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Full text of "Compte Rendu des Travaux de la Societe Royale d'Agriculture / Histoire Naturelle et Arts Utiles de Lyon"

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COMPTE RENDU 
DES TRAVAUX 


SOCIÉTÉ ROYALE 
D'AGRICULTURE, 


HISTOIRE NATURELLE 


ET 


ARTS UTILES DE LYON, 


Depuis le 147 Avril 1822, jusqu'au 1.% Mars 
1823, 


COMPTE RENDU 
DES TRAVAUX 


DE LA 


SOCIÉTÉ ROYALE D'AGRICULTURE, HISTOIRE 
NATURELLE ET ARTS UTILES DE LYON, 


Depuis le 1.* Avril 1822, jusqu'au 1.*% Mars 
1823. 


Pan Mr L. F. GROGNIER, 


PROFESSEUR À L'ÉCOLE D'ÉCONOMIE RURALE ET VÉTÉRI- 
NAIRE DE LYON, MEMBRE DE L’ACADÉMIE ET DU CERCLE 
LITTÉRAIRE DE LA MÈME VILLE, SECRÉTAIRE PERPÉTUEL 
DE LA COLONIE LINÉENNE LYONNAISE, CORRESPONDANT 
DE LA SOCIÉTÉ ROYALE ET CENTRALE D’AGRICULTURE ; 
DES SOUTIENS DE L'ART VÉTÉRINAIRE DE COPENHAGUE ;, 
DES ACADÉMIES DE TURIN, DIJON , STRASBOURG, etc, 
ÆT DE PLUSIEURS SOCIETÉS D'AGRICULTURE TANT NA 
TIONALES QU'ÉTRANGERES ;, 


SECRÉTAIRE DE LA SOCIÉTÉ, 


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COMPTE RENDÜ 
DES TRAVAUX 
DE 14 SOCIÉTÉ ROYALE D'AGRICULTURE ; 
: HISTOIRE NATURELLE ET ARTS UTILES de 


Lyon, depuis le 1.7 Avril 1822, jusqu'au 
1. Mars 1823. 


MEesstreurs, 


L'art précieux à la faveur duquel nous obte- Considérations 
nons de la terre, avec économie, des produits A 
abondans , est subordonné à la nature du sol, Âtes dans ses 
l'influence du climat , aux frais d'exploitation ; FPP°T ee 
à la facilité des transports et des déboucliés. an 
a voulu conclure de ces considérations incontes- 
tables, que, purement empirique, l'art nourricier 
des hommes était étranger à toute théorie, n'était 
fondé sur aucun principe général. On n’a pas 
songé qu’un raisonnement de ce genre s'appli- 
querait avec plus de rigueur à la médecine-pra- 
tique , art éminemment rationnel , dont l'exer- 
cice est néanmoins soumis à une infinité de 


6 Sociélé royale d'Agriculture 
données, les unes änhérentes aux individus 
souffrans , les autres leur étant extérieures. 

La médeoine-pratique ét l’agriculture sont 
liées par une étroite analogie; aussi ont-elles été 
placées sur la même ligne dans le magnifique 
tableau des progrès de l'esprit humain , que M. 
Guvier a tracé d’une main si savante. 

Elles sont moins, je avoue, des sciences po- 
sitives que des applications judicieuses de plu- 
sieurs connaissances physiques. L'une et l’autre 
ont pour objet des êtres vivans: l’une s'occupe 
de l'entretien , du perfectionnement , de la pro- 
pagation des plantes , et même des animaux qui 
nous sont utiles ; autre se propose un but plus 
élevé , celui d'écarter les maladies qui nous me- 
nacent, de nous secourir contre celles qui nous 
ont atteints; et lorsque c'est à des animaux 
malades qu’elle donne des soins, elle se trouve 
presque toujours dans le domaine de l'agronomie. 

L’agronomie, ainsi que la médecine, em- 
pruntent des lumières à la chimie, à la physique, 
à la physiologie. L'une lui dévoile la nature des 
terres et des engrais, l’autre la dirige dans la 
construction de ses machines et la conduite de 
ses irrigalions. Les principes qu'elle puise dans 
la physiologie sont plus nombreux et plus im- 
portans. 


La physiologie est la science de la vie. 


de Lyon. ? 

La vie est une force inconnue dans son essence, 
car elle est cause première ; mais dont nous pou 
vons observer les phénomènes , calculer les lois 
et modifier l’action, 

C'est elle qui organise la matière, lui imprime 
d'admirables propriétés , la dérobe pendant un 
certain espace de temps à l'empire absolu de 
l'attraction et de l'affinité ; c’est elle qui main- 
tient inaltérable le type des espèces dans la lon- 
gue succession ces individus. 

Cette force qui, dans l'homme, chef-d'œuvre 
de la création, déploie toute la plénitude de sa 
puissance, va diminuant d'activité jusqu'au polype, 
animal ébauché , jusqu'à la moisissure, rudiment 
végétal. Toujours son action est soumise à lin- 
fluence des agens de toute espèce qui entourent 
les êtres qu'elle conserve , et qui lui doivent 
leur formation, Et s’il n'en était ainsi, si la 
force vitale ressemblait à celle de l'aflinité , tous 
les individus dans une espèce vivante seraient 
géométriquement identiques comme les cristaux 
du même sel , les échantillons du même métal ; et 
comme ces corps inertes, ils ne pourraient cesser 
d'exister que par l'effet d'un accident extérieur. 

11 est à remarquer que les agens physiques 
exercent sur les êtres vivans une action d'autant 
plus forte que l’organisation de ces êtres est 
moins parfaite, que la vie dont ils sont pénétrés 


8 Societé royale d’Agricullure 

est moins développée. Il suffit d'une légère in- 
tempérie pour faire disparaître d'innombrables 
colonies d'insectes et de plantes ; les quadru- 
pèdes et les oiseaux, quoique doués d’une vita- 
dité beaucoup plus grande ne résistent point à 
tous les climats, ne peuvent pas s'approprier 
ous les genres de nourriture; l’homme seut, 
doué de la perfection vitale, habite dans toutes 
les régions de l'univers, se nourrit de toutes les 
espèces d'alimens, se plie à tous les régimes, 
succombe plus difficilement à toutes les causes de 
destruction. Seul doué d'intelligence, il étudie 
les lois de la vie dans lui-même et dans les êtres 
vivans qu'il a soumis à sa domination. La con- 
naissance et l'application de ces lois sur son 
espèce , sur celle des animaux domestiques , sur 
celle des plantes cultivées ; voilà la médecine, la 
vétérinaire et l'agronomie. Ces trois branches des 
connaissances humaines et leurs ramifications 
nombreuses partent d’un tronc unique, la phy- 
siologie générale. 

Les principes de cette science fondamentale, 
dans leurs rapports avec la végétation, sont plus 
simples , d'une application plus facile que lors- | 
qu'ils sont adaptés à l’économie animale. Aussi 
pourrons-nous, en disposant convenablement des 
agens que nous rendons physiologiques , pesex 
plus fortement sur la vitalité des plantes que sur 


de Lyon. 9 
celle des animaux. Aussi pour satisfaire à nos | 
besoins , augmenter nos jouissances, ou simple- 
ment pour satisfaire à nos caprices , opérons- 
nous plus de métamorphoses sur les herbes de 
nos jardins , les arbustes de nos vergers , que sur 
les quadrupèdes de nos étables et les oiseaux de 
nos basse-cours. Voyez la rose et l'œillet prendre 
sous la main de la culture toutes les formes , ré- 
fléchir toutes les nuances, exhaler tous les par- 
fums ; voyez ces arbres à fruit , le prunier, le 
pêcher : leurs drupes , dans l'état sauvage, sont 
uniformes, petites et d'un goût désagréable ; elles 
prennent dans nos vergers un volume singulier, 
des formes et des couleurs variées , une saveur 
exquise. Pouvez-vous comparer la vigne sauvage 
à cet arbuste domestique de la plus haute anti- 
quité qui, sous la direction de l’homme, tantôt 
semble ramper sur la terre, tantôt s'élève à la 
hauteur du chêne, tantôt se soutient d'elle- 
même, tantôt s'appuie sur un tuteur ; que l'on 
voit ici étendre le long d’un mur des bras im- 
menses ; là se contourner en guirlandes et en 
festons , dont le bois, les feuilles et les fruits 
changent de forme, de couleur et de volume, au 
point de faire le désespoir éternel des nomencla- 
teurs ? Et le produit de cet arbuste, le plus précieux 
de tous, voyez comme il diffère dans le mème ter- 
roir, selon les modes de culture et les procédés de 


30 Sociélé royale d'Agriculture 
vinification. Is sont bien remarquables, sans 
doute , les caractères qui distinguent le porc et 
Je sanglier, le moufflon et le belier, le cheval 
sauvage et le cheval domestique; mais entre les 
végétaux que nous cultivons et ceux de la même 
espèce qui sont abandonnés à la nature, la difié- 
rence est souvent immense. 

C'est principalement dans la propagation de 
ces êtres organisés que se manifeste notre puis- 
sance physiologique. ‘Tandis que par des appa- 
reillemens et des croïsemens les mieux combinés, 
nous ne pouvons imprimer aux races des ani- 
maux que des modifications légères de volume 
et de forme, nous opérons d'étonnantes méta- 
morphoses au moyen des boutures, des grefles 
et des marcottes. Non contens de créer plusieurs 
individus par la division d'un seul, nous unis- 
sons dans une seule existence deux êtres qui 
jusqu'à ce moment vivaient éloignés; nous exi- 
geons qu'un arbre, sans cesser d’être prunier ou 
amandier dans ses racines et dans une partie de 
sa tige, devienne ou un pêcher ou un abricotier 
dans ses feuilles, ses fleurs, sur-tout ses fruits. 
C'est ainsi que : 


À ses branches succède un rameau plus heureux ; 
Bientôt ce trone s’élève en arbre vigoureux , 

Et se couvrant des fruits d’une race étrangère » 
Admire ces enfaus dent il eroit être pére, 


de Lyon. RE 
Sans doute ils ignorent jusqu’au nom de la 
physiologie végétale les jardiniers qui , néan- 
* moins opèrent ces greffes avec succès. C'est à 
leur insu qu'ils appliquent les principes de cette 
science : semblables en cela à d’autres empiriques 
qui , étrangers , à toute théorie de physiologie, 
pratiquent quelquefois avec bonheur la méde- 
cine des animaux, je n'ose dire celle de l’homme. 

Résultat lumineux du raisonnement et de l'ex- 
périence , les vérités physiologiques circulent 
parmi les hommes, elles arrivent jusqu'aux 
paysans qui remuent la terre, jusqu'aux arti- 
sans qui ferrent et traitent les chevaux ; jusqu’à 
des empiriques souvent plus grossiers qui osent 
exercer la plas noble comme la plus savante de 
toutes les professions. C’est ainsi que le flambeau 
de la mécanique, celui de la chimie pénètrent 
dans les ateliers des arts pour diriger des ouvriers 
qui, sans le savoir , appliquent des théories 
transcendantes. 

Mais les auteurs de ces théories ne furent pas 
de simples manœuvres; ce ne fut point par 
d'aveugles tâtonnemens qu'ils arrivèrent à de 
brillantes découvertes ; ils observèrent avec sa- 
gacité , avec persévérance , et raisonnèrent avec 
justesse, avec profondeur. 

Les uns ont appliqué les lois de l'équilibre , 
celles du mouvement, celles de l’aflinité aux 


12 Société royale d’ Agriculture 

corps privés de vie; les autres ont pénétré dans 
l'intérieur des corps organisés, ils en ont étudié 
l'admirable économie ; ils ont cherché les mo- 
yens de la maintenir ou de la réparer. 

Parmi les physiologistes qui dirigèrent sur la 
végétation leurs recherches savantes , furent 
Duhamel et Varenne de Fénile, qui nous ap- 
prirent à gouverner les forêts ; Miller et Roger- 
Schabol qui nous enseignèrent l'art des vergers; 
Rozier et Dussieux qui fondèrent sur des prin- 
cipes la culture de la vigne; Full, Châteauvieux, 
Parmentier et Arthur Young qui répandirent 
des flots de lumière sur presque toutes les parties 
de l’économie rurale. Tous ces hommes supé- 
rieurs ne furent des agronomes du premier ordre 
que parce qu'ils furent des physiologistes habiles. 

Que la science de la vie végétale se perfectionne 
et se généralise, et bientôt, comme on connaîtra 
mieux les secrets de la germination, on dirigera 
plus sûrement tous les semis. Les lois de la nu- 
trilion des plantes étant mieux connues, on dis- 
posera d'une manière plus convenable les irriga- 
üons, les amendemens, les engrais ; du mo- 
ment que l'on aura approfondi les modes divers 
de la propagation des végétaux , on les sèmera 
d’une main plus sûre et plus économe, on mul- 
tipliera les moyens de les perpétuer , de les per- 
iectionner sans le secours des semences. 


de Iyon. St 

Cé n'est pas tout : les végétaux comme les 
animaux sont sujets à des accidens qui troublent 
leurs fonctions, altèrent leurs tissus et leurs 
humeurs, abrégent leur existence et détériorent 
leurs produits , souvent encore les rendent vé. 
néneux. C'est dans la physiologie végétale qu'il 
faut chercher les moyens de prévenir ces acci- 
dens ou d'en arrêter les ravages. La pathologie, 
la thérapeutique végétale qui, depuis quelques 
années ,isont dans toute l'Europe l'objet des re- 
cherches d'un grand nombre de savans , sont- 
elles autre chose que la science de la vie appli- 
quée aux végétaux ? 

A Dieu ne plaise, et c'est par cette considé- 
sation que je mettrai fin à ce discours ; à Dieu 
ne plaise que je refuse le titre d’agronomes ha- 
biles à tous ceux qui, jusqu'à ce moment , n’ont 
eu ni le loisir ni la pensée de considérer les phé- 
nomènes de la vie dans les plantes qu'ils culti- 
vent, dans les animaux qu'ils élèvent. Je sais 
tout ce que peut un bon esprit à laide de la tra- 
dition, de l'expérience , et par-dessus tout des 
théories qu’on n’a point étudiées , qu'on n'ap- 
précie nullement, et dont on applique les con- 
séquences sans remonter à leurs principes. 

Mais ce dont je suis certain, c'est que pour 
fonder ces théories , pour les étendre et les per- 
fectionner , il faut approfondir des questions qui, 


14 Société royale d'Agriculture 
au premier aspect, semblent être purement spé- 
culatives et sans application directe aux arts 
qu'elles intéressent le plus vivement. 

Ce n'est pas à vous, Messieurs, qu'il faut 
prouver cette vérité incontestable. Vous savez 
trop bien que tous les arts, et notamment celui 
qui nourrit l’homme, sont éclairés. par des théo- 
ries , et souvent à l'insu de ceux qui s’ÿ livrent; 
ces théories, Messieurs , et plus particulière 
ment celles qui ont pour objet la vitglité dans 
les plantes et les animaux utiles; vous savez les 
appliquer aux diverses cultures qui sont l'objet 
de vos travaux ; et si j'expose convenablement 
vos opérations et vos succès, la présente notice 
constatera de nouveau cette vérilé. 


/ 


is 


de Lyon. 15 
STATISTIQUE. 


Poursuivant avec un zèle au-dessus de tout Notice u 
éloge, ses longues recherches de statistique, M. RANGER 4 
Cochard s'est occupé cette année de Longes et Cochard. 
Tréves ; il a décrit cette commune sous les 
rapports de la topographie , de l'histoire natu- 
relle, des antiquités, de Pagriculture , de l'in- 
dustrie. La communication de son travail n’a pas 
été reçue avec moins d'intérêt et de reconnais 
sance que ceux du même auteur , qui, dans les 
années précédentes , ont eu pour objet Ste Co- 
lombe, Condrieu , Ampuis, St Cyr, Loire, 

St Romain-en-Galles. 

Longes et Tréves , vous at-il dit , sont deux 
paroisses réunies en une seule commune, qui fait 
partie du canton de Ste Colombe-les-Vienne; elle 
est située au pied de la chaîne du Pila, à 400 met. 
au-dessus du Rhône, entre le département de 
la Loire et les communes des Hayes et de St 
Romain-en-Gier ; sa longueur est de 8400 mèt., 
sa largeur de 5000. 

Quatre collines sont renfermées dans cet es- 
pace, l'une d'elles le Mont Monay domine un 
vaste et magnifique horizon , où se dessinent en 
grande partie les départemens de l'Isère, de la 
Drôme, de l'Ardèche, le Pont du St Esprit. On 


16 Société royale d’Agricullure 

découvre sur son sommet des vestiges d'anciens 
travaux militaires ; est-ce les ruines d'un camp 
où les Gaulois s'étaient retranchés contre les 
Romains? est-ce celles d’un lieu fortifié où les 
Druides célébraient les mystères les plus secrets 
de leur religion ? 

La deuxième colline a Chassenoud , est 
un pic escarpé. 

La troisième, qui porte le nom de Zonges, 
est terminée par un rocher nommé S/ Martin , 
parce que les pâtres s’y rassemblent pour se di- 
vertir le 11 novembre, fête de ce saint. 

La quatrième, appelée La Tourrette , renferme 
une mine de plomb. 

Autour de Longes sont un grand nombre de 
hameaux dont les noms rappellent ceux des pre- 
mières familles qui les ont possédés. Ici M. 
Cochard se livre à des discussions d’étymologie 
dont nous passons à regret sous silence les 
détails. 

Tréves a pareillement plusieurs hameaux, 
séparés les uns des autres par des vallons étroits , 
des ravins profonds , des côteaux presque arides. 
Vainement on chercherait sur ce territoire iné- 
gal des sites pittoresques et rians. On n’y voit 
pas davantage des prairies verdoyantes , des bois 
touffus ; de riches guérets ; presque partout l'œil 
est attristé à l'aspect de rocs décharnés, de plages 


de Lyon. 17 
incultes , de genêts et de bruyères s'étendant au 
loin avec la plus triste uniformité. Ce n'est qu’à 
l'aide d’un travail opiniâtre qu’on peut arracher 
d'un pareil sol quelques récoltes médiocres. Aussi 
sur une étendue de plus de 3197 arpens, toute 
Ja masse des propriétés n'ast-elle été évaluée par 
le cadastre en 1809 qu’à 76213f. de revenu, qu’on 
a grevée d'une imposition foncière de 15468f. 
Quand on considère que les mauvais fonds sont 
ceux dont la culture exige le plus d’avances , et 
dont les produits sont les plus chanceux , on est 
convaincu que cette imposition est exhorbitante. 


Parmi les ruisseaux qui coulent sur cette terre 
ingrate , il en est un nommé Malleval, de mau- 
vaise vallée. 


_ La population de cette commune paraît dé- 
croître. Il résulte en effet des recherches de notre 
savant confrère qu'elle était en 1658 de 1589 
individus , tandis qu'elle n'est, au moment 
actuel , que de 130r. 


Passant aux usages, aux mœurs, aux habi- 
tudes qui distinguent celte population , il en fait 
ressortir la louable simplicité; mais ne serait-elle 
pas bientôt altérée si, comme il le désire, une 
grande route s'étendant de St Chamond à Vienne, 
traversait le territoire de Longes ? 

Jadis ce territoire était couvert de bois; M, 

4 


# 


18 Société royale d'Agriculture 

Cochard est porté à croire qu'il fut inconsidé- 
rément défriché par des moines de l'Ordre de St 
Benoît. Remontant à l'an r200, notre confrère 
recherche quels ont été les seigneurs de Longes , 
et il prouve par des actes nombreux que le cha- 
pitre de Lyon s'en arrogea long-temps la suze- 
raineté : ces actes portent l'empreinte du temps 
où ils ont été consentis, et plusieurs sont fort 
curieux. 

Quoique très-pauvre, ce territoire fut visité 
par les protestans et les ligueurs. Un autre fléau, 
la peste le désola en 1586 et en 1628. A cette der- 
nière époque une grande partie de la population 
fut emportée. On voit encore dans l’église de 
Tréves une statue de St Roch que les habitans 
y élevèrent , pour obtenir par l'intercession de 
ce saint, la cessation du fléau. 

En 1673 ils furent les victimes d’une autre 
calamité, les limaçons se multiplièrent au point 
de dévorer toutes les récoltes. On exorcisa les 
pernicieux insectes; et c’est à cette cérémonie 
qu'on attribua leur disparition. 

L'église de Longes, dont l'architecture annonce 


un ouvrage du 15° siècle, a pour clocher une 


forte tour carrée qui, dans des temps barbares, 
a dû servir de forteresse. 

Non loin de cette église est une maison go- 
thique , où des Sœurs de St Charles apprennent 


de Lyon. 19 
à lire à de petites filles : c'était un vieux château 
que les chartreux de St° Croix achetèrent en 
1656 , de Jean de Gagnières, baron de Sou- 
vigny, maître d'hôtel du duc de Savoie , et gou- 
verneur de la citadelle de Turin. Cet officier 
général était-né dans la classe vulgaire ; il eut 
deux frères qui, comme lui s'élevèrent par leur 
mérite personnel ; il épousa une Duchoul, et 
ce mariage le fixa dans le Lyonnais où sa fa- 
mille existe encore; elle possédait à Grézieux 
de belles terres qui, en 1656, furent érigées en 
comtés, sous le nom de Souvigny, On rapporte 
que devenus grands seigneurs , messieurs de 
Souvigny ne méconnurent point leurs parens, 
ils les réunissaient dans leurs châteaux avec 
toute la noblesse du pays. 

Dans le bourg de Longes était le fief de La- 
combe qui , pendant plusieurs siècles fut possé- 
dé par la famille des Baudran, ensuite par les 
chartreux de St° Croix, enfin par M. le docteur 
Vitet. | 

Un autre fief de Longes , celui de Jurary, 
appartenait dès le 15° siècle à cette famille Du- 
choul , d'où sont sortis plusieurs hommes re- 
marquables. Guillaume Duchoul qui,en 1556, 
publia une dissertation savante sur la religion , 
la castramentation , la discipline militaire des 
Romains; et Jean Duchoul son fils qui , en 1585, 


20 Sociélé royale d'Agriculture 
mit au jour une histoire du chêne , ainsi qu'une 
description du mont Pila. 

Le fief de la Jurary fut vendu en 1747 à 
Christophe Vitet, chirurgien à Condrieu, qui 
le transmit à son petit-fils Louis Vitet. 

Celui-ci fut, comme on sait , maire de Lyon et 
député à la convention nationale ; il s’était fait 
connaître avant la révolution par plusieurs ou- 
vrages de médecine très-estimés , et il tenait le 
premier rang parmi les praticiens de notre ville : 
pourquoi faut-il que les circonstances politiques 
l'aient arraché à ses paisibles et honorables occu- 
pations ? Ballotté par les orages révolutionnaires, 
ses regards ont dû se porter souvent vers la 
tranquille retraite sur la porte de laquelle il 
avait, en des temps plus heureux, gravé ces mots: 
Gaudium et sanitas. 

M. Cochard nous a donné sur la vie publique 
de M. Vitet, sur les traverses qu’il essuya, 
plusieurs détails intéressans , dont quelques-uns 
n'étaient pas connus, mais qui s'éloignent de 
d'objet de cette notice. Il fait observer que c'est à 
Jurery , chez M. Vitet, que trouvèrent un asile, 
en 1793, MM. Suchet, dont d'un est devenu 
«maréchal de France et duc d’Albuféra. 

Indépendamment de Jurary, de Lacombe, 
de Souvigny , d'autres fiefs existaient à Longes 
ét Tréves , témoin La Bernardière dont était 


de Lyon. 21 
seigneur haut et puissant homme Charles de 
Chamberon , qui recevait les hommages de ses 
vassaux sous un orme séculaire qui vit encore. 

Ainsi un village qui, dans le moment actuel, 
ne compte pas même un seul bourgeois parmi 
ses habitans, était dans le 16° siècle la résidence 
de plusieurs châtelains. 

Ce village possède une mine de plomb argen- 
tifère, qui fut, dans le siècle dernier, exploitée 
par de faux monnoyeurs : elle est l’objet d'une 
demande en concession sur laquelle l'autorité n’a 
point encore prononcé; mais cette entreprise 
rencontrera de grands obstacles dans la difhculté 
des chemins et l'insuffisance de l’eau pour laver 
le minerai, etc. 

Comme M. Cochard l'a fait ere au com- 
mencement de sa notice , le sol de Longes et 
Tréves est très-ingrat. La température y est su- 
jette à de grandes vicissitudes. Les gelées prin- 
tanières y sont, au rapport des vieillards , im- 
minentes jusqu'à la disparition complète des 
neiges du Pila, et on les aperçoit jusques au 
mois de mai. En juillet s'élèvent fréquemment 
des brouillards quicausent la rouille des biés. 

Les orages sont devenus plus violens, et les 
torrens plus dévastateurs depuis le déboisement 
des sommités du Pila: On manque de bras et de 
fumier pour mettre toutes les terres en valeur ; 


22 Sociélé royale d’Agricullure 

aussi n'y connaît-on pas la rotation des récoltes, 
et les jachères y sont-elles en grand nombre ; 
c'est au point que les deux cinquièmes de la su- 
perficie territoriale sont en friche. 

Les récoltes les plus ordinaires sont le froment, 
le méteil, le seigle, l'orge, l’avoine , les pommes 
de terre et quelques légumes. A Tréves seule- 
ment on recueille du chanvre , mais en petite 
quantité ; le colza et le sarrasin sont peu usités , 
parce qu’ils réussissent rarement. 

Année commune, le froment donne à Longes 
quatre pour un, à Tréves cinq ; dans les deux 
endroits, l'orge de six à sept. Ces grains sont en 
général bien nourris, de bonne qualité, aussi 
se vendent-ils toujours un franc par hectolitre de 
plus que ceux de la plaine. Les pommes de terre 
réussissent très-bien et sont d'un goût excellent. 

Les prés y sont assez étendus, et on ne né- 
glige pas les moyens d'irrigation dont on peut 
disposer ; mais ils sont en beaucoup d'endroits 
abondans en joncs et autres mauvaises plantes , 
ce qu'on attribue à la présence de l'ocre dans les 
eaux d'arrosement ; ces prés donnent à Longes 
cinquante kilogrammes par hectare , et un peu 
moins à Tréves. 

Les vignes sont toutes en plants bas et à cor- 
nes ; les gamés noir et blanc, le mornin rouge 
et la persagne sont les espèces qui dominent. On 


de Lyon. 23 
replante tous les 4o à 50 ans, et alors on attend 
la septième année pour obtenir une récolte. On 
cultive comme dans le reste du canton ; on fait 
du vin très-ordinaire, qui néanmoins se conserve 
assez bien, et dont une partie est exportée à 
Rive-de-Gier. On évalue à un hectolitre le pro- 
duit de cinq ares. | 

Les bois sont essence chênes , charmes, peu- 
pliers , vernes , châtaigniers ; on les aménage à 
neuf à dix ans. Les arbres fruitiers sont rares 
et peu productifs à cause des vicissitudes de l'air. 

L'hiver de 1789 fit périr un grand nombre 
de châtaigniers qu'on n'a pas remplacés. 

On emploie pour l'exploitation des terres et 
pour les charrois, à Longes, 40 paires de 
bœufs, 100 vaches , 5 à 6 chevaux, 3 à 4 mu- 
lets ou ânes; à Tréves , 10 paires de bœufs, 60 
vaches, 4 à 5 chevaux ; on entretient encore dans 
la première de ces paroisses près de 300 chêvres 
et de 15 à 1600 bêtes à laine; et dans la 2°, de 
50 à 60 chèvres, et de 450 à 500 moutons. Ces 
animaux sont en général de race très-commune, 
et leur éducation est très-négligée. 

Ce bétail était de beaucoup moins nombreux 
avant la division des propriétés. À Tréves et 
Longes , comme ailleurs , cette circonstance a 
eu une heureuse influence sur l’agriculture. Ce- 
pendant de combien d'améliorations n'est - elle 


Rapport sur 
la statistique 
des récoltes du 
département 
en 1822, et sur 
le bétail exis- 
tant à cette é- 
poque, par le 
méme. 


24 Société royale d'Agriculture 
pas là, comme ailleurs, susceptible ? Ne pour- 
rait-on pas, par exemple, soumettre à la culture 
un terrain communal de 200 hectares , aban- 
donné jusqu'ici au pâturage des moutons? Ne 
devrait-on pas renoncer à l’écobuage pratiqué à 
Longes sur des sols que recouvre la couche d'hu- 
mus la plus mince, tandis que cette opération 
ne convient qu'aux terrains marécageux ? Ne 
serait-il pas possible de cultiver la pesette, la 
gesse , le pois-lupin dans les champs qu'on laisse 
en jachères après la récolte du froment, et en- 
terrer ces légumineuses pour servir d'engrais ? 
Tels sont les principaux conseils que M. Cochard 
donne aux habitans de la commune dont il a 
tracé la statistique avec sagesse. 


Cette année, comme dans les précédentes , M. 
Cochard a été l'organe de la Commission que 
vous avez chargée de recueillir des renseigne- 
mens précis sur les récoltes du département; (1) 
ces renseignemens vous sont, toutes les années, 
demandés par l'Administration, elle les réclame 
de vous afin de mettre le Gouvernement à même 
de donner au commerce des grains une impul- 
sion conforme aux ressources et aux besoins de 
chaque localité , de préserver l'agriculture du 


(1) Les autres membres de la commission étaient MM. 
Muthuon, Billon, Remond, Mognat de Liergues, Bou- 
chard-Jambon , Vatel , Grognier. 


de Lyon. 25 
préjudice que lui causerait la stagnation de ses 
produits ; enfin de provoquer et de faciliter soit 
les exportations, soit les arrivages extérieurs, 
soit les mouvemens de la circulation intérieure. 

Voici les questions adressées par l'autorité, 
et les réponses que vous avez faites. 

Première quesrion. Combien de fois chaque 
hectare a-t-il rendu en 1822, la semence pour 
chaque espèce de grains? 

Réponse. Terme moyen , à peu près quatre 
pour un. 

2€ Q. Quel a été en hectolitres le produit 
d’un hectare pour chaque espèce de grains ? 

R. Douze hectolitres. 

3.2 (Q. Quel a été en hectolitres le produit 
total de chaque espèce de grains , d'après le nom- 
bre d'hectares ensemencés ? 

À. En froment . . 230,000 hectares. 

En méteil .-. . 55,000 
En seigle . . , 180,000 
En orge. . . . 15,000 
En sarrasin . . 40,000 
En maïs et millet. 3,000 
En avoine. . . 150,000 
En légumes secs. 9,000 
En autres menus 

grains . . . 9,500 


4 Q. À combien d’hectolitres évaluez-vous 


26 Socièté royale d’Agricullure 

la récolte en châtaignes et farineux de toute na- 
ture, autres que les graines et les pommes de 
terre ? 

À. À environ 3000 hectolitres. 

Nota. Les marrons de Loire et ceux de St 
Romain , connus sous le nom de marrons de 
Lyon, ont cette année beaucoup de saveur ; mais 
on craint généralement qu'ils ne puissent être 
gardés. Pour ce qui concerne les autres fruits, 
on en a beaucoup cueilli ; cette recolte a donné 
néanmoins peu de bénéfice , attendu que les fruits 
à noyaux n'ont pu acquérir tout leur dévelop- 
pement, et que presque tous ceux à pepin se 
gâtent en peu de temps. À l'égard des pommes 
de terre , on peut dire que leur récolte printa- 
nière a peu donné; maïs la seconde a été assez 
abondante , et on peut l’évaluer à près de 200,000 
hectolitres. 

5. Q. Quel est le poids commun d’un hecto- 
litre de froment et de seigle provenant de la ré- 
colte de 1822, en distinguant , pour chaque es- 
pèce , la première qualité de la deuxième ? 

R. Le poids d'un hectolitre de froment , pre- 
mière qualité, a été, cette année, de 80 kilo- 
grammes, celui de la deuxième de 75 ; le seigle 
première qualité a pesé 70 kilo., celui de la 
deuxième 65. | 

Noia. Le blé de la montagne, qui a été récolté 


de Lyon. 27 
sur des terrains profonds, a été beau, net , et 
il a donné beaucoup de farine ; celui des terrains 
légers a été fort maigre. 

6. Q. À combien d'hectolitres évaluez-vous 
la quantité de grains de chaque espèce restant à 
l'ouverture de la récolte , et provenant du sol du 
département ou d'achats faits ailleurs ? 

BR. À plus de 4000,000 hectolitres , Lyon 
étant le point central où affluent les grains des 
départemens de la Haute-Saône, de la Côte- 
d'Or , de Saône-et-Loire , de l'Ain, etc. 

7 Q. Quel est le nombre approximatif des 
animaux domestiques , tels que chevaux, ânes, 
mules et mulets, bêtes à laine ou à cornes, 
pores etc. ? 

Æ. Les chevaux employés dans le département 
peuvent être divisés ainsi : 

1.9 Petits chevaux, propres aux charrois, 

qu'on tire de la Bresse , du Bugey, de la Franche- 
Comté et de la Suisse. . . . . . . 1500 

2.9 Gros chevaux dont se servent les 
meüniers. , « . ROSE RE RENE 400 

3.0 Chevaux pes au halage . . 600 

Nota. Ces deux dernières espèces vien- 
nent du Brabant , de la Flandre , de la 
Belgique, de la Suisse, du pays de Caux, 
de la Picardie, de la Brie , de la Beauce. 


2500 


28 Société royale d'Agriculture 
D'autre part. + 2". 2500 
4. Chevaux dont l’agriculture fait 
usage ; ils sortent du Forez, de la Bresse, 
du Bugey ; les plus forts viennent de la 
Franche-Comté et-de la Suisse . . . 3000 
5.0 Chevaux de carioles et de fiâcre ; 
ils proviennent des réformes, ou ils 
sont de rebué . .". 7. : ste ADO 
6.2 Chevaux de poste et nr de 
messageries ; on les tire de la Franche- 
Comté :.. "CONCERTS 
7° Chevaux de voitures bourgeoises ; 
la plupart sont importés de la Franche- 
Comté et de la Suisse; les plus beaux 
viennent de la Normandieet dela Flandre. 400 
8.° Chevaux de selle; on les tire du 
Morvan, de l’Auvergne , de la Norman- 
die , quelques-uns de la Navarre et du 
Étinousin :. © d'A 4 Ce PE 70 


oran: 4) 34 4° Tps 


On élève si peu de chevaux dans le départe- 
ment, qu'à peine y naît-il 200 poulains par an- 
née. Cela tient à la pénurie des fourrages. Mais 
c'est à Lyon que les départemens voisins vien- 
nent se pourvoir de chevaux ; il s'en vend au 
marché de Charabarat de 12 à 1500 par année; 
de leur côté les marchands de la Guillotière en 
vendent au moins 2500, 


de Lyon. 29 
On peut porter le nombre des mules 


212 5 AU TES  S VO APE LE SR LE ER 600 
Celui des ânes, lesquels sont presque 
tous élevés dans le département, à . . 1200 


Celui des chêvres à . . . . . . 15000 

Le Mont d'or seul en compte plus 
de 11000. * 

On porte le nombre des moutons et 
152 0) AS er Re DURCe | Eu SE EEE ASS 

Sur lesquels un dixième environ est 
mérinos ou métis. Le département pour- 
rait nourrir beaucoup plus de bêtes à 
laine. 

Malgré la pénurie des fourrages, qui a dimi- 
nué le nombre des vaches, il est encore au 
moins de 55000. 

Celui des bœufs a d'autres causes de diminu- 
tion dans la division des propriétés, et l'usage 
d'employer les vaches au charrois comme au 
labourage. 

Ce n'est que dans les montagnes qu’on élève 
quelques porcs. Les habitans de la plaine nour- 
rissent , lorsque les pommes de terre sont abon- 
dantes , de petits cochons qu’ils achètent pour 
leur consommation, ou pour les revendre. 

En terminant sa dépêche, M. le Préfet avait 
demandé un aperçu sur la récolte des vins, avec 
indication tant de la quantité que de la qualité, 


30 Société royale d'Agricullure 
comparativement avec les récoltes précédentes. 

Votre réponse a été qu'en général cette récolte 
a surpassé d'environ un cinquième celle de l'année 
précédente; et cependant dans le cours de cette 
année , la grêle et une chaleur soutenue ont nui 
à la vigne. La qualité en paraît excellente; mais 
comme ces vins ont acquis trop vite de la maturi- 
té, on est porté à croire qu'ils ne vieilliront point. 
Les rapés, dans plusieurs endroits, ont pourri; 
partout le vin redoute l'influence de l'air at- 
mosphérique, et contracte facilement un goût 
d'évent. Il semble qu’un peu d’acidité est nécessaire 
pour la conservation de cette liqueur. En effet, 
les vins de 1811, qui furent remarquables par 
leur maturité prématurée, ont tourné au gras 
au bout de 8 à 9 ans. C'est pour conserver 
leurs vins que les marchands , en plusieurs en- 
droits , introduisent de l’eau-de-vie dans les 
tonneaux. On sent aussi qu'il est nécessaire de 
pratiquer de bonne heure le soutirage, pour pré- 
venir une nouvelle fermentation. 

Tels sont les documens que vous avez adressés 
à l'Administration ; et en même temps vous lui 
avez représenté la nécessité de l'exportation du 
superflu de notre consommation en céréales. 
Le blé est à un prix si bas, on en reçoit si peu 
de demandes, la récolte future s’annonce comme 
devant être si abondante, que tout nous fait 


de Lyon. 31 
présager une surabondance de blé décourageante 
pour l’agriculture , à moins que le Gouverne- 
ment ne favorise l'écoulement du superflu tou- 
jours croissant de notre consommation. 


Depuis long-temps les bons esprits qui ont ré- 


fléchi sufPéconomie ruralede notre belle France, 
ont remarqué qu'il n’y avait aucune proportion 
raisonnée entre l'étendue des terres emblavées et 
celle des pâturages. Nous cultivons beaucoup 
trop de blé, et nous n'élevons pas assez d’ani- 
_ maux. Il entre dans notre régime beaucoup trop 
de pain, et pas assez de viande ; aussi nous es- 
suyons la disette et nous sommes menacés de la 
famine lorsque les intempéries nuisent aux cé- 
réales ; et si Ja récolte en est abondante , leurs 
produits nous embarrassent. . 
Si à l’instar de l'Angleterre , de la Suissefède 


la Flandre et de quelques parties de l'Allemagne, 


nos troupeaux étaient plus nombreux , si con- 
sommant moins de blé nous en réduisions la 
culture, nous ne serions pas exposés à des va- 
riations si calamiteuses dans le prix des denrées 
de première nécessité; une nourriture plus saine, 
plus tonique , serait donnée à ceux qui, soit au 
milieu des champs, soit dans l'intérieur des 
ateliers portent le poids du jour ; plus d’aisance, 
plus de bien-être, plus de bonheur circuleraient 


dans toutes les classes de la société. L'agricul- 


Mémoire sur 
la statistique 
des chevaux du 
Rhône , par M. 
Vatel. 


32 Société royale d'Agriculture 

ture, le commerce, les arts auraient un plus 
grand développement , et nous cesserions de de- 
mander à l'étranger des bœufs pour nos bouche- 
ries, des chevaux pour notre luxe et pour nos 
armées , de la laine et du cuir pour nos manu- 
factures , beaucoup d'autres produitsManimaux 
pour nos arts industriels et notre économie 
domestique. 

T'elles sont , Messieurs, les réflexions qu'ont 
fait naître dans votre esprit, tant le rapport de 
M. Cochard, sur la statistique des récoltes du 
Rhône en 1822, que le mémoire de M. Vatel, 
sur les chevaux qui existent dans ce département. 

Membre de la Commission dont M. Cochard 
a été l'organe, M. Vatel s'était chargé de re- 
cueillir des renseignemens sur la statistique par- 
liculière des chevaux ; nous lui devons un dé- 
nombrement approximatif de ces animaux, avec 
la désignation précise des formes et des qualités 
qui les distinguent, des genres de services aux- 
quels ils sont propres, du régime qu’on leur fait 
subir , des maladies qui les attaquent , des pays 
d'où nous sommes forcés de les tirer, n'élevant 
pas sur notre sol la vingtième partie de ceux 
que réclament nos besoins. 

Un petit nombre de ces documens ont pu 
entrer dans le rapport que vous avez adressé à 
Pautorité; mais comme tous vous ont paru im- 


de Lyon. 33 
portans , je remplirai vos intentions en les rap- 
pelant ici en peu de mots. 

Après avoir fait sentir combien était négligé 
dans notre département l'élève des chevaux , et 
avoir assigné les causes de cette funeste incurie, 
l'auteur passe en revue les diverses espèces de 
chevaux que nous importons , depuis celui de 
halage le plus fort, jusqu'à celui de selle le plus 
élégant. 

Les chevaux des charrois, du roulage, des 
brasseries , des meûneries n'ont rien de remar- 
quable ; il n'en est pas de mème de ceux de 
halage ; leur tailie s'élève jusqu’à 5 pieds 6 pouces, 
( 1 mèêt. 786 millimèt, ); ils ont le corps bien 
fait, le poitrail et la croupe larges , la tête grosse, 
sans être lourde, les membres nerveux, sans être 
chargés de chair, le pas allongé, le trot facile 
et énergique, l'allure précipitée; c'est l'élite des 
races du Brabant et de la Flandre. Le volume 
est dans ces colosses une qualité recherchée ; leur 
prix est de 1000 à 18oof. 

On prétend que le service de la rivière est 
propre à rétablir les jambes fatiguées de ces 
chevaux, aussi ne refuse-t-on pas ceux qui sont 
arqués , boulettés, affectés de vessigons et de 
molettes. Sur presque tous on coupe la crinière 
à l'endroit où porte le collier , et la queue à 8 ou 
10 pouces de son origine; on leur met des fers 

3 


34 Société royale d'Agriculture 

minces et couverts. Ils mangent, par jour , uñ 

double décalitre d'avoine, deux de son, et qua- 
rante à cinquante livres de foin sur le Rhône, 

à peu près autant de luzerne sur la Saône. Le 

fourrage, souvent avarié , leur est donné à plein 

râtelier ; on ne crible pas l'avoine; aussi la hui- 

tième partie de ces chevaux succombe-t-elle aux : 
indigestions , aux coliques, au vertige abdominal. 

Comme ces animaux sont mal pansés, ils sont 
très-sujets à des gales , à des roux vieux, que la 
tonte et la propreté seules feraient disparaître , 
et qu'on exaspère par des topiques absurdes. 

Ils sont exposés à toutes les intempéries ; 
couverts d'une sueur abondante, ils se plongent 
dans l’eau froide. Les anciens chevaux résistent, 
mais les nouveaux venus prennent souvent des 
catarrhes mortels. , 

Un huitième perd la vue , un plus grand nombre 
prend le farcin; cette maladie n'est point, le 
long du Rhône, rangée parmi les rédhibitoires ; 
si elle cause la mort d’un cheval de louage, la 
perte est pour le bailleur. La maladie guérit 
quelquefois sans traitement: on voit alors les 
boutons s'amollir au centre, s'ouvrir, suppurer 
et se cicatriser. On croit peu à la contagion; on 
ne sépare les malades qu'autant qu'ils sont cou- 
verts de boutons ulcérés. Quant à la morve, on 
la regarde comme contagieuse. On isole les ani- 


de Lyon. 35 
maux qui en sont atteints, mais pour ne pas 
se priver de leurs services, on les attèle en 
renard, c’est-à-dire, à un cordage particulier; 
ils mangent à part et bivouaquent. 

Indépendamment de la morve et du farcin, 
les chevaux de halage sont souvent affectés des 
eaux aux jambes, du crapaud et des grappes. 

Combien de ces maladies seraient prévenues 
ou guéries, je ne dis pas par'des médicamens, 
mais par un régime convenable | 

Après avoir donné ces détails intéressans sur 
les chevaux de halage, M. Vatel parle des che- 
vaux qui servent à l'agriculture; leur nombre 
est très-petit dans un département où c'est prin- 
cipalement avec des vaches que se font les labours 
et les charrois ; la plus grande partie porte tour 
à tour le bât et la selle, et est dételée de la 
charrue pour traîner une modeste cariole ; ils 
sont si peu distingués que leur prix ordinaire 
est de 2 à 3oof. 

Dans aucune grande ville les chevaux de fiâcre 
ne sont plus tarés, plus décharnés qu'à Lyon. 

Les postes dans'le département sont en gé- 
néral bien montées en chevaux suisses. 

Pour ce qui concerne les chevaux de luxe, ils 
deviennent de jour en jour plus rares dans la 
seconde ville du royaume; un seul cheval, pour 
l'ordinaire , suisse ou comtois , est attelé à une 


36 Société royale d'Agriculiure 

voiture à quatre roues; il mène le samedi, à la 
campagne une famille nombreuse ; il la ramèera 
le lundi , et dans le reste de la semaine il servira 
à l'agriculture. Les chevaux de carrosse , eux- 
mêmes , à l'exception d'un très-petit nombre, 
traînent la charrue. Quant aux chevaux de seile, 
ils sont en très - grande partie destinés à monter 
les commis- voyageurs ; et parmi ces animaux, 
il en est qui, achetés dans le Limousin, l’'Au- 


. vergne, la Navarre, contrastent singulièrement 


Mémoire sur 
les dunes du 
golfe de Gas- 
cogne , et des- 
cription des 
moyens emplo- 
yés pour les fi- 


avec ceux des meûniers, des brasseurs, surtout 
de halage. 

Au reste, il arrive à nos marchés beaucoup 
plus de chevaux que nos besoins ne pourraient 


en réclamer ; mais comme des marchands de di- 


vers pays, surtout du Midi, viennent s'y appro- 
visionner , on ne peut pas porter à moins de 
5000 le nombre des chevaux qui se vendent an- 
nuellement dans le département entier. 

Tels sont, Messieurs, les Mémoires relatifs 
à la statistique de notre département, dont 
vous avez reçu l’intéressante communication. 


Un travail dont l'objet est encore plus impor- 
tant, mais qui concerne la statistique de la Gi- 
ronde, vous a été présenté. M. le comte de Tour- 
non vous a parlé des dunes du golfe de Gascogne ; 
il a décrit les moyens par lesquels ont été fixées 


de Lyon. 37 
des montagnes de sable qui, sur les rives de xer, par M. te 
l'océan, roulaient au gré des vents. C'est dans comte de Tour- 
une de vos séances solennelles, et en présence "re 
d’un public éclairé , qu’il a tracé cette vaste opé- 
ration. Vous auriez de justes reproches à nfe 
faire si je retranchais ici un seul trait du beau 
tableau que vous avez admiré. 

» Les rives de l'océan offrent sur plusieurs 
points le spectacle de montagnes de sable, qui, 
dociles à l’action des vents, marchent pour ainsi 
dire vers la terre , portant avec elles la dévas- 
tation. Mais nulle part ce phénomène n'est 
aussi remarquable que dans le pays borné par 
les embouchures de la Gironde et de l'Adour, 
et baigné par la mer de Gascogne. Là, s’élèvent 
sur une surface de r0o lieues carrées des chaînes 
de dunes de 50 mètres de hauteur , qui, sou- 
levées par les orages , roulent périodiquement 
sur les sols cultivés leurs flots dévastateurs , dis- 
putent la terre à l'homme, et semblent destinés 
à faire reculer la civilisation. » 

» Décrire ces chaînes de montagnesambulantes, 
montrer l'effrayante aridité qu’elles répandent sur 
leur passage, peindre enfin le génie de l'homme 
disant aux vagues de sable : Vous w’irez pas plus 
loin : tel est le but de ce mémoire. Heureux si 
à defaut de talent, je trouve dans l'intérêt de 
mon sujet les moyens de captiver votre attenlion.» 


Led 


38 Societé royale d’Agriculiure 

» Le golfe de Gascogne est formé au midi par 
la côte d'Espagne, qui s’avance profondément 
dans l'océan , et au nord par les côtes de Sain- 
tonge et par les nombreuses îles qui en furent 
sans doute détachées. Entre ces deux côtes géné- 
ralement escarpées, s'étend vers lorient une 
plaine sans bornes, appelée les Landes : elle 
semble même se prolonger sous la mer ; car 
l'océan roule au loin ses flots sur un sable légè- 
rement incliné, qui sur sa trompeuse surface , 
n'offreaux navires qu’une inévitable destruction. 
Entre cette plage inhospitalière de la plaine des 
Landes, s'élève, comme une digue contre l'océan, 
une chaîne de monts sablonneux qui s’étendent 
de l'embouchure dela Gironde à celle del'Adour.» 

» Vues de la mer ou des landes, ces dunes 
présentent comme une multitude de coupoles di- 
versement groupées , toutes de leur base à leur 
sommet, éblouissantes de blancheur. Lorsque 
cette ceinture éclatante se détache au-dessus de la 
verdure foncée des bruyères et des ajoncs , on 
dirait une chaîne de monts recouverts de neige, 
au milieu d’une plaine brillante de la parure du 
printemps. » 

» Dès qu'on atteint ces monticules , toute végé- 
tation disparaît ; le sol cède et fuit sous le pied ; 
on enfonce jusqu'à mi jambe, et ce n'est qu'après 
de longs eflorts qu'on parvient au sommet de 
la dune. » 


de Lyon. 39 

» Delà se montre la chaîne des dunes dans 
toute son horreur. De là l'œil n’aperçoit plus 
que des amas de sable de toutes les formes: il 
cherche en vain dans ces vallées, sur ces pentes 
rapides quelques traces de végétation , une 
mousse, la moindre graminée: seule , la des- 
truction offre autour de lui son image : aucun 
feuillage, aucune herbe ne croît, pour recueillir 
les brises de la mer, et l'air n'est frappé que du 
bruissement lointain des brisans , et du sifflement 
du sable qu'enlève le vent. Partout une arène 
ardente , étincellante, mobile, fatigue les yeux 
de sa monotone blancheur, désole l'ame de son 
aridité : quelquefois seulement un tronc d'arbre : 
pourri, témoigne , en s'élevant au-dessus de ce 
sol maudit, que jadis une terre plus heureuse 
exista sous cette couche dévastatrice. » 

» À chaque pas qu’il fait dans ce désert, un dan- 
ger menace le voyageur ; il marche, et tout-à- 
coup sans aucun signe précurseur , la terre fuit 
sous ses pieds, le sable s’entr'ouvre , l'eau jaillit, 
et il s'enfonce dans un gouffre qui se refermerait 
sur lui si en se couchant précipitamment sur le 
sable , l'habitant du pays n'évitait ce piége dan- 
gereux. On appelle Bioures ces cavités pleines 
d’eau , qu’un sable léger a recouvertes d'une 
voûte trompeuse , présentant à l'extérieur toutes 
les apparences d'un terrain solide. Telles sont 


40 Société royale d'Agricullure 

les dunes ; telle est cette portion de notre belle 
France qui s'étend sur 60 lieues de longueur et 
une lieue et demie de largeur, et qui offre une 
superficie de 120,000 hectares dans le seul golfe 
de Gascogne. » 

» Non-seulement ces sables sont complètement 
arides , ils deviennent encore les plus redoutables 
des agens de destruction. Aussitôt que le vent 
d'ouest commence à souffler , et dans ces parages 
il dure huit mois par an, les légères molécules qui 
couvrent la pente de la dune opposée au vent, 
soulevées par lui, glissent:, s'élèvent , courrent 
et en atteignent le sommet. Leur marche est si 
rapide que la main opposée à cette multitude de 
projectiles presqu'invisibles , est bientôt meurtrie 
par leurs angles aigus. » . 

» Lorsque ces atomes se sont accumulés au, 
sommet de la dune , leur base ne pouvant plus 
se soutenir s'écroule , et le sable précipité en 
nappes, en torrens , roule au loin ses flots 
arides, Qu'un mur , qu'une haie se présente , ce 
sable arrêté samoncèle ; mais bientôt dominant 
cet obstacle, ïl le franchit , et devenu plus rapide 
dans sa course , il remplit les sillons , ensevelit 
le ceps des vignes , les tiges des arbres , pénètre 
dans les habitations , et partout il semble jeter 
comme un linceul de mort sur la plus riante. 

verdure. C'est ainsi que de riches territoires , que 


de Eyon. 4r 
des villages entiers ont à jamais disparu ; que le 
village de Soulac entr'autres , que sa belle église 
ont été détruits. Le voyageur s'arrête avec effroi 
devant ce clocher qui seul témoin de l'ancienne 
prospérité de cette plage , s'élève du sein des 
sables au-dessus des voûtes ensevelies ; plus loin 
il contemple en gémissant un vaste vignoble sur 
lequel les dunes ont accompli leur révolution , et 
dont les ceps séculaires sont maintenant le jouet 
de la mer. » 

» Quelquefois le progrès des sables s'opère 
pendant une seule tempête , et on a vu des dunes 
s’'avancer en quelques heures de 20 à 30 met. ; 
d'autres fois des vents modérés donnent à ce 
progrès une plus grande lenteur ; mais les ré- 
sultats de ce mouvement peuvent être soumis au 
calcul , et la moyenne annuelle de l'avancement 
des sables peut être évaluée à 20 mètres; ce qui 
fait une demi-lieue en un siècle. 

» Les habitans des nombreux viilages qui tou- 
chent le pied des dunes comptent en tremblant 
le nombre des récoltes qu’ils peuvent encore de- 
mander à leurs champs, avant que les champs 
et les habitations soient détruits par les sables. » 

» D’où viennent ces myriades de molécules ? 
quelle puissance les enlève à l’océan et les amon-. 
cèle sur le rivage ? La solution de ce problème 
de géologie n'entre pas dans mon sujet : il me 
suffira de dire que suivant M. Bremontier , ces 


42 Sociélé royale d'Agriculture 
sables proviennent du détritus des roches qui 
forment Les côtes d'Espagne et de Bretagne , que 
les flots enlèvent, broyent et rejettent au fond 
du golfe en imperceptibles atomes. » 

» Queile main arrêtera ce torrent dont aucune 
saison ne tarit la source ? Quel génie préservera 
de la destruction ces territoires si bien cultivés, 
ces villages peuplés d'hommes si industrieux ? » 

» Nicolas Bremontier , ingénieur en chef des 
ponts et chaussées de la généralité de Bordeaux 
en 1786, touché du malheur qui menaçait un im- 
portant et vaste pays, examina attentivement les 
dunes,observa l’efetdes ventssur leurs molécules, 
étudia la marche des coulées de sable ; il vit ser 
quelques points d'antiques forêts qui annoncent , 
de distance en distance, un primitif ensemen- 
cement ; enfin, il interroggea la nature, et il 
conçut l'espérance de rendre les dunes imme- 
biles et de les couvrir de forêts. » 

» Un Monarque dont lame s’ouvrait à toutes 
les pensées grandes et utiles, et dont l'unique 
passion élait amour de ses sujets, Louis XVI, 
accorda une somme pour tenter des essais. » 

» M. Bremontier encouragé par cet auguste 
protecteur, se livra avec l'ardeur d'un ami de 
J'humanité à ces orandes expériences , et dès l’an- 
née 1787 il commença à ensemencer les dunes. 
de la "Teste. » 


de Lyon. 43 

» Les premiers essais réalisèrent toutes les es- 
pérances de l’habile ingénieur , et les semis le- 
vèrent parfaitement : dès l’année suivante des 
des dunes qui menaçaient Mimizau et la Teste, 
arrachées à l'influence des vents, restèrentcomme 
suspendues au-dessus de ces bourgs. » 

» Mais à peine quelques centaines d'hectares 
de sable étaient ensemencés et fixés , que la ré- 
volution vint détourner les regards de toutes les 
entreprises qui n'avaient pour recommandation 
que leur utilité, La source des bienfaits fut tarie 
dans la main du Roi, et les ensemencemens 
cessèrent. » . 

» Dix ans s'écoulèrent ainsi. Au retour de 
l'ordre en 1802, M. Bremontier qui n’avait cessé 
de solliciter des fonds pour continuer une entre- 
prise dont l'expérience faite-en 1787 et 1788 dé- 
montrait la possibilité, M. Bremontier obtint 
l'autorisation de reprendre les travaux. » 

» Îls commencèrent en effet sur une assez 
grande échelle , et i!s continuèrent jusqu'en 1813. 
M. Bremontier était mort dès 1810, après avoir 
vu le succès le plus complet couronner ses 
efforts. » 

» Des circonstances malheureuses pendant les 
années 1813,1814et1815 arrêtèrent les travaux. 
Mais en 1816 je fus assez heureux pour faire adop- 
ter à M. Lainé, alors ministre de l’intérieur , tous 


44 Société royale d’Agricullure 

les plans de M. Bremontier. Dès ce moment une 
marche plus régulière, des fonds plus abondans 
assurèrent à l’entreprise une rapide exécution. » 

» Le succès obtenu par M. Bremontier était 
le résultat d'une pensée très-simple. Il conçut 
que les sables étant par leur ténuité, et par leur 
défaut de cohésion le facile jouet des vents, ik 
était indispensable pour leur confier des graines 
de végétaux, de créer pour ainsi dire aux dunes 
une surface plus compacte. C'est dans cette. vue 
qu'il dirigea les travaux. » 

» On commence par semer sur la dune un mé- 
lange de graines de pins ( pinus marilima } et de 
genêt ( genista scoparia ) on couvreensuite la sur- 
face semée avec des branchages de pins , de genêt, 
d'ajonc ou d’autres arbustes les plus à portée de 
la dune. Ces branches sont couchées en recou- 
vrement comme des tuiles , leur tige étant en- 
foncée dans le sable ; ainsi arrangées elles pré- 
sentent une surface factice qui recevant l'effort 
des veñts, en garantit le sable qu'elle recouvre. » 

» Sous cet abri les graines germent, et au 
bout de deux ou trois ans leurs tiges pressées 
couvrent le sol en surmontant ces restes pourris, 
mais devenus inutiles , de la couverture de bran- 
chages. A la quatrièmeannée, les pins ont déjà 
poussé dans ce sol perméable, leur racine pivo- 
tante a une profondeur de 3 à 4 pieds , les genêts. 


: de Lyon. : 45 
s’élancent au-dessus des têtes des jeunes pins, 
et les protégent de leur ombre. » 

» C’est alors que la dune se revêt d'une douce 
verdure qui annonce au cultivateur qu'il n'a plus 
riea à craindre de son eflrayant voisinage; car 
un terrible instrument de dévastation est trans- 
formé en un agent bienfaisant de production. » 

» À cinq ans, la jeune forêt offre une masse 
épaisse de 2 à 3 pieds de haut ; à huit ans les 
pins se sont élevés au-dessus des genêts , et crois- 
sant rapidement , ils atteignent à 25 ou 30 ans 
une hauteur d'environ 35 pieds. C’est alors qu'on 
peut commencer à en extraire la résine. » 

» Tels sont, Messieurs , les moyens employés 
pour fixer les dunes , et pour les rendre produc- 
tives. Ces moyens n’ont pas été d'abord aussi 
simples; mais l'expérience a été mise à profit, 
et nous a conduits graduellement à la méthode 
la plus économique. » 

» [l me reste à vous montrer l'ensemble de 
cette immense entreprise. » 

» La surface des dunes du golfe de Gascogne 
est d'environ 120,000 hectares , la moitié se com- 
pose de vallées où le sable plus compact n'a pas 
besoin d'être fixé, et où les arbres croîtront 
naturellement, Il reste 60,000 hectares de dunes 
mobiles. » 

» De 1787 à 1822 on a ensemencé dans les dé- 


46 Société royale d'Agriculture 
partemens de la Girondest des Landes 7000 hec- 
tares , il reste donc 53,000 hectares à ensemen- 
cer. Pour calculer ce qu'il faudra de temps pour 
rendre ces dunes immobiles , il faut rechercher 
la dépense à faire ; car il est évident que c'est 
ici une question d'argent. » 

» Les 7000 hectares ensemencés ont coûté 
1,300,000fr., ce qui met l’'hectare à 185 fr. » 

» Mais les méthodes s'étant perfectionnées, 
Phectare qui coûtait en 1787 25ofr. n'en coûte 
plus que 130 au terme moyen. Ainsi les 53,000 
hectares coûteront environ 7 millions. Le Roi 
accorde dans ce moment 100,000fr. par an, 
ainsi il faudrait 70 ans pour achever cette entre- 
prise; mais comme à mesure que les arbres se- 
ront mis en valeur, c'est-à-dire, au bout de 30 
ans, ils donneront en résine un produit de 15fr. 
par bectare, l'opération pourra être accélérée 
sensiblement, en ajoutant au fonds primitif 
de 100,000 fr. le revenu des forêts. Ainsi en 50 
ans environ, et avec une somme qui n'est pas 
excessive, vingt villages seront mis à l'abri de 
la destruction , un vaste territoire sera conservé, 
et l'Etat possèdera sur un sol aujourd’hui sans va- 
leur, la plus vaste forêt de l'Europe, peuplée 
de bois propres à tous les usages, et produisant 
plus de résine que n'en consomme la France. » 

» La mémoire de M. Bremonlier consacrée 


de Lyon. 47 
par un aussi grand succès, est immortelle sans 
doute ; mais la reconnaissance faisait une loi de 
rendre à ce bienfaiteur de l'humanité un public 
et solennel hommage. En 1817, 30 ans après 
ses premiers travaux, un cippe de marbre a été 
élevé sur la dune que cet illustre ingénieur fixa 
la première au moment où elle allait englontir 
le territoire de la Teste. Une inscription apprend 
à l'étranger (car c'est de sa mère que l'enfant du 
village apprend et le bienfait et le bienfaiteur ) 
que Nicolas Bremontier trouva l’art de fixer les 
dunes et de les couvrir de forêts ; elle lui dit que 
l'infortuné Louis XVI encouragea cette grande 
entreprise, et que son auguste frère, à peine 
assis sur le trône de ses pères, jeta les yeux sur 
ces plages désolées, et en ordonnant la conti- 
nualion des travaux, rendit l'espérance à leurs 
malheureux habitans. » 


Notice sur 
Y'art de creuser 
des canaux, 
d'ouvrir des 
fossés, et des 
roules par des 
procédés éco- 
nomiques, par 
M. De lu Cha- 
pelle. 


48 Sociélé royale d'Agriculture 


ÉCONOMIE RURALE. 


Comme l'observe très-bien M. Passerat de là 
Chapelle, « Vart de simplifier les travaux agri- 
» coles et de les amener à leur plus grande éco- 
» nomie , mérite de fixer l'attention des proprié- 
» taires qui désirent opérer des améliorations, 
» mais qui sont retenus par les dépenses , sou- 
» vent excessives , qu'elles entraînent. » 

Parmi ces améliorations , il en est peu dont 
le besoin se présente si fréquemment , et dont 
les résultats puissent offrir de plus grands avan- 
tages que le creusement des canaux et l'ouverture 
des fossés. En se livrant à ces travaux, on se 
propose pour l'ordinaire un double but, celui 
de donner un écoulement régulier à des eaux 
stegnantes ou vagabondes, et de les utiliser pour 
les irrigations des prairies et le mouvement des 
usines. 

Un changement de ce genre a été opéré par 
M. De la Chapelle. Dans ses domaines coulait 
un ruisseau dont les inondations couvraient 
d'une vase stérile les champs et les prés voisins. 
Hi résolat de le contenir, et pour cela ïl 
redressa toutes les sinuosités qui ralentissaient 
sa marche, il arracha les vieux arbres et les buis- 
sons qui obstruaient son lit , il recula ses bords, 


de Lyon. 49 

il forma à 5 et 6 pieds de distance des chaussées 

dont la hauteur fut calculée d'après le niveau le 

plus élevé des grandes eaux ; des plantations de 

peupliers , de frènes et de saules furent disposées 
au pied de ces chaussées pour les protéger contrele 

courant. Plusieursécluses furent construites dedis- 

tance en distance, pour la facilité des irrigations. 

Ces travaux étant exécutés , il fallut ouvrir 
un canal assez grand pour recevoir les eaux sur- 
abondantes du ruisseau ; il devait, avoir en lon- 
gueur deux cent cinquante toises de sept pieds 
et demi; sa profondeur devait varier depuis trois 
pieds jusqu'à sept ; il devait avoir d'ouverture 
quatorze pieds dans le haut , et au fond cinq , six, 
jusqu’à neuf pieds. 

Pour creuser ce canal , M. De la Chapelle ap- 
pela des pionniers qui demandèrent 6 fr. de la 
toise courante ; ce qui portait à 1500 fr. le mon- 
tant de la construction. L’habile agronome em- 
ploya un moyen plus économique: il fit ouvrir 
la tranchée avec une forte charrué à avant-train , 
dont l'oreille est mobile , et le soc pointu en 
forme de coin ; six forts chevaux y furent atte- 
lés , trois hommes étaient constamment assis 
sur le manche et la perche pour la contenir lors- 
qu'elle rencontrait de fortes résistances, comme 
d'énormes cailloux; elle était suivie par trente 
et jusqu’à cinquante ouvriers armés de pelles, 


4 


5o Société royale d'Agricullure 
qui jetaient sur les bords les terres remuées ; 
elles étaient repoussées par deux autres charrues.. 
Cet ouvrage, exécuté en novembre 1821 , a été 
terminé en 13 jours ; en voici les frais : 

482 journées d'ouvriers à rf. 25c., 


sans nourriture . . . .. , 602 50 
13 journées de charrue pour creuser, 
SM T 5  A N LS M ARS EE 


6 journées de charrue pour niveler 
les’terres des déblais ; les attelages 
étant moins forts que pour la pré- 
cédente, sont estimées 8 . . . . 48 


Réparation à la grande charrue . . 6 


Torar. . . 786 50 

Ainsi au lieu de 6fr. par toise de sept pieds 
-t demi que demandaient les pionniers , on n'a 
dépensé , y compris le travail des charrues du 
propriétaire , que 3fr. 14c. 

Ce n'est pas tout, on a exécuté en 13 jours 
une opération qui, par la méthode ordinaire, 
aurait duré plusieurs mois. Eh, dans combien 
de circonstances l'économie du temps n'est-elle 
pas aussi précieuse que celle de l'argent ! 

Peu de jours après, l'auteur a appliqué le même 
procédé au creusement d’un chemin sur le pen- 
chant d’une côte rapide. Les premiers sillons 
furent ouverts avec peine, les chevaux se tenant 
difhicilement sur la pente escarpée. Dix ouvriers 


de Lyon. | 51 
suivaient la charrue, détournant la terre remuée. 
Dès la seconde piquée , les chevaux se tenaient 
mieux, et la charrue repoussait elle-même les 
terres sur le bord de la pente; on la chargeait 
de plusieurs hommes lorsqu’elle manœuvrait 
contre la balme. Là où le sillon devait être creusé 
plus profondément, on y repassait plus souvent. 
Dans l’espace de trois jours, ce chemin fut rendu 
praticable , au point que des tombereaux pesam- 
ment chargés ont pu le gravir. Sa longueur est 
de plus de 100 toises , sa largeur de 10 pieds, et 
on peut évaluer à 60 pieds la hauteur perpendi- 
culaire de la colline au sommet de laquelle il 
aboutit. La dépense a été de 43fr. 75 c., ÿ com- 
pris le travail de la charrue. 

L'auteur fait observer que sa méthode n'est 
inapplicable que sur les marais, les rochers , les 
sols couverts de bois; il pense qu'elle pourrait 


s'adapter aux entreprises les plus vastes, même 


au creusement des canaux qui traversent les 
empires et mettent les mers en communication. 


C'est à l’aide d'une charrue encore plus forte 
que celle de M. De la Chapelle , qu'un autre agro- 
nome habile, M. De S/-Victor, a opéré à Rono 
près Tarare, d'importantes améliorations. 

M. De St-Did'er , qui a vu manœuvrer cette 
charrue, en a donné une courte notice , et il Pa 


Notice sur 
une  Charrue 
charolaise ; par 
M. De Si-Di- 


dicr.. 


52 Société royale d’Agricullure 
accompagnée d'un dessin exact. D’après ce dessin 
auquel est jointe une échelle de proportion, on 
peut facilement juger des dimensions extraordi- 
maires de la charrue de M. De St- Victor. (x) 

Attelée de 16 bœufs vigoureux, conduite par 
‘deux laboureurs tenant les manches , suivie de 
huit manœuvres marchant dans le sillon pour 
en ôter les blocs de pierres qu'elle arrachait jus- 
qu'à 22 pouces de profondeur , cette charrue 
puissante a défoncé en 30 journées environ 25 
mesures de 1200 pas, eten a extrait plus de 400 
charges de pierres, dont les plus grosses étaient 
à peu près du volume d’un tonneau de 3 ânées. 

Ces défoncemens ont amélioré pour long- 
temps les terres sur lesquelles on les a pratiqués; 
c'est au point qu'elles donnent de superbes mois- 
sons de froment , tandis qu'on n'en obtenait au- 
paravant que de chélives récoltes de seigle. 

C'est principalement au moyen de sa charrue 
que M. De S1-Victor a pu se livrer dans sa terre 
de Rono à beaucoup d'autres belles opérations 
agronomiques , telles que des semis considérables 
de bois sur des montagnes depuis long-temps dé- 
pouillées et arides; la création de vastes prairies 
artificielles ; la culture en grand de la pomme 
de terre : il n'a pu en effet obtenir ces amélio- 
rations que par des défrichemens considérables 
et de profonds défoncemens. 


(1) Voyez à la fin du volume, 


de Lyon. 53 

11 est dans tous les pays un grand nombre de SurlaPtéride 
végétaux qu'on méprise parce qu’on n’en connaît es et 
pas les propriétés : telle est parmi nous la ptéride : 
aquilline, fougère femelle ( Pferis aquillina ),sur 
laquelle M. HMadiot vous a donné des détails fort 
intéressans,. 

Tandis que dans quelques pays on a bien de la 
peine à la détruire, dans d’autres on la fait servir 
à divers usages précieux. 

Elle a deux espèces de racines , dont l’une pi- 
vote jusqu’à 30 pieds, et l'autre (qui est plutôt 
une souche ) est traçante. La manière la plus 
sûre de l’extirper , c’est d'en couper les jeunes 
pousses avec la faulx, la faucille, ou par le bi- 
nage d'été. Voilà pourquoi elle disparaît des pays 
où l'on cultive les trèfles, les luzernes qui se 
coupent souvent, et la pomme de terre, les ha- 
ricots qui exigent plusieurs binages. 

En Anjou et en Bretagne, on la récolte eton 
ne la détruit point, on fait avec ses racines des 
fagots qu'on nomme Souge, et qu'on donne aux 
cochons. Ceux qu'on a nourris de cette manière 
sont plus estimés que ceux qu'on à engraissés 
avec du petit-lait, des pommes de terre , des dé- 
bris de jardin; et leurs jambons rivalisent à 
Paris ceux de Mayence. 

Dans des années de disette, les Souges ont 
servi à la nourriture des pauvres ; on les faisait 


54 Sociélé royale d'Agriculture 

cuire pour leur enlever un extrait amer et 
purgatif qu'elles renferment avec de la fécule ; 
ou mieux on en retirait par des procédés parti- 
culiers cette même fécule qui est identique à 
celle de pomme de terre, de sagou, de manioc. 

Les jeunes pousses de ptéride sont également 
du goût du bétail, on les garde pour l'hiver , en 
les stratifiant avec de la paille à laquelle elles 
communiquent leur odeur. 

Les feuilles servent de litière, et donnent un 
fumier qui, étant pourri, est préférable à celui 
de paille. L'auteur a observé les effets de cet en- 
grais sur des terrains qui semblaient condamnés 
à la stérilité ; il a remarqué aussi que partout 
où le fumier de ptéride était répandu , la plante 
se multipliait abondamment. 

Dans quelques départemens de l'ouest , cette 
plante sert à couvrir les habitations des paysans 
et celles de leur bétail ; elle entre aussi dans la 
construction des murs : l'auteur a vu de ces 
murs qui, quoique très-anciens, avaient con- 
servé beaucoup de solidité. 

Indépendamment de ces usages , la ptéride est 
employée à chaufler le four, à cuire la chaux 
et le plâtre, à couvrir les plantes qui craignent 
les fortes gelées , à fournir de la potasse. 

T'els sont les usages de la fougère femelle , 
( Pleris aquillina) en Bretagne et en Anjou. 


de Lyon. 55 

Dans d'autres provinces de France, M. Wadiot 
a observé des végétaux plus importans : de ce 
nombre sont les figuiers du midi ; il en a dis- 
tingué plusieurs variétés, dont quelques-unes à 
caractères si tranchés que , facilement, selon lui, 
on pourrait les considérer comme des espèces. 
Parmi elles , il en a distingué une qu'il croit 
avoir été inconnue à Garidel et à M. de Suffren. 

En voici les caractères les plus saillans : tige 
tortueuse , écorce d'un gris cendré, parsemée 
de taches fauves, ramifications nombreuses , 
boutons gros et renflés ; feuilles larges , forte- 
ment palmées, d'un vert brun à la face supé- 
rieure, de couleur olivâtre à l'inférieure , rudes 
au toucher, nervures saillantes, pétioles gras. 
et allongés; figues naissant le long des rameaux, 
tantôt en groupes , tantôt solitaires, presque 
sessiles , d’abord verdâtres et arrondies , ensuite 
bleuâtres, violettes, et enfin noires, et de la 
forme de l'aubergine. 

L'arbre produit abondamment au printemps, 
en été , en automne ; l'auteur en a mangé des 
fruits à la fin d'octobre 1821 ; il en a rencontré 
un pied entre des individus d'autres variétés dans 
Pan des jardins de PObservance. 

Cette variété lui paraît précieuse, non-seule- 
ment sous le rapport du goût du fruit, mais en- 
core sous celui de la précocité, et pour laccé- 


Sur une nou- 
velle variété de 
Figuier , à gros 
fruit noir , en 
forme de fruit 
d’aubergine ; 
par Le méme. 


Sur une va- 
riété de noise- 
tier à feuilles 
pourpres ; Par 
le méme. 


56 Socièté royale d'Agriculture 
lérer encore , il propose les moyens suivans : on 
fait aux rameaux une légère incision corticale ; 
on serre fortement les pétioles, comme si on vou- 
lait les tordre ; on met une goutte d'huile sur 
chaque ombilic. L’enveloppe du fruit étant 
épaisse et dure, résiste à un insecte du genre 
cinips , qui s'insinue dans les figues des autres 
espèces. 

Telle est la variété de figuier que M. Madiot 
a signalée aux cultivateurs du Midi. 


Le même cultivateur a obtenu par la voie 
des semis une variété de noisetiers à feuilles 
pourpres. Les graines lui en avaient été remises 
par notre Confrère, M. De Fréminville, qui les 
avait récoltées sur un vieux pied à feuilles cui- 
vrées , dans un de ses domaines en Bresse. 

Le nouveau noisetier est conservé à la pépi- 
nière départementale , en voici les caractères : 

Elévation ordinaire; tige droite très-ramifiée; 
écorce d'un gris blanchâtre , tiquetée de points 
cendrés, souvent cotonneux; rameaux opposés ; 
bourgeons gonflés , écailleux , de couleur rousse. 
verdâtre ; chatons cylindriques , longs de deux 
pouces, se montrant à trois époques, juin, 
octobre et décembre; noix de moyenne grosseur, 
allongées ; pellicule intérieure rose; feuilles nais- 
sanies presque rouges, un peu cotonneuses , en- 


de Lyon. 57 
suite de couleur cuivrée , enfin d'une belle teinte 
violette , portées sur de courts pétioles , épaisses , 


dentelées sur les bords, hérissées de petits poils | 


rougeâtres et rudes, nervures bien prononcées ; 
port très-élégant , contrastant agréablement par 
la couleur de ses feuilles avec les autres variétés 
du genre. 

Cet arbrisseau est robuste , il s'accommode, 
pour ainsi dire , de toutes les expositions et de 
tous les terrains ; il se plaît particulièrement sur 
les sols sablonneux, et au nord ou au levant ; on 
le multiplie facilement par marcottes, rejetons , 
semis ; mäis par cette dernière voie il peut perdre 
ses caractères ; c’est par la grefle qu’on le con- 
serve sûrement. 

Les fruits de ce noïsetier sont d'un goût agréa- 
ble , sur-tout à l’état frais ; les confiseurs pour- 
raient en tirer parti; on en extrairait de l'huile 
qui, pendant plus d’un an, servirait à la cuisine, 
et qui, plus vieille ; servirait à l'éclairage , sans 
fumée et sans mauvaise odeur. L'auteur pense 
que deux livres de l'amande fournirait une livre 
d'huile de bonne qualité. 


C’est sous le rapport de leur bois qu'il a ob- 
servé trois espèces d'érables indigènes, l’acer 
pseudo platanus , le platanoïdes et l'opalus. M les a 
vus sous diverses latitudes , sur presque tous les 


Sur trois es- 
pèces d’érables 
indigènes ; par 
le méme. 


58 Société royale d'Agriculture 
sols , à toutes les expositions , et toujours végé- 
tant avec vigueur ; il pense avec raison qu'ils 
devraient être plus communs dans les forêts. 
L’Acer pseudo platanus est très-improprement 
nommé sycomore ; car le sycomore des anciens 
était un figuier, Ficus sycomorus. C'est un arbre 
forestier qui aime les terrains arides. L'auteur en 
a vu dont le tronc avait quatre mètres (12 pieds) 
de cireonférence. On peut l'élever en tailliscomme 
en haute futaie. Son bois, dur, compact, blanc- 
marbré , est susceptible d'un beau poli, il brûle 
facilement , et donne un feu clair et ardent; on 
en fait des écrous de pressoir , des écuelles , des 
cuillers , des meubles, des ouvrages de tour , de 
marqueterie, des instrumens de musique, des 
montures de fusil : pour tous ces usages ce bois 
rivalise plusieurs de eeux que nous faisons 
venir à grands frais d'un autre hémisphère. 
L’érable plane , Acer platanoïdes s'élève plus 
haut que le précédent. L'auteur en a vu dans les 
forêts de Anjou , de la Bretagne , du Dauphiné, 
des individus dont la circonférence au bas du 
tronc était de 36 pieds, et la hauteur de 100; 
il a compté sur la coupe d'un de ces arbres 264 
rayons , ce qui suppose que ces géans végétaux 
avaient vécu 300 ans. D'abord blanchâtre, le 
bois de cette espèce ne tarde pas à prendre une 
teinte jaunâtre ; moins compact que le précé- 


_: de Lyon. 5g 
dent ; il pèse 56 livres le pied cube ;on en fa- 
brique en Anjou, des sabots, des cuves, des 
coffres , des roues, des conduits d'eau. On en fait 
ailleurs des échalas, des pieus , sur-tout des 
cercles , préférables à ceux de châtaignier et à 
ceux de saule marceau. Il est peu sujet à la ver- 
moulure , et dure long}-temps sous terre. De 
même que l’érable à sucre , il renferme dans les 
vaisseaux propres, une grande quantité de ma- 
tière sucrée , comme l'auteur s'en est assuré 
en en faisant tailler 900 gros pieds sur les routes 
royales. 

L’érable opale, Acer opalus , est, dit-on, ori- 
ginaire d'Italie. L'auteur l'a vu en grande abon- 
dance dans les forêts de l'Anjou, dans celles du 
Dauphiné, sur-tout dans celles de notre Con- 
frère M. De Moidière. Sa croissance est plus 
lente que celle des deux autres. M. Madiot n'en 
a pas rencontré dont la circonférence ral 
9 pieds, et la hauteur 50. 

Le bois, dont le pied cube pèse 60 livres, est 
jaunâtre , d’un tissu fin, serré, susceptible d'un 
beau poli. Les menuisiers et les ébénistes en font 
grand cas, même à Paris. Il offre des marbrures 
singulières qui le rendent précieux pour certains 
ouvrages de tour. Ces marbrures sont dues à 
des ébranchemens pratiqués dans le moment de 
la pleine végétation, parce qu'alors la sève s'extra- 


Sur une es- 
pèce  d’orme 
égyptien ; par 
le méme. 


60 Société royale © Agriculture 

vasant à plusieurs reprises, donne lieu à des 
noôdosités qui, coupées en divers sens, offrent 
des figures souvent très-bizarres, capables de dé- 
router les deridrologistes les plus habiles. 


L'arbre suivant est exotique, sa graine se 
trouva parmi plusieurs autres qui furent remises 
à M. Madiot par un de ses amis, naturaliste de 
l'expédition d'Egypte ; il le sema, et en donna 
des plançons à plusieurs eultivateurs botanistes 
qui n'en avaient aucune connaissance. 

Il a bien réussi à la pépinière départemen- 
tale où il a offert des caractères remarquables. 

Il ne s'élève pas au-dessus de 10 à 12 pieds, 
et on ne peut l'empêcher de se former en buis- 
sons. Le tronc est blanchâtre , grisaillé , à ger- 
çures peu profondes ; branches efhlées , très rami- 
fiées , tendant toujours à prendre une direction 
horizontale ; boutons fauves , imbriqués ; feuilles 
épaisses, lisses, ovales, crenelées, à nervures 
très-saillantes, portées sur des pélioles courts , 
minces, ressemblant au premier aspect aux 
feuilles du PAillyrea latifolia, L.; persistant 
tout l'hiver, elles font place vers le commence- 
ment ‘du printemps à celles qui doivent les 
suivre. 

M. Madiot aui en possédait plusieurs pieds, en 
hasarda quelques-uns en pleine terre ; n'étant pas 


de Lyon. 65 
encore assez ligneux, ils souffrirent dans l'hiver de 
1810 ; mais l’année suivante ils repoussèrent vi- 
goureusement par le pied; et depuis ils se sont 
propagés autour de Lyon, où ils se multiplient 
par la grefle sur les ormes indigènes. Cet arbuste 
aime les terrains frais et légers , ainsi que l’ex- 
position du midi. Comme le filaria, il prend 
sous la serpette toutes les formes. L'orme égyp- 
tien qui, au milieu de l'hiver , oftre la plus belle 
verdure, et qui, dans nos climats, a sa place 
marquée dans les petits bosquets à paysage , est 
néanmoins de la même espèce que les ormes gi- 
gantesques qui ombragent les grandes routes et 
les promenades publiques. 


Le même naturaliste , revenant d'Egypte , re- 
mit à M. Madiot des cônes d’une espèce de tuya. 
Ils furent semés à la pépinière départementale; 


ils y ont réussi ; et cette année ( 1822) quelques. 


pieds de ces conifères ont fleuri , et fructifié pour 
la première fois. En voici les caractères : tronc 
droit , écorce unie, de diverses couleurs , bran- 
ches etrameaux rapprochés , ces derniers applatis, 
devenant fauves en vieillissant , feuilles écail- 
‘ leuses imbriquées, courtes , opposées , tantôt ob- 
tuses , tantôt aiguës, remarquables par une cou- 
leur d'un verttrès-luisant , et par une odeur forte- 
ment balsamique ; cônes plus petits que dans les 


Sur un tuya 
peu connu ; par 
ie même. 


Sur le poirier 
du mont Sinaï; 
pax le méme, 


62 Société royale d Agriculture 

autres espèces du même genre , groupés en grand 
nombre, en général sur un seul côté des rameaux. 
Dans un de ces groupes M. Madiot a compté 
124 cônes. 

Les amandes lui ont offert l'odeur et le goût 
du sandarach du commerce. Le bois est compact, 
liant, flexible, susceptible d'un beau poli, of- 
frant une multitude de veines, de réseaux et de 
nuances variées qui le rendent propre à la con- 
fection de jolis meubles ; exhalant d’ailleurs une 
odeur agréable. 

Ce tuya, qui a quelques rapports avec celui 
d'orient , paraît facile à multiplier , et peut four- 
nir aux jardins d'agrément un joli arbuste de 
pius. 

Son bois étant-incorruptible a pu servir à 
former les cercueils égyptiens ; c’est l'opinion 
de M. Madiot , qui a cru remarquer de la parité 
entre le grain de ce bois, observé à la pépinière 
du Rhône et celui des cercueils qui renfermaient 
les momies adressées au Muséum royal d’his- 
toire naturelle. 


D'autres graines encore furent confiées à M. 
Madiot, au retour de l'expédition d'Egypte; 
telle est celle du poirier du mont Sinaï. Notre 
Confrère en ayant obteru plusieurs pieds , il en 
adressa au savant 7houïr , directeur du jardin 


de Lyon. 63 
du Roi. Cest-là que M. Desfontaire V'a vu pro- 
bablement pour la première fois. N'étant décrit 
avec soin nulle part, M. Madiot a cru devoir en 
tracer les caractères; voici les principaux : 

Taille de l'aubépine , forme de buisson touffn , 
difficile à pénétrer, branches armées de grosses 
épines de deux pouces de longueur , qui portent 
des bourgeons d'où sortent des feuilles allongées 
et blanchâtres , tronc noueux, très-uni, écorce 
extérieure blanchâtre , liber roussâtre , avec 
quelques taches grisâtres, bourgeons rougeîtres, 
grèles , longs , petits et pointus, feuilles petites, 
lancéolées , obtuses, à dentelures rapprochées et 
peu profondes , glabres glauques en dessous , 
portées sur de courts pétioles , creusés en goat- 
tières , réunies en groupes ; fleurs en corymbe, 
pétales petites, couleur de chair, liserées de rouge, 
blanchâtres , arrondies à l'extrémité, d'une odeur 
agréable, variant par le nombre, de 4 à 8 éta- 
mines longues ; pollen d'un rose pâle; fruits 
ordinairement réunis en groupes, petits, irré- 
guliers , bossués, d'une peau dure , épaisse , ra- 
boteuse , olivâtre, d'un goût acerbe et grave- 
leux. Cet arbre est facile à multiplier par pepins 
et par grefle. 

ll serait important de le propager, sous plu- 
sieurs rapports , 1.° pour la construction des 
haies, 2.° pour la fabrication du poiré, et, à cet 


Sur le pavia 


de la Floride, 


à longues grap- 


pes; 


mére. 


par 


le 


64 Société royale d'Agriculture 

égard l’auteur s'est livré à des essais qui n'ont 
pas été sans résultats; 3.2 pour la confection 
des objets qui exigent un bois très-compact , 
très-dur , tels que des vis; sous ce rapport, ce 
poirier ne le cède pas au cormier , sorbus domes- 
tica ; il est d’ailleurs susceptible du plus beau 
poli ; on peut le teindre en noir, au point de 
lui donner l'aspect de l'ébène. 


Nous devons encore à M. Madiot une notice 
sur les fruits du Pavia à longues grappes, Escu- 
lus macrostachia , que M. Michaux père apporta 
en l'an 6 de la Floride. Cet arbre fut admis dans 
les jardins à cause de l'élégance de son port et 
de la suavité de ses fleurs. On ignorait ‘que son 


. fruit fût savoureux comme celui de la châtaigne. 


Soupçonnant ce fait, le savant Bosc voulut le 
vérifier en septembre de cette année. 

Visitant la pépinière du Rhône, il ramassa 
aux pieds de ce pavia quelques fruits mürs; on 
les fit bouillir. On observa qu’ils cuisaient plus 
promptement que les châtaignes ordinaires, sans 
doute parce que leur pellicule est plus mince ; 
on en mit sous la cendre , et ils éclattèrent avec 
plus de force que les châtaignes ordinaires qu'on 
a négligé d'entailler. Des deux manières , leur 
goût ne parut pas inférieur à celui des meilleures 
châtaignes. M. Madiot voulut savoir s’il en était 


de Lyon. | 65 
de même des fruits des autres espèces de pavia. 
Les ayant préparés de la même maniere, il 
reconnut qu'iis n'étaient pas supérieurs aux mar- 
rous d'Inde. ; 

Au dire de M. Bosc, le pavia de la Floride 
vésète plus vigoureusement sous le ciel de Lyon 
que dans les environs de Paris , où il reste nain, 
et où ses fruits ne mürissent pas. 

Depuis plus de quinze ans que M. Madio! le 
cultive, il s’est assuré que sa multiplication était 
facile par graines , marcottes et drageons , que 
toutes les expositions lui étaient bonnes, qu'il 
supportait facilement la rigueur de nos hivers, 
que sa grefle sur le marronnier d'inde , espèce 
du même genre, n'était pas dé longue durée, 
sans doute à cause de la différence qui existe 
entre la croissance de ces deux arbres. 


De concert avec M. Madiot M. Faissolle vous  Surdeux pro- 
a proposé de signaler à l'autorité les avantages j*ts de planta- 
d'une plantation de müriers le de PU 
P rs sur ja, roule de Fuissolle, 
Cyr, depuis le port des pates, à Vaise, jusques 
au pont qui sépare cette commune de celle de 
St Didier. On placerait les arbres entre le che- 
min et le fossé, et par le curage de celui-ci, 
on nivèlerait le terrain , tout en procurant aux 
jeunes müûriers un excellent engrais. La ligne 
de plantation étant d'environ 1030 mètres, on 
pourrait y planter au moins 154 pieds d'arbres, 


Sur un ouvra- 
ge relatif à la 
culture du mü- 
rier;par M. Bo- 
nafous , rap- 
porteur M. 
Faissolle. 


“66 Société royale .d'Agriculiure 


qui, dès la sixième année, donneraient chacun 
pour 3fr. de feuilles, ce qui procurerait à la 
commune de Vaise un revenu annuel de 450 fr: 

Notre confrère vous a soumis un autre projet 
de plantation : celle de deux lignes d'érables pla- 
taniers sur le quai de Bourgneuf, depuis la 
fontaine qui est en face de la rue de l'Epine, 
jusques à la hauteur de l'atelier de forges du 
sieur Garnier. La longueur de cet espace est 
de 427 mètres; sa largeur varie de 20 à 26. 
Comme il suffit de celle de ro mètres pour les 
routes de première classe , il serait facile d'établir 
sur le quai de Bourgneuf un trottoir garanti par 
des chasse-roues, et faire de ce trottoir une pro- 
menade agréable, en ie bordant de deux lignes 
d'érables plataniers ; ces arbres espacés à six 
mètres , seraient au nombre de 142. 

Si ce projet était adopté, l’entrée de Lyon, 
par les deux routes de Paris, n’ofirirait pas un 


aspect moins riant que celui qui frappe le voya- 


geur arrivant dans nos murs par le quai St Clair. 


Le même Confrère vous a fait connaître, par 
un rapport judicieux, un mémoire sur les mû- 
riers , que M. Bonafous , votre correspondant à 
Turin, vous avait soumis. (1) 


Les autres membres de la Commission étaient MM. Balbis, 
De Martinel , Madiot, Billon et Groguier. 


de Lyon. : 67 
D'après ce rapport vous avez jugé Pouvrage 
très-digne d’être publié sous vos auspices. Le pu- 
blic l'a accueilli avec reconnaissance. Quoiqu'il 
soit connu , je ne dois pas me dispenser d’en 
rappeler quelques-uns des principaux traits , tels 
que M. Fuissolle les a signalés à votre attention. 
En examinant en chimiste la feuille du mü- 
rier, M. Bonafous y a reconnu une substance 
sucrée qui sert à nourrir le ver , et une matière 
résineuse qui fournit les élémens de la soie. IL a 
retiré de l'écorce 1.° cet acide encore inconnu 
dans sa nature , qu'on a nommé morique ; 2.° de 
la filasse analogue à celle du chanvre. On se rap- 
pelle que M. Madiof avait précédemment exa- 
miné cette substance textile, et qu'il avait dé- 
montré qu’elle était capable de prendre à la 
teinture plusieurs belles couleurs. 

. Parlant de l'éducation de l'arbre, M. Bonafous 
donne un conseil que M. le Rapporteur regarde 
comme important , c'est d'employer pour le ré- 
cépage , des tenailles à mâchoires bien tran- 
chantes , au lieu de serpettes dont les coups im- 
priment à la jeune tige un ébranlement qui se 
communique à des racines encore très-délicates. 

L'auteur veut qu’on grefle les jeunes plants 
avant de les mettre en pépinière; il propose de 
pratiquer l'opération en chalumeau, et le plus 
près possible des racines. Il a observé que les 


63 Sociélé royale d'Agriculture 

plants qui ont resté trop long-lemps en pépi- 
nière réussissent rarement à la transplantation ; 
il a vu les mauvais effets d'une taille inconsi- 
dérée, sur-tout quand elle était faite dans Île 
temps où la sève est en mouvement. Parta- 
geant l'opinion de M. Chance, il conseille forte- 
ment de substituer des müriers nains aux arbus- 
tes dont on forme les haies. On éviterait par là 
des nuées dechenilles dévastatrices , et on aurait 


des feuilles tendres pour la nourriture des vers à 


soie nouvellement éclos. La cueillette de la feuille 


+ exige, selon M. Bonafous , des soins attentifs ; 


Sur la culture 
des müriers et 
l’édueation des 
vers à soie; par 


M. Chancey. 


selon lui et d'autres agronomes , l'effeuillaison 
doit être complète ; mais il est dangereux de 
la pratiquer deux fois dans la mème année; et 
n'eût-on fait aucune récolte au printemps, ilne 
faut pas arracher des feuilles en août, comme 
on le pratique en certains pays, pour nourrir 
le bétail ou lui faire litière. 


Parmi les propagateurs d’un arbre éminem- 
ment précieux, on doit placer au premier rang 
notre respectable confrère M. Chancey. Ce nestor 
des agronomes Lyonnais ne borne pas à la pro- 
vince sa sollicitude philantropique, c’est encore 
aux cultivateurs du Bourbonnais qu'il recom- 
mande avec force la culture du mürier ; il vous 
a communiqué un mémoire sur ce sujet adressé 


1 


de Lyon. 69 
à la Société d'agriculture de Moulins ; et comme 
plusieurs des vues qui y sont exprimées peuvent 
s'adapter à notre agriculture, je dois les rappeler 
ici en peu de mots. 

Sur les bords de l'Allier comme sur les rives 
du Rhône, la révolution à fait disparaître les 
müriers : tout en sollicite le prompt rétablisse- 
ment. Le prix des cocons est double de ce qu'il 
était en 1789; nous possédons le moyen de filer 
la soie à la vapeur, celui de désinfécter les 
magnaneries , nous pouvons trouver dans la pro- 
pagation de la race des vers à soie blanche d'in- 
calculables avantages. M. Poidebar, notre con- 
frère , qui élève cette race, fait la plus belle soie 
du royaume ; il la vend 75 fr. la livre, et chaque 
once de graine lui fournit de 80 à 100 livres 
de cocons. 

Nous n'avons pas à craindre pour nos mûriers 
la rigueur des frimats; ceux de ces arbres qui 
avaient échappé à la hache, ont résisté aux hivers 
de 1789, 95 et 99, qui furent si funestes à nos 
vignes, à nos noyers eb même à nos arbres 
fruitiers. 

Si dans les départemens du Rhône et de l'Allier 
les mûriers n’ont rien à craindre de la tempé- 
rature , ils soufirent beaucoup par l'effet d'une 
effeuillaison inconsidérée. Aussi M. Chancey ne 
s'oppose pas seulement à ce que ces arbres soient 


70 Societé royale d'Agriculture 

dépouillés deux fois dans un an, mais encore 
à ce qu'ils le soient toutes les années ; il veut 
que sur les montagnes , où les hivers sont pré- 
coces , la récolte des feuilles n'ait lieu en général 
que tous les deux ans ; et comme alors , dit-il, 
elle serait presque double, on pourrait , en sui- 
vant cette méthode, et sans augmenter le nombre 
de ses müriers , élever la même quantité de vers 
à sole. 

La plantation de mûriers sur le flanc des 
montagnes de notre département serait aux yeux 
de notre confrère une importante amélioration. 
{1 croit que ces arbres y remplaceraient avec 
avantage la plupart des vignes. En eflet, dit il, 
la récolte en soie n’y manquerait qu’une fois en 
dix ans , Si l'on y suivait le principe de Dandolo , 
tandis que les bonnes récoltes en vin , quel 
procédé de culture et de vinification qu'on adopte, 
seront toujours fort rares. Comme c'est en haie 
qu'on y disposerait les mûriers , ils serviraient 
à retenir les terres; une plantation d'un hec- 
lare donveraït assez de feuilles pour élever dix 
onces de graines ; on y ferait en outre tous les 
cinq ans des coupes pour avoir des échalas et 
des fagots. 

Des haies de müûriers existent près de Mont- 
merle , on en loue la feuille à raison de Sfr. le 
mèfre ce qui donne un produit de 5oof. par hectare. 


de Lyon. 7T 

Veut-on que ces mûriers soient vigoureux et 
touflus , qu’on les taille immédiatement après 
la cueillette des feuilles, et qu’on leur donne 
pour engrais la litière des vers qu'ils ont nour- 
ris. Il est prouvé qu’une éducation de dix onces 
laisse pour résidu 74 quintaux de litière. 

Qu’on se pénètre bien que dans les pays un 
peu froids, les filières de l’insecte étant plus 
resserrées , il doit en sortir une soie plus five, 
plus nerveuse. Ce n'est pas dans la plaine mais 
_sur les côteaux que se forme la belle soie qui 
nous vient du Piémont. C’est auprès du Bourg- 
Arvental , sur les flancs du Mont Siché, à une 
élévation trop grande pour la vigne, qu’on ré- 
colte de la soie blanche qui, pour l'éclat et la 
finesse , rivalise celle de M. Poidebar. Cette soie 
blanche est-elle due à une race de vers créée ik 
y a quarante à cinquante ans par Mad. Matton 
de Fougère, qui pendant longues années fut 
attentive à choisir les plus beaux cocons blancs 
de ses récoltes ? ou devons-nous cette soie à une 
race qüe M. Bertin fit venir de la Chine pen- 
dant son ministère ? 

Quoi qu’il en soit , cette soie du Bourg-Ar- 
gental est depuis long-temps très-recherchée , 
elle se paye de 60 à 75fr. la livre , et elle s'est 
encore améliorée depuis qu'on la file à la ma- 
‘ chine à vapeur de M. Gensoul. 


72 Société royale d'Agriculture 

On croit communément que c’est dans le midi 
que les éducations des vers à soie sont les plus 
certaines; il est prouvé néanmoins qu'en Lan- 
guedoc on a eu dans l’espace de 21 ans 8 bonnes 
récoltes , 6 médiocres, 7 mauvaises ; tandis que 
. dans le même temps, on a obtenu près de Mou- 
lins, 12 bonnes récoltes, 6 médiocres, 3 mau- 
vaises. M. Chancey pense que dans presque toutes 
les contrées du département du Rhône cette 
proportion ne différerait pas sensiblement; et 
c'est par cette considération qu'il a terminé son 
intéressant mémoire. 

Partout où croît la vigne, on peut aisément 
cultiver le mürier , et de plus cet arbre végète 
avec vigueur sur tel sol où la vigne languit. 

La vigne couvre une très-grande partie du 
centre et du midi de notre belle France; elle 
nous fournit un objet important d'exportation. 
Il n’en est pas de même du müûrier ; telle est la 
rareté de cet arbre dans nos campagnes , qu'il est 
bien loin de nous fournir les moyens de nous 
alranchir du tribut que nous payons à létran- 
ger, pour l'importation de la matière première 
de nos plus riches manufactures; peut-être cul- 
Uvons-nous trop de vignes, mais certainement 
nous n’élevons pas assez de müriers. 

Que de terrains où l'on ne peut songer à plan- 
ter des vignes, pourraient se couvrir de müriers ! 


de Tyon. 73 
Combien de vignobles misérables seraient rem- 
placés avec avantage par des plantations de l'arbre 
qui nourrit le ver à soie | 
Tout en recommandant avec sollicitude la 
propagation des müriers, nous devons conseïller, 
non l'extension des vignes, mais le perfection 
nement et l'économie de leur cullure. 


‘Tel est l’objet d'un mémoire qui vous a été 
soumis par M. Rubat, et sur lequel M. J'anson 
l'atné vous a fait un rapport plein d'intérêt. 

L'agronome mäconnais propose de substituer 
aux méthodes usitées pour le renouvellement de 
la vigne un procédé plus économique et plus 
expéditif. Il consiste dans le recouchage complet 
des vieilles souches. Dès lors, dit-il, on n’est 
pas tenu d'acheter de nouveaux plants, et l'on 
n'éprouve aucune interruption de produits entre 
la destruction d'une vieille vigne ét le plein 


rapport d'une nouvelle. Cette période de stéri-. 


lité n'est pas moindre selon lui de sept où huit 
ans, pendant lesquels on fait des frais considé- 
rables sans aucun dédommagement. 

Dès l'année 1813, l’auteur a renouvelé ses 
vignes par ce procédé, et il a obtenu des récoltes 
presque égales à celles que donnent les jeunes 
plants; ses ceps rajeunis depuis dix ans ont l’air 
de ceps de même âge, et rien n’annonce leur 


Rapport sur 
un Mémoire de 
M. Rubat, re= 
latif au renou- 
vellement de la 
vigne ; par M. 
Janson l’ainc. 


74 Société royale d'Agriculture 
prochaine décadence. Un pareil succès, ajoute 
l’auteur , a engagé plusieurs cultivateurs du voi- 
sinage à suivre cet exemple. Quelques-uns se sont 
bornés au renouvellement partiel ; mais M. Ru- 
bat trouve beaucoup plus avantageux le renou- 
vellement intégral. Voici son procédé. 

« Supposee la distance des ceps de vingt-six 
» pouces , on tirera un cordeau entre les deux 
» premières chaponnières ; c’est-à-dire, à 13 
» pouces de chacune , et tout le long de ce cor- 
» deau, de 26 pouces en 26 pouces, on fera 
» un creux destiné à recevoir la recouchée; cela 
» fait, on déracine chaque cep jusqu'à quinze 
» pouces , on le couche avec précaution, et on 
» le fait ressortir dans le creux préparé le long 
» du cordeau. Le sarment recouché devient bien- 
» tôt le cep primitif , l'ancienne souche se pour- 
» rit et sert d'engrais. » 

« Cette première ligne couchée, on en ouvre 
» une deuxième entre la seconde et la troisième 
» chaponnière ; et la terre extraite de cette nou- 
» velle tranchée sert à combler la première. » 

Quant à l'époque de l'opération , l'auteur pré- 
fère le printemps sur les terrains argileux , l'au- 
tomnesu r les siliceux. 

Après avoir fait connaître avec tous ses dé- 
lails le système de M. Rubat, M, le rapporteur 
s'étonne que mis en pratique depuis dix ans, il 


de Lyon. 79 
ne se soit pas propagé davantage dans le Mä- 
connais et le Beaujolais; il a de la peine à croire 
qu'un cep languissant, prêt à être arraché, puisse, 
par la recouchée, donner lieu à une tige vigou- 
reuse , il voudrait comparer à neuf ans une vigne 
ainsi renouvelée , avec un plantier de même âge, 
et surtout mettre en parallèle leurs produits. Il 
ne pense pas , avec l'auteur , qu’en suivant la 
méthode ordinaire , il y ait, pendant buit ans, 
nullité de produits. Ne peut-on pas en eflet, 
obtenir dans les quatre premières années deux 
récoltes de blé et deux de trèfle; et le profond 
minage qu’on fait ensuite ne rajeunit il pas en 
quelque sorte le fonds? et ce dernieravantage peut- 
on l'obtenir par la méthode proposée ? On con- 
vient qu'en suivant la marche ordinaire , trois 
années sont perdues pour le produit ; ce sont 
celles de l'enfance de la plante; mais aussi le 
sol se repose dans cet intervalle, et il prépare 


les récoltes souvent prodigieuses des premières 


années de plein rapport. 

Quant au procédé mécanique de recouchage, 
tout simple qu'il paraît , il exige plus de soin, 
plus d’aitention qu'on ne peut en attendre des 
vignerons ordinaires. 


Postérieurement au rapport dela commission, 
M. Rey - Monléan vous a fait parvenir de sa cam- 


Sur le pro- 
cédé de M. Ru- 
bat ; par M. 
Rey-Monléan. 


76 Sociélé royale d'Agriculture 
pagne quelques notes sur le procédé de M. 
ÆRubat. Cette méthode, ditil, n’est pas nou- 
velle , Rozier l’indiqua, et l'essai en fut fait en 
1791 à la Duchère , près Lyon, chez M. De 
Varax-de-Gages. Les funestes événemens de 
l'époque ne permirent pas de suivre cette expé- 
rience. Notre respectable confrère pense que le 
recouchage des vieilles vignes convient mieux 
dans les plaines que sur les côteaux , lorsque l'in- 
tervalle entre les chaponnières est au moins de 
26 à 28 pouces, lorsque le cepage est uniforme; 
mais sur les côteaux du département du Rhône 
où l'on plante la vigne à la distance de 22 à 23 
pouces ; cette méthode présente selon M. Rey- 
Monléan , deux inconvéniens. Le premier résulte 
de l'insuffisance d’une largeur de onze pouces au 
fossé dans lequel on couche la mère du cep nou- 
veau, il est difficile alors de ne pas endommager 
le chevelu des racines. Le deuxième inconvé- 
nient, c’est le peu de profondeur du fossé à creuser 
pour déchausser le cep primitif; cette profondeur 
n'étant, selon le procédé, que de 15 pouces, 
les sarmens dont les bourgeons enterrés doivent 
donner les racines , lors de la séparation au bout 
d'un certain temps, ces sarmens ne pourront 
jamais se trouver qu'à onze ou douze pouces au- 
dessous du sol, et ils ne pourront résister à un 
. froid long et rigoureux, comme celui de 1819, 


de Lyon. 27 
qui pénétra jusqu'à 18 pouces de profondeur, 
et rendit pendant deux ans les récoltes presque 
nulles. De cette considération M. Rey-Monléan 
conclut qu'aucune plantation de vignes ne doit 
avoir lieu à moins de 18 à 20 pouces. 

Il ne pense pas, avec M. Aubat, que le cep 
primitif se désorganise en peu de temps pour 
fournir un engrais au cep régénéré ; il croit au 
contraire qu'il est long à périr, et que dans cet 
intervalle il s’approprie, en pure perte, des sucs 
de la terre. 

Ainsi, quoique M. Rey-Monléan connût le 
procédé de recouchage long-temps avant que M. 
Rubat en eût parlé, il n’a pas cru devoir le 
mettre en pratique, et il s’en tient, pour renou- 
veler ses vignes, à la méthode qui suit : 

Il arrache les vieux ceps, en pratiquant un 
minage de 20 à 21 pouces ; il purge soigneuse- 
ment le terrain ; ( le bois mort paye la façon }; il 
cultive avec famure complète, la premièreannée, 
des plantes sarclées ; la seconde du froment, dans 
la troisième nouveau minage, et immédiatement 
après planialion selon la méthode de Duhamel. 
Deux ans après, les jeunes ceps présentent une 
végétation vigoureuse , et déjà ils donnent des 
raisins; au bout de quatre ans la récolte est 
passable; six ans au plus tard après l'arrache- 
ment des vieux ceps, les vignes sont en plein 


Nouvelles ob. 

servalions sur 
leprocédé Ger- 
vaisien par Je 
méme. 


78 Société royale d'Agriculture 

rapport ; et dans cet intervalle, qui est moins 
long que ne l’avait indiqué M. Aubat, on n’a 
pas éprouvé cette nullité de produit dont nous 
menace l’agronome mâconnais. 

Cependant comme le procédé par recouchage 
peut convenir sur certains sols où l'on peut creu- 
ser profondément les fossés, les élareir et les 
espacer à volonté ; comme certaines espèces de 
plantes peuvent s’accommoder particulièrement 
de ce mode de renouvellement, nous ne devons 
pas nous hâter de rejeter une pratique qui a 
attiré l'attention du comice agricole de Saône et 
Loire, et attendre , pour asseoir un jugement 
définitif , des expériences plus nombreuses , des 
documens plus sûrs , et les résultats d'ane dis-. 
cussion calme et désintéressée. 


Que d’expériences n’ont pas été faites dans 
tous les cantons vignobles de la France, sur le 
procédé Gervaisien ! Quelle est la pratique agri- 
cole qui a eu plus de panégyristes enthousiastes ; 
et plus de détracteurs | 

Cette discussion eùt-elle été si vive, ‘si des 
intérêts étrangers à ceux de l’agronomie ne 
l'avaient pas animée? Aussi pensez-vous avec 
M. Rey- Monléan, que s'il est vrai que le 
procédé Gervaisien offre de grands avantages , 
ce n'est point par des licences , des droits exclu- 


de Lyon. 79 
sifs de vente, mais par une récompense nationale 
qu'il fallait en rémunérer l'inventeur : dès lors 
on n'eût pas vu de mercantiles spéculations danS 
les éloges pompeux qu'on a prodigués à une mé- 
thodeagronomique dans les efforts combinés aux- 
quels on s’est livré pour la propager, dans les 
moyens de genres différens qu’on a mis en usage 
pour en assurer le succès. 

Sans examiner s'il ne serait pas digne d'une 
grande nation de substituer d’honorables distri- 
butions de récompenses au système fiscal de bre- 
vets d'invention, nous gémirons du moins de 
voir que ce système ne se bornant pas à l'industrie 
manufacturière, cherche encore à envahir l’agri- 
culture. 

En effet, Messieurs, supposons à l'appareil 
vinificateur tous les avantages qu'on lui a attri- 
bués , ne devrait-il pas être à la portée du pauvre 
vigneron qui cultive à moitié fruits , et du petit 
propriétaire pour lequel la vigne n’est qu’un objet 
de culture secondaire? 

