Malmaison ; ül
appartenait à la race nommée du Pollard , élevée
originairement par des moines de ce nom, adoptée
ensuite par le prince de la paix , et l’une des plus
fines des cavagnes léonnaises. M. Gilbert avait
conservé pour son compte une partie du troupeau
de son importation ; à sa mort, j'eus le bonheur
d’en avoir quelques individus. Le bélier que je
me procurai fut allié avec des brebis que j'avais
acquises lors des importations ordonnées par le
Gouvernement. C'est de cette souche que sortent
onze cents bêtes de race pure que je possède ac-
tuellement. Le lainage de ces animaux, plus
petits que les autres mérinos , l'emporte pour la
finesse et le soyeux; mais elle est inférieure
pour le poids, elle a la qualité que l’on préfère
en ce moment pour les mänufactures des draps
superfins et des étoffes de goût. »
94 Société royale d'Agriculture
» Je tiens de plusieurs manufacturiers un
fait qui prouve que les laines des mérinos indi-
gènes n’ont point dégénéré toutes les fois que
les propriétaires se sont plus attachés à la finesse
de la laine qu’à sa quantité et aux formes des
moutons. On préfère aujourd'hui , m’a-t-on dit,
les primes de France et de Saxe aux laines ve-
nant directement d'Espagne. Celles de Saxe qui
sont si estimées , proviennent de la même source
que les nôtres , elles ont été importées à la même
époque , et leur réputation s’est soutenue par le
choix des béliers. »
L'auteur parle ensuite de diverses maladies
qui ont assiégé son troupeau , telles sont le cla-
veau, la maladie des pieds, la pourriture, la
gale , le tournis , la météorisation , le muguet,
le coup de sang , les fractures, la morsure des
chiens , et d'autres accidens. Il a tenté sans suc-
cès l’inoculation de la vaccine contre le claveau ;
et la clavélisation même, pratiquée snr un petit
troupeau ne put empêcher la perte d'un hui-
tième ; le moment , observe l’auteur, n’était
peut-être pas favorable, peut-être aussi la ma-
ldie avait-elle un caractère malin ; et il déclare
que si le claveau se présentait encore dans ses
bergeries , il n'hésiterait pas à recourir à une
opération qui a le grand avantage d’abréger le
cours de la maladie.
de Lyon. à5
La maladie des pieds ou piétain s'est montrée
quelquefois dans son troupeau, mais elle n'a
pas fait de grands ravages , parce qu'il a eu l'at-
tention d'en arrêter les progrès ; l’auteur la re-
garde comme éminemment contagieuse , et il
lui a opposé l'acide sulfurique , remède recom-
mandé par M, Morel de Vindé,
La cachexie ou pourriture n'a jamais attaqué
ses troupeaux qui pâturent dans la plaine aride
de la Valbonne; il ne l’a vue qu’une fois chez
quelques bêtes qu’il avait confiées à un fermier
négligent , dans un domaine éloigné; elles avaient
été conduites , malgré ses recommandations, sur
des prairies humides ; mais comme M. De la
Chapelle les fit retirer promptement de ce lieu
malsain , un très-petit nombre périt , et les autres
se rétablirent sur des pâturages secs : on donna
quelques amers mêlés avec du sel.
De toutes les maladies qu'il aeues à combattre,
la gale lui a paru la plus redoutable ; il croit
qu'elle peut être spontanée, surtout lorsque,
pour exciter l'appétit, on a abusé des substances
stimulantes, lorsqu'on n'a pas donné assez de
boisson , et qu'on n’a pas défendu les mérinos
contre les effets de la malpropreté , de la fatigue,
des longues pluies.
Souvent, dit-il, on croit avoir guéri ce mal,
et on le voit reparaître plusieurs mois après le
96 Societé royale d’Agricullure
traitement. S'il attaque des bêtes communes, on
}:s vend au boucher ; maïs il ne peut pas en être
de même des mérinos et des métis.
La gale s'est présentée deux fois dans les ber-
geries de M. De la Chapelle. À la première , le
soufre fut employé intérieurement et en fric-
tions ; d'autres remèdes , donnés également
comme spécifiques , furent aussi mis en usage ;
le mal disparaissait pour se montrer de nouveau
tous les printemps. Le troupeau fut vendu à vil
prix, et celui qui l’acheta ne fut pas plus heu-
reux dans le traitement qu'il lui fit subir.
Les mérinos qui parurent avoir échappé à la
contagion , prospérèrent pendant plusieurs mois;
mais en juillet 1820, quelques boutons se mani-
festèrent sur le troupeau de béliers qui d’ailleurs
présentait le plus bel état. L’invasion de £ ma-
ladie fut si prompte , que malgré les soins qu’ on
avait eus d'isoler les premiers galeux , tout le
troupeau passa en peu de jours à l'infirmerie.
Ecoutons l’auteur rendre compte des moyens
qu'il mit en usage.
» Je fis alors une seconde tonte générale, afin
de pouvoir opérer plus facilement sur tous. Je
fis laver chaque animal avec soin dans une les-
sive où j'avais fait dissoudre de la cendre gra-
velée, combinée avec de la fleur de soufre. Le
soufre et la gentianne furent donnés intérieure-
de’ Lyon. + 97
ment. Je fis faire des frictions avec la graisse
blanche et la térébenthine, je n'obtins aucun
succès de ce premier essai ; la gale se montra de
nouveau à l'entrée de l'hiver ; le troupeau devint
hideux ; la laine se détachant partout , était rem-
placée par des croûtes épaisses et dégoûtantes ;
les animaux tombaïent dans le marasme, et pé-
rissant en grand nombre. J'essayai des frictions
avec l'onguent mercuriel, la térébenthine , les
cantharides incorporées avec la graisse blanche ;
je is encore usage d'un liniment composé de fleurs
de soufre, de verdet, de cantharides et d'huile
d'olive. J'observais la chute des croûtes dans quel-
ques animaux; mais bientôt la contagion s’éten-
dait avec plus de force ; aussi la tonte de l’année
suivante fut-elle presqu'entièrement perdue. »
» Enfin je surmontai ma répugnance contre
un remède violent, proposé par M. Tessier. Et
sur l'assurance que M, Grognier , notre collè-
gue, me donna, qu'avec des précautions, il n’y
avait aucun danger à redouter, je me détermi-
nai à employer les bains d'arsenic et de coupe-
rose ; tout le troupeau fut lavé à deux reprises,
sous l'inspection d’un vétérinaire, et c'est à ce
remède que je dois la cure complète que j'ai
obtenue. Je dois dire que quelques boutons se
manifestèrent encore dans le courant de l’an-
née; mais que, grâces aux soins assidus d’un
7
58 - Société royale d’Agricullure
excéllent berger, et à l'huile de cade, dont il
portait toujours une bouteille, ces dérnières
traces de gale ont complètement disparu , et
mes troupeaux sont, depuis ce temps, dans le
plus bel état dé santé. . . . ...... S 47515
» Mon but principal a été de faire connaître
les remèdes qui m'ont réussi dans le traitement
de la gale, maladie que je regarde éomme la
plus désastreuse de celles qui attaquent les mé-
rinos ; je m'estimerai heureux , si mon éxpé-
rience peut devenir utile à quelques proprié-
taires , et les détourner de sacrifier trop promp-
* tement des troupeaux d'un prix élevé et qu'on
ne peut former que par des soins long-temps
prolongés. »
L’agronome habile qui vous a donné cette
communication, à bien voulu prendre l'enga-
gement de vous en offrir beaucoup d’autres, et
vous les recevrez toutes avec la même recon-
naissance,
de Lyon. 99
HISTOIRE NATURELLE.
Comme l'observe très bien M. Foudras, l'En-
tomologie est la branche de l'histoire de la
nature qu’on cultive le moins dans notre dé-
partement. On y voit très-peu de collections
d'insectes. Celle que possédait l’école centrale de
Lyon, celles qu'avaient formées MM. Faure-
Biguet, Sionnest et de Villers ont disparu. Ces
naturalistes avaient signalé dans les environs
_ de notre ville près de 3000 espèces, dont les
descriptions se trouvent dans /’Entomologia ,
publiée par M. de Villers, en 1789. Que de
découvertes ont été faites depuis cette époque !
La famille des Carabiques, ( La Treille ) qui
comprend les genres Cicindela et Carabus en
offre plus de 200 espèces, dans les environs de
Lyon, tandis que M. de Villers n’en a indiqué
que 155 dans l'Europe entière.
Notre département, l’un des plus exigus du
Royaume, est , selon M. Foudras , le plus abon-
dant en te: « Les montagnes de Tarare,
» dit-il, celles de Beaujeu, et même la chaîne
» des petites montagnes qui commence à l’Au-
» bepin et à Riverie, et s'étend par St.-André,
» Izeron et St,-Bonnet, jusqu'à Montrottier ,
» peuvent être considérées comme sous-alpines;
» elles sont habitées par un grand nombre
Notice sur
lesinsectes uti-
les et les insec-
tes nuisibles
du départe-
ment ; par M,
Foudras,
100 Société royale d'Agriculture
» d'insectes qu’on ne trouve que dans le nord
» de la France, et même sur les Alpes. Les
» côteaux arides que baigne le Rhône sont.
»el'asile d'un grand nombre d’insectes méridio-
» naux, surtout d'hyménoptères, qui recher-
» chent les expositions les plus chaudes pour
» y établir leur postérité. (1) »
» Les rives siblonneuses du même fleuve
» nourrissent à la fois des insectes très-méridio-
» naux, tels que le /ridaclilus variegatus (Lat.),
» qui y a été découvert par M. Bourgeois, et
» des insectes alpins, dont les débordemens du
» Rhône amènent de temps en temps, quelques
» émigrans qui finissent par acquérir l'indigénat
» auprésvdeyLyon 5,0 us due ay 0
» La partie entomologique de la Faune Lyon-
» naise pourrait être l'objet d'un travail impor-
» tant, qui comprendrait beaucoup d'espèces
» qu’on a cru jusqu'ici particulières à l'Alle-
» magne et à l'Italie. »
Qui mieux que M, Foudras est capable de
mener à fin cette entreprise ? Depuis nombre
d'années il cherche les insectes indigènes de
notre contrée ; etdu produit de ses explorations il
(1) Le Colonites apiformis. (Lat.) Le Matilla pedemon-
fana (Jur.), ont été trouvés à la Carrete et à Vassieux ;
aux portes de Lyon; on y rencontre aussi plusieurs Pom-
pilus et Scolia , le Gryllus ifalicus, ete,
de Lyon. 107
a formé un riche cabinet. En attendant le moment
d'offrir le tableau entomologique de ce départe-
ment, il vous a présenté une notice des insectes
utiles et des insectes nuisibles qui s'y trouvent.
Passant sous silence l’abeille et le ver à soie,
dont l'histoire est très-connue , il dit un mot du
Bombyx processionea (LL. }, qui file aussi une'es-
pèce de soie très-tenace, mais qui ne pourra jamais
être devidée comme celle du Bombyx mori (1) :
les chenilles du processionea filent en commun
leur soie , et l’entremélent d'excrémens et de
débris de feuilles. L'auteur pense qu’on pourrait
en tirer parti en la réduisant en filoselle, par
le cardage ; il propose de tenter en grand des
expériences à cet égard , dans les forêts de sapins
qui couvrent la partie occidentale et montagneuse
du département.
» Ilest, ajoute-t-il, un autre insecte qu'on
» devrait essayer de naturaliser dans le dépar-
» tement, car son produit s'élèverait probable-
» ment au-dessus de celui des céréales qu’on
» obtient dans certains cantons, c’est le Cocus
» polonicus (L.) vulgairement graine d’écarlate.
» Cet animalcule se fixe et se multiplie autour
» du collet de la racine du scleranthus perennis,
» plante très-commune dans les plaines arides
» de nos montagnes. »
(1) Ver à soie ordinaire.
102 Société royale d'Agriculture
On voit partout aux environs de Lyon la four-
mi fauve, Formica rufa, (EL. dont on extrait
Vacide formique ; la Formica fuliginosa , pourrait
également le fournir ; cette dernière se trouve
dans le tronc carié de presque tous les vieux
saules. Il est étonnant qu'aucun chimiste du dé-
partement ne se soit occupé de la préparation
de cet acide.
On pêche l'écrevisse dans presque tous les
ruisseaux du département qui, dans la saison des
chaleurs conservent un filet d’eau , tels sont PAr-
dière , l'Azergues, et même l'Arche qui prend
sa source à St-Cyr et à St-Didier au Mont-d'Or.
Mais la plus grande partie des écrevisses qu'on
consomme à Lyon viennent du lac de Nantua et
de la rivière d'Ain , qui en nourrissent une pro-
digieuse quantité.
Nos pharmaciens peuvent aisément s’appro-
visionner de cantharides ( Lyffa vesicatoria Lat.)
On rencontre ces insectes en colonies nombreu-
ses sur le frêne et même sur le lilas.
Le proscaräbée, scarabée des maréchaux, bu-
preste des anciens, (Meloe proscarabæus) bour-
donne dans toutes nos prairies pendant la plus
grande partie de l’année. Cet insecte avait autre-
fois beaucoup de réputation pour le traitement
des maladies du bétail.
Quant aux insectes nuisibles, ils sont dans
de Lyon. 103
notre département , comme partout ailleurs,
plus nombreux que ceux dont on peut retirer
quelques avantages.
Parmi les premiers , l'auteur signale lŒstre
du bœuf (Œstrus bovis Clarck ) qui détermine
des tumeurs que nos paysans nomment harches,
L'Œstre de la brebis (Œstrus ovinus ) qui cause
quelquefois le tournis ; l'Œstrus equi , Phémor-
rhoïdalis, et le veterinus Clarck , trois espèces
qui attaquent le cheval. *
Une douzaine d'espèces de /aons , nommés par
les paysans /avans , et l’hyppobosca equina ( L.),
qu'ils nomment cantharine , tourmentent aussi les
bestiaux ; les premiers sont communs sur nos
montagnes.
Au nombre des insectes ennemis des abeilles
sont des acares qui s'attachent à leur corps ; des
guëêpes qui les tuent , des teignes qui gaspillent
leur cire et endommagent leurs alvéoles.
La Vespa Gallica est beaucoup plus commune
chez nous que la vulgaris ; c'est elle qui pille
nos vergers et nos vignes en espalier. La guëpe
ou frêlon, qu'on nomme dans les environs de
Lyon Tône lombarde, consomme peu, car elle
se contente des fruits du frêne ; mais son aiguil-
lon est venimeux.
Le charançon du blé (Coladre granaria Lat. )
west point indigène de nos contrées, il y vient
104 Sociélé royale d'Agriculture
avec les blés de la Bourgogne ; cet insecte étant
aptère , on peut en isoler les ravages.
La Bruche ( Bruchus pisi., L.) que nous ap-
pelons trivialément gourguillon et qui se loge
dans les pois , les vesces , les légumes , est très-
commune dans nos jardins.
L'Anobium paniceum Lat. , gâte les pâtes , les
composés de farine , les pains à cacheter, même
les grains qui ont plus d’une année. Tous les
autres sont attaqués par la Tinea granella L.
Après ces détails et quelques autres que nous
supprimons à regret, Pauteur nous fait connaî-
tre en ces termes une découverte de l'un de nos
confrères :
» ML. le colonel de Martinel qui s'occupe beau-
» coup de céréales, a découvert dans les bo-
» caux qui renferment des échantillons, une
» teigne toute rousse, qui s’y était prodigieu-
» sement multipliée. Cette teigne ressemble
» beaucoup à celles des pelleteries ; mais elle ne
» se construit pas de fourreau ; elle file irrégu-
» lièrement autour des semences qu’elle attaque. »
Contre les insectes ennemis des céréales, M,
Foudras ne connaît d'autres moyens que le cri-
blage. Il passe à ceux qui attaquent la vigne: le
nombre en est grand , et la plupart sont décrits
dans les livres d'agriculture sous des noms tri-
viaux , faciles à ramener à la nomenclature sys-
de Lyon. 105
tématique ; il faut en excepter néanmoins le
plus funeste de tous, la pyrale; car on a con-
fondu sous ce nom, avec les vrais pyrales , des
tortrix , des feignes , des aluciles ou plérophores.
Ce cahos n'a pas été débrouillé dans le mémoire,
fort bon d'ailleurs, que MM. Faure-Biguet et
Sionnest présentèrent à la Société en l’an 10 , et.
qui fut publié sous ses auspices.
Ces naturalistes sont les premiers qui ayent
signalé nettement comme très-nuisibles à la
vigne 1.° un charançon gris (Curculio incanus )
qui ronge les bourgeons nouvellement dévelop-
pés; 2.° la teigne de la grappe ( Omphaciella’) qui
dans certains vignobles avait seule détruit le
tiers de la récolte.
Les insectes qui suivent avaient été mieux
étudiés, tels sont la chape de la vigne , ( pyralis
villanna P.) dont ilest parlé dans les mémoires
d'agriculture de Paris (année 1786, trimestre
d'été ); la pyrale de Florenzac, décrite par M.
Draparnaud, dans un rapport présenté en l'an 9
à la Société d'agriculture de l'Hérault.
Malheureusement il est plus facile de décrire
les insectes vignivores que d'en arrêter les ra-
vages. Aussi MM. Faure-Biguet et Sionnest n'ont-
ils pu proposer qu’un échenillage souvent impos-
sible. C’est une mesure de même genre que pres-
crivit M. le comte de Bondi, préfet du Rhône en
166 Société royale d'Agriculture
1811, pour réprimer une chenille qui n’était
point la pyrale de Florenzac , comme on le cro-
ait, mais la Pyralis viltana Fab.
D'autres moyens également insuffisans furent
proposés par M. Arihaud de la Ferrière, notre
confrère, et nous cherchons toujours les plus
efficaces.
Ce n’est guëre sur les vignes, mais fréquem-
ment sur les saules de nos contrées , que se trouve
le Melolontha vitis.
Quant au Welolontha vulgaris , hanneton com-
mun «ilest, dit l’auteur, commun et très-
» nuisible dans ses deux états de larve et d’in-
» secte parfait ; larve, il détruit les plantes
» potagères , dont il coupe la tige à fleur de terre;
» les racines et même les arbres ne sunt pas à
» l'abri de ses dents. Insecte parfait, ilconsomme
» au printemps les fleurs et le feuillage de tous
» les arbres indistinctement , et même les bour-
* geons de la vigne. Si on secoue dès le matin, les
» arbres couverts de hannetons , les insectes sur-
» pris se laissenttomber lourdement, et ilest facile
3 à l'aide d'un drap étendu à terre, de ne pas en
» perdre un seul. Un agriculteur soigneux pour-
» xait, dans une seule matinée, en faire ramas-
» ser plusieurs boisseaux, et se procurer, par ce
» moÿen, un engrais puissant, comme le sont
» toutes les matières animales; on ferait périr
de Lyon. 107
» les hannetons dans un tonneau défoncé , à
» moitié rempli d'eau. Le même procédé serait
» appliqué à un grand nombre d’autres insectes
» nuisibles, et aux limaçons. »
Passant à la description des insectes ennemis
des bois et des haies, M. Foudras rappelle un
travail sur le même sujet, communiqué en 1818
à la Société par M. De Martinel (1). Postérieu-
rement à cette époque, en 1820 et 1821, les
bois des environs de Lyon, et particulièrement
ceux de Calvire , Tassin et Charbonnieres, les
haies de la Guillotière, et les treilles de Villeur-
banne et de Bron (Isère) furent dépouillés de
leurs feuilles , et mis à nu comme dans l'hiver.
Les arbres fruitiers ne furent pas épargnés ;
l'auteur de ces ravages fut la chenille commune
(Bombyx chrysorrhæa ).
Et à ce sujet l’auteur observe que « l'échenillage
» prescrit chaque année par des arrêtés publiés
» et affichés , demeure plus que jamais impuis-
» sant contre cette multitude d’ennemis. Cette
» opération à laquelle le paysan et le fermier ne
» se livrent qu’à regret , précisément parce
» qu’elle leur est ordonnée, ne s'exécute point
» dans beaucoup d'endroits, et presque partout
(1) Voyez compte rendu des trayaux de ja Societé, pour
1818, page 198 et suiv.
108 Société royale d'Agriculture
elle ne s'exécute qu'à demi ; au lieu de faire
brüler le nid des chenilles , le paysan les jette
sur les chemins , d'où ces animaux pernicieux
savent bien regagner les haies et les arbres
qui doivent leur servir de proie. Les contra-
ventions aux arrêtés des préfets et des maires
sur l’échenillage restent toujours impunies. »
» Pour faire réussir l’échenillage, il faudrait
joindre aux injonctions administratives les
exhortations pastorales. Pourquoi MM. les
Curés ne prêcheraient ils pas comme un de-
voir l’échenillage , pour conserver les fruits que
le ciel nous envoie ? Une croisade pieusement
dirigée contre les chenilles , occuperait chaque
dimanche et chaque jour de fête, à certaines
heures, des milliers d’individus que l'oisiveté
porte trop souvent à des actions dont la reli-
gion s'attriste et s’offense. . . . .. ......
Heureusement pour l’agriculture, le Bombyx
chrysorrhæa n’attaque ni la vigne, ni les céréa-
les, ni les légumes, ni même les prairies,
soit naturelles , soit artificielles. Les vergers
et les bois des montagnes en sont à peu près
exempts. »
La nature, au reste, plus puissante que
Thomme , met un terme aux ravages des che-
nilles , elle leur oppose les ichneumons dont la
multiplication est proportionnée à celle des in-
de Lyon. 169
sectes qui leur servent de pâture ; elle fait tom-
ber des pluies froides qui donnent à ces animal-
cules des diarrhées épizootiques. Aussi vit-on
disparaître en 1822, l'effrayante colonie qui,
l'année précédente , désolait nos bois.
Après cette chservation , l’auteur parle de la
chenille du Bombyzx dispar. L., dont les arbres
de la promenade de Bellecour sont ordinairement
couverts. Cet insecte pond ses œufs en un seul
tas , et les recouvre de poils roux ; on les aper-
çoit facilement , et si on les enlevaiten novembre,
on préserverait pour long-temps une promenade
agréable, des chenilles qui la déparent. On ne
saurait trouver aussi facilement le Bombyx neus-
fria (1) qui pond ses œufs autour des jeunes
pousses des arbres.
Les autres chenilles plus ou moins dificiles
à réprimer , dont M. Foudras a décrit les carac-
tères , sont le Bombyx cœruleo cephala , qui atta-
que les pommiers et les pruniers. Les Papilio
brassicæ, rapæ , cratægi ; les Tinea avonimella , et
padola. W à parlé ensuite d'une petite chenille
brune très-épineuse, qui apparut en 1806 contre
tous les murs de la ville : « Les poils venimeux dont
» elle était couverte, faisaient , dit-il, naître des
» ampoules sur Îles maïns délicates qui tou-
» chaïent l'insecte; quelques personnes toujours
» disposées à voir du miraculeux dans les moïn-
Considéra-
tions sur l’ex-
ploration dudé-
partement sous
110 Sociëté royale d'Agriculiure
»
dres événemens , considéraient cette irruption
de chenilles comme un effet du courroux cé-
leste. Un peu plus d'attention fit remarquer
que ces animalcules tiraient leur nourriture
de petis lichens et de petites mousses que deux
années pluvieuses consécutives , avaient fait
multiplier sur les toits. On en conclut que la
nature toujours sage, ne voulant rien laisser
inutile, avait dû augmenter le nombre des
consommateurs à mesure .de l'augmentation
des objets de consommation,
» La chenille dont il s’agit est celle de la 706;
lua complana L., petite phalène blanche qui
tient ses ailes roulées à la manière des teignes ;
on la trouve ordinairement contre le tronc
des chênes qu’elle délivre des plantes parasites
dont nous venons de parler. »
Quelques détails sur les sauterelles les plus
communes dans notre département , terminent
l'intéressant mémoire de M. Foudras, Ces insectes
sont les Gryllus germanicus, cærulescens , italicus,
et zigrofalciatus Lat. Il observe qu'ils ne sont
réellement incommodes que dans les petits can-
tons qui avoisinnent le Dauphiné.
Si l'entomologie a eu jusqu'ici.un petit nombre
de zélateurs dans notre province, il n'en est pas
de même de la botanique et de la minéralogie :
de Lyon. Titi
pour s’en assurer , il suffit de jeter un coup d'œil
sur la galerie nombreuse des naturalistes lyonnais,
que M. Tissier a mise sous vos yeux , avant
de vous exposer ses vues relativement à l'explo-
ration de nos contrées sous le rapport de l'his-
toire naturelle.
Vous avez vu dans cette galerie lillustre
Daleschamp et son savant traducteur , lyonnais
comme lui; cette famille de Jussieu qui à tant
reculé les bornes de la botanique; le modeste
Goiflon, qui a laissé sur notre flore des mémoires
inédits très-intéressans.
Vons y avez vu pareïllement paraître l'architecte
fameux, Mognat , qui a fait connaître les meïl-
leures pierres à bâtir; Blumenstein à qui nous
devons da description des mines du Lyonnais,
Forez et Beaujolais ; Jars, auteur d'un impor-
+ant ouvrage de minéralogie; De la Tourrette,
qui cultiva avec succès toutes les parties de l'his-
toire naturelle; De Varax , héritier du cabinet
de la Tourrette; l'abbé Rozier, dont le nom
æst si cher à l'agronomie; Devillers , habile phy-
le rapport de
l'histoire natu=«
relle ; par M-
Tissier,
sicien ,'entomologiste plus habile encore, quiins-"
pira l’ardeur de l’histoire naturelle au marquis
“de Grollier , à Baroud du Soleil, à Imbert Co-
lomez; le professeur Gilibert qui, après l'af-
freuse catastrophe de 1793, ralluma dans nos
murs le feu sacré des sciences naturelles.
112 Société royale d'Agriculture
Dans la même galerie figurent d’autres natu-
ralistes lyonnais, dont la plupart furent nos
confrères : Macors , Courvoisier , Tabard , Sion-
nest, Hénon , Bredin , Ragut et T'issier père , qui
vit à ses cours de minéralogie des princes étran-
gers.
Les naturalistes de Lyon, actuellementvivans,
ne sont pas oubliés : tels sont MM. Balbis , de
Martinel , Mouton-Fontenille, Madiot, Madame
Lortet, Barre, Dugas , Bourgeois, Foudras, etc.
Après avoir payé ce tribut aux savans qui l'ont
devancé dans la carrière, ou qui y marchent
avec lui, M. Tissier expose ses vues sur la cons-
titution géognosique de notre sol.
Il considère d'abord le bassin formé par la
colline de la Croix-Rousse , les côteaux de S.t®
Foy et les balmes viennoises , il y reconnaît le
travail des eaux , il y voit le lit d'un ancien lac,
d'où le Rhône s’est échappé au travers la plaine
de Sept-Fonds; le terrain abandonné par les eaux
est resté marécageux en plusieurs endroits , et
partout on peut y découvrir des sources alimen-
tées par le fleuve. « Si les fouilles, dit l’auteur ,
sont difhciles dans ces lieux trop arrosés , il est
permis d'interroger ces galets et ces bancs hori-
zontaux ,. formés uniformément par le dépôt
successif des eaux dont le cours a suivi la pente
du terrain depuis la Suisse jusqu'à la mer. Sur
de Lyon. 113
la nature de ces terrains rapportés, la palæon-
tologie va nous éclairer. Ces galets sont calcaires,
et ces petits cailloux roulés, agglutinés par la
chaux carbonatée , incrustante, annonçent l’er-
rosion produite par le Rhône dans son trajet
au travers de pays calcaires, et les alluvions de
ce fleuve. Le granit qui se trouve si près du jour,
et qui se montre en plusieurs endroits de notre
ville, nous défend de chercher plus avant , les
diverses époques de formation du sol lyonnais.
Là, les paleothorium , les anaploterium sont
introuvables ; mais il n’en est pas ainsi dans les
collines de la Croix-Rousse, de Vassieux et de
la Pape, qui sont adossées aux granits et autres
roches de Fontaine , du Vernay et de Serin. Là,
nous pouvons étudier des formations successives,
et non - seulement considérer , comme il serait
utile de le faire, la nature de chaque banc, sa
constitution , sa solidité, son épaisseur , le nom-
bre et la variété des couches , les élémens de leur
formation ; le passage prolongé des eaux , par
le témoignage des coquilles fluviatiles ; l'intermit-
tence de leurs cours, par l'abondance des coquilles
terrestres ; l’existence reculée sur cette terre de
ces colosses si bien décrits par Cuvier. C'est en
effet dans cette station, sur la diagonale de St.
Clair à Fontaine, qu’on a trouvé , en creusant
un puits, des fossiles , restes précieux de Mas-
8
114 Société royale d'Agriculture
todontes, et notamment des dents qui sont con-
servées dans les cabinets de MM. Tabard et
Thomas Dugas. »
» Consultons-nous la composition oryctolo-
gique de ces terrains de fabrique fluviatile ? J'y
ai trouvé des calcédoines, des geodes quartzeuses,
des échantillons de ces roches dont Genève est
pavée, et qui renferment tant de diallage verte,
On ne peut plus douter que le Rhône, dont les
ondes suivent cette direction , n'ait été le créa-
teur de ces collines et de leurs divers bancs. La
même composition , du moins les mêmes appa-
rences s'offrent aux côteaux de S.t° Foy. Les col-
lines les plus méridionales n’ont été étudiées que
jusques-là par un célèbre géologue dont les obser-
vations ont été consignées dans le journal de phy-
sique. Il semble avoir voulu nous laisser la
gloire et le plaisir d'explorer un terrain vierge
encore pour l'étude. » ;
» J'étends de là mes observations sur les autres
parties de notre sol ; je vois, comme je l'ai déjà
dit , le granit montrant sa tête partout, je trouve
dans la roche de Pierre-Scize, le gneis entrant
pour moitié dans la composition de cette masse
de première formation. Je cherche avec M. de
Saussure , le schorl bleu dans le granit sur le-
quel est assis le pont du change , je ne le trouve
pas; mais je le soupçonne dans Ja roche , quel-
de Lyon. 115
quefois schisteuse'de Serin ; car c'est dans ce genre
de roches qu'il git ordinairement. Je suis ce gra-
nit jusqu'à l'île Barbe , et après diverses variétés
de constitution , le rocher devient amphibolique,
et presque partout il est recouvert par la pierre
calcaire. »
» On conçoit que l'exploration du sol de notre
cité n'offre pas les cinq âges du sol de Paris,
et que sa constitution n’a pas autant varié. »
» Quittons un moment la ville, et parcourons
la partie du département laissée à notre investi-
gation. Remontons la Saône du midi au nord;
entre elle et le Rhônese trouve cette élévation
quenous ayons examinée , qui, du côté du fleuve,
est une alluyion ; qui, du côté de la rivière,
flanque ces alluvions d'une digue granitique va-
riée, La Saône sépare ici une région calcaire d'une
autre de nature diflérente. Sur la droite de son
cours le granit se montre tantôt bas, tantôt haut;
bas, il porte la roche’calcaire; haut , il l'adosse ,
la cotoye , mais lui est à peu près partout subor-
donné : Là un plateau calcaire , d'environ sept
lieues de tour , offre diverses variétés de chaux
carbonatée, propre à bâtir. St. Cyr, St. Didier,
St. Fortunat ont cinquante bancs de pierres grises
plusou moins belles , presque toutes pouvant être
taillées, et quelques-unes étant susceptibles du
plus beau poli, enfin convenables pour toutes
116 Société royale d'Agriculture
les constructions et tous les ornemens de l’archi-
tecture. Plusieurs bancs sont très -coquillers , et
c'est en vain que sur d’autres on chercherait des
mollusques fossiles ; elles paraissent être d’origine
marine. Certains bancs n’en offrent que d’une
espèce , d'autres en contiennent de plusieurs. »
» Quel est le laborieux et patient observateur
qui dévoilera le secret de cette formation , soit
dans son ensemble, soit dans ses détails ? Com-
ment une île calcaire se trouve-t-elle placée là
isolément , sans ramifications sensibles avec le
calcaire du Bugey ou du Jura, dont elle varie
it ANNE EEE
» Nous arrivons à Mont Cindre ; là, de grise
ou blanche qu'était ce calcaire , il devient jaune,
et il renferme du silex qui fait feu au briquet :
quel rapport établira-t-on entre ce calcaire tt la
craie qui renferme des bancs de silex pyroma-
que ? Plus loin, à Colonges , St. Romain , Cou-
zon , le coquiller est rare , et le calcaire est jaune,
argileux , souvent délitable à l'air, offrant plu-
sieurs variétés de chaux ‘carbonatée , surtout
l’inverse et la métastatique, et des geodes où
se trouvent quelquefois des cristaux de quartz
hyalin. »
» Dans la plaine qui, depuis les Echelles , se
prolonge jusqu'à Anse , le terrain est argileux
“et souvent semblable à celui de la Bresse. »
de Lyon. 117
» Cette île calcaire est surmontée par un banc
de formation plus récente , difficile à reconnaître
à cause des défrichemens qui ont été faits, et de
la terre végétative qui le recouvre ; mais on le
signale dans les anfractuosités abruptes, et dans
les coupes verticales des collines. Cette couche,
composée de parties hétérooènes, de fragmens
quartzeux, renferme des fossiles ; j'en ai retiré
des os incrustés, mais en trop petits fragmens
et trop informes pour qu'il m'ait été souvent
possible de les rapporter au squelette dont ils
faisaient partie. »
» Ce plateau calcaire, connu sous le nom de
Mont d'Or, cesse à Chasselay et à Limonest, où
l'on retrouve le granit, et partout, dans les
champs, le sulfate de baryte, substance dont la
présence annonce celle de quelque mine, sur-
tout de plomb. C’est d'après des indices qui, jus-
qu'ici, n’ont pas amené à de grands résultats,
qu'une compagnie avait commencé des travaux,
et qu’on avait fait plus de trente fouilles au-
jourd'hui comblées , dont la principale était au-
près du château Morand. On retrouve encore
dans le bois voisin de la principale excavation
du sulfate de baryte en abondance , de la chaux
fluatée, du petro-silex , du sulfure de plomb ,
du plomb phosphaté vert, carbonaté blanc et
noir, et du plomb oxidé ; de plus quelques légers
t18 Société rôyale d'Agriculture
fragmens de cuivre sulfuré avec du bleu et du
vert de montagne , le tout semé au milieu de
débris dé roches proprement dites. »
» Cependant le calcaire reparaît à certaines
distances du Mont d'Or. Ainsi, à Pomiers , près
Villefranche, on retrouve la même nature de
bancs qu'à St. Fortunat , et de plus le mêmé
nombre, la même épaisseur, surtout la mêmé
inclinaison à l’ést. Sur des points plus rappro-
chés du Mont d'Or, cette inclinaison varie; elle
est presque du double dans certaines exploitations
de Dardilly, dont le sol est.en partie calcaire,
et en partie d'un granit felds spathique friable,
régnant jusqu'à Dommartin. Sur cette plage , à
droite de la grande route de Paris qui passe par
l'Arbresle, se trouvent des cristaux de Felds-path
à dix pouces , bien réguliers , et qui se détachent
de la roche en décomposition. Le calcaire dominé
le granit en plusieurs endroits , et toujours sur
la droite de la route qui semble faite pour sé-
parer le pays purément calcaire , d'une contréé
d'autre formation. Je ne crois pas en eflet qu'à
gauche de cette routé on rencontre la chaux
carbonatée ; mais à droite celle - ci se prolonge
jusqu’à Chessy et au-delà , formant les plateaux
de St. Germain sur l'Arbresle et d’autres lieux
énvironnans. »
» Sur l'ancienne route qui conduit à Chessy
de Lyon. 19
par Lauzane et Châtillon , on trouve en petite
quantité, à la vérité, des émeraudes semblables à
celles des environs de Limoges. Presque partout,
les diverses roches contiennent les élémens d'un
granit qu'on a cru être analogue à celui des co-
lonnes d’Ainay, parce que , comme lui , il con-
tient du molybdène sulfuré. »
» Je ne me permettrai pas de décrire les riches
filons de cuivre de cette contrée, M. Barre fils s'est
acquitté de ce soin avec talent , je me ferai seu-
lement cette question géologique : les mines de
cuivre, soit carbonaté vért ou carbonaté bleu ;
soit oxidulé , soit sulfuré , soit pyriteux , occu-
pent un très-grand espace. Les lieux qu'arrosent
l'Azergue et la Brevenne, près de leur jonction,
sont un foyer abondant de minerai ; et le cuivre
carbonaté se trouve précisément situé entre le
cuivre sulfuré et le carbonate calcaire. Si les
filons sont le résultat d’alluvions, quel échange
chimique , quelle combinaison a pu changer le
cuivre sulfuré en cuivre carbonaté? mais dans
cetéchange mutuel l’autre union a été du sulfure
ou du sulfate de chaux:J'ai en vain cherché
celui-ci dans la contrée à l’état de cette com-
binaison neptunienne ; aurait-il disparu sans
laisser de traces? c’est ce qui pourrait être. »
M. Tissier qui, depuis nombre d'années ex-
plore la minéralogie départementale , a recueilli
Sur le Carex
plantaginæa ;
par M. De
Moidière.
120 Société royale d'Agriculture
sur cette partie intéressante de notre statistique
beaucoup d'autres faits qu'il se propose de vous
communiquer.
M. Olhon de Moïdière vous a fait part d'un
fait de physiologie végétale qui vous a paru fort
remarquable ; c'est la colonisation dans une de
ses terres du Carex plantaginæa , sans qu'on
puisse savoir comment s’est introduite cette
plante originaire de l'Amérique septentrionale.
Ce fut dans l'automne de 1803, qu'herbori-
sant avec M. Madio!, dans sa terre de Moïdière,
située dans le département de l'Isère , à cinq lieues
Est de Lyon , il rencontra une plante dont le
facies lui parut très-extraordinaire. M. Madiot
l’examine de près, et il reconnaît le Carezx plan-
taginæa ; bientôt on en découvre un grand nom
bre d'individus dans un petit vallon marécageux
dont le sol est argilo-calcaire , et que termine
au nord un côteau boisé. Plusieurs pieds sont
arrachés pour être transportés à la pépinière de
la Déserte où ils périrent. Le respectable Gilibert
qui en avait reçu quelques échantillons, inscri-
vit la plante dans la flore lyonnaise, qui fut
publiée en 1806.
Cependant M. De Moidière voulant rétablir à
la pépinière du département le Carezx plantaginæa,
le chercha dans les stations qu’il s’était choisie.s
de Lyon. 121
ses recherches furent vaines pendant cinq ans
consécutifs ; à la sixième année, il le retrouve
très-abondamment, mais en un autre endroit.
M. De Jussieu passant à Lyon, vit ce Carex,
et il en reconnut parfaitement les caractères.
Plusieurs autres années s’écoulèrent sans que
M. De Moidière eût revu le Carex acclimaté ;
peut-être que découragé par d'inutiles explora-
tions ,1l avait mis trop de lacune dans ses re-
cherches. ru
En 1821, MM. Balbis, Grognier et Madiot
ayant dirigé vers la terre de Moidière une ex-
cursion botanique , cherchèrent cette planteavec
la plus scrupuleuse attention , ils n’en décou-
vrirent aucune trace.
Dans l'automne de l’année dernière, M. Wadiot,
herborisant seul , la trouva , mais à six cents pas
à l'Est de son ancienne station, il en arracha
plusieurs pieds pour les placer à la pépinière de
l’'Observance, où ils ont très-bien réussi. Ils y ont .
été observés par plusieurs membres de la Société,
notamment par MM. Tissier, Pelletier et Grognier,
qui avaient été chargés par la Société de constater
les caractères botaniques du Carex américain.
Espériences
de teinture
avec le Bleu
Raymond,sou-
mises à la So-
ciété, par MM,
Raymond fils
et Souchon :
rapporteur M.
Tissier,
122 Société royale d'Agriculture
ARTS UTILES.
Le Gouvernement ayant demandé à la chimie
une substance capable d’être substituée à l'indigo,
nous dûmes à cet appel la découverte du Bleu
Raymond. Mais ce produit tinctorial ne put s'ap-
pliquer qu'à la soie ; ainsi le problème proposé
ne fut pas complètement résolu. Le digne fils du
chimiste habile qui avait trouvé ce bleu et qui
lui avait donné son nom, a cherché le secret de
teindre la laine par le même moyen. I croit y
être parvenu , et jaloux de votre suffrage, il
vous a soumis les résultats de ses expériences.
Vous avez reçu de lui divers échantillons de
laine teints en bleu Raymond, que vous avez
renvoyés à l'examen d’une commission , dont M.
Tissier a été l'organe. (1)
Avant que le rapport de cette commission vous
fût présenté, M. Souchon, pharmacien chimiste,
étabfi au Brotteaux , vous a adressé de son côté
d'autres échantillons de drap de laine également
teints en bleu Raymond, par des procédés qui
lui appartiennent, et il vous a fait connaître qu'il
fabriquait en grand l'élément de cette teinture ;
(1 ) Les autres membres de la Commission étaient MM.
Pelletier , Deschamp sfils. Gensoul , Multhuon , Jacquard
et Guillemet,
de Lyon. 123
t'est-à-dire,l'hydrocyanate ferrugineux de potasse.
Vous: avez voulu que la même commission à
laquelle s’est joint le secrétaire , examinât com-
parativement les échantillons présentés, soit par
M. Raymond fils, soit par M. Souchon.
Deux rapports ont été faits; ils ont été lus
dans la même séance, et vous avez adopté les
conclusions de l’un et de Pautre.
Dans le premier, M. le rapporteur s'est ex-
primé ainsi :
» Læs échantillons de draps déposés tant par
M. Raymond que par M. Souchon, nous ont
paru d’une teinte nourrie et nuancée en divers
tons, de manière à nous prouver que ces ar-
tistes manient cette substance colorante (l'hydro-
cyanate ferrugineux de potasse ) avec toute la
dextérité possible , et qu’ils peuvent obtenir avec
elle tous les tons et toutes les nuances. »
» Seulement les étoffes présentées avaient gé-
néralement plus de rudesse que les tissus teints
à l'indigo, et offraient le maniement de certains
draps teints en noir. » |
» La couleur des uns et des autres s'exaltait
par le vinaigre et les acides minéraux , tels que
le sulfurique et Phydrochlorique , suffisamment
étendus. »
» Jusqu'ici il n'y a rien d'étonnant aux yeux
du chimiste, ce sont des propriétés inhérentes
à la matière colorante. »
124 Société royale d'Agriculture
» Mais, s'est demandée la commission , y a-t-il
bien teinture dans cet emploi du bleu de Prusse,
ou seulement application et comme une espèce
de peinture ? »
» Les draps noirs et les draps bleus teints par
l'indigo ne déteignent pas par le frottement, et
quoique nous ne doutions pas qu'il n'y ait, jus-
qu'à un certain point , pénétration de la subs-
tance colorante dans les tissus colorés au bleu
de Prusse, le frottement des échantillons de l'un
et de l'autre concurrens a fait décharger sur de
la toile une partie de la couleur; mais pas assez
pour modifier sensiblement la nuance du tissu
frotté. »
» C'était pourtant là le point de perfection
auquel aucun de nos deux artistes n’est parvenu
complètement. » (1)
» La commission ne doutant pas de la solidité
de cette teinture à l’eau froide, à l'eau chaude,
à l'air et au soleil, a voulu néanmoins s'éclairer
encore sur l’action de quelques autres débouillis,
et quoiqu'il soit vrai de dire que nos habits ne
sont pas faits pour être soumis à toutes ces épreu-
ves , il est certain qu'elles nous ont servi pour
apprécier la richesse et la puissance du fond de
teinture des échantillons. »
(1) M. Raymond y est parvenu ensuite ; voyez ci-après.
de Lyon. 125
» Ainsi le drap porté sur la carte X ( déposé
par M. Raymond } a présenté dans une solution
de savon chauflé jusqu’à 60 degrés, une décolo-
ration presqu’entière. »
» Une partie du même échantillon , bien lavée
et bien dégagée de savon, a été plongée dans une
eau aiguisée d’acide hydrochlorique ; et une lé-
gère teinte verdätre et partielle a reparu , comme
dans le genre des draps appelés relangés.»
» L'échantillon a été uni à la pièce après des-
sication parfaite. »
» Un nouvel échantillon de la même pièce,
traité par l'eau de chaux à un degré de chaleur
égal , a été pareillement décoloré. »
» Traité ensuite par l'acide hydrochlorique , il
a présenté une couleur bleu de ciel. Cet échan-
tillon a été aussi annexé à la pièce. »
» L’échantillon marqué X, traité de la même
manière, a offert les mêmes résultats par l’eau
de savon ; et soumis aux mêmes acides que les
précédens échantillons , il s'est comporté d’une
manière très-analogue. »
» Un petit coupon passé à l’eau de chaux, a
perdu beaucoup de sa couleur, et il s’est rap-
proché d'un ton vert d'autant plus intense que
l'échantillon avait une couleur plus riche.»
» Les coupons de M. Souchon ont donné lieu
aux observations suivantes: 1° l'échantillon mar-
126 Société royale d'Agriculture
qué À; traité d'après les procédés ci-dessus, c’est-
à-dire, au savon chaud , a conservé une intensité
_ de couleur plus forte, en tirant au vert.»
» Soumis à l’action de l'eau de chaux , sa cou-
leur a mieux résisté que celle de l'échantillon
de M. Raymond , et la destruction n'en a pas été
aussi complète. »
» Le coupon marqué B, attaqué par les mêmes
agens, a mieux résisté au savon que l’échantil-
lon X de M. Raymond, »
» Les mêmes échantillons trempés dans l'acide
hydrochlorique, ont repris un ton vert d'une
nuance plus foncée que ceux de M. Raymond. »
» Ainsi, on ne peut se dissimuler que les
échantillons de M. Souchon qui, au premier
coup d'œil n'offrent guère une nuance plus foncée
que ceux de M. Raymond, n'ayent cependant an
fonds plus nourri et plus énergique pour résister
aux débouillis et autres agens destructeurs. »
» Nous ajouterons également qu'à la coupe ou
sur la tranche, les échantillons de M. Raymond
fils ont paru avoir été moins pénétrés dans le
tissu que ceux de ML. Souchon. »
» Mais M. Rcymond fils a porté les essais plus
loin ; du moins M. Souchon ne nous a rien fait
savoir sur le fait suivant : nous voulons parler
de la résistance du bleu Raymond au foulage,
et du feutrage de la laine ainsi teinte en fil ou
en tissu. »
de Lyon. 127
» MM. Seguin d'Annonay témoignent avoir
réussi à filer de la laine teinte , à la tisser et à la
feutrer après l'avoir mise au foulon. Ce serait
l’ultimatum de la découverte ; et ce succès est
annoncé dans une lettre de ces manufacturiers,
datée du 13 décembre 1820, lettre dans laquelle
étaient des échantillons de laine en cardage ;
d’autres, de laine filée , un morceau de drap
n'ayant pas subi le foulage, un morceau de drap
foulé. »
» Certes, si on s'en rapporte au témoignage
bien flatteur de M. Seguin , la réussite paraît
complète ; mais à la simple inspection la com-
mission n'a pu en juger ainsi. »
» [ est facile de voir que le drap foulé à
l'urine pendant quarante-huit heures , a peu per-
du de son intensité ; mais l'échantillon à échappé,
on ne sait comment, à l'effet du foulon, et le
feutrage n’a pas eu lieu. Voilà du moins ce que
la commission n'a pu admettre sur l'inspection
de l'infiniment petit coupon adressé à la société.
Bien plus , en se rendant compte des opérations
de teinture analogues à celles-ci, nous voulons
parler de la teinture en noir , dont le fonds est
également le persulfate de fer , traité par le prin-
cipe astringent , au lieu de l'être par l'hydrocya-
nate de potasse ; on sait que ces draps teints en
laine ne supportent pas cette opération; aussi
128 Société royale d’ Agriculture
sont-ils toujours teints en pièce. Il en est de
même des feutres de. laine et de poils. Il était
facile de prévoir la difficulté de l'opération du
foulage et le défaut du succès. » |
» Ainsi, en rendant justice au zèle et aux opé-
rations de M, Raymond fils, la commission pense
que la société ne saurait reconnaître un succès
complet dans les expériences de teintureen laine
au bleu Raymond. »
» Mais il n'est pas nécessaire que cette teinture
ait un succès complet ; il suffit qu’elle amène
une diminution dans la consommation de l'in-
digo, en lui substituant un produit qu’on pourra
fabriquer avec assez d'économie pour lutter
contre l'étranger qui nous le fournit ; il suffit de
cette amélioration industrielle pour donner à
leurs auteurs des droits aux suffrages de la so-
ciété et à la reconnaissance du public.
» Il s'élève ici une question, celle de l’anté-
riorité. On ne peut disconvenir qu'elle n’appar-
tienne à M. Raymond fils , qui a déposé des échan-
tillons bien avant M. Souchon , lequel n’a adressé
les siens à la société qu’à la date du 15 août 1822,
tandis que la lettre de M. Seguin (qui spécifie
les expériences de M. Raymond fils) remonte à
l'année 1820.»
» Le succès en tout le reste est égal et mérite
la même approbation. »
de Lyon. 129
» La commission ouvre donc l'avis que la
société écrive une lettte aussi flatteuse que pos-
sible aux auteurs de la découverte qui fait le
sujet du rapport, en leur témoignant qu'elle est
satisfaite du succès de ce procédé pour la teinture
des draps en pièce ; que cette amélioration peut
être aussi utile qu'honorable à l’industrie lyon-
nalse. »
» La commission pense en même temps que Ja
société doit donner acte à M. Raymond fils, de
l'antériorité du dépôt des échantillons. »
Le rapport précédent n'avait pas encore été
soumis à l'approbation de la société , lorsque M.
Raymond fils lui envoya de nouveaux échantil-
lons , avec prière de juger sa découverte d'après
leur examen plutôt que d’après celui des premiers.
La société considérant qu'elle n'avait pas à pro-
noncer sur un concours ouvert dans son sein,
et dont les limites auraient été fixées pär un
programme ; considérant d’ailleurs que dans tous
les temps elle doit accueillir les communications
qui lui sont faites dans l'intérêt des connaissances
utiles qui sont l’objet de ses travaux ; considérant
enfin que M. Raymond fils expose dans sa lettre
d'envoi que ses seconds échantillons sont mieux
teints que les premiers , ce qui annoncerait un
perfectionnement , la société a cru devoir con-
descendre à la demande de ce chimiste; elle a
9
130 Société royale d'Agriculture
arrêté en même temps qu'il serait écrit àM. Sou-
chon, pour l'inviter à envoyer de son côté d’autres
échantillons , pour être examinés comparative-
ment avec ceux qui venaient de lui être adressés ,
et la même commission a été chargée de ce
nouvel examen.
M. Souchon a eu connaissance de la détermi-
nation de la société ; il n'a point envoyé d’autres
échantillons de draps teints en bleu. On n’a pu
examiner que ceux de M. Raymond fils : voici
textuellement le résultat de cet examen , tel qu'il
a été présenté par M. le rapporteur de la com-
mission :
» 1.9 Le drap teint ( présenté en dernier lieu
par M. Raymond} est sorti victorieux du frot-
tement sur le linge, et n’a en aucune manière
déchargé la moindre parcelle de couleur, même
à un léger mouillage. »
» 2.0 Un échantillon marqué A, coupé à la
pièce, et qu’il est facile, ainsi que les suivans, d'y
rapporter , à raison de la forme de la coupure,
a été plongé dans une solution de savon chauffée
à 45 degrés, et il n’a pas sensiblement perdu de
sa couleur. »
» 3.° Un second morceau , marqué de la lettre
B , plongé dans l'eau de chaux à froid , et lavé
ensuite à l'eau pure, a pris une légère teinte
violâtre. »
de Lyon. 13:
» 49 Un troisième échantillon, marqué C,
soumis à l’action d'une solution froide de sous
carbonate de potasse , et lavé ensuite à l’eau pure,
a résisté complètement à ce débouilli. »
» 5.0 Un quatrième , marqué D, plongé dans
la potasse caustique, a été déteint entièrement ;
il n’est resté qu’une couleur de rouille. (1)
» 6.° Un cinquième échantillon marqué E , a
résisté à l’action de l’ammoniaque liquide, et est
sorti de cette épreuve seulement un peu plus
violet. »
« 7.2 Un sixième, marqué F, plongé dans une
eau fortement aiguisée d'acide acétique, a d'abord
été exalté en couleur ; elle a ensuite verdi. »
» 8.° Un septième et dernier échantillon,
marqué G , traité à l'acide hydrochlorique af-
foibli, a subi la même altération, et il est de-
venu sensiblement vert. »
» De ces expériences, la seule considération
à en tirer , est que la teinture de la laine en bleu
Raymond a acquis dans cet échantillon le degré
de perfection qui lui manquait pour former une
teinture parfaite, et non une coloration super-
ficielle, image de la peinture. »
La commission ouvre donc l’avis d'écrire à M.
(1) Cette épreuve prouvait chimiquement que le princip >
tinctorial était de l’hydrocyanate ferrugineux de potasse,
De la filature
des soies à la
vapeur ; par M.
Gensoul.
132 Société royale d'Agriculture
Raymond fils , pour lui faire connaître la satis-
faction véritable que la Société a éprouvée , en
voyant que, marchant si dignement sur les traces
de M. sun père , il devienti, comme lui, l’un des
bienfaiteurs de l’industrie, en perfectionnant la
teinture par des procédés dans lesquels on n'em-
ploie que des matières indigènes.
Ces conclusions furent adoptées par la société.
M. Souchon fut invité de nouveau à produire
d'autres échantillons de draps teints en bleu
Raymond , qui pussent soutenir l'épreuve du
frottement ; mais ce chimiste avait donné à ses
travaux une autre direction , il fabriquait en
grand l'hydrocyanate ferrugineux de potasse ; il
a envoyé un échantillon de ce produit.
La Société, considérant qu'il est dans l'esprit de
son institution de récompenser les services ren-
dus à l'industrie , tout aussi bien que les décou-
vertes qui tournent au profit de l’agriculture,
a décerné à M. Souchon une médaille à l'effigie
de Rozier. (1)
C'est tout à la fois de l'agriculture et de l'in-
dustrie qu'a bien mérité M. Gensoul , notre con
frère, par son procédé de filature à la vapeur.
En effet, Messieurs, perfectionner l'art de
(1) Voyez ci-après au chapitre des Récompenses.
de Lyon. 133
filer la soie , augmenter la valeur de cette
matière première de nos plus importantes manu-
factures , n'est-ce pas en activer la production ?
n'est-ce pas étendre la culture du mûrier et
multiplier les magnoneries ?
Dès l'année 1803, M. Gensoul fit connaître
dans le midi de la France sa belle méthode. Elle
se propagea sous les auspices de l'académie du
Gard. Bientôt traversant les Alpes, elle obtint
un succès non moins éclatant dans le Piémont
qui , à cette époque, faisait partie de la France.
Comme toutes les nouveautés, elle a eu des dé-
tracteurs ; mais s’il en existe encore, M. Gensoul
peut leur répondre par vingt ans d'expériences
et de succès.
L'appareil de cet ingénieux mécanicien est trop
connu pour qu’il soit nécessaire d'en donner ici
la description. Ses avantages ont été signalés par
des autorités trop imposantes pour qu’il ne soit
pas inutile de les rappeler ici; cependant quel-
ques considérations nouvelles sur ce sujet vous.
ayant été exposées dans un mémoire manuscrit
que l'auteur a déposé dans vos archives, vous
auriez de justes reproches à me faire si je les
passais sous silence.
La plus importante de ces considérations, c'est
l'économie du combustible amenée par le nouveau
procédé ; économie qui, sous le rapport de la.
statistique générale , offre un immense résultat.
134 Société royale d'Agriculture
En eflet, Messieurs, de nombreuses expé-
riences ont prouvé qu'il fallait consumer deux
quintaux de bois pour obtenir une livre de soie ;
aussi , ( d'après les calculs de M. Peuchet } brû-
lait-on en 1788, deux millions six cent mille
quintaux de bois pour la filature de la France,
(qui, à cette époque, ne travaillait que sur en-
viron un million trois cent mille livres de soie. }
Mais comme au moment actuel on peut, sans
exagération porter à deux millions de livres la
quantité de soie qui se file en France, il en ré-
sulte que si on avait conservé les anciens pro-
cédés , on consumerait annuellement dans les
filatures de ce genre quatre millions de quintaux
de bois.
Le prix des combustibles allant toujours
croissant , plusieurs manufacturiers dirigèrent
leurs recherches vers le moyen d'en diminuer la
consommation ; ils établirent des fourneaux qui
la réduisirent un peu. En adoptant l'emploi de
la houille, quelques fileurs firent un grand pas
vers l'économie; mais elle avait le grave incon-
vénient de salir et ternir la soie. Plusieurs sa-
vans essayèrent aussi, à plusieurs reprises, de
faire filer à l'eau froide. Mais au moulin à soie
on put reconnaître les vices de cette méthode.
Les matières employées pour dissoudre là gomme
et remplacer ainsi la chalear , portaient leur ac-
de Lyon. 135
tion sur les brins et les rendaient rudes, cas-
sans et bouchonneux.
En 1804, notre honorable confrère conçut
l'idée de chauffer plusieurs bassines par un seul
feu, au moyen de la vapeur , il réduisit ainsi
d'un quart la quantité de combustibles que l'on
brûlait même dans les fourneaux d#{s économi-
ques. Aussi ce procédé faut-il bientôt adopté dans
les principales filatures , et on put dès lors em-
ployer la houille , sans craindre qu’elle ternît ou
salît la soie, parce que le feu se trouva très-
éloigné du lieu du filage. Si comme on peut
raisonnablement l'espérer , cette méthode se gé-
néralise , il en résultera une économie annuelle
de quatre millions de quintaux de bois.
Certes, Messieurs, s'il est vrai, comme
l'a dit un publiciste , qu'économiser soit produire ;
la méthode de M. Gensoul équivaut à un beau
système d'aménagement des forêts.
Considérée sous le rapport manufacturier,
cette méthode a bien d'autres avantages. En eflet,
les fileurs Français et Piémontais avaient inuti-
lement essayé d'améliorer la qualité des soies.
M. Gensoul est parvenu à leur donner plus de
force, plus de finesse , et un éclat qu’elles con-
servent même après la teinture. Ces avantages
sont dûs à l'éloignement du fourneau , à la fa-
culté de graduer la température selon la qualité
136 Societé royale d'Agriculture
des cocons , à la présence de l'eau distillée que
le condensateur laisse tomber dans les bassines.
Or, les cocons baignent toujours sans que cette
eau ait besoin d'être recrue par de l'eau froide,
qui, au moment où on la verse, durcit la
gomme déjà dissoute des cocons. Cette transition
brusque de température fait que le brin ne se
dévide et ne se détache qu'avec déchirement ,
qu'il se casse plus souvent, que la soie se couvre
de petites bourres appelées bouchons.
On a dit que le procédé de M. Gensoul ne
s’appliquait pas à la filature des soies blanches ;
mais comme cette assertion n'est appuyée sur
aucun motif, il est inutile de s’y arrêter : d’ail-
leurs , n’avez-vous pas eu sous les yeux des soies
blanches filées par le procédé de M. Gensoul ?
n'avez-vous pas reconnu la finesse, la régularité
de leurs‘brins , et surtout l’éclat de leur blanc ?
ne vous ont-elles point paru supérieures à toutes
celles de même genre qui vous avaient été pré-
sentées jusqu’à ce jour ?
Ce n'est pas tout, M. Gensoul a encore rendu
service aux fileurs en perfectionnant les procédés
au moyen desquels on étoufle les chrysalides par
la vapeur. Avant lui ces procédés étaient si dé-
fectueux qu’on y avait généralement renoncé.
On se servait d'un fourneau qui donnait lieu à
une dépense considérable de combustibles ; à
de Lyon. 137
peine pouvait-on étouffer 25 livres de cocons à la
fois. La vapeur se condensant au-dessous de la
chaudière , il en résultait que des gouttes
d’eau chaude, tombant sur les ,cocons , ta-
chaïient et altéraient leurs tissus , au point d’oc-
casioner beaucoup de déchet au filage.
Pour obvier à ces inconvéniens M. Gensoul a
fait construire une armoire dans laquelle il à
disposé plusieurs rayons sur lesquels on peut
placer 150 à 200 livres de cocons. Il emprunte
pour quelques instans de la vapeur à sa grande
chaudière, et au moyen d’un toit incliné qui fait
couler l'eau condensée derrière les rayons, il
l'empêche de tomber sur les cocons.
A côté de son appareil, M. Gensoul applique
encore, lorsque le local le permet, une pompe
qu’il a nommée Balancier hydraulique. Cette ma-
chine agit par la force de la vapeur de la grande
chaudière , sans nuire au travail de la filature.
L'auteur étant persuadé que le balancier hy-
draulique peut être employé utilement à d’autres
usages , et servir à l’agriculture, il se propose
d’en faire le sujet d'un autre mémoire, etil a
bien voulu prendre l'engagement de vous le com-
muniquer. |
M. Faissolle qui, à l'instar de M. Gensoul, à,
Sur la mou-
ture des céréa-
et la per-
dirige ses recherches vers la mécanique , appli- cussiondesflui-
quée à l’agriculture et aux arts qui en découlent,
des ; par M.
Faissolle.
138 Société royale d'Agriculture
vous a Ju un savant mémoire sur les moulins à
eau, sur ceux à vent; et c’est sur les lois de la
percussion qu'il a fondé sa théorie.
Tout en rendant justice aux moutures de
MM. Seriziat, Tissot, Vachon, etc. dont les
moulins sont situés sur le Rhône ou sur la
Saône, l’auteur désirerait que pour mouvoir
les moulins on se servit plutôt de l'air que de
l'eau ; il signale les inconvéniens de ces usines
quand elles sont placées tant sur les rivières que
sur les ruisseaux. Les premières nuisent à la na-
vigation des fleuves, les secondes gênent la circu-
lation des eaux fertilisantes , et trop souvent
donnent lieu à des inondations désastreuses.
M. Faissolle n’est pas le premier qui ait vu
dans les moulins à eau, dans leurs digues,
leurs réservoirs , leurs rétenues , un grand obs-
tacle aux bons systèmes d'irrigation.
D'un autre côté, la sécheresse et la gelée pa-
ralysant les usines de ce genre , peuvent amener
la disette du pain au milieu de l'abondance du
blé. Les grandes rivières elles-mêmes restent à
certaines époques gelées pendant plusieurs mois;
c’est ce qu'on vit dans le rigoureux hiver de 89.
Alors un habile mécanicien, M. Smith se hâta
de construire sur les bords de la Seine des mou-
lins à farine mus par des pompes à feu. Des
usines semblables furent établies plusieurs an-
de Lyon. 139
nées après par M. Perrier , dans l'île des cygnes.
ILest fâcheux qu’elles exigent une énorme quan-
tité de combustibles.
Combien sont plus économiques les moulins
à vent.
C’est pour faire connaître le mécanisme de
leur jeu que M. Faissolle s'est livré à un certain
nombre de considérations et de calculs. Il a cher-
ché à déterminer la quantité de mouvement que
l'action de l’air ou d’un courant d'eau peut pro-
curer à un mobile qui présente , soit à l’an soit
à l’autre de ces mobiles, une surface donnée. :
Faisant ensuite abstraction des principes d'a-
près lesquels doivent être construits les moulins
à vent, il s’est rendu compte de la manière
dont les ailes d'un moulin à vent devraient être
placées et disposées pour qu'elles pussent recevoir
et conserver un mouvement de rotation. Il a été
conduit au théorème qui suit : Le choc direct
et perpendiculaire d'un fluide étant à son choc
oblique sur une même surface comme le carré
du rayon est au carré du sinus de l'angle dissi-
dent, il en résulte que les ailes des moulins à
vent qui sont frappées obliquement par l'air,
doivent, pour produire un effet déterminé , être
plus grandes que si la percussion de l'air leur
était perpendiculaire.
D'un autre côté , comme on est obligé de faire
140 Société royale d’ Agriculture
porter sur un pivot les cages des moulins à vent,
pour que leurs ailes soient toujours placées dans
la direction du vent , il devient assez difficile de
donner aux cages de ces moulins une étendue
suffisante pour pouvoir y placer toutes lesmé-
caniques qui se trouvent dans les moulins à
eau ; d’où il suit qu'il serait à propos qu'un meu-
nier eût à sa disposition plusieurs moulins con-
tigüs ; l’un d'eux serait destiné à faire mouvoir
les meules, tandis qu’un autre mettrait en mou-
vement les blutoirs, ce qui rendrait l'opération
dela mouture , sinon meilleure, du moins plus
prompte : les gruaux pouvant être placés faci-
lement et sans retard sous les meules.
Préférant toujours les moulins à vent à ceux
dont Peau est le principal moteur , notre confère
voudrait qu’on multipliât les premiers, et qu'on
n'établit les seconds que sur des rivières et des
ruisseaux non navigables. Il désirerait pareille-
ment qu’en construisant-ceux-ci, on disposät les
vannes et les déversoirs de manière à donner
un libre écoulement aux eaux lors dés grandes
inondations, et à les diriger de manière à ne
pas dévaster les propriétés du voisinage.
Les événemens de ce genre ne sont pas rares,
tel est celui dont M. Fuissolle a été témoin , et
dont il vous a parlé en ces termes :
» En 1791 , on achevait la construction d'une
de Lyon. 141
üsine à eau située à quelques lieues de Tours, je
fis à l'architecte quelques observations sur la
construction de son déversoir qui était formé
dans la partie inférieure d’un mur d'environ
trois pieds d'épaisseur, dont la partie supérieure
présentait un plan horizontal du côté du réser-
voir, et de l’autre côté un plan incliné. Ce dé-
versoir était en face d’une prairie ; on ne fit au-
cun cas de mes observations. Cinq à six ans en-
suite j'eus lieu de me convaincre que l'expérience
confirme les données d'une bonne théorie. En
effet, quoique le mur fût fort épais, et ses fon-
dations profondes , l'eau filtrait sous ses fonda-
tions , et dans les temps de sécheresse la prairie
était sillonnée par une longue et profonde ex-
cavation dans le fond de laquelle on apercevait
un gravier stérile. Tout près du réservoir était
un trou où croupissait une eau stagnante, pro-
venant de la filtration. La cause de ce dégat était
simple , les digues ou les levées retenaient l’eau
à environ six pieds au-dessus du niveau de la
prairie , l’eau qui passait par le déversoir for-
mait une cascade dont la chute était à peu près
de 20 pieds , en raison du fossé pratiqué au bas
du déversoir. On conçoit avec quelle force,
quelle impétuosité devait se précipiter sur les
terrains inférieurs l'eau qui, dans les déborde-
demens de la rivière, passait sur le déversoir,
Notes sur di-
verses machi-
nes propres à
battre les blés;
par MM. Chan-
cey et Billon.
142 Société royale d'Agriculture
dont la largeur était d'environ 12 pieds : On sent
tous les dommages que l’irruption de ce torrent
devait causer à la prairie. »
C'est avec raison que vous attachez une grande
importance aux perfectionnemens de ces machi-
nes agronomiques qui économisent le temps et
les bras, aussi avez-vous reçu avec beaucoup
d'intérêt les communications que vous ont faites
MM. Chancey et Billon sur des machines propres
à battre le blé.
Le premier vous a donné connaissance d’un
instrument de ce genre établi à Mayenne , dépar-
tement de la Loire, dans une terre de M. Mu-
rald de St. Romain.
Cet instrument , d'origine anglaise, porte le
nom d’Owen, son inventeur , il bat 8 doubles
décalitres par heure , et il exige trois ou quatre
personnes et un cheval. Cette force paraît insuf-
fisante ; lanimal , en effet, ne peut y travailler
plus de deux ou trois heures sans être tout en
nage. Le prix de la machine, toute dépense
comprise , a été d'environ 2000 f.
Près de la terre de M. De St. Romain, est celle
de M. De Belzevrie, qui, à titre de récompense
de ses travaux agricoles, a reçu du Roi une ma-
chine à battre le blé, qui fait trois fois plus
d'ouvrage que la précédente , mais qui exige deux
chevaux, elle coûte aussi beaucoup plus; car
de Lyon. 143
toutes dépenses comprises, elle ne revient pas à
moins de 2800 f.
Il y a déjà plusieurs années que M. Billon
notre confrère a fait venir d'Angleterre une ma-
chine également propre à battre le blé ; elle bat
<t vanne simultanément 34 décalitres dans une
heure ; et à cet égard M. Billon fait observer
que les machines dont il a été question battent
le blé mais ne le vannent pas. Mais aussi si la
sienne offre ce double avantage, elle ne peut
agir qu'à l’aide de quatre chevaux ou de quatre
bœufs et de quatre personnes ; savoir trois fem-
mes et un conducteur. Cette machine, tous
frais compris, a coûté 2400 f. M. Billon en a
fait construire à moindres frais une autre à
Lyon, il l'a envoyée dans son domaine de Bresse,
et elle lui a paru plus parfaite.
Une commission a été nommée dans votre
sein pour prendre connaissance des machines
agronomiques de M. Billon.
En attendant que cette commission vous fasse
son rapport, M. Billon vous a parlé d'une ma-
chine à braquer le chanvre qu'il a établie dans
son domaine de Grigny.
L'idée de cet instrument lui avait été suggérée
quelque temps avant la révolution , dans une
société des arts’utiles dont il était membre. C'est
Sur une ma-
chine àbraquer
le chanvre ; par
M. Billon.
144 Société royale d'Agriculture
là que M. Philibert Jambon exposa un braquoir
composé de deux cylindres de bois dur, canelés,
avec lesquels il prépara fort bien en peu de temps
une certaine quantité de chanvre.
La révolution ayant dispersé cette société,
M. Billon oublia là machine de M. Philibert
Jambon. Long-temps après il en parla à son ne-
veu, M. Bouchard Jambon , aujourd'hui notre
confrère. Celui-ci lui dit que les cylindres de
bois se déjetaient , qu'ils s’usaient , qu'enfin
l'instrument n'atteignait pas son but. M. Billon
comprit dès lors la nécessité de fabriquer ce cy-
lindre en fer de fonte, matière qui est devenue
économique par le perfectionnement des fon-
deries.
Dans le même temps, M. Christian imagina
un braquoir trop compliqué , surtout trop cher.
Voulant s'assurer si ces deux inconvéniens étaient
balancés par de grands avantages, notre confrère
s’en est servi pendant deux jours, et il a recon-
nu la difficulté de le maintenir convenablement
tendu , de prévenir ses dérangemens et de les
rétablir. Îl conçut alors le projet d’un battoir qui
n’eût que trois cylindres canelés, placés hori-
zontalement , le second en dessous du premier,
le troisième supérieurement au second ; il se
flattait, à la faveur de cette disposition, faire
revenir en avant le faisceau de chanvre tournant
de Lyon. 145
autour du cylindre du centre. Mais il a eu beau
employer pour cet eflet plusieurs conducteurs ,
iln'a pu réussir,
Se bornant alors à deux cylindres , il a placé
deux bascules, l'une vis-à-vis de l'autre, et il a
obtenu une pression plus ou moins forte suivant
le besoin.
Disposée de cette manière , la machine a par-
faitement rempli son ohjet , et trois personnes
ont pu facilement braquer quatre livres de
chanvre par heure. Deux de ces personnes pla-
çaient ou recevaient Je chanvre, la troisième
tournait la manivelle; et comme celle-ci se fa-
tiguait plus que les autres , elles la relevaient
tour à tour.
Le chanvre ou le lin soumis à ce braquoir ,
devait être très-sec ; et lorsqu'on a voulu agir
sur Je bois, les canelures du cylindre ont dû
être aussi fines que dans la machine de M,
Christian. (1):
Au reste, l'appareil de M. Billon présente
trois bancs de bois solides et séparés. Sur le
(2) M. Eynard, notre savant confrère , à qui les arts
doivent tant de perfectionnemens, a-reconnu qu’en passant
le chanvre ou | le Ha, sous deux cylindres rapprochés par une
forte pression, la cheneyotte se détachait ,de la filasse de
manière à l’isoler complètement et avec promptitude , et
que de plus cetle filasse était assouplie.
10
Sur une
échelle.brouet-
te présentée à
la Société , par
M. Bonnafous,
et décrite par
M. De S. Di-
didier.
146 Société royale d’Agricullure
premier , est placée la cage contenant les deux cy-
lindres unis ; sur le second se trouve la cage qui
renferme les cylindres à grosses canelures, et
sur le troisième ceux à canelures fines.
Des machines à braquer , dont les cages sont
en fonte, et qui joignent à l'économie du prix
la plus grande solidité, ont été exécutées en
fonte par M. Frèrejean aîné: un dessin exact
de ces deux machines doit être mis incessam-
ment sous les yeux de la société.
Le modèle d’une autre machine vous a été
adressé par M. Bonnafous , votre correspondant
à Turin, c’est une échelle brouette. Comme au-
cune description n'en avait accompagné envoi,
vous avez prié M. De St. Didier de la décrire et
de la dessiner.
» Elle se compose , vous a-t-il dit, de deux
parties. La première est une brouette, dont les
bras , longs de 7 à 8 pieds, sont droits, dépas-
sent un peu la roue en avant, et sont réunis
par quatre échelons ; les montans prolongés et
longs d'environ six pieds, sont traversés par le
quatrième échelon de la brouette , et ont un
mouvement autour de lui. Etant fermée, la
machine fait le service d’une brouette sur la-
quelle on peut porter des fardeaux volumineux ;
à moitié déployée, elle forme une double échelle
de Lyon. 147
dont l'écartement des bras assure la solidité ;
déployée entièrement elle produit une échelle
solide et légère , longue de douze à ‘treize pieds. »
M. De St. Didier pense avec raison qu’il serait
facile d'ajouter à cette machine des pieds légers
en fer ou en bois, qui serviraient à en élever
les bras au-dessus du terrain où ils se trouvent
posés , et qui, en même temps serviraient à
fixer solidement dans l'échelle double l'écarte-
ment -des échelles simples. |
Telle qu’elle est , sa construction est si simple ,
son coût est si modique , et l'usage en est si facile,
pour me servir des expressions de l'inventeur,
qu'indépendamment de la cueillette de la feuille
de müûrier , elle sera employée pour une infinité
de travaux rustiques, tels que la récolte des
fruits, la taille des arbres dans les jardins et les
vergers , la construction des palissades, etc. et
les propriétaires s’empresseront d'adopter l'échelle
brouette de M. Bonnafous. (1)
(1) Voyez ci-après le dessin de cette machine.
148 Societé royale d'Agriculture :
OUVRAGES IMPRIMÉS
OFFERTS A LA SOCIÉTÉ.
1. Notice sur les chêvres asiatiques des du
Thibet, chêvres de Cachemire, et sur la ma-
nière de les soigner , par M. le chevaliér Tes-
sier , inspecteur général des bergeries royales,
(Paris, 1822, in-8. 6 pag. )
2.9 De la science de l'homme , mise en rapport
avec les sciences physiques ou la philosophie de
la nature , d'après l'état dés sciences au 19.°
siècle ; par 4. Prost, docteur en médecine ,
( tome 1€7 Paris 1822. in-8. xxx11 - 448 p.)
3.2 Mémoire presenté à l'institat de France, en
lui faisant hommage de l'ouvrage précédent ,
par le méme. (Paris, in-8. 64 pag.)
4° Réflexions sur le fléau de la Catalogne et le
régime sanitaire, soumises à la Chambre des
Pairs et à celle des députés, par M. Sarmet,
aîné, docteur eh médecine à Marseille , (Paris,
1822, 11 pag.)
5.2 Nouveau manuel du vigneron ou méthode
simple , facile et économique pour faire de
bon vin, partout où le raisin mürit bien, et
particulièrement dans la Vendée, sans recou-
rir aux procédés dispendieux des spéculateurs
brevetés , tels que l'appareil Gervais et autres,
par M. George Shibuet | vigneron à Etioles ,
de Lyon. 149
propriétaire dans les départemens de l'Ain,
Seine, Seine et Oise et Vendée, ( in-8. 27 pag.)
6° Mémoires et rapports de la société d'agri-
culture et arts du département du Doubs,
1821 - 1822. (in-8. 256 pag.)
7 Procès-verbal de la séance publique de la
société d'agriculture, du commerce et des arts
de Boulogne-sur-mer, tenue le 15 juillet 1822.
(in-8. 78 pag.)
8.°° Mémoires de la société centrale d’agricul-
ture et des arts du département de Seine et
Oise , publiés depuis sa séance publique du
15 juillet 1822. (in-8. 117 pag.)
9-° Code des desséchemens , ou recueil des rè-
glemens rendus sur cette matière depuis le
règne d'Henri IV jusqu’à nos jours, suivi d’un
commentaire sur la loi du 16 septembre 1817,
et d'un tableau général des marais du royaume.
Paris, 1817. (in-8. 285 pag. pour le premier
- ouvrage, 60 pag. pour le second. }
109 Discours lu en séance publique de la so-
ciété d'agriculture, arts et commerce d'Au-
nilac, le 8 juillet 1822, sur les développe-
mens successifs de ces trois branches de lin-
dustrie humaine dans le département du Can-
tal, depuis les temps les plus reculés jusqu'à
la fin de notre ère, par M. Charles-Jean-
François Raulhac, membre de cette société
150 Société royale d'Agriculture
et adjoint du maire de ladite ville, Aurillac,
1822. (in-8. 64 pag. )
12.0 Nouveau cours complet d'agriculture théo-+
rique et pratique , contenant la grande et la
petite culture, etc. etc. par les membres de
l'institut de France, Paris, 1822. in-8. 16 vol.
( don du ministre. }
13.2 Séance de la société centrale d’agriculture,
sciences et arts d'Agen du 17 septembre 1822,
(in-4. 3 pag. )
14. Comice central agricole du département
de Saône et Loire, procédé pour opérer le
renouvellement entier d'une vieille vigne par
le recouchage des southes. (in-8. 4 pag. 1822)
15.0 Mémoirede la société royale d'Arras, pour
l'encouragement des sciences , des lettres et des
- arts, séance publique du 27 août 1822. ( in-8.
48 pag.)
16. Procès-verbal de la séance publique de la
société d'émulation et d'agriculture du dépar-
tement de l'Ain , 5 septembre 1822. ( in-8.
78 pag. )
17.2. Mémoire sur la nutrition des plantes et la
. coupe prématurée des blés , lu à la séance du
premier octobre 1822 de la société d’agricul-
ture et des arts du département de Seine et
Oise , par M. Féburier | Vun de ses membres.
(in-8. 52 pag.)
de Lyon. 151
18. Mémoire sur les fonctions du système
ganglionaire, par J. Brachet, docteur en
médecine de la Faculté de Paris, professeur
suppléant et médecin de l'Hôtel-Dieu de Lyon,
Paris et Lyon, 1823. ( in-8: 96 pag.)
19.2 , Traité de la clavelée, de la vaccination et
clavélisation des bêtes à laine, avec des notions
historiques et physiques sur l'espèce ovine et
sur la clavelée , beaucoup d'observations pra-
tiques , des histoires particulières , ete. par M.
Hurtrel d'Arboval, amateur , commissaire spé-
cial pour les épizooties de,18:5.et 1816, dans
le départ, du Pas de Calais. Paris et Amiens,
1822. (in-8.518 pag.)
20.2 Calendario Georgico della reale Societa
agraria di Torino, per l’anno 1823, compilato
da un membro della medesina. (in-8.108 pag.)
21.0: Notice sur l'école spéciale de commerce
établie à Lyon , avec l’assentiment,de S. Ex. le :
Ministre de l’intérieur , etc. et sous, la direc-
, tion de M. Guillard-Lièvre, ancien principal
de collése. Lyon, 1823. ( in-8. 35 pag. )
22... L'administration de l’agriculture appliquée
à une exploitation ; par M. lecomte de P/ancy,
ancien préfet de la Loire, de la Nièvre, de
Seine et Marne , officier de la légion d'hon-
. neur, membre correspondant du conseil d’a-
griculture. Paris, 1822. (in-fol. 86 pag.)
i52 Société royale d'Agriculture
23,6. Eloge de M. Palisot de Beauvoir, membre
de l'institut , par M. Thiébault de Berneaud ,
Paris, 1821, (in-8. 85 pag.)
#4 Relation dé la prémière fête champêtre
donnée par la Société Linéenne de Paris le 24
mäi 1825 , jour anniversaire de 14 naissance
de Linné ; par lé méme , sg 1822, (in 8.
86 pag: }
35.° Exposition dé la doctrine botanique ét du
système de physiologie végétale que Théoph-
raste enseigriait daris ses cours privés , par le
méme, Paris ; 1822. (in-8. 18 pag.)
26.9 Recherches sur les plantes connues des
anciens sous le nor de Ua, par le même ,
Püris, 1859. (Âh-8. 56 pag. )
576 ‘Voyage à Ermeénonville, par lé méme,
Paris, 1810. (in-12. 300 pag. )
28.6 Prograrñime des prix proposés par la So-
tiété d'énicouragemént , et qui doivent être
décérnés èn 1833 ,24, 25 et 50, ih-4.°
25.0 Notice sur St Romain en Galles, par M.
Cochard , (in-8. 28 pag.)
36.0 Mémoire sur cetté question : Déterminer
Si, dätis l'état actuél de nos connaissantes,
oï péut établir uné classifitation régulière
des médicaméns , fondée sur leurs propriétés
médicales , mémoire qui a mérité une mé-
daïllé d'or au jugement de la Société de méde-
cine de Paris. Lyon, 1823. ( in-8. 55 pag.)
de Lyon. 153
31.0 Remarques sur le traitement des fièvres
muqueuses à caractères ataxiques, par M. le
docteur Cartier. Lyon , 1822. (in-8 52pag.)
32.0 Moulin horizontal en spirale, sur son uti-
lité pour la mouture, les fabriques, les irri-
gations , l’arrosement des villes, suivi d'une
lettre de M. le comte François de Neufchéteau ,
1822. (.in-4.° 20 pag. )
33.° ( Opuscules agronomiques publiés : à di
verses époques, et réunis en un vol. par I.
Thouin. )
34. Notice biographique sur M. Jean-Baptiste
Desplats, médecin vétérinaire , ancien profes-
seur à l'école royale vétérinaire d'Alfort , par
M. Sylvestre , Paris , 1823. (in-8. 15 pag.)
35.° Programme de la séance publique de la
Société royale et centrale d'agriculture , tenue
le 6 avril 1823 , et présidée par S. Ex. le
Ministre de l’intérieur.
36.0 . Rapport sur les travaux de la Société cen-
trale d'agriculture, par M. Sybestre, secré-
taire perpétuel. Paris, 1823. (in-8. 24 pag.)
37.2 Programme d'un prix proposé par la même
Société pour la rédaction d'un manuel ou
guide des propriétaires des domaines affermés.
38.0 Rapport au Bureau d’agriculture de Mont-
brison ; sur le classement de ses travaux, par
M. Mortaigne de Poncins , dans la séance du
24 février 1823. (in-8. 31 pag.)
154 Société royale d'Agriculture
39.° Rapport général sur les travaux du con-
sel de salubrité (de Paris) pendant l’année
1821. (iu-4. 32 pag. )
40.9 Rapport au nom d'une commission à
l'académie des sciences , belles lettres et arts
de Lyon, sur l'école de la Martinière fondée
dans cette ville par le Major général de la
Compagnie des Indes, Claude Martin. Lyon,
1823. (in-8. 34 pag.)
41.0 Compte rendu des observations faites à
Y'Hôtel-Dieu de Lyon par les médecins de cet
Hôpital , depuis le 1.* octobre 1819 jusques
au 1.* octobre 1821, rédigé par M. Frolliet,
(in-8. 92 pag.)
42. Compte rendu des travaux de l'académie
royale des sciences, belles-lettres et arts de
Lyon, dans la séance publique du 26 août
1813, par M. Paul-Emile Beraud, present
Lyon, 1822. (in-8. 46 pag.)
43. Compte rendu des travaux de la même aca-
démie pendant le premier semestre de 1815,
par M. Cochet, président, membre corres-
pondant de l'institut. Lyon, 1822. (in-8. 15 p.)
44° Compte rendu de la même académie pen-
dant l'année 1816, par M. Ballanche, prési-
dent. (in-8. 46 pag. ) |
45.% Compte rendu de la même académie, de-
puis le 13 novembre 1821 jusqu'au 2 avril
de Lyon. : 155
1822, par E. B. Guillemet, président, ancien
. professeur de physique de la faculté des sciences
de l'académie de Lyon, membre de plusieurs
sociétés savantes. Lyon, 1822. (in-8. 36 pag. )
© 46.9 Ecole de la Martinière, fondée par le Ma-
jor-général Claude Martin. Lyon, 1823. (in-8.
35 pag.)
47.2 Notice sur quelques races de chevaux , sur
les haras et les remontes dans l'empire d’Au-
triche , par M. Huzard fils , médecin vétéri-
naire, correspondant de la société royale et
centrale d'agriculture , membre adjoint du
conseil de salubrité, Paris, 1823. (in-8. 38 p.)
48.2 Fabrication du fromage de Parmesan, par
M. Huzard fils, correspondant de la société
royale et centrale d'agriculture, 1823, ( in-8.
44 pag. )
49.° Procès-verbal de la séance publique an-
nuelle tenue à l'école d'économie rurale et vé-
térinaire de Lyon, le 19 septembre 1822, pour
Ja distribution des diplômes et des prix aux.
élèves. (in-8. 71 pag.)
50.0 Mémoire sur la eatge de l'olivier dans
le midi de la Erance, par M. De Gasparin,
(tiré de la bibliothèque universelle ) (in-8.
82 pag.)
51.9 L'art du Boyaudier, mémoire qui a obte-
nu le prix fondé par M. le préfet de police,
Ouvrages pé-
riodiques a-
dressés à la So-
ciété,
156 Société royale d'Agriculture
et proposé par la société d'encouragement pour
l'industrie nationale, par 4. G. Labarraque ,
pharmacien de Paris, membre. de la société
libre des pharmaciens, etc. etc. Paris, 1822.
(in-8. 138 pag. ),
En outre des productions que vous avez reçues
à titre d'hommages, votre bibliothèque s'est en-
richie des recueils périodiques de plusieurs so-
ciétés agricoles , dont les unes ont continué à
vous communiquer les résultats de leurs utiles
travaux, et les autres nouvellement instituées,
out bien voulu vous adresser la notice de leurs
premiers actes.
Ces ouvrages périodiques sont les suivans:
1.7 Le bon cultivateur , recueil agronomique
publié par la société centrale d'agriculture de
Nancy. ,
2.9 Recueil agronomique publié par les soins
de la société des sciences, agriculture et belles-
lettres du département de Tarn et Garonne.
3° Journal des propriétaires ruraux, pour le
midi de la France, rédigé par des membres
de la société d'agriculture de Toulouse.
4°. Journal d'agriculture, lettres et arts, rédigé
par des membres de la société d'émulation et
d'agriculture du département de l'Ain.
5.9, Annales de la société royale des sciences ,
belles-lettres et arts d'Orléans.
de Lyon. 157
6. Annales de la société d'agriculture, sciences,
arts et belles-lettres du département d'Indre et
Loire.
7. Mémoire dela société d'agriculture , sciences
et arts du département de l'Aube,
8. Bulletin de la société royale d'agriculture,
des sciences et des arts de Limoge.
9°. Bulletin d'industrie agricole et manufactu-
rière, publié par la société d'agriculture, arts
et commerce de la Loire , section de l’arron-
dissement de St. Etienne.
10.0 Feuille villageoise de l'Aveyron , journal
d'économie rurale et domestique, publié par
la société d'agriculture de l'Aveyron.
11. Bulletin de la société d'agriculture du dé;
partement de l'Hérault.
12.2 Annales de la société d'agriculture , arts
et commerce du département de la Charente.
13° Bulletin de la société d'agriculture , arts
et commerce du département du Canial.
Vous devez, Messieurs, à la munificence du
Gouvernement plusieurs ouvrages précieux, tels
sont : le traité général des eaux et forêts, chasse
et pêche, par M. Beaudrillart ; le code des des-
séchemens, ou recueil de règlemens rendus sur
cette matière depuis le règne d'Henri IV jusqu’à
nos jours ; l'administration de l’agriculture ap-
pliquée à une exploitation, par M. le comte De
Rapport sur
les mémoires
de la société
Linnéenne; par
M. Balbis.
158 Socièté royale d'Agriculture
Plancy ; la suite des annales de l'agriculture
française, par MM. Bosc et Tessier. M. le Préfet
a bien voulu continuer de vous adresser l'inté-
ressante collection de ses actes administratifs.
Avant de déposer honorablement à votre biblio-
thèque les ouvrages imprimés qui vous sont en-
voyés, vous les remettez pour l'ordinaire à des
commissaires chargés d'en faire, conriaître le
mérite par des rapports verbaux ou écrits.