Et si ce procédé est nul ou peu favorable, on 
doit s'élever contre lui avec d'autant plus de vé- 
hémence qu’on le préconise avec plus de chaleur, 
et qu'on s’obstine davantage à l'imposer comme 
une espèce d'impôt. , 

Il est probable , au reste, que dans cette 
discussion , comme dans la plupart de celles 


80 Société royale d'Agriculture 
qui divisent les hommes, la vérité réside entre 
les opinions extrêmes. | 

Quoi qu'il en soit, je dois, d’après la mission 
que vous m'avez confiée , consigner dans vos an- 
nales les faits qui vous sont communiqués , sur- 
tout lorsque partant d'une source qui vous est 
connue , ils ne peuvent vous donner aucun soup- . 
çon d'inexactitude. Tels sont les résultats d'une 
expérience à laquelle s'est livrée M. Rey-Monléan, 
dans le mois de septembre 1822, sur la méthode 
Gervaisienne. Il a opéré en présence de deux 
vignerons de St° Foy et de son jardinier. 

Deux cuves avaient été mises en comparaison. 
L'une d’elles a été gouvernée d’après les procédés 
ordinaires , l’autre selon la méthode Gervaisienne. 
Procès-verbal de lopération , jour par jour , vous 
a été adressé. Cette pièce n’est pas susceptible 
d’analise, et je dois regretter de ne pouvoir l'in- 
sérer ici textuellement ; vous en avez ordonné le 
dépôt honorable dans vos archives pour ÿ avoir 
recours au besoin. 

Quant aux résultats définitifs , les voici : Bé- 
néfice en quantité d'après l'appareil Gervaisien , 
10 p. °/, et de plus un vin secondaire , supé- 
rieur de beaucoup à la piquette qu'on a fabriquée 
partout cette année. C'est pour prouver ce dernier 
fait que M. Æey-Monléan vous a adressé un 
échantillon de cette piquette : réellement , elle 


de Lyon. 8r 
vous à paru de fort bonne qualité; et vous lui 
avez trouvé le goût du vin mêlé avec de l’eau. 

M. Rey-Monléan vous a envoyé d'autres échan- 
tillons comparatifs, et vous les avez examinés 
avec attention dans votre séance du 7 févier 1823. 
L’un était d’un vin obtenu par la méthode ordi- 
naire, dans l’expérience de l’auteur , en septembre 
1822; l’autre, d'un vin fabriqué comparative- 
ment par l'appareil Gervaisien ; vous avez donné, 
sous tous les rapports, la préférence à ce der- 
nier; il est vrai que l’autre avait un goût peu 
agréable , indépendant de sa qualité, et tenant au 
tonneau ou à d’autres causes. 

Mais comme on pourrait croire que l’appa- 
reil Gervais ne présente d'autres avantages que 
ceux que depuis long-temps on a reconnu dans 
les cuves couvertes, et tel est le sentiment des 
chimistes œnologues; c'est pour répondre à cette 
assertion que M. Rey-Monléan a soumis à votre 
examen deux échantillons de vin, fabriqué en 
1821 , l'un à St° Foy, chez M. Périsse, dans 
une cuve couverte; l’autre, en même temps 
et au même lieu, dans un appareil Gervaisien. 
Le premier a paru assez agréable, quoique de 
qualité médiocre; le second était plus âpre, mais 
avait plus de feu. 

Ces résultats, quoiqu'inférieurs aux promes- 


ses fastueusement annoncées, sont encore très- 
| 6 


82 Societé royale d'Agricullure 

au-dessous de ceux qu'on a obtenus en d'autres 
lieux, dans le Mäconnais, par exemple. La 
plupart des Œnologues regardent la question 
comme jugée ; quelques-uns plus lents à se pra- 
noncer , disent encore avec le poète latin: 


Adhüe sub judice lis est. 


de Lyon. 83 
ART VÉTÉRINAIRE. 


Du moment que M. Vatel fut attaché, comme 
professeur , à l’école d'économie rurale et vété- 
rinaire de Lyon, il dut ambitionner l'honneur 
de vous appartenir. Il forma une demande d'ad- 
mission, qu'il appuya d'un mémoire sur la fer- 
rure des grands animaux domestiques , dans le- 
quel il établit la nécessité d’avoir sur cette opé- 
ration des connaissances exactes pour se livrer 
avec fruit à la pratique de l'art vétérinaire. 

M. Rainard vous rendit de ce travail le compte 
le plus favorable , et M. Valel fut admis dans 
votre sein. 

Avant de déposer son mémoire dans le porte- 
feuille de la Société, notre nouveau Confrère 
la revu avec soin , il lui a donné de grands 
développemens , il y a fait entrer des considéra- 


tions sur le même sujet qu’il avait lues dans une 


séance publique de l'école vétérinaire ; c'est par 
conséquent un ouvrage tout nouveau , dont j'ai 
à vous présenter ici une rapide analise. 

L'auteur , avant d'entrer en matière, se livre 
à quelques considérations sur l'art vétérinaire, 
son objet et sa dignité; il cite ces mots de Végèce: 

Sunt enim animalia post hominem , ità ars vete- 
rinaria ; post medicinam secunda est. 


Sar l'utilité . 
de la ferrure 
des grands ani- 
maux domes- 
tiques ; par M. 
Vatel, 


84 Société royale d'Agriculture 

La maréchalerie lui paraît une branche essen- 
tielle de cet art. On ne peut, selon l'auteur , re- 
jeter ce fait , à moins de prétendre que la ferrure 
n’est pas nécessaire aux solipèdes; et c'est pour 
démontrer cette nécessité qu’il examine en na- 
turaliste la conformation et la structure des pieds 
dans les différentes espèces domestiques. Les 
mammifères onguiculés, tels que le chien et le 
chat, font leur appui, non sur des parties dures, 
s’usant par le frottement ; mais sur des surfaces 
molles, élastiques, se prétant aux inégalités du 
sol, augmentant en épaisseur et en dureté lors- 
que les frottemens deviennent plus considérables, 
pourvu toutefois qu'ils n'aient pas lieu sur des 
corps assez rugueux pour détruire les couches 
épidermoïdes extérieures , à mesure qu’il s’en 
forme de nouvelles. 

Les mammifères à sabots, tels que l'éléphant, 
le chameau, le bœuf et le cheval ont les pieds con- 
formés de manière à résister plus ou moins au 
frottement. Ceux de l'éléphant sont terminés par 
un vaste matelas cartilagino-corné, entouré de 
cinq sabots qui ne supportent l'appui que dans 
les exercices violens. Chez le chameau , dont le 
pied se divise peu profondément, en deux doigts, 
cet appui se fait principalement sur un coussin 
cartilagineux d’une grande élasticité ; ce n'est 
que chez le bœuf et le cheval que le sabot porte 


de Lyon. 85 
à terre. Le premier de ces animaux, dont le 
pied est fourchu , a sur l'autre un grand avan- 
tage, celui que donnent la souplesse et l'élas- 
ticité pour supporter un poids considérable, et 
résister au frottement. L’ongle du cheval est 
tout d’une pièce ; c’est principalement sur le 
bord inférieur de ses parois , nommés muraille, 
que se fait l'appui, et qu'a lieu le frottement ; 
aussi l'usure doit-elle en être beaucoup plus ra- 
pide que dans les pieds de tous les autres ani- 
maux, sans que la réparation puisse lui être 
proportionnée , d'autant que le frottement excité 
par la sécrétion réparatrice n’a pas lieu comme 
dans les onguiculés , sur la surface sécrétoire. 
Après avoir établi ces faits sur des considéra- 
tions anatomiques étendues, dont les détails, 
quoique peu liés à son sujet , n'en sont pas 
pour cela dépourvus d'intérêt , l’auteur jete un 
coup d'œil sur le cheval de la nature ; comme 
il ne porte que son corps et qu’il ne marche que 
quand il le veut et là où il lui plaît, son sabot 
s'use et s’exfolie de manière à conserver toujours 
la même forme et le même volume; la muraille 
perd de sa cohérence , elle se relève comme les 
bords d’une cloche et tombe, la sole s’exfolie 
par lames ou plaques, la fonrchetté se résout en 
écailles farineuses , etc. Mais dans l’état de do- 
mesticité, toute proportion cesse entre la des- 


86 Societé royale d'Agriculture 
truction et la réparation. De là la nécessité d'un 
moyen artificiel de conservation. 

Pour savoir si ce moyen était mis en usage 
dans l'antiquité , l'auteur s'est livré à des re- 
cherches historiques; il en a conclu que si la 
ferrure n'était pas connue des anciens, ils avaient 
du moins senti la nécessité de protéger par un 
moyen quelconque les pieds du cheval , et même 
celui du bœuf , celui du chameau. C'est ainsi 
qu'Aristote conseille de mettre un soulier de cuir 
aux pieds fatigués des chameaux ; que Columelle 
veut qu’on place sous les pieds douloureux du 
bœuf une semelle, sans doute de tige de genêt, 
qu'il nommait so/ea sparta. Cette semelle fut de 
fer , d'argent, même d'or du temps des empe- 
reurs romains , comme le prouvent divers pas- 
sages de Catule , de Suétone, de Pline, rapportés 
par M. Vatel. 

En quoi censistait cette chaussure , ce. solea 
Jerrea, argentea , etc. ? C'est ce que l'auteur n’a 
pas pu déterminer complètement, il s’est seule- 
ment assuré qu'elle était fixée au pied par des 
lanières , des courroies attachées aux paturons. 
Nous lisons dans des traités anciens sur l'hip- 
piatrique , que ces lanières déchiraient la peau, 
et donnaient lieu à des ulcères fort graves; et c'est 
sans doute pour obvier à ces inconvéniens , et 
pour fixer plus solidement aux pieds la chaussure 


de Lyon. 87 
conservatrice qu’on a inventé la ferrure propre- 
ment dite. 

Si cet usage , qui remonte au 5° ou au 6° siècle, 
n'est pas répandu partout; c'est, selon l’auteur, 
parce qu'il est des pays comme la Perse, l'Ethio- 
pie, la Tartarie, le Japon , les Colonies améri- 
caines , où les chemins ne sont pas pavés , encore 
dans ces dernières régions est-on souvent obligé 
de recourir aux chaussures des anciens. C'est 
ainsi qu'au rapport de Kempfer, les Japonais 
mettent à leurs chevaux des souliers de paille 
cordonnée , attachés. avec des cordes de la même 
matière ; et comme ces sortes de chaussures doi- 
vent s’user promptement , les voyageurs en ont 
toujours provision, et on trouve à en acheter 
dans tous les villages. 

Les chemins des anciens étant formés de 
pierres plattes , étant peu fangeux, usaient beau- 
coup moins que les nôtres , l’ongle des chevaux; 
et ces animaux n'étaient pas soumis à un travail 
si pénible, et ils étaient traités avec plus de 
douceur. C’est à ces causes , à l'influence du cli- 
mat, des localités , aux écarts du régime plutôt 
qu’à la ferrure qu'il faut , selon notre confrère, 
attribuer un grand nombre de maladies qui sur- 
viennent aux pieds du cheval, Ainsi la fourbure 
chronique et tous les accidens que M. Bracy- 
Clark regarde comme étant toujours les effets 


88 Societé royale d’Agricullure 

de la fourbure , peuvent être causés par deschocs 
violens. La raison qu’en donne M. Watel, c'est 
que ces affections arrivent le plus fréquemment 
aux chevaux ardens qui trottent ou galoppent 
sur le pavé. 

On ne peut pas non plus attribuer à la ferrure 
les javarts cutanés et les tendineux , les engorge- 
mens des tendons , les enchevêtrures et toutes les 
altérations du pied qui peuvent en être la suite. 
La faiblesse ou la mauvaise conformation , et 
non la ferrure, voilà la cause des atteintes de 
toute espèce, des meurtrissures de la couronne, 
des plaies du boulet , de celles du genou; les cra- 
paudines, les peignes , les teignes et les seimes se 
déclarent souvent aux pieds du cheval, sur-tout 
à celui de l'âne , à celui du mulet qu'on n'a pas 
encore ferrés. Il est rare qu'on puisse rapporter à 
la ferrure les tumeurs osseuses , connues sous le 
nom de forme, pas plus que l’étonnement de sa- 
bot ,les déchiremens des tendons et des ligamens, 
les fractures de l'os du pied et de l'os sesamoïde. 
N'a-t-on pas vu la fourbure aiguë, dont les suites 
sont souvent si funestes, survenir aux pieds non 
encore ferrés de chevaux et de bœufs ? N'en est-il 
pas de même des blessures de la sole et de la four- 
chette , des foulures et des bléimes ? Peut-on at- 
tribuer à la ferrure l'engravé qui survient non- 
seulement aux bœufs , Mais encore aux chiens ? 


de Lyon. 89 

C'est à tort, selon M. Vatel, qu'on a dit que 
l'usure du pied était la cause principale et pres- 
que l'unique de la réforme des chevaux ; il pré- 
tend que lorsqu'ils subissent cette ignominie ils 
ont encore en général des sabots assez forts pour 
donner attache à des fers. Mais c'est le principe 
même de leur vie qui est usé par l'excès de fa- 
tigue , la continuité des mauvais traitemens, et 
tous les vices du régime. 

Si la ferrure cause des accidens quand elle 
est pratiquée par des mains ignorantes et mal- 
adroites ; qu’elle le soit toujours par des artistes 
habiles , et elle deviendra tantôt un moyen d'hy- 
giène, tantôt un secours thérapeutique : et c'est 
principalement dans les grandes villes, sur les 
grands chemins, à la suite des armées que le vé- 
térinaire maréchal est appelé à conserver , à re- 
dresser un grand nombre de chevaux ; ses con- 
naissances lui seront encore utiles pour résoudre 
un grand nombre de questions judiciaires , sur 
des causes de claudication. 

Ce n'est donc pas sans motifs que le Gouver- 
nement a voulu que la maréchalerie fit partie 
de l'enseignement vétérinaire. Quelques person- 
nes nesentant pas la nécessité de ces motifs, notre 
Confrère a cru devoir les développer dans un 
discours qu'il a prononcé à une séance de l'école 
à laquelle il est attaché. Il y prouve que la plus 


90 Société royale d’Agriculiure 

grande partie des maladies du cheval ayant leur 
siége aux extrémités , le vétérinaire maréchal 
avait, pour traiter ces aflections, un avantage 
immense sur le praticien étranger à la maré- 
chalerie ; il démontre en même temps que l’ou- 
vrier le plus habile , qui n’est point initié 
dans les connaïssances physiologiques est hors 
d'état d'appliquer la ferrure qui convient à cer- 
faines circonstances déterminées. La dextérité 
dans la main ne supplée point les lumières d'une 
saine théorie, 

Qu'on ne s'imagine pas, dit fort bien M. Vatel, 
que l'intelligence d'un vétérinaire purement théo- 
ricien, puisse diriger la main de l'ouvrier dénué 
de théorie; un pareil accord est , pour diverses 
raisons , à peu près impossible : car c’est particu- 
lièrement dans la pratique de l'art vétérinaire 
qu'il faut être à même d'exécuter ce qu’on com- 
mande. 

La maréchalerie ne se borne pas à la consi- 
dération du pied , à celle de sa conformation et 
de sa structure , elle recherche encore l'influence 
de cet organe sur les mouvemens, sur la station, 
sur toute l'économie du cheval; et pour déter- 
miner cette influence, des connaissances étendues 
ct précises sont indispensables ; c’est ce que M. 
Vatel démontre jusqu'à l'évidence , d'après les 
principes de Bourgelat, et il en conclut le service 


de Lyon. 91 
éminent que rend le vétérinaire maréchal , non- 
seulement pour conserver l’ongle du cheval, 
mais encore pour lui rendre l'intégrité, lorsque, 
par l'effet d'une mauvaise ferrure, ou d’autres 
causes , elle l'a perdue ; et de plus , pour redres- 
ser des aplombs faussés , faciliter le jeu des ar- 
ticulations dans beaucoup de chevaux , et rendre 
leurs mouvemens plus faciles et plus sûrs. 


Le cheval est, sans doute, suivant l'expression 
du Pline français, la plus noble conquête de 
l'homme ; mais le bœuf , mais le mouton sont 
peut-être des conquêtes plus utiles:ce dernier 
deviendra pour nous plus précieux encore, lors- 
que sa race sera généralement perfectionnée. 

C'est pour atteindre ce but que peu d'années 
avant l'époque funeste de nos troubles civils, 
plusieurs savans philantropes unirent leurs efforts 
pour introduire et naturaliser en France la belle 
race des moutons mérinos. 

Parmi les propriétaires qui ont entendu la voix 
de ces philantropes , et ont répondu parleur zèle, 
il faut placer au premier rang M. De la Chapelle, 
notre confrère , dont j'ai eu souvent occasion de 
vous rappeler les améliorations agricoles de tout 
genre. 

M. De la Chapelle a bien voulu vous donner 
une notice sur le nombreux troupeau de mérinos 


Notice su 
troupeau dk 
Rouge ; par 
de la Chapi 


92 Sociélé royale d'Agriculture 
qu’il nourrit dans ses domaines de la Rouge, 
près Meximieux. 

Après quelques considérations judicieuses sur 
l'introduction dans notre patrie de la race des 
moutons espagnols , sur les obstacles nombreux 
qui s'opposaient à cette grande mesure , sur les 
succès qui l'ont couronnée, l’auteur recherche 
les causes qui , depuis quelque temps , semblent 
compromettre ces succès , il les trouve princi- 
palement dans les caprices de la mode, si natu- 
rels augcaractère français. On voulait naguère des 
draps qui eussent du nerf et du corps ; on de- 
mande aujourd'hui des étoftes fines, souples et 
moelleuses. Aussi ceux qui , dans l'éducation de 
leurs troupeaux, se sont attachés à la force et 
au tassé des toisons, ont perdu leurs soins; 
a race même de Rambouillet , si renommée jus- 
qu’à ce jour , n’a plus le même crédit; c’est au 
point que les laines de cet établissement n'ont 
pas trouvé d'acheteurs à la dernière vente pu- 
blique. S'il faut en croire les manufacturiers, 
c’est aux dépens de la finesse des toisons qu'on 
a donné aux mérinos plus de volume et même 
de plus belles formes. Les propriétaires qui, par 
le choix des étalons les plus grands et les mieux 
conformés , ainsi que par la dispensation d'une 
nourriture trop substantielle, ont peut-être trop 
imité le régime de Rambouillet, se trouvent 
avoirsuivi une fausse direction. 


de Lyon. 93 

À vette cause de discrédit des laines mérinos, 
signalée par M. De la Chapelle , nous pourrions 
en ajouter d’autres non moins puissantes ; mais 
nous devons nous borner à présenter l'analise 
de la notice des troupeaux de la Rouge. Nous 
retrancherons fort peu des détails donnés par 
notre Confrère , et souvent nous nous servirons 
de ses propres expressions. 

« Mes troupeaux, dit-il, tirent leur origine 
d’un faible détachement de celui que M. Gilbert 
avait importé lui-même pour former un trou- 
peau de choix dans le parc de Malmaison ; ül 
appartenait à la race nommée du Pollard , élevée 
originairement par des moines de ce nom, adoptée 
ensuite par le prince de la paix , et l’une des plus 
fines des cavagnes léonnaises. M. Gilbert avait 
conservé pour son compte une partie du troupeau 
de son importation ; à sa mort, j'eus le bonheur 
d’en avoir quelques individus. Le bélier que je 
me procurai fut allié avec des brebis que j'avais 
acquises lors des importations ordonnées par le 
Gouvernement. C'est de cette souche que sortent 
onze cents bêtes de race pure que je possède ac- 
tuellement. Le lainage de ces animaux, plus 
petits que les autres mérinos , l'emporte pour la 
finesse et le soyeux; mais elle est inférieure 
pour le poids, elle a la qualité que l’on préfère 
en ce moment pour les mänufactures des draps 
superfins et des étoffes de goût. » 


94 Société royale d'Agriculture 

» Je tiens de plusieurs manufacturiers un 
fait qui prouve que les laines des mérinos indi- 
gènes n’ont point dégénéré toutes les fois que 
les propriétaires se sont plus attachés à la finesse 
de la laine qu’à sa quantité et aux formes des 
moutons. On préfère aujourd'hui , m’a-t-on dit, 
les primes de France et de Saxe aux laines ve- 
nant directement d'Espagne. Celles de Saxe qui 
sont si estimées , proviennent de la même source 
que les nôtres , elles ont été importées à la même 
époque , et leur réputation s’est soutenue par le 
choix des béliers. » 

L'auteur parle ensuite de diverses maladies 
qui ont assiégé son troupeau , telles sont le cla- 
veau, la maladie des pieds, la pourriture, la 
gale , le tournis , la météorisation , le muguet, 
le coup de sang , les fractures, la morsure des 
chiens , et d'autres accidens. Il a tenté sans suc- 
cès l’inoculation de la vaccine contre le claveau ; 
et la clavélisation même, pratiquée snr un petit 
troupeau ne put empêcher la perte d'un hui- 
tième ; le moment , observe l’auteur, n’était 
peut-être pas favorable, peut-être aussi la ma- 
ldie avait-elle un caractère malin ; et il déclare 
que si le claveau se présentait encore dans ses 
bergeries , il n'hésiterait pas à recourir à une 
opération qui a le grand avantage d’abréger le 
cours de la maladie. 


de Lyon. à5 

La maladie des pieds ou piétain s'est montrée 
quelquefois dans son troupeau, mais elle n'a 
pas fait de grands ravages , parce qu'il a eu l'at- 
tention d'en arrêter les progrès ; l’auteur la re- 
garde comme éminemment contagieuse , et il 
lui a opposé l'acide sulfurique , remède recom- 
mandé par M, Morel de Vindé, 

La cachexie ou pourriture n'a jamais attaqué 
ses troupeaux qui pâturent dans la plaine aride 
de la Valbonne; il ne l’a vue qu’une fois chez 
quelques bêtes qu’il avait confiées à un fermier 
négligent , dans un domaine éloigné; elles avaient 
été conduites , malgré ses recommandations, sur 
des prairies humides ; mais comme M. De la 
Chapelle les fit retirer promptement de ce lieu 
malsain , un très-petit nombre périt , et les autres 
se rétablirent sur des pâturages secs : on donna 
quelques amers mêlés avec du sel. 

De toutes les maladies qu'il aeues à combattre, 
la gale lui a paru la plus redoutable ; il croit 
qu'elle peut être spontanée, surtout lorsque, 
pour exciter l'appétit, on a abusé des substances 
stimulantes, lorsqu'on n'a pas donné assez de 
boisson , et qu'on n’a pas défendu les mérinos 
contre les effets de la malpropreté , de la fatigue, 
des longues pluies. 

Souvent, dit-il, on croit avoir guéri ce mal, 
et on le voit reparaître plusieurs mois après le 


96 Societé royale d’Agricullure 
traitement. S'il attaque des bêtes communes, on 
}:s vend au boucher ; maïs il ne peut pas en être 
de même des mérinos et des métis. 

La gale s'est présentée deux fois dans les ber- 
geries de M. De la Chapelle. À la première , le 
soufre fut employé intérieurement et en fric- 
tions ; d'autres remèdes , donnés également 
comme spécifiques , furent aussi mis en usage ; 
le mal disparaissait pour se montrer de nouveau 
tous les printemps. Le troupeau fut vendu à vil 
prix, et celui qui l’acheta ne fut pas plus heu- 
reux dans le traitement qu'il lui fit subir. 

Les mérinos qui parurent avoir échappé à la 
contagion , prospérèrent pendant plusieurs mois; 
mais en juillet 1820, quelques boutons se mani- 
festèrent sur le troupeau de béliers qui d’ailleurs 
présentait le plus bel état. L’invasion de £ ma- 
ladie fut si prompte , que malgré les soins qu’ on 
avait eus d'isoler les premiers galeux , tout le 
troupeau passa en peu de jours à l'infirmerie. 
Ecoutons l’auteur rendre compte des moyens 
qu'il mit en usage. 

» Je fis alors une seconde tonte générale, afin 
de pouvoir opérer plus facilement sur tous. Je 
fis laver chaque animal avec soin dans une les- 
sive où j'avais fait dissoudre de la cendre gra- 
velée, combinée avec de la fleur de soufre. Le 
soufre et la gentianne furent donnés intérieure- 


de’ Lyon. + 97 
ment. Je fis faire des frictions avec la graisse 
blanche et la térébenthine, je n'obtins aucun 
succès de ce premier essai ; la gale se montra de 
nouveau à l'entrée de l'hiver ; le troupeau devint 
hideux ; la laine se détachant partout , était rem- 
placée par des croûtes épaisses et dégoûtantes ; 
les animaux tombaïent dans le marasme, et pé- 
rissant en grand nombre. J'essayai des frictions 
avec l'onguent mercuriel, la térébenthine , les 
cantharides incorporées avec la graisse blanche ; 
je is encore usage d'un liniment composé de fleurs 
de soufre, de verdet, de cantharides et d'huile 
d'olive. J'observais la chute des croûtes dans quel- 
ques animaux; mais bientôt la contagion s’éten- 
dait avec plus de force ; aussi la tonte de l’année 
suivante fut-elle presqu'entièrement perdue. » 

» Enfin je surmontai ma répugnance contre 
un remède violent, proposé par M. Tessier. Et 
sur l'assurance que M, Grognier , notre collè- 
gue, me donna, qu'avec des précautions, il n’y 
avait aucun danger à redouter, je me détermi- 
nai à employer les bains d'arsenic et de coupe- 
rose ; tout le troupeau fut lavé à deux reprises, 
sous l'inspection d’un vétérinaire, et c'est à ce 
remède que je dois la cure complète que j'ai 
obtenue. Je dois dire que quelques boutons se 
manifestèrent encore dans le courant de l’an- 
née; mais que, grâces aux soins assidus d’un 

7 


58 - Société royale d’Agricullure 

excéllent berger, et à l'huile de cade, dont il 
portait toujours une bouteille, ces dérnières 
traces de gale ont complètement disparu , et 
mes troupeaux sont, depuis ce temps, dans le 
plus bel état dé santé. . . . ...... S 47515 

» Mon but principal a été de faire connaître 
les remèdes qui m'ont réussi dans le traitement 
de la gale, maladie que je regarde éomme la 
plus désastreuse de celles qui attaquent les mé- 
rinos ; je m'estimerai heureux , si mon éxpé- 
rience peut devenir utile à quelques proprié- 
taires , et les détourner de sacrifier trop promp- 
* tement des troupeaux d'un prix élevé et qu'on 
ne peut former que par des soins long-temps 
prolongés. » 

L’agronome habile qui vous a donné cette 
communication, à bien voulu prendre l'enga- 
gement de vous en offrir beaucoup d’autres, et 
vous les recevrez toutes avec la même recon- 
naissance, 


de Lyon. 99 
HISTOIRE NATURELLE. 


Comme l'observe très bien M. Foudras, l'En- 
tomologie est la branche de l'histoire de la 
nature qu’on cultive le moins dans notre dé- 
partement. On y voit très-peu de collections 
d'insectes. Celle que possédait l’école centrale de 
Lyon, celles qu'avaient formées MM. Faure- 
Biguet, Sionnest et de Villers ont disparu. Ces 

naturalistes avaient signalé dans les environs 
_ de notre ville près de 3000 espèces, dont les 
descriptions se trouvent dans /’Entomologia , 
publiée par M. de Villers, en 1789. Que de 
découvertes ont été faites depuis cette époque ! 
La famille des Carabiques, ( La Treille ) qui 
comprend les genres Cicindela et Carabus en 
offre plus de 200 espèces, dans les environs de 
Lyon, tandis que M. de Villers n’en a indiqué 
que 155 dans l'Europe entière. 

Notre département, l’un des plus exigus du 
Royaume, est , selon M. Foudras , le plus abon- 
dant en te: « Les montagnes de Tarare, 
» dit-il, celles de Beaujeu, et même la chaîne 
» des petites montagnes qui commence à l’Au- 
» bepin et à Riverie, et s'étend par St.-André, 
» Izeron et St,-Bonnet, jusqu'à Montrottier , 
» peuvent être considérées comme sous-alpines; 
» elles sont habitées par un grand nombre 


Notice sur 
lesinsectes uti- 
les et les insec- 
tes nuisibles 
du départe- 
ment ; par M, 
Foudras, 


100 Société royale d'Agriculture 

» d'insectes qu’on ne trouve que dans le nord 
» de la France, et même sur les Alpes. Les 
» côteaux arides que baigne le Rhône sont. 
»el'asile d'un grand nombre d’insectes méridio- 
» naux, surtout d'hyménoptères, qui recher- 
» chent les expositions les plus chaudes pour 
» y établir leur postérité. (1) » 

» Les rives siblonneuses du même fleuve 
» nourrissent à la fois des insectes très-méridio- 
» naux, tels que le /ridaclilus variegatus (Lat.), 
» qui y a été découvert par M. Bourgeois, et 
» des insectes alpins, dont les débordemens du 
» Rhône amènent de temps en temps, quelques 
» émigrans qui finissent par acquérir l'indigénat 
» auprésvdeyLyon 5,0 us due ay 0 

» La partie entomologique de la Faune Lyon- 
» naise pourrait être l'objet d'un travail impor- 
» tant, qui comprendrait beaucoup d'espèces 
» qu’on a cru jusqu'ici particulières à l'Alle- 
» magne et à l'Italie. » 

Qui mieux que M, Foudras est capable de 
mener à fin cette entreprise ? Depuis nombre 
d'années il cherche les insectes indigènes de 
notre contrée ; etdu produit de ses explorations il 


(1) Le Colonites apiformis. (Lat.) Le Matilla pedemon- 
fana (Jur.), ont été trouvés à la Carrete et à Vassieux ; 
aux portes de Lyon; on y rencontre aussi plusieurs Pom- 
pilus et Scolia , le Gryllus ifalicus, ete, 


de Lyon. 107 

a formé un riche cabinet. En attendant le moment 
d'offrir le tableau entomologique de ce départe- 
ment, il vous a présenté une notice des insectes 
utiles et des insectes nuisibles qui s'y trouvent. 

Passant sous silence l’abeille et le ver à soie, 
dont l'histoire est très-connue , il dit un mot du 
Bombyx processionea (LL. }, qui file aussi une'es- 
pèce de soie très-tenace, mais qui ne pourra jamais 
être devidée comme celle du Bombyx mori (1) : 
les chenilles du processionea filent en commun 
leur soie , et l’entremélent d'excrémens et de 
débris de feuilles. L'auteur pense qu’on pourrait 
en tirer parti en la réduisant en filoselle, par 
le cardage ; il propose de tenter en grand des 
expériences à cet égard , dans les forêts de sapins 
qui couvrent la partie occidentale et montagneuse 
du département. 

» Ilest, ajoute-t-il, un autre insecte qu'on 
» devrait essayer de naturaliser dans le dépar- 
» tement, car son produit s'élèverait probable- 
» ment au-dessus de celui des céréales qu’on 
» obtient dans certains cantons, c’est le Cocus 
» polonicus (L.) vulgairement graine d’écarlate. 
» Cet animalcule se fixe et se multiplie autour 
» du collet de la racine du scleranthus perennis, 
» plante très-commune dans les plaines arides 
» de nos montagnes. » 


(1) Ver à soie ordinaire. 


102 Société royale d'Agriculture 

On voit partout aux environs de Lyon la four- 
mi fauve, Formica rufa, (EL. dont on extrait 
Vacide formique ; la Formica fuliginosa , pourrait 
également le fournir ; cette dernière se trouve 
dans le tronc carié de presque tous les vieux 
saules. Il est étonnant qu'aucun chimiste du dé- 
partement ne se soit occupé de la préparation 
de cet acide. 

On pêche l'écrevisse dans presque tous les 
ruisseaux du département qui, dans la saison des 
chaleurs conservent un filet d’eau , tels sont PAr- 
dière , l'Azergues, et même l'Arche qui prend 
sa source à St-Cyr et à St-Didier au Mont-d'Or. 
Mais la plus grande partie des écrevisses qu'on 
consomme à Lyon viennent du lac de Nantua et 
de la rivière d'Ain , qui en nourrissent une pro- 
digieuse quantité. 

Nos pharmaciens peuvent aisément s’appro- 
visionner de cantharides ( Lyffa vesicatoria Lat.) 
On rencontre ces insectes en colonies nombreu- 
ses sur le frêne et même sur le lilas. 

Le proscaräbée, scarabée des maréchaux, bu- 
preste des anciens, (Meloe proscarabæus) bour- 
donne dans toutes nos prairies pendant la plus 
grande partie de l’année. Cet insecte avait autre- 
fois beaucoup de réputation pour le traitement 
des maladies du bétail. 


Quant aux insectes nuisibles, ils sont dans 


de Lyon. 103 
notre département , comme partout ailleurs, 
plus nombreux que ceux dont on peut retirer 
quelques avantages. 

Parmi les premiers , l'auteur signale lŒstre 
du bœuf (Œstrus bovis Clarck ) qui détermine 
des tumeurs que nos paysans nomment harches, 
L'Œstre de la brebis (Œstrus ovinus ) qui cause 
quelquefois le tournis ; l'Œstrus equi , Phémor- 
rhoïdalis, et le veterinus Clarck , trois espèces 
qui attaquent le cheval. * 

Une douzaine d'espèces de /aons , nommés par 
les paysans /avans , et l’hyppobosca equina ( L.), 
qu'ils nomment cantharine , tourmentent aussi les 
bestiaux ; les premiers sont communs sur nos 
montagnes. 

Au nombre des insectes ennemis des abeilles 
sont des acares qui s'attachent à leur corps ; des 
guëêpes qui les tuent , des teignes qui gaspillent 
leur cire et endommagent leurs alvéoles. 

La Vespa Gallica est beaucoup plus commune 
chez nous que la vulgaris ; c'est elle qui pille 
nos vergers et nos vignes en espalier. La guëpe 
ou frêlon, qu'on nomme dans les environs de 
Lyon Tône lombarde, consomme peu, car elle 
se contente des fruits du frêne ; mais son aiguil- 
lon est venimeux. 

Le charançon du blé (Coladre granaria Lat. ) 
west point indigène de nos contrées, il y vient 


104 Sociélé royale d'Agriculture 
avec les blés de la Bourgogne ; cet insecte étant 
aptère , on peut en isoler les ravages. 

La Bruche ( Bruchus pisi., L.) que nous ap- 
pelons trivialément gourguillon et qui se loge 
dans les pois , les vesces , les légumes , est très- 
commune dans nos jardins. 

L'Anobium paniceum Lat. , gâte les pâtes , les 
composés de farine , les pains à cacheter, même 
les grains qui ont plus d’une année. Tous les 
autres sont attaqués par la Tinea granella L. 

Après ces détails et quelques autres que nous 
supprimons à regret, Pauteur nous fait connaî- 
tre en ces termes une découverte de l'un de nos 
confrères : 

» ML. le colonel de Martinel qui s'occupe beau- 
» coup de céréales, a découvert dans les bo- 
» caux qui renferment des échantillons, une 
» teigne toute rousse, qui s’y était prodigieu- 
» sement multipliée. Cette teigne ressemble 
» beaucoup à celles des pelleteries ; mais elle ne 
» se construit pas de fourreau ; elle file irrégu- 
» lièrement autour des semences qu’elle attaque. » 

Contre les insectes ennemis des céréales, M, 
Foudras ne connaît d'autres moyens que le cri- 
blage. Il passe à ceux qui attaquent la vigne: le 
nombre en est grand , et la plupart sont décrits 
dans les livres d'agriculture sous des noms tri- 
viaux , faciles à ramener à la nomenclature sys- 


de Lyon. 105 
tématique ; il faut en excepter néanmoins le 
plus funeste de tous, la pyrale; car on a con- 
fondu sous ce nom, avec les vrais pyrales , des 
tortrix , des feignes , des aluciles ou plérophores. 

Ce cahos n'a pas été débrouillé dans le mémoire, 
fort bon d'ailleurs, que MM. Faure-Biguet et 
Sionnest présentèrent à la Société en l’an 10 , et. 
qui fut publié sous ses auspices. 

Ces naturalistes sont les premiers qui ayent 
signalé nettement comme très-nuisibles à la 
vigne 1.° un charançon gris (Curculio incanus ) 
qui ronge les bourgeons nouvellement dévelop- 
pés; 2.° la teigne de la grappe ( Omphaciella’) qui 
dans certains vignobles avait seule détruit le 
tiers de la récolte. 

Les insectes qui suivent avaient été mieux 
étudiés, tels sont la chape de la vigne , ( pyralis 
villanna P.) dont ilest parlé dans les mémoires 
d'agriculture de Paris (année 1786, trimestre 
d'été ); la pyrale de Florenzac, décrite par M. 
Draparnaud, dans un rapport présenté en l'an 9 
à la Société d'agriculture de l'Hérault. 

Malheureusement il est plus facile de décrire 
les insectes vignivores que d'en arrêter les ra- 
vages. Aussi MM. Faure-Biguet et Sionnest n'ont- 
ils pu proposer qu’un échenillage souvent impos- 
sible. C’est une mesure de même genre que pres- 
crivit M. le comte de Bondi, préfet du Rhône en 


166 Société royale d'Agriculture 

1811, pour réprimer une chenille qui n’était 
point la pyrale de Florenzac , comme on le cro- 
ait, mais la Pyralis viltana Fab. 

D'autres moyens également insuffisans furent 
proposés par M. Arihaud de la Ferrière, notre 
confrère, et nous cherchons toujours les plus 
efficaces. 

Ce n’est guëre sur les vignes, mais fréquem- 
ment sur les saules de nos contrées , que se trouve 
le Melolontha vitis. 

Quant au Welolontha vulgaris , hanneton com- 
mun «ilest, dit l’auteur, commun et très- 
» nuisible dans ses deux états de larve et d’in- 
» secte parfait ; larve, il détruit les plantes 
» potagères , dont il coupe la tige à fleur de terre; 
» les racines et même les arbres ne sunt pas à 
» l'abri de ses dents. Insecte parfait, ilconsomme 
» au printemps les fleurs et le feuillage de tous 
» les arbres indistinctement , et même les bour- 
* geons de la vigne. Si on secoue dès le matin, les 
» arbres couverts de hannetons , les insectes sur- 
» pris se laissenttomber lourdement, et ilest facile 
3 à l'aide d'un drap étendu à terre, de ne pas en 
» perdre un seul. Un agriculteur soigneux pour- 
» xait, dans une seule matinée, en faire ramas- 
» ser plusieurs boisseaux, et se procurer, par ce 
» moÿen, un engrais puissant, comme le sont 
» toutes les matières animales; on ferait périr 


de Lyon. 107 
» les hannetons dans un tonneau défoncé , à 
» moitié rempli d'eau. Le même procédé serait 
» appliqué à un grand nombre d’autres insectes 
» nuisibles, et aux limaçons. » 

Passant à la description des insectes ennemis 
des bois et des haies, M. Foudras rappelle un 
travail sur le même sujet, communiqué en 1818 
à la Société par M. De Martinel (1). Postérieu- 
rement à cette époque, en 1820 et 1821, les 
bois des environs de Lyon, et particulièrement 
ceux de Calvire , Tassin et Charbonnieres, les 
haies de la Guillotière, et les treilles de Villeur- 
banne et de Bron (Isère) furent dépouillés de 
leurs feuilles , et mis à nu comme dans l'hiver. 
Les arbres fruitiers ne furent pas épargnés ; 
l'auteur de ces ravages fut la chenille commune 
(Bombyx chrysorrhæa ). 

Et à ce sujet l’auteur observe que « l'échenillage 
» prescrit chaque année par des arrêtés publiés 
» et affichés , demeure plus que jamais impuis- 
» sant contre cette multitude d’ennemis. Cette 
» opération à laquelle le paysan et le fermier ne 
» se livrent qu’à regret , précisément parce 
» qu’elle leur est ordonnée, ne s'exécute point 
» dans beaucoup d'endroits, et presque partout 


(1) Voyez compte rendu des trayaux de ja Societé, pour 
1818, page 198 et suiv. 


108 Société royale d'Agriculture 


elle ne s'exécute qu'à demi ; au lieu de faire 
brüler le nid des chenilles , le paysan les jette 
sur les chemins , d'où ces animaux pernicieux 
savent bien regagner les haies et les arbres 
qui doivent leur servir de proie. Les contra- 
ventions aux arrêtés des préfets et des maires 
sur l’échenillage restent toujours impunies. » 
» Pour faire réussir l’échenillage, il faudrait 
joindre aux injonctions administratives les 
exhortations pastorales. Pourquoi MM. les 
Curés ne prêcheraient ils pas comme un de- 
voir l’échenillage , pour conserver les fruits que 
le ciel nous envoie ? Une croisade pieusement 
dirigée contre les chenilles , occuperait chaque 
dimanche et chaque jour de fête, à certaines 
heures, des milliers d’individus que l'oisiveté 
porte trop souvent à des actions dont la reli- 
gion s'attriste et s’offense. . . . .. ...... 
Heureusement pour l’agriculture, le Bombyx 
chrysorrhæa n’attaque ni la vigne, ni les céréa- 
les, ni les légumes, ni même les prairies, 
soit naturelles , soit artificielles. Les vergers 
et les bois des montagnes en sont à peu près 
exempts. » 

La nature, au reste, plus puissante que 


Thomme , met un terme aux ravages des che- 
nilles , elle leur oppose les ichneumons dont la 
multiplication est proportionnée à celle des in- 


de Lyon. 169 
sectes qui leur servent de pâture ; elle fait tom- 
ber des pluies froides qui donnent à ces animal- 
cules des diarrhées épizootiques. Aussi vit-on 
disparaître en 1822, l'effrayante colonie qui, 
l'année précédente , désolait nos bois. 

Après cette chservation , l’auteur parle de la 
chenille du Bombyzx dispar. L., dont les arbres 
de la promenade de Bellecour sont ordinairement 
couverts. Cet insecte pond ses œufs en un seul 
tas , et les recouvre de poils roux ; on les aper- 
çoit facilement , et si on les enlevaiten novembre, 
on préserverait pour long-temps une promenade 
agréable, des chenilles qui la déparent. On ne 
saurait trouver aussi facilement le Bombyx neus- 
fria (1) qui pond ses œufs autour des jeunes 
pousses des arbres. 

Les autres chenilles plus ou moins dificiles 
à réprimer , dont M. Foudras a décrit les carac- 
tères , sont le Bombyx cœruleo cephala , qui atta- 
que les pommiers et les pruniers. Les Papilio 
brassicæ, rapæ , cratægi ; les Tinea avonimella , et 
padola. W à parlé ensuite d'une petite chenille 
brune très-épineuse, qui apparut en 1806 contre 
tous les murs de la ville : « Les poils venimeux dont 
» elle était couverte, faisaient , dit-il, naître des 
» ampoules sur Îles maïns délicates qui tou- 
» chaïent l'insecte; quelques personnes toujours 
» disposées à voir du miraculeux dans les moïn- 


Considéra- 
tions sur l’ex- 
ploration dudé- 
partement sous 


110 Sociëté royale d'Agriculiure 


» 


dres événemens , considéraient cette irruption 
de chenilles comme un effet du courroux cé- 
leste. Un peu plus d'attention fit remarquer 
que ces animalcules tiraient leur nourriture 
de petis lichens et de petites mousses que deux 
années pluvieuses consécutives , avaient fait 
multiplier sur les toits. On en conclut que la 
nature toujours sage, ne voulant rien laisser 
inutile, avait dû augmenter le nombre des 
consommateurs à mesure .de l'augmentation 
des objets de consommation, 

» La chenille dont il s’agit est celle de la 706; 
lua complana L., petite phalène blanche qui 
tient ses ailes roulées à la manière des teignes ; 
on la trouve ordinairement contre le tronc 
des chênes qu’elle délivre des plantes parasites 
dont nous venons de parler. » 

Quelques détails sur les sauterelles les plus 


communes dans notre département , terminent 
l'intéressant mémoire de M. Foudras, Ces insectes 
sont les Gryllus germanicus, cærulescens , italicus, 
et zigrofalciatus Lat. Il observe qu'ils ne sont 
réellement incommodes que dans les petits can- 
tons qui avoisinnent le Dauphiné. 


Si l'entomologie a eu jusqu'ici.un petit nombre 


de zélateurs dans notre province, il n'en est pas 
de même de la botanique et de la minéralogie : 


de Lyon. Titi 
pour s’en assurer , il suffit de jeter un coup d'œil 
sur la galerie nombreuse des naturalistes lyonnais, 
que M. Tissier a mise sous vos yeux , avant 
de vous exposer ses vues relativement à l'explo- 
ration de nos contrées sous le rapport de l'his- 
toire naturelle. 

Vous avez vu dans cette galerie lillustre 
Daleschamp et son savant traducteur , lyonnais 
comme lui; cette famille de Jussieu qui à tant 
reculé les bornes de la botanique; le modeste 
Goiflon, qui a laissé sur notre flore des mémoires 
inédits très-intéressans. 

Vons y avez vu pareïllement paraître l'architecte 
fameux, Mognat , qui a fait connaître les meïl- 
leures pierres à bâtir; Blumenstein à qui nous 
devons da description des mines du Lyonnais, 
Forez et Beaujolais ; Jars, auteur d'un impor- 
+ant ouvrage de minéralogie; De la Tourrette, 
qui cultiva avec succès toutes les parties de l'his- 


toire naturelle; De Varax , héritier du cabinet 


de la Tourrette; l'abbé Rozier, dont le nom 
æst si cher à l'agronomie; Devillers , habile phy- 


le rapport de 
l'histoire natu=« 
relle ; par M- 
Tissier, 


sicien ,'entomologiste plus habile encore, quiins-" 


pira l’ardeur de l’histoire naturelle au marquis 
“de Grollier , à Baroud du Soleil, à Imbert Co- 
lomez; le professeur Gilibert qui, après l'af- 
freuse catastrophe de 1793, ralluma dans nos 
murs le feu sacré des sciences naturelles. 


112 Société royale d'Agriculture 

Dans la même galerie figurent d’autres natu- 
ralistes lyonnais, dont la plupart furent nos 
confrères : Macors , Courvoisier , Tabard , Sion- 
nest, Hénon , Bredin , Ragut et T'issier père , qui 
vit à ses cours de minéralogie des princes étran- 
gers. 

Les naturalistes de Lyon, actuellementvivans, 
ne sont pas oubliés : tels sont MM. Balbis , de 
Martinel , Mouton-Fontenille, Madiot, Madame 
Lortet, Barre, Dugas , Bourgeois, Foudras, etc. 

Après avoir payé ce tribut aux savans qui l'ont 
devancé dans la carrière, ou qui y marchent 
avec lui, M. Tissier expose ses vues sur la cons- 
titution géognosique de notre sol. 

Il considère d'abord le bassin formé par la 
colline de la Croix-Rousse , les côteaux de S.t® 
Foy et les balmes viennoises , il y reconnaît le 
travail des eaux , il y voit le lit d'un ancien lac, 
d'où le Rhône s’est échappé au travers la plaine 
de Sept-Fonds; le terrain abandonné par les eaux 
est resté marécageux en plusieurs endroits , et 
partout on peut y découvrir des sources alimen- 
tées par le fleuve. « Si les fouilles, dit l’auteur , 
sont difhciles dans ces lieux trop arrosés , il est 
permis d'interroger ces galets et ces bancs hori- 
zontaux ,. formés uniformément par le dépôt 
successif des eaux dont le cours a suivi la pente 
du terrain depuis la Suisse jusqu'à la mer. Sur 


de Lyon. 113 
la nature de ces terrains rapportés, la palæon- 
tologie va nous éclairer. Ces galets sont calcaires, 
et ces petits cailloux roulés, agglutinés par la 
chaux carbonatée , incrustante, annonçent l’er- 
rosion produite par le Rhône dans son trajet 
au travers de pays calcaires, et les alluvions de 
ce fleuve. Le granit qui se trouve si près du jour, 
et qui se montre en plusieurs endroits de notre 
ville, nous défend de chercher plus avant , les 
diverses époques de formation du sol lyonnais. 
Là, les paleothorium , les anaploterium sont 
introuvables ; mais il n’en est pas ainsi dans les 
collines de la Croix-Rousse, de Vassieux et de 
la Pape, qui sont adossées aux granits et autres 
roches de Fontaine , du Vernay et de Serin. Là, 
nous pouvons étudier des formations successives, 
et non - seulement considérer , comme il serait 
utile de le faire, la nature de chaque banc, sa 
constitution , sa solidité, son épaisseur , le nom- 
bre et la variété des couches , les élémens de leur 
formation ; le passage prolongé des eaux , par 
le témoignage des coquilles fluviatiles ; l'intermit- 
tence de leurs cours, par l'abondance des coquilles 
terrestres ; l’existence reculée sur cette terre de 
ces colosses si bien décrits par Cuvier. C'est en 
effet dans cette station, sur la diagonale de St. 
Clair à Fontaine, qu’on a trouvé , en creusant 
un puits, des fossiles , restes précieux de Mas- 

8 


114 Société royale d'Agriculture 

todontes, et notamment des dents qui sont con- 
servées dans les cabinets de MM. Tabard et 
Thomas Dugas. » 

» Consultons-nous la composition oryctolo- 
gique de ces terrains de fabrique fluviatile ? J'y 
ai trouvé des calcédoines, des geodes quartzeuses, 
des échantillons de ces roches dont Genève est 
pavée, et qui renferment tant de diallage verte, 
On ne peut plus douter que le Rhône, dont les 
ondes suivent cette direction , n'ait été le créa- 
teur de ces collines et de leurs divers bancs. La 
même composition , du moins les mêmes appa- 
rences s'offrent aux côteaux de S.t° Foy. Les col- 
lines les plus méridionales n’ont été étudiées que 
jusques-là par un célèbre géologue dont les obser- 
vations ont été consignées dans le journal de phy- 
sique. Il semble avoir voulu nous laisser la 
gloire et le plaisir d'explorer un terrain vierge 
encore pour l'étude. » ; 

» J'étends de là mes observations sur les autres 
parties de notre sol ; je vois, comme je l'ai déjà 
dit , le granit montrant sa tête partout, je trouve 
dans la roche de Pierre-Scize, le gneis entrant 
pour moitié dans la composition de cette masse 
de première formation. Je cherche avec M. de 
Saussure , le schorl bleu dans le granit sur le- 
quel est assis le pont du change , je ne le trouve 
pas; mais je le soupçonne dans Ja roche , quel- 


de Lyon. 115 
quefois schisteuse'de Serin ; car c'est dans ce genre 
de roches qu'il git ordinairement. Je suis ce gra- 
nit jusqu'à l'île Barbe , et après diverses variétés 
de constitution , le rocher devient amphibolique, 
et presque partout il est recouvert par la pierre 
calcaire. » 

» On conçoit que l'exploration du sol de notre 
cité n'offre pas les cinq âges du sol de Paris, 
et que sa constitution n’a pas autant varié. » 

» Quittons un moment la ville, et parcourons 
la partie du département laissée à notre investi- 
gation. Remontons la Saône du midi au nord; 
entre elle et le Rhônese trouve cette élévation 
quenous ayons examinée , qui, du côté du fleuve, 
est une alluyion ; qui, du côté de la rivière, 
flanque ces alluvions d'une digue granitique va- 
riée, La Saône sépare ici une région calcaire d'une 
autre de nature diflérente. Sur la droite de son 
cours le granit se montre tantôt bas, tantôt haut; 
bas, il porte la roche’calcaire; haut , il l'adosse , 
la cotoye , mais lui est à peu près partout subor- 
donné : Là un plateau calcaire , d'environ sept 
lieues de tour , offre diverses variétés de chaux 
carbonatée, propre à bâtir. St. Cyr, St. Didier, 
St. Fortunat ont cinquante bancs de pierres grises 
plusou moins belles , presque toutes pouvant être 
taillées, et quelques-unes étant susceptibles du 
plus beau poli, enfin convenables pour toutes 


116 Société royale d'Agriculture 

les constructions et tous les ornemens de l’archi- 
tecture. Plusieurs bancs sont très -coquillers , et 
c'est en vain que sur d’autres on chercherait des 
mollusques fossiles ; elles paraissent être d’origine 
marine. Certains bancs n’en offrent que d’une 
espèce , d'autres en contiennent de plusieurs. » 

» Quel est le laborieux et patient observateur 
qui dévoilera le secret de cette formation , soit 
dans son ensemble, soit dans ses détails ? Com- 
ment une île calcaire se trouve-t-elle placée là 
isolément , sans ramifications sensibles avec le 
calcaire du Bugey ou du Jura, dont elle varie 
it ANNE EEE 

» Nous arrivons à Mont Cindre ; là, de grise 
ou blanche qu'était ce calcaire , il devient jaune, 
et il renferme du silex qui fait feu au briquet : 
quel rapport établira-t-on entre ce calcaire tt la 
craie qui renferme des bancs de silex pyroma- 
que ? Plus loin, à Colonges , St. Romain , Cou- 
zon , le coquiller est rare , et le calcaire est jaune, 
argileux , souvent délitable à l'air, offrant plu- 
sieurs variétés de chaux ‘carbonatée , surtout 
l’inverse et la métastatique, et des geodes où 
se trouvent quelquefois des cristaux de quartz 
hyalin. » 

» Dans la plaine qui, depuis les Echelles , se 
prolonge jusqu'à Anse , le terrain est argileux 
“et souvent semblable à celui de la Bresse. » 


de Lyon. 117 

» Cette île calcaire est surmontée par un banc 
de formation plus récente , difficile à reconnaître 
à cause des défrichemens qui ont été faits, et de 
la terre végétative qui le recouvre ; mais on le 
signale dans les anfractuosités abruptes, et dans 
les coupes verticales des collines. Cette couche, 
composée de parties hétérooènes, de fragmens 
quartzeux, renferme des fossiles ; j'en ai retiré 
des os incrustés, mais en trop petits fragmens 
et trop informes pour qu'il m'ait été souvent 
possible de les rapporter au squelette dont ils 
faisaient partie. » 

» Ce plateau calcaire, connu sous le nom de 
Mont d'Or, cesse à Chasselay et à Limonest, où 
l'on retrouve le granit, et partout, dans les 
champs, le sulfate de baryte, substance dont la 
présence annonce celle de quelque mine, sur- 
tout de plomb. C’est d'après des indices qui, jus- 
qu'ici, n’ont pas amené à de grands résultats, 
qu'une compagnie avait commencé des travaux, 
et qu’on avait fait plus de trente fouilles au- 
jourd'hui comblées , dont la principale était au- 
près du château Morand. On retrouve encore 
dans le bois voisin de la principale excavation 
du sulfate de baryte en abondance , de la chaux 
fluatée, du petro-silex , du sulfure de plomb , 
du plomb phosphaté vert, carbonaté blanc et 
noir, et du plomb oxidé ; de plus quelques légers 


t18 Société rôyale d'Agriculture 

fragmens de cuivre sulfuré avec du bleu et du 
vert de montagne , le tout semé au milieu de 
débris dé roches proprement dites. » 

» Cependant le calcaire reparaît à certaines 
distances du Mont d'Or. Ainsi, à Pomiers , près 
Villefranche, on retrouve la même nature de 
bancs qu'à St. Fortunat , et de plus le mêmé 
nombre, la même épaisseur, surtout la mêmé 
inclinaison à l’ést. Sur des points plus rappro- 
chés du Mont d'Or, cette inclinaison varie; elle 
est presque du double dans certaines exploitations 
de Dardilly, dont le sol est.en partie calcaire, 
et en partie d'un granit felds spathique friable, 
régnant jusqu'à Dommartin. Sur cette plage , à 
droite de la grande route de Paris qui passe par 
l'Arbresle, se trouvent des cristaux de Felds-path 
à dix pouces , bien réguliers , et qui se détachent 
de la roche en décomposition. Le calcaire dominé 
le granit en plusieurs endroits , et toujours sur 
la droite de la route qui semble faite pour sé- 
parer le pays purément calcaire , d'une contréé 
d'autre formation. Je ne crois pas en eflet qu'à 
gauche de cette routé on rencontre la chaux 
carbonatée ; mais à droite celle - ci se prolonge 
jusqu’à Chessy et au-delà , formant les plateaux 
de St. Germain sur l'Arbresle et d’autres lieux 
énvironnans. » 

» Sur l'ancienne route qui conduit à Chessy 


de Lyon. 19 
par Lauzane et Châtillon , on trouve en petite 
quantité, à la vérité, des émeraudes semblables à 
celles des environs de Limoges. Presque partout, 
les diverses roches contiennent les élémens d'un 
granit qu'on a cru être analogue à celui des co- 
lonnes d’Ainay, parce que , comme lui , il con- 
tient du molybdène sulfuré. » 

» Je ne me permettrai pas de décrire les riches 
filons de cuivre de cette contrée, M. Barre fils s'est 
acquitté de ce soin avec talent , je me ferai seu- 
lement cette question géologique : les mines de 
cuivre, soit carbonaté vért ou carbonaté bleu ; 
soit oxidulé , soit sulfuré , soit pyriteux , occu- 
pent un très-grand espace. Les lieux qu'arrosent 
l'Azergue et la Brevenne, près de leur jonction, 
sont un foyer abondant de minerai ; et le cuivre 
carbonaté se trouve précisément situé entre le 
cuivre sulfuré et le carbonate calcaire. Si les 
filons sont le résultat d’alluvions, quel échange 
chimique , quelle combinaison a pu changer le 
cuivre sulfuré en cuivre carbonaté? mais dans 
cetéchange mutuel l’autre union a été du sulfure 
ou du sulfate de chaux:J'ai en vain cherché 
celui-ci dans la contrée à l’état de cette com- 
binaison neptunienne ; aurait-il disparu sans 
laisser de traces? c’est ce qui pourrait être. » 

M. Tissier qui, depuis nombre d'années ex- 
plore la minéralogie départementale , a recueilli 


Sur le Carex 
plantaginæa ; 
par M. De 
Moidière. 


120 Société royale d'Agriculture 

sur cette partie intéressante de notre statistique 
beaucoup d'autres faits qu'il se propose de vous 
communiquer. 


M. Olhon de Moïdière vous a fait part d'un 
fait de physiologie végétale qui vous a paru fort 
remarquable ; c'est la colonisation dans une de 
ses terres du Carex plantaginæa , sans qu'on 
puisse savoir comment s’est introduite cette 
plante originaire de l'Amérique septentrionale. 

Ce fut dans l'automne de 1803, qu'herbori- 
sant avec M. Madio!, dans sa terre de Moïdière, 
située dans le département de l'Isère , à cinq lieues 
Est de Lyon , il rencontra une plante dont le 
facies lui parut très-extraordinaire. M. Madiot 
l’examine de près, et il reconnaît le Carezx plan- 
taginæa ; bientôt on en découvre un grand nom 
bre d'individus dans un petit vallon marécageux 
dont le sol est argilo-calcaire , et que termine 
au nord un côteau boisé. Plusieurs pieds sont 
arrachés pour être transportés à la pépinière de 
la Déserte où ils périrent. Le respectable Gilibert 
qui en avait reçu quelques échantillons, inscri- 
vit la plante dans la flore lyonnaise, qui fut 
publiée en 1806. 

Cependant M. De Moidière voulant rétablir à 
la pépinière du département le Carezx plantaginæa, 
le chercha dans les stations qu’il s’était choisie.s 


de Lyon. 121 
ses recherches furent vaines pendant cinq ans 
consécutifs ; à la sixième année, il le retrouve 
très-abondamment, mais en un autre endroit. 
M. De Jussieu passant à Lyon, vit ce Carex, 
et il en reconnut parfaitement les caractères. 

Plusieurs autres années s’écoulèrent sans que 
M. De Moidière eût revu le Carex acclimaté ; 
peut-être que découragé par d'inutiles explora- 
tions ,1l avait mis trop de lacune dans ses re- 
cherches. ru 

En 1821, MM. Balbis, Grognier et Madiot 
ayant dirigé vers la terre de Moidière une ex- 
cursion botanique , cherchèrent cette planteavec 
la plus scrupuleuse attention , ils n’en décou- 
vrirent aucune trace. 

Dans l'automne de l’année dernière, M. Wadiot, 
herborisant seul , la trouva , mais à six cents pas 
à l'Est de son ancienne station, il en arracha 
plusieurs pieds pour les placer à la pépinière de 
l’'Observance, où ils ont très-bien réussi. Ils y ont . 
été observés par plusieurs membres de la Société, 
notamment par MM. Tissier, Pelletier et Grognier, 
qui avaient été chargés par la Société de constater 
les caractères botaniques du Carex américain. 


Espériences 
de teinture 
avec le Bleu 
Raymond,sou- 
mises à la So- 
ciété, par MM, 
Raymond fils 
et Souchon : 
rapporteur M. 
Tissier, 


122 Société royale d'Agriculture 


ARTS UTILES. 


Le Gouvernement ayant demandé à la chimie 
une substance capable d’être substituée à l'indigo, 
nous dûmes à cet appel la découverte du Bleu 
Raymond. Mais ce produit tinctorial ne put s'ap- 
pliquer qu'à la soie ; ainsi le problème proposé 
ne fut pas complètement résolu. Le digne fils du 
chimiste habile qui avait trouvé ce bleu et qui 
lui avait donné son nom, a cherché le secret de 
teindre la laine par le même moyen. I croit y 
être parvenu , et jaloux de votre suffrage, il 
vous a soumis les résultats de ses expériences. 
Vous avez reçu de lui divers échantillons de 
laine teints en bleu Raymond, que vous avez 
renvoyés à l'examen d’une commission , dont M. 
Tissier a été l'organe. (1) 

Avant que le rapport de cette commission vous 
fût présenté, M. Souchon, pharmacien chimiste, 
étabfi au Brotteaux , vous a adressé de son côté 
d'autres échantillons de drap de laine également 
teints en bleu Raymond, par des procédés qui 
lui appartiennent, et il vous a fait connaître qu'il 
fabriquait en grand l'élément de cette teinture ; 


(1 ) Les autres membres de la Commission étaient MM. 


Pelletier , Deschamp sfils. Gensoul , Multhuon , Jacquard 


et Guillemet, 


de Lyon. 123 
t'est-à-dire,l'hydrocyanate ferrugineux de potasse. 
Vous: avez voulu que la même commission à 
laquelle s’est joint le secrétaire , examinât com- 
parativement les échantillons présentés, soit par 
M. Raymond fils, soit par M. Souchon. 

Deux rapports ont été faits; ils ont été lus 
dans la même séance, et vous avez adopté les 
conclusions de l’un et de Pautre. 

Dans le premier, M. le rapporteur s'est ex- 
primé ainsi : 

» Læs échantillons de draps déposés tant par 
M. Raymond que par M. Souchon, nous ont 
paru d’une teinte nourrie et nuancée en divers 
tons, de manière à nous prouver que ces ar- 
tistes manient cette substance colorante (l'hydro- 
cyanate ferrugineux de potasse ) avec toute la 
dextérité possible , et qu’ils peuvent obtenir avec 
elle tous les tons et toutes les nuances. » 

» Seulement les étoffes présentées avaient gé- 
néralement plus de rudesse que les tissus teints 
à l'indigo, et offraient le maniement de certains 
draps teints en noir. » | 

» La couleur des uns et des autres s'exaltait 
par le vinaigre et les acides minéraux , tels que 
le sulfurique et Phydrochlorique , suffisamment 
étendus. » 

» Jusqu'ici il n'y a rien d'étonnant aux yeux 
du chimiste, ce sont des propriétés inhérentes 
à la matière colorante. » 


124 Société royale d'Agriculture 

» Mais, s'est demandée la commission , y a-t-il 
bien teinture dans cet emploi du bleu de Prusse, 
ou seulement application et comme une espèce 
de peinture ? » 

» Les draps noirs et les draps bleus teints par 
l'indigo ne déteignent pas par le frottement, et 
quoique nous ne doutions pas qu'il n'y ait, jus- 
qu'à un certain point , pénétration de la subs- 
tance colorante dans les tissus colorés au bleu 
de Prusse, le frottement des échantillons de l'un 
et de l'autre concurrens a fait décharger sur de 
la toile une partie de la couleur; mais pas assez 
pour modifier sensiblement la nuance du tissu 
frotté. » 

» C'était pourtant là le point de perfection 
auquel aucun de nos deux artistes n’est parvenu 
complètement. » (1) 

» La commission ne doutant pas de la solidité 
de cette teinture à l’eau froide, à l'eau chaude, 
à l'air et au soleil, a voulu néanmoins s'éclairer 
encore sur l’action de quelques autres débouillis, 
et quoiqu'il soit vrai de dire que nos habits ne 
sont pas faits pour être soumis à toutes ces épreu- 
ves , il est certain qu'elles nous ont servi pour 
apprécier la richesse et la puissance du fond de 
teinture des échantillons. » 


(1) M. Raymond y est parvenu ensuite ; voyez ci-après. 


de Lyon. 125 

» Ainsi le drap porté sur la carte X ( déposé 
par M. Raymond } a présenté dans une solution 
de savon chauflé jusqu’à 60 degrés, une décolo- 
ration presqu’entière. » 

» Une partie du même échantillon , bien lavée 
et bien dégagée de savon, a été plongée dans une 
eau aiguisée d’acide hydrochlorique ; et une lé- 
gère teinte verdätre et partielle a reparu , comme 
dans le genre des draps appelés relangés.» 

» L'échantillon a été uni à la pièce après des- 
sication parfaite. » 

» Un nouvel échantillon de la même pièce, 
traité par l'eau de chaux à un degré de chaleur 
égal , a été pareillement décoloré. » 

» Traité ensuite par l'acide hydrochlorique , il 
a présenté une couleur bleu de ciel. Cet échan- 
tillon a été aussi annexé à la pièce. » 

» L’échantillon marqué X, traité de la même 
manière, a offert les mêmes résultats par l’eau 
de savon ; et soumis aux mêmes acides que les 
précédens échantillons , il s'est comporté d’une 
manière très-analogue. » 

» Un petit coupon passé à l’eau de chaux, a 
perdu beaucoup de sa couleur, et il s’est rap- 
proché d'un ton vert d'autant plus intense que 
l'échantillon avait une couleur plus riche.» 

» Les coupons de M. Souchon ont donné lieu 
aux observations suivantes: 1° l'échantillon mar- 


126 Société royale d'Agriculture 

qué À; traité d'après les procédés ci-dessus, c’est- 
à-dire, au savon chaud , a conservé une intensité 
_ de couleur plus forte, en tirant au vert.» 

» Soumis à l’action de l'eau de chaux , sa cou- 
leur a mieux résisté que celle de l'échantillon 
de M. Raymond , et la destruction n'en a pas été 
aussi complète. » 

» Le coupon marqué B, attaqué par les mêmes 
agens, a mieux résisté au savon que l’échantil- 
lon X de M. Raymond, » 

» Les mêmes échantillons trempés dans l'acide 
hydrochlorique, ont repris un ton vert d'une 
nuance plus foncée que ceux de M. Raymond. » 

» Ainsi, on ne peut se dissimuler que les 
échantillons de M. Souchon qui, au premier 
coup d'œil n'offrent guère une nuance plus foncée 
que ceux de M. Raymond, n'ayent cependant an 
fonds plus nourri et plus énergique pour résister 
aux débouillis et autres agens destructeurs. » 

» Nous ajouterons également qu'à la coupe ou 
sur la tranche, les échantillons de M. Raymond 
fils ont paru avoir été moins pénétrés dans le 
tissu que ceux de ML. Souchon. » 

» Mais M. Rcymond fils a porté les essais plus 
loin ; du moins M. Souchon ne nous a rien fait 
savoir sur le fait suivant : nous voulons parler 
de la résistance du bleu Raymond au foulage, 
et du feutrage de la laine ainsi teinte en fil ou 
en tissu. » 


de Lyon. 127 

» MM. Seguin d'Annonay témoignent avoir 
réussi à filer de la laine teinte , à la tisser et à la 
feutrer après l'avoir mise au foulon. Ce serait 
l’ultimatum de la découverte ; et ce succès est 
annoncé dans une lettre de ces manufacturiers, 
datée du 13 décembre 1820, lettre dans laquelle 
étaient des échantillons de laine en cardage ; 
d’autres, de laine filée , un morceau de drap 
n'ayant pas subi le foulage, un morceau de drap 
foulé. » 

» Certes, si on s'en rapporte au témoignage 
bien flatteur de M. Seguin , la réussite paraît 
complète ; mais à la simple inspection la com- 
mission n'a pu en juger ainsi. » 

» [ est facile de voir que le drap foulé à 
l'urine pendant quarante-huit heures , a peu per- 
du de son intensité ; mais l'échantillon à échappé, 
on ne sait comment, à l'effet du foulon, et le 
feutrage n’a pas eu lieu. Voilà du moins ce que 
la commission n'a pu admettre sur l'inspection 
de l'infiniment petit coupon adressé à la société. 
Bien plus , en se rendant compte des opérations 
de teinture analogues à celles-ci, nous voulons 
parler de la teinture en noir , dont le fonds est 
également le persulfate de fer , traité par le prin- 
cipe astringent , au lieu de l'être par l'hydrocya- 
nate de potasse ; on sait que ces draps teints en 
laine ne supportent pas cette opération; aussi 


128 Société royale d’ Agriculture 

sont-ils toujours teints en pièce. Il en est de 
même des feutres de. laine et de poils. Il était 
facile de prévoir la difficulté de l'opération du 
foulage et le défaut du succès. » | 

» Ainsi, en rendant justice au zèle et aux opé- 
rations de M, Raymond fils, la commission pense 
que la société ne saurait reconnaître un succès 
complet dans les expériences de teintureen laine 
au bleu Raymond. » 

» Mais il n'est pas nécessaire que cette teinture 
ait un succès complet ; il suffit qu’elle amène 
une diminution dans la consommation de l'in- 
digo, en lui substituant un produit qu’on pourra 
fabriquer avec assez d'économie pour lutter 
contre l'étranger qui nous le fournit ; il suffit de 
cette amélioration industrielle pour donner à 
leurs auteurs des droits aux suffrages de la so- 
ciété et à la reconnaissance du public. 

» Il s'élève ici une question, celle de l’anté- 
riorité. On ne peut disconvenir qu'elle n’appar- 
tienne à M. Raymond fils , qui a déposé des échan- 
tillons bien avant M. Souchon , lequel n’a adressé 
les siens à la société qu’à la date du 15 août 1822, 
tandis que la lettre de M. Seguin (qui spécifie 
les expériences de M. Raymond fils) remonte à 
l'année 1820.» 

» Le succès en tout le reste est égal et mérite 
la même approbation. » 


de Lyon. 129 

» La commission ouvre donc l'avis que la 
société écrive une lettte aussi flatteuse que pos- 
sible aux auteurs de la découverte qui fait le 
sujet du rapport, en leur témoignant qu'elle est 
satisfaite du succès de ce procédé pour la teinture 
des draps en pièce ; que cette amélioration peut 
être aussi utile qu'honorable à l’industrie lyon- 
nalse. » 

» La commission pense en même temps que Ja 
société doit donner acte à M. Raymond fils, de 
l'antériorité du dépôt des échantillons. » 

Le rapport précédent n'avait pas encore été 
soumis à l'approbation de la société , lorsque M. 
Raymond fils lui envoya de nouveaux échantil- 
lons , avec prière de juger sa découverte d'après 
leur examen plutôt que d’après celui des premiers. 
La société considérant qu'elle n'avait pas à pro- 
noncer sur un concours ouvert dans son sein, 
et dont les limites auraient été fixées pär un 
programme ; considérant d’ailleurs que dans tous 
les temps elle doit accueillir les communications 
qui lui sont faites dans l'intérêt des connaissances 
utiles qui sont l’objet de ses travaux ; considérant 
enfin que M. Raymond fils expose dans sa lettre 
d'envoi que ses seconds échantillons sont mieux 
teints que les premiers , ce qui annoncerait un 
perfectionnement , la société a cru devoir con- 


descendre à la demande de ce chimiste; elle a 
9 


130 Société royale d'Agriculture 

arrêté en même temps qu'il serait écrit àM. Sou- 
chon, pour l'inviter à envoyer de son côté d’autres 
échantillons , pour être examinés comparative- 
ment avec ceux qui venaient de lui être adressés , 
et la même commission a été chargée de ce 
nouvel examen. 

M. Souchon a eu connaissance de la détermi- 
nation de la société ; il n'a point envoyé d’autres 
échantillons de draps teints en bleu. On n’a pu 
examiner que ceux de M. Raymond fils : voici 
textuellement le résultat de cet examen , tel qu'il 
a été présenté par M. le rapporteur de la com- 
mission : 

» 1.9 Le drap teint ( présenté en dernier lieu 
par M. Raymond} est sorti victorieux du frot- 
tement sur le linge, et n’a en aucune manière 
déchargé la moindre parcelle de couleur, même 
à un léger mouillage. » 

» 2.0 Un échantillon marqué A, coupé à la 
pièce, et qu’il est facile, ainsi que les suivans, d'y 
rapporter , à raison de la forme de la coupure, 
a été plongé dans une solution de savon chauffée 
à 45 degrés, et il n’a pas sensiblement perdu de 
sa couleur. » 

» 3.° Un second morceau , marqué de la lettre 
B , plongé dans l'eau de chaux à froid , et lavé 
ensuite à l'eau pure, a pris une légère teinte 
violâtre. » 


de Lyon. 13: 

» 49 Un troisième échantillon, marqué C, 
soumis à l’action d'une solution froide de sous 
carbonate de potasse , et lavé ensuite à l’eau pure, 
a résisté complètement à ce débouilli. » 

» 5.0 Un quatrième , marqué D, plongé dans 
la potasse caustique, a été déteint entièrement ; 
il n’est resté qu’une couleur de rouille. (1) 

» 6.° Un cinquième échantillon marqué E , a 
résisté à l’action de l’ammoniaque liquide, et est 
sorti de cette épreuve seulement un peu plus 
violet. » 

« 7.2 Un sixième, marqué F, plongé dans une 
eau fortement aiguisée d'acide acétique, a d'abord 
été exalté en couleur ; elle a ensuite verdi. » 

» 8.° Un septième et dernier échantillon, 
marqué G , traité à l'acide hydrochlorique af- 
foibli, a subi la même altération, et il est de- 
venu sensiblement vert. » 

» De ces expériences, la seule considération 
à en tirer , est que la teinture de la laine en bleu 
Raymond a acquis dans cet échantillon le degré 
de perfection qui lui manquait pour former une 
teinture parfaite, et non une coloration super- 
ficielle, image de la peinture. » 

La commission ouvre donc l’avis d'écrire à M. 


(1) Cette épreuve prouvait chimiquement que le princip > 
tinctorial était de l’hydrocyanate ferrugineux de potasse, 


De la filature 
des soies à la 
vapeur ; par M. 
Gensoul. 


132 Société royale d'Agriculture 

Raymond fils , pour lui faire connaître la satis- 
faction véritable que la Société a éprouvée , en 
voyant que, marchant si dignement sur les traces 
de M. sun père , il devienti, comme lui, l’un des 
bienfaiteurs de l’industrie, en perfectionnant la 
teinture par des procédés dans lesquels on n'em- 
ploie que des matières indigènes. 

Ces conclusions furent adoptées par la société. 

M. Souchon fut invité de nouveau à produire 
d'autres échantillons de draps teints en bleu 
Raymond , qui pussent soutenir l'épreuve du 
frottement ; mais ce chimiste avait donné à ses 
travaux une autre direction , il fabriquait en 
grand l'hydrocyanate ferrugineux de potasse ; il 
a envoyé un échantillon de ce produit. 

La Société, considérant qu'il est dans l'esprit de 
son institution de récompenser les services ren- 
dus à l'industrie , tout aussi bien que les décou- 
vertes qui tournent au profit de l’agriculture, 
a décerné à M. Souchon une médaille à l'effigie 


de Rozier. (1) 


C'est tout à la fois de l'agriculture et de l'in- 
dustrie qu'a bien mérité M. Gensoul , notre con 
frère, par son procédé de filature à la vapeur. 

En effet, Messieurs, perfectionner l'art de 


(1) Voyez ci-après au chapitre des Récompenses. 


de Lyon. 133 
filer la soie , augmenter la valeur de cette 
matière première de nos plus importantes manu- 
factures , n'est-ce pas en activer la production ? 
n'est-ce pas étendre la culture du mûrier et 
multiplier les magnoneries ? 

Dès l'année 1803, M. Gensoul fit connaître 
dans le midi de la France sa belle méthode. Elle 
se propagea sous les auspices de l'académie du 
Gard. Bientôt traversant les Alpes, elle obtint 
un succès non moins éclatant dans le Piémont 
qui , à cette époque, faisait partie de la France. 
Comme toutes les nouveautés, elle a eu des dé- 
tracteurs ; mais s’il en existe encore, M. Gensoul 
peut leur répondre par vingt ans d'expériences 
et de succès. 

L'appareil de cet ingénieux mécanicien est trop 
connu pour qu’il soit nécessaire d'en donner ici 

la description. Ses avantages ont été signalés par 
des autorités trop imposantes pour qu’il ne soit 
pas inutile de les rappeler ici; cependant quel- 
ques considérations nouvelles sur ce sujet vous. 
ayant été exposées dans un mémoire manuscrit 
que l'auteur a déposé dans vos archives, vous 
auriez de justes reproches à me faire si je les 
passais sous silence. 

La plus importante de ces considérations, c'est 
l'économie du combustible amenée par le nouveau 
procédé ; économie qui, sous le rapport de la. 
statistique générale , offre un immense résultat. 


134 Société royale d'Agriculture 

En eflet, Messieurs, de nombreuses expé- 
riences ont prouvé qu'il fallait consumer deux 
quintaux de bois pour obtenir une livre de soie ; 
aussi , ( d'après les calculs de M. Peuchet } brû- 
lait-on en 1788, deux millions six cent mille 
quintaux de bois pour la filature de la France, 
(qui, à cette époque, ne travaillait que sur en- 
viron un million trois cent mille livres de soie. } 
Mais comme au moment actuel on peut, sans 
exagération porter à deux millions de livres la 
quantité de soie qui se file en France, il en ré- 
sulte que si on avait conservé les anciens pro- 
cédés , on consumerait annuellement dans les 
filatures de ce genre quatre millions de quintaux 
de bois. 

Le prix des combustibles allant toujours 
croissant , plusieurs manufacturiers dirigèrent 
leurs recherches vers le moyen d'en diminuer la 
consommation ; ils établirent des fourneaux qui 
la réduisirent un peu. En adoptant l'emploi de 
la houille, quelques fileurs firent un grand pas 
vers l'économie; mais elle avait le grave incon- 
vénient de salir et ternir la soie. Plusieurs sa- 
vans essayèrent aussi, à plusieurs reprises, de 
faire filer à l'eau froide. Mais au moulin à soie 
on put reconnaître les vices de cette méthode. 
Les matières employées pour dissoudre là gomme 
et remplacer ainsi la chalear , portaient leur ac- 


de Lyon. 135 
tion sur les brins et les rendaient rudes, cas- 
sans et bouchonneux. 

En 1804, notre honorable confrère conçut 
l'idée de chauffer plusieurs bassines par un seul 
feu, au moyen de la vapeur , il réduisit ainsi 
d'un quart la quantité de combustibles que l'on 
brûlait même dans les fourneaux d#{s économi- 
ques. Aussi ce procédé faut-il bientôt adopté dans 
les principales filatures , et on put dès lors em- 
ployer la houille , sans craindre qu’elle ternît ou 
salît la soie, parce que le feu se trouva très- 
éloigné du lieu du filage. Si comme on peut 
raisonnablement l'espérer , cette méthode se gé- 
néralise , il en résultera une économie annuelle 
de quatre millions de quintaux de bois. 

Certes, Messieurs, s'il est vrai, comme 
l'a dit un publiciste , qu'économiser soit produire ; 
la méthode de M. Gensoul équivaut à un beau 
système d'aménagement des forêts. 

Considérée sous le rapport manufacturier, 
cette méthode a bien d'autres avantages. En eflet, 
les fileurs Français et Piémontais avaient inuti- 
lement essayé d'améliorer la qualité des soies. 
M. Gensoul est parvenu à leur donner plus de 
force, plus de finesse , et un éclat qu’elles con- 
servent même après la teinture. Ces avantages 
sont dûs à l'éloignement du fourneau , à la fa- 
culté de graduer la température selon la qualité 


136 Societé royale d'Agriculture 

des cocons , à la présence de l'eau distillée que 
le condensateur laisse tomber dans les bassines. 
Or, les cocons baignent toujours sans que cette 
eau ait besoin d'être recrue par de l'eau froide, 
qui, au moment où on la verse, durcit la 
gomme déjà dissoute des cocons. Cette transition 
brusque de température fait que le brin ne se 
dévide et ne se détache qu'avec déchirement , 
qu'il se casse plus souvent, que la soie se couvre 
de petites bourres appelées bouchons. 

On a dit que le procédé de M. Gensoul ne 
s’appliquait pas à la filature des soies blanches ; 
mais comme cette assertion n'est appuyée sur 
aucun motif, il est inutile de s’y arrêter : d’ail- 
leurs , n’avez-vous pas eu sous les yeux des soies 
blanches filées par le procédé de M. Gensoul ? 
n'avez-vous pas reconnu la finesse, la régularité 
de leurs‘brins , et surtout l’éclat de leur blanc ? 
ne vous ont-elles point paru supérieures à toutes 
celles de même genre qui vous avaient été pré- 
sentées jusqu’à ce jour ? 

Ce n'est pas tout, M. Gensoul a encore rendu 
service aux fileurs en perfectionnant les procédés 
au moyen desquels on étoufle les chrysalides par 
la vapeur. Avant lui ces procédés étaient si dé- 
fectueux qu’on y avait généralement renoncé. 
On se servait d'un fourneau qui donnait lieu à 
une dépense considérable de combustibles ; à 


de Lyon. 137 
peine pouvait-on étouffer 25 livres de cocons à la 
fois. La vapeur se condensant au-dessous de la 
chaudière , il en résultait que des gouttes 
d’eau chaude, tombant sur les ,cocons , ta- 
chaïient et altéraient leurs tissus , au point d’oc- 
casioner beaucoup de déchet au filage. 

Pour obvier à ces inconvéniens M. Gensoul a 
fait construire une armoire dans laquelle il à 


disposé plusieurs rayons sur lesquels on peut 


placer 150 à 200 livres de cocons. Il emprunte 
pour quelques instans de la vapeur à sa grande 
chaudière, et au moyen d’un toit incliné qui fait 
couler l'eau condensée derrière les rayons, il 
l'empêche de tomber sur les cocons. 

A côté de son appareil, M. Gensoul applique 
encore, lorsque le local le permet, une pompe 
qu’il a nommée Balancier hydraulique. Cette ma- 
chine agit par la force de la vapeur de la grande 
chaudière , sans nuire au travail de la filature. 

L'auteur étant persuadé que le balancier hy- 
draulique peut être employé utilement à d’autres 
usages , et servir à l’agriculture, il se propose 
d’en faire le sujet d'un autre mémoire, etil a 
bien voulu prendre l'engagement de vous le com- 
muniquer. | 


M. Faissolle qui, à l'instar de M. Gensoul, à, 


Sur la mou- 
ture des céréa- 
et la per- 


dirige ses recherches vers la mécanique , appli- cussiondesflui- 


quée à l’agriculture et aux arts qui en découlent, 


des ; par M. 
Faissolle. 


138 Société royale d'Agriculture 
vous a Ju un savant mémoire sur les moulins à 
eau, sur ceux à vent; et c’est sur les lois de la 
percussion qu'il a fondé sa théorie. 

Tout en rendant justice aux moutures de 
MM. Seriziat, Tissot, Vachon, etc. dont les 
moulins sont situés sur le Rhône ou sur la 
Saône, l’auteur désirerait que pour mouvoir 
les moulins on se servit plutôt de l'air que de 
l'eau ; il signale les inconvéniens de ces usines 
quand elles sont placées tant sur les rivières que 
sur les ruisseaux. Les premières nuisent à la na- 
vigation des fleuves, les secondes gênent la circu- 
lation des eaux fertilisantes , et trop souvent 
donnent lieu à des inondations désastreuses. 

M. Faissolle n’est pas le premier qui ait vu 
dans les moulins à eau, dans leurs digues, 
leurs réservoirs , leurs rétenues , un grand obs- 
tacle aux bons systèmes d'irrigation. 

D'un autre côté, la sécheresse et la gelée pa- 
ralysant les usines de ce genre , peuvent amener 
la disette du pain au milieu de l'abondance du 
blé. Les grandes rivières elles-mêmes restent à 
certaines époques gelées pendant plusieurs mois; 
c’est ce qu'on vit dans le rigoureux hiver de 89. 
Alors un habile mécanicien, M. Smith se hâta 
de construire sur les bords de la Seine des mou- 
lins à farine mus par des pompes à feu. Des 
usines semblables furent établies plusieurs an- 


de Lyon. 139 
nées après par M. Perrier , dans l'île des cygnes. 
ILest fâcheux qu’elles exigent une énorme quan- 
tité de combustibles. 

Combien sont plus économiques les moulins 
à vent. 

C’est pour faire connaître le mécanisme de 
leur jeu que M. Faissolle s'est livré à un certain 
nombre de considérations et de calculs. Il a cher- 
ché à déterminer la quantité de mouvement que 
l'action de l’air ou d’un courant d'eau peut pro- 
curer à un mobile qui présente , soit à l’an soit 
à l’autre de ces mobiles, une surface donnée. : 

Faisant ensuite abstraction des principes d'a- 
près lesquels doivent être construits les moulins 
à vent, il s’est rendu compte de la manière 
dont les ailes d'un moulin à vent devraient être 
placées et disposées pour qu'elles pussent recevoir 
et conserver un mouvement de rotation. Il a été 
conduit au théorème qui suit : Le choc direct 
et perpendiculaire d'un fluide étant à son choc 
oblique sur une même surface comme le carré 
du rayon est au carré du sinus de l'angle dissi- 
dent, il en résulte que les ailes des moulins à 
vent qui sont frappées obliquement par l'air, 
doivent, pour produire un effet déterminé , être 
plus grandes que si la percussion de l'air leur 
était perpendiculaire. 

D'un autre côté , comme on est obligé de faire 


140 Société royale d’ Agriculture 

porter sur un pivot les cages des moulins à vent, 
pour que leurs ailes soient toujours placées dans 
la direction du vent , il devient assez difficile de 
donner aux cages de ces moulins une étendue 
suffisante pour pouvoir y placer toutes lesmé- 
caniques qui se trouvent dans les moulins à 
eau ; d’où il suit qu'il serait à propos qu'un meu- 
nier eût à sa disposition plusieurs moulins con- 
tigüs ; l’un d'eux serait destiné à faire mouvoir 
les meules, tandis qu’un autre mettrait en mou- 
vement les blutoirs, ce qui rendrait l'opération 
dela mouture , sinon meilleure, du moins plus 
prompte : les gruaux pouvant être placés faci- 
lement et sans retard sous les meules. 

Préférant toujours les moulins à vent à ceux 
dont Peau est le principal moteur , notre confère 
voudrait qu’on multipliât les premiers, et qu'on 
n'établit les seconds que sur des rivières et des 
ruisseaux non navigables. Il désirerait pareille- 
ment qu’en construisant-ceux-ci, on disposät les 
vannes et les déversoirs de manière à donner 
un libre écoulement aux eaux lors dés grandes 
inondations, et à les diriger de manière à ne 
pas dévaster les propriétés du voisinage. 

Les événemens de ce genre ne sont pas rares, 
tel est celui dont M. Fuissolle a été témoin , et 
dont il vous a parlé en ces termes : 

» En 1791 , on achevait la construction d'une 


de Lyon. 141 
üsine à eau située à quelques lieues de Tours, je 
fis à l'architecte quelques observations sur la 
construction de son déversoir qui était formé 
dans la partie inférieure d’un mur d'environ 
trois pieds d'épaisseur, dont la partie supérieure 
présentait un plan horizontal du côté du réser- 
voir, et de l’autre côté un plan incliné. Ce dé- 
versoir était en face d’une prairie ; on ne fit au- 
cun cas de mes observations. Cinq à six ans en- 
suite j'eus lieu de me convaincre que l'expérience 
confirme les données d'une bonne théorie. En 
effet, quoique le mur fût fort épais, et ses fon- 
dations profondes , l'eau filtrait sous ses fonda- 
tions , et dans les temps de sécheresse la prairie 
était sillonnée par une longue et profonde ex- 
cavation dans le fond de laquelle on apercevait 
un gravier stérile. Tout près du réservoir était 
un trou où croupissait une eau stagnante, pro- 
venant de la filtration. La cause de ce dégat était 
simple , les digues ou les levées retenaient l’eau 
à environ six pieds au-dessus du niveau de la 
prairie , l’eau qui passait par le déversoir for- 
mait une cascade dont la chute était à peu près 
de 20 pieds , en raison du fossé pratiqué au bas 
du déversoir. On conçoit avec quelle force, 
quelle impétuosité devait se précipiter sur les 
terrains inférieurs l'eau qui, dans les déborde- 
demens de la rivière, passait sur le déversoir, 


Notes sur di- 
verses machi- 
nes propres à 
battre les blés; 


par MM. Chan- 
cey et Billon. 


142 Société royale d'Agriculture 

dont la largeur était d'environ 12 pieds : On sent 
tous les dommages que l’irruption de ce torrent 
devait causer à la prairie. » 


C'est avec raison que vous attachez une grande 
importance aux perfectionnemens de ces machi- 
nes agronomiques qui économisent le temps et 
les bras, aussi avez-vous reçu avec beaucoup 
d'intérêt les communications que vous ont faites 
MM. Chancey et Billon sur des machines propres 
à battre le blé. 

Le premier vous a donné connaissance d’un 
instrument de ce genre établi à Mayenne , dépar- 
tement de la Loire, dans une terre de M. Mu- 
rald de St. Romain. 

Cet instrument , d'origine anglaise, porte le 
nom d’Owen, son inventeur , il bat 8 doubles 
décalitres par heure , et il exige trois ou quatre 
personnes et un cheval. Cette force paraît insuf- 
fisante ; lanimal , en effet, ne peut y travailler 
plus de deux ou trois heures sans être tout en 
nage. Le prix de la machine, toute dépense 
comprise , a été d'environ 2000 f. 

Près de la terre de M. De St. Romain, est celle 
de M. De Belzevrie, qui, à titre de récompense 
de ses travaux agricoles, a reçu du Roi une ma- 
chine à battre le blé, qui fait trois fois plus 


d'ouvrage que la précédente , mais qui exige deux 


chevaux, elle coûte aussi beaucoup plus; car 


de Lyon. 143 
toutes dépenses comprises, elle ne revient pas à 
moins de 2800 f. 

Il y a déjà plusieurs années que M. Billon 
notre confrère a fait venir d'Angleterre une ma- 
chine également propre à battre le blé ; elle bat 
<t vanne simultanément 34 décalitres dans une 
heure ; et à cet égard M. Billon fait observer 
que les machines dont il a été question battent 
le blé mais ne le vannent pas. Mais aussi si la 
sienne offre ce double avantage, elle ne peut 
agir qu'à l’aide de quatre chevaux ou de quatre 
bœufs et de quatre personnes ; savoir trois fem- 
mes et un conducteur. Cette machine, tous 
frais compris, a coûté 2400 f. M. Billon en a 
fait construire à moindres frais une autre à 
Lyon, il l'a envoyée dans son domaine de Bresse, 
et elle lui a paru plus parfaite. 

Une commission a été nommée dans votre 
sein pour prendre connaissance des machines 
agronomiques de M. Billon. 


En attendant que cette commission vous fasse 
son rapport, M. Billon vous a parlé d'une ma- 
chine à braquer le chanvre qu'il a établie dans 
son domaine de Grigny. 

L'idée de cet instrument lui avait été suggérée 
quelque temps avant la révolution , dans une 
société des arts’utiles dont il était membre. C'est 


Sur une ma- 
chine àbraquer 
le chanvre ; par 


M. Billon. 


144 Société royale d'Agriculture 

là que M. Philibert Jambon exposa un braquoir 
composé de deux cylindres de bois dur, canelés, 
avec lesquels il prépara fort bien en peu de temps 
une certaine quantité de chanvre. 

La révolution ayant dispersé cette société, 
M. Billon oublia là machine de M. Philibert 
Jambon. Long-temps après il en parla à son ne- 
veu, M. Bouchard Jambon , aujourd'hui notre 
confrère. Celui-ci lui dit que les cylindres de 
bois se déjetaient , qu'ils s’usaient , qu'enfin 
l'instrument n'atteignait pas son but. M. Billon 
comprit dès lors la nécessité de fabriquer ce cy- 
lindre en fer de fonte, matière qui est devenue 
économique par le perfectionnement des fon- 
deries. 

Dans le même temps, M. Christian imagina 
un braquoir trop compliqué , surtout trop cher. 
Voulant s'assurer si ces deux inconvéniens étaient 
balancés par de grands avantages, notre confrère 
s’en est servi pendant deux jours, et il a recon- 
nu la difficulté de le maintenir convenablement 
tendu , de prévenir ses dérangemens et de les 
rétablir. Îl conçut alors le projet d’un battoir qui 
n’eût que trois cylindres canelés, placés hori- 
zontalement , le second en dessous du premier, 
le troisième supérieurement au second ; il se 
flattait, à la faveur de cette disposition, faire 
revenir en avant le faisceau de chanvre tournant 


de Lyon. 145 
autour du cylindre du centre. Mais il a eu beau 
employer pour cet eflet plusieurs conducteurs , 
iln'a pu réussir, 

Se bornant alors à deux cylindres , il a placé 
deux bascules, l'une vis-à-vis de l'autre, et il a 
obtenu une pression plus ou moins forte suivant 
le besoin. 

Disposée de cette manière , la machine a par- 
faitement rempli son ohjet , et trois personnes 
ont pu facilement braquer quatre livres de 
chanvre par heure. Deux de ces personnes pla- 
çaient ou recevaient Je chanvre, la troisième 
tournait la manivelle; et comme celle-ci se fa- 
tiguait plus que les autres , elles la relevaient 
tour à tour. 

Le chanvre ou le lin soumis à ce braquoir , 
devait être très-sec ; et lorsqu'on a voulu agir 
sur Je bois, les canelures du cylindre ont dû 
être aussi fines que dans la machine de M, 
Christian. (1): 

Au reste, l'appareil de M. Billon présente 
trois bancs de bois solides et séparés. Sur le 


(2) M. Eynard, notre savant confrère , à qui les arts 
doivent tant de perfectionnemens, a-reconnu qu’en passant 
le chanvre ou | le Ha, sous deux cylindres rapprochés par une 
forte pression, la cheneyotte se détachait ,de la filasse de 
manière à l’isoler complètement et avec promptitude , et 
que de plus cetle filasse était assouplie. 

10 


Sur une 
échelle.brouet- 
te présentée à 
la Société , par 
M. Bonnafous, 
et décrite par 
M. De S. Di- 
didier. 


146 Société royale d’Agricullure 
premier , est placée la cage contenant les deux cy- 
lindres unis ; sur le second se trouve la cage qui 
renferme les cylindres à grosses canelures, et 
sur le troisième ceux à canelures fines. 

Des machines à braquer , dont les cages sont 
en fonte, et qui joignent à l'économie du prix 
la plus grande solidité, ont été exécutées en 
fonte par M. Frèrejean aîné: un dessin exact 
de ces deux machines doit être mis incessam- 
ment sous les yeux de la société. 


Le modèle d’une autre machine vous a été 
adressé par M. Bonnafous , votre correspondant 
à Turin, c’est une échelle brouette. Comme au- 
cune description n'en avait accompagné envoi, 
vous avez prié M. De St. Didier de la décrire et 
de la dessiner. 

» Elle se compose , vous a-t-il dit, de deux 
parties. La première est une brouette, dont les 
bras , longs de 7 à 8 pieds, sont droits, dépas- 
sent un peu la roue en avant, et sont réunis 
par quatre échelons ; les montans prolongés et 
longs d'environ six pieds, sont traversés par le 
quatrième échelon de la brouette , et ont un 
mouvement autour de lui. Etant fermée, la 
machine fait le service d’une brouette sur la- 
quelle on peut porter des fardeaux volumineux ; 
à moitié déployée, elle forme une double échelle 


de Lyon. 147 
dont l'écartement des bras assure la solidité ; 
déployée entièrement elle produit une échelle 
solide et légère , longue de douze à ‘treize pieds. » 

M. De St. Didier pense avec raison qu’il serait 
facile d'ajouter à cette machine des pieds légers 
en fer ou en bois, qui serviraient à en élever 
les bras au-dessus du terrain où ils se trouvent 
posés , et qui, en même temps serviraient à 
fixer solidement dans l'échelle double l'écarte- 
ment -des échelles simples. | 

Telle qu’elle est , sa construction est si simple , 
son coût est si modique , et l'usage en est si facile, 
pour me servir des expressions de l'inventeur, 
qu'indépendamment de la cueillette de la feuille 
de müûrier , elle sera employée pour une infinité 
de travaux rustiques, tels que la récolte des 
fruits, la taille des arbres dans les jardins et les 
vergers , la construction des palissades, etc. et 
les propriétaires s’empresseront d'adopter l'échelle 
brouette de M. Bonnafous. (1) 


(1) Voyez ci-après le dessin de cette machine. 


148 Societé royale d'Agriculture : 
OUVRAGES IMPRIMÉS 


OFFERTS A LA SOCIÉTÉ. 


1. Notice sur les chêvres asiatiques des du 
Thibet, chêvres de Cachemire, et sur la ma- 
nière de les soigner , par M. le chevaliér Tes- 
sier , inspecteur général des bergeries royales, 
(Paris, 1822, in-8. 6 pag. ) 

2.9 De la science de l'homme , mise en rapport 
avec les sciences physiques ou la philosophie de 
la nature , d'après l'état dés sciences au 19.° 
siècle ; par 4. Prost, docteur en médecine , 
( tome 1€7 Paris 1822. in-8. xxx11 - 448 p.) 

3.2 Mémoire presenté à l'institat de France, en 
lui faisant hommage de l'ouvrage précédent , 
par le méme. (Paris, in-8. 64 pag.) 

4° Réflexions sur le fléau de la Catalogne et le 
régime sanitaire, soumises à la Chambre des 
Pairs et à celle des députés, par M. Sarmet, 
aîné, docteur eh médecine à Marseille , (Paris, 
1822, 11 pag.) 

5.2 Nouveau manuel du vigneron ou méthode 
simple , facile et économique pour faire de 
bon vin, partout où le raisin mürit bien, et 
particulièrement dans la Vendée, sans recou- 
rir aux procédés dispendieux des spéculateurs 
brevetés , tels que l'appareil Gervais et autres, 
par M. George Shibuet | vigneron à Etioles , 


de Lyon. 149 
propriétaire dans les départemens de l'Ain, 
Seine, Seine et Oise et Vendée, ( in-8. 27 pag.) 

6° Mémoires et rapports de la société d'agri- 
culture et arts du département du Doubs, 
1821 - 1822. (in-8. 256 pag.) 

7 Procès-verbal de la séance publique de la 
société d'agriculture, du commerce et des arts 
de Boulogne-sur-mer, tenue le 15 juillet 1822. 
(in-8. 78 pag.) 

8.°° Mémoires de la société centrale d’agricul- 
ture et des arts du département de Seine et 
Oise , publiés depuis sa séance publique du 
15 juillet 1822. (in-8. 117 pag.) 

9-° Code des desséchemens , ou recueil des rè- 
glemens rendus sur cette matière depuis le 
règne d'Henri IV jusqu’à nos jours, suivi d’un 
commentaire sur la loi du 16 septembre 1817, 
et d'un tableau général des marais du royaume. 
Paris, 1817. (in-8. 285 pag. pour le premier 

- ouvrage, 60 pag. pour le second. } 

109 Discours lu en séance publique de la so- 
ciété d'agriculture, arts et commerce d'Au- 
nilac, le 8 juillet 1822, sur les développe- 
mens successifs de ces trois branches de lin- 
dustrie humaine dans le département du Can- 
tal, depuis les temps les plus reculés jusqu'à 
la fin de notre ère, par M. Charles-Jean- 
François Raulhac, membre de cette société 


150 Société royale d'Agriculture 
et adjoint du maire de ladite ville, Aurillac, 
1822. (in-8. 64 pag. ) 

12.0 Nouveau cours complet d'agriculture théo-+ 
rique et pratique , contenant la grande et la 
petite culture, etc. etc. par les membres de 
l'institut de France, Paris, 1822. in-8. 16 vol. 
( don du ministre. } 

13.2 Séance de la société centrale d’agriculture, 
sciences et arts d'Agen du 17 septembre 1822, 
(in-4. 3 pag. ) 

14. Comice central agricole du département 
de Saône et Loire, procédé pour opérer le 
renouvellement entier d'une vieille vigne par 
le recouchage des southes. (in-8. 4 pag. 1822) 

15.0 Mémoirede la société royale d'Arras, pour 
l'encouragement des sciences , des lettres et des 

- arts, séance publique du 27 août 1822. ( in-8. 
48 pag.) 

16. Procès-verbal de la séance publique de la 
société d'émulation et d'agriculture du dépar- 
tement de l'Ain , 5 septembre 1822. ( in-8. 
78 pag. ) 

17.2. Mémoire sur la nutrition des plantes et la 

. coupe prématurée des blés , lu à la séance du 
premier octobre 1822 de la société d’agricul- 
ture et des arts du département de Seine et 
Oise , par M. Féburier | Vun de ses membres. 
(in-8. 52 pag.) 


de Lyon. 151 

18. Mémoire sur les fonctions du système 
ganglionaire, par J. Brachet, docteur en 
médecine de la Faculté de Paris, professeur 
suppléant et médecin de l'Hôtel-Dieu de Lyon, 
Paris et Lyon, 1823. ( in-8: 96 pag.) 

19.2 , Traité de la clavelée, de la vaccination et 
clavélisation des bêtes à laine, avec des notions 
historiques et physiques sur l'espèce ovine et 
sur la clavelée , beaucoup d'observations pra- 
tiques , des histoires particulières , ete. par M. 
Hurtrel d'Arboval, amateur , commissaire spé- 
cial pour les épizooties de,18:5.et 1816, dans 
le départ, du Pas de Calais. Paris et Amiens, 
1822. (in-8.518 pag.) 

20.2 Calendario Georgico della reale Societa 
agraria di Torino, per l’anno 1823, compilato 
da un membro della medesina. (in-8.108 pag.) 

21.0: Notice sur l'école spéciale de commerce 
établie à Lyon , avec l’assentiment,de S. Ex. le : 
Ministre de l’intérieur , etc. et sous, la direc- 

, tion de M. Guillard-Lièvre, ancien principal 
de collése. Lyon, 1823. ( in-8. 35 pag. ) 

22... L'administration de l’agriculture appliquée 
à une exploitation ; par M. lecomte de P/ancy, 
ancien préfet de la Loire, de la Nièvre, de 
Seine et Marne , officier de la légion d'hon- 

. neur, membre correspondant du conseil d’a- 
griculture. Paris, 1822. (in-fol. 86 pag.) 


i52 Société royale d'Agriculture 

23,6. Eloge de M. Palisot de Beauvoir, membre 
de l'institut , par M. Thiébault de Berneaud , 
Paris, 1821, (in-8. 85 pag.) 

#4 Relation dé la prémière fête champêtre 
donnée par la Société Linéenne de Paris le 24 
mäi 1825 , jour anniversaire de 14 naissance 
de Linné ; par lé méme , sg 1822, (in 8. 
86 pag: } 

35.° Exposition dé la doctrine botanique ét du 
système de physiologie végétale que Théoph- 
raste enseigriait daris ses cours privés , par le 
méme, Paris ; 1822. (in-8. 18 pag.) 

26.9 Recherches sur les plantes connues des 
anciens sous le nor de Ua, par le même , 

Püris, 1859. (Âh-8. 56 pag. ) 

576 ‘Voyage à Ermeénonville, par lé méme, 
Paris, 1810. (in-12. 300 pag. ) 

28.6 Prograrñime des prix proposés par la So- 
tiété d'énicouragemént , et qui doivent être 
décérnés èn 1833 ,24, 25 et 50, ih-4.° 

25.0 Notice sur St Romain en Galles, par M. 
Cochard , (in-8. 28 pag.) 

36.0 Mémoire sur cetté question : Déterminer 
Si, dätis l'état actuél de nos connaissantes, 
oï péut établir uné classifitation régulière 
des médicaméns , fondée sur leurs propriétés 
médicales , mémoire qui a mérité une mé- 
daïllé d'or au jugement de la Société de méde- 
cine de Paris. Lyon, 1823. ( in-8. 55 pag.) 


de Lyon. 153 

31.0 Remarques sur le traitement des fièvres 
muqueuses à caractères ataxiques, par M. le 
docteur Cartier. Lyon , 1822. (in-8 52pag.) 

32.0 Moulin horizontal en spirale, sur son uti- 
lité pour la mouture, les fabriques, les irri- 
gations , l’arrosement des villes, suivi d'une 
lettre de M. le comte François de Neufchéteau , 
1822. (.in-4.° 20 pag. ) 

33.° ( Opuscules agronomiques publiés : à di 
verses époques, et réunis en un vol. par I. 
Thouin. ) 

34. Notice biographique sur M. Jean-Baptiste 
Desplats, médecin vétérinaire , ancien profes- 
seur à l'école royale vétérinaire d'Alfort , par 
M. Sylvestre , Paris , 1823. (in-8. 15 pag.) 

35.° Programme de la séance publique de la 
Société royale et centrale d'agriculture , tenue 
le 6 avril 1823 , et présidée par S. Ex. le 
Ministre de l’intérieur. 

36.0 . Rapport sur les travaux de la Société cen- 
trale d'agriculture, par M. Sybestre, secré- 
taire perpétuel. Paris, 1823. (in-8. 24 pag.) 

37.2 Programme d'un prix proposé par la même 
Société pour la rédaction d'un manuel ou 
guide des propriétaires des domaines affermés. 

38.0 Rapport au Bureau d’agriculture de Mont- 
brison ; sur le classement de ses travaux, par 
M. Mortaigne de Poncins , dans la séance du 
24 février 1823. (in-8. 31 pag.) 


154 Société royale d'Agriculture 

39.° Rapport général sur les travaux du con- 
sel de salubrité (de Paris) pendant l’année 
1821. (iu-4. 32 pag. ) 

40.9 Rapport au nom d'une commission à 
l'académie des sciences , belles lettres et arts 
de Lyon, sur l'école de la Martinière fondée 
dans cette ville par le Major général de la 
Compagnie des Indes, Claude Martin. Lyon, 
1823. (in-8. 34 pag.) 

41.0 Compte rendu des observations faites à 
Y'Hôtel-Dieu de Lyon par les médecins de cet 
Hôpital , depuis le 1.* octobre 1819 jusques 
au 1.* octobre 1821, rédigé par M. Frolliet, 
(in-8. 92 pag.) 

42. Compte rendu des travaux de l'académie 
royale des sciences, belles-lettres et arts de 
Lyon, dans la séance publique du 26 août 
1813, par M. Paul-Emile Beraud, present 
Lyon, 1822. (in-8. 46 pag.) 

43. Compte rendu des travaux de la même aca- 
démie pendant le premier semestre de 1815, 
par M. Cochet, président, membre corres- 
pondant de l'institut. Lyon, 1822. (in-8. 15 p.) 

44° Compte rendu de la même académie pen- 
dant l'année 1816, par M. Ballanche, prési- 
dent. (in-8. 46 pag. ) | 

45.% Compte rendu de la même académie, de- 
puis le 13 novembre 1821 jusqu'au 2 avril 


de Lyon. : 155 
1822, par E. B. Guillemet, président, ancien 

. professeur de physique de la faculté des sciences 
de l'académie de Lyon, membre de plusieurs 
sociétés savantes. Lyon, 1822. (in-8. 36 pag. ) 

© 46.9 Ecole de la Martinière, fondée par le Ma- 
jor-général Claude Martin. Lyon, 1823. (in-8. 
35 pag.) 

47.2 Notice sur quelques races de chevaux , sur 
les haras et les remontes dans l'empire d’Au- 
triche , par M. Huzard fils , médecin vétéri- 
naire, correspondant de la société royale et 
centrale d'agriculture , membre adjoint du 
conseil de salubrité, Paris, 1823. (in-8. 38 p.) 

48.2 Fabrication du fromage de Parmesan, par 
M. Huzard fils, correspondant de la société 
royale et centrale d'agriculture, 1823, ( in-8. 
44 pag. ) 

49.° Procès-verbal de la séance publique an- 
nuelle tenue à l'école d'économie rurale et vé- 
térinaire de Lyon, le 19 septembre 1822, pour 
Ja distribution des diplômes et des prix aux. 
élèves. (in-8. 71 pag.) 

50.0 Mémoire sur la eatge de l'olivier dans 
le midi de la Erance, par M. De Gasparin, 
(tiré de la bibliothèque universelle ) (in-8. 
82 pag.) 

51.9 L'art du Boyaudier, mémoire qui a obte- 
nu le prix fondé par M. le préfet de police, 


Ouvrages pé- 
riodiques a- 
dressés à la So- 
ciété, 


156 Société royale d'Agriculture 
et proposé par la société d'encouragement pour 
l'industrie nationale, par 4. G. Labarraque , 
pharmacien de Paris, membre. de la société 
libre des pharmaciens, etc. etc. Paris, 1822. 
(in-8. 138 pag. ), 


En outre des productions que vous avez reçues 

à titre d'hommages, votre bibliothèque s'est en- 

richie des recueils périodiques de plusieurs so- 

ciétés agricoles , dont les unes ont continué à 

vous communiquer les résultats de leurs utiles 

travaux, et les autres nouvellement instituées, 
out bien voulu vous adresser la notice de leurs 
premiers actes. 

Ces ouvrages périodiques sont les suivans: 

1.7 Le bon cultivateur , recueil agronomique 
publié par la société centrale d'agriculture de 
Nancy. , 

2.9 Recueil agronomique publié par les soins 
de la société des sciences, agriculture et belles- 
lettres du département de Tarn et Garonne. 

3° Journal des propriétaires ruraux, pour le 
midi de la France, rédigé par des membres 
de la société d'agriculture de Toulouse. 

4°. Journal d'agriculture, lettres et arts, rédigé 
par des membres de la société d'émulation et 
d'agriculture du département de l'Ain. 

5.9, Annales de la société royale des sciences , 
belles-lettres et arts d'Orléans. 


de Lyon. 157 

6. Annales de la société d'agriculture, sciences, 

arts et belles-lettres du département d'Indre et 
Loire. 

7. Mémoire dela société d'agriculture , sciences 

et arts du département de l'Aube, 

8. Bulletin de la société royale d'agriculture, 
des sciences et des arts de Limoge. 

9°. Bulletin d'industrie agricole et manufactu- 
rière, publié par la société d'agriculture, arts 
et commerce de la Loire , section de l’arron- 
dissement de St. Etienne. 

10.0 Feuille villageoise de l'Aveyron , journal 
d'économie rurale et domestique, publié par 
la société d'agriculture de l'Aveyron. 

11. Bulletin de la société d'agriculture du dé; 
partement de l'Hérault. 

12.2 Annales de la société d'agriculture , arts 
et commerce du département de la Charente. 

13° Bulletin de la société d'agriculture , arts 
et commerce du département du Canial. 
Vous devez, Messieurs, à la munificence du 

Gouvernement plusieurs ouvrages précieux, tels 

sont : le traité général des eaux et forêts, chasse 

et pêche, par M. Beaudrillart ; le code des des- 
séchemens, ou recueil de règlemens rendus sur 
cette matière depuis le règne d'Henri IV jusqu’à 
nos jours ; l'administration de l’agriculture ap- 

pliquée à une exploitation, par M. le comte De 


Rapport sur 
les mémoires 
de la société 
Linnéenne; par 


M. Balbis. 


158 Socièté royale d'Agriculture 

Plancy ; la suite des annales de l'agriculture 
française, par MM. Bosc et Tessier. M. le Préfet 
a bien voulu continuer de vous adresser l'inté- 
ressante collection de ses actes administratifs. 


Avant de déposer honorablement à votre biblio- 
thèque les ouvrages imprimés qui vous sont en- 
voyés, vous les remettez pour l'ordinaire à des 
commissaires chargés d'en faire, conriaître le 
mérite par des rapports verbaux ou écrits. 

C'est par des rapports écrits, pleins d'intérêt, 
que M. Balbis vous a rendu compte de deux 
ouvrages adressés par M. Thiebault de Berneaud, 
correspondant à Paris. L’un est l'éloge historique 
de Palisot de Beauvoir; l'autre, la notice des 


\ travaux de la société linnéenne depuis sa réorga- 


nisation jusqu’à la fin de 182r. 

Comme vous ne l'ignorez pas, Messieurs , la 
société savante qui , sous les auspices du grand 
Linné, se dévoue au culte de l'histoire naturelle, 
fut fondée à Paris en 1788. Dispersée par l'orage 
révolutionnaire , elle n'a été restaurée qu'en 
1820. Alors on a vu se former des sociétés de 
même genre dans plusieurs grandes villes du 
royaume. Se considérant comme des émanations 
de celle de la capitale, elles ont pris le titre de 
colonies de la société linnéenne de Paris ; l’une 
d’elles existe à Lyon, et c’est sous la présidence 
de M. Balbis qu'elle a ouvert le cours de ses 
nobles travaux. 


de Lyon. 159 

Le génie du grand Linné ne connut, pour 
ainsi dire , d'autres bornes que celles de la na- 
ture ; aussi les Linnéens doivent-ils , sur les pas 
de leur maître, diriger leurs recherches sur 
toutes les sciences naturelles. Des questions de 
haute philosophie sont encore de leur ressort : 
telles sont le problème de la vie que M. De 
Gasc s'est efforc®de résoudre ; celui d'un lan- 
gage logique et d'un ordre naturel sur lequel M, 
Lefebure a jeté de lumineuses idées ; celui de la 
_ stabilité des formes qui caractérisent les corps 
que nôus distinguons en genres et espèces , pro- 
blème dont M. Girod de Chantrans s'est occupé 
profondément. 

En vous citant les faits remarquables consignés 
dans la notice confiée à son examen, M. Balbis 
n'a pas passé sous silence l’observation que M. 
Madiot vous avait communiquée au sujet du 
hérisson à groin de cochon, ( 1) observation qui 
a été confirmée par celles de M. Redouté, Lebret 
et Borghers. 

Un autre naturaliste qui appartient à notre 
société à titre de correspondant , M. Fallot , s'as- 
sociant aux travaux de nos confrères MM. Sion- 
nest et Foudras , a étudié les insectes ennemis 
de la vigne, et il a poussé ses recherches sur les 
végétaux parasites du plus précieux des arbustes. 


(2) Voyez compte rendu pour 1821 , pag. 234. 


160 Société royale d'Agriculture 

Sans nous arrêter aux nombreux travaux de 
botanique de la société Linnéenne , travaux que 
personne mieux que M. Balbis ne pouvait juger, 
nous devons noter un fait de physiologie végé- 
tale qui, s’il était bien constant, aurait une 
grande influence sur la culture des arbres. M. 
Juge de St. Martin , un des mestors de l'agro- 
nomie française , s’est livré à une longue suite 
d'expériences desquelles il paraît résulter qu'en 
enlevant la pellicule noire qui recouvre les mar- 
rons , les pepins des poires , des pommes , et en 
les semant, ainsi dépouillés ils produisent des 
arbres de la même variété que ceux qui les ont 
fournis. C’est ainsi que, sans recourir aux grefles, 
aux marcottes et aux boutures, on pourrait 
propager les races végétales précieuses. 

Comme on la fait observer dans le préambule 
de cette notice, c’est à la physiologie à éclairer 
les pratiques de l'agriculture. Il était bien con- 
vaincu de cette vérité, M. Mathieu de Dombasles, 
notre savant correspondant , lorsqu'il exposait 
les phénomènes de la nutrition des plantes. Vous 
avez apprécié son beau travail. (1) Encouragé 
par vos suffrages, l’auteur l’a offert au public 
qui a confirmé votre jugement. 

Après avoir mis sous vos yeux l'extrait d’autres 


(1) Voyez compte rendu pour 1820, pag. 215. 


de Lÿon. 161 
mémoires de la société linnéenne de Paris, M. 
Balbis vous a fait part d'un hommage que cette 
compagnie a rendu à la mémoire de l’an de ses 
fondateurs , notre respectable Rast Maupas ; et 
il vous a été facile de voir que le panégyriste 
de cet agronome habile avait puisé les élémens 
de son discours dans le compte rendu de vos 
travaux pour 1820: 

Nous devons à M. Thiébault de Berneaud 
l'éloge d'un autre célèbre naturaliste M. Palisot 
de Beauvoir. En vous parlant de cet ouvrage , 
M. Balbis s'est plû à relever les services éminens 
que M. de Beauvoir a rendus à la botanique. Celui- 
ci a débrouillé le cahos de Ja cry ptogamie , dévoilé 
les’organes des lycopodes , des mousses, des cham- 
pignons , constitué la famille des graminées ; 
‘signalé une multitude de plantes parasites, ap- 
pliqué à l’agriculture de profondes recherches de 
pbhytolologie. 

Non content de reculer les bornes de la ea 
nique , Palisot de Beauvoir se livra ,avec ardeur, 
à l'étude des :belles-lettres ; il traça d'une plume 
élégante, l'éloge du sage Rollin , celui du savant 
ÆFourcroy , il composa des pièces de vers, avoués 
parle goût le plus sévère. 

ILtermina , le 21 janvier 1820, une wie pleine 
de services et -de vertus, ni. en portefeuille 
plusieurs ouvrages importans , tels que la re- 
11 


Rapport sur 
dés brevets 
d'invention 
qu'ont obtenus 
des Lyonnais ; 
par M. Faissolle 


162 Société royale d Agriculture 
lation de son voyage sur la côte occidentale 
d'Afrique. 

C'est sous ces traits que M. Balbis , d’après M. 
Thiébault de Berneaud, a peint le respectable 
Palisot de Beauvoir. 


M. Füissolle a relevé les services rendus à 
l'industrie nationale par plusieurs Lyonnais ; 
Voccasion de cet hommage a été un rapport 
sur la description des machines et procédés spé- 
cifiés dans les brevets d'invention dont la durée 
est expirée. 

Au premier rang de ces Lyonnais industrieux 
est notre confrère M. Jacquard, qui obtint le bre- 
vet le plus honorable, pour l’invention de cette 
belle machine au moyen de laquelle on a supprimé 
le tireur de lacs dans la fabrication des étoffes bro- 
chées et façonnées. M. le rapporteur a fait obser- 
ver que depuis l'obtention de ce brevet, M. Jac- 


- guard avait inventé une autre mécanique qui 


rend cette fabrication plus facile et plus rapide. 
Dans la même notice et pour la même année, 
sont spécifiés deux autres brevets décernés à des 
Lyonnais, l’un à M. Pielte, opticien, pour des 
lunettes au moyen desquelles on peut lire, à 
double portée; l'autre, à M. Bertrand, pour une 
bascule à reverbération, applicable aux cheminées, 
et pour des perfectionnemens apportés aux tu- 


de Lyon. 163 
yaux de poêles, à la faveur desquels on peut 
presque doubler la chaleur. 

Cette bascule se compose d’une plaque de tôle 
d'environ cinq décimètres de hauteur , portant à 
sa partie inférieure deux tourillons qui servent 
d'axe; elle se place du côté du contre-cœur de 
la cheminée, et repose sur la partie inférieure 
de la plaque. 

Une tige en fer sert à ouvrir et à fermer la 
bascule. Quand elle est fermée , elle présente, 
avec l'horizon, un angle de 6od. 

Le but de cette mécanique est de renvoyer de 
la cheminée la chaleur dans l'appartement , au 
moyen de la reverbération. 

Quels qu’en soient les avantages , ils sont in- 
férieurs, selon M. le rapporteur, à ceux d’une 
autre cheminée dot on doit l'invention à l'illustre 
Chaptal. 

Dans un rapport précédent sur la même no- 
tice officielle, M. Faissolle avait rappelé d'autres 
services rendus par des Lyonnais à l'industrie de 
la France. Il avait parlé successivement du 
semoir de M. Gairal, du ventilateur à condi- 
tionner les soies crues de M. Brun, du moulin 
_à vent de M. Rognat ; et à cet égard, il s'était 
livré à des considérations de mécanique qui, 
plus tard, ont été l’objet d'un mémoire spécial 
analisé dans le présent compte rendu. Il fait en- 


Rapport sur 
les annales de 
la société d’Or- 
léans; par M, 
Remond. 


164 Société royale d'Agriculture 

suite connaître le mélier inventé par M. Meunier 
fils , pour la fabrication de toutes sortes d'étoffes 
ponctuées d’un ou de deux côtés. Il relève quel- 
ques fautes de calcul échappées à ce mécanicien, 
Il rend justice au génieinventif de MM. Jordan 
père et fils, qui sont parvenus à fabriquér des 
dentelles de soie, façon anglaise. Il rappelle es 
travaux de feu M. Revol, neveu, qui futmembre 
de la société; ceux de M. Duchamp de-la Guillo- 
tière; ceux enfin de MM. Legay, Bremont et 
Bertrand, et il a bien voulu prendre l’éngage- 
ment de continuer cette revue honorable ‘pour 
l'industrie lyonnaise, 


En vous parlant des actes de la société royale 
dés sciences, belles-lettres et arts d'Orléäns, 
M. Remond a dù s'attacher aux objets qui pou- 
vaient avoir quelques rapports avec ceux de vos 
travaux. Et en cela il est entré dans les vues qui 
vous ont déterminés à vous faire rendre compte 
des divers ouvrages dont vous recevez l'hommage 
ou la communication. 

M. Remond vous a fait connaître en premier 
lieu un mémoire sur le défrichement des bru- 
yères, par l’écobuage, préférablement à celui 
qui est opéré par la pioche ou par la charrue. 
L’auteur du mémoire pense, et M. le rapporteur 
est de son avis, que l*cobuage s'applique utile- 
ment aux terrains argileux , tourbeux , ‘subs- 


de Lyon. 165 
tantiels, humides ; mais qu'il est nuisible sur 
un sol ferrugineux où la bruyère croît ordi- 
nairement, sol qui devient absolument stérile 
après l'incinération , à cause de la division plus 
complète de ses molécules et de Févaporation 
des substances végétales eb animales qui cons- 
tituent l'humus. 

ME. le rapporteur pense que, lorsque pour ne 
pas offenser les racines, on ne défriche pas à la 
charrue, on doit opérer avec la pioche. D'après 
l'auteur du mémoire, il fait sentir les avantages 
de l'enfouissement des pois , des vesces , du sar- 
rasin , pour fumer la terre , ceux de la coupe des 
blés à la faulx, méthode si peu pratiquée dans 
nos environs , quoiqu'elle ait pour résultat de 
donner beaucoup plus de paille que la méthode 
ordinaire , et de purger le sol de toutes ces mau- 
vaises herbes qui, échappant à la faucille , infes- 
tent les champs de leurs graines. 

M. Remond parle ensuite des expériences qui, 
autour d'Orléans , comme dans le reste de la 
France ont été faites sur l'appareil Gervais, et 
après avoir rapporté les résultats contradictoires 
de ces épreuves , il a cité les observations sur 
ce sujet qu’a recueillies M. Mure, propriétaire à 
Fontaine près Lyon. 

Cet agronome, à qui la société a décerné une 
médaille d'or pour ses belles cultures des müûriers 


166 Société royale d'Agriculture 

a fait fermer hermétiquement deux cuves; sur 
l'une il a placé lappareil Gervais , il a établi sur 
l'autre une soupape qui s'ouvrait par l’effort 
du gaz acide carbonique , se refermait ensuite 
spontanément. Le vin de cette dernière cuve ayant 
été décanté au 16° jour du cuvage , au lieu du 22° 
comme dans l'appareil Gervais , a néanmoins 
offert des résultats semblables en quantité et en 
qualité. 

La longue durée du cuvage ne peut pas con- 
venir à toutes les localités et à toutes les tempé- 
ratures ; c'est ce qui a été prouvé par plusieurs 
observations décisives. D’autres ont établi que 
la liqueur condensée était moins une liqueur 
alcoolique que de l'eau aromatique mêlée d'acide 
acétique , et tenant en dissolution une très-petite 
quantité d'oxide de fer. 

Deux autres mémoires ont fixé plus particu- 
lièrement l'attention de M. le rapporteur, l'un 
a pour objet la nourriture du bétail ; l'autre , le 
meilleur système d'assolement. 

Dans le premier mémoire, M. le marquis de 
Vilbreme prouve , d'après ses expériences, qu'un 
arpent de terre semé en jarosses ( Latyrus sali- 
vus ) nourrira mieux dans un temps donné 
1806 moutons que le même arpent ne nour- 
rirait 1038 de ces animaux, s'il était couvert de 
navets , et cependant le poids des navets récoltés 


de Lyon. 167 
sera cinq fois plus considérable que celui des 
jarosses. Le même agronome a éprouvé combien 
il est avantageux et économique de ne donner 
au bétail les racines et les tubercules qu'après 
les avoir fait cuire à la vapeur. 

L’autre mémoire est de M. le marquis de Guer- 
cheville; il tend à prouver que l'assolement qua- 
triennal est préférable au triennal. Voici la dis- 
tribution du sol qu'il a introduite avec succès 
dans ses exploitations : La première partie en 
blé ; laseconde en mars, avoine , orge, avec sain- 
foin ou trefle, pois ou vesce d’hiver ; la troisième 
en fourrage en plein fauchage ; la quatrième en 
préparation pour les blés d'automne. 

D'après ce mode quatriennal , les frais de cul- 
ture ont diminué, parce qu’on n'a labouré qu'un 
quart au lieu d’un tiers du domaine. On a récolté 
beaucoup plus de grains et de paille, encore plus 
de fourrage artificiel. Le nombre des bestiaux a 
augmenté et avec eux la masse des engrais. 


Ce système, très-avantageux dans les pays de 


grande culture est peu applicable à ceux, ou 
comme dans notre département, les propriétés 
sont très-divisées. 


Souvent nous avons eu occasion de le faire 
observer: les vignobles constituant notre prin- 


Rapport sur 
le procédé de 
décuvage de M. 


\ 


= Dudevant ; par 
M. Deschamps 
pères. 


168 Société royale d'Agriculture 

cipale richesse agricole , c'est vers le perfection 
nement de leur culture , c’est vers les meilleures 
méthodes de vimification que duivent tendre, 
d'une manière particulière ; nos efforts ; aussi 
devons-nous répandre avec un zèle scrupuleux 
les découvertes qui peuvent intéresser l'œnologie. 

C’est ce qui a déterminé M. Deschamps père à 
extraire des annales de l'agriculture française le 
procédé relatif au décuvage que nous devons à 
M: Düdevant | propriétaire dans le Bordelais. 

Il consiste à placer sur FPorifice d'ane cuve à 
demi pleine , la vendange ayant été foulée, six 
planches, fréquemment arrosées d'eau fraîche , 
recouvertes de plusieurs couvertures. 

Par ce procédé le décuvage eut lieule 13° jour, 
tandis que dans les environs de Bordeaux on né 
décuve que du 15° au 20° jour. Il y ent une petite 
augmentalion de produit , et le vin était fin jus: 
qu’à la dernière goutte. 

I! se trouva que le vin était clair, spiritueux, 
ésempt de la dureté qui caractérise le vin nouveau. 

M. Dudevant pense que , dès le sixième jour ;, 
le vin traité de cette manière se clarifie et peut 
être décuvé. 

Après quatre jours de tonneau, ce même vin 
a marqué trois degrés à l'aréomètre , tandis que 


. celui qui avait été fabriqué par la méthode ordi- 


paire n’en marquait que deux. Le premier n'a 


de Lyon. 169 
donné dans les tonneaux aueun signe de fer- 
mentation. _ 

» Ce résultat avantageux , dit M, Deschamps , 
» démontre complètement les avantages du nou- 
» veau procédé. Il me paraît , ajoute-Lil, devoir 
» étre pris en considération, surtout pour les 
» vins qui ont besoin de rester long temps dans 
» les cuves pour y éprouver la fermentation 
» désirée; ilremplit l'objet de l'appareil de M.!Ie 
» Gervais, et il est beaucoup plus expéditif , il 
» donne moins d'embarras , occasione moins de 
» dépense , et pour le mettre en usage on n'a pas 
» besoin de licence. » 

Deux autres rapports écrits vous ont été pré- 
sentés sur des ouvrages imprimés ; mais ils n’ont 
pas été déposés encore dans votre portefeuille ; 
l'un par M. Socquet , sur le mémoire de M. Ma- 
thieu de Dombasles, relatif à la fabrication de 
l'eau-de-vie de pommes de terre ; l'autre par M. 


le chevalier de Martinel, avait pour objet un 
cahier de l'agronome français de M. Rougier de. 
la Bergerie. Ces deux honorables confrères ayant* 


annoncé l'intention de donner une suite à leurs 
rapports, ces communications seront recueillies 
soigneusement dans le compte rerdu de vos 
travaux pour l'année prochaine. 


Je ne dois pas passer sous silence que parmi 


Rapports ver- 


les rapports verbaux qui vous ont été présentés , LE pee D 


SSLET à 


170 Société royale d'Agriculture 

vous avez écouté avec un grand intérêt celui de 
M. Tissier , sur un mémoire couronné de M. Cap, 
relatif à la classification des médicamens. M. le 
rapporteur s'étant occupé lui-même pendant 
Jong-temps de cette question , pouvait mieux que 
tout autre apprécier les vues lumineuses que M. 
Cap a développées avec autant de précision que 
de clarté. 

C'est aussi par un rapport verbal que M. Téssier 
a fait connaître une dissertation de M. Raulhac 
sur l'état de l'agriculture et de l’industrie de 
l'Auvergne dans les temps anciens, M. le rap- 
porteur a rendu justice à l’érudition de M. Rau- 
Ibac , et vous avez placé cet archéologue sur la 
liste de vos correspondans. 

Tous ces rapports et quelques autres moins 
importans ont fréquemment donné lieu à d’inté- 
ressantes discussions. C'est ainsi qu'a été justifiée 
la mesure que vous avez adoptée de remettre 
tous les ouvrages qui vous sont adressés, à un 
commissaire pour en présenter une analise suc- 

*cincte. 

Par suite de cette sage mesure, la notice qui 
suivra celle-ci sera enrichie des rapports que vous 
ont promis MM. Muthuon , Balbis, Terme, 
Pelletier, Guillemet, De Martinel , Socquet, Jan- 
son, Monnier , Billon, Deschamps fils. 


de Lyon. 171 
RÉCOMPENSES. 


L'administration , avait, l'année dernière, 
réservé de nobles récompenses aux agronomes du 
département qui se distingueraient par leurs 
succès dans la culture du mûrier et l'éducation 
des vers à soie. Le concours a été nombreux, et 
vous avez été appelés à le juger. MM. les concur- 
rens que vous avez distingués ont reçu le prix 
de leurs travaux des mains de M. le comte de 
Tournon, dans une séance publique et solen- 
nelle, présidée par ce magistrat. 

Rapporteur de votre commission permanente 
des mûriers, (1) M. Faïssolle a commencé son 
discours en adressant un hommage bien mérité 
au digne administrateur qui, dans notre Lyon- 
nais, a donné l'élan à une amélioration indus- 
trielle autant qu’agronomique. 1] a fait observer 
ensuite qu’un grand pas avait été fait dans ce dé- 


partement , et que des établissemens considérables 


s'y étaient formés pour l'éducation des vers à 
soie ; que dans quelques-uns la filature était par- 
venue à un grand point de perfection ; que plu- 
sieurs de MM. les Maires, notamment ceux 


(2) Les autres membres de cette commission sont MM. 


Cochard, Balbis, Muthuon , De Martinel, Billon, Fais- 
solle et Grognier, 


Médailles d’or 
et médailles 
d'argent pour 
la culture du 
mürier et l-édu. 
cation des vers 
à soie. 

Rapporteur 
M. Faussolle, 


172 Société royale d'Agriculture 

d'Oullins , de Tassin, de la Guillotière avaient 
secondé avec le plus grand zèle M. le Préfet , 
en fournissant des détails nombreux sur les 
plantations de mûriers et les magnoneries exis- 
tantes dans leurs communes respectives. 

Après ces observations, M. le rapporteur a 
exposé ainsi qu’il suit le tableau des récompenses 
dont MM. les concurrens ont été jugés dignes. 
Ce tableau avait été, en séance particulière, 
arrêté par la société, 


Pour la plantation des müriers , une médaille 
d'or de 300 fr., quatre aussi d'or de 1oofr., 
et deux d'argent. 


Grande médaille d'or à M. Malbos , proprié- 
taire à Oullins, pour avoir planté 1437 pieds 
de mûriers en plein vent , et 4000 en haies. 

1.2 médaille d'or de cent francs à M, Mure, 
(François ) propriétaire à Fontaine, pour avoir 
planté 744 pieds de mûriers , et avoir couvert 
de pourrettes deux ares. 

2. À M. Monterad ( Gilibert ), DÉSOÉTIENE à 
Tassin, pour avoir planté 458 pieds de müriers , 
et 4000 pourrettes. 

3. À M. Rivière, propriétaire à Oullins, pour 
avoir formé une pépinière de 400 pieds de mü- 
riers. 

4 A M. Mathieu Bonafous, matf de Lyon. 
notre correspondant à Turin, qui a fait impri- 


d de Lyon. 173 
mer et répandre à ses frais, dans le département, 
en 1821, un mémoire précieux sur l'éducation 
des vers à soie; et.cette année des principes rai- 
sônnés sur la culture des müriers.. 

Les deux médailles d'argent ont.été accordées, 

L'une à M. Dumoy (Pierre), propriétaire à 
Fontaine, pour avoir planté 300 müûriers 

L'autre à M. Billet-Landas, maire à Fleurieux 


sur l'Arbresle,, pour avoir planté 180 pieds de 
müriers. 


L 

Pour l'éducation des vers à soie ‘une médaille 
d'or de 3oofr., quatre aussi d'or de 1oofr. , 
ct deux d'argent. 


La grande médaille d'or a été décernée à M. 
Poidebard, propriétaire à St. Alban , commune 
de la Guillotière qui, précédemment , avait ob- 
tenu un prix, et qui vient de planter 500 pieds 
de mûriers et 4500 pourrettes ; il a donné en 
outre beaucoup plus de développemens à ses 
Magnoneries; c’est au point qu'il est parvenu à. 
faire éclore annuellement douze onces de graines 
de vers à soie , et il continue d'exploiter sa belle 
filature. 

Les médaillés d'or de la valeur de roofr. ont 
été distribuées comme il suit : 

1. A M. Billon, propriétaire à Grigny. Il a 
fait planter 200 pieds de müriers en plein vent, 
409 müûriers en buissons , il a donné ses soins à 


i74 Société royale d'Agriculiure ” 
la culture des vers à soie, et il a fait construire 
une Dandolière. 

2€ À M. Michel aîné, propriétaire à Oullins, 
pour avoir élevé des vers à soie provenant de six 
onces de graines. 

3€ A M. Veyre, de la même commune et 
pour le même sujet. 

42 À M. Cochard, propriétaire à St. Cyr, 
canton de Ste Colombe, pour avoir planté 70 
pieds de müriers en plein vent, et 250 pieds de 
pourrettes, et excité l'émulation de ses grangers 
en leur faisant élever chaque année des vers, 
provenant de quatre onces de graines. 

Quant aux médailles d'argent , chacune de 
25 francs, elles ont été accordées l'une à M. 
Ravichon (Jacques), de la commune d'Oullins, 
pour avoir élevé des vers provenant de trois onces 
de graines, et qu'il espère porter à six. 

L'autre à M. Champ, tonnelier à Oullins, 
pour avoir élevé des vers provenant de deux 
onces de gra'nes. 

La commission eût proposé de donner une 
médaille à Madame Mollard, qui a élevé dans la 
commune de St. Rambert, des vers provenant 
de vingt-quatre onces et demi; mais elle s’est 
assurée que l'établissement de cette dame faisait 
partie de ceux de M. Poidebard auquel un pre- 
mier prix a été décerné. Ainsi elle a dû se borner 
à mentionner honorablement Mme, Mollard. 


de Lyon. 175 

Pareille mention a été faite de M. Rieussec ù 
noire respectable confrère , pour ses plantations 
de mûriers et de pourrettes ; de MM. Jean Poisat 
et Pignard, (de Montagny , commune de Bully }; 
et de Madame veuve Blanc, de la commune 
d'Oullins , pour leurs éducations de vers à soie. 


Après avoir prorogé à plusieurs reprises une 
question qui intéresse vivement les fabriques 
lyonnaises, vous en avez obtenu la solution la 
plus satisfaisante. Voici cette question : 

Tnventer un métier qui ferait passer la navette 
Par un moyen mécanique , de manière que l’ouvrier 
ait simullanément les deux mains au battant , afin 
d'obtenir plus de régularité à la trame. 

M. D'Eglise , artiste mécanicien , et fabricant 
d'étoffes de soie à Choulans , banlieue de Lyon, 
s’est présenté comme ayant résolu cette question ; 
il s'est offert à mettre sous les yeux d’une com- 
mission de la société une machine qui, selon 
lui, faisait plus que remplir les conditions du pro- 
gramme. 

La commission a été nommée, et elle a fait 


en ces termes son rapport par l'organe de M. 
Gensoul. (1). 


mr pi, Le 2 Um 


(1) Les autres membres de la commission étaient MM. 
Cochard , Leroy-Jolimont, Jacquard, Muthuon et Grognier. 


Médaille d'or 
à M. D'Eglise, 
pour un perfec- 
tionnement 
dans la fabri- 
cation des étof- 
fes de soie. 
Rapporteur 
M. Gensoul. 


176 Société royale d'Agriculture 

» M. D'Eglise a tissé en notre présence , sans 
se servir de ses mains, et avec beaucoup de fa- 
cilité un gros de Naples noir ; il a fait agir la 
navette , le battant et les lisses à l'aide d'un seul 
pied qu'il pose alternativement sur une des deux 
marches. L’étoffe qu'il a fabriquée par ce procédé 
ne laisse rien à désirer sous le rapport de la per- 
fection. Quant aux autres avantages que peut 
offrir ce métier , quoique l'auteur n'ait pas cru 
pouvoir nous en montrer ‘tout le mécanisme , 
nous nous sommes assurés qu'il n’a rien exagéré 
dans le mémoire qu'il vous a adressé, et que 
réellement son métier a pour résultat 1.° de per- 
fectionner l’étofle; 2.° de fabriquer dans un 
temps donné un cinquième de plus; 3.° d'éviter 
à l’ouvrier les deux tiers du travail. » 

» S'il faut l'en croire, son mécanisme peut s’ap- 
pliquer à toutes sortes de tissages en soie, fil, 
laine et coton , il dit même qu'il pourrait s'adapter 
aux méliers de courant, dits à la Jacquard. » 

» Le mouvement de ce métier paraît s'opérer 
par un mécanisme qui fait mouvoir le battant , 
la navette et les lisses , de manière que ces der- 
nières s'élèvent par gradation , laissent un pas- 
sage régulier à la navette, l'empèchent de couper 
la chaîne et de former des lardures. Une nouvelle 
bascule, ajoutée au rouleau de derrière, tend la 


de Lyon. 177 
chaîne à volonté, et cède si facilement au mou- 
vement de la marche que malgré la mauvaise 
qualité qué pourraient avoir les fils de la chaîne, 
il ne s’en casse pas dans le tissage. » 

» M. D'Eglise a encore adapté à son métier 
un régulateur qui ploie l'étoffe au fur et à me- 
sure qu’elle est fabriquée ; le battant frappe le 
même coup et à distances égales, ce qui donne 
à l'étoffe une régularité qu'on ne pouvait cbte- 
nir par les anciens procédés. » 

» Cet artiste a trouvé aussi le moyen de pla- 
cer dans un métier , propre à tisser les satins , 
des aiguilles en plomb , du poids de six onces 
seulement, au lieu de ces lourdes platines qui 
usaient RARE les lisses. » 

» La commission vous annonce avec plaisir 
qu’elle n’a que des éloges à donner à un artiste 
qui, ne se contentant pas d'atteindre, a encore 
dépassé le but indiqué par votre programme. 
Elle regrette qu’on n'ait à lui offrir qu'une prime 
aussi modique , et elle invite la société à solli- 
citer auprès des autorités une récompense plus 
digne de son travail , afin de l'engager à rendre 
public un métier qui peut être très-ntile aux ma- 
nufactures de cette ville. » 

Toutes ces conclusions été adoptées par la 
société. 


12 


Médaille d’ar- 
gent a M. Sou- 
chon , pour fa- 
brication en 
grand de l’hy- 
drocyanate fer- 
rugineux de 
potasse, 


Rapporteur 
M. Tissier. 


178 Société royale d’Agricullure 

C'est pour avoir répondu à l'appel de l'edmi- 
nistration départementale , que d'honorables ré- 
compenses ont été décernées aux agronomes et 
aux manufacturiers du département qui se sont 
livrés avec zèle et succès à l'éducation des vers à 
soie et à la culture de l’arbre qui nourrit cet in- 
secte précieux. C'est pour avoir non-seulement 
atteint, mais encore dépassé le but proposé par 
votre programme, dans l'intérêt de l’industrie 


manufacturière de Lyon, que vous avez décerné 


à un artiste ingénieux une médaille d'or. 

Mais comme , dans les années précédentes, 
vous aviez cru devoir récompenser des décou- 
vertes agronomiques qu'aucun programme n'a- 
vait provoquées, vous avez voulu, cette année, 
accorder spontanément une distinction à un pro- 
cédé qui intéresse vivement l'industrie de notre 
cité. 

M. Souchon, chimiste-pharmacien et manu- 
facturier vous avait soumis un échantillon 
d'hydrocyanate ferrugineux de potasse fabriqué 
par lui; il vous avait annoncé qu’il avait établi 
une manufacture considérable de ce produit tinc- 
torial. 

Vous n’avez pas pu vérifier le dernier de ces 
faits , attendu que le procédé du fabricant étant en- 
core secret, vos commissaires n'ont pu voir son 
atelier; mais vous avez eu des raisons de croire 


de Lyon. 179 
que déjà il avait livré au commerce des masses 
de son hydrocyanaté ferrugineux. 

Le fabricant avait annoncé que ce produit de 
son industrie était d’une qualité supérieure à 
celui des autres fabriques de même genre ; pour 
constater ce fait , des expériences ont élé ordon- 
nées par la société ; elles ont eu lieu dans l'atelier 
de M. Gonin, chimiste teinturier , et l’un des 
membres de la commission des prix ; et d'après 
le rapport qui vous a été fait sur leurs résultats, 
vous avez décidé textuellement ce qui suit : 

» Une médaille d'argent à l'effigie de RozrEr, 
» est décernée à M. Souchon, pharmacien aux 
» brotteaux, pour avoir fabriqué en grand de 
» l'hydrocyanate de potasse d'une qualité au 
» moins égale à celle de l’hydrocyanate du com- 
» .merce, » 

» La société a cru devoir déclarer en outre 
» qu'elle avait des motifs de croire que le pro- 
» duit tinctorial de la fabrique de M: Souchon 
» était d'une qualité supérieure; et afin de vérifier 
‘» ce fait d'une manière authentique , elle a or- 
» donné que de nouvelles expériences seraient 
« faites incessamment. » 


180 Société royale d'Agriculture 


ÉVÉNEMENS. 


ER | 


Non content de prendre à vos travaux l'intérêt 
le plus vif, M. le comte de Tournon s'empressa 
d'y concourir. La communication qu'il voulut 
bien vous faire , et qui est l'un des plus beaux 
ornemens de la présente notice , cette communi- 
cation importante devait être suivie de beaucoup 
d’autres. Mais le Roi ayant appelé M. / comte 
de Tournon à d’autres destinées, la province a 
perdu un administrateur, homme d'état, et la 
société le plus généreux appui. 

Tant de regrets ont été heureusement réparés 
par le digne successeur de M. de Tournon. 

En effet , M. le comte de Brosses avait à peine 
pris les rènes de l'administration de ce beau dé- 
partement , qu'il fut facile de voir combien ses 
intentions étaient pures, ses vues élevées, son 
expérience consommée ; il en donna des preuves 
éclatantes. 

Ce magistrat ayant agréé la présidence d’hon- 
neur que M. de Tournon avait laissée vacante, 
il est venu au milieu de vous, et vous lui avez 
exprimé vos sentimens par l'organe de M. Co- 
chard, votre président ordinaire, qui s’est ex- 
psimé ainsi ; 


de Lyon. 181 

» Monsieur le Préfet, l'empressement que 
vous mettez à venir dans cette enceinte, en- 
courager par votre présence nos paisibles tra- 
vaux , décèle le magistrat éclairé, l'adminis- 
traiteur vigilant, le bon citoyen. Enflammé 
du désir de faire le bien, de signaler d'une 
manière glorieuse les fonctions importantes qui 
vous sont confiées, votre premier soin est de 
chercher à connaître et les hommes et les ins- 
titutions qui peuvent éclairer votre marche, fa- 
voriser vos projets , concourir à vos vues. Le 
nom que vous portez , célèbre depuis long-temps 
dans les annales de la littérature , la réputation 
que vous avez acquise dans l'exercice d’autres 
préfectures , par la droiture de vos sentimens ,. 
par la loyauté de votre conduite, par la sagesse 
de vos mesures, nous avaient déjà fait présager 
votre amour pour les sciences et les arts, et ac- 
quérir la certitude que , comme votre prédéces- 
seur , M. le comte de Tournon, vous étayeriez 
ceux qui les cullivent de toute votre influence. 
La démarche que vous faites en ce moment nous 

en est une preuve. » 

». Les sociétés d'agriculture, organisées vers le 
milieu du derniersiècle , ont plus contribué qu'on 
ne pense aux améliorations nombreuses que le 
premier des arts a reçues de nos jours. Les bonnes 


183 Société royale d Agriculture 

méthodes qu'elles ont propagées , les innovations 
salutaires qu'elles ont introduites , les exemples 
qu'elles ont donnés, ont fait germer une foule 
de connaissances précieuses , brisé les entraves de 
la routine, et préparé d'innombrables succès. 
Mais ces sociétés auraient bientôt cessé d'être 
utiles , leur zèle n'aurait pas tardé à se ralentir , 
si Padministration n’était venue sans cesse les 
mettre en évidence , exciter leur émulation, 
solliciter leurs avis, consulter leur expérience et 
les associer ainsi aux grandes conceptions qu'elle 
formait pour la prospérité de l'état. La faveur 
dont l'autorité a investi les sociétés d’agriculture, 
la confiance qu'elle leur a témoignée, ont appelé 
sur elles l'estime et la considération publiques , et 
en retour l'autorité a recueilli des renseignemens 
sûrs , des observations judicieuses , et la facilité 
de répandre dans toutes les classes, les instruc- 
tions qu’elle juge nécessaires pour le progrès des 
arts; ainsi par un heureux concours de bienveil- 
lance et de dévouement , un meilleur ordre de 
choses s’est établi, et plus de bonheur en a été la 
conséquence naturelle. » 

» La société d'agriculture de Lyon, organisée 
dès l'année 1761 , dissipée durant les orages ré- 
volutionnaires, et reconstituée au moment où le 
calme reparut , n’a négligé aucun moyen de rem- 
plir la noble tâche qu'elle s'était imposée. Les 


de Lyon. 183 
mémoires qu'elle a publiés, les concours qu'elle 
a établis , ses comptes rendus attestent les ser- 
vices dont la science agricole lui est redevable. » 

» Le sol du département est en général ingrat, 
extrêmement coupé , montueux , exposé à toutes 
les intempéries , et offrant une multitude d’as- 
pects défavorables ; cependant il est un de ceux 
du royaume qui supporte le plus de contribu- 
tions proportionnellement à sa surface , et celui 
peut-être où l’art de cultiver la terre soit le plus 
perfectionné. » 

» Dans les montagnes du Beaujolais la navette 
est venue au secours des habitans qui ne trou- 
vaient pas dans les produits de leurs récoltes les 
moyens de subsister. Le temps où ils ne peuvent 
vaquer au travail des champs est employé à tisser 
de la toile ou des étofles de coton, et l’aisance 
qu'ils obtiennent tourne au profit de l'agricul- 
ture. » | 

» ÂAiülleurs, le propriétaire cherche à tirer tout 
le parti possible du sol qui lui est échu. Là il 
convertit des rochers, des landes, en riches vi- 
gnobles ; les pentes les plus roides sont cou- 
vertes de ceps ; des murs en terrasse , rappro- 
chés les uns des autres, reçoivent la destination 
de soutenir les terres. » 

» Ici il plante le mürier , élève le ver à soie, 
et supplée de cette manière les ressources que ne 
peuvent lui fournir les céréales. » 


184 Société royale d'Agriculture 

» Plus loin , il multiplie les arbres à fruit, 
s'attache aux espèces qui conviennent à la loca- 
lité, eten fait un commerce lucratif. » 

» Dans d'autres communes , il sème la gaude 
propre à la teinture, dont il trouve à Lyon un 


débit facile. » 
» Le Mont-d'or se procure dans l'éducation 


des chêvres et dans les excellens fromages qui en 
proviennent , une branche d'industrie qui le 
dédommage de ses soins. »° 

» Plusieurs villages se livrent à la culture des 
melons etd'uneinfinité de légumes qu'ils vendent 
à Lyon ou dans les villes qui les avoisinent. » 

» Ces diverses spéculations annoncent les pro- 
grès de l’agriculture. La société n’y a point été 
étrangère. » FE 

» Mais il est encore d'autres objets susceptibles 
d'amélioration , et qui réclament toute la solli- 
citude , tout l’intérêt, toute l'attention de l'ad- 
ministrateur. » 

» Lyon, ville importante par son commerce , 
par ses manufactures et par sa population, Lyon 
dont le gouvernement ne saurait trop encourager 
les efforts , soutenir et diriger l'activité , tire les 
matières premières qui alimentent ses ateliers de 
contrées lointaines; ne serait-il pas d'une sagesse 
infinie de l'affranchir de ce tribut en multipliant, 
autant que possible, dans son territoire la plan- 
tation du müûrier, en surveillant les filatures , 


de Lyon. 185 
en introduisant la culture de la guède ou pastel, 
du safran et d’une infinité d’autres plantes tinc- 
toriales , en utilisant les poils de nos chèvres, et 
en propageant l'éducation des moutons? Ainsi, 
nous verrions successivement s’accroître l'indus- 
trie agricole , et seconder de cette manière l'in- 
dustrie manufacturière. » 

_» Je ne pousserai pas plus loin ces réflexions, il 
me suflit d’avoir indiqué le bien qui restait à 
faire , pour être certain que ce sujet deviendra 
l'objet continuel de vos profondes méditations. 
La société dont il m’est flatteur d'être en cet 
instant l'organe, s'empressera dans toutes les 
circonstances où son concours pourra être néces- 
saire, de vous donner des preuves de son zèle, 
de sa bonne volonté et de son entier dévouement.» 


En conformité de vos statuts, le renouvelle- 
ment de votre bureau devait avoir lieu cette 
année, M. Cochard a été réélu président à la 
presqu'unanimité des suffrages ; M. Janson l'aîné, 
juge au tribunal de première instance, a été 
nommé vice-président à la place de M. le comte 
Biverieulx de Chambost, qui, par suite d'une lon- 
gue et funeste maladie, s’est retiré à la cam- 
pagne; M. Grognier a été maintenu dans les 
fonctions de secrétaire ; il en a été de même de 
M. Zeroy-Jolimont | dans celles de secrétaire- 
adjoint, chargé des archives, Conformément à 


186 Société royale Agriculture 

un article réglementaire jusqu'ici sans exécu- 
tion, vous avez procédé à la nomination d'un 
second secrétaire-adjoint , et M. le docteur Terme 
a été appelé à cette fonction. M. Deschamps père 
qui n'assistait pas à cette séance d'élection , a été 
réélu trésorier à l'entière unanimité des suffrages. 

Quatre noms honorables ne sont plus sur la 
liste des titulaires, Ceux de MM. Fantet et Char- 
relon , démissionnaires ; ceux de MM. Barre père 
et Sainneville qui , ayant cessé d’habiter Lyon , 
sont devenus correspondans. Ces pertes ont été 
réparées par l'admission de quatre nouveaux ti- 
tulaires : MM. Bertrand, Poidebard, Gonin et 
Coste. 

Le premier, qui est ingénieur des ponts et 
chaussées , et ancien élève de l’école polythecni- 
que , s'occupe avec zèle du mécanisme des ins- 
trumens aratoires, et pour quelques-uns il a 
proposé d'heureux perfectionnemens. 

M. Poidebard a établi aux portes de Lyon une 
des plus belles magnoneries du royaume ; il y 
élève depuis plusieurs années la belle race des 
vers à soie blanche. Il a adapté à ses filatures, 
avec le plus grand succès , les ingénieux appa- 
reils de notre confrère M. Gensoul ; les nombreux 
müriers qu'il a plantés se distinguent par leur 
port et leur vigoureuse végétation. Depuis long- 
temps sa place était marquée parmi vous. 


de Lyon. 187 

M. Gonin pouvait seul réparer la pérte que la 
société avait essuyée par le changement de do- 
micile de M. son frère. Il a concouru avec lui à 
Ja renommée des fabriques lyonnaises, sous le 
rapport de la teinture. Non content de pratiquer 
avec la plus grande distinction l'art du tein- 
turier , notre nouveau confrère s'occupe encore 
avec un zele éclairé de celui du mécanicien. Il a 
inventé ou perfectionné plusieurs instrumens 
employés dans ses ateliers. 

M. Coste, conseiller à la cour royale et admi- 
nistrateur des hospices , s’est livré à des recher- 
ches profondes sur les antiquités de notre pro- 
vince; il à réuni les matériaux qui peuvent ser- 
vir à l'histoire de l’agriculture comme de l'indus- 
trie dans cette belle contrée. Ses lumières vous 
seront précieuses dans toutes les questions rela- 
tives à la statistique , science nouvelle , qui n'est 
pas l’objet le moins important de vos travaux. 

Tandis que la liste des titulaires s’enrichissait 
de ces noms recommandables, vous inscriviez 
sur celle de vos correspondans les noms de MM. 
Seguin, d'Annonay, l’un chimiste habile, l’autre 
grand manufacturier; ceux de M. Aimé Lair, 
secrétaire perpétuel de la société de commerce, 
agriculture et arts de Caen, et de M. Raulhac, 
propriétaire et adjoint à M. le Maire d’Aurillac. 
Le premier était connu de vous par les actes de 


188 Société royale d'Agriculture 

la société savante dont il est le digne interprète; 
le second vous a adressé, sur les antiquités de 
l'Auvergne , une dissertation pleine d'intérêt. 

Pendant l'impression de cette notice, de nou- 
veaux changemens sont survenus dans votre 
liste, M. Vatel, qui était professeur à l'école 
vétérinaire de Lyon, est passé en la même qua- 
lité à l'école d'Alfort ; ayant laissé une place va- 
cante dans la classe des titulaires, son nom a dû 
être inscrit sur la liste des correspondans. Sur 
cètte même liste vous venez de placer M. Chesnel, 
lieutenant-colonel en retraite, et rédacteur du 
journal polymatique du département de l'Hérault. 

Une question importante a été agitée dans 
plusieurs de vos séances , celle de l'établissement 
d’un journal mensuel à la place du compte rendu 
annuel de vos travaux. 

Parmi les motifs qui ont été développés en 
faveur de ce changement, celui qui a fait sur vous 
la plus grande impression , c'est la facilité qu'of- 
frirait un journal mensuel pour porter sans dé- 
lai à la connaissance du public les découvertes 
utiles. D'autres motifs vous ont fait ajourner cette 
mesure ; mais vous avez voulu que sans attendre 
la publication du compte annuel de vos travaux , 
quelques-uns de vos mémoires les plus impor- 
portans fussent imprimés et publiés à part, et 
que des exemplaires en fussent mis en réserve 
pour être joints à la notice de vos actes. 


de Lyon. 189 
Deux ouvrages vous ont paru très-dignes de 
cette distinction, l'un est un rapport présenté 
par M. le docteur Terme, sur l'établissement de 
M. Poidebard, Y'autre un mémoire de M. Bon- 
nafous, correspondant à Turin, sur une édu- 
cation de vers à soie. 
(Voyez à la suite de cette notice). 


SUIET DU PRIX 
Sur la culture 


des Abeilles. 


190 Sociclé royale d'Agriculture 
PROGRAMME 


D'un Prix pour la culture des Abeilles dans le 
département du Rhône, et de plusieurs Primes, 
proposées par la Société » pour étre décernés en 
1823 el 1824. 


Ea 182 3 


No content d'avoir tracé avec autant de méthode 
que de clarté l'histoire naturelle des abeilles, et 
d’avoir fait connaître les moyens de produire les 
essaims artificiels, d'après la méthode de M. Lombard , 
M. Lacéne , l'un des membres de la Société, a offert 
une somme de cent francs pour encourager un genre 
d'industrie presque inconnu dans notre département, 
et qui néanmoins pourrait y être établi avec avantage. 

La Société , acceptant avec reconnaissance Les offres 
généreuses de M. Lacène, a arrêté : 


1.° Qu'un prix de cent francs , auquel serait ajoutée 
uue grande médaille d'argent à l'effigie de Rozier ; 
serait décerné au cultivateur qui aurait fait avec le 
plus de succès des Essaims artificiels d'après la mé- 
thode de M. Lombard. 

2.2 Que la grande médaille d'argent serait ac- 
cordée à celui qui, par des procédés quelconques, 
aurait cultivé la plus grande quantité d'abeilles. 

3.0 Que les concurrens présenteraient, à l'appui 
de leurs mémoires , des certificats constatant leurs 
opérations et leurs succès. 

4.2 Que le concours auquel les cultivateurs du 


de Lyon. 
département pourraient être seuls admis, et même 
en en exceptant les membres de la Société , serait 
clos le 1." décembre 1823. 


En 1825. 


Il y a beaucoup de très-bonnes charrues à oreilles 
fixes ; elles sont très-propres à labourer en planches 
bombées. et en sillons Les terres humides qui re- 
tiennent l'eau ; mais existe-t-il de bonnes charrues à 
oreilles mobiles , autrement dites à tourme-oreille , 
avec lesquelles on puisse labourer à plat les terres qui 
ne retiennent pas l'eau , telles que celles de la 
majeure partie de notre département, de celui de 
l'Isère, etc. ? 

Comme une charrue de ce genre serait fort utile, 
la Société accordera une prime à celui qui la fera 
connaître; elle devra être assez solide pour labourer 
à plat, à la profondeur de 9 à 12 pouces, en em- 
ployant quatre chevaux ou quatre bœufs de force 
moyenne ; elle sera légère, afin qu'étant attelée de 
deux bœufs ou de deux chevaux également de force 
moyenne , elle puisse labourer à la profondeur de 6 
à 8 pouces, profondeur ordinaire du labourage des 
meilleures charrues à tourne-oreille , lesquelles ont 
le défaut de ne pas tenir la raie nette et de ne pas 
bien retourner la terre. 

Ou désire en même temps, que cette nouvelle char- 
rue soit d'un entretien facile et peu coûteux, qu'elle 
puisse même remplacer la charrue à oreilles fixes et 
ouvrir sans effort les raies d'écoulement que l’on fait 
ordinairement dans les terres labourées à plat. 


La Société avait proposé, l’an deruier, une prime 
pour des expériences comparatives sur le nouvel en- 


Lre PRIME. 

Indiquer la 
meilleure Char- 
rue à tourne- 
oreille, pour la- 
bourer à plat à 
la profondeur 


de gà rapouces- 


o.me PRIME. 


Comparer 


grais végéto-minéral , dit Gadoue artificielle, et le les eflets de 


l’engrais de li- 
tière avec ceux 
d'un compost 
solide ou liqui- 
de. 


3,mt PRIME. 


Comparer les 
résultats de la 
culiure du fro- 
ment après les 

pommes de 
terre , et après 
d’autres plan- 
tes, telles que 
le trèfle , le 
chanvre, etc. 


192 Société royale d'Agriculture 
produit des fosses d'aisance ; elle a cru devoir cetté 
année, donner un champ plus vaste aux agronomes 
qui dirigent leurs recherches vers la préparation des 
composts tant solides que liquides; elle les invite à 
comparer les effets du fumier de litière pure avec un 
engrais factice quelconque, n'importe le règne natu- 
rel qui en aura fourui les matériaux ; elle désire que 
le compost et le famier d’écurie soient employés 
simultanément pour une récolte de même nature et 
sur un champ qui ait au moins l'étendue de deux 
bicherées ( environ 28 ares. } 

Les concurrens feront connaître exactement les 
procédés de fabrication du compost qu'ils auront 
pratiqués , les dépenses qu'ils auront faites , et les 
résultats qu’ils auront obtenus. 


En 1824. 


C'est une pratique assez répandue de faire suc- 
céder le froment aux pommes de terre , cependant 
plusieurs agronomes éclairés pensent que le froment, 
semé immédiatement après la récolte de ces tubercules, 
qu'on ne plante jamais sans engrais, produit en 
général moins que celui qui succède au trèfle, au 
chanvre, etc, ou à la jachère , après un bon fumage, 

C'est pour mettre hors de doute les effets de ces 
modes d'alternats, que la Société propose une prime 
pour un essai comparatif de culture du froment, 
après la pomme de terre, et après d'autres plantes 
qui laissent dans la terre de l’eugrais, telles que le 
chauyre, le trèfle, etc. La Société désire que cette ex- 
périence soit faite sur une étendue de terrain au 
moins de 2 bicherées lyonnaises (27 ares 64 centiares.)- 


de Lyon. 

Après un hiver rigoureux qui a fait périr beaucoup 
d'oliviers, et qui en a mis un plus grand nombre 
hors d'état de donner, de plusieurs années, une bonne 
récolte, on sent plus que jamais combien il serait 
avantageux d'étendre la culture des végétaux herbacés 
oléiféres. Parmi ces plantes, il en est trois déjà cul- 
tivées autour de Lyon, dont la Société désirerait de 
connaître les produits par une expérience comparative. 
La première est Le Colza, brassica oleracea campestris, 
dont la propagation dans le Lyonnais est due à notre 
illustre Rozier. La seconde est le pavot des jardins 
(papaver somniferum ) , que M. Lortét cultive avec 
succès depuis deux ans. La troisième est la moutarde 
blanche ( sinapis alba), qui à été l’objet d'un heureux 
essai tenté à la Guillotière par M. Poidebard. 

La Société propose aux cultivateurs du département 
de semer chacune de ces trois plantes au moins sur 
une bicherée lyonnaise, de tenir note des frais de cul- 
ture, de la quantité de graines employées , des pro- 
duits obtenus. Uné prime sera la récompense de celui 
qui aura le mieux rempli ces conditions: 


L'un des correspondans les plus distingués de la So- 
ciété, M. Duvaure, qui a écrit sur l'éducation des vers 
à soie un ouvrage estimé, regarde comme trés-avan- 
tageuse la pratique de greffer Les müriers. D'un autre 
côté des éducateurs penchent pour Le mürier sauvageon; 
et malgré sa longue expérience, le respectable Dan- 
dolo n'a pas osé décider cette question. 

C'est afin d'arriver à la solution de ce problème 
intéressant , que la Société propose d'élever au moins 
une once de vers à soie avec de la feuille de mürier 
greffé , et la même quantité avec de la feuille de sau- 
vageon. Elle désire que ces éducations aient lieu simul- 


19 


195 : 


gume Prime, 
Culture com= 
parative de 
trois plantes 
lé 
colza ( bras- 
sica 


oléifères , 


oleraceæ 
campesfris ) 
le pavot des jar- 
dins, (papaver 
somniferum ) ; 
et la moutarde 
blanche , ( si= 


napis alba: ) 


bime PRIME: 


Comparer, 
pour l’éduca- 
tion des vers à 
soie , la feuille 
du müriergrefté 
avec celle du 

mürier non 
greffé , vulgai- 
rementditSau= 
vageoti 


194 Société Royale d’Agricullure 

tanément , dans le même local , en employant les mé. 
mes soins; et autaut que possible en donnant des 
feuilles fournies par des arbres, nourris sur Le même 
sol, etc. On tiendra note des quantités respectives 
de feuilles consommées, de la durée de l'éducation, 
et de tous ses produits. 


Conditions générales à remplir par les concurrens. 


Chacune de ces primes consistera en une médaille 
de cent francs ou en la même valeur en numéraire, 
au choix des concurrens couronnés. 

Pour le prix et les primes à décerner en 1833, 
les mémoires doivent être arrivés avant le 1.°* 
décembre de cette année ; et c’est pareillement 
avant la même époque de 1824 qu'on doit en- 
voyer les mémoires pour les concours de cette 
année. (Ces termes sont de rigueur.) Ils seront 
adressés à M. Grognier , Professeur vétérinaire et 
Secrétaire de la Société, ou à tout autre membre du 
bureau. 


Les coucurrens pour les primes , doivent être do- 
miciliés dans le département du Rhône. Ils sont libres 
de faire connaître leurs noms; les membres ordi- 
naires de la Société ne sont pas admis au concours. 


de Lyon. 195 


TABLEAU 


DE LA SOCIÉTÉ ROYALE 
D'AGRICULTURE 


En 1823. 


PP se or PES 


BUREAU, 


MEessreurs 


Le Comte de Brosses , O :% , Gentilhomme de la 
Chambre du Roi, Maître des requêtes au Conseil 
d'état, Préfet , Président d'honneur. 

Le Baron Rawsaun, &, Maire de Lyon, Président 
d'honneur. 

Cocmarp , avocat en la Cour royale de Lyon ;. 
Président. 

JANSON aîné, juge au Tribunal de première instance , 
Vice-président. 

Groenier , Professeur Vétérinaire, Secrétaire. 

Leroy-Jorrmonr , Secr.-adjoint , chargé des archives. 

TERME, Docteur en Médecine , Secrétaire-Adjoint. 

Descamps père, Trésorier. 


MEMBRES TITULAIRES. 
MéssiEurs 
1798. Rieussec >» &, Conseiller honoraire de la Cour 
royale , place Louis-le-Grand. 


Grognier , Professeur à l'école royale vétérinaire, 


196 Société Royale d'Agriculture | 
18or. Le chevalier Nugues, 4%, président de la Cour 
Royale, rue du Peyrat. 

Deschamps père, pharmacien , rue St-Domini- 
que , n° 73. 

Mognat de l'Ecluse, propr., rue de la Sphère. 

1802. Carrel , propriétaire, quai de la Baleine. 

Bellet de St-Trivier , propr. rue de la Charité. 

Faissolles , propriétaire, à Vaize. 

Le comte de Moïdière, x (Othon ), adminis- 
trateur de la pépinière départementale, place 
Louis-le-Grand. 

1804. Passerat de Lachapelle , #, propriétaire, rue 
du Peyrat. 

Le Comte Riverieulx de Chambost , DK %, 
Colonel de la Garde nationale, rue du Peyrat. 

1806. Leroy-Jolimont, propr., place du Change. 

Lombard, %#, propriétaire, rue Sala. 

1807. Mognat de Licrgues, propr., rue de la Barre. 

Eynard, médecin, place St-Clair. 

Madiot, directeur de la pépinière départemen- 

tale, clos de l'Observance. 

1810. Pelletier, pharmacien , place du plätre. 

De St-Didier , propriétaire, rue. Sala. 

1611. Socquet, ancien professeur de la faculté à l'Aca- 
démie de Lyon, place des Carmes. 

Guerre, avocat, aux Célestins. 

1812. Cochard , avocat, place St-Jean. 

Le Chevalier Delhorme, # , membre de la 

Chambre des Députés, rue du. Peyrat. 
1813. Robin de Beauregard, &, propr. , rue du Plat. 


de Lyon. 197 
Lacèné, propr., place Louis-ic-Grand. 
Dujat-des-Alimes , propr., pl. Louis-le-Grand. 
Rainard , professeur à l'Ecole royale vétérinaire. 
1814. Guillemet ; ancien professeur de la faculté de 
l'Académie de Lyon, à Serin. 
Honoré Thorombert, avocat, aux Célestins. 
Barre fils, pharmacien , place de la Comédie. 
1817. Dugas, adjoint à la mairie de Lyon ; rue royale. 
Muthuon ; ingénieur en chef des mines et usines, 
rue Rozier. 
Deschamps fils ; pharmacien ; re $t-Dominique. 
Bouchard-Jambon , mécanicien, rue de Vaubecour. 
Cazot , propriétaire, rue du Peyrat. 
‘ 2818. Le Chevalier de Martinet, 5%, Colonel en 
retraite , rue Sala. 
Le docteur Terme , rue du Peyrat. 
Bouthier de Borgard, rie du Plat. 
Jacquard, % mécanicien , rue Vaubecour. 
Rémond , propriétaire, rue des Augustlins. 
Janson , chirurgien-major de l'Hôtel-Dieu. 
Acher, conseiller à la Cour royale, quai de la 
Baleine: 
Basset de la Pape, :% rue St-Dominique. 
Tissier, professeur de chimie au musée des arts. 
Jauson, juge au tribunal civil. 
1819. Balbis , professeur de botanique, à la Déserte. 
18:9. Billon, propriétaire, petite rue des Feuillans. 
Michel, propriétaire , rue Puits-Gaillot. 
Monnier , Avocat-général , rue St-Dominique. 
1820. Trolliet, médecin , rue Puits-Gaillot. 


198 » Société Royale d'Agriculture 
1821. Cavenne , ingénieur en chef des ponts et 
chaussées, rue du Plat. 
De Fréminville , conseiller de préfecture. 
Le marquis d'Herculais , administrateur de la 
pépinière départementale. 
Mottard , directeur de la poste aux chevaux. 
Gensoul , artiste mécanicien. 
1822. Foudras, naturaliste. 
Gras, conseiller à la cour royale. 
1823. Berthaud , ingénieur des Ponts et chaussées. 
Poidebard , négociant, propriétaire. 
Gonin, chimiste , temturier. 
Coste, Conseiller à la Cour royale. 


ASSOCIÉS VÉTÉRANS. 


Messieurs 


Chancey , à Belleville. 

Frossard , naturaliste, à Partis. 

Lanoix , pharmacien, à la Guillotiére. 

Le Camus , à Paris. 

Roux, professeur émérite de la faculté des sciences, 
à Lyon. 

Willermoz, rue des Fantasques. 


Mouton-Fontenille , professeur d'histoire naturelle. 
Rey-Monléan, propriétaire. 


de Lyon. 199 
ASSOCIÉS CORRESPONDANS. 


Messreurs 


Albanis de Beaumont, à Vernas. 

Le Comte d’Albon, % , à Avranges. 

Amoreux, médecin, & Montpellier. 

Arthaud de la Ferrière, # , à Pierreu. 

Arthaud , propriétaire, à Arles. 

Aulanier , propriétaire. 

Baunier , ingénieur des mines, à Paris. 

Begon, propriétaire , à Ste-Hyppolite. 

Belleval, propriétaire , à Montpellier. 

Boesse, %, propriétaire, à la Thenaudière. 

La Comte de Bondy, (C. #), à Paris. 

Bonaire, &, ancien Préfet des Hautes-Alpes. 

Bravet, médecin , à Annonay. 

Brébisson , propriétaire, à Falaïse. 

Buniva, professeur de médecine, à Turin. 

Busson, ingénieur , à Paris. 

Cadet-de-Vaux, de la Soc. d'Agr. de la Seine, à Paris, 

Cartier-Trolli, propriétaire, & Trolli. 

Le Comte Chaptal, de PInst., ( G. # 4), à Paris. 

Le Comte Chasset, ( G. &), à Paris. 

Le Comte Chabrol de Crousol , #& conseiller d'état, 
à Paris. 

Chenaud-Desportes , propriétaire , au Mans. 

Chirat aîné, % , juge de paix , à Souzy. 

Clément, ancien juge à la Cour de justice criminelle, 
à Montpellier. 


200 Société Royale NE ilure 

Cuvier, le baron C.# , secrét. perpét. de institut, 
à Paris. 

David, propriétaire, au Ripeau, pi “és de Tours. 

De la Chence, à la Chance. 

Le baron de Gérando ( O &}, de l'Institut, à Paris, 

Decandole , de l'académie des sciences, à Genève. 

Depoix-Marescreux, propriétaire , 4 Marescreux. 

De Rosni, à Valencienne, 

Deschamps, propriétaire, à Eausanne. ‘ 

De Truchi, %&, officier de la garde royale , à Paris. 

De Vellay, professeur de mathématiques , à Lausanne. 

Le marq. d'Herbouville , pair de France C. #, à Paris, 

Dubouchage de Brangues, propriétaire, à Brangues. 

Dubouchage, propriétaire, à Grenoble. 

Dumarché, propriétaire, à Pont-de-Vaux. 

Dupalais, propriétaire, & Valence. 

Duvaure, propriétaire, à Crest, 

Faure Biguet, propriétaire, & Cresé. 

Fleury, propriétaire, à St-Vallier. 
inguerlin , négociant , en Suisse. 

Le Comte François de Neufchâteau, de l'Institut, 
( G % ), à Paris. 

Gallois, ingénieur des mines, à Paris. 

Gasparin, %, propriétaire , à Oranges. 

Groflier, médecin, & Chalons-sur-Marne: 

Guettat , mécanicien , à Rive-de-Giers. 

Guérin, médecin , à Avignon. 

Hauteville, propriétaire, à Vevay. 

Le Vicomte Héricard-Ferrand de Thury ,O %, ingé- 
mieur en chef des mines, à Paris. 


de Lyon. 201 
Hurtrel-d'Arboval , à Boulogne-sur-mer. 
Huzard, % 4%, membre de l'institut, & Paris. 
Huzard fils, médecin-vétérinaire , à Paris. 
Jussieu, % 4, membre de l'Institut, à Paris. 
Labbe , propriétaire, à Menufamille. 
Le Comte Lacépède , (G.O.:% }, membre de l'Institut 

à Paris. 
Lamarck, #, membre de l'Institut, à Paris. 
Lamartine , propriétaire , 4 Mäcon. 
Lapierre, professeur d'histoire naturelle, à Roanne. 
Le Comte de Laurencin, % %, à la Chassaigne. 
Le Duc de Larochefoucauld , 5%, Q. %) pair de 
France , à Liancourt. 

Lavalette, propriétaire, 4 Grenoble. 
Latournelle, propriétaire, à Coligny. 
Leroy-Champfleury , propriétaire , à Genay. 
Martin aîné, #, médecin , à St-Rambert. 
Narcel de Serres, naturaliste, à Montpellier. 
Matthieu de Dombasles, à Nancy. 
Maurice , propriétaire, à Genève. 
Menjot-d'Elbenne , propriétaire, & Couléon. 
Molard , #, membre de l'Institut, à Paris. 
Moscati, président de l'Institut Italien, à Milan. 
Le Comte Najac, CC. % ) conseiller d'état, & Paris. 
Noel, % , professeur d’éloquence, à Paris, 
Palmieri, botaniste, à Milan. 
Pictet de Rochemont , propriétaire , à Genève. 
Le Chevalier Pierrard, % , à Verdun. 
Pini, professeur de botanique, & Milan. 
Le Marquis de Poncins, % , maire de Feurs. 


202 Societé Royale d'Agriculture 

Posuel de Verneau, %, à Paris. 

Poutet, chimiste, à Marseille. 

Prost, médecin , à Paris. 

Rast-Dezarmaus , # , ancien Secr.-gén. de la Préfect. 
au Mans. 

Raulhac , à Aurillac. 

Raymond, %, professeur de chimie, à St-Vallier. 

Hippolyte de Rozières , & Messimi. 

Riche, propriétaire , à St- Alban. 

Le Chevalier Riboud , #% , à Bourg. 

Le Comte de Saint-Vallier, ( G. O. %# ), pair de 
France, à Paris. 

Saint-Amans , à Agen. 

Saloz, vétérinaire, à Odessa. 

Scrheiber , directeur des mines, à Alemont. 

Seguin , chimiste , 4 Annonay. 

Seguin, manufacturier , & Annonay. 

Servin-Cornon, propriétaire, à Cornon. 

Souligné , propriétaire, à Foule-Tourte. 

Silvestre , membre de l'Institut, $#, à Paris. 

Tessier , de l'académie des sciences, # 4, à Paris. 

Thiebault-de-Berneaud , l'un des bibliothécaires de 
la Bibliothèque Mazarine , à Paris. 

Thouin , membre de l’Institut , &, à Paris. 

Thouin , jardinier en chef du jardin des plantes , 
à Paris. 

Trouflaut, ancien professeur de botanique, à Autun. 

Vaivolet, propriétaire , à St-Lager. 

Valentin, $ 4, médecin, à Nancy. 

Valot, professeur d'histoire naturelle, 4 Dijon. 


de Lyon. 203 
De Varenne-Fenille, % , à Bourg. 
Valoud , propriétaire, à Fleurieux sur l Arbresle, 
Vidaillan , propriétaire, à Auch. 
Vitalis, propriétaire, à St-Vallier. 
Volta, professeur de physique, à Pavie. 
Waton, médecin, à Carpentras. 


Fin du Tableau des Membres. 


TABLE 
DES MATIÈRES. 


Considération sur la physiologie des plantes, dans 
ses rapports avec l'agronomie. 


STATISTIQUE. 


Notice sur Longes et Tréves ; par M. Cochard. 

Rapport sur la statistique des récoltes du départe- 
ment en 1822, et sur le hétail existant à cette 
époque ; par le méme. 

Mémoire sur la statistique des chevaux du Rhône; 
par M. Vatel. 

Mémoire sur les dunes du golfe de Gascogne , et 
description des moyens employés pour les fixer ; 
par M. /e comte de Tournon. 


ÉCONOMIE RURALE. 


Notice sur l’art de creuser les canaux, d'ouvrir 
des fossés et des routes , par des procédés éco- 
nomiques ; par M. De Lachapelle. 

Notice sur une Charrue charolaise ; par M. De 
St. Didier. 

Sur la Ptéride aquilline ; par M. Madiot. 

Sur une nouvelle variété de figuier , à gros fruit 
noir, en forme de fruit d'aubergine; par le 
raême, 


15 


24 


37 


48 


5t 
53. 


58 


de Lyon. 

Sur une variété de noisetier à feuilles pourpres ; 
par par le méme. 

Sur trois espèces d'érables indigènes ; par le méme. 

Sur une espèce d'orme égyptien ; par le méme. 

Sur un tuya peu connu ; par le méme. 

Sur le poirier du Mont Sinaï ; par le /e mére. 

Sur le pavia de Floride , à longues grappes; par 
le méme. 

Sur deux projets de plantation; par M. Fuissolle. 

Sur un ouvrage relatif à la culture du mûrier ; par 
M. Bonnafous , rapporteur M. Fuissolle. 

Sur la culture des müriers et l'éducation des vers 
à soie ; par M. Chancey. 

Rapport sur un mémoire de M. Rubat, relatif au 
renouvellement de la vigne; par M. Janson 
l’aine. 

Sur le procédé de M. Rubat; par M. Rey-Mon- 
léan. 

Nouvelles observations sur le procédé Gervaisien ; 
par le même. 


ART VÉTÉRINAIRE. 


Sur la ferrure des grands animaux domestiques ; 
par M. Vatel. 


Notice sur le troupeau de la Rouge; par M. de La- 
chapelle. 


‘HISTOIRE NATURELLE. 


Notice sur les insectes utiles et les insectes nuisibles 
du département ; par M. Foudras. 


205 


5G 
57 
6a 
61 
62 


64 
65 


66 


94 


99 


206 Societé royale d'Agriculture 

“Considérations sur l'exploration du département 
sous le rapport de l'histoire naturelle ; par M. 
Tissier. 

Sur Le Carex plantaginæa ; par M. De Moidière. 


ARTS UTILES. 


Expériences de teinture avec le Bleu Raymond, 
soumises à la Société, par MM. Raymond fils 
et Souchon ; rapporteur M. Tissier. 

De la filature des soies à la vapeur; par M. Gensoul. 

Sur la mouture des céréales, et la percussion des 
fluides ; par M. Faissolle. 

Notes sur diverses machines propres à battre les 

- blés; par MM. Chancey et Billon. 

Sur une machine à braquer le chanvre ; par M. 
Billon. 

Sur une échelle-brouette présentée à la Société ; 
par M. Bonnafous, et décrite par M. De St. 
Didier. 

OUVRAGES 1IMIPRIMÉS OFFERTS À LA SOCIÉTÉ. 

Ouvrages périodiques adressés à la société. 

Rapport sur des ouvrages imprimés ; par M. 
Balbis. 

Rapport sur des brevets d'invention qu'ont obtenu 
des Lyonnais ; par M. Faissolle. 


Rapport sur les annales de la société d'Orléans : 


par M. Remond. 

Rapport sur le procédé de décuvage de M. Dude- 
vant; par M. Deschamps père. 

Rapports verbaux ; par M. Tüissier. 


III 
120 


de Lyon. 207 


RÉCOMPENSES. 


Médailles d'or et médailles d'argent pour la cul- 
ture du mürier et l'éducation des vers à soie; 
rapporteur M. Faissolles. 171 

Médailles d’or à M. D’Eglise, pour un perfection- 
nement dans la fabrication des étoffes de soie ; 
rapporteur M. Gensoul. 175 

Médaille d'argent à M. Souchon, pour fabrication 
en grand de l'hydrocyanate ferrugineux de po- 


tasse; rapporteur M. Tissier. 178 
ÉVÉNEME NS. ; 180 
PROGRAMME 


D'un Concours et d'un Prix pour la culture des 
Abeilles dans le département du Rhône , et de 
plusieurs Primes, proposées par la Société, pour 
être décernés en 1823 et 1824. 189 


En 1823. 
SuIET pu Prix. 


De la culture des Abeilles. ibid. 
1. Prime. Indiquer la meilleure charrue à 
tourne-oreille , pour labourer à plat, à la pro- 
fonudeur de g à 12 pouces. 190 
2.mMe Prime. Comparer les effets de l’engrais de 
litière avec ceux d’un compost solide ou liquide. ibid 
3.M€ Prime. Comparer les résultats de la culture 
du froment après les pommes de terre, et après 
d'autres plantes, telles que le trèfle, le chanvre, 
etc, 10 


… 


208 Societé royale d'Agricullure , etc. 
£me Prime. Culture comparative de trois plantes 
oléifères , le colza (brassica oleracea campes- 
tris ); le pavot des jardins, (papaver somnife- 
rum ); et la moutarde blanche, ( sinapis alba). 192 
b.me Prime. Comparer, pour l'éducation des vers 
à soie, la feuille du mürier greffé avec celle du 
müûrier non greffé, vulgairement dit Sauvageon. ibid. 
Conditions générales à remplir par les concurrens. 194 
Tableau des Membres. 195 


Fin de la Table. 


ERRATA. 


Pag. 53, lig. 21, Souges ; lisez Fouge. 
ëd. ‘lis. 27. ibid. 
61, note marginale, tuya ; lisez: thuya. 
Got Het, 11. RIENN 
78 , lg. 9, plantes; lisez : plants. 
88, lig. 1 , fourbure ; lisez : ferrure. 
100 , note, colonites ; lisez : celonites. 
id. Matilla ; lisez : Mutilla. 
101 , lig. 15 , sapins; lisez : pins. 
id. lig. 26, plaines; lisez: plages. 
102 , lig. 23, bourdonne ; lisez : abonde,. 
107 , lig. 12, treïlles ; lisez: taillis. 
118 , lig. 17, pouces ; lisez: pans. 
135 , lig. 6, d’un quart ; lisez : à un quart. 
136, lig. 2 , le condensateur ; lisez: la 
condensation. 
137, lig. 26, à l'instar; lisez : de méme 
que. 
139 , lig. 22, dissident ; lisez : d'incidence. 
141 , lig. 24 , 20 pieds ; lisez: 10 pieds. 
186 , lig. 13; Bertrand ; lisez: Berlhaud. 


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de Ur one . 


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RAPPORT 


PRÉSENTÉ 
A LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE 
DU DÉPARTEMENT DU RHONE, 


SUR LES ÉTABLISSEMENS FORMÉS PAR M. POIDEBAR, 
A S."-ALBAN , 


AU NOM D'UNE COMMISSION; 


Par Mr le Dr TERME, 


Imprimé par ordre de la Société. 


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RAPPORT 


PRÉSENTÉ 
A LA SOCIÉTÉ D’AGRICULTURE 
DU DÉPARTEMENT DU RHONE, 


SUR LES ÉTABLISSEMENS FORMÉS PAR M. POIDEBAR ; 
A S."-ALBAN , 


* AU NOM D'UNE COMMISSION; 


Par Mr le Dr TERME, 


Imprimé par ordre de la Société. 


A LYON, 
DE L'IMPRIMERIE DE J.M. BARRET:4 


1823. 


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RAPPORT 


PRÉSENTÉ 4 LA SocIÉTÉ D'AGRICULTURE 
DU DÉPARTEMENT DU RHÔNE , sur les 
Etablissemens formés par M. Poxvesar, 
a St-Alban, au nom d'une Commission, 
par M. le Dr TERME. 


Messieurs, 


L'agriculture et industrie , d'où naît la pros- 
périté des Etats, sont unies par des liens 
indissolubles; en vain, plus d’une fois, a-t-on 
voulu les considérer comme des rivales jalouses ; 
personne n'ignore aujourd'hui que les eflorts 
de Sully ont amené les projets de Colbert , et que 
les progrès de l'agriculture ont préparé les succès - 
de l'industrie et du commerce. Sous un autre 
point de vue, il est également certain que le com- 
merce, à son tour, a réagi.sur l’agriculture, lui 


(6) 

a donné son essor et communiqué son activité. 
Sans le commerce en effet l’agriculture, étouffée 
sous le poids de sa propre fécondité , succom- 
berait bientôt par suite d’une pléthore mortelle, 
que la rapide circulation de ses produits peut 
seule prévenir. Cette double vérité est sur-tout 
incontestable pour notre Cité ; ses richesses re- 
posent sans doute sur l'étendue de ses relations 
commerciales ; mais ces mêmes relations seront 
désormais garanties par l'extension de la cul- 
ture des mûriers en France ; et c'est par cette 
culture que nous arracherons à l'étranger 
le pouvoir de disposer de la fortune et souvent 
de l'existence de notre population manufacturière. 

Aussi, Messieurs, votre Commission peut 
se féliciter des fonctions que vous avez bien 
voulu lui confier ; elle le peut d'autant plus, 
qu’ellé va vous entretenir d'un établissement 
qui doit accroître la prospérité de nos manufac- 
tures , et que les éloges que vous allez entendre 
s'adresseront à deux de nos plus estimables 
compatriotes. 

Chargée de visiter les établissemens que M. Poi- 
debar a destinés à élever les vers à soie, à filer 
et à mouliner leurs produits , votre Commission 
se rendit à St-Alban le 10 juillet 1822 , elle y 
trouva la filature et le moulinage en pleine acti- 


(7) 

vité, Vous connaissez déjà les efforts de M. 
Poidebar pour naturaliser dans notre départe- 
ment la belle race des vers à soie blanche; qu'il 
nous soit permis de vous les retracer en peu de 
mots ; nous vous ferons connaître ensuite les . 
développemens qu'il a donnés à ses premiers 
essais , ainsi que les avantages qu’il retire pour sa 
filature de l'appareil si simple et en même temps 
si ingénieux de M. Gensoul. 

Il y a cinquante ans environ que le Gouver- 
nement fit distribuer dans le Vivarais et le 
Languedoc des graines de vers à soie blanche, 
qu’il avait fait venir de Chine. Les agriculteurs 
éclairés de Bourg-Argental , des Cevennes et de 
Roquemaure furent à peu près les seuls qui 
triomphèrent des premières difficultés , bra- 
vèrent d’injustes préjugés , et en cullivant cette 
race si belle lui conservèrent toute sa pureté, 
En 1812, M. Poiïdebar fit venir des graines dé 
Bourg-Argental, d’Alais et de Roquemaure , et 
de ces trois sources différentes il oblint des ré- 
sultats semblables et des produits également 
beaux , quoiqu'il soit généralement reconnu que 
la race de Bourg-Argental est supérieure à 
toutes les autres. 

Encouragé par ce premier succès, il donna 
bientôt une plus grande extension à ses projels. 


(8) 

En 1814 sa propriété de St-Alban se couvrit de 
müûriers à plein vent et en taillis. Jusqu'en 1818 
1] n’avait pu élever qu’une petite quantité de vers; 
mais à cette époque il fit construire un premier 
atelier pouvant contenir 12 onces de graines, et 
porta l'éducation totale à 18 onces; en 1819 cette 
éducation fut portée à 24 onces avec un plein suc- 
cès. Cette même année , les efforts de M. Poidebar 
reçurent les plus honorables encouragemens ; 
vous lui décernâtes, Messieurs, une médaille d'ar- 
gent et une prime de 30of. ; ses soies filées lui 
obtinrent à l’exposition une autre médaille d'ar- 
gent, (r) et les cocons qu'il envoya à la Société 
d'encouragement , lui méritèrent l'honneur de 
partager avec M. Rocheblave une prime de 2000f. 
En 1820 un nouvel atelier fut construit, et 
l'éducation totale portée à 43 onces , en y com- 
prenant 10 onces confiées, sons la condition de 
partager les produits, à des agriculteurs voisins. 
L'année suivante 30 onces furent également, 
et sous la même condition, distribuées à des 
facteurs des environs , et l'éducation totale, qui 
s'éleva à 75 onces, offrit les résultats les. plus 
satisfaisans. 


(1) Cette Médaille est la seule qui, à l’exposition de 
1819, aït été accordée à un fileur. 


C9) 

Jusqu'à cette époque , Messieurs, vous aviez, 
ainsi que MM. De Lézay-Marnésia et De Tour 
non , successivement préfets de ce département, 
suivi les progrès de l'établissement de M. Poi- 

. debar avec un vifintérêt ; mais en 1822 cet éla- 
blissement devait prendre à vos yeux une impor- 
tance bien plus grande encore, par l'adoption 
du procédé de M. Gensoul pour la filature des 
cocons : aussi la mission de vos Commissaires 
consistait-elle spécialement dans l'examen des 
avantages obtenus par ce procédé. 

Au mois de mars 1822 M. Poidebar avait ieté 
les fondemens d’un bâtiment de 8o pieds de lon- 
gueur sur 27 de largeur , destiné à recevoir lap- 
pareil de M. Gensoul ; et dès les premiers jours 
de juillet vos Commissaires ont trouvé cet ap- 
pareil en pleine activité, et desservant 24 bas- 
sines, nombre qui pourra être porté à 36. Vous 
connaissez, Messieurs, l'appareil si parfait de 
M. Gensoul, et cependant nous croyons devoir 
vous en présenter une description rapide et peu 

“détaillée, qui suffira pour vous en rappeler l'in- 
contestable utilité. Distribuer un calorique suffi- 
sant à un nombre indéterminé de bassines, à 
l'aide d'un seul feu, régulariser le travail des 
fileuses , porter facilement et avec rapidité l'eau 
des bassines à une température voulue, conserver 


(1o ) 
à cette eau toute sa pureté, enfin augmenter la 
quantité des produits filés , tel était le but que 
s'était proposé M. Gensoul, tels sont les avaniages 
que son appareil présente. 

Cet appareil consiste en une chaudière munie 
d'un vapomètre et d’une soupape de sûreté ; elle 
est assise sur un foyer alimenté par du charbon 
de terre; la vapeur dégagée se rend dans un 
grand conducteur qui traverse horizontalement 
l'atelier , dans toute sa longueur, et se trouve à 
environ 10 pieds au-dessus du sol ; de ce conduc- 
teur général partent , de distance en distance, 
des conduits latéraux qui descendent vers les bas- 
sines, et qui, avant d'y arriver, se bifurquent 
de manière à en chauffer deux à la fois ; ces 
conduits garnis d’un robinet , à peu de distance 
de leur extrémité, se terminent par un tuyau 
qui plonge dans la bassine , et qui, percé d'un 
grand hombre de petits trous , laisse échapper la 
vapeur. Les robinets plus ou moins ouverts 
servent aux fileuses à activer ou à diminuer la 
chaleur. La vapeur en arrivant dans l'eau froïde % 
qu'elle échaufle en peu de minutes, fait entendre 
un sifflement particulier , qui cesse complète- 
ment lorsque l’eau est arrivée à la température 
de 60 degrés ; entre 65 et 70 degrés, tempé- 
rature convenable pour filer, l'eau éprouve une 


Car) 

espèce dé frémissement assez sensible qui devient 
une vive ébullition à 75 degrés , chaleur néces- 
saire pour battre les cocons. Tous ces phéno- 
mènés bien connus peuvent servir , et servent 
en effet, de thermomètre aux fileuses : celles-ci, 
n'étant point occupées à entretenir le feu comme 
dans l’ancien procédé, peuvent se livrer cons- 
tamment à la filature ; enfin la vapeur se con- 
densant dans les bassines , renouvelle sans cesse 
l’eau avec une eau d’une extrême pureté, puis- 
qu’elle est distillée. Aussi les produits obtenus 
avec l'appareil de M. Gensoul présentent une su- 
périorité sensible sur ceux que donne l'ancien 
procédé. Votre Commission fit la comparaison 
de deux écheveaux filés ‘par les deux procédés , et 
donna la préférence à celui filé à la vapeur ; elle 
compara aussi ces deux écheveaux à de la soie 
de Chine de première qualité’; et la’ très- 
grande supériorité de la soie indigène RER 
tous les yeux. 

M. Poidebar à fait connaître à vos Commis- 
saires les avantages qu'il a retirés cette année de 
l'appareil Gensoul. « Il en a été complètement 
» ‘satisfait ; ( je me sets de ses expressions ; }1l y 
» a trouvé comparativement à l’ancienne mé- 
» thode une économie des trois quarts du com- 


C12) 

» bustible, une plus grande quantité d'ouvrage 
» résultant du travail des fileuses, qui peut être 
» évaluée à un dixième, enfin plus de perfection 
» et d'éclat dans la qualité des produits. » L'ex- 
périence de M. Poïdebar n'est sans doute pas 
destinée à établir la réputation de l'appareil de 
M. Gensoul, connu depuis près de vingt ans, 
et justement apprécié par tous les fileurs qui 
l'ont adopté ; mais l'application de ce procédé à 
la filature des soies blanches lui a fait recon- 
naître une nouvelle propriété, celle de conser- 
ver tout leur éclat. 

Votre Commission a aussi visité les ateliers 
destinés chez M. Poidebar au moulinage des soies. 
Ce moulinage se composait alors de 300 tavelles 
de devidage , de 80 broches de doublage , ‘et de 
7 ovales contenant chacun 288 fuseaux pour 
retordre la soie ; trois nouveaux ovales ont été 
ajoutés aux précédens , ce qui porte la totalité 
des fuseaux à 2880. Tout cet appareil est mis 
en mouvement par une grande roue de 20 pieds 
de diamètre et de 4 pieds et demi de large , 
placée verticalement, et dans laquelle marchent 
deux chevaux de petite taille. Cette machine, 
qui rappelle l’enfance de l'art, n'est pas digne 
du reste de l'établissement, et réclame des chan- 


(13) 
gemens que M. Poidebar ne tardera pas sans 
doute à faire. (1) 

En parcourant ensuite la propriété de Saint- 
Alban , vos Commissaires ont admiré Pétendue 
et la vigueur des plantatious de mûriers, et il 
leur a paru évident que l'exemple de M. Poidebar, 
et plusencore la quantité considérable de feuilles 
qu'il consomme chaque année, ont contribué 
puissamment à encourager la culture du mû- 

 rier , culture que depuis quelques années vous 
vous êtes constamment efforcés de propager 
dans ce département. 

Après vous avoir présenté une esquisse bien 
imparfaite de la situation des établissemens de 
M. Poidebar, qu'il nous soit permis d'observer 
que le spectacle intéressant d'une filature est at- 
tristé par la vue des jeunes filles occupées à 
faire tourner les rouets. Ces femmes agitées sans 
césse d'un mouvement réoulier, mais pénible, 
n’ont d'autre point d'appui qu’une corde sus- 
pendue aux solives, et portent sur leur visage 
lexpression du malaise; leurs travaux les ex- 


(1) Au moment où ce rapport s’imprime, nous apprenons 
que M. Poidebar fait des essais pour appliquer à son mou- 
linage uné machine à vapear. 


(14) 

posent à des dangers que l'hygiène doit signaler. 
Espérons donc que l'habile mécanicien à qui nous 
devons l'une des plus ingénieuses applications 
des propriétés de la vapeur aqueuse aux arts in- 
dustriels, parviendra à remplacer le travail de 
ces tourneuses par une puissance physique ; en 
diminuant la dépense des fileurs , il rendra un 
véritable service à l'humanité. (1) | 

Ici, Messieurs, devrait se terminer le travail 
de votre Commission et de son rapporteur ; re- 
tracer les efforts de M. Poidebar , décrire l'ap- 
pareil de M. Gensoul , c’est faire le plus pom- 
peux éloge de ces deux excellens citoyens. Mais 
dans les circonstances où nous sommes , lorsque 
les débouchés de nos marchandises manufacturées 
se resserrent de jour en jour, lorsque l'Angleterre 
annonce avec orgueil que ses manufactures de 
soie produisent cinq fois plus que les nôtres, au 
moment où nos voisins élèvent de toutes parts 


(1) Le vœu émis par le Rapporteur a depuis long-temps 
été prévenu. MM. Laporte et Pellet, de St Jean-du-Gard, et 
M. Lacombe, fils, d’Alais , sont brevetés pour avoir rem- 
placé le travail des tourneuses par une force physique. 
MM. Chambon fils , d’Alais, Reboul de Mondragon, et Bon- 
nard, de Lyon, ont aussi cherché à obtenir le même ré- 
sultat; mais tous les moyens employés jusqu’à ce jour 


réclament de nombreux perfectionnemens. 


(15) 

des établissemens rivaux , où de mauvais Fran- 
çais , disons-le avec douleur, de mauvais Lyonnais 
portent dans le royaume Lombardo-vénitien les 
admirables méliers de notre collègue M. Jacquard, 
et reçoivent la récompense de leurs efforts par- 
ricides, hâtons-nous de dire et de répéter que 
notre industrie loin de se décourager doit redou- 
bler d'activité. Délivrons - nous de l'assistance 
de l'Italie | couvrons notre sol fertile de mû- 
riers , et sachons nous-mêmes nous fournir les 
matières premières que le sol humide et glacé de 
l'Angleterre lui refusera toujours. Ainsi nous 
parviendrons à paralyser les efforts de nos rivaux, 
à donner à nos manufactures un développement 
d'autant plus grand que leurs produits seront 
moins coûteux , et à faire préférer sur tous les 
marchés du monde nos étoffes , encore si supé- 
rieures par la solidité de leurs couleurs et la 
variété de leurs dessins. 

Pour contribuer, autant qu'il est en notre 
pouvoir , à atteindre de pareils résultats , nous 
devons nous empresser d'encourager les hommes 
qui cherchent à accroître et à perfectionner nos 
manufactures ; en conséquence , Messieurs, 
votre Commission vous propose de donner aux 
travaux de MM. Poidebar et Gensoul la plus 
grande publicité possible ; et, dans l'espérance 


(16) 
que le Gouvernement jugera convenable de ré- 
compenser leurs eflorts , elle vous propose , 
en outre , d'adresser une copie du présent rap- 
port à M. le Préfet de ce département. 


Lu et adopté les Conclusions à la séance du 
31 janvier 1823. 


N. F. COCHARD, Président. 


MÉMOIRE 
SUR UNE ÉDUCATION 
DE VERS A SOIE (En 1822), 


Présenté à la Société Royale d'Agriculture , Histoire naturelle 
et Arts utiles de Lyon ; 


Par Mr Marrureu BONAFOUS, 


MEMBRE TITULAIRE DE LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE DE TURIN, ET 
DIRECTEUR DU JARDIN EXPÉHIMENTAL DE LA MÊME SOCIÉTÉ 3 
ASSOCIÉ CORRESPONDANT DE CELLE DE LYON ; LINÉENNE DE 
PARIS , etc, 


Ro nt 
DES Artem experientia fecit ; 
Exemplo monstrante viam. 


LYON, 


IPRIMERIE DE J.M, BARRET, PLACE DES TERREAUX: 


LR 


1823. 


SR Made 


it 


et 


RACE 


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ae: Re ART 


ha 


IMPRIMÉ PAR ORDRE DE LA SOCIÉTÉ. 


“Ho 20 1 à DIRECTION DE LA! 


TEMPÉRATURE À ayeROMÈTRE ÉTAT 
Jours.| Dates. mn NT ei dans de 
extérieure UE 2 
intérieure, l’intérieur, l'atmosphère. || 
au couchant. À | 
ES D ÿ 
l 
il 
| 
ÉANS 
E 
ge 6" te 
S-A1lr7m 
{ 


# 
; minimr um maxim.Ë minimum. maxim. 


1.1! 50 avril.4 14 degrés 12-17 AU 61 - 57 beau temps. 
2.° | 1 mai. À 5 8 - 14 | 50 - 47 À vent et pluie. 


5e > » 16 7 = 14 20 — 40 vent. 
17 6-14 À 215 - 25 À beau temps. 


17 10 - 16 À 925 - 27 À pluie. 


18 9-18 | 26- 56 | pluie. 


19 9 - 17 25 - 4o À beau temps. 
19 19-25 | 25 - 4o À beau temps. 
20 14 - 20 À 25 - 55 | pluie etorage. 
21 13-22 | 25 - 50 | pluie et orage. 


21 12 - 1d 25 - 30 | temps nébul. 


CHAMBRE CHAUDE. 3 


OBSERVATIONS. 


Le poids de la graine était de 3 onces. — Ce jour a été le plus serein 

qu'on ait eu depuis un mois. | 

La graine pesée aujourd'hui n'a présenté aucun déchet. — On 
1 
| 
l 
l 


‘commencé à ailumer le poêle. 
D Le poids de la graine a diminué de 22 grains. 

Le poids de la graine a diminué de 40 grains. —_ I] a fallu tempérer 
la sécheresse intérieure par plusieurs arrésemens. 

Le poids de la graine a diminué de 54 grains. — L'état de la Hhoille 
a engagé de maintenir dans cette journée la mème température qu'hier. 

Le poids de la graine a diminué de 76 grains. — En ouvrant l'œuf, 
l'embryon parait formé. — On remue doucement les œufs deux ou trois 
fois par jour , jusqu'à ce qu'ils commencent à éclore. 

Le poids de la graine a diminué, jusqu'a ce jour, de 114 grains, ce 
qui forme le quinzième du poids total. — Les œufs commencent à blan- 
chir et pétillent un peu. — Le fhermométrographe fit connaître que 


| 
| 
Vassistant avait laissé monter la chaleur à 21 degrés dans la matinée, | 
et la température fut abaissée insensiblement à 19 degrés. | 

On a cessé d'observer le déchet de la graine , attendu que de 4 à | 
8 heures du matin quelques vers sont éclos. — On a étenda sur la 
graine une feuille de papier troué, sur laquelle on a placé de petits ra- | 
Meaux de jeunes müriers. | 

Depuis 4 heures jusqu'à ro heures du malin beaucoup de vers sont : 
éclos. — Vus à la loupe , ils paraissent châtains foncés , avec un collier 
blanc. — Leur longueur est d’une ligne environ. — Ces premiers -nés 
n'ont point été conservés. 

Du lever du soleil jusqu'à midi , les vers sont sortis de leurs coques 
en quantité innombrable. — On les a transportés en plusieurs fois , avec 
les tables: de transport | dans l'atelier qui leur est destiné. — Tous 
les vers nés après ceux-ci n'ont point été gardés. 

Les coques des vers et les œufs non éclos pèsent environ le sixième 
du poids total de la graine. — Déduction faite du poids des vers qui 
m'ont point été conservés, et de ceux qui ne sont point éclos, il ne 
reste à élever qu'une quantité de vers à soie provenus de deux onces 
de graines , soit près de 80,000 vers. 


4, DIRECTION DE L'ATELIER. . 


? 
[ , HYy£r0o- ESPAC : 
quantité | TEMPÉRATURE | ETAT are 
par les vers 
Jours| Dates.} 4e 1a dans de sur les claies. 
téri l’inté- s ts, 
feuille, Jintériéure. | "an | yieur l'atmosphère. 


couchant. larseur.| long. 


pieds. | pieds. 


s - beau temps. 

2. pluie. UOTE 
Il 
| 3e pluie et ciel né- slaû 

buleux, 
4.e pluie: | 
LA Jciel un peu nébu- 
leux. | 


OBSERVATIONS. 


L'atelier est une tour isolée, située au bord d'un large ruisseau : me- 
urée intérieurement elle présente un carré dont chacun des côtés est 
le 20 pieds dans tous les sens. On y a pratiqué cinq croisées et vingt 
oupiraux , dont 15 dans les murs et 7 dans le plancher supérieur. La 
orte est précédée d'un vestibule qui sert d'abri aux ouvriers. Deux 
oûles sont placés dans deux angles diagonalement opposés ; et sur un 
es côtés est une cheminée qui sert principalement à faire des feux de 
ammes; L'atelier sert aussi de chambre chaude. 

Les claies sont au nombre de 40 , ayant chacune 15 pieds de longueur 
ur 5 de largeur { de manière qu'on peut élever commodément les vers 

soie provenant de 4 onces de graines ). À la bauteur de 10 pieds , une 
ralerie de bois borde intérieurement les quatre murs, et rend le service 
e l'atelier très-facile. : 


» L'éducation régulière des vers à soie a commencé vers le milieu de 
jette journée. — La feuille épluchée et coupée très-menu a été donnée 
n deux repas, à 4 h. et à 10 h. du soir ; mais dans l'intervalle on leur 
à donné quelques petits rameaux. 
» Les vers prennent une couleur livide et leur tète commence à grossir. 
= La feuille leur a été donnée en 4 repas, non compris quelques feuilles 
ju'on leur a distribuées dans les intervalles. — À chaque repas on leur a 
fuit occuper plus d'espace pour qu'ils ne s’endormissent point les uns 
sur les autres. 

Dans la matinée, la moitié environ des vers s'est assoupie. — Au lieu de 
4 repas on leur en a donné 5, pour que ceux qui ontencore appétit ne s'en- 
dormissent pas trop de temps après les autres. — Le soir on à fait des 
feux de flammes plusieurs fois, et on a ouvert en même temps les sou- 
Biraux. — On leur a donné quelqués feuilles à ronger entre les repas. 
Au lever du soleil on a trouvé tous les vers endormis. — Dans la 
journée quelques-uns se sont éveillés. On a donné peu à manger à ces 
) érniers pour qu'ils ne devançassent pas trop les autres. .— On a fait 
deux fois des feux clairs, et tenu les soupiraux ouverts. 
[NA 9 heures du matin on a délité les vers éveillés les premiers. — 
Dans ce jour tous les vers s’éveillent. — Ils sont quatre fois plus longs 
Qu'ils n'étaient à leur naissance. — On a fait trois fois des feux de 
flammes et ouvert Les soupiraux. -- Les vers dans cet âge ne se vident 
que très - peu. 


© PREMIER AGE. 5 


ne 


6 112 1 SECOND 


à ; hygro- | = ESPACE 
quantité} TEMPÉRATURE re ETAT occupé 
par les vers 
Jours| Dates. de la at, dans de sur les claies. 
: extérieure 1: É “ A nr 
feuille. À; térioure. Le l'inté- À l'atmosphère. | 
couchant rieur. larseur.} long. 
RES | CECI TEE De et TS 5e) k 


3.el17 » 16 18 > 49% beau temps, 


| 12 - 29} 55 
gelas » | 4 8l:18 17 - 26140 - 44 beau temps. 
l 


eee je 
: pieds, | pieds, 
rerl15 mail 9 8118: 11 - 19134 - 46icicl nébuleux. 
2.116 » | 13 84187 11 - 25739 - 46{ beau temps. 
3 | 27 


AGE. 


OBSERVATIONS. 


De grand matin on a achevé de déliter les vers. — La feuille a été 
donnée en 6 repas. — Les rameaux employés à les lever leur ont servi 
pour le premier repas. — Dans le délitement on n’a pas trouvé un seul 
vers mort. — On a fait le soir un feu de flammes. 


Dans cette journée on a fait trois fois des feux de flanimes. — Les 
ers prenvent de l'appétit. — Leur tête grossit et devient plus blanche. 
Quatre repas , les deux premiers moindres. 


Dans la matinée quelques vers se sont assoupis. — Vers les 4 heures 
lu soir la chaleur extérieure s'étant élevée à 29 degrés , on a pourtant 
maintenu la température de l'atelier à 19 d. , en ouvrant la porte, les 
oupiraux et les fenêtres. — On a fait des feux de flammes et des arro- 
jemens. — Quatre repas, les deux premiers plus forts. 


Presque tous les vers étaient endormis et le plus grand nombre s'é—- 
reille. — La feuille fut distribuée suivant le besoin. — Au milieu de 

a journée on a fait un feu de flammes. — Les jeunes vers annoncent 
me santé robuste. — On remarque sur leur dos deux lignes courbes 
mblables à deux parenthèses. ( ) — Leur longueur est de 6 lignes. — 
Dans cet âge ils ont rendu un peu plus de matière excrémentielle, 
oujours dure et noire. 


ns 


TROISIÈME 


, ESPACE 

| ÉTAT orcupé 
par les vers 

sur les clairs 


quantité À TEMPÉRATURE 


de la 


extérieure 
intérieure. au 
couchant. 


feuille. 


Jargeur.| long 


ne 
pieds. | pieds, 


2° 


beau temps. 


ciel nébuleux. 


beau, grand calme 


nébuleux et vent, 


pluie et vent. 


OBSERVATIONS. 


À 7 heures du matin où a commencé le délitement 
petits rameaux comme à l'ordinaire. — On à observé 
n'ont pu müer, et on lés a mis à part. — Le corps des chenilles se dé- 
veloppe ; il blanchit un peu , et leur tête prend une couleur brune. — Leur 
appétit est modéré. — Le peu de vers qui dormaient encore hier 
réveillent. — On à fait trois fois des feux de flammes. — L 
donnée en 4 repas. — Dans cet âge on la coupe un peu moin 


des vers avec de | 
quelques vers qui | 


au soir se || 


s menu. 

De grand matin on a délité les vers éveillés les derniers, — On ne leur 

Ja donné que 4 repas et quelque peu de feuilles de temps en temps. Les deux 
derniers repas sont les plus forts, eu égard à leur appétit qui augmente. 


Les vers s'allongent et deviennent transparens. — On leur a servi 
P 


repas, les deux premiers plus forts. — On maintient la température ci 
contre à l'aide des deux poèles. 


On fait des feux de flammes qui agissent efficacement sur la sañté des 
Yers. — On a donné 4 repäs progressivement plus légers. 


Depuis midi, ces poêles n’ont plus été allumés. — On a fait des feux | 
de flammes vers la nuit. — On à donné 5 repas , et quelque peu de 


feuilles dans les intervalles. — L'atelier conserve une odeur agréable. 


, Les vers S'assoupissent. — On a fait des feux de flammes. — On à 
distribué un peu de feuilles au fur et à mesure de leur besoin. 


Les vers $e sont éveillés assez régulièrement dans le cours de la journée, 
ét le soir où les a délités, — On en a trouvé une vingtäine qui n'ont point 
mué. — Le temps pluvieux parait avoir retardé uñ peu lé réveil des 
Vers. — Les petits rameaux employés à les lever, ont servi de premier 
repas. — Six heures après on a donné trois livres de feuilles. — Le 
corps des vèrs parait sans poil. — Le mouvement de leurs pattes , qüand 
ôn leur donne à manger produit déjà un murmure qui réssemblé au 
Bruit de la pluie. — Leur longueur est de plus de douze lignes. 

& ; 


a feuille a été || 


QUATRIÈME 


BEA BUS hygro- , ESPACE 
uantité T£LMPERATURE ETS EÉ T.AUT occupé 
par ies vers 
de la ER dans de sur ies claies 
feuil'e larme ECS lat hè 
uille. 7e. su 4 atmosphère. | 
à intérieure, ONE rieur . 2e P Men loug 
nn ne | TD À RER T2, MERE EN TELOMONEETIEENCD | eorremmeu ss : à 
liv. one pieds, | pieds, 
48 17 19 - 21) 55 - 6, {temps nébuleux. 
80 16 = 17/12 - 25062 - 65 beau temps. 
100 16 - 17113 - | - 72} beau temps. 
DE 17 14,- 22765 - 80Ë beau temps. 
3 | 155 
Go 17 15 - 2760 - 784 beau temps. 
| 
14 17 -.18/15 - 25/40 - 45 lheau temps. 
» 17 = 18 16 - 25555 - 85 beau temps. : 


à agde FR On 


OBSERVATIONS. 


Tous les vers sont éveillés et on les a délités. — On à fait matin et 
soir des feux de flammes. — Trois repas, celui du milieu est le plus fort. 

Dans le cours de la journée trois feux de flammes. — Quatre repas 
de six en six heures, en les augmentant progressivement. — La feuille 
best grossièrement coupée. — Le ver s'agrandit, et sa peau continue à 
blanchir. 


Quatre repas en quantité progressive, et trois fuis des feux de flam- 
mes. — Feuille non coupée. 

Il y a entre les claies supérieures et celles d'en bas un degré de dif- 
férence , en sorte qu'on isdique ci-contre la température moyenne. — 


Les vers se raccourcissent un peu, et deviennent couleur de cire. — 


On a arrosé plusieurs fois le pavé et ouvert les soupiraux et les fenêtres. 
-- Quatre repas toujours progressifs , en élargissant chaque fois Les bandes 
de vers à soie. -- Feuille non coupée. 

Sur les 4 heures la température s'est élevée intérieurement à 19 deg. 
sans qu'on ait pu la modérer. -- Encore 4 repas distribués comme pré- 
cédemment. -— Les vers se vident très-bien, -- Leur matière excrémen- 
teuse pulvérisée paraît d’un vert très-foncé. -- Pour le dernier repas on 
a coupé la feuille pour mieux la répartir. -- On à fait quatre fois des 
feux de flammes , et arrosé plusieurs fois l'atelier. -- Une partie des 
vers commence à s'endormir. -- On a présenté aux vers à soie quelques 
feuilles du broussonetia papyrifera W , mais ils l'ont refusé. 


La chaleur de l’atmosphère n'a pas permis de maintenir la tempéra- 
ture intérieure à 17 deg. -- On a donné quatre repas , et, comme les vers 
s'assoupissent, on à diminué progressivement la quantité de la feuille. 
-- L'atelier conserve une odeur agréable, ou plutôt il n'en a aucune. 

On a fait trois fois des feux de flammes. - On a arrosé l'atelier , et on y 
a placé des baquets d'eau pour tempérer par l’évaporation la sécheresse 
$ qui y domine. -- Sur le midi les vers ont commencé à s'éveiller , et ils 
vont tous accompli leur quatrième âge dans la nuit avancée. -- Les vers 
“ont 20 lignes de longueur. æ— Dans cet âge et dans le suivant on s'est 
attaché à leur donner de Ja feuille cueillie sur de vieux müriers. 


ESPACE 
ocrupé 
pat les vers 
sur les claies 


a 


quantité 


Jours Dates de la 


metre 


; Hygro- . 
TEMPERATURE 


dans 


ne te, de 


FT 
extérieure l'inté- 
au 


couchant 


feuille, 


intérièure, EreNE l'atmosphère. 


largeur long 
cames 
Pieds pieds. 


16 - 19/14 - 23/24 - 75 beau temps. 


2.€| 3 » 150 15 - 19114 - 30/35 - 87E beau temps. 


3%! 4 » 480 16 - 20 |15 - 25} 65 - gol beau temps. 


| 
e : | 


Lun 
— 


4°! 5 » 320 15 - 27Ü70 - 87} beau temps et 


orage. 


5.®| G » 4ôo 15 - 30164 - 87 beau temps. 


7, 7 » |$20 16 - 20/17 - 28] 60 - 85 Fbeau temps. 


SPÉCR D  p mQ 


OBSERVATIONS. 


fn On a délité les vers, toujours en nettoyant les claies avec le plus grand 
fsoin. — Dans les claies supérieures, où la chaleur était inévitablement 
plus forte, on a trouvé quelques vers faibles et languissans, qu’on a 
jetés hors de l'atelier. — On a tenu les vers à soie au large pour diminuer 
les incommodités de la chaleur régnante ; et non-seulement on a fait 
plusieurs fois des feux de flammes , mais on a fait une fumigation avec du 
nitrate de potasse sur lequel on a versé un peu d’acide sulfurique : Va 
| vapeur qui s'en dégage détruit promptement les miasmes que la fermen- 
tation de la litière produit , et donne aux vers une énergie remarquable. 
— On leur a donné 5 repas. 
Les vers blanchissent et prospèrent. — Ils acquièrent de l'appétit. — On 
a aéré l'atelier autant qu'il a été possible. — On a fait des feux de 
[flammes , et le soir on a fait la même fumigation qu'hier. — On leur a 
donné 4 repas et quelques feuilles dans les intervalles. — Le premier 
frepas a été Le plus léger. — On les éclaircit autant que possible à chaque 
[repas. 
… La vigueur des vers se fait remarquer par la force avec laquelle leurs 
jattes restent attachées aux claies. — On leur a donné 4 repas, ainsi qu’un 
[peu de feuilles pour les occuper entre un repas et l'autre. — Les vers qui, 
ns l'âge précédent, n'avaient pu ronger la feuille du Broussonetia papy- 
mifera W, l'ont mangée aujourd'hui assez avidement ; on se propose de 
lfaire une autre année des expériences comparatives. — On a fait des feux 
[de flammes et parfumé l'atelier comme dans les deux premiers jours. 
|— La longueur des vers est de 27 lignes. 
La blancheur des chenilles s'altère. — Leur queue devient jaunâtre, 
Mais leur belle santé continue à émerveiller les cultivateurs qui viennent 
Iwisiter l'atelier. — On a fait deux fumigations nitriques , et 5 fois des feux 
e flammes. — On leur a donné 5 repas ; plus ou moins forts, en raison 
leur appétit. E 

. Feux de flammes et fumigations nitriques comme dans le jour précédent. 
_— On a donné 4 repas; le premier a été le plus faible, et le dernier le 
plus fort. — On à aussi donné quelques repas intermédiaires très-légers. 

. Feux de flammes et fumigations. = Cinq repas à peu près égaux, et 
quelques-uns intermédiaires. 


a  ——— 


CS 


TEMPÉRATURE | lysro- , Le ESPACE 
gnantité mére ÉTAT orcupé 
fs pas les vers 
Jours Dates. de la a dans de sur les c'aies, 
_: extérieure . L , 
feuile. L'intérieure. au Éiuté l'atmosphère, 
gouchant rieur. 


largeur! long, 
SRE | on mp mr À 4 SUuN 
pieds. 


poids. 


16 - 20/15 - 29170 - 864 beau temps et 
pluie, 


shtemenamade ste bee.s: 


18 - 21118 - 23/10 - 94} beau temps. 


'… 
2: ( N 


LE 


i OBSERVATIONS. 