C'est par des rapports écrits, pleins d'intérêt,
que M. Balbis vous a rendu compte de deux
ouvrages adressés par M. Thiebault de Berneaud,
correspondant à Paris. L’un est l'éloge historique
de Palisot de Beauvoir; l'autre, la notice des
\ travaux de la société linnéenne depuis sa réorga-
nisation jusqu’à la fin de 182r.
Comme vous ne l'ignorez pas, Messieurs , la
société savante qui , sous les auspices du grand
Linné, se dévoue au culte de l'histoire naturelle,
fut fondée à Paris en 1788. Dispersée par l'orage
révolutionnaire , elle n'a été restaurée qu'en
1820. Alors on a vu se former des sociétés de
même genre dans plusieurs grandes villes du
royaume. Se considérant comme des émanations
de celle de la capitale, elles ont pris le titre de
colonies de la société linnéenne de Paris ; l’une
d’elles existe à Lyon, et c’est sous la présidence
de M. Balbis qu'elle a ouvert le cours de ses
nobles travaux.
de Lyon. 159
Le génie du grand Linné ne connut, pour
ainsi dire , d'autres bornes que celles de la na-
ture ; aussi les Linnéens doivent-ils , sur les pas
de leur maître, diriger leurs recherches sur
toutes les sciences naturelles. Des questions de
haute philosophie sont encore de leur ressort :
telles sont le problème de la vie que M. De
Gasc s'est efforc®de résoudre ; celui d'un lan-
gage logique et d'un ordre naturel sur lequel M,
Lefebure a jeté de lumineuses idées ; celui de la
_ stabilité des formes qui caractérisent les corps
que nôus distinguons en genres et espèces , pro-
blème dont M. Girod de Chantrans s'est occupé
profondément.
En vous citant les faits remarquables consignés
dans la notice confiée à son examen, M. Balbis
n'a pas passé sous silence l’observation que M.
Madiot vous avait communiquée au sujet du
hérisson à groin de cochon, ( 1) observation qui
a été confirmée par celles de M. Redouté, Lebret
et Borghers.
Un autre naturaliste qui appartient à notre
société à titre de correspondant , M. Fallot , s'as-
sociant aux travaux de nos confrères MM. Sion-
nest et Foudras , a étudié les insectes ennemis
de la vigne, et il a poussé ses recherches sur les
végétaux parasites du plus précieux des arbustes.
(2) Voyez compte rendu pour 1821 , pag. 234.
160 Société royale d'Agriculture
Sans nous arrêter aux nombreux travaux de
botanique de la société Linnéenne , travaux que
personne mieux que M. Balbis ne pouvait juger,
nous devons noter un fait de physiologie végé-
tale qui, s’il était bien constant, aurait une
grande influence sur la culture des arbres. M.
Juge de St. Martin , un des mestors de l'agro-
nomie française , s’est livré à une longue suite
d'expériences desquelles il paraît résulter qu'en
enlevant la pellicule noire qui recouvre les mar-
rons , les pepins des poires , des pommes , et en
les semant, ainsi dépouillés ils produisent des
arbres de la même variété que ceux qui les ont
fournis. C’est ainsi que, sans recourir aux grefles,
aux marcottes et aux boutures, on pourrait
propager les races végétales précieuses.
Comme on la fait observer dans le préambule
de cette notice, c’est à la physiologie à éclairer
les pratiques de l'agriculture. Il était bien con-
vaincu de cette vérité, M. Mathieu de Dombasles,
notre savant correspondant , lorsqu'il exposait
les phénomènes de la nutrition des plantes. Vous
avez apprécié son beau travail. (1) Encouragé
par vos suffrages, l’auteur l’a offert au public
qui a confirmé votre jugement.
Après avoir mis sous vos yeux l'extrait d’autres
(1) Voyez compte rendu pour 1820, pag. 215.
de Lÿon. 161
mémoires de la société linnéenne de Paris, M.
Balbis vous a fait part d'un hommage que cette
compagnie a rendu à la mémoire de l’an de ses
fondateurs , notre respectable Rast Maupas ; et
il vous a été facile de voir que le panégyriste
de cet agronome habile avait puisé les élémens
de son discours dans le compte rendu de vos
travaux pour 1820:
Nous devons à M. Thiébault de Berneaud
l'éloge d'un autre célèbre naturaliste M. Palisot
de Beauvoir. En vous parlant de cet ouvrage ,
M. Balbis s'est plû à relever les services éminens
que M. de Beauvoir a rendus à la botanique. Celui-
ci a débrouillé le cahos de Ja cry ptogamie , dévoilé
les’organes des lycopodes , des mousses, des cham-
pignons , constitué la famille des graminées ;
‘signalé une multitude de plantes parasites, ap-
pliqué à l’agriculture de profondes recherches de
pbhytolologie.
Non content de reculer les bornes de la ea
nique , Palisot de Beauvoir se livra ,avec ardeur,
à l'étude des :belles-lettres ; il traça d'une plume
élégante, l'éloge du sage Rollin , celui du savant
ÆFourcroy , il composa des pièces de vers, avoués
parle goût le plus sévère.
ILtermina , le 21 janvier 1820, une wie pleine
de services et -de vertus, ni. en portefeuille
plusieurs ouvrages importans , tels que la re-
11
Rapport sur
dés brevets
d'invention
qu'ont obtenus
des Lyonnais ;
par M. Faissolle
162 Société royale d Agriculture
lation de son voyage sur la côte occidentale
d'Afrique.
C'est sous ces traits que M. Balbis , d’après M.
Thiébault de Berneaud, a peint le respectable
Palisot de Beauvoir.
M. Füissolle a relevé les services rendus à
l'industrie nationale par plusieurs Lyonnais ;
Voccasion de cet hommage a été un rapport
sur la description des machines et procédés spé-
cifiés dans les brevets d'invention dont la durée
est expirée.
Au premier rang de ces Lyonnais industrieux
est notre confrère M. Jacquard, qui obtint le bre-
vet le plus honorable, pour l’invention de cette
belle machine au moyen de laquelle on a supprimé
le tireur de lacs dans la fabrication des étoffes bro-
chées et façonnées. M. le rapporteur a fait obser-
ver que depuis l'obtention de ce brevet, M. Jac-
- guard avait inventé une autre mécanique qui
rend cette fabrication plus facile et plus rapide.
Dans la même notice et pour la même année,
sont spécifiés deux autres brevets décernés à des
Lyonnais, l’un à M. Pielte, opticien, pour des
lunettes au moyen desquelles on peut lire, à
double portée; l'autre, à M. Bertrand, pour une
bascule à reverbération, applicable aux cheminées,
et pour des perfectionnemens apportés aux tu-
de Lyon. 163
yaux de poêles, à la faveur desquels on peut
presque doubler la chaleur.
Cette bascule se compose d’une plaque de tôle
d'environ cinq décimètres de hauteur , portant à
sa partie inférieure deux tourillons qui servent
d'axe; elle se place du côté du contre-cœur de
la cheminée, et repose sur la partie inférieure
de la plaque.
Une tige en fer sert à ouvrir et à fermer la
bascule. Quand elle est fermée , elle présente,
avec l'horizon, un angle de 6od.
Le but de cette mécanique est de renvoyer de
la cheminée la chaleur dans l'appartement , au
moyen de la reverbération.
Quels qu’en soient les avantages , ils sont in-
férieurs, selon M. le rapporteur, à ceux d’une
autre cheminée dot on doit l'invention à l'illustre
Chaptal.
Dans un rapport précédent sur la même no-
tice officielle, M. Faissolle avait rappelé d'autres
services rendus par des Lyonnais à l'industrie de
la France. Il avait parlé successivement du
semoir de M. Gairal, du ventilateur à condi-
tionner les soies crues de M. Brun, du moulin
_à vent de M. Rognat ; et à cet égard, il s'était
livré à des considérations de mécanique qui,
plus tard, ont été l’objet d'un mémoire spécial
analisé dans le présent compte rendu. Il fait en-
Rapport sur
les annales de
la société d’Or-
léans; par M,
Remond.
164 Société royale d'Agriculture
suite connaître le mélier inventé par M. Meunier
fils , pour la fabrication de toutes sortes d'étoffes
ponctuées d’un ou de deux côtés. Il relève quel-
ques fautes de calcul échappées à ce mécanicien,
Il rend justice au génieinventif de MM. Jordan
père et fils, qui sont parvenus à fabriquér des
dentelles de soie, façon anglaise. Il rappelle es
travaux de feu M. Revol, neveu, qui futmembre
de la société; ceux de M. Duchamp de-la Guillo-
tière; ceux enfin de MM. Legay, Bremont et
Bertrand, et il a bien voulu prendre l’éngage-
ment de continuer cette revue honorable ‘pour
l'industrie lyonnaise,
En vous parlant des actes de la société royale
dés sciences, belles-lettres et arts d'Orléäns,
M. Remond a dù s'attacher aux objets qui pou-
vaient avoir quelques rapports avec ceux de vos
travaux. Et en cela il est entré dans les vues qui
vous ont déterminés à vous faire rendre compte
des divers ouvrages dont vous recevez l'hommage
ou la communication.
M. Remond vous a fait connaître en premier
lieu un mémoire sur le défrichement des bru-
yères, par l’écobuage, préférablement à celui
qui est opéré par la pioche ou par la charrue.
L’auteur du mémoire pense, et M. le rapporteur
est de son avis, que l*cobuage s'applique utile-
ment aux terrains argileux , tourbeux , ‘subs-
de Lyon. 165
tantiels, humides ; mais qu'il est nuisible sur
un sol ferrugineux où la bruyère croît ordi-
nairement, sol qui devient absolument stérile
après l'incinération , à cause de la division plus
complète de ses molécules et de Févaporation
des substances végétales eb animales qui cons-
tituent l'humus.
ME. le rapporteur pense que, lorsque pour ne
pas offenser les racines, on ne défriche pas à la
charrue, on doit opérer avec la pioche. D'après
l'auteur du mémoire, il fait sentir les avantages
de l'enfouissement des pois , des vesces , du sar-
rasin , pour fumer la terre , ceux de la coupe des
blés à la faulx, méthode si peu pratiquée dans
nos environs , quoiqu'elle ait pour résultat de
donner beaucoup plus de paille que la méthode
ordinaire , et de purger le sol de toutes ces mau-
vaises herbes qui, échappant à la faucille , infes-
tent les champs de leurs graines.
M. Remond parle ensuite des expériences qui,
autour d'Orléans , comme dans le reste de la
France ont été faites sur l'appareil Gervais, et
après avoir rapporté les résultats contradictoires
de ces épreuves , il a cité les observations sur
ce sujet qu’a recueillies M. Mure, propriétaire à
Fontaine près Lyon.
Cet agronome, à qui la société a décerné une
médaille d'or pour ses belles cultures des müûriers
166 Société royale d'Agriculture
a fait fermer hermétiquement deux cuves; sur
l'une il a placé lappareil Gervais , il a établi sur
l'autre une soupape qui s'ouvrait par l’effort
du gaz acide carbonique , se refermait ensuite
spontanément. Le vin de cette dernière cuve ayant
été décanté au 16° jour du cuvage , au lieu du 22°
comme dans l'appareil Gervais , a néanmoins
offert des résultats semblables en quantité et en
qualité.
La longue durée du cuvage ne peut pas con-
venir à toutes les localités et à toutes les tempé-
ratures ; c'est ce qui a été prouvé par plusieurs
observations décisives. D’autres ont établi que
la liqueur condensée était moins une liqueur
alcoolique que de l'eau aromatique mêlée d'acide
acétique , et tenant en dissolution une très-petite
quantité d'oxide de fer.
Deux autres mémoires ont fixé plus particu-
lièrement l'attention de M. le rapporteur, l'un
a pour objet la nourriture du bétail ; l'autre , le
meilleur système d'assolement.
Dans le premier mémoire, M. le marquis de
Vilbreme prouve , d'après ses expériences, qu'un
arpent de terre semé en jarosses ( Latyrus sali-
vus ) nourrira mieux dans un temps donné
1806 moutons que le même arpent ne nour-
rirait 1038 de ces animaux, s'il était couvert de
navets , et cependant le poids des navets récoltés
de Lyon. 167
sera cinq fois plus considérable que celui des
jarosses. Le même agronome a éprouvé combien
il est avantageux et économique de ne donner
au bétail les racines et les tubercules qu'après
les avoir fait cuire à la vapeur.
L’autre mémoire est de M. le marquis de Guer-
cheville; il tend à prouver que l'assolement qua-
triennal est préférable au triennal. Voici la dis-
tribution du sol qu'il a introduite avec succès
dans ses exploitations : La première partie en
blé ; laseconde en mars, avoine , orge, avec sain-
foin ou trefle, pois ou vesce d’hiver ; la troisième
en fourrage en plein fauchage ; la quatrième en
préparation pour les blés d'automne.
D'après ce mode quatriennal , les frais de cul-
ture ont diminué, parce qu’on n'a labouré qu'un
quart au lieu d’un tiers du domaine. On a récolté
beaucoup plus de grains et de paille, encore plus
de fourrage artificiel. Le nombre des bestiaux a
augmenté et avec eux la masse des engrais.
Ce système, très-avantageux dans les pays de
grande culture est peu applicable à ceux, ou
comme dans notre département, les propriétés
sont très-divisées.
Souvent nous avons eu occasion de le faire
observer: les vignobles constituant notre prin-
Rapport sur
le procédé de
décuvage de M.
\
= Dudevant ; par
M. Deschamps
pères.
168 Société royale d'Agriculture
cipale richesse agricole , c'est vers le perfection
nement de leur culture , c’est vers les meilleures
méthodes de vimification que duivent tendre,
d'une manière particulière ; nos efforts ; aussi
devons-nous répandre avec un zèle scrupuleux
les découvertes qui peuvent intéresser l'œnologie.
C’est ce qui a déterminé M. Deschamps père à
extraire des annales de l'agriculture française le
procédé relatif au décuvage que nous devons à
M: Düdevant | propriétaire dans le Bordelais.
Il consiste à placer sur FPorifice d'ane cuve à
demi pleine , la vendange ayant été foulée, six
planches, fréquemment arrosées d'eau fraîche ,
recouvertes de plusieurs couvertures.
Par ce procédé le décuvage eut lieule 13° jour,
tandis que dans les environs de Bordeaux on né
décuve que du 15° au 20° jour. Il y ent une petite
augmentalion de produit , et le vin était fin jus:
qu’à la dernière goutte.
I! se trouva que le vin était clair, spiritueux,
ésempt de la dureté qui caractérise le vin nouveau.
M. Dudevant pense que , dès le sixième jour ;,
le vin traité de cette manière se clarifie et peut
être décuvé.
Après quatre jours de tonneau, ce même vin
a marqué trois degrés à l'aréomètre , tandis que
. celui qui avait été fabriqué par la méthode ordi-
paire n’en marquait que deux. Le premier n'a
de Lyon. 169
donné dans les tonneaux aueun signe de fer-
mentation. _
» Ce résultat avantageux , dit M, Deschamps ,
» démontre complètement les avantages du nou-
» veau procédé. Il me paraît , ajoute-Lil, devoir
» étre pris en considération, surtout pour les
» vins qui ont besoin de rester long temps dans
» les cuves pour y éprouver la fermentation
» désirée; ilremplit l'objet de l'appareil de M.!Ie
» Gervais, et il est beaucoup plus expéditif , il
» donne moins d'embarras , occasione moins de
» dépense , et pour le mettre en usage on n'a pas
» besoin de licence. »
Deux autres rapports écrits vous ont été pré-
sentés sur des ouvrages imprimés ; mais ils n’ont
pas été déposés encore dans votre portefeuille ;
l'un par M. Socquet , sur le mémoire de M. Ma-
thieu de Dombasles, relatif à la fabrication de
l'eau-de-vie de pommes de terre ; l'autre par M.
le chevalier de Martinel, avait pour objet un
cahier de l'agronome français de M. Rougier de.
la Bergerie. Ces deux honorables confrères ayant*
annoncé l'intention de donner une suite à leurs
rapports, ces communications seront recueillies
soigneusement dans le compte rerdu de vos
travaux pour l'année prochaine.
Je ne dois pas passer sous silence que parmi
Rapports ver-
les rapports verbaux qui vous ont été présentés , LE pee D
SSLET à
170 Société royale d'Agriculture
vous avez écouté avec un grand intérêt celui de
M. Tissier , sur un mémoire couronné de M. Cap,
relatif à la classification des médicamens. M. le
rapporteur s'étant occupé lui-même pendant
Jong-temps de cette question , pouvait mieux que
tout autre apprécier les vues lumineuses que M.
Cap a développées avec autant de précision que
de clarté.
C'est aussi par un rapport verbal que M. Téssier
a fait connaître une dissertation de M. Raulhac
sur l'état de l'agriculture et de l’industrie de
l'Auvergne dans les temps anciens, M. le rap-
porteur a rendu justice à l’érudition de M. Rau-
Ibac , et vous avez placé cet archéologue sur la
liste de vos correspondans.
Tous ces rapports et quelques autres moins
importans ont fréquemment donné lieu à d’inté-
ressantes discussions. C'est ainsi qu'a été justifiée
la mesure que vous avez adoptée de remettre
tous les ouvrages qui vous sont adressés, à un
commissaire pour en présenter une analise suc-
*cincte.
Par suite de cette sage mesure, la notice qui
suivra celle-ci sera enrichie des rapports que vous
ont promis MM. Muthuon , Balbis, Terme,
Pelletier, Guillemet, De Martinel , Socquet, Jan-
son, Monnier , Billon, Deschamps fils.
de Lyon. 171
RÉCOMPENSES.
L'administration , avait, l'année dernière,
réservé de nobles récompenses aux agronomes du
département qui se distingueraient par leurs
succès dans la culture du mûrier et l'éducation
des vers à soie. Le concours a été nombreux, et
vous avez été appelés à le juger. MM. les concur-
rens que vous avez distingués ont reçu le prix
de leurs travaux des mains de M. le comte de
Tournon, dans une séance publique et solen-
nelle, présidée par ce magistrat.
Rapporteur de votre commission permanente
des mûriers, (1) M. Faïssolle a commencé son
discours en adressant un hommage bien mérité
au digne administrateur qui, dans notre Lyon-
nais, a donné l'élan à une amélioration indus-
trielle autant qu’agronomique. 1] a fait observer
ensuite qu’un grand pas avait été fait dans ce dé-
partement , et que des établissemens considérables
s'y étaient formés pour l'éducation des vers à
soie ; que dans quelques-uns la filature était par-
venue à un grand point de perfection ; que plu-
sieurs de MM. les Maires, notamment ceux
(2) Les autres membres de cette commission sont MM.
Cochard, Balbis, Muthuon , De Martinel, Billon, Fais-
solle et Grognier,
Médailles d’or
et médailles
d'argent pour
la culture du
mürier et l-édu.
cation des vers
à soie.
Rapporteur
M. Faussolle,
172 Société royale d'Agriculture
d'Oullins , de Tassin, de la Guillotière avaient
secondé avec le plus grand zèle M. le Préfet ,
en fournissant des détails nombreux sur les
plantations de mûriers et les magnoneries exis-
tantes dans leurs communes respectives.
Après ces observations, M. le rapporteur a
exposé ainsi qu’il suit le tableau des récompenses
dont MM. les concurrens ont été jugés dignes.
Ce tableau avait été, en séance particulière,
arrêté par la société,
Pour la plantation des müriers , une médaille
d'or de 300 fr., quatre aussi d'or de 1oofr.,
et deux d'argent.
Grande médaille d'or à M. Malbos , proprié-
taire à Oullins, pour avoir planté 1437 pieds
de mûriers en plein vent , et 4000 en haies.
1.2 médaille d'or de cent francs à M, Mure,
(François ) propriétaire à Fontaine, pour avoir
planté 744 pieds de mûriers , et avoir couvert
de pourrettes deux ares.
2. À M. Monterad ( Gilibert ), DÉSOÉTIENE à
Tassin, pour avoir planté 458 pieds de müriers ,
et 4000 pourrettes.
3. À M. Rivière, propriétaire à Oullins, pour
avoir formé une pépinière de 400 pieds de mü-
riers.
4 A M. Mathieu Bonafous, matf de Lyon.
notre correspondant à Turin, qui a fait impri-
d de Lyon. 173
mer et répandre à ses frais, dans le département,
en 1821, un mémoire précieux sur l'éducation
des vers à soie; et.cette année des principes rai-
sônnés sur la culture des müriers..
Les deux médailles d'argent ont.été accordées,
L'une à M. Dumoy (Pierre), propriétaire à
Fontaine, pour avoir planté 300 müûriers
L'autre à M. Billet-Landas, maire à Fleurieux
sur l'Arbresle,, pour avoir planté 180 pieds de
müriers.
L
Pour l'éducation des vers à soie ‘une médaille
d'or de 3oofr., quatre aussi d'or de 1oofr. ,
ct deux d'argent.
La grande médaille d'or a été décernée à M.
Poidebard, propriétaire à St. Alban , commune
de la Guillotière qui, précédemment , avait ob-
tenu un prix, et qui vient de planter 500 pieds
de mûriers et 4500 pourrettes ; il a donné en
outre beaucoup plus de développemens à ses
Magnoneries; c’est au point qu'il est parvenu à.
faire éclore annuellement douze onces de graines
de vers à soie , et il continue d'exploiter sa belle
filature.
Les médaillés d'or de la valeur de roofr. ont
été distribuées comme il suit :
1. A M. Billon, propriétaire à Grigny. Il a
fait planter 200 pieds de müriers en plein vent,
409 müûriers en buissons , il a donné ses soins à
i74 Société royale d'Agriculiure ”
la culture des vers à soie, et il a fait construire
une Dandolière.
2€ À M. Michel aîné, propriétaire à Oullins,
pour avoir élevé des vers à soie provenant de six
onces de graines.
3€ A M. Veyre, de la même commune et
pour le même sujet.
42 À M. Cochard, propriétaire à St. Cyr,
canton de Ste Colombe, pour avoir planté 70
pieds de müriers en plein vent, et 250 pieds de
pourrettes, et excité l'émulation de ses grangers
en leur faisant élever chaque année des vers,
provenant de quatre onces de graines.
Quant aux médailles d'argent , chacune de
25 francs, elles ont été accordées l'une à M.
Ravichon (Jacques), de la commune d'Oullins,
pour avoir élevé des vers provenant de trois onces
de graines, et qu'il espère porter à six.
L'autre à M. Champ, tonnelier à Oullins,
pour avoir élevé des vers provenant de deux
onces de gra'nes.
La commission eût proposé de donner une
médaille à Madame Mollard, qui a élevé dans la
commune de St. Rambert, des vers provenant
de vingt-quatre onces et demi; mais elle s’est
assurée que l'établissement de cette dame faisait
partie de ceux de M. Poidebard auquel un pre-
mier prix a été décerné. Ainsi elle a dû se borner
à mentionner honorablement Mme, Mollard.
de Lyon. 175
Pareille mention a été faite de M. Rieussec ù
noire respectable confrère , pour ses plantations
de mûriers et de pourrettes ; de MM. Jean Poisat
et Pignard, (de Montagny , commune de Bully };
et de Madame veuve Blanc, de la commune
d'Oullins , pour leurs éducations de vers à soie.
Après avoir prorogé à plusieurs reprises une
question qui intéresse vivement les fabriques
lyonnaises, vous en avez obtenu la solution la
plus satisfaisante. Voici cette question :
Tnventer un métier qui ferait passer la navette
Par un moyen mécanique , de manière que l’ouvrier
ait simullanément les deux mains au battant , afin
d'obtenir plus de régularité à la trame.
M. D'Eglise , artiste mécanicien , et fabricant
d'étoffes de soie à Choulans , banlieue de Lyon,
s’est présenté comme ayant résolu cette question ;
il s'est offert à mettre sous les yeux d’une com-
mission de la société une machine qui, selon
lui, faisait plus que remplir les conditions du pro-
gramme.
La commission a été nommée, et elle a fait
en ces termes son rapport par l'organe de M.
Gensoul. (1).
mr pi, Le 2 Um
(1) Les autres membres de la commission étaient MM.
Cochard , Leroy-Jolimont, Jacquard, Muthuon et Grognier.
Médaille d'or
à M. D'Eglise,
pour un perfec-
tionnement
dans la fabri-
cation des étof-
fes de soie.
Rapporteur
M. Gensoul.
176 Société royale d'Agriculture
» M. D'Eglise a tissé en notre présence , sans
se servir de ses mains, et avec beaucoup de fa-
cilité un gros de Naples noir ; il a fait agir la
navette , le battant et les lisses à l'aide d'un seul
pied qu'il pose alternativement sur une des deux
marches. L’étoffe qu'il a fabriquée par ce procédé
ne laisse rien à désirer sous le rapport de la per-
fection. Quant aux autres avantages que peut
offrir ce métier , quoique l'auteur n'ait pas cru
pouvoir nous en montrer ‘tout le mécanisme ,
nous nous sommes assurés qu'il n’a rien exagéré
dans le mémoire qu'il vous a adressé, et que
réellement son métier a pour résultat 1.° de per-
fectionner l’étofle; 2.° de fabriquer dans un
temps donné un cinquième de plus; 3.° d'éviter
à l’ouvrier les deux tiers du travail. »
» S'il faut l'en croire, son mécanisme peut s’ap-
pliquer à toutes sortes de tissages en soie, fil,
laine et coton , il dit même qu'il pourrait s'adapter
aux méliers de courant, dits à la Jacquard. »
» Le mouvement de ce métier paraît s'opérer
par un mécanisme qui fait mouvoir le battant ,
la navette et les lisses , de manière que ces der-
nières s'élèvent par gradation , laissent un pas-
sage régulier à la navette, l'empèchent de couper
la chaîne et de former des lardures. Une nouvelle
bascule, ajoutée au rouleau de derrière, tend la
de Lyon. 177
chaîne à volonté, et cède si facilement au mou-
vement de la marche que malgré la mauvaise
qualité qué pourraient avoir les fils de la chaîne,
il ne s’en casse pas dans le tissage. »
» M. D'Eglise a encore adapté à son métier
un régulateur qui ploie l'étoffe au fur et à me-
sure qu’elle est fabriquée ; le battant frappe le
même coup et à distances égales, ce qui donne
à l'étoffe une régularité qu'on ne pouvait cbte-
nir par les anciens procédés. »
» Cet artiste a trouvé aussi le moyen de pla-
cer dans un métier , propre à tisser les satins ,
des aiguilles en plomb , du poids de six onces
seulement, au lieu de ces lourdes platines qui
usaient RARE les lisses. »
» La commission vous annonce avec plaisir
qu’elle n’a que des éloges à donner à un artiste
qui, ne se contentant pas d'atteindre, a encore
dépassé le but indiqué par votre programme.
Elle regrette qu’on n'ait à lui offrir qu'une prime
aussi modique , et elle invite la société à solli-
citer auprès des autorités une récompense plus
digne de son travail , afin de l'engager à rendre
public un métier qui peut être très-ntile aux ma-
nufactures de cette ville. »
Toutes ces conclusions été adoptées par la
société.
12
Médaille d’ar-
gent a M. Sou-
chon , pour fa-
brication en
grand de l’hy-
drocyanate fer-
rugineux de
potasse,
Rapporteur
M. Tissier.
178 Société royale d’Agricullure
C'est pour avoir répondu à l'appel de l'edmi-
nistration départementale , que d'honorables ré-
compenses ont été décernées aux agronomes et
aux manufacturiers du département qui se sont
livrés avec zèle et succès à l'éducation des vers à
soie et à la culture de l’arbre qui nourrit cet in-
secte précieux. C'est pour avoir non-seulement
atteint, mais encore dépassé le but proposé par
votre programme, dans l'intérêt de l’industrie
manufacturière de Lyon, que vous avez décerné
à un artiste ingénieux une médaille d'or.
Mais comme , dans les années précédentes,
vous aviez cru devoir récompenser des décou-
vertes agronomiques qu'aucun programme n'a-
vait provoquées, vous avez voulu, cette année,
accorder spontanément une distinction à un pro-
cédé qui intéresse vivement l'industrie de notre
cité.
M. Souchon, chimiste-pharmacien et manu-
facturier vous avait soumis un échantillon
d'hydrocyanate ferrugineux de potasse fabriqué
par lui; il vous avait annoncé qu’il avait établi
une manufacture considérable de ce produit tinc-
torial.
Vous n’avez pas pu vérifier le dernier de ces
faits , attendu que le procédé du fabricant étant en-
core secret, vos commissaires n'ont pu voir son
atelier; mais vous avez eu des raisons de croire
de Lyon. 179
que déjà il avait livré au commerce des masses
de son hydrocyanaté ferrugineux.
Le fabricant avait annoncé que ce produit de
son industrie était d’une qualité supérieure à
celui des autres fabriques de même genre ; pour
constater ce fait , des expériences ont élé ordon-
nées par la société ; elles ont eu lieu dans l'atelier
de M. Gonin, chimiste teinturier , et l’un des
membres de la commission des prix ; et d'après
le rapport qui vous a été fait sur leurs résultats,
vous avez décidé textuellement ce qui suit :
» Une médaille d'argent à l'effigie de RozrEr,
» est décernée à M. Souchon, pharmacien aux
» brotteaux, pour avoir fabriqué en grand de
» l'hydrocyanate de potasse d'une qualité au
» moins égale à celle de l’hydrocyanate du com-
» .merce, »
» La société a cru devoir déclarer en outre
» qu'elle avait des motifs de croire que le pro-
» duit tinctorial de la fabrique de M: Souchon
» était d'une qualité supérieure; et afin de vérifier
‘» ce fait d'une manière authentique , elle a or-
» donné que de nouvelles expériences seraient
« faites incessamment. »
180 Société royale d'Agriculture
ÉVÉNEMENS.
ER |
Non content de prendre à vos travaux l'intérêt
le plus vif, M. le comte de Tournon s'empressa
d'y concourir. La communication qu'il voulut
bien vous faire , et qui est l'un des plus beaux
ornemens de la présente notice , cette communi-
cation importante devait être suivie de beaucoup
d’autres. Mais le Roi ayant appelé M. / comte
de Tournon à d’autres destinées, la province a
perdu un administrateur, homme d'état, et la
société le plus généreux appui.
Tant de regrets ont été heureusement réparés
par le digne successeur de M. de Tournon.
En effet , M. le comte de Brosses avait à peine
pris les rènes de l'administration de ce beau dé-
partement , qu'il fut facile de voir combien ses
intentions étaient pures, ses vues élevées, son
expérience consommée ; il en donna des preuves
éclatantes.
Ce magistrat ayant agréé la présidence d’hon-
neur que M. de Tournon avait laissée vacante,
il est venu au milieu de vous, et vous lui avez
exprimé vos sentimens par l'organe de M. Co-
chard, votre président ordinaire, qui s’est ex-
psimé ainsi ;
de Lyon. 181
» Monsieur le Préfet, l'empressement que
vous mettez à venir dans cette enceinte, en-
courager par votre présence nos paisibles tra-
vaux , décèle le magistrat éclairé, l'adminis-
traiteur vigilant, le bon citoyen. Enflammé
du désir de faire le bien, de signaler d'une
manière glorieuse les fonctions importantes qui
vous sont confiées, votre premier soin est de
chercher à connaître et les hommes et les ins-
titutions qui peuvent éclairer votre marche, fa-
voriser vos projets , concourir à vos vues. Le
nom que vous portez , célèbre depuis long-temps
dans les annales de la littérature , la réputation
que vous avez acquise dans l'exercice d’autres
préfectures , par la droiture de vos sentimens ,.
par la loyauté de votre conduite, par la sagesse
de vos mesures, nous avaient déjà fait présager
votre amour pour les sciences et les arts, et ac-
quérir la certitude que , comme votre prédéces-
seur , M. le comte de Tournon, vous étayeriez
ceux qui les cullivent de toute votre influence.
La démarche que vous faites en ce moment nous
en est une preuve. »
». Les sociétés d'agriculture, organisées vers le
milieu du derniersiècle , ont plus contribué qu'on
ne pense aux améliorations nombreuses que le
premier des arts a reçues de nos jours. Les bonnes
183 Société royale d Agriculture
méthodes qu'elles ont propagées , les innovations
salutaires qu'elles ont introduites , les exemples
qu'elles ont donnés, ont fait germer une foule
de connaissances précieuses , brisé les entraves de
la routine, et préparé d'innombrables succès.
Mais ces sociétés auraient bientôt cessé d'être
utiles , leur zèle n'aurait pas tardé à se ralentir ,
si Padministration n’était venue sans cesse les
mettre en évidence , exciter leur émulation,
solliciter leurs avis, consulter leur expérience et
les associer ainsi aux grandes conceptions qu'elle
formait pour la prospérité de l'état. La faveur
dont l'autorité a investi les sociétés d’agriculture,
la confiance qu'elle leur a témoignée, ont appelé
sur elles l'estime et la considération publiques , et
en retour l'autorité a recueilli des renseignemens
sûrs , des observations judicieuses , et la facilité
de répandre dans toutes les classes, les instruc-
tions qu’elle juge nécessaires pour le progrès des
arts; ainsi par un heureux concours de bienveil-
lance et de dévouement , un meilleur ordre de
choses s’est établi, et plus de bonheur en a été la
conséquence naturelle. »
» La société d'agriculture de Lyon, organisée
dès l'année 1761 , dissipée durant les orages ré-
volutionnaires, et reconstituée au moment où le
calme reparut , n’a négligé aucun moyen de rem-
plir la noble tâche qu'elle s'était imposée. Les
de Lyon. 183
mémoires qu'elle a publiés, les concours qu'elle
a établis , ses comptes rendus attestent les ser-
vices dont la science agricole lui est redevable. »
» Le sol du département est en général ingrat,
extrêmement coupé , montueux , exposé à toutes
les intempéries , et offrant une multitude d’as-
pects défavorables ; cependant il est un de ceux
du royaume qui supporte le plus de contribu-
tions proportionnellement à sa surface , et celui
peut-être où l’art de cultiver la terre soit le plus
perfectionné. »
» Dans les montagnes du Beaujolais la navette
est venue au secours des habitans qui ne trou-
vaient pas dans les produits de leurs récoltes les
moyens de subsister. Le temps où ils ne peuvent
vaquer au travail des champs est employé à tisser
de la toile ou des étofles de coton, et l’aisance
qu'ils obtiennent tourne au profit de l'agricul-
ture. » |
» ÂAiülleurs, le propriétaire cherche à tirer tout
le parti possible du sol qui lui est échu. Là il
convertit des rochers, des landes, en riches vi-
gnobles ; les pentes les plus roides sont cou-
vertes de ceps ; des murs en terrasse , rappro-
chés les uns des autres, reçoivent la destination
de soutenir les terres. »
» Ici il plante le mürier , élève le ver à soie,
et supplée de cette manière les ressources que ne
peuvent lui fournir les céréales. »
184 Société royale d'Agriculture
» Plus loin , il multiplie les arbres à fruit,
s'attache aux espèces qui conviennent à la loca-
lité, eten fait un commerce lucratif. »
» Dans d'autres communes , il sème la gaude
propre à la teinture, dont il trouve à Lyon un
débit facile. »
» Le Mont-d'or se procure dans l'éducation
des chêvres et dans les excellens fromages qui en
proviennent , une branche d'industrie qui le
dédommage de ses soins. »°
» Plusieurs villages se livrent à la culture des
melons etd'uneinfinité de légumes qu'ils vendent
à Lyon ou dans les villes qui les avoisinent. »
» Ces diverses spéculations annoncent les pro-
grès de l’agriculture. La société n’y a point été
étrangère. » FE
» Mais il est encore d'autres objets susceptibles
d'amélioration , et qui réclament toute la solli-
citude , tout l’intérêt, toute l'attention de l'ad-
ministrateur. »
» Lyon, ville importante par son commerce ,
par ses manufactures et par sa population, Lyon
dont le gouvernement ne saurait trop encourager
les efforts , soutenir et diriger l'activité , tire les
matières premières qui alimentent ses ateliers de
contrées lointaines; ne serait-il pas d'une sagesse
infinie de l'affranchir de ce tribut en multipliant,
autant que possible, dans son territoire la plan-
tation du müûrier, en surveillant les filatures ,
de Lyon. 185
en introduisant la culture de la guède ou pastel,
du safran et d’une infinité d’autres plantes tinc-
toriales , en utilisant les poils de nos chèvres, et
en propageant l'éducation des moutons? Ainsi,
nous verrions successivement s’accroître l'indus-
trie agricole , et seconder de cette manière l'in-
dustrie manufacturière. »
_» Je ne pousserai pas plus loin ces réflexions, il
me suflit d’avoir indiqué le bien qui restait à
faire , pour être certain que ce sujet deviendra
l'objet continuel de vos profondes méditations.
La société dont il m’est flatteur d'être en cet
instant l'organe, s'empressera dans toutes les
circonstances où son concours pourra être néces-
saire, de vous donner des preuves de son zèle,
de sa bonne volonté et de son entier dévouement.»
En conformité de vos statuts, le renouvelle-
ment de votre bureau devait avoir lieu cette
année, M. Cochard a été réélu président à la
presqu'unanimité des suffrages ; M. Janson l'aîné,
juge au tribunal de première instance, a été
nommé vice-président à la place de M. le comte
Biverieulx de Chambost, qui, par suite d'une lon-
gue et funeste maladie, s’est retiré à la cam-
pagne; M. Grognier a été maintenu dans les
fonctions de secrétaire ; il en a été de même de
M. Zeroy-Jolimont | dans celles de secrétaire-
adjoint, chargé des archives, Conformément à
186 Société royale Agriculture
un article réglementaire jusqu'ici sans exécu-
tion, vous avez procédé à la nomination d'un
second secrétaire-adjoint , et M. le docteur Terme
a été appelé à cette fonction. M. Deschamps père
qui n'assistait pas à cette séance d'élection , a été
réélu trésorier à l'entière unanimité des suffrages.
Quatre noms honorables ne sont plus sur la
liste des titulaires, Ceux de MM. Fantet et Char-
relon , démissionnaires ; ceux de MM. Barre père
et Sainneville qui , ayant cessé d’habiter Lyon ,
sont devenus correspondans. Ces pertes ont été
réparées par l'admission de quatre nouveaux ti-
tulaires : MM. Bertrand, Poidebard, Gonin et
Coste.
Le premier, qui est ingénieur des ponts et
chaussées , et ancien élève de l’école polythecni-
que , s'occupe avec zèle du mécanisme des ins-
trumens aratoires, et pour quelques-uns il a
proposé d'heureux perfectionnemens.
M. Poidebard a établi aux portes de Lyon une
des plus belles magnoneries du royaume ; il y
élève depuis plusieurs années la belle race des
vers à soie blanche. Il a adapté à ses filatures,
avec le plus grand succès , les ingénieux appa-
reils de notre confrère M. Gensoul ; les nombreux
müriers qu'il a plantés se distinguent par leur
port et leur vigoureuse végétation. Depuis long-
temps sa place était marquée parmi vous.
de Lyon. 187
M. Gonin pouvait seul réparer la pérte que la
société avait essuyée par le changement de do-
micile de M. son frère. Il a concouru avec lui à
Ja renommée des fabriques lyonnaises, sous le
rapport de la teinture. Non content de pratiquer
avec la plus grande distinction l'art du tein-
turier , notre nouveau confrère s'occupe encore
avec un zele éclairé de celui du mécanicien. Il a
inventé ou perfectionné plusieurs instrumens
employés dans ses ateliers.
M. Coste, conseiller à la cour royale et admi-
nistrateur des hospices , s’est livré à des recher-
ches profondes sur les antiquités de notre pro-
vince; il à réuni les matériaux qui peuvent ser-
vir à l'histoire de l’agriculture comme de l'indus-
trie dans cette belle contrée. Ses lumières vous
seront précieuses dans toutes les questions rela-
tives à la statistique , science nouvelle , qui n'est
pas l’objet le moins important de vos travaux.
Tandis que la liste des titulaires s’enrichissait
de ces noms recommandables, vous inscriviez
sur celle de vos correspondans les noms de MM.
Seguin, d'Annonay, l’un chimiste habile, l’autre
grand manufacturier; ceux de M. Aimé Lair,
secrétaire perpétuel de la société de commerce,
agriculture et arts de Caen, et de M. Raulhac,
propriétaire et adjoint à M. le Maire d’Aurillac.
Le premier était connu de vous par les actes de
188 Société royale d'Agriculture
la société savante dont il est le digne interprète;
le second vous a adressé, sur les antiquités de
l'Auvergne , une dissertation pleine d'intérêt.
Pendant l'impression de cette notice, de nou-
veaux changemens sont survenus dans votre
liste, M. Vatel, qui était professeur à l'école
vétérinaire de Lyon, est passé en la même qua-
lité à l'école d'Alfort ; ayant laissé une place va-
cante dans la classe des titulaires, son nom a dû
être inscrit sur la liste des correspondans. Sur
cètte même liste vous venez de placer M. Chesnel,
lieutenant-colonel en retraite, et rédacteur du
journal polymatique du département de l'Hérault.
Une question importante a été agitée dans
plusieurs de vos séances , celle de l'établissement
d’un journal mensuel à la place du compte rendu
annuel de vos travaux.
Parmi les motifs qui ont été développés en
faveur de ce changement, celui qui a fait sur vous
la plus grande impression , c'est la facilité qu'of-
frirait un journal mensuel pour porter sans dé-
lai à la connaissance du public les découvertes
utiles. D'autres motifs vous ont fait ajourner cette
mesure ; mais vous avez voulu que sans attendre
la publication du compte annuel de vos travaux ,
quelques-uns de vos mémoires les plus impor-
portans fussent imprimés et publiés à part, et
que des exemplaires en fussent mis en réserve
pour être joints à la notice de vos actes.
de Lyon. 189
Deux ouvrages vous ont paru très-dignes de
cette distinction, l'un est un rapport présenté
par M. le docteur Terme, sur l'établissement de
M. Poidebard, Y'autre un mémoire de M. Bon-
nafous, correspondant à Turin, sur une édu-
cation de vers à soie.
(Voyez à la suite de cette notice).
SUIET DU PRIX
Sur la culture
des Abeilles.
190 Sociclé royale d'Agriculture
PROGRAMME
D'un Prix pour la culture des Abeilles dans le
département du Rhône, et de plusieurs Primes,
proposées par la Société » pour étre décernés en
1823 el 1824.
Ea 182 3
No content d'avoir tracé avec autant de méthode
que de clarté l'histoire naturelle des abeilles, et
d’avoir fait connaître les moyens de produire les
essaims artificiels, d'après la méthode de M. Lombard ,
M. Lacéne , l'un des membres de la Société, a offert
une somme de cent francs pour encourager un genre
d'industrie presque inconnu dans notre département,
et qui néanmoins pourrait y être établi avec avantage.
La Société , acceptant avec reconnaissance Les offres
généreuses de M. Lacène, a arrêté :
1.° Qu'un prix de cent francs , auquel serait ajoutée
uue grande médaille d'argent à l'effigie de Rozier ;
serait décerné au cultivateur qui aurait fait avec le
plus de succès des Essaims artificiels d'après la mé-
thode de M. Lombard.
2.2 Que la grande médaille d'argent serait ac-
cordée à celui qui, par des procédés quelconques,
aurait cultivé la plus grande quantité d'abeilles.
3.0 Que les concurrens présenteraient, à l'appui
de leurs mémoires , des certificats constatant leurs
opérations et leurs succès.
4.2 Que le concours auquel les cultivateurs du
de Lyon.
département pourraient être seuls admis, et même
en en exceptant les membres de la Société , serait
clos le 1." décembre 1823.
En 1825.
Il y a beaucoup de très-bonnes charrues à oreilles
fixes ; elles sont très-propres à labourer en planches
bombées. et en sillons Les terres humides qui re-
tiennent l'eau ; mais existe-t-il de bonnes charrues à
oreilles mobiles , autrement dites à tourme-oreille ,
avec lesquelles on puisse labourer à plat les terres qui
ne retiennent pas l'eau , telles que celles de la
majeure partie de notre département, de celui de
l'Isère, etc. ?
Comme une charrue de ce genre serait fort utile,
la Société accordera une prime à celui qui la fera
connaître; elle devra être assez solide pour labourer
à plat, à la profondeur de 9 à 12 pouces, en em-
ployant quatre chevaux ou quatre bœufs de force
moyenne ; elle sera légère, afin qu'étant attelée de
deux bœufs ou de deux chevaux également de force
moyenne , elle puisse labourer à la profondeur de 6
à 8 pouces, profondeur ordinaire du labourage des
meilleures charrues à tourne-oreille , lesquelles ont
le défaut de ne pas tenir la raie nette et de ne pas
bien retourner la terre.
Ou désire en même temps, que cette nouvelle char-
rue soit d'un entretien facile et peu coûteux, qu'elle
puisse même remplacer la charrue à oreilles fixes et
ouvrir sans effort les raies d'écoulement que l’on fait
ordinairement dans les terres labourées à plat.
La Société avait proposé, l’an deruier, une prime
pour des expériences comparatives sur le nouvel en-
Lre PRIME.
Indiquer la
meilleure Char-
rue à tourne-
oreille, pour la-
bourer à plat à
la profondeur
de gà rapouces-
o.me PRIME.
Comparer
grais végéto-minéral , dit Gadoue artificielle, et le les eflets de
l’engrais de li-
tière avec ceux
d'un compost
solide ou liqui-
de.
3,mt PRIME.
Comparer les
résultats de la
culiure du fro-
ment après les
pommes de
terre , et après
d’autres plan-
tes, telles que
le trèfle , le
chanvre, etc.
192 Société royale d'Agriculture
produit des fosses d'aisance ; elle a cru devoir cetté
année, donner un champ plus vaste aux agronomes
qui dirigent leurs recherches vers la préparation des
composts tant solides que liquides; elle les invite à
comparer les effets du fumier de litière pure avec un
engrais factice quelconque, n'importe le règne natu-
rel qui en aura fourui les matériaux ; elle désire que
le compost et le famier d’écurie soient employés
simultanément pour une récolte de même nature et
sur un champ qui ait au moins l'étendue de deux
bicherées ( environ 28 ares. }
Les concurrens feront connaître exactement les
procédés de fabrication du compost qu'ils auront
pratiqués , les dépenses qu'ils auront faites , et les
résultats qu’ils auront obtenus.
En 1824.
C'est une pratique assez répandue de faire suc-
céder le froment aux pommes de terre , cependant
plusieurs agronomes éclairés pensent que le froment,
semé immédiatement après la récolte de ces tubercules,
qu'on ne plante jamais sans engrais, produit en
général moins que celui qui succède au trèfle, au
chanvre, etc, ou à la jachère , après un bon fumage,
C'est pour mettre hors de doute les effets de ces
modes d'alternats, que la Société propose une prime
pour un essai comparatif de culture du froment,
après la pomme de terre, et après d'autres plantes
qui laissent dans la terre de l’eugrais, telles que le
chauyre, le trèfle, etc. La Société désire que cette ex-
périence soit faite sur une étendue de terrain au
moins de 2 bicherées lyonnaises (27 ares 64 centiares.)-
de Lyon.
Après un hiver rigoureux qui a fait périr beaucoup
d'oliviers, et qui en a mis un plus grand nombre
hors d'état de donner, de plusieurs années, une bonne
récolte, on sent plus que jamais combien il serait
avantageux d'étendre la culture des végétaux herbacés
oléiféres. Parmi ces plantes, il en est trois déjà cul-
tivées autour de Lyon, dont la Société désirerait de
connaître les produits par une expérience comparative.
La première est Le Colza, brassica oleracea campestris,
dont la propagation dans le Lyonnais est due à notre
illustre Rozier. La seconde est le pavot des jardins
(papaver somniferum ) , que M. Lortét cultive avec
succès depuis deux ans. La troisième est la moutarde
blanche ( sinapis alba), qui à été l’objet d'un heureux
essai tenté à la Guillotière par M. Poidebard.
La Société propose aux cultivateurs du département
de semer chacune de ces trois plantes au moins sur
une bicherée lyonnaise, de tenir note des frais de cul-
ture, de la quantité de graines employées , des pro-
duits obtenus. Uné prime sera la récompense de celui
qui aura le mieux rempli ces conditions:
L'un des correspondans les plus distingués de la So-
ciété, M. Duvaure, qui a écrit sur l'éducation des vers
à soie un ouvrage estimé, regarde comme trés-avan-
tageuse la pratique de greffer Les müriers. D'un autre
côté des éducateurs penchent pour Le mürier sauvageon;
et malgré sa longue expérience, le respectable Dan-
dolo n'a pas osé décider cette question.
C'est afin d'arriver à la solution de ce problème
intéressant , que la Société propose d'élever au moins
une once de vers à soie avec de la feuille de mürier
greffé , et la même quantité avec de la feuille de sau-
vageon. Elle désire que ces éducations aient lieu simul-
19
195 :
gume Prime,
Culture com=
parative de
trois plantes
lé
colza ( bras-
sica
oléifères ,
oleraceæ
campesfris )
le pavot des jar-
dins, (papaver
somniferum ) ;
et la moutarde
blanche , ( si=
napis alba: )
bime PRIME:
Comparer,
pour l’éduca-
tion des vers à
soie , la feuille
du müriergrefté
avec celle du
mürier non
greffé , vulgai-
rementditSau=
vageoti
194 Société Royale d’Agricullure
tanément , dans le même local , en employant les mé.
mes soins; et autaut que possible en donnant des
feuilles fournies par des arbres, nourris sur Le même
sol, etc. On tiendra note des quantités respectives
de feuilles consommées, de la durée de l'éducation,
et de tous ses produits.
Conditions générales à remplir par les concurrens.
Chacune de ces primes consistera en une médaille
de cent francs ou en la même valeur en numéraire,
au choix des concurrens couronnés.
Pour le prix et les primes à décerner en 1833,
les mémoires doivent être arrivés avant le 1.°*
décembre de cette année ; et c’est pareillement
avant la même époque de 1824 qu'on doit en-
voyer les mémoires pour les concours de cette
année. (Ces termes sont de rigueur.) Ils seront
adressés à M. Grognier , Professeur vétérinaire et
Secrétaire de la Société, ou à tout autre membre du
bureau.
Les coucurrens pour les primes , doivent être do-
miciliés dans le département du Rhône. Ils sont libres
de faire connaître leurs noms; les membres ordi-
naires de la Société ne sont pas admis au concours.
de Lyon. 195
TABLEAU
DE LA SOCIÉTÉ ROYALE
D'AGRICULTURE
En 1823.
PP se or PES
BUREAU,
MEessreurs
Le Comte de Brosses , O :% , Gentilhomme de la
Chambre du Roi, Maître des requêtes au Conseil
d'état, Préfet , Président d'honneur.
Le Baron Rawsaun, &, Maire de Lyon, Président
d'honneur.
Cocmarp , avocat en la Cour royale de Lyon ;.
Président.
JANSON aîné, juge au Tribunal de première instance ,
Vice-président.
Groenier , Professeur Vétérinaire, Secrétaire.
Leroy-Jorrmonr , Secr.-adjoint , chargé des archives.
TERME, Docteur en Médecine , Secrétaire-Adjoint.
Descamps père, Trésorier.
MEMBRES TITULAIRES.
MéssiEurs
1798. Rieussec >» &, Conseiller honoraire de la Cour
royale , place Louis-le-Grand.
Grognier , Professeur à l'école royale vétérinaire,
196 Société Royale d'Agriculture |
18or. Le chevalier Nugues, 4%, président de la Cour
Royale, rue du Peyrat.
Deschamps père, pharmacien , rue St-Domini-
que , n° 73.
Mognat de l'Ecluse, propr., rue de la Sphère.
1802. Carrel , propriétaire, quai de la Baleine.
Bellet de St-Trivier , propr. rue de la Charité.
Faissolles , propriétaire, à Vaize.
Le comte de Moïdière, x (Othon ), adminis-
trateur de la pépinière départementale, place
Louis-le-Grand.
1804. Passerat de Lachapelle , #, propriétaire, rue
du Peyrat.
Le Comte Riverieulx de Chambost , DK %,
Colonel de la Garde nationale, rue du Peyrat.
1806. Leroy-Jolimont, propr., place du Change.
Lombard, %#, propriétaire, rue Sala.
1807. Mognat de Licrgues, propr., rue de la Barre.
Eynard, médecin, place St-Clair.
Madiot, directeur de la pépinière départemen-
tale, clos de l'Observance.
1810. Pelletier, pharmacien , place du plätre.
De St-Didier , propriétaire, rue. Sala.
1611. Socquet, ancien professeur de la faculté à l'Aca-
démie de Lyon, place des Carmes.
Guerre, avocat, aux Célestins.
1812. Cochard , avocat, place St-Jean.
Le Chevalier Delhorme, # , membre de la
Chambre des Députés, rue du. Peyrat.
1813. Robin de Beauregard, &, propr. , rue du Plat.
de Lyon. 197
Lacèné, propr., place Louis-ic-Grand.
Dujat-des-Alimes , propr., pl. Louis-le-Grand.
Rainard , professeur à l'Ecole royale vétérinaire.
1814. Guillemet ; ancien professeur de la faculté de
l'Académie de Lyon, à Serin.
Honoré Thorombert, avocat, aux Célestins.
Barre fils, pharmacien , place de la Comédie.
1817. Dugas, adjoint à la mairie de Lyon ; rue royale.
Muthuon ; ingénieur en chef des mines et usines,
rue Rozier.
Deschamps fils ; pharmacien ; re $t-Dominique.
Bouchard-Jambon , mécanicien, rue de Vaubecour.
Cazot , propriétaire, rue du Peyrat.
‘ 2818. Le Chevalier de Martinet, 5%, Colonel en
retraite , rue Sala.
Le docteur Terme , rue du Peyrat.
Bouthier de Borgard, rie du Plat.
Jacquard, % mécanicien , rue Vaubecour.
Rémond , propriétaire, rue des Augustlins.
Janson , chirurgien-major de l'Hôtel-Dieu.
Acher, conseiller à la Cour royale, quai de la
Baleine:
Basset de la Pape, :% rue St-Dominique.
Tissier, professeur de chimie au musée des arts.
Jauson, juge au tribunal civil.
1819. Balbis , professeur de botanique, à la Déserte.
18:9. Billon, propriétaire, petite rue des Feuillans.
Michel, propriétaire , rue Puits-Gaillot.
Monnier , Avocat-général , rue St-Dominique.
1820. Trolliet, médecin , rue Puits-Gaillot.
198 » Société Royale d'Agriculture
1821. Cavenne , ingénieur en chef des ponts et
chaussées, rue du Plat.
De Fréminville , conseiller de préfecture.
Le marquis d'Herculais , administrateur de la
pépinière départementale.
Mottard , directeur de la poste aux chevaux.
Gensoul , artiste mécanicien.
1822. Foudras, naturaliste.
Gras, conseiller à la cour royale.
1823. Berthaud , ingénieur des Ponts et chaussées.
Poidebard , négociant, propriétaire.
Gonin, chimiste , temturier.
Coste, Conseiller à la Cour royale.
ASSOCIÉS VÉTÉRANS.
Messieurs
Chancey , à Belleville.
Frossard , naturaliste, à Partis.
Lanoix , pharmacien, à la Guillotiére.
Le Camus , à Paris.
Roux, professeur émérite de la faculté des sciences,
à Lyon.
Willermoz, rue des Fantasques.
Mouton-Fontenille , professeur d'histoire naturelle.
Rey-Monléan, propriétaire.
de Lyon. 199
ASSOCIÉS CORRESPONDANS.
Messreurs
Albanis de Beaumont, à Vernas.
Le Comte d’Albon, % , à Avranges.
Amoreux, médecin, & Montpellier.
Arthaud de la Ferrière, # , à Pierreu.
Arthaud , propriétaire, à Arles.
Aulanier , propriétaire.
Baunier , ingénieur des mines, à Paris.
Begon, propriétaire , à Ste-Hyppolite.
Belleval, propriétaire , à Montpellier.
Boesse, %, propriétaire, à la Thenaudière.
La Comte de Bondy, (C. #), à Paris.
Bonaire, &, ancien Préfet des Hautes-Alpes.
Bravet, médecin , à Annonay.
Brébisson , propriétaire, à Falaïse.
Buniva, professeur de médecine, à Turin.
Busson, ingénieur , à Paris.
Cadet-de-Vaux, de la Soc. d'Agr. de la Seine, à Paris,
Cartier-Trolli, propriétaire, & Trolli.
Le Comte Chaptal, de PInst., ( G. # 4), à Paris.
Le Comte Chasset, ( G. &), à Paris.
Le Comte Chabrol de Crousol , #& conseiller d'état,
à Paris.
Chenaud-Desportes , propriétaire , au Mans.
Chirat aîné, % , juge de paix , à Souzy.
Clément, ancien juge à la Cour de justice criminelle,
à Montpellier.
200 Société Royale NE ilure
Cuvier, le baron C.# , secrét. perpét. de institut,
à Paris.
David, propriétaire, au Ripeau, pi “és de Tours.
De la Chence, à la Chance.
Le baron de Gérando ( O &}, de l'Institut, à Paris,
Decandole , de l'académie des sciences, à Genève.
Depoix-Marescreux, propriétaire , 4 Marescreux.
De Rosni, à Valencienne,
Deschamps, propriétaire, à Eausanne. ‘
De Truchi, %&, officier de la garde royale , à Paris.
De Vellay, professeur de mathématiques , à Lausanne.
Le marq. d'Herbouville , pair de France C. #, à Paris,
Dubouchage de Brangues, propriétaire, à Brangues.
Dubouchage, propriétaire, à Grenoble.
Dumarché, propriétaire, à Pont-de-Vaux.
Dupalais, propriétaire, & Valence.
Duvaure, propriétaire, à Crest,
Faure Biguet, propriétaire, & Cresé.
Fleury, propriétaire, à St-Vallier.
inguerlin , négociant , en Suisse.
Le Comte François de Neufchâteau, de l'Institut,
( G % ), à Paris.
Gallois, ingénieur des mines, à Paris.
Gasparin, %, propriétaire , à Oranges.
Groflier, médecin, & Chalons-sur-Marne:
Guettat , mécanicien , à Rive-de-Giers.
Guérin, médecin , à Avignon.
Hauteville, propriétaire, à Vevay.
Le Vicomte Héricard-Ferrand de Thury ,O %, ingé-
mieur en chef des mines, à Paris.
de Lyon. 201
Hurtrel-d'Arboval , à Boulogne-sur-mer.
Huzard, % 4%, membre de l'institut, & Paris.
Huzard fils, médecin-vétérinaire , à Paris.
Jussieu, % 4, membre de l'Institut, à Paris.
Labbe , propriétaire, à Menufamille.
Le Comte Lacépède , (G.O.:% }, membre de l'Institut
à Paris.
Lamarck, #, membre de l'Institut, à Paris.
Lamartine , propriétaire , 4 Mäcon.
Lapierre, professeur d'histoire naturelle, à Roanne.
Le Comte de Laurencin, % %, à la Chassaigne.
Le Duc de Larochefoucauld , 5%, Q. %) pair de
France , à Liancourt.
Lavalette, propriétaire, 4 Grenoble.
Latournelle, propriétaire, à Coligny.
Leroy-Champfleury , propriétaire , à Genay.
Martin aîné, #, médecin , à St-Rambert.
Narcel de Serres, naturaliste, à Montpellier.
Matthieu de Dombasles, à Nancy.
Maurice , propriétaire, à Genève.
Menjot-d'Elbenne , propriétaire, & Couléon.
Molard , #, membre de l'Institut, à Paris.
Moscati, président de l'Institut Italien, à Milan.
Le Comte Najac, CC. % ) conseiller d'état, & Paris.
Noel, % , professeur d’éloquence, à Paris,
Palmieri, botaniste, à Milan.
Pictet de Rochemont , propriétaire , à Genève.
Le Chevalier Pierrard, % , à Verdun.
Pini, professeur de botanique, & Milan.
Le Marquis de Poncins, % , maire de Feurs.
202 Societé Royale d'Agriculture
Posuel de Verneau, %, à Paris.
Poutet, chimiste, à Marseille.
Prost, médecin , à Paris.
Rast-Dezarmaus , # , ancien Secr.-gén. de la Préfect.
au Mans.
Raulhac , à Aurillac.
Raymond, %, professeur de chimie, à St-Vallier.
Hippolyte de Rozières , & Messimi.
Riche, propriétaire , à St- Alban.
Le Chevalier Riboud , #% , à Bourg.
Le Comte de Saint-Vallier, ( G. O. %# ), pair de
France, à Paris.
Saint-Amans , à Agen.
Saloz, vétérinaire, à Odessa.
Scrheiber , directeur des mines, à Alemont.
Seguin , chimiste , 4 Annonay.
Seguin, manufacturier , & Annonay.
Servin-Cornon, propriétaire, à Cornon.
Souligné , propriétaire, à Foule-Tourte.
Silvestre , membre de l'Institut, $#, à Paris.
Tessier , de l'académie des sciences, # 4, à Paris.
Thiebault-de-Berneaud , l'un des bibliothécaires de
la Bibliothèque Mazarine , à Paris.
Thouin , membre de l’Institut , &, à Paris.
Thouin , jardinier en chef du jardin des plantes ,
à Paris.
Trouflaut, ancien professeur de botanique, à Autun.
Vaivolet, propriétaire , à St-Lager.
Valentin, $ 4, médecin, à Nancy.
Valot, professeur d'histoire naturelle, 4 Dijon.
de Lyon. 203
De Varenne-Fenille, % , à Bourg.
Valoud , propriétaire, à Fleurieux sur l Arbresle,
Vidaillan , propriétaire, à Auch.
Vitalis, propriétaire, à St-Vallier.
Volta, professeur de physique, à Pavie.
Waton, médecin, à Carpentras.
Fin du Tableau des Membres.
TABLE
DES MATIÈRES.
Considération sur la physiologie des plantes, dans
ses rapports avec l'agronomie.
STATISTIQUE.
Notice sur Longes et Tréves ; par M. Cochard.
Rapport sur la statistique des récoltes du départe-
ment en 1822, et sur le hétail existant à cette
époque ; par le méme.
Mémoire sur la statistique des chevaux du Rhône;
par M. Vatel.
Mémoire sur les dunes du golfe de Gascogne , et
description des moyens employés pour les fixer ;
par M. /e comte de Tournon.
ÉCONOMIE RURALE.
Notice sur l’art de creuser les canaux, d'ouvrir
des fossés et des routes , par des procédés éco-
nomiques ; par M. De Lachapelle.
Notice sur une Charrue charolaise ; par M. De
St. Didier.
Sur la Ptéride aquilline ; par M. Madiot.
Sur une nouvelle variété de figuier , à gros fruit
noir, en forme de fruit d'aubergine; par le
raême,
15
24
37
48
5t
53.
58
de Lyon.
Sur une variété de noisetier à feuilles pourpres ;
par par le méme.
Sur trois espèces d'érables indigènes ; par le méme.
Sur une espèce d'orme égyptien ; par le méme.
Sur un tuya peu connu ; par le méme.
Sur le poirier du Mont Sinaï ; par le /e mére.
Sur le pavia de Floride , à longues grappes; par
le méme.
Sur deux projets de plantation; par M. Fuissolle.
Sur un ouvrage relatif à la culture du mûrier ; par
M. Bonnafous , rapporteur M. Fuissolle.
Sur la culture des müriers et l'éducation des vers
à soie ; par M. Chancey.
Rapport sur un mémoire de M. Rubat, relatif au
renouvellement de la vigne; par M. Janson
l’aine.
Sur le procédé de M. Rubat; par M. Rey-Mon-
léan.
Nouvelles observations sur le procédé Gervaisien ;
par le même.
ART VÉTÉRINAIRE.
Sur la ferrure des grands animaux domestiques ;
par M. Vatel.
Notice sur le troupeau de la Rouge; par M. de La-
chapelle.
‘HISTOIRE NATURELLE.
Notice sur les insectes utiles et les insectes nuisibles
du département ; par M. Foudras.
205
5G
57
6a
61
62
64
65
66
94
99
206 Societé royale d'Agriculture
“Considérations sur l'exploration du département
sous le rapport de l'histoire naturelle ; par M.
Tissier.
Sur Le Carex plantaginæa ; par M. De Moidière.
ARTS UTILES.
Expériences de teinture avec le Bleu Raymond,
soumises à la Société, par MM. Raymond fils
et Souchon ; rapporteur M. Tissier.
De la filature des soies à la vapeur; par M. Gensoul.
Sur la mouture des céréales, et la percussion des
fluides ; par M. Faissolle.
Notes sur diverses machines propres à battre les
- blés; par MM. Chancey et Billon.
Sur une machine à braquer le chanvre ; par M.
Billon.
Sur une échelle-brouette présentée à la Société ;
par M. Bonnafous, et décrite par M. De St.
Didier.
OUVRAGES 1IMIPRIMÉS OFFERTS À LA SOCIÉTÉ.
Ouvrages périodiques adressés à la société.
Rapport sur des ouvrages imprimés ; par M.
Balbis.
Rapport sur des brevets d'invention qu'ont obtenu
des Lyonnais ; par M. Faissolle.
Rapport sur les annales de la société d'Orléans :
par M. Remond.
Rapport sur le procédé de décuvage de M. Dude-
vant; par M. Deschamps père.
Rapports verbaux ; par M. Tüissier.
III
120
de Lyon. 207
RÉCOMPENSES.
Médailles d'or et médailles d'argent pour la cul-
ture du mürier et l'éducation des vers à soie;
rapporteur M. Faissolles. 171
Médailles d’or à M. D’Eglise, pour un perfection-
nement dans la fabrication des étoffes de soie ;
rapporteur M. Gensoul. 175
Médaille d'argent à M. Souchon, pour fabrication
en grand de l'hydrocyanate ferrugineux de po-
tasse; rapporteur M. Tissier. 178
ÉVÉNEME NS. ; 180
PROGRAMME
D'un Concours et d'un Prix pour la culture des
Abeilles dans le département du Rhône , et de
plusieurs Primes, proposées par la Société, pour
être décernés en 1823 et 1824. 189
En 1823.
SuIET pu Prix.
De la culture des Abeilles. ibid.
1. Prime. Indiquer la meilleure charrue à
tourne-oreille , pour labourer à plat, à la pro-
fonudeur de g à 12 pouces. 190
2.mMe Prime. Comparer les effets de l’engrais de
litière avec ceux d’un compost solide ou liquide. ibid
3.M€ Prime. Comparer les résultats de la culture
du froment après les pommes de terre, et après
d'autres plantes, telles que le trèfle, le chanvre,
etc, 10
…
208 Societé royale d'Agricullure , etc.
£me Prime. Culture comparative de trois plantes
oléifères , le colza (brassica oleracea campes-
tris ); le pavot des jardins, (papaver somnife-
rum ); et la moutarde blanche, ( sinapis alba). 192
b.me Prime. Comparer, pour l'éducation des vers
à soie, la feuille du mürier greffé avec celle du
müûrier non greffé, vulgairement dit Sauvageon. ibid.
Conditions générales à remplir par les concurrens. 194
Tableau des Membres. 195
Fin de la Table.
ERRATA.
Pag. 53, lig. 21, Souges ; lisez Fouge.
ëd. ‘lis. 27. ibid.
61, note marginale, tuya ; lisez: thuya.
Got Het, 11. RIENN
78 , lg. 9, plantes; lisez : plants.
88, lig. 1 , fourbure ; lisez : ferrure.
100 , note, colonites ; lisez : celonites.
id. Matilla ; lisez : Mutilla.
101 , lig. 15 , sapins; lisez : pins.
id. lig. 26, plaines; lisez: plages.
102 , lig. 23, bourdonne ; lisez : abonde,.
107 , lig. 12, treïlles ; lisez: taillis.
118 , lig. 17, pouces ; lisez: pans.
135 , lig. 6, d’un quart ; lisez : à un quart.
136, lig. 2 , le condensateur ; lisez: la
condensation.
137, lig. 26, à l'instar; lisez : de méme
que.
139 , lig. 22, dissident ; lisez : d'incidence.
141 , lig. 24 , 20 pieds ; lisez: 10 pieds.
186 , lig. 13; Bertrand ; lisez: Berlhaud.
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RAPPORT
PRÉSENTÉ
A LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE
DU DÉPARTEMENT DU RHONE,
SUR LES ÉTABLISSEMENS FORMÉS PAR M. POIDEBAR,
A S."-ALBAN ,
AU NOM D'UNE COMMISSION;
Par Mr le Dr TERME,
Imprimé par ordre de la Société.
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RAPPORT
PRÉSENTÉ
A LA SOCIÉTÉ D’AGRICULTURE
DU DÉPARTEMENT DU RHONE,
SUR LES ÉTABLISSEMENS FORMÉS PAR M. POIDEBAR ;
A S."-ALBAN ,
* AU NOM D'UNE COMMISSION;
Par Mr le Dr TERME,
Imprimé par ordre de la Société.
A LYON,
DE L'IMPRIMERIE DE J.M. BARRET:4
1823.
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RAPPORT
PRÉSENTÉ 4 LA SocIÉTÉ D'AGRICULTURE
DU DÉPARTEMENT DU RHÔNE , sur les
Etablissemens formés par M. Poxvesar,
a St-Alban, au nom d'une Commission,
par M. le Dr TERME.
Messieurs,
L'agriculture et industrie , d'où naît la pros-
périté des Etats, sont unies par des liens
indissolubles; en vain, plus d’une fois, a-t-on
voulu les considérer comme des rivales jalouses ;
personne n'ignore aujourd'hui que les eflorts
de Sully ont amené les projets de Colbert , et que
les progrès de l'agriculture ont préparé les succès -
de l'industrie et du commerce. Sous un autre
point de vue, il est également certain que le com-
merce, à son tour, a réagi.sur l’agriculture, lui
(6)
a donné son essor et communiqué son activité.
Sans le commerce en effet l’agriculture, étouffée
sous le poids de sa propre fécondité , succom-
berait bientôt par suite d’une pléthore mortelle,
que la rapide circulation de ses produits peut
seule prévenir. Cette double vérité est sur-tout
incontestable pour notre Cité ; ses richesses re-
posent sans doute sur l'étendue de ses relations
commerciales ; mais ces mêmes relations seront
désormais garanties par l'extension de la cul-
ture des mûriers en France ; et c'est par cette
culture que nous arracherons à l'étranger
le pouvoir de disposer de la fortune et souvent
de l'existence de notre population manufacturière.
Aussi, Messieurs, votre Commission peut
se féliciter des fonctions que vous avez bien
voulu lui confier ; elle le peut d'autant plus,
qu’ellé va vous entretenir d'un établissement
qui doit accroître la prospérité de nos manufac-
tures , et que les éloges que vous allez entendre
s'adresseront à deux de nos plus estimables
compatriotes.
Chargée de visiter les établissemens que M. Poi-
debar a destinés à élever les vers à soie, à filer
et à mouliner leurs produits , votre Commission
se rendit à St-Alban le 10 juillet 1822 , elle y
trouva la filature et le moulinage en pleine acti-
(7)
vité, Vous connaissez déjà les efforts de M.
Poidebar pour naturaliser dans notre départe-
ment la belle race des vers à soie blanche; qu'il
nous soit permis de vous les retracer en peu de
mots ; nous vous ferons connaître ensuite les .
développemens qu'il a donnés à ses premiers
essais , ainsi que les avantages qu’il retire pour sa
filature de l'appareil si simple et en même temps
si ingénieux de M. Gensoul.
Il y a cinquante ans environ que le Gouver-
nement fit distribuer dans le Vivarais et le
Languedoc des graines de vers à soie blanche,
qu’il avait fait venir de Chine. Les agriculteurs
éclairés de Bourg-Argental , des Cevennes et de
Roquemaure furent à peu près les seuls qui
triomphèrent des premières difficultés , bra-
vèrent d’injustes préjugés , et en cullivant cette
race si belle lui conservèrent toute sa pureté,
En 1812, M. Poiïdebar fit venir des graines dé
Bourg-Argental, d’Alais et de Roquemaure , et
de ces trois sources différentes il oblint des ré-
sultats semblables et des produits également
beaux , quoiqu'il soit généralement reconnu que
la race de Bourg-Argental est supérieure à
toutes les autres.
Encouragé par ce premier succès, il donna
bientôt une plus grande extension à ses projels.
(8)
En 1814 sa propriété de St-Alban se couvrit de
müûriers à plein vent et en taillis. Jusqu'en 1818
1] n’avait pu élever qu’une petite quantité de vers;
mais à cette époque il fit construire un premier
atelier pouvant contenir 12 onces de graines, et
porta l'éducation totale à 18 onces; en 1819 cette
éducation fut portée à 24 onces avec un plein suc-
cès. Cette même année , les efforts de M. Poidebar
reçurent les plus honorables encouragemens ;
vous lui décernâtes, Messieurs, une médaille d'ar-
gent et une prime de 30of. ; ses soies filées lui
obtinrent à l’exposition une autre médaille d'ar-
gent, (r) et les cocons qu'il envoya à la Société
d'encouragement , lui méritèrent l'honneur de
partager avec M. Rocheblave une prime de 2000f.
En 1820 un nouvel atelier fut construit, et
l'éducation totale portée à 43 onces , en y com-
prenant 10 onces confiées, sons la condition de
partager les produits, à des agriculteurs voisins.
L'année suivante 30 onces furent également,
et sous la même condition, distribuées à des
facteurs des environs , et l'éducation totale, qui
s'éleva à 75 onces, offrit les résultats les. plus
satisfaisans.
(1) Cette Médaille est la seule qui, à l’exposition de
1819, aït été accordée à un fileur.
C9)
Jusqu'à cette époque , Messieurs, vous aviez,
ainsi que MM. De Lézay-Marnésia et De Tour
non , successivement préfets de ce département,
suivi les progrès de l'établissement de M. Poi-
. debar avec un vifintérêt ; mais en 1822 cet éla-
blissement devait prendre à vos yeux une impor-
tance bien plus grande encore, par l'adoption
du procédé de M. Gensoul pour la filature des
cocons : aussi la mission de vos Commissaires
consistait-elle spécialement dans l'examen des
avantages obtenus par ce procédé.
Au mois de mars 1822 M. Poidebar avait ieté
les fondemens d’un bâtiment de 8o pieds de lon-
gueur sur 27 de largeur , destiné à recevoir lap-
pareil de M. Gensoul ; et dès les premiers jours
de juillet vos Commissaires ont trouvé cet ap-
pareil en pleine activité, et desservant 24 bas-
sines, nombre qui pourra être porté à 36. Vous
connaissez, Messieurs, l'appareil si parfait de
M. Gensoul, et cependant nous croyons devoir
vous en présenter une description rapide et peu
“détaillée, qui suffira pour vous en rappeler l'in-
contestable utilité. Distribuer un calorique suffi-
sant à un nombre indéterminé de bassines, à
l'aide d'un seul feu, régulariser le travail des
fileuses , porter facilement et avec rapidité l'eau
des bassines à une température voulue, conserver
(1o )
à cette eau toute sa pureté, enfin augmenter la
quantité des produits filés , tel était le but que
s'était proposé M. Gensoul, tels sont les avaniages
que son appareil présente.
Cet appareil consiste en une chaudière munie
d'un vapomètre et d’une soupape de sûreté ; elle
est assise sur un foyer alimenté par du charbon
de terre; la vapeur dégagée se rend dans un
grand conducteur qui traverse horizontalement
l'atelier , dans toute sa longueur, et se trouve à
environ 10 pieds au-dessus du sol ; de ce conduc-
teur général partent , de distance en distance,
des conduits latéraux qui descendent vers les bas-
sines, et qui, avant d'y arriver, se bifurquent
de manière à en chauffer deux à la fois ; ces
conduits garnis d’un robinet , à peu de distance
de leur extrémité, se terminent par un tuyau
qui plonge dans la bassine , et qui, percé d'un
grand hombre de petits trous , laisse échapper la
vapeur. Les robinets plus ou moins ouverts
servent aux fileuses à activer ou à diminuer la
chaleur. La vapeur en arrivant dans l'eau froïde %
qu'elle échaufle en peu de minutes, fait entendre
un sifflement particulier , qui cesse complète-
ment lorsque l’eau est arrivée à la température
de 60 degrés ; entre 65 et 70 degrés, tempé-
rature convenable pour filer, l'eau éprouve une
Car)
espèce dé frémissement assez sensible qui devient
une vive ébullition à 75 degrés , chaleur néces-
saire pour battre les cocons. Tous ces phéno-
mènés bien connus peuvent servir , et servent
en effet, de thermomètre aux fileuses : celles-ci,
n'étant point occupées à entretenir le feu comme
dans l’ancien procédé, peuvent se livrer cons-
tamment à la filature ; enfin la vapeur se con-
densant dans les bassines , renouvelle sans cesse
l’eau avec une eau d’une extrême pureté, puis-
qu’elle est distillée. Aussi les produits obtenus
avec l'appareil de M. Gensoul présentent une su-
périorité sensible sur ceux que donne l'ancien
procédé. Votre Commission fit la comparaison
de deux écheveaux filés ‘par les deux procédés , et
donna la préférence à celui filé à la vapeur ; elle
compara aussi ces deux écheveaux à de la soie
de Chine de première qualité’; et la’ très-
grande supériorité de la soie indigène RER
tous les yeux.
M. Poidebar à fait connaître à vos Commis-
saires les avantages qu'il a retirés cette année de
l'appareil Gensoul. « Il en a été complètement
» ‘satisfait ; ( je me sets de ses expressions ; }1l y
» a trouvé comparativement à l’ancienne mé-
» thode une économie des trois quarts du com-
C12)
» bustible, une plus grande quantité d'ouvrage
» résultant du travail des fileuses, qui peut être
» évaluée à un dixième, enfin plus de perfection
» et d'éclat dans la qualité des produits. » L'ex-
périence de M. Poïdebar n'est sans doute pas
destinée à établir la réputation de l'appareil de
M. Gensoul, connu depuis près de vingt ans,
et justement apprécié par tous les fileurs qui
l'ont adopté ; mais l'application de ce procédé à
la filature des soies blanches lui a fait recon-
naître une nouvelle propriété, celle de conser-
ver tout leur éclat.
Votre Commission a aussi visité les ateliers
destinés chez M. Poidebar au moulinage des soies.
Ce moulinage se composait alors de 300 tavelles
de devidage , de 80 broches de doublage , ‘et de
7 ovales contenant chacun 288 fuseaux pour
retordre la soie ; trois nouveaux ovales ont été
ajoutés aux précédens , ce qui porte la totalité
des fuseaux à 2880. Tout cet appareil est mis
en mouvement par une grande roue de 20 pieds
de diamètre et de 4 pieds et demi de large ,
placée verticalement, et dans laquelle marchent
deux chevaux de petite taille. Cette machine,
qui rappelle l’enfance de l'art, n'est pas digne
du reste de l'établissement, et réclame des chan-
(13)
gemens que M. Poidebar ne tardera pas sans
doute à faire. (1)
En parcourant ensuite la propriété de Saint-
Alban , vos Commissaires ont admiré Pétendue
et la vigueur des plantatious de mûriers, et il
leur a paru évident que l'exemple de M. Poidebar,
et plusencore la quantité considérable de feuilles
qu'il consomme chaque année, ont contribué
puissamment à encourager la culture du mû-
rier , culture que depuis quelques années vous
vous êtes constamment efforcés de propager
dans ce département.
Après vous avoir présenté une esquisse bien
imparfaite de la situation des établissemens de
M. Poidebar, qu'il nous soit permis d'observer
que le spectacle intéressant d'une filature est at-
tristé par la vue des jeunes filles occupées à
faire tourner les rouets. Ces femmes agitées sans
césse d'un mouvement réoulier, mais pénible,
n’ont d'autre point d'appui qu’une corde sus-
pendue aux solives, et portent sur leur visage
lexpression du malaise; leurs travaux les ex-
(1) Au moment où ce rapport s’imprime, nous apprenons
que M. Poidebar fait des essais pour appliquer à son mou-
linage uné machine à vapear.
(14)
posent à des dangers que l'hygiène doit signaler.
Espérons donc que l'habile mécanicien à qui nous
devons l'une des plus ingénieuses applications
des propriétés de la vapeur aqueuse aux arts in-
dustriels, parviendra à remplacer le travail de
ces tourneuses par une puissance physique ; en
diminuant la dépense des fileurs , il rendra un
véritable service à l'humanité. (1) |
Ici, Messieurs, devrait se terminer le travail
de votre Commission et de son rapporteur ; re-
tracer les efforts de M. Poidebar , décrire l'ap-
pareil de M. Gensoul , c’est faire le plus pom-
peux éloge de ces deux excellens citoyens. Mais
dans les circonstances où nous sommes , lorsque
les débouchés de nos marchandises manufacturées
se resserrent de jour en jour, lorsque l'Angleterre
annonce avec orgueil que ses manufactures de
soie produisent cinq fois plus que les nôtres, au
moment où nos voisins élèvent de toutes parts
(1) Le vœu émis par le Rapporteur a depuis long-temps
été prévenu. MM. Laporte et Pellet, de St Jean-du-Gard, et
M. Lacombe, fils, d’Alais , sont brevetés pour avoir rem-
placé le travail des tourneuses par une force physique.
MM. Chambon fils , d’Alais, Reboul de Mondragon, et Bon-
nard, de Lyon, ont aussi cherché à obtenir le même ré-
sultat; mais tous les moyens employés jusqu’à ce jour
réclament de nombreux perfectionnemens.
(15)
des établissemens rivaux , où de mauvais Fran-
çais , disons-le avec douleur, de mauvais Lyonnais
portent dans le royaume Lombardo-vénitien les
admirables méliers de notre collègue M. Jacquard,
et reçoivent la récompense de leurs efforts par-
ricides, hâtons-nous de dire et de répéter que
notre industrie loin de se décourager doit redou-
bler d'activité. Délivrons - nous de l'assistance
de l'Italie | couvrons notre sol fertile de mû-
riers , et sachons nous-mêmes nous fournir les
matières premières que le sol humide et glacé de
l'Angleterre lui refusera toujours. Ainsi nous
parviendrons à paralyser les efforts de nos rivaux,
à donner à nos manufactures un développement
d'autant plus grand que leurs produits seront
moins coûteux , et à faire préférer sur tous les
marchés du monde nos étoffes , encore si supé-
rieures par la solidité de leurs couleurs et la
variété de leurs dessins.
Pour contribuer, autant qu'il est en notre
pouvoir , à atteindre de pareils résultats , nous
devons nous empresser d'encourager les hommes
qui cherchent à accroître et à perfectionner nos
manufactures ; en conséquence , Messieurs,
votre Commission vous propose de donner aux
travaux de MM. Poidebar et Gensoul la plus
grande publicité possible ; et, dans l'espérance
(16)
que le Gouvernement jugera convenable de ré-
compenser leurs eflorts , elle vous propose ,
en outre , d'adresser une copie du présent rap-
port à M. le Préfet de ce département.
Lu et adopté les Conclusions à la séance du
31 janvier 1823.
N. F. COCHARD, Président.
MÉMOIRE
SUR UNE ÉDUCATION
DE VERS A SOIE (En 1822),
Présenté à la Société Royale d'Agriculture , Histoire naturelle
et Arts utiles de Lyon ;
Par Mr Marrureu BONAFOUS,
MEMBRE TITULAIRE DE LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE DE TURIN, ET
DIRECTEUR DU JARDIN EXPÉHIMENTAL DE LA MÊME SOCIÉTÉ 3
ASSOCIÉ CORRESPONDANT DE CELLE DE LYON ; LINÉENNE DE
PARIS , etc,
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DES Artem experientia fecit ;
Exemplo monstrante viam.
LYON,
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IMPRIMÉ PAR ORDRE DE LA SOCIÉTÉ.
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1.1! 50 avril.4 14 degrés 12-17 AU 61 - 57 beau temps.
2.° | 1 mai. À 5 8 - 14 | 50 - 47 À vent et pluie.
5e > » 16 7 = 14 20 — 40 vent.
17 6-14 À 215 - 25 À beau temps.
17 10 - 16 À 925 - 27 À pluie.
18 9-18 | 26- 56 | pluie.
19 9 - 17 25 - 4o À beau temps.
19 19-25 | 25 - 4o À beau temps.
20 14 - 20 À 25 - 55 | pluie etorage.
21 13-22 | 25 - 50 | pluie et orage.
21 12 - 1d 25 - 30 | temps nébul.
CHAMBRE CHAUDE. 3
OBSERVATIONS.
Le poids de la graine était de 3 onces. — Ce jour a été le plus serein
qu'on ait eu depuis un mois. |
La graine pesée aujourd'hui n'a présenté aucun déchet. — On
1
|
l
l
‘commencé à ailumer le poêle.
D Le poids de la graine a diminué de 22 grains.
Le poids de la graine a diminué de 40 grains. —_ I] a fallu tempérer
la sécheresse intérieure par plusieurs arrésemens.
Le poids de la graine a diminué de 54 grains. — L'état de la Hhoille
a engagé de maintenir dans cette journée la mème température qu'hier.
Le poids de la graine a diminué de 76 grains. — En ouvrant l'œuf,
l'embryon parait formé. — On remue doucement les œufs deux ou trois
fois par jour , jusqu'à ce qu'ils commencent à éclore.
Le poids de la graine a diminué, jusqu'a ce jour, de 114 grains, ce
qui forme le quinzième du poids total. — Les œufs commencent à blan-
chir et pétillent un peu. — Le fhermométrographe fit connaître que
|
|
Vassistant avait laissé monter la chaleur à 21 degrés dans la matinée, |
et la température fut abaissée insensiblement à 19 degrés. |
On a cessé d'observer le déchet de la graine , attendu que de 4 à |
8 heures du matin quelques vers sont éclos. — On a étenda sur la
graine une feuille de papier troué, sur laquelle on a placé de petits ra- |
Meaux de jeunes müriers. |
Depuis 4 heures jusqu'à ro heures du malin beaucoup de vers sont :
éclos. — Vus à la loupe , ils paraissent châtains foncés , avec un collier
blanc. — Leur longueur est d’une ligne environ. — Ces premiers -nés
n'ont point été conservés.
Du lever du soleil jusqu'à midi , les vers sont sortis de leurs coques
en quantité innombrable. — On les a transportés en plusieurs fois , avec
les tables: de transport | dans l'atelier qui leur est destiné. — Tous
les vers nés après ceux-ci n'ont point été gardés.
Les coques des vers et les œufs non éclos pèsent environ le sixième
du poids total de la graine. — Déduction faite du poids des vers qui
m'ont point été conservés, et de ceux qui ne sont point éclos, il ne
reste à élever qu'une quantité de vers à soie provenus de deux onces
de graines , soit près de 80,000 vers.
4, DIRECTION DE L'ATELIER. .
?
[ , HYy£r0o- ESPAC :
quantité | TEMPÉRATURE | ETAT are
par les vers
Jours| Dates.} 4e 1a dans de sur les claies.
téri l’inté- s ts,
feuille, Jintériéure. | "an | yieur l'atmosphère.
couchant. larseur.| long.
pieds. | pieds.
s - beau temps.
2. pluie. UOTE
Il
| 3e pluie et ciel né- slaû
buleux,
4.e pluie: |
LA Jciel un peu nébu-
leux. |
OBSERVATIONS.
L'atelier est une tour isolée, située au bord d'un large ruisseau : me-
urée intérieurement elle présente un carré dont chacun des côtés est
le 20 pieds dans tous les sens. On y a pratiqué cinq croisées et vingt
oupiraux , dont 15 dans les murs et 7 dans le plancher supérieur. La
orte est précédée d'un vestibule qui sert d'abri aux ouvriers. Deux
oûles sont placés dans deux angles diagonalement opposés ; et sur un
es côtés est une cheminée qui sert principalement à faire des feux de
ammes; L'atelier sert aussi de chambre chaude.
Les claies sont au nombre de 40 , ayant chacune 15 pieds de longueur
ur 5 de largeur { de manière qu'on peut élever commodément les vers
soie provenant de 4 onces de graines ). À la bauteur de 10 pieds , une
ralerie de bois borde intérieurement les quatre murs, et rend le service
e l'atelier très-facile. :
» L'éducation régulière des vers à soie a commencé vers le milieu de
jette journée. — La feuille épluchée et coupée très-menu a été donnée
n deux repas, à 4 h. et à 10 h. du soir ; mais dans l'intervalle on leur
à donné quelques petits rameaux.
» Les vers prennent une couleur livide et leur tète commence à grossir.
= La feuille leur a été donnée en 4 repas, non compris quelques feuilles
ju'on leur a distribuées dans les intervalles. — À chaque repas on leur a
fuit occuper plus d'espace pour qu'ils ne s’endormissent point les uns
sur les autres.