‘ 

ï D 2 EN EE 
' 


* Dans ce dernier âge l’excès de la température augmentant l'appétit des | 
vers et hâtant leur maturité, on a dû leur donner une nourriture plus | 
abondante, en 4 repas progressivement plus petits ; ils n’ont laissé que | 
les nervures des feuilles : il en est même qui ont attaqué lés mûres. — On | 
à fait des feux de flimmes 4 fois dans ce jour , et la fumigation nitrique | 
matin et soir. — Les vers, par la diminntion de leur volume et leur demi- | 
transparence, annoncent leur prochaine maturité. — Ils se rident et de- | 
viennent plustendres. — Déjà quelques-uns se traînent au bord des claies | 
et cherchent à grimper. — On a nettoyé complètement les claies. — (Une | 
once à peu près d'excrémens et de litière, renfermée dans un bocal , ena | 
tellement altéré l'air , que des vers à soie qu'on y a introduits ont bientôt 

péri ; ce qui démontre le danger de ne point nettoyer exactement les | 
c laies ) — On commence à former les haies avec de la bruyère commure, 


Calluna vulgaris W) qu'on avait préparée d'avance. — Dans cet dge 
On n’a point coupé la feuille. 


» On achève de former les haies en les disposant en cabannes. = On a 


fait 4 Lois des feux de flammes et 2 fois des fumigations. — Tous les vers 


montent vers les bruyères, jettent leur soie,et se mettent à filer. — Le 
Bruit qu'ils font ressemble à une forte pluie. — Ils continuent à se vider. 


= Un orage violent qui eut lieu pendant la nuit à dérangé quelques vers, 


“tout dans les étages supérieurs. — Les vers, parvenus à leur plus 


| 
| 
| 
| 
| 
and développement , sont longs de 58 à 40 ligues ; il en faut 7 ou 8 | 
seulement pour former le poids d'une once. 
On a trouvé quelques vers courts , et on les a mis de côté. — On a 
fouvé aussi un très-petit nombre de vers jaunes, qu’on a promptement 
jetés hors de l'atelier. 


s 


L 
[R ; 
“N'ayant trouvé ancun vers atteint de la muscardine , 


et voulant recon- 
itre si cette maladie, 


qui faisait des ravages dans les alentours, est 
Mtagieuse, on s'en est procuré une centaine; les uns étaient encore 
ougeñtres, et les antres déjà calcinés. On les à mis avec un nombre deux 
dis plus forts de vers parfaitement sains: ces derniers sont restés sept 
jou sLavec les autres sans prendre la maladie ; le huitième jour ils en 
nbtous été atteints , à l'exception de 5 seulement qui ont filé, mais à 
ouverture du cocon , on a trouvé la chrysalide morte de la muscardine : 

as se recouvrir d'un duvet blanc, comme les vers muscardins. 


À : ; 


p_ % Suite du CINQUIÈME 


hygro- ; ESPACE 
quantité| TEMPÉRATURE be ETAT occupe 
î par 1es vers 
AJours! Dates À dela dans de sur les claies 
Maui : es, 
feuille, À; térieure. J'inté- l'atmosphère, : 
coMbhant rieur largeur. long. 


RS € omcecemrmmsccmememeenss. | amas 
_— | pieds. | pieds. 
18 - 2017 - 29, 3 - 100{ beau temps ét 


vent du sud. 


16.11 » 18 - 50! 14 - 271 5 - 16 pluie. 


viel1a » i7- 191! 15 - 26] 6 - 86: beau temps. 


12e113 » 15 - 20 17 - 29 7 - 90 beau temps, 


13.0, 14 » 16 - 20 go ! beau temps. 


17 - 2980 


| 


age |15 » 485 - 95 j beau temps. 


25.116 » 


» 


CPS. 


en 


QT 


AGE. : 


OBSERVATIONS. 


” 


oo 


Un orage très-violent eut lieu dans la nuit, et son effet fut de 
diminuer les forces vitales des vers fileurs. —« 11 en fit tomber quel- 
ques-uns , principalement des claies supérieures. — Il en est qui ne 
reprirent point leur travail et on les jeta dehors. — Quelques poignées 
de feuilles ont été nécessaires pour un petit nombre de vers tardifs. — 
On a continué les feux de flammes et les fumigations. 


Le dernier nettoiement des claies a été exécuté avec tous les soins 
requis. — On a fait, matin et soir, une fumigation. — Un troisième 
orage , également violent, eut lieu dans la nuit. — Les vers qu'il fit 
tomber furent placés dans un endroit séparé sur des rameaux de chène. 


constamment. 


On a tenu l'atelier tout ouvert dans les heures les moins chaudes 
de la journée. 


On a continué à aérer l'atelier. 


Des vers à soie qu'on s'est procuré chez des voisins, et qui étaient 
au quatrième jour du cinquième âge , furent exposés à 32 degrés de 
chaleur ; il en résulte qu'ils ont pris la jaunisse , excepté quatre d’en- 
Atr'eux, qui, se trouvant accidentellement à l'ombre, ont fait un cocon 
très-flasque. | 


Les vers travaillent avec activité. — Deux ouvriers les surveillent 
D 
Dans cette journée on a détaché de la bruyère tous les cocons , en | 
commençant par les claies inférieures. — Le poids total de la récolte | 
a été de trois cent quatre livres et huit onces, poids de marc (seize 


rubs et six livres de Piémont. ) 


Ces cocons sont généralement fermes , bien tissus , médiocrément 
gros et d'une belle couleur paille, avec un cercle rentrant dans le 
milieu. Cette espèce, très-recherchée par les italiens , est connue sous 
le nom de centurini. Seize cocons, pris au hazard , formaient le poids | 
d'une once. ; 


RÉCAPITULATION. 


as ESPACE 
| Quantité Decnye 
par les vers 
Jours de la sur les claies. 
LP AT, 
feuille. largeur.! longs. 


pieds. pieds. 


liy. onces. 


La feuille donnée 
dans les repas inter- 


Temps que les œufs ont 
mis pour éclore dans la 
chambre chaude. + e médiaires n’est point 
comprise dans ce ta- 
bleau, 


I âge. . . ° 
Il âge. . + On a obtenu une 
livre de cocons de 
neuf livres de feuilles 
épluchées, 


TITI âge. ET ce 
IV âge. . + . 


V âge, jusqu’à la mon- 
tée des vers. 


Rectification faite pendant l'impression. 


‘À la suite de l'observation correspondant au 6 mai, l’auteur ajoute: 


Ce nouvel instrument (le thermométrographe), qui sert à indiquer le 
maximum et le minimum de la température qui a eu lieu pendant 
absence de l'observateur , est d’une grande utilité pour les proprié- 


tairese 


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SOCIÉTÉ 


ROYALE 


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COMPTE RENDU 
DES TRAVAUX 


DE LA 
SOCIËTÉ ROYALE 
D'AGRICULTURE, 


HISTOIRE NATURELLE 


ET 


ARTS UTILES DE LYON, 


Depuis le 1. Mars 1823, jusqu’à la fin de 
1824. 


COMPTE RENDU 
DES TRAVAUX 


DE LA 


SOCIÉTÉ ROYALE D'AGRICULTURE, HISTOIRE 
NATURELLE ET ARTS UTILES DE LYON, 


Depuis le 1* Mars 1823 , jusqu'à la fin de 
1824 , 


Pan Mr L. F GROGNIER, 


PROFESSEUR À L'ÉCOLE D'ÉCONOMIE RURALE ET VÉTÉRI- 
NAIRE DE LYON , MEMBRE DE L'ACADÉMIE ET DU CERCLE 
LITTÉRAIRE DE LA MÊME VILLE , SECRÉTAIRE PERPÉTUEL 
DE LA COLONIE LINNÉENNE LYONNAISE, ASSOCIÉ REGNI- 
COLE DE L’ACADÉMIE ROYALE DE MÉDECINE, CORRESPON= 
DANT DELA SOCIÉTÉ ROYALE ET CENTRALE D’AGRICUL- 

 TURE, DES SOUTIENS DE L'ART. VÉTÉRINAIRE DE COPEN: 
HAGUE, DES ACADÉMIES DE TURIN ; DION, STRASBOURG, 
ET DE PLUSIEURS SOCIÉTÉS D'AGRICULTURE TANT NA: 
TIONALES QU'ÉTRANGÈRES, 


SECRÉTAIRE DE LA SOCIÉTÉ, 


LYON. 
LMPRIMERIE DE J.M. BARRE‘ 


1824. 


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COMPTE RENDU 


DES TRAVAUX 


DE 14 SOCIÉTÉ ROYALE D AGRICULTURE , 
HISTOIRE NATURELLE ET ARTS UTILES de 
Lyon, depuis le 127 Mars 1825, jusqu'à 


la fin de 1824. 


Messieurs, 


Douze ans se sont écoulés depuis le jour où Sur l’'intro- 
j'ai eu l'honneur de mettre sous vos yeux pour duction de + 
la première fois le compte rendu de vos travaux. FL EUE 
Depuis cette époque, je vous ai soumis annuel- par le Secré- 
lement une notice du même genre, et toujours fi 
vous l’avez accueillie avec la même indulgence. 

Si vous avez si souvent confirmé à son auteur 
une confiance si flatteuse, c'est que vous avez 
pensé que dans plusieurs circonstances il est peu 
de qualités que le zèle et la bonne volonté ne 
puissent suppléer. Dans la séance de cloture de 
l'an dernier vous lui avez accordé un nouveau 


6 Sociéle royale d'Agriculture 
témoignage de satisfaction qui, tout en excitant 
sa reconnaissance , lui impose le devoir de re- 
doubler d’eforts et de persévérance. 

Parmi les objets qui , l'an dernier, ont appelé 
votre sollicitude, on a remarqué l'introduction 
dans notre économie rurale de deux végétaux , 
le chanvre Bolonais et le trèfle incarnat, Ces 
deux plantes précieuses ne seront pas les pre- 
mières dont l'établissement et la propagation sur 
notre sol ayent été les fruits de vos soins ; et à 
cet égard , permettez-moi, Messieurs, de vous 
rappeler quelques-uns de vos anciens travaux. 

Le mûrier était presque inconnu dans notre 
province lorsque l'un de nos plus respectables 
devanciers, M. Thomé entreprit d'en établir la 
culture : il y réussit par ses écrits, surtout par 
ses exemples. Nos campagnes se couvrirent de 
müriers ; mais ils disparurent par l'effet du mal- 
heur des temps; vous avez élevé la voix en leur 
faveur , et vous voyez que partout ils sont re- 
plantés, et qu'à mesure qu’ils se multiplient on 
voit se former de nouvelles magnoneries : ces 
établissemens sont devenus plus précieux depuis 
qu'on y élève cette belle race Szra que nous de- 
vons à M. Poidebard, à cet agronome manufac- 
turier, dont les services éminens sont encore 
au-dessus des récompenses nationales dont plu- 
sieurs fois ils ont été l’objet. La multiplication 


de Lyon. 7 
du mäûrier dans nos campagnes est d'ailleurs 
favorisée puissamment par les écrits lumineux 
publiés récemment sur leur culture et sur l'édu- 
cation des vers à soie par M. Matthieu Bonafous, 
natif de notre ville et notre correspondant à 
Turin. 

Un végétal encore plus important que le mù- 
rier , la solannée parmentière fut , vers le milieu 
du dernier siècle, fortement recommandée par 
Alléon Dulac, l’un des fondateurs de la société. Et 
plus tard, notre respectable émérite, M. Chancey 
se montra dans nos contrées l'émule du vénérable 
Parmentier. On lui dut la connaissance et la pro- 
pagation d'un grand nombre de races précieuses 
de parmentières. Ce tubercule est depuis quel- 
ques années l'objet des recherches d'un autre de 
nos confrères , M. de Martinel , dont les travaux 
en ce genre ont été distingués honorablement 
par la société centrale d’agriculture de France. 

A l'époque où les pommes de terre et les mü- 
riers se répandirent dans notre province, MM. 
de Monspey qui appartenaient à l’ancienne société 
d'agriculture, introduisirent dans leurs domaines 
les légumineuses fourragères, et ce ne fut pas 
sans efforts et sans persévérance qu’ils triomphè- 
rent de la routine qui repoussait avec obstina- 
tion les prairies artificielles , c’est-à-dire la plus 
grande de toutes les améliorations agronomiques. 


8 Société royale d'Agriculture 

Avec quelle lenteur se répandent les bonnes 
méthodes de culture ! Ce n’est que depuis quel- 
ques années qu'on voit du sainfoin sur la côte 
du Rhône près de S.e Colombe. M. Cochard, 
notre président le premier l'y a semé. Si l'on 
rencontre la même plante dans la commune 
d'Irigoy , c'est un présent dont on est redevable 
à M. Carelle. 

Nous devons à la sollicitude de Rozier l’intro- 
duction du colzat dans nos assolemens , et l’on 
n'a presque rien ajouté à lexcellent mémoire 
qu’il écrivit en 1774 sur la culture et les avan- 
tages de cette plante oléagineuse. La navette et 
le lin furent aussi l'objet des soins du columelle 
lyonnais, et ce fut encore chez MM. de Monspey 
que la dernière de ces plantes , tout à la fois 
textile et oléagineuse, s’introduisit d'abord. 

Si un grand nombre d'arbres exotiques se sont, 
depuis soixante ans, répandus dans nos forêts, 
dans nos vergers , dans nos jardins , ne sont-ils 
pas sortis des belles pépinières de naturali- 
sation que Poivre avait établies à la Freta , La 
Tourette à Eveux , Rast-Maupas à Ecully ? Par 
quelle fatalité des établissemens chers à l’agri- 
culture, que les étrangers visitaient avec tant 
d’empressement , dont notre province s'hono- 
rait , ont-ils disparu pour toujours! Et le même 
sort n’a-til pas menacé naguères l'institution 


de Lyon: 9 
départementale qui est destinée non-seulement 
à naturaliser des arbres étrangers, mais en- 
core à recueillir, à perfectionner , à répandre 
dans les campagnes des espèces précieuses , d'une 
institution qui a été le théâtre de tant d'obser- 
vations et d'expériences dont les résultais ont 
enrichi la dendrologie. Il est probable, Mes- 
sieurs, que cette institution eût péri, si vous 
n'en aviez pris la défense avec tout l'intérêt 
qu'elle doit vous inspirer. C’est dans cette cir- 
constance, Messieurs, que vous avez su choisir 
un organe digne de la cause que vous lui aviez 
confiée. (1) 

Le souvenir mêlé de regrets des richesses agri- 
coles que M. Rast avait réunies à Ecully sera 
retracé dans vos archives. M. Madiot y a déposé 
les annotations nombreuses qu’il a recueillies sur 
la nature des arbres dont l'éducation avait occupé 
pendant un demi-siècle les soins du plus phi- 
lantrope des agronomes. Ainsi ne seront pas 
tout-à-fait perdus pour la science les phénomènes 
de la végétation de tant d'arbres étrangers qui, 
pour la première fois, sous notre ciel ont fleuri 
dans les pépinières de M. Rast. Quelques-uns de 
ces arbres vivent chez des amateurs éclairés, et 


(1) Voyez à la suite du volume le rapport de M, Gras 
sar la pépinière départementale, 


10 Sociélé royale d'Agriculture 
deviendront peut-être un jour d'importans ob- 
jets de culture : tel est le cirier de la Louisiane 
qui donne une substance identique avec l’un 
des produits des mouches à miel. Vous vous 
rappelez, Messieurs, que des bougies, fabri- 
quées avec cette cire végétale, furent allumées 
dans cette salle, et que leur clarté ne se trouva 
point inférieure à celle des bougies ordinaires. 

Le vernis du Japon et'le Bonduc s'élèvent 
dans plusieurs jardins à paysages , pourquoi ne 
fourniraient-ils pas à l’ébéniste des bois capables 
de prendre toutes les formes , de réfléchir toutes 
les nuances? Qui peut assurer que la Ptelée à 
feuilles ternées ne deviendra pas, pour la fabri- 
cation de la bière, l’auxiliaire du houblon ? 
N'est-il pas présumable que plusieurs chênes na- 
turalisés par M. Rast , que plusieurs noyers qu'il 
avait habitués à notre climat, ayant échappé 
à la cognée destructive , seront quelque jour 
l’objet de vastes plantations? Et quand bien 
même sur tous les végétaux étrangers dont on 
doit la connaissance à M. Rast, un seul serait 
adopté par notre économie rurale, cet agronome 
n'aurait-il pas acquis des droits sacrés au sou- 
venir de la postérité ? 

Faut-il vous rappeler, Messieurs, ce grand 
nombre de notices intéressantes que M. Madiot 
vous présente, depuis plusieurs années sur les 


de Lyon. IT 
espèces la plupart nouvelles qu’il cultive dans la 
pépinière dont la direction lui est confiée? Vous 
avez vu que déposées dans vos comptes rendus , 
ces notices en sont fréquemment tirées pour enri- 
chir des journaux agronomiques , et qu’elles atti- 
rent à leur auteur de divers points du royaume la 
demande des belles espèces qui y sont spécifiées 
et décrites. Je me contenterai de citer ici plu- 
sieurs espèces intéressantes de châtaigniers , de 
melons, d’arbres à fruits, et cette poire hâtive, 
d’un goût exquis , déjà connue partout sous le 
nom de Poire Jolimont. 

D'autres expériences ont été faites par plu- 
sieurs de nos confrères sur l’acclimatation des 
végétaux étrangers et les produits qu’ils pour- 
raient nous fournir. C’est ainsi que M. de la 
Chassagne avait obtenu de l’asclépiade de Syrie 
une matière soyeuse d’une blancheur éclatante , 
qui pendant un instant avait attiré l'attention 
des manufacturiers, et qui peut-être a été rejetée 
trop légèrement. Le même agronome se deman- 
dait pourquoi l’on ne cherchäit point à utiliser 
les soies de la linegrette. Quel triomphe pour 
notre agriculture si elle pouvait fournir à notre 
industrie un succedané du coton! Il est en eftet 
bien reconnu que malgré tous les eflorts des agri- 
culteurs, parmi lesquels nous nommerons M. 
Faissolles , le cotonnier se refusera toujours à 
vivre en pleine terre dans nos climats. 


12 Société royale d'Agriculiure 

M. Giraud de Montbellet avait introduit dans 
une de ses terres le melique de Sibérie (melica 
allissima) graminée qui , d'après le savant Yvart 
est précoce, rustique , abondante et fournit de 
bons fourrages. M. de Montbellet lui reconnut 
toutes ces qualités, à l’exception de la dernière, 
et il cessa de la cultiver. Une plante vantée par 
M. Yvartne devrait peut-être pas être condamnée 
d’après une seule expérience. 

Deux graminées céréales du genre froment 
ont été l’objet. de plusieurs essais; l’une qui 
avait usurpé le nom de riz sec de la Chine, a 
été reconnue pour être le /rilicum monoccocum. 
L’autre est le polonicum , froment de Pologne. 
Parmi ceux qui se sont occupés de la première, 
on distingue nos confrères MM. Rieussec et 
Bouchard - Jambon, qui l'ont trouvée d'une 
grande fécondité et d'une culture très - facile ; 
mais ils se sont assurés en même temps que 
son grain éprouvait à la mouture un grand dé- 
chet , qu’il était peu propre à la panification , 
et que son usage le plus convenable était de 
le consommer en soupes sous forme de gruau. 
C'est principalement à M. Rey-Monléan que 
nous devons des observations sur le froment de 
Pologne. Cet agronome lui a reconnu pareille- 
ment une grande fécondité, du moins dans la 
première année de sa culture; mais il Pa vu 


de Lyon. 13 
dégénérer progressivement , et les expériences 
auxquelles il s'est livré à l'invitation de M. Fran- 
çois de Neuchâteau , pour en panifier la farine, 
n’ont pas eu des résultats satisfaisans. M. Othon 
de Moidière a obtenu des résultats différens dans 
ses domaines ; le /riticum polonicum ÿ a subsisté 
plusieurs années sans dégénération, et il en a 
obtenu un pain de bonne qualité. Vous jugerez 
sans doute, Messieurs, qu'il ne faut pas se 
presser d’éliminer ces deux fromens de notre 
économie rurale; fussent - ils peu propres à 
faire du pain, ils fourniraient peut - être de 
bons fourrages , des engrais à enterrer en verd, 
des matières premières pour la fabrication des 
chapeaux. Il est peu d'innovations en agriculture 
qu’on n'ait abandonnées plusieurs fois avant de 
les adopter définitivement. 

Pourquoi ne cultiverait-on pas le tournesol 
pour en extraire de la potasse? N'est-il pas dé- 
montré d'après les expériences de M. Deschamps 
père, qu’on peut retirer des cendres de cette 
corymbifère jusqu'à 60 pour 100, de lalcali 
carbonaté ? Le même agronome vous a entrete- 
nu de la gesse tubéreuse comme pouvant fournir 
un tubercule alimentaire ; du thé du Mexique, 
(chenopodium ambrosioides ), plante si facile à 
cultiver, comme pouvant suppléer le thé de la 
Chine. Il vous à communiqué sur ces deux 


14 Société royale d'Agriculture 
plantes des faits que vous avez jugés dignes 
d'une attention sérieuse. 

Ai-je tout dit? Mais non content d'élever de 
nombreuses colonies d'arbres exotiques, M. Rast 
avait observé les phénomènes de la végétation 
dans un grand nombre de végétaux herbacés dont 
il proposait la culture , tels sont le chou belge 
(Brassica oleracea v. viridis brumalis) , crucifère 
très-productive , excellente pour nourrir le bé- 
tail ; le safran bâtard ( Cathamus tinctorius ) dont 
le produit tinctorial est réclamé par nos manu- 
factures. Le lin de la nouvelle Zélande ( Phor- 
mium lenax ), qui résiste, en pleine terre, àla 
rigueur de nos hivers, et qui, sans doute un 
jour , sera placé au premier rang de nos plantes 
textiles. 

Le souchet domestique , (Cyperus esculentus ), 
qui, selon M. Rast, fournit non-seulement une 
substance alimentaire, mais encore de l'huile de 
bonne qualité. 

Une plante plus oléagineuse est cultivée par 
M. Bouchard-Jambon. C’est la pistache de terre, 
(Arachys kypogea ). Cette légumineuse, dont 
la fane est un fourrage excellent, porte une 
graine qui donne la moitié de son poids d'une 
huile qui, selon notre confrère , peut être com- 
parée pour les usages de la table, à la meilleure 
de noix, Etant très-siccative , on peut, sous ce 


de Lyon. 15 
rapport , l'employer utilement dans les arts. 
Malgré tant d'avantages, l’arachide a fait autour 
de Lyon peu de progrès (1). Doit-on au reste 
s'étonner que la pistache de terre ait tant de peine 
à se propager, quand on songe aux obstacles qui, 
pendant des siècles, s'opposèrent à la culture en 
grand de la pomme de terre et du maïs, du 
trèfle et du mürier ! 

Que de plantes sont dédaignées, qui pour- 
raient fournir abondamment le principe oléagi- 
neux , et suppléer ainsi le noyer qui devient 
tous les jours plus rare, et l'olivier dont les 
récoltes semblent de plus en plus précaires! 
Cependant la consommation de l'huile augmente 
en France dans une étonnante proportion , et 
cela non-seulement pour l'éclairage et les autres 
“usages domestiques , mais pour les fabriques 
de savon plus nombreuses et plus importantes 
qu’autrefois, pour les teintures, les manufac- 
tures de draps et autres usines qui se multiplient . 
partout ; aussi à la honte de son agriculture , la 
France est-elle sur lachat des huiles, tributaire 
de l'étranger. 

Vous avez senti, Messieurs , la nécessité de 
multiplier les plantes herbacées oléagineuses , 


(2) C’est peut-être parce qu’on ne peut pas conserver la 
graine de cette plante , qu’elle a été abandonnée en divers 
Lieux. 


16 Sociélé royale d'Agriculture 

lorsque vous avez encouragé la culture du 
pavot dans ce département. Déjà des champs 
étendus sont , dans la plaine du Beaujolais , con- 
sacrés à la culture de cette plante. Vous avez 
applaudi aux efforts de plusieurs propriétaires 
de vignobles qui cherchent à extraire de l'huile 
douce des pepins de raisin , et vous avez appris 
avec satisfaction que les cultivateurs de nos 
montagnes commencent à ramasser le fruit du 
hêtre pour en extraire une huile jusqu'ici dé- 
daignée. 

D'autres plantes économiques réclament votre 
sollicitude , et c'est à votre voix qu’elles se pro+ 
pageront dans nos campagnes, telles sont la 
gaude , la garance et le houblon. Vous êtes bien 
convaincus , Messieurs , et l'exemple de ces 
dernières années vous l’a démontré de plus en 
plus, que dans notre France trop d’espace est 
emblavé, et que pour l'intérêt de l'agriculture, 
de Pindustrie et du commerce il faut donner à 
des plantes dont linsuffisance nous rend tribu- 
tairés de l'étranger, une partie du terrain que 
nous prodiguons aux céréales. 


de Lyon. 17 


STATISTIQUE AGRICOLE 
DU DÉPARTEMENT. 


Depuis quelques années un grand nombre de 
Savans s'occupent, avec un zèle que rien ne 
peut ralentir, de recherches sur l'état des con- 
trées qu'ils habitent. Ils les étudient sous le 
triple rapport des lieux, des choses et des 
hommes. Non contens d'explorer ce qui existe ; 
ils remontent à l'origine des établissemens et 
des institutions. Ils proposent des améliorations 
et des perfectionnemens. C'est ainsi que, dans 
le plan de leurs travaux philantropiques , le 
passé et l'avenir s'unissent au présent. Partout 
Padministration seconde des recherches qui se 
lient étroitement à la prospérité nationale. Dans 
un pays voisin , des cours publics sont institués 
où l'on enseigne , avec l'histoire locale , la topo- 
graphie, et l’économie applicable à la contrée. 
Un professeur de Gottingue (1) a donné le nom 
de s/alistique à cet ensemble de connaissances. 
Ce terme a été admis dans toutes les langues 
de PEurope, et quoiqu'on le détourne quelque- 
fois de son acception, il exprime toujours la 
description d’un pays. | 

(1) Archenwal, 

2 


Statistique 
de la commune 
des Hayes ; par 
M. Cochard. 


18 Sociélé royale d'Agriculture 

Cette description peut n’être pas complète, 
elle peut se borner à l'agriculture, au commerce, 
à d’autres objets déterminés ; de là les statistiques 
agricoles , commerciales , archéologiques, etc. 


C'est sous tous ces rapports que M. Cochard 
a décrit un grand nombre de communes inté- 
ressantes de ce département. Depuis plusieurs 
années il vous communique ses utiles travaux 
en ce genre. Vous les appréciez tous ; mais vous 
fixez principalement votre attention sur ceux 
d'entre eux qui sont relatifs à l’objet spécial de 
votre institution. Aussi dois-je m'imposer des 
sacrifices en vous présentant l'analyse de la no- 
tice statistique que M. Cochard vous a lue cette 
année , et me borner, pour ainsi dire, à en 
extraire ce qu’elle renferme de relatif à l'agri- 
culture, 

Cette notice statistique a pour objet Les Hayes, 
commune du canton de S.® Colombe, sise à 
dix kilomètres sud-ouest du chef-lieu, et six 
nord de Condrieu. Une chaîne de montagnes 
échappées du Pila la domine au midi , elle oc- 
cupe l'arête d'un plateau inférieur qui court au 
nord par une forte inclinaison; une partie de 
ses eaux coule dans le Rhône, l’autre dans le 
Gier. Elle est séparée de la commune d'Echalas 
par deux petits ruisseaux, le Aw/y etle Mézerin, 


de Lyon. ïg 
dé Sémon par le Colume, de Condrieu par le 
Cordeliere, ces deux derniers ruisseaux se réu- 
nissent en un seul qui, sous le nom de Bassenon, 
se jette dans le Rhône au-dessous de ‘Tupin , un 
grand chemin venant de Condrieu la sépare de 
Longes. 

Son territoire offre des pentes roïdes qui en 
rendent la culture extrêmement pénible, et c'est 
par des soins assidus et un bon système de tra- 
vail que l'on prévient les dégâts du terrain qui 
ont jadis creusé de profonds ravins et formé des 
gorges considérables. Les sommités sont dans 
quelques points, couvertes de taillis et de pins, 
la vigne se montre en des lieux abrités ; mais 
sous uné température aussi froide elle est ex- 
posée aux gelées et donne un vin très-médiocre. 
On voit des prairies dans les vallées, et autour 
des maisons , des terrains d’un assez bon produit. 

De grandes forêts couvraient anciennement 
cette partie de la montagne, sur la fin du quin- 
zième siècle on y courait encore la grande bête ; 
à peine aujourd’hui rencontre-t-on quelques 
lièvres , quelques renards sur un sol où le cerf, 
la biche , le chevreuil , le sanglier se réfugiaient 
dans des retraites impénétrables. Les défriche- 
mens, le gaspillage des bois , le braconnage ont 
fait disparaître les grosses bêtes , et bientôt on 
n’y trouvera plus aucune espèce de gibier, 


20 Societé royale d'Agricullure 

M. Cochard trace ainsi le caractère des habi- 
tans de cette contrée ingrate : 

» Les vents qui règnent sur ces hauteurs, le 
froid excessif qu'on y éprouve durant l’hiver , la 
neise qui couvre souvent le sol de plusieurs 
pieds, en éloigneraient les habitans s'ils n'y étaient 
retenus par l’amour de la propriété, par l'atta- 
chement aux lieux où ils ont vu le jour , et où 
reposent les ossemens de leurs pères. Ils savent 
tirer d’un terrain si peu favorable quelques res- 
sources ; et comme leurs besoins sont extrême- 
ment bornés, ils trouvent dans la culture des 
céréales , dans la vente de leurs bois et d’une 
partie de leurs fourrages les moyens de pourvoir 
à tout ce qui leur est nécessaire, ils vivent 
même heureux parce qu'ils sont sans ambition. 
La vue des riches plaines qui se déploient au- 
dessous d’eux avec tant de magnificence n’excite 
dans leur ame aucune envie , aucun désir ; sa- 
tisfaits de ce qu'ils possèdent , ils ne recherchent 
rien au-delà. Aussi ne les voit-on jamais aban- 
donner leurs modestes et paisibles demeures 
pour courir après les faveurs de la fortune et 
les jouissances des citadins. » 

En parlant des mœurs et habitudes des bons 
habitans des Hayes, M. Cochard dit encore: 
» Dans une paroisse dont toutes les maisons sont 
isolées, les habitans doivent avoir naturellement 


de Lyon. 21 
de la timidité, une certaine réserve, Pair sé- 
rieux, c’est ce qu’on remarque en effet dans 
ceux des Hayes ; ils sont d'une taille ordinaire, 
d’un tempérament sec, mais robustes, laborieux 
et sobres, c’est au point qu'il y a quelques an- 
nées on ne trouvait pas un seul cabaret dans 
la commune; il s’en est établi deux, mais si 
peu fréquentés qu’ils auront de la peine à se 
soutenir. 

Nous passons sous silence ce que dit l'auteur 

touchant l'étendue territoriale | le revenu , les 
contributions de cette commune, nous ne dirons 
rien de sa population , ni de son histoire, quoique 
l'auteur ait su la rendre intéressante par de sa- 
vantes recherches , nous croyons mieux remplir 
Ja mission qui nous est confiée, en déposant ici 
ce qui, dans la notice sur la commune des Hayes, 
a rapport à l’agriculture. 
_.» Les terres, presque toutes en pente, exigent 
dans leur, culture une surveillance très-active 
pour n'être pas entraînées par les eaux ; ce n’est 
qu’en multipliant les béalures, qu’en les combi- 
nant avec sagesse que l'on peut prévenir de 
grands dommages. » 

» Le froment, la blondée, le seigle, orge 
et l'avoine sont les principales productions des 
terres labourables; les meilleures ne donnent 
pas, année commune, au-delà de quatre pour 


22 Société royale d'Agriculture 

un à cause des accidens occasionés par une tem- 
pérature rigoureuse. Cette quotité est encore 
moindre en seigle. » 

» On recueille du colzat et du chanvre, maisen 
petite quantité ; quant à la pomme de terre , elle y 
réussit parfaitement. Les vignes , presque toutes 
à cornes, ne rapportent qu’un vin extrêmement 
acide et qui dure à peine un an. Les prairies, si- 
tuées dans le fond des vallons, fournissent du 
fourrage en assez grande quantité, mais très- 
mélangé de jonc et de laîches. Tout mauvais 
qu'il est, ce foin est vendu en grande partie et 
sert à acquitter les contributions exhorbitantes 
auxquelles sont imposés des cultivateurs pauvres 
et dénués de toute espèce d'industrie. On estime 
que toutes les années il sort des Hayes environ 
trois mille quintaux de foin qui sont consom- 
més dans les communes voisines. Cette ‘expor- 
tation ne permet pas de tenir un bétail nom- 
breux, de faire des élèves, ce‘qui procurerait 
une quantité de fumier dont la disette se fait 
sentir. » 

» Cette commune ne comptait en 1822 que 
46 bœufs et 148 vaches , 646 moutons ou bre- 
bis , 92 chêvres et 5 à 6 chevaux, quantité bien 
insuffisante pour un territoire si étendu. » 

Les bois ne produisent que du fagotage qui 
est voituré à Condrieu et vendu aux boulangers. 


de Lyon. 23 
Ici pas plus que dans les autres communes du 
canton on ne s’occupe pas à dépouiller le chêne 
de son écorce pour le tannage. On suit, pour la 
culture des terres , les anciennes méthodes ; on 
cultive peu d'arbres à fruit, cependant le chä- 
taignier vient très-bien sur ce terrain, et le 
pommier s'y acclimaterait facilement ; si on y 
multipliait ces arbres on en retirerait des res- 
sources précieuses , surtout dans les années 
pauvres en grains et en pommes de terre. » 

» Le terrain est en général rougeatre , grave- 
leux et sans consistance ; il a assez de profon- 
deur; mais comme il est exposé aux rigueurs 
d'une température excessive, il aurait besoin 
d'être échauffé par des engrais abondaus dans 
lesquels il entrerait un peu de chaux. Malheu- 
reusement le cultivateur , constamment pressé 
par le besoin , ne s’occupe point à améliorer , il 


pratique comme son père, sans examiner si un, 


mieux est possible. L'exemple pourrait peut-être 
V'éclairer; mais qui pourrait le donner dans un 
pays où il n'existe pas un seul bourgeois ? 


C’est dans l'intérêt de la statistique que notre 
confrère a fait une excursion savante dans la 
plaine du Dauphiné, voisine de notre ville. Le 
bel établissement de M. Poidebard s’est trouvé 
sur ses pas ; il Pa visité avec empressement, il 


Etat actuel 
de la magno- 
nerie de M. 
Poidebard , à 
St.-Alban. 


24 Sociélé royale d'Agriculture 

a recueilli sur. son état actuel des notes dont 
vous avez reçu la communication avec un inté- 
rêt toujours nouveau. Parmi les détails qu’il a 
mis sous vos yeux, il en est sans doute qui 
sont consignés dans un rapport que M. le doc- 
teur Terme vous présenta l'année dernière sur 
le même sujet, et dont vous ordonnâtes l'im- 
pression. Telle est Pimportance non-seulement 
Jyonnaise mais nationale de l’établissement de 
M. Poidebard, que pour ne rien omettre de ce 
qui le concerne, on doit s’exposer à tomber 
dans quelques répétitions. C’est ainsi que M. 
Cochard s'exprime à son sujet, 

» On ne peut visiter St. Alban sans aller voir le 
magnifique établissement que M. Poidebard y a 
créé. Il a fait construire auprès de son habitation 
un très-grand bâtiment (il a 80 pieds de longueur 
sur 27 de large), parfaitement aéré, destiné à 
y élever des vers à soie et filer les cocons qui en 
proviennent ou qu'il achète. » 

» Ce bâtiment, composé d’un rez-de-chaussée 
et d'un étage au-dessus, offre deux pièces im- 
menses. Dans celle d'en haut tout l’espace qu'elle 
contient était garni sur la fin du mois de juin 
d'un nombre infini d’étagères sur lesquelles était 
accumulée une récolte précieuse decocons blancs. 
Je ne pouvais me lasser d'admirer l’ordre qui ré- 
grait dans cette magnonerie ; la propreté dont elle 


de: Lyon. 25 
était constamment l'objet, l'art avec lequel la bru- 
yère et le genêt avaient été dessinés en arceaux 
pour recevoir le ver qui venait y déposer son riche 
tissu ; enfin les soins en tous genres que les 
personnes chargées de cette éducation ne ces- 
saient de prodiguer à l'insecte précieux ; aussi 
la vue ni l'odorat n'étaient affectés de rien de 
désagréable , et l'opération n'éprouvant aucune 
contrariété , aucun dérangement , s’achevait de 
la manière la plus parfaite. On reconnaissait 
aisément qu'un résultat aussi favorable était dû 
principalement au zèle et à l'activité de Mad. 
Poidebard ; elle exerce une surveillance conti- 
nuelle sur les diverses parties de ce travail et 
seconde de tout son pouvoir les sages et utiles 
combinaisons de son époux. » 

» Je suis retourné quelque temps après chez 
M. Poïdebard , dans l'objet d'examiner sa fila- 
ture , et j'ai eu la satisfaction de me convaincre 
qu'il eût été diflicile d'élever un atelier plus | 
commode et moins dispendieux que celui qu’il a 
fondé, Le triage qu’il fait faire de ses cocons en 
bons, médiocres et mauvais, lui procure d’abord 
un brin plus uniforme ét plus régulier ; ensuite 
l'emploi d’un étoufloir chauffé à la vapeur pour 
faire périr la chrysalide offre un procédé plus 
expéditif, plus sûr et plus parfait que l'usage 
du four dont on se sert communément pour 


26 Sociélé royale d'Agricullure 
remplir ce but, ce qui est une amélioration 
sensible dans l'art de tirer la soie. » 

.» Mais l'opération même de la filature qui 
avait lieu dans la pièce au rez-de-chaussée du 
grand bâtiment nouvellement construit, pré- 
sentait un spectacle imposant et curieux. Trente- 
six tours garnis de leurs machines et de con- 
duits destinés à transmettre un calorique suf- 
fisant, étaient mis en action par une grande 
roue à tambour à laquelle un cheval donnait 
limpulsion. Une femme placée à chaque tour, 
occupée à battre les cocons et à filer la soie, 
remplissait sa tâche avec plus de facilité que 
dans la méthode ordinaire. Enfin, un appareil 
aussi simple qu'ingénieux , imaginé par M. Ger- 
soul , et consistant en une chaudière munie d'un 
vapomètre et d’une soupape de sûreté, assise 
sur un foyer alimenté par du charbon de terre, 
suffisait pour porter et entretenir l’eau de toutes 
ces bassines à la température voulue. Un grand 
conducteur, traversant horizontalement l'atelier 
dans toute sa longueur, remplissait cet office 
au moyen de conduits latéraux , disposés de dis- 
tance en distance qui descendaient vers les bas- 
sines. Ces conduits, garnis de leurs robinets 
près de leur extrémité, pour activer ou diminuer 
la chaleur, se terminent par un tuyau qui 
plonge dans la bassine , et qui, percé d'un 


de Lyon. 27 
grand nombre de petits trous , laisse échapper 
la vapeur. » 

» M. Poidebard , en adoptant ces divers pro- 
cédés , a porté la filature de la soie au plus haut 
degré de perfection , en même temps qu'il y ren- 
contre une grande économie soit sous le rapport 
du combustible, soit par la suppression des 
tourneuses. Il en résulte également que la vapeur 
se condensant dans les bassines , renouvelle sans 
cesse l’eau avec une eau distillée, et donne par 
conséquent à la soie plus d'éclat, plus de bril- 
lant ; ainsi les innovations qu'il a introduites 
réunissent tous les avantages. » 

» Ce citoyen industrieux a encore établi dans 
une partie d'anciens bâtimens , des ateliers pro- 
pres.au moulinage des soies, et dont les rouages 
sont mis en activité par des chevaux. En sorte 
que toutes les opérations relatives à ce beau tissu 
qui précèdent celles de la teinture se font dans 
un même local, avec une précision, une acti- | 
yité et une surveillance que l’on rencontre rare- 
ment ailleurs, Aussi les soies confectionnées chez 
lui ont-elles plus de valeur et sont-elles plus re- 
cherchées que celles qui proviennent des ateliers 
où l’ancienne pratique est encore en usage. » 

» Cependant tous les soins qu’exige une 
aussi grande manutention n'ont pas distrait M. 
Poidebard d'autres occupations également impor- 


28 Sociéle royale d Agriculture 

tantes. Il a fait faire, dans son domaine, des plan- 
tations de müriers considérables ; leur état pros- 
père révèle ses soins et son intelligence. Il'n’y a 
pas de doute que d’ici à quelques années il ne 
recueille suffisamment de feuilles pour élever 
de 60 à 80 onces de vers à soie. » 

» [l s’occupe aussi de l'éducation de quelques 
chèvres du Thibet, de leur croisement avec des 
chêvres indigènes, et des moyens de tirer le 
parti le plus avantageux de leur duvet. » 

» Le jury de la dernière exposition de Fin- 
dustrie française au Louvre, ainsi que la société 
royale et centrale d'agriculture de Paris, en dé- 
cernant l’un et l’autre une grande médaille d'or 
à M. Poidebard n’a fait qu'exciter de plus en 
plus son zèle et ses efforts. Les améliorations 
nombreuses dont il enrichit chaque jour son 
établissement en sont une preuve convainéante. 
Ce manufacturier habile a fait faire un grand 
pas au pérfectionnement de la filature de soie. 
Nous n’avons plus maintenant à redouter en 
ce genre la supériorité des organsins du Pié- 
mont.» 
= » Une méthode aussi heureuse ne peut man- 
quer de se propager de proche en proche, et 
d’influer puissamment sur la prospérité de nos 
fabriques d'étofles. » 


, 


de Lyon. 29 
C'est sous. d'autres points de vue que M, 


Sur le même 
établissement; 


Trolliet a examiné le bel établissement de M, ,,, 7. Toi. 
Poidebard , il vous a donné d’intéressans détails le. 


sur la manière dont on y cultive les müriers, 
dont on y élève les vers à soie. 

Les mûriers sont espacés de 15 pieds , par- 
faitement alignés , disposés en losange et greflés 
avec la variété recommandée par M. le comte 
Dandolo. Cette variété, dont les branches sont 
régulières et les feuilles larges , offre pour la 
cueillette une grande économie ; c’est au point 
qu'elle ne coûte que 60 cent. par quintal, tandis 
qu'elle coûte 3 fr. prise sur les sauvageons. 

La pépinière du Rhône a fourni les mûriers 
de M. Poidebard , ils réussissent très-bien sur 
un sol argilleux, cultivé à la bêche , et fécondé 
en partie par la litière des vers. Entre ces ar- 
bres est plantée une jeune vigne dont les ceps 
sont espacés ; et en attendant qu’elle se déve- 
loppe, des pommes de terre et diverses plantes 
potagères y croissent. 

Ce n’est pas moins de quatre-vingt-quinze 
onces de vers à soie blanche que M. Poidebard 
a fait .éclore, quarante dans sa magnonerie , 
cinquante dans des villages voisins. La magno- 
nerie se compose de trois ateliers, dont le plus 
grand a servi au développement des vingt-cinq 
onces de graines. Voici la description que M. 
Trolliet donne de ce vaste atelier : 


30 Sociélé royale d'Agriculture 

« Placé dans un bâtiment neuf, au-dessué 
de l'atelier destiné à la filature , il a, comme 
ce dernier , 80 pieds de long et il contient troïs 
rangs de claies, chaque claie se compose de neuf 
rayons de planches minces ou lambris, supportés 
à leurs extrémités par des montans, et soutenues 
dans les intervalles par des pieds droits, placés 
sous les traverses qui les lient. Leur largeur 
est de 4 pieds et demi, elle est proportionnée 
à la longueur du bras , de manière que la main 
peut être facilement portée au centre. La hau- 
teur des rayons, déterminée par la longueur 
de la bruyère, est d'environ 15 pouces. Deux 
personnes peuvent facilement circuler entre les 
claies. » 

» En outre des grandes fenêtres, on a pra- 
tiqué aux murs et aux planchers un grand 
nombre d'ouvertures par où l’air se renouvelle 
selon le besoin : on les tient libres ou fermées. » 

» Trois poêles placés à des distances calculées, 
établissent une température convenable ; un 
thermomètre et un hygromètre mesurent la 
chaleur et l'humidité. » 

» Lorsque les vers sont éclos, on les trans- 
porte sur les claies du milieu. À mesure qu'ils 
grossissent et qu’ils ont besoin de plus d'espace, 
ils sont portés sur les claies voisines à l’aide de 
petits rameaux dont ils couvrent les feuilles. » 


de Lyon. 31 

M. Poïdebard a occupé dans le moment de la 
briffe jusqu’à cent personnes à 20, à 30 sous 
par jour ; des intempéries lui ont fait perdre en 
1823 un tiers de sa récolte ; il estime à 70 
quintaux la quantité qu’il a obtenue de 95 onces 
de graines, ce qui lui donnera environ 6 quin- 
taux de soie blanche de la plus belle qualité, 
En l'évaluant seulement au prix de 3ofr. la livre, 
prix des plus belles soies jaunes , quoique nous 
soyons fondés à croire qu'elle a plus de valeur, 
le produit total sera de 18000 fr.; si on déduit 
la moitié de cette somme pour les frais, ainsi 
que le pense M. Poïidebard, il n'en sera pas 
moins très-avantageusement dédommagé des 
soins auxquels il s'est livré. » 

» Ses bénéfices sont accrus par la valeur de 
ses feuilles , par l’économie que lui procure le 
procédé de M. Gensoul, et les avantages qu'il 
retire de sa mécanique servant au moulinage.» 


» Comme dans les années précédentes, l’admi- 
nistration vous a demandé des renseignemens 
précis sur les récoltes du département , elle les 
réclame de vous afin de mettre le Gouvernement 
à même de donner au commerce des grains une 
impulsion conforme aux ressources et aux be- 
soins de chaque localité, de préserver l'agricul- 
ture du préjudice que lui causerait une stagna- 


. Sur la statis- 
tique des ré- 
coltes en 1623. 


32, Sociélé royalè d'Agriculture 

tion de ses produits ; enfin de provoquer et de 
faciliter, soit les exportations , soit les arrivages 
extérieurs , soit les mouvemens de la circulation 
intérieure. 

La commission que vous avez chargée de re- 
cueillir ces renseignemens, vous a présenté son 
rapport par l'organe de M. Rémond (1). 

Voici les questions, adressées par l'autorité , 
et les réponses que vous avez faites : 

Première question : Combien de fois chaque 
hectare rend-il , années communes , la semence 
pour chaque espèce de grains ? 

Réponse : ‘Terme moyen, à peu prés cinq 
pour un, et le produit d’un hectare, en sus 
de la semence est, années communes, d'environ 
dix hectolitres. 

Deuxième question. Combien de fois chaque 
hectare a-t-il rendu en 1823 la semence, pour 
chaque espèce de grains ? 

Réponse. Terme moyen, chaque hectare a 
rendu environ quatre pour un. 

Troisième question. Combien faut-il d’hecto- 
litres de semence par hectare pour chaque es- 
pèce de grains ? 


(1) Les autres membres de la commission étaient MM: 
Cochard , Muthuon , Billon , Bouchard-Jambon et Guerre. 


de Lyon. 33 
Réponse. 1 faut trois hectolitres de froment 
pour ensemencer ün hectare. 


Quatr ème question. Quel a été en hectolitres 
le produit d’un hectare pour chaque espèce de 
grains ? 


Réponse. Il a été de neuf hectolitres. 


Cinquième question. Quel a été en hectolitres 
le produit total de la récolte de chaque espèce de 
grains d'après le nombre d'hectares ensemencés ? 

Réponse. En froment. . . . 200,000 hect. 

En méteil. . ... 50,000 
En seigle . . . . . 150,000 


En orge. ..... 20,000 
En sarrazin. . . . 30,000 
En maïs et millet. 4,000 


En avoine. . . .. 25,0000 
En légumes secs. 12,000 
En autres menus 
grains, tels que 
pois, vesces. . . 12,000 
Sixième question. À combien d’hectolitres éva- 
luez-vous la récolte en châtaignes et farineux de 
toute nature , autres que les grains et les 
pommes de terre ? 
Réponse. À 2500. 
Seplième question. À combien d'hectolitres 
évaluez-vous la quantité de grains restant à l'ou- 


3 


34 Société royale d'Agriculture 
verture de la récolte et provenant du sol du dé- 
partement ou d'achats faits ailleurs ? 

Réponse. À près de 2,000000 d'hectolitres. 

Dans aucun temps peut-être, il n’y a eu dans 
ce département , une plus grande quantité de 
grains de toute espèce en magasin; cette accumu- 
lation préjudiciable à l’agriculture , tient moins 
à la fertilité de l'année dernière et des précé- 
dentes qu’au défaut d'écoulement des grains dans 
les départemens auxquels Lyon sert d'entrepôt , 
et qui , eux-mêmes sont au moment actuel, sur- 
chargés de grains. 

Les mêmes questions , notamment la 1.'€ et 
la 3.° sont faites pour les pommes de terre, en 
y ajoutant toutefois combien il y a d’hectares en- 
semencés en cette espèce de farineux. 

Réponse. Un hectare ensemencé en pommes 
de terre reçoit 24 hectolitres de semence, et peut 
rendre , années communes , quinze pour un de 
produits. D'un autre côté, on peut évaluer à 
cinq hectares par communes , terme moyen, 
l'espace ensemencé en pommes de terre; ainsi, 
du moment qu'il existe dans le département 
250 communes, on peut porter le nombre d’hec- 
tares qui y sont ensemencés en pommes de terre 
à 1250, eten multipliant ce nombre par celui 
de 360 qui est celui du produit en hectolitres 
dun hectare, on aura pour le département entier 


de Lyon. 35 
un total de 453,600 hectolitres de pommes de 
terre. | 

Huilième queslion. Quel est le poids commun 
d'un hectolitre de froment et de seigle, provenant 
de la récolte de 1823, en distinguant, pout 
chaque espèce, la première qualité de la seconde ? 

Réponse. Le poids d’un hectolitre de froment, 
première qualité, est de 75 kilogrammes , et de 
deuxième , de 72; celui de la première qualité 
de seigle est de 68 , et de la seconde de 62. 

Pour ce qui concerne les récoltes en vin de 
l'année 1823, on peut dire qu'elles ont été en 
quantité à peu près égale à ce qu’elles furent 
l'année précédente ; mais leurs qualités ont été 
de beaucoup inférieures. 


Dans la séance de cloture, il vous est parvenu 
une dépêche de M. le préfet , par laquelle ce ma- 
gistrat demandait des renseignemens positifs sur 


la statistique des récoltes en 1824. Il témoignait 


le désir de les recevoir sous le plus bref délai, 
devant adresser à son Excellence le Ministre de 
l'intérieur , ce tableau dans le courant du mois 
d'octobre, 

Comme il n'était pas possible de renvoyer 
jusqu'à la rentrée, les réponses aux questions 
proposées par M. le préfet, dans l'intérêt de 
l'agriculture et de l'économie publique, M. 


Rapport sur 
la statistique 
des récoltes en 
1824; par le 
méme. 


36 Societé royale d'Agriculture 

Rémond qui, plusieurs fois , a été l'organé de 
votre commission permanente de statistique des 
récoltes , a bien voulu se charger de rédiger ces 
réponses, après toutefois s'être concerté avec 
plusieurs de nos confrères. 

Cette circonstance , qui n'est pas nouvelle, 
et qui peut se reproduire, vous déterminera 
peut-être, Messieurs, à nommer chaque année, 
avant de vous séparer, une commission qui, 
réunie à ceux des membres du bureau séden- 
taires à Lyon , serait chargée pendant les féries, 
d'agir en votre nom toutes les fois que l'urgence 
serait évidemment reconnue. Cet usage est suivi 
dans plusieurs sociétés savantes et de bien pu- 
blic. Elle faisait partie du règlement de l'ancienne 
société royale d'agriculture de Lyon. 


Voici , Messieurs, les questions adressées par 
l'autorité et les réponses qui ont été faites en 
votre nom. 


Première question. Combien de fois chaque 
hectolitre a-t-il rendu en 1824, la semence pour 
chaque espèce de grains ? 

Réponse. Cinq pour un en sus de la semence. 


Deuxième question. Quel a été en hectolitres 
le produit d’un hectare pour chaque espèce de 
grains ? 

Réponse. Environ douze hectolitres. 


de Lyon. 37 

Troisième question. Quel a été en hectolitres 

le produit total de la récolte de chaque espèce de 
grains ? 

Réponse. En froment . . . . . . 250,000 hect. 


En méteil ....... 50,000 
En seigle. . ...... 120,000 
En orge ........ 15,000 
En sarrazin . ..... 15,000 


En maïs et millet. . . 3,000 
En avoine . . «. . .. 200,000 
En légumes secs. . . . 10,000 
Autres menus grains , 

pois, vesces, etc. . . 10,000 


Quatrième question. À combien d’hectolitres 
évaluez-vous la récolte en châtaignes et autres 
farineux de toute nature, autres que les grains 
et pommes de terre ? 


Réponse. À 3,500 hectolitres. 


Cinquième question. À combien d'hectolitres 
évaluez-vous la quantité de grains restant à 
louverture de la récolte, et provenant du sol 
du département ou d’achats faits ailleurs? Les 


mêmes questions sont faites pour les pommes 
de terre. 


Réponse. À 1,800,000 hectolitres de grains. 
Pour ce qui concerne les pommes de terre, 
il n'en existait point à l'ouverture de la récolte , 


Observations 
œnologiques , 
recueillies dans 
Jes années 1822 
et 1823 ; par 
M. R'y-Mon- 
léan, 


38 Société royale d’Agriculluré 
et on peut en évaluer le produit à 410,000 hect. 

Sixième question. Quel est le poids d'un hec- 
tolitre de froment , de méteil, de seigle et d'orge, 
en distinguant chaque espèce de grains ? 

Réponse. Le poids d'un hectolitre de froment 
peut être évalué à 76 kilogrammes, 

Celui du méteil à 71 kilogr., 

Celui du seigle à 62 kilogr. , 

Celui de l'orge à 60 kilogr. 

M. le préfet demande encore un aperçu sur 
l'espérance de la récolte des vins , avec indication 
tant de la qualité que de la quantité présumée , 
comparativement avec la récolte précédente. 

Réponse. La récolte en vin pour 1824 , est 
généralement d’un grand tiers moindre que celle 
de 1823, elle ne s'élève pas au-dessus du tiers 
d'une bonne récolte. Quant à la qualité, quoi- 
que peu remarquable , elle est bien supérieure 
à celle de la récolte de 1823. 


M. Rey-Monléan vous annonça l'année der- 
nière avoir obtenu en 1822, à la faveur du pro- 
cédé Gervaisien et au moment du décuvage une 
augmentation de dix pour cent sur la quantité 
du vin de sa récolte ; il vous a dit, cette année, 
qu’à ce bénéfice déjà très-remarquable , se joi- 
goit, au moment du soutirage, celui de quatre 
pour cent; et que ce vin se vendit cinq francs de 


de Lyon. 39 
plus par hectolitre que le vin de la même récolte 
fabriqué d’après le procédé ordinaire. Notre con- 
frère croit avoir découvert encore un autre ayan- 
tage à la méthode de M.lle Gervais, celui d’empé- 
cher dans quelques circonstances le vin de tourner 
à l'aigre. C’est ainsi, dit-il, qu'on a observé dans 
le département de la Dordogne que du vin fabri- 
quéen 1822 par le procédé ancien, tourna à l’aigre 
sous l'influence d'une température de 30 degrés 
Réaumuriens, tandis que du vin de la même 
récolte, fabriqué à cuves closes , n’avait éprouvé 
aucune altération. Ce fait , ajoute-t-il, répandit 
dans tout le canton une surprise mélée d'en- 
thousiasme pour le procédé Gervaisien ; mais 
l'occlusion de la cuve n'est qu’une partie de ce 
procédé , et sans doute la seule avantageuse. 
Les raisonnemens auxquels se livre notre con- 
frère ne prouvent que l'utilité de cette occlusion, 
et au lieu d’un chapiteau soi-disant condensa- 
teur, il recommande de placer un second ‘cou- 
vercle à claire voie dans l'intérieur de la cuve 
au-dessus du chapeau de la vendange, pour 
l'empêcher de se dérober à la fermentation du 
moût. Ce perfectionnement appartient à M. Dru, 
brasseur de bière dans le département du Gers. 
Par son usage, on peut laisser un grand vide 
dans la cuve pour le dégagement et la conden- 
sation des vapeurs alcooliques ; ce procédé paraît 


40 Societé royale d'Agriculture 

à M. Rey-Monléan très-bien imaginé , aussi a-t- 
il résolu de le combiner avec celui de M.!e 
Gervais. (1) 

Notre confrère avait eu raison d'annoncer que 
la récolte de 1822, qui fut médiocre sous le 
rapport de la quantité, serait bonne sous celui 
de la qualité. Son pronostic était fondé sur la 
consideration des chaleurs qui régnèrent dans 
les mois de juin, juillet et août de cette année. 
Par l’effet de cette température soutenue , les 
vendanges furent avancées de cinq à six semaines. 
Ceux néanmoins qui ne se pressèrent pas de 
vendanger profitèrent d’une pluie de deux ou 
trois jours , qui eut, sur la qualité des vins, 
une influence remarquable, et une plus grande 
encore sur celle du second vin, vulgairement 
nommé rapé , qui tourna à l'acide presque par- 
tout où l'on s'était pressé de vendanger. 

Il ya déja bien long-temps que notre sage 
œnologue s'élève contre la précipitation des ven- 
danges autour de Lyon; espérons que tôt ou 
tard l’on cessera d’être sourd à ses conseils, et 
aveugle devant ses exemples. 

Passant aux vendanges de 1823, M. Rey-Mon- 
léan voit les causes de leur infériorité dans une 


und 


(1) Le procédé de M. Dru est exposé dans les annales de 
V’agriculture francaise , septembre 1823, 


de Lyon. 41 
gelée printanière qui atteignit la vigne encore 
en bourgeons , et qui fut très-sensible partout 
où l'air circulait difficilement , dans des alter- 
natives de pluies et de chaleurs qui , ont pen- 
dant l'été , excité l'accroissement des ceps , et 
multiplié les feuilles aux dépens de la maturité 
des raisins ; de là une surabondance d'acide tar- 
tareux et d'acide malique qui éloignera la ma- 
turité des vins dans les tonneaux et donnera lieu 
lors du soutirage à un déchet considérable par 
la quantité de lie. 

Malgré ce déchet et des grèles fréquentes, on a 
fait plus de vin cette année que la précédente , 
mais d'une qualité très-inférieure non-seulement 
au vin de 1822, mais encore de 1818 et 1819. 

On vendangea cinq semaines plus tard que 
l'année dernière, par une température plus basse 
de 6 à 7 degrés. Notre confrère crut devoirsuivre, 
dans cette circonstance , les préceptes de Chap- 
tal et Davy ; il porta à 13 1/2 la température 
de la vendange qui marquait à peine 6. Cette 
opération là fut facile étant dans l'usage d’écra- 
ser les raisins sur le pressoir ; le jus donnait r2 
à l'aréomètre, mais le rafle était vert. M. Rey- 
Monléan se décida à jeter dans ses deux cuves de 
la cassonade et de l’eau de vie, la première à la 
dose de sept hectogrammes, la deuxième à celle 
d’un tiers de litre par hectolitre de moût. Cela 


42 Sociélé royale d'Agricullure 

fait, il a fermé hermétiquement ses deux cuves. 
Le vingt-unième jour on a décuvé et on a ob- 
tenu un vin coloré, clair jusqu'aux trois-quarts 
de la profondeur de chaque cuve, et ne le cédant 
à celui de l’année dernière que parce qu'il avait 
un degré de moins de spiritualité à l’aréomètre 
de Cartier. 


&« Ce vin, dit l’auteur en finissant, a été 
examiné par des propriétaires de S.ie Foy, pré- 
venus même en faveur du leur en raison de 
l'exposition de leurs vignes et du choix de 
leurs plants. Le résultat les a étonnés ; de leur 
aveu leur vin était encore louche, acerbe et 
il annonçait qu’au soutirage il y aurait une 
grande perte, tandis que je suis assuré de 
n'en éprouver que dans le vin du pressoir, 
que je place séparément et ne mélange jamais 
avec la mère-goutte. T'ous ceux qui me lironk 
ou qui m’écoutent , sont invités avec cordia- 
lité à venir constater et s'assurer par la dégus- 
tation des faits que j’avance, ils reconnaîtront 
que la science peut suppléer aux effets de la 
nature, et qu'avec son secours on peut vaincre 
l'influence d'une saison défavorable, » 


de Lyon. 43 
ÉCONOMIE RURALE. 


Le bien labourer et le bien fumer , c'est, selon 
Olivier de Serres, fout le mesnage des champs. 
La bonté du labour dépend , sans doute, de la 
perfection de l'instrument aratoire; et cependant 
le même auteur dit, d’après le vieux Caton : NE 
CHANGE POINT DE SOC, ayant pour suspecte toute 
nouvelleté. X] ajoute : « et de faict ceux-là se sont 
» plutôt faict admirer qu'imiter , qui ont in- 
» venté des nouveaux socs, tant a de majesté 
» l'antique façon de manier la terre, de laquelle 
» on ne se doit détourner que le moins que l’on 
» peut, et avec grandes considérations. Il est 
» vrai que comme les esprits des hommes s’af- 
» finent tous les jours, et que pour le présent 
» nous pouvons sçavoir ce que nos pères ont sçeu 
» le temps passé, avec jugement y pourrons-nous 
» ajouter quelque cas de nos inventions expé- 
» rimentées , pour servir d’adresse à la conduite 
» de nos affaires, cequ’on en doit opiniâtrément 
» rejeter. Maïs c’est toutes fois avec un jusques 
» où, pour ne s’'abandonner à toutes sortes de nou- 
» velles inventions, de peur que par mauvais ren- 
» contre, on ne chée en moquerie, estant tous- 
jours le guerdon d'une curiosité par trop grande.» 
La majesté de l'antique façon de manier la terre 
était le jeu d’un instrument grossier ; c'est ce 


& 


44 Sociélé royale d'Agriculture 

qu'a prouvé notre célèbre compatriote M. Mongez, 
dans une dissertation sur les charrues des Egyp- 
tiens, des Grecs et des Romains. Ce savant en 
a dessiné plus de trente dont il a pris les modèles 
sur des médailles et autres monumens. Toutes 
ne sont que des crochets différemment configurés ; 
une seule a une roue , mais si petite qu’on n'en 
conçoit pas l'usage (1). On ne voit nulle part 
cette charrue primitive , excepté peut-être en 
Crimée, où on l’appelle sabor. 

Ce qui frappe le plus celui qui parcourt en 
observateur agricole la France et le reste de 
l'Europe , c’est la diversité des charrues ; par- 
tout on lui dit que celle dont on fait usage est 
la mieux appropriée à la nature du terrain. Sans 
doute qu’une charrue légère serait impuissaute 
sur un sol compact et argileux qui recèlerait 
de grosses racines ; il est vrai aussi qu’une forte 
charrueserait ridicule sur un sol léger et sablon- 
neux ; mais quelle que soit la variété des sols, 
elle est moindre que celle des instrumens de 
labour. C'est dans des combinaisons bien ou 
mal conçues qu'il faut chercher les causes de 
l'extrême diversité de ces instrumens. Ainsi il 
faut s'attacher à les ramener aux lois de l'agri- 


(1) Mémoires de la classe d'histoire et de littérature an- 
cienne de l’Institut , tome II. 


de Lyon. 45 
culture et de la mécanique. C’est ce qu’a senti 
la société royale et centrale d'agriculture de 
France, en ouvrant, dès 1802, un concours 
dans son sein pour le perfectionnement de la 
charrue ; et vous-mêmes , Messieurs, vous avez 
promis en l’année 1821 une récompense à celui 
qui ferait connaître la meilleure charrue à 
tourne-oreille pour labourer à plat à la profon- 
deur de neuf à douze pouces. Un mémoire fort 
étendu sur ce sujet vous parvint l’année sui- 
vante. On y annonçait la solution complète du 
problème ; mais avant de prononcer sur le mé- 
rite de l'ouvrage, on désira de voir manœuvrer 
la charrue décrite; et le secrétaire fut chargé 
d’en prévenir l’auteur qui ne fit aucune difficulté 
de se soumettre à cette épreuve ; il promit d’en- 
voyer à Lyon sa charrue, maison l'attend encore. 
On a su que des circonstances particulières 
avaient retardé cet envoi, et le programme du 
prix pour l'invention de la charrue à tourne- 
oreille n’a pas été retiré. 

Selon notre respectable confrère, M. Chancey,le 
problème est résolu , depuis soixante ans, époque 
à laquelle M. Guiguet, conseiller au parlement 
de Trévoux, inventa ou perfectionna une charrue 
de ce genre, que notre confrère a vu manœuvrer 
dernièrement dans les communes de Quincieux et 
des Echels, à trois lieues de Lyon. 


Sur une char- 
rue à tourne- 
oreille ; par M- 
Chancey. 


Sur la char- 
rue belge ; par 
M. Hiboud. 


46 Société royale d'Agricul/ure 

Cette charrue, dit-il, a un soc court , très- 
fort, surmonté d’une petite oreille mobile, le 
tout en fer garni d’acier ; à chaque changement 
de raie, on retourne cette petite oreille à la- 
quelle est fixée la grande oreille en bois qui re- 
tourne la terre du sillon ouvert. La petite oreille 
coupe parfaitement toutes les racines des plantes 
qui sont ensuite renversées par l’oreille de bois. 

Dès l'époque de son invention, M. Chancey 
avait eu connaissance de cette charrue , et quel- 
ques années après, il la désigna à plusieurs pro- 
priétaires qui l'adoptèrent; et néanmoins M. 
Chancey Va croyait perdue lorsqu'il a eu la satis- 
faction de la revoir aux Echets où depuis qua- 
rante ans elle est usitée, ainsi qu’à Quincieux ; 
elle coûte peu , se dérange rarement , ne fatigue 
pas les animaux, laboure profondément et coupe 
les racines des trèfles et des luzernes. 


Il existe une charrue plus puissante encore; 
il est vrai qu'elle est plus dispendieuse et qu’elle 
exige un attelage plus fort , c'est la charrue Belge. 
Rien convaincu qu'on ne saurait trop en répandre 
la connaissance, M. Chanucey vous a luet il a 
déposé dans vos archives une lettre sur ce sujet 
que lui a adressée M. Riboud, votre honorable 
correspondant à Bourg. Celui-ci ne peut man- 
quer de souscrire à lutile publicité que vous 


de Lyon. 47 
donnez à la lettre adressée par lui à notre res- 
pectable émérite. 

« Nous venons d’éprouver une honorable sa- 
tisfaction relativement à notre charrue Belge, 
à laquelle nous avons ajouté quelques perfec- 
tionnemens. Le comité agricole de l’arrondisse- 
ment de Mâcon a envoyé une députation com- 
posée de M. Barjol, ancien maire de Mâcon, 
Mottin , secrétaire , et de Lachapelle , à l'effet 
d'examiner cette charrue et de la voir opérer. 
Nous avions heureusement en ce moment une 
luzernière de la sixième année à rompre. La na- 
ture du terrain était presqu’entièrement caillou- 
teux à une grande profondeur, en sorte que le 
sol de cette luzernière était d’une extrême com- 
pacité et dureté. La configuration de cette luzer- 
nière était triangulaire, ce qui rendait le labou- 
rage plus diffcile, » 

« La charrue Belge , attelée de quatre bœufs » 
a agi sur ce massif dont la ténacité était aug- 
mentée par les racines de la luzerne. En moins 
d'une heure , elle a sillonné, renversé et mis à 
la superficie toutes les racines de plusieurs ares. 
La moindre profondeur du labour a été de dix 
à douze pouces , il est souvent allé jusqu’à treize. 
Le labourage de ce terrain caillouteux a été aussi 
rapide que si on eût travaillé un terrain doux 
et facile, la charrue marchait toujours égale- 


Sur la même 
charrue ; par 
M. de Lacha- 
pelle. 


48 Sociélé royale d'Agriculture 
ment et horizontalement sans plus fatiguer le 
laboureur qu’un simple araire. » 

« MM. les commissaires de la société de Mâcon 
ont été tellement satisfaits du service de cet 
instrument, qu'ils en ont sur-le-champ com- 
mandé au sieur Pichalt, ouvrier très-intel- 
ligent qui en a déjà exécuté un grand nombre. » 
( 24 mai 1824 ). 

En vous communiquant cette lettre, M. 
Chancey vous a lu l'extrait de celle qu'il a re- 
çue le 6 août 1823 de M. Lullin, correspondant 
de la société à Genève. On y parle de la rapide 
propagation de la charrue Belge , et lon déclare 
qu'elle convient dans toutes les localités , excepté 
dans les pentes rapides, qui au reste ne devraient 
jamais avoir une destination agricole, mais être 
réservées pour prairies naturelles ou artificielles, 
suivant qu'on peut ou non les arroser. 


A ces témoignages en faveur de la charrue 
Belge , il faut ajouter celui non moins imposant 
de notre confrère M. de Lachapelle qui , l'année 
dernière, écrivait à M. Chancey qu'ayant em- 
ployé la charrue Belge , il avait reconnu qu'elle 
méritait les éloges dont elle avait été l’objet. 
J'ai cru , Messieurs, remplir vos intentions , en 
écrivant pendant les féries, à M. de Zachapelle 
pour lui demander des détails sur une charrue 


de Lyon. 49 
qui depuis quelques années excite fortement 
V’attention des agriculteurs du Genevois et de la 
Bresse , et qui est presqu'inconnue dans notre 
département. Vous jugerez sans doute qu'un 
extrait de la lettre de ce sage agronome mérite 
une place dans cette notice de vos travaux. Il 
décrit ainsi cette charrue : 

« Le soc n’a qu’une aile qui se prolonge sous 
l'oreille, il est garni d’une lame de fer tran- 
chante , qui découpe horizontalement les bandes 
de terre, tandis que le coutre la tranche verti- 
calement. Cette bande ainsi détachée du sol, re- 
monte sur un plan incliné que lui présente 
l'oreille, et celle-ci étant contournée à sa partie 
supérieure, renverse facilement la bande de 
terre sans dessus dessous, et la raie demeure 
ouverte et très-nette, » 

» Avec la charrue ordinaire , le soc, en forme 
de coin , arrache la terre sans la trancher , l'oreille 
plate la pousse au lieu de la renverser, il en ré- 
sulte que le travail est beaucoup moins propre 4 
qu’ane grande partie de la terre du fond n'est 
que déplacée , au lieu d'être ramenée à la sur- 
face. » 

» Il est facile de concevoir qu'il faut beaucoup 
plus de force pour mettre en mouvement la 
charrue ordinaire que celle de la Belgique. 
Aussi trouve-t-on de l'économie dans l'emploi 


£ 


50 Société royale d'Agriculture 
de la dernière, c’est au point qu’on peut diminuer 
la force de lattelage d’un quart et même d'un 
tiers. Elle convient beaucoup dans les terres 
fortes où le labourage en planches est nécessaire 
pour faciliter l'écoulement des eaux, et surtout 
pour le défrichement des prairies artificielles 
dont elle découpe admirablement les racines. » 

» Ces avantages sont mèlés de quelques incon- 
véniens. L’oreille fixe de la charrue Belge sera 
un obstacle à son introduction dans beaucoup de 
pays. Les terrains secs , où le labourage à plat'est 
seul usité, n'ont aucun besoin des raies ouvertes 
que l'on est forcé de laisser de distance en dis- 
tance avec toutes les charrues dont l'oreille ne 
change pas de côté. On est forcé de labourer en 
tournant autour de la pièce de terre que l'où a 
entamée. I] en résulte que l’on forme malgré soi 
des espèces de planches bombées dans leur mi- 
lieu et décharnées sur les bords. Entre chacune 
d'elles des doubles raies qui restent ouvertes, 
présentent à l’œil l'aspect de petits fossés trop 
multipliés et dans lesquels les plantes végètent 
avec peine. Les labours qui suivent ont de la 
peine à les combler et à mettre le terrain de 
niveau. » 

» Cet inconvénient et surtout la ruutine s’op- 
poseront long-temps encore à l'introduction de 
la charrue Belge dans ces sortes de terrains 


de Lyon. 5x 
ainsi que dans ceux qui sont mélangés de cail- 
loux et de fragmens de rochers, sa construc- 
tion la rendant susceptible de sortir de terre au 
moindre obstacle qu’elle rencontre. » 

» D'un autre côté l'âge et le sep étant assemblés 
solidement et unis l'un à l’autre par une forte 
pièce de bois , on ne peut pas , comme dans la 
charrue ordinaire , ouvrir et fermer à volonté 
l'angle que ces deux pièces laissent entr’elles , il 
en résulte que le laboureur ne peut pas régler 
sa charrue selon les besoins , pour obtenir un 
labourage profond ou superficiel : c’est à mes 
yeux un inconvénient assez grave. » 


M. de St-Didier a eu occasion de voir dans 
les environs de Bourg la charrue Belge, il s'est 
assuré qu'elle continue de plus en plus à être 
émployée par les riches propriétaires , il regrette 
que son prix, qui s’élève à 8o fr., ne permette 


pas à la plupart des cultivateurs d’en faire 


usage (1). Il pense que l’une de celles que M. 
Riche , notre confrère a inventées à St-Alban ; 
et dont il fut fait dans le temps rapport à la 


PR RE TT ne mr or lp nm 


. (1) Aux côtes d’Avey , arrondissement de Vienne , dé- 
partement de l'Isère, on fait usage de la charrue Belge ; 
elle ÿ a produit cet effet, qu'un domaine dans lequel on 


avait semé , il y a deux ans, 120 boisseaux froment , en a 


produit 1840, 


Sur la chaf. 
rue Belge ; par 
M.deSt.Didier., 


Considéra- 
tions surlesen- 
grais ; par M, 
Faissolles. 


52 Socielé royale d'Agriculture 
société , est d'une construction à peu près sem 
blable, et qu’elle aurait l'avantage d'être moins 
chère. Le point essentiel est de savoir si elle exige 
pour être mise en action une plus grande force ; 
c'est un fait facile à éclaircir à l’aide d’un fort 
didanomètre. Notre confrère renouvelle le vœu 
de l'acquisition par la société de cet instrument. 
Cependant , comme il est convaincu que la 
charrue Belge peut être fort utile dans un grand 
nombre de localités de ce département , et que 
par conséquent on ne saurait trop en propager 
la connaissance , il en a tracé le dessin , et vous 
jugerez sans doute que cette nouvelle production 
du crayon de notre confrère ne peut qu’enrichir 
la notice annuelle de vos travaux (r). 


Quels que soient les avantages des bons la- 
bours , ils ne peuvent pas suppléer les engrais , 
et malgré les assertions de Tull et de Duhamel, 
on est bien convaincu que pour obtenir de la 
terre des récoltes abondantes et non interrompues, 
il ne suffit pas de la remuer, même dans les temps 
les plus opportuns et de la manière la plus con- 
venable, mais qu'il faut encore lui rendre les 
élémens consumés par la végétation d’une seule 
espèce de plantes dont le cultivateur emporte les 
produits ; et cette nécessité est bien plus grande 


(1) Voyez à la fin du volume. 


de Lyon. 53 
encore si les plantes ont mûri leurs graines avant 
d’avoir été coupées , surtout arrachées. Et nous 
répéterons l'adage du patriarche de l’agriculture 
française : le bien /abourer et le bien fumer est 
tout le mesnage des champs. 

La lecture attentive de l’excellent ouvrage 
dont M. le comte Chaptal vient d'enrichir 
l'agronomie, a inspiré à M. Faïssolles Yidée d’un 
travail sur les engrais. Tout ce qu'il vous a dit 
sur cet important objet, n’est sans doute pas 
nouveau: et souvent ce sont les théories de M. 
le comte Chaptal qu'il a reproduites. Mais lou- 
vrage où elles sont savamment exposées, n'étant 
pas à la portée de tous les agriculteurs, je crois 
remplir vos intentions en les joignant ici aux 
réflexions qu’elles ont suggérées à notre confrère, 
et aux résultats des expériences qui lui sont 
personnelles. 

Avant de parler des engrais, M. Faissolles a 
dû jeter un coup-d'œil rapide sur la nature des 
sols géoponiques, sur celle de la marne, terre 
aroilo-calcaire, si propre à les amender. Il fait 
observer, avec raison , que les marnes grasses 
ou fortement alumineuses conviennent aux ter- 
rains poreux, légers, siliceux, tandis que les 
marnes maigres dans lesquelles prédomine la 
chaux, sont appropriées aux terres fortes et 
compactes. 


54 Société royalé d'Agriculture 

Les engrais qui fertilisent les terres se dis- 
tinguent en nutritifs et en stimulans. Les pre- 
miers sont les gaz azote, acide carbonique, 
hydrogène caburé, qui résultent de la décom- 
position des fumiers. Ces gaz alimentaires se 
dégagent en pure perte lorsque c’est en plein air 
que s’opère la décomposition , tandis que les fu- 
miers, enfouis en temps opportun , ont encore 
l'avantage de soulever la terre et de faciliter l'in- 
troduction de l'air , de l'eau, des engrais atmos- 
phériques. 

C’est donc une mauvaise pratique d'amonceler 
en plein air le fumier à mesure qu’on l'extrait 
des étables. Lorsqu'on attaque ces tas qui souvent 
sont formés dans l’espace d’une année entière , 
les couches inférieures sont dans un état de dé- 
composition beaucoup plus avancée que les supé- 
rieures , et la masse s’est appauvrie de ses princi- 
pes Les plus fertilisans, dont une partie s'est éva- 
porée dans l'air , et l'autre a été entraînée par les 
eaux pluviales. Pour obvier à ces inconvéniens, 
il faudrait placer les fumiers sous des hangards, 
en faire autant de tas que d’extraction des étables, 
au point que chacun de ces tas n'eût pas en 
épaisseur plus de 50 centimètres ; il faudrait les 
étendre, les remuer , les méler avec du gazon, 
du plâtras, des balayures , toutes les fois que la 
fermentation y aurait développé plus de 28 degrés 


de Lyon. 55 
de chaleur, et recueillir dans des fossés les 
parties liquides qui s'en échappent. 

On ne doit pas attendre que les fumiers fer- 
mentent quand on les destine aux terres argi- 
leuses. Ce n’est pas sur toute espèce de terrains et 
pour nourrir toute sorte de végétaux que con- 
viennent les urines, les matières fécales et le 
compost dont ils forment la base. 

Voici la composition d'un compost pour une 
terre argileuse. 

« On le forme, dit M. Faissolles , en faisant 
» une première couche de plâtras , de gravier ou de 
». mortier de démolition, on la recouvre de fumier 
» de litière; sur cette seconde couche on étend 
» les balayures des cours, des granges, des 
» chemins , mélées des limons déposés par les 
»- rivières ; une troisième couche composée de 
» matières fécales , de débris de paille et de foin 
» s’élève sur celle-ci; enfin la quatrième est de 
» même nature que la première. Quand la fer- 
» mentation s’est établie dans la masse , on le 
» remue pour mélanger les couches, et on le 
» transporte dans les champs. » | 

M. Faissolles préfère ce compost à ceux qu'on 
prépare dans des fosses avec addition de piâtre. Il 
fit, l'année dernière dans son jardin à Vaise, 


une expérience dont il rend compte dans les- 
termes suivans : 


56 Société royale d'Agriculture 


A4 


ÿ 


« J'avais quelques coïgnassiers sur lesquels 
j'avais enté en 1822 des poiriers. Le sol sur 
lequel ils étaient, me paraissait formé de 
débris de granit , de silex, de chaux et d'une 
faible quantité de terre végétale. Ces poiriers 
paraissaient languissans et d’une faible venue. 
Pour en ranimer la végétation , il me fallait 
un engrais liant et onctueux. Et pour le pro- 
duire, je fis, au commencement de l'été, un 
trou que je remplis de mercuriales qui m'in- 
commodaient , je les arrosai chaque jour avec 
de l'urine; bientôt la fermentation putride 
s'établit , et les tiges des mercuriales n’offraient 
plus que des filamens pâteux : c'est alors qu’au 
milieu du même été je déposai au pied de mes 
arbres cet engrais que je fis suivre d'un léger 
labour pour l’enfouir en terre. La végéta- 
tion fut tellement active que mes poiriers 
avaient crû au mois de septembre de près de 
quatre décimètres. On observera que mes 
arbres sont vigoureux , et que l’extractif de 
cet engrais n'étant pas entièrement décomposé, 
il peut prolonger pendant long -temps son 
influence. » 

Cet engrais convenait au sol du jardin de M. 


Faissolles beaucoup mieux qu'un compost formé 
de plâtre , de chaux, de matières fécales , qui 
est approprié non aux terrains siliceux , pauvres 


de Lyon: 57 
en terres végétales, mais aux terres fortes et 
compactes : dans les premières, ils sont trop 
stimulans. | 

En effet, le plâtre et les autres substances sali- 
nes nourrissent moins les plantes qu’ils n’excitent 
leurs organes digestifs : leur action est analogue 
à celle des alimens épicés sur l'estomac humain, 

Mais ce n’est point à cela que se borne l’action 
de la chaux ; elle dispose encore certains corps, 
naturellement insolubles dans l’eau, à se dis- 
soudre dans ce liquide ; elle prolonge la vertu 
nutritive de certaines matières tant végétales 
qu'animales , elle corrode les succoirs des végé- 
taux enfouis comme engrais et en accélère la 
putréfaction , elle fait périr , avec les mauvaises 
herbes, une multitude d’insectes. 

Moins utile sous ces derniers rapports que la 
chaux, le plâtre est, d’un autre côté, plus 
stimulant. On peut l’'employer cru ou cuit, mais 
toujours broyé. 

M. le comte Chaptal , l'ayant essayé dans ces 
deux états, a reconnu qu’à la première année le 
plâtre cuit produisait plus d'effets, et que dans 
les trois années subséquentes son influence sur 
la végétation était la même que celle du plâtre 
cru. Le sulfate de chaux exigeant, pour se dis- 
soudre, trois cents parties d'eau, ne pénètre 
pas dans les organes des plantes en assez grande 


Sur le même 
sujet, par M. 
Billion. 


58 Société royale d'Agriculture 
quantité pour les irriter à la manière des sels 
plus solubles. 

Quelques considérations physiologiques sur la 
manière d’agir des engrais, soit nutritifs , soit 
stimulans , terminent le mémoire de M. Faissolles. 


M. Billion a confirmé, d'après sa propre expé- 
rience , une partie des théories exposées par M. 
Faissolles. Cet agronome vous a entretenu des 
améliorations qu’il a opérées dans un de ses do- 
maines en Bresse, et vous avez reconnu qu’il 
avait dû principalement ses succès à la manière 
dont il a su administrer ses engrais. 

Avant lui, le fumier était amoncelé dans une 
cour qui offrait d’assez grandes excavations , 
parce qu’on emportait de la terre en enlevant 
les couches inférieures du fumier. L’eau crou- 
pissante dans ces excavations était la boisson or- 
dinaire d'un bétail toujours chétif, malgré la 
bonté des pâturages. Le fumier restait dans ces 
creux plus de six mois, il s’y dépouillait d'une 
grande partie de son jus et se réduisait à un 
tiers de sa masse. M. Billion fit d'abord niveler 
et paver la cour , il veilla ensuite à ce que les 
fumiers fussent portés dans les champs non à 
l'époque des semaïlles comme on le pratiquait 
ordinairement ; mais au moment de son extrac- 
tion des écuries et sans attendre le dernier labour. 
Ses fermiers furent bien étonnés, l'annéesuivante, - 


de Lyon. 59 
de voir verser le blé aux places où le fumier 
avait été entreposé. Depuis cette époque, ils les 
portent sur les terres immédiatement autant que 
possible , après son extraction des étables. 


De tous les élémens du fumier, c’est le car- 
bone qu'on regarde comme la principale nourri- 
ture des plantes , et on croit qu'il parvient dans 
leurs organes sous forme d’acide carbonique. 
Une observation de M. Batilliat semble prouver 
que sous forme de charbon il exerce sur la végé- 
tation une grande influence. 

Ce chimiste agronome n'appartenait pas en- 
core à la société à titre de correspondant , lors- 
qu'il voulut bien lui adresser sur la propriété 
fertilisante du charbon , considéré comme corps 
physique et corps chimique, un mémoire inté- 
ressant , dont M. Cap vous a rendu compte. IL 
serait difficile de présenter le travail de M. Baul- 
liat avec plus de précision et de clarté que ne l'a 
fait M. Cap. Aussi n'ai-je rien de mieux à faire que 
d'emprunter ici les expressions de notre confrère. 

« M. Bailliat avait observé dans la commune 
de St. Lager, près Beaujeu, canton remar- 
quable par la qualité de ses vins, que le sol de 
deux ou trois vignes était très-noir, quoique 
celui des terrains environnans fût loin d’avoir 
cette teinte foncée. En s'entretenant avec quel- 
ques anciens habitans du pays, il apprit qu’il y 


Du charbon 
commeengrais; 


parM.Botilliat. 


60 Société royale d Agriculture 

a environ cinquante ans le propriétaire avait 
établi près de là un four à chaux et à briques que 
l'on chauffait avec du bois, que celui-ci étantem- 
barrassé d’une assez grande quantité de poussière 
de charbon, il l'avait fait répandre sur ses 
vignes qui , depuis, ont porté le nom de vignes 
brälées, qu'elles ne gelaient jamais , que la ré- 
colte y était toujours, proportion gardée, plus 
abondante qu'ailleurs ; que les marchands don- 
naient toujours la préférence au vin qui en pro- 
venait sur celui des autres vignes du même 
canton et de la même exposition, qu’enfin ; 
lorsque dans les temps de la sécheresse, les cul- 
tivateurs renonçaient à cultiver la terre à cause 
de sa grande compacité , ils travaillaient encore 
avec assez de facilité le terrain des vignes brûlées. » 

» Ces détails qui furent confirmés à M. Batil- 
lat par le propriétaire actuel, fixèrent l'attention 
de ce chimiste qui chercha à s'assurer par la 
théorie si en effet le charbon végétal pourrait 
exercer sur la végétation une influence avanta- 
geuse , et voici par quelle suite de raisonnemensS 
il parvint à résoudre d'une manière affirmative 
cet intéressant problème. » 

» 10 Le charbon, comme corps noir et non 
poli, absorbe plus facilement que les autres 
corps la lumière et le calorique. Les ferres 
colorées | dit M. Chaptal , absorbent la chaleur 


de Lyon. 61 
en raison du degré de leur nuance , depuis le brun 
jusqu'au noir.» 

» MM. Davy a observé qu’un terreau noir qui 
contenait près d’un tiers de matières végétales , 
exposé au soleil, avait acquis en une heure une 
élévation de température qui avait porté le ther- 
momètre de 12 degrés à 31; tandis que dans 
les mêmes circonstances, un sol à base de craie 
n'avait pris que 2 degrés. Tout le monde sait 
que l'on noircit les murs des espaliers, des 
serres et des orangeries pour y concentrer la 
chaleur. Voilà donc une première propriété du 
charbon bien constatée. » 

2. » Le charbon est, de tous les corps, celui 
qui jouit au plus haut degré de la propriété 
d'absorber l'air atmosphérique ; cette faculté est 
telle qu'il pent en retenir un poids égal au sien. 
En sorte qu'un morceau de charbon , parfaite- 
ment sec, et pesant un gros , peut loger entre 
ses molécules environ 8 litres d’air. Or, l'in- 
fluence de l'air sur la végétation est assez recon- 
nue pour qu’on n'ait pas besoin d'insister sur 
Pavantage de pouvoir le porter en assez grande 
quantité jusqu'aux racines des plantes par HR 
termédiaire du charbon. » 

» 3° Une propriété non moins importante de 
ce corps, est celle d'attirer l'humidité. On conce- 
vra tout ce qu'offre d'avantageux cette propriété 


62 Société royale d'Agricullure 
hygrométrique , si l’on réfléchit qu’en été où les 
rosées sont très-abondantes , le charbon s’im- 
prègne d'humidité pendant la nuit, et la rend 
peu à peu lorsqu'il est imprégné des rayons so- 
laires. M. Davy a observé que la fertilité des 
sols est en raison de la propriété qu'ils possèdent 
d’absorber lhumidité. » 

» 4° C’est un fait généralement reconnu que 
Pabsorption du gaz acide carbonique par les 
plantes a lieu durant la nuit. N'est-ce donc pas 
leur fournir un aliment utile que de placer à 
leur portée la base de cet acide ? On sait d'ail- 
leurs que la combinaison de l’oxigène et du car- 
bone s’opère à la longue sans le concours de la 
chaleur. » 

» 5.0 Le charbon, comme bon conducteur 
du fluide électrique, ne présenterait-il pas encore 
un nouvel avantage ? M. Davy a remarqué que 
le blé germe plus vite dans de l’eau chargée d'é- 
lectricité positive. Ne pourrait-on pas admettre 
aussi que, répandu sur une grande surface, le 
charbon doit s'opposer à la formation de la grêle 
en soutirant le fluide électrique de l'atmosphère ? 
Quelques perches charbonnées, plantées au mi- 
lieu d’un champ ne produiraient-elles pas les 
mêmes effets que les conducteurs en paille ré- 
cemment imaginés dans le même but ? » 

» À l'appui de ces observations, M. Batilliat 


de Lyon. 63 
rappelle l'opinion de Parmentier (article engrais 
du dictionnaire d'histoire naturelle) , depuis que 
la chimie nous a appris, dit-il , que le charbon 
était le principal aliment des plantes ; la manière 
d'agir des engrais a été plus facile à expliquer. 
Ainsi, on sait aujourd'hui que si les substances 
animales sont plus fertilisantes que les végétales, 
c’est qu’elles contiennent plus de carbone. » 

» Îl cite également une observation de M. 
Chaptal qui prétend que l’usage de brûler sur 
place les chaumes peut être avantageux, parce 
qu'il se forme une légère couche de charbon qui, 
par sa division extréme, peut servir facilement 
d'aliment aux végétaux.» 

» M. Batilliat (qui voudrait recommander le 
charbon comme engrais ) répond à quelques ob- 
jections fondées sur la cherté de cette substance , 
il a observé qu’elle agissait en petite quantité, et 
pendant un temps indéterminé, puisqu'au bout 
de 50 ans, son effet est si remarquable sur les 
vignes brûlées, Il propose d'en fabriquer exprès 
avec les bruyères et autres plantes dont on se 
débarrasse par la combustion , et qu’il ne faudrait 
pas pousser jusqu’à ERNS On pourrait, 
dans le voisinage des raffineries de sucre RENE 
yer le charbon animal qui a servi à Aeoibter les 
sirops. D'un autre côté, quoique le charbon mi- 
néral ne partage pas toutes les propriétés du 


Assolement 
d'un domaine 
dans le départe- 
ment de l’Ain; 
par M. Billion. 


64 Societé royale d'Agriculture 

charbon végétal , on pourrait en tirer des avari+ 
tages si on trouvait des schistes bitumineux 
exempts de sulfate de fer. 


» 


» De toutes les opérations agricoles , 4 dit un 
habile agronome (1), lassolement est celle 


» qui exige de la part du cultivateur l'attention 


» 


la plus sérieuse et la plus soutenue, les calculs 
les mieux raisonnés et la connaissance la plus 
approfondie des ressources et des difficultés de 
son artet de sa position locale. » 

» En vain il laboure, ensemence, nettoie, 
amende, engraisse , fertilise et dispose ses 
champs par tous les moyens qui sont en son 
pouvoir , à produire d'abondantes récoltes : 
ses succès sont toujours incertains ou incom- 
plets , illusoires ou éphémères, si un assole- 
ment conforme aux vrais principes et appro- 
prié surtout aux localités, ne fait la base de 
son exploitation. » 

Profondément convaincu de cette vérité, M. 


Billion qui est correspondant du conseil d’agricul- 
ture près le ministre de l'intérieur, ayant acquis 
le domaine de Bolliard à St. Georges-de-Fenom , 
département de l'Ain , il y trouve un système d’as- 


(1) M. Yvart, nouveau cours d'agriculture , tome KE, 


page 38. 


de Lyon. 65 
solement qu'il y trouva lui parut vicieux. Les 
terres étaient partagées en deux soles , et dans 
l'une comme dans l'autre on voyait quelques 
terrains privilégiés à la proximité de la maison: 
c’est ce qu'on nomme verchères. Les légumes 
et le froment se succédaient sans interruption 
sur les verchères, parce qu'elles recevaient la plus 
grande partie du fumier de la ferme. Il en res- 
tait bien peu pour toutes les autres terres, quoi- 
que leur étendue fût beaucoup plus considéra- 
ble , encore était-il fort mal administré. 

M. Billion ayant divisé le domaine en huit 
parties , un quart du terrain fut cultivé cons- 
tamment en froment, un huitième en seigle 
après raves, un huitième en grains de mars, 
un quart en trèfles, un huitième en légumes 
sarclés , un huitième en colzats sarclés. La ro- 
tation a commencé en 1818, elle doit se pro- 
longer jusqu’en 1825. 

L'auteur expose dans le tableau ci-après la 
culture de chaque sole dont la contenance est 


Nora. Onpourrait croire qu’on ne faisait pas assez de fumier 
pour suflire à cette culture , mais il faut , pendant Les pre- 
miers temps, s’en procurer ou acheter de la paille et quel- 
que bétail de plus, ensuite le fumier ne manquera pas. 
D'ailleurs il faut conduire sur les terres les fumiers tout 
frais , sortant des écuries, et par ce seul moyen on en aura 
suffisamment. [l est à présent reconnu qu'il fait plus d’effet 
que quand on le laisse dans les cours. P 


66 Société royale d'Agriculture 
déterminée en coupées. ( Chaque coupée repré 
sente la vingt-quatrième partie d’un hectare ). 

Pour faciliter Pintelligence de son tableau ; 
auteur développe bien l'assolement, en com- 
mençant par le N.° 1° dont le sol est argileux. 

1818. Ces terres doivent être labourées avant 
l'hivers, et fumées au printemps. On y semera, 
suivant la nature de chaque portion de terrain ,du 
chauvre, du lin, du mais , des pommes de terre : 
ces deux dernières plantes doivent être bien sar- 
clées, soit à la main, soit au moyen de petits 
araires, bien alignées, afin que le labour en 
long et en large, et par suite le sarclage soient 
plus faciles. | ’ 

1819. Immédiatement après la récolte, cette 
sole est encore labourée et fumée pour recevoir 
au printemps suivant les grains de mars, comme 
avoine, orge, blé ou seigle trémois , suivant la 
nature du terrain et le grain qui vient le mieux 
dans chaque portion de la sole. On y sème en 
même temps, à raison de deux livres par cou- 
pée au moins , du trèfle qu'on plâtre de suite: 
si, dans quelques places le trèfle ne sort pas , ce 
qui arrive lorsque les terres sont maigres depuis 
long-temps, on peut, en les fumant, y semer 
en septembre ou plus tard , des gesses d'hiver et 
quelques-unes des graminées qui viennent bien 
dans le pays, elles rament les vesces à mesure 
qu’elles montent ; on les plâtre au printemps, 


de Lyon. 67 
et on les fauche lorsqu’elles sont en pleines 
fleurs. On obtient par ce moyen un fourrage qui 
peut suppléer le trèfle. 

1820. Cette sole produira cette année du trèfle, 
et sera fauchée deux fois, et pâturée l’automne. 

1821. Cette même sole produira encore cette 
année du trèfle; mais il ne faudra la faucher 
qu’une fois afin d’avoir le temps de donner une 
demi-jachère à la terre pour y semer du froment; 
mais si la sécheresse s'opposait à ce qu’on ne 
pût pas la labourer , il n'y aurait pas un grand 
mal, on profiterait alors d'un pâturage d’au- 
tomne abondant , qui rendrait, pour nourrir de 
jeunes cochons, cinq à six francs par coupée, 
et on sèmerait de l’avoine le printemps suivant 
sur un seul labourage fait dans le courant de 
l'hiver. 

1822. La terre sera en froment, et si la saison 
ne l’a pas permis, en avoine. 

1823. Elle sera labourée et fumée avec un 
quintal par coupée de trouille, provenant des 
huiles de graines, et on y sèmera du colzat. Il 
faut que cet engrais soit pilé et passé à la grille 
comme le plâtre, et répandu sur la terre après 
le premier labour , et enterré aussitôt pour qu'il 
ne nuise pas à la graine quand on la sème. On 
disposera des lignes pour pouvoir labourer dans 
les intervalles, on sarclera à la main, et on 
éclaircira les plantes s’il est nécessaire. 


63 Société royale d’Agricullure 

1824. On récolte le colzat, on laboure et l'on 
répand le fumier qu’on a fait depuis les dernières 
pommes de terre, et on sème du froment qui 
viendra très-bien. 

1825. La terre sera en froment , après sa ré- 
colte, on laboure et on sème du seigle; c'est la 
dernière année de l'assolement. 

On peut, cette dernière année, prendre une 
récolte dérobée sur les terres sablonneuses et 
légères, semer du sarrazin avec des raves, de 
celles qui s'enfoncent en terre et ne craignent 
pas la gelée ; l’arrachement du blé noir leur tient 
lieu de sarclage, et elles profitent pendant l'hiver. 

Dans les terres argileuses, on sème les raves 
en ligne, on les sarcle avec la petite charrue, 
comme les pommes de terre, et on peut réserver 
pour le blé noir une partie du terrain, à la 
condition de le fumer davantage. 

Cette suite de récolte finie, on recommence 
et on poursuit la rotation dans les autres soles, 
toujours d'après le même système. 

L'auteur convient qu'il n’est pas facile d'éta- 
blir dans le domaine dès la première année les 
diverses cultures comme elles le sont au tableau. 
Mais on y parvient avec des sacrifices et de la 
persévérance , comme l'a heureusement éprouvé 
notre confrère. 


Voyez ci-contre le tableau de cet assolement, 


Sr-GEORGE-DE-RENOM, (png. 68. ) 


DÉPARTEMENT DE LAIN. ASSOLEMENT du Domaine Bolliard, divisé en huit parties. 


LA 
es 
ii 
: < Ds: 1/4 en froment. 1/4 en trèfle, 
, G a n à 10 ns “ : 4, 4 4. 
_ D’après cette division et cet Assolement on aura toujours : 1/8 en seigle , après raves sarclées, | 1/8 légumes sarclés. 
a 1/8 en grains de mars. 1/8 colza sarclé, 
NOMS | CONTENUE n 
e Na À dE TOTAL Q 0 z o h 
Fa ST rte 1818. 101 2 2 22 2 24 2° 
c DES TeRErE ee 819. 1820. 1821, 1822. 1825. 1524. 1825. 
M = | | a ——— 
t etre des Côtes . 6 coupées. Récolle fumée et 
Héabide GOT ee EN Cu : sarclée. Tréfle pl 
E se : 8 ps Grains de mars | Trüfledeuscou [ste Plâtré || pen demi. sarclé de- | Froment demi- | Seigle aprés blé 
1. |'Leipetit plats... . Re Bi 58. chanvre TT: une coupe demi- À 
\ L cpu 9 € , fuméset trèllepli- | pes, et pâturage | "A9 jachère famé , se- | mi-jnchère, semer | misjachère, semer | noir et raves mé. 
pan diplat ee loue in, ré, d'automne, Meet » semer | er colza sarclé, | froment. scigle, ldes ou seules et 
s La terre de l'église et le Prellon . . . . | 17 » ni nn ne sarclées. 
pommes de terre, 
: — == 
“ Seigleaprèsraves | Récolte fumée et E Fin 
, : : Ù TR roment demi 
a x Le perchet . se et 3 + + + + «+ | 35 coupées. ’ et blé noir mêlé de PERS Graïns de mars | Trèfledeuxcou- |  Trèfle une cou- |  Froment demi-| Colza sarclé , | jachère , semer 
2, | Terre du LEE HE 0 PO ED 0, 00e à 9 » 4: re ou seules, | chanvre, fomés, trèfle plô- | pes, et pâturage | pe jachère, semer | jachère fumé, se- | demi-jachère, se- | acigle , après sar- 
: Pettbrandi UNE. Cr ass acer re se GS lin, tré, d'automne, froment, mer colza sarclé, | mer froment, razin et raves m- 
etsarcl, à la hou ï 
rcl, à oue,| mais, “En lées ou seules, 
pommes de terre, 
, — ——— 
Bicolle fumée el 
- Seigle après re. sarclée, Le # Froment demi- , 
3, | La terre des Perolles. . . . . « + + . | 35 coupées, | 5 Froment demi- | ves et blé noir mé. | ch Grains de mars |, Trife deuxeou- | Tééfono cons | re ere) | M GOIEa RTE d do, 
s : à 0. jachère , semer du | je SSRUYEES fumés , trèlle plô- | pes, et pâturage | pe jachère, semer 2) mijachère , ot se- 
Les petites Varines . . . « . . . + « |15 » rne lé) ou rares eus | tré. d'automne, froment, sens cola sas | fromant, 
à Eee mais ; 24 
3 porumes de terre. 
J Aécolte fumée et 
: é … lenprés rave sarclde, , 
4 Des gere à | Froment demi- Re rrsnares DS Grains de mars | ‘Tréfledeuxcou- || (Trèfle one cou- || psoment demi 
a , jachère oir ; où | chanvre, s, semer trè- | pes étura pe demi-jachère : 
+ | La grande terre des Varines . + . : : 2 | 50 coupées. | 50. [émane ‘| jachère , semer | ee age | cnÔnTEe fumés, semer trè- | pes, et phturage | pe demi-jachère, | jachère fumé et 
HS En d'automne, et semer froment, | scmer colza, 
pommes de terre. 
je | 
Récolte fumée et 
Froment demi- entra surélée, à x 
ri dan ae cn nl CT A Er Coira sarclé | Froment demi- | Scigle après ra- F Grains de mars |  Trèfle platré | Tréfleplâtréune 
5 55 coupées. jachère fumé, et | demi-jnchèr: t à L e 
k ul 5 SI. emi-jachère, et | jachère | semer | ves et sarraziu , | chanvre, nt: Bale ae |eusccroa me te|lecnpe dent it 
De défichement à us rs. st + D cs. |) semer colza sar- | semer froment. È ‘lu EE CHR rAe | 
dé, nt | seigle. où raves sarclées, | lin» tré, turage d'automne, | suere, Et semer 
mis, à 
pommes de terre. 


pommes de terre. 


Hécolle fumée et 
La terre dite de chez Rousset 3 Trèfle plûtré sarclée 
* + «+ + » | 30 coupées. rèfle plûtré , | Froment demi- Paoollliseonn Seigle après 0 G d ; 
$ een Ÿ demi-ju- igle sprès ra- rains de mars Trèfle  plâtré 
6. La terre des Contentes . Riel |PA0 Es 60. PA pe Lea jachère fumé , F demi-jachère , et | chôre , et semer | ves et sorrazin, | chanvre, fumés , trèfle plä- | deux RARE 
Très-épuisées par défaut d'engrais. (eat semercolzasarelé, | semer froment. seigle. ou raves seules , |lin, tré. lurage d'automue, 
* sarclées, malus 
pommes de terre. 
— ——— | ——— | — Etes im) à —— 
Hécolle fumée et 
, Trèlle plätré , | Froment demi- : ïel “re relée, 3 
La verchère de Bolliard. . . . + , . . | 4 coupées. Téèlte plâtré , | uve conr ani” | jachèe fumé, eù | Cola demija- | Froment demi- | Seigle après ra ee Grains de mars 
PA ET ER TON NN ETES , | deuxcoupesetpa- | pure à semer | semer colra sar- | chère, et semer | juchère, etsemer | JE? sarclées ; ou | chanvre, fumé , et semer 
Le haut de ln grande terre . . . . nd turage d'automne. | Goment. clé froment. seigle, sarain et rare | in trie plitré, 
DE : : eules sarclés Eh 
pommes de terre. 
— | ——— 4 Re © se = 
Becolle fumée et 
: sarclée, 
| | ï Trèlle plâtré 4 Scigle après ra- 
8. | La grande terre Grains de mors |  Trüfle plâtré, Sa SSpE M | Féoment demi- | C3 demi-ja- | Froment demi- le ap = 
s Ftt os ++ + + + + | So coupées. à 50, | fumés, et semer | deux conperetple | uen games |inchère fumé, et | Chère. et semer | jachère, et semer Na D 
ê ; ï ’ 
trèfle plôtré. turage d'automue. | nent, semercolsasarelé. | Moment. seigle. DE 


de Lyon. 

Parmi les autres améliorations dont notre éco- 
nomie rurale est susceptible , l'une des plus im- 
portantes aux yeux de M. Chancey , est la grefle 
du noyer et celle du châtaignier. Avec quelle 
sollicitude cet agronome dont rien ne peut 
ralentir le zèle pour les progrès de l'agricul- 
ture , vous a , dans plusieurs séances , recom- 
mandé une pratique qu'on regarde comme 
difficile, et que de simples paysans exécutent 
dans le Milanais et dans le Piémont! Il y a 
près d'un siècle que cette méthode traversa les 
Alpes et se répandit en Dauphiné. Elle resta 
long-temps éomme ignorée du reste de la France, 
et aucun auteur agronomique n’en a parlé jus- 
qu’à 1760, où un anonyme écrivit à la société 
économique de Berne ces paroles : « le seul mo- 
» yen de tirer un bon parti des noyÿers, est de 
» les faire enter , comme on le pratique dans 
» le marquisat de Roiïanès ; depuis que cette 
» méthode y est devenue générale, ce petit can- 
» ton fournit une quäntité d'huile de noix pres- 
» qu'incroyable. » (1) 

Rozier nous apprend qu’à Crest en Dauphiné 


trois jardiniers faisaient profession de greffer le 
noyer à l'écusson. 


(1) Mémoires de la Société économique de Berne , année 
3760 , page 154. 


Sur la greffe 
du noyer et 
celle du chà- 
taignier ; par, 


M. Chancey- 


70 Société royale d'Agriculture 

Dans les premiers jours de la restauration de 
cette société, notre respectable contrère vous 
communiqua sur le même sujet un mémoire 
qui fut imprimé dans la feuille du cultivateur, 
et d'après lequel un agronome célèbre M. Juge 
S1. Martin se détermina à introduire cette pra- 
tique dans le haut Limousin. (1) 

Vous vous rappelez, Messieurs, que dans 
une de vos séances de 1819, M. Chancey ou- 
vrit sur la greffe du noyer une discussion à la- 
quelle M. le chevalier de lHorme , membre de 
Ja chambre des députés , et alors votre président, 
prit une part active, il soutint les avantages 
de cette méthode. Vous adoptâtes ce sentiment, 
et M. Madiot, notre confrère, fat invité à greffer 
les noyers dans l'établissement dont la culture 
lui est confiée ; il y réussit pleinement sur un 
grand nombre de ces arbres; mais le procédé 
qu'il mit en usage exige une main habile , aussi 
n’eut il aucun succès ailleurs. 

Un procédé plus facile a été exécuté sous les 
yeux de M. Chancey , par un simple jardinier 
de la terre de lPEcluse, nommé Czhermion, et 
sur la demande de notre confrère , une commis- 
sion dont il a dû faire partie , est allée, d'après 
vos ordres, prendre connaissance du procédé du 


(1) Feuille du cultivateur , 7 fructidor an II. 


de Lyon. 71 
sieur Chermion. (1) Ce jardinier fait une incision 
oblique dans le milieu de la tige ou d’une 
branche du sauvageon pour y introduire la 
greffe qu'il a taillée en forme de coin , il la place 
de façon à former une bifurcation avec la tige 
ou la branche dont l’ouverture est en haut; il 
fait en sorte, autant que possible , que lé sau- 
vageon et la greffe soient de même diamètre , il 
maintient l'appareil au moyen d’une composition 
goudronnée, comme pour la grefle en pente, 
et il ajoute le plus souvent une ligature d'osier. 

‘Il avait pratiqué cette grefle si simple, non- 
seulement sur des noyers, mais encore sur des 
châtaigniers et quelques arbres fruitiers. Témoin 
des succès qu'il avait obtenus , la commission 
a demandé qu'une récompense fût accordée au 
sieur Chermion , et cette proposition a été adoptée. 

C'est le zèle et la persévérance que la société a 
récompensé, et non le génie de linventeur 
car ce n’est pas le sieur Chermion qui a imaginé 
le procédé dont il a fait usage avec succès : il lui 
fut indiqué par un agriculteur qui n’a pas voulu 
se faire connaître, et qui appela cette opération, 
Greffe à l'anglaise. 

Quelque temps après, le savant Bosc, de 
l'académie des sciences, voyageant dans l'intérêt 


(1) Les deux autres commissaires étaient MM. Mudioi 
et Grognier. 


72 Sociélé royale d'Agriculture 

de l’agriculture, s'arrêta à l'Ecluse et il visita 
avec soin les noyers et les châtaigniers greflés 
à l’anglaise par le jardinier Chermion , il lui té- 
moigna sa satisfaction en l'engageant à pratiquer 
sur les chênes le même procédé. | 

Comme on devait l’attendre du zèle sans 
bornes de notre confrère pour la propagation des 
améliorations agricoles, la greffe à l'anglaise 
fut annoncée aux associations agronomiques qui 
comptent M. Chancey parmi leurs associés , et 
M. le marquis de St-Georges, vice - président 
de celle de l'Allier, lui répondit le 19 juillet 
dernier : « la grefle à l'anglaise a très-bien réussi, 
» quelques noyers ont cependant manqué; mais 
» sur les châtaigniers , le succès a été complet; 
» elle sera en usage plus en grand à la saison 
» prochaine.» (1) 

Pour démontrer combien serait avantageuse 
la pratique de greffer le noyer, M. Chancey se 
livre à quelques calculs approximatifs : il sup- 
pose que dans le Mont-d’Or lyonnais, dans cette 
contrée industrieuse , où l'on élève douze ou 
quinze mille chèvres , il existe 30000 pieds de 
noyers , âgés de plus de trente ans et par consé- 


» (1 La greffe dite à l'anglaise, ( dit M. Bosc, nouveau 
» dict. d’agric, ,t. X, pag. 386), se pratique avec un succès 
» presque assuré sur le noyer , en la faisant de manière à 
» ce que la moelle ne soit pas entamée dans sa longueur, 


de Lyon. 73 
quent en plein rapport ; aucun n’est greffé ; ils 
donnent tous par pied , terme moyen, un 
bichet de noix , dont on fait 6 liv. et 1/2 d’huile. 
S'ils étaient greflés en bonnes variétés de noix, 
à l'abri des gelées du printemps, on estime , dit 
notre confrère, que leur produit serait au moins 
quintuple; en l'élevant simplement au double 
ce serait un accroissement en recette de plus 
de 180,000 liv. d'huile, qui , à 5ocent. la livre, 
constitueraient un surcroît annuel de revenu 
de 90000 fr. : que serait-ce pour le département 
entier ? 


» Il ditun peu plus bas: M. Knigh{ a trouvé qu’il était 
plus avantageux de prendre les petits yeux qui sont à la 
base des pousses que les gros pour la greffe du noyer en 
écusson, et de les placer dans le même lieu, sur les 


» 

» 

» 

» sujets. J'avais long-temps avant lui, remarqué que celles 
» que je plaçais au collet des racines réussissaient toujours , 
» et javais expliqué ce fait par la considération de l’humi- 
» dité et de l’ombre dont jouissaient ces greffes , ce qui re- 
» tardait le desséchement de leurs yeux. 

» Dans les départemens formés de l’ancienne Auvérgne et 
de l’ancien Limousin , on greffe les noyers sur eux-mêmes , 
uniquement pour retarder leur végétation au printemps, 
et par là rendre plus rares sur eux l’atteinte des gelées. 
Cette pratique est bien digne d’être imitée plus au nord.» 
» M. Bosc dit ailleurs : La méthode de la greffe en sifflet 
» est aujourd’hui pratiquée par tous les cultivateurs des en- 
» virons de Grenoble , de Romans , le long de la rive du 
>» Rhône dans la partie du Dauphiné. 


EE» Y}Y 


74 Societé royale d'Agriculture 

= Voulant montrer combien son calcul est mo- 
déré , l’auteur fait observer qu'en Dauphiné le 
produit des noyers greflés est de huit à douze 
mesures de noix, pesant chacune 65 livres poids 
de marc. Ila vu en 1789 à Charly, près de 
Lyon, un énorme noyer, plein de vigueur, qui, 
dans une année produisit 24 bichets de noix. 

Ce n’est pas tout : ajoutons avec M. Bosc que 
si, après la récolte on brûlait les feuilles et le 
brou, on en tirerait en potasse le vingtième de 
leur poids, estimé 6fr., ce qui donnerait pour 
chaque noyer un surcroît de revenu représen- 
tatif d'un capital de 100 francs. 

D'un autre côté, M. Duvaure, notre corres- 
pondant à Crest, a éprouvé, dit-il, plus d'une 
fois , que 30 à 36fr. de frais donnaient lieu à 
une récolte d'une quantité de noix dont le pro- 
duit s’élevait à environ 400 francs. 

Ajoutons que ce n’est pas seulement par son 
fruit que le noyer est précieux, son bois est 
doux, flexible, liant, il souffre le ciseau, il 
prend le plus beau poli. On en tire des planches 
larges, minces, qui, au moyen du feu se pré- 
tent docilement à tous les contours qu'on veut 
leur donner. Une fois bien sec, ce bois ne se 
tourmente pas , et il conserve la forme qu'on lui 
a imprimée. Il n'en est aucun qui puisse sup- 
pléer avec tant d’avantage les bois précieux d'un 


< 


de Lyon. Ù “75 
autre hémisphère. Aussi les menuisiers, les 
carrossiers , les ébénistes , les tourneurs, les 
sculpteurs, les statuaires estiment - ils ce bois 
au-delà de tous ceux qui croissent dans nos 
contrées. 

Comment se fait-il que malgré tant d’avan- 
tages on plante de nos jours dans ce département 
si peu de noyers ? et pourquoi est-on si porté à 
arracher ceux qui existent en plein rapport ? 
Car c'est avec douleur qu’en parcourant le dé- 
partement dans Pintérêt de la statistique agro- 
nomique, nous nous sommes assuré que depuis 
quelque temps surtout , le nombre des noyers y 
diminuait considérablement. On nous a dit que 
la cause principale de cet abandon était l'incer- 
titude des récoltes par l'effet des gelées tardives. 
Le climat a changé, dit-on, les saisons ont 
perdu leur régularité. Ce changement de tem- 
pérature qu'on ne peut contester , est sans doute 
le résultat de la disparition des grands arbres 
forestiers , et peut-être aussi de l'abaissement des 
montagnes. 

Quoi qu’il en soit , ne peut-on pas se préserver 
des désastres des gelées en ne plantant que des 
noyers tardifs, des noyers de la St-Jean ( mé- 
sange ) dont la récolte est presque sûre à cause 
du retard de leur floraison ? et n’est-ce pas avec 
cette variété qu’il convient de grefler tous les 


Sur quelques 
variétés de ché- 
nes ; par M. 
Chancey. 


76 Société royale d'Agriculiure 
sauvageons ? et cela encore parce que le mésange, 
variété de noyer la plus répandue en Dauphiné, 
est encore la meilleure sous le double rapport de 
l'abondance et de la qualité des fruits. 

Selon M. Chancey il est aussi facile de changer 
en m#ésange tous nos noyers, que tous nos chä- 
taigniers en marronniers de Loire, et il cite à 
ce sujet M. Durand , conseiller à la cour royale 
qui, ayant fait greffer en flûte sur de jeunes 
branches de gros châtaigniers des marronniers de 
Loire , avait obtenu des fruits de cette belle 
qualité. L'expérience qui a eu lieu en Beaujolais, 
à deux lieues de l’Ecluse a été constatée par M. 
Chancey. 


Ce n’est pas seulement le noyer et le châtai- 
gnier qui excitent la sollicitude de M. Chancey , 
il voudrait encore qu'on propageât dans le dépar- 
tement diverses espèces de noyers de Amérique 
septentrionale , bien meilleures que les nôtres : 
tels sont le chêne à gros fruits dont le gland a 
deux pouces de longueur et six lignes de dia- 
mètre ; le chène blanc qui croît dans les terrains 
les plus arides ; le chêne châtaignier qui s'élève 
à cent pieds de hauteur, dont le bois est excel- 
lent et le gland doux; enfin le chêne verd de 
la Caroline. 

Il vous a dit que notre respectable Gilbert lui 


de Lyon. 77 
remit, il y adix-neuf ans, de jeunes pieds de chêne 
d'Amérique qui étaient venus de graine au jardin 
de la Déserte ; ils furent reçus à l'Ecluse, et 
peu d’années après transplantés dans un autre 
local où l’on établit en pépinière des acacias 
qu’on y laissa à demeure. Les chênes souffrirent 
beaucoup de ce voisinage , et néanmoins ils ont 
atteint vingt à vingt-cinq pieds de hauteur , et 
ils présentent le plus beau feuillage ; leur crois- 
sance eût été sans doute bien plus rapide s'ils 


\ 


n’eussent pas eu à souffrir de deux transplan- 
tations et d'un fâcheux voisinage. 

Les chênes présentent deux espèces, l’une à 
feuilles de châtaignier qui se dépouille de son 
écorce comme le platane ; l'autre paraît être 
l'espèce à gros fruits. 

M. Chancey a mis sous les yeux de la société 
des feuilles de l’une et de l'autre ; celles de la 
première avaient un pied de long sur cinq pouces 
et demi de largeur , celles de l’autre neuf pouces 
de long sur six de fargeur: Notre confrère s’est 
offert à fournir à la pépinière départementale 
de naturalisation des greffes de ces deux chênes 
américains, en attendant de pouvoir en distri- 


buer des glands pour semis, ce qui ne peut pas 
être bien éloigné. 


Non content de vous payer son tribut par les Sur divers su: 


communications qui précèdent , M. Chancey }°'s 2£ronomi- 
ques extraitsde 


78 Société royale d'Agriculture 


la correspon- Loujours plein d'ardeur pour les progrès de l'a- 
dance de M. gronomie , a profité des courts instans qu'il a 


Chancey. 


passés parmi vous pour mettre sous vos yeux 
quelques traits de la correspondance qu’il entre- 
tient depuis longues années avec les plus célèbres 
agronomes de l’Europe. 

M. Zullin, votre correspondant à Genève, 
écrit en date du 6 août 1823, que dans le pays 
qu'il habite, si renommé sous le rapport des 
savantes méthodes agronomiques , on substitue 
les vaches aux bœufs pour l’attelage des charrues. 
Si elles sont, dit-il, convenablement nourries , 
elles donnent autant de lait que celles qui ne 
sont pas attelées : quant aux bœufs , ajoute-t-il, 
ils ne doivent être, en attendant la boucherie , 
qu'une machine à fumier. Un grand et habile 
propriétaire, M. ZLoys a un nombreux troupeau 
de vaches, et il les attelle toutes. 

L’attelage des vaches à la charrue, ajoute à 
cet égard M. Chancey, en remplacement des 
bœufs , est l'une des plus grandes améliorations 
que l'on puisse introduire dans la culture des 
céréales de ce département. En supposant en 
effet que quatre bonnes vaches coûtent plus d’en- 
tretien que deux bœufs , cette différence est plus 
que compensée par le bénéfice du lait et des 
vaux , et l'augmentation du fumier. Dès 1803 
les avantages de ce mode de culture avaient été 


de Lyon. 79 
signalés dans la Bibliothèque britannique ; et 
l'auteur de l'article était l'un des membres de 
la société. 

C'est encore dans la correspondance de M. 
Lullin que M. Chancey a puisé une note sur le 
plâtrage , il consiste à répandre l’engrais miné- 
ral, moitié sur cotylédons, moitié sur les lé- 
gumineuses de six pouces de hauteur. Un autre 
savant agronome Genevois, M. Zoys, ne jette 
les plâtres que sur cotylédons. Quoi qu'il en soit 
de ces deux méthodes, il n'en est pas moins 
vrai que l’emploi du plâtre devient tous les 
jours plus fréquent aux environs de Genève; 
c'est au point qu'on y exploite au moment 
actuel trente carrières de ce minéral, et qu’on 
est sur le point d’en ouvrir de nouvelles, tandis 
que deux ou trois suffisaient il y a quarante 
ans à la consommation. On en employerait bien 
davantage si l'on prenait le parti de le mêler 
avec du fumier pour les laisser fermenter en- 
semble. M. Aeine, correspondant du conseil 
d'agriculture, ayant opéré ainsi, il obtint un 
compost qui , ayant été répandu sur une vigne 
en vétusté, donna lieu à une récolte triple de 
celle qu'on retira d'une autre vigne qu'on avait 
cultivée comparativement, et de plus la pre- 
mière poussa des sarmens de dix pieds de long. 

Il est permis de croire qu'un pareil mélange 


L 


80 Société royale d Agricullure 
aurait du succès sur les céréales. ( Annales de 
l'agricullure française, mai 1823, pag. 201. ) 

On voit dans la même correspondance, que 
la pratique de chauler les céréales avec le sul- 
fate de zinc , recommandée, il y a plus de vingt 
ans, à Toulouse, par M. Benedict Prévôt, 

est devenue générale dans les environs de 
Genève. 

Il suffit de deux onces de vitriol bleu, dissous 
dans vingt-cinq pintes d'eau, pour un hecto- 
litre de semences. 

Ce procédé n’est pas plus coûteux que le 
chaulage ordinaire , il est plus efficace contre 
le charbon des céréales, et il ne les altère nul- 
lement. 

M. Chancey nous annonce , dans une autre 
lettre, que MM. Frèrejean sont parvenus à 
chauffer avec du charbon de pierre les fours 
de boulangers qu’ils ont établis à St-Etienne 
dans leurs vastes usines ; la cuisson du pain 
s'y opère au moyen de petits fourneaux à re- 
verbère , disposés dans le fond du four, de 
manière à le chauffer sans communiquer au 
pain aucune saveur désagréable. Déjà sept à 
huit boulangers de St-Etienne se sont empressés 
de chauffer leur four par un procédé qui leur 
procure une économie de combustibles dans la 
proportion des neuf dixièmes. 


LL 


de Lyon. 8t 

L'éloge du trèfle incarnat , vulgairement 

nommé farouche , est souvent répété dans la 
correspondance de M. Chancey. 


Cette légumineuse fourragère a été l'objet 
des observations de M. le chevalier Charmetlon, 
propriétaire-cultivateur au Bois-d'Oingt , que 
vous avez mis récemment au nombre de vos 
correspondans. Cet agronome la sème immé- 
diatemerit après le blé, et même sur le chaume 
sans labour ; il se contente de faire traîner sur 
le sol la herse de fer chargée fortement. Cette 
plante , observe-t-il, ne craint point la séche- 
resse, elle fleurit quinze jours avant la luzerne; 
tous les bestiaux la préfèrent au trèfle ordi- 
naire , et son produit est deux fois plus con- 
sidérable , quoiqu’on ne le fauche qu'une fois 
tous les ans ; on peut la faire consommer sur 
le.champ, surtout par les bêtes à laine , elle a 
le grand avantage de ne jamais les météoriser; 


donnée en vert à l’étable, elle augmente le lait des 


vaches et lui donne un goût plus agréable; 
comme on la fauche en avril, elle rend de bonne 
heure le terrain disponible ; on peut y mettre 
sans différer des pommes de terre sans engrais, 
elles sont même meilleures que celles qui 
viennent à la suite d’une fumure particulière 
M. Charmetton ne conseille pas de faire succéder 


Sur le tréfl& : 


incarnat ; par 
M. le chevalier 
Charmetton. 


Grefloir de 
J'inveution de 


M, Madiot. 


82 Sociélé royale d'Agricullure 

du blé aux pommes de terre , étant, dit-il, tres- 
avides , elles effritent la terre et y attirent beau- 
coup de limaces, il vaut mieux y jeter des gesses 
qui donnent au printemps un excellent fourrage, 
dont l'influence sur le lait des vaches est ana- 
logue à celle du trèfle incarnat. 

Après avoir adressé cette note à la société , 
M. e chevalier Charmetton eut occasion de faire 
un voyage en Normandie, province dont l'agri- 
culture ‘est renommée ; il y vit des champs 
immenses de trèfle incarnat où l’on faisait paître 
le bétail et même les chevaux depuis la fin d'avril 
jusqu’à la fin de mai; il y acquit la confirma- 
tion des précieuses qualités d’un fourrage qui 
engraisse beaucoup le bétail sans le météoriser 
comme le trèfle ordinaire et la luzerne, il a 


_appris aussi qu’on ne plâtre jamais cette plante. 


Nous allons maintenant rendre compte des 
faits nombreux que nous devons à M. Madiot. 

Cet agronome laborieux et infatigable a in- 
venté un instrument dont l'expérience lui a 
démontré les avantages pour greffer sûrement et 
avec promptitude toute sorte d’arbres et d’ar- 
bustes, 3 

Comme il ne serait pas possible de se faire 
une idée de ce greffoir si la description qu’en 
donne l’auteur n'était accompagnée d’un dessin , 


de Lyon. 83 
vous jugerez sans doute convenable , Messieurs, 
d'ajouter à votre compte rendu la figure de Pins- 
trument inventé par notre confrère (1). 

Il nomme spatule A un appendice de la lame, 
d'un demi-pouce de longueur, d'un quart de 
pouce de large; il est en argent, et pourrait 
être d'acier, ou mieux de platine (selon le con- 
seil de feu notre confrère M. Rast) ; il est 
légèrement horizontal , appliqué sur le dos de 
Ja lame, et presqu'à sa partie supérieure. Cet 
appendice sert à inoculer l’écusson. Il facilite sin- 
gulièrement l'opération, en la rendant plus 
prompte. On sait combien cette dernière con- 
dition est essentielle. 

La lame B a deux pouces et demi de lon- 
gueur , et n’est tranchante que supérieurement; 
c'est-à-dire à la seule partie qui serve à enlever 
l’écusson. 

L'auteur nomme talon C la partie de la lame 
émoussée dont le tranchant serait inutile, et qui, 
telle qu’elle est , sert de point d’appui auxdoigts, 
et donne beaucoup de facilité à l’opérateur. 

Entre la lame et le manche est le ressort D; 
il est intérieur et sert à ouvrir et fermer l’ins- 
trument sans aucun vacillement, 


(1) Cette figure, de grandeur naturelle , est à la fin du 
présent compte rendu. 


Sur l’ébour- 
geonnement 
des arbres frui- 

\ 


tiers ; par Le 
méme. 


84 Sociélé royale d’Agricullure 

La platine E qui règne le long du manche 
sert à maintenir les autres parties. 

Le manche F est bifurqué; il est de bois de 
plaqueminier ou diospyros, lequel en vieillissant 
devient dur et compact comme celui d’ébène ou 
d'acajou ( les arbres qui le fournissent sont cul- 
tivés à la pépinière de naturalisation } ;ce manche 
est arrondi en corne, et disposé de manière à 
recevoir les platines, le tranchant et la spatule. 

Les rosettes sur lesquelles sont rivés les clous 
qui tiennent toutes les pièces assemblées (1), et 
une légère cavité servent à introduire le bout de 
l'index pour ouvrir l'instrument. 

Aucun grefloir n'est d’un emploi plus facile 
même pour ceux qui n’ont pas l'habitude de gref- 
fer, il est aussi très-expéditif; c’est au point qu’en- 
tre les mains d'un habile pépiniériste il peut 
servir à opérer en un seul jour 1900 à 2000 grefles. 


Quand on veut avoir de beaux arbres fruitiers, 
il ne suffit pas de les greffer convenablement, il 
aut encore en diriger la sève avec habileté, et 
empêcher qu’elle ne s'égare pour développer des 
bourgeons superflus au détriment des produc- 
tions utiles. A la faveur d’un ébourgeonnement 
bien entendu, on maintient encore entre les 


(1) Cet instrument se trouve chez M. Lépine, coutelier, 
rue de la Coge, à Lyon. 


de Lyon. 85 
branches un équilibre exact, et on assure la 
fécondité de l'arbre pour plusieurs années. 

Tout le monde se mêle d'ébourgeonner; mais 
fort peu de cultivateurs pratiquent d'après de 
vrais principes cette opération essentielle. M. 
Madiot a déposé dans votre porte-feuille un mé- 
moire sur cet objet. Il y traite successivement 
1,9 du palissage selon la méthode de Montreuil ; 
2.° du procédé de Forsith ; 3.° de celui à l'éven- 
tail ; 4.0 de celui qui convient pour les arbres 
en quenouille; 5.° pour ceux en gobelet; 6.2 
pour les buissonniers; 7.2 pour les arbres à 
grand vent; 8.° il traite de l’ébourgeonnement 
par étage des tiges droites; 9.° de l'ébourgeon- 
nement de la vigne; 10. enfin de celui des 
arbres résineux. 

Notre confrère pense que toutes les espèces 
d'ébourgeonnement peuvent se pratiquer avec la 
main , sans le secours d'aucun instrument, et 
que cette manière est préférable, parce qu’elle 
est non-seulement plus expéditive , mais encore 
plus complète, et qu’elle extirpe avec les bour- 
geons les tubes médullaires qui leur corres- 
pondent, et que dès-lors la sève se dirige vers 
la branche mère. 

Après cette observation , l'auteur parle de la 
méthode de Montreuil , de celle de Forsith , trop 
connues pour être décrites ici. Ce qu'il dit de 


86 Société royale d Agriculture 
l'ébourgeonnement en quenouille , en éventail , 
en gobelet, prouve qu'il a confirmé par sa pro- 
pre expérience les principes de M. Roger-Schabol. 
Lorsqu'une branche à bois, dit-il, est bifurquée 
ou trifurquée, elle est généralement garnie d'un 
grand nombre de bourgeons; on ne doit con- 
server alors que ceux qui sont les mieux dis- 
posés. L'on voit souvent, ajoute-t-il, une branche . 
fruitière retenir du fruit, quoiqu’elle n'ait pro- 
duit aucun bourgeon , il est bon alors de la 
couper à trois ou quatre yeux : on intercepte ainsi 
la sève et on prévient l'épuisement, non -seu- 
lement de cette branche, mais encore de l'arbre 
entier. Dans tous les cas, il faut bien se garder 
de laisser Jes branches trop serrées’ les unes 
contre les autres , elles éprouveraïent par l’action 
des vents, un fâcheux frottement. 
L’écartement des branches d'un arbre peut 
être régulier et symétrique au point de lui don- 
ner la forme d'une colonne offrant plusieurs 
étages distans les uns des autres de deux à trois 
pieds. Le nombre de ces étages s'accroît avec les 
années , en proportion de la vigueur de Parbre, 
qui prend de plus en plus l'aspect le plus agréable 
en même temps qu’il produit d'excellens fruits , 
et cela par l'influence de l'air et de la lumière 
qui circulent sans obstacle entre les branches. 
C'est en pyramides que sont taillés les ceps 


de Lyon. 87 
de vigne des diverses variétés cultivées à titre 
d'expérience à la pépinière de naturalisation de ce 
département. Cette méthode, peu usitée, est 
fort avantageuse parce qu’elle économise l'espace ; 
qu’elle facilite l'ébourgeonnement, qu'elle ouvre 
à l'air et aux rayons solaires un libre accès. 

Il ne suffit pas de bien ébourgeonner la vigne 
il faut encore la dégarnir soigneusement des 
chicots , ergots et onglets qui arrêtent le cours 
de la sève et déterminent des ulcères chancreux- 
Si les vignes du Beaujolais sont en meilleur état 
que celles des environs de Lyon, c’est parce que 
dans le Beaujolais on élague soigneusement les 
bois morts; il ne faut pas craindre de raccour- 
cir les ceps; car c'est dans cet état qu'ils poussent 
le plus et qu'ils produisent la plus grande quan- 
tité de grappes; et à cet égard, l'auteur rap- 
porte que le 10 juin 1823, dans laprès-midi, 
il tailla un cep en pyramide , qui, le lendemain 
à la même heure, avait allongé ses rameaux de 
quinze pouces. Il dit encore que deux plants de 
huit ans, ayant été mis en parallèle, l’un fut 
traité d’après la méthode du Beaujolais , l'autre 
d'après celle du Lyonnais:le premier donna 
26 grappes , le deuxième 14. 

On suit une autre mauvaise méthode dans le 
Lyonnais , elle consiste à planter les ceps à deux 
pieds et demi de distance au lieu de quatre à 


Sur les semis 
d'arbres non 
acclimatés, et 
sur unc couche 
économique ; 
sans fumier ; 
par le méme. 


88 Sociélé royale d'Agriculture 

cinq ; dès-lors ils se disputent le terrain , leurs 
rameaux s’entortillent et se dérobent mutuelle- 
ment l'air et la lumière. 

Pour ce qui concerne l’ébourgeonnement des 
arbres verts, il ne peut consister que dans l’ac- 
tion de tortiller les branches horizontales qu'on 
veut supprimer ; toute autre méthode don- 
nerait lieu à de fâcheuses hémorragies. On a 
néanmoins observé que la conpe des rameaux 
pouvait être pratiquée impunément sur quel- 
ques arbres conifères : tels sont le thuyÿa, le gene- 
vrier , l'if, le cyprès ainsi que l'if; le genevrier 
de Virginie, peut, sous la serpette prendre 
toute espèce de formes , et à cetégard M. Pidancet, 
régisseur de la terre de l'Ecluse, s’est livré à des 
essais fort curieux. 


Un autre mémoire de M. Madiot a pour objet 
l'art d'élever de semis des arbres et arbustes 
étrangers pour les cultiver ensuite en pleine 
terre. C’est après vingt ans d'expérience qu’il 
donne le terreau de bruyère comme approprié 
aux jeunes arbres de l'Amérique septentrionale, 
11 distingue de deux sortes de terreaux, l’une 
compacte, l'autre légère ; il conseille de mêler 
à la première un septième de sable de rivière; 
à l’autre un sixième, avec la même quantité 
de terre argileuse, et arroser souvent. Toute 
espèce de fumier mélangé lui paraît nuisible aux 


de Lyon. 89 
semis , le fumier favorisant la végétation d’une 
foule de champignons parasites et souterrains , 
et qui rongent les radicules. 

Après avoir été semées dans des terreaux de 
bruyère , les graines de ces arbres doivent être 
soumises à une température à peu près égale à 
celle des pays dont elles sont originaires. 

Dès les premiers jours du printemps, ces 
jeunes plants sont exposés au levant, à l'abri 
du soleil et du nord. Il est des graines qui ne 
lèvent qu'à l'ombre ; quelques unes d'arbres 
baccifères , tels que certains jujubiers micocou- 
liers, etc. ne germent qu’au bout de hait à dix 
ans : dans tous les cas, il importe beaucoup de 
défendre les cotylédons de ces graines contre les 
ardeurs du soleil. 

Il n’en est pas de même des graines d'arbres 
originaires des zones brûülantes , celles-ci seront 
placées dans des pots ou terrines qu'on enfoncera 
dans des couches formées de végétaux capables 
de subir une fermentation très active. On les expo- 
sera au soleil à l'abri du nord et des eaux pluviales. 

Ces couches que M. Madiot appelle sourdes , 
auront 2 à 3 pieds de hauteur , et seront con- 
fectionnées ainsi: on forme un lit de plantes 
aromatiques qu'on tasse le plus possible par le 
trépignement des pieds, pour le réduire à l'é- 
paisseur de 8 à ro pouces ; on encaisse celte cou- 


90 Société royalé d'Agriculture 

che au moyen de quelques piquets ou de bran- 
chages entralacés ; on couvre cette couche de 
bonne terre; une fermentation vive ne tarde 
pas à s'établir dans l’intérieur de la couche, et 
bientôt les cotylédons se développent; on doit 
couvrir et paillasser ces organes délicats pour les 
préserver de la trop grande ardeur du soleil et 
des rosées nocturnes. Comme ils ont besoin 
d'être arrosés, et que l'eau troublerait la fermen- 
tation des couches , il faut avoir grand soin de 
ne verser cette eau que sur les pots qui con- 
tiennent les graines. 

Les plantes aromatiques employées par l'auteur 
pour former ces couches, sont des marubes , des 
cataires, des sauges, des menthes , des thyms. 

Aussitôt que ces jeunes plançons sont devenus 
un peu ligneux , on les transporte par un beau 
jour de printemps dans des pots, en séparant 
les espèces. On les laisse tout l'été à l'air, on ne 
craint pas même de les exposer aux premières 
gelées de l'automne ; ce n’est que lorsque le froid 
est intense qu’on les rentre dans l’orangerie. Dès 
l'année suivante on se hasarde d’en mettre en 
pleine terre , sauf à les empailler si l'hiver est 
trop rigoureux. 

C'est au moyen de ces couches économiques 
composées de plantes aromatiques que M. Madiot 
est parvenu à naturaliser à la pépinière du 
Rhône, un grand nombre d’arbres étrangers. 


de’ Lyon: ‘ 91 
Non content de naturaliser des arbres exotiques, 
M. Madiot a su employer plusieurs espèces in- 
digènes à des services de haut intérêt , il a sou- 
tenu par des plantations bien entendues les 
terrains mouvans qui menaçaient de tomber sur 
le cours St. Clair , depuis la Boucle jusqu’à 
l'extrémité du faubourg. On sait combien , avant 
ces plantations , étaient insuffisans les gros murs 
de soutènement que l'on avait construits au 
pied de ce coteau , dont la hauteur presque à pic, 
est de 90 à 100 mètres au-dessus du niveau du 
Rhône. Notre confrère n'a pas obtenu moins de 
succès sur la route nouvelle tracée à travers la 
montagne de Tarare jusqu'à une hauteur de 
344 mètres au-dessus du niveau de la mer. 
Mais ce n’est pas seulement par des planta- 
tions d’arbres qu’on fixe des terrains mouvans: 
On peut encore faire servir à cet important 
usage certaines plantes herbacées ; et parmi ces 
végétaux M. Madiot place au premier rang le 
froment junciforme, Triticum junceum , et'elyme 
des sables, Elymus arenarius. A a rencontré fré- 
quemment ces deux graminées le long des côtes 
arides et brülantes que baigne le Rhône depuis 
Lyon jusqu’à Valence. La nature semble les y 
avoir semées pour prévenir les éboulemens ; M. 
Madiot a eu occasion de jeter au milieu d’elles 
sur des penchans de ravins plusieurs espèees 


Sur le fro- 
ment joncifor= 
me et l’elyme 
des sables pour 
consolider les 
sables mou- 
yans. 


Manière 
d'empêcher les 
choux de mon- 
ter ; par le 
même, 


92 Socielé royale d'Agriculture 

de chènes , de hêtres , de châtaigniers , et au bout 
de quelques années ces terrains se sont couverts 
de plançons vigoureux ; ces mêmes graminées 
engraissées par le détritus des graminées fauchées 
de bonne heure, peuvent encore fournir de bons 
fourrages , comme l'auteur l’a observé chez un 
de ses amis en 1820. Ce n'est pas tout : la paille 
de Pélyme des sables et celle du froment junci- 
forme seraient employées avec avantage à la 
fabrication des chapeaux. 

D'après ces motifs , l’auteur voudrait que ces 
deux graminées fussent semées sur les dunes de 
Gascogne, elles assureraient, dit-il , et surtout 
rendraient plus prompt le succès des plantations 
d'arbres qu’on y fait pour les fixer et prévenir les 
catastrophes dont M. le comte de Tournon nous 
traça l’an dernier l’effrayant tableau (1). 


Il est un arbuste indigène qui sert à former 
les haies , l'aubépine ( Cratégus oxiacantha), et 
un arbrisseau étranger qu'on pourrait employer 
au même usage , le fevier (Gleditzia tricanthos ) ; 
ils sont l’un et l’autre armés d'épines , et M. 
Madiot propose de faire servir ces productions 
pour empêcher le choux cabut ( Brassica oleracea 
capitala') de porter des graines au lieu de former 
ce qu'on nomme la pomme. On enfonce , dit-il , 


(1) Voyez compte rendu pour 1822, pag. 38. 


de Lyon. 93 
ces épines transversalement entre le 1.% et le 
2.€ étages des feuilles, on les y abandonne, et 
elles déterminent une extravasion de sève consi- 
dérable ; la floraison et par conséquent la fruc- 
tification n'ont pas lieu, et les feuilles supé- 
rieures rècevant toute la nourriture se multi- 
plient , s’éparpillent et s'agglomèrent. L'auteur, 
qui ne se donne pas pour l'inventeur de cette 
méthode, l'a pratiquée, dit-il, avec le plus 
grand succès en 1823. D’autres observations de 
M. Madiot trouveront place au chapitre de l'his- 
toire naturelle. Je dois terminer cette section par 
la belle notice d’une amélioration projetée qui ? 
comme tant d'autres sera votre ouvrage. 


M. Matthieu Bonafous, notre correspondant 
à Turin, parcourant l'année dernière, en agro- 
nome observateur , les environs de sa ville natale, 
crut remarquer que le chanvre cultivé dans le 
Lyonnais était bien inférieur à celui qui croît 
en Piémont, surtout à celui qu'on récolte dans 
le Bolonais , et cela, quoique la plupart des cul- 
tivateurs du Rhône ayent établi leurs chenevières 
sur des terrains très- propres au chanvre, et 
prodiguent à ce végétal les engrais dont il est 
avide. 

Désirant améliorer dans sa patrie un genre 
important d'industrie agricole, il a bien voulu 


Introduction 
du chanvre bo- 
lonais; par le 
même. 


94 Sociélé royale d'Agriculture 

vous adresser uné certaine quantité de graine 
de chanvre Bolonais de la plus belle qualité. Il 
a exprimé le désir que cette graine soit offerte 
gratuitement aux cultivateurs du Rhône qui 
voudraient en semer comparativement avec celle 
du chanvre du pays, et pour stimuler leur zèle, 
il s’est offert à faire les fonds d’un prix en faveur 
de celui qui , au jugement de la société, obtien- 
drait les résultats les plus importans. 

Une offre si généreuse a été acceptée avec re- 
connaissance. La graine du chanvre Bolonais a 
été déposée à la pépinière départementale de na- 
turalisation , et la distribution en a été confiée à 
nos confrères MM. Madiot et Remond. En 
même temps un programme de prix a été publié 
par la voie des journaux. (1) 

L'appel fait aux agronomes a été entendu, 
soixante-dix-huit d'entre eux, dont cinquante- 
quatre du départemént se sont empressés de 
semer le chanvre Bolonais, nous attendons des 
renseignemens sur les résultats de cette culture 
nouvelle, tout nous annonce qu'ils seront im- 
portans. Déjà M. Balbis vous a présenté un 
paquet de chanvre Bolonais cultivé sur le terri- 
toire de la Croix-Rousse par M. de Valence , et 
vous en avez remarqué la hauteur qui dépassait 


(1) Voyez à la fin de la présente notice. 


de Lyon. 95 
“onze pieds. M, Grognier , de son côté, en a vu 
à Tassin , chez notre confrère, M. Rreussec , qui 
s'élevait de deux à trois pieds au-dessus du 
chanvre indigène à côté duquel il avait été 
semé. Le sol , l'exposition, le mode de culture 
étaient les mêmes pour l’un comme pour l’autre, 
et vous avez entendu M. Remond vous dire que 
partout où les deux espèces avaient été placées 
dans des circonstances semblables, celle de Bo- 
logne avait acquis un plus grand développement. 
Il reste à savoir si elle offre la même supériorité 
sous le rapport de abondance , de la finesse et 
de la ténacité de la filasse, s’il n’exige pas da- 
vantage du sol qui le nourrit , s’il peut se con- 
server dans nos contrées sans dégénération. Ces 
renseignemens seront recueillis par une commis- 
sion que vous avez chargée en même temps 
d'examiner les titres des cultivateurs qui con- 
courront pour le prix dont M. Matthieu Bonafous 
a fait les fonds avec une générosité au-dessus de 
tout éloge. 

C'est afin de ne pas prendre en ce moment 
l'initiative sur le travail de la commission que 
je dois garder le silence sur un mémoire de M. 
de Broal, juge de paix du canton de Mézieux , 
qui a cultivé comparativement dans son domaine 
de Vaux, trois espèces de chanvre, l'une de 
Bologne, l'autre de Russie, la troisième , de 


96 Societé royale d'Agriculture 
Vizille, département de l'Isère. IL a mis sous 
vos yeux des bottes de chacune d’elles, en joi- 
gnant à cet envoi un mémoire dont vous avez 
entendu la lecture avec beaucoup d'intérêt. 
En attendant le résultat du concours, nous 
avons appris par une lettre de M. Bonafous que 
le gouvernement pontifical , à l'exemple de celui 
du roi de Sardaigne , a prohibé tout récemment 
l'exportation de toute espèce de graine de chanvre. 
Les cultivateurs lyonnais ne pourront donc plus 
se procurer directement de celle de Bologne; 
c'est à eux à conserver précieusement les graines 
de cette race qu'ils ont récoltées cette année , 
afin d'assurer à la France la naturalisation d’une 
plante textile qui paraît très-précieuse. 


SUITE DE L’ECONOMIE RURALE. 


OPÉRATIONS agronomiques de M. de TaLuyers, 
particulièrement sur les irrigations. ( M. Gras, 
rapporteur ). 


Dans le courant de 1823, vous eûtes connais- 
sance des améliorations importantes qu’avait 
introduites dans ses domaines M. Bertaud de 
Taluyers | qui ne vous appartenait pas encore à 
ütre de correspondant. Vous désirâtes des détails 
Sur ces belles opérations, l’un de vous se rendit 


de Lyon. 97 
sur les lieux pour les recueillir, et il vous les 
donna dans un rapport verbal dont voici la 
substance : 

Le domaine de M, de Taluyers est situé , partie 
dans la commune de ce nom, partie dans celle 
de St. Laurent. On le nomme Prapin. Il s'étend 
sur une plaine élevée qui forme la première 
rampe de la montagne de St. André, il repose 
sur un granit micacé en décomposition. La terre 
végétale y est à peine de cinq à six pouces. Les 
arbres y sont rares et rabougris , il y souffle des 
vents impétueux échappés du Pila ; Pair y est 
pur, les hommes et les animaux y offrent les 
signes de la santé. 

Ce domaine de 400 bicherées lyonnaises (en- 
viron 52 ares), donnait autrefois 120ofr. de 
revenus ; il en produit actuellement 10000, 
C’est principalement le résultat de la métamor- 
phose en prairie d'une terre à seigle qui donnait 
trois ou quatre pour un. 

Pour créer cette prairie, on a creusé un ré-. 
servoir d’une surface de sept à huit bicherées 
(‘environ cent quatre ares) , et de la profondeur 
de seize à dix-huit pieds ( six mètres environ ): 
plusieurs sources se rendent dans ce réservoir, 
il reçoit les eaux pluviales chargées de principes 
fertilisans qui descendent de St. Laurent ; il a 
été confectionné d'après le système suivi pour 


7 


98 Société royale d'Agriculture 

la construction des étangs de Bresse. On a été 
favorisé par la nature du terrain qui, conve- 
nablement conroyé, s’est montré imperméable 
à l’eau; et avant de se livrer à l’entreprise, 
cette propriété du terrain avait été constatée 
par des expériences bien combinées. 

Il fallait encore que le champ que l'on voulait 
changer en prairie fût configuré de manière à se 
prêter à un arrosement complet et facile : ïl 
avait cette disposition. On put en temps oppor- 
tun, l'arroser par immersion ; et au moyen d'un 
canal parallèle au réservoir et traversant la 
prairie à la partie supérieure, canal où l'on 
mettait du fumier d'écurie avec du plâtre , et où 
entrait l'eau avant de se répandre dans la prairie, 
on put rendre cette eau éminemment fertilisante. 
Aussi cette prairie, examinée dans le courant 
de mai offrait-elle une belle végétation. Presque 
toutes les plantes dont elle se composait sont 
comprises parmi les meilleurs fourrages. Elle est 
de la contenance de 260 bicherées (33.80 ares 
environ). Elle doit donner, année commune, 
4000 quintaux de foin , qui, dans ce pays vaut } 
terme moyen , 3fr. le quintal. Le produit du 
regain doit servir à payer les façons. Le débit 
du foin est facile à Taluyers, parce qu’auprès 
de cette commune passe le grand chemin de 
St. Etienne à Lyon, sur lequel les charroïs sont 


de Lyon. 99 
très-nombreux. En attendant la vente, le foin est 
placé sous un vaste hangar dont la toiture est à 
ceintre ; 1l est pesé avec une grande économie 
de temps, au moyen d’une espèce de bascule 
fort ingénieuse, de l'invention de M. de T'aluyers. 
Cinq à six ans lui ont suffi pour opérer cette 
grande amélioration ; c’est à 20000 fr. que se sont 
bornés ses déboursés, et ses bénéfices ont dé- 
passé 80,000 fr. Cet habile agronome a bien 
voulu confier au membre de la société qui avait 
visité son domaine , les notes qu’il avait écrites 
sur ces améliorations , et vous avez prié M. Gras 
d’en prendre connaissance pour vous en rendre 
compte et vous développer leur objet. 

Vous avez entendu avec le plus grand intérêt 
le rapport de M. Gras, et vous avez arrêté qu'il 
serait inséré textuellement dans la notice an- 
nuelle de vos travaux. 


«Un savant également célèbre par ses travaux 
et par ses écrits, avait choisi cette épigraphe : 
Ingentia rura laudalo, exiguum colito. Vans la 
bouche et sur la porte de M. l'abbé Rozier , le 
tonseil du poète latin, publiquement, proclamé 
avait pris Pautorité d’un précepte. L'un et l'autre 
ont trouvé un contradicteur. Dans un mémoire 
dont vous avez entendu la lecture avec intérêt, 
M. de Taluyers , agronome distingué de ce dé- 


RAPPORT 
DE 
M. Gras. 


Culture des 
grandes et des 
petites prairies 


100 Société royale d'Agriculture 
partement, a prouvé que d'après certaines ex- 
positions données , il était plus avantageux de 
cultiver les grandes propriétés que les petites. » 

» Cet écrit, dont la modestie relève le mérite, 
vous a paru un compte rendu par un agriculteur 
actif et éclairé de ses travaux et de son admi- 
nistration. Vous avez cru y remarquer que les 
procédés dont il a usé pour changer l’ancienne 
culture de ses fonds et en adopter une plus ap- 
propriée à la nature du sol, étaient savamment 
combinés, que des observations exactes et sou- 
tenues confirment les faits qui en sont le résultat ; 
que le désir généreux d’être utile aux agronomes 
qui suivraient son exemple, l’a engagé à leur 
tracer des règles pour la direction de leurs essais ; 
que de riches produits ont succédé à ses combi- 
naisons et réalisé ses espérances ; en un mot, 
que dans l'écrit de M. de Taluyers cet ensemble 
de détails, de faits, de résultats était fondé sur sa 
propre expérience, que rien n’était abandonné à 
une théorie systématique. » 

» Vous avez manifesté l'intention qu’un rap- 
port du mémoire de M. de Taluyers vous füt 
présenté ; c’est à ce vœu que je viens répondre, 
c’est cette dette que je vais acquitter. » 

» M. de Taluyers débute par quelques obser- 
vations générales et d’une haute importance; il 
balance les avantages et les mouvemens de la 


de Lyon. 10i 
division des terres, ou de leur réunion en des 
masses considérables , il recherche les causes qui 
ontengagéles grands propriétaires à aliéner leurs 
héritages ; il conseille dé la simplicité dans les 
cultures, une sage circonspection dans l'usage 
des nouvelles méthodes ; il indique les procédés 
à pratiquer pour la bonification du sol et les 
combinaisons qu'elle comporte. » 

» Une grande partie de ces observations est 
déjà connue, nous ne les rappellerons pas ; c'est 
à celles qui nous ont paru le plus dignes de votre 
attention que nous nous arréterons. » 

» Avant M. de Taluyers, un de nos législateurs 
modernes avait dit: partout où vous construi- 
rez une chaumière et l’environnerez d'un arpent 
de terre, vous fonderez une nouvelle famille et 
vous multiplierez les bras pour l'agriculture. 
Notre auteur est également convaincu que nous 
devons à la grande division des terres l’accrois- 
sement prodigieux de la population et l'augmenta- 
tion considérable de nos produits territoriaux. » 

» Il attribue à cette division un effet qui dans 
le temps excita notre étonnement et dont la 
cause échappa aux esprits inattentifs. » 

» Dans des siècles antérieurs , dit M. de T'aluyers, 
la désertion , le licenciement des armées enfanta 
les bandes dévastatrices qui furent la terreur et 
le fléau des provinces qu'elles parcoururent et 


102 Société royale d'Agriculiure 
ravagèrent : il en a été tout autrement de nos 
jours. Libre de toute contrainte, le soldat li- 
cencié a conservé l'esprit de discipline qui le 
maîtrisait sous son drapeau , et rentré paisibles 
ment dans ses foyers, il y a déposé sans mur- 
mure ses armes qui furent les témoins et les 
instrumens de sa valeur et de sa gloire. » 

» Sans vouloir donner à un dévouement aussi 
absolu, un principe moral trop élevé, M. de 
Taluyers pense seulement que possesseur d'une 
parcelle de terre, le soldat devenu simple cito- 
yen , fut rappelé par l'attrait de la propriété et 
céda au sentiment du besoin de la tranquillité 
protectrice des premiers travaux et des premiers 
plaisirs de sa jeunesse. » 

» Balançant ensuite les avantages de la division 
des terres avec ceux de leur réunion en une 
masse considérable, M. de Taluyers s'occupe 
d'abord du soin de venger les grands propriétaires 
du reproche injuste d'aliéner par un motif de 
cupidité , l’héritage de leurs pères. Ils y sont, 
selon lui , entraînés par des causes indépendantes 
de leur volonté. » 

» Ces causes, il les attribue à la loi des suc- 
cessions , à l’énormité de l'impôt, au mode de 
culture stationnaire par le manque de capitaux ; 
à l'infidélité des régisseurs, à la mauvaise foi 
des fermiers ou des grangers, au haut prix des 


| de Lyon. 103 
gages des domestiques, à la trop grande variété 
de culture, au peu de soin qu'on apporte dans 
l'entretien des prairies, à absence et à l’insou- 
ciance du maître , enfin au bas prix des denrées. » 

» L'auteur du mémoire parcourt successivement 
les causes impulsives de l’aliénation des grandes 
propriétés , et les réflexions que lui suggère la 
modification apportée à la loi des successions par. 
celle qui a créé les majorats , sont d’une vérité 
frappante. » 


» Puisqu'il est, dit M. de Taluyers, de l'essence 
de notre constitution politique qu'il existe un 
corps intermédiaire et divitocraté ; qu’il s’associe 
à la puissance, par l’ascendant des richesses, que 
la possession des vastes propriétés en rehausse 
l'éclat, que linaliénabilité de ces propriétés per- 
pétue la splendeur des familles appelées à former 
ce corps, du moins faut-il qu'une administra- 
tion active et intelligente garantisse à la pros- 
périté publique qu’elle retirera des masses im- 
posantes que leur affectation aux majorats exclut 
du commerce, les mêmes avantages qu'elle aurait 
obtenus de la division de ces masses. » 

» Quelle sera la règle des grands propriétaires 
pour reconnaître dans leur intérêt et dans celui 
de l'état, si leur administration a atteint le but 
qu'ils doivent se proposer ? Quel est, pour frap- 


Du régime 
et de l’admi- 
nistration des 


grandes 
priétés, 


pra- 


Y04 Société royale d'Agriculture 

per ce but, le mode d'exploitation à préférer ? 
Ces deux problèmes importans sont résolus par 
Vauteur du mémoire. » 

» Les bases de l’impôt fondées non sur les 
produits , mais sur la contenue et la classification 
des propriétés, ne pourraient être changées 
sans des inconvéniens graves et de fâcheux ré- 
sultats, même pour l’agriculture. L’impôt de- 
vient ainsi un point de départ immuable. Il est 
reconnu que l'impôt dans la proportion des pro- 
duits des grandes propriétés, comparés à ceux 
des petites, est pour les premières d’un à quatre, 
pour les secondes d'un à six. Conséquemment 
l'équilibre rétabli entre ces deux produits, dont 
la proportion de l'impôt constatait la différence , 
sera pour le grand propriétaire le thermomètre 
le plus fidèle de la bonté de son administration. » 

» Si les ouvrages multipliés de nos savans agro- 
nomes n'étaient pas remplis de conseils donnés 
aux propriétaires-agriculteurs pour les prémunir 
contre la déception des méthodes innovées qui ne 
se recommandent ni par leur simplicité ni par 
leur clarté, contre les opérations exécutées sur de 
grandes échelles, avant d’avoir été tentées sur de 
petites contenues, contre le dangerdes emprunts 
pour les bonifications, contre les piéges des régis- 
seurs et des fermiers intéressés à dissimuler ou 
à amoindrir les revenus des propriétés qu'ils 


de Lyon. 105 
régissent ou qu'ils afferment; nous aurions à 
suivre M. de Taluyers dans cette partie de son 
mémoire ; nous aurions à vous rappeler avec lui 
. la méthode salutaire de simplifier autant que 
possible les genres de culture dont chaque do- 
maine est susceptible; à exprimer le vœu qu’il 
forme pour que le langage agricole soit aussi 
vulgaire que l’art l'est lui-même ; mais il nous 
a paru que dans ce tableau, dont les détails vous 
sont depuis long-temps connus, notre auteur a 
seulement voulu peindre les obstacles qu'il avait 
eus à vaincre pour améliorer sa propriété et pour 
que sa persévérance, en les surmontant , servit 
tout à la fois d'encouragement pour l'imiter , de 
leçon pour les éviter. » 

» C’est sur des objets d’une plus haute impor- 
tance que votre attention doit se fixer ; c’est sur 
le mode d'exploitation qui, sous beaucoup de 
rapports, rend les grandes propriétés préférables 
aux petites , que vos regards vont s'attacher. » 

» M. de Taluyers s'occupe peu. de la culture 
des terres et encore moins du régime des bois ; 
il se borne à répéter, pour les premières, qu’elles 
s’améliorent , soit par les prairies artificielles 
dont les avantages sont généralement reconnus, 
soit par l'usage des instrumens aratoires les plus 
perfectionnés. C’est à la charrue inventée par M. 
Dumont , et dont il décrit les effets, qu'il donne 
la préférence. » 


106 Société royale d'Agriculture 

» Quant au régime des bois , il convient que les 
siens sont en mauvais état, et que la matière à 
cet égard étant épuisée , il s'abstient de toute 
observation. Il parle seulement des grands ser- 
vices que certaines espèces d'arbres peuvent 
rendre, et si au pied de ses possessions coulait 
un torrent ou une rivière, à l'exemple de M- 
de Varax de Marcilly, il en aurait prévenu les 
excursions, en les contenant dans leur lit par 
des plantations de peupliers heureusement com- 
binées. » 

» M. de Taluyers permettra-t-il de s'étonner 
de la sévérité de ce laconisme, et de ce qu’en 
parlant des grandes propriétés , en classant les 
bois dans leurs revenus , cependant il n'a rap- 
pelé ce genre de productions que pour signaler 
Patilité de la plantation de certains arbres ? » 

» Des vues d'un autre ordre auraient dû, ce 
semble, agrandir ses observations. » 

» La conservation des forêts et des bois taiïllis 
est du plus grand intérêt , aussi a-t-elle été dans 
tous les temps l'objet de la sollicitude du gou- 
vernement et le sujet de soins également salu- 
taires par la sagesse de leurs mesures et Ja ri- 
gueur de leurs prohibitions. » 

s » Ce n’est ni du petit propriétaire, ni du 
paysan qu'on peut espérer cette conservation. Le 
dernier surtout avide de jouir du fruit annuel de 


de. Lyon: 107 
ses travaux, n’acquiert des bois que pour y porter 
la hache. On ne doit attendre cette conservation 
que des grands propriétaires. À eux seuls exclu- 
sivement il appartient aussi d'ajouter à cette 
partie de nos richesses nationales par la planta- 
tion et la culture des arbres exotiques que 
nous avons acclimatés. » 

» D'un autre côté, l'institution des majorats 
ne s'oppose pas seulement aux inconvéniens d'une 
extrême division des terres , elle exerce surtout 
de plus une influence puissante sur la conser- 
vation des forêts dont l'existence , par l’efet de 
linaliénabilité, se perpétue avec l'effet des ma- 
jorats eux-mêmes, indépendamment de ce qu'une 
nécessité journalière et toujours renaissante force 
l'emploi des arbres de haute futaie et en assure 
le produit aux grands propriétaires. Les forêts , 
sous un autre rapport, doivent être considérées 
comme d'immenses capitaux mis en réserve pour 
les besoins des temps difficiles et orageux. Qui 
ne se rappelle , en effet , le noble emploi que fit 
du prix de la vente de ses antiques forêts un 
ministre, le conseil , l'ami, le censeur de son 
souverain , et l'influence que ce généreux sacri- 
fice eut sur les événemens qui le suivirent? Qui 
ne sait que le tribut déposé par un serviteur 
fidèle aux pieds d’un maître reconnaissant con- 
tribua à purger le sol français des hordes étran- 


108 Société royale d'Agriculture 

gères qui le foulaient , et à conduire par la main 
de la victoire un grand prince sur le trône de ses 
aïeux et dans le sein de sa grande famille ? ». 

» Peut-être aussi, Messieurs, qu’en nous éton- 
nant de ce que ces avantages éminenset caractéris- 
tiques de la supériorité des grandes propriétés , 
n'ont pas été aperçus par un observateur judi- 
cieux , nous sommes-nous exposés nous - même 
au reproche de méconnaître intention et le but 
de Pécrit que nous analysons. » 

« Réunissant à des connaissances étendues en 
agronomie, une pratique consommée, M. de 
Taluyers s’est proposé seulement d'indiquer quel 
est, pour les grandes propriétés , le genre de 
culture le plus productif, d'en garantir la réa- 
lité par sa propre expérience, et d’en faciliter 
l'exécution par la connaissance de ses procédés. » 

» C'est en nous renfermant dans cecerele , que 
nous suivrons désormais l'auteur du mémoire. » 

» Il ne se dissimule ni la difhculté d'amé- 
liorer les grandes propriétés, ni les obstacles 
qui s'opposent à cette amélioration. Pénétré de 
cette vérité, il a cherché, pour vaincre ces 
difficultés et surmonter ces obstacles , un pro- 
cédé qui s'écartät de ceux généralement adoptés, 
et selon lui presque toujours aussi dispendieux 
qu’insuffisans. » 

» Ce procédé est celui de l'amendement des 
anciennes prairies et la création de nouvelles. » 


de Lyon. 109 

» Personne ne contestera à M. de Taluyers la 
supériorité des produits des prairies sur toutes 
les autres espèces de récoltes. Le tableau qu’il 
en a-tracé est d’une vérité démontrée. » 

» Cette nature de bien, observe-t-il, exige 
peu de main-d'œuvre préparatoire et peu de se- 
mence. Elle n'exige point de dépense , ni de re- 
cette de détail; elle brave les intempéries des 
saisons et les fléaux qui ravagent les autres 
productions ; elle a surtout cet avantage pré- 
cieux, que la récolte du foin peut s’apprécier 
et se vendre sur place; que par lui-même et 
sans l'intervention toujours onéreuse d'un régis- 
seur , le propriétaire peut supputer et assurer 
son revenu avec d'autant plus de certitude que 
les fourrages sont difficiles à soustraire, et 
qu’une fois bien conditionné, ils ne nécessitent 
plus de surveillance. » 

» Cette base incontestable ainsi établie, M. 
de Taluyers s'occupe de l'amendement et de 
Pirrigation des anciennes prairies, de la conser- 
vation et de l'irrigation des nouvelles. » 

» Nous avons hésité long-temps , Messieurs , 
sinous devions vous entretenir des observations 
et des conseils de M. de Taluÿers sur l’'amende- 
ment et l'irrigation des anciennes prairies. De 
tous les détails dans lesquels il est entré, il n'en 
est pas un qui ne soit connu ; de tous les pro- 


De l'aimer. | 
dement des an- 
ciennes prai- 
ries , eonsidéré 
comme moyen 
d'améliorer les 
grandes  pro- 
priétése 


110 Sociélé royale d'Agriculture 
cédés qu'il indique, il n'en est pas un qui ne 
soit pratiqué par ceux-là mêmes qui n’ont que 
de premières notions en agriculture. » 

» À coup sûr cette partie de l'écrit que nous 
analysons, considérée sous ce rapport , était 
peu propre à fixer l'attention d'une compagnie 
savante ; aussi l’aurions-nous supprimée, si une 
considération que vous partagerez peut-être , ne 
nous avait déterminé à vous en présenter au 
moins l'aperçu. » 

» Sous la main d’un propriétaire agronome, 
de vastes champs frappés en quelque sorte de 
stérilité, tant qu’ils furent possédés par ses an- 
cêtres , se sont tout à coup couverts de riches 
produits. Ce fait, uniquement obtenu par des 
travaux agronomiques a fixé vos regards ; vous 
avez pensé que pour l’encouragement ; peut-être 
même pour les progrès de l’agriculture , il im- 
portait de vérifier par quels moyens s'est opéré 
un changement aussi heureux, je dirai pres- 
que une métamorphose aussi surprenante. » 

» En agronomie comme dans toute autre ad- 
ministration , les parties dont elle se compose, 
se lient et s'enchaînent., C'est par le perfection 
nement de chacune d'elles , par leur. tendance 
vers un centre commun , par l'homogénéité de 
leur ensemble qu’on réalise les résultats avan- 
lageux qu’on s’en promet : or, dès que M. de 


de Eyon. 111 
T'aluyers attribue à deux causes le haut degré 
de fertilité auquel il a élevé sa propriété, il m’a 
semblé que ces deux causes se combinant l’une 
avec l’autre, je n’aurais pas répondu à votre 
attente si javais négligé la première, pour m'at- 
tacher exclusivement à la seconde. » 

» Assainir, fumer, herser , arroser en temps 
utile, tels sont les travaux que M. de Taluyers 
indique pour l'amélioration des anciennes prai- 
ries. » 

» I est reconnu , observe notre agronome , 
que le séjour des eaux dans une prairie est ex- 
trèmement nuisible , et que leur écoulement 
entre deux terres qu’il refroidit , ne l’est pas 
moins. L'effet donné par ces deux causes est de 
produire des joncs et des. plantes de mauvaise 
qualité. » 

« De là l'indispensable nécessité d'assainir les 
prairies. » 

» Comment y parvient-on ? » 

« Deux fossés ayant. chacun une PRE A 
particulière doivent être ouverts, l’un dans la 
partie la plus élevée de la prairie, l’autre dans la 
partie la plus basse, » 

» Destiné à recueillir les eaux postl'irrigation 
dé la prairie, le premier fossé creusé à quatre 
pieds de profondeur sur six en largeur, est rem- 
pli de fumier de litière bien conditionné ; un 


112 Societé royale d Agriculture 

autre fossé de la même profondeur , ayant sa 
direction vers la partie la plus basse , se coupe 
à angles, et sa communication entre les deux 
fossés est interceptée par une planche mobile. » 

» Par son passage et son séjour dans le fossé, 
l'eau se sature des parties fertilisantes du fumier ; 
lorsqu’ensuite la planche qui le sépare de celui 
qui le coupe à angle droit est levée , l'eau ainsi 
imprégnée des sels fécondans s'échappe , arrive 
sans être délavée , aux points les plus éloignés, 
et chaque partie de la prairie est également 
amendée. » 

» Le second fossé ouvert dans la partie la 
plus basse, n'a d'autre destination que de rece- 
voir les eaux surabondantes ou qui fluent entre 
deux terres; on les y conduit par de petits 
fossés ou des tranchées, et dans la crainte que 
le trop plein nese répande et n'inonde la prairie, 
il est nécessaire que ce fossé en ait un de dégor- 
gement. » 

» On remarque dans toutes les prairies an- 
ciennes, continue M. de Taluyers, que les 
parties élevées sont sèches et le plus souvent 
arides , tandis que les parties basses sont maré- 
cageuses. Cette différence vient de ce qu’à leur 
entrée dans la prairie, les eaux sont chargées 
de parties terréuses , qu'à peine ont-elles par- 
couru vingt toises qu'elles s'épurent par le frot- 


| de Lyon. 113 
tement de la feuille des plantes à travers les- 
quelles elles coulent et forment des dépôts suc- 
cessifs, qui , devenant nuls pour les parties 
basses , les rendent chaque jour plus maréca- 
geuses. » 

» Cette différence se corrige par un travail 
diamétralement contraire à celui pratiqué pour 
les terres. Pour ces dernières, c'est du bas dans 
le haut que les chaintres se transportent ; c’est 
du haut dans le bas pour les prairies. 

» C'est avec la suie formée par la combustion 
du bois que M. de Taluyers conseille de fumer 
les anciennes prairies, et le mois d'août est le 
moment le plus favorable pour la répandre : 
vingt bichets combles suffisent pour une bicherée 
lyonnaise, » 

» Une prohibition sévère de laisser les bes- 
tiaux paître dans les prairies, est encore un 
conseil qu'il donne aux propriétaires. N’écoutez 
point, leur dit-il, les insinuations intéressées 
des fermiers ou des grangers. Les bestiaux man- 
gent les bonnes plantes, dédaignent les mau- 
vaises; celles ci montent en graines, et dans 
peu d'années le sol en est couvert. » 

» C'en est assez, Messieurs , pour vous donner 
une idée de cette partie du mémoire de M. de 
Taluyers; c’est de ses procédés pour la création 
des prairies que nous avons maintenant à vous 
entretenir, » 8 


Création des 
prairies, 


114 Société royale d'Agriculture 

» Tout ici devient digne de vous. Nous avons 
à fixer votre attention sur des conceptions neu- 
ves, sur des découvertes , fruit d'observations 
judicieuses et souvent réitérées, sur des résultats 
soumis à des calculs certains , sur des faits d'un 
grand intérêt et confirmés par l'expérience. 


» Transformer en prairies excellentes des. 
terres ingrates, est, dit M. de Taluyers, de 
toutes les opérations en agronomie, sans contre- 
dit la plus avantageuse. » 

». Réservé dans ses conseils ; il déclare qu’elle 
ne convient pas à toutes les localités, et prin- 
cipalement aux petites propriétés composées 
de fonds isolés et de peu de contenue; mais ses 
succès lui ont démontré que cette métamorphose 
s'opère sûrement dans les grandes propriétés par 
la raison que parmi les vastes tènemens dont 
elles sont formées, il serait rare de n’en pas trou- 
ver qui se prêtâssent à ce mode d'exploitation ; 
aussi cette possibilité est-elle tout à la fois un 
des-traits qui caractérisent leur supériorité , et 
un motif puissant d'encouragement pour les 
grands propriétaires. » 

» L'exposition la plus favorable pour une 
prairie étant celle du midi et du matin, c'est 
coriséquemment celle qu'on doit choisir et pré- 


féter. » 


de Lyon. 115 

« Ce choix une fois fixé, trois opérations prin- 
cipales sont nécessaires pour convertir en prairie 
une terre sillonnée jusqu'alors par la charrue, 
et souvent arrosée des sueurs infructueuses du 
laboureur. Ces opérations sont : 

« Recueillir dans un réservoir un volume 
d’eau suffisant pour l'irrigation ; 

» Construire le réservoir dans une propor- 
tion égale au volume d'eau qu'il doit contenir ; 

» Préparer la terre pour recevoir la semence 
et l'y répandre. » 

» Parcourons avec M. de Taluyers les prin- 
cipales divisions qui , à leur tour , en admettent 
de secondaires. » 

» La première est celle de l'irrigation ; il la 
définit en ces termes: » 

» Considérées comme moyen de bonification , 
les irrigations consistent à recueillir dans un 
réservoir les eaux des pluies, des neiges et des 
sources pendant l'automne et l'hiver, pour les 
y conserver jusqu'au printemps, les répandre 
alorssur les prés et lestérresqu’on veutapprarier.» 

» Ainsi réunies et exposées à l’action du soleil, 
ces eaux sont préférables à celles des sources, et 
offrent des avantages que ne présentent pas l'écou- 
lement continuel et successif de ces dernières. » 

» 1.2 Ayant une grande masse d'eau à ré- 
pandre à la fois, on arrose également toutes les 
parties d’un pré; 


+16 Société royale d'Agricullure 

» 2.9 Le réservoir dominant le pré et inter- 
ceptant les eaux par des fossés de conduit, on 
le tient sec pendant l'hiver ; 

» 3.2 Pouvant arroser à volonté, on est sûr 
d’avoir un second foin ; 

» 4° En lâchant les eaux après les premiers 
foins , les graines tombées, lèvent et garnissent 
les places vides ; avantage très-précieux pour les 
nouvelles prairies qui se resèment d’elles-mêmes 
et sans frais. » 

» Quel est le volume d’eau nécessaire pour 
l'irrigation d’une prairie? C’est sur une grande 
échelle que M. de Taluyers a établi ses calculs. » 

» Il y donne pour base un tènement de fonds 
de la contenue de 250 bicherées mesure lyon- 
naises , il évalue à 20 toises cubes d’eau l’absorp- 
ption faite par l'irrigation de chaque bicherée, 
et multipliant le nombre de 250 par celui de 20, 
il fixe à 5000 toises cubes d’eau la quantité né- 
cessaire pour l’arrosement annuel et complet 
de toute sa prairie. » 

» Comment le propriétaire qui se propose de 
convertir une terre de cette étendue en une 
prairie, peut-il s'assurer qu'il obtiendra un vo- 
Jume d’eau aussi considérable ? » 

» Sans doute le calcul serait facile et la cer- 
titude complète, si le réservoir était constamment 
alimenté par des sources abondantes et conti- 


de Lyon. 117 
nues ; des règles sûres et adaptées à la science 
hydraulique apprendraient bientôt au proprié- 
taire si le volume d’eau donné par les sources, 
suffit à l’arrosement de la prairie qu’il veut créer. 
Mais quoique M. de Taluyers ait compris indis- 
tinctement dans la nomenclature des ,eaux à 
recueillir, celles provenant des sources, des 
pluies et des neiges, il paraît cependant n’avoir 
rappelé les premières que comme un bénéfice 
incertain ou accidentel de la nature; et c'est sur 
celles données par les pluies et par les neiges que 
portent ses observations et qu’il fonde ses calculs.» 


» Un fait étudié avec soin vint éclairer ses 
premières observations. 11 remarqua que les 
hauteurs environnant de toutes parts la prairie 
qu'il se proposait de créer, continuellement des- 
séchées , ne produisaient que les plantes qui se 
plaisent seulement dans les terrains arides ; 
qu’au contraire les parties basses étaient cons- 
tamment humides. Il chercha à s’expliquer cette 
différence, et l'attribua tout naturellement à ces 
eaux qui fluaient de ces mêmes hauteurs ; ce qui 
le conduisait à conclure d'une part qu’il s'opérait 
une infiltration d’eau très-considérable ; d'autre 
part que cette infiltration s’effectuait à une assez 
grande profondeur pour que les racines des 


plantes ne pussent même y atteindre. Il jugea: 


Application 
des principes 
préeédens à la 

construction 
d’un grand ré- 
servoir d’irri- 
gation, 


118 Société royale d'Agriculture 

que cette profondeur de terre était d’autant plus 
nécessaire à admettre que le sol du pays est en 
général composé d’un pied environ de terre végé- 
tale, et que sous cette couche règne un banc de 
roche granitique plus ou moins dur, et com- 
posé de quartz , de mica. » 

» Une fois certain de la présence des eaux par 
leur infiltration dans la terre, et de l'action de 
cette infiltration sur les parties basses de la 
prairie , M. de Taluyers porta plus loin ses ob- 
servations , il voulut remonter à la cause pro- 
ductive des eaux ainsi infiltrées, et connaître par 
leur volume quelle masse on pouvait recueillir 
dans un réservoir. » 

» Un second fait également étudié avec soin 
fixa son opinion sur le problème qui lui restait 
à résoudre, et qui devait servir de base à ses 
calculs. » 

» Au mois de novembre 1822, raconte M. 
de Taluyers , j'ai vu pleuvoir plusieurs jours de 
suite sans qu'aucune goutte d'eau s’écoulât dans 
mon réservoir du terrain qui le dominait. Le 
1.7 décembre , et sans qu'il survînt de nouvelles 
pluies, je vis les terres s'humecter ; le 2 elles 
commencèrent à suinter et à former de petites 
sources dont le volume s'augmenta chaque jour ; 
le 10 les sources devinrent très-abondantes , et 
mon réservoirse remplit dans les mois de janvier 


de Lyon. 119 
et de février. Depuis, l'écoulement de ces sources 
n'a pas cessé, et au mois de juin il continuait 
encore. » 

» Des-lors l'infiltration des eaux pluviales 
dans la terre et la direction de leur écoulement 
vers les parties basses de sa prairie furent dé- 
montrées à M. de Taluyers, et par la masse 
d’eau recueillie ensuite dans son réservoir, il 
put juger du volume de celles données par cette 
infiltration. » 

» Une autre observation concourut encore à 
asseoir ses idées. Dans la partie opposée à la 
chaussée du réservoir , les terres avaient été 
creusées à une profondeur de douze pieds , et les 
terres coupées à pic, présentant l'aspect d'un mur 
élevé sur son aplomb, montraient à découvert 
les différentes couches dont elles se composaient 
dans cette hauteur. M. de Taluyers vit alors que 
les eauxsuivaient les couches composées de sable 
et de gravier, et laissaient toujours à sec les 
terres compactes, inférieures ou supérieures, qui 
ne s’humectaient que long-temps après. Ce fait 
lui démontra qu’une fois le solimbibé dans toute 
sa profondeur , il rejetait les eaux qui tombaient 
sur sa surface , et que les couches de sable et 
de gravier devenaient autant de canaux ménagés 
par la nature, pour faciliter l'écoulement de la 
surabondance des eaux dont il était saturé. » 


120 Sociélé royale d'Agriculture 

» À l'aide de ces observations, M. de T'aluyers 
obtint pour ses calculs deux termes connus ; l'in- 
filtration des eaux pluviales dans la terre et le 
volume donné par leur écoulement dans les 
couches de sable et de gravier : il met ces deux 
termes en rapport avec un troisième, celui de 
l'étendue du terrain qui domine son réservoir ; 
et de la combinaison de ces termes , il arrive à 
un résultat inconnu peut-être dans les procédés 
agronomiques. » 

» Il admet que le rapport entre la superficie 
du terrain dominant et la masse des neiges et 
des eaux pluviales qui tombent annuellement 
sur cette superficie, est d'un à trois; ainsi 
ayant trois cents toises carrées en superficie, on 
aura cent toises cubes d’eau. Les neuf dixièmes 
de cette masse annuelle d'eau, en s'évaporant 
par l'influence solaire et atmosphérique, ou 
étant absorbés par la nutrition des arbres , des 
plantes et d’autres causes, il en résulte que le 
réservoir ne recevra chaque année qu’un dixième 
de la masse d’eau produite par les pluies et par 
les neiges. Conséquemment trente toises car- 
rées en superficie ne donnent en effectif pour 
l'arrosement d'une prairie qu’une toise eube 
d'eau. » 

» Graduant ensuite ces données sur deux 
échelles , l'une de la capacité de son réservoir , 


de Lyon. 123- 
l'autre de l'étendue de sa prairie qui est de 250 
bicherées lyonnaises, M. de Taluyers présente 
les calculs suivans : » 

» Le premier est relatif à la quantité d'eau 
qu'il recueille annuellement. » 

» Il évalue à 169,000 toises carrées le terrain 
qui domine son réservoir ; divisant ensuite ce 
nombre par celui de trente qui donne une toise 
cube d’eau , il résulte de cette division que les 
169000 toises carrées du terrain dominant, 
donnent, abstraction faite des fractions , 5,633 
toises cubes d’eau qui se rendent au réservoir. » 

» Considéré sous le rapport de la capacité du 
réservoir, ce volume d’eau donne un excédant 
de go1 toises cubes. La capacité de ce réservoir 
ne contenant en effet que 4,732 toises cubes 
d’eau, et celles qui y coulent étant de 5,633 
toises cubes , il y a réellement un excédant de 
go1 toises cubes pour le remplir. » 

» Considéré sous le rapport de l'étendue de 
la prairie , cet excédant diminue. » 

» Vingt toises cubes d'eau suffisent, selon 
M. de Taluyers, pour larrosement annuel de 
chaque bicherée d’une prairie. La sienne étant 
de 250 bicherées, et ce nombre étant mul- 
tiplié par celui de 20, on obtient un total 
de 5000 toises cubes d'eau ; celle qu'il recueille 


étant de 5,633 toises, l’excédant se réduit à 
633 toises. » 


122 Société royale d'Agriculture 

» Continuons de suivre M. de Taluyers dans 
quelques observations qui terminent cette partie 
intéressante de son mémoire. » 

» La supputation des toises cubes d’eau , cal- 
culée d’après l'étendue de la superficie du terrain 
qui domine sa prairie, ne s'étend que sur des 
données générales, il peut se rencontrer des 
causes secondes et locales qui ne sauraient être 
prévues , et qu’il faut abandonner à l’'intelli- 
gence du cultivateur, ou pour les corriger si 
elles sont nuisibles , ou pour en profiter si elles 
sont avantageuses. » 

» I] ne faut pas croire que les calculs sur le 
volume d’eau produit par l’infiltration des pluies 
et des neiges, soient tellement constans qu'on 
ait la certitude de les voir se réaliser chaque an- 
née. Ces calculs ne sont rigoureusement exacts 
qu’en prenant le terme moyen de vingt années. » 

» Des causes différentes produisent une grande 
variété dans le volume d’eau donné par l'infil- 
tration des pluies et des neiges. » 

» Cette variété est surtout remarquable sui- 
vant la température des saisons. Les années 1822 
et 1823 en ont fourni la preuve à M. de Taluyers. 
En 1822, où il tomba peu de pluie, il eut à 
peine 5o toises cubes d’eau dans son réservoir ; 
en 1823 au contraire où les pluies furent abon- 
dantes, il estime à goo toises cubes le volume 
d’eau qui s’y rendit. » 


de Lyon. 123 

» Une autre cause qui doit être observée par 
le cultivateur , et qui, faute de réflexion , ne 
manquerait pas de le décourager , c'est que plus 
le terrain est pentif et léger, plus il enverra 
d’eau ; c'est que pendant l’hiver les causes d'éva- 
poration étant à peu près nulles, il s’infiltre une 
plus grande quantité d’eau que dans les autres 
saisons , et l'écoulement sur les parties infé- 
rieures en est conséquemment plus considérable ; 
aussi n'est-ce que sur les pluies d'hiver et sur les 
neiges qu'il doit baser la quantité d’eau dont il 
aura à disposer. » 

-» Une dernière observation qui vous a frappés 
à la lecture du mémoire, doit, par ce motif, 
terminer cette partie de notre analyse : cette 
observation tient à un calcul de la réduction de 
la neige en eau. Notre auteur remarque que 
cette réduction s'opère de sept à un, en telle 
sorte que sept toises cubes de neige ne donnent 
qu'une toise cube d'eau. » 

» Que des expériences antécédentes à celles de 
M: de Taluyers, aient convaincu de la réalité 
de ce résultat, ou qu'il soit dû aux propres ex- 
périences de M. de Taluyers, il sera toujours 
juste de reconnaître dans cet agronome cet amour 
de la science qui ne négiige aucun détail, cet 
esprit observateur qui se plaît à tout voir, à 
tout étudier , à se rendre un compte fidèle et 


124 Société royale d'Agriculture 

sûr de ce qu’il a vu et étudié, et qui soumet à 
des certitudes mathématiques la solution des 
problèmes que la nature offre à ses méditations. » 

» Ce sont les mêmes recherches, les mêmes 
procédés , la même certitude de résultats que 
vous retrouveriez dans les procédés mis en pra- 
tique par M. de Taluyers pour la construction 
de son réservoir , si nous avions à le suivre 
dans le compte qu’il en rend et dans les règles 
qu'il prescrit pour ce genre de travail. » 

» Nous aurions à reconnaître avec lui la place 
à choisir pour l'assiette du réservoir , com- 
ment il doit être orienté pour que les eaux 
agitées par le vent , n’en dégradent pas la chaus- 
sée ; quelle doit être l'épaisseur de cette chaus- 
sée ; quelle inclinaison il importe de donner aux 
talus intérieurs et extérieurs ; quelle est la qua- 
lité de terre propre à claver pour le béton destiné 
à contenir les eaux ; à quelles épreuves cette terre 
doit être soumise pour en vérifier la qualité. » 

» Quelqu'essentiels que ‘soient ces détails, 
nous n'avons cependant pas cru devoir vous en 
entretenir. L'usage les a rendus depuis long- 
temps familiers dans les pays surtout où les 
étangs sont multipliés ; et s’il est vrai, comme 
le remarque M. de Taluyers , que la construction 
d'une chaussée soit un art qu'il faut apprendre, 
il est tout aussi vrai que les préceptes qu'il en- 


de Lyon. 125 
seigne à cet égard , l'habitude et la pratique les 
ont inculqués aux ouvriers qui se consacrent à 
ces travaux. » 

» Aussi avons-nous regardé cette partie du 
mémoire de M. de Taluyers comme un excellent 
manuel pour les agronomes qui l'imiteront , mais 
comme n'étant pas aussi d’un intérêt assez pi- 
quant pour attacher votre attention. » 

» Nous nous bornerons à recueillir quelques 
traits qui ont paru se recommander, sinon par 
leur nouveauté | du moins par la nécessité de 
les rappeler. » 

» L'une des observations de M. de Taluyers 
se porte sur le calcul de la capacité du réservoir. » 

» Cette capacité doit être déterminée d'après 
le volume d’eau nécessaire pour l'irrigation de 
Ja prairie. Et comme notre auteur a observé que 
c'est seulement sur les neiges et les pluies d'hiver 
que le volume d’eau à recueillir peut être appré- 
cié , il sait qu'il convient de donner au réservoir 
une capacité assez vaste pour contenir toute 
l'eau qu’exige l’étendue de la prairie. » 

» Le calcul pour fixer la capacité à donner 
au réservoir, tient à une opération connue et 
fort simple, c’est de multiplier les toises car- 

* rées du terre-plein du réservoir, par le nombre 
de pieds que sa chaussée a en élévation. Admettez, 
par exemple, que le terre-plein du réservoir ait 


126 Société royale d'Agriculture 

en superficie 100 toises carrées, et que la chaus- 
sée ait en élévation trois pieds , alors le réservoir 
contiendra trois cents toises cubes d'eau: Adaptez 
ensuite ce calcul au volume d'eau à disperser sur 
tous les points de la superficie de la prairie pour 
son irrigation, et vous connaîtrez par cette 
opération mathématique quelle dimension il 
faut donner au réservoir, à quelle hauteur il 
- faut élever la chaussée. » 

» Cette chaussée exige le plus grand soin dans 
sa construction , et des observations multipliées 
pour s'assurer de sa bonté. » 

» Deux points à vérifier s'offrent d’abord au 
constructeur du réservoir ; si la qualité du sol 
formant le terre-plein est propre à conserver 
l'eau , si d’un autre côté la chaussée s’oppose à 
toute espèce d'infiltration, » 

» Quant au premier point, l'œil le moins 
attentif peut facilement s’en assurer ; il suffit de 
voir si l’eau qui repose sur le fond du réservoir 
est promptement absorbée. » 

» Quant à la chaussée, la certitude de sa per- 
fection demande des observations plus soutenues.» 

« Notre auteur conseille de faire d'abord une 
chaussée d’épreuve avant que de l’exécuter sur 
une plus grande échelle ; et lorsqu'elle est ache- 
vée , la couvrir d'une couche de terre de la 
même qualité que celle employée à la clave , 


de Lyon. 127 
laquelle sera légèrement mouillée, pour que ni 
les rigueurs du froid, ni les ardeurs du soleil 
ne la dégradent par les fentes qui , sans cette 
précaution , seraient inévitables. » 

» Cette chaussée d’épreuve doit être clavée dans 
toute la profondeur du fossé , et jusqu’à la hau- 
teur du bourrelet formé par les terres extraites 
du fossé et jetées également des deux côtés ; son 
élévation doit être en outre de six ou sept pieds.» 

» Une année doit être donnée à l'expérience 
et aux observations. La chaussée, pendant ce 
temps, doit être souvent visitée; et pour voir 
si elle tient l'eau il n'est besoin que de calculer 
celle qui se rend dans le réservoir, celle qui se 
perd par l’évaporation, et tirer la conséquence 
de ces deux termes connus. » 

» Le mode de procéder à cette vérification est 
ici placé à côté du précepte. » 

» Après chaque pluie il faut cuber la masse 
d'eau qui en sera le produit, défalquer ensuite 
de cette masse celle absorbée par l'évaporation , 
et tenir une note exacte de ces deux calculs : à 
la fin de l’année on totalise la masse d’eau entrée, 
celle absorbée par Pévaporation , et le nombre 
excédant donne nécessairement la certitude des 
résultats qu’on a voulu obtenir par la chaussée 
d'épreuve. » 

» Si le volume d’eau conservé dans le réser- 


128 Société royale d'Agricullure 

voir est dans une proportion égale au volume 
diminué par l’évaporation , alors on acquiert la 
double certitude , d’une part que la chaussée 
comme le fond du réservoir retiennent parfai- 
tement l’eau qui s’ÿ rend ; d’autre part , on a la 
mesure exacte du volume d’eau dont on peut 
disposer pour irrigation de la prairie. » 

» Au contraire, s’il est vérifié par les calculs 
que l’absorption de l'eau entrée dans le réservoir 
est plus forte que celle qui aurait dû s'opérer 
par l’évaporation , alors il devient évident que 
cette disproportion provient de l'une de ces deux 
causes, ou de la défectuosité de la chaussée , ou 
d'une déperdition occasionée par la nature du sol 
du fond du réservoir. » R 

» Ilest facile de remédier à la première de 
ces causes; mais on ne le pourrait pour la seconde 
qu’à l'aide d’un béton de chaux ; et comme la 
dépense serait excessive lorsque le réservoir a de 
grandes dimensions , M. de Taluyers conseille 
dans ce cas de renoncer à l’entreprise. » 

» Plus les calculs sont importans par leurs 
conséquences , plus on doit apporter d'attention 
pour en assurer l'exactitude, aussi notre auteur 
conseille-t-il l'usage d'une règle de métal, graduée 
par pieds , pouces et lignes, fixée dans l'eau 
contre la chaussée , et placée de manière qu'on 
puisse facilement en distinguer les divisions : il 


de Lyon. 129 
considère ce nilomètre comme un moyen sûr de 
ne pas errer dans les calculs. » 

» Nous placerons ici, Messieurs , une obser- 
vation qui nous a paru digne de vous être 
soumise. » 

» Lorsqu'on examine avec l'œil du philo- 
sophe la variété des substances dont se compose 
le globe sur lequel les hommes sont disséminés 
et fixés par leur naissance , lorsqu'on réfléchit 
sur les modifications qui diversifient la nature 
du sol de chaque contrée, on semble autorisé 
à croire qu’en les forçant à trouver dans les pro- 
ductions végétales celles qui doivent conserver 
leur existence , la Divinité a voulu, par cette 
nécessité première, varier leur industrie, comme 
elle diversifiait les substances de la terre qu’elle 
livrait à la culture et à leurs travaux. » 

» Nous ne savons pas Messieurs, si cette 
réflexion a frappé l'auteur du mémoire lorsqu'il 
a indiqué à l’agronome qui marcherait sur ses 
traces, les procédés dont il devait faire usage 
pour s’assurer si la nature du sol où il plaçait 
son réservoir lui fournirait une terre propre à 
former le béton de la chaussée. » 

» S'il avait écrit pour la province de Bresse 
où il possède comme nous des propriétés, les 
recherches et les fouilles qu’il conseille auraient 
été inutiles. ,, 


9 


130 Société royale d'Agriculture 

» Dans cette province et dans toutes celles où 
les étangs se multiplient comme moyen d'amé- 
lioration et de production industrielle , la nature 
du sol a indiqué la formation de ces grands ré- 
servoirs. Là quelques pouces de terre végétale 
couvrent une couche épaisse d'argile que la 
pioche peut à peine rompre, et qui mieux qu’un 
ouvrage de l'art s’oppose à l'infiltration de l'eau. , 

» Presque partout on est certain de se procu- 
rer une terre propre à former le béton d'une 
chaussée , et d’avoir un plafond où l’eau est 
parfaitement retenue; mais il n’en est pas de 
même dans toutes les contrées, surtout dans 
celle où M. de Taluyers a sa prairie; et c'est 
avec son discernement ordinaire qu'il prescrit 
de cuber approximativement le nombre de toises 
_de chaque qualité de terre donné par le creuse- 
ment du réservoir et les fouilles profondes qui 
y seront faites, à l’eflet de reconnaître si elles 
sont propres et en assez grande quantité pour le 
béton de la chaussée. ,, 

» Cette partie de son mémoire, l'auteur la 
termine en prescrivant d'ouvrir sur le derrière 
et les côtés de l'étang de grands fossés qu'on 
remplit de fumier , de manière que les eaux qui 
sortiront de l'étang puissent y passer au besoin. 
Il conseille encore lorsque l'étang n’a plus d’eau 
de mêler ces fumiers encore humides avec une 


de Lyon. 131 
quantité triple de bonne terre, d’en former des 
tas allongés à la hauteur de cinq pieds, de les 
laisser fermenter pendant deux mois, et de les 
répandre ensuite comme un excellent engrais 
sur la prairie, 

» Le hasard est venu encore seconder les tra- 
vaux de notre agronome. ,, 

» Une branche souterraine des anciens aque- 
ducs romains ayant sa direction du nord-est au 
sud-ouest, traverse sa prairie dans toute son 
étendue. Cet aqueduc, arrondi en forme de 
voûte , ayant cinq pieds de hauteur sur deux en 
largeur , a ses parois intérieures revêtues de ci- 
ment briqueté, et le fond en est carrelé. Des 
siècles ont dégradé cet ouvrage, monument de la 
grandeur et de la puissance d’un peuple qui vivra 
éternellement dans l'histoire ; mais quelques 
réparations heureusement combinées l’ont encore 
utilisé pour la fertilité de la prairie. ;, 

» Les eaux pénètrent encore dans ce canal ; 
malgré son état de dégradation elles y séjournent 
et en sortent ensuite avec abondance. Il fallait y 
donner une direction profitable : qu'a fait M. 
de Taluyers ? ,, 

» Il a déblayé l’aqueduc dans une longueur 
d'environ cinq toises , et l’a ensuite rompu à 
deux pieds de profondeur au milieu de la partie 
repurgée. Les eaux qui se perdaient par les in- 


Résultats ob- 
tenus. 


132 Sociélé royale d Agriculture 
filtrations ont ainsi été forcées de s'écouler sur 
un point déterminé et à s'élever sur la surface 
de la prairie. Ainsi retenues et élevées , les eaux 
sont ensuite conduites par un canal partant 
da point où l'aqueduc a été ouvert, à une marre 
dont les bords élevés en retenant les eaux dans 
Vaqueduc ne leur permettent de s'écouler que 
lorsque celles de la marre s’abaissent. Ainsi le 
vide de Paqueduc devient un réservoir souterrain 
qui alimente la pièce d'eau avec laquelle il cor- 
respond. ;, 

» Sans doute, Messieurs, il faut ici applaudir 
à l'intelligence de l’agronome ; mais la décou- 
verte inespérée qu’il a faite, ne saurait être ni 
un exemple , ni un motif d'encouragement pour 
aucun autre propriétaire. » 

>, Ce qui en sera un très-puissant, c’est l'é- 
norme accroissement de valeur et de revenus, 
produit par les améliorations et les travaux de 
M. de Taluyers. Nous allons le suivre dans ses 
calculs, en ne prenant que les totaux. 


» Le domaine de Prapin avait été affermé 
par le père de VT. de Taluyers 1200 fr. Le prix 
trop élevé força le fermier à demander le rési- 
liement de son bail; il devint colon partiaire ; 
et ie revenu net du domaine fut alors réduit 
à 1050 fr. » : 

Ce même revenu, au moyen des amélio- 


de Lyon. 133 
rations de M. de Taluyers fils, s'élève brut à 
14,300 fr. Dans la supputation des produits qui 
donnent cette somme, le premier foin évalué à 
2fr. le quintal, et le second à rfr. 5oc., fi- 
gurent pour un total de 10,25ofr. ;, 

» L'augmentation par les autres produits se- 
rait de 4,050 fr. » 

» Tel est le premier calcul des revenus bruts 
du domaine de Prapin. » 

» La déduction des sommes avancées pour les 
améliorations, des frais de culture et des impo- 
sitions, présente un autre tableau. » 

» La première déduction est celle de l'intérêt 
de la somme avancée pour les améliorations ; il 
l'évalue à 20,000 fr., dont l'intérêt annuel est 
DÉ e ela ral SU RS TRER UEE Le . 1000 f, 

» Il y ajoute pour l'imposition et les 
frais d'exploitation . ........,... 4250 


Por. Soon. . 5250 


a 


» Le revenu net est conséquement de . g000 
» Et si de cette dernière somme on 
soustrait le revenu ancien . . . . . . . . 1050 


» L’accroissement de revenu est con- 
séquemment de. ........,.... "70990 


» Répartissant ensuite ce produit sur 400 bi- 
cherées lyonnaises, dont se compose la contenue 
du domaine de Prapin, M. de Taluyers observe 


134 Société royale d'Agriculture 
que le revenu donné par chaque bicherée est 
de 25fr. environ. » 

» Cette augmentation de revenus a dû néces- 
sairement en produire une toute aussi considé- 
rable dans la valeur vénale du domaine ; c'est 
encore un autre calcul de M. de T'aluyers. » 

» [Il remarque d’abord que dans le départe- 
ment du Rhône, à trois lieues de Lyon, sur 
la route qui conduit de cette ville à St. Etienne, 
les domaines ne s’achètent pas à raison de 5 
pour °/, du revenu ; il donne en consequence 
à sa propriété de Prapin produisant net g0oof., 
une valeur vénale de 200,000 fr. » 

» Voilà le terme de comparaison pour l’ac- 
croissement du capital donné par les améliora- 
tions. » 

» Il a été offert à M. de Taluyers pour l’ac- 
quisition de sa propriété , et il a refusé une 
somme de 65,000 fr. : c'était là son ancienne 
valeur. Il a dépensé 20,000 fr. pour les amélio- 
rations, ces deux sommes réunies donnent un 
total de 85,000 fr. , lequel déduit de 200,000 f. 
donne 115,000 f, pour l’accroissement du capital. » 

» Le résumé de ces calculs est donc pour les 
revenus une augmentation de 7950 fr.; pour le 
capital, un accroissement de 115,000 fr. » 

» Là se termine l'analyse du mémoire de M. 
de Taluyers ; ne vous étonnez pas de l'étendue 


de Lyon. 135 
que nous y avons donnée ; nous avons pensé 
qu’elle trouvait son excuse dans l'intérêt qui se 
rattache aux observations de l’auteur , dans leurs 
rapports avec de grandes vues en agronomie. » 

» Rien de ce qui tient à l'agriculture, aux 
arts, à l'industrie ne vous est étranger ; vous 
saisissez avec empressement les faits nouveaux ? 
les découvertes les plus simples , les plus légers 
perfectionnemens ; vous les scrutez avec soin 
pour en mesurer le degré d'utilité, vous les en 
couragez par des éloges, quelquefois même vous 
les récompensez par d'honorables distinctions. 
Les travaux et les succès de M. de Taluyers ne 
vous auraient-ils pas laissé entrevoir un horizon 
plus étendu et d'un ordre plus élevé ? » 

» C'est beaucoup, sans doute, que d'éclairer 
la routine des cultivateurs , de donner à leurs 
travaux un résultat plus avantageux; de leur 
indiquer de nouvelles richesses dans de nou- 
velles productions. Sans doute l'agronomie a fait 
un grand pas, lorsqu'elle s'est associée une 
autre science ; mais ne serait-ce pas obtenir un 
avantage tout aussi réel , plus général peut-être, 
que d'apprendre aux grands propriétaires le de- 
gré de prospérité auquel peuvent s'élever leurs 
vastes possessions, que de vaincre par la certi- 
tude d'atteindre ce but, le dégoût qui accom- 
pagne une grande administration , et le découra- 


136 Sociélé royale d'Agriculture 
gement qui naît presque toujours des frais énor- 
mes qui la surchargent. » 

» Le problème de savoir si pour la prospérité 
publique , comme pour celle des particuliers il 
est préférable de cultiver les petites propriétés 
plutôt que les grandes, est loin d'être résolu , 
et la préférence donnée aux premières n’est 
peut-être qu'un préjugé accrédité par le temps, 
par des opinions imposantes, mais qu’il importe 
de déraciner. » 

» Si je ne me trompe, Messieurs , c’est à une 
compagnie savante, comme la vôtre, à opérer 
cette révolution en agronomie, à substituer une 
vérité démontrée à ure erreur que tout concourt 
à fortifier, à ouvrir un débouché trop dédaigné 
aux capitaux des riches possesseurs , à les atta- 
cher, par d’heureuses spéculations , à la culture 
de l’héritage de leurs pères, qu’ils livrent à 
l'ignorance et à l'avidité des fermiers. » 

» Votre institution réclame de vous ce chan- 
gement dans les idées, si vos recherches et vos 
méditations vous en démontrent l'utilité, et 
vous auriez alors à féliciter M. de Taluyers de 
vous avoir fourni tout à la fois une preuve et 
un exemple. » 

» C’est à la création d'une vaste prairie, par 
des observations et des procédés qu'aucun agro- 
nome n'avait encore révélés, que M. de Taluyers 
attribue principalement l'accroissement de la 


de Lyon. 137 
valeur et des produits de sa propriété. Sous ce 
rapport ses travaux et ses découvertes se recom- 
manderaient encore par leur utilité. » 

» Depuis longtemps on a proclamé comme 
une vérité constante que la France, trop riche 
en blé, ne l'était pas assez en bestiaux , et si je 
ne craignais de le dire, jejouterais que la con- 
currence étrangère qui avilit le prix de cette 
denrée et la tient captive dans nos greniers, 
donne à cette vérité la conviction de l'évidence. » 

» Rendons grâces à la sollicitude bienfaisante 
du gouvernement, qui, par des concessions et 
des encouragemens , s'efforce d'améliorer les 
races d'animaux que nous élevons. Déjà nous en 
ressentons les salutaires effets, mais ils de- 
mandent à être secondés. Ce n'est point assez 
de produire de beauxextraits , il importe encore 
de les multiplier et de nous affranchir du tribut 
que nous payons à l'étranger qui nous fournit 
les bestiaux destinés à la consommation des 
grandes cités, ou ceux dont nous recherchons 
Je fruit. » 

» Il nous semble qu'on ne doit se flatter 
d'atteindre ce but et de répondre aux vues du 
gouvernement, qu’en multipliant les prairies. 
Celles artificielles qui se propagent dans nos 
campagnes , offrent sans doute de précieux avan- 
tages ; maïs elles sont insuffisantes , quelquefois 
da: gereuses pour l'éducation des élèves, Ce serait 


138 Socièlé royale d'Agriculture 

donc une découverte inappréciable que celle de 
convertir en des prés fertiles des terres qui jus- 
qu’à présent n'ont été sillonnées que par le soc 
de la charrue. » 

» Enfin, Messieurs, si vous pensiez que les 
découvertes et les travaux de M. de Taluyers ne 
prêtent au développement aucune de ces vues, 
et n'exigent pas qu’elles soient approfondies par 
une commission prise dans votre sein, nous 
aurions alors à vous proposer, en le félicitant 
sur son zèle pour l’agronomie , de lui donner, 
au nom de votre société, un témoignage public 
du prix que vous y attachez. » 


Quoique le rapport lumineux qui précède ait 
suffi, Messieurs, pour vous donner les idées 
les plus précises sur les améliorations de M. 
de Taluyers, vous avez cependant voulu qu'une 
commission allâten prendre connaissance sur les 
lieux. Elle s'est composée de MM. Gras, Remond, 

Bouchard-Jambon, Madiot, Deschamps , Faisso- 

les et Grognier. Le rapport verbal qu'elle vous a 
présenté a confirmé pleinement tout ce que 
vous aviez appris relativement à l’une des plus 
belles opérations agronomiques qui , depuis plu- 
sieurs années , ayent été faites dans notre pro- 
vince, et vous vous êtes empressé d'inscrire le 
nom de M. de Taluyers sur la liste de vos cor- 
respondans. 


de Lyon. 139 
HISTOIRE NATURELLE. 


cms 


Vous prenez sans doute, Messieurs, le plus 
grand intérêt à toutes les recherches des natu- 
ralistes ; il n'en est aucune dont la communi- 
cation ne soit honorablement accueillie par vous. 
Cependant vous n’avez fait entrer dans l'ordre 
habituel de vos travaux , que celles de ces re- 
cherches qui se lient , du moins indirectement, 
au premier des arts. Considérée sous ce rapport, 
la science de la nature vous offre un vaste do- 
maine à exploiter; c'est au point qu'il est bien 
difficile d'en assigner les limites. Combien de 
végétaux en effet, qui jusqu'ici n'ont été l'objet 
d'aucune culture, si ce n'est dans des jardins 
botaniques, et qui entreront un jour dans 
notre économie rurale, ne füt-ce que comme 
plantes d'agrément ! Combien d'animaux sau- 
vages qui un jour recevront le joug de la domes- 
ticité ! 

Je pourrais , en développant ces considéra- 
tions, vous présenter l'étroite alliance qui lie 
l’histoire naturelle avec l'agronomie. Je pour- 
rais signaler lés services immenses que les scru- 
tateurs de la nature ont rendus à Part qui nour- 
rit les hommes; et d'un autre côté vous citer 
les agronomes qui , en étudiant des êtres vivans , 


140 Sociélé royale d Agriculture 
dans tous leurs âges, ont concouru puissamment 
aux progrès de la botanique et de la zoologie ; 
mais je ne dois pas oublier que c’est de vos tra- 
vaux et non de mes pensées que doit se composer 
le tableau que je trace en votre nom. 

Parmi ces travaux il en est qui appartiennent 
presqu'également à la botanique et à l'agrono- 
mie, tels sont ceux qui ont rempli une grande 
partie de la longue et honorable carrière de 
M. Rast-Maupas. 

Combien de fois n'a-t-il pas été question dans 
vos comptes rendus annuels des observations 
dendrologiques , recueillies par notre respectable 
confrère , dans ses pépinières d’Ecully ? Vous 
savez quel a été le sort d'un établissement éga- 
lement cher à l’agriculture et à l'histoire natu- 
relle, d'un établissement que les voyageurs sa- 
vans visitaient avec un vif intérêt. 

De cette multitude d'arbres curieux, origi- 
naires de toutes les parties du monde que M. Rast 
s'était plu à réunir sous un site aussi varié que 
pittoresque, il ne reste que quelques échantillons 
de bois que M. Madiot a dérobés à la destruction. 
Il a étudié avec soin ces échantillons , il les a 
rapportés aux arbres qui les ont fournis, et 
qu'il avait observés pendant longues années dans 
la pépinière même où ils ont vécu ; car il s'était 
associé aux recherches dexdrologiques de M. 


de Lyon. 141 
ÆRast. Ne pouvant sauver de la hache dévasta- 
trice tant d'arbres étrangers dont plusieurs ont 
peut-être végété sous notre ciel, pour la der- 
nière fois, M. Madio! a obtenu , du moins, la 
faculté de les observer encore au moment où ils 
allaient périr ; et ce qu’il n'aurait pu faire s'ils 
avaient vécu, il en a examiné le tronc dans 
l'intérieur. Des échantillons qu'il a recueillis il 
a formé un cabinet de bois exotiques dont une 
partie a été mise sous vos yeux avec des notes 
qui méritent une place dans cette notice. 


1. Acer Tartaricum ( Erable de Crête }, bois 
blanchâtre, d’un tissu fin et serré, dont le pied 
cube a pesé 19 kilogrammes 73 grammes. (1) 
L'arbre avait acquis, à 42 ans , 12 mètres 
de hauteur sur 97 centimèt. , 5 millimètres de 
circonférence. Ce bois pourrait être employé 
dans le charronnage, la menuiserie, dans l’art 
de l'armurier comme dans celui du sculpteur. 

2. Acer negundo, E. à feuilles de frêne, bois 
jaune paille, safrané , d'un grain fin , uni, 
facile à travailler, durcissant par le laps du 
temps. -— 14 kilogram. 139 gram. le pied cube, 
ayant acquis chez M. Rast en 22 ans, 18 mèt. 
de haut sur 1 mèt. 32 centimèt. de circonfé- 


(1) Tous ces ces arbres ont été pesés huit à dix mois après 
aYoir été coupés. 


Notes sur 
des bois étram- 
gers; par M. 
Madiot. 


142 Société royale d'Agriculture 
rence ; on en fait des cerceaux exempts de la ver- 
moulure ; ses feuilles sont uu fourrage d’hiver(r). 

3. Acer Pensilvanicum , E. jaspé , bois nuancé 
de roux, avec des bandes olivâtres , léger, pe- 
sant 17 kilogram. 197 gram., peu intéressant 
sous le rapport de l'industrie; mais comme il 
est revêtu d’une écorce jaspée dont l'aspect est 
fort agréable, l'arbre peut être admis dans les 
bosquets d'agrément. L’individu de M. Ras! avait 
à 36 ans , 8 mèt. de haut, 48 centimèt. 7 mill. 
de circonférence. 

4. Anona Triloba, Anone à trois lobes, ou 
Assiminier des Américains. Bois blanc , po- 
reux, filandreux, pesant 10 kilogram. 432 gram., 
peu propre à être travaillé, ayant acquis en 34 
ans 3 mèt. de haut, sur 18 cent. de circonférence, 
fétide au moment de la sève. 

5. Aylanthus glandulosa, vernis du Japon, bois 
devenant dur en vieillissant, jaune pâle, avec 
des bandes longitudinales blanchâtres, pesant 
22 kilogr. 344 gram. -- Propre à un grand 
nombre d’ouvrages pourvu qu’il soit bien sec , 
autrement il se gerce et se contourne. M. Rasten 
avait fait faire des meubles très-jolis ; il en avait 
envoyés à M. le comte François de Neuchäteau. 


(1) Voyez des détails sur cet érable , dans le compte renda 
pour 1817, page 114. 


de Lyon. 143 
L'arbre en 49 ans avait acquis 31 mèt. sur 3 1/2 
de circonférence ; son port était magnifique ,sur- 
tout pendant la floraison ; mais il répandait 
alors une odeur désagréable , peut-être insa- 
lubre. Il vient dans tous les terrains et sous 
toutes les expositions. 

6. Abies Canadensis , Sapin hemlocks, bois d'un 
jaune blanchâtre, d'un tissu grossier , cotonneux, 
entremélé d’un autre tissu longitudinal, plus uni 
et plus fin, ayant acquis, à 42 ans, 8 mètres 
d’élévation , sur 43 centim. de circonférence ; 
l'écorce ayant quelques rapports avec celle du 
cèdre du Liban ; le bois donne un feu clair, 
ardent, mais de peu de durée. 

7. Belula papyracea, Bouleau à papier, bois 
d’un tissu fin et compact, teillasseux, difficile à 
fendre , susceptible d'un beau poli, couleur rou- 
geâtre, mélangé de roux, écorce extérieure blan- 
châtre comme celle du B. alba , les couches in- 
ternes se séparant en couches minces comme du 
papier ; à 46 ans, haut de 16 mèt., sur 1 mèt. 
62 centimèt. de circonférence : pied cube 17 
kilogr. 3/4. On s’en sert dans le nord pour faire 
des meubles , des vases, des nates, des cordes ; 
ses chatons fournissent de la cire, et sa sève 
une liqueur sucrée capable de fermentation. 

8. Broussonetia papyrifera , Müûrier à papier , 
bois compact , d'un tissu fin, susceptible d’un 


144 Socièté royale d'Agriculture 
bean poli, à 18 ans, 11 mèt. de haut , 1 met. 
30 centimèt. de circonférence , croît rapidement 
jusqu'à 20 à 25 ans, et il s'arrête : pied cube 19 
kilogr. 130 gram. Bois pour la marqueterie , 
le charronnage , la sculpture, etc. On tire dans 
certains pays, de l'écorce des jeunes branches de la 
filasse dont on fait des cordages, de la toile, etc.; 
au Japon et à la Chine on en fait du papier. 

9. Buxus Balearica , Buis de Mahon, bois jau- 
nâtre tirant sur le blanc , tissu très-serré ; arbre 
à 46 ans de la hauteur de 3 mèt., de la circonfé- 
rence de 3 centim. 9 mil.; le pied cube 28 kilogr. 
118 gram., croissant plus vite que l'indigène. 

10. Bignonia catalpa , bois léger, d’un tissu 
grossier , nuancé de gris, de roux, de vert, facile 
à travailler , cependant peu utile; arbre à 4x 
ans, 14 mèt. de hauteur, 2 mèt. de circonfé- 
rence ; pied cube 19 kilogr. 344 gram., mauvais 
pour le chauffage, d’un aspect agréable quand 
ilest en fleurs. | 

11. Cercis Canadensis , Gaïînier du Canada, 
bois compact , d’un grain fin , serré, suscep- 
tible d'un beau poli, nuancé de brun, de jaune; 
arbre à 42 ans, 6 mèt. de haut, 1 mèt. de cir- 
conférence ; pied cube 15 kilogr. 224 gram., 
jeunes rameaux en fleurs fournissant un pro- 
duit tinctorial. 

12. Cupressus thuyoïdes, Cyprès à fleurs de 


de Lyon. 145 
tuya , cèdre blanc, aubier blanchâtre, bois par- 
fait, roux , d’un grain serré, facile à travailler; 
arbre à 43 ans, haut de 12 mèt., circonférence 
d'un mèt, 65 centimèt., pied cube 16 kilog 1/2, 
brûlant lentement, avec une odeur agréable, se 
durcissant et se conservant dans l’eau comme le 
chêne , assez flexible, dans ses jeunes branches, 
pour former des cercles de tonneaux , exempts 
de la vermoulure. 

13. Carpinus orientalis, Charme d'orient , in- 
troduit par Tournefort , boiscompact , d’un blanc 
grisaillé, bon à divers usages, même pour le 
chauffage ; arbre à 43 ans , 7 mèt. de haut , 50 
centimèt. de circonférence, bois pesant 25 kilog. 
336 gram., facile à élever et à multiplier. 

14. Cellis occidentalis , Micocoulier de Virgi- 
nie, bois dur, compact, d'un tissu fin, noi- 
râtre; arbre à 39 ans, 7 mètres de haut sur 50 
centimèt. de circonférence, pied cube 22 kilog. 
219 gram., ses branches flexibles, propres à 
faire des cerceaux , excellent pour le chauffage , 
réussissant dans les terrains médiocres. 

15. Casuaria equisetifolia | Casuarine à feuilles 
de prèle, remarquable par ses branches arti- 
culées, serrées les unes contre les autres , pen- 
dantes, bois à l’intérieur couleur lie de vin, 
nuancée de roux et de jaunâtre , arbre à 42 ans» 
5 mèt. de haut, 21 centimèt. de circonférence ; 

10 


146 Société royale d Agriculture 

pied cube 23 kilog. 323 gram. , sujet en séchant 
à se tourmenter , à se gercer, encore rare en 
France. 

16. Corylus columa, Noisetier de Bizance , un 
pied fut planté par l’Ecluse au jardin de Leyde, 
en 1582, où Linné le vit encore en 1736 ; chez 
M. Ras! à 44 ans, 11 mèt. 1/2 de haut, 5o c. 
de circonférence, pied cube 19 kilog. 234 gram., 
digne d’être cultivé à cause de son beau feuillage 
et de la, souplesse de ses branches , plutôt qu à 
cause de son fruit très-sujet à avorter. 

17. Diospyros hirsuta , Plaqueminier velu, 
bois superbe, ne le cédant en rien à celui d'aca- 
jou , agréablement nuancé de diverses couleurs ; 
arbre à 41 ans, 10 mèt. de hauteur sur 50 cen- 
timèt. de circonférence , pesant le pied cube 23 
kilog. 214 gram., très-propre aux plus riches 
ouvrages de l'ébénisterie , l'aspect élégant de 
l'arbre lui mérite une place dans les jardins à 
paysage ; son fruit pulpeux a un goût analogue 
à celui de Ja nefle. 

18. Diospyros Virginiana , Plaqueminier de 
Virginie, bois d’un tissu fin , serré, compact, 
d’un beau jaune , nuancé de roux, susceptible 
d'un beau poli, se durcissant par le temps et 
devenant noirâtre , presqu’anssi bon que le 
précédent pour les ouvrages d’ébénisterie : l’au- 
teur en a fait des barreaux d’échelles, des man- 


de Lyon. 147 
ches d'outils qui, après 20 ans, présentent une 
grande dureté, il a composé avec son fruit d’ex- 
cellentes marmelades ; l'arbre avait acquis à 43 
ans , 15 mètres d’élévation , r mètre de circonfé- 
rence. Le pied cube pèse 19 kilog. 158 gram. 

19. Ævonimus Americana | Fusain d'Amé- 
rique , bois d’un blanc tirant sur le citron 
fin, d’un tissu fin, compact, luisant , vernissé, 
susceptible d’un beau poli, pouvant servir à un 
grand nombre d'ouvrages de tour et de mar- 
queterie ; à 41 ans, 6 mèt. 32 centimèt. de haut 
22 centimèt. de circonférence , pied cube 14 ki- 
logr. 158 gram. 

20. Fagus ferruginea , Hêtre ferrugineux à 
feuilles pourprées , bois ayant peu de souplesse, 
se gerçant aisément, se tourmentant surtout 
au grand air , sujet à la vermoulure , et cepen- 
dant d'un grain serré, compact, susceptible 
d’un beau poli ; arbre à 48 ans ayant 22 mèt. de 
hauteur , 3 de circonférence ; le pied cube 17 
kilogr. 244 gram. , il durcit en vieillissant , eb 
il peut être employé comme bois de chauffage. 

21. Fraxinus Caroliniana, Frêne de Caroline, 
introduit en Europe par Bosc , sa croissance est 
aussi rapide que celle des indigènes , et sa cul- 
ture aussi facile , bois blanchâtre avec marbrures 
rousses , supérieur à celle de nos frênes pour le 
charronnage, l’ébénisterie, etc. ; arbre à 42 ans 


148 Société royale d'Agriculture 

ayant 21 mèt. de haut, 1 mèt. 48 centimèt. de 
circonférence, pied cube 19 kilogram. 149 gr., 
feuillage bon pour les bestiaux , moins sujet aux 
cantharides. 