Dans la matinée, la moitié environ des vers s'est assoupie. — Au lieu de
4 repas on leur en a donné 5, pour que ceux qui ontencore appétit ne s'en-
dormissent pas trop de temps après les autres. — Le soir on à fait des
feux de flammes plusieurs fois, et on a ouvert en même temps les sou-
Biraux. — On leur a donné quelqués feuilles à ronger entre les repas.
Au lever du soleil on a trouvé tous les vers endormis. — Dans la
journée quelques-uns se sont éveillés. On a donné peu à manger à ces
) érniers pour qu'ils ne devançassent pas trop les autres. .— On a fait
deux fois des feux clairs, et tenu les soupiraux ouverts.
[NA 9 heures du matin on a délité les vers éveillés les premiers. —
Dans ce jour tous les vers s’éveillent. — Ils sont quatre fois plus longs
Qu'ils n'étaient à leur naissance. — On a fait trois fois des feux de
flammes et ouvert Les soupiraux. -- Les vers dans cet âge ne se vident
que très - peu.
© PREMIER AGE. 5
ne
6 112 1 SECOND
à ; hygro- | = ESPACE
quantité} TEMPÉRATURE re ETAT occupé
par les vers
Jours| Dates. de la at, dans de sur les claies.
: extérieure 1: É “ A nr
feuille. À; térioure. Le l'inté- À l'atmosphère. |
couchant rieur. larseur.} long.
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3.el17 » 16 18 > 49% beau temps,
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l
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2.116 » | 13 84187 11 - 25739 - 46{ beau temps.
3 | 27
AGE.
OBSERVATIONS.
De grand matin on a achevé de déliter les vers. — La feuille a été
donnée en 6 repas. — Les rameaux employés à les lever leur ont servi
pour le premier repas. — Dans le délitement on n’a pas trouvé un seul
vers mort. — On a fait le soir un feu de flammes.
Dans cette journée on a fait trois fois des feux de flanimes. — Les
ers prenvent de l'appétit. — Leur tête grossit et devient plus blanche.
Quatre repas , les deux premiers moindres.
Dans la matinée quelques vers se sont assoupis. — Vers les 4 heures
lu soir la chaleur extérieure s'étant élevée à 29 degrés , on a pourtant
maintenu la température de l'atelier à 19 d. , en ouvrant la porte, les
oupiraux et les fenêtres. — On a fait des feux de flammes et des arro-
jemens. — Quatre repas, les deux premiers plus forts.
Presque tous les vers étaient endormis et le plus grand nombre s'é—-
reille. — La feuille fut distribuée suivant le besoin. — Au milieu de
a journée on a fait un feu de flammes. — Les jeunes vers annoncent
me santé robuste. — On remarque sur leur dos deux lignes courbes
mblables à deux parenthèses. ( ) — Leur longueur est de 6 lignes. —
Dans cet âge ils ont rendu un peu plus de matière excrémentielle,
oujours dure et noire.
ns
TROISIÈME
, ESPACE
| ÉTAT orcupé
par les vers
sur les clairs
quantité À TEMPÉRATURE
de la
extérieure
intérieure. au
couchant.
feuille.
Jargeur.| long
ne
pieds. | pieds,
2°
beau temps.
ciel nébuleux.
beau, grand calme
nébuleux et vent,
pluie et vent.
OBSERVATIONS.
À 7 heures du matin où a commencé le délitement
petits rameaux comme à l'ordinaire. — On à observé
n'ont pu müer, et on lés a mis à part. — Le corps des chenilles se dé-
veloppe ; il blanchit un peu , et leur tête prend une couleur brune. — Leur
appétit est modéré. — Le peu de vers qui dormaient encore hier
réveillent. — On à fait trois fois des feux de flammes. — L
donnée en 4 repas. — Dans cet âge on la coupe un peu moin
des vers avec de |
quelques vers qui |
au soir se ||
s menu.
De grand matin on a délité les vers éveillés les derniers, — On ne leur
Ja donné que 4 repas et quelque peu de feuilles de temps en temps. Les deux
derniers repas sont les plus forts, eu égard à leur appétit qui augmente.
Les vers s'allongent et deviennent transparens. — On leur a servi
P
repas, les deux premiers plus forts. — On maintient la température ci
contre à l'aide des deux poèles.
On fait des feux de flammes qui agissent efficacement sur la sañté des
Yers. — On a donné 4 repäs progressivement plus légers.
Depuis midi, ces poêles n’ont plus été allumés. — On a fait des feux |
de flammes vers la nuit. — On à donné 5 repas , et quelque peu de
feuilles dans les intervalles. — L'atelier conserve une odeur agréable.
, Les vers S'assoupissent. — On a fait des feux de flammes. — On à
distribué un peu de feuilles au fur et à mesure de leur besoin.
Les vers $e sont éveillés assez régulièrement dans le cours de la journée,
ét le soir où les a délités, — On en a trouvé une vingtäine qui n'ont point
mué. — Le temps pluvieux parait avoir retardé uñ peu lé réveil des
Vers. — Les petits rameaux employés à les lever, ont servi de premier
repas. — Six heures après on a donné trois livres de feuilles. — Le
corps des vèrs parait sans poil. — Le mouvement de leurs pattes , qüand
ôn leur donne à manger produit déjà un murmure qui réssemblé au
Bruit de la pluie. — Leur longueur est de plus de douze lignes.
& ;
a feuille a été ||
QUATRIÈME
BEA BUS hygro- , ESPACE
uantité T£LMPERATURE ETS EÉ T.AUT occupé
par ies vers
de la ER dans de sur ies claies
feuil'e larme ECS lat hè
uille. 7e. su 4 atmosphère. |
à intérieure, ONE rieur . 2e P Men loug
nn ne | TD À RER T2, MERE EN TELOMONEETIEENCD | eorremmeu ss : à
liv. one pieds, | pieds,
48 17 19 - 21) 55 - 6, {temps nébuleux.
80 16 = 17/12 - 25062 - 65 beau temps.
100 16 - 17113 - | - 72} beau temps.
DE 17 14,- 22765 - 80Ë beau temps.
3 | 155
Go 17 15 - 2760 - 784 beau temps.
|
14 17 -.18/15 - 25/40 - 45 lheau temps.
» 17 = 18 16 - 25555 - 85 beau temps. :
à agde FR On
OBSERVATIONS.
Tous les vers sont éveillés et on les a délités. — On à fait matin et
soir des feux de flammes. — Trois repas, celui du milieu est le plus fort.
Dans le cours de la journée trois feux de flammes. — Quatre repas
de six en six heures, en les augmentant progressivement. — La feuille
best grossièrement coupée. — Le ver s'agrandit, et sa peau continue à
blanchir.
Quatre repas en quantité progressive, et trois fuis des feux de flam-
mes. — Feuille non coupée.
Il y a entre les claies supérieures et celles d'en bas un degré de dif-
férence , en sorte qu'on isdique ci-contre la température moyenne. —
Les vers se raccourcissent un peu, et deviennent couleur de cire. —
On a arrosé plusieurs fois le pavé et ouvert les soupiraux et les fenêtres.
-- Quatre repas toujours progressifs , en élargissant chaque fois Les bandes
de vers à soie. -- Feuille non coupée.
Sur les 4 heures la température s'est élevée intérieurement à 19 deg.
sans qu'on ait pu la modérer. -- Encore 4 repas distribués comme pré-
cédemment. -— Les vers se vident très-bien, -- Leur matière excrémen-
teuse pulvérisée paraît d’un vert très-foncé. -- Pour le dernier repas on
a coupé la feuille pour mieux la répartir. -- On à fait quatre fois des
feux de flammes , et arrosé plusieurs fois l'atelier. -- Une partie des
vers commence à s'endormir. -- On a présenté aux vers à soie quelques
feuilles du broussonetia papyrifera W , mais ils l'ont refusé.
La chaleur de l’atmosphère n'a pas permis de maintenir la tempéra-
ture intérieure à 17 deg. -- On a donné quatre repas , et, comme les vers
s'assoupissent, on à diminué progressivement la quantité de la feuille.
-- L'atelier conserve une odeur agréable, ou plutôt il n'en a aucune.
On a fait trois fois des feux de flammes. - On a arrosé l'atelier , et on y
a placé des baquets d'eau pour tempérer par l’évaporation la sécheresse
$ qui y domine. -- Sur le midi les vers ont commencé à s'éveiller , et ils
vont tous accompli leur quatrième âge dans la nuit avancée. -- Les vers
“ont 20 lignes de longueur. æ— Dans cet âge et dans le suivant on s'est
attaché à leur donner de Ja feuille cueillie sur de vieux müriers.
ESPACE
ocrupé
pat les vers
sur les claies
a
quantité
Jours Dates de la
metre
; Hygro- .
TEMPERATURE
dans
ne te, de
FT
extérieure l'inté-
au
couchant
feuille,
intérièure, EreNE l'atmosphère.
largeur long
cames
Pieds pieds.
16 - 19/14 - 23/24 - 75 beau temps.
2.€| 3 » 150 15 - 19114 - 30/35 - 87E beau temps.
3%! 4 » 480 16 - 20 |15 - 25} 65 - gol beau temps.
|
e : |
Lun
—
4°! 5 » 320 15 - 27Ü70 - 87} beau temps et
orage.
5.®| G » 4ôo 15 - 30164 - 87 beau temps.
7, 7 » |$20 16 - 20/17 - 28] 60 - 85 Fbeau temps.
SPÉCR D p mQ
OBSERVATIONS.
fn On a délité les vers, toujours en nettoyant les claies avec le plus grand
fsoin. — Dans les claies supérieures, où la chaleur était inévitablement
plus forte, on a trouvé quelques vers faibles et languissans, qu’on a
jetés hors de l'atelier. — On a tenu les vers à soie au large pour diminuer
les incommodités de la chaleur régnante ; et non-seulement on a fait
plusieurs fois des feux de flammes , mais on a fait une fumigation avec du
nitrate de potasse sur lequel on a versé un peu d’acide sulfurique : Va
| vapeur qui s'en dégage détruit promptement les miasmes que la fermen-
tation de la litière produit , et donne aux vers une énergie remarquable.
— On leur a donné 5 repas.
Les vers blanchissent et prospèrent. — Ils acquièrent de l'appétit. — On
a aéré l'atelier autant qu'il a été possible. — On a fait des feux de
[flammes , et le soir on a fait la même fumigation qu'hier. — On leur a
donné 4 repas et quelques feuilles dans les intervalles. — Le premier
frepas a été Le plus léger. — On les éclaircit autant que possible à chaque
[repas.
… La vigueur des vers se fait remarquer par la force avec laquelle leurs
jattes restent attachées aux claies. — On leur a donné 4 repas, ainsi qu’un
[peu de feuilles pour les occuper entre un repas et l'autre. — Les vers qui,
ns l'âge précédent, n'avaient pu ronger la feuille du Broussonetia papy-
mifera W, l'ont mangée aujourd'hui assez avidement ; on se propose de
lfaire une autre année des expériences comparatives. — On a fait des feux
[de flammes et parfumé l'atelier comme dans les deux premiers jours.
|— La longueur des vers est de 27 lignes.
La blancheur des chenilles s'altère. — Leur queue devient jaunâtre,
Mais leur belle santé continue à émerveiller les cultivateurs qui viennent
Iwisiter l'atelier. — On a fait deux fumigations nitriques , et 5 fois des feux
e flammes. — On leur a donné 5 repas ; plus ou moins forts, en raison
leur appétit. E
. Feux de flammes et fumigations nitriques comme dans le jour précédent.
_— On a donné 4 repas; le premier a été le plus faible, et le dernier le
plus fort. — On à aussi donné quelques repas intermédiaires très-légers.
. Feux de flammes et fumigations. = Cinq repas à peu près égaux, et
quelques-uns intermédiaires.
a ———
CS
TEMPÉRATURE | lysro- , Le ESPACE
gnantité mére ÉTAT orcupé
fs pas les vers
Jours Dates. de la a dans de sur les c'aies,
_: extérieure . L ,
feuile. L'intérieure. au Éiuté l'atmosphère,
gouchant rieur.
largeur! long,
SRE | on mp mr À 4 SUuN
pieds.
poids.
16 - 20/15 - 29170 - 864 beau temps et
pluie,
shtemenamade ste bee.s:
18 - 21118 - 23/10 - 94} beau temps.
'…
2: ( N
LE
i OBSERVATIONS.
‘
ï D 2 EN EE
'
* Dans ce dernier âge l’excès de la température augmentant l'appétit des |
vers et hâtant leur maturité, on a dû leur donner une nourriture plus |
abondante, en 4 repas progressivement plus petits ; ils n’ont laissé que |
les nervures des feuilles : il en est même qui ont attaqué lés mûres. — On |
à fait des feux de flimmes 4 fois dans ce jour , et la fumigation nitrique |
matin et soir. — Les vers, par la diminntion de leur volume et leur demi- |
transparence, annoncent leur prochaine maturité. — Ils se rident et de- |
viennent plustendres. — Déjà quelques-uns se traînent au bord des claies |
et cherchent à grimper. — On a nettoyé complètement les claies. — (Une |
once à peu près d'excrémens et de litière, renfermée dans un bocal , ena |
tellement altéré l'air , que des vers à soie qu'on y a introduits ont bientôt
péri ; ce qui démontre le danger de ne point nettoyer exactement les |
c laies ) — On commence à former les haies avec de la bruyère commure,
Calluna vulgaris W) qu'on avait préparée d'avance. — Dans cet dge
On n’a point coupé la feuille.
» On achève de former les haies en les disposant en cabannes. = On a
fait 4 Lois des feux de flammes et 2 fois des fumigations. — Tous les vers
montent vers les bruyères, jettent leur soie,et se mettent à filer. — Le
Bruit qu'ils font ressemble à une forte pluie. — Ils continuent à se vider.
= Un orage violent qui eut lieu pendant la nuit à dérangé quelques vers,
“tout dans les étages supérieurs. — Les vers, parvenus à leur plus
|
|
|
|
|
and développement , sont longs de 58 à 40 ligues ; il en faut 7 ou 8 |
seulement pour former le poids d'une once.
On a trouvé quelques vers courts , et on les a mis de côté. — On a
fouvé aussi un très-petit nombre de vers jaunes, qu’on a promptement
jetés hors de l'atelier.
s
L
[R ;
“N'ayant trouvé ancun vers atteint de la muscardine ,
et voulant recon-
itre si cette maladie,
qui faisait des ravages dans les alentours, est
Mtagieuse, on s'en est procuré une centaine; les uns étaient encore
ougeñtres, et les antres déjà calcinés. On les à mis avec un nombre deux
dis plus forts de vers parfaitement sains: ces derniers sont restés sept
jou sLavec les autres sans prendre la maladie ; le huitième jour ils en
nbtous été atteints , à l'exception de 5 seulement qui ont filé, mais à
ouverture du cocon , on a trouvé la chrysalide morte de la muscardine :
as se recouvrir d'un duvet blanc, comme les vers muscardins.
À : ;
p_ % Suite du CINQUIÈME
hygro- ; ESPACE
quantité| TEMPÉRATURE be ETAT occupe
î par 1es vers
AJours! Dates À dela dans de sur les claies
Maui : es,
feuille, À; térieure. J'inté- l'atmosphère, :
coMbhant rieur largeur. long.
RS € omcecemrmmsccmememeenss. | amas
_— | pieds. | pieds.
18 - 2017 - 29, 3 - 100{ beau temps ét
vent du sud.
16.11 » 18 - 50! 14 - 271 5 - 16 pluie.
viel1a » i7- 191! 15 - 26] 6 - 86: beau temps.
12e113 » 15 - 20 17 - 29 7 - 90 beau temps,
13.0, 14 » 16 - 20 go ! beau temps.
17 - 2980
|
age |15 » 485 - 95 j beau temps.
25.116 »
»
CPS.
en
QT
AGE. :
OBSERVATIONS.
”
oo
Un orage très-violent eut lieu dans la nuit, et son effet fut de
diminuer les forces vitales des vers fileurs. —« 11 en fit tomber quel-
ques-uns , principalement des claies supérieures. — Il en est qui ne
reprirent point leur travail et on les jeta dehors. — Quelques poignées
de feuilles ont été nécessaires pour un petit nombre de vers tardifs. —
On a continué les feux de flammes et les fumigations.
Le dernier nettoiement des claies a été exécuté avec tous les soins
requis. — On a fait, matin et soir, une fumigation. — Un troisième
orage , également violent, eut lieu dans la nuit. — Les vers qu'il fit
tomber furent placés dans un endroit séparé sur des rameaux de chène.
constamment.
On a tenu l'atelier tout ouvert dans les heures les moins chaudes
de la journée.
On a continué à aérer l'atelier.
Des vers à soie qu'on s'est procuré chez des voisins, et qui étaient
au quatrième jour du cinquième âge , furent exposés à 32 degrés de
chaleur ; il en résulte qu'ils ont pris la jaunisse , excepté quatre d’en-
Atr'eux, qui, se trouvant accidentellement à l'ombre, ont fait un cocon
très-flasque. |
Les vers travaillent avec activité. — Deux ouvriers les surveillent
D
Dans cette journée on a détaché de la bruyère tous les cocons , en |
commençant par les claies inférieures. — Le poids total de la récolte |
a été de trois cent quatre livres et huit onces, poids de marc (seize
rubs et six livres de Piémont. )
Ces cocons sont généralement fermes , bien tissus , médiocrément
gros et d'une belle couleur paille, avec un cercle rentrant dans le
milieu. Cette espèce, très-recherchée par les italiens , est connue sous
le nom de centurini. Seize cocons, pris au hazard , formaient le poids |
d'une once. ;
RÉCAPITULATION.
as ESPACE
| Quantité Decnye
par les vers
Jours de la sur les claies.
LP AT,
feuille. largeur.! longs.
pieds. pieds.
liy. onces.
La feuille donnée
dans les repas inter-
Temps que les œufs ont
mis pour éclore dans la
chambre chaude. + e médiaires n’est point
comprise dans ce ta-
bleau,
I âge. . . °
Il âge. . + On a obtenu une
livre de cocons de
neuf livres de feuilles
épluchées,
TITI âge. ET ce
IV âge. . + .
V âge, jusqu’à la mon-
tée des vers.
Rectification faite pendant l'impression.
‘À la suite de l'observation correspondant au 6 mai, l’auteur ajoute:
Ce nouvel instrument (le thermométrographe), qui sert à indiquer le
maximum et le minimum de la température qui a eu lieu pendant
absence de l'observateur , est d’une grande utilité pour les proprié-
tairese
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SOCIÉTÉ
ROYALE
a
191 D’ AGRICULTURE
DE
en
COMPTE RENDU
DES TRAVAUX
DE LA
SOCIËTÉ ROYALE
D'AGRICULTURE,
HISTOIRE NATURELLE
ET
ARTS UTILES DE LYON,
Depuis le 1. Mars 1823, jusqu’à la fin de
1824.
COMPTE RENDU
DES TRAVAUX
DE LA
SOCIÉTÉ ROYALE D'AGRICULTURE, HISTOIRE
NATURELLE ET ARTS UTILES DE LYON,
Depuis le 1* Mars 1823 , jusqu'à la fin de
1824 ,
Pan Mr L. F GROGNIER,
PROFESSEUR À L'ÉCOLE D'ÉCONOMIE RURALE ET VÉTÉRI-
NAIRE DE LYON , MEMBRE DE L'ACADÉMIE ET DU CERCLE
LITTÉRAIRE DE LA MÊME VILLE , SECRÉTAIRE PERPÉTUEL
DE LA COLONIE LINNÉENNE LYONNAISE, ASSOCIÉ REGNI-
COLE DE L’ACADÉMIE ROYALE DE MÉDECINE, CORRESPON=
DANT DELA SOCIÉTÉ ROYALE ET CENTRALE D’AGRICUL-
TURE, DES SOUTIENS DE L'ART. VÉTÉRINAIRE DE COPEN:
HAGUE, DES ACADÉMIES DE TURIN ; DION, STRASBOURG,
ET DE PLUSIEURS SOCIÉTÉS D'AGRICULTURE TANT NA:
TIONALES QU'ÉTRANGÈRES,
SECRÉTAIRE DE LA SOCIÉTÉ,
LYON.
LMPRIMERIE DE J.M. BARRE‘
1824.
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COMPTE RENDU
DES TRAVAUX
DE 14 SOCIÉTÉ ROYALE D AGRICULTURE ,
HISTOIRE NATURELLE ET ARTS UTILES de
Lyon, depuis le 127 Mars 1825, jusqu'à
la fin de 1824.
Messieurs,
Douze ans se sont écoulés depuis le jour où Sur l’'intro-
j'ai eu l'honneur de mettre sous vos yeux pour duction de +
la première fois le compte rendu de vos travaux. FL EUE
Depuis cette époque, je vous ai soumis annuel- par le Secré-
lement une notice du même genre, et toujours fi
vous l’avez accueillie avec la même indulgence.
Si vous avez si souvent confirmé à son auteur
une confiance si flatteuse, c'est que vous avez
pensé que dans plusieurs circonstances il est peu
de qualités que le zèle et la bonne volonté ne
puissent suppléer. Dans la séance de cloture de
l'an dernier vous lui avez accordé un nouveau
6 Sociéle royale d'Agriculture
témoignage de satisfaction qui, tout en excitant
sa reconnaissance , lui impose le devoir de re-
doubler d’eforts et de persévérance.
Parmi les objets qui , l'an dernier, ont appelé
votre sollicitude, on a remarqué l'introduction
dans notre économie rurale de deux végétaux ,
le chanvre Bolonais et le trèfle incarnat, Ces
deux plantes précieuses ne seront pas les pre-
mières dont l'établissement et la propagation sur
notre sol ayent été les fruits de vos soins ; et à
cet égard , permettez-moi, Messieurs, de vous
rappeler quelques-uns de vos anciens travaux.
Le mûrier était presque inconnu dans notre
province lorsque l'un de nos plus respectables
devanciers, M. Thomé entreprit d'en établir la
culture : il y réussit par ses écrits, surtout par
ses exemples. Nos campagnes se couvrirent de
müriers ; mais ils disparurent par l'effet du mal-
heur des temps; vous avez élevé la voix en leur
faveur , et vous voyez que partout ils sont re-
plantés, et qu'à mesure qu’ils se multiplient on
voit se former de nouvelles magnoneries : ces
établissemens sont devenus plus précieux depuis
qu'on y élève cette belle race Szra que nous de-
vons à M. Poidebard, à cet agronome manufac-
turier, dont les services éminens sont encore
au-dessus des récompenses nationales dont plu-
sieurs fois ils ont été l’objet. La multiplication
de Lyon. 7
du mäûrier dans nos campagnes est d'ailleurs
favorisée puissamment par les écrits lumineux
publiés récemment sur leur culture et sur l'édu-
cation des vers à soie par M. Matthieu Bonafous,
natif de notre ville et notre correspondant à
Turin.
Un végétal encore plus important que le mù-
rier , la solannée parmentière fut , vers le milieu
du dernier siècle, fortement recommandée par
Alléon Dulac, l’un des fondateurs de la société. Et
plus tard, notre respectable émérite, M. Chancey
se montra dans nos contrées l'émule du vénérable
Parmentier. On lui dut la connaissance et la pro-
pagation d'un grand nombre de races précieuses
de parmentières. Ce tubercule est depuis quel-
ques années l'objet des recherches d'un autre de
nos confrères , M. de Martinel , dont les travaux
en ce genre ont été distingués honorablement
par la société centrale d’agriculture de France.
A l'époque où les pommes de terre et les mü-
riers se répandirent dans notre province, MM.
de Monspey qui appartenaient à l’ancienne société
d'agriculture, introduisirent dans leurs domaines
les légumineuses fourragères, et ce ne fut pas
sans efforts et sans persévérance qu’ils triomphè-
rent de la routine qui repoussait avec obstina-
tion les prairies artificielles , c’est-à-dire la plus
grande de toutes les améliorations agronomiques.
8 Société royale d'Agriculture
Avec quelle lenteur se répandent les bonnes
méthodes de culture ! Ce n’est que depuis quel-
ques années qu'on voit du sainfoin sur la côte
du Rhône près de S.e Colombe. M. Cochard,
notre président le premier l'y a semé. Si l'on
rencontre la même plante dans la commune
d'Irigoy , c'est un présent dont on est redevable
à M. Carelle.
Nous devons à la sollicitude de Rozier l’intro-
duction du colzat dans nos assolemens , et l’on
n'a presque rien ajouté à lexcellent mémoire
qu’il écrivit en 1774 sur la culture et les avan-
tages de cette plante oléagineuse. La navette et
le lin furent aussi l'objet des soins du columelle
lyonnais, et ce fut encore chez MM. de Monspey
que la dernière de ces plantes , tout à la fois
textile et oléagineuse, s’introduisit d'abord.
Si un grand nombre d'arbres exotiques se sont,
depuis soixante ans, répandus dans nos forêts,
dans nos vergers , dans nos jardins , ne sont-ils
pas sortis des belles pépinières de naturali-
sation que Poivre avait établies à la Freta , La
Tourette à Eveux , Rast-Maupas à Ecully ? Par
quelle fatalité des établissemens chers à l’agri-
culture, que les étrangers visitaient avec tant
d’empressement , dont notre province s'hono-
rait , ont-ils disparu pour toujours! Et le même
sort n’a-til pas menacé naguères l'institution
de Lyon: 9
départementale qui est destinée non-seulement
à naturaliser des arbres étrangers, mais en-
core à recueillir, à perfectionner , à répandre
dans les campagnes des espèces précieuses , d'une
institution qui a été le théâtre de tant d'obser-
vations et d'expériences dont les résultais ont
enrichi la dendrologie. Il est probable, Mes-
sieurs, que cette institution eût péri, si vous
n'en aviez pris la défense avec tout l'intérêt
qu'elle doit vous inspirer. C’est dans cette cir-
constance, Messieurs, que vous avez su choisir
un organe digne de la cause que vous lui aviez
confiée. (1)
Le souvenir mêlé de regrets des richesses agri-
coles que M. Rast avait réunies à Ecully sera
retracé dans vos archives. M. Madiot y a déposé
les annotations nombreuses qu’il a recueillies sur
la nature des arbres dont l'éducation avait occupé
pendant un demi-siècle les soins du plus phi-
lantrope des agronomes. Ainsi ne seront pas
tout-à-fait perdus pour la science les phénomènes
de la végétation de tant d'arbres étrangers qui,
pour la première fois, sous notre ciel ont fleuri
dans les pépinières de M. Rast. Quelques-uns de
ces arbres vivent chez des amateurs éclairés, et
(1) Voyez à la suite du volume le rapport de M, Gras
sar la pépinière départementale,
10 Sociélé royale d'Agriculture
deviendront peut-être un jour d'importans ob-
jets de culture : tel est le cirier de la Louisiane
qui donne une substance identique avec l’un
des produits des mouches à miel. Vous vous
rappelez, Messieurs, que des bougies, fabri-
quées avec cette cire végétale, furent allumées
dans cette salle, et que leur clarté ne se trouva
point inférieure à celle des bougies ordinaires.
Le vernis du Japon et'le Bonduc s'élèvent
dans plusieurs jardins à paysages , pourquoi ne
fourniraient-ils pas à l’ébéniste des bois capables
de prendre toutes les formes , de réfléchir toutes
les nuances? Qui peut assurer que la Ptelée à
feuilles ternées ne deviendra pas, pour la fabri-
cation de la bière, l’auxiliaire du houblon ?
N'est-il pas présumable que plusieurs chênes na-
turalisés par M. Rast , que plusieurs noyers qu'il
avait habitués à notre climat, ayant échappé
à la cognée destructive , seront quelque jour
l’objet de vastes plantations? Et quand bien
même sur tous les végétaux étrangers dont on
doit la connaissance à M. Rast, un seul serait
adopté par notre économie rurale, cet agronome
n'aurait-il pas acquis des droits sacrés au sou-
venir de la postérité ?
Faut-il vous rappeler, Messieurs, ce grand
nombre de notices intéressantes que M. Madiot
vous présente, depuis plusieurs années sur les
de Lyon. IT
espèces la plupart nouvelles qu’il cultive dans la
pépinière dont la direction lui est confiée? Vous
avez vu que déposées dans vos comptes rendus ,
ces notices en sont fréquemment tirées pour enri-
chir des journaux agronomiques , et qu’elles atti-
rent à leur auteur de divers points du royaume la
demande des belles espèces qui y sont spécifiées
et décrites. Je me contenterai de citer ici plu-
sieurs espèces intéressantes de châtaigniers , de
melons, d’arbres à fruits, et cette poire hâtive,
d’un goût exquis , déjà connue partout sous le
nom de Poire Jolimont.
D'autres expériences ont été faites par plu-
sieurs de nos confrères sur l’acclimatation des
végétaux étrangers et les produits qu’ils pour-
raient nous fournir. C’est ainsi que M. de la
Chassagne avait obtenu de l’asclépiade de Syrie
une matière soyeuse d’une blancheur éclatante ,
qui pendant un instant avait attiré l'attention
des manufacturiers, et qui peut-être a été rejetée
trop légèrement. Le même agronome se deman-
dait pourquoi l’on ne cherchäit point à utiliser
les soies de la linegrette. Quel triomphe pour
notre agriculture si elle pouvait fournir à notre
industrie un succedané du coton! Il est en eftet
bien reconnu que malgré tous les eflorts des agri-
culteurs, parmi lesquels nous nommerons M.
Faissolles , le cotonnier se refusera toujours à
vivre en pleine terre dans nos climats.
12 Société royale d'Agriculiure
M. Giraud de Montbellet avait introduit dans
une de ses terres le melique de Sibérie (melica
allissima) graminée qui , d'après le savant Yvart
est précoce, rustique , abondante et fournit de
bons fourrages. M. de Montbellet lui reconnut
toutes ces qualités, à l’exception de la dernière,
et il cessa de la cultiver. Une plante vantée par
M. Yvartne devrait peut-être pas être condamnée
d’après une seule expérience.
Deux graminées céréales du genre froment
ont été l’objet. de plusieurs essais; l’une qui
avait usurpé le nom de riz sec de la Chine, a
été reconnue pour être le /rilicum monoccocum.
L’autre est le polonicum , froment de Pologne.
Parmi ceux qui se sont occupés de la première,
on distingue nos confrères MM. Rieussec et
Bouchard - Jambon, qui l'ont trouvée d'une
grande fécondité et d'une culture très - facile ;
mais ils se sont assurés en même temps que
son grain éprouvait à la mouture un grand dé-
chet , qu’il était peu propre à la panification ,
et que son usage le plus convenable était de
le consommer en soupes sous forme de gruau.
C'est principalement à M. Rey-Monléan que
nous devons des observations sur le froment de
Pologne. Cet agronome lui a reconnu pareille-
ment une grande fécondité, du moins dans la
première année de sa culture; mais il Pa vu
de Lyon. 13
dégénérer progressivement , et les expériences
auxquelles il s'est livré à l'invitation de M. Fran-
çois de Neuchâteau , pour en panifier la farine,
n’ont pas eu des résultats satisfaisans. M. Othon
de Moidière a obtenu des résultats différens dans
ses domaines ; le /riticum polonicum ÿ a subsisté
plusieurs années sans dégénération, et il en a
obtenu un pain de bonne qualité. Vous jugerez
sans doute, Messieurs, qu'il ne faut pas se
presser d’éliminer ces deux fromens de notre
économie rurale; fussent - ils peu propres à
faire du pain, ils fourniraient peut - être de
bons fourrages , des engrais à enterrer en verd,
des matières premières pour la fabrication des
chapeaux. Il est peu d'innovations en agriculture
qu’on n'ait abandonnées plusieurs fois avant de
les adopter définitivement.
Pourquoi ne cultiverait-on pas le tournesol
pour en extraire de la potasse? N'est-il pas dé-
montré d'après les expériences de M. Deschamps
père, qu’on peut retirer des cendres de cette
corymbifère jusqu'à 60 pour 100, de lalcali
carbonaté ? Le même agronome vous a entrete-
nu de la gesse tubéreuse comme pouvant fournir
un tubercule alimentaire ; du thé du Mexique,
(chenopodium ambrosioides ), plante si facile à
cultiver, comme pouvant suppléer le thé de la
Chine. Il vous à communiqué sur ces deux
14 Société royale d'Agriculture
plantes des faits que vous avez jugés dignes
d'une attention sérieuse.
Ai-je tout dit? Mais non content d'élever de
nombreuses colonies d'arbres exotiques, M. Rast
avait observé les phénomènes de la végétation
dans un grand nombre de végétaux herbacés dont
il proposait la culture , tels sont le chou belge
(Brassica oleracea v. viridis brumalis) , crucifère
très-productive , excellente pour nourrir le bé-
tail ; le safran bâtard ( Cathamus tinctorius ) dont
le produit tinctorial est réclamé par nos manu-
factures. Le lin de la nouvelle Zélande ( Phor-
mium lenax ), qui résiste, en pleine terre, àla
rigueur de nos hivers, et qui, sans doute un
jour , sera placé au premier rang de nos plantes
textiles.
Le souchet domestique , (Cyperus esculentus ),
qui, selon M. Rast, fournit non-seulement une
substance alimentaire, mais encore de l'huile de
bonne qualité.
Une plante plus oléagineuse est cultivée par
M. Bouchard-Jambon. C’est la pistache de terre,
(Arachys kypogea ). Cette légumineuse, dont
la fane est un fourrage excellent, porte une
graine qui donne la moitié de son poids d'une
huile qui, selon notre confrère , peut être com-
parée pour les usages de la table, à la meilleure
de noix, Etant très-siccative , on peut, sous ce
de Lyon. 15
rapport , l'employer utilement dans les arts.
Malgré tant d'avantages, l’arachide a fait autour
de Lyon peu de progrès (1). Doit-on au reste
s'étonner que la pistache de terre ait tant de peine
à se propager, quand on songe aux obstacles qui,
pendant des siècles, s'opposèrent à la culture en
grand de la pomme de terre et du maïs, du
trèfle et du mürier !
Que de plantes sont dédaignées, qui pour-
raient fournir abondamment le principe oléagi-
neux , et suppléer ainsi le noyer qui devient
tous les jours plus rare, et l'olivier dont les
récoltes semblent de plus en plus précaires!
Cependant la consommation de l'huile augmente
en France dans une étonnante proportion , et
cela non-seulement pour l'éclairage et les autres
“usages domestiques , mais pour les fabriques
de savon plus nombreuses et plus importantes
qu’autrefois, pour les teintures, les manufac-
tures de draps et autres usines qui se multiplient .
partout ; aussi à la honte de son agriculture , la
France est-elle sur lachat des huiles, tributaire
de l'étranger.
Vous avez senti, Messieurs , la nécessité de
multiplier les plantes herbacées oléagineuses ,
(2) C’est peut-être parce qu’on ne peut pas conserver la
graine de cette plante , qu’elle a été abandonnée en divers
Lieux.
16 Sociélé royale d'Agriculture
lorsque vous avez encouragé la culture du
pavot dans ce département. Déjà des champs
étendus sont , dans la plaine du Beaujolais , con-
sacrés à la culture de cette plante. Vous avez
applaudi aux efforts de plusieurs propriétaires
de vignobles qui cherchent à extraire de l'huile
douce des pepins de raisin , et vous avez appris
avec satisfaction que les cultivateurs de nos
montagnes commencent à ramasser le fruit du
hêtre pour en extraire une huile jusqu'ici dé-
daignée.
D'autres plantes économiques réclament votre
sollicitude , et c'est à votre voix qu’elles se pro+
pageront dans nos campagnes, telles sont la
gaude , la garance et le houblon. Vous êtes bien
convaincus , Messieurs , et l'exemple de ces
dernières années vous l’a démontré de plus en
plus, que dans notre France trop d’espace est
emblavé, et que pour l'intérêt de l'agriculture,
de Pindustrie et du commerce il faut donner à
des plantes dont linsuffisance nous rend tribu-
tairés de l'étranger, une partie du terrain que
nous prodiguons aux céréales.
de Lyon. 17
STATISTIQUE AGRICOLE
DU DÉPARTEMENT.
Depuis quelques années un grand nombre de
Savans s'occupent, avec un zèle que rien ne
peut ralentir, de recherches sur l'état des con-
trées qu'ils habitent. Ils les étudient sous le
triple rapport des lieux, des choses et des
hommes. Non contens d'explorer ce qui existe ;
ils remontent à l'origine des établissemens et
des institutions. Ils proposent des améliorations
et des perfectionnemens. C'est ainsi que, dans
le plan de leurs travaux philantropiques , le
passé et l'avenir s'unissent au présent. Partout
Padministration seconde des recherches qui se
lient étroitement à la prospérité nationale. Dans
un pays voisin , des cours publics sont institués
où l'on enseigne , avec l'histoire locale , la topo-
graphie, et l’économie applicable à la contrée.
Un professeur de Gottingue (1) a donné le nom
de s/alistique à cet ensemble de connaissances.
Ce terme a été admis dans toutes les langues
de PEurope, et quoiqu'on le détourne quelque-
fois de son acception, il exprime toujours la
description d’un pays. |
(1) Archenwal,
2
Statistique
de la commune
des Hayes ; par
M. Cochard.
18 Sociélé royale d'Agriculture
Cette description peut n’être pas complète,
elle peut se borner à l'agriculture, au commerce,
à d’autres objets déterminés ; de là les statistiques
agricoles , commerciales , archéologiques, etc.
C'est sous tous ces rapports que M. Cochard
a décrit un grand nombre de communes inté-
ressantes de ce département. Depuis plusieurs
années il vous communique ses utiles travaux
en ce genre. Vous les appréciez tous ; mais vous
fixez principalement votre attention sur ceux
d'entre eux qui sont relatifs à l’objet spécial de
votre institution. Aussi dois-je m'imposer des
sacrifices en vous présentant l'analyse de la no-
tice statistique que M. Cochard vous a lue cette
année , et me borner, pour ainsi dire, à en
extraire ce qu’elle renferme de relatif à l'agri-
culture,
Cette notice statistique a pour objet Les Hayes,
commune du canton de S.® Colombe, sise à
dix kilomètres sud-ouest du chef-lieu, et six
nord de Condrieu. Une chaîne de montagnes
échappées du Pila la domine au midi , elle oc-
cupe l'arête d'un plateau inférieur qui court au
nord par une forte inclinaison; une partie de
ses eaux coule dans le Rhône, l’autre dans le
Gier. Elle est séparée de la commune d'Echalas
par deux petits ruisseaux, le Aw/y etle Mézerin,
de Lyon. ïg
dé Sémon par le Colume, de Condrieu par le
Cordeliere, ces deux derniers ruisseaux se réu-
nissent en un seul qui, sous le nom de Bassenon,
se jette dans le Rhône au-dessous de ‘Tupin , un
grand chemin venant de Condrieu la sépare de
Longes.
Son territoire offre des pentes roïdes qui en
rendent la culture extrêmement pénible, et c'est
par des soins assidus et un bon système de tra-
vail que l'on prévient les dégâts du terrain qui
ont jadis creusé de profonds ravins et formé des
gorges considérables. Les sommités sont dans
quelques points, couvertes de taillis et de pins,
la vigne se montre en des lieux abrités ; mais
sous uné température aussi froide elle est ex-
posée aux gelées et donne un vin très-médiocre.
On voit des prairies dans les vallées, et autour
des maisons , des terrains d’un assez bon produit.
De grandes forêts couvraient anciennement
cette partie de la montagne, sur la fin du quin-
zième siècle on y courait encore la grande bête ;
à peine aujourd’hui rencontre-t-on quelques
lièvres , quelques renards sur un sol où le cerf,
la biche , le chevreuil , le sanglier se réfugiaient
dans des retraites impénétrables. Les défriche-
mens, le gaspillage des bois , le braconnage ont
fait disparaître les grosses bêtes , et bientôt on
n’y trouvera plus aucune espèce de gibier,
20 Societé royale d'Agricullure
M. Cochard trace ainsi le caractère des habi-
tans de cette contrée ingrate :
» Les vents qui règnent sur ces hauteurs, le
froid excessif qu'on y éprouve durant l’hiver , la
neise qui couvre souvent le sol de plusieurs
pieds, en éloigneraient les habitans s'ils n'y étaient
retenus par l’amour de la propriété, par l'atta-
chement aux lieux où ils ont vu le jour , et où
reposent les ossemens de leurs pères. Ils savent
tirer d’un terrain si peu favorable quelques res-
sources ; et comme leurs besoins sont extrême-
ment bornés, ils trouvent dans la culture des
céréales , dans la vente de leurs bois et d’une
partie de leurs fourrages les moyens de pourvoir
à tout ce qui leur est nécessaire, ils vivent
même heureux parce qu'ils sont sans ambition.
La vue des riches plaines qui se déploient au-
dessous d’eux avec tant de magnificence n’excite
dans leur ame aucune envie , aucun désir ; sa-
tisfaits de ce qu'ils possèdent , ils ne recherchent
rien au-delà. Aussi ne les voit-on jamais aban-
donner leurs modestes et paisibles demeures
pour courir après les faveurs de la fortune et
les jouissances des citadins. »
En parlant des mœurs et habitudes des bons
habitans des Hayes, M. Cochard dit encore:
» Dans une paroisse dont toutes les maisons sont
isolées, les habitans doivent avoir naturellement
de Lyon. 21
de la timidité, une certaine réserve, Pair sé-
rieux, c’est ce qu’on remarque en effet dans
ceux des Hayes ; ils sont d'une taille ordinaire,
d’un tempérament sec, mais robustes, laborieux
et sobres, c’est au point qu'il y a quelques an-
nées on ne trouvait pas un seul cabaret dans
la commune; il s’en est établi deux, mais si
peu fréquentés qu’ils auront de la peine à se
soutenir.
Nous passons sous silence ce que dit l'auteur
touchant l'étendue territoriale | le revenu , les
contributions de cette commune, nous ne dirons
rien de sa population , ni de son histoire, quoique
l'auteur ait su la rendre intéressante par de sa-
vantes recherches , nous croyons mieux remplir
Ja mission qui nous est confiée, en déposant ici
ce qui, dans la notice sur la commune des Hayes,
a rapport à l’agriculture.
_.» Les terres, presque toutes en pente, exigent
dans leur, culture une surveillance très-active
pour n'être pas entraînées par les eaux ; ce n’est
qu’en multipliant les béalures, qu’en les combi-
nant avec sagesse que l'on peut prévenir de
grands dommages. »
» Le froment, la blondée, le seigle, orge
et l'avoine sont les principales productions des
terres labourables; les meilleures ne donnent
pas, année commune, au-delà de quatre pour
22 Société royale d'Agriculture
un à cause des accidens occasionés par une tem-
pérature rigoureuse. Cette quotité est encore
moindre en seigle. »
» On recueille du colzat et du chanvre, maisen
petite quantité ; quant à la pomme de terre , elle y
réussit parfaitement. Les vignes , presque toutes
à cornes, ne rapportent qu’un vin extrêmement
acide et qui dure à peine un an. Les prairies, si-
tuées dans le fond des vallons, fournissent du
fourrage en assez grande quantité, mais très-
mélangé de jonc et de laîches. Tout mauvais
qu'il est, ce foin est vendu en grande partie et
sert à acquitter les contributions exhorbitantes
auxquelles sont imposés des cultivateurs pauvres
et dénués de toute espèce d'industrie. On estime
que toutes les années il sort des Hayes environ
trois mille quintaux de foin qui sont consom-
més dans les communes voisines. Cette ‘expor-
tation ne permet pas de tenir un bétail nom-
breux, de faire des élèves, ce‘qui procurerait
une quantité de fumier dont la disette se fait
sentir. »
» Cette commune ne comptait en 1822 que
46 bœufs et 148 vaches , 646 moutons ou bre-
bis , 92 chêvres et 5 à 6 chevaux, quantité bien
insuffisante pour un territoire si étendu. »
Les bois ne produisent que du fagotage qui
est voituré à Condrieu et vendu aux boulangers.
de Lyon. 23
Ici pas plus que dans les autres communes du
canton on ne s’occupe pas à dépouiller le chêne
de son écorce pour le tannage. On suit, pour la
culture des terres , les anciennes méthodes ; on
cultive peu d'arbres à fruit, cependant le chä-
taignier vient très-bien sur ce terrain, et le
pommier s'y acclimaterait facilement ; si on y
multipliait ces arbres on en retirerait des res-
sources précieuses , surtout dans les années
pauvres en grains et en pommes de terre. »
» Le terrain est en général rougeatre , grave-
leux et sans consistance ; il a assez de profon-
deur; mais comme il est exposé aux rigueurs
d'une température excessive, il aurait besoin
d'être échauffé par des engrais abondaus dans
lesquels il entrerait un peu de chaux. Malheu-
reusement le cultivateur , constamment pressé
par le besoin , ne s’occupe point à améliorer , il
pratique comme son père, sans examiner si un,
mieux est possible. L'exemple pourrait peut-être
V'éclairer; mais qui pourrait le donner dans un
pays où il n'existe pas un seul bourgeois ?
C’est dans l'intérêt de la statistique que notre
confrère a fait une excursion savante dans la
plaine du Dauphiné, voisine de notre ville. Le
bel établissement de M. Poidebard s’est trouvé
sur ses pas ; il Pa visité avec empressement, il
Etat actuel
de la magno-
nerie de M.
Poidebard , à
St.-Alban.
24 Sociélé royale d'Agriculture
a recueilli sur. son état actuel des notes dont
vous avez reçu la communication avec un inté-
rêt toujours nouveau. Parmi les détails qu’il a
mis sous vos yeux, il en est sans doute qui
sont consignés dans un rapport que M. le doc-
teur Terme vous présenta l'année dernière sur
le même sujet, et dont vous ordonnâtes l'im-
pression. Telle est Pimportance non-seulement
Jyonnaise mais nationale de l’établissement de
M. Poidebard, que pour ne rien omettre de ce
qui le concerne, on doit s’exposer à tomber
dans quelques répétitions. C’est ainsi que M.
Cochard s'exprime à son sujet,
» On ne peut visiter St. Alban sans aller voir le
magnifique établissement que M. Poidebard y a
créé. Il a fait construire auprès de son habitation
un très-grand bâtiment (il a 80 pieds de longueur
sur 27 de large), parfaitement aéré, destiné à
y élever des vers à soie et filer les cocons qui en
proviennent ou qu'il achète. »
» Ce bâtiment, composé d’un rez-de-chaussée
et d'un étage au-dessus, offre deux pièces im-
menses. Dans celle d'en haut tout l’espace qu'elle
contient était garni sur la fin du mois de juin
d'un nombre infini d’étagères sur lesquelles était
accumulée une récolte précieuse decocons blancs.
Je ne pouvais me lasser d'admirer l’ordre qui ré-
grait dans cette magnonerie ; la propreté dont elle
de: Lyon. 25
était constamment l'objet, l'art avec lequel la bru-
yère et le genêt avaient été dessinés en arceaux
pour recevoir le ver qui venait y déposer son riche
tissu ; enfin les soins en tous genres que les
personnes chargées de cette éducation ne ces-
saient de prodiguer à l'insecte précieux ; aussi
la vue ni l'odorat n'étaient affectés de rien de
désagréable , et l'opération n'éprouvant aucune
contrariété , aucun dérangement , s’achevait de
la manière la plus parfaite. On reconnaissait
aisément qu'un résultat aussi favorable était dû
principalement au zèle et à l'activité de Mad.
Poidebard ; elle exerce une surveillance conti-
nuelle sur les diverses parties de ce travail et
seconde de tout son pouvoir les sages et utiles
combinaisons de son époux. »
» Je suis retourné quelque temps après chez
M. Poïdebard , dans l'objet d'examiner sa fila-
ture , et j'ai eu la satisfaction de me convaincre
qu'il eût été diflicile d'élever un atelier plus |
commode et moins dispendieux que celui qu’il a
fondé, Le triage qu’il fait faire de ses cocons en
bons, médiocres et mauvais, lui procure d’abord
un brin plus uniforme ét plus régulier ; ensuite
l'emploi d’un étoufloir chauffé à la vapeur pour
faire périr la chrysalide offre un procédé plus
expéditif, plus sûr et plus parfait que l'usage
du four dont on se sert communément pour
26 Sociélé royale d'Agricullure
remplir ce but, ce qui est une amélioration
sensible dans l'art de tirer la soie. »
.» Mais l'opération même de la filature qui
avait lieu dans la pièce au rez-de-chaussée du
grand bâtiment nouvellement construit, pré-
sentait un spectacle imposant et curieux. Trente-
six tours garnis de leurs machines et de con-
duits destinés à transmettre un calorique suf-
fisant, étaient mis en action par une grande
roue à tambour à laquelle un cheval donnait
limpulsion. Une femme placée à chaque tour,
occupée à battre les cocons et à filer la soie,
remplissait sa tâche avec plus de facilité que
dans la méthode ordinaire. Enfin, un appareil
aussi simple qu'ingénieux , imaginé par M. Ger-
soul , et consistant en une chaudière munie d'un
vapomètre et d’une soupape de sûreté, assise
sur un foyer alimenté par du charbon de terre,
suffisait pour porter et entretenir l’eau de toutes
ces bassines à la température voulue. Un grand
conducteur, traversant horizontalement l'atelier
dans toute sa longueur, remplissait cet office
au moyen de conduits latéraux , disposés de dis-
tance en distance qui descendaient vers les bas-
sines. Ces conduits, garnis de leurs robinets
près de leur extrémité, pour activer ou diminuer
la chaleur, se terminent par un tuyau qui
plonge dans la bassine , et qui, percé d'un
de Lyon. 27
grand nombre de petits trous , laisse échapper
la vapeur. »
» M. Poidebard , en adoptant ces divers pro-
cédés , a porté la filature de la soie au plus haut
degré de perfection , en même temps qu'il y ren-
contre une grande économie soit sous le rapport
du combustible, soit par la suppression des
tourneuses. Il en résulte également que la vapeur
se condensant dans les bassines , renouvelle sans
cesse l’eau avec une eau distillée, et donne par
conséquent à la soie plus d'éclat, plus de bril-
lant ; ainsi les innovations qu'il a introduites
réunissent tous les avantages. »
» Ce citoyen industrieux a encore établi dans
une partie d'anciens bâtimens , des ateliers pro-
pres.au moulinage des soies, et dont les rouages
sont mis en activité par des chevaux. En sorte
que toutes les opérations relatives à ce beau tissu
qui précèdent celles de la teinture se font dans
un même local, avec une précision, une acti- |
yité et une surveillance que l’on rencontre rare-
ment ailleurs, Aussi les soies confectionnées chez
lui ont-elles plus de valeur et sont-elles plus re-
cherchées que celles qui proviennent des ateliers
où l’ancienne pratique est encore en usage. »
» Cependant tous les soins qu’exige une
aussi grande manutention n'ont pas distrait M.
Poidebard d'autres occupations également impor-
28 Sociéle royale d Agriculture
tantes. Il a fait faire, dans son domaine, des plan-
tations de müriers considérables ; leur état pros-
père révèle ses soins et son intelligence. Il'n’y a
pas de doute que d’ici à quelques années il ne
recueille suffisamment de feuilles pour élever
de 60 à 80 onces de vers à soie. »
» [l s’occupe aussi de l'éducation de quelques
chèvres du Thibet, de leur croisement avec des
chêvres indigènes, et des moyens de tirer le
parti le plus avantageux de leur duvet. »
» Le jury de la dernière exposition de Fin-
dustrie française au Louvre, ainsi que la société
royale et centrale d'agriculture de Paris, en dé-
cernant l’un et l’autre une grande médaille d'or
à M. Poidebard n’a fait qu'exciter de plus en
plus son zèle et ses efforts. Les améliorations
nombreuses dont il enrichit chaque jour son
établissement en sont une preuve convainéante.
Ce manufacturier habile a fait faire un grand
pas au pérfectionnement de la filature de soie.
Nous n’avons plus maintenant à redouter en
ce genre la supériorité des organsins du Pié-
mont.»
= » Une méthode aussi heureuse ne peut man-
quer de se propager de proche en proche, et
d’influer puissamment sur la prospérité de nos
fabriques d'étofles. »
,
de Lyon. 29
C'est sous. d'autres points de vue que M,
Sur le même
établissement;
Trolliet a examiné le bel établissement de M, ,,, 7. Toi.
Poidebard , il vous a donné d’intéressans détails le.
sur la manière dont on y cultive les müriers,
dont on y élève les vers à soie.
Les mûriers sont espacés de 15 pieds , par-
faitement alignés , disposés en losange et greflés
avec la variété recommandée par M. le comte
Dandolo. Cette variété, dont les branches sont
régulières et les feuilles larges , offre pour la
cueillette une grande économie ; c’est au point
qu'elle ne coûte que 60 cent. par quintal, tandis
qu'elle coûte 3 fr. prise sur les sauvageons.
La pépinière du Rhône a fourni les mûriers
de M. Poidebard , ils réussissent très-bien sur
un sol argilleux, cultivé à la bêche , et fécondé
en partie par la litière des vers. Entre ces ar-
bres est plantée une jeune vigne dont les ceps
sont espacés ; et en attendant qu’elle se déve-
loppe, des pommes de terre et diverses plantes
potagères y croissent.
Ce n’est pas moins de quatre-vingt-quinze
onces de vers à soie blanche que M. Poidebard
a fait .éclore, quarante dans sa magnonerie ,
cinquante dans des villages voisins. La magno-
nerie se compose de trois ateliers, dont le plus
grand a servi au développement des vingt-cinq
onces de graines. Voici la description que M.
Trolliet donne de ce vaste atelier :
30 Sociélé royale d'Agriculture
« Placé dans un bâtiment neuf, au-dessué
de l'atelier destiné à la filature , il a, comme
ce dernier , 80 pieds de long et il contient troïs
rangs de claies, chaque claie se compose de neuf
rayons de planches minces ou lambris, supportés
à leurs extrémités par des montans, et soutenues
dans les intervalles par des pieds droits, placés
sous les traverses qui les lient. Leur largeur
est de 4 pieds et demi, elle est proportionnée
à la longueur du bras , de manière que la main
peut être facilement portée au centre. La hau-
teur des rayons, déterminée par la longueur
de la bruyère, est d'environ 15 pouces. Deux
personnes peuvent facilement circuler entre les
claies. »
» En outre des grandes fenêtres, on a pra-
tiqué aux murs et aux planchers un grand
nombre d'ouvertures par où l’air se renouvelle
selon le besoin : on les tient libres ou fermées. »
» Trois poêles placés à des distances calculées,
établissent une température convenable ; un
thermomètre et un hygromètre mesurent la
chaleur et l'humidité. »
» Lorsque les vers sont éclos, on les trans-
porte sur les claies du milieu. À mesure qu'ils
grossissent et qu’ils ont besoin de plus d'espace,
ils sont portés sur les claies voisines à l’aide de
petits rameaux dont ils couvrent les feuilles. »
de Lyon. 31
M. Poïdebard a occupé dans le moment de la
briffe jusqu’à cent personnes à 20, à 30 sous
par jour ; des intempéries lui ont fait perdre en
1823 un tiers de sa récolte ; il estime à 70
quintaux la quantité qu’il a obtenue de 95 onces
de graines, ce qui lui donnera environ 6 quin-
taux de soie blanche de la plus belle qualité,
En l'évaluant seulement au prix de 3ofr. la livre,
prix des plus belles soies jaunes , quoique nous
soyons fondés à croire qu'elle a plus de valeur,
le produit total sera de 18000 fr.; si on déduit
la moitié de cette somme pour les frais, ainsi
que le pense M. Poïidebard, il n'en sera pas
moins très-avantageusement dédommagé des
soins auxquels il s'est livré. »
» Ses bénéfices sont accrus par la valeur de
ses feuilles , par l’économie que lui procure le
procédé de M. Gensoul, et les avantages qu'il
retire de sa mécanique servant au moulinage.»
» Comme dans les années précédentes, l’admi-
nistration vous a demandé des renseignemens
précis sur les récoltes du département , elle les
réclame de vous afin de mettre le Gouvernement
à même de donner au commerce des grains une
impulsion conforme aux ressources et aux be-
soins de chaque localité, de préserver l'agricul-
ture du préjudice que lui causerait une stagna-
. Sur la statis-
tique des ré-
coltes en 1623.
32, Sociélé royalè d'Agriculture
tion de ses produits ; enfin de provoquer et de
faciliter, soit les exportations , soit les arrivages
extérieurs , soit les mouvemens de la circulation
intérieure.
La commission que vous avez chargée de re-
cueillir ces renseignemens, vous a présenté son
rapport par l'organe de M. Rémond (1).
Voici les questions, adressées par l'autorité ,
et les réponses que vous avez faites :
Première question : Combien de fois chaque
hectare rend-il , années communes , la semence
pour chaque espèce de grains ?
Réponse : ‘Terme moyen, à peu prés cinq
pour un, et le produit d’un hectare, en sus
de la semence est, années communes, d'environ
dix hectolitres.
Deuxième question. Combien de fois chaque
hectare a-t-il rendu en 1823 la semence, pour
chaque espèce de grains ?
Réponse. Terme moyen, chaque hectare a
rendu environ quatre pour un.
Troisième question. Combien faut-il d’hecto-
litres de semence par hectare pour chaque es-
pèce de grains ?
(1) Les autres membres de la commission étaient MM:
Cochard , Muthuon , Billon , Bouchard-Jambon et Guerre.
de Lyon. 33
Réponse. 1 faut trois hectolitres de froment
pour ensemencer ün hectare.
Quatr ème question. Quel a été en hectolitres
le produit d’un hectare pour chaque espèce de
grains ?
Réponse. Il a été de neuf hectolitres.
Cinquième question. Quel a été en hectolitres
le produit total de la récolte de chaque espèce de
grains d'après le nombre d'hectares ensemencés ?
Réponse. En froment. . . . 200,000 hect.
En méteil. . ... 50,000
En seigle . . . . . 150,000
En orge. ..... 20,000
En sarrazin. . . . 30,000
En maïs et millet. 4,000
En avoine. . . .. 25,0000
En légumes secs. 12,000
En autres menus
grains, tels que
pois, vesces. . . 12,000
Sixième question. À combien d’hectolitres éva-
luez-vous la récolte en châtaignes et farineux de
toute nature , autres que les grains et les
pommes de terre ?
Réponse. À 2500.
Seplième question. À combien d'hectolitres
évaluez-vous la quantité de grains restant à l'ou-
3
34 Société royale d'Agriculture
verture de la récolte et provenant du sol du dé-
partement ou d'achats faits ailleurs ?
Réponse. À près de 2,000000 d'hectolitres.
Dans aucun temps peut-être, il n’y a eu dans
ce département , une plus grande quantité de
grains de toute espèce en magasin; cette accumu-
lation préjudiciable à l’agriculture , tient moins
à la fertilité de l'année dernière et des précé-
dentes qu’au défaut d'écoulement des grains dans
les départemens auxquels Lyon sert d'entrepôt ,
et qui , eux-mêmes sont au moment actuel, sur-
chargés de grains.
Les mêmes questions , notamment la 1.'€ et
la 3.° sont faites pour les pommes de terre, en
y ajoutant toutefois combien il y a d’hectares en-
semencés en cette espèce de farineux.
Réponse. Un hectare ensemencé en pommes
de terre reçoit 24 hectolitres de semence, et peut
rendre , années communes , quinze pour un de
produits. D'un autre côté, on peut évaluer à
cinq hectares par communes , terme moyen,
l'espace ensemencé en pommes de terre; ainsi,
du moment qu'il existe dans le département
250 communes, on peut porter le nombre d’hec-
tares qui y sont ensemencés en pommes de terre
à 1250, eten multipliant ce nombre par celui
de 360 qui est celui du produit en hectolitres
dun hectare, on aura pour le département entier
de Lyon. 35
un total de 453,600 hectolitres de pommes de
terre. |
Huilième queslion. Quel est le poids commun
d'un hectolitre de froment et de seigle, provenant
de la récolte de 1823, en distinguant, pout
chaque espèce, la première qualité de la seconde ?
Réponse. Le poids d’un hectolitre de froment,
première qualité, est de 75 kilogrammes , et de
deuxième , de 72; celui de la première qualité
de seigle est de 68 , et de la seconde de 62.
Pour ce qui concerne les récoltes en vin de
l'année 1823, on peut dire qu'elles ont été en
quantité à peu près égale à ce qu’elles furent
l'année précédente ; mais leurs qualités ont été
de beaucoup inférieures.
Dans la séance de cloture, il vous est parvenu
une dépêche de M. le préfet , par laquelle ce ma-
gistrat demandait des renseignemens positifs sur
la statistique des récoltes en 1824. Il témoignait
le désir de les recevoir sous le plus bref délai,
devant adresser à son Excellence le Ministre de
l'intérieur , ce tableau dans le courant du mois
d'octobre,
Comme il n'était pas possible de renvoyer
jusqu'à la rentrée, les réponses aux questions
proposées par M. le préfet, dans l'intérêt de
l'agriculture et de l'économie publique, M.
Rapport sur
la statistique
des récoltes en
1824; par le
méme.
36 Societé royale d'Agriculture
Rémond qui, plusieurs fois , a été l'organé de
votre commission permanente de statistique des
récoltes , a bien voulu se charger de rédiger ces
réponses, après toutefois s'être concerté avec
plusieurs de nos confrères.
Cette circonstance , qui n'est pas nouvelle,
et qui peut se reproduire, vous déterminera
peut-être, Messieurs, à nommer chaque année,
avant de vous séparer, une commission qui,
réunie à ceux des membres du bureau séden-
taires à Lyon , serait chargée pendant les féries,
d'agir en votre nom toutes les fois que l'urgence
serait évidemment reconnue. Cet usage est suivi
dans plusieurs sociétés savantes et de bien pu-
blic. Elle faisait partie du règlement de l'ancienne
société royale d'agriculture de Lyon.
Voici , Messieurs, les questions adressées par
l'autorité et les réponses qui ont été faites en
votre nom.
Première question. Combien de fois chaque
hectolitre a-t-il rendu en 1824, la semence pour
chaque espèce de grains ?
Réponse. Cinq pour un en sus de la semence.
Deuxième question. Quel a été en hectolitres
le produit d’un hectare pour chaque espèce de
grains ?
Réponse. Environ douze hectolitres.
de Lyon. 37
Troisième question. Quel a été en hectolitres
le produit total de la récolte de chaque espèce de
grains ?
Réponse. En froment . . . . . . 250,000 hect.
En méteil ....... 50,000
En seigle. . ...... 120,000
En orge ........ 15,000
En sarrazin . ..... 15,000
En maïs et millet. . . 3,000
En avoine . . «. . .. 200,000
En légumes secs. . . . 10,000
Autres menus grains ,
pois, vesces, etc. . . 10,000
Quatrième question. À combien d’hectolitres
évaluez-vous la récolte en châtaignes et autres
farineux de toute nature, autres que les grains
et pommes de terre ?
Réponse. À 3,500 hectolitres.
Cinquième question. À combien d'hectolitres
évaluez-vous la quantité de grains restant à
louverture de la récolte, et provenant du sol
du département ou d’achats faits ailleurs? Les
mêmes questions sont faites pour les pommes
de terre.
Réponse. À 1,800,000 hectolitres de grains.
Pour ce qui concerne les pommes de terre,
il n'en existait point à l'ouverture de la récolte ,
Observations
œnologiques ,
recueillies dans
Jes années 1822
et 1823 ; par
M. R'y-Mon-
léan,
38 Société royale d’Agriculluré
et on peut en évaluer le produit à 410,000 hect.
Sixième question. Quel est le poids d'un hec-
tolitre de froment , de méteil, de seigle et d'orge,
en distinguant chaque espèce de grains ?
Réponse. Le poids d'un hectolitre de froment
peut être évalué à 76 kilogrammes,
Celui du méteil à 71 kilogr.,
Celui du seigle à 62 kilogr. ,
Celui de l'orge à 60 kilogr.
M. le préfet demande encore un aperçu sur
l'espérance de la récolte des vins , avec indication
tant de la qualité que de la quantité présumée ,
comparativement avec la récolte précédente.
Réponse. La récolte en vin pour 1824 , est
généralement d’un grand tiers moindre que celle
de 1823, elle ne s'élève pas au-dessus du tiers
d'une bonne récolte. Quant à la qualité, quoi-
que peu remarquable , elle est bien supérieure
à celle de la récolte de 1823.
M. Rey-Monléan vous annonça l'année der-
nière avoir obtenu en 1822, à la faveur du pro-
cédé Gervaisien et au moment du décuvage une
augmentation de dix pour cent sur la quantité
du vin de sa récolte ; il vous a dit, cette année,
qu’à ce bénéfice déjà très-remarquable , se joi-
goit, au moment du soutirage, celui de quatre
pour cent; et que ce vin se vendit cinq francs de
de Lyon. 39
plus par hectolitre que le vin de la même récolte
fabriqué d’après le procédé ordinaire. Notre con-
frère croit avoir découvert encore un autre ayan-
tage à la méthode de M.lle Gervais, celui d’empé-
cher dans quelques circonstances le vin de tourner
à l'aigre. C’est ainsi, dit-il, qu'on a observé dans
le département de la Dordogne que du vin fabri-
quéen 1822 par le procédé ancien, tourna à l’aigre
sous l'influence d'une température de 30 degrés
Réaumuriens, tandis que du vin de la même
récolte, fabriqué à cuves closes , n’avait éprouvé
aucune altération. Ce fait , ajoute-t-il, répandit
dans tout le canton une surprise mélée d'en-
thousiasme pour le procédé Gervaisien ; mais
l'occlusion de la cuve n'est qu’une partie de ce
procédé , et sans doute la seule avantageuse.
Les raisonnemens auxquels se livre notre con-
frère ne prouvent que l'utilité de cette occlusion,
et au lieu d’un chapiteau soi-disant condensa-
teur, il recommande de placer un second ‘cou-
vercle à claire voie dans l'intérieur de la cuve
au-dessus du chapeau de la vendange, pour
l'empêcher de se dérober à la fermentation du
moût. Ce perfectionnement appartient à M. Dru,
brasseur de bière dans le département du Gers.
Par son usage, on peut laisser un grand vide
dans la cuve pour le dégagement et la conden-
sation des vapeurs alcooliques ; ce procédé paraît
40 Societé royale d'Agriculture
à M. Rey-Monléan très-bien imaginé , aussi a-t-
il résolu de le combiner avec celui de M.!e
Gervais. (1)
Notre confrère avait eu raison d'annoncer que
la récolte de 1822, qui fut médiocre sous le
rapport de la quantité, serait bonne sous celui
de la qualité. Son pronostic était fondé sur la
consideration des chaleurs qui régnèrent dans
les mois de juin, juillet et août de cette année.
Par l’effet de cette température soutenue , les
vendanges furent avancées de cinq à six semaines.
Ceux néanmoins qui ne se pressèrent pas de
vendanger profitèrent d’une pluie de deux ou
trois jours , qui eut, sur la qualité des vins,
une influence remarquable, et une plus grande
encore sur celle du second vin, vulgairement
nommé rapé , qui tourna à l'acide presque par-
tout où l'on s'était pressé de vendanger.
Il ya déja bien long-temps que notre sage
œnologue s'élève contre la précipitation des ven-
danges autour de Lyon; espérons que tôt ou
tard l’on cessera d’être sourd à ses conseils, et
aveugle devant ses exemples.
Passant aux vendanges de 1823, M. Rey-Mon-
léan voit les causes de leur infériorité dans une
und
(1) Le procédé de M. Dru est exposé dans les annales de
V’agriculture francaise , septembre 1823,
de Lyon. 41
gelée printanière qui atteignit la vigne encore
en bourgeons , et qui fut très-sensible partout
où l'air circulait difficilement , dans des alter-
natives de pluies et de chaleurs qui , ont pen-
dant l'été , excité l'accroissement des ceps , et
multiplié les feuilles aux dépens de la maturité
des raisins ; de là une surabondance d'acide tar-
tareux et d'acide malique qui éloignera la ma-
turité des vins dans les tonneaux et donnera lieu
lors du soutirage à un déchet considérable par
la quantité de lie.
Malgré ce déchet et des grèles fréquentes, on a
fait plus de vin cette année que la précédente ,
mais d'une qualité très-inférieure non-seulement
au vin de 1822, mais encore de 1818 et 1819.
On vendangea cinq semaines plus tard que
l'année dernière, par une température plus basse
de 6 à 7 degrés. Notre confrère crut devoirsuivre,
dans cette circonstance , les préceptes de Chap-
tal et Davy ; il porta à 13 1/2 la température
de la vendange qui marquait à peine 6. Cette
opération là fut facile étant dans l'usage d’écra-
ser les raisins sur le pressoir ; le jus donnait r2
à l'aréomètre, mais le rafle était vert. M. Rey-
Monléan se décida à jeter dans ses deux cuves de
la cassonade et de l’eau de vie, la première à la
dose de sept hectogrammes, la deuxième à celle
d’un tiers de litre par hectolitre de moût. Cela
42 Sociélé royale d'Agricullure
fait, il a fermé hermétiquement ses deux cuves.
Le vingt-unième jour on a décuvé et on a ob-
tenu un vin coloré, clair jusqu'aux trois-quarts
de la profondeur de chaque cuve, et ne le cédant
à celui de l’année dernière que parce qu'il avait
un degré de moins de spiritualité à l’aréomètre
de Cartier.
&« Ce vin, dit l’auteur en finissant, a été
examiné par des propriétaires de S.ie Foy, pré-
venus même en faveur du leur en raison de
l'exposition de leurs vignes et du choix de
leurs plants. Le résultat les a étonnés ; de leur
aveu leur vin était encore louche, acerbe et
il annonçait qu’au soutirage il y aurait une
grande perte, tandis que je suis assuré de
n'en éprouver que dans le vin du pressoir,
que je place séparément et ne mélange jamais
avec la mère-goutte. T'ous ceux qui me lironk
ou qui m’écoutent , sont invités avec cordia-
lité à venir constater et s'assurer par la dégus-
tation des faits que j’avance, ils reconnaîtront
que la science peut suppléer aux effets de la
nature, et qu'avec son secours on peut vaincre
l'influence d'une saison défavorable, »
de Lyon. 43
ÉCONOMIE RURALE.
Le bien labourer et le bien fumer , c'est, selon
Olivier de Serres, fout le mesnage des champs.
La bonté du labour dépend , sans doute, de la
perfection de l'instrument aratoire; et cependant
le même auteur dit, d’après le vieux Caton : NE
CHANGE POINT DE SOC, ayant pour suspecte toute
nouvelleté. X] ajoute : « et de faict ceux-là se sont
» plutôt faict admirer qu'imiter , qui ont in-
» venté des nouveaux socs, tant a de majesté
» l'antique façon de manier la terre, de laquelle
» on ne se doit détourner que le moins que l’on
» peut, et avec grandes considérations. Il est
» vrai que comme les esprits des hommes s’af-
» finent tous les jours, et que pour le présent
» nous pouvons sçavoir ce que nos pères ont sçeu
» le temps passé, avec jugement y pourrons-nous
» ajouter quelque cas de nos inventions expé-
» rimentées , pour servir d’adresse à la conduite
» de nos affaires, cequ’on en doit opiniâtrément
» rejeter. Maïs c’est toutes fois avec un jusques
» où, pour ne s’'abandonner à toutes sortes de nou-
» velles inventions, de peur que par mauvais ren-
» contre, on ne chée en moquerie, estant tous-
jours le guerdon d'une curiosité par trop grande.»
La majesté de l'antique façon de manier la terre
était le jeu d’un instrument grossier ; c'est ce
&
44 Sociélé royale d'Agriculture
qu'a prouvé notre célèbre compatriote M. Mongez,
dans une dissertation sur les charrues des Egyp-
tiens, des Grecs et des Romains. Ce savant en
a dessiné plus de trente dont il a pris les modèles
sur des médailles et autres monumens. Toutes
ne sont que des crochets différemment configurés ;
une seule a une roue , mais si petite qu’on n'en
conçoit pas l'usage (1). On ne voit nulle part
cette charrue primitive , excepté peut-être en
Crimée, où on l’appelle sabor.
Ce qui frappe le plus celui qui parcourt en
observateur agricole la France et le reste de
l'Europe , c’est la diversité des charrues ; par-
tout on lui dit que celle dont on fait usage est
la mieux appropriée à la nature du terrain. Sans
doute qu’une charrue légère serait impuissaute
sur un sol compact et argileux qui recèlerait
de grosses racines ; il est vrai aussi qu’une forte
charrueserait ridicule sur un sol léger et sablon-
neux ; mais quelle que soit la variété des sols,
elle est moindre que celle des instrumens de
labour. C'est dans des combinaisons bien ou
mal conçues qu'il faut chercher les causes de
l'extrême diversité de ces instrumens. Ainsi il
faut s'attacher à les ramener aux lois de l'agri-
(1) Mémoires de la classe d'histoire et de littérature an-
cienne de l’Institut , tome II.
de Lyon. 45
culture et de la mécanique. C’est ce qu’a senti
la société royale et centrale d'agriculture de
France, en ouvrant, dès 1802, un concours
dans son sein pour le perfectionnement de la
charrue ; et vous-mêmes , Messieurs, vous avez
promis en l’année 1821 une récompense à celui
qui ferait connaître la meilleure charrue à
tourne-oreille pour labourer à plat à la profon-
deur de neuf à douze pouces. Un mémoire fort
étendu sur ce sujet vous parvint l’année sui-
vante. On y annonçait la solution complète du
problème ; mais avant de prononcer sur le mé-
rite de l'ouvrage, on désira de voir manœuvrer
la charrue décrite; et le secrétaire fut chargé
d’en prévenir l’auteur qui ne fit aucune difficulté
de se soumettre à cette épreuve ; il promit d’en-
voyer à Lyon sa charrue, maison l'attend encore.
On a su que des circonstances particulières
avaient retardé cet envoi, et le programme du
prix pour l'invention de la charrue à tourne-
oreille n’a pas été retiré.
Selon notre respectable confrère, M. Chancey,le
problème est résolu , depuis soixante ans, époque
à laquelle M. Guiguet, conseiller au parlement
de Trévoux, inventa ou perfectionna une charrue
de ce genre, que notre confrère a vu manœuvrer
dernièrement dans les communes de Quincieux et
des Echels, à trois lieues de Lyon.
Sur une char-
rue à tourne-
oreille ; par M-
Chancey.
Sur la char-
rue belge ; par
M. Hiboud.
46 Société royale d'Agricul/ure
Cette charrue, dit-il, a un soc court , très-
fort, surmonté d’une petite oreille mobile, le
tout en fer garni d’acier ; à chaque changement
de raie, on retourne cette petite oreille à la-
quelle est fixée la grande oreille en bois qui re-
tourne la terre du sillon ouvert. La petite oreille
coupe parfaitement toutes les racines des plantes
qui sont ensuite renversées par l’oreille de bois.
Dès l'époque de son invention, M. Chancey
avait eu connaissance de cette charrue , et quel-
ques années après, il la désigna à plusieurs pro-
priétaires qui l'adoptèrent; et néanmoins M.
Chancey Va croyait perdue lorsqu'il a eu la satis-
faction de la revoir aux Echets où depuis qua-
rante ans elle est usitée, ainsi qu’à Quincieux ;
elle coûte peu , se dérange rarement , ne fatigue
pas les animaux, laboure profondément et coupe
les racines des trèfles et des luzernes.
Il existe une charrue plus puissante encore;
il est vrai qu'elle est plus dispendieuse et qu’elle
exige un attelage plus fort , c'est la charrue Belge.
Rien convaincu qu'on ne saurait trop en répandre
la connaissance, M. Chanucey vous a luet il a
déposé dans vos archives une lettre sur ce sujet
que lui a adressée M. Riboud, votre honorable
correspondant à Bourg. Celui-ci ne peut man-
quer de souscrire à lutile publicité que vous
de Lyon. 47
donnez à la lettre adressée par lui à notre res-
pectable émérite.
« Nous venons d’éprouver une honorable sa-
tisfaction relativement à notre charrue Belge,
à laquelle nous avons ajouté quelques perfec-
tionnemens. Le comité agricole de l’arrondisse-
ment de Mâcon a envoyé une députation com-
posée de M. Barjol, ancien maire de Mâcon,
Mottin , secrétaire , et de Lachapelle , à l'effet
d'examiner cette charrue et de la voir opérer.
Nous avions heureusement en ce moment une
luzernière de la sixième année à rompre. La na-
ture du terrain était presqu’entièrement caillou-
teux à une grande profondeur, en sorte que le
sol de cette luzernière était d’une extrême com-
pacité et dureté. La configuration de cette luzer-
nière était triangulaire, ce qui rendait le labou-
rage plus diffcile, »
« La charrue Belge , attelée de quatre bœufs »
a agi sur ce massif dont la ténacité était aug-
mentée par les racines de la luzerne. En moins
d'une heure , elle a sillonné, renversé et mis à
la superficie toutes les racines de plusieurs ares.
La moindre profondeur du labour a été de dix
à douze pouces , il est souvent allé jusqu’à treize.
Le labourage de ce terrain caillouteux a été aussi
rapide que si on eût travaillé un terrain doux
et facile, la charrue marchait toujours égale-
Sur la même
charrue ; par
M. de Lacha-
pelle.
48 Sociélé royale d'Agriculture
ment et horizontalement sans plus fatiguer le
laboureur qu’un simple araire. »
« MM. les commissaires de la société de Mâcon
ont été tellement satisfaits du service de cet
instrument, qu'ils en ont sur-le-champ com-
mandé au sieur Pichalt, ouvrier très-intel-
ligent qui en a déjà exécuté un grand nombre. »
( 24 mai 1824 ).
En vous communiquant cette lettre, M.
Chancey vous a lu l'extrait de celle qu'il a re-
çue le 6 août 1823 de M. Lullin, correspondant
de la société à Genève. On y parle de la rapide
propagation de la charrue Belge , et lon déclare
qu'elle convient dans toutes les localités , excepté
dans les pentes rapides, qui au reste ne devraient
jamais avoir une destination agricole, mais être
réservées pour prairies naturelles ou artificielles,
suivant qu'on peut ou non les arroser.
A ces témoignages en faveur de la charrue
Belge , il faut ajouter celui non moins imposant
de notre confrère M. de Lachapelle qui , l'année
dernière, écrivait à M. Chancey qu'ayant em-
ployé la charrue Belge , il avait reconnu qu'elle
méritait les éloges dont elle avait été l’objet.
J'ai cru , Messieurs, remplir vos intentions , en
écrivant pendant les féries, à M. de Zachapelle
pour lui demander des détails sur une charrue
de Lyon. 49
qui depuis quelques années excite fortement
V’attention des agriculteurs du Genevois et de la
Bresse , et qui est presqu'inconnue dans notre
département. Vous jugerez sans doute qu'un
extrait de la lettre de ce sage agronome mérite
une place dans cette notice de vos travaux. Il
décrit ainsi cette charrue :
« Le soc n’a qu’une aile qui se prolonge sous
l'oreille, il est garni d’une lame de fer tran-
chante , qui découpe horizontalement les bandes
de terre, tandis que le coutre la tranche verti-
calement. Cette bande ainsi détachée du sol, re-
monte sur un plan incliné que lui présente
l'oreille, et celle-ci étant contournée à sa partie
supérieure, renverse facilement la bande de
terre sans dessus dessous, et la raie demeure
ouverte et très-nette, »
» Avec la charrue ordinaire , le soc, en forme
de coin , arrache la terre sans la trancher , l'oreille
plate la pousse au lieu de la renverser, il en ré-
sulte que le travail est beaucoup moins propre 4
qu’ane grande partie de la terre du fond n'est
que déplacée , au lieu d'être ramenée à la sur-
face. »
» Il est facile de concevoir qu'il faut beaucoup
plus de force pour mettre en mouvement la
charrue ordinaire que celle de la Belgique.
Aussi trouve-t-on de l'économie dans l'emploi
£
50 Société royale d'Agriculture
de la dernière, c’est au point qu’on peut diminuer
la force de lattelage d’un quart et même d'un
tiers. Elle convient beaucoup dans les terres
fortes où le labourage en planches est nécessaire
pour faciliter l'écoulement des eaux, et surtout
pour le défrichement des prairies artificielles
dont elle découpe admirablement les racines. »
» Ces avantages sont mèlés de quelques incon-
véniens. L’oreille fixe de la charrue Belge sera
un obstacle à son introduction dans beaucoup de
pays. Les terrains secs , où le labourage à plat'est
seul usité, n'ont aucun besoin des raies ouvertes
que l'on est forcé de laisser de distance en dis-
tance avec toutes les charrues dont l'oreille ne
change pas de côté. On est forcé de labourer en
tournant autour de la pièce de terre que l'où a
entamée. I] en résulte que l’on forme malgré soi
des espèces de planches bombées dans leur mi-
lieu et décharnées sur les bords. Entre chacune
d'elles des doubles raies qui restent ouvertes,
présentent à l’œil l'aspect de petits fossés trop
multipliés et dans lesquels les plantes végètent
avec peine. Les labours qui suivent ont de la
peine à les combler et à mettre le terrain de
niveau. »
» Cet inconvénient et surtout la ruutine s’op-
poseront long-temps encore à l'introduction de
la charrue Belge dans ces sortes de terrains
de Lyon. 5x
ainsi que dans ceux qui sont mélangés de cail-
loux et de fragmens de rochers, sa construc-
tion la rendant susceptible de sortir de terre au
moindre obstacle qu’elle rencontre. »
» D'un autre côté l'âge et le sep étant assemblés
solidement et unis l'un à l’autre par une forte
pièce de bois , on ne peut pas , comme dans la
charrue ordinaire , ouvrir et fermer à volonté
l'angle que ces deux pièces laissent entr’elles , il
en résulte que le laboureur ne peut pas régler
sa charrue selon les besoins , pour obtenir un
labourage profond ou superficiel : c’est à mes
yeux un inconvénient assez grave. »
M. de St-Didier a eu occasion de voir dans
les environs de Bourg la charrue Belge, il s'est
assuré qu'elle continue de plus en plus à être
émployée par les riches propriétaires , il regrette
que son prix, qui s’élève à 8o fr., ne permette
pas à la plupart des cultivateurs d’en faire
usage (1). Il pense que l’une de celles que M.
Riche , notre confrère a inventées à St-Alban ;
et dont il fut fait dans le temps rapport à la
PR RE TT ne mr or lp nm
. (1) Aux côtes d’Avey , arrondissement de Vienne , dé-
partement de l'Isère, on fait usage de la charrue Belge ;
elle ÿ a produit cet effet, qu'un domaine dans lequel on
avait semé , il y a deux ans, 120 boisseaux froment , en a
produit 1840,
Sur la chaf.
rue Belge ; par
M.deSt.Didier.,
Considéra-
tions surlesen-
grais ; par M,
Faissolles.
52 Socielé royale d'Agriculture
société , est d'une construction à peu près sem
blable, et qu’elle aurait l'avantage d'être moins
chère. Le point essentiel est de savoir si elle exige
pour être mise en action une plus grande force ;
c'est un fait facile à éclaircir à l’aide d’un fort
didanomètre. Notre confrère renouvelle le vœu
de l'acquisition par la société de cet instrument.
Cependant , comme il est convaincu que la
charrue Belge peut être fort utile dans un grand
nombre de localités de ce département , et que
par conséquent on ne saurait trop en propager
la connaissance , il en a tracé le dessin , et vous
jugerez sans doute que cette nouvelle production
du crayon de notre confrère ne peut qu’enrichir
la notice annuelle de vos travaux (r).
Quels que soient les avantages des bons la-
bours , ils ne peuvent pas suppléer les engrais ,
et malgré les assertions de Tull et de Duhamel,
on est bien convaincu que pour obtenir de la
terre des récoltes abondantes et non interrompues,
il ne suffit pas de la remuer, même dans les temps
les plus opportuns et de la manière la plus con-
venable, mais qu'il faut encore lui rendre les
élémens consumés par la végétation d’une seule
espèce de plantes dont le cultivateur emporte les
produits ; et cette nécessité est bien plus grande
(1) Voyez à la fin du volume.
de Lyon. 53
encore si les plantes ont mûri leurs graines avant
d’avoir été coupées , surtout arrachées. Et nous
répéterons l'adage du patriarche de l’agriculture
française : le bien /abourer et le bien fumer est
tout le mesnage des champs.
La lecture attentive de l’excellent ouvrage
dont M. le comte Chaptal vient d'enrichir
l'agronomie, a inspiré à M. Faïssolles Yidée d’un
travail sur les engrais. Tout ce qu'il vous a dit
sur cet important objet, n’est sans doute pas
nouveau: et souvent ce sont les théories de M.
le comte Chaptal qu'il a reproduites. Mais lou-
vrage où elles sont savamment exposées, n'étant
pas à la portée de tous les agriculteurs, je crois
remplir vos intentions en les joignant ici aux
réflexions qu’elles ont suggérées à notre confrère,
et aux résultats des expériences qui lui sont
personnelles.
Avant de parler des engrais, M. Faissolles a
dû jeter un coup-d'œil rapide sur la nature des
sols géoponiques, sur celle de la marne, terre
aroilo-calcaire, si propre à les amender. Il fait
observer, avec raison , que les marnes grasses
ou fortement alumineuses conviennent aux ter-
rains poreux, légers, siliceux, tandis que les
marnes maigres dans lesquelles prédomine la
chaux, sont appropriées aux terres fortes et
compactes.
54 Société royalé d'Agriculture
Les engrais qui fertilisent les terres se dis-
tinguent en nutritifs et en stimulans. Les pre-
miers sont les gaz azote, acide carbonique,
hydrogène caburé, qui résultent de la décom-
position des fumiers. Ces gaz alimentaires se
dégagent en pure perte lorsque c’est en plein air
que s’opère la décomposition , tandis que les fu-
miers, enfouis en temps opportun , ont encore
l'avantage de soulever la terre et de faciliter l'in-
troduction de l'air , de l'eau, des engrais atmos-
phériques.
C’est donc une mauvaise pratique d'amonceler
en plein air le fumier à mesure qu’on l'extrait
des étables. Lorsqu'on attaque ces tas qui souvent
sont formés dans l’espace d’une année entière ,
les couches inférieures sont dans un état de dé-
composition beaucoup plus avancée que les supé-
rieures , et la masse s’est appauvrie de ses princi-
pes Les plus fertilisans, dont une partie s'est éva-
porée dans l'air , et l'autre a été entraînée par les
eaux pluviales. Pour obvier à ces inconvéniens,
il faudrait placer les fumiers sous des hangards,
en faire autant de tas que d’extraction des étables,
au point que chacun de ces tas n'eût pas en
épaisseur plus de 50 centimètres ; il faudrait les
étendre, les remuer , les méler avec du gazon,
du plâtras, des balayures , toutes les fois que la
fermentation y aurait développé plus de 28 degrés
de Lyon. 55
de chaleur, et recueillir dans des fossés les
parties liquides qui s'en échappent.
On ne doit pas attendre que les fumiers fer-
mentent quand on les destine aux terres argi-
leuses. Ce n’est pas sur toute espèce de terrains et
pour nourrir toute sorte de végétaux que con-
viennent les urines, les matières fécales et le
compost dont ils forment la base.
Voici la composition d'un compost pour une
terre argileuse.
« On le forme, dit M. Faissolles , en faisant
» une première couche de plâtras , de gravier ou de
». mortier de démolition, on la recouvre de fumier
» de litière; sur cette seconde couche on étend
» les balayures des cours, des granges, des
» chemins , mélées des limons déposés par les
»- rivières ; une troisième couche composée de
» matières fécales , de débris de paille et de foin
» s’élève sur celle-ci; enfin la quatrième est de
» même nature que la première. Quand la fer-
» mentation s’est établie dans la masse , on le
» remue pour mélanger les couches, et on le
» transporte dans les champs. » |
M. Faissolles préfère ce compost à ceux qu'on
prépare dans des fosses avec addition de piâtre. Il
fit, l'année dernière dans son jardin à Vaise,
une expérience dont il rend compte dans les-
termes suivans :
56 Société royale d'Agriculture
A4
ÿ
« J'avais quelques coïgnassiers sur lesquels
j'avais enté en 1822 des poiriers. Le sol sur
lequel ils étaient, me paraissait formé de
débris de granit , de silex, de chaux et d'une
faible quantité de terre végétale. Ces poiriers
paraissaient languissans et d’une faible venue.
Pour en ranimer la végétation , il me fallait
un engrais liant et onctueux. Et pour le pro-
duire, je fis, au commencement de l'été, un
trou que je remplis de mercuriales qui m'in-
commodaient , je les arrosai chaque jour avec
de l'urine; bientôt la fermentation putride
s'établit , et les tiges des mercuriales n’offraient
plus que des filamens pâteux : c'est alors qu’au
milieu du même été je déposai au pied de mes
arbres cet engrais que je fis suivre d'un léger
labour pour l’enfouir en terre. La végéta-
tion fut tellement active que mes poiriers
avaient crû au mois de septembre de près de
quatre décimètres. On observera que mes
arbres sont vigoureux , et que l’extractif de
cet engrais n'étant pas entièrement décomposé,
il peut prolonger pendant long -temps son
influence. »
Cet engrais convenait au sol du jardin de M.