22, Ficus rubiginosa , Figuier rouillé, bois 
d’un tissu teillasseux , d'un grain grossier, d'un 
jaune pâle, hauteur à 47 ans, à une exposi- 
tion au midi, 3 mèt. pied cube du tronc, 21 kilo. 
240 gram. Le boïs des branches beaucoup plus 
léger ; il prend, en vieillissant, une belle cou- 
leur citronnée. On empêche qu'il ne se tour- 
mente, qu'il ne se gerce, en l’abandonnant 
pendänt quelque temps dans de l'eau stagnante ; 
on pourrait en tirer quelque parti; son fruit 
ne mürit point dans notre climat : c’est un arbre 
plus curieux qu’utile, 

23. Ginkgo biloba, Salisburia adiantifolia , ori- 
ginaire du Japon , encore rare en France, même 
en Europe, bois pourpre veiné ; arbre à 44 ans, 
8 mètres de haut, 1 mèt. de circonférence, pied 
cube 14 kilogr. 164 gram, susceptible du plus 
beau poli. Le pied cultivé chez M. Rast était 
mâle, c’est un des premiers de cette espèce qui 
ait fleuri en Europe. Les journaux en ont fait 
mention. 

24. Gleditsia caspica, Fevier de la mer cas- 
pienne , bois d’un grain fin, serré, de couleur 
jaunâtre, analogue à celle du bois d’oranger , à 


de Lyon. 149 
47 ans l'arbre avait 16 mètres de haut, sur 
1 mètre 48 centimètres de circonférence , pied 
cube 18 kilog. 189 gram. , utile pour la menui 
serie, la marqueterie , les ouvrages du tour. 

25, Gleditsia Chinensis, Fevier de la Chine, 
bois compact , d’un grain fin, de couleur rousse, 
veiné de rouge, pesant le pied cube 19 kilog. 
105 gram. ; l'arbre à 45 ans de 11 mèt. de haut, 
x mèt. de circonférence , susceptible d’un beau 
poli, bon pour le charronnage, la menuiserie, 
Vart du tourneur. Comme il se durcit dans l’eau; 
il pourrait servir à faire des pilotis et des pièces 
de marine; comme il est armé d’épines , il se- 
rait précieux pour former des clotures s'il ne 
craignait pas tant d’être taillé, et si ses graines, 
quand on les arrache, n'exhalaient pas des éma- 
nations incommodes. 

26. Gymnocladus Canadensis , Gymnoclade du 
Canada, bois compact, de couleur rousseâtre , 
veiné de brun , grain peu serré et néanmoins 
pesant le pied cube 19 kilog. 243 gram., à 40 
Ans 12 mèt. de haut sur 3 de circonférence. M. 
Rast en avait fait, 20 ans avant sa mort, un 
joli meuble ; il est veiné de diverses couleurs qui 
acquièrent en vieillissant des nuances agréa!les. 

27. Halesia tetraptere , Halésie à 4 ailes, ori- 
ginaire de la Caroline, remarquable par sa pré- 
cocité et la beauté de ses fleurs ; ayant acquis à 


150 Société royale d’Agricullure 

43 ans 9 mèt. 1/2 de haut sur 50 centirnèt. de 
circonférence , portant des noix dont on pourrait 
extraire de l'huile ; bois d'un grain et d’un tissu 
fin , de couleur rougeâtre, facile à travailler, 
et qui pourrait servir à de petits ouvrages de 
tour , pesant le pied cube 18 kilog. 336 gram. , 
en 42 ans il avait acquis 8 métres. 

28. Hypophaë Canadensis , Hypophae du Ca- 
nada, arbrisseau qui ne s'élève pas dans nos 
pays au-dessus de 2 à 3 mèt., son bois ne peut 
pas être d'une grande utilité, pesant le pied cube 
14 kilog. 24 gram. 

29. Îllicus Floridanus , Badiane de la Floride, 
arbrisseau importé en 1780 par Michaux père, 
dont le feuillage exhale une odeur suave , et dont 
l'huile essentielle pourrait être employée par les 
parfumeurs et les distillateurs ; qui, par l'élé- 
gance de son port, ornerait les jardins à paysage; 
son bois est odorant, d’un grain fin, de couleur 
jaunâtre, facile à polir , pesant le pied cube 21 
kilog. 367 gram.; l'arbuste ne s'élève pas au- 
dessus de 3 à 4 mèt. 

30. Juniperus oxiccdrus, Genevrier Cèdre, 
bois marbré de roux et de jaune pâle, d'un grain 
fin, s’étant en 43 ans élevé à 7 mètres sur 34 
centimèt. de circonférence ; pied cube 14 kilog. 


147 gram. 
31. Juglans squamosa , Noyer écailleux , com- 


de Lyon. 151 
mun en Pensilvanie, bois roux avec des veines 
brunes; en 41 ans l'arbre s'est élevé à 12 mèt. 
48 centimèt. Le pied cube 15 kilog. 242 gram., 
inférieur au nôtre pour la fabrication des meubles 
et autres objets. | 

32. Juglans olivæformis , Noyer pacanier, bois 
d'un grain fin , de couleur rembrunie, suscp- 
tible d’an beau poli, supérieur peut-être à l'in- 
digène pour la fabrication des beaux meubles, 
et s’élevant plus haut ; il s'est élevé en 23 ans à 
22 mèt. sur 1 mèt. de circonférence; le pied 
cube 17 kilogr. 190 gram. : il surpassait de beau- 
coup les indigènes de même âge placés à côté 
de lui. 

33. Koëlreuteria paullinioïdes | Koëlteurie à 
feuilles de paullinier , remarquable par Pélé- 
gance de son port ; bois d’un tissu fin, serré, 
compact, de couleur blanchätre avec des mar- 
brures tant rousses que noirâtres, susceptible 
d'un beau poli, mais se gerçant, se délitant, 
facile à travailler , durcissant par le temps , bon 
pour de petits ouvrages de tabletterie; pesant le 
pied cube 22 kilogr. 264 gram. L'arbre s'étant 
élevé en 24 ans à 8 mèt. sur presqu'un de cir- 
conférence , portant une amande dont on pour- 
rait peut-être extraire de l’huile. 

34. Laurus sassafras , Laurier sassafras, ori- 
ginaire de la Floride, d'un aspect agréable , d'un 


292 Société royale d'Agriculture 

bois spongieux , poreux, teillasseux , dont le 
tissu est grossier , la couleur rousse, tirant sur 
le rouge , l'odeur aromatique , ne se distinguant 
point de celui que le commerce nous apporte 
pour l’usage de la médecine, ayant sans doute 
la même propriété, ayant fourni à M. Goindoin , 
jardinier en chef à Trianon une excellente li- 
quéur stomachique ; pesant le pied cube 5 kilo. 
37 gram. L'arbre avait à 46 ans 8 mèt, de haut 
sur 35 centimèt. de circonférence. 

35. Lyriodendrum lulipifera , Vulipier de Vir- 
ginie, son bois est d'un tissu fin , jaune pâle, 
avec des taches d’un vert rembruni, facile à 
travailler , se gerçant difficilement, prenant un 
superbe poli, d’une odeur agréable ; il sert en 
Amérique à faire des meubles fort jolis, son 
écorce peut servir à aromatiser les liqueurs de 
table ; son bois pèse le pied cube 14 kilog. 157 
gram. L'arbre avait à 41 ans 10 mèt. de hauteur 
sur 32 centimèt. de circonférence. 

36. Liquidambar  styraciflua | Liquidambar 
d'Amérique, originaire de Virginie , de Pensil- 
vanie, bois d’un tissu blanchâtre avec des veines 
purpurines , il ne prend pas un beau poli, il 
n'est pas d'un bon usage même pour le chauffage, 
il exhale, soit qu'il soit vert ou sec, une forte 
odeur aromatique. Il s’était élevé en 42 ans à 6 
mèt. et sa circonférence était de 38 centimèt. 
Le bois pèse 32 kilog. 123 gram. le pied cube. 


-de Lyon. “153 

37.. Laryx cedrus, Cèdre du Liban , bois d'un 
grain fin , veiné longitudinalement , marbré d'un 
blanc roux , conservant après avoir été coupé » 
une odeur agréable; l'arbre en 44 ans ayant 
acquis 20 mèt. de hauteur sur 1 mèt, de cir- 
conférence. Le pied cube pèse 17 kilog. 134 gr. 

38. Mespilus Coralina , Kpine, petit corail , 
originaire du Japon, bois compact , d’un grain 
fin, susceptible d’un beau poli, pouvant servir 
aux graveurs, aux tourneurs , aux ébénistes , 
ayant acquis en 44 ans 6 mèt. de hauteur sur 15 
centimèt. de circonférence, pesant le pied cube 
19 kilogr. 282 gram. 

39. Prunus Lusitanica , Cerisier Azarero , ori- 
ginaife du Portugal, bois compact, d’un grain 
fin, marbré, d’un superbe poli, pouvant être 
employé dans plusieurs arts, pesant 19 kilogr. 
149 gram. le pied cube, s'étant élevé en 42 
ans à 5 mèt. sur 65 centimèt. de circonférence, 
son fruit estun poison pour les paons et autres. 
oiseaux de basse-cour. » 

40. Prunus Virginiana , Cerisier de Virginie, 
bois d'un jaune orangé , veiné de nuances plus 
claires, tissu fin et serré , susceptible d’un beau 
poli, pouvant servir à l'ébénisterie , au placage, 
à la fabrication de fort jolis meubles , pesant le 
pied cube 15 kilogram. 196 gram, l'arbre ayant 
acquis en 32 ans 6 mèt. de hauteur sur 48 met. 
de circonférence. 


154 Sociélé royale d’Agricullure 

41. Phyllirea latifol'a , Filaria à feuilles larges, 
bois dur, compact , d'un tissu serré , pouvant 
être employé à faire des roues, des vis, des 
ouvrages de marqueterie , très-sujet à se gercer , 
si on n'a pas soin de le tenir à l'ombre quelques 
mois après son exploitation. Le pied cube pèse 
16 kilogr. 348 gram. 

42. Pinus rigida, Pin hérissé , originaire de 
Virginie, bois peu fin et peu serré, de couleur 
rousseâtre , avec des couches longitudinales blan- 
châtres, ne pesant le pied cube que 10 kilogr. 
247 gram. L'arbre ayant acquis en 24 ans 14 
mèt. de hauteur sur 73 centimèt. de circonfé- 
rence, réussissant sur les terrains arides et sa- 
bionneux ; on le cultive à la pépinière du Rhône, 
On en fait en Amérique des solives, des planches, 
des canaux , etc. [1 acquiert dans l'eau de la 
dureté. 

43. Populus Græca, Peuplier d'Athènes, com- 
mun aux îles de l’Archipel , bois roux entremêlé 
de jaune ,: avec des bandes blanchâtres, d'un 
tissu serré, susceptible d’un beau poli, supé- 
rieur au bois des autres peupliers pour la me- 
nuiserie , l’ébénisterie , la marqueterie, pesant 
le pied cube 13 kilogr. 187 gram. L'arbre s'étant 
élevé en 43 ans jusqu'à 3 mèt. de hauteur sur 
2 1/2 de circonférence. 

44. Platanus ôccidentalis | Platane d'occident , 


de. Lyon. 155 
bois dar et compact, d'un tissu fin, de couleur 
marbrée, ayant des rapports avec celui du hêtre, 
souffrant un beau poli ; il pourrait servir à for- 
mer des tonneaux, des cuves, des foudres , etc. 
On peut s’en servir un an après l'avoir coupé : 
comme le platane d’orient, il acquiert dans l’eau 
de la flexibilité. 

45. Populus suber , Peuplier liége. On l'a ren- 
,contré en 1806 dans les îles du Rhône: bois 
blanc, nuancé de diverses couleurs, peu facile 
à travailler, mauvais pour le chauffage, il ne 
pourrait servir qu'à faire des caisses , des tables, 
d'autres petits ouvrages; ses feuilles donnent 
beaucoup d'ombrage et sont précieuses pour la 
nourriture des moutons. Le bois pèse le pied 
cube 14 kilogr. 104 gram. ; l'arbre eu 18 ans s'est 
élevé à 12 mèt. sur 50 centimèt. de circonférence* 

46. Populus monilifera | Peuplier du Canada, 
bois blanc jaunâtre, teillasseux, pesant le pied 
cube 13 kilogr. 290 gram. L'arbre s'étant élevé 
en 33 ans à 15 mèt. sur 1 mèt. 50 centimèt. de 
circonférence , précieux parce qu’il croît rapide- 
ment, et qu’il prospère , ainsi que le précédent 
dans les terrains humides et tourbeux. 

47. Quercus banisteri , Chêne de banister » 
originaire de New-yorck , bois dur, compact ? 
d’un roux foncé, nuancé de gris de fer , peu 
propre à être travaiilé, pesant le pied cube 14 


156 Société royale d'Agriculture 

kilogr. 314 gram. L'arbre n'ayant acquis en 33 
ans que 4 mèt. de haut sur 37 centimèt de cir- 
conférence , réussissant dans les terrains hu- 
mides , et pouvant former des haies épaisses. 

48. Quercus suber , Chêne liége, bois jaune 
jaspé de roux , croissant beaucoup plus en cir- 
conférence qu’en hauteur, précieux pour son 
épiderme dont on fait des bouchons ; on peut 
l'en dépouiller sans que l'arbre en souffre , le 
pied cube pèse 16 kilogr. 188 gram. L’arbre 
avait acquis à 45 ans, 6 mèt. de hauteur sur 2 
mèt. 58 centimèt. de circonférence. Sa culture 
se réduit de jour en jour, etilest à craindre 
qu'il ne disparaisse de nos climats. 

49. Robinia Sophoræfolia , Robinia à feuilles 
de sophora , espèce nouvelle que M. Ras! tenait 
de M. Madiot , lequel l'avait obtenue de graine en 
1804 à la pépinière départementale, son nom 
Jui a été donné par M. de Candolle. Le bois en 
est dur , d’un grain uni, serré, susceptible d'un 
beau poli, coloré en jaune clair, avec des jas- 
pures brunes et vert olive : on pourrait en faire 
de jolis meubles. Le pied cube pèse 20 kilogr. 
244 gram.; l'arbre à 20 ans n'avait acquis que 
8 mèt. d'élévation sur 40 centimèt. de circonfé- 
rence. Îl n’a pas encore fleuri en France. 

50. Rhus lyphinus , Sumac de Virginie, bois 
d'un tissu satiné, d'un jaune citron , avec des 


de Lyon. 157 
lisières brunes, quoique peu dur, facile à tra- 
vailler , prenant un superbe poli , se durcissant 
par le temps, précieux pour les ouvrages d’ébé- 
nisterie, pesant le pied cube 14 kilog. 28. gram. ; 
l'arbre ayant acquis en 24 ans 6 mèt. de hauteur 
sur 1 mèt. de circonférence. Il ne vit pas long- 
temps, se reproduit de lui-même pas drageons ; 
il fournit une résine analogueau copal ; on peut 
tirer de ses feuilles un produit tinctorial , et de 
ses baies du vinaigre. 

51. Rhus copallinum , bois d’un jaune citron 
foncé, avec des jaspures de couleurs variées, 
prenant un très-beau poli et pouvant servir à 
la fabrication de meubles élégans , pesant le pied 
cube 16 kilog. 134 gram. L'arbre en 34 ans avait 
en hauteur 5 mèt. sur 32 centimèt. de circonfé- 
rence. Il fleurit rarement dans nos climats. 

52. Spartinus albinus, Spartie à fleurs blanches, 
originaire de Barbarie , bois d’un tissu fin perlé, 
nuancé de blanc, de pourpre, de roux , d'orange, 
pesant le pied cube 17 kilogr. 189 gram. L'arbre 
ayant acquis à 39 ans, 3 mèt. de hauteur sur 9 
centimèt. de circonférence. Il offre pendant sa 
floraison qui dure plusieurs mois, un aspect 
fort agréable : les boutons macérés dans le vi- 
naigre peuvent suppléer les capres. 

53. Sambucus Canadensis, Sureau du Canada, 
son bois , en vieillisant , devient très-compact, 


158 Société royale d Agricullure 

il est jaune pâle avec des nuances variées ; il pèse 
13 kilogr. 104 gram. L’arbrisseau a acquis en 16 
ans 13 kilogr. 104 gram. 

54. Sophora Japonica , Sophora du Japon, 
son bois, en vieillissant devient, à l'intérieur, 
d’un jaune rembruni , son tissu est uni, serré, 
compact , susceptible d’un beau poli, il est propre 
au charronnage, à la sculpturé, à la marque- 
terie , à la fabrication des vis de pressoir , etc. IL 
pèse le pied cube 18 kilogr. 247 gram. L'arbre 
avait acquis à 50 ans 16 mèt. de hauteur sur:32 
centimèt. de circonférence. Ses racines sucrées 
pourraient être de quelqu’utilité en médecine. 

55. Tilia alba , Villeul argenté, spontané en 
Hongrie, introduit en Angleterre en 1767, et 
envoyé au jardin du roi il y a 30 ans; bois 
blanchâtre, se fendant difficilement et se refer- 
mant après avoir reçu une entaille, excellent 
pour les ouvrages de sculpture, la fabrication des 
balles d'imprimerie , des tables sur lesquelles on 
coupe le cuir, etc. mauvais bois de chauffage » 
ne pesant le pied cube que 12 kilogr. 230 gram. 
L'arbre s'était élevé en 24 ans à 15 mèt. de hau- 
teur sur 1 mèt. de circonférence. Son mérite 
consiste dans l'élégance de son port et l’épaisseur 
de son feuillage. 

56. Ulmus  Americana ; Orme d'Amérique , 
bois veiné de jaune et de blanchâtre , d’un grain 


de Lyon. 159 
ai peu grossier , souffrant un beau poli, se dé- 
jetant quand on l'emploie trop tôt; tout aussi 
ban au reste que l’indigène pour le charronnage , 
le chauffage , comme lui donnant d’excellens 
charbons, pesant le pied cube 22 kilogr. 188 gr., 
ayant acquis en. 44 ans 20, mèt. de hauteur sur 
3 de circonférence. Ses feuilles , que les insectes 
n'attaquent jamais , constituent un excellent 
fourrage. 

57. Viburnus punicifolius , Viourne à feuilles 
de grenadier , originaire de l'Amérique septen- 
trionale , bois d’un grain sec, serré, d'un tissu 
compact, blanchâtre, pesant le pied cube 16 
kilogr. 300 gram., n'étant, à l’âge de 40 ans, 
parvenu qu'à 4 mèt. de hauteur sur 21 centi- 
mètres de circonférence. 

58. Virgilia lulea , Nirgilia à fleurs jaunes. 
Le genre a été détaché du Sophora L. par La- 
marck ; l’espèce en fut introduite par M. Madiot 
à Lyon en 1806, c’est lui qui le procura à M. 
Fast. Le bois a le grain fin, de couleur safra- 
née , avec des nuances rousseâtres à l'intérieur ; 
il pourrait être employé utilement à divers ou- 
vrages de luxe ; le pied cube pèse 22 kilogr. 377 
gram, Il ne vit pas long-temps, peut se greffer 
sur le Sophora du Japon : les terrains humides 
sont ceux qui lui conviennent le mieux. 

59. Zanthoxylum Fraxineum , Zanthoxilum à 


Sur trois es- 
Pèces ou va- 
riétés d’alizier; 
par le méme. 


169 Société royale d’ Agriculture 
feuille de frêne ou clavalier , originaire de lAmé- 
rique septentrionale ; bois d’un tissu fin , teillas- 


seux, jaspé de jaune et de blanchâtre , facile à 


travailler et pouvant servir à divers ouvrages ; 
pesant le pied cube 19 kilogr. 388 gram. L'arbre 
en 44 ans s'étant élevé à 6 mèt. sur 34 centimèt. 
de circonférence, 

6o. Ziziphus Sinensis, J ujubier de la Chine, 
d’un bois dur, compact, susceptible d’un beau 
poli , pesant le pied cube 24 kilogr. 114 gram. : 
l'arbre ayant acquis en 47 ans 4 mèt. 1/2 de 
hauteur sur 5 centimèt. de circonférence. Sa 
forme est peu agréable, son fruit pourrait peut- 
être suppléer celui du Jujubier ordinaire ; quant 
à son bois, il n’a été employé jusqu'ici àaucun 
usage. 


Indépendamment de tous ces faits, également 
intéressans sous le rapport de l'agronomie et 
sous celui de l'histoire naturelle, notre confrère 
a recueilli à la pépinière départementale des ob- 
servations sur plusieurs espèces ou variétés 
d'alizier, dont l'un à feuilles de clethra , un 
autre à feuilles de sorbier, et un troisième nom- 
mé alizier nain. , 

Le premier est une variété que l’auteur obtint 
de la graine de l’alizier à feuiiles d'arbouzier ; 11 
vient de le voir fleurir et fructiñer pour la pre- 


g de Lyon, 61 
mière fois. Il ne l'a trouvée décrite nulle part: 
elle se distingue par les caractères suivans : 

Taille d'un mètre et demi, port buissonnier , 
tiges blanchâtres, panachées de rouge sanguin, 
branches et rameaux s'étendant confusément, 
boutons sanguins recouverts de petites écailles 
de même couleur et de forme ovale , légèrement 
aplaties , bourgeons à feuilles et à bois, pointus 
en fer de lance ; fleurs petites, en panicule , de 
cinq à six pétales inégaux , couleur de chair , 
odeur balsamique , calice persistant , cinq à six 
styles ; feuilles ovales , lancéolées , dentelées , 
d'un vert glabre en dessus , cotonneuses en des- 
sous, nervures saillantes , pédoncules courts , 
en gouttière, grands rapports avec la feuille du 
clethra; fruits noirs , luisans , odorans , ras- 
semblés en corymbes au sommet des rameaux 
de deux à trois ans ; pédoncules courts, rous- 
seâtres , se terminant dans un enfoncement 
profond ; ombilic foliacé, forme sphérique, . 
trois à sept pepins cartilagineux. Ce joli petit 
arbrisseau se propage aisément de grefle sur 
l'aubépin et le cognassier , il vit peu de temps 
sur le poirier ; il vient difficilement de semence 
et de marcotte; son bois est compact, lourd, 
d'un grain fin, d’une odeur agréable quand il 
est fraîchement coupé, il prend, en vieillissant , 


une belle teinte jaune pâle , il est susceptible 
d'un beau poli. 11 


162 Socièlé royale d'Agriculture 

L'autre espèce d’alizier , celui que l'auteur 
appelle à feuilles de sorbier, fut trouvée dans 
les forêts du Vesterdal , en Suède, par un na- 
turaliste de ses amis qui lui en remit quelques 
graines en 1810 ; au bout de treize ans , il l'a 
vue fleurir et fructifier. Comme il la croit nou- 
velle il en signale ainsi les caractères : 

Racine d’un rouxtrès-foncé à l'extérieur, inté- 
rieurement d’un jaune clair , donnant à l'eau une 
teinte verte, comme on l’a remarqué à la suite 
de quelques jours de macération dans ce liquide ; 
tiges purpurines, ponctuées, se ramifiant au 
point de former, quand l'arbuste est isolé, une 
touffe très-agréable ; bois compact , lourd , d'un 
grain fin, se colorant en rouge quelque temps 
après avoir été coupé , et conservant alors une 
odeur analogue à celle du cerisier ; branches 
nombreuses, effilées et ramassées ; rameaux d'un 
rouge sanguin avec des taches cendrées d'inégales 
grandeurs; bourgeons à fleurs, petits, allongés, 
recouverts d’écailles purpurines ; feuilles pinnées 
avec impaire ; folioles lancéolées, dentelées sur 
les bords, pétioles creusés en gouttière ; fleurs 
en corymbe , de couleur de chair, d'une odeur 
analogue à celle des fleurs d'amandier ; trois à 
cinq styles, moins longs que les étamines ; fruits 
pruniformes , se colorant à l’époque de la matu- 
rité en beau noir luisant , offrant dans un pa- 


de Lyon. 163 
renchyme rouge deux à trois petits pepins carti- 
lagineux, allongés, pourpres. 

Les oiseaux recherchent moins ce fruit que 
celui des autres espèces d’alizier ; ila une saveur 
acidule, légèrement vineuse, et peut se conser- 
ver pendant quatre à cinq mois. L'auteur en a 
fait une boisson rafraîchissante assez agréable. 

Cet arbuste se multiplie de semences, il se 
greffe sur le poirier et le cognassier , surtout sur 
Paubépin , et alors il est plus robuste et plus 
vivace. 

L'alizier nain, Crathægus chamæ mespilus , qui 
a été aussi l'objet des observations de notre con- 
frère, habite les montagnes alpines, et il s’est 
facilement naturalisé à la pépinière du Rhône 
où il se présente sous un bel aspect, surtout au 
printemps. 

Il s’élève à peine au-dessus de deux pieds, ses 
tiges, de couleur cendrée, sont parsemées de 
taches purpurines ; rameaux agréablement dis- 
posés en étages; boutons allongés , pointus , 
saillans, recouverts d'écailles cendrées à la base, 
vertes et purpurines à la pointe ; feuilles ovales, 
dentées , cotonneuses en dessous , et en dessus 
d'un vert clair luisant, pétioles courts, d’un 
vert jaunâtre, et creusés en gouttière ; fleurs en 
corymbe , pétales larges, de couleur rose , d'une 
odeur agréable, étamines jaunâtres et rougeâtres, 


Sur deux va- 


riétés 
Pin ; 
méme. 


d’aubé- 
par le 


164 Societe royale d'Agriculture 

deux styles blancs ; inflorescence au commence- 
ment du printemps ; fruits olivaires, acides, 
portés perpendiculairement sur des pétioles 
droits, tandis que dans les autres espèces d’alizier 
les fruits sont réfléchis et pendans. 

Ce joli petit arbrisseau mérite une place dans 
les jardins d'agrément , et plaît dès le commen- 
cement du printemps par l'élégance de ses fleurs 
et de son feuillage ; il flatte les yeux dans l’au- 
tomne par la disposition de ses fruits, les oiseaux 
en sont friands et on pourrait en faire un petit 
vin agréable, 

L’alizier nain se multiplie sur l’aubépia et le 
cognassier ; il vient difficilement de graine ; car 
c'est en vain que jusqu’ici Pauteur a cherché à 
lobtenir franc de pied. 


Deux variétés d'aubépin ont été observées par 
notre laborieux confrère, l’un est à feuilles de 
tanaisie , l’autre à feuilles en spatule. 

Les caractères du premier sont les suivans : 
tige droite , unie, cotonneuse , blanchâtre , sans 
épines, bourgeons gros, gonflés, recouverts d'un 
duvet blanchâtre, boutons à fleurs mamelonnées, 
accompagnées de petites écailles purpurines, 
fleurs en corymbes , portées sur des pédoncules 
allongés, pétales blancs, légèrement nuancés en 
rose, odeur agréable, feuilles larges, bipinnées , 
roncinées à la pointe , stipulées , hérissées de 


de Lyon. 165 
poils ; portés sur des pétioles courts, rudes au 
toucher, creusés en gouttière , fruit quelquefois 
du volume d'une petite pomme, dont il a la 
forme, ayant un large ombilic , la pellicule lisse , 
jaune citron. Il prend , en mürissant , l'odeur de 
la pomme de rainette. La chair en est pâteuse , 
d’un jaune pâle , l’eau peu abondante , aigre- 
lette, légèrement sucrée. L’auteur a fait avec ce 
fruit des marmelades et des confitures qui avaient 
des rapports avec celles d’épine-vinette ; les pepins 
sont oblongs , anguleux , comprimés , osseux. 

L'aubépin à feuilles de tanaisie se cultive 
comme les autres espèces d’azerolier , seulement 
il réclame plus particulièrement l'exposition du 
levant et du midi; on peut le greffer sur l'aubé- 
pin ordinaire , sur le cognassier et même sur le 
poirier ; on l’obtient difficilement de graine. 

L'autre espèce d’aubépin observée par M. 
Madiot est le Mespilus spatulata ( Bosc), arbuste 
exotique qui, comme urie foule d'autres , s’est 
acclimaté à la pépinière du Rhône. Comme il se 
ramifie beaucoup , il y forme des buissons très- 
touflus. Ses tiges sont de couleur cendrée, mar- 
quetées de points rousseâtres, ses rameaux effilés, 
armés de longues épines flexibles , les boutcns 
peu saillans, mamelonnés , d'un rouge sanguin, 
revêtus d'écailles imperceptibles ; les fleurs pe- 
tites , en panicule , couleur de chair, d’une 


Sur une vya- 
riéte de pom- 
mier et sur une 
variété de poi- 
rier; par le 
méme. 


166 Sociélé royale d'Agriculture 

odeur suave ; les feuilles variant par leur 
forme, sont les unes en spatule, d'autres lan- 
céolées , quelques-unes arrondies , elles sont 
lisses, portées sur de courts pétioles et persistent 
long-temps. Les fruits sont pyriformes , isolés, 
groupés en nombre impair, chacun d’eux ren- 
fermant deux à trois semences osseuses. La chair 
en est jaunâtre et d’un goût analogue à celui de 
Vaubépin ordinaire, l'ombilic est d’une gran- 
deur remarquable. Le bois de cet azerolier est 
jaunâtre , d'un grain fin, susceptible d'un beau 
poli ; mais comme il est très-dur, on le travaille 
difficilement. 


Nous devons encore à M. Madiot la notice 
d'une variété de pommier qu'il appelle à bois 
couleur d'olive , et d’une variété de poirier qu'il 
nomme à bois et à fruits maculés dejaune. 

Il découvrit la première en 1819 à St-Cyr au 
Mont-d’Or. Elle lui parut fort remarquable par 
la couleur de l'écorce: des jeunes rameaux qui, 
au moment de la sève, semblent avoir reçu un 
vernis luisant, couleur d'olive : les autres carac- 
tères de cette variété sont un tronc droit, des 
bourgeons allongés, cotonneux , des boutons 
d'un vert clair à la pointe, recouverts de petites 
écailles imbriquées, des fleurs réunies en co- 
yymbe, au nombre de dix à quinze, dont les 


de Lyon. 167 
pétales sont arrondis supérieurement , à large 
onglet, et colorés en rouge de chair. Les feuilles 
sont stipulées , ovales |, acuminées, à nervures 
nombreuses et saillantes , denticulées , luisantes 
à la face supérieure, portées sur de courts pé- 
tioles creusés en gouttière. Le fruit est gros, 
aplati, présentant sur une de ses faces un œil 
très-large; sur l’autre une cavité profonde , pour 
l'implantation du pédoncule ; la peau en est 
unie, couleur de chair, excepté sur la surface 
qui était exposée au nord; la chair en est 
ferme, fine, d'un beau blanc avec quelques 
teintes rougeâtres sous la peau, l’eau abondante, 
analogue à celle de la rainette. C’est une des 
pommes qui se conservent le plus long-temps. 

Comment se fait-il qu'une variété de pommier 
si précieuse ne soit cultivée que dans le Mont- 
d'Or lyonnais ? Toutes les expositions lui con- 
viennent , seulement il exige un sol profond. 
On le greffe sur franc, pour l'obtenir à grand 
vent, et dès-lors sa fécondité est prodigieuse. 

Pour ce qui concerne la variété de poirier St- 
Germain à bois et à fruits maculés de jaune ,en 
voici les caractères principaux : Racines pivo- 
tantes, quand il est greffé sur franc dans un bon 
terrain , traçantes quand on l’a enté sur le 
cognassier , tiges prenant une belle direction, 
se terminant par une tête en pyramide, bois 


168 Société royale d'Agriculture 

jaspé de plusieurs nuances de jaune; boutons 
petits , recouverts d’écailles grisaillées , pana- 
chure singulière, qu’on maintient par la grefe, 
en inoculant les boutons les plus maculés; feuilles 
stipulées , portées sur de longs pétioles réfléchis 
en gouttière , fleurs couleur de chair, irrégu- 
lièrement allongées , jaspées de plusieurs nuan- 
ces comme le bois, et devenant presque couleur 
citron au moment de la maturité; la chair en 
est fondante et l'eau très-sucrée , les pepins sont 
tantôt isolés , tantôt depuis quatre jusqu’à huit ; 
les carrières sont abondantes. 

Ce fruit mûrit en novembre et peut se conser- 
ver jusqu'en mai , et à cette époque il a le goût 
et l'odeur du bon chrétien d’été ou gracioli 
d'Italie. Il réussit sur franc, mais alors il ne 
donne abondamment du fruit qu'au bout de 
huit à dix ans, tandis que greffé sur cognas- 
sier , il en porte beaucoup et de bonne qualité, 
deux ou trois ans après l'opération. 


Sur une va  L’arbuste qui suit est, selon M. Wadio!, 
riété de Spiréa sorti des graines du spiréa à feuilles d'obier qui 
Are sn furent semées à la pépinière de naturalisation du 
paniculées ; Rhône; c'est, dit-il, une variété qui n’avait 

por le même. bas été décrite jusqu’ici. Voici les principaux ca- 

ractères que l’auteur lui a reconnus : 
: Racines stolonifères, fournissant beaucoup de 


de Lyon. 169 
drageons; tiges nombreuses formant des buis- 
sous touffus, très-moelleuses, ne durant chacune 
que quatre à six ans ; boutons duvetés , aigrettes 
grisâtres, recouvertes à la base de petites écailles 
rousseâtres ; bourgeons à fleurs, saillans et rap- 
prochés les uns des autres ; fleurons paniculés , 
pétales de couleur de chair vive, étamines jau- 
nâtres et blanches , extrêmement nombreuses ; 
feuilles ternées , folioles lancéolées , inégalement 
dentées , velues en dessous , glabres et d’un vert 
d'olive supérieurement , pétioles courts, creusés 
en gouttière , cinq à sept capsules, renfermant 
chacune de trois à sept petites semences légère- 
ment osseuses , blanchâtres et brillantes. 

Cette espèce s'élève à la hauteur de deux à 
trois mètres, on la multiplie de graines, dra- 
geons , marcottes et boutures; elle réussit moins 
bien de cette dernière manière; toutes sortes de 
terrains et d'expositions lui conviennent, difié- 
rant en cela de la plupart des autres espèces de 
spiréa. | 

Celui-ci est propre à orner les jardins , les 
parterres et les bosquets ; mais il faut le renou- 
veler tous les sept à huit ans, parce que ses 
racines stolonifères se dévient, s'écartent de 
la tige principale qui. meurt; il s'en forme de 
nouvelles un peu plus loin , de sorte que l'ar- 
buste voyage en quelque sorte. 


Sur l’érable 
à trois lobes ; 
par lo même. 


Y70 Société royale d'Agricullure 

Notre confrère trouva dans un semis d'érables 
de Tartarie une variété de ce genre qui lui parut 
remarquable principalement par son feuillage 
élégant , touffu, d’une belle verdure claire, sur- 
tout au soleil; les feuilles sont à trois lobes 
allongés , dentelés sur les bords, à nervures 
très-saillantes , à pédoncules courts et d’un rouge 
sanguin. Cette variété a fleuri pour la première 
fois en avril 1823, et l’auteur remarqua que ses 
fleurs, au lieu d'être en corymbe comme dans 
l'érable de Tartarie, étaient en grappes, et les 
fleurs plus petites qu'elles ne le sont dans les 
espèces de ce genre. 

Le bois d'érable à trois lobes a paru à M. 
Madiot plus dur, plus compact que celui des 
autres érables , et par conséquent plus propre à 
l'ébénisterie , et aux ouvrages de tour et de mar- 
queterie , d'autant mieux qu'il se travaille très- 
aisément, et que son tissu est d’un grain fin, 
nuancé de diverses couleurs. L'auteur, sans 
sacrifier l'arbre , a pu en étudier le bois, ayant 
eu occasion d'enlever une grosse branche qui 
empéchait l'arbre de monter. 

Cet érable croît fort lentement, il n’a acquis 
en effet, depuis seize ans qu'on le cultive , que 
huit pieds de haut sur quatre pouces de circon- 
férence. La compacité de son bois tient à la 
lenteur de sa croissance. 


de Lyon. 171 

Ce n’est pas à la pépinière dont la direction 
lui est confiée, mais à la terre de la Tourrette, 
chez M. de St-Trivier , que M. Madiot a observé 
l’agavé d'Amérique. Il y a fleuri pour la première 
fois en septembre 1823. 1] pense même qu’avant 
cette époque les fleurs de cette espèce ne s'étaient 
pas épanouies sous notre ciel, car il regarde 
comme appartenant à une espèce différente l'agavé 
à feuilles panachées qu’on a vu fleurir en 1816. 

L'agavé de M. de St-Trivier avait crû dans 
l’espace de 20 jours de douze pieds , et ce pro- 
digieux effort ne l'avait pas empêché de pousser 
quatre tiges latérales qui, à la vérité, s'étaient 
élevées beaucoup moins haut. 

La floraison de cet agavé se composait de douze 
superbes corymbes portant chacun de vingt à 
cinquante fleurs , de sorte que le nombre total 
de celles-ci était de plus de trois cents; leur 
couleur était d’un jaune verdâtre, et leur odeur 
fort peu agréable. Après avoir duré deux mois 
ces fleurs tombèrent , et la plante mourut. 

Elle vivait encore lorsque M. Madiot , qui se 
trouvait au château de la Tourrette, détacha de 
sa tige un corymbe composé de trente - quatre 
fleurons , pour l'étudier à son aise à la pépinière; 
il le mit dans un vase avec de l’eau, La fécon- 
dation s’opéra dans ces fleurs tout aussi bien 
que si elles n’eussent pas été détachées de la tige. 


Sur l’agavé 
d'Amérique ; 


par le méme. 


Sur des in- 
sectesnuisibles 
à l’agriculture; 
et sur les mo- 
yens de s’en 
délivrer en leur 
opposant d’au- 
tres animaux ; 
par le méme. 


172. Socièlé royale d'Agriculture 
Les grains qui se formèrent en grand nombre 
avaient les apparences d’une parfaite maturité. 

Originaire du nouveau monde d'où il fut ap- 
porté vers le XVLe siècle, l'agavé s’est naturalisé 
en Espagne où il sert à former des haies impé- 
nétrables à cause des aïguillons forts et nom- 
breux dont sa tige est armée. 

Si, dans le midi de la France, on acclimatait 
cette plante grasse , on la ferait servir, non- 
seulement à construire des haies, mais encore 
à former des cables, des cordages pour la marine ; 
il suffirait en effet d'en faire rouir les feuilles 
pour obtenir une filasse d'une grande ténacité, 
qui, selon M. Madiot, se fortifie dans l’eau, 
aussi recommande-t-il la naturalisation dans le 
midi de la France de l'agavé américain. 


Occupé depuis un si grand nombre d'années 
de la culture des arbres, M. Madiot a dû étudier 
les insectes ennemis de ces grands végétaux. 

Les plus redoutables de ces parasites funestes 
lui ont paru être les courtillières , les larves des 
hannetons , les lisettes ou coupe-bourgeons, les 
perce-oreilles , les sauterelles à molaires en forme 
de ciseaux, un très-grand nombre de chenilles, 
plusieurs espèces de punaises, des tigres, des 
fourmis , des pucerons, etc. 

Pour défendre contre les ravages de ces insectes 


de Lyon. 173 
les pépinières , surtout les jeunes semis , il vou- 
drait qu'on en confiât la garde à deux animaux, 
le hérisson à groin de cochon et le lézard vert. 

Le premier de ces animaux fut l'objet d’une 
observation du même auteur, laquelle fut in- 
sérée dans le compte rendu de la société pour 
1821, Cette notice étant, dit-il, parvenue aux 
Etats-Unis d'Amérique, il reçut de ce pays la 
demande d’une expédition de hérissons ; on se 
proposait de les y naturaliser avec soin, pour 
les opposer aux insectes, aux petits reptiles qui 
pullulent dans ces contrées. 

Le lézard vert, Laserta viridis, est, comme 
le hérisson, grand ennemi desinsectes, et il a sur 
lui le grand avantage de pouvoir les poursuivre 
sur les murs et jusqu'au sommet des arbres ; ce 
n'est pas seulement pour s'en repaître qu’il leur 
fait la guerre. L'auteur a vu des lézards aban- 
donner les cadavres des insectes qu'ils avaient 
tués pour chercher de nouvelles victimes. Il les 
a vus se cacher, se blottir , se mettre à l'affût, 
et attendre avec une imperturbable patience que 
le hasard aménât auprès d’eux quelques insectes, 
ayant soin de s'établir dans les lieux qu'ils fré- 
quentent. 

Il croit que chaque lézard s'arroge un droit 
de chasse dans un arrondissement, et qu'il le 
défend contre tout animal de son espèce qui 


Notice sur 
une nouvelle 
variété de cy- 
près chauve ; 
par M. de Fre- 
minyille. 


174 Societe royale d'Agriculture 


voudrait lenvahir. Cest au point, dit-il, que 


si deux lézards se rencontrent sur ie même ter- 
rain , ils se livrent des combats furieux, et le 
champion vaincu se retire et attend pour re- 
commencer le combat que ses blessures soient 
guéries. 

Telles sont les observations d'histoire natu- 
relle recueillies par M. Madiot. 


Vous devez à M. de Fréminville celle d'un 
cyprès non décrit, qui végète depuis environ dix- 
huit ans à Laumusse, ( départ. de Saône et 
Loire), où, cette année, pour la première 
fois , il a montré des chatons et des cones. 

Il ressemble par le port, la disposition des 
branches et l'écorce à celui que l’on nomme vul- 
gairement cyprès mâle ( Cupressus elata ). Au 
commencement de la pousse, les feuilles de l’un 
et celles de l’autre sont groupées et disposées de 
la même manière ; mais cette ressemblance 
n'existe plus lorsque le développement est complet. 

Le cyprès chauve est dioïque : le mâle porte 
des chatons de couleur brune, qui pendent au 
mois de mai des extrémités de toutes les branches. 
Il paraît un peu plus vigoureux, ses feuilles 
sont un peu plus allongées , et d'un vert plus 


_ foncé que dans la femelle. 


Celle-ci présente à la même époque de très- 


de Lyon. 175 
petits cones ronds , en aussi grand nombre et 
placés de la même manière que les fleurs dans 
le mâle. 11 n'en reste qu’un très-petit nombre. 
Ceux que jai pu apercevoir m'ont paru avoir 
atteint un diamètre d'environ quatre lignes. 
J'ignore s'ils grossiront davantage. 

Les feuilles naissent en grand nombre le 
long et autour des rameaux. Leur longueur or- 
dinaire est de cinq à six pouces. Les folioles , 
très - étroites , quoiqu’aplaties , sont rangées 
tout autour de la côte commune , depuis 
sa naissance jusqu’à son extrémité ; elles 
sont tantôt opposées , tantôt alternes ; elles pa- 
raissent dans le mâle un peu plus larges et elles 
se détachent sensiblement de la côte, tandis que 
dans la femelle elles paraissent collées. 

La disposition de ces feuilles qui pendent le 
long des branches et qui forment plusieurs 
étages , donne à l'arbre une physionomie élé- 
gante qui le ferait figurer avec agrément dans 
les paysages. 

Les deux’seuls pieds que l’auteur possède sont 
plantés l’un à côté de l’autre, dans un sol peu 
fertile, sur les bords d’une petite pièce d'eau ; 
leur grosseur , près de terre, peut être d'environ 
deux pieds de circonférence, et leur hauteur de 
trente à quarante. 


Les feuilles tombent toutes ensemble aux pre- 


176 Société royale d'Agriculture 

miers froids ; elles pourraient former un abri 
pour les jeunes semis que l’on voudrait préser- 
ver de la gelée d'hiver. 


Notice sur Cette partie de l'histoire naturelle qui a pour 


une roche feld- Gbjet les minéraux, n'est pas étrangère à vos 
spathique sma- 


ragdifère; par 
M. Tissier. deux mémoires de M. Tissier , l'un sur une 
roche remarquable, dont le gisement est peu 
éloigné de notre ville; l'autre sur une eau mi- 
nérale nouvellement découverte près de Condrieu. 

Le mémoire relatif à la roche étant peu 
étendu, je crois devoir l'insérer ici textuelle- 
ment : 

» Sur l'ancien chemin de Chessy, qui part de 
la grande route de Lyon à Paris par Larbresle, 
et à la partie de ce chemin qui va de Dardilly à 
Dommartin , et de Dommartin à Lauzanne, 
gisent diverses substances qui sont en droit 
d'intéresser vivement le minéralogiste et le géo- 
logue. Le terrain s'y compose en grande partie 
de roches feldspathiques , souvent en décompo- 
sition, et qui passent du porphyre argileux 
proprement dit au granit pur et au granit por- 
phyroïde. Au revers nord-ouest de ce terrain, 
dans la commune de Dardilly, se trouvent des 
bancs calcaires inclinés à l'est, formant avec 
l'horizon un angle de plus de 75 degrés, tant 


travaux , aussi avez-vous entendu avec intérêt 


Lo 


de Lyon. 177 
leur inclinaison est plus grande que celle des 
carrières du Mont-d’Or dont elles sont un dé- 
membrement, » 

» Pour guider le naturaliste dans les recher- 
ches à faire sur ce terrain , traçons la route que 
nous avons nous-même suivie dans cette explo- 
ration. » | 

» Lorsqu’en suivant la route de Paris par le 
Bourbonnais, on est arrivé à la hauteur de 
Dardilly , non loin de la Tour de Salvagny , on 
prend un chemin à droite qui conduit à un 
ruisseau qui coule au pied des collines dont 


Dardilly est flanqué de ce côté ; en continuant 


de marcher latéralement à la grande route , et 
longeant ces collines, on trouve un terrain 
friable , argileux , rougeâtre ; c’est la roche elle- 
même en décomposition ; et souvent on rencontre 
dans cette terre meuble , des cristaux de feld- 
spath dodécaëdres , ayant le prisme et les deux 


pyramides bien terminés. Ces cristaux sont gre- 


nus, micacés , et ont seuls résisté à l’action de 
l'air et de l'humidité qui ont mis la surface de 
ce sol en détritus; depuis cet endroit et autour 
du village, des champs sont trop bien cultivés 
pour qu'il soit permis de faire des fouilles , seu- 
Jement on y aperçoit la mémenature de terrain. » 

» Ayant atteint l’ancienne route, et en tra- 
versant plusieurs collines basses de même con- 

12 


178 Société royale d'Agriculture 

texture, mais dont le noyau varie du rouge au 
jaunâtre , on découvre un porphyre globuleux , 
rassez semblable à celui de Corse. Il aflecte di- 
verses couleurs depuis le rouge foncé jusqu'au 
jaune pâle ; il est souvent en décomposition , et 
on le prendrait quelquefois pour une mine de 
fer argileuse, hydratée en grains. » 

» Enfin, à environ six cents pas du village , 
la roche prend un caractère décidé de granit 
porphyroïde, ayant passé même à l’état de gneiss 
en certains endroits. Ce granit porphyroïde est 
parfaitement caractérisé, la pâte en est feldspa- 
thique ; si le quartz enchâssé était cristallisé , 
on aurait une pegmatite ; mais il est grenu. » 

Le feldspath y est laminaire, nuancé de blanc, 
de rose, de violâtre, quelquefois en cristaux de 
plusieurs pouces de longueur et de grosseur, 
tantôt enchässant un quartz grenu à gros grains, 
translucide, d’un blanc grisâtre , tantôt enchâssé 
par cette substance. La masse entière est entre- 
lardée de tourmaline cylindroïde canelée , d’un 
vert luisant flatteur. Le mica est argentin, 
quelquefois abondamment disséminé , le plus 
souvent réuni en grandes lames et en masses 
très-feuilletées et d’un bel eflet :il occupe des 
places distinctes. » 

.-» Cette roche granitique et feldspathique, 
dont la pâte est de cette dernière nature, pourrait 


de Lyon. 179 
tout aussi bien être désignée sous le nom de 
porphyre granitique. On sait en effet que le pas- 
sage de la prémière de ces formations à la se- 
conde est insensible, et qu’on les retrouve 
quelquefois dans la même roche. » 

» Cette roche est souvent smaragdifère, ce 
qui le prouve, c’est qu'à la distance d'environ 
six cents pas du village , non loin des bois de 
Vabres , et au milieu même de la route, le 
granit porphyritique renferme en outre de belles 
tourmalines , des émeraudes à prismes hexaëdres, 
dont quelques-unes remarquables par la gros- 
seur et la régularité du prisme. Quelques-unes 
sont en décomposition ; mais parmi celles qui 
sont intègres, on en voit d’un vert fort beau 
et d'un jaune dont la nuance varie depuis le 
pâle jusqu'au verdâtre . . . . . . . . . 

» En explorant avec soin le terrain de Dom- 
martin , M. Tissier le fils a rencontré dans la 
roche dont il s'agit l'épidote aciculaire, en très- 
petite quantité à la vérité, mais suffisamment 
pour donner l'éveil aux explorateurs et leur faire 
espérer plus de succès dans leurs recherches. » 

» La même roche m’a aussi présenté des in- 
dices de grenats d’une petitesse extrême, mais 
d’une couleur analogue à ceux du Piémont , des 
traces de titane rutile, et quelques portions de 
chaux posphatée ( apatite des Saxons ). 


180 Société royale d’ Agriculture 

» La découverte de cette roche est une bonne 
fortune pour les minéralogistes du département, 
la variété de ses annexes la rend intéressante et 
précieuse ; pourquoi faut-il que des destruc- 
teurs se plaisent à nous priver de cette jouis- 
sance; les uns pour avoir le plaisir jaloux de 
posséder seuls , les autres pour nous vendre au 
poids de l'or une production minérale de notre 
contrée ? » 

» Mais qu'on se rassure. Tous les amateurs 
trouveront encore de quoi satisfaire leurs désirs 
et matière à de nouvelles découvertes. En atten- 
dant, comme j'ai droit de soupçonner qu'on sé 
fera honneur de ces explorations , je prends acte 
pour mon fils et M. Zounoy de la découverte 
faite en 1819 de cette roche, et j'invoque en 
faveur de ce fait le témoignage de MM. Barre 
et Dugas. » | 

» Cette roche qui n’est pas seulement smarag- 
difère, m'a offert les substances suivantes : 

1. Emeraudes à prismes hexaëdres jaunes, 
jaunes verdâtres, vertes ; 

2° Tourmaline cylindroïde ; 

3.0 Epidote aciculaire verte ; 

4. Chaux phosphatée apatite ; 

5.0 Mica argentin. 

De plus, dans les terres des collines basses , 
on trouve des masses terreuses blanches qui sont 
du caholin pur. » 


de Lyon. 181 

L'eau minérale dont notre confrère a exposé 
l'analyse, coule à la Bonnette, commune de 
Condrieu , dans un domaine de M. de Prunelle, 
membre de la Chambre des députés. IL.a opéré 
sur cinq litres un quart de cette eau qui lui 
avaient été envoyés par M. le docteur Chardon, 
médecin à Condrieu. 

C'était au mois d'octobre ; le thermomètre 
Réaumurien témoignait 11 deg. 1/4. 

L’aréomètre des sels, plongé dans de l’eau 
distillée, se tenait à o découvert, et dans l’eau 
de la Bonnette à o couvert. Un litre et quart de 
cette dernière a été soumis à divers réactifs. 

1. Point de trouble ni de nuage par le nitrate 
de baryte ; 

2, Opacité laiteuse par l’eau de chaux; 

3. Nuages blancs au bout de dix minutes par 
le nitrate d'argent ; | 

4. Par l'hydrocianate de potasse ferrugineux , 


sans addition de potasse, couleur bleu, qui a 


pris de l'intensité par l'addition d'un acide ; 

5. L'alcohol gallique a rendu le liquide violet , 
et il a donné lieu à un précipité brun noirâtre; 

6. L’oxalate d'ammoniaque n’a louché la li- 
queur qu’au bout de quelque temps, et la matière 
en suspension a pris une teinte bleuâtre ; 

7. Ce n’est qu'après un temps plus long que 
l'ammoniaque seul a troublé la liqueur ; 


Analyse de 
l'eau minérale 
de la Bonnette; 
par le méme. 


182 Sociélé royale d'Agriculture 

8. L'acide oxalique a produit cet effet sur-le- 
champ et d'une manière très-prononcée ; 

9- Rien par la solution du sous - carbonate 
d'ammoniaque ; | 

10. Liqueur laiteuse par le phosphate desoude. 

11. Même effet par l'addition de l'ammoniaque 
à ce sel. 

12. Même effet par de l’eau de baryte. 


De ces essais, l’auteur conclut déjà que l'eau 
de la Bonnette contient de l’oxide de fer, de la 
chaux, saturés avec excès par l’acide carbonique. 


I! s'agissait de déterminer la proportion de ces 
principes: on a , pour cela , soumis quatre litres 
d'eau de la Bonnette à diverses épreuves, telles 
que la distillation , l'évaporation. On a exa- 
miné avec soin les résidus obtenus, et indépen- 
damment des oxides de fer et de calcium, on a 
rencontré une matière solide, inattaquable par 
les acides hydrochlorique, sulfurique, nitrique, 
oxalique. Cette matière , essayée au chalumeau 
avec de la soude, s'est changée en verre, ce qui 
annonce suffisamment sa nature siliceuse. L’au- 
teur se demande si cette silice est en dissolution 
ou en suspension dans une eau qu’on voit 
sourdre d'un terrain granitique. 

Quoi qu'il en soit, voici les résultats de cette 
analyse : 


de Lyon. 183 


Quatre litres d'eau de la Bonnette ont donné 


Acide carbonique , 9 gr. 42 cent. 
Oxide de fer , 2 gr. 
Carbonate de chaux , 14 gr. 


Silicium (matière insoluble), 2 gr. 

Ce qui donne pour un litre de cette eau ; en- 
viron le huitième d'un litre acide carbonique en 
volume ; et en poids environ 2 gr. 1/3; oxide 
de fer, 1/2 gr.; carbonate de chaux, 3 gr. 1/2; 
matière insoluble, 1/2 gr. 


C’est pour payer un tribut à l’histoire natu- 
relle , que M. Grognier a retracé les titres de 
gloire de deux grands naturalistes nés dans nos 
murs. Tout en jugeant sans doute que ces deux 
hommes célèbres étaient dignes d’un tout autre 
panégyriste, vous avez écouté leur éloge avec 
intérêt et consenti à ce qu'il fût inséré dans le 
recueil de vos actes. 


Notre province, dont la flore présente aux 


amateurs de plantes tant de richesses , a été le 
théâtre des travaux et de la gloire de plusieurs 
botanistes du premier ordre , tels que Jean 
Bauhin , Daleschamps , Latourette , Gilibert et 
Goiflon. 

Ce dernier fut le maître , le protecteur et 
l'ami d'Antoine de Jussieu, qui lui-même à son 
tour ouvrit la carrière à ses frères Bernard et 


Joseph. 


Notice sur 
Antoine et sur 
Joseph de Jus- 
sieu; par M, 
Grognier, 


184 Sociélé royale d'Agriculture 

Le digne neveu de ces trois grands natura- 
listes est aujourd'hui le nestor dés savans de 
VEurope. D'autres exposeront ses titres au sou- 
venir de la postérité (1). C'est le portrait d’A7- 
toine et celui de Joseph que je me propose de 
crayonner aujourd’hui ; puisse cette esquisse 
porter l'empreinte de cette touchante simplicité 
qui est héréditaire dans la famille célèbre dont 
je vais m'occuper ! 

Antoine de Jussieu naquit à Lyon en 1686, 
comme Tournefort, il se destina, dans sa jeu- 
nesse, à l’état ecclésiastique. Sa santé s'étant 
altérée par l'excès du travail, son médecin fut 
le savant et modeste Goiffon , qui , pour faire 
diversion aux études trop sévères de son jeune 
malade , lui prêta les ouvrages de Tournefort. 
À cette lecture le génie d'Antoine s'enflamme 
et sa vocation est décidée. À peine convales- 
cent, il suit son médecin le long des deux fleuves 
qui baignent notre cité, il gravit sur ses pas 
les cotaux qui la couronnent. Bientôt il a re- 
couvré ses: forces et la plénitude de la santé : 
alors au lieu de rentrer dans une école de théo- 
logie , il se rendit à Montpellier ; il y étudia 
la médecine, surtout la botanique , sous pes: 
Hi Rare Magnol. 


(1) L’éloge de Bernard a été lu dans une de vos séances, 
etinséré dans le comple rendu de vos trayaux pour 1917. 


de Lyon. 185 

En 1767, étant âgé de vingt-un ans, il re- 
çoit le bonnet de docteur, et le voilà parcou= 
rant les provinces méridionales de la France, 
les bords de la Méditerranée, les îles d'Hyères , 
Ja vallée de Nice , les Alpes Savoisiennes, il re- 
vient dans sa ville natale pour exposer aux re- 
gards charmés de son premier maître , les ri- 
ches trésors qu’il a recueillis. Celui-ci lui re- 
met deux lettres, l’une pour Tournefort, l'autre 
pour Fagon, premier médecin du Roi. Le jeune 
botaniste part pour la capitale , il vole au jardin 
du Roi, et il n’y arrive que pour assister aux 
funérailles de Tournefort. 

Quelques jours auparavant , Tournefort sor- 
tant d’une des séances de l'académie, avait été 
heurté, dans la rue St-Victor , par le timon 
d'une voiture, et il mourut des suites de ce 
coup violent. 

Antoine de Jussieu n'était venu à Paris que 
pour entendre et suivre un professeur dont il 
avait tant admiré les ouvrages ; ne pouvant 
jouir de cet avantage, il se hâta de quitter la 
capitale pour aller herboriser dans la Bretagne, 
dans la Normandie et principalement sur les 
côtes de l'Océan. 

Au retour de ces voyages il se souvint de 
l'accueil bienveillant que le premier médecin du 
Roi lui avait fait, à la recommandation de 


Goiffon. 


186 Société royale d'Agriculture 

Le premier médecin avait l’intendance géné- 
rale du jardin des plantes, il était zélateur de 
la botanique, il voulut voir toutes les collec- 
tions du jeune botaniste Lyonnais, et à la suite 
d'un long entretien sur la science des végétaux, 
il lui dit en lui serrant la main : Mon jeune 
ami, je vous nomme professeur du jardin du Roi. 

Antoine de Jussieu était à peine âgé de vingt- 
quatre ans lorsqu’il s’assit sur la chaire de Tour- 
nefort. Il ne tarda pas d'entrer dans la faculté 
de médecine et à l'académie des sciences. 

Jaloux d'enrichir de végétaux étrangers l'éta- 
. blissement confié à ses soins , le nouveau pro- 
fesseur fit avec l'agrément du Roi un voyage 
en Espagne et en Portugal. Son frère Bernard, 
alors âgé de dix-sept ans , l'accompagna dans 
cette expédition savante, et celui-ci prit dès-lors 
la résolution de se dévouer entièrement à une 
science dont il devait reculer au loin les bornes. 

Dans ce voyage qui dura à peine une année, 
Antoine de Jussieu recueillit non-seulement une 
immense quantité de végétaux ; mais encore 
plusieurs autres objets d'histoire naturelle qui, 
déposés au jardin du Roi, ont commencé ce 
cabinet qui , sous la plume de Buffon , est de- 
venu si célebre,. 

Parmi les plantes introduites par Antoine de 
. Jussieu au jardin royal, il en est une dont la 


de Lyon. }TE87 
propagation est une grande époque dans lhis- 
toire du commerce. Ce fut en 1719, que ce 
professeur remit au chevalier Desclieur ; en- 
seigne de vaisseau, un pied de larbuste qui 
produit le café ; et ce pied unique , transporté 
dans les Antilles, a donné naissance à tous les 
cafayers de cette partie du monde. 

On sait que le chevalier Desclieux était tel- 
lement convaincu de l'importance du dépôt 
qu'Antoine de Jussieu lui avait confié, que pen- 
dant la traversée il arrosait l'arbuste délicat 
avec une partie de l’eau dont se composait sa 
ration. 

Le café s'était introduit en France quelques 
années avant que l’arbrisseau qui le fournit 
eût été recueilli dans les serres du Jardin 
Royal ; mais l'origine de ce produit était in- 
connue , et on n'avait aucune idée des carac- 
tères botaniques , du mode de végétation et de 
la culture du cafayer. Ces questions importantes 
furent résolues dans un mémoire qu'Antoine 
de Jussieu lut à l'académie des sciences ; et 
ce n’est pas le seul qu'il ait communiqué à 
cette compagnie. Il a encore déposé dans ses 
actes des observations sur les champignons , 
le Simarouba, le contrayerva, le cierge du 
Pérou ; sur le cachou , sur la nature du gypse, 
sur les pierres tombées du ciel, Pexploitation 


188 … Societé royale d'Agriculture 

des mines de mercure d'Amelden en Espagne, 
les fossiles qu'on rencontre dans les mines de 
St-Chamond; sur les mines de cuivre du Lyon- 
mais , sur la tête et le pied de l'hippopotame, 
la collection des peintures de plantes et d'ani- 
maux déposées au muséum ; sur les causes de 
Paltération de l'eau de la Seine , dans la grande 
sécheresse de 1731. 

Ces ouvrages scientifiques sont , sans doute, 
au-dessous des connaissances actuelles , mais 
serions-nous si avancés dans l'étude de la na- 
ture si nos respectables devanciers ne nous 
avaient , même en s’égarant quelquefois , frayé 
le véritable chemin ? 

La gloire de notre Tournefort en est-elle 
moins brillante et moins pure parce que ses 
théories et ses méthodes ont fait place à celles 
de Linné et à celles d’un autre Jussieu ? Et 
celles-ci, qui font tant d'honneur aux génies 
qui les ont créées, auront-elles une destinée 
différente ? 

Au reste, quelles que soient les révolutions 
de la science, les grands ouvrages , tant de 
Linné que de Tournefort resteront comme des 
monumens de l'esprit humain , et les éditeurs 
de ces livres fondamentaux seront eux-mêmes 
considérés comme ayant bien mérité des 
sciences. 


de Lyon. 189 

Aoiié de Jussieu à , sous ce rapport , un 
titre de plus à notre reconnaissance, nous lui 
devons une édition des /nstitutiones rei herbariæ 
de Tournefort, avec la vie de l'auteur, et un 
supplément à sa préface ( Lyon, 1719). Il avait 
rédigé précédemment l'ouvrage du Père Barelier, 
sous le titre de Plantæ per Galliam ; Hispaniam 
et J{aliam observate. 

Il avait commencé la rédaction de son voyage 
en Espagne et conçu le projet de beaucoup 
d'autres ouvrages plus importans que ses mé- 
moires académiques ; mais il était médecin, 
et la confiance du public le déroba à ses oc- 
cupations littéraires. 

Sa pratique dans la capitale fut heureuse et 
brillante. Il l’exerça chez les grands , et il par- 
vint à la fortune. 

: Sans cette circonstance c’en était fait peut-être 
du jardin royal. Le respectable Fagon n'était 
plus, l'intendance de l'établissement était tombée 
dans les mains de Chirac, médecin du Roi, et 
esprit bizarre et despotique, plein de mépris 
pour la botanique dont il ne possédait pas les 
premiers élémens. L'organisation de l'établisse- 
ment fut bouleversée ; les correspondances fu- 
rent entravées , les cultures négligées , les fonds 
détournés sans reddition de compte : c'était sous 
la régence. 


190 Sociélé royale d Agriculture ; 

Antoine et Bernard de Jussieu n’abandonnèrent 
point un établissement menacé d'une dissolution 
prochaine , et qui, au moment actuel , est l’un 
des plus beaux monumens de l'univers. Antoine 
suppléa de son or aux moyens de subsister 
qu'on refusait au jardin royal : engrais; instru- 
mens de culture, travaux d'ouvriers, il paya 
tout avec une rare générosité. En même temps 
voyageaient à ses frais de jeunes botanistes char- 
gés de recueillir des graines et des plantes vi- 
vañtes pour enrichir le jardin royal. 

C'était là qu'il habitait, et l'un de ses appar- 
temens se remplissait tous les jours au lever de 
l'aurore de pauvres malades auxquels il distri- 
buait, avec ses ordonnances , les moyens pé- 


cuniaires de les faire exécuter et d'en assurer le 
succès. 


Ce naturaliste, ce médecin si généreux , si 
philantrope, cessa de vivre le 22 avril 17958, 
étant âgé de 72 ans , et après avoir rempli pen- 
dant 49 ans la chaire de professeur de botanique 
au jardin du Roi. Il eut pour successeur et pour 
héritier son frère Bernard. 


Au moment où Antoine de Jussieu descendait 
au tombeau, Joseph , un autre de ses frères 
parcouraïit les Cordilières, cherchant au milieu 
des déserts , des volcans et des précipices, quel- 


de Lyon. 101 
ques végétaux utiles ou agréables qui fussent 
inconnus à sa patrie. 

Joseph de Jussieu était né à Lyon en 1704. 

Après avoir fait quelques études de médecine, 
il s'adonna tout entier aux mathématiques, et 
voulutentrer dans la carrière des ponts et chaus- 
sées. 11 se rendit à Paris où il reprit ses études 
de’ médecine, qu’il suspendit encore pour se 
livrer avec enthousiasme à la botanique. 

Ses deux frères, Antoine et Bernard, enseig- 
naient alors avec éclat cette science au jardin du 
Roi. 11 se méla à la jeunesse studieuse que la 
renommée des deux professeurs attirait de toutes 
les contrées de l'Europe. 

En 1734, il reçut le bonnet de docteur. 

L’année suivante , il fut adjoint en qualité de 
botaniste à La Condamine et aux autres acadé- 
miciens envoyés par le Roi pour mesurer un 
degré du méridien sous Péquateur. 

L'expédition savante relâcha à la Martinique 
et à St. Domingue. Joseph de Jussieu explora 
ces deux îles. Il y découvrit un grand nombre 
de végétaux dont il enrichit le jardin du Roi. 
Arrivé sur le continent américain , il traversa 
l'isthme de Panama, s’embarqua pour Guayaquil 
d’où il se rendit par terre à Quito où devaient 
commencer les.opérations astronomiques. 

Les, mathématiciens chargés de les exécuter 


192 Société royale d'Agriculture 
ne furent pas peu étonnés de trouver un utile 
coopérateur dans un botaniste. | 

C'est en travaillant de concert avec les géo- 
mètres de l'académie à une opération qui exigea 
sept ans de travaux difficiles et pénibles, que 
Joseph! de Jussieu se trouva au milieu de ces 
vastes forêts des Cordilières, dans la profondeur 
. desquelles la nature avait caché le quinquina. 
Cette substance héroïque avait été, depuis quel- 
ques années , introduite en Europe sous le nom 
de poudre des Jésuites ; mais on ne connaissait pas 
l'arbre qui la fournit. C’est à Joseph de Jussieu 
que nous devons les premières notions précises 
sur un végétal si précieux. Il distingua nettement 
plusieurs espèces de quinquina, en désignant 
celles qui donnent l'écorce la plus efficace. 

Cependant les astronomes de l'académie ayant 
terminé leur mission , rétournèrent en Europe. 
Mais il restait encore à l'intrépide compagnon de 
leurs travaux des montagnes à gravir, des pré- 
cipices à franchir , des solitudes à traverser; ils 
ne l'oublièrent point dans le rapport qu’ils pré- 
sentèrent à l'académie des sciences , et son nom 
fut inscrit. à côté de ceux de ses frères sur la 
liste de cette illustre compagnie. | 

Le voyageur savant s'engagea dans des pays 
sauvages , inhabités , il pénétra dans ces lieux 
où , selon l'expression de Buffon , on ne rencontre 


de Lyon. 193 
aucuns vestiges de l’homme ,et où la nature , accou- 
lumée au plus profond silence , semble s’élonner de 
s'entendre interroger pour la première fois. K] 
atteignit des sommités où, même sous la ligne, 
la rigueur du froid avait étoufté toute végétation , 
et il osa s'approcher de ces vastes brasiers dont 
les flammes s’échappent par torrens au-dessus 
des glaces éternelles. 

Après avoir parcouru dans tous les sens les 
Alpes péruviennes, il se dirigea vers les côtes 
de la mer pour envoyer en Europe une partie 
de ses richesses botaniques. Parmi les plantes 
dont il fit présent au vieux continent , je citerai 
cette plante suave connue sous le nom d'Hélio- 
trope du Pérou. 

Quelle serait notre indigence si nous étions 
réduits aux seuls végétaux que la nature a semés 
dans les contrées que nous habitons! Originaires 
d'un pays inconnu, les céréales nous furent 
apportées à une époque dont l’histoire a perdu 
le souvenir. L'empereur Probus envoya la vigne 
aux Gaulois ; Lucullus leur avait précédemment 
donné le cerisier ; lungues années après on vit 
arriver en France le pêcher et d'autres arbres 
de la même famille. Le müûrier vint du midi de 
l'Europe , sous le bon Henri. Le botaniste 
V'Écluse fit connaître à la France la pomme de 
terre ; l'ambassadeur Nicot envoya du Brésil la 

13 


194 Société royale d'Agricullure 

plante qui fournit le tabac ; un autre agent di- 
plomatique nous donna le maïs ; le jardinier 
Robin nous donna l'acacia ; Commerson intro- 
duisit cette plante magnifique qu'il consacra à 
Hortense Lepeautre. | 

Combien d’autres végétaux étrangers peuplent 
nos forêts , enrichissent nos vergers , embellissent 
nos jardins , sans que nous connaissions le nom 
de ceux qui les ont apportés d’un autre hémis- 
phère ! Tout retentit du nom de ceux qui ra- 
vagent la terre, on oublie facilement ceux qui 
nous enseignent à embellir et à féconder son 
sein. 

Au reste, notre Jussieu, pendant le long 
séjour qu’il fit en Amériqué, ne borna pas ses 
travaux à la botanique, il visita encore plusieurs 
mines d'argent , il décrivit les procédés em- 
ployés dans leur exploitation , il proposa à 
Padministration coloniale des perfectionnemens 
qui furent adoptés. Devenu en quelque sorte ci- 
toyen du Potosi, il paya à sa patrie adoptive le 
tribut de ses talens et de ses connaissances. On 
le vit lever des plans , tracer des cartes, ouvrir 
des grands chemins, construire des ponts, eten 
même temps répandre le secours de Part salu- 
taire. Tant de services lui méritèrent un monu- 
ment qui fut élevé aux dépens du public dans 
la capitale du Potosi, c'était une pyramide por- 


de Lyon. 195 
tant sur son piédestal une inscription destinée 
à transmettre à la postérité la reconnaissance des 
Péruviens envers un Lyonnais leur bienfaiteur. 
Qu'est devenu ce monument ? aura-t-il résisté 
aux intrigues d'une foule d'hommes jaloux et 
pervers que fatiguait depuis long-temps la gloire 
d'un étranger ? ils parvinrent à le calomnier 
auprès du gouvernement espagnol ; il fut abreuvé 
d'amertumes , sa santé en souffrit profondément, 
et il quitta le Pérou au milieu des regrets et 
des larmes d’une population entière. 

Il se retrouva à Paris en 1771 , après trente- 
six ans d'absence ; sa santé s’était fortifiée pen- 
dant le voyage; mais sa tête s'était perdue , sa 
mémoire effacée , son imagination éteinte , le 
fil de ses idées s'était brisé pour toujours ; il ne 
lui restait de lui-même que l'air doux et cares- 
sant avec lequel il recevait les tendres soins que 
des frères généreux prodiguaient à son triste sort. 

Un bruit affreux a couru, qui n’a été ni con- 
firmé , ni démenti. Les envieux de Joseph de 
Jussieu furent accusés de lui avoir donné un de 
ces poisons qui, lorsqu'ils ne causent pas la 
mort, impriment une altération incurable et 
profonde à l'organe central de la vie. 

L'enfance sénile de Joseph de Jussieu se pro- 
longea pendant neuf ans, et il s’éteignit le 
11 avril 1779. 


196 Sociélé royalè d'Agriculture 


ARTS UTILES. 


En mettant en œuvre les produits de la terre, 
l'industrie en centuple quelquefois la valeur. 
Mais ses succès sont bien moins importans , et 
ils peuvent être fortement compromis lorsqu'elle 
est obligée de demander à l'étranger la matière 
première de ses opérations. Telle est la nécessité 
où elle se trouve en France relativement au 
coton. Si elle l’'éprouve encore à l'égard de la soie 
et de la laine, n'est-ce pas l'effet de l’imperfection 
de notre agriculture ? Donnons-nous à l’entre- 
tien et à la propagation des races précieuses de 
moutons tout le soin que réclame cette branche 
de notre économie rurale? Ne sont-elles pas sus- 
ceptibles d'être étendues dans nos campagnes, 
et la culture du mûrier et l'éducation du ver à 
soie? 

C’est sur cette dernière amélioration que vous 
dirigez depuis plusieurs années vos efforts les 
plus constans , et vous avez eu, Messieurs, la 
satisfaction de voir que ce n’était pas sans succès. 
Mais quelque beaux que soient les résultats que 
vous avez obtenus en ce genre, vous êtes loin 
de croire que votre mission soit remplie. 

C’est principalement lorsque la rivalité de 
l'Angleterre devient menaçante pour la brillante 


de Lyon. 197 
industrie de Lyon, que vous avez senti de plus 
en plus combien il vous importe vivement d'ap- 
peler l'attention de l'administration et de l’agro- 
nomie sur les moyens d'augmenter le plus 
possible la production de la plus belle soie. 

L'un de nos concitoyens, actuellement établi 
à Paris, M. Camille Beauvais est entré dans 
vos vues, il vous a soumis un important mé- 
moire sur ce sujet, et vous avez voulu qu’un 
long extrait en fût inséré dans le recueil de vos 
actes. 


Un très-habile manufacturier lyonnais , dont 
les produits ont honorablement figuré à l'expo- 
sition européenne du Louvre , un Français qu'a- 
nime la plus noble ardeur pour la gloire et la 
prospérité nationale , M. Camille Beauvais, vient 
de déposer dans une brochure de quelques pages 
des considérations d’un haut intérêt : elles sont 
relatives aux dangers qui menacent l'industrie 
de la France, et celle de Lyon en particulier. 
C'est surtout le développement des fabriques de 
soierie, de celle de lainage, chez nos éternels 
rivaux , qui lui paraît mériter l'attention la plus 
sérieuse. Il fait observer, avec inquiétude , que 
l'Angleterre dont les fabriques desoierie n’avaient 
guère fourni jusqu'ici qu'à la consommation 
locale, prétend, même dans ce genre d'industrie, 


Essai sur quel- 
ques branches 
de l'industrie 
francaise ; par 
M. Beauvais. 

Extrait par. 

M. Grognier. 


198 Société royale d'Agriculture 

entrer en concurrence avec nous sur les marchés 
où nous sommes les maîtres depuis des siècles , 
et cette concurrence paraît redoutable à l'auteur 
par deux raisons : d'abord , la fabrication sera 
en Angleterre activée par la force des machines 
à vapeur ; ensuite elle y sera soutenue par une 
grande puissance de richesse nationale et de 
crédit public. 

Il s'est assuré, d'après des calculs et des do- 
cumens précis, que , sur mille métiers à la 
Jacquard (car ces métiers ont déjà traversé la 
mer), mus par la vapeur, déjà la façon d'une 
aune d'étoffe se trouve réduite à 40 centimes, et 
cela quoiqu'on tienne compte des frais d'établis- 
sement et de ceux d'administration : cependant 
le même tissu coûte à Lyon , dans ce moment, 
sans y comprendre les frais d'administration , 
x fr. 20 à r fr. 25. Que sera ce si, comme on a 
lieu de le craindre, cette énorme différence 
s'accroît encore ? 

Non contens de favoriser puissamment la fa- 
brication des étofies de soie, les Anglais appel- 
lent dans leurs vastes domaines la production et 
la préparation de la matière première de ces fa- 
briques : témoins les bills d'encouragement pro- 
digués depuis six ans aux cultivateurs de mû- 
riers et aux filateurs du Bengale (1). Tel a été 


(1) Il est yrai que cette soie sera toujours inférieure à la 
nôtre, 


de Lyon. 199 
le résultat de cette politique que, d’après les 
renseignemens de l’auteur, puisés sur les lieux 
il n'existait en 1814 que douze mille métiers de 
soierie dans les trois royaumes réunis; tandis 
que les Anglais affirment qu'ils en possèdent au- 
jourd'hui plus de trente mille : les seules fabri- 
ques de Cowentry, qui ne fournissaient à cette 
époque que pour quinze à dix-huit millions de 
rubans , en produisent aujourd'hui pour plus 
de quarante millions. Et quelle doit être la 
production en ce genre de la Grande-Bretagne 
entière ? 

Le contrôleur général Huskinston rassembla 
au commencement de l'année dernière les prin- 
- cipaux manufacturiers de soierie , et leur tint ce 
langage : 

« Nous avons au Bengale un sol immense 
» couvert de müriers ; nos filatures se sont per- 
» fectionnées ; nos manufactures produisent déjà 
» pour deux cent cinquante millions de francs , 
mais il faut que ces produits soient doublés d'ici à 
» quelques années , et qu'ils rivalisent ceux de 
5 France dans tous les marchés. Vous réclamez 
» depuis long-temps l’abolition des droits sur la 
» soie : cette faveur vous sera accordée en partie 
» cette année, mais l'abolition entière n'aura 
» lieu que lorsque l’ouvraison de cette matière 
» se sera perfectionnée , et que /e métier Jacquard 


ÿ 


200 Société royale d'Agriculture 
» aura été mis en rapport avec la machine à 
» vapeur.» 

Cette promesse n'a pas été vaine: les droits 
énormes qui pesaient Sur les soies grèges pro- 
venant du Bengale et du midi de Europe ont 
été abolis l'année dernière, et le montant de 
ces droits régulièrement remboursé aux posses- 
seurs de ces matières. 

Si les soies ouvrées de Piémont et d'Italie 
payent encore un droit assez fort, c'est parce 
que, lors de la présentation de la loi, les mou- 
liniers anglais n'étaient pas en état de fournir 
au commerce des fils aussi parfaits que ceux qui 
viennent du continent ; mais ce droit ne tardera 
pas à être aboli. Que l'on ajoute la ressource 
des capitaux que les entreprises industrielles ne 
réclament, en Angleterre , jamais en vain , les 
mesures du gouvernement de ce pays, pour que 
le taux commercial de l'argent ne s’élève jamais 
au-dessus de 3 p. °/, sa sollicitude constante 
pour ménager les débouchés des produits manu- 
facturés , et l'on ne s'étonnera plus du déve- 
loppement des manufactures de soierie chez nos 
éternels rivaux ; on verra sans surprise de vastes 
établissemens de ce genre s’élever à Manchester , 
dont l’industrie n'avait jusqu'ici rien de commun 
avec la fabrication des étofles de soie, 

Ce n'est pas seulement en Angleterre qu'une 


de Lyon. 201 
concurrence dangereuse menace l’industrie lyon- 
naise. 

Dans le court espace de huit ans, dit auteur, 
il s'est monté plus de dix mille métiers d’étofles 
de soie à Zurich ; le nord de l'Italie favorisé par 
la fertilité de son sol, fortement protégé par son 
gouvernement , développe et perfectionne une 
industrie que nous lui avions ravie. Les bords 
du Rhin ajoutent à leurs anciennes manufac- 
tures des établissemens où les étofles de Lyon 
sont imitées. 

Un pareil état de choses inquiète M. Camille 
Beauvais , et il n’est pas rassuré par la prospé- 
rité actuelle des fabriques de Lyon , de St- 
Etienne, de St-Chamond, de Nîmes et d’Avi- 
gnon; c’est aux troubles d'Espagne , c’est-à-dire, 
à une circonstance passagère, qu'il attribue 
l'activité des fabriques lyonnaises ; elles sup- 
pléent , dit-il, pour la consommation des Amé- 
riques espagnoles , les métiers brisés de Valence, 
Grenade, Barcelonne, Séville, Malaga , et il ne 
croit pas éxagérer en disant que le commerce 
de ces Amériques occupe, au moment actuel, 
à Lyon, huit mille métiers. 

Mais les Anglais nous menacent dans les mar- 
chés des Hispano-Américains. 

« Mieux informés que nous sur les Dés 
» de ces peuples ( c’est l’auteur qui parle} , pro- 


202 Société royale d'Agriculture 

» tégés par leur marine, aïdés de grands capi- 
» taux, ils sont prêts à s'emparer de riches co- 
» Jonies dont la séparation entière de la métro- 
» pole tournera exclusivement alors à l'avantage 
» du commerce anglais et au détriment des ma- 
» nufactures française et espagnole. Au reste, 
» la protection du gouvernement anglais envers 
» les nouveaux états américains ressemblera 
» à celle qu’il accorde au Portugal , où nos rela- 
» tions commerciales sont tellement anéanties 
» que je ne crois pas que , depuis six ans, il se 
» soit montré à Lisbonne un seul voyageur qui 
» ait osé présenter des échantillons de soierie 
» française. » 

Cette politique profonde, l'Angleterre la suit 
avec une imperturbable persévérance. L’Angle- 
terre, dit l’auteur, ne combat plus pour la 
conquête de telle ou telle portion de terre, pour 
l'occupation de tel ou tel point maritime, mais 
pour l'avantage de fournir à des millions d’indi- 
vidus étrangers à ses lois les objets nécessaires 
à leur consommation. Après avoir favorisé de 
sa toute-puissance la création ou l'importation 
de la matière première, cette politique en se- 
conde la mise en œuvre , et elle place erisuite 
les manufactures dans l'heureuse position de fa- 
briquer sans attendre la consommation , parce 
qu’elle se charge en quelque sorte elle - même 


.de Lyon. 203 
d'ouvrir des débouchés exclusifs , de disposer des 
marchés privilégiés. 

Après avoir signalé les dangers qui menacent 
l'industrie de la France, et particulièrement 
celle de Lyon , M. Camille Beauvais indique quel- 
ques moyens de les conjurer. Il n'exclut de cette 
culture que les provinces du nord, et en suppo- 
sant que la récolte du mürier n’est pas aussi 
productive dans nos provinces tempérées que 
dans le midi , il soutient qu'elle y offrirait tou- 
jours un avantage immense sur les produits ordi- 
naires. I] voudrait que le conseil général de 
commerce, qui déjà inspire à l'industrie de si 
grandes espérances , veillât à ce que les instruc- 
tions sur la culture de cet arbre et l'éducation 
du ver à soie fussent répandues partout, que 
des primes d'encouragement, et même des dis- 
tinctions honorables fussent accordées à ceux 
qui auraient imprimé dans leur canton un mou- 
vement salutaire à cette double culture ; que 
toutes les grandes routes fussent plantées de 
mûriers. Avant dix ans, ajoute-t-il , la France 
récolterait assez de soie pour alimenter ses 
fabriques. 

Songeons que la très-grande partie de la France 
est propre à l'éducation de l’insecte précieux. 

Après avoir fait connaître les perfectionne- 
mens que ce genre d'industrie a obtenus, l’au- 


204 Société royale d Agriculture 

teur ajoute : & Leurs résultats sont tels que, 
» tandis que, dans le siècle dernier, sur cent 
» éducations, trente donnaient à peine une 
» réussite satisfaisante ; aujourd’hui, sur le 
» même nombre , il n’y en a pas vingt qui ne 
» dédommagent amplement l’éducateur de ses 
» peines, et encore lorsqu'il ne réussit pas , il 
» ne doit en accuser que son manque de soins 
» et son inexpérience. » 

Ces considérations conduisent l’auteur à payer 
un tribut d'estime à M. Matthieu Bonafous, dont 
les savans mémoires n’ont pas peu contribué à 
la propagation des bonnes doctrines. Il désire 
vivement que partout on élève de préférence la 
race à soie blanche ; il trace l'historique de l’in- 
troduction en France d’une race si précieuse : ce 
qui le conduit naturellement à parler de M. 
Poidebard. 

« La soie de M. Poidebard, dit-il, est d’un 
» blanc bien plus pur que celle de la Chine, 
» dont elle est originaire ; elle est supérieure à 
» celle de Gênes et du Piémont , au-dessus de 
» celle de Bourg-Argental , de Roquemaure et 
» des Cevennes. Déjà, en 1814, la société 
» d'encouragement de Lyon, frappée de la beauté 
» de cette matière , nomma une commission 
» pour examiner la soie blanche dont il s'agit : 
» celte commission, dont je fus rapporteur, 


de Lyon. 205 
» conclut à l’unanimité que la chambre de 
» commerce serait priée d'appeler l'attention du 
» ministre de l’intérieur sur la soie blanche de 
» M. Poidebard , afin que S. Ex. voulût bien 
» convertir son établissement en ferme expéri- 
» mentale. » 

S'occupant ensuite des filatures et des ouvrai- 
sons , M. Camille Beauvais pouvait-il passer sous 
silence M. Gensoul ? C'est à lui, dit-il , que nous 
devons les perfectionnemens qui se sont opérés 
dans la filature depuis la fin du siècle dernier. 
Son appareil , aussi simple qu’ingénieux, rem- 
plit toutes les conditions désirables : aussi a-t-il 
été adopté par tous les filateurs éclairés de la 
France et du Piémont. Quelque connu que soit 
cet appareil, je n'en exposerai pas moins ici 
les principaux avantages, en empruntant les 
expressions de M. Camille Beauvais. 

« Au moyen d’un seul feu et de la vapeur , le 
» calorique se distribue à un nombre de bas- 
» sines déterminé ; l'eau qu’elles contiennent est 
» portée au degré de chaleur convenable, et sa 
» chaleur est graduée avec une promptitude qui 
» facilite toutes les opérations du filage. » 

« La fileuse éloignée du foyer ne souffre plus 
» de l’action de la chaleur produite par les four- 
» neaux de l’ancienne méthode ; la tourneuse 


qui n'a plus de feu à alimenter, donne tout 
» son temps au travail. 


206 Sociélé royale d'Agriculture 


» 


» La fumée , produite par les feux nus, est 
entièrement supprimée par le nouvel appareil 
qui joint à tous ces avantages celui de ne con- 
sommer que le tiers de combustibles. Pour 
terminer le tableau des améliorations , j'ajou- 
terai que /a rente du cocon est plus productive, 
que son brin filé à la vapeur a plus d’eclat , 
plus de netteté, plus d'élasticité, etc., etc. » 

La soie récoltée, filée, ouvrée, il s’agit de 


l'employer à la fabrication. C’est le triomphe de 
l'mdustrie lyonnaise. 


» 


» 


« Les produits des fabriques de Lyon, dit M. 
Camille Beauvais, sont imités par les fabricans 
de St-Chamond et de St-Etienne, par ceux 
de Nîmes et de Rouen, et enfin par tous les 
manufacturiers de toiles et de papiers peints. 
Les Suisses , les Italiens , les Allemands, les 
Anglais même recherchent les échantillons de 
fabriques lyonnaises pour en tenter l’imitation: 
on peut considérer Lyon comme la première 
école industrielle de Europe. » . . ...... 
« Les Anglais nous sont inférieurs , 1.° sous 
le rapport des prix (par les moyens ordinaires, 
nous avons sur eux l'avantage de 25 à 30 p.°/0); 
2.° pour la connaissance et Pemploi des matières ; 
3.° pour les leintures ; 4.° pour les appréts ; 
5.° enfin pour les combinaisons multipliées sè 


» familières aux fabricans lyonnais. 


de Lyon. 207 

Mais nos éternels rivaux nous imiteront, froi- 
dement à la vérité, mais ils nous imiteront 
avec des machines à vapeur, des métiers de 
rotation. Chacun de ces métiers produira vingt 
aunes d'étoffes par jour ; le ministère protégera 
de tout son pouvoir ce mouvement. Nos étoffes 
fabriquées à la main seront sans doute d'une 
qualité supérieure aux produits des machines ; 
mais sous le rapport des prix pourront-elles sou- 
tenir la concurrence ? et à l'égard du plus grand 
nombre des consommateurs , le bon marché ne 
passe-t il pas avant tout? Que sera-ce, si, comme 
le craint M. Beauvais , on parvient à organiser 
les métiers de rotation de manière à fabriquer, 
par leur moyen, avec autant de perfection 
qu'avec la main ? 

Nous devons cpposer les mêmes armes à nos 
éternels rivaux : notre gouvernement doit avoir 
pour nos manufactures une sollicitude égale à 
celle du gouvernement britannique pour les ma- 
nufactures anglaises ; nous devons demander à 
la mécanique les moyens de produire avec ra- 
pidité, avec économie, pour vendre à bas prix 
avec bénéfice. Il est encore d’autres moyens sur 
desquels Pauteur veut garder le silence pour ne pas 
donner des armes contre nous. 

Si, sous ces rapports, nous arrivions , vis-à- 
vis de l'Angleterre , à l'égalité, nous aurions 


208 Société royale d'Agriculture 
toujours l'avantage d’un sol plus fécond, de 
planteurs et de filateurs plus expérimentés , de 
manufacturiers plus instruits , d'une population 
entière plus active et plus ingénieuse. 

Tout en produisant des étoffes à bas prix pour 
résister sous ce rapport à la concurrence, il nous 
convient de varier, de perfectionner les articles 
de goût , au point de prévenir ou de rendre im- 
possible toute rivalité; et, à cet égard, l'auteur, 
tout en appréciant les services éminens rendus 
à l'industrie lyonnaise par M. Jacquard, est 
tenté de lui reprocher d'avoir imprimé trop de 
monotonie aux produits, et il regarde cette mo- 
notonie comme une des causes de la rivalité qui 
se prépare chez nos voisins. Si la machine de cet 
homme ingénieux a été adaptée heureusement 
à l’étoffe courante, son application aux tissus 
pour ameublement , n’a-t-elle pas réduit les 
moyens d'exécution, et par conséquent fait ré- 
trograder un art dont Lassalle et Pernon avaient 
tenté de reculer les bornes ? n'est-elle pas la 
cause que nos damas et nos lampas ont pu être 
imités jusqu’au fond de la Moscovie ? 

Que les Lyonnais se livrent à ce génie inven- 
tif qui les place au-dessus de tous les manufac- 
turiers de l'univers. Ce qu’ils ont fait depuis 
vingt ans annonce ce dont ils sont capables. 


C'est dans cette période de temps que M. 


. 
de Lyon. 209 
Gonin a découvert son rouge de cochenille, M. 
Raymond, le bleu qui porte son nom ; que le 
crêpe a été pour toujours enlevé au Bolonais ; 
l'utile et modeste machine ronde à dévider, in- 
ventée ; le coton en numéros très-élevés appliqué 
à la Jacquard; le crêpe de l'Inde parfaitement 
imité ; la gaze lisse mariée à la gaze métallique ; 
le gauffrage des rubans porté sur des étofes de 
largeur ; la fabrication des tulles perfectionnée 
au point de nous livrer, pour cet article , les 
marchés dont les Anglais étaient en possession ; 
les draps d'or destinés aux sérails, exécutés à 
moins de frais sans rien perdre de leur richesse ; 
les chaînes de soie disposées à recevoir les combi- 
naisons réunies du cylindre gravé et de la litho- 
graphie. Enfin , à la dernière exposition, on a 
vu paraître une étoffe pour stores , dont l'effet 
a excité l'admiration de tous les hommes de goût. 
Ainsi ce n’est pas pour les étoffes façonnées 
que nous avons à craindre la rivalité anglaise ; 
mais il n’en est pas de même pour les étoffes 
unies, pour celles de consommation coloniale, 
et c'est cette branche de notre richesse commer- 
ciale qui réclame toute l'attention , toute la 
protection du gouvernement. 
Ne bornant pas sa sollicitude aux fabriques 
de soie, M. Camille Beauvais l'a étendue à celle 
des draps, et pour mettre cette branche de notre 


14 


Sur l'intro. 
duction de la 
race des mou- 
tons Dislhey; 
Par le méme. 


210 Société royale À Agriculture 

industrie à l’abri des atteintes de nos rivaux, 
il recommande vivement d'introduire à tout prix 
dans nos campagnes , et de propager partout une 
race de moutons dont la laine fine, lisse, ner- 
veuse, a jusqu’à quatorze pouces de longueur. 

Cette race précieuse, qui est élevée dans toutes 
les parties de la Grande-Bretagne, se nomme 
indifféremment Dislhey, Newleicester ou Bake- 
well. Ces deux premières dénominations rappel- 
lent les lieux qui ont été les berceaux de cette 
race , la troisième le nom du cultivateur fameux 
qui l'a créée. 

La race Disilhey se distingue par une petite 
tête très-fine , des yeux beaux et brillans , des 
reins droits , larges. et gras, un corps arrondi 
en forme de baril, un dos petit et uni , une peau 
fine, et, ce qui est la conséquence. naturelle. 
d'une pareille conformation, une disposition. 
marquée à l’engraissement. Telle est la docilité 
de ces moutons que, quoique leur taille soit 
fort élevée, une haïe de trois pieds de hauteur 
suffit pour les retenir. Leur chair, grasse et 
succulente , est extrêmement estimée en An-, 
gleterre : ils arrivent à un état d'embonpoint ou 
pour mieux dire d'obésité prodigieuse. Un Dis- 
lhey de trois ans, appartenant à un fermier du 
Northumberland, portait sur les côtes une bande 
de graisse de sept à huit pouces d'épaisseur , il 


de Lyon: six 
était recouvert, sur le dos et les reins, d’une 
couche adipeuse, comparable au. lard le plus 
épais. Les brebis Dishley donnent pour l'ordinaire 
de dix-huit à vingt-quatre livres de suif. 

Dans une des solennités agricoles du duc de 
Bedfort, M. Bithrey de Bedforshire , donna les 
détails suivans sur un mouton Dishley de trois 
ans, tué le 20 décembre 1800 , qui avait été 
engraissé à l'herbe. 

Poids de l'animal en vie . ... 272livres. 

Viande nette ,........... 186 

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Vingt livres de lanimal en vie ont donné 
quatorze livres et trois-quarts de viande ou 
suif (1). À 

Le Dislhey dont il s’agit était sans doute un 
animal extraordinaire ; mais le poids commun 
des individus de cette race n'en est pas moins 
très-remarquable. En effet, dit M. le baron 
Mortemart.- Boisse , le poids d'une brebis Dis- 
They , âgée de trois ou quatre ans, dépouillée 


(1) Bibliothèque britannique, tom. 6, pag. 428. ( Part. 
d'Agr.) 


212 Société royale ‘d'Agriculture 

de la peau , est en général de 18 à 26 livres 
par quartier ; et d’un mouton de deux ans, de 
20 à 30 livres par quartier (1). 

Croirait-on que du temps de la reine Anne, 
le poids moyen des moutons qui se vendaient 
au marché de Smilhfield était de 28 livres, 
celui des agneaux de 18 livres ? Quant aux 
bœufs ils pesaient à cette époque 370 livres , 
les veaux 50 livres. C’est que tout le bétail an- 
glais paissait alors ou cherchait à paître dans 
des communaux, tandis qu’il pâture aujourd’hui 
dans de bons pâturages bien clos. 

C’est principalement à un fermier du comté 
de Leicester , nommé Bakewell , que l'Angleterre 
doit ses énormes moutons. M. Mortemart-Boissé 
pense qu'il en avait tiré les souches du Holstein , 
de la Hv!lande , peut-être même de contrées plus 
éloignées vers le nord (2). 

Quoi qu’il en soit : ce fermier retira de ses 
opérations une fortune immense, une de ces for- 
tunes telles qu’on en fait souvent en Angleterre 
quand, par d’heureuses découvertes sur l'agro- 
nomie ou les arts industriels , on attire l’attention 
publique. 

En 1760, M. Bakewell vendait ses brebis à 


(1) Annales de l’agriculture française, 2.e série. (f. XXVI.) 
(3) Robert Bakewell est né à Dishley dans le Leicestershire 
eu 1726, et il est mort eu 1795. 


de Lyon: 213 
raison de 2 ou 3 guinées par tête, ce qui déjà 
était au-dessus du taux ordinaire de ces ani- 
maux. Ses beliers furent ensuite recherchés, et 
pendant plusieurs saisons il put les louer chacun 
une guinée ; mais lorsque la race qu'il créait 
eut acquis de la réputation, quelques-uns de 
ses beliers furent loués 25 guinées pour une 
saison : bientôt sa renommée s’étendit , elle de- 
vint imposante , au point que quelques-uns de 
ses beliers furent loués chacun à raison de 400 
guinées pour une seule saison, et même l'un 
d’entr'eux , nommé le Tow Pounder, lui a valu, 
dans un an, 800 guinées , et il a produit en 
outre des agneaux de ses propres brebis pour 
400 guinées ; en sorte que la rente de ce seul 
belier Dishley montait à 1200 guinées ( plus de 
25000 fr. de notre monnaie. }) 

L'enthousiasme qu'avait excitée l'amélioration 
produite par M. Bakewell lui survécut. Je lis, 
en effet, dans la B'bliothèque britannique (1) , 
que l’un des continuateurs de ce fermier célèbre , 
M. Stone de Quorndon , en Leicestershire , 
ayant fait une exhibition de beliers , en les 
offrant à louer pour la saison , dans l'espace de 
deux heures , les N.95 suivans furent loués aux 
prix ci-après : 


(1) T. Il, pag. 276. ( partie agricole. } 


214 Société royale d'Agriculture 
N.° 10. Belier à sa première tonte, loué par 
M. Duddin, pour. ...... 4001.st. 
N.°x1. De même, loué par M. Coke . 500 
N.° 7. De même, loué par M. d'Alby. 200 
N.° 6. De même, loué par M. Trau- 
mann. ...:... ds Fe de, 0300 


N.0 7. Belier de deux tontes, loué 
par le duc de Bedfort, avec la réserve 


qu'il servira vingt brebis avant d'être 

remis au prince. . « ... « «+ … o 500 
N.° 9. Belier de deux tontes , loué 

par M. Whinfeld .......... 300 


Total de la rente des six beliers (1). 2200 g. 

Ainsi en Angleterre, c'est moins dans la 
munificence du gouvernement que dans len- 
thousiasme patriotique des particuliers , que 
trouvent de brillantes récompenses ceux qui 
ouvrent de nouvelles routes à l'agriculture ou à 
l'industrie manufacturière. 

: Comment ce fermier Anglais, dont le nom 
est immortel , parvint-il à changer l’économie 
-rurale de sa patrie ? IL vit dans l'avenir la for- 
mation d’une race , en mariant ensemble, dans 
une longue suite de générations, des individus 
qui lui ont offert des variétés dont il a senti 
- l'utilité , telles, par exemple, que de petits os, 


(5) Plus de 50000 fr. de notre monnaie, 


de Lyon. 219 
des chairs volumineuses , une conformation fa- 
vorable à l'engraissement. Il a dispensé à ces 
individus le régime le plus propre à renforcer 
ces qualités, qui, primitivement , étaient les 
résultats du hasard : il a continué cette opération 
- pendant un quart de siècle , avec un soin scru- 
puleux et une persévérance à toute épreuve , et 
ses continuateurs ont hérité de son zèle et de 
sa constance. 

« Ne sait-on pas, dit l’auteur du nouveau 
» traité sur la laine et sur les moutons ( pag. 
» 6), que la puissance de l’homme est allée 
» jusqu'à modifier, dans sa conformation même, 
y le corps des animaux domestiques. Bakewell 
» n'a-t-il pas diminué de moitié le poids de la 
» charpente osseuse de la race des moutons qu’il 
» a formée, n'a-t-il pas doublé le poids de la 
» chair, et n'en a-t-il pas pétri les formés à 
» son gré? » | 

Ce cultivateur à jamais célèbre , n’a vu dans la 
race qui est sortie de ses mains, que des ani- 
maux très-précieux sous le rapport de la con- 
sommation. U n'avait sans doute pas prévu que, 
par un rapport physiologique difficile à expli- 
quer , à mesure que les os de ces animaux dimi- 
nueraient de volume et que leurs parties molles 
se développeraient outre mesure, on verrait leur 
laine s’allonger, s’affiner, participer , en quelque 


/ 

216 Société royale dA'ericulture 

sorte, des qualités de la soie ? Pouvait-il penser 
que cette laine acquerrait la longueur de 14 
pouces ? qu’elle serait propre à être travaillée au 
peigne et qu’elle servirait presqu’exclusivement 
à la fabrication des étofes en usage dans les cou- 
vens d'Espagne, des manteaux Écossais, des 
camelots, et de tous les genres d'étofles rases 
qui se font en Espagne? 

C’est, dit M. Camille Beauvais, à cette matière 
première , dont ils sont seuls en possession, que 
les Anglais doivent leur suprématie dans les 
marchés de l'Espagne et de ses riches colonies, 
du Portugal et de ses domaines maritimes ; ils 
en font des flanelles, des tricots et d'autres tissus 
que nous ne pouvons imiter avec nos laines de 
mérinos , et dont l’imitation d’ailleurs n'aurait 
rien d’économique. 

» Les brins de cette laine , ajoute M. Camille 
Beauvais , sont lisses et brillans , ils se prêtent 
sans eflort à l'action du peignage (1) qui les unit 
et les dispose tous dans un parallélisme égal ; 
Ja filature en est plus facile et moins coûteuse. 
Mise en écheveau ou prise sur la fusée, cette 
matière se dévide, s’ourdit , se ploie sur l’ensou- 
ple avec moins de frais et de déchet que la laine 


| 


(1) Dans cette opération on peut évaluer ses avantages à 
plus de 50 pour ?/, sur les nôtres. 


de Lyon. 217 
courte, parce qu'elle est sans adhérence , élasti- 
que et nerveuse. Ces caractères , qui ont rendu 
toutes les préparations désignées ci-dessus plus 
aisées, qui n’ont altéré le brin ni dans sa longueur 
ni dans sa circonférence , servent puissamment 
l'action du tissage , et c'est dans cette opération 
que se développent ses avantages incontestables. » 

» Filée, cette laine est rase est brillante, 
employée sur une chaîne de soie , elle n’en in- 
tercepte pas Péclat comme la laine courte, par 
des aspérités continuelles. » 

« C’est cette vérité matérielle qui rend le 
bombasin anglais brillant avec peu de soie ; c’est 
la même raison qui rend leurs étoffes pour gilets 
plus unies et plus éclatantes que celles qui se 
fabriquent en France: c'est enfin aux Longwoods 
que nos rivaux doivent l'avantage de pouvoir 
offrir à une infériorité de prix qui leur a livré 
‘tous les marchés de draperie commune dont 
nous étions en possession. » 

Nos éternels rivaux sont tellement jaloux de 
la race des moutons qui leur fournit une laine 
si précieuse , qu'ils ont porté peine de mort con- 
tre ceux qui en exporteraient un seul individu. 

D'après cette prohibition barbare , on pourrait 
croire qu'il n'existe pas en France un seul 
mouton Dishley , ainsi le croyait M. Camille 
Beauvais , cependant M. Vollaston a introduit 


Lettré de M. 
Terret , sur le 
même sujet. 


218 Société royale d'Agriculture 

cette race à Vassonville , près Dieppe : un déta- 
chement de son troupeau est nourri à l'école 
vétérinaire d'Alfort. M. le chevalier Hindenlang » 
filateur et fabricant de tissus de cachemire , a 
été chargé par le gouvernement de faire des essais 
de filature avec la laine de ces animaux, il l’a 
filée aux N.°% 45 et 50 et il l’a reconnue propre 
non-seulement aux étoffes auxquelles on l’emploie 
en Angleterre , mais encore à servir de chaîne 
dans la confection de nos tissus mérinos. 

M. Vollaston ne peut suffire à toutes les 
demandes qui lui sont faites; à sa dernière vente 
le prix des beliers a été de 1200 fr., celui des 
brebis de 600 f., et il sera forcé, dit-il, de 
tenter uue nouvelle importation pour recom- 
pléter son troupeau. 

Ainsi commence à s'introduire en France une 
race de moutons qui l'emporte peut-être sur 
celle des mérinos ; et qui bien certainement 
s'acclimaterait plus aisément dans notre dépar- 
tement que ne l'a fait la race espagnole. 


(Lyon , le 10 Mars 1825 ) « J'ai honneur 
de vous faire part des renseignemens que j'ai 
pris auprès de M. Pierre Crozier, négociant de 
cette ville , sur les moutons de Leicester. Vous 


:jugerez si ces renseignemens peuvent offrir quel- 


que chose d'intéressant, » 


RSS, LS es CR PS Se 


de Lyon. 219 

« M. Crozier , qui fait le commerce de com- 
mission pour l'Espagne, et qui a habité plusieurs 
années dans ce pays, a été à même d'apprécier 
la concurrence redoutable établie par les manu- 
facturiers Anglais, à égard de plusieurs branches 
de l'industrie Française. Leurs tissus soie et laine 
de Leicester qu’ils nomment bombasin, n’a même 
pu être imité chez nous, et trouve en Espagne 
une consommation énorme ; la régularité de 
cette laine, qui ne feutre ni ne frise point 
comme nos laines, permet à la soie qui sert de 
chaîne de briller de tout son éclat, elle ne la 
recouvre pas d'aspérités et de duvet. M. Crozier, 
jaloux d'introduire cette industrie dans son pays, 
présenta à plusieurs reprises à nos fabricans des 
échantillons de cette étoffe; leurs tentatives pour 
limiter furent infructueuses , ils étaient privés 
de la matière nécessaire et en ignoraient même 
l'existence. L'année passée M. Crozier étant à 
Paris, se procura , pour répondre au vœu de 
M. Beauvais, un échantillon de #ombasin. M. 
de Castelbajac et plusieurs membres du conseil 
des manufactures qui le virent, en admirèrent 
la beauté, et exprimèrent le vœu de voir in- 
troduire en France le précieux mouton qui four- 
nissait cette laine. M. Beauvais et deux ou trois 
autres négocians firent un fonds de 40,000 fr. , 
destiné à acheter un troupeau de moutons de 


220 Sociélé royale d'Agriculture 

Leicester , et cherchaïent un moyen pour assurer 
leur conquête, lorsque M. de Castelbajac reçut 
avis qu'un troupeau de trente moutons venait 
d'arriver à un port de France ( on ne sait si 
c'est Brest ou Calais ). Il communiqua cette 
nouvelle à M. Beauvais et à ses associés; on 
entra de suite en marché. Mais peu de jours 
après leur arrivée, un petit berger anglais en 
avait empoisonné la moitié, le reste assez mal 
portant fut conduit en Normandie dans un 
pâturage très-gras , et acheté par ces Messieurs. 
Ces détails, que M. Crozier tient de M. Beauvais 
lui-même , sont antérieurs à la publication de 
l'ouvrage de ce dernier. Je ne sais donc pourquoi 
M. Beauvais n’en fait pas mention et exprime 
seulement le vœu de voir cette race introduite 
en France. Ces animaux, m'a dit M. Crozier, 
sont élevés en Angleterre en plein air; on ne les 
ferme jamais , n'ayant à craindre aucune attaque 
de loups. Il est à remarquer, dit-il, que les 
bêtes à laine du nord ont le poil moins fin, 
moins dense, mais plus long que ceux des pro- 
vinces méridionales , dont le poil est touflu, 
adhérent et frisé , ce qu'il attribue à l'influence 
de la chaleur qui ouvre leurs pores, etentretient 
une transpiration habituelle ( chose que j'aban- 
donne à votre jugement plus éclairé que le nôtre 
en ces matières ). Il pense donc que l’éducation 


de Lyon. 221 
de cet animal réussirait mieux dans nos plaines , 
et de préférence dans le nord que dans le midi 
de la France, et il ne peut qu'applaudir à l’idée 
d'introduire cette race dans le royaume, où nous 
pourrons sans doute lutter avec succès contre 
nos voisins, dans un produit dont la consomma- 
tion est énorme. 

Agréez, Monsieur, etc. 


Quoique Part du boyaudier n'occupe pas une 
grande place dans le tableau de l'industrie lyon- 
naise, il n’est pas sans importance, et il est 
susceptible d'amélioration et de développement. 
Comme la théorie de cet art tient à la chimie, il 
a dû exciter l'attention de M. Tissier , qui ,après 
avoir bravé les émanations infectes qu'exhalent 
des fabriques très - justement rangées dans la 
première classe de celles à odeur insalubre, vous 
a fait part des observations qu’il a recueillies 
dans les boyauderies ; et d’abord il s’est étonné 
de n'avoir pas trouvé parmi ces établissemens 
une seule fabrique de baudruche pour le besoin 
des batteurs d’or dont la profession est si mul- 
tipliée à Lyon. 

Dans les vues d’atténuer autant que possible 
l'insalubrité des procédés du boyaudier , notre 
confrère a conseillé , et non sans quelques suc- 
cès, les moyens de désinfection inventés par 


Notice sur 
l'art du boyau- 
dier, à Lyon; 
par M. Tis- 


sier'e 


222 Société royale d'Agriculture 

M. Labarraque. On sait qu'ils consistent dans 
l'emploi du chlorure de chaux , et telle est l'efli- 
cacité de ce moyen , qu’il rend facile et prompte 
la séparation des membranes de l'intestin du 
bœuf , séparation qu'on n'obtient ordinairement 
que par une longue macération , accompagnée 
d'une fermentation putride également incom- 
mode et insalubre. 

L’usage aussi efficace qu'économique du chlo- 
rure de chaux n'est pas la seule amélioration re- 
commandée aux boyaudiers par notreconfrère. Si 
ces conseils étaient suivis, il en résulterait un 
heureux développement dans un genre d’indus- 
trie qui se borne, dans notre ville , à 9 établisse- 
mens , encore ne sont-ils pas anciens. En eñlet, 
un seul boyaudier existait à Lyon en 1770 , 
lorsque des Napolitains , fabricans de cordes à 
boyaux vinrent s’y établir. Les produits fournis 
par les fabriques de ce genre établies dans notre 
ville, sont bien au dessous de nos besoins. Il 
résulte en effet des recherches de M. Tissier , que 
les villes de Moulins , Besançon , Châlons , 
Grenoble , etc. fournissent à Lyon soixante 
mille boyaux secs ou soufflés , avec lesquels on 
fait environ vingt mille douzaines de cordes 
d'arçon. Les boyaux ont soixante pieds de lon- 
gueur , et les cordes seulement quinze; elles sont 
de trois grosseurs différentes ; les plus fines ont 


de Lyon. 223 
quatre fils, les moyennes six , les plus grosses 
quatorze. Le nombre de boÿyaux frais fournis 
par les bouchers de Lyon est de cent soixante 
mille, ils servent à la fabrication de cordes 
d'instrumens , et sont confectionnées dans huit 
fabriques dont M. Tissier a évalué les produits 
respectifs. Il nous apprend ensuite que chaque 
paquet de cordes à instrumens est de trente, 
qu'il se confectionne annuellement à Lyon soi- 
xante mille paquets de chanterelles, quinze mille 
de secondes, dix mille de troisièmes ; qu’il s'y 
fabrique aussi dix mille paquets de cordes pour 
les harpes, et six mille pour les basses et contre- 
basses ; enfin, ajoute M. Tissier, les villes de 
France où l'on fabrique les meilleures chante- 
relles sont Nantes, Nevers, Lyon ; cette der- 
nière ville en envoie dans toute la France , dans 
une grande partie de l'Europe et même en 
Amérique :elle s’est substituée à la ville de 
Naples d'où nous venaient jadis les plus belles 
chanterelles. 

M. Tissier a complété sa notice statistique sur 
Part du boyaudier à Lyon, en traçant l'état du 
mouvement de numéraire qui en est le résultat. 
Il s’est assuré que les boyaux pris à la bouche- 
rie pour être confectionnés , se payent annuel- 
lement 62,000 f., qu'ils sont livrés à quarante 
ouvriers dont la main-d'œuvre s'élève à 30,00of.; 


Usage del’é- 
corce de til- 
leul ; par M. 
Madiot. 


224 Société royale d'Agriculture 

les ateliers sont au nombre de huit , et leur 
location coûte 16000 f. , l'entretien de ces ateliers 
et des ustensiles s’élève à 6o0o f., on est obligé 
d'acheter du dehors des boyaux pour 2500of., 
total 149,000 f, ‘ 

Quant aux bénéfices , ils sont en chanterelles, 
en paquets de seconde, de troisième, de basses, 
en garnitures de basses , en cordes pour les cha- 
peliers , etc. , etc., de 398,000 f. 

Combien il serait à désirer que toutes les 
branches de notre industrie fussent examinées 
avec le même soin, et exposées avec la même 
clarté, nous connaîtrions dès-lors nos ressources, 
et nous saurions par quels moyens il est permis 
de les agrandir (r). 


Nous sommes loin de tirer parti de toutes 
celles qui s'offrent à nous daus les trois règnes 
de la nature. Tandis que M. Tissier calculait ce 
que nous retirons d’une substance animale, M. 
Madiot étudiait les avantages que nous pourrious 


obtenir d'une substance végétale , l’écorce de 


(2) La notice de M. Tissier sur l’art du boyaudier à Lyon 
appartenant à la statistique , eût dû, ce semble, être placée 
“dans le chapitre que nous avons consacré à cette partie ; 
mais comme nous ne l’y avons traitée que dans ses rapports 
avec l’agriculture du département, c’est au chapitre des arts 


utiles que nous ayons dû comprendre le travail de M, Fissier. 


de Lyon. 225 
tilleul. Ayant fait couper par rondins de quatre 
mètres de longueur un tronc de tilleul , ïl en 
fit enlever l'écorce et la fit rouir pendant trois 
mois. Après ce temps il put en séparer 114 la- 
nières rubannées superposées entr’elles. Ce nom- 
bre annonçait, selon M. Madiot , celui se an- 
nées que l'arbre avait vécu. 

Les lanières les plus voisines du bois sont les 
plus fines, on s’en est servi pour fabriquer des 
chapeaux, des gilets, des coffrets, des sacs à 
ouvrage, de petits nécessaires d’un fort bon 
usage, et on a pu donner à ces objets les cou- 
leurs les plus variées : l'écorce de tilleul pre- 
nant facilement toutes les teintures. 

Des mariniers ont assuré à M. Madiof que 
des cordes et des cables fabriqués avec cette ma- 
tière duraïent plus long-temps dans l'eau que 
ceux que l’on fait avec du chanvre. 

Depuis vingt ans notre confrère se sert des 


lanières de l'écorce de tilleul pour maintenir les 


appareils des greffes. C’est selon lui le lien le 


plus avantageux pour cette opération délicate. 


Le Chalef, £lœagnus anguslifolius, cet arbuste 
dont le port est si élégant, et dont les fleurs 
exhalent pendant dix-huit à vingt jours un par- 
fum si suave, a procuré à M. Madiot une li- 
queur de table d’un goût agréable et bonne pour 

19 


Sur une li- 
queur de table - 
qu’on peut ob- 
tenir du chalef; 
par le méme. 


226 Société royale d'Agricullure 

l'estomac ; il conseille de la fabriquer ainsi : on 
récolte au commencement de mai les fleurs de 
chalefs , on les jette dans de l'eau-de-vie à la 
dose d'une poignée par litre , on laisse macérer 


* pendant quatre à six semaines , selon la tempé- 


Sur l'huile de 
pepins de rai- 
sin ; par M. 
Batillat , cor- 
respondant, 


rature , on passe ensuite à travers un tamis, et 
on verse dans de nouveaux flacons, en ajoutant 
par litre un quart de livre de sucre. La liqueur 
prend une teinte rousseâtre, elle exhale une 
odeur agréable, et déjà on peut en user; mais 
elle acquiert des qualités en vieillissant, pourvu 
qu'on la conserve dans des vases hermétique- 
ment fermés. 


Il y a quelques années que la proposition vous 
fut faite d'extraire de l'huile de pepins de 
raisin comme on le pratique dans le Padouan 
et même en France dans les environs d'Avignon 
et d'Albi, vous priâtes MM. de l’Ecluse et le 
docteur Terme de se livrer à quelques essais à ce 
sujet. Les résultats n'en furent pas très-satisfai- 
sans, et l'huile de pepins de raisin fut oubliée. 

Cependant M. Chancey ayant pensé que le dé- 
faut de succès pourrait bien être dû à une ma- 
nipulation imparfaite, s’est informé si ailleurs 
on n’avait pas été plus heureux, il a su qu'un 
chimiste agronome que vous avez nouvellement 
admis parmi vos correspondans , M. Batillat, de 


de Lyon. 227 
Mâcon, avait fait sur le même objet une com- 
munication à la société des sciences et agricul- 
ture de cette ville. Il s’est empressé d'écrire à 
M. Butillat , qui lui a envoyé, pour vous être 
soumis , des détails précis sur l'extraction de 
Phuile dont il s'agit. C'est très-brièvement que 
la société de Mâcon a rendu compte de cet 
objet (1). Comme vous paraissez, Messieurs, et 
non Sans raison , y mettre de l'importance, je 
remplirai vos intentions en insérant ici textuelle- 
mént la lettre de M, Batillat à M. Chancey. 

« ( 17 juin 1824.) L'année dernière, je con- 
seillai à un distillateur intelligent de séparer les 
pepins de ses marcs de raisin , avant de les dis- 
tiller , parce que c'est à eux qu'est dû en grande 
partie, le goût détestable d’empyreume des eaux- 
de-vie extraites de ces marcs par les anciens 
procédés, je lui fis observer que le temps donné 
à ce travail serait plus que compensé par l’éco- 
nomie de celui qu’il emploirait à chauffer inu- 
tilement ces pepins, sans compter le com- 
bustible perdu dans cette circonstance. Je lui 
conseillai d'extraire de ces pepins l'huile qu'ils 
contenaient (j'ignorais que la société d'agriculture 
de Lyon s'était occupée du même objet), il 


mn 


(1) Compte rendu de la société des sciences » agriculture 
et arts de Mâcon , 1823, pag. 14. 


228 Société royale d’Agriculturé 

suivit mon conseil, et fit cribler (au moyen d'un 
crible de peau parcheminée) quatre tonneaux de 
marc de raisin, dont il retira un tonneau de 
pepins ; l’ouvrier , je crois, aurait pu , avec un 
peu plus de soin, en retirer un tiers de plus: 
cette opération a duré un jour. Je dois dire qu'il 
en est résulté une diminution dans la quantité 
d'alcool ; c'est sans doute parce que, pendant 
le criblage, le marc s'est un peu desséché. » 

» Ces pepins (on a négligé de les peser ), ont 
été bien vannés et exposés quelques jours à l'air 
libre, on les a portés ensuite au moulin à huile 
pour être écrasés comme les autres semences 
oléagineuses, après les avoir légèrement torré- 
fiés dans une chaudière, on les a soumis à l'ex- 
pression, et on a retiré huit kilogrammes d'huile. 
Les frais d'extraction se sont montés à 65 cent. 
par kilogramme. Cette huile , après quelque 
temps de repos, s’est montrée limpide, d'un 
jaune verdâtre , restant fluide à plusieurs degrés 
au-dessous de zéro, ayant un goût particulier 
( provenant peut-être en partie du moulin où elle 
a été faite) qui la fera repousser de la table du 
riche, mais non de celle du cultivateur qui en 
consomme souvent qui lui est très - inférieure. 
Rozier dit que l’huile de pepins qui n’a pas été 
chauffée vaut mieux à tous égards que l'espèce 
d'huile d'olive qu'on vend à Paris 15 qu 18 sous 


de Lyon. 229 
la livre : il y a cinquante ans qu'il tenait ce 
langage. » 

» L'huile de pepins brûle avec une belle 
flamme , sans odeur et presque sans fumée, 
surtout , selon Rozier , quand elle est vieille ; ce 
qui serait étonnant, car toutes les autres se 
comportent en sens inverse ; mais cela ne pro- 
viendrait-il pas de ce qu’elle est longue à se dé- 
purer , et que la première brülée par l’agronome 
lyonnais ne l'était pas encore? On la dépure en 
la faisant passer, comme je l'ai fait, à travers 
des filtres de papier. Elle se saponifie parfaite- 
ment : le savon que j'en ai obtenu dans le temps, 
était solide et peu coloré, ayant été fait en petit; 
il est actuellement ( 18 mois après sa prépa- 
ration } très-jaune et moins consistant. » 

« Cette huile est très-fixe ; j'en ai fait chauffer 
une once , dans une capsule de verre, pendant 
une heure, à une chaleur de 80 degrés Réau- 
muriens , elle n’a perdu que 5 grains. » 

» Le pain qui reste après l'expression est 
très-volumineux. C'est un bon combustible ; une 
fois en charbon, il se réduit lentement en cendres 
alcalines. Ce n’est cependant pas dans l'extraction 
de la potasse qu'elles contiennent que consisté | 
la principale utilité de ce marc ; comme il 
contient encore beaucoup de parties huileuses, 
ce qui est prouvé par sa combustibilité, on 


230 Société royale d'Agriculture 

pourrait en former un savonule liquide par 
l'addition d'une lessive alcaline de cendres décar- 
bonatées par la chaux, et on s’en servirait pour 
le blanchissage du linge. » 

» Rozier dit qu'après avoir exprimé de ce 
marc l'huile vierge , on en obtient d’une autre 
qualité , en le faisant chauffer dans une chau- 
dière avec un peu d'eau , et le soumettant en- 
suite à une expression nouvelle; c’est une expé- 
rience que je n'ai point faite ; il dit aussi que 
l'huile tirée des pepins du marc qui a servi à 
faire le petit vin est plus douce que l’autre. » 

» Ïl sérait donc avantageux pour les cultiva- 
teurs de cribler les marcs de leurs vendanges 
après en avoir tiré le petit vin ; c’est une opéra- 
tion qu'ils pourraient renvoyer à un moment 
où les travaux de leurs vignes sont suspendus, 
et ils pourraient se procurer, par ce moyen, 
leur provision d'huile , tant pour l'éclairage que 
pour la préparation des alimens, à 70 cent. le 
kilogramme , en supposant que la journée payée 
pour monder un tonneau de pepins valût 1 fr. 
60 centimes. » 

» J’ai dit que chaque vigneron pourrait retirer 
sa provision d'huile de ses pepins. Voici mon 
calcul : » 

» Il reste sur le pressoir à peu près un ton- 
neau de marc sur sept pièces de vin, ce qui fait 


de Lyon. 231 
un tonneau de pepins sur vingt-une pièces, 
récolte ordinaire d’un simple vigneron ; il pour- 
rait retirer de cette quantité de marc seize livres 
d'huile. » 

» En prenant ce calcul pour base , il en ré- 
sulterait que de la masse de pepins de quinze 
millions de pièces de vin qui se récoltent en 
France, on retirerait environ 71,389 tonneaux 
de pepins qui fourniraient 1,142,004 liv. d'huile, 
qui, au prix de 75 cent. produiraient une va- 
leur de 856,670 francs. » 


Sur les ponts 
en fil de fer; 
par M. Seguin 

“ainé; rappor- 
teur M. Co- 
chard. 


232 Société royale d'Agriculture 


RAPPORTS. 


A l'appui de la demande qu'il avait formée 
de vous appartenir, M: Seguin vous a adressé 
un ouvrage de sa composition sur lequel M. 
Cochard vous a fait un rapport tellement sub- 
stantiel que je crois devoir le reproduire ici 
textuellement : 

« L'invention des ponts de fer , que les Anglais 
ont voulu s'approprier, parce que les premiers 
ils en ont fait usage, est cependant due à un 
peintre lyonnais qui , vers le milieu du dernier 
siècle , conçut le projet d'un pont de cette na- 
ture, destiné à remplacer celui nommé de St- 
Vincent , sur la Saône. Il eut été d'une seule ar- 
che, et devait avoir 254 piedsdelong sur 18 pieds 
6 pouces de large. Mais ce projet eut le sort 
qu'ont en France la plupart des inventions nou- 
velles , on le rejeta, il fallut l'exporter en An- 
gleterre pour lui donner cours , et ce n'est 
qu'après y avoir obtenu une grande faveur qu'il 
a été réimporté en France et accueilli d'une 
manière distinguée. Il semble que nous ne sau- 
rions adopter aucune découverte utile qu’elle 
n'ait préalablement reçu la sanction anglaise. 
Quoi qu'il en soit, ce fut en 1793, à une. 


de Lyon. 233 
époque où la France était plongée dans la plus 
affreuse anarchie, qu’un citoyen de Londres, 
un membre du parlement (M. Burdon ) fit 
exécuter à ses frais, un pont sur la rivière de 
Warmouth , partie en fer forgé, partie en fer 
fondu ; il avait 236 pieds de long sur 30 de 
large; et ne comportait qu'une seule arche de 
217 pieds d'ouverture. Le succès de cette entre- 
prise a engagé le gouvernement français à éta- 
blir, au retour de l'ordre, un pont aussi en 
fer, dans la capitale; mais les dépenses énormes 
qu'entraîne l'érection de semblables monumens 
n'ont pas permis de les multiplier. » 

» M. Seguin, né dans une ville qui s'honore 
d’avoir produit les Montgolfier et une foule 
d'autres savans, a cherché à perfectionner le 
système des ponts en fer, et à rendre ce mode 
de communication plus facile et moins dispen- 
dieux : dans cette vue, il a imaginé de substi- 
tuer aux bacs qui offrent de grands inconvéniens , 
les ponts suspendus , tels qu’on en voit dans 
quelques contrées de l'Amérique : il s'est prin- 
cipalement attaché à leur donner toute la solidité 
convenable, et toute l'élégance dont ce genre d’ou- 
vrage est susceptible, sans nuire à la navigation. 
Ce n'est qu'après une suite de calculs et d’expé- 
riences que M. Seguin , s’est déterminé à solliciter 
du gouvernement l'autorisation de construire un 


234 Société royale d'Agriculture 

pont en fil de fer. Ce pont, seulement à l'usage 
des piétons serait jeté sur le Rhône entre Tain 
et Tournon, et servirait à la communication 
des deux rives; le concessionnaire ne deman- 
derait pour le remboursement de ses avances 
qu’un péage extrêmement modéré, et pendant 
un temps fixe. » 

» VL. Seguin, que le sentiment des arts et le 
besoin d’être utile à sa patrie, guide uniquement, 
a voulu éclairer le public et appeler l'attention 
des hommes instruits sur l'innovation heureuse 
qu’il cherche à introduire. » 

» Il a publié dans cette vue l'opuscule dont 
nous rendons compte. » 

» Après avoir énuméré les divers ponts sus- 
pendus qui, dans lintervalle de quelques années 
ont été confectionnés soit en Angleterre , soit en 
Amérique , M. Séguin parle de l'essai qu'il a fait 
de son système, en élevant pour le service de 
sa maison d'Annonay , un pont qui a 55 pieds 
de long sur 18 pouces de largeur ; cette cons- 
truction qui est solide n'a coûté qu'environ 5of., 
et n'a exigé depuis plus d’un an aucune répara- 
tion quoiqu'il ait été visité et éprouvé par plus 
de vingt mille personnes. » 

» Ce fait, qui seul suffirait pour donner l’idée 
la plus avantageuse de la méthode de M. Seguin, 
est encore confirmé par l’exemple d'un autre 


de Lyon. 233 
pont établi à Genève, d’après les mêmes prin- 
cipes, etquia parfaitement réussi. Les détails 
dans lesquels entre notre auteur sur les culées , 
sur les amarres , sur la résistance des fers, sur 
la forme des planchers , sur les moyens de sus- 
pension , etc. annoncent avec quelle exactitude, 
quels soins, quelle sagacité il a procédé à ce 
qui est relatif à ce nouvel art. » 

» L'ouvrage de M. Seguin , écrit avec clarté 
et précision, ne laisse rien à désirer. Nous di- 
rons même que l’administration des ponts et 
chaussées , après un examen approfondi, s’est 
empressée d'accueillir les projets de l'auteur. Le 
modèle d'un pont en fil de fer qu’il a présenté 
à l'exposition publique des produits de Pindustrie 
a obtenu une médaille d'honneur. Enfin, nous 
avons la certitude que la demande de M. Seguin 
a été admise par le gouvernement , et qu’un 
pont construit d'après son système, unira Tain 
et Tournon. » 

» M. Seguin est encore parvenu à former une 
compagnie pour établir un pont de même nature 
entre S.* Colombe et Vienne. Il y a lieu de 
présumer que le gouvernement favorisera un 
projet qui est dans l'intérêt public ; et si, comme 
tout porte à le croire ,ces deux ponts remplissent 
l'objet qu'on s’est proposé, si les voitures les plus 
pesantes peuvent passer facilement sur celui de 


Sur une é- 
chelle graduée, 
inventée par 
M. Chambey- 
ron; méMmerap- 
porteur. 


236 Société royale d'Agriculture 
Vienne , si la dépense qu’un pareil ouvrage oc= 
casionera n'est point trop exhorbitante , et que 
les droits de péage puissent la couvrir, bientôt 
d'autres communications s'ouvriront sur divers 
points. L'industrie , le commerce, l'agriculture 
vivifiés par ces débouchés inattendus , prendront 
un plus grand essor , et l’on verra se développer 
des germes nombreux de prospérité publique. » 
» I paraît que les ponts suspendus le sont en 
Angleterre, au moyen de chaînes de fer ; ceux 
que propose M. Seguin doivent l'être en fil de fer ; 
les expériences auxquelles ce savant s’est livré , et 
dont son ouvrage rend compte, prouvent jusqu’à 
l'évidence les avantages de son innovation. » 
Les conclusions du rapport de M. Cochard 
ont été très-favorables à la demande de M. Seguin, 


_et vous vous êtes empressé d'admettre dans votre 


sein un mécanicien si recommandable. 


Le génie de la mécanique , celui de la trigo- 
nométrie n’éclatent pas seulement chez des per- 
sonnes qui , comme M. Seguin, ont pu déve- 
lopper, par une éducation libérale , les heu- 
reuses dispositions qu'ils ont reçues de la nature ; 
on a vu des hommes sans lettres inventer des 
machines , des instrumens qui semblent sup- 
poser de grandes et profondes connaissances ; 
parmi ces êtres privilégiés est un jeune homme 


de Lyon, 237 
mwommé Chambeyron qui, né dans un village 
voisin de S.® Colombe, et n’ayant reçu aucune 
espèce d'instruction , montra tout-à-coup un 
goût décidé pour la géométrie, il se livra presque 
sans aide à l'étude de cette science, et avec tant 
d'ardeur et d’opiniâtreté qu’il mérita d'être em- 
ployé au cadastre, soit dans le département du 
Rhône, soit dans celui de la Loire; il a fabriqué 
avec précision tous les instrumens dont il se 
sert, notamment une espèce d'échelle graduée 
pour calculer avec facilité , rapidité , exactitude, 
les polygones d'un plan géométral. M. Cochard 
a mis cet instrument sous vos yeux, et il vous 
en a présenté la description. C’est une glace 
transparente gravée, représentant un parallélo- 
gramme d’un décimètre carré, faisant à l'échelle 
d’un à 2,500 mètres une superficie de 6 arpens 
25 perches métriques. 

Ce parallélogramme est divisé en cinq carrés 
égaux , indiquant chacun 50 mètres de chaque 
côté , et une surface de 25 perches carrées ; chaque 
carré de 25 perches superficielles est subdivisé 
en 25 petits carrés de 10 mètres de chaque côté, 
valant chacun une perche carrée. Ainsi, cet 
instrument offre à la fois la division en carrés 
du premier ordre et en carrés du deuxième ordre; 
il est construit de manière qu’un homme non 
exercé et dénué de connaissances en géométrie 


238 Société royale d'Agriculture 

obtiendra la connaissance d'un polygone quel- 
conque avec autant de précision qu'à l’aide du 
compas et de l'échelle, et il pourra ainsi faire 
en moins de deux heures une opération qui 
exigerait par les procédés ordinaires une journée 
entière. | 

La manière de se servir de l'instrument est 
fort simple : lorsqu'on veut calculer une des 
figures d’un plan , on applique dessus le côté 
gravé de l'instrument , on compte d’abord le 
nombre des carrés pleins du premier ordre qui 
se trouvent entièrement compris dans l’intérieur 
des polygones ; ensuite , se reportant sur le con- 
tour de la figure, on ajoute au premier résultat 
le nombre des carrés du deuxième ordre qui se 
rencontrent , et s’il reste des parties du polygone 
qui n'occupent pas en entier un des petits carrés, 
s'ils en prennent une plus grande ou une moindre 
superficie , il est aisé, par des compensations 
approximatives , de se procurer la véritable 
valeur. 

Plusieurs géomètres ont adopté cet instru- 
ment , et il est mis en usage dans quelques en- 
droits. 

M. Cochard ne doute pas qu'il ne pût rem- 
placer avec avantage les papiers huilés dont on 
se sert dans la fabrique des étoffes de soie pour 
la mise en carte des dessins. 


de Lyon. 239 
Le jeune Chambeyron a encore imaginé une 


machine propre à casser les noix, fort ingé- 


nieuse, et qui peut offrir des avantages :en 
voici la description d'après M. Cochard': & Sur 


» 


» 


quatre piliers d’environ 7o centimètres de 
hauteur, et ayant 5 centimètres d'épaisseur , 
assemblés par huit traverses que lient en- 
semble quatre panneaux , s'élève une caisse 
destinée à recevoir les noix ; elles tombent 
par une ouverture pratiquée au fond de cette 
caisse , et rencontrent deux cylindres canelés, 
soutenus par les panneaux. On les éloigne 
ou rapproche à volonté, selon la grosseur 
des noix ; ils sont mus par une manivelle 
et cassent les noix, au fur et à mesure qu’elles 
sortent de la caisse. Les noyaux sont reçus 
dans un tiroir placé au-dessous. » 

» Cette machine bien simple et peu coûteuse 
procure donc le moyen de casser les noïx beau- 
coup mieux et en moins de temps qu'avec le 
marteau , et de les choisir plus aisément ; il 
en résulte même un bénéfice de quatre pour 
cent sur les produits de l'opération parce que 
rien n’est perdu. 


Sur une ma- 
chine hydrau- 
lique, présen- 
téeà la Société; 
rapporteur M. 
Bouchard- 
Jambon, 


240 Société royale d'Agricullure 

Un autre mécanicien , comme Chambeyron ; 
étranger aux lettres, mais moins heureux que 
lui, a présenté à la société une machine by- 
draulique qu’il a cru nouvelle. Ce mécanicien 
se nomme Benoît Miniot, de la commune des 
Avenières, canton de Morestel , dép. de l'Isère. 

Chargé de l’examen de cette machine conjoin- 
tement avec MM. Jacquard et Muthuon , M. Bou- 
chard-Jambon a reconnu qu’elle ne paraissait 
pas différer de plusieurs autres inventées depuis 
très-long-temps. Telle est celle décrite dans 
l'ouvrage de M. Belidor , qui fut construite par 
ordre du ministre Colbert , et dont l'auteur, 
nommé Francini, qui en fit l'essai dans le jardin 
de l'ancienne bibliothèque du Roi , en 1668 , ne 
la donna pas comme une nouveauté , seulement 
il en fit une application utile. M. Bouchard- 
Jambon a encore trouvé la description d’une 
machine semblable dans un ouvrage intitulé : 
Thédtre des instrumens mathématiques de Jacques 
Besson, Dauphinois , docteur mathématicien , 
Genève et Lyon, 1604. On en faisait usage pour 
monter de la terre qu'on faisait charger à bras 
d'hommes des fossés des fortifications, pour la 
transporter sur le sommet ou derrière les rem- 
parts. 

L'ouvrage de M. Grolier de Serrières ,imprimé 
en 1741, donne aussi la description d'une ma- 


de Lyon. 243 
chine hydraulique placée sur un courant d'eau , 
qui étant construite d'après le même principe 
que celle de M. Miniot, donne des résultats 
semblables. 

Plusieurs membres de la société ont vu dans 
le midi de la France des machines à godet et à 
chaîne à la Vaucansen, qui sont employées à 
l'arrosage des prairies, et dont le principe de 
construction est semblable à celui de la machine 
de M. Miniot. 

Au reste , quels que soient les avantages de 
ces machines, M. Bouchard-Jambon pense qu'ils 
sont au-dessous de ceux qu’on obtient des pompes 
perfectionnées. Quant à M. Winiot , il a, selon 
M. le rapporteur, le mérite d'avoir parfaitement 
exécuté une machine déjà connue. On peut 
ajouter que ce mécanicien, manquant d'érudi- 
tion, a pu n'avoir aucune connaissance des 
machines citées par M. le rapporteur , et dès- 
lors il se serait rencontré avec leurs inventeurs 
plutôt qu'il ne les aurait imités. Dans tous les 
cas, la société voulant donner un témoignage 


d'estime à M. Miniot, lui a accordé un jeton 
d'argent. 


Vous avez décerné , Messieurs, une autré 
récompense à M. Georges , fabricant de tricots 
en soie. Ses titres à cette distinction vous ont été 


exposés par M. Gensoul, au nom d’une com- 
16 


Sur un métier 
de M. Georges 
fabricant d’é- 
toffes de soie; 
rapporteur M, 
Gensouls 


Sur les eaux 
minérales arti- 
ficielles fabri- 
quées par M. 
Laville Dela- 
plaïgue; 

Rapporteur 
M, Fauché. 


242 Société royale d’Agricullure 
mission dont les autres membres étaient MM. 
Jacquard, Cochard et Grognier. 

M. le rapporteur n'a pas cru devoir détailler 
les différentes pièces qui composent lingénieux 
métier de M. Georges, il s'est contenté de dire 
qu'il est très-simple , d'un entretien facile et 
qu'il accélère beaucoup le travail. M. Georges a 
fabriqué en présence de la commission ; des tri- 
cots imitant la dentelle, d'un riche dessin, et 
d’un très-bon goût ; il lui a montré des robes, 
des voiles, des schalls de la plus grande élégance, 
et dont l'exécution a paru parfaite. La célérité 
avec laquelle il fabrique tous ces articles lui 
permet de les livrer au commerce à un prix 
modique , et fait espérer que l’on en fera une 
grande consommation. C’est par de semblables 
succès que nous pourrons triompher de la riva- 
lité anglaise qui menace l'industrie de la France, 
et plus particulièrement celle de Lyon. 

La commission a conclu à ce qu'une grande 
médaille d'argent fût accordée à M. Georges, et 
cette proposition a été unanimement adoptée. 


Üne invention d’un tout autre genre vous a 
été signalée par M. le chevalier Fauché: celle de 
plusieurs machines et appareils heureusement 
imaginés par M. le docteur Zaville Delaplaigne 
pour la fabrication des eaux minérales et l'ad- 
ministration des douches et des bains miné- 


de Lyon. 243 
raux artificiels, objet pour lesquels ce médecin 
a obtenu un brevet d'invention et de perfec- 
tionnement. Sans attendre que le délai de ce 
brevet füt expiré, l'auteur a consigné ses pro- 
-cédés et leurs résultats dans un mémoire dont 
il vous a fait hommage, Chargé de vous en 
rendre compte, M. Fauché ne s'est pas contenté 
de lire attentivement l’ouvrage, il s’est encore 
rendu dans l'établissement qui y est décrit, et 
il s’est assuré , par ses yeux, de l'exactitude ri- 
goureuse de tous les faits avancés. 

« Cet établissement, dit M. le rapporteur, 
est conçu sur un plan très-vaste ; on y fabrique 
des eaux minérales à prendre en boissons, on 
y donne des bains et des douches; on y admi- 
nistre des bains fumigatoires. » 

» En sa qualité de médecin , M. ZLaville 
Delaplaïigne peut diriger l'emploi des moyens 
thétapeutiques de sa création , il possède en outre 
des connaissances en mécanique , et il en fait 
de nombreuses applications dans l'atelier qu'il a 
formé. Il emploie à la fabrication des eaux fac- 
tices potables, dés machines françaises douées 
d’une force de compression telle qu'elles peuvent 
imprégner l’eau de 24 fois son volume de gaz 
acide carbonique, 22 fois de gaz oxigène, et 
dans une pareille proportion de tous les autres 
fluides aériformes , suivant leur degré de com- 


’ 
244 Société royale d'Agriculture 
pressibilité et de leur affinité pour l'eau. Cette 
force est à la machine de M. Paul , regardée 
comme extraordinaire à l’époque de sa publica- 
cation , comme 4 est à 1 & 4:1.» 

» Ces eaux étant fabriquées , l'auteur adapte 
au récipient ordinaire un nouveau récipient dont 
la surface intérieure est revêtue en platine de 
manière à former un appareil qui réunit les 
moyens de la machine pneumatique aux efforts 
de la presse hydraulique. Cet appareil est disposé 
de manière à remplir et à boucher en même temps 
les bouteilles à livrer au public, sans perte d’eau 
ni de gaz, et sans danger pour l'opérateur quand 
bien même les bouteilles viendraient à se briser, » 

» Pour composer les eaux destinées aux bains 
ou douches, au lieu d'ajouter à l'eau d’une bai- 
gnoire les sels ou autres substances à dissoudre, 
il a en réserve des dissolutions de chaque sel; il 
les mélange , au moment d’en faire usage , dans 
un réservoir plein d'eau commune élevée à la 
température ordinaire du bain à prendre ; etau 
moyen d’une ramification de son appareil com- 
pressif il y fait passer le gaz que l’eau minérale 
doit contenir. Elle est conduite presqu’en même 
temps au moyen de tuyaux à robinet dans des 
baignoires assez bien closes pour empêcher que des 
vapeurs en s’exhalant des bains n'incommodent 
les malades. Si c'est en douches que l’eau mi- 


de Lyon. 245 
nérale est prescrite, on l'élève par une pompe 
foulante au faîte de la maison , d'où elle descend 
sur le corps soumis à son action , avec plus ou | 
moins de force , suivant qu’on la livre à son poids 
paturel, ou que l’on en modifie le cours au moyen 
de soupapes, et encore suivant la forme de la pièce 
amovible qui termine le conduit ; on se procure 
une douche en filet , en colonne, en conque, en 
arrosoir, ou même sous forme d'injection pour 
l'oreille, l'œil, l’urètre, lutérus, l'anus, etc. 
M. Delaplaigne a aussi construit des bains de 
vapeurs ; il croit avoir apporté d'importantes 
améliorations dans la manière de chauffer sa 
caisse fumigatoire , considérant comme dange- 
reux et ayant donné lieu à des accidens graves 
les appareils à la Darcet. Je dois toutefois à la 
vérité, d'affirmer que dans une pratique de plu- 
sieurs années avec ces derniers appareils, je n’ai 
observé aucun des graves accidens qu'il si- 
gnale , quoique les malades se soient trouvés 
dans un état d’excitation contre lequel M. Dela- 
plaïigne veut qu'on se prémunisse. Bien mieux, 
j'étais porté à penser , et je crois avec l’auteur 
de l'article Bains de vapeurs , au dictionnaire des 
sciences médicales, que cette excitation était elle- 
même un des bons effets de la médication par 
les vapeurs, puisque ce n’est point parce que la 
œaisse est placée au-dessus d'une plaque de fer 


246 Société royale d'Agriculture 

échauflée qu'elle a lieu, mais par la seule élé- 
vation de la température. Or , n’est-ce pas là une 
des conditions essentielles de ce genre de médi- 
cation ? Quoiqu'il en soit , si par les moyens 
ingénieux que M. Delaplaigne a imaginés pour 
établir ses appareils fumigatoires , il a conservé 
les avantages reconnus des appareils de M. Dar- 
cet, il aura produit un effet très-heureux sur 
l'esprit de la plupart des malades, des femmes 
surtout, lesquelles manifestent assez souvent 
des inquiétudes, quoique sans fondement , en 
entrant dans une caisse faite de bois , placée au- 
dessus d’un fourneau qui est allumé. » 

« Enfin, on peut prendre chez M. Delaplai- 
gne des bains à la manière des Russes. On sait 
que dans ces sortes de bains le malade passe 
graduellement d'une température très-chaude à 
une température très- froide, et ces divers degrés 
de température, M. Delaplaigne sait les détermi- 
ner el y soumettre ses malades par des moyens 
ingénieux, » 

Les procédés de ce médecin sont donc dignes 
des suffrages de la société, et le mémoire dans 
lequel ils sonit- décrits doit être honorablement 
mentionné : telles sont les conclusions de M. le 
rapporteur ; elles sont accueillies à l’unanimité. 


de Lyon. 247 

Un autre rapport , mais d'un intérêt plus gé- 
néral , a été présenté par M. le comte de Moi- 
dière. W avait pour objet le procédé que propose 
: M. le comte Dejean, directeur général des vivres 
de l'armée, pour la conservation illimitée des 
grains et farines. 

Le but de ce procédé est, comme on le sait, 
de mettre en réserve pour les années de disette la 
surabondance de récoltes qu’ofirent les années 
fertiles. 11 est à remarquer que c'est précisément 
quand les graines céréales sont le plus abon- 
dantes, que leurs qualités sont les meilleures 
et leur conservation la plus facile. Les altéra- 
tions qu’elles peuvent subir tiennent à l'alterna- 
tion du chaud, du froïd, de la sécheresse , de 
l'humidité, C’est afin de les dérober à cette in- 
fluence que l'on inventa autrefois ces espèces de 
souterrains exactement bétonnés, que les Arabes 
out nommés silos, et dont on s'est ressouvenu 
après la disette de 1816. 

Aux silos des Arabes, M. Dejean veut qu'on 
substitue des cylindres en plomb , pouvant con- 
tenir chacun 80 hectolitres de blé. Les motifs 
de la préférence qu'il donne à ces cylindres se 
fondent sur plusieurs expériences dont les résul- 
tats sont judicieusement appréciés par M. de 
Moidière ; mais une question s'est présentée à 
Vesprit de M. le rapporteur : c’est celle de l'éco- 


Procédé pro- 
posé par M. le 
comte Dejean, 
pour la con- 
servation des 
grains et fa- 
rines ; 

Rapporteur 
M. Ofhon-de- 
Moidière. 


548 Société royale d'Agriculture 

nomie ; et à cet égard il s’est livré à des calculs 
qui n'ont pas été défavorables au système de 
M. Dejean. En effet, les silos construits à Phô- 
pital St-Louis à titre d'expérience , ont, à raison 
de leurs dimensions, occasioné une dépense qu’on 
peut évaluer à 9f. 6oc. pour l'appareil occupé 
par chaque hectolitre de blé, tandis que les cy- 
lindres de plomb présenteront une économie de 
3£. 20 c. pour chaque capacité d'hectolitre ; mais 
une soumission toute nouvelle, présentée au mi- 
nistre de l'intérieur , a pour objet la construction 
des silos ordinaires , avec une économie qui ne 
laisserait aux vaisseaux métalliques de M. Dejean 
qu'une diminution de 67 centimes par hectolitre 
de blé, et ce bénéfice n'est-il pas balancé, pour 
ne rien dire de plus, par la nature des fosses en 
pierre et en béton, lesquelles n'éprouveront 
aucune altération , aucun déchet, tandis que , du 
propre aveu de M. Dejean , ces silos métalli- 
ques ont, au bout de quatre ans, perdu de leur 
poids 200 kilo. sur 1600 ? 

Dans tous les cas, les silos métalliques ou 
non sont des établissemens dignes de la haute 
sollicitude du gouvernement , mais qui ne sau- 
raient offrir à de simples particuliers des objets 
de spéculation, C’est par cette réflexion que 
M. de Moidière a terminé un rapport qui n'a 
pas été entendu sans intérêt. 


de Lyon. 249 

Parmi les rapports que vous devez à M. Fais- 
solles , il en est un -qui intéresse l'industrie 
lyonnaise : il a pour objet des brevets d’inven- 
tion accordés à des fabricans de notre ville. On 
sait que les procédés spécifiés dans ces sortes de 
brevets sont, après un certain temps , rendus 
publics, et que leur description détaillée cons- 
titue un ouvrage périodique imprimé par les 
ordres du gouvernement, C’est dans le volume 
de ce recueil publié pour 1823, que M. Faissolles 
a recueilli les titres de quelques fabricans lyon- 
nais à l'estime et à la reconnaissance de leurs 
concitoyens. 

Les uns , tels que MM. Jolivet et Cochet ont 
amélioré la fabrication du tricot à doubles mailles 
fixes , et ils ont obtenu cet important résultat 
en disposant d'une manière ingénieuse les ai- 
guilles, tant dans la première que dans la se- 
conde fonture. 

M. Janin fabrique des tulles et autres tricots 
à jour, au moyen d’un mécanisme de son in- 
vention, dans lequel se trouve changée la forme 
de ce qu'on appelle la #ayomnette et les pointes. 

MM. Dutillieu et Théoleyre sont parvenus à 
imiter avec de la soie la laine d'agneau d’As- 
tracan ; ils en ont fait des peluches , et, pour 
en faire friser le poil , ils ont imaginé un lami- 
noir à deux rouleaux ; lun en métal, l'autre 


Description 
desmachinesét 
procédés spé 
cifiés dans les 
brevets d’in- 
vention ; 

Rapporteur 
M. Faissolles. 


Progrès de la 
distillation ; 
Même rap- 
porteur. 


250 Sociélé royale d'Agricullure 
en bois. Le premier s'échaufle äu moyen de 
barres de fer rouges que l'on introduit dans le 
centre ; ces deux rouleaux sont cannelés et en- 
grenés l’un avec l’autre. La manipulation de cet 
instrument est aussi sûre que facile. 

Le briquet pneumatique s'est perfectionné 
dans les mains de M. Dubois. On n’ignore pas que 
c'est à de savans Lyonnais(r) que l'on doit l'in- 
vention d’un instrument qui a reculé les bornes 
de la physique. 


Un autre rapport de M. Faissolles a pour objet 
un genre d'industrie pratiqué principalement 
dans le midi de la France: c'est la distillation 
des vins. Les Arabes inventèrent ce procédé dans 
le dixième siècle , et il n’a fait jusqu’à nos jours 
presqu'aucun progrès. Après avoir montré 
toutes les imperfections de l’ancien procédé, 
M. Faissolles décrit l'appareil distillatoire de M. 
Edouard Adam ; il lui reconnaît trois avantages : 
le premier, de chauffer le vin sans aucune dé- 
pense ; le second, de dispenser de renouveler 
l'eau du serpentin ; le troisième, d'obtenir cons- 
tamment de l’alcohol froid , en évitant toute 
déperdition. M. Bérard ajouta à la cucurbite un 
cylindre creux, disposé de manière à séparer com- 
plètement les vapeurs alcoholiques des vapeurs 
aqueusés , et à porter sur-le-champ l'alcohol à 


RON... 8 OP LENS 8 UT eee où 1 Nr RUN 
(1) MM. Eynard et Mollet, 


de Lyon. 45,251 
38 degrés. D’autres artistes , MM. Cellier , Blu- 
mental, les frères Argant, le comte Chaptal, 
Chassery , surtout M. Solimani , perfectionnèrent 
successivement les appareils distillatoires. D’a- 
près la méthode de ce dernier , il sufht d’une 
seule opération pour retirer d'une quantité de 
vin donnée , autant et plus d'alcohol que par les 
procédés ordinaires. L'appareil de M. Solimani 
est trop connu pour qu'il soit nécessaire d'insérer 
ici la description qu’en donne M. Faissolies. 


En rendant compte d’un mémoire sur l'agri- 
culture d’un canton de l'Auvergne, adressé par 
M. Devèze de Chabriol , notre confrère fait 
observer que plusieurs des principes établis par 
ce minéralogiste agronome, peuvent s'adapter 
à l’agriculture du Lyonnais : c’est ainsi que les 
deux axiomes qui suivent sont applicables à 
toutes les localités. 

1.0 La terre est formée des débris de la roche 
qui lui sert de base, et sur laquelle elle repose, 
plus d’une quantité d'humus qui varie suivant 
la naiure da sol. 

2. Un terrain ne doit être considéré , rela- 
tivement à la végétation , que comme la matrice 
dans laquelle sont déposées les semences des vé- 
gétaux qui doivent y prendre leur accroissement, 


et dans laquelle sont placés les principes nutri- 
üfs dont elles ont besoin. 


Mémoire sur 
les terres cul. 
 tivées dansPar- 

rondissement 
de St-Flour , 
par M. Devèze 
de Chabriol ; 
Même rap- 
porteur. 


252 Société royale d'Agriculture 

Sans rien fournir de leur propre substance à 
la nutrition des plantes, les terres sont réputées 
plus ou moins fertiles, selon leur faculté d'ab- 
sorber l'humidité, la ténacité qu’elles peuvent 
contracter , l'adhésion que leurs élémens peuvent 
avoir entr’eux, et leur facilité à se laisser en- 
traïner par les eaux. 

M. Devèze divise les terres en cinq ordres : le 
premier comprend les granitiques ; le deuxième , 
les schisteuses ; le troisième , les argileuses et 
terres d'alluvion ; le quatrième , les volcaniques ; 
le cinquième , les tourbières. Chacun de ces 
ordres se divise en espèces, que M. Devèze dé- 
termine avec sagacité. Les considérant sous le 
rapport de la fertilité, il donne la préférence 
aux volcaniques , regrettant toutefois qu’elles 
soient en général dans une situation trop élevée. 
De toutes les terres, celles à base granitique lui 
paraissent les plus mauvaises, et pour établir 
ces faits, il se livre à des calculs dont les ré- 
sultats s’appliquent principalement à l’arrondis- 
sement de St-Flour où le calcaire est fort rare, ce 
qui explique son silence sur les terres où ce prin- 
cipe domine. Quoi qu'il en soit , on doit désirer 
qu’un travail analogue à celui de M. de Chabriol 
soit exécuté sur tous les points du royaume, 
il en résulterait pour la statistique générale 
de notre France les plus précieux documens. 


de Lyon. 253 

Que de produits agricoles nous importons que 
nous pourrions créer | Et, pour n’en citer qu’un 
exemple , n'est-ce point par notre incurie 
que nous sommes tributaires de la Suisse, de 
la Hollande, de l'Italie pour une grande quan- 
tité de fromage que nous consommons ? C'est 
ce qu'a prouvé M. Huzard fils, notre correspon- 
dant, dans un mémoire qu'il vous a adressé, 
et dont M. Deschamps vous a donné l'analyse, 
L'objet de cet ouvrage est la fabrication du fro- 
mage de Lodezan, connu sous le nom de Par- 
mesan. Ses qualités précieuses dépendent tout à 
la fois et de sa fabrication et du régime auquel 
ron soumet les vaches qui en fournissent les 
élémens. De toutes les manipulations auxquelles 
on se livre pour la fabrication du Parmesan, la 
plus remarquable est une double cuisson, la 
seconde ayant lieu après le pressurage et la 
séparation du serum de la matière caseuse. La 
température y est élevée jusques à 40 ou 45 de- 
grés réaumuriens. 

On est bien convaincu dans plusieurs contrées 
de la France, notamment en Auvergne, des 
avantages de la cuisson pour la fabrication du 
fromage ; mais on ne l'emploie pas à cause de 
la dépense en combustible qu’elle causerait. 
Toutes les autres manipulations pratiquées dans 
les chalets du Lodezan sont faciles partout, et 


Notice sur la 
fabrication du 
fromage de 
Parmesan, par 
M. Huzard fils; 

Rapporteur 
M.Deschamps. 


254 Société royale d Agriculture 

la double cuisson pourrait avoir lieu dans les 
pays où le combustible est à bas prix. On pour- 
rait, en plusieurs contrées de la France , faire du 
Parmesan, comme on fait du Gruyère et autres 
fromages suisses dans la Franche-Comté et le 
Dauphiné , du Hollande dans le Calvados , etc. 

Ce n'est pas tout d'employer, dans la fabrica- 
tion des fromages, des manipulations bien en- 
tendues : il faut encore avoir de bon lait et en 
grande abondance. C'est dans cette vue que les 
fromagers du Lodezan nourrissent leurs vaches 
au vert pendant neuf à dix mois de l'année, [ls 
en obtiennent les moyens par des irrigations et 
des fumures bien combinées. 

Nous ne pourrions pas ,en France, soumettre 
partout les vaches à ce régime; mais il nous 
serait facile de nourrir ces animaux à la manière 
des Anglais dont le ciel est beaucoup moins 
favorable que le nôtre : ils donnent toute l’année 
à leur bétail, même à leurs chevaux , un mé- 
lange de fourrage vert et de fourrage sec ; ils 
en obtiennent les moyens à l’aide de l'immense 
quantité de racines et de tubercules qu'ils cul- 
tivent pour les provisions d'hiver. C'est par ce 
régime que leurs animaux évitent les effets sou- 
vent si fâcheux d'une subite transition de la 
nourriture sèche à la nourriture verte, et que 
leurs vaches donnent, presqu’en tout temps, 
une grande abondance d’excellent lait. 


de Lyon. 255 
Telle est la notice intéressante que vous a 
adressée M. Huzard fils. 


Un autre de vos correspondans , M. Bonafous 
à qui vous devez tant de précieuses communi- 
cations, vous a envoyé un mémoire écrit en 
italien, sur un semoir très-simple, et M. Billon 
vous a fait connaître cet instrument ; il en a 
mis un modèle sous vos yeux; il y a ajouté 
une boîte de fer-blanc , avec quatre changemens 
pour pouvoir semer des grains de quatre gros- 
seurs différentes. 

« L'usage ( j'emprunte les expressions de M. 
Billon) en est très-facile. En eflet, tandis qué 
le laboureur ouvre avec un araire , une raie de 
la profondeur qu'il juge convenable, une autre 
personne suit avec le semoir à la main, et le 
secoue légèrement à chaque pas dans le sens de 
Ja raie ; il distribue ainsi avec régularité la se- 


mence que la raie suivante recouvre , et ainsi de. 


suite. On peut, de cette manière, semer des 
grains en alignement et à la distance convenable 
pour leur donner ensuite une léoère culture 
avec le même araire qui a servi à les semer, et 
se dispenser par ce moyen du travail long et 
dispendieux de les semer à la main. » 

» M. Bonafous a voulu s'assurer , par une 
expérience positive , de l’économie produite par 
l'usage de ce semoir. » 


Sur un se- 
moir présenté 
par M. Bona. 
fous ; 

Rapporteur 
M, Billon. 


Observation s 
sur la machine 
Christian , à 
tiller le chan- 
vre , par M 
Pidancet ; ù 

Rapporteur 
M. Leroy-Joli- 
mont. 


256 Société royale d'Agriculture 

» Le 17 octobre 1821 , il a semé à ‘la main 
trois livres deux onces de froment sur un terrain 
déterminé, et dans un autre terrain de même 
étendue , il a semé avec son semoir seulement 
une livre et huit onces du même grain. La ré- 
colte fut faite le 30 juin 1822. Le grain semé à 
la main à produit seize livres et demie, et l’autre 
dix-sept livres. Ainsi on a obtenu, à l’aide du 
semoir , plus de grains, en employant la moitié 
moins de semence. » 


Il est une autre machine qui a attiré plus for- 
tement l'attention des agriculteurs , c’est celle 
que M. Christian a imaginée pour suppléer le 
rouissage du chanvre et du lin. Comme elle n'a 
pas répondu à l'attente qu’elle avait fait naître, 
plusieurs mécaniciens ont cherché à en corriger 
les imperfections, et, parmi ces artistes , s’est 
distingué M. Pidancet , régisseur de la terre de 
l'Ecluse, qui vous a soumis sur cet objet un 
mémoire accompagné de dessins. 

Les changemens proposés par M. Pidancet à 
la machine Christian, vous ont été exposés 
comme il suit par M. Zeroy-Jolimont (x). 

« M. Pidancet augmente de plus d'un tiers le 
ns PRE pires Cl L if 261 HN PURES 

(1) On suppose qne la machine Christian , qui a été décrite 


et gravée dans une foule de journaux et de brochures agro- 
zomiques , est suffisamment connue du lecteur, 


de Lyon. 257 
diamètre du gros cylindre cannelé , afin de 
mettre la grandeur de sa circonférence plus en 
harmonie avec la longueur du chanvre qu'on est 
dans le cas de tiller. » 

» Il résulte plusieurs avantages d'un pareil 
changement : : 

» 1°, Les deux extrémités de la filasse du 
chanvre, à moins qu'elle ne soit très-grande, 
ne pourront plus, comme auparavant se réunir et 
se croiser sur le cylindre, ce qui prolongeait sou- 
vent Popération , et gâtait toujours la filasse ; ». 

2.° En donnant un plus grand diamètre aux 
gros cylindres, on laisse entre les petits un plus 
grand espace vide, on peut en augmenter le 
nombre, et accélérer ainsi l'ouvrage. Comme 
cette augmentation ne sera que de deux cylindres, 
il restera toujours un espace vide suffisant pour 
pouvoir établir en avant de la machine une es- 
pèce de support ou de trémie qui serve à rece- 
voir le chanvreet à le diriger entre les cylindres. » 

» Cette disposition, qui manque à la machine 
Christian, est nécessaire pour préserver l’ou- 
vrier qui fournit le chanvre à la machine , du 
danger d’avoir les doigts pris entre les cylindres, 
accident dont M. Pidancet a été témoin plusieurs 
fois. » 

Dans la vue de disposer la trémie d'une ma- 
nière plus commode et plus avantageuse, il a 


17 


258 Société royale d'Agriculture 

pensé qu'il convenait de placer le cylindfe qui 
porte la manivelle et le volant , dans le haut de 
la machine, au lieu de le laisser de côté , comme 
il se trouve dans la machine Christian , il a cru 
qu’il était convenable que ce cylindre qui sert 
d’engrenage ne fût cannelé que dans ses extré- 
mités. C'est ainsi qu’il favorise l'entrée du chan- 
vre entre les cylindres travailleurs, et rend plus 
facile le jeu de la machine. » 

» M. Pidancet pense encore que les petits 
cylindres qui tillent le chanvre doivent tous 
être en fonte, parce que ceux même en bois 
dur se dégradent assez promptement ; ce qui 
nuit au service de la machine. » 

» Îlest facile de voir que lorsqu'on aura fait 
subir à la machine Christian les changemens 
dont on vient de parler, il faudra une plus 
grande force pour entretenir son mouvement. 
M. Pidancet qui a prévu ce résultat a cherché à 
l'annuler , soit en augmentant l'effet du volant 
dont il allonge les bras en augmentant son poids 
dans toute sa circonférence , soit en changeant 
l’engrenage de la machine , ce qu'il exécute en 
donnant un plus grand diamètre aux pignons 
placés aux extrémités du cylindre qui, d'un côté, 
portent la manivelle, et de l’autre le volant. » 

» On doit se rappeler que M. Pidancet a fait 
observer que ce cylindre ne devait pas être can- 


de Lyon. 259 
nelé dans toute sa longueur. Une pareille dispo- 
sition serait vicieuse , car elle augmenterait la 
résistance de la machine et diminuerait son effet. » 

» Cependant on trouve cette disposition dans 
la figure 1. qui est à la suite de l'instruction 
que M. Christian a donnée de sa machine. » 

» M. Pidancet dispose les coulisseaux dans 
lesquels jouent les tourillons des petits cylindres 
de manière à ce qu'ils puissent rentrer en place 
si les cordes qui pressent sur eux viennent à se 
casser. Et afin que leur pression soit continuel- 
lement la même et toujours celle qu'on aura 
jugée nécessaire pour l'effet dont on aura besoin , 
il remplace par des poids les ressorts qui tendent 
les cordes. » 

» Cet avantage est plus grand qu'il ne paraît 
au premier coup-d’œil , l'expérience a appris en 
effet à M. Pidancet que lorsque la machine tra- 
vaille , il faut tendre les cordes au moins toutes 
les trois heures , ce qui non-seulement retarde 
l'opération , mais encore entraîne quelquefois la 
rupture des ressorts, et souvent celle des cordes 
à cause de la forte tension qu'on est obligé de 
leur donner. » 

» Je crois devoir faire observer que si le sys- 
tème de la machine à tiller le chanvre et le lin 
était horizontal au lieu d'être circulaire, il en 
résulterait qu’on obtiendrait plus facilement et 


260 Société royale d'Agriculture 
plus complètement les différens avantages dont 
il a eté parlé. v 

» D'ailleurs la machine en deviendrait moins 
coûteuse, objet très-important quand il s’agit 
d'instrumens d’agriculture. » 

» À la suite de ses observations, M. Pidancet 
expose combien il serait économique de faire 
usage d’un courant d’eau pour mettre en mou- 
vement cette machine, et il entre dans beau- 
coup de détails sur les avantages que, pour cet 
effet, on pourrait retirer d’un moulin ; et afin 
de rendre plus intelligibles ses idées , il a ajouté 
à son mémoire plusieurs figures explicatives. » 

» On ne peut, sous plusieurs rapports, 
qu’applaudir aux corrections que M. Pidancel a 
apportées à la machine Christian , elles contri- 
buent certainement à en améliorer l'usage ; mais 
malheureusement plusieurs de ces changemens 
ont pour effet d'en augmenter le prix qui, déjà 
est trop élevé, pour qu’elle puisse devenir com- 
mune dans les campagnes. » 

» IÎlest certainement peu de personnes versées 
dans les principes de la mécanique qui, ayant 
vu travailler la machine Christian , n’en aient 
reconnu la plupart des défauts et des imperfec- 
tions ; mais en général on a pensé qu’au lieu de 
chercher à les corriger , il valait mieux changer 
le système de la machine et tâcher de la rendre 


de Lyon. 261 
plus simple, moins coûteuse et d'un meilleur 
effet ; parce qu'ainsi que nous l'avons déjà dit, 
une machine destinée aux travaux de Pagricul- 
ture doit, autant que possible , réunir tous ces 
avantages. » 

» Les travaux de notre collègue, M. Eynard, 
sur ce sujet, nous promettent les plus heureux 
résultats, » 


Si M. ZLeroy-Jolimont a donné de justes éloges Mémoire sut 
au mémoire de M. Pidancet sur la machine à FROM “ 
tiller le chanvre, M. Remond n'a pas été si fa- sur la distilla- 
vorable à un mémoire anonyme présenté à la tion ; rappor- 
société sur la méthode de faire le vin et la dis- Ph 3 
tillation , en 1819. 

L'auteur voudrait qu’on introduisit dans le 

Beaujolais les bans des vendanges, tels qu'on 
les pratique en Franche-Comté. M. le rappor- 
teur est d'un avis tout différent , et il trouve 
très-préférable l’usage suivi dans nos contrées. 
Les propriétaires sont réunis au son de la cloche 
sur la place publique; et c’est après avoir re- 
cueilli léurs avis que le conseil municipal , pré- 
sidé par le maire, fixe l'ouverture des vendan- 
ges. L'arrêté qu'on a pris est affiché , et une 
amende est portée contre ceux qui devanceraient 
le jour déterminé. 


L'auteur du mémoire est partisan du dégra- 


Mémoire sur 
l’opjet et la di- 
Vision des tra- 
vaux de la so- 
ciété d’agricul. 
ture de Mont- 
brison , par M. 
de Poncins. 


262 Société royale d'Agriculture 

page; mais il propose pour cette opération des 
procédés nouveaux , qui paraissent à M. le rap- 
porteur moins simples, moins expéditifs que 
ceux que nous connaissons ; celui-ci porte le 
même jugement sur d'autres idées de l’auteur, 
relatives au pressurage des vins et à la distilla- 
tion des gènes; et en dernière analyse, il ne 
trouve à louer dans le mémoire soumis à son 
examen que le zèle et les bonnes intentions de 
l'auteur. » 


M. Remond vous a présenté un rapport plus 
satisfaisant sur un ouvrage que vous a adressé 
M. Montaigne de Poncins , votre correspondant 
à St-Cyr, département de la Loire. C'est un 
discours aussi bien écrit que bien pensé, par 
lequel fut inaugurée, le 24 février 1823, la 
société d'agriculture séante à Montbrison. L'au- 
teur jette un coup-d'œil rapide sur l’agriculture 
de l'arrondissement de cette ville, il en signale 
les imperfections, il indique les nombreuses 
améliorations dont elle est susceptible ; il trace 
l'ordre des travaux à suivre dans la nouvelle so- 
ciété pour amener ces améliorations. Plusieurs 
des vues de M. de Poncins peuvent s’appliquer 
au département du Rhône; quelques - unes à 
celui de l'Ain où plusieurs d'entre vous pos- 
sèdent des propriétés analogues à celles qui sont 


de Lyon: 263 
la ressource de la plaine du Forez. Sous ce 
double rapport , l'ouvrage de M. de Poncins a dû 
vous intéresser. Comme il est imprimé , et par 
conséquent suffisamment connu du public, M. 
le rapporteur n'a pas cru devoir en présenter 
une analyse , il a demandé qu'il soit établi entre 
votre société et celle qui vient de se former à 
Montbrison, des relations intimes qui ne pour- 
raient que tourner au profit de l'agriculture des 
deux pays. 


C'est pareillement sur un ouvrage imprimé 
que M. le docteur Zrolliet vous a présenté un 
rapport que vous avez entendu avec un vifin- 
térêt , mais dont l'analyse ne doit pas occuper 
une grande place dans la notice de vos travaux. 
Ce rapport avait pour objet les mémoires pu- 
bliés en 1823 par la société centrale d’agricul- 
ture et des arts du département de Seine et Oise. 
Parmi ces mémoires, il en est un que M. Trolliet 
a jugé digne d'un long extrait , c'est celui de M. 
Feburier sur la nutrition des plantes et la coupe 
prématurée des blés. Les résultats obtenus par ce 
physiologiste agronome , sont différens de ceux 
qu’avait annoncés M. Matthieu de Dombasles , il 
s’agissait de déterminer le degré d’épuisement du 
sol avant et après la fécondation des plantes. Le 
mémoire de M. Matthieu de Dombasles sur cet 
objet fut envoyé à l'an de vos concours , et mérita 


Mémoires de 
la Societé cen- 
trale de Seine 
et Oise , pu- 
bliés en 1825; 
rapporteur M. 
Trolliet, 


Mémoires 
de zoologie , 
présentés par 
M. Desmarets; 
rapporteur M, 
Trolliet. 


264 Société royale d'Agriculiure 

à son auteur une médaille d'argent. Quoique ce 
travail vous fût connu par un rapport lumineux 
de M. Balbis , vous n'en avez pas moins écouté 
avec beaucoup d'intérêt ce que vous en a dit M. 
Trolliet ; ce dernier s'est particulièrement attaché 
à signaler les rapports de la physiologie végétale 
avec l'agriculture - pratique; il a expliqué. ainsi 
pourquoi l’enfouissement de certaines plantes à 
l'époque de la floraison équivaut à une demi- 
fumure, tandis qu'il faut une fumure complète» 
lorsque la récolte a été faite après la matura- 
tion. Il a développé ainsi l'influence des feuilles 
Sur la végétation et sur la composition du sol, 
celle des semis et du mode de récolter , il a com- 
paré les expériences de M. de Dombasles avec 
celles de M. Feburier , il a montré que ces au- 
teurs ne s’accordaient pas davantage sur les ré- 
sultats de la coupe prématurée des blés; mais 
qu’ils étaient du même sentiment sur les avan- 
tages de cette méthode qui est adoptée depuis 
plusieurs années par des cultivateurs des depar- 
temens du nord. 


C'est encore sur des mémoires imprimés et 
par conséquent suffisamment connus du public, 
que M. Foudras vous a présenté un lumineux 
rapport. Ces ouvrages vous avaient été adressés 
par M. Anthelme-Gaetan Desmarets , professeur 
de zoologie à l’école de médecine vétérinaire de 


de Lyon. 265 
Lyon, à l'appui d'une demande d'association. 
L'un d'eux traite du genre de mammifères masu- 
piaux qu’on a nommés Kanguroo ; l’autre, d'un 
genre de rongeurs que l’auteur a constitué sous 
le nom de Capromys : ces deux monographies 
qui ont été insérées dans plusieurs recueils, 
offrent ce qu'il y a de plus complet sur l'histoire 
de ces deux animaux étrangers ; mais c’est princi- 
palement dans la description du second que M. 
Anthelme-Gaetan Desmarets s’est montré zoolo- 
giste profond. Au reste, comme lobserve M. le 
rapporteur, M. Desmarets a d’autres titres aux 
.suffrages de la société : il a écrit l’histoire des 
. Tangaras , des Manaquins et des Todiers , il a 
déposé dans l'encyclopédie méthodique une partie 
de celle des mammifères, et il a publié à part 
ce travail en deux volumes in-4.°, sous le titre 
de mammologie. Il a inséré divers mémoires 
dans le bulletin des sciences et dans le journal 
des mines, il est enfin lPun des collaborateurs 
du savant journal de M. Ferrussac. 

M. Desmarets s'occupe encore de minéralogie, 
et il vous a adressé sur cette partie de Phistoire 
naturelle divers opuscules imprimés, dont M. 
T'issier vous a fait sentir tout le mérite dans un 
rapport verbal. | 

Aussi, Messieurs, vous êtes-vous empressés 
d'admettre M. Anthelme-Gaetan Desmarets au 
nombre de vos correspondans, 


266 Société royale æ Agriculture 


OUVRAGES IMPRIMÉS 


OFFERTS À LA SOCIÉTÉ. 


1.° Lettre de M. Zacoste de Plaisance, près 
de Toulouse, professeur des sciences phy- 
siques , aux amis des sciences du Puy de 
Dôme. Clermont-Ferrand , 1823. (in-8. 26p.) 

2.9 Dictionnaire des eaux et forêts, formant 
la première livraison de la 2.° partie du traité 
général des eaux et forêts, chasses et pêches, 
publié par M. Beaudrillart. 

3,9 Note sur les chèvres de Cachemire, impor- 
tées en France, par M. Grognier , 1823. (in-8. 
4 pages. ) 

4°  Specienze intorno all uso del seminatijo 
fatto del signor Matteo Bonafous, direttore 
dell’ orto agrario di Torino et lettura fatta 
nelli adunanza della reale societa agraria di 
Torino , il 24 g.bre 1822. Milano, 1823 ,(in-8. 
fig. , 8 pag.) 

5.0 Procès-verbal de la séance de distribution 
des prix à l’école royale vétérinaire d’Alfort, 
tenue le 25 novembre 1822. ( in-8. 103 pag.) 

6° Rapports sur les concours pour des mé- 
moires de médecine vétérinaire, présentés à la 
société royale et centrale ME DA , dans 


de Lyon. 267 
sa séance publique du 6 avril 1823. ( in-8. 
35 pag.) 

7. Influence des sociétés littéraires, savantes 
et agricoles, sur la prospérité publique, par 
M. Bigot de Morogues, membre de plusieurs 
sociétés savantes. Orléans , 1823. (in-8. 20p.) 

8.2 Mémoires d'agriculture, d'économie rurale 
et domestique , publiés par la société royale 
et centrale d'agriculture, année 1822 (t.L., 
in-8. 530 pag.) 

9°: Voyage en Espagne dans les années 1816, 
1817, 1818 et 1819, ou recherches sur les 
arrosages, sur les lois et coutumes qui les 
régissent; sur les lois domaniales et munici- 
pales, considérées comme un puissant moyen 
de perfectionner l’agriculture française , par 
M. Jaubert de Passa , etc. 1823. (in-8. cartes, 
2 vol.) 

109 Chimie appliquée à Hahiolere , par M. 
le comte Capial, ai de France , etc. FR 
1823, (in-8. 2 vol. 

ja Réueil de poils et autres pièces de 
prose et de vers qui ont été lus dans la séance 
des amis des sciences, des lettres, de l'agri- 
culture et des arts, à Aix, département des 
Bouches du Rhône, depuis 1819 jusqu'à pré- 
sent. Aix, 1823. (in-8., 1 vol., 472 pag.) 

12. Mémoires de la société centrale d’agricul- 


268 Socielé royale d'Agriculture 
tare èt des arts du département de Seine et 
Oise, publiés depuis la séance publique du 
7 juillet 1822 jusqu’à celle du 27 juillet 1823, 
(23° année ). Versailles , in-8. 84 pag. (Dans 
le même volume ) Mémoire sur la nutrition 
des plantes et la coupe prématurée des blés, 
par M. Feburier , (1.° octobre 1822. 52 pag.) 

13° Règlement de la société d'agriculture » 
sciences et belles-lettres de Mâcon. 1823. 
(in-4. 5 pag.) 

14° Mémoire sur la saccharification des fé- 
cules , présenté à la société royale et centrale 
d'agriculture de Paris, pour le concours qu’elle 
a ouvert sur la culture de la pomme de terre 
et l'emploi de ses produits, par M. Dubrunfaut. 
Paris, 1823. (in-8. 79 pag.) 

15° Notice sur la fête agricole et le concours 
établi en faveur des laboureurs qui ont eu 
lieu à la ferme de Précontal , commune de Mon- 
telimart ( Drôme), le 23 juillet 1823, par A. 
Duvaure, (in 12. 13 pag.) 

16. Observations critiques sur l'espèce de riz 
sec de montagne ou de la Cochinchine , par 
M. S!-Amand. Agen, 16 septembre 1823, 
Cin-8. 4 pag. ) 

17° Notice sur le château de Lamothe, par 
M. Cochard, de l’académie de Lyon. (in-8. 
4 pag. 1823.) 


de Lyon. 269 

18.9 Mémoires et rapports de la société d'agri- 
culture et des arts du département du Doubs, 
( depuis le 13 ventose an vnx jusqu’en 1823.) 
(in-8. ro vol.) 

19.0 Essai sur l'agriculture du département du 
Jura, par M. Guyétant, docteur de la faculté 
de médecine de Paris, etc. Lons-le-Saunier , 
1822. (in-8. 400 pag.) 

20.9 Noticia intorno ai lavori della classe di 
scienzes fisiche et mathematiche dal primo 
Giorno di Gennajo, sino allultimo di decembre 
1822, del professore Giacinto Carena, se- 
cretario di esta classe. 

21.9 Description des machines et procédés spé- 
cifiés dans les brevets d'invention , de perfec- 
tionnement et d'importation ( 5 volumes ). 
Paris , 1823. (in-4. 366 pag.) 

22. Programme des prix proposés par la société 
d'encouragement pour l’industrie nationale, 
pour les années 1824, 1825 et 1830. 

23. Programme d’un cours de botanique agri- 

. cole qui sera donné au musée académique de 
Genève, par M. le professeur de Candolle. 
(in-8. 8 pag. ) 

242 Notice sur Pierre Poivre (par M.le baron de 
Gerando, extrait de la bibliographie générale.) 

25 Observation sur la pépinière de naturali- 
sation du département du Rhône, par M 
Guerre. Lyon, 1824. (11 pag.) 


270 Société royale d Agriculiure 

26.2 Compte rendu des travaux de la société 
des sciences , arts et belles-lettres de Mâcon, 
pendant l’année 1823. ( in-8. 136 pag.) 

27° Règlement de cette société. Mâcon, 1823. 
(in-4. 5 pag.) 

28% Collection d'instrumens, de machines, 
ustensiles , constructions et appareils emplo- 
yés dans l’économie rurale, domestique et 
industrielle, par M. le comte de Lastayrie , 
Ct. IT et IE, et 4° livraison.) 

29.2 Extrait du recueil des mémoires de la so- 
ciété d'agriculture et arts du département du 
Doubs , pour l’année 1820. in-4. 44 pag. (avec 
un tableau d'assolement de huit années. ) 

30.°. Procès-verbal de la séance publique de la 
société d'agriculture du commerce et des arts 
de Boulogne-sur-mer , année 1823, suivi du 
programme des prix proposés par cettes ociété 

319 Note sur la fructification du phormium 
tenaz , ou lin de la nouvelle Zélande, à Cher- 
bourg et à Toulon, sur la germination par- 
ticulière de ses graines et leur culture, par M, 
Gillet de Laumont. Paris , 1824. (in-8. 8 pag.) 

32.2 Des ponts en fer, par M. Seguin aîné , 
d'Annonay. Paris, 1824. (in-8. 103 pag. pl.) 

33.° Annuaire de la société royale et centrale 
d'agriculture du département de la Seine, 
pour l’année 1824. Paris, (in-12. 54 pag.) 


de Lyon. 271 

34° Mémoire sur un nouveau genre de mam- 

mifères de l’ordre des rongeurs , nommés cap- 

promis, par M. Desmarets. Paris , 1823. 
(in-4. 20 pag. 1 planche. ) 

35.9 — Sur le Kanguroo, genre de mammi- 
fères masupiaux , par le même. Paris | 1823. 
(24 pag. in-8.) 

36.2 Notice sur les couches naturelles de Passy. 
(in-8. 15 pag.) 

37.2 Mémoire sur les fossiles des terrains d'eau 
douce. (in-8. 24 pag.) 

38.2 — Sur la gyrogonite (in-8. 20 pag. 1 pl.) 
(ces trois derniers ouvrages du même auteur, 
sont extraits du journal des mines.) 

39.° Ecole royale d'économie rurale de Lyon. 
Procès - verbal de la séance publique an- 
nuelle , tenue à cette école le 27 octobre 1823, 
pour la distribution des diplômes et des prix 
aux élèves. ( in-8. 75 pag.) 

40° Rapport fait à la societé royale et centrale 
d'agriculture, dans sa séance du 20 août 1823, 
par MM. Molard et Bosc, sur une presse 
propre à retirer le miel des gâteaux de cire. 
Paris. (in-8. 6 pag. 1 planche.) 

41 Calendario Georgico della reale societa 
agraria per l’anno bissestile 1824. Torino, 
106 pag. (in-8. planches.) 

42.2 Rapport sur les travaux de la société d'a- 
griculture du département des Vosges, depuis 


272 Société royale d'Agriculture 

sa création en janvier 1821 jusqu’en juin 

1822, lu en séance extraordinaire, le 10 
juin 1822, par M. Matthieu, secrétaire de la 
société, médecin vétérinaire en chef du dépar- 
tement, membre de la société d’encourage- 
ment. Epinal. (in-8. 44 pag.) 

43.° Mémoire de la société royale et centrale 
d'agriculture , année 1822. (t. IL. ) et année 
1823. 

44% Mémoire de la société des sciences , d’agri- 
culture et arts de Strasbourg, 1822 (2 vol.) 
45 Article greffe, extrait du nouveau cours 
complet d'agriculture pratique et théorique 

( édition de 1822.) 

46.2 Mémoire sur la prétendue greffe columelle 
et sa planche. 

47° Neuf planches lithographiées des grefles 
de 1.'° et 2.° section. 

48. Description de la greffe d'Aubenton et sa 
planche ( les quatre articles qui précèdent ont 
été adressés par M. Thouir , professeur de: 
culture au jardin du Roi. ) 

49°  Noticehistorique et statistique sur St-Cyr, 
sur le Rhône. Lyon , 1824. (in-8. 4 pag.) 

50.0 Mémoire sur la vinification à la mécanique, 
par M. Joseph Esquirol. (in-8.22 pag: ) 

91.0 De l'éducation des vers à soie, d’après la 
méthode du comte Dandolo, par Matthieu 


de Lyon. 273 
Bonafous , membre de plusieurs sociétés sa- 
vantes , et directeur du jardin de la société 
royale d'agriculture de Turin, seconde édi- 
tion. Paris, 1824. (in-8. 102 pag. fig. ) 

52.2 Nouveau traité sur la laine et sur les mou- 
tons, publié par le propriétaire du troupeau 
de Maz. Paris , 1824. (in-8. 220 pag.) 

53.9 Résumé de toutes les expériences faites 
pour constater la bonté du procédé proposé 
par M. le comte Dejean pour la conservation 
illimitée des grains et farines. Paris, 1824. 
(in-8. 20 pag.) | 

549 Mémoire sur les eaux minérales, douches 
et bains artificiels, et sur les bains de va- 
peurs , par À. E. Laville Delaplaigne, doc- 
teur en médecine, breveté d'invention et de 
perfectionnement pour la confection de ses 
appareils. Paris, 1824. (in-8. 172. pag.) 

55.2 Recherches sur les différentes races de 
bêtes à laine de la Grande-Bretagne, et parti- 
culièrement sur la nouvelle race du Leycester- 
shire , par M. le baron de Mortemart-Boïisse , 
chevalier de l'Ordre da Roi, des Ordres de 
St-Louis et de la légion d'honneur , corres- 
pondant du conseil d'agriculture près S. Ex. 
le Ministre de l'intérieur , etc. Paris, 1824. 
(in-8. 45 pag.) 

56.0 Compte rendu de la pratique chirurgicale 

18 


274 Sociélé royale d'Agriculture 
de l'Hôtel-Dieu de Lyon pendant six années, 
lu en séance publique de l'administration des 
Hôpitaux , le 30 septembre 1823, par L. 
Janson , docteur en médecine, chirurgien en 
chef de l’'Hôtel-Dieu, etc. imprimé par ordre 
del'administration. Lyon, 1824. (in-8. 135 p.) 

37° Mémoire sur les effets des pompes du sys- 
tème de M. Arnollet, dans leur état de per- 
fectionnement au 1.7 janvier 1823. Paris, 
1824. (in-8. 62 pag. avec planches.) 

58.2 Mémoire sur la machine écossaise à battre 
les grains, par M. ***, et description d'une 
machine inventée en Russie en 1823, pour le 
même objet, par. MM. le Prince Gagarin et 
Molard aîné. Paris, 1824. 

59.° Programme de la séance publique de la 
société royale et centrale d'agriculture , tenue 
le 25 avril 1824. (in-4. 8 pag.) 

60... Rapport à M. le comte de Brosses , préfet, 
sur l'établissement et les premiers travaux du 
conseil de salubrité du département du Rhône, 
par M. Grognier. Lyon, 23 août 1824. 
Cin-4. 34 pag.) 

61.2 Méthode naturelle des végétaux, par M. 
Antoine-Laurent de Jussieu. Paris, 1824. 
(in-8. 51 pag.) 

62° Rapport sur les produits de l'industrie 
française , présenté au nom du jury central, 


de Lyon. 295 
à $. Ex. le comte Corbières, ministre , secré- 
taire d'état de l'intérieur, approuvé par S. S. 
le duc de Dodeauville, rédigé par MM. Hericart 
de Thury et Migneron. 7 int impr, royale. 
1824. (in-8. 517 pag.) 

63. Description des machines et procédés spé- 
cifiés dans les brevets d'invention , de perfec- 
tionnement et d'importation dont la durée est 
expirée, publiée d’après les ordres de S. Ex. 
le Ministre de l’intérieur , par M. Christian, 
directeur du conservatoire royal des arts et 
métiers (t. VIL). Paris, 1824. (in-4. fig. 305 p.) 

64° Exposé des différens objets qui ont occupé 

- la société d'agriculture de Dôle dans ses trois 
dernières séances. Dôle, 1824. (in-8. fig. 24 p.) 

65.° Recueil des pièces instructives publiées par 
la compagnie sanitaire contre le rouissage ac- 
tuel des chanvres et des lins, etc. Paris, 1824. 
(in-8, 122 pag.) 

66.2 Séance publique de la société d'agriculture, 
commerce , sciences et arts du département de 
la Marne, tenue à Chälons le 27 août 1824. 
(in-8. 75 pag.) 

67° Mémoires de la société centrale d'agricul- 
ture et des arts du département de Seine et 
Oise, publiés depuis sa séance publique du 
27 juillet 1823 jusqu’à celle du 11 juillet 
1824. ( 24.° année ) 242 pag. 


276 Société royale d’Agricullure 

68.2 Mémoire sur les moyens de reconnaître 
l’âge du cheval, etc. par M. Girard fils , pro- 
fesseur à l'école d’Alfort. Paris, 1824. (in-8. 
48 pag. fig. ) 

69° Eloge de Denis Mortier, chirurgien en 
chef de l'Hôtel - Dieu de Lyon, par J.-M. 
Pichard , secrétaire - général de la société de 
médecine de la même vilte, Lyon, 1824. (in-8, 
14. pag.) 

70.9 Oraison funèbre de très-grand , très-haut, 
très-puissant et très-excellent prince Louis 
XVIIT, roi de France et de Navarre, par M. 
l'abbé Bonnevie. Lyon, 1824. (in-8. 101 pag. 

71.9 De la culture des müûriers, par M. Mat- 
thieu Bonafous (2.° édition). Paris, 1824. 
(in-8. fig. 52 pag. ) 


de Lyon. 277 
ÉVÉNEMENS. 


La notice que je viens d’esquisser de vos nobles 
et utiles travaux embrasse, comme vous l'avez 
vu, Messieurs, un espace de temps plus long 
que celles de même genre dont vous avez , dans 
les années précédentes , ordonné la publication. 
L'une des causes qui , en cette circonstance, ont 
porté votre secrétaire à suivre l'esprit plutôt que 
la lettre de votre règlement , est l'incertitude où 
il s'est trouvé sur les résultats définitifs d’une 
discussion qui s’est renouvelée plusieurs fois 
dans vos séances. Il s'agissait de savoir si, dé- 
sormais, vous ne feriez pas connaître vos tra- 
vaux au public tous les trimestres, ou même 
tous les mois. Vous sentez, Messieurs, que si 
ce changement qui, sous plusieurs rapports , 
offrait des avantages , eût été adopté , le compte 
annuel de vos travaux devait, en supposant son 
maintien , être rédigé sous d’autres formes. 

En vous déterminant à ne rien changer dans 
un mode de publication suivi depuis vingt ans, 
vous avez imposé à votre secrétaire l'obligation 
de redoubler d'efforts pour rendre, autant qué 
possible, dignes de vous les notices annuelles 
dont vous lui avez confié la rédaction. 

Pour compléter celle qu'il a l'honneur de 


278 Societe royale d'Agricullure 

mettre aujourd’hui sous vos yeux , il ne lui reste 
qu’à vous rappeler les événemens survenus dans 
la société depuis la publication du dernier compte 
rendu de vos travaux. 

La mort vous a ravi deux confrères respec- 
tables : l’un appartenant à la classe des titulaires, 
l’autre à celle des vétérans: l’un et Pautre s'étaient 
assis successivement à votre bureau en qualité 
de trésoriers. Le premier des deux qui a terminé 
son honorable carrière, est M. Deschamps. Vous 
avez voulu que sans délai un tribut de regrets 
et d'estime fût payé à sa mémoire. Un hommage 
semblable va être rendu en votre nom à M. 
Barre , que nous avons perdu tout récemment., 

Huit de vos honorables correspondans vous 
ont été ravis: MM. Raulhac, Grofiier, Amo- 
reux , Faure-Biguet, le comte de St-Vailier, 
Pin, Moscati, Thouïn. 

M. Raulhac n’a figuré que quelques jours sur 
votre liste, il avait mérité d'y être inscrit par 
ses recherches profondes sur la géologie de la 
haute Auvergne, et sur les institutions , les 
mœurs, l'agriculture et l'industrie des antiques 
Arvernes. 

M. Groffier, habile médecin , s’est rendu re- 
commandable par un ouvrage sur les marais , 
dans lequel cette question importante est traitée 
sous le triple rapport de l'hygiène, de lagricul- 
ture et de l'économie publique. 


de Lyon. 279 

M. Amoreux consacra une longue vie à des 
travaux utiles ; plusieurs fois il fut couronné à 
la suite des concours ouverts soit à l'académie ;, 
soit à l’ancienne société d'agriculture de notre 
ville. C’est principalement vers l'agronomie et 
les arts qui en découlent que cet homme émi- 
nemment laborieux aimait à diriger ses recher- 
ches ; et quoiqu'il ait publié un assez grand 
nombre de mémoires , la plupart de ses onvra- 
ges Sont restés inédits ; la société possède dans 
ses porte-feuilles plusieurs de ces derniers. 

M. Faure-Biguet fut le collaborateur et l'ami 
de notre savant Syonnest ; ils dirigèrent vers 
l'entomologie leurs travaux. Parmi les insectes, 
ceux qui peuvent nuire aux récoltes furent l'objet 
Spécial de leur investigation , et, sous ce rap- 
port, l'agronomie leur dut de précieuses décou- 
vertes. - 

M. comte de St-Vallier , pair de France, 
avait été inscrit sur la liste de la société le jour 
même de sa restauration en l'an vr. C’était un 
de ces grands propriétaires qui, s'occupant eux- 
mêmes de l'administration de leurs domaines : 
exercent une influence puissante sur le perfection 
nement de l'agriculture dans la contrée qu'ils 
habitent. D'autres ont parlé du noble caractère 
que M. de S/-Vallier a déployé dans toutes les 
époques de nos longues dissensions. C'est parce 


280 Société royale d Agriculture 
qu'il était l'ami éclairé de l'agriculture , que 
j’adresse un tribut à sa mémoire. 

M. Pini a laissé la réputation d'un habile phy- 
sicien et d'un savant astronome , il s'occupa 
aussi de météorologie , et, sous ce rapport, il 
mérita une place parmi vos correspondans. Il 
était à Lyon au commencement du siècle, comme 
député de l'Ordre des Dotti à la Consulta cisal- 
pine; il assista plusieurs fois à vos séances , et 
il parut prendre à vos travaux le plus vif intérêt 

M. Moscati, célèbre médecin et physicien 
profond , fut directeur général de l'instruction 
publique du royaume d'Italie. Il jouissait dans sa 
patrie de la plus haute considération ; de même 
que M. Pini, il assista fréquemment à vos 
séances à l'époque de la Consulta cisalpine, et 
vos procès-verbaux ont recueilli quelques traits 
de sa brillante improvisation. 

M. Thouin a professé pendant un demi-siècle 
l'agriculture pratique au jardin du Roi, il ya 
établi école des arbres forestiers , il a reculé les 
bornes de l’agronomie, principalement la partie 
de cette science qui a pour objet les greffes. Il a 
été le collaborateur de M. Tessier dans lency- 
clopédie méthodique, et le continuateur de notre 
illustre Rozier dans le cours d'agriculture. Il a 
enrichi de ses nombreux mémoires les actes de 
l'institut , ceux de la société royale et centrale, 


de Lÿon. 281 
ceux du muséum d'histoire naturelleetvos propres 
archives. Sa longue vie fut pleine de vertus mo- 
destes comme de services éclatans, et c’est un vide 
immense qu'il a laissé dans votre liste comme 
dans celle de la première académie de l'univers. 

Si la liste de vos titulaires a perdu quelques 
autres noms recommandables, celle de vos émé- 
rites s’en est enrichie. Ceux de nos confrères qui, 
par leurs longs et honorables services ont mérité 
d'y être placés, sont : MM. le comte de Chambost , 
Eynard et Rieussec. 

M. Berthaud, ingénieur des ponts et chaus- 
sées, ayant été appelé dans un autre départe- 
ment, a dû passer à la classe des correspondans. 

Il en est de même de M. le baron & l’Horme, 
nommé premier président à la cour royale de 
Caen. 

. Pour réparer tant de pertes, vous avez admis 
dans votre sein, en qualité de titulaires MM. 
Seguin , Cap, Tabareau , Fauché , Prunelle et 
Bouniols. 

. Le premier vous avait fait hommage d’un 
mémoire imprimé , sur les ponts en fil de fer. 
Non content d'exposer les avantages de ces sortes 
de constructions , il avait mis en pratique ses 
théories , et au moment où je trace ces lignes, 
d'importantes entreprises en ce genre sont com- 
mencées, d'autres sont sur le point de se for- 
mer sous la direction de M. Seguin. 


282 Société royale d Agriculture 

M. Cap s'était attaché à lier à l'art de guérir 
la chimie pharmaceutique , et ses travaux sur ce 
sujet avaient mérité une honorable distinction, 
au jugement d'une société savante de la capitale. 

Elève distingué de l’école polytechnique , M. 
Tabareau avait débuté avec un rare succès dans 
la carrière de l'enseignement des sciences phy- 
siques , lorsqu’il s’est présenté à vos suffrages. 

Pharmacien en chef dans les armées fran- 
çaises, l'un des premiers dans son honorable 
profession, M. Fauché s’est occupé avec ardeur 
de l'histoire naturelle , et c'est principalement la 
botanique, cette science dont les rapports avec 
l’agronomie sont si intimes, qui a été l'objet de 
ses travaux. 

M. le docteur Prunelle a enseigné avec éclat la 
médecine dans la célèbre école de Montpellier ; 
il a publié divers ouvrages où l'art d'écrire se 
joint à une vaste érudition , et dans un séjour 
de plusieurs années à la campagne, il a recueilli 
sur l’agriculture de précieuses observations. 

M. Bouniols , propriétaire à la Croix-Rousse, 
a étudié l’agriculture maraîchère qui fait la ri- 
chesse de cette partie de la banlieue de Lyon. IL 
a, par des soins éclairés , augmenté le produit de 
ses jardins et de ses vergers. 

Tels sont les titres qu’avaient à vos suffrages 
les nouveaux confrères que vous vous êtes don- 
nés dans la classe des titulaires. 


de Lyon. 283 

Vous avez admis parmi vos correspondans 
MM. le comte de Tournon , de Taluyers, de 
Broal, Desmarets , et Bonafous. 

M. le comte de Tournon, qui, pendant trop 
peu de temps a tenu les rènes de l’administra- 
tion dans notre province , avait, en coopérant 
lui-même à vos travaux, donné la preuve la 
plus éclatante de l'intérêt qu’ils lui inspiraient , 
et la communication dont il a enrichi votre 
dernier compte rendu, devait être suivie de 
plusieurs autres , lorsque de plus hautes desti- 
nées l'ont appelé à la capitale. 

M. de Taluyers à opéré à quelques lieues de 
notre ville une de ces grandes et belles opéra- 
tions agronomiques qui supposent le concours 
des lumières, du zèle, de la persévérance et des 
capitaux. Le rapport qui vous en a été fait n'est 
pas lun des moindres ornemens de la présente 
notice. Vous vous êtes empressés de mettre au 
nombre de vos correspondans un agronome pra- 
ticien tel que M. de Taluyers. 

Les titres à la même distinction de M. de 
Broal , propriétaire et juge de paix du canton 
de Meïzieux , sont principalement le succès qu'il 
a obtenu dans la culture du chanvre et la pro- 
pagation dans le canton qu'il habite , de plusieurs 
variétés précieuses de cette plante textile. 

M, Desmarets, professeur à l'école de méde- 


284 Société royale d’Agricullure 

cine vétérinaire d’Alfort, mène de front la zoo- 
logie et la minéralogie. Plusieurs des ouvrages 
qu’il a publiés sur ces deux branches de l'histoire 
naturelle , ont accompagné la demande qu'il a 
formée de vous appartenir à titre de corres- 
pondant. 

Né dans nos murs, M. Matthieu Bonafous est 
fixé à Turin où il dirige un établissement agro- 
nomique. Plein de sollicitude pour la prospérité 
de l’agriculture et de l'industrie de sa province 
natale, il a publié plusieurs traités sur la cul- 
ture du mûrier et l'éducation des vers à soie, il 
a fondé dans votre sein des prix pour encourager 
d’autres améliorations importantes , et ce n'est 
pas là les seuls services qu'il ait rendus à l'éco- 
nomie rurale de ce département. Vous avez 
pensé, Messieurs , que l’agronome qu'anime une 
philantropie si pure ne pouvait qu’'honorer la 
liste de vos correspondans. 

Un seul changement a été fait à votre bureau; 
c'est la nomination de M. Deschamps à la place 
de trésorier que son père avait laissée vacante. 
Vous avez honoré ainsi la mémoire d'un con- 
frère respectable , tout en donnant à son digne 
fils une grande marque de confiance. 

Vous avez adopté de nouveaux diplômes, l’édi- 
tion des anciens étant épuisée. Vous avez saisi- 
cette circonstance pour rendre un sûlennel hom- 


de Lyon. 285 
mage à des Lyonnais qui se sont illustrés dans 
l’agriculture , ou l’histoire naturelle, ou les 
arts utiles. Vous avez voulu que leurs noms 
vénérés fussent inscrits autour de ces diplômes. 
Chargés de remplir vos vues à cet égard, MM. 
de S/-Didier et Acher vous ont présenté un ta- 
bleau que vous avez adopté. 

On y voit la gloire assise sur un lion , em- 
blême de notre cité; elle tient de chaque main 
des couronnes qu’elle présente, d'un côté aux 
génies de Pagriculture, de l'autre aux génies 
des arts utiles ; tout près de ces génies sont des 
faisceaux de palmes et de lauriers. 

De ce groupe placé en tête du diplôme, partent 
à droite et à gauche des guirlandes de chêne qui 
entourent les noms des illustres Lyonnais; elles 
sont unies au bas du tableau par un trophée où 
lon voit entrelacés avec élégance des gerbes , des 
pampres , quelques instrumens agricoles , des 
instrumens des arts utiles , la cornue de la 
chimie , le caducée du commerce , les serpens 
d'Epidaure. Voici les noms des Lyonnais dont 
la gloire immortelle est gravée sur vos di- 
plômes. 

Hors de rang à des places distinctes , Rozier 
et Bourgelat : peu de noms aussi honorables 
ont été inscrits dans les fastes de lagricul- 
ture lyonnase , j'ai presque dit dans ceux de 


280 Sociélé royale dA'griculture 
lagriculture de la France entière. Nous devons 
au premier l’un des ouvrages agronomiques 
les plus importans qui aient été publiés en 
Europe, depuis le Mesnage des champs d'Oli- 
vier de Serre. Non content d'avoir exposé dans 
ce livre , classique pour l'époque, toutes les 
théories de l'art , il en a perfectionné la pra. 
tique par de belles expériences , dont plusieurs 
ont été faites dans les campagnes voisines de 
notre ville. 

Bourgelat a créé, pour ainsi dire, l'art pré- 
cieux qui a pour objet la conservation et le 
perfectionnement des animaux utiles. Il a fondé 
des écoles publiques dont aucun siècle ni au- 
cune nation ne lui avaient offert des modèles ; 
il a laissé , sur presque toutes les parties de 
l'art vétérinaire , des ouvrages originaux qui 
ont passé dans toutes les langues de l'Europe; 
c'est dans nos murs qu’il a placé le berceau 
d'une institution dont les progrès ont ren- 
contré des obstacles de tous les genres, mais 
qui ne peut manquer de prendre un jour, 
dans l'intérêt du premier des arts, de grands 
développemens. 

En tête de l'une des colonnes du tableau est 
Dalechamp ; il fut médecin habile et natura- 
liste infatigable. Nous lui devons la première 
flore lyonnaise ; et la plupart des plantes ins- 


de Lyon. 287 
crites dans son grand ouvrage y sont décrites 
pour la première fois. On les reconnaît encore 
au signalement qu'il en a donné , et on les 
retrouve , après plus de deux siècles , dans les 
stations qu'il leur a assignées. Le lyonnais 
Dalechamp est regardé par les botanistes de 
tous les pays comme l'un des pères de la 
science des végétaux. 

Au-dessous du nom de Dalechamp est celui 
de Jean Bauhin qui, originaire de la Suisse, 
naquit à Lyon, y fit un long séjour et con- 
courut avec Dalechamp, son ami , à l’histoire 
des plantes du Lyonnais ; il publia, sous son 
propre nom , une histoire générale des végé- 
taux , ouvrage volumineux où les plantes des 
environs de Lyon sont décrites avec prédilec- 
tion , ainsi que les lieux où elles croissent na- 
turellement , et les usages qu’on leur attribuait 

à la fin du 16.me siècle , époque où l'auteur 
| écrivait. 

Long-temps après Dalechamp et Bauhin on 
vit s'élever à Lyon une famille privilégiée dans 
laquelle le, génie de la botanique est hérédi- 
taire ; Antoine de Jussieu fut le premier de 
cette famille qui s'illustra , il ouvrit la car- 
rière à ses deux frères , Joseph et Bernard, 
ils furent suivis d'Antoine-Laurent leur neveu, 
aujourd'hui l'un des nestors des naturalistes 


288 Société royale d'Agriculture 

de l'Europe. C'est Bernard de Jussieu dont 
le nom , suf cette colonne , est placé dans 
l'ordre chronologique , au-dessous de celui de 
Jean Bauhin. Dans l'ordre du génie botanique 
Bernard peut avoir des égaux, mais il ne con- 
naît pas de supérieurs. Sa classification des 
végétaux, d’après la méthode naturelle , est l’une 
des plus fortes conceptions du dix-huitième siècle. 

Latourrette consacra sa vie à l'exploration de 
la terre natale ; aucun savant , avant lui, n'a- 
vait poussé si loin la connaissance de la bota- 
nique et de la minéralogie du Lyonnais ; voué 
à l'histoire naturelle uniquement à cause des 
charmes attachés à son culte , il laissa ses nom- 
breux ouvrages en porte-feuille, ou les fit pa- 
raître sans nom d'auteur. Deux d’entre eux ce- 
pendant , le voyage au mont Pilat et le chloris 
Jugdunensis , furent reconnus pour être sortis 
de sa plume , et consacrèrent sa réputation dans 
le monde savant. 

Voyageur philantrope , Poivre parcourut une 
grande partie du globe pour enrichir sa patrie 
du fruit de ses découvertes. Sage et profond 
administrateur , il créa la prospérité de deux 
colonies françaises ; ami éclairé de l'agriculture, 
il lui fit présent d’un grand nombre de végétaux 
utiles ou agréables. C’est dans sa charmante so- 
litude de la Fréta que s'acclimataient ces plantes 


de Lyon. 289 
étrangères avant de se répandre dans le Lyonnais 
et les provinces voisines. Les arts utiles, et jus- 
qu'aux teintures de Lyon durent à Poivre 
d'heureux perfectionnemens. 

Le nom qui suit est celui de Jars. On connaît 
plusieurs minéralogistes de ce nom ; mais Gabriel 
fut le plus célèbre. Ami de Duhamel, il visita 
avec ce savant les mines d'Allemagne, il explora 
ensuite presque toutes celles de l'Europe, et du 
résultat de ses recherches , il composa un grand 
ouvrage qui lui ouvrit les portes de l'académie 
des sciences. De concert avec Duhamel , Gallos 
et Fourcroy de Ramecourt, il publia un im- 
portant ouvrage de technologie ; il perfectionna 
l'exploitation des mines de St-Bel et de Chessy, 
et sous ce rapport il augmenta la prospérité de 
sa terre natale, que ses autres travaux avaient 
illustrée. 

Villers mena de front la physique et l'ento- 
mologie, il enseigna ces deux sciences dans des 
cours particuliers , et il vit des princes parmi 
ses auditeurs; il les professa aussi dans une 
réunion d'amis des sciences qui s'était formée à 
Lyon sous le titre de société philotechnique ; on 
lui doit un ouvrage en plusieurs volumes sur 
les insectes, qui lui mérita l’estime de Haller, 
de Réaumur et de Linnée. C'est autour de notre 
ville et sur les montagnes qui en bornent l’ho- 


19 


290 Société royale d'Agriculture 

rizon , que Villers avait étudié l'entomologie, 
et on lui doit de belles observations sur les in- 
sectes ennemis de l'agriculture. 

Gilibert quitta la cour d'un roi dont il était 
premier médecin, pour consacrer à sa patrie ses 
talens et son expérience. Il fut long-temps dans 
notre ville le premier dans sa profession. Le 
temps qu'il déroba à des devoirs sévères , il le 
donna à l’aimable science ; ‘il propagea les doc- 
trines Linnéennes , planta le jardin de l’école 
vétérinaire et celui de la Déserte ; il enseigna 
avec éclat la science des végétaux ; il aimait à 
développer les rapports de cette science avec la 
médecine, l’agronomie, la pratique des artsutiles, 

Il présidait la société à l'époque où ses mem- 
bres furent dispersés par les orages révolution- 
paires, et c’est lui qui en réunit les membres 
épars lorsqu'un peu de calme eût succédé à la 
violence de la tempête. 

Patrin s'illustra par des travaux et des décou- 
vertes en minéralogie. L'ardeur de cette science 
lentraîna jusqu’à l’extrémité septentrionale du 
vaste empire de Russie; il pénétra dans des 
lieux où , pour me servir de l'expression de 
Buflon, /a nature fut étonnée de s'entendre inter- 
roger pour la première fois. De retour en France, 
il entra à l'académie des sciences de Paris, et il 
fut l’un des fondateurs de l'ancienne société 
d'agriculture de Lyon. 


de Lyon. 201 

Chomel, curé de St-Vincent de Lyon, était 
presque octogénaire lorsqu'il publia sous le titre 
de dictionnaire économique , un volumineux ou- 
vrage qui à eu plusieurs éditions. C’est en admi- 
nistrant une terre considérable appartenant à 
l'église , qu’il avait acquis de grandes connais- 
sances , non-seulement sur l’agriculture , mais 
encore sur l’art vétérinaire. Son livre a été long- 
temps, dans le Lyonnais surtout, le manuel 
des agriculteurs et des bonnes ménagères. 

Les Lyonnais qui suivent se sont rendus cé- 
lébres en reculant les bornes des arts qui fondent 
la prospérité de notre cité. 

Laure, originaire du Milanais, vint s'établir 
à Lyon sur la fin du 16.° siècle ; il y apporta 
de nouveaux procédés sur l'art de teindre les 
soies. Les anciennes méthodes furent bientôt 
oubliées , et tout en enrichissant sa patrie adop- 
tive, Laure parvint à une grande fortune, 
dont il fit un noble usage. 

Revel surpassa ses contemporains et ses de- 
vanciers dans l’art du dessin appliqué aux divers 
tissus ; il découvrit le secret de distribuer agréa- 
blement les lumières et les ombres sur les 
étoffes ; on lui dut d’autres inventions du même 
genre, et c’est ainsi qu'il concourut puissam- 
ment à la renommée des manufactures lyon- 
naises. 


292 Société royale d'Agriculture 

Mey (Octavio) se sendit recommandable par 
une découverte capitale; il trouva le moyen 
de lustrer la soie ; il le dut , dit-on , au hasard ; 
mais ne sait-on pas que si le hasard a quelquefois 
produit des merveilles dans les sciences ou dans 
les arts, c'est qu'il a été secondé par le talent 
ou le génie ? 

Roville se distingua parmi les nombreux im- 
primeurs qui, dans le seizième siècle, florirent 
à Lyon. Homme de lettres et savant, comme 
l'étaient , surtout dans notre ville, les impri- 
meurs de cette époque, Roville ornait de notes 
et de préfaces les ouvrages qu'il mettait au jour, 
et il s’associait ainsi à la gloire de leurs auteurs. 
Il consacra sa fortune à des institutions pieuses, 
dont quelques-unes subsistent encore. 

Delorme ( Philibert ) appartient au siècle de 
François L" et de Léon X ; c’est comme archi- 
tecte qu'il a pris rang parmi les hommes qui 
ont concouru à la renaissance des sciences , des 
lettres et des arts : du nombre de ses ouvrages 
est ce château de Chambort , qui vient de recevoir 
une si glorieuse destination. Mais ce n’est pas 
seulement dans la construction des palais et des 
temples qu’il a déployé les richesses de son 
génie , il a encore bâti, du moins dans sa ville 
natale, plusieurs maisons modestes , dont quel- 
ques-unes attirent encore l'attention des voya- 
geurs instruits, 


de Lyon. 293 

Coustou (Nicolas) fut, ainsi que son frère 
Guillaume, l’un des plus habiles sculpteurs du 
règne de Louis XIV. Les statues colossales du 
Rhône et de la Saône que l'on voyait au piédes- 
tal de la statue de ce grand monarque, sur la 
place de Bellccour , étaient sorties du ciseau de 
Nicolas et de Guillaume Coustou. Le premier a 
laissé en outre des ouvrages très-remarquables, 
soit aux champs-élisées à Paris, soit au jardin 
de Marly. 

Audran fut l’un des plus célèbres graveurs du 
dix-septième siècle. Ses batailles d'Alexandre, 
son triomphe de Constantin tiennent encore un 
rang distingué parmi les chefs-d'œuvres de la 
gravure ; peu d'hommes ont jeté plus d’éclat 
sur une ville féconde en grands hommes de tous 
les genres. 

Lassalle , ingénieux mécanicien , porta dans 
la fabrication des étofles lyonnaises de nom- 
breux perfectionnemens. Habile dessinateur, ses 
talens agrandirent l’art que le génie de Revel 
avait fait sortir de l'enfance. Citoyen vertueux, 
son zèle pour la prospérité des fabriques de Lyon 
ne s’est pas ralenti , et il a voulu que ses derniers 
ouvrages devinssent la propriété de tous , etil 
les a deposés au palais du commerce et des arts 
où il a terminé sa carrière. Une inscription en 
son honneur a été gravée sur le grand pérystile 
de ce palais. 


M, BARRE. 


294 Sociélé royale d'Agriculture 


NÉCROLOGIE. 


M. François Barre, pharmacien et ancien 
trésorier de la société, naquit à Lyon en 175r. 
Son père exerçait aussi avec honneur une pro- 
fession qui se lie à l'agriculture par un plus 
grand nombre de rapports qu'on ne le pense 
communément. C’est, en effet, dans les labo- 
ratoires des pharmaciens que s’est formée et que 
se perfectionne tous les jours cette chimie pra- 
tique dont lPinfluence s’étend sur tous les arts 
économiques. Les théories qui éclairent les pro- 
cédés et les manipulations de la pharmacie ont 
jeté un grand jour sur la composition des terres 
géoponiques , la formation des composts, la 
conduite de la fermentation vineuse , la distilla- 
tion des esprits, l'extraction des principes oléa- 
gineux, tinctoriaux , saccharins : n'est-ce pas à 
l'ordre des pharmaciens qu'appartenait le trip- 
tolême de notre âge ? Il ne faut donc pas s’éton- 
ner si l'on voit sur les listes de toutes les sociétés 
d'agriculture un si grand nombre de savans qui 
appartiennent à cette classe honorable. 

M. François Barre fut reçu maître en phar- 
macie à Lyon en 1777. Les réceptions étaient 
sévères à cette époque; mais notre confrère qui 
avait suivi pendant plusieurs années les cours 


de Lyon: 295 
de Rouelle et qui en avait recueilli en manus- 
crit toutes les leçons, soutint aisément les exa- 
mens qu'on lui fit subir. 

Quelques années après il se rendit à Valence 
pour se présenter à d'autres examens , à la suite 
desquels il reçut le titre de maître ès arts. 

Peu de temps avant la révolution il se réunit 
à MM. de Latourette, Camus , Villers, Roland 
de la Platière pour fonder à Lyon une associa- 
tion d'amis des sciences et des lettres, qui fut 
connue sous le nom de Société philothecnique. Des 
cours publics y furent institués, et l’enseigre_ 
ment de la chimie lui fut confié conjointement 
avec M. Macors. C’est à cette époque qu'éclata la 
doctrine pneumatique. M. Barre fut en province 
l'un des professeurs qui , les premiers , adopte- 
rent cette doctrine, qui en suivirent les progrès 
et la développèrent dans des cours publics. 

Notre confrère commençait à jouir du fruit 
de ses travaux, lorsque tout en France fut bou- 
leversé. 11 suivit le mouvement généreux qui 
souleva Lyon contre l'anarchie , et il fut chargé 
de diriger la pharmacie de l'hôpital militaire de 
St Louis. Proscrit après la chute de cette ville 
infortunée , il se réfugia dans un village du 
Dauphiné. 

Un peu de calme ayant succédé à l'orage ré- 
volutionnaire, M. Barre reparut dans sa ville 


296 Société royale d'Agricullur e 

natale , il s'unit à quelques-uns de ses anciens 
confrères pour établir une société de pharmacie 
dont pendant plusieurs années il fut le président. 

Membre de la section de chimie dans la so- 
ciété des amis du commerce et des arts , il y fit 
deux communications remarquables, l’une sur 
la composition d’une encre indélébile, l’autre 
sur la nécessité de conserver pendant quelque 
temps encore l'ancien système métrique pour 
Vusage pharmaceutique. 

Il fut admis en 1809 dans le sein de la société 
d'agriculture de Lyon. L'année suivante il fit 
un rapport lumineux sur un fourneau écono- 
mique inventé par un mécanicien nommé Four- 
nier 3 en 1810 il succéda à M. Sionnest à la 
place de trésorier. Les comptes rendus de la 
société ont recueilli d’autres communications 
de M. Barre , notamment un rapport sur un 
pétrin tournant , inventé par M. Lambert, bou- 
langer à Paris, et un mémoire sur les produits 
de diverses variétés de pommes de terre qu'il 
avait cultivées dans ses domaines à Millery. 

Ayant acquis par son âge et ses longs services 
des droits à la vétérance , il fut inscrit en cette 
honorable qualité sur votre liste, et il se retira 
dans son domaine où il avait déjà opéré de nom- 
breuses améliorations. 

Lorsqu'il prit l'administration de son vignoble 


de Lyon. 297 
‘de Millery, la réputation des vins de ce canton 
commençait à déchoir. On y fumait beau- 
coup trop, on sacrifiait ainsi la qualité des ré- 
coltes à leur abondance. Il donna l’exemple de 
répandre les engrais dans les vignes avec écono- 
mie; et si, à égalité de tènement , il récolta 
moins que ses voisins, ses vins eurent sur les 
leurs une grande supériorité, et en définitive ses 
bénéfices furent plus considérables. Il introduisit 
une autre amélioration , celle de fouler, d’écraser 
le raisin avant de le jeter dans la cuve; il pra- 
tiquait cette opération préliminaire dans un 
vaisseau percé de trous, qu'il plaçait sur la 
cuve même, c'élait une espèce de chantepleure 
que plusieurs de ses voisins ont adoptée. 

Non content d'améliorer la culture de ses 
vignes et la fabrication de ses vins, M. Barre 
dirigea sa sollicitude vers d'autres parties de 
l'économie rurale, il planta un grand nombre 
d'arbres fruitiers qui se firent remarquer par 
leur belle venue, il étendit autant que possible 
la culture du mûrier. C’est ainsi qu'il concourut 
à un genre d'amélioration auquel vous attachez, 
Messieurs , la plus haute importance. 

Ce pharmacien distingué autant qu'habile 
agronome a cessé de vivre le 12 décembre 1824. 


298 Sociélé royale d’ Agriculture 


Comme dans les deux années précédentes , 
vous avez arrêté que sans attendre l'époque de 
la publication annuelle de vos travaux , quel- 
ques-uns de vos actes fussent imprimés et publiés 
à part, et que des exemplaires en fussent mis 
en réserve pour être joints à la présente notice. 

Trois ouvrages vous ont paru dignes de cette 
distinction. l’un est la notice sur M. Deschamps, 
par le secrétaire ; l'autre la notice sur M. Wil- 
lermoz, par M. le docteur Terme, son neveu ; 
le troisième , le rapport de M. Gras sur la 
pépinière départementale de naturalisation, rap- 
port dont les conclusions , adoptées par vous , a 
éclairé l'autorité sur la nécessité de maintenir 
dans son état actuel un établissement précieux (r). 

Je ne terminerai pas cette notice sans y con- 
signer l'hommage de votre reconnaissance envers 
M. le Maire de Lyon, qui a bien voulu mettre 
à votre disposition une salle pour y recevoir les 
machines et instrumens qui composent votre 
collection ; et j'ajouterai l'expression de vos re- 
mercîmens envers notre confrère, M. Dugas, 
aux soins duquel vous devez cet acte de muni- 
ficence municipale. 


(1) Voyez à la suite de la présente notice. 


de Lyon. 299 
PROGRAMME 


D'un Prix pour la culture des Abeilles dans le 
département du Rhône, et de plusieurs Primes , 
proposés par la Sociëté, pour étre décernés en 
1825 cl 1826. 


En 1825. 