Faissolles beaucoup mieux qu'un compost formé
de plâtre , de chaux, de matières fécales , qui
est approprié non aux terrains siliceux , pauvres
de Lyon: 57
en terres végétales, mais aux terres fortes et
compactes : dans les premières, ils sont trop
stimulans. |
En effet, le plâtre et les autres substances sali-
nes nourrissent moins les plantes qu’ils n’excitent
leurs organes digestifs : leur action est analogue
à celle des alimens épicés sur l'estomac humain,
Mais ce n’est point à cela que se borne l’action
de la chaux ; elle dispose encore certains corps,
naturellement insolubles dans l’eau, à se dis-
soudre dans ce liquide ; elle prolonge la vertu
nutritive de certaines matières tant végétales
qu'animales , elle corrode les succoirs des végé-
taux enfouis comme engrais et en accélère la
putréfaction , elle fait périr , avec les mauvaises
herbes, une multitude d’insectes.
Moins utile sous ces derniers rapports que la
chaux, le plâtre est, d’un autre côté, plus
stimulant. On peut l’'employer cru ou cuit, mais
toujours broyé.
M. le comte Chaptal , l'ayant essayé dans ces
deux états, a reconnu qu’à la première année le
plâtre cuit produisait plus d'effets, et que dans
les trois années subséquentes son influence sur
la végétation était la même que celle du plâtre
cru. Le sulfate de chaux exigeant, pour se dis-
soudre, trois cents parties d'eau, ne pénètre
pas dans les organes des plantes en assez grande
Sur le même
sujet, par M.
Billion.
58 Société royale d'Agriculture
quantité pour les irriter à la manière des sels
plus solubles.
Quelques considérations physiologiques sur la
manière d’agir des engrais, soit nutritifs , soit
stimulans , terminent le mémoire de M. Faissolles.
M. Billion a confirmé, d'après sa propre expé-
rience , une partie des théories exposées par M.
Faissolles. Cet agronome vous a entretenu des
améliorations qu’il a opérées dans un de ses do-
maines en Bresse, et vous avez reconnu qu’il
avait dû principalement ses succès à la manière
dont il a su administrer ses engrais.
Avant lui, le fumier était amoncelé dans une
cour qui offrait d’assez grandes excavations ,
parce qu’on emportait de la terre en enlevant
les couches inférieures du fumier. L’eau crou-
pissante dans ces excavations était la boisson or-
dinaire d'un bétail toujours chétif, malgré la
bonté des pâturages. Le fumier restait dans ces
creux plus de six mois, il s’y dépouillait d'une
grande partie de son jus et se réduisait à un
tiers de sa masse. M. Billion fit d'abord niveler
et paver la cour , il veilla ensuite à ce que les
fumiers fussent portés dans les champs non à
l'époque des semaïlles comme on le pratiquait
ordinairement ; mais au moment de son extrac-
tion des écuries et sans attendre le dernier labour.
Ses fermiers furent bien étonnés, l'annéesuivante, -
de Lyon. 59
de voir verser le blé aux places où le fumier
avait été entreposé. Depuis cette époque, ils les
portent sur les terres immédiatement autant que
possible , après son extraction des étables.
De tous les élémens du fumier, c’est le car-
bone qu'on regarde comme la principale nourri-
ture des plantes , et on croit qu'il parvient dans
leurs organes sous forme d’acide carbonique.
Une observation de M. Batilliat semble prouver
que sous forme de charbon il exerce sur la végé-
tation une grande influence.
Ce chimiste agronome n'appartenait pas en-
core à la société à titre de correspondant , lors-
qu'il voulut bien lui adresser sur la propriété
fertilisante du charbon , considéré comme corps
physique et corps chimique, un mémoire inté-
ressant , dont M. Cap vous a rendu compte. IL
serait difficile de présenter le travail de M. Baul-
liat avec plus de précision et de clarté que ne l'a
fait M. Cap. Aussi n'ai-je rien de mieux à faire que
d'emprunter ici les expressions de notre confrère.
« M. Bailliat avait observé dans la commune
de St. Lager, près Beaujeu, canton remar-
quable par la qualité de ses vins, que le sol de
deux ou trois vignes était très-noir, quoique
celui des terrains environnans fût loin d’avoir
cette teinte foncée. En s'entretenant avec quel-
ques anciens habitans du pays, il apprit qu’il y
Du charbon
commeengrais;
parM.Botilliat.
60 Société royale d Agriculture
a environ cinquante ans le propriétaire avait
établi près de là un four à chaux et à briques que
l'on chauffait avec du bois, que celui-ci étantem-
barrassé d’une assez grande quantité de poussière
de charbon, il l'avait fait répandre sur ses
vignes qui , depuis, ont porté le nom de vignes
brälées, qu'elles ne gelaient jamais , que la ré-
colte y était toujours, proportion gardée, plus
abondante qu'ailleurs ; que les marchands don-
naient toujours la préférence au vin qui en pro-
venait sur celui des autres vignes du même
canton et de la même exposition, qu’enfin ;
lorsque dans les temps de la sécheresse, les cul-
tivateurs renonçaient à cultiver la terre à cause
de sa grande compacité , ils travaillaient encore
avec assez de facilité le terrain des vignes brûlées. »
» Ces détails qui furent confirmés à M. Batil-
lat par le propriétaire actuel, fixèrent l'attention
de ce chimiste qui chercha à s'assurer par la
théorie si en effet le charbon végétal pourrait
exercer sur la végétation une influence avanta-
geuse , et voici par quelle suite de raisonnemensS
il parvint à résoudre d'une manière affirmative
cet intéressant problème. »
» 10 Le charbon, comme corps noir et non
poli, absorbe plus facilement que les autres
corps la lumière et le calorique. Les ferres
colorées | dit M. Chaptal , absorbent la chaleur
de Lyon. 61
en raison du degré de leur nuance , depuis le brun
jusqu'au noir.»
» MM. Davy a observé qu’un terreau noir qui
contenait près d’un tiers de matières végétales ,
exposé au soleil, avait acquis en une heure une
élévation de température qui avait porté le ther-
momètre de 12 degrés à 31; tandis que dans
les mêmes circonstances, un sol à base de craie
n'avait pris que 2 degrés. Tout le monde sait
que l'on noircit les murs des espaliers, des
serres et des orangeries pour y concentrer la
chaleur. Voilà donc une première propriété du
charbon bien constatée. »
2. » Le charbon est, de tous les corps, celui
qui jouit au plus haut degré de la propriété
d'absorber l'air atmosphérique ; cette faculté est
telle qu'il pent en retenir un poids égal au sien.
En sorte qu'un morceau de charbon , parfaite-
ment sec, et pesant un gros , peut loger entre
ses molécules environ 8 litres d’air. Or, l'in-
fluence de l'air sur la végétation est assez recon-
nue pour qu’on n'ait pas besoin d'insister sur
Pavantage de pouvoir le porter en assez grande
quantité jusqu'aux racines des plantes par HR
termédiaire du charbon. »
» 3° Une propriété non moins importante de
ce corps, est celle d'attirer l'humidité. On conce-
vra tout ce qu'offre d'avantageux cette propriété
62 Société royale d'Agricullure
hygrométrique , si l’on réfléchit qu’en été où les
rosées sont très-abondantes , le charbon s’im-
prègne d'humidité pendant la nuit, et la rend
peu à peu lorsqu'il est imprégné des rayons so-
laires. M. Davy a observé que la fertilité des
sols est en raison de la propriété qu'ils possèdent
d’absorber lhumidité. »
» 4° C’est un fait généralement reconnu que
Pabsorption du gaz acide carbonique par les
plantes a lieu durant la nuit. N'est-ce donc pas
leur fournir un aliment utile que de placer à
leur portée la base de cet acide ? On sait d'ail-
leurs que la combinaison de l’oxigène et du car-
bone s’opère à la longue sans le concours de la
chaleur. »
» 5.0 Le charbon, comme bon conducteur
du fluide électrique, ne présenterait-il pas encore
un nouvel avantage ? M. Davy a remarqué que
le blé germe plus vite dans de l’eau chargée d'é-
lectricité positive. Ne pourrait-on pas admettre
aussi que, répandu sur une grande surface, le
charbon doit s'opposer à la formation de la grêle
en soutirant le fluide électrique de l'atmosphère ?
Quelques perches charbonnées, plantées au mi-
lieu d’un champ ne produiraient-elles pas les
mêmes effets que les conducteurs en paille ré-
cemment imaginés dans le même but ? »
» À l'appui de ces observations, M. Batilliat
de Lyon. 63
rappelle l'opinion de Parmentier (article engrais
du dictionnaire d'histoire naturelle) , depuis que
la chimie nous a appris, dit-il , que le charbon
était le principal aliment des plantes ; la manière
d'agir des engrais a été plus facile à expliquer.
Ainsi, on sait aujourd'hui que si les substances
animales sont plus fertilisantes que les végétales,
c’est qu’elles contiennent plus de carbone. »
» Îl cite également une observation de M.
Chaptal qui prétend que l’usage de brûler sur
place les chaumes peut être avantageux, parce
qu'il se forme une légère couche de charbon qui,
par sa division extréme, peut servir facilement
d'aliment aux végétaux.»
» M. Batilliat (qui voudrait recommander le
charbon comme engrais ) répond à quelques ob-
jections fondées sur la cherté de cette substance ,
il a observé qu’elle agissait en petite quantité, et
pendant un temps indéterminé, puisqu'au bout
de 50 ans, son effet est si remarquable sur les
vignes brûlées, Il propose d'en fabriquer exprès
avec les bruyères et autres plantes dont on se
débarrasse par la combustion , et qu’il ne faudrait
pas pousser jusqu’à ERNS On pourrait,
dans le voisinage des raffineries de sucre RENE
yer le charbon animal qui a servi à Aeoibter les
sirops. D'un autre côté, quoique le charbon mi-
néral ne partage pas toutes les propriétés du
Assolement
d'un domaine
dans le départe-
ment de l’Ain;
par M. Billion.
64 Societé royale d'Agriculture
charbon végétal , on pourrait en tirer des avari+
tages si on trouvait des schistes bitumineux
exempts de sulfate de fer.
»
» De toutes les opérations agricoles , 4 dit un
habile agronome (1), lassolement est celle
» qui exige de la part du cultivateur l'attention
»
la plus sérieuse et la plus soutenue, les calculs
les mieux raisonnés et la connaissance la plus
approfondie des ressources et des difficultés de
son artet de sa position locale. »
» En vain il laboure, ensemence, nettoie,
amende, engraisse , fertilise et dispose ses
champs par tous les moyens qui sont en son
pouvoir , à produire d'abondantes récoltes :
ses succès sont toujours incertains ou incom-
plets , illusoires ou éphémères, si un assole-
ment conforme aux vrais principes et appro-
prié surtout aux localités, ne fait la base de
son exploitation. »
Profondément convaincu de cette vérité, M.
Billion qui est correspondant du conseil d’agricul-
ture près le ministre de l'intérieur, ayant acquis
le domaine de Bolliard à St. Georges-de-Fenom ,
département de l'Ain , il y trouve un système d’as-
(1) M. Yvart, nouveau cours d'agriculture , tome KE,
page 38.
de Lyon. 65
solement qu'il y trouva lui parut vicieux. Les
terres étaient partagées en deux soles , et dans
l'une comme dans l'autre on voyait quelques
terrains privilégiés à la proximité de la maison:
c’est ce qu'on nomme verchères. Les légumes
et le froment se succédaient sans interruption
sur les verchères, parce qu'elles recevaient la plus
grande partie du fumier de la ferme. Il en res-
tait bien peu pour toutes les autres terres, quoi-
que leur étendue fût beaucoup plus considéra-
ble , encore était-il fort mal administré.
M. Billion ayant divisé le domaine en huit
parties , un quart du terrain fut cultivé cons-
tamment en froment, un huitième en seigle
après raves, un huitième en grains de mars,
un quart en trèfles, un huitième en légumes
sarclés , un huitième en colzats sarclés. La ro-
tation a commencé en 1818, elle doit se pro-
longer jusqu’en 1825.
L'auteur expose dans le tableau ci-après la
culture de chaque sole dont la contenance est
Nora. Onpourrait croire qu’on ne faisait pas assez de fumier
pour suflire à cette culture , mais il faut , pendant Les pre-
miers temps, s’en procurer ou acheter de la paille et quel-
que bétail de plus, ensuite le fumier ne manquera pas.
D'ailleurs il faut conduire sur les terres les fumiers tout
frais , sortant des écuries, et par ce seul moyen on en aura
suffisamment. [l est à présent reconnu qu'il fait plus d’effet
que quand on le laisse dans les cours. P
66 Société royale d'Agriculture
déterminée en coupées. ( Chaque coupée repré
sente la vingt-quatrième partie d’un hectare ).
Pour faciliter Pintelligence de son tableau ;
auteur développe bien l'assolement, en com-
mençant par le N.° 1° dont le sol est argileux.
1818. Ces terres doivent être labourées avant
l'hivers, et fumées au printemps. On y semera,
suivant la nature de chaque portion de terrain ,du
chauvre, du lin, du mais , des pommes de terre :
ces deux dernières plantes doivent être bien sar-
clées, soit à la main, soit au moyen de petits
araires, bien alignées, afin que le labour en
long et en large, et par suite le sarclage soient
plus faciles. | ’
1819. Immédiatement après la récolte, cette
sole est encore labourée et fumée pour recevoir
au printemps suivant les grains de mars, comme
avoine, orge, blé ou seigle trémois , suivant la
nature du terrain et le grain qui vient le mieux
dans chaque portion de la sole. On y sème en
même temps, à raison de deux livres par cou-
pée au moins , du trèfle qu'on plâtre de suite:
si, dans quelques places le trèfle ne sort pas , ce
qui arrive lorsque les terres sont maigres depuis
long-temps, on peut, en les fumant, y semer
en septembre ou plus tard , des gesses d'hiver et
quelques-unes des graminées qui viennent bien
dans le pays, elles rament les vesces à mesure
qu’elles montent ; on les plâtre au printemps,
de Lyon. 67
et on les fauche lorsqu’elles sont en pleines
fleurs. On obtient par ce moyen un fourrage qui
peut suppléer le trèfle.
1820. Cette sole produira cette année du trèfle,
et sera fauchée deux fois, et pâturée l’automne.
1821. Cette même sole produira encore cette
année du trèfle; mais il ne faudra la faucher
qu’une fois afin d’avoir le temps de donner une
demi-jachère à la terre pour y semer du froment;
mais si la sécheresse s'opposait à ce qu’on ne
pût pas la labourer , il n'y aurait pas un grand
mal, on profiterait alors d'un pâturage d’au-
tomne abondant , qui rendrait, pour nourrir de
jeunes cochons, cinq à six francs par coupée,
et on sèmerait de l’avoine le printemps suivant
sur un seul labourage fait dans le courant de
l'hiver.
1822. La terre sera en froment, et si la saison
ne l’a pas permis, en avoine.
1823. Elle sera labourée et fumée avec un
quintal par coupée de trouille, provenant des
huiles de graines, et on y sèmera du colzat. Il
faut que cet engrais soit pilé et passé à la grille
comme le plâtre, et répandu sur la terre après
le premier labour , et enterré aussitôt pour qu'il
ne nuise pas à la graine quand on la sème. On
disposera des lignes pour pouvoir labourer dans
les intervalles, on sarclera à la main, et on
éclaircira les plantes s’il est nécessaire.
63 Société royale d’Agricullure
1824. On récolte le colzat, on laboure et l'on
répand le fumier qu’on a fait depuis les dernières
pommes de terre, et on sème du froment qui
viendra très-bien.
1825. La terre sera en froment , après sa ré-
colte, on laboure et on sème du seigle; c'est la
dernière année de l'assolement.
On peut, cette dernière année, prendre une
récolte dérobée sur les terres sablonneuses et
légères, semer du sarrazin avec des raves, de
celles qui s'enfoncent en terre et ne craignent
pas la gelée ; l’arrachement du blé noir leur tient
lieu de sarclage, et elles profitent pendant l'hiver.
Dans les terres argileuses, on sème les raves
en ligne, on les sarcle avec la petite charrue,
comme les pommes de terre, et on peut réserver
pour le blé noir une partie du terrain, à la
condition de le fumer davantage.
Cette suite de récolte finie, on recommence
et on poursuit la rotation dans les autres soles,
toujours d'après le même système.
L'auteur convient qu'il n’est pas facile d'éta-
blir dans le domaine dès la première année les
diverses cultures comme elles le sont au tableau.
Mais on y parvient avec des sacrifices et de la
persévérance , comme l'a heureusement éprouvé
notre confrère.
Voyez ci-contre le tableau de cet assolement,
Sr-GEORGE-DE-RENOM, (png. 68. )
DÉPARTEMENT DE LAIN. ASSOLEMENT du Domaine Bolliard, divisé en huit parties.
LA
es
ii
: < Ds: 1/4 en froment. 1/4 en trèfle,
, G a n à 10 ns “ : 4, 4 4.
_ D’après cette division et cet Assolement on aura toujours : 1/8 en seigle , après raves sarclées, | 1/8 légumes sarclés.
a 1/8 en grains de mars. 1/8 colza sarclé,
NOMS | CONTENUE n
e Na À dE TOTAL Q 0 z o h
Fa ST rte 1818. 101 2 2 22 2 24 2°
c DES TeRErE ee 819. 1820. 1821, 1822. 1825. 1524. 1825.
M = | | a ———
t etre des Côtes . 6 coupées. Récolle fumée et
Héabide GOT ee EN Cu : sarclée. Tréfle pl
E se : 8 ps Grains de mars | Trüfledeuscou [ste Plâtré || pen demi. sarclé de- | Froment demi- | Seigle aprés blé
1. |'Leipetit plats... . Re Bi 58. chanvre TT: une coupe demi- À
\ L cpu 9 € , fuméset trèllepli- | pes, et pâturage | "A9 jachère famé , se- | mi-jnchère, semer | misjachère, semer | noir et raves mé.
pan diplat ee loue in, ré, d'automne, Meet » semer | er colza sarclé, | froment. scigle, ldes ou seules et
s La terre de l'église et le Prellon . . . . | 17 » ni nn ne sarclées.
pommes de terre,
: — ==
“ Seigleaprèsraves | Récolte fumée et E Fin
, : : Ù TR roment demi
a x Le perchet . se et 3 + + + + «+ | 35 coupées. ’ et blé noir mêlé de PERS Graïns de mars | Trèfledeuxcou- | Trèfle une cou- | Froment demi-| Colza sarclé , | jachère , semer
2, | Terre du LEE HE 0 PO ED 0, 00e à 9 » 4: re ou seules, | chanvre, fomés, trèfle plô- | pes, et pâturage | pe jachère, semer | jachère fumé, se- | demi-jachère, se- | acigle , après sar-
: Pettbrandi UNE. Cr ass acer re se GS lin, tré, d'automne, froment, mer colza sarclé, | mer froment, razin et raves m-
etsarcl, à la hou ï
rcl, à oue,| mais, “En lées ou seules,
pommes de terre,
, — ———
Bicolle fumée el
- Seigle après re. sarclée, Le # Froment demi- ,
3, | La terre des Perolles. . . . . « + + . | 35 coupées, | 5 Froment demi- | ves et blé noir mé. | ch Grains de mars |, Trife deuxeou- | Tééfono cons | re ere) | M GOIEa RTE d do,
s : à 0. jachère , semer du | je SSRUYEES fumés , trèlle plô- | pes, et pâturage | pe jachère, semer 2) mijachère , ot se-
Les petites Varines . . . « . . . + « |15 » rne lé) ou rares eus | tré. d'automne, froment, sens cola sas | fromant,
à Eee mais ; 24
3 porumes de terre.
J Aécolte fumée et
: é … lenprés rave sarclde, ,
4 Des gere à | Froment demi- Re rrsnares DS Grains de mars | ‘Tréfledeuxcou- || (Trèfle one cou- || psoment demi
a , jachère oir ; où | chanvre, s, semer trè- | pes étura pe demi-jachère :
+ | La grande terre des Varines . + . : : 2 | 50 coupées. | 50. [émane ‘| jachère , semer | ee age | cnÔnTEe fumés, semer trè- | pes, et phturage | pe demi-jachère, | jachère fumé et
HS En d'automne, et semer froment, | scmer colza,
pommes de terre.
je |
Récolte fumée et
Froment demi- entra surélée, à x
ri dan ae cn nl CT A Er Coira sarclé | Froment demi- | Scigle après ra- F Grains de mars | Trèfle platré | Tréfleplâtréune
5 55 coupées. jachère fumé, et | demi-jnchèr: t à L e
k ul 5 SI. emi-jachère, et | jachère | semer | ves et sarraziu , | chanvre, nt: Bale ae |eusccroa me te|lecnpe dent it
De défichement à us rs. st + D cs. |) semer colza sar- | semer froment. È ‘lu EE CHR rAe |
dé, nt | seigle. où raves sarclées, | lin» tré, turage d'automne, | suere, Et semer
mis, à
pommes de terre.
pommes de terre.
Hécolle fumée et
La terre dite de chez Rousset 3 Trèfle plûtré sarclée
* + «+ + » | 30 coupées. rèfle plûtré , | Froment demi- Paoollliseonn Seigle après 0 G d ;
$ een Ÿ demi-ju- igle sprès ra- rains de mars Trèfle plâtré
6. La terre des Contentes . Riel |PA0 Es 60. PA pe Lea jachère fumé , F demi-jachère , et | chôre , et semer | ves et sorrazin, | chanvre, fumés , trèfle plä- | deux RARE
Très-épuisées par défaut d'engrais. (eat semercolzasarelé, | semer froment. seigle. ou raves seules , |lin, tré. lurage d'automue,
* sarclées, malus
pommes de terre.
— ——— | ——— | — Etes im) à ——
Hécolle fumée et
, Trèlle plätré , | Froment demi- : ïel “re relée, 3
La verchère de Bolliard. . . . + , . . | 4 coupées. Téèlte plâtré , | uve conr ani” | jachèe fumé, eù | Cola demija- | Froment demi- | Seigle après ra ee Grains de mars
PA ET ER TON NN ETES , | deuxcoupesetpa- | pure à semer | semer colra sar- | chère, et semer | juchère, etsemer | JE? sarclées ; ou | chanvre, fumé , et semer
Le haut de ln grande terre . . . . nd turage d'automne. | Goment. clé froment. seigle, sarain et rare | in trie plitré,
DE : : eules sarclés Eh
pommes de terre.
— | ——— 4 Re © se =
Becolle fumée et
: sarclée,
| | ï Trèlle plâtré 4 Scigle après ra-
8. | La grande terre Grains de mors | Trüfle plâtré, Sa SSpE M | Féoment demi- | C3 demi-ja- | Froment demi- le ap =
s Ftt os ++ + + + + | So coupées. à 50, | fumés, et semer | deux conperetple | uen games |inchère fumé, et | Chère. et semer | jachère, et semer Na D
ê ; ï ’
trèfle plôtré. turage d'automue. | nent, semercolsasarelé. | Moment. seigle. DE
de Lyon.
Parmi les autres améliorations dont notre éco-
nomie rurale est susceptible , l'une des plus im-
portantes aux yeux de M. Chancey , est la grefle
du noyer et celle du châtaignier. Avec quelle
sollicitude cet agronome dont rien ne peut
ralentir le zèle pour les progrès de l'agricul-
ture , vous a , dans plusieurs séances , recom-
mandé une pratique qu'on regarde comme
difficile, et que de simples paysans exécutent
dans le Milanais et dans le Piémont! Il y a
près d'un siècle que cette méthode traversa les
Alpes et se répandit en Dauphiné. Elle resta
long-temps éomme ignorée du reste de la France,
et aucun auteur agronomique n’en a parlé jus-
qu’à 1760, où un anonyme écrivit à la société
économique de Berne ces paroles : « le seul mo-
» yen de tirer un bon parti des noyÿers, est de
» les faire enter , comme on le pratique dans
» le marquisat de Roiïanès ; depuis que cette
» méthode y est devenue générale, ce petit can-
» ton fournit une quäntité d'huile de noix pres-
» qu'incroyable. » (1)
Rozier nous apprend qu’à Crest en Dauphiné
trois jardiniers faisaient profession de greffer le
noyer à l'écusson.
(1) Mémoires de la Société économique de Berne , année
3760 , page 154.
Sur la greffe
du noyer et
celle du chà-
taignier ; par,
M. Chancey-
70 Société royale d'Agriculture
Dans les premiers jours de la restauration de
cette société, notre respectable contrère vous
communiqua sur le même sujet un mémoire
qui fut imprimé dans la feuille du cultivateur,
et d'après lequel un agronome célèbre M. Juge
S1. Martin se détermina à introduire cette pra-
tique dans le haut Limousin. (1)
Vous vous rappelez, Messieurs, que dans
une de vos séances de 1819, M. Chancey ou-
vrit sur la greffe du noyer une discussion à la-
quelle M. le chevalier de lHorme , membre de
Ja chambre des députés , et alors votre président,
prit une part active, il soutint les avantages
de cette méthode. Vous adoptâtes ce sentiment,
et M. Madiot, notre confrère, fat invité à greffer
les noyers dans l'établissement dont la culture
lui est confiée ; il y réussit pleinement sur un
grand nombre de ces arbres; mais le procédé
qu'il mit en usage exige une main habile , aussi
n’eut il aucun succès ailleurs.
Un procédé plus facile a été exécuté sous les
yeux de M. Chancey , par un simple jardinier
de la terre de lPEcluse, nommé Czhermion, et
sur la demande de notre confrère , une commis-
sion dont il a dû faire partie , est allée, d'après
vos ordres, prendre connaissance du procédé du
(1) Feuille du cultivateur , 7 fructidor an II.
de Lyon. 71
sieur Chermion. (1) Ce jardinier fait une incision
oblique dans le milieu de la tige ou d’une
branche du sauvageon pour y introduire la
greffe qu'il a taillée en forme de coin , il la place
de façon à former une bifurcation avec la tige
ou la branche dont l’ouverture est en haut; il
fait en sorte, autant que possible , que lé sau-
vageon et la greffe soient de même diamètre , il
maintient l'appareil au moyen d’une composition
goudronnée, comme pour la grefle en pente,
et il ajoute le plus souvent une ligature d'osier.
‘Il avait pratiqué cette grefle si simple, non-
seulement sur des noyers, mais encore sur des
châtaigniers et quelques arbres fruitiers. Témoin
des succès qu'il avait obtenus , la commission
a demandé qu'une récompense fût accordée au
sieur Chermion , et cette proposition a été adoptée.
C'est le zèle et la persévérance que la société a
récompensé, et non le génie de linventeur
car ce n’est pas le sieur Chermion qui a imaginé
le procédé dont il a fait usage avec succès : il lui
fut indiqué par un agriculteur qui n’a pas voulu
se faire connaître, et qui appela cette opération,
Greffe à l'anglaise.
Quelque temps après, le savant Bosc, de
l'académie des sciences, voyageant dans l'intérêt
(1) Les deux autres commissaires étaient MM. Mudioi
et Grognier.
72 Sociélé royale d'Agriculture
de l’agriculture, s'arrêta à l'Ecluse et il visita
avec soin les noyers et les châtaigniers greflés
à l’anglaise par le jardinier Chermion , il lui té-
moigna sa satisfaction en l'engageant à pratiquer
sur les chênes le même procédé. |
Comme on devait l’attendre du zèle sans
bornes de notre confrère pour la propagation des
améliorations agricoles, la greffe à l'anglaise
fut annoncée aux associations agronomiques qui
comptent M. Chancey parmi leurs associés , et
M. le marquis de St-Georges, vice - président
de celle de l'Allier, lui répondit le 19 juillet
dernier : « la grefle à l'anglaise a très-bien réussi,
» quelques noyers ont cependant manqué; mais
» sur les châtaigniers , le succès a été complet;
» elle sera en usage plus en grand à la saison
» prochaine.» (1)
Pour démontrer combien serait avantageuse
la pratique de greffer le noyer, M. Chancey se
livre à quelques calculs approximatifs : il sup-
pose que dans le Mont-d’Or lyonnais, dans cette
contrée industrieuse , où l'on élève douze ou
quinze mille chèvres , il existe 30000 pieds de
noyers , âgés de plus de trente ans et par consé-
» (1 La greffe dite à l'anglaise, ( dit M. Bosc, nouveau
» dict. d’agric, ,t. X, pag. 386), se pratique avec un succès
» presque assuré sur le noyer , en la faisant de manière à
» ce que la moelle ne soit pas entamée dans sa longueur,
de Lyon. 73
quent en plein rapport ; aucun n’est greffé ; ils
donnent tous par pied , terme moyen, un
bichet de noix , dont on fait 6 liv. et 1/2 d’huile.
S'ils étaient greflés en bonnes variétés de noix,
à l'abri des gelées du printemps, on estime , dit
notre confrère, que leur produit serait au moins
quintuple; en l'élevant simplement au double
ce serait un accroissement en recette de plus
de 180,000 liv. d'huile, qui , à 5ocent. la livre,
constitueraient un surcroît annuel de revenu
de 90000 fr. : que serait-ce pour le département
entier ?
» Il ditun peu plus bas: M. Knigh{ a trouvé qu’il était
plus avantageux de prendre les petits yeux qui sont à la
base des pousses que les gros pour la greffe du noyer en
écusson, et de les placer dans le même lieu, sur les
»
»
»
» sujets. J'avais long-temps avant lui, remarqué que celles
» que je plaçais au collet des racines réussissaient toujours ,
» et javais expliqué ce fait par la considération de l’humi-
» dité et de l’ombre dont jouissaient ces greffes , ce qui re-
» tardait le desséchement de leurs yeux.
» Dans les départemens formés de l’ancienne Auvérgne et
de l’ancien Limousin , on greffe les noyers sur eux-mêmes ,
uniquement pour retarder leur végétation au printemps,
et par là rendre plus rares sur eux l’atteinte des gelées.
Cette pratique est bien digne d’être imitée plus au nord.»
» M. Bosc dit ailleurs : La méthode de la greffe en sifflet
» est aujourd’hui pratiquée par tous les cultivateurs des en-
» virons de Grenoble , de Romans , le long de la rive du
>» Rhône dans la partie du Dauphiné.
EE» Y}Y
74 Societé royale d'Agriculture
= Voulant montrer combien son calcul est mo-
déré , l’auteur fait observer qu'en Dauphiné le
produit des noyers greflés est de huit à douze
mesures de noix, pesant chacune 65 livres poids
de marc. Ila vu en 1789 à Charly, près de
Lyon, un énorme noyer, plein de vigueur, qui,
dans une année produisit 24 bichets de noix.
Ce n’est pas tout : ajoutons avec M. Bosc que
si, après la récolte on brûlait les feuilles et le
brou, on en tirerait en potasse le vingtième de
leur poids, estimé 6fr., ce qui donnerait pour
chaque noyer un surcroît de revenu représen-
tatif d'un capital de 100 francs.
D'un autre côté, M. Duvaure, notre corres-
pondant à Crest, a éprouvé, dit-il, plus d'une
fois , que 30 à 36fr. de frais donnaient lieu à
une récolte d'une quantité de noix dont le pro-
duit s’élevait à environ 400 francs.
Ajoutons que ce n’est pas seulement par son
fruit que le noyer est précieux, son bois est
doux, flexible, liant, il souffre le ciseau, il
prend le plus beau poli. On en tire des planches
larges, minces, qui, au moyen du feu se pré-
tent docilement à tous les contours qu'on veut
leur donner. Une fois bien sec, ce bois ne se
tourmente pas , et il conserve la forme qu'on lui
a imprimée. Il n'en est aucun qui puisse sup-
pléer avec tant d’avantage les bois précieux d'un
<
de Lyon. Ù “75
autre hémisphère. Aussi les menuisiers, les
carrossiers , les ébénistes , les tourneurs, les
sculpteurs, les statuaires estiment - ils ce bois
au-delà de tous ceux qui croissent dans nos
contrées.
Comment se fait-il que malgré tant d’avan-
tages on plante de nos jours dans ce département
si peu de noyers ? et pourquoi est-on si porté à
arracher ceux qui existent en plein rapport ?
Car c'est avec douleur qu’en parcourant le dé-
partement dans Pintérêt de la statistique agro-
nomique, nous nous sommes assuré que depuis
quelque temps surtout , le nombre des noyers y
diminuait considérablement. On nous a dit que
la cause principale de cet abandon était l'incer-
titude des récoltes par l'effet des gelées tardives.
Le climat a changé, dit-on, les saisons ont
perdu leur régularité. Ce changement de tem-
pérature qu'on ne peut contester , est sans doute
le résultat de la disparition des grands arbres
forestiers , et peut-être aussi de l'abaissement des
montagnes.
Quoi qu’il en soit , ne peut-on pas se préserver
des désastres des gelées en ne plantant que des
noyers tardifs, des noyers de la St-Jean ( mé-
sange ) dont la récolte est presque sûre à cause
du retard de leur floraison ? et n’est-ce pas avec
cette variété qu’il convient de grefler tous les
Sur quelques
variétés de ché-
nes ; par M.
Chancey.
76 Société royale d'Agriculiure
sauvageons ? et cela encore parce que le mésange,
variété de noyer la plus répandue en Dauphiné,
est encore la meilleure sous le double rapport de
l'abondance et de la qualité des fruits.
Selon M. Chancey il est aussi facile de changer
en m#ésange tous nos noyers, que tous nos chä-
taigniers en marronniers de Loire, et il cite à
ce sujet M. Durand , conseiller à la cour royale
qui, ayant fait greffer en flûte sur de jeunes
branches de gros châtaigniers des marronniers de
Loire , avait obtenu des fruits de cette belle
qualité. L'expérience qui a eu lieu en Beaujolais,
à deux lieues de l’Ecluse a été constatée par M.
Chancey.
Ce n’est pas seulement le noyer et le châtai-
gnier qui excitent la sollicitude de M. Chancey ,
il voudrait encore qu'on propageât dans le dépar-
tement diverses espèces de noyers de Amérique
septentrionale , bien meilleures que les nôtres :
tels sont le chêne à gros fruits dont le gland a
deux pouces de longueur et six lignes de dia-
mètre ; le chène blanc qui croît dans les terrains
les plus arides ; le chêne châtaignier qui s'élève
à cent pieds de hauteur, dont le bois est excel-
lent et le gland doux; enfin le chêne verd de
la Caroline.
Il vous a dit que notre respectable Gilbert lui
de Lyon. 77
remit, il y adix-neuf ans, de jeunes pieds de chêne
d'Amérique qui étaient venus de graine au jardin
de la Déserte ; ils furent reçus à l'Ecluse, et
peu d’années après transplantés dans un autre
local où l’on établit en pépinière des acacias
qu’on y laissa à demeure. Les chênes souffrirent
beaucoup de ce voisinage , et néanmoins ils ont
atteint vingt à vingt-cinq pieds de hauteur , et
ils présentent le plus beau feuillage ; leur crois-
sance eût été sans doute bien plus rapide s'ils
\
n’eussent pas eu à souffrir de deux transplan-
tations et d'un fâcheux voisinage.
Les chênes présentent deux espèces, l’une à
feuilles de châtaignier qui se dépouille de son
écorce comme le platane ; l'autre paraît être
l'espèce à gros fruits.
M. Chancey a mis sous les yeux de la société
des feuilles de l’une et de l'autre ; celles de la
première avaient un pied de long sur cinq pouces
et demi de largeur , celles de l’autre neuf pouces
de long sur six de fargeur: Notre confrère s’est
offert à fournir à la pépinière départementale
de naturalisation des greffes de ces deux chênes
américains, en attendant de pouvoir en distri-
buer des glands pour semis, ce qui ne peut pas
être bien éloigné.
Non content de vous payer son tribut par les Sur divers su:
communications qui précèdent , M. Chancey }°'s 2£ronomi-
ques extraitsde
78 Société royale d'Agriculture
la correspon- Loujours plein d'ardeur pour les progrès de l'a-
dance de M. gronomie , a profité des courts instans qu'il a
Chancey.
passés parmi vous pour mettre sous vos yeux
quelques traits de la correspondance qu’il entre-
tient depuis longues années avec les plus célèbres
agronomes de l’Europe.
M. Zullin, votre correspondant à Genève,
écrit en date du 6 août 1823, que dans le pays
qu'il habite, si renommé sous le rapport des
savantes méthodes agronomiques , on substitue
les vaches aux bœufs pour l’attelage des charrues.
Si elles sont, dit-il, convenablement nourries ,
elles donnent autant de lait que celles qui ne
sont pas attelées : quant aux bœufs , ajoute-t-il,
ils ne doivent être, en attendant la boucherie ,
qu'une machine à fumier. Un grand et habile
propriétaire, M. ZLoys a un nombreux troupeau
de vaches, et il les attelle toutes.
L’attelage des vaches à la charrue, ajoute à
cet égard M. Chancey, en remplacement des
bœufs , est l'une des plus grandes améliorations
que l'on puisse introduire dans la culture des
céréales de ce département. En supposant en
effet que quatre bonnes vaches coûtent plus d’en-
tretien que deux bœufs , cette différence est plus
que compensée par le bénéfice du lait et des
vaux , et l'augmentation du fumier. Dès 1803
les avantages de ce mode de culture avaient été
de Lyon. 79
signalés dans la Bibliothèque britannique ; et
l'auteur de l'article était l'un des membres de
la société.
C'est encore dans la correspondance de M.
Lullin que M. Chancey a puisé une note sur le
plâtrage , il consiste à répandre l’engrais miné-
ral, moitié sur cotylédons, moitié sur les lé-
gumineuses de six pouces de hauteur. Un autre
savant agronome Genevois, M. Zoys, ne jette
les plâtres que sur cotylédons. Quoi qu'il en soit
de ces deux méthodes, il n'en est pas moins
vrai que l’emploi du plâtre devient tous les
jours plus fréquent aux environs de Genève;
c'est au point qu'on y exploite au moment
actuel trente carrières de ce minéral, et qu’on
est sur le point d’en ouvrir de nouvelles, tandis
que deux ou trois suffisaient il y a quarante
ans à la consommation. On en employerait bien
davantage si l'on prenait le parti de le mêler
avec du fumier pour les laisser fermenter en-
semble. M. Aeine, correspondant du conseil
d'agriculture, ayant opéré ainsi, il obtint un
compost qui , ayant été répandu sur une vigne
en vétusté, donna lieu à une récolte triple de
celle qu'on retira d'une autre vigne qu'on avait
cultivée comparativement, et de plus la pre-
mière poussa des sarmens de dix pieds de long.
Il est permis de croire qu'un pareil mélange
L
80 Société royale d Agricullure
aurait du succès sur les céréales. ( Annales de
l'agricullure française, mai 1823, pag. 201. )
On voit dans la même correspondance, que
la pratique de chauler les céréales avec le sul-
fate de zinc , recommandée, il y a plus de vingt
ans, à Toulouse, par M. Benedict Prévôt,
est devenue générale dans les environs de
Genève.
Il suffit de deux onces de vitriol bleu, dissous
dans vingt-cinq pintes d'eau, pour un hecto-
litre de semences.
Ce procédé n’est pas plus coûteux que le
chaulage ordinaire , il est plus efficace contre
le charbon des céréales, et il ne les altère nul-
lement.
M. Chancey nous annonce , dans une autre
lettre, que MM. Frèrejean sont parvenus à
chauffer avec du charbon de pierre les fours
de boulangers qu’ils ont établis à St-Etienne
dans leurs vastes usines ; la cuisson du pain
s'y opère au moyen de petits fourneaux à re-
verbère , disposés dans le fond du four, de
manière à le chauffer sans communiquer au
pain aucune saveur désagréable. Déjà sept à
huit boulangers de St-Etienne se sont empressés
de chauffer leur four par un procédé qui leur
procure une économie de combustibles dans la
proportion des neuf dixièmes.
LL
de Lyon. 8t
L'éloge du trèfle incarnat , vulgairement
nommé farouche , est souvent répété dans la
correspondance de M. Chancey.
Cette légumineuse fourragère a été l'objet
des observations de M. le chevalier Charmetlon,
propriétaire-cultivateur au Bois-d'Oingt , que
vous avez mis récemment au nombre de vos
correspondans. Cet agronome la sème immé-
diatemerit après le blé, et même sur le chaume
sans labour ; il se contente de faire traîner sur
le sol la herse de fer chargée fortement. Cette
plante , observe-t-il, ne craint point la séche-
resse, elle fleurit quinze jours avant la luzerne;
tous les bestiaux la préfèrent au trèfle ordi-
naire , et son produit est deux fois plus con-
sidérable , quoiqu’on ne le fauche qu'une fois
tous les ans ; on peut la faire consommer sur
le.champ, surtout par les bêtes à laine , elle a
le grand avantage de ne jamais les météoriser;
donnée en vert à l’étable, elle augmente le lait des
vaches et lui donne un goût plus agréable;
comme on la fauche en avril, elle rend de bonne
heure le terrain disponible ; on peut y mettre
sans différer des pommes de terre sans engrais,
elles sont même meilleures que celles qui
viennent à la suite d’une fumure particulière
M. Charmetton ne conseille pas de faire succéder
Sur le tréfl& :
incarnat ; par
M. le chevalier
Charmetton.
Grefloir de
J'inveution de
M, Madiot.
82 Sociélé royale d'Agricullure
du blé aux pommes de terre , étant, dit-il, tres-
avides , elles effritent la terre et y attirent beau-
coup de limaces, il vaut mieux y jeter des gesses
qui donnent au printemps un excellent fourrage,
dont l'influence sur le lait des vaches est ana-
logue à celle du trèfle incarnat.
Après avoir adressé cette note à la société ,
M. e chevalier Charmetton eut occasion de faire
un voyage en Normandie, province dont l'agri-
culture ‘est renommée ; il y vit des champs
immenses de trèfle incarnat où l’on faisait paître
le bétail et même les chevaux depuis la fin d'avril
jusqu’à la fin de mai; il y acquit la confirma-
tion des précieuses qualités d’un fourrage qui
engraisse beaucoup le bétail sans le météoriser
comme le trèfle ordinaire et la luzerne, il a
_appris aussi qu’on ne plâtre jamais cette plante.
Nous allons maintenant rendre compte des
faits nombreux que nous devons à M. Madiot.
Cet agronome laborieux et infatigable a in-
venté un instrument dont l'expérience lui a
démontré les avantages pour greffer sûrement et
avec promptitude toute sorte d’arbres et d’ar-
bustes, 3
Comme il ne serait pas possible de se faire
une idée de ce greffoir si la description qu’en
donne l’auteur n'était accompagnée d’un dessin ,
de Lyon. 83
vous jugerez sans doute convenable , Messieurs,
d'ajouter à votre compte rendu la figure de Pins-
trument inventé par notre confrère (1).
Il nomme spatule A un appendice de la lame,
d'un demi-pouce de longueur, d'un quart de
pouce de large; il est en argent, et pourrait
être d'acier, ou mieux de platine (selon le con-
seil de feu notre confrère M. Rast) ; il est
légèrement horizontal , appliqué sur le dos de
Ja lame, et presqu'à sa partie supérieure. Cet
appendice sert à inoculer l’écusson. Il facilite sin-
gulièrement l'opération, en la rendant plus
prompte. On sait combien cette dernière con-
dition est essentielle.
La lame B a deux pouces et demi de lon-
gueur , et n’est tranchante que supérieurement;
c'est-à-dire à la seule partie qui serve à enlever
l’écusson.
L'auteur nomme talon C la partie de la lame
émoussée dont le tranchant serait inutile, et qui,
telle qu’elle est , sert de point d’appui auxdoigts,
et donne beaucoup de facilité à l’opérateur.
Entre la lame et le manche est le ressort D;
il est intérieur et sert à ouvrir et fermer l’ins-
trument sans aucun vacillement,
(1) Cette figure, de grandeur naturelle , est à la fin du
présent compte rendu.
Sur l’ébour-
geonnement
des arbres frui-
\
tiers ; par Le
méme.
84 Sociélé royale d’Agricullure
La platine E qui règne le long du manche
sert à maintenir les autres parties.
Le manche F est bifurqué; il est de bois de
plaqueminier ou diospyros, lequel en vieillissant
devient dur et compact comme celui d’ébène ou
d'acajou ( les arbres qui le fournissent sont cul-
tivés à la pépinière de naturalisation } ;ce manche
est arrondi en corne, et disposé de manière à
recevoir les platines, le tranchant et la spatule.
Les rosettes sur lesquelles sont rivés les clous
qui tiennent toutes les pièces assemblées (1), et
une légère cavité servent à introduire le bout de
l'index pour ouvrir l'instrument.
Aucun grefloir n'est d’un emploi plus facile
même pour ceux qui n’ont pas l'habitude de gref-
fer, il est aussi très-expéditif; c’est au point qu’en-
tre les mains d'un habile pépiniériste il peut
servir à opérer en un seul jour 1900 à 2000 grefles.
Quand on veut avoir de beaux arbres fruitiers,
il ne suffit pas de les greffer convenablement, il
aut encore en diriger la sève avec habileté, et
empêcher qu’elle ne s'égare pour développer des
bourgeons superflus au détriment des produc-
tions utiles. A la faveur d’un ébourgeonnement
bien entendu, on maintient encore entre les
(1) Cet instrument se trouve chez M. Lépine, coutelier,
rue de la Coge, à Lyon.
de Lyon. 85
branches un équilibre exact, et on assure la
fécondité de l'arbre pour plusieurs années.
Tout le monde se mêle d'ébourgeonner; mais
fort peu de cultivateurs pratiquent d'après de
vrais principes cette opération essentielle. M.
Madiot a déposé dans votre porte-feuille un mé-
moire sur cet objet. Il y traite successivement
1,9 du palissage selon la méthode de Montreuil ;
2.° du procédé de Forsith ; 3.° de celui à l'éven-
tail ; 4.0 de celui qui convient pour les arbres
en quenouille; 5.° pour ceux en gobelet; 6.2
pour les buissonniers; 7.2 pour les arbres à
grand vent; 8.° il traite de l’ébourgeonnement
par étage des tiges droites; 9.° de l'ébourgeon-
nement de la vigne; 10. enfin de celui des
arbres résineux.
Notre confrère pense que toutes les espèces
d'ébourgeonnement peuvent se pratiquer avec la
main , sans le secours d'aucun instrument, et
que cette manière est préférable, parce qu’elle
est non-seulement plus expéditive , mais encore
plus complète, et qu’elle extirpe avec les bour-
geons les tubes médullaires qui leur corres-
pondent, et que dès-lors la sève se dirige vers
la branche mère.
Après cette observation , l'auteur parle de la
méthode de Montreuil , de celle de Forsith , trop
connues pour être décrites ici. Ce qu'il dit de
86 Société royale d Agriculture
l'ébourgeonnement en quenouille , en éventail ,
en gobelet, prouve qu'il a confirmé par sa pro-
pre expérience les principes de M. Roger-Schabol.
Lorsqu'une branche à bois, dit-il, est bifurquée
ou trifurquée, elle est généralement garnie d'un
grand nombre de bourgeons; on ne doit con-
server alors que ceux qui sont les mieux dis-
posés. L'on voit souvent, ajoute-t-il, une branche .
fruitière retenir du fruit, quoiqu’elle n'ait pro-
duit aucun bourgeon , il est bon alors de la
couper à trois ou quatre yeux : on intercepte ainsi
la sève et on prévient l'épuisement, non -seu-
lement de cette branche, mais encore de l'arbre
entier. Dans tous les cas, il faut bien se garder
de laisser Jes branches trop serrées’ les unes
contre les autres , elles éprouveraïent par l’action
des vents, un fâcheux frottement.
L’écartement des branches d'un arbre peut
être régulier et symétrique au point de lui don-
ner la forme d'une colonne offrant plusieurs
étages distans les uns des autres de deux à trois
pieds. Le nombre de ces étages s'accroît avec les
années , en proportion de la vigueur de Parbre,
qui prend de plus en plus l'aspect le plus agréable
en même temps qu’il produit d'excellens fruits ,
et cela par l'influence de l'air et de la lumière
qui circulent sans obstacle entre les branches.
C'est en pyramides que sont taillés les ceps
de Lyon. 87
de vigne des diverses variétés cultivées à titre
d'expérience à la pépinière de naturalisation de ce
département. Cette méthode, peu usitée, est
fort avantageuse parce qu’elle économise l'espace ;
qu’elle facilite l'ébourgeonnement, qu'elle ouvre
à l'air et aux rayons solaires un libre accès.
Il ne suffit pas de bien ébourgeonner la vigne
il faut encore la dégarnir soigneusement des
chicots , ergots et onglets qui arrêtent le cours
de la sève et déterminent des ulcères chancreux-
Si les vignes du Beaujolais sont en meilleur état
que celles des environs de Lyon, c’est parce que
dans le Beaujolais on élague soigneusement les
bois morts; il ne faut pas craindre de raccour-
cir les ceps; car c'est dans cet état qu'ils poussent
le plus et qu'ils produisent la plus grande quan-
tité de grappes; et à cet égard, l'auteur rap-
porte que le 10 juin 1823, dans laprès-midi,
il tailla un cep en pyramide , qui, le lendemain
à la même heure, avait allongé ses rameaux de
quinze pouces. Il dit encore que deux plants de
huit ans, ayant été mis en parallèle, l’un fut
traité d’après la méthode du Beaujolais , l'autre
d'après celle du Lyonnais:le premier donna
26 grappes , le deuxième 14.
On suit une autre mauvaise méthode dans le
Lyonnais , elle consiste à planter les ceps à deux
pieds et demi de distance au lieu de quatre à
Sur les semis
d'arbres non
acclimatés, et
sur unc couche
économique ;
sans fumier ;
par le méme.
88 Sociélé royale d'Agriculture
cinq ; dès-lors ils se disputent le terrain , leurs
rameaux s’entortillent et se dérobent mutuelle-
ment l'air et la lumière.
Pour ce qui concerne l’ébourgeonnement des
arbres verts, il ne peut consister que dans l’ac-
tion de tortiller les branches horizontales qu'on
veut supprimer ; toute autre méthode don-
nerait lieu à de fâcheuses hémorragies. On a
néanmoins observé que la conpe des rameaux
pouvait être pratiquée impunément sur quel-
ques arbres conifères : tels sont le thuyÿa, le gene-
vrier , l'if, le cyprès ainsi que l'if; le genevrier
de Virginie, peut, sous la serpette prendre
toute espèce de formes , et à cetégard M. Pidancet,
régisseur de la terre de l'Ecluse, s’est livré à des
essais fort curieux.
Un autre mémoire de M. Madiot a pour objet
l'art d'élever de semis des arbres et arbustes
étrangers pour les cultiver ensuite en pleine
terre. C’est après vingt ans d'expérience qu’il
donne le terreau de bruyère comme approprié
aux jeunes arbres de l'Amérique septentrionale,
11 distingue de deux sortes de terreaux, l’une
compacte, l'autre légère ; il conseille de mêler
à la première un septième de sable de rivière;
à l’autre un sixième, avec la même quantité
de terre argileuse, et arroser souvent. Toute
espèce de fumier mélangé lui paraît nuisible aux
de Lyon. 89
semis , le fumier favorisant la végétation d’une
foule de champignons parasites et souterrains ,
et qui rongent les radicules.
Après avoir été semées dans des terreaux de
bruyère , les graines de ces arbres doivent être
soumises à une température à peu près égale à
celle des pays dont elles sont originaires.
Dès les premiers jours du printemps, ces
jeunes plants sont exposés au levant, à l'abri
du soleil et du nord. Il est des graines qui ne
lèvent qu'à l'ombre ; quelques unes d'arbres
baccifères , tels que certains jujubiers micocou-
liers, etc. ne germent qu’au bout de hait à dix
ans : dans tous les cas, il importe beaucoup de
défendre les cotylédons de ces graines contre les
ardeurs du soleil.
Il n’en est pas de même des graines d'arbres
originaires des zones brûülantes , celles-ci seront
placées dans des pots ou terrines qu'on enfoncera
dans des couches formées de végétaux capables
de subir une fermentation très active. On les expo-
sera au soleil à l'abri du nord et des eaux pluviales.
Ces couches que M. Madiot appelle sourdes ,
auront 2 à 3 pieds de hauteur , et seront con-
fectionnées ainsi: on forme un lit de plantes
aromatiques qu'on tasse le plus possible par le
trépignement des pieds, pour le réduire à l'é-
paisseur de 8 à ro pouces ; on encaisse celte cou-
90 Société royalé d'Agriculture
che au moyen de quelques piquets ou de bran-
chages entralacés ; on couvre cette couche de
bonne terre; une fermentation vive ne tarde
pas à s'établir dans l’intérieur de la couche, et
bientôt les cotylédons se développent; on doit
couvrir et paillasser ces organes délicats pour les
préserver de la trop grande ardeur du soleil et
des rosées nocturnes. Comme ils ont besoin
d'être arrosés, et que l'eau troublerait la fermen-
tation des couches , il faut avoir grand soin de
ne verser cette eau que sur les pots qui con-
tiennent les graines.
Les plantes aromatiques employées par l'auteur
pour former ces couches, sont des marubes , des
cataires, des sauges, des menthes , des thyms.
Aussitôt que ces jeunes plançons sont devenus
un peu ligneux , on les transporte par un beau
jour de printemps dans des pots, en séparant
les espèces. On les laisse tout l'été à l'air, on ne
craint pas même de les exposer aux premières
gelées de l'automne ; ce n’est que lorsque le froid
est intense qu’on les rentre dans l’orangerie. Dès
l'année suivante on se hasarde d’en mettre en
pleine terre , sauf à les empailler si l'hiver est
trop rigoureux.
C'est au moyen de ces couches économiques
composées de plantes aromatiques que M. Madiot
est parvenu à naturaliser à la pépinière du
Rhône, un grand nombre d’arbres étrangers.
de’ Lyon: ‘ 91
Non content de naturaliser des arbres exotiques,
M. Madiot a su employer plusieurs espèces in-
digènes à des services de haut intérêt , il a sou-
tenu par des plantations bien entendues les
terrains mouvans qui menaçaient de tomber sur
le cours St. Clair , depuis la Boucle jusqu’à
l'extrémité du faubourg. On sait combien , avant
ces plantations , étaient insuffisans les gros murs
de soutènement que l'on avait construits au
pied de ce coteau , dont la hauteur presque à pic,
est de 90 à 100 mètres au-dessus du niveau du
Rhône. Notre confrère n'a pas obtenu moins de
succès sur la route nouvelle tracée à travers la
montagne de Tarare jusqu'à une hauteur de
344 mètres au-dessus du niveau de la mer.
Mais ce n’est pas seulement par des planta-
tions d’arbres qu’on fixe des terrains mouvans:
On peut encore faire servir à cet important
usage certaines plantes herbacées ; et parmi ces
végétaux M. Madiot place au premier rang le
froment junciforme, Triticum junceum , et'elyme
des sables, Elymus arenarius. A a rencontré fré-
quemment ces deux graminées le long des côtes
arides et brülantes que baigne le Rhône depuis
Lyon jusqu’à Valence. La nature semble les y
avoir semées pour prévenir les éboulemens ; M.
Madiot a eu occasion de jeter au milieu d’elles
sur des penchans de ravins plusieurs espèees
Sur le fro-
ment joncifor=
me et l’elyme
des sables pour
consolider les
sables mou-
yans.
Manière
d'empêcher les
choux de mon-
ter ; par le
même,
92 Socielé royale d'Agriculture
de chènes , de hêtres , de châtaigniers , et au bout
de quelques années ces terrains se sont couverts
de plançons vigoureux ; ces mêmes graminées
engraissées par le détritus des graminées fauchées
de bonne heure, peuvent encore fournir de bons
fourrages , comme l'auteur l’a observé chez un
de ses amis en 1820. Ce n'est pas tout : la paille
de Pélyme des sables et celle du froment junci-
forme seraient employées avec avantage à la
fabrication des chapeaux.
D'après ces motifs , l’auteur voudrait que ces
deux graminées fussent semées sur les dunes de
Gascogne, elles assureraient, dit-il , et surtout
rendraient plus prompt le succès des plantations
d'arbres qu’on y fait pour les fixer et prévenir les
catastrophes dont M. le comte de Tournon nous
traça l’an dernier l’effrayant tableau (1).
Il est un arbuste indigène qui sert à former
les haies , l'aubépine ( Cratégus oxiacantha), et
un arbrisseau étranger qu'on pourrait employer
au même usage , le fevier (Gleditzia tricanthos ) ;
ils sont l’un et l’autre armés d'épines , et M.
Madiot propose de faire servir ces productions
pour empêcher le choux cabut ( Brassica oleracea
capitala') de porter des graines au lieu de former
ce qu'on nomme la pomme. On enfonce , dit-il ,
(1) Voyez compte rendu pour 1822, pag. 38.
de Lyon. 93
ces épines transversalement entre le 1.% et le
2.€ étages des feuilles, on les y abandonne, et
elles déterminent une extravasion de sève consi-
dérable ; la floraison et par conséquent la fruc-
tification n'ont pas lieu, et les feuilles supé-
rieures rècevant toute la nourriture se multi-
plient , s’éparpillent et s'agglomèrent. L'auteur,
qui ne se donne pas pour l'inventeur de cette
méthode, l'a pratiquée, dit-il, avec le plus
grand succès en 1823. D’autres observations de
M. Madiot trouveront place au chapitre de l'his-
toire naturelle. Je dois terminer cette section par
la belle notice d’une amélioration projetée qui ?
comme tant d'autres sera votre ouvrage.
M. Matthieu Bonafous, notre correspondant
à Turin, parcourant l'année dernière, en agro-
nome observateur , les environs de sa ville natale,
crut remarquer que le chanvre cultivé dans le
Lyonnais était bien inférieur à celui qui croît
en Piémont, surtout à celui qu'on récolte dans
le Bolonais , et cela, quoique la plupart des cul-
tivateurs du Rhône ayent établi leurs chenevières
sur des terrains très- propres au chanvre, et
prodiguent à ce végétal les engrais dont il est
avide.
Désirant améliorer dans sa patrie un genre
important d'industrie agricole, il a bien voulu
Introduction
du chanvre bo-
lonais; par le
même.
94 Sociélé royale d'Agriculture
vous adresser uné certaine quantité de graine
de chanvre Bolonais de la plus belle qualité. Il
a exprimé le désir que cette graine soit offerte
gratuitement aux cultivateurs du Rhône qui
voudraient en semer comparativement avec celle
du chanvre du pays, et pour stimuler leur zèle,
il s’est offert à faire les fonds d’un prix en faveur
de celui qui , au jugement de la société, obtien-
drait les résultats les plus importans.
Une offre si généreuse a été acceptée avec re-
connaissance. La graine du chanvre Bolonais a
été déposée à la pépinière départementale de na-
turalisation , et la distribution en a été confiée à
nos confrères MM. Madiot et Remond. En
même temps un programme de prix a été publié
par la voie des journaux. (1)
L'appel fait aux agronomes a été entendu,
soixante-dix-huit d'entre eux, dont cinquante-
quatre du départemént se sont empressés de
semer le chanvre Bolonais, nous attendons des
renseignemens sur les résultats de cette culture
nouvelle, tout nous annonce qu'ils seront im-
portans. Déjà M. Balbis vous a présenté un
paquet de chanvre Bolonais cultivé sur le terri-
toire de la Croix-Rousse par M. de Valence , et
vous en avez remarqué la hauteur qui dépassait
(1) Voyez à la fin de la présente notice.
de Lyon. 95
“onze pieds. M, Grognier , de son côté, en a vu
à Tassin , chez notre confrère, M. Rreussec , qui
s'élevait de deux à trois pieds au-dessus du
chanvre indigène à côté duquel il avait été
semé. Le sol , l'exposition, le mode de culture
étaient les mêmes pour l’un comme pour l’autre,
et vous avez entendu M. Remond vous dire que
partout où les deux espèces avaient été placées
dans des circonstances semblables, celle de Bo-
logne avait acquis un plus grand développement.
Il reste à savoir si elle offre la même supériorité
sous le rapport de abondance , de la finesse et
de la ténacité de la filasse, s’il n’exige pas da-
vantage du sol qui le nourrit , s’il peut se con-
server dans nos contrées sans dégénération. Ces
renseignemens seront recueillis par une commis-
sion que vous avez chargée en même temps
d'examiner les titres des cultivateurs qui con-
courront pour le prix dont M. Matthieu Bonafous
a fait les fonds avec une générosité au-dessus de
tout éloge.
C'est afin de ne pas prendre en ce moment
l'initiative sur le travail de la commission que
je dois garder le silence sur un mémoire de M.
de Broal, juge de paix du canton de Mézieux ,
qui a cultivé comparativement dans son domaine
de Vaux, trois espèces de chanvre, l'une de
Bologne, l'autre de Russie, la troisième , de
96 Societé royale d'Agriculture
Vizille, département de l'Isère. IL a mis sous
vos yeux des bottes de chacune d’elles, en joi-
gnant à cet envoi un mémoire dont vous avez
entendu la lecture avec beaucoup d'intérêt.
En attendant le résultat du concours, nous
avons appris par une lettre de M. Bonafous que
le gouvernement pontifical , à l'exemple de celui
du roi de Sardaigne , a prohibé tout récemment
l'exportation de toute espèce de graine de chanvre.
Les cultivateurs lyonnais ne pourront donc plus
se procurer directement de celle de Bologne;
c'est à eux à conserver précieusement les graines
de cette race qu'ils ont récoltées cette année ,
afin d'assurer à la France la naturalisation d’une
plante textile qui paraît très-précieuse.
SUITE DE L’ECONOMIE RURALE.
OPÉRATIONS agronomiques de M. de TaLuyers,
particulièrement sur les irrigations. ( M. Gras,
rapporteur ).
Dans le courant de 1823, vous eûtes connais-
sance des améliorations importantes qu’avait
introduites dans ses domaines M. Bertaud de
Taluyers | qui ne vous appartenait pas encore à
ütre de correspondant. Vous désirâtes des détails
Sur ces belles opérations, l’un de vous se rendit
de Lyon. 97
sur les lieux pour les recueillir, et il vous les
donna dans un rapport verbal dont voici la
substance :
Le domaine de M, de Taluyers est situé , partie
dans la commune de ce nom, partie dans celle
de St. Laurent. On le nomme Prapin. Il s'étend
sur une plaine élevée qui forme la première
rampe de la montagne de St. André, il repose
sur un granit micacé en décomposition. La terre
végétale y est à peine de cinq à six pouces. Les
arbres y sont rares et rabougris , il y souffle des
vents impétueux échappés du Pila ; Pair y est
pur, les hommes et les animaux y offrent les
signes de la santé.
Ce domaine de 400 bicherées lyonnaises (en-
viron 52 ares), donnait autrefois 120ofr. de
revenus ; il en produit actuellement 10000,
C’est principalement le résultat de la métamor-
phose en prairie d'une terre à seigle qui donnait
trois ou quatre pour un.
Pour créer cette prairie, on a creusé un ré-.
servoir d’une surface de sept à huit bicherées
(‘environ cent quatre ares) , et de la profondeur
de seize à dix-huit pieds ( six mètres environ ):
plusieurs sources se rendent dans ce réservoir,
il reçoit les eaux pluviales chargées de principes
fertilisans qui descendent de St. Laurent ; il a
été confectionné d'après le système suivi pour
7
98 Société royale d'Agriculture
la construction des étangs de Bresse. On a été
favorisé par la nature du terrain qui, conve-
nablement conroyé, s’est montré imperméable
à l’eau; et avant de se livrer à l’entreprise,
cette propriété du terrain avait été constatée
par des expériences bien combinées.
Il fallait encore que le champ que l'on voulait
changer en prairie fût configuré de manière à se
prêter à un arrosement complet et facile : ïl
avait cette disposition. On put en temps oppor-
tun, l'arroser par immersion ; et au moyen d'un
canal parallèle au réservoir et traversant la
prairie à la partie supérieure, canal où l'on
mettait du fumier d'écurie avec du plâtre , et où
entrait l'eau avant de se répandre dans la prairie,
on put rendre cette eau éminemment fertilisante.
Aussi cette prairie, examinée dans le courant
de mai offrait-elle une belle végétation. Presque
toutes les plantes dont elle se composait sont
comprises parmi les meilleurs fourrages. Elle est
de la contenance de 260 bicherées (33.80 ares
environ). Elle doit donner, année commune,
4000 quintaux de foin , qui, dans ce pays vaut }
terme moyen , 3fr. le quintal. Le produit du
regain doit servir à payer les façons. Le débit
du foin est facile à Taluyers, parce qu’auprès
de cette commune passe le grand chemin de
St. Etienne à Lyon, sur lequel les charroïs sont
de Lyon. 99
très-nombreux. En attendant la vente, le foin est
placé sous un vaste hangar dont la toiture est à
ceintre ; 1l est pesé avec une grande économie
de temps, au moyen d’une espèce de bascule
fort ingénieuse, de l'invention de M. de T'aluyers.
Cinq à six ans lui ont suffi pour opérer cette
grande amélioration ; c’est à 20000 fr. que se sont
bornés ses déboursés, et ses bénéfices ont dé-
passé 80,000 fr. Cet habile agronome a bien
voulu confier au membre de la société qui avait
visité son domaine , les notes qu’il avait écrites
sur ces améliorations , et vous avez prié M. Gras
d’en prendre connaissance pour vous en rendre
compte et vous développer leur objet.
Vous avez entendu avec le plus grand intérêt
le rapport de M. Gras, et vous avez arrêté qu'il
serait inséré textuellement dans la notice an-
nuelle de vos travaux.
«Un savant également célèbre par ses travaux
et par ses écrits, avait choisi cette épigraphe :
Ingentia rura laudalo, exiguum colito. Vans la
bouche et sur la porte de M. l'abbé Rozier , le
tonseil du poète latin, publiquement, proclamé
avait pris Pautorité d’un précepte. L'un et l'autre
ont trouvé un contradicteur. Dans un mémoire
dont vous avez entendu la lecture avec intérêt,
M. de Taluyers , agronome distingué de ce dé-
RAPPORT
DE
M. Gras.
Culture des
grandes et des
petites prairies
100 Société royale d'Agriculture
partement, a prouvé que d'après certaines ex-
positions données , il était plus avantageux de
cultiver les grandes propriétés que les petites. »
» Cet écrit, dont la modestie relève le mérite,
vous a paru un compte rendu par un agriculteur
actif et éclairé de ses travaux et de son admi-
nistration. Vous avez cru y remarquer que les
procédés dont il a usé pour changer l’ancienne
culture de ses fonds et en adopter une plus ap-
propriée à la nature du sol, étaient savamment
combinés, que des observations exactes et sou-
tenues confirment les faits qui en sont le résultat ;
que le désir généreux d’être utile aux agronomes
qui suivraient son exemple, l’a engagé à leur
tracer des règles pour la direction de leurs essais ;
que de riches produits ont succédé à ses combi-
naisons et réalisé ses espérances ; en un mot,
que dans l'écrit de M. de Taluyers cet ensemble
de détails, de faits, de résultats était fondé sur sa
propre expérience, que rien n’était abandonné à
une théorie systématique. »
» Vous avez manifesté l'intention qu’un rap-
port du mémoire de M. de Taluyers vous füt
présenté ; c’est à ce vœu que je viens répondre,
c’est cette dette que je vais acquitter. »
» M. de Taluyers débute par quelques obser-
vations générales et d’une haute importance; il
balance les avantages et les mouvemens de la
de Lyon. 10i
division des terres, ou de leur réunion en des
masses considérables , il recherche les causes qui
ontengagéles grands propriétaires à aliéner leurs
héritages ; il conseille dé la simplicité dans les
cultures, une sage circonspection dans l'usage
des nouvelles méthodes ; il indique les procédés
à pratiquer pour la bonification du sol et les
combinaisons qu'elle comporte. »
» Une grande partie de ces observations est
déjà connue, nous ne les rappellerons pas ; c'est
à celles qui nous ont paru le plus dignes de votre
attention que nous nous arréterons. »
» Avant M. de Taluyers, un de nos législateurs
modernes avait dit: partout où vous construi-
rez une chaumière et l’environnerez d'un arpent
de terre, vous fonderez une nouvelle famille et
vous multiplierez les bras pour l'agriculture.
Notre auteur est également convaincu que nous
devons à la grande division des terres l’accrois-
sement prodigieux de la population et l'augmenta-
tion considérable de nos produits territoriaux. »
» Il attribue à cette division un effet qui dans
le temps excita notre étonnement et dont la
cause échappa aux esprits inattentifs. »
» Dans des siècles antérieurs , dit M. de T'aluyers,
la désertion , le licenciement des armées enfanta
les bandes dévastatrices qui furent la terreur et
le fléau des provinces qu'elles parcoururent et
102 Société royale d'Agriculiure
ravagèrent : il en a été tout autrement de nos
jours. Libre de toute contrainte, le soldat li-
cencié a conservé l'esprit de discipline qui le
maîtrisait sous son drapeau , et rentré paisibles
ment dans ses foyers, il y a déposé sans mur-
mure ses armes qui furent les témoins et les
instrumens de sa valeur et de sa gloire. »
» Sans vouloir donner à un dévouement aussi
absolu, un principe moral trop élevé, M. de
Taluyers pense seulement que possesseur d'une
parcelle de terre, le soldat devenu simple cito-
yen , fut rappelé par l'attrait de la propriété et
céda au sentiment du besoin de la tranquillité
protectrice des premiers travaux et des premiers
plaisirs de sa jeunesse. »
» Balançant ensuite les avantages de la division
des terres avec ceux de leur réunion en une
masse considérable, M. de Taluyers s'occupe
d'abord du soin de venger les grands propriétaires
du reproche injuste d'aliéner par un motif de
cupidité , l’héritage de leurs pères. Ils y sont,
selon lui , entraînés par des causes indépendantes
de leur volonté. »
» Ces causes, il les attribue à la loi des suc-
cessions , à l’énormité de l'impôt, au mode de
culture stationnaire par le manque de capitaux ;
à l'infidélité des régisseurs, à la mauvaise foi
des fermiers ou des grangers, au haut prix des
| de Lyon. 103
gages des domestiques, à la trop grande variété
de culture, au peu de soin qu'on apporte dans
l'entretien des prairies, à absence et à l’insou-
ciance du maître , enfin au bas prix des denrées. »
» L'auteur du mémoire parcourt successivement
les causes impulsives de l’aliénation des grandes
propriétés , et les réflexions que lui suggère la
modification apportée à la loi des successions par.
celle qui a créé les majorats , sont d’une vérité
frappante. »
» Puisqu'il est, dit M. de Taluyers, de l'essence
de notre constitution politique qu'il existe un
corps intermédiaire et divitocraté ; qu’il s’associe
à la puissance, par l’ascendant des richesses, que
la possession des vastes propriétés en rehausse
l'éclat, que linaliénabilité de ces propriétés per-
pétue la splendeur des familles appelées à former
ce corps, du moins faut-il qu'une administra-
tion active et intelligente garantisse à la pros-
périté publique qu’elle retirera des masses im-
posantes que leur affectation aux majorats exclut
du commerce, les mêmes avantages qu'elle aurait
obtenus de la division de ces masses. »
» Quelle sera la règle des grands propriétaires
pour reconnaître dans leur intérêt et dans celui
de l'état, si leur administration a atteint le but
qu'ils doivent se proposer ? Quel est, pour frap-
Du régime
et de l’admi-
nistration des
grandes
priétés,
pra-
Y04 Société royale d'Agriculture
per ce but, le mode d'exploitation à préférer ?
Ces deux problèmes importans sont résolus par
Vauteur du mémoire. »
» Les bases de l’impôt fondées non sur les
produits , mais sur la contenue et la classification
des propriétés, ne pourraient être changées
sans des inconvéniens graves et de fâcheux ré-
sultats, même pour l’agriculture. L’impôt de-
vient ainsi un point de départ immuable. Il est
reconnu que l'impôt dans la proportion des pro-
duits des grandes propriétés, comparés à ceux
des petites, est pour les premières d’un à quatre,
pour les secondes d'un à six. Conséquemment
l'équilibre rétabli entre ces deux produits, dont
la proportion de l'impôt constatait la différence ,
sera pour le grand propriétaire le thermomètre
le plus fidèle de la bonté de son administration. »
» Si les ouvrages multipliés de nos savans agro-
nomes n'étaient pas remplis de conseils donnés
aux propriétaires-agriculteurs pour les prémunir
contre la déception des méthodes innovées qui ne
se recommandent ni par leur simplicité ni par
leur clarté, contre les opérations exécutées sur de
grandes échelles, avant d’avoir été tentées sur de
petites contenues, contre le dangerdes emprunts
pour les bonifications, contre les piéges des régis-
seurs et des fermiers intéressés à dissimuler ou
à amoindrir les revenus des propriétés qu'ils
de Lyon. 105
régissent ou qu'ils afferment; nous aurions à
suivre M. de Taluyers dans cette partie de son
mémoire ; nous aurions à vous rappeler avec lui
. la méthode salutaire de simplifier autant que
possible les genres de culture dont chaque do-
maine est susceptible; à exprimer le vœu qu’il
forme pour que le langage agricole soit aussi
vulgaire que l’art l'est lui-même ; mais il nous
a paru que dans ce tableau, dont les détails vous
sont depuis long-temps connus, notre auteur a
seulement voulu peindre les obstacles qu'il avait
eus à vaincre pour améliorer sa propriété et pour
que sa persévérance, en les surmontant , servit
tout à la fois d'encouragement pour l'imiter , de
leçon pour les éviter. »
» C’est sur des objets d’une plus haute impor-
tance que votre attention doit se fixer ; c’est sur
le mode d'exploitation qui, sous beaucoup de
rapports, rend les grandes propriétés préférables
aux petites , que vos regards vont s'attacher. »
» M. de Taluyers s'occupe peu. de la culture
des terres et encore moins du régime des bois ;
il se borne à répéter, pour les premières, qu’elles
s’améliorent , soit par les prairies artificielles
dont les avantages sont généralement reconnus,
soit par l'usage des instrumens aratoires les plus
perfectionnés. C’est à la charrue inventée par M.
Dumont , et dont il décrit les effets, qu'il donne
la préférence. »
106 Société royale d'Agriculture
» Quant au régime des bois , il convient que les
siens sont en mauvais état, et que la matière à
cet égard étant épuisée , il s'abstient de toute
observation. Il parle seulement des grands ser-
vices que certaines espèces d'arbres peuvent
rendre, et si au pied de ses possessions coulait
un torrent ou une rivière, à l'exemple de M-
de Varax de Marcilly, il en aurait prévenu les
excursions, en les contenant dans leur lit par
des plantations de peupliers heureusement com-
binées. »
» M. de Taluyers permettra-t-il de s'étonner
de la sévérité de ce laconisme, et de ce qu’en
parlant des grandes propriétés , en classant les
bois dans leurs revenus , cependant il n'a rap-
pelé ce genre de productions que pour signaler
Patilité de la plantation de certains arbres ? »
» Des vues d'un autre ordre auraient dû, ce
semble, agrandir ses observations. »
» La conservation des forêts et des bois taiïllis
est du plus grand intérêt , aussi a-t-elle été dans
tous les temps l'objet de la sollicitude du gou-
vernement et le sujet de soins également salu-
taires par la sagesse de leurs mesures et Ja ri-
gueur de leurs prohibitions. »
s » Ce n’est ni du petit propriétaire, ni du
paysan qu'on peut espérer cette conservation. Le
dernier surtout avide de jouir du fruit annuel de
de. Lyon: 107
ses travaux, n’acquiert des bois que pour y porter
la hache. On ne doit attendre cette conservation
que des grands propriétaires. À eux seuls exclu-
sivement il appartient aussi d'ajouter à cette
partie de nos richesses nationales par la planta-
tion et la culture des arbres exotiques que
nous avons acclimatés. »
» D'un autre côté, l'institution des majorats
ne s'oppose pas seulement aux inconvéniens d'une
extrême division des terres , elle exerce surtout
de plus une influence puissante sur la conser-
vation des forêts dont l'existence , par l’efet de
linaliénabilité, se perpétue avec l'effet des ma-
jorats eux-mêmes, indépendamment de ce qu'une
nécessité journalière et toujours renaissante force
l'emploi des arbres de haute futaie et en assure
le produit aux grands propriétaires. Les forêts ,
sous un autre rapport, doivent être considérées
comme d'immenses capitaux mis en réserve pour
les besoins des temps difficiles et orageux. Qui
ne se rappelle , en effet , le noble emploi que fit
du prix de la vente de ses antiques forêts un
ministre, le conseil , l'ami, le censeur de son
souverain , et l'influence que ce généreux sacri-
fice eut sur les événemens qui le suivirent? Qui
ne sait que le tribut déposé par un serviteur
fidèle aux pieds d’un maître reconnaissant con-
tribua à purger le sol français des hordes étran-
108 Société royale d'Agriculture
gères qui le foulaient , et à conduire par la main
de la victoire un grand prince sur le trône de ses
aïeux et dans le sein de sa grande famille ? ».
» Peut-être aussi, Messieurs, qu’en nous éton-
nant de ce que ces avantages éminenset caractéris-
tiques de la supériorité des grandes propriétés ,
n'ont pas été aperçus par un observateur judi-
cieux , nous sommes-nous exposés nous - même
au reproche de méconnaître intention et le but
de Pécrit que nous analysons. »
« Réunissant à des connaissances étendues en
agronomie, une pratique consommée, M. de
Taluyers s’est proposé seulement d'indiquer quel
est, pour les grandes propriétés , le genre de
culture le plus productif, d'en garantir la réa-
lité par sa propre expérience, et d’en faciliter
l'exécution par la connaissance de ses procédés. »
» C'est en nous renfermant dans cecerele , que
nous suivrons désormais l'auteur du mémoire. »
» Il ne se dissimule ni la difhculté d'amé-
liorer les grandes propriétés, ni les obstacles
qui s'opposent à cette amélioration. Pénétré de
cette vérité, il a cherché, pour vaincre ces
difficultés et surmonter ces obstacles , un pro-
cédé qui s'écartät de ceux généralement adoptés,
et selon lui presque toujours aussi dispendieux
qu’insuffisans. »
» Ce procédé est celui de l'amendement des
anciennes prairies et la création de nouvelles. »
de Lyon. 109
» Personne ne contestera à M. de Taluyers la
supériorité des produits des prairies sur toutes
les autres espèces de récoltes. Le tableau qu’il
en a-tracé est d’une vérité démontrée. »
» Cette nature de bien, observe-t-il, exige
peu de main-d'œuvre préparatoire et peu de se-
mence. Elle n'exige point de dépense , ni de re-
cette de détail; elle brave les intempéries des
saisons et les fléaux qui ravagent les autres
productions ; elle a surtout cet avantage pré-
cieux, que la récolte du foin peut s’apprécier
et se vendre sur place; que par lui-même et
sans l'intervention toujours onéreuse d'un régis-
seur , le propriétaire peut supputer et assurer
son revenu avec d'autant plus de certitude que
les fourrages sont difficiles à soustraire, et
qu’une fois bien conditionné, ils ne nécessitent
plus de surveillance. »
» Cette base incontestable ainsi établie, M.
de Taluyers s'occupe de l'amendement et de
Pirrigation des anciennes prairies, de la conser-
vation et de l'irrigation des nouvelles. »
» Nous avons hésité long-temps , Messieurs ,
sinous devions vous entretenir des observations
et des conseils de M. de Taluÿers sur l’'amende-
ment et l'irrigation des anciennes prairies. De
tous les détails dans lesquels il est entré, il n'en
est pas un qui ne soit connu ; de tous les pro-
De l'aimer. |
dement des an-
ciennes prai-
ries , eonsidéré
comme moyen
d'améliorer les
grandes pro-
priétése
110 Sociélé royale d'Agriculture
cédés qu'il indique, il n'en est pas un qui ne
soit pratiqué par ceux-là mêmes qui n’ont que
de premières notions en agriculture. »
» À coup sûr cette partie de l'écrit que nous
analysons, considérée sous ce rapport , était
peu propre à fixer l'attention d'une compagnie
savante ; aussi l’aurions-nous supprimée, si une
considération que vous partagerez peut-être , ne
nous avait déterminé à vous en présenter au
moins l'aperçu. »
» Sous la main d’un propriétaire agronome,
de vastes champs frappés en quelque sorte de
stérilité, tant qu’ils furent possédés par ses an-
cêtres , se sont tout à coup couverts de riches
produits. Ce fait, uniquement obtenu par des
travaux agronomiques a fixé vos regards ; vous
avez pensé que pour l’encouragement ; peut-être
même pour les progrès de l’agriculture , il im-
portait de vérifier par quels moyens s'est opéré
un changement aussi heureux, je dirai pres-
que une métamorphose aussi surprenante. »
» En agronomie comme dans toute autre ad-
ministration , les parties dont elle se compose,
se lient et s'enchaînent., C'est par le perfection
nement de chacune d'elles , par leur. tendance
vers un centre commun , par l'homogénéité de
leur ensemble qu’on réalise les résultats avan-
lageux qu’on s’en promet : or, dès que M. de
de Eyon. 111
T'aluyers attribue à deux causes le haut degré
de fertilité auquel il a élevé sa propriété, il m’a
semblé que ces deux causes se combinant l’une
avec l’autre, je n’aurais pas répondu à votre
attente si javais négligé la première, pour m'at-
tacher exclusivement à la seconde. »
» Assainir, fumer, herser , arroser en temps
utile, tels sont les travaux que M. de Taluyers
indique pour l'amélioration des anciennes prai-
ries. »
» I est reconnu , observe notre agronome ,
que le séjour des eaux dans une prairie est ex-
trèmement nuisible , et que leur écoulement
entre deux terres qu’il refroidit , ne l’est pas
moins. L'effet donné par ces deux causes est de
produire des joncs et des. plantes de mauvaise
qualité. »
« De là l'indispensable nécessité d'assainir les
prairies. »
» Comment y parvient-on ? »
« Deux fossés ayant. chacun une PRE A
particulière doivent être ouverts, l’un dans la
partie la plus élevée de la prairie, l’autre dans la
partie la plus basse, »
» Destiné à recueillir les eaux postl'irrigation
dé la prairie, le premier fossé creusé à quatre
pieds de profondeur sur six en largeur, est rem-
pli de fumier de litière bien conditionné ; un
112 Societé royale d Agriculture
autre fossé de la même profondeur , ayant sa
direction vers la partie la plus basse , se coupe
à angles, et sa communication entre les deux
fossés est interceptée par une planche mobile. »
» Par son passage et son séjour dans le fossé,
l'eau se sature des parties fertilisantes du fumier ;
lorsqu’ensuite la planche qui le sépare de celui
qui le coupe à angle droit est levée , l'eau ainsi
imprégnée des sels fécondans s'échappe , arrive
sans être délavée , aux points les plus éloignés,
et chaque partie de la prairie est également
amendée. »
» Le second fossé ouvert dans la partie la
plus basse, n'a d'autre destination que de rece-
voir les eaux surabondantes ou qui fluent entre
deux terres; on les y conduit par de petits
fossés ou des tranchées, et dans la crainte que
le trop plein nese répande et n'inonde la prairie,
il est nécessaire que ce fossé en ait un de dégor-
gement. »
» On remarque dans toutes les prairies an-
ciennes, continue M. de Taluyers, que les
parties élevées sont sèches et le plus souvent
arides , tandis que les parties basses sont maré-
cageuses. Cette différence vient de ce qu’à leur
entrée dans la prairie, les eaux sont chargées
de parties terréuses , qu'à peine ont-elles par-
couru vingt toises qu'elles s'épurent par le frot-
| de Lyon. 113
tement de la feuille des plantes à travers les-
quelles elles coulent et forment des dépôts suc-
cessifs, qui , devenant nuls pour les parties
basses , les rendent chaque jour plus maréca-
geuses. »
» Cette différence se corrige par un travail
diamétralement contraire à celui pratiqué pour
les terres. Pour ces dernières, c'est du bas dans
le haut que les chaintres se transportent ; c’est
du haut dans le bas pour les prairies.
» C'est avec la suie formée par la combustion
du bois que M. de Taluyers conseille de fumer
les anciennes prairies, et le mois d'août est le
moment le plus favorable pour la répandre :
vingt bichets combles suffisent pour une bicherée
lyonnaise, »
» Une prohibition sévère de laisser les bes-
tiaux paître dans les prairies, est encore un
conseil qu'il donne aux propriétaires. N’écoutez
point, leur dit-il, les insinuations intéressées
des fermiers ou des grangers. Les bestiaux man-
gent les bonnes plantes, dédaignent les mau-
vaises; celles ci montent en graines, et dans
peu d'années le sol en est couvert. »
» C'en est assez, Messieurs , pour vous donner
une idée de cette partie du mémoire de M. de
Taluyers; c’est de ses procédés pour la création
des prairies que nous avons maintenant à vous
entretenir, » 8
Création des
prairies,
114 Société royale d'Agriculture
» Tout ici devient digne de vous. Nous avons
à fixer votre attention sur des conceptions neu-
ves, sur des découvertes , fruit d'observations
judicieuses et souvent réitérées, sur des résultats
soumis à des calculs certains , sur des faits d'un
grand intérêt et confirmés par l'expérience.
» Transformer en prairies excellentes des.
terres ingrates, est, dit M. de Taluyers, de
toutes les opérations en agronomie, sans contre-
dit la plus avantageuse. »
». Réservé dans ses conseils ; il déclare qu’elle
ne convient pas à toutes les localités, et prin-
cipalement aux petites propriétés composées
de fonds isolés et de peu de contenue; mais ses
succès lui ont démontré que cette métamorphose
s'opère sûrement dans les grandes propriétés par
la raison que parmi les vastes tènemens dont
elles sont formées, il serait rare de n’en pas trou-
ver qui se prêtâssent à ce mode d'exploitation ;
aussi cette possibilité est-elle tout à la fois un
des-traits qui caractérisent leur supériorité , et
un motif puissant d'encouragement pour les
grands propriétaires. »
» L'exposition la plus favorable pour une
prairie étant celle du midi et du matin, c'est
coriséquemment celle qu'on doit choisir et pré-
féter. »
de Lyon. 115
« Ce choix une fois fixé, trois opérations prin-
cipales sont nécessaires pour convertir en prairie
une terre sillonnée jusqu'alors par la charrue,
et souvent arrosée des sueurs infructueuses du
laboureur. Ces opérations sont :
« Recueillir dans un réservoir un volume
d’eau suffisant pour l'irrigation ;
» Construire le réservoir dans une propor-
tion égale au volume d'eau qu'il doit contenir ;
» Préparer la terre pour recevoir la semence
et l'y répandre. »
» Parcourons avec M. de Taluyers les prin-
cipales divisions qui , à leur tour , en admettent
de secondaires. »
» La première est celle de l'irrigation ; il la
définit en ces termes: »
» Considérées comme moyen de bonification ,
les irrigations consistent à recueillir dans un
réservoir les eaux des pluies, des neiges et des
sources pendant l'automne et l'hiver, pour les
y conserver jusqu'au printemps, les répandre
alorssur les prés et lestérresqu’on veutapprarier.»
» Ainsi réunies et exposées à l’action du soleil,
ces eaux sont préférables à celles des sources, et
offrent des avantages que ne présentent pas l'écou-
lement continuel et successif de ces dernières. »
» 1.2 Ayant une grande masse d'eau à ré-
pandre à la fois, on arrose également toutes les
parties d’un pré;
+16 Société royale d'Agricullure
» 2.9 Le réservoir dominant le pré et inter-
ceptant les eaux par des fossés de conduit, on
le tient sec pendant l'hiver ;
» 3.2 Pouvant arroser à volonté, on est sûr
d’avoir un second foin ;
» 4° En lâchant les eaux après les premiers
foins , les graines tombées, lèvent et garnissent
les places vides ; avantage très-précieux pour les
nouvelles prairies qui se resèment d’elles-mêmes
et sans frais. »
» Quel est le volume d’eau nécessaire pour
l'irrigation d’une prairie? C’est sur une grande
échelle que M. de Taluyers a établi ses calculs. »
» Il y donne pour base un tènement de fonds
de la contenue de 250 bicherées mesure lyon-
naises , il évalue à 20 toises cubes d’eau l’absorp-
ption faite par l'irrigation de chaque bicherée,
et multipliant le nombre de 250 par celui de 20,
il fixe à 5000 toises cubes d’eau la quantité né-
cessaire pour l’arrosement annuel et complet
de toute sa prairie. »
» Comment le propriétaire qui se propose de
convertir une terre de cette étendue en une
prairie, peut-il s'assurer qu'il obtiendra un vo-
Jume d’eau aussi considérable ? »
» Sans doute le calcul serait facile et la cer-
titude complète, si le réservoir était constamment
alimenté par des sources abondantes et conti-
de Lyon. 117
nues ; des règles sûres et adaptées à la science
hydraulique apprendraient bientôt au proprié-
taire si le volume d’eau donné par les sources,
suffit à l’arrosement de la prairie qu’il veut créer.
Mais quoique M. de Taluyers ait compris indis-
tinctement dans la nomenclature des ,eaux à
recueillir, celles provenant des sources, des
pluies et des neiges, il paraît cependant n’avoir
rappelé les premières que comme un bénéfice
incertain ou accidentel de la nature; et c'est sur
celles données par les pluies et par les neiges que
portent ses observations et qu’il fonde ses calculs.»
» Un fait étudié avec soin vint éclairer ses
premières observations. 11 remarqua que les
hauteurs environnant de toutes parts la prairie
qu'il se proposait de créer, continuellement des-
séchées , ne produisaient que les plantes qui se
plaisent seulement dans les terrains arides ;
qu’au contraire les parties basses étaient cons-
tamment humides. Il chercha à s’expliquer cette
différence, et l'attribua tout naturellement à ces
eaux qui fluaient de ces mêmes hauteurs ; ce qui
le conduisait à conclure d'une part qu’il s'opérait
une infiltration d’eau très-considérable ; d'autre
part que cette infiltration s’effectuait à une assez
grande profondeur pour que les racines des
plantes ne pussent même y atteindre. Il jugea:
Application
des principes
préeédens à la
construction
d’un grand ré-
servoir d’irri-
gation,
118 Société royale d'Agriculture
que cette profondeur de terre était d’autant plus
nécessaire à admettre que le sol du pays est en
général composé d’un pied environ de terre végé-
tale, et que sous cette couche règne un banc de
roche granitique plus ou moins dur, et com-
posé de quartz , de mica. »
» Une fois certain de la présence des eaux par
leur infiltration dans la terre, et de l'action de
cette infiltration sur les parties basses de la
prairie , M. de Taluyers porta plus loin ses ob-
servations , il voulut remonter à la cause pro-
ductive des eaux ainsi infiltrées, et connaître par
leur volume quelle masse on pouvait recueillir
dans un réservoir. »
» Un second fait également étudié avec soin
fixa son opinion sur le problème qui lui restait
à résoudre, et qui devait servir de base à ses
calculs. »
» Au mois de novembre 1822, raconte M.
de Taluyers , j'ai vu pleuvoir plusieurs jours de
suite sans qu'aucune goutte d'eau s’écoulât dans
mon réservoir du terrain qui le dominait. Le
1.7 décembre , et sans qu'il survînt de nouvelles
pluies, je vis les terres s'humecter ; le 2 elles
commencèrent à suinter et à former de petites
sources dont le volume s'augmenta chaque jour ;
le 10 les sources devinrent très-abondantes , et
mon réservoirse remplit dans les mois de janvier
de Lyon. 119
et de février. Depuis, l'écoulement de ces sources
n'a pas cessé, et au mois de juin il continuait
encore. »
» Des-lors l'infiltration des eaux pluviales
dans la terre et la direction de leur écoulement
vers les parties basses de sa prairie furent dé-
montrées à M. de Taluyers, et par la masse
d’eau recueillie ensuite dans son réservoir, il
put juger du volume de celles données par cette
infiltration. »
» Une autre observation concourut encore à
asseoir ses idées. Dans la partie opposée à la
chaussée du réservoir , les terres avaient été
creusées à une profondeur de douze pieds , et les
terres coupées à pic, présentant l'aspect d'un mur
élevé sur son aplomb, montraient à découvert
les différentes couches dont elles se composaient
dans cette hauteur. M. de Taluyers vit alors que
les eauxsuivaient les couches composées de sable
et de gravier, et laissaient toujours à sec les
terres compactes, inférieures ou supérieures, qui
ne s’humectaient que long-temps après. Ce fait
lui démontra qu’une fois le solimbibé dans toute
sa profondeur , il rejetait les eaux qui tombaient
sur sa surface , et que les couches de sable et
de gravier devenaient autant de canaux ménagés
par la nature, pour faciliter l'écoulement de la
surabondance des eaux dont il était saturé. »
120 Sociélé royale d'Agriculture
» À l'aide de ces observations, M. de T'aluyers
obtint pour ses calculs deux termes connus ; l'in-
filtration des eaux pluviales dans la terre et le
volume donné par leur écoulement dans les
couches de sable et de gravier : il met ces deux
termes en rapport avec un troisième, celui de
l'étendue du terrain qui domine son réservoir ;
et de la combinaison de ces termes , il arrive à
un résultat inconnu peut-être dans les procédés
agronomiques. »
» Il admet que le rapport entre la superficie
du terrain dominant et la masse des neiges et
des eaux pluviales qui tombent annuellement
sur cette superficie, est d'un à trois; ainsi
ayant trois cents toises carrées en superficie, on
aura cent toises cubes d’eau. Les neuf dixièmes
de cette masse annuelle d'eau, en s'évaporant
par l'influence solaire et atmosphérique, ou
étant absorbés par la nutrition des arbres , des
plantes et d’autres causes, il en résulte que le
réservoir ne recevra chaque année qu’un dixième
de la masse d’eau produite par les pluies et par
les neiges. Conséquemment trente toises car-
rées en superficie ne donnent en effectif pour
l'arrosement d'une prairie qu’une toise eube
d'eau. »
» Graduant ensuite ces données sur deux
échelles , l'une de la capacité de son réservoir ,
de Lyon. 123-
l'autre de l'étendue de sa prairie qui est de 250
bicherées lyonnaises, M. de Taluyers présente
les calculs suivans : »
» Le premier est relatif à la quantité d'eau
qu'il recueille annuellement. »
» Il évalue à 169,000 toises carrées le terrain
qui domine son réservoir ; divisant ensuite ce
nombre par celui de trente qui donne une toise
cube d’eau , il résulte de cette division que les
169000 toises carrées du terrain dominant,
donnent, abstraction faite des fractions , 5,633
toises cubes d’eau qui se rendent au réservoir. »
» Considéré sous le rapport de la capacité du
réservoir, ce volume d’eau donne un excédant
de go1 toises cubes. La capacité de ce réservoir
ne contenant en effet que 4,732 toises cubes
d’eau, et celles qui y coulent étant de 5,633
toises cubes , il y a réellement un excédant de
go1 toises cubes pour le remplir. »
» Considéré sous le rapport de l'étendue de
la prairie , cet excédant diminue. »
» Vingt toises cubes d'eau suffisent, selon
M. de Taluyers, pour larrosement annuel de
chaque bicherée d’une prairie. La sienne étant
de 250 bicherées, et ce nombre étant mul-
tiplié par celui de 20, on obtient un total
de 5000 toises cubes d'eau ; celle qu'il recueille
étant de 5,633 toises, l’excédant se réduit à
633 toises. »
122 Société royale d'Agriculture
» Continuons de suivre M. de Taluyers dans
quelques observations qui terminent cette partie
intéressante de son mémoire. »
» La supputation des toises cubes d’eau , cal-
culée d’après l'étendue de la superficie du terrain
qui domine sa prairie, ne s'étend que sur des
données générales, il peut se rencontrer des
causes secondes et locales qui ne sauraient être
prévues , et qu’il faut abandonner à l’'intelli-
gence du cultivateur, ou pour les corriger si
elles sont nuisibles , ou pour en profiter si elles
sont avantageuses. »
» I] ne faut pas croire que les calculs sur le
volume d’eau produit par l’infiltration des pluies
et des neiges, soient tellement constans qu'on
ait la certitude de les voir se réaliser chaque an-
née. Ces calculs ne sont rigoureusement exacts
qu’en prenant le terme moyen de vingt années. »
» Des causes différentes produisent une grande
variété dans le volume d’eau donné par l'infil-
tration des pluies et des neiges. »
» Cette variété est surtout remarquable sui-
vant la température des saisons. Les années 1822
et 1823 en ont fourni la preuve à M. de Taluyers.
En 1822, où il tomba peu de pluie, il eut à
peine 5o toises cubes d’eau dans son réservoir ;
en 1823 au contraire où les pluies furent abon-
dantes, il estime à goo toises cubes le volume
d’eau qui s’y rendit. »
de Lyon. 123
» Une autre cause qui doit être observée par
le cultivateur , et qui, faute de réflexion , ne
manquerait pas de le décourager , c'est que plus
le terrain est pentif et léger, plus il enverra
d’eau ; c'est que pendant l’hiver les causes d'éva-
poration étant à peu près nulles, il s’infiltre une
plus grande quantité d’eau que dans les autres
saisons , et l'écoulement sur les parties infé-
rieures en est conséquemment plus considérable ;
aussi n'est-ce que sur les pluies d'hiver et sur les
neiges qu'il doit baser la quantité d’eau dont il
aura à disposer. »
-» Une dernière observation qui vous a frappés
à la lecture du mémoire, doit, par ce motif,
terminer cette partie de notre analyse : cette
observation tient à un calcul de la réduction de
la neige en eau. Notre auteur remarque que
cette réduction s'opère de sept à un, en telle
sorte que sept toises cubes de neige ne donnent
qu'une toise cube d'eau. »
» Que des expériences antécédentes à celles de
M: de Taluyers, aient convaincu de la réalité
de ce résultat, ou qu'il soit dû aux propres ex-
périences de M. de Taluyers, il sera toujours
juste de reconnaître dans cet agronome cet amour
de la science qui ne négiige aucun détail, cet
esprit observateur qui se plaît à tout voir, à
tout étudier , à se rendre un compte fidèle et
124 Société royale d'Agriculture
sûr de ce qu’il a vu et étudié, et qui soumet à
des certitudes mathématiques la solution des
problèmes que la nature offre à ses méditations. »
» Ce sont les mêmes recherches, les mêmes
procédés , la même certitude de résultats que
vous retrouveriez dans les procédés mis en pra-
tique par M. de Taluyers pour la construction
de son réservoir , si nous avions à le suivre
dans le compte qu’il en rend et dans les règles
qu'il prescrit pour ce genre de travail. »
» Nous aurions à reconnaître avec lui la place
à choisir pour l'assiette du réservoir , com-
ment il doit être orienté pour que les eaux
agitées par le vent , n’en dégradent pas la chaus-
sée ; quelle doit être l'épaisseur de cette chaus-
sée ; quelle inclinaison il importe de donner aux
talus intérieurs et extérieurs ; quelle est la qua-
lité de terre propre à claver pour le béton destiné
à contenir les eaux ; à quelles épreuves cette terre
doit être soumise pour en vérifier la qualité. »
» Quelqu'essentiels que ‘soient ces détails,
nous n'avons cependant pas cru devoir vous en
entretenir. L'usage les a rendus depuis long-
temps familiers dans les pays surtout où les
étangs sont multipliés ; et s’il est vrai, comme
le remarque M. de Taluyers , que la construction
d'une chaussée soit un art qu'il faut apprendre,
il est tout aussi vrai que les préceptes qu'il en-
de Lyon. 125
seigne à cet égard , l'habitude et la pratique les
ont inculqués aux ouvriers qui se consacrent à
ces travaux. »
» Aussi avons-nous regardé cette partie du
mémoire de M. de Taluyers comme un excellent
manuel pour les agronomes qui l'imiteront , mais
comme n'étant pas aussi d’un intérêt assez pi-
quant pour attacher votre attention. »
» Nous nous bornerons à recueillir quelques
traits qui ont paru se recommander, sinon par
leur nouveauté | du moins par la nécessité de
les rappeler. »
» L'une des observations de M. de Taluyers
se porte sur le calcul de la capacité du réservoir. »
» Cette capacité doit être déterminée d'après
le volume d’eau nécessaire pour l'irrigation de
Ja prairie. Et comme notre auteur a observé que
c'est seulement sur les neiges et les pluies d'hiver
que le volume d’eau à recueillir peut être appré-
cié , il sait qu'il convient de donner au réservoir
une capacité assez vaste pour contenir toute
l'eau qu’exige l’étendue de la prairie. »
» Le calcul pour fixer la capacité à donner
au réservoir, tient à une opération connue et
fort simple, c’est de multiplier les toises car-
* rées du terre-plein du réservoir, par le nombre
de pieds que sa chaussée a en élévation. Admettez,
par exemple, que le terre-plein du réservoir ait
126 Société royale d'Agriculture
en superficie 100 toises carrées, et que la chaus-
sée ait en élévation trois pieds , alors le réservoir
contiendra trois cents toises cubes d'eau: Adaptez
ensuite ce calcul au volume d'eau à disperser sur
tous les points de la superficie de la prairie pour
son irrigation, et vous connaîtrez par cette
opération mathématique quelle dimension il
faut donner au réservoir, à quelle hauteur il
- faut élever la chaussée. »
» Cette chaussée exige le plus grand soin dans
sa construction , et des observations multipliées
pour s'assurer de sa bonté. »
» Deux points à vérifier s'offrent d’abord au
constructeur du réservoir ; si la qualité du sol
formant le terre-plein est propre à conserver
l'eau , si d’un autre côté la chaussée s’oppose à
toute espèce d'infiltration, »
» Quant au premier point, l'œil le moins
attentif peut facilement s’en assurer ; il suffit de
voir si l’eau qui repose sur le fond du réservoir
est promptement absorbée. »
» Quant à la chaussée, la certitude de sa per-
fection demande des observations plus soutenues.»
« Notre auteur conseille de faire d'abord une
chaussée d’épreuve avant que de l’exécuter sur
une plus grande échelle ; et lorsqu'elle est ache-
vée , la couvrir d'une couche de terre de la
même qualité que celle employée à la clave ,
de Lyon. 127
laquelle sera légèrement mouillée, pour que ni
les rigueurs du froid, ni les ardeurs du soleil
ne la dégradent par les fentes qui , sans cette
précaution , seraient inévitables. »
» Cette chaussée d’épreuve doit être clavée dans
toute la profondeur du fossé , et jusqu’à la hau-
teur du bourrelet formé par les terres extraites
du fossé et jetées également des deux côtés ; son
élévation doit être en outre de six ou sept pieds.»
» Une année doit être donnée à l'expérience
et aux observations. La chaussée, pendant ce
temps, doit être souvent visitée; et pour voir
si elle tient l'eau il n'est besoin que de calculer
celle qui se rend dans le réservoir, celle qui se
perd par l’évaporation, et tirer la conséquence
de ces deux termes connus. »
» Le mode de procéder à cette vérification est
ici placé à côté du précepte. »
» Après chaque pluie il faut cuber la masse
d'eau qui en sera le produit, défalquer ensuite
de cette masse celle absorbée par l'évaporation ,
et tenir une note exacte de ces deux calculs : à
la fin de l’année on totalise la masse d’eau entrée,
celle absorbée par Pévaporation , et le nombre
excédant donne nécessairement la certitude des
résultats qu’on a voulu obtenir par la chaussée
d'épreuve. »
» Si le volume d’eau conservé dans le réser-
128 Société royale d'Agricullure
voir est dans une proportion égale au volume
diminué par l’évaporation , alors on acquiert la
double certitude , d’une part que la chaussée
comme le fond du réservoir retiennent parfai-
tement l’eau qui s’ÿ rend ; d’autre part , on a la
mesure exacte du volume d’eau dont on peut
disposer pour irrigation de la prairie. »
» Au contraire, s’il est vérifié par les calculs
que l’absorption de l'eau entrée dans le réservoir
est plus forte que celle qui aurait dû s'opérer
par l’évaporation , alors il devient évident que
cette disproportion provient de l'une de ces deux
causes, ou de la défectuosité de la chaussée , ou
d'une déperdition occasionée par la nature du sol
du fond du réservoir. » R
» Ilest facile de remédier à la première de
ces causes; mais on ne le pourrait pour la seconde
qu’à l'aide d’un béton de chaux ; et comme la
dépense serait excessive lorsque le réservoir a de
grandes dimensions , M. de Taluyers conseille
dans ce cas de renoncer à l’entreprise. »
» Plus les calculs sont importans par leurs
conséquences , plus on doit apporter d'attention
pour en assurer l'exactitude, aussi notre auteur
conseille-t-il l'usage d'une règle de métal, graduée
par pieds , pouces et lignes, fixée dans l'eau
contre la chaussée , et placée de manière qu'on
puisse facilement en distinguer les divisions : il
de Lyon. 129
considère ce nilomètre comme un moyen sûr de
ne pas errer dans les calculs. »
» Nous placerons ici, Messieurs , une obser-
vation qui nous a paru digne de vous être
soumise. »
» Lorsqu'on examine avec l'œil du philo-
sophe la variété des substances dont se compose
le globe sur lequel les hommes sont disséminés
et fixés par leur naissance , lorsqu'on réfléchit
sur les modifications qui diversifient la nature
du sol de chaque contrée, on semble autorisé
à croire qu’en les forçant à trouver dans les pro-
ductions végétales celles qui doivent conserver
leur existence , la Divinité a voulu, par cette
nécessité première, varier leur industrie, comme
elle diversifiait les substances de la terre qu’elle
livrait à la culture et à leurs travaux. »
» Nous ne savons pas Messieurs, si cette
réflexion a frappé l'auteur du mémoire lorsqu'il
a indiqué à l’agronome qui marcherait sur ses
traces, les procédés dont il devait faire usage
pour s’assurer si la nature du sol où il plaçait
son réservoir lui fournirait une terre propre à
former le béton de la chaussée. »
» S'il avait écrit pour la province de Bresse
où il possède comme nous des propriétés, les
recherches et les fouilles qu’il conseille auraient
été inutiles. ,,
9
130 Société royale d'Agriculture
» Dans cette province et dans toutes celles où
les étangs se multiplient comme moyen d'amé-
lioration et de production industrielle , la nature
du sol a indiqué la formation de ces grands ré-
servoirs. Là quelques pouces de terre végétale
couvrent une couche épaisse d'argile que la
pioche peut à peine rompre, et qui mieux qu’un
ouvrage de l'art s’oppose à l'infiltration de l'eau. ,
» Presque partout on est certain de se procu-
rer une terre propre à former le béton d'une
chaussée , et d’avoir un plafond où l’eau est
parfaitement retenue; mais il n’en est pas de
même dans toutes les contrées, surtout dans
celle où M. de Taluyers a sa prairie; et c'est
avec son discernement ordinaire qu'il prescrit
de cuber approximativement le nombre de toises
_de chaque qualité de terre donné par le creuse-
ment du réservoir et les fouilles profondes qui
y seront faites, à l’eflet de reconnaître si elles
sont propres et en assez grande quantité pour le
béton de la chaussée. ,,
» Cette partie de son mémoire, l'auteur la
termine en prescrivant d'ouvrir sur le derrière
et les côtés de l'étang de grands fossés qu'on
remplit de fumier , de manière que les eaux qui
sortiront de l'étang puissent y passer au besoin.
Il conseille encore lorsque l'étang n’a plus d’eau
de mêler ces fumiers encore humides avec une
de Lyon. 131
quantité triple de bonne terre, d’en former des
tas allongés à la hauteur de cinq pieds, de les
laisser fermenter pendant deux mois, et de les
répandre ensuite comme un excellent engrais
sur la prairie,
» Le hasard est venu encore seconder les tra-
vaux de notre agronome. ,,
» Une branche souterraine des anciens aque-
ducs romains ayant sa direction du nord-est au
sud-ouest, traverse sa prairie dans toute son
étendue. Cet aqueduc, arrondi en forme de
voûte , ayant cinq pieds de hauteur sur deux en
largeur , a ses parois intérieures revêtues de ci-
ment briqueté, et le fond en est carrelé. Des
siècles ont dégradé cet ouvrage, monument de la
grandeur et de la puissance d’un peuple qui vivra
éternellement dans l'histoire ; mais quelques
réparations heureusement combinées l’ont encore
utilisé pour la fertilité de la prairie. ;,
» Les eaux pénètrent encore dans ce canal ;
malgré son état de dégradation elles y séjournent
et en sortent ensuite avec abondance. Il fallait y
donner une direction profitable : qu'a fait M.
de Taluyers ? ,,
» Il a déblayé l’aqueduc dans une longueur
d'environ cinq toises , et l’a ensuite rompu à
deux pieds de profondeur au milieu de la partie
repurgée. Les eaux qui se perdaient par les in-
Résultats ob-
tenus.
132 Sociélé royale d Agriculture
filtrations ont ainsi été forcées de s'écouler sur
un point déterminé et à s'élever sur la surface
de la prairie. Ainsi retenues et élevées , les eaux
sont ensuite conduites par un canal partant
da point où l'aqueduc a été ouvert, à une marre
dont les bords élevés en retenant les eaux dans
Vaqueduc ne leur permettent de s'écouler que
lorsque celles de la marre s’abaissent. Ainsi le
vide de Paqueduc devient un réservoir souterrain
qui alimente la pièce d'eau avec laquelle il cor-
respond. ;,
» Sans doute, Messieurs, il faut ici applaudir
à l'intelligence de l’agronome ; mais la décou-
verte inespérée qu’il a faite, ne saurait être ni
un exemple , ni un motif d'encouragement pour
aucun autre propriétaire. »
>, Ce qui en sera un très-puissant, c’est l'é-
norme accroissement de valeur et de revenus,
produit par les améliorations et les travaux de
M. de Taluyers. Nous allons le suivre dans ses
calculs, en ne prenant que les totaux.
» Le domaine de Prapin avait été affermé
par le père de VT. de Taluyers 1200 fr. Le prix
trop élevé força le fermier à demander le rési-
liement de son bail; il devint colon partiaire ;
et ie revenu net du domaine fut alors réduit
à 1050 fr. » :
Ce même revenu, au moyen des amélio-
de Lyon. 133
rations de M. de Taluyers fils, s'élève brut à
14,300 fr. Dans la supputation des produits qui
donnent cette somme, le premier foin évalué à
2fr. le quintal, et le second à rfr. 5oc., fi-
gurent pour un total de 10,25ofr. ;,
» L'augmentation par les autres produits se-
rait de 4,050 fr. »
» Tel est le premier calcul des revenus bruts
du domaine de Prapin. »
» La déduction des sommes avancées pour les
améliorations, des frais de culture et des impo-
sitions, présente un autre tableau. »
» La première déduction est celle de l'intérêt
de la somme avancée pour les améliorations ; il
l'évalue à 20,000 fr., dont l'intérêt annuel est
DÉ e ela ral SU RS TRER UEE Le . 1000 f,
» Il y ajoute pour l'imposition et les
frais d'exploitation . ........,... 4250
Por. Soon. . 5250
a
» Le revenu net est conséquement de . g000
» Et si de cette dernière somme on
soustrait le revenu ancien . . . . . . . . 1050
» L’accroissement de revenu est con-
séquemment de. ........,.... "70990
» Répartissant ensuite ce produit sur 400 bi-
cherées lyonnaises, dont se compose la contenue
du domaine de Prapin, M. de Taluyers observe
134 Société royale d'Agriculture
que le revenu donné par chaque bicherée est
de 25fr. environ. »
» Cette augmentation de revenus a dû néces-
sairement en produire une toute aussi considé-
rable dans la valeur vénale du domaine ; c'est
encore un autre calcul de M. de T'aluyers. »
» [Il remarque d’abord que dans le départe-
ment du Rhône, à trois lieues de Lyon, sur
la route qui conduit de cette ville à St. Etienne,
les domaines ne s’achètent pas à raison de 5
pour °/, du revenu ; il donne en consequence
à sa propriété de Prapin produisant net g0oof.,
une valeur vénale de 200,000 fr. »
» Voilà le terme de comparaison pour l’ac-
croissement du capital donné par les améliora-
tions. »
» Il a été offert à M. de Taluyers pour l’ac-
quisition de sa propriété , et il a refusé une
somme de 65,000 fr. : c'était là son ancienne
valeur. Il a dépensé 20,000 fr. pour les amélio-
rations, ces deux sommes réunies donnent un
total de 85,000 fr. , lequel déduit de 200,000 f.
donne 115,000 f, pour l’accroissement du capital. »
» Le résumé de ces calculs est donc pour les
revenus une augmentation de 7950 fr.; pour le
capital, un accroissement de 115,000 fr. »
» Là se termine l'analyse du mémoire de M.
de Taluyers ; ne vous étonnez pas de l'étendue
de Lyon. 135
que nous y avons donnée ; nous avons pensé
qu’elle trouvait son excuse dans l'intérêt qui se
rattache aux observations de l’auteur , dans leurs
rapports avec de grandes vues en agronomie. »
» Rien de ce qui tient à l'agriculture, aux
arts, à l'industrie ne vous est étranger ; vous
saisissez avec empressement les faits nouveaux ?
les découvertes les plus simples , les plus légers
perfectionnemens ; vous les scrutez avec soin
pour en mesurer le degré d'utilité, vous les en
couragez par des éloges, quelquefois même vous
les récompensez par d'honorables distinctions.
Les travaux et les succès de M. de Taluyers ne
vous auraient-ils pas laissé entrevoir un horizon
plus étendu et d'un ordre plus élevé ? »
» C'est beaucoup, sans doute, que d'éclairer
la routine des cultivateurs , de donner à leurs
travaux un résultat plus avantageux; de leur
indiquer de nouvelles richesses dans de nou-
velles productions. Sans doute l'agronomie a fait
un grand pas, lorsqu'elle s'est associée une
autre science ; mais ne serait-ce pas obtenir un
avantage tout aussi réel , plus général peut-être,
que d'apprendre aux grands propriétaires le de-
gré de prospérité auquel peuvent s'élever leurs
vastes possessions, que de vaincre par la certi-
tude d'atteindre ce but, le dégoût qui accom-
pagne une grande administration , et le découra-
136 Sociélé royale d'Agriculture
gement qui naît presque toujours des frais énor-
mes qui la surchargent. »
» Le problème de savoir si pour la prospérité
publique , comme pour celle des particuliers il
est préférable de cultiver les petites propriétés
plutôt que les grandes, est loin d'être résolu ,
et la préférence donnée aux premières n’est
peut-être qu'un préjugé accrédité par le temps,
par des opinions imposantes, mais qu’il importe
de déraciner. »
» Si je ne me trompe, Messieurs , c’est à une
compagnie savante, comme la vôtre, à opérer
cette révolution en agronomie, à substituer une
vérité démontrée à ure erreur que tout concourt
à fortifier, à ouvrir un débouché trop dédaigné
aux capitaux des riches possesseurs , à les atta-
cher, par d’heureuses spéculations , à la culture
de l’héritage de leurs pères, qu’ils livrent à
l'ignorance et à l'avidité des fermiers. »
» Votre institution réclame de vous ce chan-
gement dans les idées, si vos recherches et vos
méditations vous en démontrent l'utilité, et
vous auriez alors à féliciter M. de Taluyers de
vous avoir fourni tout à la fois une preuve et
un exemple. »
» C’est à la création d'une vaste prairie, par
des observations et des procédés qu'aucun agro-
nome n'avait encore révélés, que M. de Taluyers
attribue principalement l'accroissement de la
de Lyon. 137
valeur et des produits de sa propriété. Sous ce
rapport ses travaux et ses découvertes se recom-
manderaient encore par leur utilité. »
» Depuis longtemps on a proclamé comme
une vérité constante que la France, trop riche
en blé, ne l'était pas assez en bestiaux , et si je
ne craignais de le dire, jejouterais que la con-
currence étrangère qui avilit le prix de cette
denrée et la tient captive dans nos greniers,
donne à cette vérité la conviction de l'évidence. »
» Rendons grâces à la sollicitude bienfaisante
du gouvernement, qui, par des concessions et
des encouragemens , s'efforce d'améliorer les
races d'animaux que nous élevons. Déjà nous en
ressentons les salutaires effets, mais ils de-
mandent à être secondés. Ce n'est point assez
de produire de beauxextraits , il importe encore
de les multiplier et de nous affranchir du tribut
que nous payons à l'étranger qui nous fournit
les bestiaux destinés à la consommation des
grandes cités, ou ceux dont nous recherchons
Je fruit. »
» Il nous semble qu'on ne doit se flatter
d'atteindre ce but et de répondre aux vues du
gouvernement, qu’en multipliant les prairies.
Celles artificielles qui se propagent dans nos
campagnes , offrent sans doute de précieux avan-
tages ; maïs elles sont insuffisantes , quelquefois
da: gereuses pour l'éducation des élèves, Ce serait
138 Socièlé royale d'Agriculture
donc une découverte inappréciable que celle de
convertir en des prés fertiles des terres qui jus-
qu’à présent n'ont été sillonnées que par le soc
de la charrue. »
» Enfin, Messieurs, si vous pensiez que les
découvertes et les travaux de M. de Taluyers ne
prêtent au développement aucune de ces vues,
et n'exigent pas qu’elles soient approfondies par
une commission prise dans votre sein, nous
aurions alors à vous proposer, en le félicitant
sur son zèle pour l’agronomie , de lui donner,
au nom de votre société, un témoignage public
du prix que vous y attachez. »
Quoique le rapport lumineux qui précède ait
suffi, Messieurs, pour vous donner les idées
les plus précises sur les améliorations de M.
de Taluyers, vous avez cependant voulu qu'une
commission allâten prendre connaissance sur les
lieux. Elle s'est composée de MM. Gras, Remond,
Bouchard-Jambon, Madiot, Deschamps , Faisso-
les et Grognier. Le rapport verbal qu'elle vous a
présenté a confirmé pleinement tout ce que
vous aviez appris relativement à l’une des plus
belles opérations agronomiques qui , depuis plu-
sieurs années , ayent été faites dans notre pro-
vince, et vous vous êtes empressé d'inscrire le
nom de M. de Taluyers sur la liste de vos cor-
respondans.
de Lyon. 139
HISTOIRE NATURELLE.
cms
Vous prenez sans doute, Messieurs, le plus
grand intérêt à toutes les recherches des natu-
ralistes ; il n'en est aucune dont la communi-
cation ne soit honorablement accueillie par vous.
Cependant vous n’avez fait entrer dans l'ordre
habituel de vos travaux , que celles de ces re-
cherches qui se lient , du moins indirectement,
au premier des arts. Considérée sous ce rapport,
la science de la nature vous offre un vaste do-
maine à exploiter; c'est au point qu'il est bien
difficile d'en assigner les limites. Combien de
végétaux en effet, qui jusqu'ici n'ont été l'objet
d'aucune culture, si ce n'est dans des jardins
botaniques, et qui entreront un jour dans
notre économie rurale, ne füt-ce que comme
plantes d'agrément ! Combien d'animaux sau-
vages qui un jour recevront le joug de la domes-
ticité !
Je pourrais , en développant ces considéra-
tions, vous présenter l'étroite alliance qui lie
l’histoire naturelle avec l'agronomie. Je pour-
rais signaler lés services immenses que les scru-
tateurs de la nature ont rendus à Part qui nour-
rit les hommes; et d'un autre côté vous citer
les agronomes qui , en étudiant des êtres vivans ,
140 Sociélé royale d Agriculture
dans tous leurs âges, ont concouru puissamment
aux progrès de la botanique et de la zoologie ;
mais je ne dois pas oublier que c’est de vos tra-
vaux et non de mes pensées que doit se composer
le tableau que je trace en votre nom.
Parmi ces travaux il en est qui appartiennent
presqu'également à la botanique et à l'agrono-
mie, tels sont ceux qui ont rempli une grande
partie de la longue et honorable carrière de
M. Rast-Maupas.
Combien de fois n'a-t-il pas été question dans
vos comptes rendus annuels des observations
dendrologiques , recueillies par notre respectable
confrère , dans ses pépinières d’Ecully ? Vous
savez quel a été le sort d'un établissement éga-
lement cher à l’agriculture et à l'histoire natu-
relle, d'un établissement que les voyageurs sa-
vans visitaient avec un vif intérêt.
De cette multitude d'arbres curieux, origi-
naires de toutes les parties du monde que M. Rast
s'était plu à réunir sous un site aussi varié que
pittoresque, il ne reste que quelques échantillons
de bois que M. Madiot a dérobés à la destruction.
Il a étudié avec soin ces échantillons , il les a
rapportés aux arbres qui les ont fournis, et
qu'il avait observés pendant longues années dans
la pépinière même où ils ont vécu ; car il s'était
associé aux recherches dexdrologiques de M.
de Lyon. 141
ÆRast. Ne pouvant sauver de la hache dévasta-
trice tant d'arbres étrangers dont plusieurs ont
peut-être végété sous notre ciel, pour la der-
nière fois, M. Madio! a obtenu , du moins, la
faculté de les observer encore au moment où ils
allaient périr ; et ce qu’il n'aurait pu faire s'ils
avaient vécu, il en a examiné le tronc dans
l'intérieur. Des échantillons qu'il a recueillis il
a formé un cabinet de bois exotiques dont une
partie a été mise sous vos yeux avec des notes
qui méritent une place dans cette notice.
1. Acer Tartaricum ( Erable de Crête }, bois
blanchâtre, d’un tissu fin et serré, dont le pied
cube a pesé 19 kilogrammes 73 grammes. (1)
L'arbre avait acquis, à 42 ans , 12 mètres
de hauteur sur 97 centimèt. , 5 millimètres de
circonférence. Ce bois pourrait être employé
dans le charronnage, la menuiserie, dans l’art
de l'armurier comme dans celui du sculpteur.
2. Acer negundo, E. à feuilles de frêne, bois
jaune paille, safrané , d'un grain fin , uni,
facile à travailler, durcissant par le laps du
temps. -— 14 kilogram. 139 gram. le pied cube,
ayant acquis chez M. Rast en 22 ans, 18 mèt.
de haut sur 1 mèt. 32 centimèt. de circonfé-
(1) Tous ces ces arbres ont été pesés huit à dix mois après
aYoir été coupés.
Notes sur
des bois étram-
gers; par M.
Madiot.
142 Société royale d'Agriculture
rence ; on en fait des cerceaux exempts de la ver-
moulure ; ses feuilles sont uu fourrage d’hiver(r).
3. Acer Pensilvanicum , E. jaspé , bois nuancé
de roux, avec des bandes olivâtres , léger, pe-
sant 17 kilogram. 197 gram., peu intéressant
sous le rapport de l'industrie; mais comme il
est revêtu d’une écorce jaspée dont l'aspect est
fort agréable, l'arbre peut être admis dans les
bosquets d'agrément. L’individu de M. Ras! avait
à 36 ans , 8 mèt. de haut, 48 centimèt. 7 mill.
de circonférence.
4. Anona Triloba, Anone à trois lobes, ou
Assiminier des Américains. Bois blanc , po-
reux, filandreux, pesant 10 kilogram. 432 gram.,
peu propre à être travaillé, ayant acquis en 34
ans 3 mèt. de haut, sur 18 cent. de circonférence,
fétide au moment de la sève.
5. Aylanthus glandulosa, vernis du Japon, bois
devenant dur en vieillissant, jaune pâle, avec
des bandes longitudinales blanchâtres, pesant
22 kilogr. 344 gram. -- Propre à un grand
nombre d’ouvrages pourvu qu’il soit bien sec ,
autrement il se gerce et se contourne. M. Rasten
avait fait faire des meubles très-jolis ; il en avait
envoyés à M. le comte François de Neuchäteau.
(1) Voyez des détails sur cet érable , dans le compte renda
pour 1817, page 114.
de Lyon. 143
L'arbre en 49 ans avait acquis 31 mèt. sur 3 1/2
de circonférence ; son port était magnifique ,sur-
tout pendant la floraison ; mais il répandait
alors une odeur désagréable , peut-être insa-
lubre. Il vient dans tous les terrains et sous
toutes les expositions.
6. Abies Canadensis , Sapin hemlocks, bois d'un
jaune blanchâtre, d'un tissu grossier , cotonneux,
entremélé d’un autre tissu longitudinal, plus uni
et plus fin, ayant acquis, à 42 ans, 8 mètres
d’élévation , sur 43 centim. de circonférence ;
l'écorce ayant quelques rapports avec celle du
cèdre du Liban ; le bois donne un feu clair,
ardent, mais de peu de durée.
7. Belula papyracea, Bouleau à papier, bois
d’un tissu fin et compact, teillasseux, difficile à
fendre , susceptible d'un beau poli, couleur rou-
geâtre, mélangé de roux, écorce extérieure blan-
châtre comme celle du B. alba , les couches in-
ternes se séparant en couches minces comme du
papier ; à 46 ans, haut de 16 mèt., sur 1 mèt.
62 centimèt. de circonférence : pied cube 17
kilogr. 3/4. On s’en sert dans le nord pour faire
des meubles , des vases, des nates, des cordes ;
ses chatons fournissent de la cire, et sa sève
une liqueur sucrée capable de fermentation.
8. Broussonetia papyrifera , Müûrier à papier ,
bois compact , d'un tissu fin, susceptible d’un
144 Socièté royale d'Agriculture
bean poli, à 18 ans, 11 mèt. de haut , 1 met.
30 centimèt. de circonférence , croît rapidement
jusqu'à 20 à 25 ans, et il s'arrête : pied cube 19
kilogr. 130 gram. Bois pour la marqueterie ,
le charronnage , la sculpture, etc. On tire dans
certains pays, de l'écorce des jeunes branches de la
filasse dont on fait des cordages, de la toile, etc.;
au Japon et à la Chine on en fait du papier.
9. Buxus Balearica , Buis de Mahon, bois jau-
nâtre tirant sur le blanc , tissu très-serré ; arbre
à 46 ans de la hauteur de 3 mèt., de la circonfé-
rence de 3 centim. 9 mil.; le pied cube 28 kilogr.
118 gram., croissant plus vite que l'indigène.
10. Bignonia catalpa , bois léger, d’un tissu
grossier , nuancé de gris, de roux, de vert, facile
à travailler , cependant peu utile; arbre à 4x
ans, 14 mèt. de hauteur, 2 mèt. de circonfé-
rence ; pied cube 19 kilogr. 344 gram., mauvais
pour le chauffage, d’un aspect agréable quand
ilest en fleurs. |
11. Cercis Canadensis , Gaïînier du Canada,
bois compact , d’un grain fin , serré, suscep-
tible d'un beau poli, nuancé de brun, de jaune;
arbre à 42 ans, 6 mèt. de haut, 1 mèt. de cir-
conférence ; pied cube 15 kilogr. 224 gram.,
jeunes rameaux en fleurs fournissant un pro-
duit tinctorial.
12. Cupressus thuyoïdes, Cyprès à fleurs de
de Lyon. 145
tuya , cèdre blanc, aubier blanchâtre, bois par-
fait, roux , d’un grain serré, facile à travailler;
arbre à 43 ans, haut de 12 mèt., circonférence
d'un mèt, 65 centimèt., pied cube 16 kilog 1/2,
brûlant lentement, avec une odeur agréable, se
durcissant et se conservant dans l’eau comme le
chêne , assez flexible, dans ses jeunes branches,
pour former des cercles de tonneaux , exempts
de la vermoulure.
13. Carpinus orientalis, Charme d'orient , in-
troduit par Tournefort , boiscompact , d’un blanc
grisaillé, bon à divers usages, même pour le
chauffage ; arbre à 43 ans , 7 mèt. de haut , 50
centimèt. de circonférence, bois pesant 25 kilog.
336 gram., facile à élever et à multiplier.
14. Cellis occidentalis , Micocoulier de Virgi-
nie, bois dur, compact, d'un tissu fin, noi-
râtre; arbre à 39 ans, 7 mètres de haut sur 50
centimèt. de circonférence, pied cube 22 kilog.
219 gram., ses branches flexibles, propres à
faire des cerceaux , excellent pour le chauffage ,
réussissant dans les terrains médiocres.
15. Casuaria equisetifolia | Casuarine à feuilles
de prèle, remarquable par ses branches arti-
culées, serrées les unes contre les autres , pen-
dantes, bois à l’intérieur couleur lie de vin,
nuancée de roux et de jaunâtre , arbre à 42 ans»
5 mèt. de haut, 21 centimèt. de circonférence ;
10
146 Société royale d Agriculture
pied cube 23 kilog. 323 gram. , sujet en séchant
à se tourmenter , à se gercer, encore rare en
France.
16. Corylus columa, Noisetier de Bizance , un
pied fut planté par l’Ecluse au jardin de Leyde,
en 1582, où Linné le vit encore en 1736 ; chez
M. Ras! à 44 ans, 11 mèt. 1/2 de haut, 5o c.
de circonférence, pied cube 19 kilog. 234 gram.,
digne d’être cultivé à cause de son beau feuillage
et de la, souplesse de ses branches , plutôt qu à
cause de son fruit très-sujet à avorter.
17. Diospyros hirsuta , Plaqueminier velu,
bois superbe, ne le cédant en rien à celui d'aca-
jou , agréablement nuancé de diverses couleurs ;
arbre à 41 ans, 10 mèt. de hauteur sur 50 cen-
timèt. de circonférence , pesant le pied cube 23
kilog. 214 gram., très-propre aux plus riches
ouvrages de l'ébénisterie , l'aspect élégant de
l'arbre lui mérite une place dans les jardins à
paysage ; son fruit pulpeux a un goût analogue
à celui de Ja nefle.
18. Diospyros Virginiana , Plaqueminier de
Virginie, bois d’un tissu fin , serré, compact,
d’un beau jaune , nuancé de roux, susceptible
d'un beau poli, se durcissant par le temps et
devenant noirâtre , presqu’anssi bon que le
précédent pour les ouvrages d’ébénisterie : l’au-
teur en a fait des barreaux d’échelles, des man-
de Lyon. 147
ches d'outils qui, après 20 ans, présentent une
grande dureté, il a composé avec son fruit d’ex-
cellentes marmelades ; l'arbre avait acquis à 43
ans , 15 mètres d’élévation , r mètre de circonfé-
rence. Le pied cube pèse 19 kilog. 158 gram.
19. Ævonimus Americana | Fusain d'Amé-
rique , bois d’un blanc tirant sur le citron
fin, d’un tissu fin, compact, luisant , vernissé,
susceptible d’un beau poli, pouvant servir à un
grand nombre d'ouvrages de tour et de mar-
queterie ; à 41 ans, 6 mèt. 32 centimèt. de haut
22 centimèt. de circonférence , pied cube 14 ki-
logr. 158 gram.
20. Fagus ferruginea , Hêtre ferrugineux à
feuilles pourprées , bois ayant peu de souplesse,
se gerçant aisément, se tourmentant surtout
au grand air , sujet à la vermoulure , et cepen-
dant d'un grain serré, compact, susceptible
d’un beau poli ; arbre à 48 ans ayant 22 mèt. de
hauteur , 3 de circonférence ; le pied cube 17
kilogr. 244 gram. , il durcit en vieillissant , eb
il peut être employé comme bois de chauffage.
21. Fraxinus Caroliniana, Frêne de Caroline,
introduit en Europe par Bosc , sa croissance est
aussi rapide que celle des indigènes , et sa cul-
ture aussi facile , bois blanchâtre avec marbrures
rousses , supérieur à celle de nos frênes pour le
charronnage, l’ébénisterie, etc. ; arbre à 42 ans
148 Société royale d'Agriculture
ayant 21 mèt. de haut, 1 mèt. 48 centimèt. de
circonférence, pied cube 19 kilogram. 149 gr.,
feuillage bon pour les bestiaux , moins sujet aux
cantharides.
22, Ficus rubiginosa , Figuier rouillé, bois
d’un tissu teillasseux , d'un grain grossier, d'un
jaune pâle, hauteur à 47 ans, à une exposi-
tion au midi, 3 mèt. pied cube du tronc, 21 kilo.
240 gram. Le boïs des branches beaucoup plus
léger ; il prend, en vieillissant, une belle cou-
leur citronnée. On empêche qu'il ne se tour-
mente, qu'il ne se gerce, en l’abandonnant
pendänt quelque temps dans de l'eau stagnante ;
on pourrait en tirer quelque parti; son fruit
ne mürit point dans notre climat : c’est un arbre
plus curieux qu’utile,
23. Ginkgo biloba, Salisburia adiantifolia , ori-
ginaire du Japon , encore rare en France, même
en Europe, bois pourpre veiné ; arbre à 44 ans,
8 mètres de haut, 1 mèt. de circonférence, pied
cube 14 kilogr. 164 gram, susceptible du plus
beau poli. Le pied cultivé chez M. Rast était
mâle, c’est un des premiers de cette espèce qui
ait fleuri en Europe. Les journaux en ont fait
mention.
24. Gleditsia caspica, Fevier de la mer cas-
pienne , bois d’un grain fin, serré, de couleur
jaunâtre, analogue à celle du bois d’oranger , à
de Lyon. 149
47 ans l'arbre avait 16 mètres de haut, sur
1 mètre 48 centimètres de circonférence , pied
cube 18 kilog. 189 gram. , utile pour la menui
serie, la marqueterie , les ouvrages du tour.
25, Gleditsia Chinensis, Fevier de la Chine,
bois compact , d’un grain fin, de couleur rousse,
veiné de rouge, pesant le pied cube 19 kilog.
105 gram. ; l'arbre à 45 ans de 11 mèt. de haut,
x mèt. de circonférence , susceptible d’un beau
poli, bon pour le charronnage, la menuiserie,
Vart du tourneur. Comme il se durcit dans l’eau;
il pourrait servir à faire des pilotis et des pièces
de marine; comme il est armé d’épines , il se-
rait précieux pour former des clotures s'il ne
craignait pas tant d’être taillé, et si ses graines,
quand on les arrache, n'exhalaient pas des éma-
nations incommodes.
26. Gymnocladus Canadensis , Gymnoclade du
Canada, bois compact, de couleur rousseâtre ,
veiné de brun , grain peu serré et néanmoins
pesant le pied cube 19 kilog. 243 gram., à 40
Ans 12 mèt. de haut sur 3 de circonférence. M.
Rast en avait fait, 20 ans avant sa mort, un
joli meuble ; il est veiné de diverses couleurs qui
acquièrent en vieillissant des nuances agréa!les.
27. Halesia tetraptere , Halésie à 4 ailes, ori-
ginaire de la Caroline, remarquable par sa pré-
cocité et la beauté de ses fleurs ; ayant acquis à
150 Société royale d’Agricullure
43 ans 9 mèt. 1/2 de haut sur 50 centirnèt. de
circonférence , portant des noix dont on pourrait
extraire de l'huile ; bois d'un grain et d’un tissu
fin , de couleur rougeâtre, facile à travailler,
et qui pourrait servir à de petits ouvrages de
tour , pesant le pied cube 18 kilog. 336 gram. ,
en 42 ans il avait acquis 8 métres.
28. Hypophaë Canadensis , Hypophae du Ca-
nada, arbrisseau qui ne s'élève pas dans nos
pays au-dessus de 2 à 3 mèt., son bois ne peut
pas être d'une grande utilité, pesant le pied cube
14 kilog. 24 gram.
29. Îllicus Floridanus , Badiane de la Floride,
arbrisseau importé en 1780 par Michaux père,
dont le feuillage exhale une odeur suave , et dont
l'huile essentielle pourrait être employée par les
parfumeurs et les distillateurs ; qui, par l'élé-
gance de son port, ornerait les jardins à paysage;
son bois est odorant, d’un grain fin, de couleur
jaunâtre, facile à polir , pesant le pied cube 21
kilog. 367 gram.; l'arbuste ne s'élève pas au-
dessus de 3 à 4 mèt.
30. Juniperus oxiccdrus, Genevrier Cèdre,
bois marbré de roux et de jaune pâle, d'un grain
fin, s’étant en 43 ans élevé à 7 mètres sur 34
centimèt. de circonférence ; pied cube 14 kilog.
147 gram.
31. Juglans squamosa , Noyer écailleux , com-
de Lyon. 151
mun en Pensilvanie, bois roux avec des veines
brunes; en 41 ans l'arbre s'est élevé à 12 mèt.
48 centimèt. Le pied cube 15 kilog. 242 gram.,
inférieur au nôtre pour la fabrication des meubles
et autres objets. |
32. Juglans olivæformis , Noyer pacanier, bois
d'un grain fin , de couleur rembrunie, suscp-
tible d’an beau poli, supérieur peut-être à l'in-
digène pour la fabrication des beaux meubles,
et s’élevant plus haut ; il s'est élevé en 23 ans à
22 mèt. sur 1 mèt. de circonférence; le pied
cube 17 kilogr. 190 gram. : il surpassait de beau-
coup les indigènes de même âge placés à côté
de lui.
33. Koëlreuteria paullinioïdes | Koëlteurie à
feuilles de paullinier , remarquable par Pélé-
gance de son port ; bois d’un tissu fin, serré,
compact, de couleur blanchätre avec des mar-
brures tant rousses que noirâtres, susceptible
d'un beau poli, mais se gerçant, se délitant,
facile à travailler , durcissant par le temps , bon
pour de petits ouvrages de tabletterie; pesant le
pied cube 22 kilogr. 264 gram. L'arbre s'étant
élevé en 24 ans à 8 mèt. sur presqu'un de cir-
conférence , portant une amande dont on pour-
rait peut-être extraire de l’huile.
34. Laurus sassafras , Laurier sassafras, ori-
ginaire de la Floride, d'un aspect agréable , d'un
292 Société royale d'Agriculture
bois spongieux , poreux, teillasseux , dont le
tissu est grossier , la couleur rousse, tirant sur
le rouge , l'odeur aromatique , ne se distinguant
point de celui que le commerce nous apporte
pour l’usage de la médecine, ayant sans doute
la même propriété, ayant fourni à M. Goindoin ,
jardinier en chef à Trianon une excellente li-
quéur stomachique ; pesant le pied cube 5 kilo.
37 gram. L'arbre avait à 46 ans 8 mèt, de haut
sur 35 centimèt. de circonférence.
35. Lyriodendrum lulipifera , Vulipier de Vir-
ginie, son bois est d'un tissu fin , jaune pâle,
avec des taches d’un vert rembruni, facile à
travailler , se gerçant difficilement, prenant un
superbe poli, d’une odeur agréable ; il sert en
Amérique à faire des meubles fort jolis, son
écorce peut servir à aromatiser les liqueurs de
table ; son bois pèse le pied cube 14 kilog. 157
gram. L'arbre avait à 41 ans 10 mèt. de hauteur
sur 32 centimèt. de circonférence.
36. Liquidambar styraciflua | Liquidambar
d'Amérique, originaire de Virginie , de Pensil-
vanie, bois d’un tissu blanchâtre avec des veines
purpurines , il ne prend pas un beau poli, il
n'est pas d'un bon usage même pour le chauffage,
il exhale, soit qu'il soit vert ou sec, une forte
odeur aromatique. Il s’était élevé en 42 ans à 6
mèt. et sa circonférence était de 38 centimèt.
Le bois pèse 32 kilog. 123 gram. le pied cube.
-de Lyon. “153
37.. Laryx cedrus, Cèdre du Liban , bois d'un
grain fin , veiné longitudinalement , marbré d'un
blanc roux , conservant après avoir été coupé »
une odeur agréable; l'arbre en 44 ans ayant
acquis 20 mèt. de hauteur sur 1 mèt, de cir-
conférence. Le pied cube pèse 17 kilog. 134 gr.
38. Mespilus Coralina , Kpine, petit corail ,
originaire du Japon, bois compact , d’un grain
fin, susceptible d’un beau poli, pouvant servir
aux graveurs, aux tourneurs , aux ébénistes ,
ayant acquis en 44 ans 6 mèt. de hauteur sur 15
centimèt. de circonférence, pesant le pied cube
19 kilogr. 282 gram.
39. Prunus Lusitanica , Cerisier Azarero , ori-
ginaife du Portugal, bois compact, d’un grain
fin, marbré, d’un superbe poli, pouvant être
employé dans plusieurs arts, pesant 19 kilogr.
149 gram. le pied cube, s'étant élevé en 42
ans à 5 mèt. sur 65 centimèt. de circonférence,
son fruit estun poison pour les paons et autres.
oiseaux de basse-cour. »
40. Prunus Virginiana , Cerisier de Virginie,
bois d'un jaune orangé , veiné de nuances plus
claires, tissu fin et serré , susceptible d’un beau
poli, pouvant servir à l'ébénisterie , au placage,
à la fabrication de fort jolis meubles , pesant le
pied cube 15 kilogram. 196 gram, l'arbre ayant
acquis en 32 ans 6 mèt. de hauteur sur 48 met.
de circonférence.
154 Sociélé royale d’Agricullure
41. Phyllirea latifol'a , Filaria à feuilles larges,
bois dur, compact , d'un tissu serré , pouvant
être employé à faire des roues, des vis, des
ouvrages de marqueterie , très-sujet à se gercer ,
si on n'a pas soin de le tenir à l'ombre quelques
mois après son exploitation. Le pied cube pèse
16 kilogr. 348 gram.
42. Pinus rigida, Pin hérissé , originaire de
Virginie, bois peu fin et peu serré, de couleur
rousseâtre , avec des couches longitudinales blan-
châtres, ne pesant le pied cube que 10 kilogr.
247 gram. L'arbre ayant acquis en 24 ans 14
mèt. de hauteur sur 73 centimèt. de circonfé-
rence, réussissant sur les terrains arides et sa-
bionneux ; on le cultive à la pépinière du Rhône,
On en fait en Amérique des solives, des planches,
des canaux , etc. [1 acquiert dans l'eau de la
dureté.
43. Populus Græca, Peuplier d'Athènes, com-
mun aux îles de l’Archipel , bois roux entremêlé
de jaune ,: avec des bandes blanchâtres, d'un
tissu serré, susceptible d’un beau poli, supé-
rieur au bois des autres peupliers pour la me-
nuiserie , l’ébénisterie , la marqueterie, pesant
le pied cube 13 kilogr. 187 gram. L'arbre s'étant
élevé en 43 ans jusqu'à 3 mèt. de hauteur sur
2 1/2 de circonférence.
44. Platanus ôccidentalis | Platane d'occident ,
de. Lyon. 155
bois dar et compact, d'un tissu fin, de couleur
marbrée, ayant des rapports avec celui du hêtre,
souffrant un beau poli ; il pourrait servir à for-
mer des tonneaux, des cuves, des foudres , etc.
On peut s’en servir un an après l'avoir coupé :
comme le platane d’orient, il acquiert dans l’eau
de la flexibilité.
45. Populus suber , Peuplier liége. On l'a ren-
,contré en 1806 dans les îles du Rhône: bois
blanc, nuancé de diverses couleurs, peu facile
à travailler, mauvais pour le chauffage, il ne
pourrait servir qu'à faire des caisses , des tables,
d'autres petits ouvrages; ses feuilles donnent
beaucoup d'ombrage et sont précieuses pour la
nourriture des moutons. Le bois pèse le pied
cube 14 kilogr. 104 gram. ; l'arbre eu 18 ans s'est
élevé à 12 mèt. sur 50 centimèt. de circonférence*
46. Populus monilifera | Peuplier du Canada,
bois blanc jaunâtre, teillasseux, pesant le pied
cube 13 kilogr. 290 gram. L'arbre s'étant élevé
en 33 ans à 15 mèt. sur 1 mèt. 50 centimèt. de
circonférence , précieux parce qu’il croît rapide-
ment, et qu’il prospère , ainsi que le précédent
dans les terrains humides et tourbeux.
47. Quercus banisteri , Chêne de banister »
originaire de New-yorck , bois dur, compact ?
d’un roux foncé, nuancé de gris de fer , peu
propre à être travaiilé, pesant le pied cube 14
156 Société royale d'Agriculture
kilogr. 314 gram. L'arbre n'ayant acquis en 33
ans que 4 mèt. de haut sur 37 centimèt de cir-
conférence , réussissant dans les terrains hu-
mides , et pouvant former des haies épaisses.
48. Quercus suber , Chêne liége, bois jaune
jaspé de roux , croissant beaucoup plus en cir-
conférence qu’en hauteur, précieux pour son
épiderme dont on fait des bouchons ; on peut
l'en dépouiller sans que l'arbre en souffre , le
pied cube pèse 16 kilogr. 188 gram. L’arbre
avait acquis à 45 ans, 6 mèt. de hauteur sur 2
mèt. 58 centimèt. de circonférence. Sa culture
se réduit de jour en jour, etilest à craindre
qu'il ne disparaisse de nos climats.
49. Robinia Sophoræfolia , Robinia à feuilles
de sophora , espèce nouvelle que M. Ras! tenait
de M. Madiot , lequel l'avait obtenue de graine en
1804 à la pépinière départementale, son nom
Jui a été donné par M. de Candolle. Le bois en
est dur , d’un grain uni, serré, susceptible d'un
beau poli, coloré en jaune clair, avec des jas-
pures brunes et vert olive : on pourrait en faire
de jolis meubles. Le pied cube pèse 20 kilogr.
244 gram.; l'arbre à 20 ans n'avait acquis que
8 mèt. d'élévation sur 40 centimèt. de circonfé-
rence. Îl n’a pas encore fleuri en France.
50. Rhus lyphinus , Sumac de Virginie, bois
d'un tissu satiné, d'un jaune citron , avec des
de Lyon. 157
lisières brunes, quoique peu dur, facile à tra-
vailler , prenant un superbe poli , se durcissant
par le temps, précieux pour les ouvrages d’ébé-
nisterie, pesant le pied cube 14 kilog. 28. gram. ;
l'arbre ayant acquis en 24 ans 6 mèt. de hauteur
sur 1 mèt. de circonférence. Il ne vit pas long-
temps, se reproduit de lui-même pas drageons ;
il fournit une résine analogueau copal ; on peut
tirer de ses feuilles un produit tinctorial , et de
ses baies du vinaigre.
51. Rhus copallinum , bois d’un jaune citron
foncé, avec des jaspures de couleurs variées,
prenant un très-beau poli et pouvant servir à
la fabrication de meubles élégans , pesant le pied
cube 16 kilog. 134 gram. L'arbre en 34 ans avait
en hauteur 5 mèt. sur 32 centimèt. de circonfé-
rence. Il fleurit rarement dans nos climats.
52. Spartinus albinus, Spartie à fleurs blanches,
originaire de Barbarie , bois d’un tissu fin perlé,
nuancé de blanc, de pourpre, de roux , d'orange,
pesant le pied cube 17 kilogr. 189 gram. L'arbre
ayant acquis à 39 ans, 3 mèt. de hauteur sur 9
centimèt. de circonférence. Il offre pendant sa
floraison qui dure plusieurs mois, un aspect
fort agréable : les boutons macérés dans le vi-
naigre peuvent suppléer les capres.
53. Sambucus Canadensis, Sureau du Canada,
son bois , en vieillisant , devient très-compact,
158 Société royale d Agricullure
il est jaune pâle avec des nuances variées ; il pèse
13 kilogr. 104 gram. L’arbrisseau a acquis en 16
ans 13 kilogr. 104 gram.
54. Sophora Japonica , Sophora du Japon,
son bois, en vieillissant devient, à l'intérieur,
d’un jaune rembruni , son tissu est uni, serré,
compact , susceptible d’un beau poli, il est propre
au charronnage, à la sculpturé, à la marque-
terie , à la fabrication des vis de pressoir , etc. IL
pèse le pied cube 18 kilogr. 247 gram. L'arbre
avait acquis à 50 ans 16 mèt. de hauteur sur:32
centimèt. de circonférence. Ses racines sucrées
pourraient être de quelqu’utilité en médecine.
55. Tilia alba , Villeul argenté, spontané en
Hongrie, introduit en Angleterre en 1767, et
envoyé au jardin du roi il y a 30 ans; bois
blanchâtre, se fendant difficilement et se refer-
mant après avoir reçu une entaille, excellent
pour les ouvrages de sculpture, la fabrication des
balles d'imprimerie , des tables sur lesquelles on
coupe le cuir, etc. mauvais bois de chauffage »
ne pesant le pied cube que 12 kilogr. 230 gram.
L'arbre s'était élevé en 24 ans à 15 mèt. de hau-
teur sur 1 mèt. de circonférence. Son mérite
consiste dans l'élégance de son port et l’épaisseur
de son feuillage.
56. Ulmus Americana ; Orme d'Amérique ,
bois veiné de jaune et de blanchâtre , d’un grain
de Lyon. 159
ai peu grossier , souffrant un beau poli, se dé-
jetant quand on l'emploie trop tôt; tout aussi
ban au reste que l’indigène pour le charronnage ,
le chauffage , comme lui donnant d’excellens
charbons, pesant le pied cube 22 kilogr. 188 gr.,
ayant acquis en. 44 ans 20, mèt. de hauteur sur
3 de circonférence. Ses feuilles , que les insectes
n'attaquent jamais , constituent un excellent
fourrage.
57. Viburnus punicifolius , Viourne à feuilles
de grenadier , originaire de l'Amérique septen-
trionale , bois d’un grain sec, serré, d'un tissu
compact, blanchâtre, pesant le pied cube 16
kilogr. 300 gram., n'étant, à l’âge de 40 ans,
parvenu qu'à 4 mèt. de hauteur sur 21 centi-
mètres de circonférence.
58. Virgilia lulea , Nirgilia à fleurs jaunes.
Le genre a été détaché du Sophora L. par La-
marck ; l’espèce en fut introduite par M. Madiot
à Lyon en 1806, c’est lui qui le procura à M.
Fast. Le bois a le grain fin, de couleur safra-
née , avec des nuances rousseâtres à l'intérieur ;
il pourrait être employé utilement à divers ou-
vrages de luxe ; le pied cube pèse 22 kilogr. 377
gram, Il ne vit pas long-temps, peut se greffer
sur le Sophora du Japon : les terrains humides
sont ceux qui lui conviennent le mieux.
59. Zanthoxylum Fraxineum , Zanthoxilum à
Sur trois es-
Pèces ou va-
riétés d’alizier;
par le méme.
169 Société royale d’ Agriculture
feuille de frêne ou clavalier , originaire de lAmé-
rique septentrionale ; bois d’un tissu fin , teillas-
seux, jaspé de jaune et de blanchâtre , facile à
travailler et pouvant servir à divers ouvrages ;
pesant le pied cube 19 kilogr. 388 gram. L'arbre
en 44 ans s'étant élevé à 6 mèt. sur 34 centimèt.
de circonférence,
6o. Ziziphus Sinensis, J ujubier de la Chine,
d’un bois dur, compact, susceptible d’un beau
poli , pesant le pied cube 24 kilogr. 114 gram. :
l'arbre ayant acquis en 47 ans 4 mèt. 1/2 de
hauteur sur 5 centimèt. de circonférence. Sa
forme est peu agréable, son fruit pourrait peut-
être suppléer celui du Jujubier ordinaire ; quant
à son bois, il n’a été employé jusqu'ici àaucun
usage.
Indépendamment de tous ces faits, également
intéressans sous le rapport de l'agronomie et
sous celui de l'histoire naturelle, notre confrère
a recueilli à la pépinière départementale des ob-
servations sur plusieurs espèces ou variétés
d'alizier, dont l'un à feuilles de clethra , un
autre à feuilles de sorbier, et un troisième nom-
mé alizier nain. ,
Le premier est une variété que l’auteur obtint
de la graine de l’alizier à feuiiles d'arbouzier ; 11
vient de le voir fleurir et fructiñer pour la pre-
g de Lyon, 61
mière fois. Il ne l'a trouvée décrite nulle part:
elle se distingue par les caractères suivans :
Taille d'un mètre et demi, port buissonnier ,
tiges blanchâtres, panachées de rouge sanguin,
branches et rameaux s'étendant confusément,
boutons sanguins recouverts de petites écailles
de même couleur et de forme ovale , légèrement
aplaties , bourgeons à feuilles et à bois, pointus
en fer de lance ; fleurs petites, en panicule , de
cinq à six pétales inégaux , couleur de chair ,
odeur balsamique , calice persistant , cinq à six
styles ; feuilles ovales , lancéolées , dentelées ,
d'un vert glabre en dessus , cotonneuses en des-
sous, nervures saillantes , pédoncules courts ,
en gouttière, grands rapports avec la feuille du
clethra; fruits noirs , luisans , odorans , ras-
semblés en corymbes au sommet des rameaux
de deux à trois ans ; pédoncules courts, rous-
seâtres , se terminant dans un enfoncement
profond ; ombilic foliacé, forme sphérique, .
trois à sept pepins cartilagineux. Ce joli petit
arbrisseau se propage aisément de grefle sur
l'aubépin et le cognassier , il vit peu de temps
sur le poirier ; il vient difficilement de semence
et de marcotte; son bois est compact, lourd,
d'un grain fin, d’une odeur agréable quand il
est fraîchement coupé, il prend, en vieillissant ,
une belle teinte jaune pâle , il est susceptible
d'un beau poli. 11
162 Socièlé royale d'Agriculture
L'autre espèce d’alizier , celui que l'auteur
appelle à feuilles de sorbier, fut trouvée dans
les forêts du Vesterdal , en Suède, par un na-
turaliste de ses amis qui lui en remit quelques
graines en 1810 ; au bout de treize ans , il l'a
vue fleurir et fructifier. Comme il la croit nou-
velle il en signale ainsi les caractères :
Racine d’un rouxtrès-foncé à l'extérieur, inté-
rieurement d’un jaune clair , donnant à l'eau une
teinte verte, comme on l’a remarqué à la suite
de quelques jours de macération dans ce liquide ;
tiges purpurines, ponctuées, se ramifiant au
point de former, quand l'arbuste est isolé, une
touffe très-agréable ; bois compact , lourd , d'un
grain fin, se colorant en rouge quelque temps
après avoir été coupé , et conservant alors une
odeur analogue à celle du cerisier ; branches
nombreuses, effilées et ramassées ; rameaux d'un
rouge sanguin avec des taches cendrées d'inégales
grandeurs; bourgeons à fleurs, petits, allongés,
recouverts d’écailles purpurines ; feuilles pinnées
avec impaire ; folioles lancéolées, dentelées sur
les bords, pétioles creusés en gouttière ; fleurs
en corymbe , de couleur de chair, d'une odeur
analogue à celle des fleurs d'amandier ; trois à
cinq styles, moins longs que les étamines ; fruits
pruniformes , se colorant à l’époque de la matu-
rité en beau noir luisant , offrant dans un pa-
de Lyon. 163
renchyme rouge deux à trois petits pepins carti-
lagineux, allongés, pourpres.
Les oiseaux recherchent moins ce fruit que
celui des autres espèces d’alizier ; ila une saveur
acidule, légèrement vineuse, et peut se conser-
ver pendant quatre à cinq mois. L'auteur en a
fait une boisson rafraîchissante assez agréable.
Cet arbuste se multiplie de semences, il se
greffe sur le poirier et le cognassier , surtout sur
Paubépin , et alors il est plus robuste et plus
vivace.
L'alizier nain, Crathægus chamæ mespilus , qui
a été aussi l'objet des observations de notre con-
frère, habite les montagnes alpines, et il s’est
facilement naturalisé à la pépinière du Rhône
où il se présente sous un bel aspect, surtout au
printemps.
Il s’élève à peine au-dessus de deux pieds, ses
tiges, de couleur cendrée, sont parsemées de
taches purpurines ; rameaux agréablement dis-
posés en étages; boutons allongés , pointus ,
saillans, recouverts d'écailles cendrées à la base,
vertes et purpurines à la pointe ; feuilles ovales,
dentées , cotonneuses en dessous , et en dessus
d'un vert clair luisant, pétioles courts, d’un
vert jaunâtre, et creusés en gouttière ; fleurs en
corymbe , pétales larges, de couleur rose , d'une
odeur agréable, étamines jaunâtres et rougeâtres,
Sur deux va-
riétés
Pin ;
méme.
d’aubé-
par le
164 Societe royale d'Agriculture
deux styles blancs ; inflorescence au commence-
ment du printemps ; fruits olivaires, acides,
portés perpendiculairement sur des pétioles
droits, tandis que dans les autres espèces d’alizier
les fruits sont réfléchis et pendans.
Ce joli petit arbrisseau mérite une place dans
les jardins d'agrément , et plaît dès le commen-
cement du printemps par l'élégance de ses fleurs
et de son feuillage ; il flatte les yeux dans l’au-
tomne par la disposition de ses fruits, les oiseaux
en sont friands et on pourrait en faire un petit
vin agréable,
L’alizier nain se multiplie sur l’aubépia et le
cognassier ; il vient difficilement de graine ; car
c'est en vain que jusqu’ici Pauteur a cherché à
lobtenir franc de pied.
Deux variétés d'aubépin ont été observées par
notre laborieux confrère, l’un est à feuilles de
tanaisie , l’autre à feuilles en spatule.
Les caractères du premier sont les suivans :
tige droite , unie, cotonneuse , blanchâtre , sans
épines, bourgeons gros, gonflés, recouverts d'un
duvet blanchâtre, boutons à fleurs mamelonnées,
accompagnées de petites écailles purpurines,
fleurs en corymbes , portées sur des pédoncules
allongés, pétales blancs, légèrement nuancés en
rose, odeur agréable, feuilles larges, bipinnées ,
roncinées à la pointe , stipulées , hérissées de
de Lyon. 165
poils ; portés sur des pétioles courts, rudes au
toucher, creusés en gouttière , fruit quelquefois
du volume d'une petite pomme, dont il a la
forme, ayant un large ombilic , la pellicule lisse ,
jaune citron. Il prend , en mürissant , l'odeur de
la pomme de rainette. La chair en est pâteuse ,
d’un jaune pâle , l’eau peu abondante , aigre-
lette, légèrement sucrée. L’auteur a fait avec ce
fruit des marmelades et des confitures qui avaient
des rapports avec celles d’épine-vinette ; les pepins
sont oblongs , anguleux , comprimés , osseux.
L'aubépin à feuilles de tanaisie se cultive
comme les autres espèces d’azerolier , seulement
il réclame plus particulièrement l'exposition du
levant et du midi; on peut le greffer sur l'aubé-
pin ordinaire , sur le cognassier et même sur le
poirier ; on l’obtient difficilement de graine.
L'autre espèce d’aubépin observée par M.
Madiot est le Mespilus spatulata ( Bosc), arbuste
exotique qui, comme urie foule d'autres , s’est
acclimaté à la pépinière du Rhône. Comme il se
ramifie beaucoup , il y forme des buissons très-
touflus. Ses tiges sont de couleur cendrée, mar-
quetées de points rousseâtres, ses rameaux effilés,
armés de longues épines flexibles , les boutcns
peu saillans, mamelonnés , d'un rouge sanguin,
revêtus d'écailles imperceptibles ; les fleurs pe-
tites , en panicule , couleur de chair, d’une
Sur une vya-
riéte de pom-
mier et sur une
variété de poi-
rier; par le
méme.
166 Sociélé royale d'Agriculture
odeur suave ; les feuilles variant par leur
forme, sont les unes en spatule, d'autres lan-
céolées , quelques-unes arrondies , elles sont
lisses, portées sur de courts pétioles et persistent
long-temps. Les fruits sont pyriformes , isolés,
groupés en nombre impair, chacun d’eux ren-
fermant deux à trois semences osseuses. La chair
en est jaunâtre et d’un goût analogue à celui de
Vaubépin ordinaire, l'ombilic est d’une gran-
deur remarquable. Le bois de cet azerolier est
jaunâtre , d'un grain fin, susceptible d'un beau
poli ; mais comme il est très-dur, on le travaille
difficilement.
Nous devons encore à M. Madiot la notice
d'une variété de pommier qu'il appelle à bois
couleur d'olive , et d’une variété de poirier qu'il
nomme à bois et à fruits maculés dejaune.
Il découvrit la première en 1819 à St-Cyr au
Mont-d’Or. Elle lui parut fort remarquable par
la couleur de l'écorce: des jeunes rameaux qui,
au moment de la sève, semblent avoir reçu un
vernis luisant, couleur d'olive : les autres carac-
tères de cette variété sont un tronc droit, des
bourgeons allongés, cotonneux , des boutons
d'un vert clair à la pointe, recouverts de petites
écailles imbriquées, des fleurs réunies en co-
yymbe, au nombre de dix à quinze, dont les
de Lyon. 167
pétales sont arrondis supérieurement , à large
onglet, et colorés en rouge de chair. Les feuilles
sont stipulées , ovales |, acuminées, à nervures
nombreuses et saillantes , denticulées , luisantes
à la face supérieure, portées sur de courts pé-
tioles creusés en gouttière. Le fruit est gros,
aplati, présentant sur une de ses faces un œil
très-large; sur l’autre une cavité profonde , pour
l'implantation du pédoncule ; la peau en est
unie, couleur de chair, excepté sur la surface
qui était exposée au nord; la chair en est
ferme, fine, d'un beau blanc avec quelques
teintes rougeâtres sous la peau, l’eau abondante,
analogue à celle de la rainette. C’est une des
pommes qui se conservent le plus long-temps.
Comment se fait-il qu'une variété de pommier
si précieuse ne soit cultivée que dans le Mont-
d'Or lyonnais ? Toutes les expositions lui con-
viennent , seulement il exige un sol profond.
On le greffe sur franc, pour l'obtenir à grand
vent, et dès-lors sa fécondité est prodigieuse.
Pour ce qui concerne la variété de poirier St-
Germain à bois et à fruits maculés de jaune ,en
voici les caractères principaux : Racines pivo-
tantes, quand il est greffé sur franc dans un bon
terrain , traçantes quand on l’a enté sur le
cognassier , tiges prenant une belle direction,
se terminant par une tête en pyramide, bois
168 Société royale d'Agriculture
jaspé de plusieurs nuances de jaune; boutons
petits , recouverts d’écailles grisaillées , pana-
chure singulière, qu’on maintient par la grefe,
en inoculant les boutons les plus maculés; feuilles
stipulées , portées sur de longs pétioles réfléchis
en gouttière , fleurs couleur de chair, irrégu-
lièrement allongées , jaspées de plusieurs nuan-
ces comme le bois, et devenant presque couleur
citron au moment de la maturité; la chair en
est fondante et l'eau très-sucrée , les pepins sont
tantôt isolés , tantôt depuis quatre jusqu’à huit ;
les carrières sont abondantes.
Ce fruit mûrit en novembre et peut se conser-
ver jusqu'en mai , et à cette époque il a le goût
et l'odeur du bon chrétien d’été ou gracioli
d'Italie. Il réussit sur franc, mais alors il ne
donne abondamment du fruit qu'au bout de
huit à dix ans, tandis que greffé sur cognas-
sier , il en porte beaucoup et de bonne qualité,
deux ou trois ans après l'opération.
Sur une va L’arbuste qui suit est, selon M. Wadio!,
riété de Spiréa sorti des graines du spiréa à feuilles d'obier qui
Are sn furent semées à la pépinière de naturalisation du
paniculées ; Rhône; c'est, dit-il, une variété qui n’avait
por le même. bas été décrite jusqu’ici. Voici les principaux ca-
ractères que l’auteur lui a reconnus :
: Racines stolonifères, fournissant beaucoup de
de Lyon. 169
drageons; tiges nombreuses formant des buis-
sous touffus, très-moelleuses, ne durant chacune
que quatre à six ans ; boutons duvetés , aigrettes
grisâtres, recouvertes à la base de petites écailles
rousseâtres ; bourgeons à fleurs, saillans et rap-
prochés les uns des autres ; fleurons paniculés ,
pétales de couleur de chair vive, étamines jau-
nâtres et blanches , extrêmement nombreuses ;
feuilles ternées , folioles lancéolées , inégalement
dentées , velues en dessous , glabres et d’un vert
d'olive supérieurement , pétioles courts, creusés
en gouttière , cinq à sept capsules, renfermant
chacune de trois à sept petites semences légère-
ment osseuses , blanchâtres et brillantes.
Cette espèce s'élève à la hauteur de deux à
trois mètres, on la multiplie de graines, dra-
geons , marcottes et boutures; elle réussit moins
bien de cette dernière manière; toutes sortes de
terrains et d'expositions lui conviennent, difié-
rant en cela de la plupart des autres espèces de
spiréa. |
Celui-ci est propre à orner les jardins , les
parterres et les bosquets ; mais il faut le renou-
veler tous les sept à huit ans, parce que ses
racines stolonifères se dévient, s'écartent de
la tige principale qui. meurt; il s'en forme de
nouvelles un peu plus loin , de sorte que l'ar-
buste voyage en quelque sorte.
Sur l’érable
à trois lobes ;
par lo même.
Y70 Société royale d'Agricullure
Notre confrère trouva dans un semis d'érables
de Tartarie une variété de ce genre qui lui parut
remarquable principalement par son feuillage
élégant , touffu, d’une belle verdure claire, sur-
tout au soleil; les feuilles sont à trois lobes
allongés , dentelés sur les bords, à nervures
très-saillantes , à pédoncules courts et d’un rouge
sanguin. Cette variété a fleuri pour la première
fois en avril 1823, et l’auteur remarqua que ses
fleurs, au lieu d'être en corymbe comme dans
l'érable de Tartarie, étaient en grappes, et les
fleurs plus petites qu'elles ne le sont dans les
espèces de ce genre.
Le bois d'érable à trois lobes a paru à M.
Madiot plus dur, plus compact que celui des
autres érables , et par conséquent plus propre à
l'ébénisterie , et aux ouvrages de tour et de mar-
queterie , d'autant mieux qu'il se travaille très-
aisément, et que son tissu est d’un grain fin,
nuancé de diverses couleurs. L'auteur, sans
sacrifier l'arbre , a pu en étudier le bois, ayant
eu occasion d'enlever une grosse branche qui
empéchait l'arbre de monter.
Cet érable croît fort lentement, il n’a acquis
en effet, depuis seize ans qu'on le cultive , que
huit pieds de haut sur quatre pouces de circon-
férence. La compacité de son bois tient à la
lenteur de sa croissance.
de Lyon. 171
Ce n’est pas à la pépinière dont la direction
lui est confiée, mais à la terre de la Tourrette,
chez M. de St-Trivier , que M. Madiot a observé
l’agavé d'Amérique. Il y a fleuri pour la première
fois en septembre 1823. 1] pense même qu’avant
cette époque les fleurs de cette espèce ne s'étaient
pas épanouies sous notre ciel, car il regarde
comme appartenant à une espèce différente l'agavé
à feuilles panachées qu’on a vu fleurir en 1816.
L'agavé de M. de St-Trivier avait crû dans
l’espace de 20 jours de douze pieds , et ce pro-
digieux effort ne l'avait pas empêché de pousser
quatre tiges latérales qui, à la vérité, s'étaient
élevées beaucoup moins haut.
La floraison de cet agavé se composait de douze
superbes corymbes portant chacun de vingt à
cinquante fleurs , de sorte que le nombre total
de celles-ci était de plus de trois cents; leur
couleur était d’un jaune verdâtre, et leur odeur
fort peu agréable. Après avoir duré deux mois
ces fleurs tombèrent , et la plante mourut.
Elle vivait encore lorsque M. Madiot , qui se
trouvait au château de la Tourrette, détacha de
sa tige un corymbe composé de trente - quatre
fleurons , pour l'étudier à son aise à la pépinière;
il le mit dans un vase avec de l’eau, La fécon-
dation s’opéra dans ces fleurs tout aussi bien
que si elles n’eussent pas été détachées de la tige.
Sur l’agavé
d'Amérique ;
par le méme.
Sur des in-
sectesnuisibles
à l’agriculture;
et sur les mo-
yens de s’en
délivrer en leur
opposant d’au-
tres animaux ;
par le méme.
172. Socièlé royale d'Agriculture
Les grains qui se formèrent en grand nombre
avaient les apparences d’une parfaite maturité.
Originaire du nouveau monde d'où il fut ap-
porté vers le XVLe siècle, l'agavé s’est naturalisé
en Espagne où il sert à former des haies impé-
nétrables à cause des aïguillons forts et nom-
breux dont sa tige est armée.
Si, dans le midi de la France, on acclimatait
cette plante grasse , on la ferait servir, non-
seulement à construire des haies, mais encore
à former des cables, des cordages pour la marine ;
il suffirait en effet d'en faire rouir les feuilles
pour obtenir une filasse d'une grande ténacité,
qui, selon M. Madiot, se fortifie dans l’eau,
aussi recommande-t-il la naturalisation dans le
midi de la France de l'agavé américain.
Occupé depuis un si grand nombre d'années
de la culture des arbres, M. Madiot a dû étudier
les insectes ennemis de ces grands végétaux.
Les plus redoutables de ces parasites funestes
lui ont paru être les courtillières , les larves des
hannetons , les lisettes ou coupe-bourgeons, les
perce-oreilles , les sauterelles à molaires en forme
de ciseaux, un très-grand nombre de chenilles,
plusieurs espèces de punaises, des tigres, des
fourmis , des pucerons, etc.
Pour défendre contre les ravages de ces insectes
de Lyon. 173
les pépinières , surtout les jeunes semis , il vou-
drait qu'on en confiât la garde à deux animaux,
le hérisson à groin de cochon et le lézard vert.
Le premier de ces animaux fut l'objet d’une
observation du même auteur, laquelle fut in-
sérée dans le compte rendu de la société pour
1821, Cette notice étant, dit-il, parvenue aux
Etats-Unis d'Amérique, il reçut de ce pays la
demande d’une expédition de hérissons ; on se
proposait de les y naturaliser avec soin, pour
les opposer aux insectes, aux petits reptiles qui
pullulent dans ces contrées.
Le lézard vert, Laserta viridis, est, comme
le hérisson, grand ennemi desinsectes, et il a sur
lui le grand avantage de pouvoir les poursuivre
sur les murs et jusqu'au sommet des arbres ; ce
n'est pas seulement pour s'en repaître qu’il leur
fait la guerre. L'auteur a vu des lézards aban-
donner les cadavres des insectes qu'ils avaient
tués pour chercher de nouvelles victimes. Il les
a vus se cacher, se blottir , se mettre à l'affût,
et attendre avec une imperturbable patience que
le hasard aménât auprès d’eux quelques insectes,
ayant soin de s'établir dans les lieux qu'ils fré-
quentent.
Il croit que chaque lézard s'arroge un droit
de chasse dans un arrondissement, et qu'il le
défend contre tout animal de son espèce qui
Notice sur
une nouvelle
variété de cy-
près chauve ;
par M. de Fre-
minyille.
174 Societe royale d'Agriculture
voudrait lenvahir. Cest au point, dit-il, que
si deux lézards se rencontrent sur ie même ter-
rain , ils se livrent des combats furieux, et le
champion vaincu se retire et attend pour re-
commencer le combat que ses blessures soient
guéries.
Telles sont les observations d'histoire natu-
relle recueillies par M. Madiot.
Vous devez à M. de Fréminville celle d'un
cyprès non décrit, qui végète depuis environ dix-
huit ans à Laumusse, ( départ. de Saône et
Loire), où, cette année, pour la première
fois , il a montré des chatons et des cones.
Il ressemble par le port, la disposition des
branches et l'écorce à celui que l’on nomme vul-
gairement cyprès mâle ( Cupressus elata ). Au
commencement de la pousse, les feuilles de l’un
et celles de l’autre sont groupées et disposées de
la même manière ; mais cette ressemblance
n'existe plus lorsque le développement est complet.
Le cyprès chauve est dioïque : le mâle porte
des chatons de couleur brune, qui pendent au
mois de mai des extrémités de toutes les branches.
Il paraît un peu plus vigoureux, ses feuilles
sont un peu plus allongées , et d'un vert plus
_ foncé que dans la femelle.
Celle-ci présente à la même époque de très-
de Lyon. 175
petits cones ronds , en aussi grand nombre et
placés de la même manière que les fleurs dans
le mâle. 11 n'en reste qu’un très-petit nombre.
Ceux que jai pu apercevoir m'ont paru avoir
atteint un diamètre d'environ quatre lignes.
J'ignore s'ils grossiront davantage.
Les feuilles naissent en grand nombre le
long et autour des rameaux. Leur longueur or-
dinaire est de cinq à six pouces. Les folioles ,
très - étroites , quoiqu’aplaties , sont rangées
tout autour de la côte commune , depuis
sa naissance jusqu’à son extrémité ; elles
sont tantôt opposées , tantôt alternes ; elles pa-
raissent dans le mâle un peu plus larges et elles
se détachent sensiblement de la côte, tandis que
dans la femelle elles paraissent collées.
La disposition de ces feuilles qui pendent le
long des branches et qui forment plusieurs
étages , donne à l'arbre une physionomie élé-
gante qui le ferait figurer avec agrément dans
les paysages.
Les deux’seuls pieds que l’auteur possède sont
plantés l’un à côté de l’autre, dans un sol peu
fertile, sur les bords d’une petite pièce d'eau ;
leur grosseur , près de terre, peut être d'environ
deux pieds de circonférence, et leur hauteur de
trente à quarante.
Les feuilles tombent toutes ensemble aux pre-
176 Société royale d'Agriculture
miers froids ; elles pourraient former un abri
pour les jeunes semis que l’on voudrait préser-
ver de la gelée d'hiver.
Notice sur Cette partie de l'histoire naturelle qui a pour
une roche feld- Gbjet les minéraux, n'est pas étrangère à vos
spathique sma-
ragdifère; par
M. Tissier. deux mémoires de M. Tissier , l'un sur une
roche remarquable, dont le gisement est peu
éloigné de notre ville; l'autre sur une eau mi-
nérale nouvellement découverte près de Condrieu.
Le mémoire relatif à la roche étant peu
étendu, je crois devoir l'insérer ici textuelle-
ment :
» Sur l'ancien chemin de Chessy, qui part de
la grande route de Lyon à Paris par Larbresle,
et à la partie de ce chemin qui va de Dardilly à
Dommartin , et de Dommartin à Lauzanne,
gisent diverses substances qui sont en droit
d'intéresser vivement le minéralogiste et le géo-
logue. Le terrain s'y compose en grande partie
de roches feldspathiques , souvent en décompo-
sition, et qui passent du porphyre argileux
proprement dit au granit pur et au granit por-
phyroïde. Au revers nord-ouest de ce terrain,
dans la commune de Dardilly, se trouvent des
bancs calcaires inclinés à l'est, formant avec
l'horizon un angle de plus de 75 degrés, tant
travaux , aussi avez-vous entendu avec intérêt
Lo
de Lyon. 177
leur inclinaison est plus grande que celle des
carrières du Mont-d’Or dont elles sont un dé-
membrement, »
» Pour guider le naturaliste dans les recher-
ches à faire sur ce terrain , traçons la route que
nous avons nous-même suivie dans cette explo-
ration. » |
» Lorsqu’en suivant la route de Paris par le
Bourbonnais, on est arrivé à la hauteur de
Dardilly , non loin de la Tour de Salvagny , on
prend un chemin à droite qui conduit à un
ruisseau qui coule au pied des collines dont
Dardilly est flanqué de ce côté ; en continuant
de marcher latéralement à la grande route , et
longeant ces collines, on trouve un terrain
friable , argileux , rougeâtre ; c’est la roche elle-
même en décomposition ; et souvent on rencontre
dans cette terre meuble , des cristaux de feld-
spath dodécaëdres , ayant le prisme et les deux
pyramides bien terminés. Ces cristaux sont gre-
nus, micacés , et ont seuls résisté à l’action de
l'air et de l'humidité qui ont mis la surface de
ce sol en détritus; depuis cet endroit et autour
du village, des champs sont trop bien cultivés
pour qu'il soit permis de faire des fouilles , seu-
Jement on y aperçoit la mémenature de terrain. »
» Ayant atteint l’ancienne route, et en tra-
versant plusieurs collines basses de même con-
12
178 Société royale d'Agriculture
texture, mais dont le noyau varie du rouge au
jaunâtre , on découvre un porphyre globuleux ,
rassez semblable à celui de Corse. Il aflecte di-
verses couleurs depuis le rouge foncé jusqu'au
jaune pâle ; il est souvent en décomposition , et
on le prendrait quelquefois pour une mine de
fer argileuse, hydratée en grains. »
» Enfin, à environ six cents pas du village ,
la roche prend un caractère décidé de granit
porphyroïde, ayant passé même à l’état de gneiss
en certains endroits. Ce granit porphyroïde est
parfaitement caractérisé, la pâte en est feldspa-
thique ; si le quartz enchâssé était cristallisé ,
on aurait une pegmatite ; mais il est grenu. »
Le feldspath y est laminaire, nuancé de blanc,
de rose, de violâtre, quelquefois en cristaux de
plusieurs pouces de longueur et de grosseur,
tantôt enchässant un quartz grenu à gros grains,
translucide, d’un blanc grisâtre , tantôt enchâssé
par cette substance. La masse entière est entre-
lardée de tourmaline cylindroïde canelée , d’un
vert luisant flatteur. Le mica est argentin,
quelquefois abondamment disséminé , le plus
souvent réuni en grandes lames et en masses
très-feuilletées et d’un bel eflet :il occupe des
places distinctes. »
.-» Cette roche granitique et feldspathique,
dont la pâte est de cette dernière nature, pourrait
de Lyon. 179
tout aussi bien être désignée sous le nom de
porphyre granitique. On sait en effet que le pas-
sage de la prémière de ces formations à la se-
conde est insensible, et qu’on les retrouve
quelquefois dans la même roche. »
» Cette roche est souvent smaragdifère, ce
qui le prouve, c’est qu'à la distance d'environ
six cents pas du village , non loin des bois de
Vabres , et au milieu même de la route, le
granit porphyritique renferme en outre de belles
tourmalines , des émeraudes à prismes hexaëdres,
dont quelques-unes remarquables par la gros-
seur et la régularité du prisme. Quelques-unes
sont en décomposition ; mais parmi celles qui
sont intègres, on en voit d’un vert fort beau
et d'un jaune dont la nuance varie depuis le
pâle jusqu'au verdâtre . . . . . . . . .