INox content d'avoir tracé avec autant de méthode 
que de clarté l'histoire naturelle des abeilles , et 
d'avoir fait connaître les moyens de produire les 
essaims artificiels, d'après la méthode de M. Lombard , 
M. Lacène, l'un des membres de la Société, a offert 
une somme de cent francs pour encourager un genre 
d'industrie presque inconnu dans notre département , 
et qui néanmoins pourrait y être établi avec avantage. 

La Société, acceptant avec reconnaissance les offres 
généreuses de M. Lacène , a arrêté: 


1.0 Qu'un prix de cent francs , auquel serait ajoutée 
une grande médaille d'argent à l'effigie de Rozier, 
serait décerné au cultivateur qui aurait fait avec le 
plus de succès des Essaims artificiels d'après la mé- 
thode de M. Lombard ; 

2.9 Que la grande médeille d’argent serait re 
à celui qui, par des procédés quelconques, aurait 
cultivé la plus grande quantité d'abeilles ; 

9 Que les concurrens présenteraient , à l'appui 
de leurs mémoires, des certificats constatant leurs 
opérations et leurs succès ; 


4.9 Que le concours auquel les cultivateurs du 


SUJET DU Prrx 
Sur la culture 
des Abeilles, 


SUJET DE PRIX 
Sur l’acclima- 

tation du chan- 

vre bolonais. 


Lire PRIME. 


Indiquer la 
meilleure char- 
rue à tourne- 
oreille , pour 
labourer à plat 
à la profondeur 
de 9 à 12 pouces 


300 Socielé royale d'Agricullure 
département pourraient seuls être admis, et même 


en en exceptant les membres de la Société, serait clos 
le r1.°" décembre 1825. 


En 1825 et 1826. 


M. Matthieu Bonafous désirant améliorer dans sa 
province natale un genre important d'industrie agri- 
cole , y a envoyé de la graine de chanvre bolonais, qui 
a été distribuée gratuitement aux agriculteurs qui ont 
voulu la semer comparativement avec celle du chanvre 
du pays, et il a fait les fonds d'un prix en faveur de 
celui qui aurait le plus contribué à l’acclimatation de 
cette graine étrangère. 

MM. les concurrens qui ont resemé de la graine de 
chanvre bolonais, provenant de l'envoi fait par M. 
Bonafous , feront connaître avec détail les résultats 
qu’ils ont obtenus, et leurs mémoires devront être 
accompagnés de certificats et d’attestations authen- 
tiques. 

Un prix de 100 fr. ou une médaille de mème valeur 
sera accordé à celui qui, au jugement de la Société : 
aura obtenu sur l'acclimatation du chanvre bolonais 
les résultats les plus importans. 


En 1825. 


Il y a beaucoup de très-bonnes charrues à oreilles 
fixes ; elles sont très - propres à labourer en planches 
bombées et en sillons les terres humides qui re- 
tiennent l'eau ; mais existe-t-il de bonnes charrues à 
oreilles mobiles , autrement dites à tourne-creille, 
avec lesquelles on puisse labourer à plat les terres qu 
ne retiennent pas l'eau, telles que celles de Îa 
majeure partie de notre département, de celui de 
l'Isère, etc. ? 


de Lyon. 301 

Comme une charrue de ce genre serait fort utile, 
la Société accordera une prime à celui qui la fera 
connaître ; elle devra être assez solide pour labourer 
à plat , à la profondeur de ÿ à 12 pouces, en em- 
ployant quatre chevaux ou quatre bœufs de force 
moyenne ; elle sera légère, afin qu'étant attelée de 
deux bœufs ou de deux chevaux également de force 
moyenne, elle puisse labourer à la profondeur de 6 
à 8 pouces, profondeur ordinaire du labourage des 
meilleures charrues à tourne-oreille , lesquelles ont 
le défaut de ne pas tenir la raie nette et de ne pas bien 
retourner la terre. 

On désire en même temps que cette nouvelle charrue 
soit d'un entretien facile et peu coûteux , qu'elle puisse 
mème remplacer la charrue à oreilles fixes et ouvrir 
sans effort les raies d'écoulement que l'on fait ordinai- 
rement dans les terres labourées à plat. 


La société avait proposé, l’an dernier , une prime 
pour des expériences comparatives sur le nouvel en- 
grais végéto-minéral, dit Gadoue artificielle, et le 
produit des fosses d'aisance; elle a cru devoir cette 
année , donner un champ plus vaste aux agronomes 
qui dirigent leurs recherches vers la préparation des 
composts tant solides que liquides ; elle les invite à 
comparer les effets du fumier de litière pure avec un 
engrais factice quelconque , n'importe le règne natu- 
rel qui aura fourni les matériaux ; elle désire que le 
compost et le fumier d’écurie soient employés simul- 
tanément pour une récolte de mème nature et sur un 
champ qui ait au moins l'étendue de deux bicherées 
(environ 28 ares. ) 

Les concurrens feront connaître exactement les 
procédés de fabrication du compost qu'ils auront pra- 
tiqués , les dépenses qu'ils auront faites, et les résul- 
lats qu’ils auront obtenus. 


2,me PRIME. 

Comparer 
les effets de 
l’engrais de li- 
tière avec ceux 
d’un ‘compost. 
solide ou li- 
quide. 


3.me PRIME. 

Comparer les 
résultats de la 
culture du fro- 
ment après les 

pommes de 
terre , et après 
d’autres plan- 
tes, telles que 
le trèfle , le 
chanvre, etc. 


Aime PRIME. 
Culture compa- 
rative de trois 
plantes oléifè- 
res , le colza 
( brassica ole- 
racea campes- 
éris ) ; le pavot 
des jardins , 
(papaver som- 
niferum }); et 
la 
blanche, ( si- 
napis alba.) 


moutarde 


302 Sociélé royale d'Agriculture 


En 1825. 


C'est une pratique assez répandue de faire succéder 
le froment aux pommes de terre, cependant plusieurs 
agronomes éclairés pensent que le froment semé im- 
médiatement après la récolte de ces tubercules, qu'on 
ne plante jamais sans engrais, produit en général 
moins que celui qui succède au trèfle, au chanvre, 
etc. ou à la jachère, après un bon fumage. 

C'est pour mettre hors de doute les effets de ces 
modes d'alternats , que la Société propose une prime 
pour un essai comparatif de culture du froment, après 
la pomme de terre, et après d'autres plantes qui 
laissent dans la terre de l'engrais, telles que le chanvre, 
le trèfle, etc. La Société désire que cette expérience 
soit faite sur une étendue de terrain au moins de deux 
bicherées lyonnaises (27 ares 64 centiares. } 


Après un hiver rigoureux qui a fait périr beaucoup 
d'oliviers, et qui en a mis un plus grand nombre hors 
d'état de donner, de plusieurs années, une bonne ré- 
colte, on sent plus que jamais combien il serait 
avantageux d'étendre la culture des végétaux herbacés 
oléifères. Parmi ces plantes , il en est trois déjà cul- 
tivées autour de Lyon, dont la Société désirerait de 
connaître les produits par une expérience comparative. 
La première est le Colza , brasica oleraeea campestris , 
dont la propagation dans le Lyonnais est due à notre 
illustre Rozier. La seconde est le pavot des jardins 
(papaver somniferum ), que Mad. Lortet cultive avec 
succès depuis deux ans. La troisième est la moutarde 
blanche (sirapis alba ), qui a été l'objet d'un heureux. 
essai tenté à la Guillotière par M. Poidebard. 

La Société propose aux cultivateurs du département 
de semer chacune de ces trois plantes au moins sur 


de Lyon. 303 
une bicherée lyonnaise, de tenir note des frais de 
culture, de la quantité de graines employées, des pro- 
duits obtenus. Une prime sera la récompense de celui 
qui aura le mieux rempli ces conditions. 


L'un des correspondans les plus distingués de la So- 
ciété, M. Duvaure, qui a écrit sur l'éducation des vers 
à soie un ouvrage estimé, regarde comme très-avan- 
tageuse la pratique de greffer les müriers. D'un autre 
côté des éducateurs penchent pour le müûrier sauvageon; 
et malgré sa longue expérience , le respectable Dan- 
dolo n’a pas osé décider cette question. 

C'est afin d’arriver à la solution de ce problème 
intéressant , que la Société propose d'élever au moins 
une once de vers à soie avec de la feuille de mürier 
greffé, et la même quantité avec de la feuille de sau- 
vageon. Elle désire que ces éducations aient lieu simul- 
tanément, dans le même local, en employant les 
mêmes soins ; et autant que possible en donnant des 
feuilles fournies par des arbres nourris sur le même 
sol, etc. On tiendra note des quantités respectives de 


feuiiles consommées, de la durée de l'éducation , et 
de tous ses produits. 


Conditions générales à remplir par les concurrens. 


Chacune de ces primes consistera en une médaille 


de cent francs ou en la même valeur en numéraire , au 
choix des concurrens couronnés. 

Pour le prix et les primes à décerner en 1825 , les 
mémoires doivent être arrivés avant le 1.7 décembre 
de cette année ; et c'est pareillement avant la même 
époque de 1826 qu'on doitenvoyer les mémoires pour 
les concours de cette année. ( Ces termes sont de ri- 


5.me PRIME, 
Comparer ; 
pour l’éduca- 
tion des vers à 
soie , la feuille 
du mürier gref- 
fé avec celle 
du mürier non 
greffé,vulgaire- 
ment dit Sau- 
vageolte 


304 Société royale d'Agriculture 
gueur.) Ils seront adressés au Secrétaire de la Société, 
ou à tout autre membre du bureau. 

Les concurrens pour les primes, doivent être do- 
miciliés dans le département du Rhône. Ils sont libres 
de faire conuaître leurs noms; les membres ordinaires 
de la Société ne sont pas admis au concours. 


de Lyon. 305 


TABLEAU 


DE LA SOCIÉTÉ ROYALE 
D'AGRICULTURE 


En 1825. 


Len + ne be be be be à 0e L se) 


BUREAU. 


Messreurs 


Le Comte de Brosses , O ÿ%x , Gentilhomme de là 
Chambre du Roi, Maître des requêtes au Conseil 
d'état, Préfet , Président d'honneur. 

Le Baron Ramsaup, &:, Maire de Lyon, Président 
d'honneur. 

CocHarp , avocat en la Cour royale de Lyon ; 
Président. 

Janson aîné, juge au Tribunal de première instance ; 

Vice-président. 

Groenter , Professeur Vétérinaire , Secrétaire. 

Leroy-Jorimonr , Secr.-adjoint , chargé des archives. 

Terme, Docteur en Médecine , Secrétaire-Adjoint. 

Descaamrs, Trésorier. 


MEMBRES TITULAIRES. 


MEessiEURS 


1708. Grognier ; Professeur à l'école royale vétéri- 
maire. 


20 


306 Société royale d'Agriculture 
18o1. Le chevalier Nugues, #1, président de la Cour 
Royale , rue du Pérat. 

Mognat de l'Ecluse, propr., rue de la Sphère. 

1802. Carrel, propriétaire, quai de la Baleine. 
Bellet de St-Trivier, propr. rue de la Charité. 
Faissolles, propriétaire , à Vaise. 

Le comte de Moidière, #4 (Othon), adminis- 
trateur de la pépinière départementale, place 
Louis-le-Grand. 

1804. Passerat de Lachapelle, %, propriétaire, rue 

du Pérat. : 

1806. Leroy-Jolimont, propr., place du Change. 
Lombard, %, propriétaire , rue Sala. 

1807. Mognat de Liergues, propr., rue de lu Barre. 
Madiot, directeur de la pépinière départemen- 

tale, clos de l'Observance. 

1810. Pelletier, pharmacien , place du Plätre. 

De St-Didier , propriétaire , rue Sala. 

1811. Socquet , ancien professeur de la faculté à 

l’Académie de Lyon, rue St-Côme. 

Guerre avocat, aux Célestins. 

1812. Cochard, ayocat, place St-Jean: 

1815. Robin de Beauregard, &, propr., rue du Plat. 
Lacène , propr. , place Louis-le-Grand. 
Dujat-des-Alimes, propr. , place Louis-le-Grand. 
Rainard, professeur à l'Ecole royale vétérinaire. 

1814. Guillemet , ancien professeur de la faculté de 

l’Académie de Lyon, à Serin. 

Barre fils, pharmacien, place de la Comédie, 

1817. Dugas, adjoint à la mairie de Lyon, rue Royale. 


de Lyon. 307 
Muthuon , ingénieur en chef des mines ét usines, 
rue Rozier. 
Deschamps, pharmacien, rue St-Dominique. 
Bouchard-Jambon, mécanicien, rue de Vaubecour. 
Cazot , propriétaire, rue du Pérat. 
1818. Le chevalier de Martinel » 2 , colonel en re- 
traite, rue Sala. 
Le docteur Terme, rue du Peyrat. 
Bouthier de Borgard , rue du Plat. 
Jacquard , %, mécanicien, rue Vaubecour. 
Remond, propriétaire, rue des Augustins. 
anson, ancien chirurgien-major de l’'Hôtel-Dieu , 
quai de Retz. 
Acher , conseiller à la Cour royale, quai de la 
Baleine. 
Basset de la Pape #, rue St-Dominique. 
Tissier, professeur de chimie au musée des arts, 
Janson , juge au tribunal civil. 

1819. Balbis ; professeur de botanique, à la Déserte, 
Billon , propriétaire , petite rue des Feuillans. 
Michel, propriétaire, rue Puits-Caillot. 
Monnier, #, Avocat-général, rue St-Dominique. 

1820. Trolliet, médecin ; rue Puits-Gaillot. 

1821. Cavenne, %, ingénieur en chef des ponts et 

chaussées, rue du Plat. 
De Fréminville , conseiller de préfecture , rue 
rue du Pérat. 

Le marquis d'Herculais ; administrateur de la 
pépinière départementale , quai Monsieur. 
Mottard, directeur de la poste aux chevaux, 

rue Sala, 


308 Sociélé royale d'Agriculture 
Gensoul, %, ingénieur-mécanicien, à Ainay. 
1822. Foudras, naturaliste, rue du Palais. 
Gras, conseiller à la cour royale, rue du Pérat.. 
Poidebard , négociant, propriétaire. 
Gonin , chimiste , teinturier , quai St-Vincent. 
Coste, Conseiller à la Cour royale, rue St-Do- 
minique. 
1824. Cap, pharmacien , rue des Capucins. 
Seguin , ingénieur-mécanicien , rue St-Do- 
minique. 
Tabareau , professeur de physique au musée 
des arts. 
Fauché, %, pharmacien militaire en chef, hors 
les portes de St-Clair. 
Prunelle, médecin, place de la Miséricorde. 
Bouniols , ingénieur et propriétaire. 


ASSOCIÉS VÉTÉRANS. 


Messieurs 


Chancey, à Belleville. 

Frossard , naturaliste, à Paris. 

Lanoix , pharmacien, à la Guillotiére. 

Le Camus , à Paris. 

Roux, professeur émérite de la faculté des sciences, 
à Lyon. 

Willermoz, rue des Fantasques. 

Mouton-Fontenille , professeur d'histoire naturelle. 

Rey-Monléan, propriétaire. 

Rieussec, %#, Conseiller honoraire à la Cour royale. 

Le Comte Riverieulx de Chambost, 24 4% 

Eynard, médecin. 


de Lyon. 399 
ASSOCIÉS CORRESPONDANS. 


MRrsSsSIEURS 


Albanis de Beaumont, à Vernas. 

Le comte d’Albon , K, à Avranges. 

Arthaud de la Ferrière, # , à Pierreu. 

Arthaud, propriétaire, à Arles. 

Aulanier , propriétaire. 

Baunier , ingénieur des mines, à Paris. 

Begon, propriétaire, à St-Hippolyte. 

Belleval, propriétaire, à Montpellier. 

Boesse , &, propriétaire, à la Thenaudiére. 

Bonafous ( Matthieu ), à Turin. 

Le comte de Bondy ( C. % ), à Paris. 

Bonaire , &, ancien Préfet des Hautes-Alpes. 

Bravet, médecin , à Annonay. 

Brébisson, propriétaire, à Falaise. 

De Broal, % , juge de paix, à Mocizieux ( Isère ). 

Buniva , professeur de médecine, à Turin. 

Busson , ingénieur , à Paris. 

Cadet-de-Vaux, professeur émérite, à Paris. 

Cartier-Trolli, propriétaire, à Trolli. 

Le comte Chaptal, de l'Inst., (G. % 4), à Paris. 

Le comte Chasset, (G. #), à Paris. 

Le comte Chabrol de Crousol, %& , conseiller d'état, 
à Paris. 

Chenaud-Desportes, propriétaire, au Mans. 

Chirat aîné, % , juge de paix, à Souzy. 

Clément , ancien juge à la Cour de justice criminelle, 
à Montpellier, 


310 Socielé royale d'Agriculture 

Cuvier (le baron ), C. %, secrétaire perpétuel de 
l'Institut , à Paris. 

David , propriétaire, au Ripeau, près de Tours. 

De la Chance, à [1 Chance. 

Le baron de Gérando (O % ), de l'Institut, à Paris. 

Decaudole, de l'académie des sciences, à Genève. 

Depoix-Marescreux, propriétaire, à Marescreux. 

De Rosni, à Valenciennes. 

Deschamps, propriétaire , à Lausanne. 

De Truchi, %, officier de la garde royale, à Paris. 

De Vellay, professeur de mathématiques, à Lausanne. 

Le marq. d'Herbouville , pair de France C. &, à Paris. 

Desmarets, professeur à l’école vétérinaire d'Alfort. 

Dubouchage de Brangues, propriétaire, à Brangues, 

Dubouchage, propriétaire, à Grencble. 

Dumarché, propriétaire , à Pont-de-Vaux, 

Dumond, à St- Ouen ( Seine et Oise ). 

Duapalais, propriétaire, à Valence. 

Duvaure , propriétaire , à Crest. 

Fleury, propriétaire, à St-Vallier, 

Finguerlin, négociant , en Suisse. 

Le Comte François de Neufchâteau, de l'Institut, 
(G. %), à Paris. 

Gallois, ingénieur des mines, à Paris. 

Gasparin, propriétaire, à Oranges. 

Guettat, mécanicien, à Rive-de-Giers. 

Guérin, médecin, à Avignon. 

Guyettant, médecin , à Lons-le-Saunier, 

Hauteville, propriétaire, à Vevay. 

Le Vicomte Héricard-Ferrand de Thury, O #, ingé- 
nieur en chef des mines, à Paris. 


de Lyon. SII 
Hurtrel d'Arboval, à Boulogne-sur-mer. 
Huzard, # #, membre de l’Institut, à Paris. 
Huzard fils, médecin-vétérinaire, à Paris. 
Jussieu, % 1, membre de l'Institut, à Paris. 
Labbe , propriétaire, à Menufamille. 
Le comte Lacèpède, (G.O.%), membre de l'Ins- 

titut, à Paris. 
Lair, a Caen ( Calvados ). 
Lamarck , %, membre de l'Institut, à Paris. 
Lamartine, propriétaire, à Macon. 
Lapierre, professeur d'histoire naturelle, à Roanne, 
Le comte de Laurencin , % 3%, à la Chassagne. 
Le duc de Larochefoucauld , > O. %, pair de France, 
à Liancourt. 

Lavalette , propriétaire , à Grenoble. 
Latournelle, propriétaire , à Coligny. 
Leroy-Champfleury, propriétaire, à Genay. 
Martin aîné, %, médecin , à St-Rambert. 
Marcel de Serres, naturaliste, à Montpellier. 
Matthieu de Dombasles, à Nancy. 
Maurice, propriétaire , à Genève. 
Menjot - d’Elbenne, propriétaire , à Couléon. 
Molard , %, membre de l’Institut, à Paris. 
Le comte Najac, ( C. &), conseiller d'état, à Paris. 
Noël, % , professeur d’éloquence , à Paris. 
Palmiéri , botäniste, « Milan. 
Pictet de Rochemont , propriétaire, « Genève. 
Le chevalier Pierrard , &, à Verdun. 
Le marquis de Poncins, # , maire de Feurs. 
Posuel de Verneau, & , à Paris. 
Poutet, chimiste, à Marseille. 


312 Societé royale d'Agriculture 

Prost, médecin, à Paris. 

Rast-Dezarmans , # , ancien Secr.-gén. de la Préfect. 
au Mans. 

Raymond ;-%, professeur de chimie, à St-Vallier, 

Hippolyte de Rozières , à Messimi. 

Riche, propriétaire, à St- Alban. 

Le chevalier Riboud , % , à Bourg. 

Saint-Amans , à Agen. 

Saloz, vétérinaire, à Odessa. 

Scrheiïber , inspecteur divisionnaire en retraite, di- 

recteur des mines, à Alemont. 

Seguin , chimiste , à Annonay. 

Seguin , manufacturier , & Annonay. 

Servin-Cornon, propriétaire, à Cornon. 

Souligné , propriétaire, à Foule-Tourte. 

Silvestre, membre de l'Institut, %, à Paris. 

Tessier , de l'académie des sciences, # 4, à Paris. 

De Taluyers , à Ambronay, (Ain). 

Thiebault-de-Berneaud , l'un des bibliothécaires de 
la Bibliothèque Mazarine , à Paris. ‘ 

Thouin , jardinier en chef du jardin des plantes , 
à Paris. 

Le Comte de Tournon, ( # %#), pair de France, 
à Paris. 

Trouflaut, ancien professeur de botanique, à Autun. 

Vaivolet, propriétaire , à St-Lager. 

Valentin, % 4, médecin, à Nancy. 

Valot , professeur d'histoire naturelle, à Dijon. 

De Varenne-Fenille, 3% , à Bourg. 

Valoud , propriétaire, à Fleurieux sur l Arbresle. 

Vatel , professeur à l'école vétérinaire d’Alfort. 


de Lyon. 313 
Vidaillan , propriétaire, à Auch. 
Vitalis, propriétaire, à St-Vallier. 
Volta, professeur de physique , & Pavie. 
Waton, médecin, à Carpentras. 


Fin du Tableau des Memkres. 


314 Société royale d'Agriculture 


TABLE 
DES MATIÈRES. 


Sur l'introduction de végétaux dans le départ. du 
Rhône ; par Le Secrétaire. 


STATISTIQUE AGRICOLE 
DU DÉPARTEMENT. 


Statistique de la commune des Hayes ; par M. 
Cochard. 

Etat actuel de la magnonerie de M. Poidebard , à 
St.-Alban. 

Sur le même établissement ; par M. Trolliet 

Sur la statistique des récoltes en 1825. 

Rapport sur la statistique des récoltes en 1824 ; 
par le méme. 

Observations œnologiques , recueillies dans les 
années 1822 et 1823 ; par M. Rey-Monlean. 


ÉCONOMIE RURALE. 


Sur une charrue à tourne-oreille; par M. Chancey 
Sur la charrue belge; par M. Hiboud. 

Sur la même charrue ; par M. de Lachapelle. 
Sur la charrue Belge, par M. de St-Didier. 
Considérations sur les engrais ; par M. Faissolles. 
Sur le même sujet; par M. Billion. 


[ei 


48 
T: 


52 


de Lyon. 919 


Da charbon comme engrais; par M. Batillat. 

Assolement d'un domaine dans le département de 
l'Ain ; par M. Billion. 

Sur la greffe du noyer et celle du châtaignier ; 
par M. Chancey, 

Sur quelques variétés de chènes ; par M. Chancey. 

Sur divers sujets agronomiques extraits de la 
correspondance de M. Chancey. 

Sur le trèfle incarnat ; par M. le chevalier 
Charmetton. 

Greffoir de l’invention de M. Madiot. 

Sur l’ébourgeonnement des arbres fruitiers ; par 
le méme. 

Sur les semis d'arbres non acclimatés , et sur une 
couche économique , sans fumier ; par le méme. 

Sur le froment junciforme et l’elyme des sables, 
pour consolider les sables mouvans. 

Manière d'empècher les choux de monter; par 
le méme. 


Introduction du chanvre bolonais ; par le méme. 
SUITE DE L’'ECONOMIE RURALE. 


OPÉRATIONS agronomiques de M. de TALuYERS ; 
particulièrement sur les irrigations.( M. Gras, 
rapporteur ). 


RaPPpORT DE M, Gras. 


Culture des grandes et des petites prairies 

Du régime et de l'administration des grandes 
propriétés. 

De l'amendement des anciennes prairies, considéré 


59 
64 


69 
76 


77 


81 
82 


84 
83 
gt 


92 


95 


96 


99 


103 


316 Société royale d’Agricullure 
comme moyen d'améliorer les grandes pro- 
priétés. 

Application des principes précédens à la construc- 
tion d'un grand réservoir d'irrigation. 


HISTOIRE NATURELLE. 


Notes sur des buis étrangers ; par M. Madiot 
Sur trois espèces ou variétés d’alizier ; par le méme. 
Sur deux variétés d'aubépin; par le méme. 

Sur une variété de pommier et une variété de 
poirier ; par le méme. 

Sur l'agavé d'Amérique ; par le méme. 

Sur des insectes nuisibles à l'agriculture, et sur les 
moyens de s'en délivrer en leur opposant d’au- 
tres animaux ; par le méme. 

Notice sur une nouvelle variété de cyprès chauve; 
par M. de Fréminville. 

Notice sur une roche feldspathique smaragdifère ; 
par M. Tissier. 

Analyse de l'eau minérale de la Bonnette; par 
le même. 

Notice sur Antoine et sur Joseph de Jussieu; par 
M. Grognier. 


ARTS UTILES. 


Essai sur quelques branches de l'industrie fran- 
çaise ; par M. Beauvais. = Extrait par M. 
Grognier. 

Sur l'introduction de la race des moutons Dislhey ; 
par le méme 

Lettre de M. Terrct sur le mème sujet. 


10% 
117 
141 
160 
164 
166 


174 


172 


183 


197 


209 


218 


de Lyon. 317 


Notice sur l'art du boyaudier ; par M. Tissier. 221 


Usage de l'écorce de tilleul ; par M. Madiot. 224 
Sur une liqueur de table qu'on peut obtenir du 
chalef; par le méme. 229 
Sur l’huile de pepins de raisin ; par M. Batillat , 
corespondant. 226 
RAPPORTS. 
Sur les ponts en fil de fer ; par M. Seguin-aîné ; 
rapporteur M. Cochard. 232 
Sur une échelle graduée , inventée par M. Cham- 
beyron ; méme rapporteur. 236 
Sur une machine hydraulique , présentée à la So- 
ciété ; rapporteur M. Bouchard-Jambon. 240 
Sur un métier de M. Georges, fabricant d'’étoffes 
de soie ; rapporteur M. Gensoul. 241 


Sur les eaux minérales artificielles fabriquées par 

M. Laville Delaplaigne; rapporteur M. Fauché. 242 
Procédé proposé par M. le comte Dejan, pour la 

conservation des grains et farines ; rapporteur 

M Othon-de-Moidière. 247 
Description des machines et procédés spécifiés 

dans les brevets d'invention ; rapporteur M. 

Faissolles. 249 
Progrès de la distillation ; même rapporteur. 290 
Mémoire sur les terres cultivées dans l’arrondis- 

sement de St-Flour , par M. Devèze de Cha- 
briol ; même rapporteur. 251 
Notice sur la fabrication du fromage de Parmesan , 

par M. Huzard fils ; rapporteur M. Deschamps. 253 


Sur un semoir présenté par M. Bonafous ; rappor- 
teur M. Billion. 255 


318 Societé royale d'Agriculture 
Observations sur la machine Christian , à tiller le 

chanvre , par M. Pidancet ; rapporteur M. 

Leroy-Jolimont. 256 
Mémoire sur la méthode de faire le vin et sur 

la distillation ; rapporteur, M. Hemond. 261 
Mémoire sur l'objet et la division des travaux 

de la société d'agriculture de Montbrison ; par 

M. de Poncins. 262 
Mémoires de la Société centrale de Seine et Oise, 

publiés en 1825 ; rapporteur, M. Trolliet. 265 
Mémoires de zoologie , présentés par M. Des- 


marets ; rapporteur , M. Trolliet. 264 
OUVRAGES 1MIPRIMÉS OFFERTS À LA SOCIÉTÉ. 266 
ÉVÉNEMENS. 297 
NÉCROLOGIE. 294 

PROGRAMME 


De deux Prix, l'un pour la culture des Abeilles dans 
le département du Rhône ; l’autre, sur l'acclima- 
tation du chanvre bolonais, et de plusieurs Primes, 
proposés par la Société, pour être décernés en 1825 
et 1826. 


Eu 1825. 
Surer Des Prix. 
De la culture des Abeilles. 299 
Sur l’acclimatation du chanvre bolonaïs. 300 


1. Prime. Indiquer la meilleure charrue à 
tourne-oreille , pour labourer à plat, à la pro- 
foudeur de 9 à 12 pouces. ibid, 


de Lyon. 319 
2.me Prime. Comparer les effets de l'engrais de 
litière avec ceux d’un compost solide ou liquide.  3ox 
3.M€ Prime, Comparer les résultats de la culture 
du froment après les pommes de terre, etaprès 
d’autres plantes, telles que le trèfle, le chanvre, 
etc. 302 
4me Prime. Culture comparative de trois plantes 
oléiféres , le colza (brassica oleracea campes- 
tris ); le pavot des jardins , (papaver som- 
niferum) ; et la moutarde blanche , (sinapis 
alba. ) ibid. 
5.me Prime, Comparer , pour l'éducation des 
vers à soie, la feuille du mürier greffé avec 
celle da mürier non greffé , vulgairement dit 
Sauvageon. 303 
Conditions générales à remplir par les corcurens. bid. 
Tableau des membres. 505 


Fin de la Table des matières. 


ERRATA. 


Pages. 

64, lig. 24, il y trouve un système d’assolement ; 
lisez : le système d'assolement qu'il y trouva. 

92, lig. 25, Capitala ; lisez : capitata. 

93 , Note marginale, par le méme ; lisez : par M. 
Matthieu Bonafous. 

141, Dig. 12, Acer tartaricum ; lisez: Acer tata- 
ricum. 

145, lig. 25, Casuaria ; lisez: Casuarina. 

146, lig. 4, Columa ; lisez : colurna. 

149 , lig. 5, Chinensis ; lisez: Sinensis. 

150 , lig. 15, Ulicus Floridanus ; lisez : Illicium 
Floridanum. 

156, lig. 27, Typhinus ; lisez : typhinum. 

157, lig. 18, Spartinus albinus ; lisez : Spartium 
album. 

159, lig. 10, Viburnus punicifolius ; lisez : Vibur- 
num punicifolium. 

264, Note marginale, par M. Trolliet ; lisez : M. 
Foudras. 

265 , lig. 17e, Lyon, lisez: A/fort. 

26 ; Rapport sur la pépinière départementale, après 
la dernière ligne de la note (ci-après), lisez : 
(Note de M. Trolliet). 


AP 


( Ad SN 


olément } 
trouva. 


par M, 


cer talas 


Tlicium 


Spartium 
: Vibur= 
sez: M. 


e, après 
, lisez? 


Litk de Brunel à 


} 


Goff d What D 


NOTICE 
SUR M: DESCHAMPS, 


Paarmacten , Trésorier de la Société Royale 
d'Agriculture, Histoire naturelle et Arts utiles 
de Lyon, 


Par LE. SECRÉTAIRE, 
nn 


Imprimée par ordre de la Société. 


A LYON, 
DE L’IMPRIMERIE DE J.M. BARRET. 


ES —— 


1824. 


t» = g 
D SD UT 


, 


NOTICE 


M' DESCHAMPS. 


M. Nicoras-Amsnoise-Manrinx DESCHAMPS 
naquit en 1750, à St-Dizier, petite ville de 
Champagne. Sa famille, qui était fort hono- 
rable, jouit encore dans la province de beau- 
coup de considération. Après avoir fait de bonnes 
études au collége de Châlons-sur-Marne , il se 
destina à la médecine, et suivit des cours à l'hô- 
pital de cette ville; maïs un goût bien prononcé 
pour les sciences chimiques l’entraîna bientôt 
vers la pharmacie; et ce fut dans une humble 
officine de sa ville natale qu’il puisa les pre- 
miers élémens de cet art précieux. 

Bientôt apres, s'étant rendu à Paris , il entra 
chez MM. Cadet et Desrones, qui tenaient à 
cette époque le premier rang parmi les pharma- 
ciens de la capitale. Tout en s'exerçant aux ma- 


(4) 

nipulalions pharmaceutiques dans un laboratoire 
renommé , il étudiait la théorie de l'art à l'école 
des Rouclle, des Macquer , des Beaumé. Témoins 
de ses progrès, et pleins de confiance dans sa 
probité, MM. Cadet et Desrones lui confièrent la 
direction de leur établissement, et il put con- 
cevoir l'espérance de leur succéder. Cependant 
l'excès du travail altéra sa santé, et les médecins 
lui ordonnèrent Pair du Midi; il vint à Lyon, 
y connut M. Fleurant, pharmacien très-distin- 
gué, dont il devint le successeur. 

Avant que M. Deschamps s'établit dans notre. 
ville, on y étiquetait d’une manière inintelligible 
et barbare les médicamens , et cela non-seule- 
ment sur les vases qui les recèlent à loffcine , 
mais encore sur les enveloppes dont on les re- 
couvre pour les porter au dehors. Il introduisit 
à Lyon l'usage suivi à Paris dans cette partie du 
service médical. Les médicamens qui sortaient 
de sa pharmacie étaient dénommés avec une élé- 
gance typographique inconnue jusqu’à lui aux 
pharmaciens lyonnais. 

Il coulait des jours tranquilles dans le sein de 
ses utiles et honorables occupations ; il arrivait 
lentement , mais d’un pas sûr, à une fortune 
qui n’est pas toujours la récompense de services 
rendus à la société , lorsque la révolution éclata. 
Qui a pu rester tout à fait étranger à ce terrible 
mouvement ? M. Deschamps , dont le caractère 


C5) 

était si doux, si ennemi du bruit et de l’osten- 
tation, ne put réussir. à rester ignoré dans son 
laboratoire et dans son officine. Mais quel rôle 
joua-t-il ? on le nomma en 1789 membre du 
comité de bienfaisance de sa section. L'année 
suivante , il était , dans la garde nationale, ca- 
pitaine de la première compagnie de grenadiers 
de son arrondissement. Lyon ayant pris les armes 
contre l'anarchie, le poste de M. Deschamps ne 
pouvait pas être sur les remparts dela ville assié- 
gée; il fut attaché comme pharmacien de pre- 
mière classe à l'hôpital militaire. Ce fut en pré- 
parant les moyens de soulager et de guérir les 
Lyonnais blessés au champ d'honneur qu'il paya 
son tribut à sa patrie adoptive. 

Après la chute de Lyon, il dut être en butte aux 
fureurs révolutionnaires. Le plus acharné de ses 
dénonciateurs fut Dorfeuille, digne ami de Col- 
lot-D’herbois , qui, comme ce dernier avait été 
comédien , et qui était descendu des tréteaux pour 
s'asseoir sur un tribunal de sang. Dorfeuille qui 
ne pouvait faire un crime à M. Deschamps d'avoir 
préparé des remèdes pour des blessés , parmi les- 
quels s’étaient trouvés des prisonniers de l’armée 
assiégeante , Dorfeuille accusa M. Deschamps 
d'entretenir des relations avec des familles de 
nobles. Celui-ci fut obligé de quitter son domi- 
cile, d'abandonner sa pharmacie pour aller cacher 
son existence dans un réduit obscur ; il y resta 


(6) 
jusqu’au 9 thermidor. Dès qu'il reparut à sa 
section , on le nomma successivement assesseur 
du juge de paix , et officier municipal. 

Le plutôt qu’il le put il quitta les fonctions pu- 
bliques pour se renfermer dans la sphère de ses 
modestes et honorabies travaux. 

Toujours entouré de l’estime publique, on le 
vit président de la société de pharmacie , tréso- 
rier de la société de médecine, adjoint au jury 
médical du département , enfin trésorier de notre 
société. 

Il avait appartenu précédamment à une société 
d'amis des arts et de l’agriculture dans le sein 
de laquelle des cours gratuits avaient élé ouverts; 
c'est-là qu'il avait fait connaître les premières 
découvertes qui,ant changé ka face de la chimie. 

Comme chimiste, il s'adjoignit dans la suite 
à la société des amis du commerce et des arts, 
et il s’y fit remarquer par plusieurs rapports 
importans. 

C’est tout à la fois comme chimiste et comme 
agronome qu'il est venu s'asseoir parmi nous. 

Déjà il avait communiqué à la société de mé- 
decine de notre ville deux mémoires intéres- 
sans. Dans l'un il avait cherché à expliquer les 
phénomènes. qui se passent pendant les décoc- 
lions des végétaux , et déterminer la nature des 
dépôts qui se forment alors. C'est principalement 
avec le quina jaune qu'il avait opéré; et quoique 


(ro 
les résultats de ses recherches ne soient plus ad- 
mis aujourd'hui, on ne peut disconvenir qu'ils 
n’ayent concouru à mettre d'autres chimistes sur 
la voie de la découverte très-moderne des vrais 
élémens de l’une des substances médicales les 
plus héroïques. 

L'objet de l'autre mémoire était un procédé pour 
préparer un extrait s5ommeux d'opium , dépouillé 
de sa qualité narcotique et vireuse. Combien 
d’autres chimistes recommandables avaient dirigé 
leurs recherches vers cette chimèré pharmaco- 
logique ! 

Les recherches de M. Deschamps étant anté- 
rieures aux travaux entrepris sur l’opium paf 
MM. Desrones fils, Sestuerner , Seguin et Robi: 
guet , est-il étonnant qu’il n'ait pas connu alors 
la morphine , l'acide méconique , Vopiane , narcoline 
naguères sel essentiel de M. Desrones? Qui sait 
si ces principes immédiats ainsi qué les acides , 
les alcaloïdes , les substances sui generis qui au- 
jourd’hui se présentent en foule dans toutes les 
analyses végétales , ne feront pas bientôt place à 
d'autres principes mieux déterminés | 

Quoi qu'il en soit, la plupart des praticiens 
regardent encore l'extrait opiacé soluble dans l'eau 
comme la préparation d'opium la plus certaine 
et la plus efficace; c'est celle que M. Deschamps 
isolait avec soin, sous le nom d'exfrail gommeux. 
Sous celui de sel essentiel il avait entrevu loprane 


CR. 
et la morphine , il avait vu ces principes accom- 
pagner la solution aqueuse, et il les soupçon- 
nait dépositaires des vertus de l'opium , il pro- 
posait même de les essayer isolément. 

Ces deux mémoires ne sont pas les seuls tri- 
buts qu'il ait payés aux sociétés de médecine et 
de pharmacie. Il leur a encore communiqué des 
observations sur les causes de la coloration en 
rouge des cataplasmes de verveine que le vulgaire 
attribue à une exhudation sanguine, tout en 
concluant de cette supposition les vertus vulné- 
raires de la plante. 

Il leur fit part des faits nombreux qu'il avait 
recueillis sur des infusions et décoctions mêlées 
ensemble , attribuant les dépôts qui se forment 
dans ces mélanges principalement à la décom- 
position d’un sel calcaire par un principe as- 
tringent. 

IL proposa d'extraire par ébullition plutôt que 
par expression le beurre de cacao, il prouva, 
contre M. Demachy , pharmacien de Paris, que 
le corps gras obtenu par ce procédé était beau- 
coup plus abondant et nullement altéré. On 
accuse ce produit d’être plus sujet à se rancir; 
mais ne peut-on pas le préserver de cette détério- 
ration en le purifiant et le conservant avec soin ? 

Les autres mémoires dont M. Deschamps a en- 
richi les porte-feuilles des sociétés de médecine 
et de pharmacie sont relatifs aux fumigations 


(9) 

de graines de jusquiame ; à l'indispensable néces- 
sité de n’employer le muriate de baryte que dans 
de l’eau distillée ; à la solubilité aqueuse de la 
crême de tartre par l'intermède du borate de 
soude ; à la purification des aluns artificiels ; à 
l'analyse d'une prétendue eau minérale, trouvée 
dans les environs de Villefranche. Quelques-uns 
de ces mémoires ont été recueillis dans un jour- 
nal de pharmacie que fondèrent en 1797 Par- 
mentier, Deyeux et Fourcroy. 

Il me reste à rappeler les travaux dont M. 
Deschamps a bien voulu nous communiquer les 
résultats, 

En 1805, il présenta l'analyse d’une terre 
marneuse trouvée près de Lyon, et il reconnut 
qu’elle était trop pauvre en parties calcaires pour 
servir d'amendement. 

Quelque temps après, il se livra à des recher- 
ches sur le principe colorant de la graine du Ba- 
sella rubra L. , et il en obtint différentes nuances 
d'un beau rouge. L'Hyacinthus Botrioides lui 
donna des couleurs bleues bien prononcées. 

Ils'attachait dans le même temps à la recherche 
du principe colorant qui existe dans la pellicule 
des raisins noirs. Il prouva contre l'opinion com- 
mune, que ce principe n’est point résineux, mais 
extracto-savonneux , se dissolvant dans l'alcool 
comme dans les liquides aqueux. La couleur peut 
donc se développer dans le moût, indépendam- 


(ro) 

ment de l'alcool formé pendant la fermentation ; 
et il est facile de colorer les vins en jetant dans 
Ja cuve des pellicules de raisins noirs ramassés 
pour cet usage et bouillis dans le moût. Ce n’est 
pas sans succès que M. Deschamps a mis en pra- 
tique son procédé , et il a eu des imitateurs. 

Déjà M. Deschamps avait cherché à appliquer 
le principe colorant de la pellicule des raisins 
sur la laine et la soie, et les résultats de ses re- 
cherches sur cet objet important avaient été 
communiqués tant à notre société qu’à celle 
du commerce et des arts de Lyon. Des rapports 
favorables avaient été présentés à la suite d’ex- 
périences concluantes par MM. Raymond et 
Gonin juges bien compétens en cette matière. 
L'invention de M. Deschamps fut adoptée par 
la société d'encouragement pour l’industrie na- 
tionale, qui siégeait à Lyon. (1) Elle figura 
avec honneur à l'exposition du Louvre. Qui n’eût 
dit que l’industrie française s'était enrichie d'un 
nouveau moyen tinctorial , et qu'une substance 
indigène dont la source est, pour ainsi dire, 
inépuisable , allait être substituée à des produits 
qui nous arrivent à grands frais d'un autre 
hémisphère ! Mais le propre de la routine est 
de rejeter, sans examen et avec obstination , tout 


(1) Cette société de bien public a été dispersée par le 
malheur des temps. On se demande depuis plusieurs années 


qu’elle est la cause qui s'oppose à sa restauration. 


Cu) 

ee qui n’est pas ancien ; heureusement que son 
empire n’est pas éternel; et il nous est permis 
d'espérer que tôt ou tard les pellicules de raisin, 
comme les feuilles de pastel, comme les fleurs de 
carthame, remplaceront dans nos ateliers, de 
teinture des végétaux étrangers. 

* On doit considérer comme appartenant à notre 
sol , les plantes qui s'y sont acclimatées , tel est 
le thé du Mexique , Chenopodium Ambrosioïdes , 
que l'on cultive depuis long-temps en Portugal , 
et que M. Deschamps avait vu prospérer en pleine 
terre sous le climat de Lyon. Il avait étudié 
cette plante, il en avait fait des infusions théi- 
formes , faciles à confondre avec le thé de la 
Chine ; il lui supposait même des qualités su- 
périeures, et il proposait de l’introduire dans 
l'horticulture et dans la matière médicale. 

Il s’étonnait de ce qu’on avait négligé jusqu'ici 
la gesse tubéreuse , vulgairement gland terre , 
Latyrus Tuberosus. I en avait fait cuire les tu- 
bercules dans l’eau et sous la braise. 

Il présenta à l'auteur de celte notice et à 
d'autres personnes ce mets nouveau, qui fut 
trouvé de bon goût. Pourquoi ne pas adopter une 
légumineuse très-rustique , dont les feuilles se- : 
raient un excellent fourrage, et les tubercules 
une ressource alimentaire, non-seulement pour 
les animaux, mais encore pour l'espèce humaine. 

Emule de Parmentier, M. Deschamps aimait 


C12) 

à diriger ses recherches vers les moyens d’aug- 
menter la masse des subsistances et d'améliorer 
le sort des classes malheureuses , il composa 
pour les paysans de la Bresse un vinaigre de petit- 
lait, bien préférable à celui qu'on débite dans les 
campagnes , lequel, pour l'ordinaire, doit sa force 
à de la pyrèthre, à du poivre long. Le vinaigre 
de M. Deschamps , bien pur, très-salubre , assez 
fort pour tous les usages, ne peut pas coûter 
plus de 15 centimes la bouteille. 

Toujours conduit par des vues d'économie phi- 
lantropique, il donna une formule de boisson 
rafraîchissante ; c'est une limonade artificielle , 
composée d’une macération de réglisse , dans” 
laquelle on a versé de l'acide sulfurique et de 
lesprit de citron. * 

Quelque temps après, il se demanda pourquoi, 
dans la fabrication de la bière , on rejetait 
comme un inutile résidu le germon d'orge»: 
vulgairement nommé {ourraillon ; il essaya cette 
substance , comparativement avec l'engrais de 
litière , et il s'assura que même à pelite dose, 
son activité était plus énergique. (1) 

Nous devons à M. Deschamps la connaissance 
d’un autre engrais; c’est un compost analogue 
a celui qui, sous le nom de Gadoue artificielle , 


(1) La vertu fertilisante de cette matière fut confirmée par 


Panalyse chimique que M, Deschamps fils s’empressa d’en 
faire. ” 


| (15) 

s'est introduit dans la plaine du Dauphiné voi- 
sine de Lyon. M. Deschamps s'était montré par- 
tisan zélé de ce dernier engrais , il le regardait 
comme très-propre à fertiliser un sol léger et 
sablonneux ; mais on l'a jeté sur toutes sortes de 
terrains, sans aucun égard au temps opportun 
pour son emploi ; on l'a d’ailleurs fabriqué sans 
soins et sans précautions. Est-il étonnant que 
n’en ayant pas obtenu les effets merveilleux qu'on 
en attendait , on soit tenté de l’abandonner ? 

La plupart des innovations agronomiques quel- 
que soit leur degré d'importance et d'utilité, 
sont d’abord annoncées avec éclat; elles sont en- 
suite appliquées sans intelligence et à contre- 
temps ; on n’en obtient point les prodiges dont 
on s'était flatté, et au lieu de se contenter des 
fruits qu’elles doivent naturellement produire, 
on les rejette avec plus de promptitude qu’on 
ne les avait adoptées ; on finit cependant par les 
apprécier à leur juste valeur , et dès-lorselles s’éta- 
blissent et se propagent d'une manière durable. 

Tout en cherchant à perfectionner l’engrais 
nouveau, très - improprement nommé Gadoue 
artificielle, M. Deschamps était bien convaincu 
que cette amélioration n'aurait pas une destinée 
diflérente. 

Je n'ai pas signalé tous les travaux de cet 
habile et sage agriculteur, je n’ai rien dit de la 
manière dont il cultivait ses vignes , dont il gou- 


(14) 
vernait ses cuves, dont il dirigeait toute l’exploi- 
tation de son domaine. 

Les essais auxquels il s'était livré , les succès 
qu'il avait obtenus n’ont pas été consignés dans 
des mémoires, mais ils ont été l'objet de plu- 
sieurs discussions lumineuses, dont les traces 
subsistent dans les procès-verbaux des séances 
de la société. 

En outre des rapports écrits dont M. Deschamps 
a enrichi le porte-feuille de cette compagnie, 
combien de rapports verbaux tous pleins d’inté- 
rêts ne lui a-t-il pas présentés sur des questions 
de chimie , d’agronomie, d'économie industrielle ! 

Admis au sein de la société dès les premières 
années de sa restauration, nul ne fut plus exact 
aux séances ; trésorier de la société, il en a, 
pendant longues, années rempli les fonctions 
avec un zèle à toute épreuve. 

Faut-il maintenant peindre cet excellent 
homme dans l'intérieur de son domestique ? 
Fermement attaché à la religion de ses pères , il 
en pratiquait en silence les préceptes divins ; 
il était le modèle de ces vertus privées qui seront 
toujours la garantie la plus sûre des vertus pu- 
bliques. Bon époux , excellent père, il était Pobjet 
de la tendresse respectueuse des siens, et parmi 
eux on eût confondu les jeunes gens qui rece- 
vaient chez lui les premiers élémens de l'art 
pharmaceutique. 


(235) 

I surveillait leur conduite, il dirigeait leurs 
mœurs , il prenait un vif intérêt à leurs progrès. 

Tous les soirs, lorsque l'heure de la retraite 
avait sonnée , il les appelait auprès de lui, et 
dans des conférences paternelles qui, pour l'or- 
dinaire se prolongeaient bien avant dans la nuit, 
il leur demandait compte des opérations de la 
journée , il leur expliquait la cause des phéno- 
mènes divers qui avaient frappé leurs sens; il 
leur enseignait à ramener à de sages théories les 
faits qu’ils avaient recuellis, il s’attachait surtout 
à leur inspirer de l'amour et du respect pour 
la profession qu’ils avaient embrassée. 

Cette profession qui suppose un esprit juste 
et lumineux , des études préliminaires soignées, 
des connaissances étendues sur l'histoire natu- 
relle et la chimie, des notions positives sur plu- 
sieurs branches de la médecine, beaucoup d'or- 
dre , de sagesse , d'assiduité , une probité sévère, 
une délicatesse à toute épreuve ; cette profession 
est loin d'occuper en France dans l'estime pu- 
blique le rang dont elle est digne; mais si chez 
nos voisins elle est mieux appréciée, c’est sans 
doute parce qu’ils ont su se préserver d'une hon- 
teuse et déplorable facilité dans l'admission aux 
professions savantes. 

Quel état serait plus respecté que celui de 
pharmacien , si ceux qui l’exercent pouvaient 
être comparés à l'homme de bien dont je me suis 
eHorcé de retracer les services et les vertus ! 


(16) 

Îl a laissé, dans sa carrière, un frère, un fils, 
plusieurs élèves dignes de lui. 

M. Deschamps jeune s'est fait remarquer par 
d'importans travaux sur les extraits des plantes, 
l’analyse du quina, et une polémique vigoureuse 
contre les coryphées des doctrines chimiques qui 
régnaient au commencement du siècle. M. Des- 
champs fils a, dans les dernières années de son 
respectable père , dirigé son laboratoire et son 
officine. Déjà il a enrichi de plusieurs bons mé- 
moires le porte-feuille de la société qui lui a 
confié les fonctions de trésorier que son père a 
laissées vacantes. 

Parmi les élèves de M. Deschamps , plusieurs 
se sont distingués , tels sont M. Bussy, aujour- 
 d’hui professeur adjoint dans une école de chimie 
de Paris, et M. Bieétrix qui, dans un grand 
concours de botanique, de chimie, de pharmacie 
ouvert à la capitale , vient d'obtenir plusieurs 
couronnes. 

Les succès de ces deux jeunes savans ont charmé 
les derniers jours du bon vieillard. 

Il a terminé son utile et honorable carrière 
le 12 novembre 1823, étant âgé de 73 ans. 


GROGNIER. 


NOTICE 


SUR 


M*' WILLERMOZ, 


Membre de la Société royale d'Agriculture 
de Lyon, 


Par M. Tenue, D.-M.-P. 


Mrssisurs, 


Si, lorsque la mort frappe une jeune vic- 
time , nous sommes accablés d'un douloureux 
effroi, nos regrets, quoique prévus, ne sont 
pas moins vifs lorsque sa faux inévitable vient 
à trancher les jours d’un vieillard , reste pré- 
cieux d’une génération éteinte, souvenir vivant 
d’un temps qui n’est plus. Nous voyons alors 
se briser sans retour le lien qui nous rattachait 
au passé; et si le jeune homme emporte avec 
lui de brillantes espérances qu'il n’eût peut- 
être jamais réalisées , le vieillard en mourant 
nous ravit les utiles leçons d'une sagesse mûrie 
par l'expérience des hommes et des choses. 
Ce triste sentiment , Messieurs , vous l'avez 


(2) 

éprouvé plusieurs fois dans l’espace de peu de 
mois. Vous avez vu successivement s'éteindre 
MM. Rast, Deschamps et Willermoz. Une 
plume éloquente vous a retracé les vertus pu- 
bliques et privées des deux premiers : je viens 
aujourd'hui rendre à M. Willermoz un hom- 
mage bien mérité par celui qui parcourut ho- 
norablement une longue carrière. 

M. J.-B. Willermoz naquit à Lyon le ro 
juillet 1730 , au sein d'une famille recomman- 
dable. Ses premières études furent confiées à 
un vénérable ecclésiastique dont il conserva tou- 
jours un tendre souvenir : il en avait achevé le 
cours à douze ans dans le collége des Jésuites. 
Peu d'années après , ayant embrassé le com- 
merce des riches étofles de soie , dont notre 
ville fournissait alors toutes les Cours de l'Eu- 
rope , il fut appelé à faire de nombreux voyages 
à Paris , dans toute l'Allemagne et en Angle- 
terre , et y forma des relations intimes avec 
quelques hommes distingués de cette époque. 
Doué d’une tête pensante et d'un caractère ré- 
fléchi , il trouva dans les sciences morales un 
puissant attrait , et leur donnant toujours pour 
base la religion, il se livra à leur étude avec 
une vive ardeur. Ces travaux adoucirent l’amer- 
tume des maux dont , jeune encore , il se 
vit accablé ; mais s'il put les supporter avec 


(3) 

un courage qui ne se démentit jamais , il le 
dut surtout à sa pieuse résignation et aux conso- 
lations que lui prodiguait une sœur chérie, 
Mad. V.€ Provençal, femme d'un mérite supé- 
rieur et trop peu connu, vrai philosophe chré- 
tien qui , à tous les dons de l'esprit , à l’ins- 
truction la plus solide , savait unir la piété 
la plus éclairée , toutes les vertus sociales et 
toutes les qualités du cœur. Ils étaient dès-lors 
tous deux connus par leur attachement aux prin- 
cipes d’une association célèbre dont M. Willer- 
moz fut un des membres les plus influens , et 
dont plus tard il tenta vainement de ranimer 
les cendres déjà refroidies. La haute considé- 
ration que ses connaissances lui méritèrent, lui 
donna de nombreuses relations avec des Princes 
régnans et plusieurs autres personnages d'un 
rang élevé. Par suite de ces rapports , dont il 
conserva quelques-uns jusqu’à la fin de sa vie, 
et dans lesquels il sut allier le respect dû 
aux Grands de la terre avec le respect que 
l'homme se doit à lui-même, plus d’une fois 
il lui fut offert, avec instance , des places lu- 
cratives et des dignités éminentes ; mais il pré- 
féra toujours sa patrie et la tendresse de sa fa- 
mille à l'or et aux faveurs d’une cour étrangère. 

Nous devons le dire ici: l'opinion publique, 
injuste seulement envers ceux qui s'enveloppent 


(4) 

de mystères , a trop souvent placé M. Wil- 
lermoz dans les rangs d’une foule d’adeptes 
avec lesquels il n'eut jamais de commun que 
certaines désignations vagues et insignifiantes, 
mais dont il repoussait les principes avec d’au- 
tant plus de sincérité qu'il en connaissait mieux 
les dangers et les funestes conséquences. Vous 
n’en sauriez douter, Messieurs, vous qui avez 
connu sa noble franchise et sa piété profonde; 
nous pouvons surtout l’attester, nous , ses pa- 
rens , ses amis, pour qui il fut comme un livre 
ouvert et instruclif, nous qui avons trouvé dans 
sa conduite de si généreux exemples, et re- 
cueilli de sa bouche de si utiles conseils. 

M. Willermoz avait 60 ans, lorsqu’en 1790 
il fut nommé administrateur de l'Hôtel-Dieu 
de Lyon. Une santé robuste conservait en lui 
cette vigueur de l'esprit et cette énergie de l’ame 
que vous avez encore admirées trente ans plus 
tard. Incapable de remplir aucun devoir à demi, 
son premier soin fut de s'instruire de tous ceux 
que lui imposaient ses nouvelles fonctions ; en 
examiner , en connaître toutes les parties furent 
ses premières pensées, remédier aux abus et ré- 
gulariser le service, fut le but de tous ses efforts. 
Déjà il avait contribué à introduire de nom- 
breuses améliorations , lorsque le char révolu- 
tionnaire, poussé par une puissance irrésistible , 


(5) 
après avoir renversé tous les obstacles, écrasé ses 
guides eux-mêmes , sembla entraîner la France 
dans un profond abîme. Lyon épouvanté des 
convulsions qui agitaient le gouvernement; Lyon 
menacé et déjà atteint dans ce qu’il avait de 
plus cher, son industrie, sa fortune, la vie de 
ses citoyens ; Lyon crut devoir s’armer contre 
la plus dangereuse des tyrannies , celle qui se 
couvrant du nom de la liberté n'était que le 
despotisme de l’anarchie. M. Willermoz prévit 
les maux, suite d’une lutte trop inégale. Comme 
administrateur de l'intérieur , il se hâta de faire 
des approvisionnemens considérables. Cepen- 
dant le danger devenait pressant; tousses collè- 
gues avaient fui; mais la pensée d’abandonner le 
dépôt confié à son zèle ne se présente point à son 
esprit. Bientôt une ligne de fer nous enve- 
loppe ; le siége commence ! Vainement il fait 
arborer sur l'Hôtel-Dieu le drapeau noir : les 
images suppliantes de la douleur et de la mi- 
sère, loin d’attendrir les haines civiles , les irri- 
tent, et leur servent de point de mire pour 
diriger sur l'asile sacré des pauvres leurs feux 
destructeurs. L’incendie éclate de toutes parts. 
Le zèle de l’administrateur a tout prévu : dans 
la seule nuit du 24 août, quarante-un foyers 
enflammés sont éteints. M. Willermoz est par- 
tout ; il semble se multiplier ; il fait enlever les 
* 


(6) 
malades des rangs embrasés, les fait transporter 
sous les voûtes , il les porte lui-même; et lors- 
qu'effrayés des périls qui l’environnent , ses 
amis le pressent de se retirer , il répond : La 
Providence m'a placé ici, je reste à mon poste. 

Les malades furent transférés au couvent des 
deux Amans et aux Cordeliers de l'Observance : 
là ils purent souffrir avec plus de sécurité Ce- 
pendant la famine se fit bientôt sentir dans la 
ville ; les autorités connaissant les approvision- 
nemens de l'Hôtel - Dieu , crurent pouvoir les 
faire enlever, mais la résistance de M. Villermoz 
fut invincible, et le pain des pauvres , celui des 
Frères et des Sœurs qui les soignaient, fut con- 
Servé par la présence d'esprit et Je courage d’un 
seul homme. 

Après la prise de Lyon, les Loti de la 
convention furent plus funestes à cette cité que 
ne lavaient été ses soldats. M. Willermoz fut 
arrêté : on lui faisait un crime d’avoir sauvé 
l'Hôtel-Dieu. Indigné, il osa reprocher aux 
représentans leur cruauté. On le reconduisait 
en prison , lorsque le dragon , à la garde duquel 
il était confié , frappé de son courage et touché 
sans doute à l’aspect de cette figure sur laquelle 
étaient empreintes la noblesse et la probité, lui 
dit : citoyen , {u m'as l'air d'un brave homme, sau- 
ve-loi. Au milieu des crimes qui couvraient la 


ua, 
France dans ces temps orageux , de pareils traits 
consolent et ne doivent point être abandonnés à 
l'oubli. M. Willermoz trouva un asile impéné- 
trable ; mais son ame fut déchirée de douleur en 
apprenant que tandis qu’il sauvait sa tête, celle 
du plus jeune deses frères roulait sur l’échafaud ! 

Peu d'années après on se ressouvint des ser- 
vices rendus, et M. Willermoz fut de nouveau 
appelé à l'administration des hospices, adminis- 
tration qui réunissait alors la Charité à l'Hôtel- 
Dieu. Le sol était encore agité et le ciel encore 
ému des tempêtes de la veille; mais rien ne 
pouvait retenir M. Willermoz, lorsqu'il s'agissait 
du bien public. Il fit partie de cette commission 
de cinq administrateurs chargés de rassembler 
les biens des pauvres qui avaient été dispersés , 
et de réparer le mal qui avait été fait. Il consacra 
à ce devoir toute son activité, toute son énergie, 
et prépara ainsi les succès des administrateurs 
à venir, 

Le pouvoir de cette époque convaincu sans 
doute, ainsi qu'on l'est généralement aujour- 
d'hui, qu’une administration doit être respon- 
sable, et par conséquent salariée , offrit des 
émolumens à la commission qu’il appelait à la 
direction des hospices ; mais cette commission 
refusa tout salaire, et pour sa part M. Willer- 
moz n'a jamais rempli que des fonctions gratuites. 


(8) 

Ce ne fut pas seulement dans l'intérieur 
des hospices que la commission administrative 
déploya son zèle et mérita la reconnaissance: de 
ses concitoyens. C’est encore elle qui, appuyant 
la résistance des autorités locales aux ordres 
réitérés du gouvernement , pour la vente du 
palais de St-Pierre , eut l’heureuse pensée de le 
réclamer en payement des sommes dues aux 
hôpitaux , et arracha ainsi ce superbe monu- 
ment aux mains avides et destructives de ligno- 
rance. 

Qu’elle serait grande la folie de l'homme qui 
chercherait la récompense de ses travaux dans 
le jugement de ses contemporains ! Les repré- 
sentans du peuple avaient fait un crime à M. 
Willermoz de ses efforts pour arracher l'Hôtel- 
Dieu à la destruction ; et de nos jours quelques 
esprits chagrins lui ont reproché d’avoir travaillé 
sous le directoire à rétablir cet admirable té- 
moiïgnage de la piété de nos pères. Ainsi les cir- 
constances changent, et trop souvent les hommes 
avec elles ; mais les passions se succèdent et 
restent les mêmes. M. Willermoz avait sur la 
vertu des idées plus fixes et plus positives ; il 
pensait que sous tous les régimes les malheureux 
étaient ses frères. Il était convaincu que la cha- 
rité est toujours légitime. Si nous pouvions être 


n] 


entendus de ces hommes à qui de si terribles 


C9) 

leçons n’ont point encore appris l’indulgence , 
nous leur dirions : vainement vous renversez le 
marbre chargé de rappeler aux pauvres les noms 
de leurs bienfaiteurs, vous ne sauriez étoufler 
la voix de la reconnaissance (1); plus vainement 
encore vous refusez à l'homme de bien le secours 
de vos prières (2); celui qui sonde les cœurs et 
pénètre les plus secrètes pensées , le jugera dans 
sa justice et le récompensera dans sa bonté. 

Tous les malheureux sans doute ne sauraient 
trouver un asile dans les hospices, et les bureaux 
de bienfaisance ainsi que la commission admi- 
nistrative de cette institution fournirent à M. 
WVillermoz de nombreuses occasions de signaler 
son zèle et sa charité. 

A l'âge de 70 ans, M. Wiillermoz fut nommé 
membre du Conseil-général du département du 
Rhône , et dans ces nouvelles fonctions il ap- 
porta de grandes lumières , un caractère indé- 
pendant et la plus vive ardeur pour le travail. 
Toujours infatigable, il rendit d'importans ser- 


(1) Un marbre placé à l'Hôtel-Dieu rappelait. aux pauvres 
les noms des cinq membres de la Commission administrative 
dont nous venons de parler : depuis quelques années il a 
disparu. 

(2) Lorsqu'un ancien administrateur vient à mourir, l’ad- 
ministration des Hospices fait eélébrer le service divin pour 
Je repos de son ame, Cette piense consolation a été refusée 
à la cendre de M, Willermos. 


(10) 

vices à son département , contribua au réta: 
blissement de larchevéché , présenta à toutes 
les sessions de nombreux et lumineux rapports 
sur les finances et particulièrement sur les amé- 
liorations à introduire dans le régime des pri- 
sons. Malgré son grand âge , l’estime de ses 
concitoyens et des autorités lobligea, à trois 
reprises différentes , de continuer des fonc- 
Uons qui semblaient au-dessus de ses forces , ‘et 
qu'il n'abandonna pas avant quatre-vingt-cinq 
aps. 

Mais tous les instans de M. Willermoz n'é- 
taient pas donnés aux sciences et aux fonctions 
publiques, il en consacrait encore à cultiver des 
relations chères à son cœur et précieuses à son es- 
prit. Parmi les hommes distingués qui lui furent 
unis par les liens de l'amitié , pourrais-je oublier 
un nom cher à votre souvenir , celui de l'abbé 
Rozier ? M. Willermoz partagea cette honorable 
amitié avec son frère le médecin, et plus d'une 
fois les conseils de tous les deux furent utiles à 
la perfection du magnifique monument que le 
Columelle français élevait à l’agriculture. Dès 
l'origine de la société d'agriculture du départe- 
ment du Rhône, l’ami de Rozier vint s'asseoir au 
milieu de vous : il vous apportait régulièrement 
les résultats de ses expériences œnologiques, et 
tous les ans il enrichissait votre compte rendu 


ŒT) 
d’un tableau d'observations météorologiques faites 
avec la plus scrupuleuse exactitude. 

Vous peindrai-je M. Willermoz dans l'in- 
térieur de sa famille ? Il eut toutes les vertus 
privées ; mais plus qu’un autre, il fut accablé 
de chagrins et appelé à une courageuse résigna- 
tion. L’aîné de douze frères et sœurs , il resta 
seul. Uni dans un âge avancé à une femme 
jeune et aimable , il la vit succomber à une 
maladie douloureuse : enfin le seul fils qui lui 
restât, son unique espérance, celui qui devait 
fermer ses paupières appesanties par les années, 
expira dans les bras de son père au moment où 
il semblait promettre de douces consolations à sa 
vieillesse. C'est surtout dans cette cruelle circons- 
tance que nous avons admiré le courage de M. 
WVillermoz; nous Pavons vu au milieu de la 
longue et cruelle agonie de son fils, se précipiter 
au pied du Christ, et, nouvel Abraham, lui 
offrir en sacrifice ce qu'il avait de plus cher. 

Tant de pertes remplirent d’amertume les 
dernières années de sa vie ; mais ne lui ôtèrent 
rien de cette bonté inaltérable, de cette charité 
active qui le rendaient cher à tous ceux qui 
l'ont connu , et qui ne l'abandonnèrent qu’avec 
la vie. 11 mourut le 29 mai 1824. » 

M. Willermoz était d’une taille élevée , son 
visage portait l'empreinte de la douceur unie à 


(12) 

Ja dignité ; ses discours étaient graves, et sa 
parole lente et solennelle ; il avait du plaisir 
à rappeler les souvenirs du passé ; il avait vu 
de si longues années ! Ce qui le caractérisait 
particulièrement était cette foi vive, cette con- 
viction profonde des vérités de la religion , qu'il 
cherchait sans cesse à faire pénétrer dans le 
cœur de ceux qui l’écoutaient ; c’est ce sen- 
timent qui l’animait, lorsqu'il donnait tant 
de soins à l'administration de l’église de sa par- 
roisse dont il fut fabricien depuis le rétablis- 
sement du culte jusqu’à sa mort ; c’est encore 
ce même sentiment qui inspirait toutes ses pen- 
sées , présidait à toutes ses actions et qui , dans 
un corps brisé par quatre-vingt-quatorze années 
de travaux et de souffrances, conserva jusqu’au 
dernier moment une ame pleine de  résigna- 
tion , de calme et de piété. 


RAPPORT 


PRÉSENTÉ 


A LA SOCIÉTÉ ROYALE D’AGRICULTURE , 
HISTOIRE NATURELLE ET ARTS UTILES 


DE LYON, 


Par la Commission composée de MM. Sr-Divter , 
TrozLier, PELLETIER, Gonin ; et GRAS, Rapporteur. 


SUR LA PÉPINIÈRE DÉPARTEMENTALE DU RHÔNE. 


INPRIMÉ PAR ORDRE DE LA SOCIÉTÉ. 


A LYON, 
DE L’IMPRIMERIE DE J.M. BARRET. 


1824. 


RAPPORT 


SUR LA 
PÉPINIÈRE DÉPARTEMENTALE 
DU RHONE. 


MESSIEURS, 


Dix l’une des séances de la dernière session, 
le Conseil général du département du Rhône a 
délibéré plusieurs mesures relatives à la pépi- 
nière départementale. 

Il a reconnu et consacré en principe qu'elle 
serait conservée. 

Il a émis le vœu qu’elle soit exclusivement 
affectée à la naturalisation des arbres exotiques, 
et que, sous ce rapport, étant d’un intérêt 
général pour la France, le Gouvernement in- 
tervienne et fournisse aux dépenses de la pépi- 
nière. 

Il prie M. le Préfet de chercher un terrain 
nouveau, plus convenable pour y transférer 


C4) 
la pépinière , et il met dès à présent celui qu'elle 
occupe à.la disposition de ce magistrat, pour 
y fonder, si le cas se présente, un autre éta- 
blissement plus utile. 

Enfin, le conseil général arrête qu'il ne sera 
alloué pour l’année 1824, dans son budjet , aucun 
fonds pour la pépinière. 

Trop de rapports et des rapports trop intimes 
lient les travaux dont vous vous occupez, 
aux succès et à la prospérité de la pépinière 
départementale, pour que vous restiez indiffé- 
rens sur les conséquences de la délibération du 
Conseil général et du vœu qu’il a émis. 

Les limites dans lesquelles on circonscrirait 
désormais les essais et les travaux de la pé- 
pinière; sa translation dans un terrain nou- 
veau et les sacrifices qui en seraient insépa- 
rables ; la contradiction que vous avez eue à re- 
marquer entre le refas de tout secours pour 
l'année 1824, et la résolution prise de mettre 
dès à présent à la disposition de M. le Préfet, 
le terrain occupée par la pépinière : en un mot, 
ces mesures et ces modifications vous ont paru 
contraires au principe conservateur consacré par 
le Conseil général, qui cependant a rendu à cet 
établissement , l'hommage qu'il est d'un intérêt 
général pour toute la France. 

Chacun de nous en particulier et la Société 


(5) 

en corps a dès-lors pensé, qu’en plaçant la pé- 
pinière départementale sous votre surveillance ; 
qu'en choisissant dans votre sein les adminis- 
trateurs éclairés et désintéressés qui l'inspectent 
et la dirigent; ces témoignages éclatans dela 
confiance dont le Gouvernement vous honore, 
vous imposaient l'obligation de lui signaler les 
dangers dont l'exécution de l'arrêté du Conseil 
général semble menacer un établissement qui 
fut un des bienfaits de nos Souverains et qu'ils 
daignent protéger. 

Cette maturité qui caractérise vos délibéra- 
tions , vous a engagés à nommer une commis- 
sion chargée de vous faire un rapport, 1.° sur 
l'état actuel de la pépinière départementale; 2.° 
sur les effets de l'affectation exclusive de cet 
établissement à la naturalisation des arbres 
exotiques; , 

3.0 Sur les conséquences de sa translation 
dans un nouveau terrain. 

C’est le résultat de ses recherches et de ses 
réflexions que la Commission a l'honneur de 
vous présenter. 

Ce serait donner une idée imparfaite de l'état 
actuel de la pépinière départementale du Rhône, 
que de se borner à exposer ce qu'elle est au- 
jourd'hui. Pour s'en former une opinion exacte; 
il faut rétrograder à des temps plus reculés, 


C6) 

la prendre à sa formation , la suivre dans ses 
revers et ses différentes créations, l’étudier dans 
ses progrès, mesurer son degré d'utilité , calcu- 
ler les services qu'elle a rendus à cette branche 
de l'économie politique, et ceux qu'on doit en 
attendre encore. C’est en comparant ce qu’elle 
fut avec ce qu'elle est , qu’on peut sainement 
juger son état présent. 

La création des pépinières publiques ne date 
pas de nos jours , et ce n’est pas dans des temps 
modernes qu'on doit chercher leur origine. 
Elles existaient en 1643, telle est du moins 
l'époque à laquelle remonte celle fondée à Lyon. 
Plus tard Louis XV en institua dans chaque 
généralité de son royaume. 

Sous l’illustre abbé Rozier, la pépinière pu- 
blique de Lyon s'agrandit et se perfectionna. 
Ce savant agronome établit ‘la pépinière dans un 
emplacement vaste et propice à tous les genres 
de culture. Il y fonda une école de taille pour 
les arbres fruitiers , et de greffe pour ceux de 
toute nature. Lui-même donnait des leçons aux 
élèves qui afluaient de toutes parts, et alliant 
la pratique aux principes qu’il leur enseignait, 
il les familiarisait avec la théorie qu’il a dé- 
veloppée dans son immortel ouvrage. Aussi, 
s'être formé sous ce grand maître, devenait-il 


pour les jardiniers et les pépiniéristes , un titre 
de recommandation. 


(7) 


Les orages révolutionnaires renversèrent ce 
précieux établissement. Il ne fut recréé qu’en 
l'année 1804. 

Plusieurs décisions administratives avaient 
préparé cette restauration. 

Dans un temps où l'on comptait pour peu 
les institutions les plus utiles, votre Société et 
la pépinière publique parurent commander une 
exception. Peu après la journée du 9 thermi- 
dor, un arrêté pris au nom du Gouvernement, 
vous céda pour vos travaux, à la pépinière, 
pour ses expériences, un emplacement dans le 
clos de la Déserte. j 

Postérieurement et dans des lettres circulaires 
des 12 fructidor an V et 25 vendémiaire an VII, 
le ministre de l'intérieur avait recommandé 
au zèle et à la sollicitude des autorités locales, 
de propager et de favoriser les plantations, les 
semis , les pépinières; mais ce fut seulement le 
7 ventose an X, que, pour frapper plus direc- 
tement le but qu'il s'était proposé, il décida qu'il 
serait formé des pépinières départementales. 

À peine cette volonté fut-elle connue, que 
le Corseil général du département , du Rhône 
et votre Société applaudirent , dans leurs dé- 
libérations , aux vues bienfaisantes du Gou- 
vernement. À son tour, M. le Conseiller- 
d'Etat, Préfet, dans un arrêté du 10 messidor 


(8) 
de la même année, se rendant l'interprète 
des vues et de l'intention du ministre , de votre 
empressement et de celui du Conseil général à 
les seconder , y exprima les sentimens d'amour 
du bien public dont lui-même était animé. 

L'un des principaux motifs de cet arrêté fut : 

« Qu'il est des principes de l'économie poli- 
tique , du besoin public et du devoir de l'admi- 
nistration, d’exciter , de diriger et d'encoura- 
ger , soit par l'établissement des pépinières, soit 
par des semis et par des plantations, la mul- 
tiplication des arbres fruitiers et forestiers; des 
arbres fruitiers qui, par l'abondance et la beauté 
de leurs fruits, enrichissent les propriétaires et 
offrent à la Société des ressources et des jouis- 
sances ; des arbres'forestiers et des taillis néces- 
saires à la marine, aux arts, aux constructions, 
à la confection des charbons et à l'usage jour- 
nalier. » 

Des dispositions réglementaires et parfaite- 
ment combinées, furent la conséquence de ces 
importantes considérations. 

C’est sous ces auspices, avec le concours de 
toutes ces volontés, que la pépinière de Lyon 
se relevant , sous le titre de pépinière départe- 
mentale, du coup qui l'avait abattue, fut dé- 
finitivement organisée. 

Jusques à cette époque ; elle n'avait oceupé 


(9) 


que l'emplacement qui lui avait été cédé dans le 
clos de la Déserte. La nécessité d'un local plus 
vaste se fit bientôt sentir. 

On joignit à celui du clos de la Déserte , un 
terrain situé dans la commune de Villeurbane : 
lequel , en raison de son étendue, parut suffire 
aux besoins de la pépinière. 

Un nouveau revers l'y attendait. 

Quoique la qualité et l'exposition du terrain 
fussent peu favorables à la naturalisation et à 
la culture des arbres et des plantes, cependant 
un petit nombre d'années avait suffi pour éle- 
ver l'établissement à un assez haut degré de 
prospérité. Déjà son mobilier se composait de 
plus de 130,000 plants d'une belle venue et 
de plus de 300,000 pourrètes. 

Ces succès, fruit d’un travail opiniâtre et d'es- 
sais multipliés, étaient fortement balancés par 
les incommodités inhérentes au sol, et par les 
fréquens accidens que causaient les inondations 
du Rhône. Cet état de choses n’échappa point 
à votre surveillance , vous sollicitâtes la trans- 
lation de la pépinière, dans un terrain plus con- 
venable. 

Cette translation fut décidée: malheureuse- 
ment on mit dans lexécution, une précipita- 
tion si étrange , si inconcevable, que tout le me- 
bilier périt sous la hache du bucheron. 


, (1872 

Les arbres furent convertis en fagots , les 
pourrètes sechangèrent en fumier ; la dévastation 
fut telle que le produit de la coupe n’en a pas 
couvert les frais. 

Après cet événement désastreux , il ne restait 
à la pépinière que l'emplacement et le mobilier 
de la Déserte. Un avenir moins orageux parut 
lui sourire. Les titres les plus solennels, les 
plus augustes lui ‘garantirent une stabilité sans 
laquelle ces sortes d'établissemens ne peuvent 
ni prospérer , ni même se maintenir. 

Le 20 décembre 1817, le Conseil général du 
département du Rhône proposa au Gouverne- 
ment de lui céder en toute propriété le grand 
clos des Cordeliers de l'Observance, appartenant 
à la ville de Lyon , pour être réuni à la pé- 
pinière départementale, sous la condition que, 
de son côté , le Gouvernement céderait à la ville, 
également en toute propriété, l'espace de ter- 
rain que la pépinière départementale occupait 
dans l'intérieur du Jardin des plantes; plus, 
un petit bâtiment joignant le passage qui con- 
duit du Jardin à la montée de la grande Côte. 

Ces conditions respectives devinrent le sujet 
d'un échange arrêté le 19 janvier 1818, entre 
M. le Préfet et M. le Maire, sous le bon plai- 
sir et sauf l'approbation de sa Majesté. 

Ce qui tient à l’historique de la pépinière 


(11) 
départementele , se réduit à l'analyse de quel- 
ques articles de ce traité. 

Par le premier , la ville de Lyon remet, cède 
et transporte à perpétuité , pour l'établissement 
d'une pépinière départementale , le grand clos de 
l'Observance comportant, d'après la mensuration 
qui en a été faite, 312 ares 12 centiares ; ou 
autrement, 24 bicherées et 1/5 de bicherée, 
mesure de Lyon. 

Le jardin potager, complanté d'arbres à fruits, 
comportant, d'après la mensuration , 25 ares 
54 centiares, ou autrement, deux bicherées , 
mesure de Lyon. 

L’aile méridionale du bâtiment claustral, bor- 
nant du côté du nord , le jardin potager. 

Enfin , ancien clocher. 

Par l’article 9, il est dit que M. le Préfet pren- 
dra pour cause d'utilité publique, un arrêté qui 
enjoindra à tous occupans, à quelquetitre que ce 
soit, des portions de terres, jardins ou bâti- 
mens desdits cordeliers de l'Observance, de 
les évacuer dans le délai de quinze jours, afin 
que la pépinière départementale puisse Y commen- 
cer; Sur-le-champ , les travaux préparatoires aux- 
quels elle à à se livrer , pour que les plantations 
qu'elle y projette soient faites en temps utile. 

Dans Particle 11 on lit: « Toutefois la pé- 
pinière départementale conservera, d’ici au pre- 


(12) 

mier mars de l’année 1819, la faculté de conti- 
nuer dans l'emplacement du jardin des plantes, 
la culture des arbres et arbustes qu’elle ne pour- 
ra pas enlever immédiatement ; mais à l'époque 
du premier mars 1819, tous les arbres et ar- 
bustes de la pépinière devront nécessairement 
être enlevés ; à défaut, ils seront censés faire 
partie du terrain cédé à la ville. » 

« Pareillement, pendant le cours de la pré- 
sente année , la ville aura la faculté de faire, 
ou préparer dans ce même emplacement , toutes 
dispositions qu’elle jugerait convenables, er {ant 
toutefois que ces dispositions seraient compatibles 
avec la culture desdits arbres et ne leur porteraïent 
aucun préjudice. » 

Quoïque ces stipulations de détail paraissent 
tenir plutôt à l’économie du traité qu'aux re- 
cherches que vous attendez de votre commission , 
cependant elle ne les a pas jugées étrangères au 
rapport dont vous l’avez chargée. Elle a cru 
utile de vous faire remarquer d’une part, que 
Péchange eut pour cause et pour condition , d’af- 
fecter à la pépinière départementale, le grand 
clos de l'Observance, parce qu’il n’est pas in- 
différent à la splendeur d’une cité, de posséder 
dans son enceinte des établissemens publics; d'autre 
part, de vous faire observer le prix attaché aux 
travaux de la pépinière qu'on pensait ne pouvoir 


ie 79 
trop accélérer, et les précautions infinies qu’on 
prenait pour le transport et la conservation de 
son mobilier. | 

Une ordonnance royale du 10 décembre 1820, 
a sanctionné le traité d'échange. Sa Majesté au- 
torise le Maïre de la ville de Lyon, à céder au 
Préfet du département du Rhône le grand clos 
des Cordeliers de l'Observance, destiné à Péta- 
blissement d'une pépinière départementale. 

Ainsi, un contrat intervenu entre deux grandes 
autorités administratives , et plus imposante 
encore , la sanction du Souverain , assurent à la 
pépinière départementale un asile contre les 
vicissitudes qui jusques alors s’étaient opposées 
à ses progrès. Pourrait-on aujourd'hui mécon- 
naître des garanties aussi solennelles ? Ce doute 
pénible ne s'est pas même présenté à l'esprit de 
vos commissaires. Ils se sont hâtés de se renfer- 
mer dans les limites que vousleur avez prescrites. 

Le premier objet de leurs recherches a donc 
été de s’assurer si un terrain nouveau serait plus 
convenable pour y transporter la pépinière dé- 
partementale. 

Les naturalistes les plus instruits considèrent 
la position de la ville, située au 45." degré de 
latitude, comme étant la plus propre pour ac- 
climater les arbres exotiques du nord et du midi. 
Le clos de l’Observance seconde merveilleuse- 
ment cette position. 


(14) 

La qualité du sol est un granit en décompo- 
sition, que d’épaisses couches de terre couvrent 
dans certaines parties. Les expositions sont extré- 
mement variées. Elles offrent aux semis des 
abris contre les rigueurs de l’hiver ; les ardeurs 
du soleil aux individus qui les demandent ; une 
température plus douce à ceux qui l’exigent ; et 
une source assez abondante fournit l'eau néces- 
saire pour larrosement des semis et des plantes. 

La beauté des produits garantit la bonté du sol. 

On remarque dans tous les sujets une végéta- 
tion vigoureuse; l'accroissement des arbres et 
des plantes est prompt ; leur constitution robuste ; 
rien ne souffre , rien ne languit; tout respire la 
vie et la force. On s'étonne , on conçoit avec peine 
que quatre années à peine écoulées aient sufh à 
couvrir d'autant de richesses, le terrain occupé 
par la pépinière départementale. 

Son mobilier , en effet, quoique dans un em- 
placement resserré , se compose aujourd'hui de 
25,000 planis de toute nature, prêts à vendre, 
et de 150,000 pourrètes. Ce qui rend ce mobilier 
plus précieux encore, ce qui confirme la bonté 
du sol, c'est qu'élevés dans un terrain qui n’est 
ni trop substantiel, ni trop aride, et qu'aucun 
engrais ne féconde, les sujets extraits de la pé- 
pinière se plaisent et prospèrent partout où ils 
sont transportés : différens en ce point des indi- 


(15 ) 
vidus des autres pépinières qui, nourris dans 
des terres trop substantielles, le plus souvent 
dans de vrais terreaux, en imposent d'abord à 
l'œil de l'acheteur, mais qui, transplantés dans 
un sol de moindre bonté, languissent, et périssent 
bientôt dans un sol de mauvaise qualité. 

La variété des expositions du terrain du clos 
de l’'Observance offre encore cet avantage que 
chaque individu vivant sous la température la 
plus favorable à sa vitalité et à son développe- 
ment , admet sous le rapport de cette cause na- 
turelle , une distinction première ; des observa- 
tions exactes ont ensuite nuancé et gradué cette 
distinction. Toutes les espèces sont séparées , 
tous les sujets sont classés par famille, numé- 
rotés avec soin, observés avec attention ; et cet 
ordre admirable, résultat d'une longue expé- 
rience , d’un travail assidu , semble présenter aux 
réflexions de l’agronome philosophe, l'image de 
cette loi universelle qui, dans la chaîne des êtres, 
assigna à chacun la place qu'il y dut occuper. 

Ces recherches préliminaires ont donné à votre 
commission la conviction intime qu'il serait dif- 
ficile de trouver un terrain plus convenable aux 
travaux et aux essais de la pépinière départe- 
mentale, 


Quel serait ensuite l'effet de son affectation 


(16) 
exclusive à la naturalisation des arbres exotiques ? 

Votre commission a d'abord cherché dans les 
faits historiques de la pépinière départementale, 
les éclaircissemens que vous lui avez demandés 
sur ce point d'un grand intérêt. 

Affecter’exclusivement la pépinière à la natu- 
ralisation des arbres exotiques, ce serait s'écarter 
de l’une des vues principales pour lesquelles elle 
fut instituée. 

Sans remonter à l’origine de ces établissemens, 
mais en la fixant seulement aux temps qui pré- 
cédèrent nos orages révolutionnaires et à ceux 
qui les suivirent, il est incontestable que l'accli- 
matation des arbres exotiques ne fut pas le but 
unique de l'institution des pépinières publiques. 
Le gouvernement s’en promit d'autres résultats 
qu'il jugea non moins importans , et ce fut aux 
autorités administratives qu'il s’en remit pour 
proclamer les principes dont les effets devaient 
en être la conséquence nécessaire. 

Aussi avez-vous vu dans l'arrêté du 7 ventose 
an X, que M. le préfet rappelant les invitations 
pressantes du ministre de l'intérieur , déclara 
qu'il est des principes de l’économie politique , 
du besoin public, de son devoir d’exciter , de 
diriger , d'encourager , par l'établissement des 
pépinières , la multiplication des arbres fruitiers 
et forestiers. 


C17) 

Loin d'interdire aux pépinières départemen- 
tales, la culture des arbres fruitiers et forestiers, 
le Gouvernement mû par des motifs d'utilité 
générale , voulut donc, au contraire, que ces 
arbres se multipliassent par ces établissemens 
qu'il recréait et qu'il organisait. Il décida con- 
séquemment que cette branche de l'économie po- 
litique entrerait dans leur institution et serait 
confiée à leurs travaux. 

Exiler de la pépinière du Rhône tous les 
arbres indigènes , ou réputés tels par leur accli- 
matation , c’est oublier les services qu'elle a 
rendus , c'est se priver désormais des ressources 
qu'elle seule peut offrir. 

__ À qui doit-on, en eflet , les arbres qui embel- 
lissent nos cours et nos quais, ombragent nos 
promenades , bordent nos grandes routes? sinon 
à la pépinière départementale. Dans quels éta- 
blissemens particuliers aurait-on trouvé les 
51,379 pieds d'arbres employés à des plantations 
publiques , dont le plus grand nombre n’a pas 
même coûté les frais d’arrachement , dont 
l’autre partie aété vendue à moitié prix. 

Votre commission doit vous dire qu’elle a 
fixé avec satisfaction ses regards sur le nombre 
considérable de mûriers cultivés à la pépinière 
et sur la beauté de ces arbres: Dans la variété 


de leurs espèces, due à ses expériences , se dis- 
2 


(18) 

üngué principalement le mürier à feuilles d'an- 
dolo , si précieux et en même temps si écono- 
mique pour l'éducation du ver à soie. Votre 
commission doit ajouter que la culture du mûrier, 
sinon totalement perdue, était du moins très- 
négligée dans ce département et dans ceux qui 
l'avoisinent. En la considérant sous ce rapport, 
il serait permis de regarder le müûrier comme 
une culture rendue nouvelle par les soins et les 
succès de la pépinière. 

Sans contredit, le mûrier est un arbre indi- 
gène que la mesure restrictive du conseil-géné- 
ral exclurait à ce titre, de la pépinière départe- 
mentale. Cependant, à l’époque où le gouver- 
nement , dans la vue d'augmenter nos richesses 
nationales , et de nous affranchir du tribut que 
nos manufacturiers payaient à l'étranger , fit un 
appel aux agriculteurs pour couvrir leur sol de 
müriers , aux hommes industrieux pour former 
des établissemens destinés à élever le ver à soie 
et à préparer la matière première qu’on en ob- 
tient : à cette époque , disons-nous , qui a fourni 
les cent mille pieds de mûriers qui furent alors 
plantés dans notre département et dans ceux qui 
l'environnent ? Qui en a varié les espèces ? Qui 
nous a procuré celle à feuilles d’andolo ? la pé- 
pinière départementale. 

Comment aurait-on fourni à toutes ces de- 
mandes sans ces ressources abondantes? Quelles 


| (19) 

sont les pépinières particulières qui les auraient 
offertes ? Par quels moyens aurait-on répondu 
à la voix du Gouvernement et concouru à ses 
vues d'économie politique dont nous ressentons 
déjà les heureux effets ? 

C’est dans une ville essentiellement commer- 
çante et manufacturière ; à Lyon surtout, si re- 
commandable par la fabrication de ses étofles , 
qu'on apprécie sainement létendue du service 
que la pépinière du Rhône rendit alors à notre 
industrie nationale. C’est par l'utilité de cet éta- 
blissement , par les secours que notre cité doit 
attendre encore de ses travaux et de ses essais, 
qu'on peut calculer les conséquences fâcheuses de 
l'innovation votée par le Conseil général. 

Pourquoi étendrait-on cette mesure restrictive 
aux arbres fruitiers ? On défendrait sans utilité; 
on nuirait, en défendant , à l'instruction et à la 
science. . 

Le luxe s’est emparé des arbres et des plantes 
exotiques et rares, pour en orner somptueuse- 
ment nos parcs et nos jardins ; les arbres frui- 
tiers tiennent de plus près à nos besoins. Ce 
sont eux, comme s'en exprimait M. le Préfet 
dans son arrêté de messidor an X, qui, par la- 
bondance et la beauté de leurs fruits , enrichis- 
sent les propriétaires , et offrent à la société des 
ressources et des jouissances. 

L'étude de cette branche de la science agro- 


(:20+) 

nomique, étant reconnue d'un intérêt réel et gé- 
néral , on ne saurait trop multiplier, dans cette 
partie , les moyens d'instruction. Aussi, la pépi- 
nière départementale admet-elle à ses études tous 
les élèves que le désir de s'instruire y conduit. 
Déjà elle en compte plus de deux cents qui , sous 
les leçons de M. Madiot, ont appris Part et les 
temps des semis, le choix relatif des terrains et 
des expositions , la saison, les formes , la pro- 
priété de chaque greffe, l'éducation et la taille 
des arbres. À l'exemple encore de M. l'abbé Ro- 
zier, la pratique explique et rend sensibles les 
principes de la théorie. 

il est reconnu qu'une bonne école , pour la 
culture des arbres fruitiers surtout , a cet effet 
nécessaire de vaincre la profonde ignorance de 
la plupart des jardiniers et des pépiniéristes qui, 
conduits par une routine aveugle , imitent ce 
qu’ils ont vu et ne vont jamais au-delà. Mais 
cette bonne école ne peut exister hors des pépi- 
nières publiques. 

Indépendamment de ce que la direction en est 
confiée à des hommes qui se recommandent par 
leurs lumières et leur expérience ; tels sont en- 
core les eflets de l’enseignement qu’ils professent, 
que les connaissances théoriques et pratiques ac- 
quises sous de pareils maîtres , s’élendent et se 
propagent au Join. Il ne faut pas non plus se le 
dissimuler , cet enseignement ne se généralise 


C21) 
et ne se perfectionne , le cercle de ces connais- 
sances ne s'agrandit que par l'étude de la variété 
ét la multiplicité des espèces dont les pépinières 
publiques renferment seules les immenses col- 
lections. 

Les arbres fruitiers , quoiqu'usuels , ne se rat- 
tachent-ils pas d’ailleurs à la science agronomi- 
que? ne prêtent-ils pas à des faits nouveaux ? 
N'est:il pas vérifié qu’à l'aide des étamines , des 
semis et de la greffe, on a obtenu et on obtient 
encore des espèces et des variétés dans les ar- 
bres forestiers et dans les arbres fruitiers à pé- 
pins et à noyaux. Tant que la nature ne se 
refusera pas aux essais de l’agronomie, faut-il 
que, plus rebelle que la nature , une mesure 
restrictive s'oppose dans nos pépinières publi- 
ques, à de nouvelles créations. 

Une autre considération résiste également à 
cette mesure. L’étranger, à qui le climat sous 
lequel il vit , refuse nos arbres indigènes , ac- 
court dans nos pépinières départementales, pour 
connaître les espèces et les variétés de nos pro- 
ductions. Qu'arriverait-il cependant si ces éta- 
blissemens étaient exclusivement affectés à la 
naturalisation des arbres exotiques ? 

Trompé dans l’idée qu'il se serait formée d’une 
pépinière fondée par le Gouvernement , cet 
étanger pourrait trouver tous les arbres qui 
croissent sous la température de son pays, et 


(22) 
n'en découvrirait aucun de ceux qui prospèrent 
sous la nôtre. 

La culture à la pépinière , des arbres fruitiers 
et des autres arbres indigènes , a produit le ré- 
sultat avantageux de maintenir par la concur- 
rence , à un taux modéré, le prix des arbres des 
pépinières privées. Il existe une différence énorme 
entre le prix auquel la pépinière du Rhône les 
livre, et celui auquel les pépiniéristes les taxaient. 

L'équilibre serait bientôt rompu, si cette con- 
currence était détruite; on verrait à l’instant les 
consommateurs en proie au monopole des mar- 
chands d'arbres , et renaître l'impôt qui a pesé 
trop long-temps sur l'agriculture. 

Ce serait un mal, sans doute , relativement 
aux consommateurs et à l’agriculture, que la 
perte des avantages obtenus par cette concur- 
rence; mais c'en serait également une autre, 
sous le rapport de la prospérité de la pépinière 
départementale, 

Secondée par une sage administration , elle 
est parvenue au point de trouver dans ses propres 
ressources des secours suffisans pour fournir à 
ses dépenses. C'est principalement à la culture 
et à la vente des arbres indigènes qu’elle doit la 
position où elle est aujourd’hui placée, ce serait 
la changer que de lui enlever des produits qui 
sont le fruit de ses travaux ; et il a paru à 
votre commission que lorsqu'un établissement 


(23) 
public se soutient par ses propres forces , il est 
plus convenable de les accroître, que de les pa- 
ralyser. 

En s’occupant de la culture des arbres indi- 
gènes , la pépinière départementale n'a point ou- 
blié qu’elle est aussi instituée pour la naturali- 
sation des arbres exotiques. Vos Commissaires 
se sont convaincus qu’elle justifie pleinement 
l'opinion proclamée par le conseil général, que, 
considérée sous ce point de vue , elle est en- 
core d'un intérét général pour toute la France. 

La pépinière départementale possède et cultive 
presque toutes les variétés d’arbres et de plantes 
exotiques dont la France s’est enrichie depuis la 
fin du dernier siècle. Des recherches opiniâtres , 
des soins assidus , des expériences multipliées et 
heureuses ajoutent de nouvelles acquisitions à 
celles que nous avions importées des contrées les 
plus lointaines, et donnent l'espoir flatteur de 
voir prospérer sous notre température, des ar- 
bres qui semblaient la fuir. 

Le temps n’est pas éloigné, peutêtre , où les 
propriétés de ces arbres , étudiées , mieux 
connues , apprendront ce qu’ils peuvent offrir de 
ressources et d'avantages à l'architecture, à l'ébé- 
nisterie , au charronnage. Déjà une utilité pré- 
sente et réelle nous dédommage de ce que nous 
promet encore l’avenir. " 

Le dessin's’'est emparé des fleurs de ces arbres; 


(24) 
leur port, l'élégance de leurs formes, les nuances 
infinies de leurs couleurs , fournissent à l'artiste 
des sujets de composition qui, inconnus jusques 
alors, ouvrent de nouvelles sources à la pros- 
périté de nos manufactures. 

D'autres faits ont démontré l'influence et les 
effets de l’acclimatation des arbres exotiques. 

Plus de quatre-vingt-quatorze espèces d'arbres 
exotiques, qui ne pouvaient supporter la tempé- 
rature de Paris, se sont parfaitement acclimatés 
sous le ciel de Lyon. Il y a même lieu de croire que 
leur constitution, modifiée par leur naturalisa- 
tion , bravera les rigueurs de la température avec 
laquelle elle n'avait pu se familiariser. 

Cette influence et les eflets de l’acclimatation 
sur la constitution des arbres exotiques , sont 
démontrés par l'expérience. 

On a vu plusieurs de ces arbres exotiques, sté- 
riles d’abord sous le climat de Paris, y fructifier 
ensuite lorsque les pépinières de la Seine ont 
ajouté à leur collection , des graines envoyées par 
la pépinière du Rhône, et qui avaient été don- 
nées par les arbres de la même espèce, après leur 
naturalisation à Lyon. (1) 


(2) Quelques personnes recommandables ont exprimé cette 
pensée , que le local de la pépinière trop resserré , ne per- 
mettrait point de laisser reposer la terre, et que le sol épuisé 
par de continuelles plantations ne fournirait plus les sucs 
nécessaires à une nouvelle végétation. On a ajouté que placée 


(25) 
Les bornes d'un rapport ne permettent pas à 
votre commission de rappeler tous les faits par- 
ticuliers recueillis par la pépinière départemen- 


à deux lieues de notre ville, le terrain étant moins pré- 
cieux , il serait facile d'accroître l'étendue de la pépinière 
et d’en laisser constamment reposer une partie pendant le 
temps nécessaire pour que la terre épuisée pût recouvrer les 
principes de sa fécondité. 

Un tel raisonnement , plus spécieux que juste, n’est qu’une 
conséquence de la théorie fausse et surannée des jachères ; 
il west plus admis que par quelques cultivateurs qui mé- 
connaissent les avantages d’un assolement bien entendu. 
Ecoutons les lecons de l’expérience. 

Il existe dans Paris trois pépinières , dont la direction 
est confiée à des hommes célèbres. Le terrain qui est affecté 
à chacune est renfermé dans d’étroites limites ; jamais on 
ne le laisse reposer, 

La pépinière du Roule , qui ne se compose que de dix 
arpens ( anc, mesure }) , contient des arbres et des arbustes 
d'ornement, indigènes et exotiques. Les plantes de nature 
différente s’y succèdent de telle manière qu’on ne voit au- 
cune place vide dans ce petit espace. Les arbres sont enle- 
vés dans l’automne; le terrain est miné et fumé au besoiu, 
et des arbres d’une autre espèce y sont plantés au printemps. 

Dans la pépinière du Luxembourg , qui est destinée aux 
arbres fruitiers , et dont l’étendue est d’environ neuf hec- 
tares, les arbres à noyaux succèdent aux arbres à pépins, 
immédiatement après une préparation convenable du sol. 

La pépinière du jardin du Roi est beaucoup plus petite ; 
le même genre de culture y est adopté. 

Dans toutes , les arbres prospèrent également. 

Le sein fécond de la terre après avoir fourni des sucs à un 
ordre de végétaux , en contient encore pour de nouvelles 
espèces , pendant que celles-ci se nourrissent, les premiers 
sucs se réparent. 

La chimie ni la physiologie végétale ne peuvent nous dé- 


(26) 
tale et qui ont ajouté à l’avancement de Ja science. 
C'est par une idée plus générale qu’elle fixera 


voiler les moyens secrets par lesquels la nature maintient 
cette constante fécondité ; ces sciences ne nous apprennent 
point quel genre de sucs convient à telle espèce de plante ; 
l'expérience seule a instruit les agronomes ; c’est sur elle 
que repose la théorie des assolemens. 

Le repos de la terre est donc une pure perte ; on ne l’ob- 
serve point dans la nature. Toutefois s’il était nécessaire, 
le nombre des arbres que l’on cultive à la pépinière du dé- 
partement du Rhône permettrait encore de laisser reposer 
la cinquième partie du terrain sur lequel elle existe. 

Est-il avantageux que cet établissement soit placé près de 
la ville ? il ne peut y avoir de doute à cet égard. Là , il est 
sous les yeux de l'administration et de l’autorité; les per- 
sonnes qui ont besoin de quelques arbres se les procurent 
sans se déplacer : dans la ville, la pépinière est à la portée des 
personnes qui veulent s’instruire sur les variétés des arbres, 
sur leur culture et sur la greffe; les savans et les amateurs 
peuvent la visiter sans perdre de temps , et il est plus facile 
de se procurer l’engrais nécessaire. 

Si la pépinière était située à la distance d’une ou de deux 
lieues, la surveillance qu’exerce l'administration pourrait- 
elle être aussi exacte ? se donnerait-on la peine de s’y trans- 
porter pour quelques arbres! irait-on prendre une lecon 
de greffe à une ou plusieurs lieues ? Nos dessinateurs vou- 
draient-ils aller à cette distance peindre quelques fleurs d’or- 
nement ? et ce bel établissement ne serait-il pas en grande 
partie perdu pour la science ? 

Ces considérations ont sans doute contribué à faire placer 
la pépinière de Paris dans l’enceinte de ses faubourgs. 

L'administration est trop éclairée sur les causes qui as- 
surent le succès de la pépinière du département du Rhône, 
pour consentir à une translation qui la priverait de ces pré- 
cieux avantages, et pour la condamner à un exil qui ne 


tarderait pas à la faire languir, et peut-être à entraîner sa 
perte. 


(277 
vos regards sur Pensemble des avantages qui 
recommandent cet établissement. , 

Ileest de ces monumens publics , de ces insti- 
tutions nationales qui, dans l’histoire des peuples 
civilisés, fixent les époques du progrès de leurs 
lumières. De ce nombre sont les pépinières dé- 
partementales. 

Leur création fut un grand pas dans la science 
agronomique. Leurs découvertes , fruits d'essais 
continuels ; agrandissent la sphère de nos con- 
naissances et servent à les propager. L'acclima- 
tation des arbres et des plantes exotiques augmente 
la masse de nos richesses territoriales. Le per- 
fectionnement des arbres nés sur notre sol ajoute 
à leur utilité, à nos jouissances , à la satisfaction 
de nos besoins. La réunion enfin, sur le même 
point , des productions disséminées dans les dif” 
férentes parties du globe, présente une foule de 
sujets aux méditations de l’agronome savant, et 
devient pour tous un objet d'étonnement et d’ad- 
miration. 

Voilà les grands traits qui caractérisent les pé- 
pinières départementales , attestent leur utilité et 
qui distinguent spécialement celle du Rhône, 
C'est un hommage que lui rendent les agronomes 
étrangers et les voyageurs instruits. il en est 
peu qui, sur la réputation de cet établissement, 
n’y accourent lors de leur passage à Lyon. Plus 


(28) 
d'une fois on a vu les De Bosc et les De Candolle, 
ces savans universellement reconnus, consacrer 
des journées entières à examiner et à connaître 
ce qu'il possède. 

Votre commission ne séparera point la justice 
qu'elle rend à la pépinière départementale , de 
celle due à M. Madiot, son directeur et notre 
collègue. Elle saisit avec empressement l’occasion 
de publier que son zèle et son activité pour le 
perfectionnement de la culture des arbres, l'avan- 
cement de la science, ne le cèdent qu'à l'étendue 
de ses connaissances. Les faits nouveaux qui ont 
été recueillis , sont dûs à ses expériences; il a 
inventé des instramens et employé de nouveaux 
procédés pour la greffe ; souvent il a enrichi de 
ses observations, les comptes annuels de vos tra- 
vaux, souvent aussi vous avez eu la satisfac- 
tion de voir ses observations reproduites dans 
les journaux nationaux et étrangers. 

La mesure qui réduirait la pépinière départe- 
mentale exclusivement à la naturalisation des 
arbres et des plantes exotiques, serait donc tout 
à la fois contraire à l'institution de cet établisse- 
ment, et nuisible dans ses eflets. La mesure qui, 
d'un autre côté, opérerait sa translation dans 
un terrain nouveau, ne serait pas moins funeste. 

S'il est vrai, en général , que la stabilité des 
établissemens publics est une des grandes causes 


(29) 
de leur prospérité ; cette vérité est surtout fon- 
damentale pour les pépinières établies ‘par le 
Gouvernement. 

Sans doute la pépinière départementale n'au- 
rait pas à craindre que l'expérience du passé soit 
une leçon perdue pour l'avenir, ni de voir se 
renouveller les scènes de dévastation qui anéan- 
tirent le mobilier qu’ellepossédait à Villeurbanne. 
Mais la translation de cet établissement , quoi- 
qu’effectuée avec plus de sang-froïd et de pré- 
cautions , n’en comporterait pas moins des frais 
et des sacrifices considérables. 

Non-seulement les dépenses déjà faites pour 
le nivellement et le défoncement du terrain, 
pour le transport des terres de bruyères néces- 
saires à l'acclimatation de certaines plantes se- 
raient perdues ; mais il faudrait encore les répéter 
pour la préparation du terrain nouveau qui se- 
rait destiné à la pépinière , et y ajouter les frais 
du transport de son mobilier. 

Quels que soient les soins apportés à cetrans- 
port , le sacrifice de toutes les productions in- 
susceptibles d’être transplantées , ou qui ne 
pourraient l'être sans danger, en serait une suite 
inévitable. Au moment de recueillir le fruit 
de tant de travaux et d'expériences , il serait 
ravi sans retour ; aux années inutilement écou- 
lées pour produire , succéderaient des années 


(5) 
pour créer ; et à ces viscissitudes successives , 
toujours sans fixité dans les résultats , se réu- 
nirait la possibilité décourageante d’une nou- 
velle translation. 

Quoique la délibération du Conseil général 
qui met, dès à présent, à la disposition de M. le 
Préfet , le terrain occupé par la pépinière, com- 
binée avec le refus de tojit secours pour l’année 
1824 vous ait alarmés par ses conséquences ; 
néanmoins votre commission n'a pu partager 
entièrement vos craintes. 

Fefuser les moyens de conserver , c’est dans 
la réalité détruire. Cette vérité n’a pu échapper 
à des administrateurs éclairés ; ils ont sûrement 
prévu qu’en reconnaissant qu’il était d’un in- 
térêt général pour toute la France de conser- 
ver la pépinière départementale, ils voteraient 
cependant sa destruction , en délibérant sa trans- 
lation , et ne lui laissant aucune possibilité de 
fournir aux dépenses que cette translation né- 
cessiterait. 

Impossible d’admettre une pareille contradic- 
tion. Si des motifs que votre commission n'a- 
vait point à pénétrer, ont engagé le Conseil gé- 
néral à supprimer de son budjet de 1824, l'in- 
demnité qu'il avait constamment accordée à la 
pépinière, en même temps qu'il délibérait sa 
translation dans un terrain nouveau ; il est à 


(31) 
croire qu’en sollicitant le ministre de linté- 
rieur , pour que le Gouvernement intervienne, 
il a voulu obtenir pour cet établissement les 
secours qu'il lui refusait, et que sa délibération 
rendait indispensables. 

Sans doute, la pépinière départementale doit 
tout espérer, tout attendre de la munificence du 
souverain , de son amour pour son peuple, de 
sa sollicitudé pour conserver les établissemens 
utiles que fondèrent ses ancêtres ; mais pour- 
quoi fatiguer par des demandes, sa bienfaisance , 
quelqu'inépuisable qu’elle soit. Pourquoi y recou- 
rir, lorsque la pépinière , conservée avec toutes 
ses ressources , continuant à occuper le terrain 
que des titres solennels lui ont affecté , suffit à 
ses besoins et n’aurait à réclamer que de légers 
secours, pour l'entretien de ses bâtimens ? 

Tels sont les motifs qui engagent votre com- 
mission à vous proposer d’arrêter : 

Que Son Excellence le Ministre de l'intérieur 
soit sollicité à Peffet, 1.° que la pépinière de na- 
turalisation du département du Rhône soit main- 
tenue dans la possession du terrain qu'elle 
occupe; 2.9 que son organisation actuelle, et 
telle qu'elle a été réglée, soit pour ses travaux, 
soit pour son administration , n’éprouve aucun 
changement. 


Ce vœu formé par votre commission , si vous 


(32) 
le partagez, va être déposé dans le sein du ma- 
gistrat qui vous préside. Il daignera, n'en dou- 
tez point, l’accueillir. Administrateur vertueux 
etéclairé, protecteur de nos institutions bien- 
faisantes, ami de la science et des arts qu’il 
honore et encourage , il applaudira à votre zèle 
et à vos eflorts. Osez tout espérer de votre 
réclamation , s’il s’en rend l'organe. 
Gras, rapporteur ; G. Pezrerier , André 
Gonin , Trozzter, D.-M. 


La société adoptant les motifs développés dans 
le rapport , émet le vœu: 

1.0 Que la pépinière départementale soit con- 
servée dans le terrain qu’elle occupe ; 

2.0 Quelle soit conservée avec son régime et 
son organisation actuels. 

M. le Préfet est prié de transmettre le présent 
rapport à Son Exc. le Ministre de l'Intérieur. 


Lyon, le 18 Juillet 1823. 


N. F. COCHARD , Président ; 
GROGNIER , Secrétaire. 


Nota. Son Excellence le Ministre de l'intérieur a 
bien voulu accueillir le vœu de la Société , en faveur 
de la Pépinière départementale , et ce précieux éta- 
blissement sera conservé avec son organisation actuelle. 


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