» En explorant avec soin le terrain de Dom-
martin , M. Tissier le fils a rencontré dans la
roche dont il s'agit l'épidote aciculaire, en très-
petite quantité à la vérité, mais suffisamment
pour donner l'éveil aux explorateurs et leur faire
espérer plus de succès dans leurs recherches. »
» La même roche m’a aussi présenté des in-
dices de grenats d’une petitesse extrême, mais
d’une couleur analogue à ceux du Piémont , des
traces de titane rutile, et quelques portions de
chaux posphatée ( apatite des Saxons ).
180 Société royale d’ Agriculture
» La découverte de cette roche est une bonne
fortune pour les minéralogistes du département,
la variété de ses annexes la rend intéressante et
précieuse ; pourquoi faut-il que des destruc-
teurs se plaisent à nous priver de cette jouis-
sance; les uns pour avoir le plaisir jaloux de
posséder seuls , les autres pour nous vendre au
poids de l'or une production minérale de notre
contrée ? »
» Mais qu'on se rassure. Tous les amateurs
trouveront encore de quoi satisfaire leurs désirs
et matière à de nouvelles découvertes. En atten-
dant, comme j'ai droit de soupçonner qu'on sé
fera honneur de ces explorations , je prends acte
pour mon fils et M. Zounoy de la découverte
faite en 1819 de cette roche, et j'invoque en
faveur de ce fait le témoignage de MM. Barre
et Dugas. » |
» Cette roche qui n’est pas seulement smarag-
difère, m'a offert les substances suivantes :
1. Emeraudes à prismes hexaëdres jaunes,
jaunes verdâtres, vertes ;
2° Tourmaline cylindroïde ;
3.0 Epidote aciculaire verte ;
4. Chaux phosphatée apatite ;
5.0 Mica argentin.
De plus, dans les terres des collines basses ,
on trouve des masses terreuses blanches qui sont
du caholin pur. »
de Lyon. 181
L'eau minérale dont notre confrère a exposé
l'analyse, coule à la Bonnette, commune de
Condrieu , dans un domaine de M. de Prunelle,
membre de la Chambre des députés. IL.a opéré
sur cinq litres un quart de cette eau qui lui
avaient été envoyés par M. le docteur Chardon,
médecin à Condrieu.
C'était au mois d'octobre ; le thermomètre
Réaumurien témoignait 11 deg. 1/4.
L’aréomètre des sels, plongé dans de l’eau
distillée, se tenait à o découvert, et dans l’eau
de la Bonnette à o couvert. Un litre et quart de
cette dernière a été soumis à divers réactifs.
1. Point de trouble ni de nuage par le nitrate
de baryte ;
2, Opacité laiteuse par l’eau de chaux;
3. Nuages blancs au bout de dix minutes par
le nitrate d'argent ; |
4. Par l'hydrocianate de potasse ferrugineux ,
sans addition de potasse, couleur bleu, qui a
pris de l'intensité par l'addition d'un acide ;
5. L'alcohol gallique a rendu le liquide violet ,
et il a donné lieu à un précipité brun noirâtre;
6. L’oxalate d'ammoniaque n’a louché la li-
queur qu’au bout de quelque temps, et la matière
en suspension a pris une teinte bleuâtre ;
7. Ce n’est qu'après un temps plus long que
l'ammoniaque seul a troublé la liqueur ;
Analyse de
l'eau minérale
de la Bonnette;
par le méme.
182 Sociélé royale d'Agriculture
8. L'acide oxalique a produit cet effet sur-le-
champ et d'une manière très-prononcée ;
9- Rien par la solution du sous - carbonate
d'ammoniaque ; |
10. Liqueur laiteuse par le phosphate desoude.
11. Même effet par l'addition de l'ammoniaque
à ce sel.
12. Même effet par de l’eau de baryte.
De ces essais, l’auteur conclut déjà que l'eau
de la Bonnette contient de l’oxide de fer, de la
chaux, saturés avec excès par l’acide carbonique.
I! s'agissait de déterminer la proportion de ces
principes: on a , pour cela , soumis quatre litres
d'eau de la Bonnette à diverses épreuves, telles
que la distillation , l'évaporation. On a exa-
miné avec soin les résidus obtenus, et indépen-
damment des oxides de fer et de calcium, on a
rencontré une matière solide, inattaquable par
les acides hydrochlorique, sulfurique, nitrique,
oxalique. Cette matière , essayée au chalumeau
avec de la soude, s'est changée en verre, ce qui
annonce suffisamment sa nature siliceuse. L’au-
teur se demande si cette silice est en dissolution
ou en suspension dans une eau qu’on voit
sourdre d'un terrain granitique.
Quoi qu'il en soit, voici les résultats de cette
analyse :
de Lyon. 183
Quatre litres d'eau de la Bonnette ont donné
Acide carbonique , 9 gr. 42 cent.
Oxide de fer , 2 gr.
Carbonate de chaux , 14 gr.
Silicium (matière insoluble), 2 gr.
Ce qui donne pour un litre de cette eau ; en-
viron le huitième d'un litre acide carbonique en
volume ; et en poids environ 2 gr. 1/3; oxide
de fer, 1/2 gr.; carbonate de chaux, 3 gr. 1/2;
matière insoluble, 1/2 gr.
C’est pour payer un tribut à l’histoire natu-
relle , que M. Grognier a retracé les titres de
gloire de deux grands naturalistes nés dans nos
murs. Tout en jugeant sans doute que ces deux
hommes célèbres étaient dignes d’un tout autre
panégyriste, vous avez écouté leur éloge avec
intérêt et consenti à ce qu'il fût inséré dans le
recueil de vos actes.
Notre province, dont la flore présente aux
amateurs de plantes tant de richesses , a été le
théâtre des travaux et de la gloire de plusieurs
botanistes du premier ordre , tels que Jean
Bauhin , Daleschamps , Latourette , Gilibert et
Goiflon.
Ce dernier fut le maître , le protecteur et
l'ami d'Antoine de Jussieu, qui lui-même à son
tour ouvrit la carrière à ses frères Bernard et
Joseph.
Notice sur
Antoine et sur
Joseph de Jus-
sieu; par M,
Grognier,
184 Sociélé royale d'Agriculture
Le digne neveu de ces trois grands natura-
listes est aujourd'hui le nestor dés savans de
VEurope. D'autres exposeront ses titres au sou-
venir de la postérité (1). C'est le portrait d’A7-
toine et celui de Joseph que je me propose de
crayonner aujourd’hui ; puisse cette esquisse
porter l'empreinte de cette touchante simplicité
qui est héréditaire dans la famille célèbre dont
je vais m'occuper !
Antoine de Jussieu naquit à Lyon en 1686,
comme Tournefort, il se destina, dans sa jeu-
nesse, à l’état ecclésiastique. Sa santé s'étant
altérée par l'excès du travail, son médecin fut
le savant et modeste Goiffon , qui , pour faire
diversion aux études trop sévères de son jeune
malade , lui prêta les ouvrages de Tournefort.
À cette lecture le génie d'Antoine s'enflamme
et sa vocation est décidée. À peine convales-
cent, il suit son médecin le long des deux fleuves
qui baignent notre cité, il gravit sur ses pas
les cotaux qui la couronnent. Bientôt il a re-
couvré ses: forces et la plénitude de la santé :
alors au lieu de rentrer dans une école de théo-
logie , il se rendit à Montpellier ; il y étudia
la médecine, surtout la botanique , sous pes:
Hi Rare Magnol.
(1) L’éloge de Bernard a été lu dans une de vos séances,
etinséré dans le comple rendu de vos trayaux pour 1917.
de Lyon. 185
En 1767, étant âgé de vingt-un ans, il re-
çoit le bonnet de docteur, et le voilà parcou=
rant les provinces méridionales de la France,
les bords de la Méditerranée, les îles d'Hyères ,
Ja vallée de Nice , les Alpes Savoisiennes, il re-
vient dans sa ville natale pour exposer aux re-
gards charmés de son premier maître , les ri-
ches trésors qu’il a recueillis. Celui-ci lui re-
met deux lettres, l’une pour Tournefort, l'autre
pour Fagon, premier médecin du Roi. Le jeune
botaniste part pour la capitale , il vole au jardin
du Roi, et il n’y arrive que pour assister aux
funérailles de Tournefort.
Quelques jours auparavant , Tournefort sor-
tant d’une des séances de l'académie, avait été
heurté, dans la rue St-Victor , par le timon
d'une voiture, et il mourut des suites de ce
coup violent.
Antoine de Jussieu n'était venu à Paris que
pour entendre et suivre un professeur dont il
avait tant admiré les ouvrages ; ne pouvant
jouir de cet avantage, il se hâta de quitter la
capitale pour aller herboriser dans la Bretagne,
dans la Normandie et principalement sur les
côtes de l'Océan.
Au retour de ces voyages il se souvint de
l'accueil bienveillant que le premier médecin du
Roi lui avait fait, à la recommandation de
Goiffon.
186 Société royale d'Agriculture
Le premier médecin avait l’intendance géné-
rale du jardin des plantes, il était zélateur de
la botanique, il voulut voir toutes les collec-
tions du jeune botaniste Lyonnais, et à la suite
d'un long entretien sur la science des végétaux,
il lui dit en lui serrant la main : Mon jeune
ami, je vous nomme professeur du jardin du Roi.
Antoine de Jussieu était à peine âgé de vingt-
quatre ans lorsqu’il s’assit sur la chaire de Tour-
nefort. Il ne tarda pas d'entrer dans la faculté
de médecine et à l'académie des sciences.
Jaloux d'enrichir de végétaux étrangers l'éta-
. blissement confié à ses soins , le nouveau pro-
fesseur fit avec l'agrément du Roi un voyage
en Espagne et en Portugal. Son frère Bernard,
alors âgé de dix-sept ans , l'accompagna dans
cette expédition savante, et celui-ci prit dès-lors
la résolution de se dévouer entièrement à une
science dont il devait reculer au loin les bornes.
Dans ce voyage qui dura à peine une année,
Antoine de Jussieu recueillit non-seulement une
immense quantité de végétaux ; mais encore
plusieurs autres objets d'histoire naturelle qui,
déposés au jardin du Roi, ont commencé ce
cabinet qui , sous la plume de Buffon , est de-
venu si célebre,.
Parmi les plantes introduites par Antoine de
. Jussieu au jardin royal, il en est une dont la
de Lyon. }TE87
propagation est une grande époque dans lhis-
toire du commerce. Ce fut en 1719, que ce
professeur remit au chevalier Desclieur ; en-
seigne de vaisseau, un pied de larbuste qui
produit le café ; et ce pied unique , transporté
dans les Antilles, a donné naissance à tous les
cafayers de cette partie du monde.
On sait que le chevalier Desclieux était tel-
lement convaincu de l'importance du dépôt
qu'Antoine de Jussieu lui avait confié, que pen-
dant la traversée il arrosait l'arbuste délicat
avec une partie de l’eau dont se composait sa
ration.
Le café s'était introduit en France quelques
années avant que l’arbrisseau qui le fournit
eût été recueilli dans les serres du Jardin
Royal ; mais l'origine de ce produit était in-
connue , et on n'avait aucune idée des carac-
tères botaniques , du mode de végétation et de
la culture du cafayer. Ces questions importantes
furent résolues dans un mémoire qu'Antoine
de Jussieu lut à l'académie des sciences ; et
ce n’est pas le seul qu'il ait communiqué à
cette compagnie. Il a encore déposé dans ses
actes des observations sur les champignons ,
le Simarouba, le contrayerva, le cierge du
Pérou ; sur le cachou , sur la nature du gypse,
sur les pierres tombées du ciel, Pexploitation
188 … Societé royale d'Agriculture
des mines de mercure d'Amelden en Espagne,
les fossiles qu'on rencontre dans les mines de
St-Chamond; sur les mines de cuivre du Lyon-
mais , sur la tête et le pied de l'hippopotame,
la collection des peintures de plantes et d'ani-
maux déposées au muséum ; sur les causes de
Paltération de l'eau de la Seine , dans la grande
sécheresse de 1731.
Ces ouvrages scientifiques sont , sans doute,
au-dessous des connaissances actuelles , mais
serions-nous si avancés dans l'étude de la na-
ture si nos respectables devanciers ne nous
avaient , même en s’égarant quelquefois , frayé
le véritable chemin ?
La gloire de notre Tournefort en est-elle
moins brillante et moins pure parce que ses
théories et ses méthodes ont fait place à celles
de Linné et à celles d’un autre Jussieu ? Et
celles-ci, qui font tant d'honneur aux génies
qui les ont créées, auront-elles une destinée
différente ?
Au reste, quelles que soient les révolutions
de la science, les grands ouvrages , tant de
Linné que de Tournefort resteront comme des
monumens de l'esprit humain , et les éditeurs
de ces livres fondamentaux seront eux-mêmes
considérés comme ayant bien mérité des
sciences.
de Lyon. 189
Aoiié de Jussieu à , sous ce rapport , un
titre de plus à notre reconnaissance, nous lui
devons une édition des /nstitutiones rei herbariæ
de Tournefort, avec la vie de l'auteur, et un
supplément à sa préface ( Lyon, 1719). Il avait
rédigé précédemment l'ouvrage du Père Barelier,
sous le titre de Plantæ per Galliam ; Hispaniam
et J{aliam observate.
Il avait commencé la rédaction de son voyage
en Espagne et conçu le projet de beaucoup
d'autres ouvrages plus importans que ses mé-
moires académiques ; mais il était médecin,
et la confiance du public le déroba à ses oc-
cupations littéraires.
Sa pratique dans la capitale fut heureuse et
brillante. Il l’exerça chez les grands , et il par-
vint à la fortune.
: Sans cette circonstance c’en était fait peut-être
du jardin royal. Le respectable Fagon n'était
plus, l'intendance de l'établissement était tombée
dans les mains de Chirac, médecin du Roi, et
esprit bizarre et despotique, plein de mépris
pour la botanique dont il ne possédait pas les
premiers élémens. L'organisation de l'établisse-
ment fut bouleversée ; les correspondances fu-
rent entravées , les cultures négligées , les fonds
détournés sans reddition de compte : c'était sous
la régence.
190 Sociélé royale d Agriculture ;
Antoine et Bernard de Jussieu n’abandonnèrent
point un établissement menacé d'une dissolution
prochaine , et qui, au moment actuel , est l’un
des plus beaux monumens de l'univers. Antoine
suppléa de son or aux moyens de subsister
qu'on refusait au jardin royal : engrais; instru-
mens de culture, travaux d'ouvriers, il paya
tout avec une rare générosité. En même temps
voyageaient à ses frais de jeunes botanistes char-
gés de recueillir des graines et des plantes vi-
vañtes pour enrichir le jardin royal.
C'était là qu'il habitait, et l'un de ses appar-
temens se remplissait tous les jours au lever de
l'aurore de pauvres malades auxquels il distri-
buait, avec ses ordonnances , les moyens pé-
cuniaires de les faire exécuter et d'en assurer le
succès.
Ce naturaliste, ce médecin si généreux , si
philantrope, cessa de vivre le 22 avril 17958,
étant âgé de 72 ans , et après avoir rempli pen-
dant 49 ans la chaire de professeur de botanique
au jardin du Roi. Il eut pour successeur et pour
héritier son frère Bernard.
Au moment où Antoine de Jussieu descendait
au tombeau, Joseph , un autre de ses frères
parcouraïit les Cordilières, cherchant au milieu
des déserts , des volcans et des précipices, quel-
de Lyon. 101
ques végétaux utiles ou agréables qui fussent
inconnus à sa patrie.
Joseph de Jussieu était né à Lyon en 1704.
Après avoir fait quelques études de médecine,
il s'adonna tout entier aux mathématiques, et
voulutentrer dans la carrière des ponts et chaus-
sées. 11 se rendit à Paris où il reprit ses études
de’ médecine, qu’il suspendit encore pour se
livrer avec enthousiasme à la botanique.
Ses deux frères, Antoine et Bernard, enseig-
naient alors avec éclat cette science au jardin du
Roi. 11 se méla à la jeunesse studieuse que la
renommée des deux professeurs attirait de toutes
les contrées de l'Europe.
En 1734, il reçut le bonnet de docteur.
L’année suivante , il fut adjoint en qualité de
botaniste à La Condamine et aux autres acadé-
miciens envoyés par le Roi pour mesurer un
degré du méridien sous Péquateur.
L'expédition savante relâcha à la Martinique
et à St. Domingue. Joseph de Jussieu explora
ces deux îles. Il y découvrit un grand nombre
de végétaux dont il enrichit le jardin du Roi.
Arrivé sur le continent américain , il traversa
l'isthme de Panama, s’embarqua pour Guayaquil
d’où il se rendit par terre à Quito où devaient
commencer les.opérations astronomiques.
Les, mathématiciens chargés de les exécuter
192 Société royale d'Agriculture
ne furent pas peu étonnés de trouver un utile
coopérateur dans un botaniste. |
C'est en travaillant de concert avec les géo-
mètres de l'académie à une opération qui exigea
sept ans de travaux difficiles et pénibles, que
Joseph! de Jussieu se trouva au milieu de ces
vastes forêts des Cordilières, dans la profondeur
. desquelles la nature avait caché le quinquina.
Cette substance héroïque avait été, depuis quel-
ques années , introduite en Europe sous le nom
de poudre des Jésuites ; mais on ne connaissait pas
l'arbre qui la fournit. C’est à Joseph de Jussieu
que nous devons les premières notions précises
sur un végétal si précieux. Il distingua nettement
plusieurs espèces de quinquina, en désignant
celles qui donnent l'écorce la plus efficace.
Cependant les astronomes de l'académie ayant
terminé leur mission , rétournèrent en Europe.
Mais il restait encore à l'intrépide compagnon de
leurs travaux des montagnes à gravir, des pré-
cipices à franchir , des solitudes à traverser; ils
ne l'oublièrent point dans le rapport qu’ils pré-
sentèrent à l'académie des sciences , et son nom
fut inscrit. à côté de ceux de ses frères sur la
liste de cette illustre compagnie. |
Le voyageur savant s'engagea dans des pays
sauvages , inhabités , il pénétra dans ces lieux
où , selon l'expression de Buffon , on ne rencontre
de Lyon. 193
aucuns vestiges de l’homme ,et où la nature , accou-
lumée au plus profond silence , semble s’élonner de
s'entendre interroger pour la première fois. K]
atteignit des sommités où, même sous la ligne,
la rigueur du froid avait étoufté toute végétation ,
et il osa s'approcher de ces vastes brasiers dont
les flammes s’échappent par torrens au-dessus
des glaces éternelles.
Après avoir parcouru dans tous les sens les
Alpes péruviennes, il se dirigea vers les côtes
de la mer pour envoyer en Europe une partie
de ses richesses botaniques. Parmi les plantes
dont il fit présent au vieux continent , je citerai
cette plante suave connue sous le nom d'Hélio-
trope du Pérou.
Quelle serait notre indigence si nous étions
réduits aux seuls végétaux que la nature a semés
dans les contrées que nous habitons! Originaires
d'un pays inconnu, les céréales nous furent
apportées à une époque dont l’histoire a perdu
le souvenir. L'empereur Probus envoya la vigne
aux Gaulois ; Lucullus leur avait précédemment
donné le cerisier ; lungues années après on vit
arriver en France le pêcher et d'autres arbres
de la même famille. Le müûrier vint du midi de
l'Europe , sous le bon Henri. Le botaniste
V'Écluse fit connaître à la France la pomme de
terre ; l'ambassadeur Nicot envoya du Brésil la
13
194 Société royale d'Agricullure
plante qui fournit le tabac ; un autre agent di-
plomatique nous donna le maïs ; le jardinier
Robin nous donna l'acacia ; Commerson intro-
duisit cette plante magnifique qu'il consacra à
Hortense Lepeautre. |
Combien d’autres végétaux étrangers peuplent
nos forêts , enrichissent nos vergers , embellissent
nos jardins , sans que nous connaissions le nom
de ceux qui les ont apportés d’un autre hémis-
phère ! Tout retentit du nom de ceux qui ra-
vagent la terre, on oublie facilement ceux qui
nous enseignent à embellir et à féconder son
sein.
Au reste, notre Jussieu, pendant le long
séjour qu’il fit en Amériqué, ne borna pas ses
travaux à la botanique, il visita encore plusieurs
mines d'argent , il décrivit les procédés em-
ployés dans leur exploitation , il proposa à
Padministration coloniale des perfectionnemens
qui furent adoptés. Devenu en quelque sorte ci-
toyen du Potosi, il paya à sa patrie adoptive le
tribut de ses talens et de ses connaissances. On
le vit lever des plans , tracer des cartes, ouvrir
des grands chemins, construire des ponts, eten
même temps répandre le secours de Part salu-
taire. Tant de services lui méritèrent un monu-
ment qui fut élevé aux dépens du public dans
la capitale du Potosi, c'était une pyramide por-
de Lyon. 195
tant sur son piédestal une inscription destinée
à transmettre à la postérité la reconnaissance des
Péruviens envers un Lyonnais leur bienfaiteur.
Qu'est devenu ce monument ? aura-t-il résisté
aux intrigues d'une foule d'hommes jaloux et
pervers que fatiguait depuis long-temps la gloire
d'un étranger ? ils parvinrent à le calomnier
auprès du gouvernement espagnol ; il fut abreuvé
d'amertumes , sa santé en souffrit profondément,
et il quitta le Pérou au milieu des regrets et
des larmes d’une population entière.
Il se retrouva à Paris en 1771 , après trente-
six ans d'absence ; sa santé s’était fortifiée pen-
dant le voyage; mais sa tête s'était perdue , sa
mémoire effacée , son imagination éteinte , le
fil de ses idées s'était brisé pour toujours ; il ne
lui restait de lui-même que l'air doux et cares-
sant avec lequel il recevait les tendres soins que
des frères généreux prodiguaient à son triste sort.
Un bruit affreux a couru, qui n’a été ni con-
firmé , ni démenti. Les envieux de Joseph de
Jussieu furent accusés de lui avoir donné un de
ces poisons qui, lorsqu'ils ne causent pas la
mort, impriment une altération incurable et
profonde à l'organe central de la vie.
L'enfance sénile de Joseph de Jussieu se pro-
longea pendant neuf ans, et il s’éteignit le
11 avril 1779.
196 Sociélé royalè d'Agriculture
ARTS UTILES.
En mettant en œuvre les produits de la terre,
l'industrie en centuple quelquefois la valeur.
Mais ses succès sont bien moins importans , et
ils peuvent être fortement compromis lorsqu'elle
est obligée de demander à l'étranger la matière
première de ses opérations. Telle est la nécessité
où elle se trouve en France relativement au
coton. Si elle l’'éprouve encore à l'égard de la soie
et de la laine, n'est-ce pas l'effet de l’imperfection
de notre agriculture ? Donnons-nous à l’entre-
tien et à la propagation des races précieuses de
moutons tout le soin que réclame cette branche
de notre économie rurale? Ne sont-elles pas sus-
ceptibles d'être étendues dans nos campagnes,
et la culture du mûrier et l'éducation du ver à
soie?
C’est sur cette dernière amélioration que vous
dirigez depuis plusieurs années vos efforts les
plus constans , et vous avez eu, Messieurs, la
satisfaction de voir que ce n’était pas sans succès.
Mais quelque beaux que soient les résultats que
vous avez obtenus en ce genre, vous êtes loin
de croire que votre mission soit remplie.
C’est principalement lorsque la rivalité de
l'Angleterre devient menaçante pour la brillante
de Lyon. 197
industrie de Lyon, que vous avez senti de plus
en plus combien il vous importe vivement d'ap-
peler l'attention de l'administration et de l’agro-
nomie sur les moyens d'augmenter le plus
possible la production de la plus belle soie.
L'un de nos concitoyens, actuellement établi
à Paris, M. Camille Beauvais est entré dans
vos vues, il vous a soumis un important mé-
moire sur ce sujet, et vous avez voulu qu’un
long extrait en fût inséré dans le recueil de vos
actes.
Un très-habile manufacturier lyonnais , dont
les produits ont honorablement figuré à l'expo-
sition européenne du Louvre , un Français qu'a-
nime la plus noble ardeur pour la gloire et la
prospérité nationale , M. Camille Beauvais, vient
de déposer dans une brochure de quelques pages
des considérations d’un haut intérêt : elles sont
relatives aux dangers qui menacent l'industrie
de la France, et celle de Lyon en particulier.
C'est surtout le développement des fabriques de
soierie, de celle de lainage, chez nos éternels
rivaux , qui lui paraît mériter l'attention la plus
sérieuse. Il fait observer, avec inquiétude , que
l'Angleterre dont les fabriques desoierie n’avaient
guère fourni jusqu'ici qu'à la consommation
locale, prétend, même dans ce genre d'industrie,
Essai sur quel-
ques branches
de l'industrie
francaise ; par
M. Beauvais.
Extrait par.
M. Grognier.
198 Société royale d'Agriculture
entrer en concurrence avec nous sur les marchés
où nous sommes les maîtres depuis des siècles ,
et cette concurrence paraît redoutable à l'auteur
par deux raisons : d'abord , la fabrication sera
en Angleterre activée par la force des machines
à vapeur ; ensuite elle y sera soutenue par une
grande puissance de richesse nationale et de
crédit public.
Il s'est assuré, d'après des calculs et des do-
cumens précis, que , sur mille métiers à la
Jacquard (car ces métiers ont déjà traversé la
mer), mus par la vapeur, déjà la façon d'une
aune d'étoffe se trouve réduite à 40 centimes, et
cela quoiqu'on tienne compte des frais d'établis-
sement et de ceux d'administration : cependant
le même tissu coûte à Lyon , dans ce moment,
sans y comprendre les frais d'administration ,
x fr. 20 à r fr. 25. Que sera ce si, comme on a
lieu de le craindre, cette énorme différence
s'accroît encore ?
Non contens de favoriser puissamment la fa-
brication des étofies de soie, les Anglais appel-
lent dans leurs vastes domaines la production et
la préparation de la matière première de ces fa-
briques : témoins les bills d'encouragement pro-
digués depuis six ans aux cultivateurs de mû-
riers et aux filateurs du Bengale (1). Tel a été
(1) Il est yrai que cette soie sera toujours inférieure à la
nôtre,
de Lyon. 199
le résultat de cette politique que, d’après les
renseignemens de l’auteur, puisés sur les lieux
il n'existait en 1814 que douze mille métiers de
soierie dans les trois royaumes réunis; tandis
que les Anglais affirment qu'ils en possèdent au-
jourd'hui plus de trente mille : les seules fabri-
ques de Cowentry, qui ne fournissaient à cette
époque que pour quinze à dix-huit millions de
rubans , en produisent aujourd'hui pour plus
de quarante millions. Et quelle doit être la
production en ce genre de la Grande-Bretagne
entière ?
Le contrôleur général Huskinston rassembla
au commencement de l'année dernière les prin-
- cipaux manufacturiers de soierie , et leur tint ce
langage :
« Nous avons au Bengale un sol immense
» couvert de müriers ; nos filatures se sont per-
» fectionnées ; nos manufactures produisent déjà
» pour deux cent cinquante millions de francs ,
mais il faut que ces produits soient doublés d'ici à
» quelques années , et qu'ils rivalisent ceux de
5 France dans tous les marchés. Vous réclamez
» depuis long-temps l’abolition des droits sur la
» soie : cette faveur vous sera accordée en partie
» cette année, mais l'abolition entière n'aura
» lieu que lorsque l’ouvraison de cette matière
» se sera perfectionnée , et que /e métier Jacquard
ÿ
200 Société royale d'Agriculture
» aura été mis en rapport avec la machine à
» vapeur.»
Cette promesse n'a pas été vaine: les droits
énormes qui pesaient Sur les soies grèges pro-
venant du Bengale et du midi de Europe ont
été abolis l'année dernière, et le montant de
ces droits régulièrement remboursé aux posses-
seurs de ces matières.
Si les soies ouvrées de Piémont et d'Italie
payent encore un droit assez fort, c'est parce
que, lors de la présentation de la loi, les mou-
liniers anglais n'étaient pas en état de fournir
au commerce des fils aussi parfaits que ceux qui
viennent du continent ; mais ce droit ne tardera
pas à être aboli. Que l'on ajoute la ressource
des capitaux que les entreprises industrielles ne
réclament, en Angleterre , jamais en vain , les
mesures du gouvernement de ce pays, pour que
le taux commercial de l'argent ne s’élève jamais
au-dessus de 3 p. °/, sa sollicitude constante
pour ménager les débouchés des produits manu-
facturés , et l'on ne s'étonnera plus du déve-
loppement des manufactures de soierie chez nos
éternels rivaux ; on verra sans surprise de vastes
établissemens de ce genre s’élever à Manchester ,
dont l’industrie n'avait jusqu'ici rien de commun
avec la fabrication des étofles de soie,
Ce n'est pas seulement en Angleterre qu'une
de Lyon. 201
concurrence dangereuse menace l’industrie lyon-
naise.
Dans le court espace de huit ans, dit auteur,
il s'est monté plus de dix mille métiers d’étofles
de soie à Zurich ; le nord de l'Italie favorisé par
la fertilité de son sol, fortement protégé par son
gouvernement , développe et perfectionne une
industrie que nous lui avions ravie. Les bords
du Rhin ajoutent à leurs anciennes manufac-
tures des établissemens où les étofles de Lyon
sont imitées.
Un pareil état de choses inquiète M. Camille
Beauvais , et il n’est pas rassuré par la prospé-
rité actuelle des fabriques de Lyon , de St-
Etienne, de St-Chamond, de Nîmes et d’Avi-
gnon; c’est aux troubles d'Espagne , c’est-à-dire,
à une circonstance passagère, qu'il attribue
l'activité des fabriques lyonnaises ; elles sup-
pléent , dit-il, pour la consommation des Amé-
riques espagnoles , les métiers brisés de Valence,
Grenade, Barcelonne, Séville, Malaga , et il ne
croit pas éxagérer en disant que le commerce
de ces Amériques occupe, au moment actuel,
à Lyon, huit mille métiers.
Mais les Anglais nous menacent dans les mar-
chés des Hispano-Américains.
« Mieux informés que nous sur les Dés
» de ces peuples ( c’est l’auteur qui parle} , pro-
202 Société royale d'Agriculture
» tégés par leur marine, aïdés de grands capi-
» taux, ils sont prêts à s'emparer de riches co-
» Jonies dont la séparation entière de la métro-
» pole tournera exclusivement alors à l'avantage
» du commerce anglais et au détriment des ma-
» nufactures française et espagnole. Au reste,
» la protection du gouvernement anglais envers
» les nouveaux états américains ressemblera
» à celle qu’il accorde au Portugal , où nos rela-
» tions commerciales sont tellement anéanties
» que je ne crois pas que , depuis six ans, il se
» soit montré à Lisbonne un seul voyageur qui
» ait osé présenter des échantillons de soierie
» française. »
Cette politique profonde, l'Angleterre la suit
avec une imperturbable persévérance. L’Angle-
terre, dit l’auteur, ne combat plus pour la
conquête de telle ou telle portion de terre, pour
l'occupation de tel ou tel point maritime, mais
pour l'avantage de fournir à des millions d’indi-
vidus étrangers à ses lois les objets nécessaires
à leur consommation. Après avoir favorisé de
sa toute-puissance la création ou l'importation
de la matière première, cette politique en se-
conde la mise en œuvre , et elle place erisuite
les manufactures dans l'heureuse position de fa-
briquer sans attendre la consommation , parce
qu’elle se charge en quelque sorte elle - même
.de Lyon. 203
d'ouvrir des débouchés exclusifs , de disposer des
marchés privilégiés.
Après avoir signalé les dangers qui menacent
l'industrie de la France, et particulièrement
celle de Lyon , M. Camille Beauvais indique quel-
ques moyens de les conjurer. Il n'exclut de cette
culture que les provinces du nord, et en suppo-
sant que la récolte du mürier n’est pas aussi
productive dans nos provinces tempérées que
dans le midi , il soutient qu'elle y offrirait tou-
jours un avantage immense sur les produits ordi-
naires. I] voudrait que le conseil général de
commerce, qui déjà inspire à l'industrie de si
grandes espérances , veillât à ce que les instruc-
tions sur la culture de cet arbre et l'éducation
du ver à soie fussent répandues partout, que
des primes d'encouragement, et même des dis-
tinctions honorables fussent accordées à ceux
qui auraient imprimé dans leur canton un mou-
vement salutaire à cette double culture ; que
toutes les grandes routes fussent plantées de
mûriers. Avant dix ans, ajoute-t-il , la France
récolterait assez de soie pour alimenter ses
fabriques.
Songeons que la très-grande partie de la France
est propre à l'éducation de l’insecte précieux.
Après avoir fait connaître les perfectionne-
mens que ce genre d'industrie a obtenus, l’au-
204 Société royale d Agriculture
teur ajoute : & Leurs résultats sont tels que,
» tandis que, dans le siècle dernier, sur cent
» éducations, trente donnaient à peine une
» réussite satisfaisante ; aujourd’hui, sur le
» même nombre , il n’y en a pas vingt qui ne
» dédommagent amplement l’éducateur de ses
» peines, et encore lorsqu'il ne réussit pas , il
» ne doit en accuser que son manque de soins
» et son inexpérience. »
Ces considérations conduisent l’auteur à payer
un tribut d'estime à M. Matthieu Bonafous, dont
les savans mémoires n’ont pas peu contribué à
la propagation des bonnes doctrines. Il désire
vivement que partout on élève de préférence la
race à soie blanche ; il trace l'historique de l’in-
troduction en France d’une race si précieuse : ce
qui le conduit naturellement à parler de M.
Poidebard.
« La soie de M. Poidebard, dit-il, est d’un
» blanc bien plus pur que celle de la Chine,
» dont elle est originaire ; elle est supérieure à
» celle de Gênes et du Piémont , au-dessus de
» celle de Bourg-Argental , de Roquemaure et
» des Cevennes. Déjà, en 1814, la société
» d'encouragement de Lyon, frappée de la beauté
» de cette matière , nomma une commission
» pour examiner la soie blanche dont il s'agit :
» celte commission, dont je fus rapporteur,
de Lyon. 205
» conclut à l’unanimité que la chambre de
» commerce serait priée d'appeler l'attention du
» ministre de l’intérieur sur la soie blanche de
» M. Poidebard , afin que S. Ex. voulût bien
» convertir son établissement en ferme expéri-
» mentale. »
S'occupant ensuite des filatures et des ouvrai-
sons , M. Camille Beauvais pouvait-il passer sous
silence M. Gensoul ? C'est à lui, dit-il , que nous
devons les perfectionnemens qui se sont opérés
dans la filature depuis la fin du siècle dernier.
Son appareil , aussi simple qu’ingénieux, rem-
plit toutes les conditions désirables : aussi a-t-il
été adopté par tous les filateurs éclairés de la
France et du Piémont. Quelque connu que soit
cet appareil, je n'en exposerai pas moins ici
les principaux avantages, en empruntant les
expressions de M. Camille Beauvais.
« Au moyen d’un seul feu et de la vapeur , le
» calorique se distribue à un nombre de bas-
» sines déterminé ; l'eau qu’elles contiennent est
» portée au degré de chaleur convenable, et sa
» chaleur est graduée avec une promptitude qui
» facilite toutes les opérations du filage. »
« La fileuse éloignée du foyer ne souffre plus
» de l’action de la chaleur produite par les four-
» neaux de l’ancienne méthode ; la tourneuse
qui n'a plus de feu à alimenter, donne tout
» son temps au travail.
206 Sociélé royale d'Agriculture
»
» La fumée , produite par les feux nus, est
entièrement supprimée par le nouvel appareil
qui joint à tous ces avantages celui de ne con-
sommer que le tiers de combustibles. Pour
terminer le tableau des améliorations , j'ajou-
terai que /a rente du cocon est plus productive,
que son brin filé à la vapeur a plus d’eclat ,
plus de netteté, plus d'élasticité, etc., etc. »
La soie récoltée, filée, ouvrée, il s’agit de
l'employer à la fabrication. C’est le triomphe de
l'mdustrie lyonnaise.
»
»
« Les produits des fabriques de Lyon, dit M.
Camille Beauvais, sont imités par les fabricans
de St-Chamond et de St-Etienne, par ceux
de Nîmes et de Rouen, et enfin par tous les
manufacturiers de toiles et de papiers peints.
Les Suisses , les Italiens , les Allemands, les
Anglais même recherchent les échantillons de
fabriques lyonnaises pour en tenter l’imitation:
on peut considérer Lyon comme la première
école industrielle de Europe. » . . ......
« Les Anglais nous sont inférieurs , 1.° sous
le rapport des prix (par les moyens ordinaires,
nous avons sur eux l'avantage de 25 à 30 p.°/0);
2.° pour la connaissance et Pemploi des matières ;
3.° pour les leintures ; 4.° pour les appréts ;
5.° enfin pour les combinaisons multipliées sè
» familières aux fabricans lyonnais.
de Lyon. 207
Mais nos éternels rivaux nous imiteront, froi-
dement à la vérité, mais ils nous imiteront
avec des machines à vapeur, des métiers de
rotation. Chacun de ces métiers produira vingt
aunes d'étoffes par jour ; le ministère protégera
de tout son pouvoir ce mouvement. Nos étoffes
fabriquées à la main seront sans doute d'une
qualité supérieure aux produits des machines ;
mais sous le rapport des prix pourront-elles sou-
tenir la concurrence ? et à l'égard du plus grand
nombre des consommateurs , le bon marché ne
passe-t il pas avant tout? Que sera-ce, si, comme
le craint M. Beauvais , on parvient à organiser
les métiers de rotation de manière à fabriquer,
par leur moyen, avec autant de perfection
qu'avec la main ?
Nous devons cpposer les mêmes armes à nos
éternels rivaux : notre gouvernement doit avoir
pour nos manufactures une sollicitude égale à
celle du gouvernement britannique pour les ma-
nufactures anglaises ; nous devons demander à
la mécanique les moyens de produire avec ra-
pidité, avec économie, pour vendre à bas prix
avec bénéfice. Il est encore d’autres moyens sur
desquels Pauteur veut garder le silence pour ne pas
donner des armes contre nous.
Si, sous ces rapports, nous arrivions , vis-à-
vis de l'Angleterre , à l'égalité, nous aurions
208 Société royale d'Agriculture
toujours l'avantage d’un sol plus fécond, de
planteurs et de filateurs plus expérimentés , de
manufacturiers plus instruits , d'une population
entière plus active et plus ingénieuse.
Tout en produisant des étoffes à bas prix pour
résister sous ce rapport à la concurrence, il nous
convient de varier, de perfectionner les articles
de goût , au point de prévenir ou de rendre im-
possible toute rivalité; et, à cet égard, l'auteur,
tout en appréciant les services éminens rendus
à l'industrie lyonnaise par M. Jacquard, est
tenté de lui reprocher d'avoir imprimé trop de
monotonie aux produits, et il regarde cette mo-
notonie comme une des causes de la rivalité qui
se prépare chez nos voisins. Si la machine de cet
homme ingénieux a été adaptée heureusement
à l’étoffe courante, son application aux tissus
pour ameublement , n’a-t-elle pas réduit les
moyens d'exécution, et par conséquent fait ré-
trograder un art dont Lassalle et Pernon avaient
tenté de reculer les bornes ? n'est-elle pas la
cause que nos damas et nos lampas ont pu être
imités jusqu’au fond de la Moscovie ?
Que les Lyonnais se livrent à ce génie inven-
tif qui les place au-dessus de tous les manufac-
turiers de l'univers. Ce qu’ils ont fait depuis
vingt ans annonce ce dont ils sont capables.
C'est dans cette période de temps que M.
.
de Lyon. 209
Gonin a découvert son rouge de cochenille, M.
Raymond, le bleu qui porte son nom ; que le
crêpe a été pour toujours enlevé au Bolonais ;
l'utile et modeste machine ronde à dévider, in-
ventée ; le coton en numéros très-élevés appliqué
à la Jacquard; le crêpe de l'Inde parfaitement
imité ; la gaze lisse mariée à la gaze métallique ;
le gauffrage des rubans porté sur des étofes de
largeur ; la fabrication des tulles perfectionnée
au point de nous livrer, pour cet article , les
marchés dont les Anglais étaient en possession ;
les draps d'or destinés aux sérails, exécutés à
moins de frais sans rien perdre de leur richesse ;
les chaînes de soie disposées à recevoir les combi-
naisons réunies du cylindre gravé et de la litho-
graphie. Enfin , à la dernière exposition, on a
vu paraître une étoffe pour stores , dont l'effet
a excité l'admiration de tous les hommes de goût.
Ainsi ce n’est pas pour les étoffes façonnées
que nous avons à craindre la rivalité anglaise ;
mais il n’en est pas de même pour les étoffes
unies, pour celles de consommation coloniale,
et c'est cette branche de notre richesse commer-
ciale qui réclame toute l'attention , toute la
protection du gouvernement.
Ne bornant pas sa sollicitude aux fabriques
de soie, M. Camille Beauvais l'a étendue à celle
des draps, et pour mettre cette branche de notre
14
Sur l'intro.
duction de la
race des mou-
tons Dislhey;
Par le méme.
210 Société royale À Agriculture
industrie à l’abri des atteintes de nos rivaux,
il recommande vivement d'introduire à tout prix
dans nos campagnes , et de propager partout une
race de moutons dont la laine fine, lisse, ner-
veuse, a jusqu’à quatorze pouces de longueur.
Cette race précieuse, qui est élevée dans toutes
les parties de la Grande-Bretagne, se nomme
indifféremment Dislhey, Newleicester ou Bake-
well. Ces deux premières dénominations rappel-
lent les lieux qui ont été les berceaux de cette
race , la troisième le nom du cultivateur fameux
qui l'a créée.
La race Disilhey se distingue par une petite
tête très-fine , des yeux beaux et brillans , des
reins droits , larges. et gras, un corps arrondi
en forme de baril, un dos petit et uni , une peau
fine, et, ce qui est la conséquence. naturelle.
d'une pareille conformation, une disposition.
marquée à l’engraissement. Telle est la docilité
de ces moutons que, quoique leur taille soit
fort élevée, une haïe de trois pieds de hauteur
suffit pour les retenir. Leur chair, grasse et
succulente , est extrêmement estimée en An-,
gleterre : ils arrivent à un état d'embonpoint ou
pour mieux dire d'obésité prodigieuse. Un Dis-
lhey de trois ans, appartenant à un fermier du
Northumberland, portait sur les côtes une bande
de graisse de sept à huit pouces d'épaisseur , il
de Lyon: six
était recouvert, sur le dos et les reins, d’une
couche adipeuse, comparable au. lard le plus
épais. Les brebis Dishley donnent pour l'ordinaire
de dix-huit à vingt-quatre livres de suif.
Dans une des solennités agricoles du duc de
Bedfort, M. Bithrey de Bedforshire , donna les
détails suivans sur un mouton Dishley de trois
ans, tué le 20 décembre 1800 , qui avait été
engraissé à l'herbe.
Poids de l'animal en vie . ... 272livres.
Viande nette ,........... 186
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Vingt livres de lanimal en vie ont donné
quatorze livres et trois-quarts de viande ou
suif (1). À
Le Dislhey dont il s’agit était sans doute un
animal extraordinaire ; mais le poids commun
des individus de cette race n'en est pas moins
très-remarquable. En effet, dit M. le baron
Mortemart.- Boisse , le poids d'une brebis Dis-
They , âgée de trois ou quatre ans, dépouillée
(1) Bibliothèque britannique, tom. 6, pag. 428. ( Part.
d'Agr.)
212 Société royale ‘d'Agriculture
de la peau , est en général de 18 à 26 livres
par quartier ; et d’un mouton de deux ans, de
20 à 30 livres par quartier (1).
Croirait-on que du temps de la reine Anne,
le poids moyen des moutons qui se vendaient
au marché de Smilhfield était de 28 livres,
celui des agneaux de 18 livres ? Quant aux
bœufs ils pesaient à cette époque 370 livres ,
les veaux 50 livres. C’est que tout le bétail an-
glais paissait alors ou cherchait à paître dans
des communaux, tandis qu’il pâture aujourd’hui
dans de bons pâturages bien clos.
C’est principalement à un fermier du comté
de Leicester , nommé Bakewell , que l'Angleterre
doit ses énormes moutons. M. Mortemart-Boissé
pense qu'il en avait tiré les souches du Holstein ,
de la Hv!lande , peut-être même de contrées plus
éloignées vers le nord (2).
Quoi qu’il en soit : ce fermier retira de ses
opérations une fortune immense, une de ces for-
tunes telles qu’on en fait souvent en Angleterre
quand, par d’heureuses découvertes sur l'agro-
nomie ou les arts industriels , on attire l’attention
publique.
En 1760, M. Bakewell vendait ses brebis à
(1) Annales de l’agriculture française, 2.e série. (f. XXVI.)
(3) Robert Bakewell est né à Dishley dans le Leicestershire
eu 1726, et il est mort eu 1795.
de Lyon: 213
raison de 2 ou 3 guinées par tête, ce qui déjà
était au-dessus du taux ordinaire de ces ani-
maux. Ses beliers furent ensuite recherchés, et
pendant plusieurs saisons il put les louer chacun
une guinée ; mais lorsque la race qu'il créait
eut acquis de la réputation, quelques-uns de
ses beliers furent loués 25 guinées pour une
saison : bientôt sa renommée s’étendit , elle de-
vint imposante , au point que quelques-uns de
ses beliers furent loués chacun à raison de 400
guinées pour une seule saison, et même l'un
d’entr'eux , nommé le Tow Pounder, lui a valu,
dans un an, 800 guinées , et il a produit en
outre des agneaux de ses propres brebis pour
400 guinées ; en sorte que la rente de ce seul
belier Dishley montait à 1200 guinées ( plus de
25000 fr. de notre monnaie. })
L'enthousiasme qu'avait excitée l'amélioration
produite par M. Bakewell lui survécut. Je lis,
en effet, dans la B'bliothèque britannique (1) ,
que l’un des continuateurs de ce fermier célèbre ,
M. Stone de Quorndon , en Leicestershire ,
ayant fait une exhibition de beliers , en les
offrant à louer pour la saison , dans l'espace de
deux heures , les N.95 suivans furent loués aux
prix ci-après :
(1) T. Il, pag. 276. ( partie agricole. }
214 Société royale d'Agriculture
N.° 10. Belier à sa première tonte, loué par
M. Duddin, pour. ...... 4001.st.
N.°x1. De même, loué par M. Coke . 500
N.° 7. De même, loué par M. d'Alby. 200
N.° 6. De même, loué par M. Trau-
mann. ...:... ds Fe de, 0300
N.0 7. Belier de deux tontes, loué
par le duc de Bedfort, avec la réserve
qu'il servira vingt brebis avant d'être
remis au prince. . « ... « «+ … o 500
N.° 9. Belier de deux tontes , loué
par M. Whinfeld .......... 300
Total de la rente des six beliers (1). 2200 g.
Ainsi en Angleterre, c'est moins dans la
munificence du gouvernement que dans len-
thousiasme patriotique des particuliers , que
trouvent de brillantes récompenses ceux qui
ouvrent de nouvelles routes à l'agriculture ou à
l'industrie manufacturière.
: Comment ce fermier Anglais, dont le nom
est immortel , parvint-il à changer l’économie
-rurale de sa patrie ? IL vit dans l'avenir la for-
mation d’une race , en mariant ensemble, dans
une longue suite de générations, des individus
qui lui ont offert des variétés dont il a senti
- l'utilité , telles, par exemple, que de petits os,
(5) Plus de 50000 fr. de notre monnaie,
de Lyon. 219
des chairs volumineuses , une conformation fa-
vorable à l'engraissement. Il a dispensé à ces
individus le régime le plus propre à renforcer
ces qualités, qui, primitivement , étaient les
résultats du hasard : il a continué cette opération
- pendant un quart de siècle , avec un soin scru-
puleux et une persévérance à toute épreuve , et
ses continuateurs ont hérité de son zèle et de
sa constance.
« Ne sait-on pas, dit l’auteur du nouveau
» traité sur la laine et sur les moutons ( pag.
» 6), que la puissance de l’homme est allée
» jusqu'à modifier, dans sa conformation même,
y le corps des animaux domestiques. Bakewell
» n'a-t-il pas diminué de moitié le poids de la
» charpente osseuse de la race des moutons qu’il
» a formée, n'a-t-il pas doublé le poids de la
» chair, et n'en a-t-il pas pétri les formés à
» son gré? » |
Ce cultivateur à jamais célèbre , n’a vu dans la
race qui est sortie de ses mains, que des ani-
maux très-précieux sous le rapport de la con-
sommation. U n'avait sans doute pas prévu que,
par un rapport physiologique difficile à expli-
quer , à mesure que les os de ces animaux dimi-
nueraient de volume et que leurs parties molles
se développeraient outre mesure, on verrait leur
laine s’allonger, s’affiner, participer , en quelque
/
216 Société royale dA'ericulture
sorte, des qualités de la soie ? Pouvait-il penser
que cette laine acquerrait la longueur de 14
pouces ? qu’elle serait propre à être travaillée au
peigne et qu’elle servirait presqu’exclusivement
à la fabrication des étofes en usage dans les cou-
vens d'Espagne, des manteaux Écossais, des
camelots, et de tous les genres d'étofles rases
qui se font en Espagne?
C’est, dit M. Camille Beauvais, à cette matière
première , dont ils sont seuls en possession, que
les Anglais doivent leur suprématie dans les
marchés de l'Espagne et de ses riches colonies,
du Portugal et de ses domaines maritimes ; ils
en font des flanelles, des tricots et d'autres tissus
que nous ne pouvons imiter avec nos laines de
mérinos , et dont l’imitation d’ailleurs n'aurait
rien d’économique.
» Les brins de cette laine , ajoute M. Camille
Beauvais , sont lisses et brillans , ils se prêtent
sans eflort à l'action du peignage (1) qui les unit
et les dispose tous dans un parallélisme égal ;
Ja filature en est plus facile et moins coûteuse.
Mise en écheveau ou prise sur la fusée, cette
matière se dévide, s’ourdit , se ploie sur l’ensou-
ple avec moins de frais et de déchet que la laine
|
(1) Dans cette opération on peut évaluer ses avantages à
plus de 50 pour ?/, sur les nôtres.
de Lyon. 217
courte, parce qu'elle est sans adhérence , élasti-
que et nerveuse. Ces caractères , qui ont rendu
toutes les préparations désignées ci-dessus plus
aisées, qui n’ont altéré le brin ni dans sa longueur
ni dans sa circonférence , servent puissamment
l'action du tissage , et c'est dans cette opération
que se développent ses avantages incontestables. »
» Filée, cette laine est rase est brillante,
employée sur une chaîne de soie , elle n’en in-
tercepte pas Péclat comme la laine courte, par
des aspérités continuelles. »
« C’est cette vérité matérielle qui rend le
bombasin anglais brillant avec peu de soie ; c’est
la même raison qui rend leurs étoffes pour gilets
plus unies et plus éclatantes que celles qui se
fabriquent en France: c'est enfin aux Longwoods
que nos rivaux doivent l'avantage de pouvoir
offrir à une infériorité de prix qui leur a livré
‘tous les marchés de draperie commune dont
nous étions en possession. »
Nos éternels rivaux sont tellement jaloux de
la race des moutons qui leur fournit une laine
si précieuse , qu'ils ont porté peine de mort con-
tre ceux qui en exporteraient un seul individu.
D'après cette prohibition barbare , on pourrait
croire qu'il n'existe pas en France un seul
mouton Dishley , ainsi le croyait M. Camille
Beauvais , cependant M. Vollaston a introduit
Lettré de M.
Terret , sur le
même sujet.
218 Société royale d'Agriculture
cette race à Vassonville , près Dieppe : un déta-
chement de son troupeau est nourri à l'école
vétérinaire d'Alfort. M. le chevalier Hindenlang »
filateur et fabricant de tissus de cachemire , a
été chargé par le gouvernement de faire des essais
de filature avec la laine de ces animaux, il l’a
filée aux N.°% 45 et 50 et il l’a reconnue propre
non-seulement aux étoffes auxquelles on l’emploie
en Angleterre , mais encore à servir de chaîne
dans la confection de nos tissus mérinos.
M. Vollaston ne peut suffire à toutes les
demandes qui lui sont faites; à sa dernière vente
le prix des beliers a été de 1200 fr., celui des
brebis de 600 f., et il sera forcé, dit-il, de
tenter uue nouvelle importation pour recom-
pléter son troupeau.
Ainsi commence à s'introduire en France une
race de moutons qui l'emporte peut-être sur
celle des mérinos ; et qui bien certainement
s'acclimaterait plus aisément dans notre dépar-
tement que ne l'a fait la race espagnole.
(Lyon , le 10 Mars 1825 ) « J'ai honneur
de vous faire part des renseignemens que j'ai
pris auprès de M. Pierre Crozier, négociant de
cette ville , sur les moutons de Leicester. Vous
:jugerez si ces renseignemens peuvent offrir quel-
que chose d'intéressant, »
RSS, LS es CR PS Se
de Lyon. 219
« M. Crozier , qui fait le commerce de com-
mission pour l'Espagne, et qui a habité plusieurs
années dans ce pays, a été à même d'apprécier
la concurrence redoutable établie par les manu-
facturiers Anglais, à égard de plusieurs branches
de l'industrie Française. Leurs tissus soie et laine
de Leicester qu’ils nomment bombasin, n’a même
pu être imité chez nous, et trouve en Espagne
une consommation énorme ; la régularité de
cette laine, qui ne feutre ni ne frise point
comme nos laines, permet à la soie qui sert de
chaîne de briller de tout son éclat, elle ne la
recouvre pas d'aspérités et de duvet. M. Crozier,
jaloux d'introduire cette industrie dans son pays,
présenta à plusieurs reprises à nos fabricans des
échantillons de cette étoffe; leurs tentatives pour
limiter furent infructueuses , ils étaient privés
de la matière nécessaire et en ignoraient même
l'existence. L'année passée M. Crozier étant à
Paris, se procura , pour répondre au vœu de
M. Beauvais, un échantillon de #ombasin. M.
de Castelbajac et plusieurs membres du conseil
des manufactures qui le virent, en admirèrent
la beauté, et exprimèrent le vœu de voir in-
troduire en France le précieux mouton qui four-
nissait cette laine. M. Beauvais et deux ou trois
autres négocians firent un fonds de 40,000 fr. ,
destiné à acheter un troupeau de moutons de
220 Sociélé royale d'Agriculture
Leicester , et cherchaïent un moyen pour assurer
leur conquête, lorsque M. de Castelbajac reçut
avis qu'un troupeau de trente moutons venait
d'arriver à un port de France ( on ne sait si
c'est Brest ou Calais ). Il communiqua cette
nouvelle à M. Beauvais et à ses associés; on
entra de suite en marché. Mais peu de jours
après leur arrivée, un petit berger anglais en
avait empoisonné la moitié, le reste assez mal
portant fut conduit en Normandie dans un
pâturage très-gras , et acheté par ces Messieurs.
Ces détails, que M. Crozier tient de M. Beauvais
lui-même , sont antérieurs à la publication de
l'ouvrage de ce dernier. Je ne sais donc pourquoi
M. Beauvais n’en fait pas mention et exprime
seulement le vœu de voir cette race introduite
en France. Ces animaux, m'a dit M. Crozier,
sont élevés en Angleterre en plein air; on ne les
ferme jamais , n'ayant à craindre aucune attaque
de loups. Il est à remarquer, dit-il, que les
bêtes à laine du nord ont le poil moins fin,
moins dense, mais plus long que ceux des pro-
vinces méridionales , dont le poil est touflu,
adhérent et frisé , ce qu'il attribue à l'influence
de la chaleur qui ouvre leurs pores, etentretient
une transpiration habituelle ( chose que j'aban-
donne à votre jugement plus éclairé que le nôtre
en ces matières ). Il pense donc que l’éducation
de Lyon. 221
de cet animal réussirait mieux dans nos plaines ,
et de préférence dans le nord que dans le midi
de la France, et il ne peut qu'applaudir à l’idée
d'introduire cette race dans le royaume, où nous
pourrons sans doute lutter avec succès contre
nos voisins, dans un produit dont la consomma-
tion est énorme.
Agréez, Monsieur, etc.
Quoique Part du boyaudier n'occupe pas une
grande place dans le tableau de l'industrie lyon-
naise, il n’est pas sans importance, et il est
susceptible d'amélioration et de développement.
Comme la théorie de cet art tient à la chimie, il
a dû exciter l'attention de M. Tissier , qui ,après
avoir bravé les émanations infectes qu'exhalent
des fabriques très - justement rangées dans la
première classe de celles à odeur insalubre, vous
a fait part des observations qu’il a recueillies
dans les boyauderies ; et d’abord il s’est étonné
de n'avoir pas trouvé parmi ces établissemens
une seule fabrique de baudruche pour le besoin
des batteurs d’or dont la profession est si mul-
tipliée à Lyon.
Dans les vues d’atténuer autant que possible
l'insalubrité des procédés du boyaudier , notre
confrère a conseillé , et non sans quelques suc-
cès, les moyens de désinfection inventés par
Notice sur
l'art du boyau-
dier, à Lyon;
par M. Tis-
sier'e
222 Société royale d'Agriculture
M. Labarraque. On sait qu'ils consistent dans
l'emploi du chlorure de chaux , et telle est l'efli-
cacité de ce moyen , qu’il rend facile et prompte
la séparation des membranes de l'intestin du
bœuf , séparation qu'on n'obtient ordinairement
que par une longue macération , accompagnée
d'une fermentation putride également incom-
mode et insalubre.
L’usage aussi efficace qu'économique du chlo-
rure de chaux n'est pas la seule amélioration re-
commandée aux boyaudiers par notreconfrère. Si
ces conseils étaient suivis, il en résulterait un
heureux développement dans un genre d’indus-
trie qui se borne, dans notre ville , à 9 établisse-
mens , encore ne sont-ils pas anciens. En eñlet,
un seul boyaudier existait à Lyon en 1770 ,
lorsque des Napolitains , fabricans de cordes à
boyaux vinrent s’y établir. Les produits fournis
par les fabriques de ce genre établies dans notre
ville, sont bien au dessous de nos besoins. Il
résulte en effet des recherches de M. Tissier , que
les villes de Moulins , Besançon , Châlons ,
Grenoble , etc. fournissent à Lyon soixante
mille boyaux secs ou soufflés , avec lesquels on
fait environ vingt mille douzaines de cordes
d'arçon. Les boyaux ont soixante pieds de lon-
gueur , et les cordes seulement quinze; elles sont
de trois grosseurs différentes ; les plus fines ont
de Lyon. 223
quatre fils, les moyennes six , les plus grosses
quatorze. Le nombre de boÿyaux frais fournis
par les bouchers de Lyon est de cent soixante
mille, ils servent à la fabrication de cordes
d'instrumens , et sont confectionnées dans huit
fabriques dont M. Tissier a évalué les produits
respectifs. Il nous apprend ensuite que chaque
paquet de cordes à instrumens est de trente,
qu'il se confectionne annuellement à Lyon soi-
xante mille paquets de chanterelles, quinze mille
de secondes, dix mille de troisièmes ; qu’il s'y
fabrique aussi dix mille paquets de cordes pour
les harpes, et six mille pour les basses et contre-
basses ; enfin, ajoute M. Tissier, les villes de
France où l'on fabrique les meilleures chante-
relles sont Nantes, Nevers, Lyon ; cette der-
nière ville en envoie dans toute la France , dans
une grande partie de l'Europe et même en
Amérique :elle s’est substituée à la ville de
Naples d'où nous venaient jadis les plus belles
chanterelles.
M. Tissier a complété sa notice statistique sur
Part du boyaudier à Lyon, en traçant l'état du
mouvement de numéraire qui en est le résultat.
Il s’est assuré que les boyaux pris à la bouche-
rie pour être confectionnés , se payent annuel-
lement 62,000 f., qu'ils sont livrés à quarante
ouvriers dont la main-d'œuvre s'élève à 30,00of.;
Usage del’é-
corce de til-
leul ; par M.
Madiot.
224 Société royale d'Agriculture
les ateliers sont au nombre de huit , et leur
location coûte 16000 f. , l'entretien de ces ateliers
et des ustensiles s’élève à 6o0o f., on est obligé
d'acheter du dehors des boyaux pour 2500of.,
total 149,000 f, ‘
Quant aux bénéfices , ils sont en chanterelles,
en paquets de seconde, de troisième, de basses,
en garnitures de basses , en cordes pour les cha-
peliers , etc. , etc., de 398,000 f.
Combien il serait à désirer que toutes les
branches de notre industrie fussent examinées
avec le même soin, et exposées avec la même
clarté, nous connaîtrions dès-lors nos ressources,
et nous saurions par quels moyens il est permis
de les agrandir (r).
Nous sommes loin de tirer parti de toutes
celles qui s'offrent à nous daus les trois règnes
de la nature. Tandis que M. Tissier calculait ce
que nous retirons d’une substance animale, M.
Madiot étudiait les avantages que nous pourrious
obtenir d'une substance végétale , l’écorce de
(2) La notice de M. Tissier sur l’art du boyaudier à Lyon
appartenant à la statistique , eût dû, ce semble, être placée
“dans le chapitre que nous avons consacré à cette partie ;
mais comme nous ne l’y avons traitée que dans ses rapports
avec l’agriculture du département, c’est au chapitre des arts
utiles que nous ayons dû comprendre le travail de M, Fissier.
de Lyon. 225
tilleul. Ayant fait couper par rondins de quatre
mètres de longueur un tronc de tilleul , ïl en
fit enlever l'écorce et la fit rouir pendant trois
mois. Après ce temps il put en séparer 114 la-
nières rubannées superposées entr’elles. Ce nom-
bre annonçait, selon M. Madiot , celui se an-
nées que l'arbre avait vécu.
Les lanières les plus voisines du bois sont les
plus fines, on s’en est servi pour fabriquer des
chapeaux, des gilets, des coffrets, des sacs à
ouvrage, de petits nécessaires d’un fort bon
usage, et on a pu donner à ces objets les cou-
leurs les plus variées : l'écorce de tilleul pre-
nant facilement toutes les teintures.
Des mariniers ont assuré à M. Madiof que
des cordes et des cables fabriqués avec cette ma-
tière duraïent plus long-temps dans l'eau que
ceux que l’on fait avec du chanvre.
Depuis vingt ans notre confrère se sert des
lanières de l'écorce de tilleul pour maintenir les
appareils des greffes. C’est selon lui le lien le
plus avantageux pour cette opération délicate.
Le Chalef, £lœagnus anguslifolius, cet arbuste
dont le port est si élégant, et dont les fleurs
exhalent pendant dix-huit à vingt jours un par-
fum si suave, a procuré à M. Madiot une li-
queur de table d’un goût agréable et bonne pour
19
Sur une li-
queur de table -
qu’on peut ob-
tenir du chalef;
par le méme.
226 Société royale d'Agricullure
l'estomac ; il conseille de la fabriquer ainsi : on
récolte au commencement de mai les fleurs de
chalefs , on les jette dans de l'eau-de-vie à la
dose d'une poignée par litre , on laisse macérer
* pendant quatre à six semaines , selon la tempé-
Sur l'huile de
pepins de rai-
sin ; par M.
Batillat , cor-
respondant,
rature , on passe ensuite à travers un tamis, et
on verse dans de nouveaux flacons, en ajoutant
par litre un quart de livre de sucre. La liqueur
prend une teinte rousseâtre, elle exhale une
odeur agréable, et déjà on peut en user; mais
elle acquiert des qualités en vieillissant, pourvu
qu'on la conserve dans des vases hermétique-
ment fermés.
Il y a quelques années que la proposition vous
fut faite d'extraire de l'huile de pepins de
raisin comme on le pratique dans le Padouan
et même en France dans les environs d'Avignon
et d'Albi, vous priâtes MM. de l’Ecluse et le
docteur Terme de se livrer à quelques essais à ce
sujet. Les résultats n'en furent pas très-satisfai-
sans, et l'huile de pepins de raisin fut oubliée.
Cependant M. Chancey ayant pensé que le dé-
faut de succès pourrait bien être dû à une ma-
nipulation imparfaite, s’est informé si ailleurs
on n’avait pas été plus heureux, il a su qu'un
chimiste agronome que vous avez nouvellement
admis parmi vos correspondans , M. Batillat, de
de Lyon. 227
Mâcon, avait fait sur le même objet une com-
munication à la société des sciences et agricul-
ture de cette ville. Il s’est empressé d'écrire à
M. Butillat , qui lui a envoyé, pour vous être
soumis , des détails précis sur l'extraction de
Phuile dont il s'agit. C'est très-brièvement que
la société de Mâcon a rendu compte de cet
objet (1). Comme vous paraissez, Messieurs, et
non Sans raison , y mettre de l'importance, je
remplirai vos intentions en insérant ici textuelle-
mént la lettre de M, Batillat à M. Chancey.
« ( 17 juin 1824.) L'année dernière, je con-
seillai à un distillateur intelligent de séparer les
pepins de ses marcs de raisin , avant de les dis-
tiller , parce que c'est à eux qu'est dû en grande
partie, le goût détestable d’empyreume des eaux-
de-vie extraites de ces marcs par les anciens
procédés, je lui fis observer que le temps donné
à ce travail serait plus que compensé par l’éco-
nomie de celui qu’il emploirait à chauffer inu-
tilement ces pepins, sans compter le com-
bustible perdu dans cette circonstance. Je lui
conseillai d'extraire de ces pepins l'huile qu'ils
contenaient (j'ignorais que la société d'agriculture
de Lyon s'était occupée du même objet), il
mn
(1) Compte rendu de la société des sciences » agriculture
et arts de Mâcon , 1823, pag. 14.
228 Société royale d’Agriculturé
suivit mon conseil, et fit cribler (au moyen d'un
crible de peau parcheminée) quatre tonneaux de
marc de raisin, dont il retira un tonneau de
pepins ; l’ouvrier , je crois, aurait pu , avec un
peu plus de soin, en retirer un tiers de plus:
cette opération a duré un jour. Je dois dire qu'il
en est résulté une diminution dans la quantité
d'alcool ; c'est sans doute parce que, pendant
le criblage, le marc s'est un peu desséché. »
» Ces pepins (on a négligé de les peser ), ont
été bien vannés et exposés quelques jours à l'air
libre, on les a portés ensuite au moulin à huile
pour être écrasés comme les autres semences
oléagineuses, après les avoir légèrement torré-
fiés dans une chaudière, on les a soumis à l'ex-
pression, et on a retiré huit kilogrammes d'huile.
Les frais d'extraction se sont montés à 65 cent.
par kilogramme. Cette huile , après quelque
temps de repos, s’est montrée limpide, d'un
jaune verdâtre , restant fluide à plusieurs degrés
au-dessous de zéro, ayant un goût particulier
( provenant peut-être en partie du moulin où elle
a été faite) qui la fera repousser de la table du
riche, mais non de celle du cultivateur qui en
consomme souvent qui lui est très - inférieure.
Rozier dit que l’huile de pepins qui n’a pas été
chauffée vaut mieux à tous égards que l'espèce
d'huile d'olive qu'on vend à Paris 15 qu 18 sous
de Lyon. 229
la livre : il y a cinquante ans qu'il tenait ce
langage. »
» L'huile de pepins brûle avec une belle
flamme , sans odeur et presque sans fumée,
surtout , selon Rozier , quand elle est vieille ; ce
qui serait étonnant, car toutes les autres se
comportent en sens inverse ; mais cela ne pro-
viendrait-il pas de ce qu’elle est longue à se dé-
purer , et que la première brülée par l’agronome
lyonnais ne l'était pas encore? On la dépure en
la faisant passer, comme je l'ai fait, à travers
des filtres de papier. Elle se saponifie parfaite-
ment : le savon que j'en ai obtenu dans le temps,
était solide et peu coloré, ayant été fait en petit;
il est actuellement ( 18 mois après sa prépa-
ration } très-jaune et moins consistant. »
« Cette huile est très-fixe ; j'en ai fait chauffer
une once , dans une capsule de verre, pendant
une heure, à une chaleur de 80 degrés Réau-
muriens , elle n’a perdu que 5 grains. »
» Le pain qui reste après l'expression est
très-volumineux. C'est un bon combustible ; une
fois en charbon, il se réduit lentement en cendres
alcalines. Ce n’est cependant pas dans l'extraction
de la potasse qu'elles contiennent que consisté |
la principale utilité de ce marc ; comme il
contient encore beaucoup de parties huileuses,
ce qui est prouvé par sa combustibilité, on
230 Société royale d'Agriculture
pourrait en former un savonule liquide par
l'addition d'une lessive alcaline de cendres décar-
bonatées par la chaux, et on s’en servirait pour
le blanchissage du linge. »
» Rozier dit qu'après avoir exprimé de ce
marc l'huile vierge , on en obtient d’une autre
qualité , en le faisant chauffer dans une chau-
dière avec un peu d'eau , et le soumettant en-
suite à une expression nouvelle; c’est une expé-
rience que je n'ai point faite ; il dit aussi que
l'huile tirée des pepins du marc qui a servi à
faire le petit vin est plus douce que l’autre. »
» Ïl sérait donc avantageux pour les cultiva-
teurs de cribler les marcs de leurs vendanges
après en avoir tiré le petit vin ; c’est une opéra-
tion qu'ils pourraient renvoyer à un moment
où les travaux de leurs vignes sont suspendus,
et ils pourraient se procurer, par ce moyen,
leur provision d'huile , tant pour l'éclairage que
pour la préparation des alimens, à 70 cent. le
kilogramme , en supposant que la journée payée
pour monder un tonneau de pepins valût 1 fr.
60 centimes. »
» J’ai dit que chaque vigneron pourrait retirer
sa provision d'huile de ses pepins. Voici mon
calcul : »
» Il reste sur le pressoir à peu près un ton-
neau de marc sur sept pièces de vin, ce qui fait
de Lyon. 231
un tonneau de pepins sur vingt-une pièces,
récolte ordinaire d’un simple vigneron ; il pour-
rait retirer de cette quantité de marc seize livres
d'huile. »
» En prenant ce calcul pour base , il en ré-
sulterait que de la masse de pepins de quinze
millions de pièces de vin qui se récoltent en
France, on retirerait environ 71,389 tonneaux
de pepins qui fourniraient 1,142,004 liv. d'huile,
qui, au prix de 75 cent. produiraient une va-
leur de 856,670 francs. »
Sur les ponts
en fil de fer;
par M. Seguin
“ainé; rappor-
teur M. Co-
chard.
232 Société royale d'Agriculture
RAPPORTS.
A l'appui de la demande qu'il avait formée
de vous appartenir, M: Seguin vous a adressé
un ouvrage de sa composition sur lequel M.
Cochard vous a fait un rapport tellement sub-
stantiel que je crois devoir le reproduire ici
textuellement :
« L'invention des ponts de fer , que les Anglais
ont voulu s'approprier, parce que les premiers
ils en ont fait usage, est cependant due à un
peintre lyonnais qui , vers le milieu du dernier
siècle , conçut le projet d'un pont de cette na-
ture, destiné à remplacer celui nommé de St-
Vincent , sur la Saône. Il eut été d'une seule ar-
che, et devait avoir 254 piedsdelong sur 18 pieds
6 pouces de large. Mais ce projet eut le sort
qu'ont en France la plupart des inventions nou-
velles , on le rejeta, il fallut l'exporter en An-
gleterre pour lui donner cours , et ce n'est
qu'après y avoir obtenu une grande faveur qu'il
a été réimporté en France et accueilli d'une
manière distinguée. Il semble que nous ne sau-
rions adopter aucune découverte utile qu’elle
n'ait préalablement reçu la sanction anglaise.
Quoi qu'il en soit, ce fut en 1793, à une.
de Lyon. 233
époque où la France était plongée dans la plus
affreuse anarchie, qu’un citoyen de Londres,
un membre du parlement (M. Burdon ) fit
exécuter à ses frais, un pont sur la rivière de
Warmouth , partie en fer forgé, partie en fer
fondu ; il avait 236 pieds de long sur 30 de
large; et ne comportait qu'une seule arche de
217 pieds d'ouverture. Le succès de cette entre-
prise a engagé le gouvernement français à éta-
blir, au retour de l'ordre, un pont aussi en
fer, dans la capitale; mais les dépenses énormes
qu'entraîne l'érection de semblables monumens
n'ont pas permis de les multiplier. »
» M. Seguin, né dans une ville qui s'honore
d’avoir produit les Montgolfier et une foule
d'autres savans, a cherché à perfectionner le
système des ponts en fer, et à rendre ce mode
de communication plus facile et moins dispen-
dieux : dans cette vue, il a imaginé de substi-
tuer aux bacs qui offrent de grands inconvéniens ,
les ponts suspendus , tels qu’on en voit dans
quelques contrées de l'Amérique : il s'est prin-
cipalement attaché à leur donner toute la solidité
convenable, et toute l'élégance dont ce genre d’ou-
vrage est susceptible, sans nuire à la navigation.
Ce n'est qu'après une suite de calculs et d’expé-
riences que M. Seguin , s’est déterminé à solliciter
du gouvernement l'autorisation de construire un
234 Société royale d'Agriculture
pont en fil de fer. Ce pont, seulement à l'usage
des piétons serait jeté sur le Rhône entre Tain
et Tournon, et servirait à la communication
des deux rives; le concessionnaire ne deman-
derait pour le remboursement de ses avances
qu’un péage extrêmement modéré, et pendant
un temps fixe. »
» VL. Seguin, que le sentiment des arts et le
besoin d’être utile à sa patrie, guide uniquement,
a voulu éclairer le public et appeler l'attention
des hommes instruits sur l'innovation heureuse
qu’il cherche à introduire. »
» Il a publié dans cette vue l'opuscule dont
nous rendons compte. »
» Après avoir énuméré les divers ponts sus-
pendus qui, dans lintervalle de quelques années
ont été confectionnés soit en Angleterre , soit en
Amérique , M. Séguin parle de l'essai qu'il a fait
de son système, en élevant pour le service de
sa maison d'Annonay , un pont qui a 55 pieds
de long sur 18 pouces de largeur ; cette cons-
truction qui est solide n'a coûté qu'environ 5of.,
et n'a exigé depuis plus d’un an aucune répara-
tion quoiqu'il ait été visité et éprouvé par plus
de vingt mille personnes. »
» Ce fait, qui seul suffirait pour donner l’idée
la plus avantageuse de la méthode de M. Seguin,
est encore confirmé par l’exemple d'un autre
de Lyon. 233
pont établi à Genève, d’après les mêmes prin-
cipes, etquia parfaitement réussi. Les détails
dans lesquels entre notre auteur sur les culées ,
sur les amarres , sur la résistance des fers, sur
la forme des planchers , sur les moyens de sus-
pension , etc. annoncent avec quelle exactitude,
quels soins, quelle sagacité il a procédé à ce
qui est relatif à ce nouvel art. »
» L'ouvrage de M. Seguin , écrit avec clarté
et précision, ne laisse rien à désirer. Nous di-
rons même que l’administration des ponts et
chaussées , après un examen approfondi, s’est
empressée d'accueillir les projets de l'auteur. Le
modèle d'un pont en fil de fer qu’il a présenté
à l'exposition publique des produits de Pindustrie
a obtenu une médaille d'honneur. Enfin, nous
avons la certitude que la demande de M. Seguin
a été admise par le gouvernement , et qu’un
pont construit d'après son système, unira Tain
et Tournon. »
» M. Seguin est encore parvenu à former une
compagnie pour établir un pont de même nature
entre S.* Colombe et Vienne. Il y a lieu de
présumer que le gouvernement favorisera un
projet qui est dans l'intérêt public ; et si, comme
tout porte à le croire ,ces deux ponts remplissent
l'objet qu'on s’est proposé, si les voitures les plus
pesantes peuvent passer facilement sur celui de
Sur une é-
chelle graduée,
inventée par
M. Chambey-
ron; méMmerap-
porteur.
236 Société royale d'Agriculture
Vienne , si la dépense qu’un pareil ouvrage oc=
casionera n'est point trop exhorbitante , et que
les droits de péage puissent la couvrir, bientôt
d'autres communications s'ouvriront sur divers
points. L'industrie , le commerce, l'agriculture
vivifiés par ces débouchés inattendus , prendront
un plus grand essor , et l’on verra se développer
des germes nombreux de prospérité publique. »
» I paraît que les ponts suspendus le sont en
Angleterre, au moyen de chaînes de fer ; ceux
que propose M. Seguin doivent l'être en fil de fer ;
les expériences auxquelles ce savant s’est livré , et
dont son ouvrage rend compte, prouvent jusqu’à
l'évidence les avantages de son innovation. »
Les conclusions du rapport de M. Cochard
ont été très-favorables à la demande de M. Seguin,
_et vous vous êtes empressé d'admettre dans votre
sein un mécanicien si recommandable.
Le génie de la mécanique , celui de la trigo-
nométrie n’éclatent pas seulement chez des per-
sonnes qui , comme M. Seguin, ont pu déve-
lopper, par une éducation libérale , les heu-
reuses dispositions qu'ils ont reçues de la nature ;
on a vu des hommes sans lettres inventer des
machines , des instrumens qui semblent sup-
poser de grandes et profondes connaissances ;
parmi ces êtres privilégiés est un jeune homme
de Lyon, 237
mwommé Chambeyron qui, né dans un village
voisin de S.® Colombe, et n’ayant reçu aucune
espèce d'instruction , montra tout-à-coup un
goût décidé pour la géométrie, il se livra presque
sans aide à l'étude de cette science, et avec tant
d'ardeur et d’opiniâtreté qu’il mérita d'être em-
ployé au cadastre, soit dans le département du
Rhône, soit dans celui de la Loire; il a fabriqué
avec précision tous les instrumens dont il se
sert, notamment une espèce d'échelle graduée
pour calculer avec facilité , rapidité , exactitude,
les polygones d'un plan géométral. M. Cochard
a mis cet instrument sous vos yeux, et il vous
en a présenté la description. C’est une glace
transparente gravée, représentant un parallélo-
gramme d’un décimètre carré, faisant à l'échelle
d’un à 2,500 mètres une superficie de 6 arpens
25 perches métriques.
Ce parallélogramme est divisé en cinq carrés
égaux , indiquant chacun 50 mètres de chaque
côté , et une surface de 25 perches carrées ; chaque
carré de 25 perches superficielles est subdivisé
en 25 petits carrés de 10 mètres de chaque côté,
valant chacun une perche carrée. Ainsi, cet
instrument offre à la fois la division en carrés
du premier ordre et en carrés du deuxième ordre;
il est construit de manière qu’un homme non
exercé et dénué de connaissances en géométrie
238 Société royale d'Agriculture
obtiendra la connaissance d'un polygone quel-
conque avec autant de précision qu'à l’aide du
compas et de l'échelle, et il pourra ainsi faire
en moins de deux heures une opération qui
exigerait par les procédés ordinaires une journée
entière. |
La manière de se servir de l'instrument est
fort simple : lorsqu'on veut calculer une des
figures d’un plan , on applique dessus le côté
gravé de l'instrument , on compte d’abord le
nombre des carrés pleins du premier ordre qui
se trouvent entièrement compris dans l’intérieur
des polygones ; ensuite , se reportant sur le con-
tour de la figure, on ajoute au premier résultat
le nombre des carrés du deuxième ordre qui se
rencontrent , et s’il reste des parties du polygone
qui n'occupent pas en entier un des petits carrés,
s'ils en prennent une plus grande ou une moindre
superficie , il est aisé, par des compensations
approximatives , de se procurer la véritable
valeur.
Plusieurs géomètres ont adopté cet instru-
ment , et il est mis en usage dans quelques en-
droits.
M. Cochard ne doute pas qu'il ne pût rem-
placer avec avantage les papiers huilés dont on
se sert dans la fabrique des étoffes de soie pour
la mise en carte des dessins.
de Lyon. 239
Le jeune Chambeyron a encore imaginé une
machine propre à casser les noix, fort ingé-
nieuse, et qui peut offrir des avantages :en
voici la description d'après M. Cochard': & Sur
»
»
quatre piliers d’environ 7o centimètres de
hauteur, et ayant 5 centimètres d'épaisseur ,
assemblés par huit traverses que lient en-
semble quatre panneaux , s'élève une caisse
destinée à recevoir les noix ; elles tombent
par une ouverture pratiquée au fond de cette
caisse , et rencontrent deux cylindres canelés,
soutenus par les panneaux. On les éloigne
ou rapproche à volonté, selon la grosseur
des noix ; ils sont mus par une manivelle
et cassent les noix, au fur et à mesure qu’elles
sortent de la caisse. Les noyaux sont reçus
dans un tiroir placé au-dessous. »
» Cette machine bien simple et peu coûteuse
procure donc le moyen de casser les noïx beau-
coup mieux et en moins de temps qu'avec le
marteau , et de les choisir plus aisément ; il
en résulte même un bénéfice de quatre pour
cent sur les produits de l'opération parce que
rien n’est perdu.
Sur une ma-
chine hydrau-
lique, présen-
téeà la Société;
rapporteur M.
Bouchard-
Jambon,
240 Société royale d'Agricullure
Un autre mécanicien , comme Chambeyron ;
étranger aux lettres, mais moins heureux que
lui, a présenté à la société une machine by-
draulique qu’il a cru nouvelle. Ce mécanicien
se nomme Benoît Miniot, de la commune des
Avenières, canton de Morestel , dép. de l'Isère.
Chargé de l’examen de cette machine conjoin-
tement avec MM. Jacquard et Muthuon , M. Bou-
chard-Jambon a reconnu qu’elle ne paraissait
pas différer de plusieurs autres inventées depuis
très-long-temps. Telle est celle décrite dans
l'ouvrage de M. Belidor , qui fut construite par
ordre du ministre Colbert , et dont l'auteur,
nommé Francini, qui en fit l'essai dans le jardin
de l'ancienne bibliothèque du Roi , en 1668 , ne
la donna pas comme une nouveauté , seulement
il en fit une application utile. M. Bouchard-
Jambon a encore trouvé la description d’une
machine semblable dans un ouvrage intitulé :
Thédtre des instrumens mathématiques de Jacques
Besson, Dauphinois , docteur mathématicien ,
Genève et Lyon, 1604. On en faisait usage pour
monter de la terre qu'on faisait charger à bras
d'hommes des fossés des fortifications, pour la
transporter sur le sommet ou derrière les rem-
parts.
L'ouvrage de M. Grolier de Serrières ,imprimé
en 1741, donne aussi la description d'une ma-
de Lyon. 243
chine hydraulique placée sur un courant d'eau ,
qui étant construite d'après le même principe
que celle de M. Miniot, donne des résultats
semblables.
Plusieurs membres de la société ont vu dans
le midi de la France des machines à godet et à
chaîne à la Vaucansen, qui sont employées à
l'arrosage des prairies, et dont le principe de
construction est semblable à celui de la machine
de M. Miniot.
Au reste , quels que soient les avantages de
ces machines, M. Bouchard-Jambon pense qu'ils
sont au-dessous de ceux qu’on obtient des pompes
perfectionnées. Quant à M. Winiot , il a, selon
M. le rapporteur, le mérite d'avoir parfaitement
exécuté une machine déjà connue. On peut
ajouter que ce mécanicien, manquant d'érudi-
tion, a pu n'avoir aucune connaissance des
machines citées par M. le rapporteur , et dès-
lors il se serait rencontré avec leurs inventeurs
plutôt qu'il ne les aurait imités. Dans tous les
cas, la société voulant donner un témoignage
d'estime à M. Miniot, lui a accordé un jeton
d'argent.
Vous avez décerné , Messieurs, une autré
récompense à M. Georges , fabricant de tricots
en soie. Ses titres à cette distinction vous ont été
exposés par M. Gensoul, au nom d’une com-
16
Sur un métier
de M. Georges
fabricant d’é-
toffes de soie;
rapporteur M,
Gensouls
Sur les eaux
minérales arti-
ficielles fabri-
quées par M.
Laville Dela-
plaïgue;
Rapporteur
M, Fauché.
242 Société royale d’Agricullure
mission dont les autres membres étaient MM.
Jacquard, Cochard et Grognier.
M. le rapporteur n'a pas cru devoir détailler
les différentes pièces qui composent lingénieux
métier de M. Georges, il s'est contenté de dire
qu'il est très-simple , d'un entretien facile et
qu'il accélère beaucoup le travail. M. Georges a
fabriqué en présence de la commission ; des tri-
cots imitant la dentelle, d'un riche dessin, et
d’un très-bon goût ; il lui a montré des robes,
des voiles, des schalls de la plus grande élégance,
et dont l'exécution a paru parfaite. La célérité
avec laquelle il fabrique tous ces articles lui
permet de les livrer au commerce à un prix
modique , et fait espérer que l’on en fera une
grande consommation. C’est par de semblables
succès que nous pourrons triompher de la riva-
lité anglaise qui menace l'industrie de la France,
et plus particulièrement celle de Lyon.
La commission a conclu à ce qu'une grande
médaille d'argent fût accordée à M. Georges, et
cette proposition a été unanimement adoptée.
Üne invention d’un tout autre genre vous a
été signalée par M. le chevalier Fauché: celle de
plusieurs machines et appareils heureusement
imaginés par M. le docteur Zaville Delaplaigne
pour la fabrication des eaux minérales et l'ad-
ministration des douches et des bains miné-
de Lyon. 243
raux artificiels, objet pour lesquels ce médecin
a obtenu un brevet d'invention et de perfec-
tionnement. Sans attendre que le délai de ce
brevet füt expiré, l'auteur a consigné ses pro-
-cédés et leurs résultats dans un mémoire dont
il vous a fait hommage, Chargé de vous en
rendre compte, M. Fauché ne s'est pas contenté
de lire attentivement l’ouvrage, il s’est encore
rendu dans l'établissement qui y est décrit, et
il s’est assuré , par ses yeux, de l'exactitude ri-
goureuse de tous les faits avancés.
« Cet établissement, dit M. le rapporteur,
est conçu sur un plan très-vaste ; on y fabrique
des eaux minérales à prendre en boissons, on
y donne des bains et des douches; on y admi-
nistre des bains fumigatoires. »
» En sa qualité de médecin , M. ZLaville
Delaplaïigne peut diriger l'emploi des moyens
thétapeutiques de sa création , il possède en outre
des connaissances en mécanique , et il en fait
de nombreuses applications dans l'atelier qu'il a
formé. Il emploie à la fabrication des eaux fac-
tices potables, dés machines françaises douées
d’une force de compression telle qu'elles peuvent
imprégner l’eau de 24 fois son volume de gaz
acide carbonique, 22 fois de gaz oxigène, et
dans une pareille proportion de tous les autres
fluides aériformes , suivant leur degré de com-
’
244 Société royale d'Agriculture
pressibilité et de leur affinité pour l'eau. Cette
force est à la machine de M. Paul , regardée
comme extraordinaire à l’époque de sa publica-
cation , comme 4 est à 1 & 4:1.»
» Ces eaux étant fabriquées , l'auteur adapte
au récipient ordinaire un nouveau récipient dont
la surface intérieure est revêtue en platine de
manière à former un appareil qui réunit les
moyens de la machine pneumatique aux efforts
de la presse hydraulique. Cet appareil est disposé
de manière à remplir et à boucher en même temps
les bouteilles à livrer au public, sans perte d’eau
ni de gaz, et sans danger pour l'opérateur quand
bien même les bouteilles viendraient à se briser, »
» Pour composer les eaux destinées aux bains
ou douches, au lieu d'ajouter à l'eau d’une bai-
gnoire les sels ou autres substances à dissoudre,
il a en réserve des dissolutions de chaque sel; il
les mélange , au moment d’en faire usage , dans
un réservoir plein d'eau commune élevée à la
température ordinaire du bain à prendre ; etau
moyen d’une ramification de son appareil com-
pressif il y fait passer le gaz que l’eau minérale
doit contenir. Elle est conduite presqu’en même
temps au moyen de tuyaux à robinet dans des
baignoires assez bien closes pour empêcher que des
vapeurs en s’exhalant des bains n'incommodent
les malades. Si c'est en douches que l’eau mi-
de Lyon. 245
nérale est prescrite, on l'élève par une pompe
foulante au faîte de la maison , d'où elle descend
sur le corps soumis à son action , avec plus ou |
moins de force , suivant qu’on la livre à son poids
paturel, ou que l’on en modifie le cours au moyen
de soupapes, et encore suivant la forme de la pièce
amovible qui termine le conduit ; on se procure
une douche en filet , en colonne, en conque, en
arrosoir, ou même sous forme d'injection pour
l'oreille, l'œil, l’urètre, lutérus, l'anus, etc.
M. Delaplaigne a aussi construit des bains de
vapeurs ; il croit avoir apporté d'importantes
améliorations dans la manière de chauffer sa
caisse fumigatoire , considérant comme dange-
reux et ayant donné lieu à des accidens graves
les appareils à la Darcet. Je dois toutefois à la
vérité, d'affirmer que dans une pratique de plu-
sieurs années avec ces derniers appareils, je n’ai
observé aucun des graves accidens qu'il si-
gnale , quoique les malades se soient trouvés
dans un état d’excitation contre lequel M. Dela-
plaïigne veut qu'on se prémunisse. Bien mieux,
j'étais porté à penser , et je crois avec l’auteur
de l'article Bains de vapeurs , au dictionnaire des
sciences médicales, que cette excitation était elle-
même un des bons effets de la médication par
les vapeurs, puisque ce n’est point parce que la
œaisse est placée au-dessus d'une plaque de fer
246 Société royale d'Agriculture
échauflée qu'elle a lieu, mais par la seule élé-
vation de la température. Or , n’est-ce pas là une
des conditions essentielles de ce genre de médi-
cation ? Quoiqu'il en soit , si par les moyens
ingénieux que M. Delaplaigne a imaginés pour
établir ses appareils fumigatoires , il a conservé
les avantages reconnus des appareils de M. Dar-
cet, il aura produit un effet très-heureux sur
l'esprit de la plupart des malades, des femmes
surtout, lesquelles manifestent assez souvent
des inquiétudes, quoique sans fondement , en
entrant dans une caisse faite de bois , placée au-
dessus d’un fourneau qui est allumé. »
« Enfin, on peut prendre chez M. Delaplai-
gne des bains à la manière des Russes. On sait
que dans ces sortes de bains le malade passe
graduellement d'une température très-chaude à
une température très- froide, et ces divers degrés
de température, M. Delaplaigne sait les détermi-
ner el y soumettre ses malades par des moyens
ingénieux, »
Les procédés de ce médecin sont donc dignes
des suffrages de la société, et le mémoire dans
lequel ils sonit- décrits doit être honorablement
mentionné : telles sont les conclusions de M. le
rapporteur ; elles sont accueillies à l’unanimité.
de Lyon. 247
Un autre rapport , mais d'un intérêt plus gé-
néral , a été présenté par M. le comte de Moi-
dière. W avait pour objet le procédé que propose
: M. le comte Dejean, directeur général des vivres
de l'armée, pour la conservation illimitée des
grains et farines.
Le but de ce procédé est, comme on le sait,
de mettre en réserve pour les années de disette la
surabondance de récoltes qu’ofirent les années
fertiles. 11 est à remarquer que c'est précisément
quand les graines céréales sont le plus abon-
dantes, que leurs qualités sont les meilleures
et leur conservation la plus facile. Les altéra-
tions qu’elles peuvent subir tiennent à l'alterna-
tion du chaud, du froïd, de la sécheresse , de
l'humidité, C’est afin de les dérober à cette in-
fluence que l'on inventa autrefois ces espèces de
souterrains exactement bétonnés, que les Arabes
out nommés silos, et dont on s'est ressouvenu
après la disette de 1816.
Aux silos des Arabes, M. Dejean veut qu'on
substitue des cylindres en plomb , pouvant con-
tenir chacun 80 hectolitres de blé. Les motifs
de la préférence qu'il donne à ces cylindres se
fondent sur plusieurs expériences dont les résul-
tats sont judicieusement appréciés par M. de
Moidière ; mais une question s'est présentée à
Vesprit de M. le rapporteur : c’est celle de l'éco-
Procédé pro-
posé par M. le
comte Dejean,
pour la con-
servation des
grains et fa-
rines ;
Rapporteur
M. Ofhon-de-
Moidière.
548 Société royale d'Agriculture
nomie ; et à cet égard il s’est livré à des calculs
qui n'ont pas été défavorables au système de
M. Dejean. En effet, les silos construits à Phô-
pital St-Louis à titre d'expérience , ont, à raison
de leurs dimensions, occasioné une dépense qu’on
peut évaluer à 9f. 6oc. pour l'appareil occupé
par chaque hectolitre de blé, tandis que les cy-
lindres de plomb présenteront une économie de
3£. 20 c. pour chaque capacité d'hectolitre ; mais
une soumission toute nouvelle, présentée au mi-
nistre de l'intérieur , a pour objet la construction
des silos ordinaires , avec une économie qui ne
laisserait aux vaisseaux métalliques de M. Dejean
qu'une diminution de 67 centimes par hectolitre
de blé, et ce bénéfice n'est-il pas balancé, pour
ne rien dire de plus, par la nature des fosses en
pierre et en béton, lesquelles n'éprouveront
aucune altération , aucun déchet, tandis que , du
propre aveu de M. Dejean , ces silos métalli-
ques ont, au bout de quatre ans, perdu de leur
poids 200 kilo. sur 1600 ?
Dans tous les cas, les silos métalliques ou
non sont des établissemens dignes de la haute
sollicitude du gouvernement , mais qui ne sau-
raient offrir à de simples particuliers des objets
de spéculation, C’est par cette réflexion que
M. de Moidière a terminé un rapport qui n'a
pas été entendu sans intérêt.
de Lyon. 249
Parmi les rapports que vous devez à M. Fais-
solles , il en est un -qui intéresse l'industrie
lyonnaise : il a pour objet des brevets d’inven-
tion accordés à des fabricans de notre ville. On
sait que les procédés spécifiés dans ces sortes de
brevets sont, après un certain temps , rendus
publics, et que leur description détaillée cons-
titue un ouvrage périodique imprimé par les
ordres du gouvernement, C’est dans le volume
de ce recueil publié pour 1823, que M. Faissolles
a recueilli les titres de quelques fabricans lyon-
nais à l'estime et à la reconnaissance de leurs
concitoyens.
Les uns , tels que MM. Jolivet et Cochet ont
amélioré la fabrication du tricot à doubles mailles
fixes , et ils ont obtenu cet important résultat
en disposant d'une manière ingénieuse les ai-
guilles, tant dans la première que dans la se-
conde fonture.
M. Janin fabrique des tulles et autres tricots
à jour, au moyen d’un mécanisme de son in-
vention, dans lequel se trouve changée la forme
de ce qu'on appelle la #ayomnette et les pointes.
MM. Dutillieu et Théoleyre sont parvenus à
imiter avec de la soie la laine d'agneau d’As-
tracan ; ils en ont fait des peluches , et, pour
en faire friser le poil , ils ont imaginé un lami-
noir à deux rouleaux ; lun en métal, l'autre
Description
desmachinesét
procédés spé
cifiés dans les
brevets d’in-
vention ;
Rapporteur
M. Faissolles.
Progrès de la
distillation ;
Même rap-
porteur.
250 Sociélé royale d'Agricullure
en bois. Le premier s'échaufle äu moyen de
barres de fer rouges que l'on introduit dans le
centre ; ces deux rouleaux sont cannelés et en-
grenés l’un avec l’autre. La manipulation de cet
instrument est aussi sûre que facile.
Le briquet pneumatique s'est perfectionné
dans les mains de M. Dubois. On n’ignore pas que
c'est à de savans Lyonnais(r) que l'on doit l'in-
vention d’un instrument qui a reculé les bornes
de la physique.
Un autre rapport de M. Faissolles a pour objet
un genre d'industrie pratiqué principalement
dans le midi de la France: c'est la distillation
des vins. Les Arabes inventèrent ce procédé dans
le dixième siècle , et il n’a fait jusqu’à nos jours
presqu'aucun progrès. Après avoir montré
toutes les imperfections de l’ancien procédé,
M. Faissolles décrit l'appareil distillatoire de M.
Edouard Adam ; il lui reconnaît trois avantages :
le premier, de chauffer le vin sans aucune dé-
pense ; le second, de dispenser de renouveler
l'eau du serpentin ; le troisième, d'obtenir cons-
tamment de l’alcohol froid , en évitant toute
déperdition. M. Bérard ajouta à la cucurbite un
cylindre creux, disposé de manière à séparer com-
plètement les vapeurs alcoholiques des vapeurs
aqueusés , et à porter sur-le-champ l'alcohol à
RON... 8 OP LENS 8 UT eee où 1 Nr RUN
(1) MM. Eynard et Mollet,
de Lyon. 45,251
38 degrés. D’autres artistes , MM. Cellier , Blu-
mental, les frères Argant, le comte Chaptal,
Chassery , surtout M. Solimani , perfectionnèrent
successivement les appareils distillatoires. D’a-
près la méthode de ce dernier , il sufht d’une
seule opération pour retirer d'une quantité de
vin donnée , autant et plus d'alcohol que par les
procédés ordinaires. L'appareil de M. Solimani
est trop connu pour qu'il soit nécessaire d'insérer
ici la description qu’en donne M. Faissolies.
En rendant compte d’un mémoire sur l'agri-
culture d’un canton de l'Auvergne, adressé par
M. Devèze de Chabriol , notre confrère fait
observer que plusieurs des principes établis par
ce minéralogiste agronome, peuvent s'adapter
à l’agriculture du Lyonnais : c’est ainsi que les
deux axiomes qui suivent sont applicables à
toutes les localités.
1.0 La terre est formée des débris de la roche
qui lui sert de base, et sur laquelle elle repose,
plus d’une quantité d'humus qui varie suivant
la naiure da sol.
2. Un terrain ne doit être considéré , rela-
tivement à la végétation , que comme la matrice
dans laquelle sont déposées les semences des vé-
gétaux qui doivent y prendre leur accroissement,
et dans laquelle sont placés les principes nutri-
üfs dont elles ont besoin.
Mémoire sur
les terres cul.
tivées dansPar-
rondissement
de St-Flour ,
par M. Devèze
de Chabriol ;
Même rap-
porteur.
252 Société royale d'Agriculture
Sans rien fournir de leur propre substance à
la nutrition des plantes, les terres sont réputées
plus ou moins fertiles, selon leur faculté d'ab-
sorber l'humidité, la ténacité qu’elles peuvent
contracter , l'adhésion que leurs élémens peuvent
avoir entr’eux, et leur facilité à se laisser en-
traïner par les eaux.
M. Devèze divise les terres en cinq ordres : le
premier comprend les granitiques ; le deuxième ,
les schisteuses ; le troisième , les argileuses et
terres d'alluvion ; le quatrième , les volcaniques ;
le cinquième , les tourbières. Chacun de ces
ordres se divise en espèces, que M. Devèze dé-
termine avec sagacité. Les considérant sous le
rapport de la fertilité, il donne la préférence
aux volcaniques , regrettant toutefois qu’elles
soient en général dans une situation trop élevée.
De toutes les terres, celles à base granitique lui
paraissent les plus mauvaises, et pour établir
ces faits, il se livre à des calculs dont les ré-
sultats s’appliquent principalement à l’arrondis-
sement de St-Flour où le calcaire est fort rare, ce
qui explique son silence sur les terres où ce prin-
cipe domine. Quoi qu'il en soit , on doit désirer
qu’un travail analogue à celui de M. de Chabriol
soit exécuté sur tous les points du royaume,
il en résulterait pour la statistique générale
de notre France les plus précieux documens.
de Lyon. 253
Que de produits agricoles nous importons que
nous pourrions créer | Et, pour n’en citer qu’un
exemple , n'est-ce point par notre incurie
que nous sommes tributaires de la Suisse, de
la Hollande, de l'Italie pour une grande quan-
tité de fromage que nous consommons ? C'est
ce qu'a prouvé M. Huzard fils, notre correspon-
dant, dans un mémoire qu'il vous a adressé,
et dont M. Deschamps vous a donné l'analyse,
L'objet de cet ouvrage est la fabrication du fro-
mage de Lodezan, connu sous le nom de Par-
mesan. Ses qualités précieuses dépendent tout à
la fois et de sa fabrication et du régime auquel
ron soumet les vaches qui en fournissent les
élémens. De toutes les manipulations auxquelles
on se livre pour la fabrication du Parmesan, la
plus remarquable est une double cuisson, la
seconde ayant lieu après le pressurage et la
séparation du serum de la matière caseuse. La
température y est élevée jusques à 40 ou 45 de-
grés réaumuriens.
On est bien convaincu dans plusieurs contrées
de la France, notamment en Auvergne, des
avantages de la cuisson pour la fabrication du
fromage ; mais on ne l'emploie pas à cause de
la dépense en combustible qu’elle causerait.
Toutes les autres manipulations pratiquées dans
les chalets du Lodezan sont faciles partout, et
Notice sur la
fabrication du
fromage de
Parmesan, par
M. Huzard fils;
Rapporteur
M.Deschamps.
254 Société royale d Agriculture
la double cuisson pourrait avoir lieu dans les
pays où le combustible est à bas prix. On pour-
rait, en plusieurs contrées de la France , faire du
Parmesan, comme on fait du Gruyère et autres
fromages suisses dans la Franche-Comté et le
Dauphiné , du Hollande dans le Calvados , etc.
Ce n'est pas tout d'employer, dans la fabrica-
tion des fromages, des manipulations bien en-
tendues : il faut encore avoir de bon lait et en
grande abondance. C'est dans cette vue que les
fromagers du Lodezan nourrissent leurs vaches
au vert pendant neuf à dix mois de l'année, [ls
en obtiennent les moyens par des irrigations et
des fumures bien combinées.
Nous ne pourrions pas ,en France, soumettre
partout les vaches à ce régime; mais il nous
serait facile de nourrir ces animaux à la manière
des Anglais dont le ciel est beaucoup moins
favorable que le nôtre : ils donnent toute l’année
à leur bétail, même à leurs chevaux , un mé-
lange de fourrage vert et de fourrage sec ; ils
en obtiennent les moyens à l’aide de l'immense
quantité de racines et de tubercules qu'ils cul-
tivent pour les provisions d'hiver. C'est par ce
régime que leurs animaux évitent les effets sou-
vent si fâcheux d'une subite transition de la
nourriture sèche à la nourriture verte, et que
leurs vaches donnent, presqu’en tout temps,
une grande abondance d’excellent lait.
de Lyon. 255
Telle est la notice intéressante que vous a
adressée M. Huzard fils.
Un autre de vos correspondans , M. Bonafous
à qui vous devez tant de précieuses communi-
cations, vous a envoyé un mémoire écrit en
italien, sur un semoir très-simple, et M. Billon
vous a fait connaître cet instrument ; il en a
mis un modèle sous vos yeux; il y a ajouté
une boîte de fer-blanc , avec quatre changemens
pour pouvoir semer des grains de quatre gros-
seurs différentes.
« L'usage ( j'emprunte les expressions de M.
Billon) en est très-facile. En eflet, tandis qué
le laboureur ouvre avec un araire , une raie de
la profondeur qu'il juge convenable, une autre
personne suit avec le semoir à la main, et le
secoue légèrement à chaque pas dans le sens de
Ja raie ; il distribue ainsi avec régularité la se-
mence que la raie suivante recouvre , et ainsi de.
suite. On peut, de cette manière, semer des
grains en alignement et à la distance convenable
pour leur donner ensuite une léoère culture
avec le même araire qui a servi à les semer, et
se dispenser par ce moyen du travail long et
dispendieux de les semer à la main. »
» M. Bonafous a voulu s'assurer , par une
expérience positive , de l’économie produite par
l'usage de ce semoir. »
Sur un se-
moir présenté
par M. Bona.
fous ;
Rapporteur
M, Billon.
Observation s
sur la machine
Christian , à
tiller le chan-
vre , par M
Pidancet ; ù
Rapporteur
M. Leroy-Joli-
mont.
256 Société royale d'Agriculture
» Le 17 octobre 1821 , il a semé à ‘la main
trois livres deux onces de froment sur un terrain
déterminé, et dans un autre terrain de même
étendue , il a semé avec son semoir seulement
une livre et huit onces du même grain. La ré-
colte fut faite le 30 juin 1822. Le grain semé à
la main à produit seize livres et demie, et l’autre
dix-sept livres. Ainsi on a obtenu, à l’aide du
semoir , plus de grains, en employant la moitié
moins de semence. »
Il est une autre machine qui a attiré plus for-
tement l'attention des agriculteurs , c’est celle
que M. Christian a imaginée pour suppléer le
rouissage du chanvre et du lin. Comme elle n'a
pas répondu à l'attente qu’elle avait fait naître,
plusieurs mécaniciens ont cherché à en corriger
les imperfections, et, parmi ces artistes , s’est
distingué M. Pidancet , régisseur de la terre de
l'Ecluse, qui vous a soumis sur cet objet un
mémoire accompagné de dessins.
Les changemens proposés par M. Pidancet à
la machine Christian, vous ont été exposés
comme il suit par M. Zeroy-Jolimont (x).
« M. Pidancet augmente de plus d'un tiers le
ns PRE pires Cl L if 261 HN PURES
(1) On suppose qne la machine Christian , qui a été décrite
et gravée dans une foule de journaux et de brochures agro-
zomiques , est suffisamment connue du lecteur,
de Lyon. 257
diamètre du gros cylindre cannelé , afin de
mettre la grandeur de sa circonférence plus en
harmonie avec la longueur du chanvre qu'on est
dans le cas de tiller. »
» Il résulte plusieurs avantages d'un pareil
changement : :
» 1°, Les deux extrémités de la filasse du
chanvre, à moins qu'elle ne soit très-grande,
ne pourront plus, comme auparavant se réunir et
se croiser sur le cylindre, ce qui prolongeait sou-
vent Popération , et gâtait toujours la filasse ; ».
2.° En donnant un plus grand diamètre aux
gros cylindres, on laisse entre les petits un plus
grand espace vide, on peut en augmenter le
nombre, et accélérer ainsi l'ouvrage. Comme
cette augmentation ne sera que de deux cylindres,
il restera toujours un espace vide suffisant pour
pouvoir établir en avant de la machine une es-
pèce de support ou de trémie qui serve à rece-
voir le chanvreet à le diriger entre les cylindres. »
» Cette disposition, qui manque à la machine
Christian, est nécessaire pour préserver l’ou-
vrier qui fournit le chanvre à la machine , du
danger d’avoir les doigts pris entre les cylindres,
accident dont M. Pidancet a été témoin plusieurs
fois. »
Dans la vue de disposer la trémie d'une ma-
nière plus commode et plus avantageuse, il a
17
258 Société royale d'Agriculture
pensé qu'il convenait de placer le cylindfe qui
porte la manivelle et le volant , dans le haut de
la machine, au lieu de le laisser de côté , comme
il se trouve dans la machine Christian , il a cru
qu’il était convenable que ce cylindre qui sert
d’engrenage ne fût cannelé que dans ses extré-
mités. C'est ainsi qu’il favorise l'entrée du chan-
vre entre les cylindres travailleurs, et rend plus
facile le jeu de la machine. »
» M. Pidancet pense encore que les petits
cylindres qui tillent le chanvre doivent tous
être en fonte, parce que ceux même en bois
dur se dégradent assez promptement ; ce qui
nuit au service de la machine. »
» Îlest facile de voir que lorsqu'on aura fait
subir à la machine Christian les changemens
dont on vient de parler, il faudra une plus
grande force pour entretenir son mouvement.
M. Pidancet qui a prévu ce résultat a cherché à
l'annuler , soit en augmentant l'effet du volant
dont il allonge les bras en augmentant son poids
dans toute sa circonférence , soit en changeant
l’engrenage de la machine , ce qu'il exécute en
donnant un plus grand diamètre aux pignons
placés aux extrémités du cylindre qui, d'un côté,
portent la manivelle, et de l’autre le volant. »
» On doit se rappeler que M. Pidancet a fait
observer que ce cylindre ne devait pas être can-
de Lyon. 259
nelé dans toute sa longueur. Une pareille dispo-
sition serait vicieuse , car elle augmenterait la
résistance de la machine et diminuerait son effet. »
» Cependant on trouve cette disposition dans
la figure 1. qui est à la suite de l'instruction
que M. Christian a donnée de sa machine. »
» M. Pidancet dispose les coulisseaux dans
lesquels jouent les tourillons des petits cylindres
de manière à ce qu'ils puissent rentrer en place
si les cordes qui pressent sur eux viennent à se
casser. Et afin que leur pression soit continuel-
lement la même et toujours celle qu'on aura
jugée nécessaire pour l'effet dont on aura besoin ,
il remplace par des poids les ressorts qui tendent
les cordes. »
» Cet avantage est plus grand qu'il ne paraît
au premier coup-d’œil , l'expérience a appris en
effet à M. Pidancet que lorsque la machine tra-
vaille , il faut tendre les cordes au moins toutes
les trois heures , ce qui non-seulement retarde
l'opération , mais encore entraîne quelquefois la
rupture des ressorts, et souvent celle des cordes
à cause de la forte tension qu'on est obligé de
leur donner. »
» Je crois devoir faire observer que si le sys-
tème de la machine à tiller le chanvre et le lin
était horizontal au lieu d'être circulaire, il en
résulterait qu’on obtiendrait plus facilement et
260 Société royale d'Agriculture
plus complètement les différens avantages dont
il a eté parlé. v
» D'ailleurs la machine en deviendrait moins
coûteuse, objet très-important quand il s’agit
d'instrumens d’agriculture. »
» À la suite de ses observations, M. Pidancet
expose combien il serait économique de faire
usage d’un courant d’eau pour mettre en mou-
vement cette machine, et il entre dans beau-
coup de détails sur les avantages que, pour cet
effet, on pourrait retirer d’un moulin ; et afin
de rendre plus intelligibles ses idées , il a ajouté
à son mémoire plusieurs figures explicatives. »
» On ne peut, sous plusieurs rapports,
qu’applaudir aux corrections que M. Pidancel a
apportées à la machine Christian , elles contri-
buent certainement à en améliorer l'usage ; mais
malheureusement plusieurs de ces changemens
ont pour effet d'en augmenter le prix qui, déjà
est trop élevé, pour qu’elle puisse devenir com-
mune dans les campagnes. »
» IÎlest certainement peu de personnes versées
dans les principes de la mécanique qui, ayant
vu travailler la machine Christian , n’en aient
reconnu la plupart des défauts et des imperfec-
tions ; mais en général on a pensé qu’au lieu de
chercher à les corriger , il valait mieux changer
le système de la machine et tâcher de la rendre
de Lyon. 261
plus simple, moins coûteuse et d'un meilleur
effet ; parce qu'ainsi que nous l'avons déjà dit,
une machine destinée aux travaux de Pagricul-
ture doit, autant que possible , réunir tous ces
avantages. »
» Les travaux de notre collègue, M. Eynard,
sur ce sujet, nous promettent les plus heureux
résultats, »
Si M. ZLeroy-Jolimont a donné de justes éloges Mémoire sut
au mémoire de M. Pidancet sur la machine à FROM “
tiller le chanvre, M. Remond n'a pas été si fa- sur la distilla-
vorable à un mémoire anonyme présenté à la tion ; rappor-
société sur la méthode de faire le vin et la dis- Ph 3
tillation , en 1819.
L'auteur voudrait qu’on introduisit dans le
Beaujolais les bans des vendanges, tels qu'on
les pratique en Franche-Comté. M. le rappor-
teur est d'un avis tout différent , et il trouve
très-préférable l’usage suivi dans nos contrées.
Les propriétaires sont réunis au son de la cloche
sur la place publique; et c’est après avoir re-
cueilli léurs avis que le conseil municipal , pré-
sidé par le maire, fixe l'ouverture des vendan-
ges. L'arrêté qu'on a pris est affiché , et une
amende est portée contre ceux qui devanceraient
le jour déterminé.
L'auteur du mémoire est partisan du dégra-
Mémoire sur
l’opjet et la di-
Vision des tra-
vaux de la so-
ciété d’agricul.
ture de Mont-
brison , par M.
de Poncins.
262 Société royale d'Agriculture
page; mais il propose pour cette opération des
procédés nouveaux , qui paraissent à M. le rap-
porteur moins simples, moins expéditifs que
ceux que nous connaissons ; celui-ci porte le
même jugement sur d'autres idées de l’auteur,
relatives au pressurage des vins et à la distilla-
tion des gènes; et en dernière analyse, il ne
trouve à louer dans le mémoire soumis à son
examen que le zèle et les bonnes intentions de
l'auteur. »
M. Remond vous a présenté un rapport plus
satisfaisant sur un ouvrage que vous a adressé
M. Montaigne de Poncins , votre correspondant
à St-Cyr, département de la Loire. C'est un
discours aussi bien écrit que bien pensé, par
lequel fut inaugurée, le 24 février 1823, la
société d'agriculture séante à Montbrison. L'au-
teur jette un coup-d'œil rapide sur l’agriculture
de l'arrondissement de cette ville, il en signale
les imperfections, il indique les nombreuses
améliorations dont elle est susceptible ; il trace
l'ordre des travaux à suivre dans la nouvelle so-
ciété pour amener ces améliorations. Plusieurs
des vues de M. de Poncins peuvent s’appliquer
au département du Rhône; quelques - unes à
celui de l'Ain où plusieurs d'entre vous pos-
sèdent des propriétés analogues à celles qui sont
de Lyon: 263
la ressource de la plaine du Forez. Sous ce
double rapport , l'ouvrage de M. de Poncins a dû
vous intéresser. Comme il est imprimé , et par
conséquent suffisamment connu du public, M.
le rapporteur n'a pas cru devoir en présenter
une analyse , il a demandé qu'il soit établi entre
votre société et celle qui vient de se former à
Montbrison, des relations intimes qui ne pour-
raient que tourner au profit de l'agriculture des
deux pays.
C'est pareillement sur un ouvrage imprimé
que M. le docteur Zrolliet vous a présenté un
rapport que vous avez entendu avec un vifin-
térêt , mais dont l'analyse ne doit pas occuper
une grande place dans la notice de vos travaux.
Ce rapport avait pour objet les mémoires pu-
bliés en 1823 par la société centrale d’agricul-
ture et des arts du département de Seine et Oise.
Parmi ces mémoires, il en est un que M. Trolliet
a jugé digne d'un long extrait , c'est celui de M.
Feburier sur la nutrition des plantes et la coupe
prématurée des blés. Les résultats obtenus par ce
physiologiste agronome , sont différens de ceux
qu’avait annoncés M. Matthieu de Dombasles , il
s’agissait de déterminer le degré d’épuisement du
sol avant et après la fécondation des plantes. Le
mémoire de M. Matthieu de Dombasles sur cet
objet fut envoyé à l'an de vos concours , et mérita
Mémoires de
la Societé cen-
trale de Seine
et Oise , pu-
bliés en 1825;
rapporteur M.
Trolliet,
Mémoires
de zoologie ,
présentés par
M. Desmarets;
rapporteur M,
Trolliet.
264 Société royale d'Agriculiure
à son auteur une médaille d'argent. Quoique ce
travail vous fût connu par un rapport lumineux
de M. Balbis , vous n'en avez pas moins écouté
avec beaucoup d'intérêt ce que vous en a dit M.
Trolliet ; ce dernier s'est particulièrement attaché
à signaler les rapports de la physiologie végétale
avec l'agriculture - pratique; il a expliqué. ainsi
pourquoi l’enfouissement de certaines plantes à
l'époque de la floraison équivaut à une demi-
fumure, tandis qu'il faut une fumure complète»
lorsque la récolte a été faite après la matura-
tion. Il a développé ainsi l'influence des feuilles
Sur la végétation et sur la composition du sol,
celle des semis et du mode de récolter , il a com-
paré les expériences de M. de Dombasles avec
celles de M. Feburier , il a montré que ces au-
teurs ne s’accordaient pas davantage sur les ré-
sultats de la coupe prématurée des blés; mais
qu’ils étaient du même sentiment sur les avan-
tages de cette méthode qui est adoptée depuis
plusieurs années par des cultivateurs des depar-
temens du nord.
C'est encore sur des mémoires imprimés et
par conséquent suffisamment connus du public,
que M. Foudras vous a présenté un lumineux
rapport. Ces ouvrages vous avaient été adressés
par M. Anthelme-Gaetan Desmarets , professeur
de zoologie à l’école de médecine vétérinaire de
de Lyon. 265
Lyon, à l'appui d'une demande d'association.
L'un d'eux traite du genre de mammifères masu-
piaux qu’on a nommés Kanguroo ; l’autre, d'un
genre de rongeurs que l’auteur a constitué sous
le nom de Capromys : ces deux monographies
qui ont été insérées dans plusieurs recueils,
offrent ce qu'il y a de plus complet sur l'histoire
de ces deux animaux étrangers ; mais c’est princi-
palement dans la description du second que M.
Anthelme-Gaetan Desmarets s’est montré zoolo-
giste profond. Au reste, comme lobserve M. le
rapporteur, M. Desmarets a d’autres titres aux
.suffrages de la société : il a écrit l’histoire des
. Tangaras , des Manaquins et des Todiers , il a
déposé dans l'encyclopédie méthodique une partie
de celle des mammifères, et il a publié à part
ce travail en deux volumes in-4.°, sous le titre
de mammologie. Il a inséré divers mémoires
dans le bulletin des sciences et dans le journal
des mines, il est enfin lPun des collaborateurs
du savant journal de M. Ferrussac.
M. Desmarets s'occupe encore de minéralogie,
et il vous a adressé sur cette partie de Phistoire
naturelle divers opuscules imprimés, dont M.
T'issier vous a fait sentir tout le mérite dans un
rapport verbal. |
Aussi, Messieurs, vous êtes-vous empressés
d'admettre M. Anthelme-Gaetan Desmarets au
nombre de vos correspondans,
266 Société royale æ Agriculture
OUVRAGES IMPRIMÉS
OFFERTS À LA SOCIÉTÉ.
1.° Lettre de M. Zacoste de Plaisance, près
de Toulouse, professeur des sciences phy-
siques , aux amis des sciences du Puy de
Dôme. Clermont-Ferrand , 1823. (in-8. 26p.)
2.9 Dictionnaire des eaux et forêts, formant
la première livraison de la 2.° partie du traité
général des eaux et forêts, chasses et pêches,
publié par M. Beaudrillart.
3,9 Note sur les chèvres de Cachemire, impor-
tées en France, par M. Grognier , 1823. (in-8.
4 pages. )
4° Specienze intorno all uso del seminatijo
fatto del signor Matteo Bonafous, direttore
dell’ orto agrario di Torino et lettura fatta
nelli adunanza della reale societa agraria di
Torino , il 24 g.bre 1822. Milano, 1823 ,(in-8.
fig. , 8 pag.)
5.0 Procès-verbal de la séance de distribution
des prix à l’école royale vétérinaire d’Alfort,
tenue le 25 novembre 1822. ( in-8. 103 pag.)
6° Rapports sur les concours pour des mé-
moires de médecine vétérinaire, présentés à la
société royale et centrale ME DA , dans
de Lyon. 267
sa séance publique du 6 avril 1823. ( in-8.
35 pag.)
7. Influence des sociétés littéraires, savantes
et agricoles, sur la prospérité publique, par
M. Bigot de Morogues, membre de plusieurs
sociétés savantes. Orléans , 1823. (in-8. 20p.)
8.2 Mémoires d'agriculture, d'économie rurale
et domestique , publiés par la société royale
et centrale d'agriculture, année 1822 (t.L.,
in-8. 530 pag.)
9°: Voyage en Espagne dans les années 1816,
1817, 1818 et 1819, ou recherches sur les
arrosages, sur les lois et coutumes qui les
régissent; sur les lois domaniales et munici-
pales, considérées comme un puissant moyen
de perfectionner l’agriculture française , par
M. Jaubert de Passa , etc. 1823. (in-8. cartes,
2 vol.)
109 Chimie appliquée à Hahiolere , par M.
le comte Capial, ai de France , etc. FR
1823, (in-8. 2 vol.
ja Réueil de poils et autres pièces de
prose et de vers qui ont été lus dans la séance
des amis des sciences, des lettres, de l'agri-
culture et des arts, à Aix, département des
Bouches du Rhône, depuis 1819 jusqu'à pré-
sent. Aix, 1823. (in-8., 1 vol., 472 pag.)
12. Mémoires de la société centrale d’agricul-
268 Socielé royale d'Agriculture
tare èt des arts du département de Seine et
Oise, publiés depuis la séance publique du
7 juillet 1822 jusqu’à celle du 27 juillet 1823,
(23° année ). Versailles , in-8. 84 pag. (Dans
le même volume ) Mémoire sur la nutrition
des plantes et la coupe prématurée des blés,
par M. Feburier , (1.° octobre 1822. 52 pag.)
13° Règlement de la société d'agriculture »
sciences et belles-lettres de Mâcon. 1823.
(in-4. 5 pag.)
14° Mémoire sur la saccharification des fé-
cules , présenté à la société royale et centrale
d'agriculture de Paris, pour le concours qu’elle
a ouvert sur la culture de la pomme de terre
et l'emploi de ses produits, par M. Dubrunfaut.
Paris, 1823. (in-8. 79 pag.)
15° Notice sur la fête agricole et le concours
établi en faveur des laboureurs qui ont eu
lieu à la ferme de Précontal , commune de Mon-
telimart ( Drôme), le 23 juillet 1823, par A.
Duvaure, (in 12. 13 pag.)
16. Observations critiques sur l'espèce de riz
sec de montagne ou de la Cochinchine , par
M. S!-Amand. Agen, 16 septembre 1823,
Cin-8. 4 pag. )
17° Notice sur le château de Lamothe, par
M. Cochard, de l’académie de Lyon. (in-8.
4 pag. 1823.)
de Lyon. 269
18.9 Mémoires et rapports de la société d'agri-
culture et des arts du département du Doubs,
( depuis le 13 ventose an vnx jusqu’en 1823.)
(in-8. ro vol.)
19.0 Essai sur l'agriculture du département du
Jura, par M. Guyétant, docteur de la faculté
de médecine de Paris, etc. Lons-le-Saunier ,
1822. (in-8. 400 pag.)
20.9 Noticia intorno ai lavori della classe di
scienzes fisiche et mathematiche dal primo
Giorno di Gennajo, sino allultimo di decembre
1822, del professore Giacinto Carena, se-
cretario di esta classe.
21.9 Description des machines et procédés spé-
cifiés dans les brevets d'invention , de perfec-
tionnement et d'importation ( 5 volumes ).
Paris , 1823. (in-4. 366 pag.)
22. Programme des prix proposés par la société
d'encouragement pour l’industrie nationale,
pour les années 1824, 1825 et 1830.
23. Programme d’un cours de botanique agri-
. cole qui sera donné au musée académique de
Genève, par M. le professeur de Candolle.
(in-8. 8 pag. )
242 Notice sur Pierre Poivre (par M.le baron de
Gerando, extrait de la bibliographie générale.)
25 Observation sur la pépinière de naturali-
sation du département du Rhône, par M
Guerre. Lyon, 1824. (11 pag.)
270 Société royale d Agriculiure
26.2 Compte rendu des travaux de la société
des sciences , arts et belles-lettres de Mâcon,
pendant l’année 1823. ( in-8. 136 pag.)
27° Règlement de cette société. Mâcon, 1823.
(in-4. 5 pag.)
28% Collection d'instrumens, de machines,
ustensiles , constructions et appareils emplo-
yés dans l’économie rurale, domestique et
industrielle, par M. le comte de Lastayrie ,
Ct. IT et IE, et 4° livraison.)
29.2 Extrait du recueil des mémoires de la so-
ciété d'agriculture et arts du département du
Doubs , pour l’année 1820. in-4. 44 pag. (avec
un tableau d'assolement de huit années. )
30.°. Procès-verbal de la séance publique de la
société d'agriculture du commerce et des arts
de Boulogne-sur-mer , année 1823, suivi du
programme des prix proposés par cettes ociété
319 Note sur la fructification du phormium
tenaz , ou lin de la nouvelle Zélande, à Cher-
bourg et à Toulon, sur la germination par-
ticulière de ses graines et leur culture, par M,
Gillet de Laumont. Paris , 1824. (in-8. 8 pag.)
32.2 Des ponts en fer, par M. Seguin aîné ,
d'Annonay. Paris, 1824. (in-8. 103 pag. pl.)
33.° Annuaire de la société royale et centrale
d'agriculture du département de la Seine,
pour l’année 1824. Paris, (in-12. 54 pag.)
de Lyon. 271
34° Mémoire sur un nouveau genre de mam-
mifères de l’ordre des rongeurs , nommés cap-
promis, par M. Desmarets. Paris , 1823.
(in-4. 20 pag. 1 planche. )
35.9 — Sur le Kanguroo, genre de mammi-
fères masupiaux , par le même. Paris | 1823.
(24 pag. in-8.)
36.2 Notice sur les couches naturelles de Passy.
(in-8. 15 pag.)
37.2 Mémoire sur les fossiles des terrains d'eau
douce. (in-8. 24 pag.)
38.2 — Sur la gyrogonite (in-8. 20 pag. 1 pl.)
(ces trois derniers ouvrages du même auteur,
sont extraits du journal des mines.)
39.° Ecole royale d'économie rurale de Lyon.
Procès - verbal de la séance publique an-
nuelle , tenue à cette école le 27 octobre 1823,
pour la distribution des diplômes et des prix
aux élèves. ( in-8. 75 pag.)
40° Rapport fait à la societé royale et centrale
d'agriculture, dans sa séance du 20 août 1823,
par MM. Molard et Bosc, sur une presse
propre à retirer le miel des gâteaux de cire.
Paris. (in-8. 6 pag. 1 planche.)
41 Calendario Georgico della reale societa
agraria per l’anno bissestile 1824. Torino,
106 pag. (in-8. planches.)
42.2 Rapport sur les travaux de la société d'a-
griculture du département des Vosges, depuis
272 Société royale d'Agriculture
sa création en janvier 1821 jusqu’en juin
1822, lu en séance extraordinaire, le 10
juin 1822, par M. Matthieu, secrétaire de la
société, médecin vétérinaire en chef du dépar-
tement, membre de la société d’encourage-
ment. Epinal. (in-8. 44 pag.)
43.° Mémoire de la société royale et centrale
d'agriculture , année 1822. (t. IL. ) et année
1823.
44% Mémoire de la société des sciences , d’agri-
culture et arts de Strasbourg, 1822 (2 vol.)
45 Article greffe, extrait du nouveau cours
complet d'agriculture pratique et théorique
( édition de 1822.)
46.2 Mémoire sur la prétendue greffe columelle
et sa planche.
47° Neuf planches lithographiées des grefles
de 1.'° et 2.° section.
48. Description de la greffe d'Aubenton et sa
planche ( les quatre articles qui précèdent ont
été adressés par M. Thouir , professeur de:
culture au jardin du Roi. )
49° Noticehistorique et statistique sur St-Cyr,
sur le Rhône. Lyon , 1824. (in-8. 4 pag.)
50.0 Mémoire sur la vinification à la mécanique,
par M. Joseph Esquirol. (in-8.22 pag: )
91.0 De l'éducation des vers à soie, d’après la
méthode du comte Dandolo, par Matthieu
de Lyon. 273
Bonafous , membre de plusieurs sociétés sa-
vantes , et directeur du jardin de la société
royale d'agriculture de Turin, seconde édi-
tion. Paris, 1824. (in-8. 102 pag. fig. )
52.2 Nouveau traité sur la laine et sur les mou-
tons, publié par le propriétaire du troupeau
de Maz. Paris , 1824. (in-8. 220 pag.)
53.9 Résumé de toutes les expériences faites
pour constater la bonté du procédé proposé
par M. le comte Dejean pour la conservation
illimitée des grains et farines. Paris, 1824.
(in-8. 20 pag.) |
549 Mémoire sur les eaux minérales, douches
et bains artificiels, et sur les bains de va-
peurs , par À. E. Laville Delaplaigne, doc-
teur en médecine, breveté d'invention et de
perfectionnement pour la confection de ses
appareils. Paris, 1824. (in-8. 172. pag.)
55.2 Recherches sur les différentes races de
bêtes à laine de la Grande-Bretagne, et parti-
culièrement sur la nouvelle race du Leycester-
shire , par M. le baron de Mortemart-Boïisse ,
chevalier de l'Ordre da Roi, des Ordres de
St-Louis et de la légion d'honneur , corres-
pondant du conseil d'agriculture près S. Ex.
le Ministre de l'intérieur , etc. Paris, 1824.
(in-8. 45 pag.)
56.0 Compte rendu de la pratique chirurgicale
18
274 Sociélé royale d'Agriculture
de l'Hôtel-Dieu de Lyon pendant six années,
lu en séance publique de l'administration des
Hôpitaux , le 30 septembre 1823, par L.
Janson , docteur en médecine, chirurgien en
chef de l’'Hôtel-Dieu, etc. imprimé par ordre
del'administration. Lyon, 1824. (in-8. 135 p.)
37° Mémoire sur les effets des pompes du sys-
tème de M. Arnollet, dans leur état de per-
fectionnement au 1.7 janvier 1823. Paris,
1824. (in-8. 62 pag. avec planches.)
58.2 Mémoire sur la machine écossaise à battre
les grains, par M. ***, et description d'une
machine inventée en Russie en 1823, pour le
même objet, par. MM. le Prince Gagarin et
Molard aîné. Paris, 1824.
59.° Programme de la séance publique de la
société royale et centrale d'agriculture , tenue
le 25 avril 1824. (in-4. 8 pag.)
60... Rapport à M. le comte de Brosses , préfet,
sur l'établissement et les premiers travaux du
conseil de salubrité du département du Rhône,
par M. Grognier. Lyon, 23 août 1824.
Cin-4. 34 pag.)
61.2 Méthode naturelle des végétaux, par M.
Antoine-Laurent de Jussieu. Paris, 1824.
(in-8. 51 pag.)
62° Rapport sur les produits de l'industrie
française , présenté au nom du jury central,
de Lyon. 295
à $. Ex. le comte Corbières, ministre , secré-
taire d'état de l'intérieur, approuvé par S. S.
le duc de Dodeauville, rédigé par MM. Hericart
de Thury et Migneron. 7 int impr, royale.
1824. (in-8. 517 pag.)
63. Description des machines et procédés spé-
cifiés dans les brevets d'invention , de perfec-
tionnement et d'importation dont la durée est
expirée, publiée d’après les ordres de S. Ex.
le Ministre de l’intérieur , par M. Christian,
directeur du conservatoire royal des arts et
métiers (t. VIL). Paris, 1824. (in-4. fig. 305 p.)
64° Exposé des différens objets qui ont occupé
- la société d'agriculture de Dôle dans ses trois
dernières séances. Dôle, 1824. (in-8. fig. 24 p.)
65.° Recueil des pièces instructives publiées par
la compagnie sanitaire contre le rouissage ac-
tuel des chanvres et des lins, etc. Paris, 1824.
(in-8, 122 pag.)
66.2 Séance publique de la société d'agriculture,
commerce , sciences et arts du département de
la Marne, tenue à Chälons le 27 août 1824.
(in-8. 75 pag.)
67° Mémoires de la société centrale d'agricul-
ture et des arts du département de Seine et
Oise, publiés depuis sa séance publique du
27 juillet 1823 jusqu’à celle du 11 juillet
1824. ( 24.° année ) 242 pag.
276 Société royale d’Agricullure
68.2 Mémoire sur les moyens de reconnaître
l’âge du cheval, etc. par M. Girard fils , pro-
fesseur à l'école d’Alfort. Paris, 1824. (in-8.
48 pag. fig. )
69° Eloge de Denis Mortier, chirurgien en
chef de l'Hôtel - Dieu de Lyon, par J.-M.
Pichard , secrétaire - général de la société de
médecine de la même vilte, Lyon, 1824. (in-8,
14. pag.)
70.9 Oraison funèbre de très-grand , très-haut,
très-puissant et très-excellent prince Louis
XVIIT, roi de France et de Navarre, par M.
l'abbé Bonnevie. Lyon, 1824. (in-8. 101 pag.
71.9 De la culture des müûriers, par M. Mat-
thieu Bonafous (2.° édition). Paris, 1824.
(in-8. fig. 52 pag. )
de Lyon. 277
ÉVÉNEMENS.
La notice que je viens d’esquisser de vos nobles
et utiles travaux embrasse, comme vous l'avez
vu, Messieurs, un espace de temps plus long
que celles de même genre dont vous avez , dans
les années précédentes , ordonné la publication.
L'une des causes qui , en cette circonstance, ont
porté votre secrétaire à suivre l'esprit plutôt que
la lettre de votre règlement , est l'incertitude où
il s'est trouvé sur les résultats définitifs d’une
discussion qui s’est renouvelée plusieurs fois
dans vos séances. Il s'agissait de savoir si, dé-
sormais, vous ne feriez pas connaître vos tra-
vaux au public tous les trimestres, ou même
tous les mois. Vous sentez, Messieurs, que si
ce changement qui, sous plusieurs rapports ,
offrait des avantages , eût été adopté , le compte
annuel de vos travaux devait, en supposant son
maintien , être rédigé sous d’autres formes.
En vous déterminant à ne rien changer dans
un mode de publication suivi depuis vingt ans,
vous avez imposé à votre secrétaire l'obligation
de redoubler d'efforts pour rendre, autant qué
possible, dignes de vous les notices annuelles
dont vous lui avez confié la rédaction.
Pour compléter celle qu'il a l'honneur de
278 Societe royale d'Agricullure
mettre aujourd’hui sous vos yeux , il ne lui reste
qu’à vous rappeler les événemens survenus dans
la société depuis la publication du dernier compte
rendu de vos travaux.
La mort vous a ravi deux confrères respec-
tables : l’un appartenant à la classe des titulaires,
l’autre à celle des vétérans: l’un et Pautre s'étaient
assis successivement à votre bureau en qualité
de trésoriers. Le premier des deux qui a terminé
son honorable carrière, est M. Deschamps. Vous
avez voulu que sans délai un tribut de regrets
et d'estime fût payé à sa mémoire. Un hommage
semblable va être rendu en votre nom à M.
Barre , que nous avons perdu tout récemment.,
Huit de vos honorables correspondans vous
ont été ravis: MM. Raulhac, Grofiier, Amo-
reux , Faure-Biguet, le comte de St-Vailier,
Pin, Moscati, Thouïn.
M. Raulhac n’a figuré que quelques jours sur
votre liste, il avait mérité d'y être inscrit par
ses recherches profondes sur la géologie de la
haute Auvergne, et sur les institutions , les
mœurs, l'agriculture et l'industrie des antiques
Arvernes.
M. Groffier, habile médecin , s’est rendu re-
commandable par un ouvrage sur les marais ,
dans lequel cette question importante est traitée
sous le triple rapport de l'hygiène, de lagricul-
ture et de l'économie publique.
de Lyon. 279
M. Amoreux consacra une longue vie à des
travaux utiles ; plusieurs fois il fut couronné à
la suite des concours ouverts soit à l'académie ;,
soit à l’ancienne société d'agriculture de notre
ville. C’est principalement vers l'agronomie et
les arts qui en découlent que cet homme émi-
nemment laborieux aimait à diriger ses recher-
ches ; et quoiqu'il ait publié un assez grand
nombre de mémoires , la plupart de ses onvra-
ges Sont restés inédits ; la société possède dans
ses porte-feuilles plusieurs de ces derniers.
M. Faure-Biguet fut le collaborateur et l'ami
de notre savant Syonnest ; ils dirigèrent vers
l'entomologie leurs travaux. Parmi les insectes,
ceux qui peuvent nuire aux récoltes furent l'objet
Spécial de leur investigation , et, sous ce rap-
port, l'agronomie leur dut de précieuses décou-
vertes. -
M. comte de St-Vallier , pair de France,
avait été inscrit sur la liste de la société le jour
même de sa restauration en l'an vr. C’était un
de ces grands propriétaires qui, s'occupant eux-
mêmes de l'administration de leurs domaines :
exercent une influence puissante sur le perfection
nement de l'agriculture dans la contrée qu'ils
habitent. D'autres ont parlé du noble caractère
que M. de S/-Vallier a déployé dans toutes les
époques de nos longues dissensions. C'est parce
280 Société royale d Agriculture
qu'il était l'ami éclairé de l'agriculture , que
j’adresse un tribut à sa mémoire.
M. Pini a laissé la réputation d'un habile phy-
sicien et d'un savant astronome , il s'occupa
aussi de météorologie , et, sous ce rapport, il
mérita une place parmi vos correspondans. Il
était à Lyon au commencement du siècle, comme
député de l'Ordre des Dotti à la Consulta cisal-
pine; il assista plusieurs fois à vos séances , et
il parut prendre à vos travaux le plus vif intérêt
M. Moscati, célèbre médecin et physicien
profond , fut directeur général de l'instruction
publique du royaume d'Italie. Il jouissait dans sa
patrie de la plus haute considération ; de même
que M. Pini, il assista fréquemment à vos
séances à l'époque de la Consulta cisalpine, et
vos procès-verbaux ont recueilli quelques traits
de sa brillante improvisation.
M. Thouin a professé pendant un demi-siècle
l'agriculture pratique au jardin du Roi, il ya
établi école des arbres forestiers , il a reculé les
bornes de l’agronomie, principalement la partie
de cette science qui a pour objet les greffes. Il a
été le collaborateur de M. Tessier dans lency-
clopédie méthodique, et le continuateur de notre
illustre Rozier dans le cours d'agriculture. Il a
enrichi de ses nombreux mémoires les actes de
l'institut , ceux de la société royale et centrale,
de Lÿon. 281
ceux du muséum d'histoire naturelleetvos propres
archives. Sa longue vie fut pleine de vertus mo-
destes comme de services éclatans, et c’est un vide
immense qu'il a laissé dans votre liste comme
dans celle de la première académie de l'univers.
Si la liste de vos titulaires a perdu quelques
autres noms recommandables, celle de vos émé-
rites s’en est enrichie. Ceux de nos confrères qui,
par leurs longs et honorables services ont mérité
d'y être placés, sont : MM. le comte de Chambost ,
Eynard et Rieussec.
M. Berthaud, ingénieur des ponts et chaus-
sées, ayant été appelé dans un autre départe-
ment, a dû passer à la classe des correspondans.
Il en est de même de M. le baron & l’Horme,
nommé premier président à la cour royale de
Caen.
. Pour réparer tant de pertes, vous avez admis
dans votre sein, en qualité de titulaires MM.
Seguin , Cap, Tabareau , Fauché , Prunelle et
Bouniols.
. Le premier vous avait fait hommage d’un
mémoire imprimé , sur les ponts en fil de fer.
Non content d'exposer les avantages de ces sortes
de constructions , il avait mis en pratique ses
théories , et au moment où je trace ces lignes,
d'importantes entreprises en ce genre sont com-
mencées, d'autres sont sur le point de se for-
mer sous la direction de M. Seguin.
282 Société royale d Agriculture
M. Cap s'était attaché à lier à l'art de guérir
la chimie pharmaceutique , et ses travaux sur ce
sujet avaient mérité une honorable distinction,
au jugement d'une société savante de la capitale.
Elève distingué de l’école polytechnique , M.
Tabareau avait débuté avec un rare succès dans
la carrière de l'enseignement des sciences phy-
siques , lorsqu’il s’est présenté à vos suffrages.
Pharmacien en chef dans les armées fran-
çaises, l'un des premiers dans son honorable
profession, M. Fauché s’est occupé avec ardeur
de l'histoire naturelle , et c'est principalement la
botanique, cette science dont les rapports avec
l’agronomie sont si intimes, qui a été l'objet de
ses travaux.
M. le docteur Prunelle a enseigné avec éclat la
médecine dans la célèbre école de Montpellier ;
il a publié divers ouvrages où l'art d'écrire se
joint à une vaste érudition , et dans un séjour
de plusieurs années à la campagne, il a recueilli
sur l’agriculture de précieuses observations.
M. Bouniols , propriétaire à la Croix-Rousse,
a étudié l’agriculture maraîchère qui fait la ri-
chesse de cette partie de la banlieue de Lyon. IL
a, par des soins éclairés , augmenté le produit de
ses jardins et de ses vergers.
Tels sont les titres qu’avaient à vos suffrages
les nouveaux confrères que vous vous êtes don-
nés dans la classe des titulaires.
de Lyon. 283
Vous avez admis parmi vos correspondans
MM. le comte de Tournon , de Taluyers, de
Broal, Desmarets , et Bonafous.
M. le comte de Tournon, qui, pendant trop
peu de temps a tenu les rènes de l’administra-
tion dans notre province , avait, en coopérant
lui-même à vos travaux, donné la preuve la
plus éclatante de l'intérêt qu’ils lui inspiraient ,
et la communication dont il a enrichi votre
dernier compte rendu, devait être suivie de
plusieurs autres , lorsque de plus hautes desti-
nées l'ont appelé à la capitale.
M. de Taluyers à opéré à quelques lieues de
notre ville une de ces grandes et belles opéra-
tions agronomiques qui supposent le concours
des lumières, du zèle, de la persévérance et des
capitaux. Le rapport qui vous en a été fait n'est
pas lun des moindres ornemens de la présente
notice. Vous vous êtes empressés de mettre au
nombre de vos correspondans un agronome pra-
ticien tel que M. de Taluyers.
Les titres à la même distinction de M. de
Broal , propriétaire et juge de paix du canton
de Meïzieux , sont principalement le succès qu'il
a obtenu dans la culture du chanvre et la pro-
pagation dans le canton qu'il habite , de plusieurs
variétés précieuses de cette plante textile.
M, Desmarets, professeur à l'école de méde-
284 Société royale d’Agricullure
cine vétérinaire d’Alfort, mène de front la zoo-
logie et la minéralogie. Plusieurs des ouvrages
qu’il a publiés sur ces deux branches de l'histoire
naturelle , ont accompagné la demande qu'il a
formée de vous appartenir à titre de corres-
pondant.
Né dans nos murs, M. Matthieu Bonafous est
fixé à Turin où il dirige un établissement agro-
nomique. Plein de sollicitude pour la prospérité
de l’agriculture et de l'industrie de sa province
natale, il a publié plusieurs traités sur la cul-
ture du mûrier et l'éducation des vers à soie, il
a fondé dans votre sein des prix pour encourager
d’autres améliorations importantes , et ce n'est
pas là les seuls services qu'il ait rendus à l'éco-
nomie rurale de ce département. Vous avez
pensé, Messieurs , que l’agronome qu'anime une
philantropie si pure ne pouvait qu’'honorer la
liste de vos correspondans.
Un seul changement a été fait à votre bureau;
c'est la nomination de M. Deschamps à la place
de trésorier que son père avait laissée vacante.
Vous avez honoré ainsi la mémoire d'un con-
frère respectable , tout en donnant à son digne
fils une grande marque de confiance.
Vous avez adopté de nouveaux diplômes, l’édi-
tion des anciens étant épuisée. Vous avez saisi-
cette circonstance pour rendre un sûlennel hom-
de Lyon. 285
mage à des Lyonnais qui se sont illustrés dans
l’agriculture , ou l’histoire naturelle, ou les
arts utiles. Vous avez voulu que leurs noms
vénérés fussent inscrits autour de ces diplômes.
Chargés de remplir vos vues à cet égard, MM.
de S/-Didier et Acher vous ont présenté un ta-
bleau que vous avez adopté.
On y voit la gloire assise sur un lion , em-
blême de notre cité; elle tient de chaque main
des couronnes qu’elle présente, d'un côté aux
génies de Pagriculture, de l'autre aux génies
des arts utiles ; tout près de ces génies sont des
faisceaux de palmes et de lauriers.
De ce groupe placé en tête du diplôme, partent
à droite et à gauche des guirlandes de chêne qui
entourent les noms des illustres Lyonnais; elles
sont unies au bas du tableau par un trophée où
lon voit entrelacés avec élégance des gerbes , des
pampres , quelques instrumens agricoles , des
instrumens des arts utiles , la cornue de la
chimie , le caducée du commerce , les serpens
d'Epidaure. Voici les noms des Lyonnais dont
la gloire immortelle est gravée sur vos di-
plômes.
Hors de rang à des places distinctes , Rozier
et Bourgelat : peu de noms aussi honorables
ont été inscrits dans les fastes de lagricul-
ture lyonnase , j'ai presque dit dans ceux de
280 Sociélé royale dA'griculture
lagriculture de la France entière. Nous devons
au premier l’un des ouvrages agronomiques
les plus importans qui aient été publiés en
Europe, depuis le Mesnage des champs d'Oli-
vier de Serre. Non content d'avoir exposé dans
ce livre , classique pour l'époque, toutes les
théories de l'art , il en a perfectionné la pra.
tique par de belles expériences , dont plusieurs
ont été faites dans les campagnes voisines de
notre ville.
Bourgelat a créé, pour ainsi dire, l'art pré-
cieux qui a pour objet la conservation et le
perfectionnement des animaux utiles. Il a fondé
des écoles publiques dont aucun siècle ni au-
cune nation ne lui avaient offert des modèles ;
il a laissé , sur presque toutes les parties de
l'art vétérinaire , des ouvrages originaux qui
ont passé dans toutes les langues de l'Europe;
c'est dans nos murs qu’il a placé le berceau
d'une institution dont les progrès ont ren-
contré des obstacles de tous les genres, mais
qui ne peut manquer de prendre un jour,
dans l'intérêt du premier des arts, de grands
développemens.
En tête de l'une des colonnes du tableau est
Dalechamp ; il fut médecin habile et natura-
liste infatigable. Nous lui devons la première
flore lyonnaise ; et la plupart des plantes ins-
de Lyon. 287
crites dans son grand ouvrage y sont décrites
pour la première fois. On les reconnaît encore
au signalement qu'il en a donné , et on les
retrouve , après plus de deux siècles , dans les
stations qu'il leur a assignées. Le lyonnais
Dalechamp est regardé par les botanistes de
tous les pays comme l'un des pères de la
science des végétaux.
Au-dessous du nom de Dalechamp est celui
de Jean Bauhin qui, originaire de la Suisse,
naquit à Lyon, y fit un long séjour et con-
courut avec Dalechamp, son ami , à l’histoire
des plantes du Lyonnais ; il publia, sous son
propre nom , une histoire générale des végé-
taux , ouvrage volumineux où les plantes des
environs de Lyon sont décrites avec prédilec-
tion , ainsi que les lieux où elles croissent na-
turellement , et les usages qu’on leur attribuait
à la fin du 16.me siècle , époque où l'auteur
| écrivait.
Long-temps après Dalechamp et Bauhin on
vit s'élever à Lyon une famille privilégiée dans
laquelle le, génie de la botanique est hérédi-
taire ; Antoine de Jussieu fut le premier de
cette famille qui s'illustra , il ouvrit la car-
rière à ses deux frères , Joseph et Bernard,
ils furent suivis d'Antoine-Laurent leur neveu,
aujourd'hui l'un des nestors des naturalistes
288 Société royale d'Agriculture
de l'Europe. C'est Bernard de Jussieu dont
le nom , suf cette colonne , est placé dans
l'ordre chronologique , au-dessous de celui de
Jean Bauhin. Dans l'ordre du génie botanique
Bernard peut avoir des égaux, mais il ne con-
naît pas de supérieurs. Sa classification des
végétaux, d’après la méthode naturelle , est l’une
des plus fortes conceptions du dix-huitième siècle.
Latourrette consacra sa vie à l'exploration de
la terre natale ; aucun savant , avant lui, n'a-
vait poussé si loin la connaissance de la bota-
nique et de la minéralogie du Lyonnais ; voué
à l'histoire naturelle uniquement à cause des
charmes attachés à son culte , il laissa ses nom-
breux ouvrages en porte-feuille, ou les fit pa-
raître sans nom d'auteur. Deux d’entre eux ce-
pendant , le voyage au mont Pilat et le chloris
Jugdunensis , furent reconnus pour être sortis
de sa plume , et consacrèrent sa réputation dans
le monde savant.
Voyageur philantrope , Poivre parcourut une
grande partie du globe pour enrichir sa patrie
du fruit de ses découvertes. Sage et profond
administrateur , il créa la prospérité de deux
colonies françaises ; ami éclairé de l'agriculture,
il lui fit présent d’un grand nombre de végétaux
utiles ou agréables. C’est dans sa charmante so-
litude de la Fréta que s'acclimataient ces plantes
de Lyon. 289
étrangères avant de se répandre dans le Lyonnais
et les provinces voisines. Les arts utiles, et jus-
qu'aux teintures de Lyon durent à Poivre
d'heureux perfectionnemens.
Le nom qui suit est celui de Jars. On connaît
plusieurs minéralogistes de ce nom ; mais Gabriel
fut le plus célèbre. Ami de Duhamel, il visita
avec ce savant les mines d'Allemagne, il explora
ensuite presque toutes celles de l'Europe, et du
résultat de ses recherches , il composa un grand
ouvrage qui lui ouvrit les portes de l'académie
des sciences. De concert avec Duhamel , Gallos
et Fourcroy de Ramecourt, il publia un im-
portant ouvrage de technologie ; il perfectionna
l'exploitation des mines de St-Bel et de Chessy,
et sous ce rapport il augmenta la prospérité de
sa terre natale, que ses autres travaux avaient
illustrée.
Villers mena de front la physique et l'ento-
mologie, il enseigna ces deux sciences dans des
cours particuliers , et il vit des princes parmi
ses auditeurs; il les professa aussi dans une
réunion d'amis des sciences qui s'était formée à
Lyon sous le titre de société philotechnique ; on
lui doit un ouvrage en plusieurs volumes sur
les insectes, qui lui mérita l’estime de Haller,
de Réaumur et de Linnée. C'est autour de notre
ville et sur les montagnes qui en bornent l’ho-
19
290 Société royale d'Agriculture
rizon , que Villers avait étudié l'entomologie,
et on lui doit de belles observations sur les in-
sectes ennemis de l'agriculture.
Gilibert quitta la cour d'un roi dont il était
premier médecin, pour consacrer à sa patrie ses
talens et son expérience. Il fut long-temps dans
notre ville le premier dans sa profession. Le
temps qu'il déroba à des devoirs sévères , il le
donna à l’aimable science ; ‘il propagea les doc-
trines Linnéennes , planta le jardin de l’école
vétérinaire et celui de la Déserte ; il enseigna
avec éclat la science des végétaux ; il aimait à
développer les rapports de cette science avec la
médecine, l’agronomie, la pratique des artsutiles,
Il présidait la société à l'époque où ses mem-
bres furent dispersés par les orages révolution-
paires, et c’est lui qui en réunit les membres
épars lorsqu'un peu de calme eût succédé à la
violence de la tempête.
Patrin s'illustra par des travaux et des décou-
vertes en minéralogie. L'ardeur de cette science
lentraîna jusqu’à l’extrémité septentrionale du
vaste empire de Russie; il pénétra dans des
lieux où , pour me servir de l'expression de
Buflon, /a nature fut étonnée de s'entendre inter-
roger pour la première fois. De retour en France,
il entra à l'académie des sciences de Paris, et il
fut l’un des fondateurs de l'ancienne société
d'agriculture de Lyon.
de Lyon. 201
Chomel, curé de St-Vincent de Lyon, était
presque octogénaire lorsqu'il publia sous le titre
de dictionnaire économique , un volumineux ou-
vrage qui à eu plusieurs éditions. C’est en admi-
nistrant une terre considérable appartenant à
l'église , qu’il avait acquis de grandes connais-
sances , non-seulement sur l’agriculture , mais
encore sur l’art vétérinaire. Son livre a été long-
temps, dans le Lyonnais surtout, le manuel
des agriculteurs et des bonnes ménagères.
Les Lyonnais qui suivent se sont rendus cé-
lébres en reculant les bornes des arts qui fondent
la prospérité de notre cité.
Laure, originaire du Milanais, vint s'établir
à Lyon sur la fin du 16.° siècle ; il y apporta
de nouveaux procédés sur l'art de teindre les
soies. Les anciennes méthodes furent bientôt
oubliées , et tout en enrichissant sa patrie adop-
tive, Laure parvint à une grande fortune,
dont il fit un noble usage.
Revel surpassa ses contemporains et ses de-
vanciers dans l’art du dessin appliqué aux divers
tissus ; il découvrit le secret de distribuer agréa-
blement les lumières et les ombres sur les
étoffes ; on lui dut d’autres inventions du même
genre, et c’est ainsi qu'il concourut puissam-
ment à la renommée des manufactures lyon-
naises.
292 Société royale d'Agriculture
Mey (Octavio) se sendit recommandable par
une découverte capitale; il trouva le moyen
de lustrer la soie ; il le dut , dit-on , au hasard ;
mais ne sait-on pas que si le hasard a quelquefois
produit des merveilles dans les sciences ou dans
les arts, c'est qu'il a été secondé par le talent
ou le génie ?
Roville se distingua parmi les nombreux im-
primeurs qui, dans le seizième siècle, florirent
à Lyon. Homme de lettres et savant, comme
l'étaient , surtout dans notre ville, les impri-
meurs de cette époque, Roville ornait de notes
et de préfaces les ouvrages qu'il mettait au jour,
et il s’associait ainsi à la gloire de leurs auteurs.
Il consacra sa fortune à des institutions pieuses,
dont quelques-unes subsistent encore.
Delorme ( Philibert ) appartient au siècle de
François L" et de Léon X ; c’est comme archi-
tecte qu'il a pris rang parmi les hommes qui
ont concouru à la renaissance des sciences , des
lettres et des arts : du nombre de ses ouvrages
est ce château de Chambort , qui vient de recevoir
une si glorieuse destination. Mais ce n’est pas
seulement dans la construction des palais et des
temples qu’il a déployé les richesses de son
génie , il a encore bâti, du moins dans sa ville
natale, plusieurs maisons modestes , dont quel-
ques-unes attirent encore l'attention des voya-
geurs instruits,
de Lyon. 293
Coustou (Nicolas) fut, ainsi que son frère
Guillaume, l’un des plus habiles sculpteurs du
règne de Louis XIV. Les statues colossales du
Rhône et de la Saône que l'on voyait au piédes-
tal de la statue de ce grand monarque, sur la
place de Bellccour , étaient sorties du ciseau de
Nicolas et de Guillaume Coustou. Le premier a
laissé en outre des ouvrages très-remarquables,
soit aux champs-élisées à Paris, soit au jardin
de Marly.
Audran fut l’un des plus célèbres graveurs du
dix-septième siècle. Ses batailles d'Alexandre,
son triomphe de Constantin tiennent encore un
rang distingué parmi les chefs-d'œuvres de la
gravure ; peu d'hommes ont jeté plus d’éclat
sur une ville féconde en grands hommes de tous
les genres.
Lassalle , ingénieux mécanicien , porta dans
la fabrication des étofles lyonnaises de nom-
breux perfectionnemens. Habile dessinateur, ses
talens agrandirent l’art que le génie de Revel
avait fait sortir de l'enfance. Citoyen vertueux,
son zèle pour la prospérité des fabriques de Lyon
ne s’est pas ralenti , et il a voulu que ses derniers
ouvrages devinssent la propriété de tous , etil
les a deposés au palais du commerce et des arts
où il a terminé sa carrière. Une inscription en
son honneur a été gravée sur le grand pérystile
de ce palais.
M, BARRE.
294 Sociélé royale d'Agriculture
NÉCROLOGIE.
M. François Barre, pharmacien et ancien
trésorier de la société, naquit à Lyon en 175r.
Son père exerçait aussi avec honneur une pro-
fession qui se lie à l'agriculture par un plus
grand nombre de rapports qu'on ne le pense
communément. C’est, en effet, dans les labo-
ratoires des pharmaciens que s’est formée et que
se perfectionne tous les jours cette chimie pra-
tique dont lPinfluence s’étend sur tous les arts
économiques. Les théories qui éclairent les pro-
cédés et les manipulations de la pharmacie ont
jeté un grand jour sur la composition des terres
géoponiques , la formation des composts, la
conduite de la fermentation vineuse , la distilla-
tion des esprits, l'extraction des principes oléa-
gineux, tinctoriaux , saccharins : n'est-ce pas à
l'ordre des pharmaciens qu'appartenait le trip-
tolême de notre âge ? Il ne faut donc pas s’éton-
ner si l'on voit sur les listes de toutes les sociétés
d'agriculture un si grand nombre de savans qui
appartiennent à cette classe honorable.
M. François Barre fut reçu maître en phar-
macie à Lyon en 1777. Les réceptions étaient
sévères à cette époque; mais notre confrère qui
avait suivi pendant plusieurs années les cours
de Lyon: 295
de Rouelle et qui en avait recueilli en manus-
crit toutes les leçons, soutint aisément les exa-
mens qu'on lui fit subir.
Quelques années après il se rendit à Valence
pour se présenter à d'autres examens , à la suite
desquels il reçut le titre de maître ès arts.
Peu de temps avant la révolution il se réunit
à MM. de Latourette, Camus , Villers, Roland
de la Platière pour fonder à Lyon une associa-
tion d'amis des sciences et des lettres, qui fut
connue sous le nom de Société philothecnique. Des
cours publics y furent institués, et l’enseigre_
ment de la chimie lui fut confié conjointement
avec M. Macors. C’est à cette époque qu'éclata la
doctrine pneumatique. M. Barre fut en province
l'un des professeurs qui , les premiers , adopte-
rent cette doctrine, qui en suivirent les progrès
et la développèrent dans des cours publics.
Notre confrère commençait à jouir du fruit
de ses travaux, lorsque tout en France fut bou-
leversé. 11 suivit le mouvement généreux qui
souleva Lyon contre l'anarchie , et il fut chargé
de diriger la pharmacie de l'hôpital militaire de
St Louis. Proscrit après la chute de cette ville
infortunée , il se réfugia dans un village du
Dauphiné.
Un peu de calme ayant succédé à l'orage ré-
volutionnaire, M. Barre reparut dans sa ville
296 Société royale d'Agricullur e
natale , il s'unit à quelques-uns de ses anciens
confrères pour établir une société de pharmacie
dont pendant plusieurs années il fut le président.
Membre de la section de chimie dans la so-
ciété des amis du commerce et des arts , il y fit
deux communications remarquables, l’une sur
la composition d’une encre indélébile, l’autre
sur la nécessité de conserver pendant quelque
temps encore l'ancien système métrique pour
Vusage pharmaceutique.
Il fut admis en 1809 dans le sein de la société
d'agriculture de Lyon. L'année suivante il fit
un rapport lumineux sur un fourneau écono-
mique inventé par un mécanicien nommé Four-
nier 3 en 1810 il succéda à M. Sionnest à la
place de trésorier. Les comptes rendus de la
société ont recueilli d’autres communications
de M. Barre , notamment un rapport sur un
pétrin tournant , inventé par M. Lambert, bou-
langer à Paris, et un mémoire sur les produits
de diverses variétés de pommes de terre qu'il
avait cultivées dans ses domaines à Millery.
Ayant acquis par son âge et ses longs services
des droits à la vétérance , il fut inscrit en cette
honorable qualité sur votre liste, et il se retira
dans son domaine où il avait déjà opéré de nom-
breuses améliorations.
Lorsqu'il prit l'administration de son vignoble
de Lyon. 297
‘de Millery, la réputation des vins de ce canton
commençait à déchoir. On y fumait beau-
coup trop, on sacrifiait ainsi la qualité des ré-
coltes à leur abondance. Il donna l’exemple de
répandre les engrais dans les vignes avec écono-
mie; et si, à égalité de tènement , il récolta
moins que ses voisins, ses vins eurent sur les
leurs une grande supériorité, et en définitive ses
bénéfices furent plus considérables. Il introduisit
une autre amélioration , celle de fouler, d’écraser
le raisin avant de le jeter dans la cuve; il pra-
tiquait cette opération préliminaire dans un
vaisseau percé de trous, qu'il plaçait sur la
cuve même, c'élait une espèce de chantepleure
que plusieurs de ses voisins ont adoptée.
Non content d'améliorer la culture de ses
vignes et la fabrication de ses vins, M. Barre
dirigea sa sollicitude vers d'autres parties de
l'économie rurale, il planta un grand nombre
d'arbres fruitiers qui se firent remarquer par
leur belle venue, il étendit autant que possible
la culture du mûrier. C’est ainsi qu'il concourut
à un genre d'amélioration auquel vous attachez,
Messieurs , la plus haute importance.
Ce pharmacien distingué autant qu'habile
agronome a cessé de vivre le 12 décembre 1824.
298 Sociélé royale d’ Agriculture
Comme dans les deux années précédentes ,
vous avez arrêté que sans attendre l'époque de
la publication annuelle de vos travaux , quel-
ques-uns de vos actes fussent imprimés et publiés
à part, et que des exemplaires en fussent mis
en réserve pour être joints à la présente notice.
Trois ouvrages vous ont paru dignes de cette
distinction. l’un est la notice sur M. Deschamps,
par le secrétaire ; l'autre la notice sur M. Wil-
lermoz, par M. le docteur Terme, son neveu ;
le troisième , le rapport de M. Gras sur la
pépinière départementale de naturalisation, rap-
port dont les conclusions , adoptées par vous , a
éclairé l'autorité sur la nécessité de maintenir
dans son état actuel un établissement précieux (r).
Je ne terminerai pas cette notice sans y con-
signer l'hommage de votre reconnaissance envers
M. le Maire de Lyon, qui a bien voulu mettre
à votre disposition une salle pour y recevoir les
machines et instrumens qui composent votre
collection ; et j'ajouterai l'expression de vos re-
mercîmens envers notre confrère, M. Dugas,
aux soins duquel vous devez cet acte de muni-
ficence municipale.
(1) Voyez à la suite de la présente notice.
de Lyon. 299
PROGRAMME
D'un Prix pour la culture des Abeilles dans le
département du Rhône, et de plusieurs Primes ,
proposés par la Sociëté, pour étre décernés en
1825 cl 1826.
En 1825.
INox content d'avoir tracé avec autant de méthode
que de clarté l'histoire naturelle des abeilles , et
d'avoir fait connaître les moyens de produire les
essaims artificiels, d'après la méthode de M. Lombard ,
M. Lacène, l'un des membres de la Société, a offert
une somme de cent francs pour encourager un genre
d'industrie presque inconnu dans notre département ,
et qui néanmoins pourrait y être établi avec avantage.
La Société, acceptant avec reconnaissance les offres
généreuses de M. Lacène , a arrêté:
1.0 Qu'un prix de cent francs , auquel serait ajoutée
une grande médaille d'argent à l'effigie de Rozier,
serait décerné au cultivateur qui aurait fait avec le
plus de succès des Essaims artificiels d'après la mé-
thode de M. Lombard ;
2.9 Que la grande médeille d’argent serait re
à celui qui, par des procédés quelconques, aurait
cultivé la plus grande quantité d'abeilles ;
9 Que les concurrens présenteraient , à l'appui
de leurs mémoires, des certificats constatant leurs
opérations et leurs succès ;
4.9 Que le concours auquel les cultivateurs du
SUJET DU Prrx
Sur la culture
des Abeilles,
SUJET DE PRIX
Sur l’acclima-
tation du chan-
vre bolonais.
Lire PRIME.
Indiquer la
meilleure char-
rue à tourne-
oreille , pour
labourer à plat
à la profondeur
de 9 à 12 pouces
300 Socielé royale d'Agricullure
département pourraient seuls être admis, et même
en en exceptant les membres de la Société, serait clos
le r1.°" décembre 1825.
En 1825 et 1826.
M. Matthieu Bonafous désirant améliorer dans sa
province natale un genre important d'industrie agri-
cole , y a envoyé de la graine de chanvre bolonais, qui
a été distribuée gratuitement aux agriculteurs qui ont
voulu la semer comparativement avec celle du chanvre
du pays, et il a fait les fonds d'un prix en faveur de
celui qui aurait le plus contribué à l’acclimatation de
cette graine étrangère.
MM. les concurrens qui ont resemé de la graine de
chanvre bolonais, provenant de l'envoi fait par M.
Bonafous , feront connaître avec détail les résultats
qu’ils ont obtenus, et leurs mémoires devront être
accompagnés de certificats et d’attestations authen-
tiques.
Un prix de 100 fr. ou une médaille de mème valeur
sera accordé à celui qui, au jugement de la Société :
aura obtenu sur l'acclimatation du chanvre bolonais
les résultats les plus importans.
En 1825.
Il y a beaucoup de très-bonnes charrues à oreilles
fixes ; elles sont très - propres à labourer en planches
bombées et en sillons les terres humides qui re-
tiennent l'eau ; mais existe-t-il de bonnes charrues à
oreilles mobiles , autrement dites à tourne-creille,
avec lesquelles on puisse labourer à plat les terres qu
ne retiennent pas l'eau, telles que celles de Îa
majeure partie de notre département, de celui de
l'Isère, etc. ?
de Lyon. 301
Comme une charrue de ce genre serait fort utile,
la Société accordera une prime à celui qui la fera
connaître ; elle devra être assez solide pour labourer
à plat , à la profondeur de ÿ à 12 pouces, en em-
ployant quatre chevaux ou quatre bœufs de force
moyenne ; elle sera légère, afin qu'étant attelée de
deux bœufs ou de deux chevaux également de force
moyenne, elle puisse labourer à la profondeur de 6
à 8 pouces, profondeur ordinaire du labourage des
meilleures charrues à tourne-oreille , lesquelles ont
le défaut de ne pas tenir la raie nette et de ne pas bien
retourner la terre.
On désire en même temps que cette nouvelle charrue
soit d'un entretien facile et peu coûteux , qu'elle puisse
mème remplacer la charrue à oreilles fixes et ouvrir
sans effort les raies d'écoulement que l'on fait ordinai-
rement dans les terres labourées à plat.
La société avait proposé, l’an dernier , une prime
pour des expériences comparatives sur le nouvel en-
grais végéto-minéral, dit Gadoue artificielle, et le
produit des fosses d'aisance; elle a cru devoir cette
année , donner un champ plus vaste aux agronomes
qui dirigent leurs recherches vers la préparation des
composts tant solides que liquides ; elle les invite à
comparer les effets du fumier de litière pure avec un
engrais factice quelconque , n'importe le règne natu-
rel qui aura fourni les matériaux ; elle désire que le
compost et le fumier d’écurie soient employés simul-
tanément pour une récolte de mème nature et sur un
champ qui ait au moins l'étendue de deux bicherées
(environ 28 ares. )
Les concurrens feront connaître exactement les
procédés de fabrication du compost qu'ils auront pra-
tiqués , les dépenses qu'ils auront faites, et les résul-
lats qu’ils auront obtenus.
2,me PRIME.
Comparer
les effets de
l’engrais de li-
tière avec ceux
d’un ‘compost.
solide ou li-
quide.
3.me PRIME.
Comparer les
résultats de la
culture du fro-
ment après les
pommes de
terre , et après
d’autres plan-
tes, telles que
le trèfle , le
chanvre, etc.
Aime PRIME.
Culture compa-
rative de trois
plantes oléifè-
res , le colza
( brassica ole-
racea campes-
éris ) ; le pavot
des jardins ,
(papaver som-
niferum }); et
la
blanche, ( si-
napis alba.)
moutarde
302 Sociélé royale d'Agriculture
En 1825.
C'est une pratique assez répandue de faire succéder
le froment aux pommes de terre, cependant plusieurs
agronomes éclairés pensent que le froment semé im-
médiatement après la récolte de ces tubercules, qu'on
ne plante jamais sans engrais, produit en général
moins que celui qui succède au trèfle, au chanvre,
etc. ou à la jachère, après un bon fumage.
C'est pour mettre hors de doute les effets de ces
modes d'alternats , que la Société propose une prime
pour un essai comparatif de culture du froment, après
la pomme de terre, et après d'autres plantes qui
laissent dans la terre de l'engrais, telles que le chanvre,
le trèfle, etc. La Société désire que cette expérience
soit faite sur une étendue de terrain au moins de deux
bicherées lyonnaises (27 ares 64 centiares. }
Après un hiver rigoureux qui a fait périr beaucoup
d'oliviers, et qui en a mis un plus grand nombre hors
d'état de donner, de plusieurs années, une bonne ré-
colte, on sent plus que jamais combien il serait
avantageux d'étendre la culture des végétaux herbacés
oléifères. Parmi ces plantes , il en est trois déjà cul-
tivées autour de Lyon, dont la Société désirerait de
connaître les produits par une expérience comparative.
La première est le Colza , brasica oleraeea campestris ,
dont la propagation dans le Lyonnais est due à notre
illustre Rozier. La seconde est le pavot des jardins
(papaver somniferum ), que Mad. Lortet cultive avec
succès depuis deux ans. La troisième est la moutarde
blanche (sirapis alba ), qui a été l'objet d'un heureux.
essai tenté à la Guillotière par M. Poidebard.
La Société propose aux cultivateurs du département
de semer chacune de ces trois plantes au moins sur
de Lyon. 303
une bicherée lyonnaise, de tenir note des frais de
culture, de la quantité de graines employées, des pro-
duits obtenus. Une prime sera la récompense de celui
qui aura le mieux rempli ces conditions.
L'un des correspondans les plus distingués de la So-
ciété, M. Duvaure, qui a écrit sur l'éducation des vers
à soie un ouvrage estimé, regarde comme très-avan-
tageuse la pratique de greffer les müriers. D'un autre
côté des éducateurs penchent pour le müûrier sauvageon;
et malgré sa longue expérience , le respectable Dan-
dolo n’a pas osé décider cette question.
C'est afin d’arriver à la solution de ce problème
intéressant , que la Société propose d'élever au moins
une once de vers à soie avec de la feuille de mürier
greffé, et la même quantité avec de la feuille de sau-
vageon. Elle désire que ces éducations aient lieu simul-
tanément, dans le même local, en employant les
mêmes soins ; et autant que possible en donnant des
feuilles fournies par des arbres nourris sur le même
sol, etc. On tiendra note des quantités respectives de
feuiiles consommées, de la durée de l'éducation , et
de tous ses produits.
Conditions générales à remplir par les concurrens.
Chacune de ces primes consistera en une médaille
de cent francs ou en la même valeur en numéraire , au
choix des concurrens couronnés.
Pour le prix et les primes à décerner en 1825 , les
mémoires doivent être arrivés avant le 1.7 décembre
de cette année ; et c'est pareillement avant la même
époque de 1826 qu'on doitenvoyer les mémoires pour
les concours de cette année. ( Ces termes sont de ri-
5.me PRIME,
Comparer ;
pour l’éduca-
tion des vers à
soie , la feuille
du mürier gref-
fé avec celle
du mürier non
greffé,vulgaire-
ment dit Sau-
vageolte
304 Société royale d'Agriculture
gueur.) Ils seront adressés au Secrétaire de la Société,
ou à tout autre membre du bureau.
Les concurrens pour les primes, doivent être do-
miciliés dans le département du Rhône. Ils sont libres
de faire conuaître leurs noms; les membres ordinaires
de la Société ne sont pas admis au concours.
de Lyon. 305
TABLEAU
DE LA SOCIÉTÉ ROYALE
D'AGRICULTURE
En 1825.
Len + ne be be be be à 0e L se)
BUREAU.
Messreurs
Le Comte de Brosses , O ÿ%x , Gentilhomme de là
Chambre du Roi, Maître des requêtes au Conseil
d'état, Préfet , Président d'honneur.
Le Baron Ramsaup, &:, Maire de Lyon, Président
d'honneur.
CocHarp , avocat en la Cour royale de Lyon ;
Président.
Janson aîné, juge au Tribunal de première instance ;
Vice-président.
Groenter , Professeur Vétérinaire , Secrétaire.
Leroy-Jorimonr , Secr.-adjoint , chargé des archives.
Terme, Docteur en Médecine , Secrétaire-Adjoint.
Descaamrs, Trésorier.
MEMBRES TITULAIRES.
MEessiEURS
1708. Grognier ; Professeur à l'école royale vétéri-
maire.
20
306 Société royale d'Agriculture
18o1. Le chevalier Nugues, #1, président de la Cour
Royale , rue du Pérat.
Mognat de l'Ecluse, propr., rue de la Sphère.
1802. Carrel, propriétaire, quai de la Baleine.
Bellet de St-Trivier, propr. rue de la Charité.
Faissolles, propriétaire , à Vaise.
Le comte de Moidière, #4 (Othon), adminis-
trateur de la pépinière départementale, place
Louis-le-Grand.
1804. Passerat de Lachapelle, %, propriétaire, rue
du Pérat. :
1806. Leroy-Jolimont, propr., place du Change.
Lombard, %, propriétaire , rue Sala.
1807. Mognat de Liergues, propr., rue de lu Barre.
Madiot, directeur de la pépinière départemen-
tale, clos de l'Observance.
1810. Pelletier, pharmacien , place du Plätre.
De St-Didier , propriétaire , rue Sala.
1811. Socquet , ancien professeur de la faculté à
l’Académie de Lyon, rue St-Côme.
Guerre avocat, aux Célestins.
1812. Cochard, ayocat, place St-Jean:
1815. Robin de Beauregard, &, propr., rue du Plat.
Lacène , propr. , place Louis-le-Grand.
Dujat-des-Alimes, propr. , place Louis-le-Grand.
Rainard, professeur à l'Ecole royale vétérinaire.
1814. Guillemet , ancien professeur de la faculté de
l’Académie de Lyon, à Serin.
Barre fils, pharmacien, place de la Comédie,
1817. Dugas, adjoint à la mairie de Lyon, rue Royale.
de Lyon. 307
Muthuon , ingénieur en chef des mines ét usines,
rue Rozier.
Deschamps, pharmacien, rue St-Dominique.
Bouchard-Jambon, mécanicien, rue de Vaubecour.
Cazot , propriétaire, rue du Pérat.
1818. Le chevalier de Martinel » 2 , colonel en re-
traite, rue Sala.
Le docteur Terme, rue du Peyrat.
Bouthier de Borgard , rue du Plat.
Jacquard , %, mécanicien, rue Vaubecour.
Remond, propriétaire, rue des Augustins.
anson, ancien chirurgien-major de l’'Hôtel-Dieu ,
quai de Retz.
Acher , conseiller à la Cour royale, quai de la
Baleine.
Basset de la Pape #, rue St-Dominique.
Tissier, professeur de chimie au musée des arts,
Janson , juge au tribunal civil.
1819. Balbis ; professeur de botanique, à la Déserte,
Billon , propriétaire , petite rue des Feuillans.
Michel, propriétaire, rue Puits-Caillot.
Monnier, #, Avocat-général, rue St-Dominique.
1820. Trolliet, médecin ; rue Puits-Gaillot.
1821. Cavenne, %, ingénieur en chef des ponts et
chaussées, rue du Plat.
De Fréminville , conseiller de préfecture , rue
rue du Pérat.
Le marquis d'Herculais ; administrateur de la
pépinière départementale , quai Monsieur.
Mottard, directeur de la poste aux chevaux,
rue Sala,
308 Sociélé royale d'Agriculture
Gensoul, %, ingénieur-mécanicien, à Ainay.
1822. Foudras, naturaliste, rue du Palais.
Gras, conseiller à la cour royale, rue du Pérat..
Poidebard , négociant, propriétaire.
Gonin , chimiste , teinturier , quai St-Vincent.
Coste, Conseiller à la Cour royale, rue St-Do-
minique.
1824. Cap, pharmacien , rue des Capucins.
Seguin , ingénieur-mécanicien , rue St-Do-
minique.
Tabareau , professeur de physique au musée
des arts.
Fauché, %, pharmacien militaire en chef, hors
les portes de St-Clair.
Prunelle, médecin, place de la Miséricorde.
Bouniols , ingénieur et propriétaire.
ASSOCIÉS VÉTÉRANS.
Messieurs
Chancey, à Belleville.
Frossard , naturaliste, à Paris.
Lanoix , pharmacien, à la Guillotiére.
Le Camus , à Paris.
Roux, professeur émérite de la faculté des sciences,
à Lyon.
Willermoz, rue des Fantasques.
Mouton-Fontenille , professeur d'histoire naturelle.
Rey-Monléan, propriétaire.
Rieussec, %#, Conseiller honoraire à la Cour royale.
Le Comte Riverieulx de Chambost, 24 4%
Eynard, médecin.
de Lyon. 399
ASSOCIÉS CORRESPONDANS.
MRrsSsSIEURS
Albanis de Beaumont, à Vernas.
Le comte d’Albon , K, à Avranges.
Arthaud de la Ferrière, # , à Pierreu.
Arthaud, propriétaire, à Arles.
Aulanier , propriétaire.
Baunier , ingénieur des mines, à Paris.
Begon, propriétaire, à St-Hippolyte.
Belleval, propriétaire, à Montpellier.
Boesse , &, propriétaire, à la Thenaudiére.
Bonafous ( Matthieu ), à Turin.
Le comte de Bondy ( C. % ), à Paris.
Bonaire , &, ancien Préfet des Hautes-Alpes.
Bravet, médecin , à Annonay.
Brébisson, propriétaire, à Falaise.
De Broal, % , juge de paix, à Mocizieux ( Isère ).
Buniva , professeur de médecine, à Turin.
Busson , ingénieur , à Paris.
Cadet-de-Vaux, professeur émérite, à Paris.
Cartier-Trolli, propriétaire, à Trolli.
Le comte Chaptal, de l'Inst., (G. % 4), à Paris.
Le comte Chasset, (G. #), à Paris.
Le comte Chabrol de Crousol, %& , conseiller d'état,
à Paris.
Chenaud-Desportes, propriétaire, au Mans.
Chirat aîné, % , juge de paix, à Souzy.
Clément , ancien juge à la Cour de justice criminelle,
à Montpellier,
310 Socielé royale d'Agriculture
Cuvier (le baron ), C. %, secrétaire perpétuel de
l'Institut , à Paris.
David , propriétaire, au Ripeau, près de Tours.
De la Chance, à [1 Chance.
Le baron de Gérando (O % ), de l'Institut, à Paris.
Decaudole, de l'académie des sciences, à Genève.
Depoix-Marescreux, propriétaire, à Marescreux.
De Rosni, à Valenciennes.
Deschamps, propriétaire , à Lausanne.
De Truchi, %, officier de la garde royale, à Paris.
De Vellay, professeur de mathématiques, à Lausanne.
Le marq. d'Herbouville , pair de France C. &, à Paris.
Desmarets, professeur à l’école vétérinaire d'Alfort.
Dubouchage de Brangues, propriétaire, à Brangues,
Dubouchage, propriétaire, à Grencble.
Dumarché, propriétaire , à Pont-de-Vaux,
Dumond, à St- Ouen ( Seine et Oise ).
Duapalais, propriétaire, à Valence.
Duvaure , propriétaire , à Crest.
Fleury, propriétaire, à St-Vallier,
Finguerlin, négociant , en Suisse.
Le Comte François de Neufchâteau, de l'Institut,
(G. %), à Paris.
Gallois, ingénieur des mines, à Paris.
Gasparin, propriétaire, à Oranges.
Guettat, mécanicien, à Rive-de-Giers.
Guérin, médecin, à Avignon.
Guyettant, médecin , à Lons-le-Saunier,
Hauteville, propriétaire, à Vevay.
Le Vicomte Héricard-Ferrand de Thury, O #, ingé-
nieur en chef des mines, à Paris.
de Lyon. SII
Hurtrel d'Arboval, à Boulogne-sur-mer.
Huzard, # #, membre de l’Institut, à Paris.
Huzard fils, médecin-vétérinaire, à Paris.
Jussieu, % 1, membre de l'Institut, à Paris.
Labbe , propriétaire, à Menufamille.
Le comte Lacèpède, (G.O.%), membre de l'Ins-
titut, à Paris.
Lair, a Caen ( Calvados ).
Lamarck , %, membre de l'Institut, à Paris.
Lamartine, propriétaire, à Macon.
Lapierre, professeur d'histoire naturelle, à Roanne,
Le comte de Laurencin , % 3%, à la Chassagne.
Le duc de Larochefoucauld , > O. %, pair de France,
à Liancourt.
Lavalette , propriétaire , à Grenoble.
Latournelle, propriétaire , à Coligny.
Leroy-Champfleury, propriétaire, à Genay.
Martin aîné, %, médecin , à St-Rambert.
Marcel de Serres, naturaliste, à Montpellier.
Matthieu de Dombasles, à Nancy.
Maurice, propriétaire , à Genève.
Menjot - d’Elbenne, propriétaire , à Couléon.
Molard , %, membre de l’Institut, à Paris.
Le comte Najac, ( C. &), conseiller d'état, à Paris.
Noël, % , professeur d’éloquence , à Paris.
Palmiéri , botäniste, « Milan.
Pictet de Rochemont , propriétaire, « Genève.
Le chevalier Pierrard , &, à Verdun.
Le marquis de Poncins, # , maire de Feurs.
Posuel de Verneau, & , à Paris.
Poutet, chimiste, à Marseille.
312 Societé royale d'Agriculture
Prost, médecin, à Paris.
Rast-Dezarmans , # , ancien Secr.-gén. de la Préfect.
au Mans.
Raymond ;-%, professeur de chimie, à St-Vallier,
Hippolyte de Rozières , à Messimi.
Riche, propriétaire, à St- Alban.
Le chevalier Riboud , % , à Bourg.
Saint-Amans , à Agen.
Saloz, vétérinaire, à Odessa.
Scrheiïber , inspecteur divisionnaire en retraite, di-
recteur des mines, à Alemont.
Seguin , chimiste , à Annonay.
Seguin , manufacturier , & Annonay.
Servin-Cornon, propriétaire, à Cornon.
Souligné , propriétaire, à Foule-Tourte.
Silvestre, membre de l'Institut, %, à Paris.
Tessier , de l'académie des sciences, # 4, à Paris.
De Taluyers , à Ambronay, (Ain).
Thiebault-de-Berneaud , l'un des bibliothécaires de
la Bibliothèque Mazarine , à Paris. ‘
Thouin , jardinier en chef du jardin des plantes ,
à Paris.
Le Comte de Tournon, ( # %#), pair de France,
à Paris.
Trouflaut, ancien professeur de botanique, à Autun.
Vaivolet, propriétaire , à St-Lager.
Valentin, % 4, médecin, à Nancy.
Valot , professeur d'histoire naturelle, à Dijon.
De Varenne-Fenille, 3% , à Bourg.
Valoud , propriétaire, à Fleurieux sur l Arbresle.
Vatel , professeur à l'école vétérinaire d’Alfort.
de Lyon. 313
Vidaillan , propriétaire, à Auch.
Vitalis, propriétaire, à St-Vallier.
Volta, professeur de physique , & Pavie.
Waton, médecin, à Carpentras.
Fin du Tableau des Memkres.
314 Société royale d'Agriculture
TABLE
DES MATIÈRES.
Sur l'introduction de végétaux dans le départ. du
Rhône ; par Le Secrétaire.
STATISTIQUE AGRICOLE
DU DÉPARTEMENT.
Statistique de la commune des Hayes ; par M.
Cochard.
Etat actuel de la magnonerie de M. Poidebard , à
St.-Alban.
Sur le même établissement ; par M. Trolliet
Sur la statistique des récoltes en 1825.
Rapport sur la statistique des récoltes en 1824 ;
par le méme.
Observations œnologiques , recueillies dans les
années 1822 et 1823 ; par M. Rey-Monlean.
ÉCONOMIE RURALE.
Sur une charrue à tourne-oreille; par M. Chancey
Sur la charrue belge; par M. Hiboud.
Sur la même charrue ; par M. de Lachapelle.
Sur la charrue Belge, par M. de St-Didier.
Considérations sur les engrais ; par M. Faissolles.
Sur le même sujet; par M. Billion.
[ei
48
T:
52
de Lyon. 919
Da charbon comme engrais; par M. Batillat.
Assolement d'un domaine dans le département de
l'Ain ; par M. Billion.
Sur la greffe du noyer et celle du châtaignier ;
par M. Chancey,
Sur quelques variétés de chènes ; par M. Chancey.
Sur divers sujets agronomiques extraits de la
correspondance de M. Chancey.
Sur le trèfle incarnat ; par M. le chevalier
Charmetton.
Greffoir de l’invention de M. Madiot.
Sur l’ébourgeonnement des arbres fruitiers ; par
le méme.
Sur les semis d'arbres non acclimatés , et sur une
couche économique , sans fumier ; par le méme.
Sur le froment junciforme et l’elyme des sables,
pour consolider les sables mouvans.
Manière d'empècher les choux de monter; par
le méme.
Introduction du chanvre bolonais ; par le méme.
SUITE DE L’'ECONOMIE RURALE.
OPÉRATIONS agronomiques de M. de TALuYERS ;
particulièrement sur les irrigations.( M. Gras,
rapporteur ).
RaPPpORT DE M, Gras.
Culture des grandes et des petites prairies
Du régime et de l'administration des grandes
propriétés.
De l'amendement des anciennes prairies, considéré
59
64
69
76
77
81
82
84
83
gt
92
95
96
99
103
316 Société royale d’Agricullure
comme moyen d'améliorer les grandes pro-
priétés.
Application des principes précédens à la construc-
tion d'un grand réservoir d'irrigation.
HISTOIRE NATURELLE.
Notes sur des buis étrangers ; par M. Madiot
Sur trois espèces ou variétés d’alizier ; par le méme.
Sur deux variétés d'aubépin; par le méme.
Sur une variété de pommier et une variété de
poirier ; par le méme.
Sur l'agavé d'Amérique ; par le méme.
Sur des insectes nuisibles à l'agriculture, et sur les
moyens de s'en délivrer en leur opposant d’au-
tres animaux ; par le méme.
Notice sur une nouvelle variété de cyprès chauve;
par M. de Fréminville.
Notice sur une roche feldspathique smaragdifère ;
par M. Tissier.
Analyse de l'eau minérale de la Bonnette; par
le même.
Notice sur Antoine et sur Joseph de Jussieu; par
M. Grognier.
ARTS UTILES.
Essai sur quelques branches de l'industrie fran-
çaise ; par M. Beauvais. = Extrait par M.
Grognier.
Sur l'introduction de la race des moutons Dislhey ;
par le méme
Lettre de M. Terrct sur le mème sujet.
10%
117
141
160
164
166
174
172
183
197
209
218
de Lyon. 317
Notice sur l'art du boyaudier ; par M. Tissier. 221
Usage de l'écorce de tilleul ; par M. Madiot. 224
Sur une liqueur de table qu'on peut obtenir du
chalef; par le méme. 229
Sur l’huile de pepins de raisin ; par M. Batillat ,
corespondant. 226
RAPPORTS.
Sur les ponts en fil de fer ; par M. Seguin-aîné ;
rapporteur M. Cochard. 232
Sur une échelle graduée , inventée par M. Cham-
beyron ; méme rapporteur. 236
Sur une machine hydraulique , présentée à la So-
ciété ; rapporteur M. Bouchard-Jambon. 240
Sur un métier de M. Georges, fabricant d'’étoffes
de soie ; rapporteur M. Gensoul. 241
Sur les eaux minérales artificielles fabriquées par
M. Laville Delaplaigne; rapporteur M. Fauché. 242
Procédé proposé par M. le comte Dejan, pour la
conservation des grains et farines ; rapporteur
M Othon-de-Moidière. 247
Description des machines et procédés spécifiés
dans les brevets d'invention ; rapporteur M.
Faissolles. 249
Progrès de la distillation ; même rapporteur. 290
Mémoire sur les terres cultivées dans l’arrondis-
sement de St-Flour , par M. Devèze de Cha-
briol ; même rapporteur. 251
Notice sur la fabrication du fromage de Parmesan ,
par M. Huzard fils ; rapporteur M. Deschamps. 253
Sur un semoir présenté par M. Bonafous ; rappor-
teur M. Billion. 255
318 Societé royale d'Agriculture
Observations sur la machine Christian , à tiller le
chanvre , par M. Pidancet ; rapporteur M.
Leroy-Jolimont. 256
Mémoire sur la méthode de faire le vin et sur
la distillation ; rapporteur, M. Hemond. 261
Mémoire sur l'objet et la division des travaux
de la société d'agriculture de Montbrison ; par
M. de Poncins. 262
Mémoires de la Société centrale de Seine et Oise,
publiés en 1825 ; rapporteur, M. Trolliet. 265
Mémoires de zoologie , présentés par M. Des-
marets ; rapporteur , M. Trolliet. 264
OUVRAGES 1MIPRIMÉS OFFERTS À LA SOCIÉTÉ. 266
ÉVÉNEMENS. 297
NÉCROLOGIE. 294
PROGRAMME
De deux Prix, l'un pour la culture des Abeilles dans
le département du Rhône ; l’autre, sur l'acclima-
tation du chanvre bolonais, et de plusieurs Primes,
proposés par la Société, pour être décernés en 1825
et 1826.
Eu 1825.
Surer Des Prix.
De la culture des Abeilles. 299
Sur l’acclimatation du chanvre bolonaïs. 300
1. Prime. Indiquer la meilleure charrue à
tourne-oreille , pour labourer à plat, à la pro-
foudeur de 9 à 12 pouces. ibid,
de Lyon. 319
2.me Prime. Comparer les effets de l'engrais de
litière avec ceux d’un compost solide ou liquide. 3ox
3.M€ Prime, Comparer les résultats de la culture
du froment après les pommes de terre, etaprès
d’autres plantes, telles que le trèfle, le chanvre,
etc. 302
4me Prime. Culture comparative de trois plantes
oléiféres , le colza (brassica oleracea campes-
tris ); le pavot des jardins , (papaver som-
niferum) ; et la moutarde blanche , (sinapis
alba. ) ibid.
5.me Prime, Comparer , pour l'éducation des
vers à soie, la feuille du mürier greffé avec
celle da mürier non greffé , vulgairement dit
Sauvageon. 303
Conditions générales à remplir par les corcurens. bid.
Tableau des membres. 505
Fin de la Table des matières.
ERRATA.
Pages.
64, lig. 24, il y trouve un système d’assolement ;
lisez : le système d'assolement qu'il y trouva.
92, lig. 25, Capitala ; lisez : capitata.
93 , Note marginale, par le méme ; lisez : par M.
Matthieu Bonafous.
141, Dig. 12, Acer tartaricum ; lisez: Acer tata-
ricum.
145, lig. 25, Casuaria ; lisez: Casuarina.
146, lig. 4, Columa ; lisez : colurna.
149 , lig. 5, Chinensis ; lisez: Sinensis.
150 , lig. 15, Ulicus Floridanus ; lisez : Illicium
Floridanum.
156, lig. 27, Typhinus ; lisez : typhinum.
157, lig. 18, Spartinus albinus ; lisez : Spartium
album.
159, lig. 10, Viburnus punicifolius ; lisez : Vibur-
num punicifolium.
264, Note marginale, par M. Trolliet ; lisez : M.
Foudras.
265 , lig. 17e, Lyon, lisez: A/fort.
26 ; Rapport sur la pépinière départementale, après
la dernière ligne de la note (ci-après), lisez :
(Note de M. Trolliet).
AP
( Ad SN
olément }
trouva.
par M,
cer talas
Tlicium
Spartium
: Vibur=
sez: M.
e, après
, lisez?
Litk de Brunel à
}
Goff d What D
NOTICE
SUR M: DESCHAMPS,
Paarmacten , Trésorier de la Société Royale
d'Agriculture, Histoire naturelle et Arts utiles
de Lyon,
Par LE. SECRÉTAIRE,
nn
Imprimée par ordre de la Société.
A LYON,
DE L’IMPRIMERIE DE J.M. BARRET.
ES ——
1824.
t» = g
D SD UT
,
NOTICE
M' DESCHAMPS.
M. Nicoras-Amsnoise-Manrinx DESCHAMPS
naquit en 1750, à St-Dizier, petite ville de
Champagne. Sa famille, qui était fort hono-
rable, jouit encore dans la province de beau-
coup de considération. Après avoir fait de bonnes
études au collége de Châlons-sur-Marne , il se
destina à la médecine, et suivit des cours à l'hô-
pital de cette ville; maïs un goût bien prononcé
pour les sciences chimiques l’entraîna bientôt
vers la pharmacie; et ce fut dans une humble
officine de sa ville natale qu’il puisa les pre-
miers élémens de cet art précieux.
Bientôt apres, s'étant rendu à Paris , il entra
chez MM. Cadet et Desrones, qui tenaient à
cette époque le premier rang parmi les pharma-
ciens de la capitale. Tout en s'exerçant aux ma-
(4)
nipulalions pharmaceutiques dans un laboratoire
renommé , il étudiait la théorie de l'art à l'école
des Rouclle, des Macquer , des Beaumé. Témoins
de ses progrès, et pleins de confiance dans sa
probité, MM. Cadet et Desrones lui confièrent la
direction de leur établissement, et il put con-
cevoir l'espérance de leur succéder. Cependant
l'excès du travail altéra sa santé, et les médecins
lui ordonnèrent Pair du Midi; il vint à Lyon,
y connut M. Fleurant, pharmacien très-distin-
gué, dont il devint le successeur.
Avant que M. Deschamps s'établit dans notre.
ville, on y étiquetait d’une manière inintelligible
et barbare les médicamens , et cela non-seule-
ment sur les vases qui les recèlent à loffcine ,
mais encore sur les enveloppes dont on les re-
couvre pour les porter au dehors. Il introduisit
à Lyon l'usage suivi à Paris dans cette partie du
service médical. Les médicamens qui sortaient
de sa pharmacie étaient dénommés avec une élé-
gance typographique inconnue jusqu’à lui aux
pharmaciens lyonnais.
Il coulait des jours tranquilles dans le sein de
ses utiles et honorables occupations ; il arrivait
lentement , mais d’un pas sûr, à une fortune
qui n’est pas toujours la récompense de services
rendus à la société , lorsque la révolution éclata.
Qui a pu rester tout à fait étranger à ce terrible
mouvement ? M. Deschamps , dont le caractère
C5)
était si doux, si ennemi du bruit et de l’osten-
tation, ne put réussir. à rester ignoré dans son
laboratoire et dans son officine. Mais quel rôle
joua-t-il ? on le nomma en 1789 membre du
comité de bienfaisance de sa section. L'année
suivante , il était , dans la garde nationale, ca-
pitaine de la première compagnie de grenadiers
de son arrondissement. Lyon ayant pris les armes
contre l'anarchie, le poste de M. Deschamps ne
pouvait pas être sur les remparts dela ville assié-
gée; il fut attaché comme pharmacien de pre-
mière classe à l'hôpital militaire. Ce fut en pré-
parant les moyens de soulager et de guérir les
Lyonnais blessés au champ d'honneur qu'il paya
son tribut à sa patrie adoptive.
Après la chute de Lyon, il dut être en butte aux
fureurs révolutionnaires. Le plus acharné de ses
dénonciateurs fut Dorfeuille, digne ami de Col-
lot-D’herbois , qui, comme ce dernier avait été
comédien , et qui était descendu des tréteaux pour
s'asseoir sur un tribunal de sang. Dorfeuille qui
ne pouvait faire un crime à M. Deschamps d'avoir
préparé des remèdes pour des blessés , parmi les-
quels s’étaient trouvés des prisonniers de l’armée
assiégeante , Dorfeuille accusa M. Deschamps
d'entretenir des relations avec des familles de
nobles. Celui-ci fut obligé de quitter son domi-
cile, d'abandonner sa pharmacie pour aller cacher
son existence dans un réduit obscur ; il y resta
(6)
jusqu’au 9 thermidor. Dès qu'il reparut à sa
section , on le nomma successivement assesseur
du juge de paix , et officier municipal.
Le plutôt qu’il le put il quitta les fonctions pu-
bliques pour se renfermer dans la sphère de ses
modestes et honorabies travaux.
Toujours entouré de l’estime publique, on le
vit président de la société de pharmacie , tréso-
rier de la société de médecine, adjoint au jury
médical du département , enfin trésorier de notre
société.
Il avait appartenu précédamment à une société
d'amis des arts et de l’agriculture dans le sein
de laquelle des cours gratuits avaient élé ouverts;
c'est-là qu'il avait fait connaître les premières
découvertes qui,ant changé ka face de la chimie.
Comme chimiste, il s'adjoignit dans la suite
à la société des amis du commerce et des arts,
et il s’y fit remarquer par plusieurs rapports
importans.
C’est tout à la fois comme chimiste et comme
agronome qu'il est venu s'asseoir parmi nous.
Déjà il avait communiqué à la société de mé-
decine de notre ville deux mémoires intéres-
sans. Dans l'un il avait cherché à expliquer les
phénomènes. qui se passent pendant les décoc-
lions des végétaux , et déterminer la nature des
dépôts qui se forment alors. C'est principalement
avec le quina jaune qu'il avait opéré; et quoique
(ro
les résultats de ses recherches ne soient plus ad-
mis aujourd'hui, on ne peut disconvenir qu'ils
n’ayent concouru à mettre d'autres chimistes sur
la voie de la découverte très-moderne des vrais
élémens de l’une des substances médicales les
plus héroïques.
L'objet de l'autre mémoire était un procédé pour
préparer un extrait s5ommeux d'opium , dépouillé
de sa qualité narcotique et vireuse. Combien
d’autres chimistes recommandables avaient dirigé
leurs recherches vers cette chimèré pharmaco-
logique !
Les recherches de M. Deschamps étant anté-
rieures aux travaux entrepris sur l’opium paf
MM. Desrones fils, Sestuerner , Seguin et Robi:
guet , est-il étonnant qu’il n'ait pas connu alors
la morphine , l'acide méconique , Vopiane , narcoline
naguères sel essentiel de M. Desrones? Qui sait
si ces principes immédiats ainsi qué les acides ,
les alcaloïdes , les substances sui generis qui au-
jourd’hui se présentent en foule dans toutes les
analyses végétales , ne feront pas bientôt place à
d'autres principes mieux déterminés |
Quoi qu'il en soit, la plupart des praticiens
regardent encore l'extrait opiacé soluble dans l'eau
comme la préparation d'opium la plus certaine
et la plus efficace; c'est celle que M. Deschamps
isolait avec soin, sous le nom d'exfrail gommeux.
Sous celui de sel essentiel il avait entrevu loprane
CR.
et la morphine , il avait vu ces principes accom-
pagner la solution aqueuse, et il les soupçon-
nait dépositaires des vertus de l'opium , il pro-
posait même de les essayer isolément.
Ces deux mémoires ne sont pas les seuls tri-
buts qu'il ait payés aux sociétés de médecine et
de pharmacie. Il leur a encore communiqué des
observations sur les causes de la coloration en
rouge des cataplasmes de verveine que le vulgaire
attribue à une exhudation sanguine, tout en
concluant de cette supposition les vertus vulné-
raires de la plante.
Il leur fit part des faits nombreux qu'il avait
recueillis sur des infusions et décoctions mêlées
ensemble , attribuant les dépôts qui se forment
dans ces mélanges principalement à la décom-
position d’un sel calcaire par un principe as-
tringent.
IL proposa d'extraire par ébullition plutôt que
par expression le beurre de cacao, il prouva,
contre M. Demachy , pharmacien de Paris, que
le corps gras obtenu par ce procédé était beau-
coup plus abondant et nullement altéré. On
accuse ce produit d’être plus sujet à se rancir;
mais ne peut-on pas le préserver de cette détério-
ration en le purifiant et le conservant avec soin ?
Les autres mémoires dont M. Deschamps a en-
richi les porte-feuilles des sociétés de médecine
et de pharmacie sont relatifs aux fumigations
(9)
de graines de jusquiame ; à l'indispensable néces-
sité de n’employer le muriate de baryte que dans
de l’eau distillée ; à la solubilité aqueuse de la
crême de tartre par l'intermède du borate de
soude ; à la purification des aluns artificiels ; à
l'analyse d'une prétendue eau minérale, trouvée
dans les environs de Villefranche. Quelques-uns
de ces mémoires ont été recueillis dans un jour-
nal de pharmacie que fondèrent en 1797 Par-
mentier, Deyeux et Fourcroy.
Il me reste à rappeler les travaux dont M.
Deschamps a bien voulu nous communiquer les
résultats,
En 1805, il présenta l'analyse d’une terre
marneuse trouvée près de Lyon, et il reconnut
qu’elle était trop pauvre en parties calcaires pour
servir d'amendement.
Quelque temps après, il se livra à des recher-
ches sur le principe colorant de la graine du Ba-
sella rubra L. , et il en obtint différentes nuances
d'un beau rouge. L'Hyacinthus Botrioides lui
donna des couleurs bleues bien prononcées.
Ils'attachait dans le même temps à la recherche
du principe colorant qui existe dans la pellicule
des raisins noirs. Il prouva contre l'opinion com-
mune, que ce principe n’est point résineux, mais
extracto-savonneux , se dissolvant dans l'alcool
comme dans les liquides aqueux. La couleur peut
donc se développer dans le moût, indépendam-
(ro)
ment de l'alcool formé pendant la fermentation ;
et il est facile de colorer les vins en jetant dans
Ja cuve des pellicules de raisins noirs ramassés
pour cet usage et bouillis dans le moût. Ce n’est
pas sans succès que M. Deschamps a mis en pra-
tique son procédé , et il a eu des imitateurs.
Déjà M. Deschamps avait cherché à appliquer
le principe colorant de la pellicule des raisins
sur la laine et la soie, et les résultats de ses re-
cherches sur cet objet important avaient été
communiqués tant à notre société qu’à celle
du commerce et des arts de Lyon. Des rapports
favorables avaient été présentés à la suite d’ex-
périences concluantes par MM. Raymond et
Gonin juges bien compétens en cette matière.
L'invention de M. Deschamps fut adoptée par
la société d'encouragement pour l’industrie na-
tionale, qui siégeait à Lyon. (1) Elle figura
avec honneur à l'exposition du Louvre. Qui n’eût
dit que l’industrie française s'était enrichie d'un
nouveau moyen tinctorial , et qu'une substance
indigène dont la source est, pour ainsi dire,
inépuisable , allait être substituée à des produits
qui nous arrivent à grands frais d'un autre
hémisphère ! Mais le propre de la routine est
de rejeter, sans examen et avec obstination , tout
(1) Cette société de bien public a été dispersée par le
malheur des temps. On se demande depuis plusieurs années
qu’elle est la cause qui s'oppose à sa restauration.
Cu)
ee qui n’est pas ancien ; heureusement que son
empire n’est pas éternel; et il nous est permis
d'espérer que tôt ou tard les pellicules de raisin,
comme les feuilles de pastel, comme les fleurs de
carthame, remplaceront dans nos ateliers, de
teinture des végétaux étrangers.
* On doit considérer comme appartenant à notre
sol , les plantes qui s'y sont acclimatées , tel est
le thé du Mexique , Chenopodium Ambrosioïdes ,
que l'on cultive depuis long-temps en Portugal ,
et que M. Deschamps avait vu prospérer en pleine
terre sous le climat de Lyon. Il avait étudié
cette plante, il en avait fait des infusions théi-
formes , faciles à confondre avec le thé de la
Chine ; il lui supposait même des qualités su-
périeures, et il proposait de l’introduire dans
l'horticulture et dans la matière médicale.
Il s’étonnait de ce qu’on avait négligé jusqu'ici
la gesse tubéreuse , vulgairement gland terre ,
Latyrus Tuberosus. I en avait fait cuire les tu-
bercules dans l’eau et sous la braise.
Il présenta à l'auteur de celte notice et à
d'autres personnes ce mets nouveau, qui fut
trouvé de bon goût. Pourquoi ne pas adopter une
légumineuse très-rustique , dont les feuilles se- :
raient un excellent fourrage, et les tubercules
une ressource alimentaire, non-seulement pour
les animaux, mais encore pour l'espèce humaine.
Emule de Parmentier, M. Deschamps aimait
C12)
à diriger ses recherches vers les moyens d’aug-
menter la masse des subsistances et d'améliorer
le sort des classes malheureuses , il composa
pour les paysans de la Bresse un vinaigre de petit-
lait, bien préférable à celui qu'on débite dans les
campagnes , lequel, pour l'ordinaire, doit sa force
à de la pyrèthre, à du poivre long. Le vinaigre
de M. Deschamps , bien pur, très-salubre , assez
fort pour tous les usages, ne peut pas coûter
plus de 15 centimes la bouteille.
Toujours conduit par des vues d'économie phi-
lantropique, il donna une formule de boisson
rafraîchissante ; c'est une limonade artificielle ,
composée d’une macération de réglisse , dans”
laquelle on a versé de l'acide sulfurique et de
lesprit de citron. *
Quelque temps après, il se demanda pourquoi,
dans la fabrication de la bière , on rejetait
comme un inutile résidu le germon d'orge»:
vulgairement nommé {ourraillon ; il essaya cette
substance , comparativement avec l'engrais de
litière , et il s'assura que même à pelite dose,
son activité était plus énergique. (1)
Nous devons à M. Deschamps la connaissance
d’un autre engrais; c’est un compost analogue
a celui qui, sous le nom de Gadoue artificielle ,
(1) La vertu fertilisante de cette matière fut confirmée par
Panalyse chimique que M, Deschamps fils s’empressa d’en
faire. ”
| (15)
s'est introduit dans la plaine du Dauphiné voi-
sine de Lyon. M. Deschamps s'était montré par-
tisan zélé de ce dernier engrais , il le regardait
comme très-propre à fertiliser un sol léger et
sablonneux ; mais on l'a jeté sur toutes sortes de
terrains, sans aucun égard au temps opportun
pour son emploi ; on l'a d’ailleurs fabriqué sans
soins et sans précautions. Est-il étonnant que
n’en ayant pas obtenu les effets merveilleux qu'on
en attendait , on soit tenté de l’abandonner ?
La plupart des innovations agronomiques quel-
que soit leur degré d'importance et d'utilité,
sont d’abord annoncées avec éclat; elles sont en-
suite appliquées sans intelligence et à contre-
temps ; on n’en obtient point les prodiges dont
on s'était flatté, et au lieu de se contenter des
fruits qu’elles doivent naturellement produire,
on les rejette avec plus de promptitude qu’on
ne les avait adoptées ; on finit cependant par les
apprécier à leur juste valeur , et dès-lorselles s’éta-
blissent et se propagent d'une manière durable.
Tout en cherchant à perfectionner l’engrais
nouveau, très - improprement nommé Gadoue
artificielle, M. Deschamps était bien convaincu
que cette amélioration n'aurait pas une destinée
diflérente.
Je n'ai pas signalé tous les travaux de cet
habile et sage agriculteur, je n’ai rien dit de la
manière dont il cultivait ses vignes , dont il gou-
(14)
vernait ses cuves, dont il dirigeait toute l’exploi-
tation de son domaine.
Les essais auxquels il s'était livré , les succès
qu'il avait obtenus n’ont pas été consignés dans
des mémoires, mais ils ont été l'objet de plu-
sieurs discussions lumineuses, dont les traces
subsistent dans les procès-verbaux des séances
de la société.
En outre des rapports écrits dont M. Deschamps
a enrichi le porte-feuille de cette compagnie,
combien de rapports verbaux tous pleins d’inté-
rêts ne lui a-t-il pas présentés sur des questions
de chimie , d’agronomie, d'économie industrielle !
Admis au sein de la société dès les premières
années de sa restauration, nul ne fut plus exact
aux séances ; trésorier de la société, il en a,
pendant longues, années rempli les fonctions
avec un zèle à toute épreuve.
Faut-il maintenant peindre cet excellent
homme dans l'intérieur de son domestique ?
Fermement attaché à la religion de ses pères , il
en pratiquait en silence les préceptes divins ;
il était le modèle de ces vertus privées qui seront
toujours la garantie la plus sûre des vertus pu-
bliques. Bon époux , excellent père, il était Pobjet
de la tendresse respectueuse des siens, et parmi
eux on eût confondu les jeunes gens qui rece-
vaient chez lui les premiers élémens de l'art
pharmaceutique.
(235)
I surveillait leur conduite, il dirigeait leurs
mœurs , il prenait un vif intérêt à leurs progrès.
Tous les soirs, lorsque l'heure de la retraite
avait sonnée , il les appelait auprès de lui, et
dans des conférences paternelles qui, pour l'or-
dinaire se prolongeaient bien avant dans la nuit,
il leur demandait compte des opérations de la
journée , il leur expliquait la cause des phéno-
mènes divers qui avaient frappé leurs sens; il
leur enseignait à ramener à de sages théories les
faits qu’ils avaient recuellis, il s’attachait surtout
à leur inspirer de l'amour et du respect pour
la profession qu’ils avaient embrassée.
Cette profession qui suppose un esprit juste
et lumineux , des études préliminaires soignées,
des connaissances étendues sur l'histoire natu-
relle et la chimie, des notions positives sur plu-
sieurs branches de la médecine, beaucoup d'or-
dre , de sagesse , d'assiduité , une probité sévère,
une délicatesse à toute épreuve ; cette profession
est loin d'occuper en France dans l'estime pu-
blique le rang dont elle est digne; mais si chez
nos voisins elle est mieux appréciée, c’est sans
doute parce qu’ils ont su se préserver d'une hon-
teuse et déplorable facilité dans l'admission aux
professions savantes.
Quel état serait plus respecté que celui de
pharmacien , si ceux qui l’exercent pouvaient
être comparés à l'homme de bien dont je me suis
eHorcé de retracer les services et les vertus !
(16)
Îl a laissé, dans sa carrière, un frère, un fils,
plusieurs élèves dignes de lui.
M. Deschamps jeune s'est fait remarquer par
d'importans travaux sur les extraits des plantes,
l’analyse du quina, et une polémique vigoureuse
contre les coryphées des doctrines chimiques qui
régnaient au commencement du siècle. M. Des-
champs fils a, dans les dernières années de son
respectable père , dirigé son laboratoire et son
officine. Déjà il a enrichi de plusieurs bons mé-
moires le porte-feuille de la société qui lui a
confié les fonctions de trésorier que son père a
laissées vacantes.
Parmi les élèves de M. Deschamps , plusieurs
se sont distingués , tels sont M. Bussy, aujour-
d’hui professeur adjoint dans une école de chimie
de Paris, et M. Bieétrix qui, dans un grand
concours de botanique, de chimie, de pharmacie
ouvert à la capitale , vient d'obtenir plusieurs
couronnes.
Les succès de ces deux jeunes savans ont charmé
les derniers jours du bon vieillard.
Il a terminé son utile et honorable carrière
le 12 novembre 1823, étant âgé de 73 ans.
GROGNIER.
NOTICE
SUR
M*' WILLERMOZ,
Membre de la Société royale d'Agriculture
de Lyon,
Par M. Tenue, D.-M.-P.
Mrssisurs,
Si, lorsque la mort frappe une jeune vic-
time , nous sommes accablés d'un douloureux
effroi, nos regrets, quoique prévus, ne sont
pas moins vifs lorsque sa faux inévitable vient
à trancher les jours d’un vieillard , reste pré-
cieux d’une génération éteinte, souvenir vivant
d’un temps qui n’est plus. Nous voyons alors
se briser sans retour le lien qui nous rattachait
au passé; et si le jeune homme emporte avec
lui de brillantes espérances qu'il n’eût peut-
être jamais réalisées , le vieillard en mourant
nous ravit les utiles leçons d'une sagesse mûrie
par l'expérience des hommes et des choses.
Ce triste sentiment , Messieurs , vous l'avez
(2)
éprouvé plusieurs fois dans l’espace de peu de
mois. Vous avez vu successivement s'éteindre
MM. Rast, Deschamps et Willermoz. Une
plume éloquente vous a retracé les vertus pu-
bliques et privées des deux premiers : je viens
aujourd'hui rendre à M. Willermoz un hom-
mage bien mérité par celui qui parcourut ho-
norablement une longue carrière.
M. J.-B. Willermoz naquit à Lyon le ro
juillet 1730 , au sein d'une famille recomman-
dable. Ses premières études furent confiées à
un vénérable ecclésiastique dont il conserva tou-
jours un tendre souvenir : il en avait achevé le
cours à douze ans dans le collége des Jésuites.
Peu d'années après , ayant embrassé le com-
merce des riches étofles de soie , dont notre
ville fournissait alors toutes les Cours de l'Eu-
rope , il fut appelé à faire de nombreux voyages
à Paris , dans toute l'Allemagne et en Angle-
terre , et y forma des relations intimes avec
quelques hommes distingués de cette époque.
Doué d’une tête pensante et d'un caractère ré-
fléchi , il trouva dans les sciences morales un
puissant attrait , et leur donnant toujours pour
base la religion, il se livra à leur étude avec
une vive ardeur. Ces travaux adoucirent l’amer-
tume des maux dont , jeune encore , il se
vit accablé ; mais s'il put les supporter avec
(3)
un courage qui ne se démentit jamais , il le
dut surtout à sa pieuse résignation et aux conso-
lations que lui prodiguait une sœur chérie,
Mad. V.€ Provençal, femme d'un mérite supé-
rieur et trop peu connu, vrai philosophe chré-
tien qui , à tous les dons de l'esprit , à l’ins-
truction la plus solide , savait unir la piété
la plus éclairée , toutes les vertus sociales et
toutes les qualités du cœur. Ils étaient dès-lors
tous deux connus par leur attachement aux prin-
cipes d’une association célèbre dont M. Willer-
moz fut un des membres les plus influens , et
dont plus tard il tenta vainement de ranimer
les cendres déjà refroidies. La haute considé-
ration que ses connaissances lui méritèrent, lui
donna de nombreuses relations avec des Princes
régnans et plusieurs autres personnages d'un
rang élevé. Par suite de ces rapports , dont il
conserva quelques-uns jusqu’à la fin de sa vie,
et dans lesquels il sut allier le respect dû
aux Grands de la terre avec le respect que
l'homme se doit à lui-même, plus d’une fois
il lui fut offert, avec instance , des places lu-
cratives et des dignités éminentes ; mais il pré-
féra toujours sa patrie et la tendresse de sa fa-
mille à l'or et aux faveurs d’une cour étrangère.
Nous devons le dire ici: l'opinion publique,
injuste seulement envers ceux qui s'enveloppent
(4)
de mystères , a trop souvent placé M. Wil-
lermoz dans les rangs d’une foule d’adeptes
avec lesquels il n'eut jamais de commun que
certaines désignations vagues et insignifiantes,
mais dont il repoussait les principes avec d’au-
tant plus de sincérité qu'il en connaissait mieux
les dangers et les funestes conséquences. Vous
n’en sauriez douter, Messieurs, vous qui avez
connu sa noble franchise et sa piété profonde;
nous pouvons surtout l’attester, nous , ses pa-
rens , ses amis, pour qui il fut comme un livre
ouvert et instruclif, nous qui avons trouvé dans
sa conduite de si généreux exemples, et re-
cueilli de sa bouche de si utiles conseils.
M. Willermoz avait 60 ans, lorsqu’en 1790
il fut nommé administrateur de l'Hôtel-Dieu
de Lyon. Une santé robuste conservait en lui
cette vigueur de l'esprit et cette énergie de l’ame
que vous avez encore admirées trente ans plus
tard. Incapable de remplir aucun devoir à demi,
son premier soin fut de s'instruire de tous ceux
que lui imposaient ses nouvelles fonctions ; en
examiner , en connaître toutes les parties furent
ses premières pensées, remédier aux abus et ré-
gulariser le service, fut le but de tous ses efforts.
Déjà il avait contribué à introduire de nom-
breuses améliorations , lorsque le char révolu-
tionnaire, poussé par une puissance irrésistible ,
(5)
après avoir renversé tous les obstacles, écrasé ses
guides eux-mêmes , sembla entraîner la France
dans un profond abîme. Lyon épouvanté des
convulsions qui agitaient le gouvernement; Lyon
menacé et déjà atteint dans ce qu’il avait de
plus cher, son industrie, sa fortune, la vie de
ses citoyens ; Lyon crut devoir s’armer contre
la plus dangereuse des tyrannies , celle qui se
couvrant du nom de la liberté n'était que le
despotisme de l’anarchie. M. Willermoz prévit
les maux, suite d’une lutte trop inégale. Comme
administrateur de l'intérieur , il se hâta de faire
des approvisionnemens considérables. Cepen-
dant le danger devenait pressant; tousses collè-
gues avaient fui; mais la pensée d’abandonner le
dépôt confié à son zèle ne se présente point à son
esprit. Bientôt une ligne de fer nous enve-
loppe ; le siége commence ! Vainement il fait
arborer sur l'Hôtel-Dieu le drapeau noir : les
images suppliantes de la douleur et de la mi-
sère, loin d’attendrir les haines civiles , les irri-
tent, et leur servent de point de mire pour
diriger sur l'asile sacré des pauvres leurs feux
destructeurs. L’incendie éclate de toutes parts.
Le zèle de l’administrateur a tout prévu : dans
la seule nuit du 24 août, quarante-un foyers
enflammés sont éteints. M. Willermoz est par-
tout ; il semble se multiplier ; il fait enlever les
*
(6)
malades des rangs embrasés, les fait transporter
sous les voûtes , il les porte lui-même; et lors-
qu'effrayés des périls qui l’environnent , ses
amis le pressent de se retirer , il répond : La
Providence m'a placé ici, je reste à mon poste.
Les malades furent transférés au couvent des
deux Amans et aux Cordeliers de l'Observance :
là ils purent souffrir avec plus de sécurité Ce-
pendant la famine se fit bientôt sentir dans la
ville ; les autorités connaissant les approvision-
nemens de l'Hôtel - Dieu , crurent pouvoir les
faire enlever, mais la résistance de M. Villermoz
fut invincible, et le pain des pauvres , celui des
Frères et des Sœurs qui les soignaient, fut con-
Servé par la présence d'esprit et Je courage d’un
seul homme.
Après la prise de Lyon, les Loti de la
convention furent plus funestes à cette cité que
ne lavaient été ses soldats. M. Willermoz fut
arrêté : on lui faisait un crime d’avoir sauvé
l'Hôtel-Dieu. Indigné, il osa reprocher aux
représentans leur cruauté. On le reconduisait
en prison , lorsque le dragon , à la garde duquel
il était confié , frappé de son courage et touché
sans doute à l’aspect de cette figure sur laquelle
étaient empreintes la noblesse et la probité, lui
dit : citoyen , {u m'as l'air d'un brave homme, sau-
ve-loi. Au milieu des crimes qui couvraient la
ua,
France dans ces temps orageux , de pareils traits
consolent et ne doivent point être abandonnés à
l'oubli. M. Willermoz trouva un asile impéné-
trable ; mais son ame fut déchirée de douleur en
apprenant que tandis qu’il sauvait sa tête, celle
du plus jeune deses frères roulait sur l’échafaud !
Peu d'années après on se ressouvint des ser-
vices rendus, et M. Willermoz fut de nouveau
appelé à l'administration des hospices, adminis-
tration qui réunissait alors la Charité à l'Hôtel-
Dieu. Le sol était encore agité et le ciel encore
ému des tempêtes de la veille; mais rien ne
pouvait retenir M. Willermoz, lorsqu'il s'agissait
du bien public. Il fit partie de cette commission
de cinq administrateurs chargés de rassembler
les biens des pauvres qui avaient été dispersés ,
et de réparer le mal qui avait été fait. Il consacra
à ce devoir toute son activité, toute son énergie,
et prépara ainsi les succès des administrateurs
à venir,
Le pouvoir de cette époque convaincu sans
doute, ainsi qu'on l'est généralement aujour-
d'hui, qu’une administration doit être respon-
sable, et par conséquent salariée , offrit des
émolumens à la commission qu’il appelait à la
direction des hospices ; mais cette commission
refusa tout salaire, et pour sa part M. Willer-
moz n'a jamais rempli que des fonctions gratuites.
(8)
Ce ne fut pas seulement dans l'intérieur
des hospices que la commission administrative
déploya son zèle et mérita la reconnaissance: de
ses concitoyens. C’est encore elle qui, appuyant
la résistance des autorités locales aux ordres
réitérés du gouvernement , pour la vente du
palais de St-Pierre , eut l’heureuse pensée de le
réclamer en payement des sommes dues aux
hôpitaux , et arracha ainsi ce superbe monu-
ment aux mains avides et destructives de ligno-
rance.
Qu’elle serait grande la folie de l'homme qui
chercherait la récompense de ses travaux dans
le jugement de ses contemporains ! Les repré-
sentans du peuple avaient fait un crime à M.
Willermoz de ses efforts pour arracher l'Hôtel-
Dieu à la destruction ; et de nos jours quelques
esprits chagrins lui ont reproché d’avoir travaillé
sous le directoire à rétablir cet admirable té-
moiïgnage de la piété de nos pères. Ainsi les cir-
constances changent, et trop souvent les hommes
avec elles ; mais les passions se succèdent et
restent les mêmes. M. Willermoz avait sur la
vertu des idées plus fixes et plus positives ; il
pensait que sous tous les régimes les malheureux
étaient ses frères. Il était convaincu que la cha-
rité est toujours légitime. Si nous pouvions être
n]
entendus de ces hommes à qui de si terribles
C9)
leçons n’ont point encore appris l’indulgence ,
nous leur dirions : vainement vous renversez le
marbre chargé de rappeler aux pauvres les noms
de leurs bienfaiteurs, vous ne sauriez étoufler
la voix de la reconnaissance (1); plus vainement
encore vous refusez à l'homme de bien le secours
de vos prières (2); celui qui sonde les cœurs et
pénètre les plus secrètes pensées , le jugera dans
sa justice et le récompensera dans sa bonté.
Tous les malheureux sans doute ne sauraient
trouver un asile dans les hospices, et les bureaux
de bienfaisance ainsi que la commission admi-
nistrative de cette institution fournirent à M.
WVillermoz de nombreuses occasions de signaler
son zèle et sa charité.
A l'âge de 70 ans, M. Wiillermoz fut nommé
membre du Conseil-général du département du
Rhône , et dans ces nouvelles fonctions il ap-
porta de grandes lumières , un caractère indé-
pendant et la plus vive ardeur pour le travail.
Toujours infatigable, il rendit d'importans ser-
(1) Un marbre placé à l'Hôtel-Dieu rappelait. aux pauvres
les noms des cinq membres de la Commission administrative
dont nous venons de parler : depuis quelques années il a
disparu.
(2) Lorsqu'un ancien administrateur vient à mourir, l’ad-
ministration des Hospices fait eélébrer le service divin pour
Je repos de son ame, Cette piense consolation a été refusée
à la cendre de M, Willermos.
(10)
vices à son département , contribua au réta:
blissement de larchevéché , présenta à toutes
les sessions de nombreux et lumineux rapports
sur les finances et particulièrement sur les amé-
liorations à introduire dans le régime des pri-
sons. Malgré son grand âge , l’estime de ses
concitoyens et des autorités lobligea, à trois
reprises différentes , de continuer des fonc-
Uons qui semblaient au-dessus de ses forces , ‘et
qu'il n'abandonna pas avant quatre-vingt-cinq
aps.
Mais tous les instans de M. Willermoz n'é-
taient pas donnés aux sciences et aux fonctions
publiques, il en consacrait encore à cultiver des
relations chères à son cœur et précieuses à son es-
prit. Parmi les hommes distingués qui lui furent
unis par les liens de l'amitié , pourrais-je oublier
un nom cher à votre souvenir , celui de l'abbé
Rozier ? M. Willermoz partagea cette honorable
amitié avec son frère le médecin, et plus d'une
fois les conseils de tous les deux furent utiles à
la perfection du magnifique monument que le
Columelle français élevait à l’agriculture. Dès
l'origine de la société d'agriculture du départe-
ment du Rhône, l’ami de Rozier vint s'asseoir au
milieu de vous : il vous apportait régulièrement
les résultats de ses expériences œnologiques, et
tous les ans il enrichissait votre compte rendu
ŒT)
d’un tableau d'observations météorologiques faites
avec la plus scrupuleuse exactitude.
Vous peindrai-je M. Willermoz dans l'in-
térieur de sa famille ? Il eut toutes les vertus
privées ; mais plus qu’un autre, il fut accablé
de chagrins et appelé à une courageuse résigna-
tion. L’aîné de douze frères et sœurs , il resta
seul. Uni dans un âge avancé à une femme
jeune et aimable , il la vit succomber à une
maladie douloureuse : enfin le seul fils qui lui
restât, son unique espérance, celui qui devait
fermer ses paupières appesanties par les années,
expira dans les bras de son père au moment où
il semblait promettre de douces consolations à sa
vieillesse. C'est surtout dans cette cruelle circons-
tance que nous avons admiré le courage de M.
WVillermoz; nous Pavons vu au milieu de la
longue et cruelle agonie de son fils, se précipiter
au pied du Christ, et, nouvel Abraham, lui
offrir en sacrifice ce qu'il avait de plus cher.
Tant de pertes remplirent d’amertume les
dernières années de sa vie ; mais ne lui ôtèrent
rien de cette bonté inaltérable, de cette charité
active qui le rendaient cher à tous ceux qui
l'ont connu , et qui ne l'abandonnèrent qu’avec
la vie. 11 mourut le 29 mai 1824. »
M. Willermoz était d’une taille élevée , son
visage portait l'empreinte de la douceur unie à
(12)
Ja dignité ; ses discours étaient graves, et sa
parole lente et solennelle ; il avait du plaisir
à rappeler les souvenirs du passé ; il avait vu
de si longues années ! Ce qui le caractérisait
particulièrement était cette foi vive, cette con-
viction profonde des vérités de la religion , qu'il
cherchait sans cesse à faire pénétrer dans le
cœur de ceux qui l’écoutaient ; c’est ce sen-
timent qui l’animait, lorsqu'il donnait tant
de soins à l'administration de l’église de sa par-
roisse dont il fut fabricien depuis le rétablis-
sement du culte jusqu’à sa mort ; c’est encore
ce même sentiment qui inspirait toutes ses pen-
sées , présidait à toutes ses actions et qui , dans
un corps brisé par quatre-vingt-quatorze années
de travaux et de souffrances, conserva jusqu’au
dernier moment une ame pleine de résigna-
tion , de calme et de piété.
RAPPORT
PRÉSENTÉ
A LA SOCIÉTÉ ROYALE D’AGRICULTURE ,
HISTOIRE NATURELLE ET ARTS UTILES
DE LYON,
Par la Commission composée de MM. Sr-Divter ,
TrozLier, PELLETIER, Gonin ; et GRAS, Rapporteur.
SUR LA PÉPINIÈRE DÉPARTEMENTALE DU RHÔNE.
INPRIMÉ PAR ORDRE DE LA SOCIÉTÉ.
A LYON,
DE L’IMPRIMERIE DE J.M. BARRET.
1824.
RAPPORT
SUR LA
PÉPINIÈRE DÉPARTEMENTALE
DU RHONE.
MESSIEURS,
Dix l’une des séances de la dernière session,
le Conseil général du département du Rhône a
délibéré plusieurs mesures relatives à la pépi-
nière départementale.
Il a reconnu et consacré en principe qu'elle
serait conservée.
Il a émis le vœu qu’elle soit exclusivement
affectée à la naturalisation des arbres exotiques,
et que, sous ce rapport, étant d’un intérêt
général pour la France, le Gouvernement in-
tervienne et fournisse aux dépenses de la pépi-
nière.
Il prie M. le Préfet de chercher un terrain
nouveau, plus convenable pour y transférer
C4)
la pépinière , et il met dès à présent celui qu'elle
occupe à.la disposition de ce magistrat, pour
y fonder, si le cas se présente, un autre éta-
blissement plus utile.
Enfin, le conseil général arrête qu'il ne sera
alloué pour l’année 1824, dans son budjet , aucun
fonds pour la pépinière.
Trop de rapports et des rapports trop intimes
lient les travaux dont vous vous occupez,
aux succès et à la prospérité de la pépinière
départementale, pour que vous restiez indiffé-
rens sur les conséquences de la délibération du
Conseil général et du vœu qu’il a émis.
Les limites dans lesquelles on circonscrirait
désormais les essais et les travaux de la pé-
pinière; sa translation dans un terrain nou-
veau et les sacrifices qui en seraient insépa-
rables ; la contradiction que vous avez eue à re-
marquer entre le refas de tout secours pour
l'année 1824, et la résolution prise de mettre
dès à présent à la disposition de M. le Préfet,
le terrain occupée par la pépinière : en un mot,
ces mesures et ces modifications vous ont paru
contraires au principe conservateur consacré par
le Conseil général, qui cependant a rendu à cet
établissement , l'hommage qu'il est d'un intérêt
général pour toute la France.
Chacun de nous en particulier et la Société
(5)
en corps a dès-lors pensé, qu’en plaçant la pé-
pinière départementale sous votre surveillance ;
qu'en choisissant dans votre sein les adminis-
trateurs éclairés et désintéressés qui l'inspectent
et la dirigent; ces témoignages éclatans dela
confiance dont le Gouvernement vous honore,
vous imposaient l'obligation de lui signaler les
dangers dont l'exécution de l'arrêté du Conseil
général semble menacer un établissement qui
fut un des bienfaits de nos Souverains et qu'ils
daignent protéger.
Cette maturité qui caractérise vos délibéra-
tions , vous a engagés à nommer une commis-
sion chargée de vous faire un rapport, 1.° sur
l'état actuel de la pépinière départementale; 2.°
sur les effets de l'affectation exclusive de cet
établissement à la naturalisation des arbres
exotiques; ,
3.0 Sur les conséquences de sa translation
dans un nouveau terrain.
C’est le résultat de ses recherches et de ses
réflexions que la Commission a l'honneur de
vous présenter.
Ce serait donner une idée imparfaite de l'état
actuel de la pépinière départementale du Rhône,
que de se borner à exposer ce qu'elle est au-
jourd'hui. Pour s'en former une opinion exacte;
il faut rétrograder à des temps plus reculés,
C6)
la prendre à sa formation , la suivre dans ses
revers et ses différentes créations, l’étudier dans
ses progrès, mesurer son degré d'utilité , calcu-
ler les services qu'elle a rendus à cette branche
de l'économie politique, et ceux qu'on doit en
attendre encore. C’est en comparant ce qu’elle
fut avec ce qu'elle est , qu’on peut sainement
juger son état présent.
La création des pépinières publiques ne date
pas de nos jours , et ce n’est pas dans des temps
modernes qu'on doit chercher leur origine.
Elles existaient en 1643, telle est du moins
l'époque à laquelle remonte celle fondée à Lyon.
Plus tard Louis XV en institua dans chaque
généralité de son royaume.
Sous l’illustre abbé Rozier, la pépinière pu-
blique de Lyon s'agrandit et se perfectionna.
Ce savant agronome établit ‘la pépinière dans un
emplacement vaste et propice à tous les genres
de culture. Il y fonda une école de taille pour
les arbres fruitiers , et de greffe pour ceux de
toute nature. Lui-même donnait des leçons aux
élèves qui afluaient de toutes parts, et alliant
la pratique aux principes qu’il leur enseignait,
il les familiarisait avec la théorie qu’il a dé-
veloppée dans son immortel ouvrage. Aussi,
s'être formé sous ce grand maître, devenait-il
pour les jardiniers et les pépiniéristes , un titre
de recommandation.
(7)
Les orages révolutionnaires renversèrent ce
précieux établissement. Il ne fut recréé qu’en
l'année 1804.
Plusieurs décisions administratives avaient
préparé cette restauration.
Dans un temps où l'on comptait pour peu
les institutions les plus utiles, votre Société et
la pépinière publique parurent commander une
exception. Peu après la journée du 9 thermi-
dor, un arrêté pris au nom du Gouvernement,
vous céda pour vos travaux, à la pépinière,
pour ses expériences, un emplacement dans le
clos de la Déserte. j
Postérieurement et dans des lettres circulaires
des 12 fructidor an V et 25 vendémiaire an VII,
le ministre de l'intérieur avait recommandé
au zèle et à la sollicitude des autorités locales,
de propager et de favoriser les plantations, les
semis , les pépinières; mais ce fut seulement le
7 ventose an X, que, pour frapper plus direc-
tement le but qu'il s'était proposé, il décida qu'il
serait formé des pépinières départementales.
À peine cette volonté fut-elle connue, que
le Corseil général du département , du Rhône
et votre Société applaudirent , dans leurs dé-
libérations , aux vues bienfaisantes du Gou-
vernement. À son tour, M. le Conseiller-
d'Etat, Préfet, dans un arrêté du 10 messidor
(8)
de la même année, se rendant l'interprète
des vues et de l'intention du ministre , de votre
empressement et de celui du Conseil général à
les seconder , y exprima les sentimens d'amour
du bien public dont lui-même était animé.
L'un des principaux motifs de cet arrêté fut :
« Qu'il est des principes de l'économie poli-
tique , du besoin public et du devoir de l'admi-
nistration, d’exciter , de diriger et d'encoura-
ger , soit par l'établissement des pépinières, soit
par des semis et par des plantations, la mul-
tiplication des arbres fruitiers et forestiers; des
arbres fruitiers qui, par l'abondance et la beauté
de leurs fruits, enrichissent les propriétaires et
offrent à la Société des ressources et des jouis-
sances ; des arbres'forestiers et des taillis néces-
saires à la marine, aux arts, aux constructions,
à la confection des charbons et à l'usage jour-
nalier. »
Des dispositions réglementaires et parfaite-
ment combinées, furent la conséquence de ces
importantes considérations.
C’est sous ces auspices, avec le concours de
toutes ces volontés, que la pépinière de Lyon
se relevant , sous le titre de pépinière départe-
mentale, du coup qui l'avait abattue, fut dé-
finitivement organisée.
Jusques à cette époque ; elle n'avait oceupé
(9)
que l'emplacement qui lui avait été cédé dans le
clos de la Déserte. La nécessité d'un local plus
vaste se fit bientôt sentir.
On joignit à celui du clos de la Déserte , un
terrain situé dans la commune de Villeurbane :
lequel , en raison de son étendue, parut suffire
aux besoins de la pépinière.
Un nouveau revers l'y attendait.
Quoique la qualité et l'exposition du terrain
fussent peu favorables à la naturalisation et à
la culture des arbres et des plantes, cependant
un petit nombre d'années avait suffi pour éle-
ver l'établissement à un assez haut degré de
prospérité. Déjà son mobilier se composait de
plus de 130,000 plants d'une belle venue et
de plus de 300,000 pourrètes.
Ces succès, fruit d’un travail opiniâtre et d'es-
sais multipliés, étaient fortement balancés par
les incommodités inhérentes au sol, et par les
fréquens accidens que causaient les inondations
du Rhône. Cet état de choses n’échappa point
à votre surveillance , vous sollicitâtes la trans-
lation de la pépinière, dans un terrain plus con-
venable.
Cette translation fut décidée: malheureuse-
ment on mit dans lexécution, une précipita-
tion si étrange , si inconcevable, que tout le me-
bilier périt sous la hache du bucheron.
, (1872
Les arbres furent convertis en fagots , les
pourrètes sechangèrent en fumier ; la dévastation
fut telle que le produit de la coupe n’en a pas
couvert les frais.
Après cet événement désastreux , il ne restait
à la pépinière que l'emplacement et le mobilier
de la Déserte. Un avenir moins orageux parut
lui sourire. Les titres les plus solennels, les
plus augustes lui ‘garantirent une stabilité sans
laquelle ces sortes d'établissemens ne peuvent
ni prospérer , ni même se maintenir.
Le 20 décembre 1817, le Conseil général du
département du Rhône proposa au Gouverne-
ment de lui céder en toute propriété le grand
clos des Cordeliers de l'Observance, appartenant
à la ville de Lyon , pour être réuni à la pé-
pinière départementale, sous la condition que,
de son côté , le Gouvernement céderait à la ville,
également en toute propriété, l'espace de ter-
rain que la pépinière départementale occupait
dans l'intérieur du Jardin des plantes; plus,
un petit bâtiment joignant le passage qui con-
duit du Jardin à la montée de la grande Côte.
Ces conditions respectives devinrent le sujet
d'un échange arrêté le 19 janvier 1818, entre
M. le Préfet et M. le Maire, sous le bon plai-
sir et sauf l'approbation de sa Majesté.
Ce qui tient à l’historique de la pépinière
(11)
départementele , se réduit à l'analyse de quel-
ques articles de ce traité.
Par le premier , la ville de Lyon remet, cède
et transporte à perpétuité , pour l'établissement
d'une pépinière départementale , le grand clos de
l'Observance comportant, d'après la mensuration
qui en a été faite, 312 ares 12 centiares ; ou
autrement, 24 bicherées et 1/5 de bicherée,
mesure de Lyon.
Le jardin potager, complanté d'arbres à fruits,
comportant, d'après la mensuration , 25 ares
54 centiares, ou autrement, deux bicherées ,
mesure de Lyon.
L’aile méridionale du bâtiment claustral, bor-
nant du côté du nord , le jardin potager.
Enfin , ancien clocher.
Par l’article 9, il est dit que M. le Préfet pren-
dra pour cause d'utilité publique, un arrêté qui
enjoindra à tous occupans, à quelquetitre que ce
soit, des portions de terres, jardins ou bâti-
mens desdits cordeliers de l'Observance, de
les évacuer dans le délai de quinze jours, afin
que la pépinière départementale puisse Y commen-
cer; Sur-le-champ , les travaux préparatoires aux-
quels elle à à se livrer , pour que les plantations
qu'elle y projette soient faites en temps utile.
Dans Particle 11 on lit: « Toutefois la pé-
pinière départementale conservera, d’ici au pre-
(12)
mier mars de l’année 1819, la faculté de conti-
nuer dans l'emplacement du jardin des plantes,
la culture des arbres et arbustes qu’elle ne pour-
ra pas enlever immédiatement ; mais à l'époque
du premier mars 1819, tous les arbres et ar-
bustes de la pépinière devront nécessairement
être enlevés ; à défaut, ils seront censés faire
partie du terrain cédé à la ville. »
« Pareillement, pendant le cours de la pré-
sente année , la ville aura la faculté de faire,
ou préparer dans ce même emplacement , toutes
dispositions qu’elle jugerait convenables, er {ant
toutefois que ces dispositions seraient compatibles
avec la culture desdits arbres et ne leur porteraïent
aucun préjudice. »
Quoïque ces stipulations de détail paraissent
tenir plutôt à l’économie du traité qu'aux re-
cherches que vous attendez de votre commission ,
cependant elle ne les a pas jugées étrangères au
rapport dont vous l’avez chargée. Elle a cru
utile de vous faire remarquer d’une part, que
Péchange eut pour cause et pour condition , d’af-
fecter à la pépinière départementale, le grand
clos de l'Observance, parce qu’il n’est pas in-
différent à la splendeur d’une cité, de posséder
dans son enceinte des établissemens publics; d'autre
part, de vous faire observer le prix attaché aux
travaux de la pépinière qu'on pensait ne pouvoir
ie 79
trop accélérer, et les précautions infinies qu’on
prenait pour le transport et la conservation de
son mobilier. |
Une ordonnance royale du 10 décembre 1820,
a sanctionné le traité d'échange. Sa Majesté au-
torise le Maïre de la ville de Lyon, à céder au
Préfet du département du Rhône le grand clos
des Cordeliers de l'Observance, destiné à Péta-
blissement d'une pépinière départementale.
Ainsi, un contrat intervenu entre deux grandes
autorités administratives , et plus imposante
encore , la sanction du Souverain , assurent à la
pépinière départementale un asile contre les
vicissitudes qui jusques alors s’étaient opposées
à ses progrès. Pourrait-on aujourd'hui mécon-
naître des garanties aussi solennelles ? Ce doute
pénible ne s'est pas même présenté à l'esprit de
vos commissaires. Ils se sont hâtés de se renfer-
mer dans les limites que vousleur avez prescrites.
Le premier objet de leurs recherches a donc
été de s’assurer si un terrain nouveau serait plus
convenable pour y transporter la pépinière dé-
partementale.
Les naturalistes les plus instruits considèrent
la position de la ville, située au 45." degré de
latitude, comme étant la plus propre pour ac-
climater les arbres exotiques du nord et du midi.
Le clos de l’Observance seconde merveilleuse-
ment cette position.
(14)
La qualité du sol est un granit en décompo-
sition, que d’épaisses couches de terre couvrent
dans certaines parties. Les expositions sont extré-
mement variées. Elles offrent aux semis des
abris contre les rigueurs de l’hiver ; les ardeurs
du soleil aux individus qui les demandent ; une
température plus douce à ceux qui l’exigent ; et
une source assez abondante fournit l'eau néces-
saire pour larrosement des semis et des plantes.
La beauté des produits garantit la bonté du sol.
On remarque dans tous les sujets une végéta-
tion vigoureuse; l'accroissement des arbres et
des plantes est prompt ; leur constitution robuste ;
rien ne souffre , rien ne languit; tout respire la
vie et la force. On s'étonne , on conçoit avec peine
que quatre années à peine écoulées aient sufh à
couvrir d'autant de richesses, le terrain occupé
par la pépinière départementale.
Son mobilier , en effet, quoique dans un em-
placement resserré , se compose aujourd'hui de
25,000 planis de toute nature, prêts à vendre,
et de 150,000 pourrètes. Ce qui rend ce mobilier
plus précieux encore, ce qui confirme la bonté
du sol, c'est qu'élevés dans un terrain qui n’est
ni trop substantiel, ni trop aride, et qu'aucun
engrais ne féconde, les sujets extraits de la pé-
pinière se plaisent et prospèrent partout où ils
sont transportés : différens en ce point des indi-
(15 )
vidus des autres pépinières qui, nourris dans
des terres trop substantielles, le plus souvent
dans de vrais terreaux, en imposent d'abord à
l'œil de l'acheteur, mais qui, transplantés dans
un sol de moindre bonté, languissent, et périssent
bientôt dans un sol de mauvaise qualité.
La variété des expositions du terrain du clos
de l’'Observance offre encore cet avantage que
chaque individu vivant sous la température la
plus favorable à sa vitalité et à son développe-
ment , admet sous le rapport de cette cause na-
turelle , une distinction première ; des observa-
tions exactes ont ensuite nuancé et gradué cette
distinction. Toutes les espèces sont séparées ,
tous les sujets sont classés par famille, numé-
rotés avec soin, observés avec attention ; et cet
ordre admirable, résultat d'une longue expé-
rience , d’un travail assidu , semble présenter aux
réflexions de l’agronome philosophe, l'image de
cette loi universelle qui, dans la chaîne des êtres,
assigna à chacun la place qu'il y dut occuper.
Ces recherches préliminaires ont donné à votre
commission la conviction intime qu'il serait dif-
ficile de trouver un terrain plus convenable aux
travaux et aux essais de la pépinière départe-
mentale,
Quel serait ensuite l'effet de son affectation
(16)
exclusive à la naturalisation des arbres exotiques ?
Votre commission a d'abord cherché dans les
faits historiques de la pépinière départementale,
les éclaircissemens que vous lui avez demandés
sur ce point d'un grand intérêt.
Affecter’exclusivement la pépinière à la natu-
ralisation des arbres exotiques, ce serait s'écarter
de l’une des vues principales pour lesquelles elle
fut instituée.
Sans remonter à l’origine de ces établissemens,
mais en la fixant seulement aux temps qui pré-
cédèrent nos orages révolutionnaires et à ceux
qui les suivirent, il est incontestable que l'accli-
matation des arbres exotiques ne fut pas le but
unique de l'institution des pépinières publiques.
Le gouvernement s’en promit d'autres résultats
qu'il jugea non moins importans , et ce fut aux
autorités administratives qu'il s’en remit pour
proclamer les principes dont les effets devaient
en être la conséquence nécessaire.
Aussi avez-vous vu dans l'arrêté du 7 ventose
an X, que M. le préfet rappelant les invitations
pressantes du ministre de l'intérieur , déclara
qu'il est des principes de l’économie politique ,
du besoin public, de son devoir d’exciter , de
diriger , d'encourager , par l'établissement des
pépinières , la multiplication des arbres fruitiers
et forestiers.
C17)
Loin d'interdire aux pépinières départemen-
tales, la culture des arbres fruitiers et forestiers,
le Gouvernement mû par des motifs d'utilité
générale , voulut donc, au contraire, que ces
arbres se multipliassent par ces établissemens
qu'il recréait et qu'il organisait. Il décida con-
séquemment que cette branche de l'économie po-
litique entrerait dans leur institution et serait
confiée à leurs travaux.
Exiler de la pépinière du Rhône tous les
arbres indigènes , ou réputés tels par leur accli-
matation , c’est oublier les services qu'elle a
rendus , c'est se priver désormais des ressources
qu'elle seule peut offrir.
__ À qui doit-on, en eflet , les arbres qui embel-
lissent nos cours et nos quais, ombragent nos
promenades , bordent nos grandes routes? sinon
à la pépinière départementale. Dans quels éta-
blissemens particuliers aurait-on trouvé les
51,379 pieds d'arbres employés à des plantations
publiques , dont le plus grand nombre n’a pas
même coûté les frais d’arrachement , dont
l’autre partie aété vendue à moitié prix.
Votre commission doit vous dire qu’elle a
fixé avec satisfaction ses regards sur le nombre
considérable de mûriers cultivés à la pépinière
et sur la beauté de ces arbres: Dans la variété
de leurs espèces, due à ses expériences , se dis-
2
(18)
üngué principalement le mürier à feuilles d'an-
dolo , si précieux et en même temps si écono-
mique pour l'éducation du ver à soie. Votre
commission doit ajouter que la culture du mûrier,
sinon totalement perdue, était du moins très-
négligée dans ce département et dans ceux qui
l'avoisinent. En la considérant sous ce rapport,
il serait permis de regarder le müûrier comme
une culture rendue nouvelle par les soins et les
succès de la pépinière.
Sans contredit, le mûrier est un arbre indi-
gène que la mesure restrictive du conseil-géné-
ral exclurait à ce titre, de la pépinière départe-
mentale. Cependant, à l’époque où le gouver-
nement , dans la vue d'augmenter nos richesses
nationales , et de nous affranchir du tribut que
nos manufacturiers payaient à l'étranger , fit un
appel aux agriculteurs pour couvrir leur sol de
müriers , aux hommes industrieux pour former
des établissemens destinés à élever le ver à soie
et à préparer la matière première qu’on en ob-
tient : à cette époque , disons-nous , qui a fourni
les cent mille pieds de mûriers qui furent alors
plantés dans notre département et dans ceux qui
l'environnent ? Qui en a varié les espèces ? Qui
nous a procuré celle à feuilles d’andolo ? la pé-
pinière départementale.
Comment aurait-on fourni à toutes ces de-
mandes sans ces ressources abondantes? Quelles
| (19)
sont les pépinières particulières qui les auraient
offertes ? Par quels moyens aurait-on répondu
à la voix du Gouvernement et concouru à ses
vues d'économie politique dont nous ressentons
déjà les heureux effets ?
C’est dans une ville essentiellement commer-
çante et manufacturière ; à Lyon surtout, si re-
commandable par la fabrication de ses étofles ,
qu'on apprécie sainement létendue du service
que la pépinière du Rhône rendit alors à notre
industrie nationale. C’est par l'utilité de cet éta-
blissement , par les secours que notre cité doit
attendre encore de ses travaux et de ses essais,
qu'on peut calculer les conséquences fâcheuses de
l'innovation votée par le Conseil général.
Pourquoi étendrait-on cette mesure restrictive
aux arbres fruitiers ? On défendrait sans utilité;
on nuirait, en défendant , à l'instruction et à la
science. .
Le luxe s’est emparé des arbres et des plantes
exotiques et rares, pour en orner somptueuse-
ment nos parcs et nos jardins ; les arbres frui-
tiers tiennent de plus près à nos besoins. Ce
sont eux, comme s'en exprimait M. le Préfet
dans son arrêté de messidor an X, qui, par la-
bondance et la beauté de leurs fruits , enrichis-
sent les propriétaires , et offrent à la société des
ressources et des jouissances.
L'étude de cette branche de la science agro-
(:20+)
nomique, étant reconnue d'un intérêt réel et gé-
néral , on ne saurait trop multiplier, dans cette
partie , les moyens d'instruction. Aussi, la pépi-
nière départementale admet-elle à ses études tous
les élèves que le désir de s'instruire y conduit.
Déjà elle en compte plus de deux cents qui , sous
les leçons de M. Madiot, ont appris Part et les
temps des semis, le choix relatif des terrains et
des expositions , la saison, les formes , la pro-
priété de chaque greffe, l'éducation et la taille
des arbres. À l'exemple encore de M. l'abbé Ro-
zier, la pratique explique et rend sensibles les
principes de la théorie.
il est reconnu qu'une bonne école , pour la
culture des arbres fruitiers surtout , a cet effet
nécessaire de vaincre la profonde ignorance de
la plupart des jardiniers et des pépiniéristes qui,
conduits par une routine aveugle , imitent ce
qu’ils ont vu et ne vont jamais au-delà. Mais
cette bonne école ne peut exister hors des pépi-
nières publiques.
Indépendamment de ce que la direction en est
confiée à des hommes qui se recommandent par
leurs lumières et leur expérience ; tels sont en-
core les eflets de l’enseignement qu’ils professent,
que les connaissances théoriques et pratiques ac-
quises sous de pareils maîtres , s’élendent et se
propagent au Join. Il ne faut pas non plus se le
dissimuler , cet enseignement ne se généralise
C21)
et ne se perfectionne , le cercle de ces connais-
sances ne s'agrandit que par l'étude de la variété
ét la multiplicité des espèces dont les pépinières
publiques renferment seules les immenses col-
lections.
Les arbres fruitiers , quoiqu'usuels , ne se rat-
tachent-ils pas d’ailleurs à la science agronomi-
que? ne prêtent-ils pas à des faits nouveaux ?
N'est:il pas vérifié qu’à l'aide des étamines , des
semis et de la greffe, on a obtenu et on obtient
encore des espèces et des variétés dans les ar-
bres forestiers et dans les arbres fruitiers à pé-
pins et à noyaux. Tant que la nature ne se
refusera pas aux essais de l’agronomie, faut-il
que, plus rebelle que la nature , une mesure
restrictive s'oppose dans nos pépinières publi-
ques, à de nouvelles créations.
Une autre considération résiste également à
cette mesure. L’étranger, à qui le climat sous
lequel il vit , refuse nos arbres indigènes , ac-
court dans nos pépinières départementales, pour
connaître les espèces et les variétés de nos pro-
ductions. Qu'arriverait-il cependant si ces éta-
blissemens étaient exclusivement affectés à la
naturalisation des arbres exotiques ?
Trompé dans l’idée qu'il se serait formée d’une
pépinière fondée par le Gouvernement , cet
étanger pourrait trouver tous les arbres qui
croissent sous la température de son pays, et
(22)
n'en découvrirait aucun de ceux qui prospèrent
sous la nôtre.
La culture à la pépinière , des arbres fruitiers
et des autres arbres indigènes , a produit le ré-
sultat avantageux de maintenir par la concur-
rence , à un taux modéré, le prix des arbres des
pépinières privées. Il existe une différence énorme
entre le prix auquel la pépinière du Rhône les
livre, et celui auquel les pépiniéristes les taxaient.
L'équilibre serait bientôt rompu, si cette con-
currence était détruite; on verrait à l’instant les
consommateurs en proie au monopole des mar-
chands d'arbres , et renaître l'impôt qui a pesé
trop long-temps sur l'agriculture.
Ce serait un mal, sans doute , relativement
aux consommateurs et à l’agriculture, que la
perte des avantages obtenus par cette concur-
rence; mais c'en serait également une autre,
sous le rapport de la prospérité de la pépinière
départementale,
Secondée par une sage administration , elle
est parvenue au point de trouver dans ses propres
ressources des secours suffisans pour fournir à
ses dépenses. C'est principalement à la culture
et à la vente des arbres indigènes qu’elle doit la
position où elle est aujourd’hui placée, ce serait
la changer que de lui enlever des produits qui
sont le fruit de ses travaux ; et il a paru à
votre commission que lorsqu'un établissement
(23)
public se soutient par ses propres forces , il est
plus convenable de les accroître, que de les pa-
ralyser.
En s’occupant de la culture des arbres indi-
gènes , la pépinière départementale n'a point ou-
blié qu’elle est aussi instituée pour la naturali-
sation des arbres exotiques. Vos Commissaires
se sont convaincus qu’elle justifie pleinement
l'opinion proclamée par le conseil général, que,
considérée sous ce point de vue , elle est en-
core d'un intérét général pour toute la France.
La pépinière départementale possède et cultive
presque toutes les variétés d’arbres et de plantes
exotiques dont la France s’est enrichie depuis la
fin du dernier siècle. Des recherches opiniâtres ,
des soins assidus , des expériences multipliées et
heureuses ajoutent de nouvelles acquisitions à
celles que nous avions importées des contrées les
plus lointaines, et donnent l'espoir flatteur de
voir prospérer sous notre température, des ar-
bres qui semblaient la fuir.
Le temps n’est pas éloigné, peutêtre , où les
propriétés de ces arbres , étudiées , mieux
connues , apprendront ce qu’ils peuvent offrir de
ressources et d'avantages à l'architecture, à l'ébé-
nisterie , au charronnage. Déjà une utilité pré-
sente et réelle nous dédommage de ce que nous
promet encore l’avenir. "
Le dessin's’'est emparé des fleurs de ces arbres;
(24)
leur port, l'élégance de leurs formes, les nuances
infinies de leurs couleurs , fournissent à l'artiste
des sujets de composition qui, inconnus jusques
alors, ouvrent de nouvelles sources à la pros-
périté de nos manufactures.
D'autres faits ont démontré l'influence et les
effets de l’acclimatation des arbres exotiques.
Plus de quatre-vingt-quatorze espèces d'arbres
exotiques, qui ne pouvaient supporter la tempé-
rature de Paris, se sont parfaitement acclimatés
sous le ciel de Lyon. Il y a même lieu de croire que
leur constitution, modifiée par leur naturalisa-
tion , bravera les rigueurs de la température avec
laquelle elle n'avait pu se familiariser.
Cette influence et les eflets de l’acclimatation
sur la constitution des arbres exotiques , sont
démontrés par l'expérience.
On a vu plusieurs de ces arbres exotiques, sté-
riles d’abord sous le climat de Paris, y fructifier
ensuite lorsque les pépinières de la Seine ont
ajouté à leur collection , des graines envoyées par
la pépinière du Rhône, et qui avaient été don-
nées par les arbres de la même espèce, après leur
naturalisation à Lyon. (1)
(2) Quelques personnes recommandables ont exprimé cette
pensée , que le local de la pépinière trop resserré , ne per-
mettrait point de laisser reposer la terre, et que le sol épuisé
par de continuelles plantations ne fournirait plus les sucs
nécessaires à une nouvelle végétation. On a ajouté que placée
(25)
Les bornes d'un rapport ne permettent pas à
votre commission de rappeler tous les faits par-
ticuliers recueillis par la pépinière départemen-
à deux lieues de notre ville, le terrain étant moins pré-
cieux , il serait facile d'accroître l'étendue de la pépinière
et d’en laisser constamment reposer une partie pendant le
temps nécessaire pour que la terre épuisée pût recouvrer les
principes de sa fécondité.
Un tel raisonnement , plus spécieux que juste, n’est qu’une
conséquence de la théorie fausse et surannée des jachères ;
il west plus admis que par quelques cultivateurs qui mé-
connaissent les avantages d’un assolement bien entendu.
Ecoutons les lecons de l’expérience.
Il existe dans Paris trois pépinières , dont la direction
est confiée à des hommes célèbres. Le terrain qui est affecté
à chacune est renfermé dans d’étroites limites ; jamais on
ne le laisse reposer,
La pépinière du Roule , qui ne se compose que de dix
arpens ( anc, mesure }) , contient des arbres et des arbustes
d'ornement, indigènes et exotiques. Les plantes de nature
différente s’y succèdent de telle manière qu’on ne voit au-
cune place vide dans ce petit espace. Les arbres sont enle-
vés dans l’automne; le terrain est miné et fumé au besoiu,
et des arbres d’une autre espèce y sont plantés au printemps.
Dans la pépinière du Luxembourg , qui est destinée aux
arbres fruitiers , et dont l’étendue est d’environ neuf hec-
tares, les arbres à noyaux succèdent aux arbres à pépins,
immédiatement après une préparation convenable du sol.
La pépinière du jardin du Roi est beaucoup plus petite ;
le même genre de culture y est adopté.
Dans toutes , les arbres prospèrent également.
Le sein fécond de la terre après avoir fourni des sucs à un
ordre de végétaux , en contient encore pour de nouvelles
espèces , pendant que celles-ci se nourrissent, les premiers
sucs se réparent.
La chimie ni la physiologie végétale ne peuvent nous dé-
(26)
tale et qui ont ajouté à l’avancement de Ja science.
C'est par une idée plus générale qu’elle fixera
voiler les moyens secrets par lesquels la nature maintient
cette constante fécondité ; ces sciences ne nous apprennent
point quel genre de sucs convient à telle espèce de plante ;
l'expérience seule a instruit les agronomes ; c’est sur elle
que repose la théorie des assolemens.
Le repos de la terre est donc une pure perte ; on ne l’ob-
serve point dans la nature. Toutefois s’il était nécessaire,
le nombre des arbres que l’on cultive à la pépinière du dé-
partement du Rhône permettrait encore de laisser reposer
la cinquième partie du terrain sur lequel elle existe.
Est-il avantageux que cet établissement soit placé près de
la ville ? il ne peut y avoir de doute à cet égard. Là , il est
sous les yeux de l'administration et de l’autorité; les per-
sonnes qui ont besoin de quelques arbres se les procurent
sans se déplacer : dans la ville, la pépinière est à la portée des
personnes qui veulent s’instruire sur les variétés des arbres,
sur leur culture et sur la greffe; les savans et les amateurs
peuvent la visiter sans perdre de temps , et il est plus facile
de se procurer l’engrais nécessaire.
Si la pépinière était située à la distance d’une ou de deux
lieues, la surveillance qu’exerce l'administration pourrait-
elle être aussi exacte ? se donnerait-on la peine de s’y trans-
porter pour quelques arbres! irait-on prendre une lecon
de greffe à une ou plusieurs lieues ? Nos dessinateurs vou-
draient-ils aller à cette distance peindre quelques fleurs d’or-
nement ? et ce bel établissement ne serait-il pas en grande
partie perdu pour la science ?
Ces considérations ont sans doute contribué à faire placer
la pépinière de Paris dans l’enceinte de ses faubourgs.
L'administration est trop éclairée sur les causes qui as-
surent le succès de la pépinière du département du Rhône,
pour consentir à une translation qui la priverait de ces pré-
cieux avantages, et pour la condamner à un exil qui ne
tarderait pas à la faire languir, et peut-être à entraîner sa
perte.
(277
vos regards sur Pensemble des avantages qui
recommandent cet établissement. ,
Ileest de ces monumens publics , de ces insti-
tutions nationales qui, dans l’histoire des peuples
civilisés, fixent les époques du progrès de leurs
lumières. De ce nombre sont les pépinières dé-
partementales.
Leur création fut un grand pas dans la science
agronomique. Leurs découvertes , fruits d'essais
continuels ; agrandissent la sphère de nos con-
naissances et servent à les propager. L'acclima-
tation des arbres et des plantes exotiques augmente
la masse de nos richesses territoriales. Le per-
fectionnement des arbres nés sur notre sol ajoute
à leur utilité, à nos jouissances , à la satisfaction
de nos besoins. La réunion enfin, sur le même
point , des productions disséminées dans les dif”
férentes parties du globe, présente une foule de
sujets aux méditations de l’agronome savant, et
devient pour tous un objet d'étonnement et d’ad-
miration.
Voilà les grands traits qui caractérisent les pé-
pinières départementales , attestent leur utilité et
qui distinguent spécialement celle du Rhône,
C'est un hommage que lui rendent les agronomes
étrangers et les voyageurs instruits. il en est
peu qui, sur la réputation de cet établissement,
n’y accourent lors de leur passage à Lyon. Plus
(28)
d'une fois on a vu les De Bosc et les De Candolle,
ces savans universellement reconnus, consacrer
des journées entières à examiner et à connaître
ce qu'il possède.
Votre commission ne séparera point la justice
qu'elle rend à la pépinière départementale , de
celle due à M. Madiot, son directeur et notre
collègue. Elle saisit avec empressement l’occasion
de publier que son zèle et son activité pour le
perfectionnement de la culture des arbres, l'avan-
cement de la science, ne le cèdent qu'à l'étendue
de ses connaissances. Les faits nouveaux qui ont
été recueillis , sont dûs à ses expériences; il a
inventé des instramens et employé de nouveaux
procédés pour la greffe ; souvent il a enrichi de
ses observations, les comptes annuels de vos tra-
vaux, souvent aussi vous avez eu la satisfac-
tion de voir ses observations reproduites dans
les journaux nationaux et étrangers.
La mesure qui réduirait la pépinière départe-
mentale exclusivement à la naturalisation des
arbres et des plantes exotiques, serait donc tout
à la fois contraire à l'institution de cet établisse-
ment, et nuisible dans ses eflets. La mesure qui,
d'un autre côté, opérerait sa translation dans
un terrain nouveau, ne serait pas moins funeste.
S'il est vrai, en général , que la stabilité des
établissemens publics est une des grandes causes
(29)
de leur prospérité ; cette vérité est surtout fon-
damentale pour les pépinières établies ‘par le
Gouvernement.
Sans doute la pépinière départementale n'au-
rait pas à craindre que l'expérience du passé soit
une leçon perdue pour l'avenir, ni de voir se
renouveller les scènes de dévastation qui anéan-
tirent le mobilier qu’ellepossédait à Villeurbanne.
Mais la translation de cet établissement , quoi-
qu’effectuée avec plus de sang-froïd et de pré-
cautions , n’en comporterait pas moins des frais
et des sacrifices considérables.
Non-seulement les dépenses déjà faites pour
le nivellement et le défoncement du terrain,
pour le transport des terres de bruyères néces-
saires à l'acclimatation de certaines plantes se-
raient perdues ; mais il faudrait encore les répéter
pour la préparation du terrain nouveau qui se-
rait destiné à la pépinière , et y ajouter les frais
du transport de son mobilier.
Quels que soient les soins apportés à cetrans-
port , le sacrifice de toutes les productions in-
susceptibles d’être transplantées , ou qui ne
pourraient l'être sans danger, en serait une suite
inévitable. Au moment de recueillir le fruit
de tant de travaux et d'expériences , il serait
ravi sans retour ; aux années inutilement écou-
lées pour produire , succéderaient des années
(5)
pour créer ; et à ces viscissitudes successives ,
toujours sans fixité dans les résultats , se réu-
nirait la possibilité décourageante d’une nou-
velle translation.
Quoique la délibération du Conseil général
qui met, dès à présent, à la disposition de M. le
Préfet , le terrain occupé par la pépinière, com-
binée avec le refus de tojit secours pour l’année
1824 vous ait alarmés par ses conséquences ;
néanmoins votre commission n'a pu partager
entièrement vos craintes.
Fefuser les moyens de conserver , c’est dans
la réalité détruire. Cette vérité n’a pu échapper
à des administrateurs éclairés ; ils ont sûrement
prévu qu’en reconnaissant qu’il était d’un in-
térêt général pour toute la France de conser-
ver la pépinière départementale, ils voteraient
cependant sa destruction , en délibérant sa trans-
lation , et ne lui laissant aucune possibilité de
fournir aux dépenses que cette translation né-
cessiterait.
Impossible d’admettre une pareille contradic-
tion. Si des motifs que votre commission n'a-
vait point à pénétrer, ont engagé le Conseil gé-
néral à supprimer de son budjet de 1824, l'in-
demnité qu'il avait constamment accordée à la
pépinière, en même temps qu'il délibérait sa
translation dans un terrain nouveau ; il est à
(31)
croire qu’en sollicitant le ministre de linté-
rieur , pour que le Gouvernement intervienne,
il a voulu obtenir pour cet établissement les
secours qu'il lui refusait, et que sa délibération
rendait indispensables.
Sans doute, la pépinière départementale doit
tout espérer, tout attendre de la munificence du
souverain , de son amour pour son peuple, de
sa sollicitudé pour conserver les établissemens
utiles que fondèrent ses ancêtres ; mais pour-
quoi fatiguer par des demandes, sa bienfaisance ,
quelqu'inépuisable qu’elle soit. Pourquoi y recou-
rir, lorsque la pépinière , conservée avec toutes
ses ressources , continuant à occuper le terrain
que des titres solennels lui ont affecté , suffit à
ses besoins et n’aurait à réclamer que de légers
secours, pour l'entretien de ses bâtimens ?
Tels sont les motifs qui engagent votre com-
mission à vous proposer d’arrêter :
Que Son Excellence le Ministre de l'intérieur
soit sollicité à Peffet, 1.° que la pépinière de na-
turalisation du département du Rhône soit main-
tenue dans la possession du terrain qu'elle
occupe; 2.9 que son organisation actuelle, et
telle qu'elle a été réglée, soit pour ses travaux,
soit pour son administration , n’éprouve aucun
changement.
Ce vœu formé par votre commission , si vous
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le partagez, va être déposé dans le sein du ma-
gistrat qui vous préside. Il daignera, n'en dou-
tez point, l’accueillir. Administrateur vertueux
etéclairé, protecteur de nos institutions bien-
faisantes, ami de la science et des arts qu’il
honore et encourage , il applaudira à votre zèle
et à vos eflorts. Osez tout espérer de votre
réclamation , s’il s’en rend l'organe.
Gras, rapporteur ; G. Pezrerier , André
Gonin , Trozzter, D.-M.
La société adoptant les motifs développés dans
le rapport , émet le vœu:
1.0 Que la pépinière départementale soit con-
servée dans le terrain qu’elle occupe ;
2.0 Quelle soit conservée avec son régime et
son organisation actuels.
M. le Préfet est prié de transmettre le présent
rapport à Son Exc. le Ministre de l'Intérieur.
Lyon, le 18 Juillet 1823.
N. F. COCHARD , Président ;
GROGNIER , Secrétaire.
Nota. Son Excellence le Ministre de l'intérieur a
bien voulu accueillir le vœu de la Société , en faveur
de la Pépinière départementale , et ce précieux éta-
blissement sera conservé avec son organisation actuelle.
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